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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 016 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 11 mai 2010

[Enregistrement électronique]

(1540)

[Traduction]

    Je vous remercie de votre patience. Il semble que nous avons maintenant le quorum. Nous sommes donc prêts à entreprendre la 16e séance de la présente session, tenue par le Comité permanent du commerce international.
    Les témoins qui sont avec nous aujourd'hui feront chacun une déclaration préliminaire, puis nous pourrons leur poser des questions. Je crois que nous allons pouvoir faire deux séries de questions complètes aujourd'hui, si les témoins s'en tiennent à 10 minutes ou moins pour leur déclaration. Nous allons tenir les membres du comité à l'oeil, pour nous assurer que leurs questions soient brèves, et nous espérons que les réponses seront également brèves, et qu'elles iront droit au but.
    Nous allons commencer dès que j'aurai présenté les témoins.
    Je vais d'abord présenter M. Mauricio Ferro. Cela nous permettra de nous assurer que les communications fonctionnent bien.
    Monsieur Ferro, est-ce que vous m'entendez?
    Oui. Merci beaucoup. Et nous pouvons également vous voir.
    M. Ferro travaille pour le Centre de connaissances techniques et d'apprentissage pour la mine de charbon de Cerrejon, en Colombie. Il est à Bogotá aujourd'hui.
    Je suis en fait à la mine, dans le département de La Guajira, au nord-est de la Colombie, près de la frontière vénézuélienne et de la mer des Antilles.
    Bien. Les appareils fonctionnent aujourd'hui; c'est excellent. Vous êtes plutôt loin de Bogotá, mais vous venez tout de même nous rencontrer aujourd'hui, à Ottawa. C'est formidable. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Je vous reviens dans un instant. Je vais présenter les autres témoins, puis je vais vous demander de faire votre déclaration, si cela vous convient.
    Nous avons également avec nous Tania Hallé, du Projet Accompagnement et Solidarité Colombie. Tania est travailleuse sur le terrain et coordonnatrice au sein de l'équipe de coordination. Nous accueillons également Stephen Benedict, directeur du Service des droits de la personne et des syndicats, à la Confédération syndicale internationale. Je vous présente également Andrew Casey, qui comparaît devant nous pour la seconde fois, si je ne me trompe pas. M. Casey est vice-président aux relations publiques et au commerce international pour l'Association des produits forestiers du Canada.
    Nos témoins auront donc l'occasion de faire une déclaration préliminaire. Nous allons entendre chacun d'entre eux avant de leur poser des questions. Je vous remercie tous d'être présents aujourd'hui.
    Nous allons retourner en Colombie, par vidéoconférence, et je vais demander à M. Mauricio Ferro de prendre la parole le premier.
    Monsieur Ferro.
    C'est un honneur et un privilège de pouvoir témoigner devant notre Parlement au sujet de l'Accord de libre-échange Canada-Colombie.
    Je vais d'abord vous parler un peu de moi. J'ai la double nationalité. Je suis né en Colombie et, en 1986, j'ai déménagé au Canada, à Ottawa, à la fin de la présidence de M. Betancur. J'étais à l'époque statisticien en chef de la Colombie. J'avais auparavant été doyen de l'École de gestion de l'Université de Los Andes, et j'ai également été professeur dans cet établissement.
    À Ottawa, j'ai travaillé dans le secteur des hautes technologies, notamment dans le domaine du développement du commerce international, pour le compte de certaines sociétés canadiennes. J'ai également donné des cours de marketing international dans le cadre du programme de MBA de l'Université d'Ottawa.
    Au cours des trois dernières années, j'ai travaillé dans une mine de charbon à ciel ouvert, en Colombie, en tant que chef de la division de l'engagement social, au sein du secteur de la responsabilité sociale de l'entreprise. Il y a quelques mois, on m'a chargé de trouver un collège qui pourra donner une formation technique de niveau secondaire aux membres des communautés environnantes.
    La propriété de la mine Cerrejon est divisée en trois parties égales, entre des filiales de BHP Billiton, d'Anglo American et de Xstrata. C'est la plus grosse mine de charbon à ciel ouvert du monde. Elle est située dans la péninsule de La Guajira, dans le nord-est de la Colombie, et elle jouxte le Venezuela et la mer des Antilles.
    L'exploitation de la mine comprend des activités d'exploration, de production, de transport et d'expédition de charbon thermique à haute teneur. La mine fournit du travail à plus de 10 000 personnes. En 2008 et en 2009, nous avons produit et exporté environ 31 millions de tonnes, dont un million a été exporté dans les provinces maritimes, au Canada.
    Le développement socio-économique de La Guajira est indissociable de la mine Cerrejon et du secteur minier. Plus de la moitié du PIB du département provient de Cerrejon... [Note de la rédaction: difficultés techniques].
    La communication est-elle coupée? Est-ce que vous m'entendez?
    Une voix: Ça va. Nous vous entendons.
    M. Mauricio Ferro: C'est bon.
    Ce qui me frappe, à la lecture du compte rendu des témoignages, c'est que les opposants à l'accord invoquent principalement des raisons idéologiques et des arguments qui ressortissent à la politique partisane interne de la Colombie. Ce ne sont pas les mérites de l'accord que l'on prend en considération, ni la contribution à long terme que le Canada et la Colombie peuvent s'apporter mutuellement. Le Canada est une société multiculturelle et multi-ethnique, et nous sommes fiers de nos valeurs, ainsi que de la tolérance et du respect dont nous faisons preuve les uns envers les autres, même si nous ne nous entendons pas sur bon nombre de questions litigieuses.
    Étant donné qu'une des principales politiques de l'administration Uribe est d'ouvrir la Colombie au commerce international, au moyen d'accords de libre-échange, quiconque s'oppose à lui entrave ses efforts pour mener à bien ses politiques.
    Comme tout autre pays, la Colombie a ses problèmes, à commencer par la question de la primauté du droit. Nous pouvons rédiger d'excellents accords et d'excellentes lois, mais le problème, c'est que ces lois ne sont pas toujours mises à exécution. Il reste du travail à faire au chapitre des droits de la personne. Il faut que ce soit une priorité pour nous tous, mais cela demandera du temps, et nous n'y arriverons pas sans un effort concerté de tous les Colombiens, et sans l'aide d'autres pays comme le Canada.
    Beaucoup de témoins ont parlé des menaces et du meurtre de dirigeants syndicaux. Et ils ont raison; cela se produit. Mais personne n'a parlé de la violence au foyer dont sont victimes certaines femmes et certains enfants.
(1545)
    Quand un enfant grandit dans un climat de violence, son système de valeurs est complètement déréglé. Il croit que c'est par la violence qu'il parviendra à faire valoir son point de vue et à s'imposer. Nous devons modifier ce mode de pensée qui pétrit la société colombienne, grâce à l'éducation.
    Alors que faisons-nous?
    C'est ce qui se passe à Cerrejon, en ce qui concerne les droits de la personne. Nous travaillons actuellement avec John Ruggie de l'Université Harvard, spécialiste des droits de la personne et conseiller spécial des Nations Unies. Dans le cadre d'un projet pilote sur le terrain, nous tâchons de mettre en application des lignes directrices sur les mécanismes de règlement des griefs, élaborées par M. Ruggie. Si aucun mécanisme ne permet de déposer un grief par suite de violations des droits de la personne, nous ne pouvons alors rien faire au sujet de ces violations. Il faut que des mesures puissent être prises immédiatement.
    En 2006, Cerrejon a commencé à organiser des séances de formation et de sensibilisation sur différents thèmes liés aux droits de la personne, notamment sur les principes volontaires et sur la sécurité et les droits de la personne. Près de 14 000 membres des collectivités locales ont assisté à ces formations, y compris des employés, des entrepreneurs ainsi que des représentants des pouvoirs publics, de forces de sécurité privées et d'organismes d'application de la loi.
    L'an dernier, Cerrejon a fait la promotion de 17 ateliers de la Croix-Rouge nationale, qui portaient sur des enjeux liés aux droits de la personne. Il s'agissait d'ateliers à l'intention des enfants, et près de 1 000 enfants des communautés ont assisté aux séances, qui étaient animées en espagnol et en langue wayuu. Les Autochtones représentent 44 p. 100 de la population de La Guajira, la majorité d'entre eux étant des Wayuu.
    En vertu de la législation colombienne, les Autochtones ont le droit d'avoir leurs propres systèmes sociaux locaux et leurs propres régimes politiques. Par conséquent, il est essentiel de tenir compte des chevauchements entre les lois du pays et les coutumes locales, en ce qui concerne la sécurité, la résolution de conflits et les droits humains, lorsqu'on se penche sur l'application des principes volontaires en matière de sécurité et de droits de la personne à Cerrejon.
    Notre point de vue, à Cerrejon, c'est qu'il ne faut pas simplement satisfaire à l'exigence minimale, mais qu'il faut plutôt faire tout ce qui est en notre pouvoir. Il faudra des années pour changer les mentalités, mais nous devons travailler sans relâche pour que les valeurs changent et qu'on en vienne à respecter la vie humaine, les collectivités autochtones et les Afro-Colombiens.
    Ne nous faisons pas d'illusions: il faudra des années de travail assidu. C'est pour cela qu'il est d'une importance capitale, pour toutes les parties concernées, que l'on établisse un accord commercial qui procurera des emplois à des Colombiens aussi bien qu'à des Canadiens, mais qui favorisera également l'application des lois concernant les droits de la personne.
    Je vais vous faire grâce de tout ce que je pourrais ajouter. Je tenais à souligner que ces problèmes ne se régleront pas du jour au lendemain. Nous devrons travailler des années durant et investir dans l'éducation. Autrement, nous n'atteindrons pas les objectifs visés, et nous ne pourrons pas nous dire que nous avons fait quelque chose pour les droits de la personne en Colombie, par respect les uns pour les autres.
    En guise d'exemple, si les membres des forces armées sont des illettrés qui ont grandi dans un climat de violence, et qu'on leur remet un fusil sans leur avoir donné de formation, on ne peut s'attendre à rien d'autre que ce qu'on observe en Colombie. Il faut faire quelque chose à ce sujet. Cela fait partie des objectifs que l'administration Uribe s'était donnés lorsqu'elle a doté le pays d'une armée composée de militaires professionnels, qui ont reçu de la formation.
(1550)
    Nous devons apporter notre contribution pour que les Colombiens puissent recevoir de la formation dans le domaine des droits de la personne et des droits des travailleurs.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Ferro.
    Mauricio Ferro nous parle depuis la mine de charbon de Cerrejon, dans le nord-est de la Colombie.
    Nous allons maintenant entendre Tania Hallé, coordonnatrice du travail sur le terrain dans le cadre du Projet Accompagnement et Solidarité Colombie.
    La parole est à vous, madame Hallé.

[Français]

    Bonjour à tous et à toutes. Merci de m'avoir invitée aujourd'hui à témoigner devant le comité.
    L'organisme que je représente est présent en Colombie, sur le terrain, depuis 2003. Notre partenaire principal en Colombie est la Comisión Intereclesial de Justicia y Paz, un organisme colombien de défense des droits de la personne avec lequel nous accompagnons des communautés métisses et afro-descendantes du nord du pays, dans le département du Choco dans la région du Bajo Atrato.
    J'ai personnellement effectué trois longs séjours dans le pays: un premier en 2003 d'une période de six mois, un autre en 2004 d'une période de huit mois, et le dernier de décembre 2007 à février 2009. J'ai donc une assez bonne connaissance de ce qui se passe réellement sur le terrain.
    Aujourd'hui, à l'aide de ce témoignage, je vais tenter de démontrer essentiellement deux choses: premièrement, que le phénomène du déplacement forcé en Colombie est un phénomène qui s'inscrit, entre autres, dans les politiques de l'État colombien visant à permettre l'appropriation des terres des communautés par des secteurs privés pour la mise en place de projets de développement économique, entre autres de type agro-industriel; deuxièmement, qu'il existe dans le pays un plan de persécution politique à l'encontre des défenseurs colombiens des droits de la personne ainsi que des organisations internationales qui sont critiques des politiques du gouvernement.
    Je vais faire une mise en contexte de la situation des communautés qu'on accompagne. Ces communautés sont dans les territoires du Jiguamiando et du Curvaradó, dans le Bajo Atrato. Elles ont été déplacées en 1997 à la suite d'une opération de la Brigade XVII de l'Armée nationale menée conjointement avec les troupes paramilitaires. Il y a d'ailleurs actuellement un processus judiciaire à l'encontre du général Rito Alejo del Rio, qui était alors commandant de la Brigade XVII.
     Depuis 2000, les communautés ont commencé à effectuer un retour progressif dans leurs terres. Cependant, la violence paramilitaire a repris depuis 2003. On a aussi constaté le début de l'implantation d'un projet agro-industriel de palmes africaines destinées à l'exportation d'agrocombustibles, implanté de manière illégale sur les territoires collectifs des communautés qui sont reconnues par la loi 70 en Colombie.
    J'ai personnellement été témoin de plusieurs incursions de type paramilitaire dans les villages, lors de mon séjour en 2003. Lors d'une de ces incursions, le commandant de l'opération paramilitaire portait une insigne de la Brigade XVII de l'Armée nationale, alors que l'ensemble de la troupe portait l'insigne d'AUC, Autodéfenses unies de Colombie, un groupe paramilitaire.
    Également lors de cette incursion, les paramilitaires disaient aux communautés qu'ils étaient là pour récupérer les terres et apporter le progrès dans la région, et incitaient les communautés à s'associer au grand projet de développement de palmes africaines qui allait être implanté.
    En 2005, l'Institut colombien de développement rural, une entité gouvernementale, a produit un rapport à la suite d'une commission de vérification sur les plantations de palmes africaines, stipulant que 93 p. 100 des plantations de palmes étaient implantées illégalement sur les terres des communautés. Malheureusement, malgré toutes les démarches entreprises par Justicia y Paz pour aider les communautés à récupérer leurs terres, ce n'est toujours pas fait. Il y a maintenant plus de 15 000 hectares de palmes africaines semées illégalement sur les territoires.
    Il y a plus préoccupant encore. Des preuves ont été révélées de l'implication du paramilitarisme avec les entreprises de palmes et du fait que les entreprises ont profité d'un appui financier gouvernemental. Parmi les preuves qu'on retrouve des liens entre le paramilitarisme et les entreprises de palmes dans la région du Bajo Atrato, on a les aveux des paramilitaires eux-mêmes, dont un important chef paramilitaire du nom de Éver Veloza, connu sous le pseudonyme de HH, qui, avant son extradition aux États-Unis, dans le cadre du processus de démobilisation, a fait certaines déclarations. Il a entre autres remis une clé USB contenant des documents qui faisaient état de la relation entre Vicente Castaño, un des plus importants chefs du paramilitarisme en Colombie, et le projet de palmes africaines dans le Curvaradó.
(1555)
    Il a aussi affirmé que Rodrigo Zapata, alias El Negro, un autre chef paramilitaire démobilisé, qui était à ce moment-là chef du bloc Calima sous son autorité, était à la tête des affaires de la palme dans cette région et qu'il avait été responsable de légaliser les papiers des terres à l'INCORA — l'Institut colombien de réforme agraire — pour permettre l'implantation du projet dans le Curvaradó.
    Un autre fait est préoccupant. En 2009, un rapport équivalent à celui de notre vérificateur général a révélé des preuves selon lesquelles près de 100 p. 100 du financement ayant permis l'implantation du projet illégal de palmes africaines dans les terres des communautés provenait de fonds publics, principalement de FINAGRO, la financière agricole du gouvernement colombien.
    Rappelons que ces communautés ont connu au total, de 1996 à aujourd'hui, 140 assassinats et disparitions forcées et plus de 15 déplacements forcés dont la responsabilité est attribuable directement à l'État colombien.
    Dans la deuxième partie de ma présentation, je voudrais attirer votre attention sur la persécution autant médiatique que politique et judiciaire menée à l'endroit des organismes de défense des droits de la personne sur le terrain. Vous avez probablement entendu parler, par d'autres témoins, de l'existence d'un document confisqué par le Bureau du Procureur général de la Nation au Département administratif de sécurité, le DAS, le service de renseignement colombien. Je vais vous lire seulement quelques brefs extraits qui sont assez horrifiants. Le document date de juin 2005:
OPÉRATION TRANSMILENIO — OBJECTIF GÉNÉRAL: Neutraliser les actions déstabilisantes des ONG en Colombie et dans le monde. Établir des liens avec des organisations narcoterroristes cherchant à les inculper. OPÉRATION INTERNET: Créer de la controverse autour des ONG. STRATÉGIES: Discrédit. OPÉRATION ÉTRANGERS: Neutraliser l'action des citoyens étrangers. Enquêtes opératives. Discrédit et pression. Déportation. Communiqués et dénonciations.
    Concrètement, nous vivons les conséquences de ce qui est écrit dans ces documents. Depuis octobre 2008, il y a une nouvelle vague d'attaques contre les ONG de droits de la personne en Colombie, particulièrement contre notre partenaire en Colombie, la Comisión de Justicia y Paz, contre notre organisme canadien de défense des droits de la personne, le PASC, et contre les Brigades de Paix Internationales, un organisme reconnu sur le plan international présent dans la région.
    J'ai personnellement été témoin, à l'automne 2008, de nombreuses menaces de mort faites par téléphone cellulaire contre des membres de l'équipe de terrain de Justicia y Paz, épisode qui s'est soldé par l'enlèvement, par les paramilitaires, d'un des membres de l'équipe de terrain de Justicia y Paz, en novembre 2008, qui a heureusement été relâché par la suite. Il reste que les paramilitaires sont encore très présents dans la région et que, concrètement, la seule différence qu'on voit post-processus de démobilisation, c'est un changement de modus operandi.
    Depuis le début de cette année, une importante campagne de diffamation s'est abattue sur Justicia y Paz et sur notre organisme. Des articles ont été publiés dans les quotidiens nationaux en décembre 2009, dont l'un d'entre eux écrit par M. Jose Obdulio Gavrira, ex-conseiller présidentiel du président Uribe, où on accuse Justicia y Paz, les Brigades de Paix Internationales et le PASC de travailler directement avec les FARC-EP, la guérilla colombienne.
    Le 16 février dernier, dans le cadre d'une émission de radio animée par M. Fernando Londoño, ex-ministre de l'Intérieur sous le gouvernement d'Uribe,on a lancé des accusations gratuites tentant de faire un faux lien entre nous et la guérilla colombienne. Donc, j'aimerais vous rappeler que cette stratégie qui consiste à associer les ONG de droits de la personne à la lutte armée d'extrême gauche convertit les défenseurs de droits de la personne en cibles pour les paramilitaires et que, dans son rapport annuel de mars dernier, le Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les droits de l'homme en Colombie identifiait encore les défenseurs des droits de la personne comme groupes vulnérables et stipulait que l'augmentation des attaques et des menaces à leur encontre était directement attribuable aux affirmations de diffamation publique dont ils sont l'objet, entre autres de la part de membres du gouvernement.
(1600)
    Pour nous, la série de diffamations et de menaces dont on a été victimes et dont notre partenaire est victime n'est pas un cas isolé. Il illustre une politique qui touche les plus hautes sphères de l'État colombien.
    En terminant, je vous rappelle que la Colombie est l'un des dix pays au monde qui est sous la loupe de l'examen préliminaire de la Cour pénale internationale. Selon nous, la ratification d'un accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie constituerait un désaveu, de la part du gouvernement canadien, du travail des ONG canadiennes sur le terrain. Cela aurait comme conséquence d'augmenter gravement le risque que courent nos accompagnateurs sur le terrain et de nous enlever les garanties qui nous permettent de continuer à exercer notre travail.
    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons maintenant entendre M. Stephen Benedict, directeur du Service des droits de la personne et des syndicats, à la Confédération syndicale internationale.
    Allez-y, monsieur Benedict.
    Ma déclaration sera unilingue, mais il me fera plaisir de répondre à des questions posées en français ou...
    Excusez-moi. Puis-je vous demander de faire votre déclaration en moins de 10 minutes, afin que tous les témoins aient assez de temps pour parler? Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens d'abord à remercier le Congrès du travail du Canada, qui parraine ma présence aujourd'hui et, bien entendu, le comité, qui me donne l'occasion de présenter mon témoignage sur les droits des syndicats en Colombie, dans une perspective internationale.
    Je suis directeur du Service des droits de la personne et des syndicats à la Confédération syndicale internationale, dont le siège social est à Bruxelles. J'ai également déjà été directeur du Congrès du travail du Canada.
    La Confédération syndicale internationale est une organisation-cadre. À l'échelle mondiale, c'est la plus grande organisation à chapeauter des centrales syndicales nationales; elle représente environ 176 millions de travailleurs, répartis dans 155 pays et territoires.
    Nous comptons parmi nos membres des organisations comme le Congrès du travail du Canada, la Confédération des syndicats nationaux du Canada, ou CSN, et, en Colombie, les trois principales centrales nationales, soit la CUT, la CTC et la CGT. Ces trois confédérations colombiennes représentent, au total, environ un million de travailleuses et de travailleurs colombiens syndiqués.
    Le service que je dirige à la CSI est responsable de la réalisation d'une enquête annuelle sur les violations des droits des syndicats. J'ai un exemplaire de ce document en anglais et en français, s'il y a des intéressés.
    Pour faire cette enquête, nous procédons d'abord à une étude des aspects du droit du travail liés à la liberté d'association et au droit à la négociation collective, selon les dispositions des textes législatifs. Ensuite, nous vérifions de quelle manière ces mesures législatives sont appliquées, puis, cela va sans dire, nous documentons les infractions. Je vais revenir à cette enquête dans un instant.
    Mon service joue également un rôle au sein de l'Organisation internationale du Travail. Nous exerçons en particulier des fonctions de soutien et de coordination en ce qui concerne la contribution que les représentants des travailleurs apportent aux travaux de la Commission de l'application des normes.
    J'ai eu l'occasion de consulter le verbatim de certains témoignages entendus par le comité jusqu'à présent et, à la lumière de ces lectures, je vais mettre l'accent sur trois questions. Je vais d'abord vous parler de la contribution de la Colombie aux mécanismes de supervision de l'Organisation internationale du Travail; je vais ensuite aborder la question des violations des droits du travail commises en Colombie; enfin, je vais vous présenter certaines préoccupations liées aux répercussions d'un accord de libre-échange et d'investissement sur les travailleurs colombiens.
    Le mécanisme de supervision de l'OIT comporte deux volets, dont vous avez probablement déjà entendu parler. Le premier mécanisme est le Comité de la liberté syndicale, un organisme tripartite composé de travailleurs, d'employeurs et de représentants gouvernementaux. Ce comité a été institué en 1951 pour exercer une surveillance relativement à la liberté d'association.
    Le Comité de la liberté syndicale condamne régulièrement le meurtre de syndicalistes colombiens au titre du cas numéro 1787, le cas du comité qui est en instance depuis le plus longtemps. En 2006, le rapport du comité sur la Colombie était, à lui seul, plus volumineux que l'ensemble des rapports sur tous les autres cas. Et depuis l'an 2000, c'est en Colombie que les missions de haut niveau de l'OIT ont été les plus nombreuses.
    La question de la violence contre les syndicats est au coeur de ces missions, mais elles visent bien entendu un certain nombre d'autres enjeux, qu'il s'agisse du droit de se syndiquer, du droit de négocier collectivement ou du droit de grève; de l'adoption de lois antisyndicales; du démantèlement forcé d'organisations syndicales, sous prétexte de restructurations ou de privatisations; du recours à des coopératives de travailleurs associées, au sein desquelles la syndicalisation est impossible, pour embaucher du personnel sans avoir à offrir d'avantages sociaux ou de régimes de soins de santé; ou de toutes sortes d'autres restrictions qui ont une incidence sur les droits des travailleurs.
(1605)
    Le second mécanisme de l'OIT est la Commission de l'application des normes. À partir d'un rapport produit par un comité d'experts juridiques, un certain nombre de pays sont invités chaque année à participer à la conférence de la commission. Le comité d'experts établit son rapport sur l'application des conventions en se fondant sur des informations provenant d'un large éventail de sources.
    Pour établir leur rapport, les experts juridiques consultent les rapports annuels de la CSI. Ils tiennent également compte de l'information qu'ils reçoivent de travailleurs colombiens, ainsi que de l'information que leur communiquent des organisations d'employeurs, les gouvernements, de même qu'un certain nombre d'organisations non gouvernementales, qu'il s'agisse d'une école colombienne qui réalise des études sur le respect des droits en Colombie, d'Amnistie internationale ou d'autres organisations non gouvernementales bien connues.
    Dans le rapport de cette année — je ne passerai pas par quatre chemins —, les experts ont relevé un certain nombre de points satisfaisants ou présentant un intérêt particulier. Bien entendu, si on lit attentivement l'ensemble du rapport — qui est accessible au public —, on constate que des problèmes persistent en ce qui concerne le droit à la liberté d'association et à la négociation collective.
    Personne n'a encore mentionné cela, mais permettez-moi de vous citer le paragraphe qui suit celui auquel quelqu'un a fait référence précédemment, comme l'indique le compte rendu: « Le comité tient à exprimer encore une fois ses profonds regrets [...] ». Ce passage est en caractères gras. Ce sont des experts juridiques internationaux qui s'expriment; ils n'emploient pas les caractères gras à la légère. Ils ont donc exprimé leurs « profonds regrets devant les meurtres et les actes de violence dont ont été victimes des syndicalistes » pendant de nombreuses années, depuis l'examen précédent de l'application de la convention 87, et notamment en 2009.
    En ce qui concerne les meurtres de syndicalistes commis en 2009, nos observations indiquent que la situation ne s'est guère améliorée. En 2009, 47 meurtres ont été commis. Les syndicalistes qui ont été tués ont été assassinés pour la seule raison qu'ils exerçaient leur droit de représenter des travailleurs et qu'ils s'acquittaient de leurs responsabilités à cet égard. J'aimerais que le comité puisse entendre les témoignages de certaines organisations qui représentent les travailleurs qui ont été tués. Et ce qui est préoccupant, au-delà des nombres, c'est que le nombre de femmes assassinées a augmenté.
    Comme l'énonce le programme de l'OIT, les membres des syndicats colombiens sont la cible de violences physiques, et certains sont assassinés, mais on s'en prend également à eux en employant des moyens légaux, ou en les intimidant et en les harcelant. Tout cela s'inscrit dans une culture persistante d'exclusion systématique des travailleurs et de leurs regroupements, une culture qui ne comprend pas et qui foule aux pieds le rôle fondamental des syndicats au sein d'une société démocratique.
    Ces attaques sont systématiques et, dans la majorité des cas, elles sont directement liées à des conflits de travail. Elles visent à empêcher les travailleurs de se joindre à des syndicats, de négocier collectivement, et d'obtenir de meilleures conditions de vie pour leur famille, ce qui est leur droit. Cette situation fait en sorte que les travailleurs ne peuvent guère bénéficier des avantages de l'expansion économique qui résulte des échanges commerciaux.
    Quand le meurtre et l'intimidation ne suffisent pas à arrêter les syndicalistes, d'autres techniques sont employées. Les demandes d'accréditation sont rejetées arbitrairement, on procède à des congédiements massifs, et les employeurs qui contreviennent à la loi agissent en toute impunité. Ces violations ont non seulement occasionné une importante diminution du nombre de travailleurs syndiqués en Colombie, mais également un déclin du nombre de syndicats accrédités ainsi que du nombre de travailleurs bénéficiant d'une convention collective.
    Bien qu'il existe des rapports contradictoires à ce sujet, le fait est que le nombre de travailleurs syndiqués a diminué d'environ 4,7 p. 100 de 2002 à 2008. Et de 2003 à 2008, 253 demandes d'accréditation ont été rejetées. En fait, ce qu'on observe, c'est qu'il y a eu un déclin des négociations collectives au cours des dernières années, depuis que le gouvernement actuel a pris le pouvoir.
(1610)
    Pour ce qui est de 2010, 25 syndicalistes avaient été assassinés à la fin du mois d'avril. Il existe des listes qui répertorient les noms des victimes, l'endroit où elles ont été assassinés et le nom du syndicat auquel elles appartenaient.
    Permettez-moi de présenter mon troisième point très rapidement, monsieur le président. Je crois qu'il me reste un peu de temps.
    Vous avez déjà dépassé votre temps d'environ une minute et demie, mais puisque Mme Hallé a dépassé son temps de deux minutes, nous avons maintenant quatre minutes de retard.
    Alors, je ne prendrai que 30 secondes. Merci.
    Les trois confédérations nationales colombiennes se sont opposées à l'accord de libre-échange. En 2009, elles ont affirmé ce qui suit:
Selon nous, le commerce équitable devrait se définir comme une pratique favorisant l'avancement et le progrès des droits socioéconomiques, culturels et environnementaux des Colombiens. La signature d'un accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie ne garantirait pas le respect de ces droits.
    En ce qui concerne la question de savoir s'il s'agit d'une perspective idéologique, permettez-moi de vous rappeler un point sur lequel nous nous entendons probablement: la modification qui a été proposée. Nous sommes très favorables à la modification de l'accord, pour garantir qu'il prévoie un examen des incidences sur les droits de la personne.
    Selon ma compréhension des choses, le gouvernement colombien exigera qu'un rapport annuel soit établi à l'intention de son Congrès relativement aux répercussions de l'accord sur les droits humains en Colombie. Et le gouvernement du Canada fera de même.
    Que se passera-t-il ensuite? Est-ce que les rapports seront échangés entre les parlements? Est-ce qu'ils feront l'objet de discussions? Par quels comités seront-ils examinés? Comment tout ce processus se déroulera-t-il?
    Quelle idée y a-t-il derrière tout ça? Est-ce qu'on s'attend à ce que les Colombiens débattent de l'incidence de l'accord sur les droits de la personne au Canada?
    Selon nous, une évaluation légitime des répercussions sur les droits humains doit reposer sur les principes suivants: l'évaluation doit être antérieure à la mise en oeuvre, elle doit être réalisée de manière indépendante, et il doit être possible de prendre des mesures à partir de ses conclusions. Si l'on convient que ces principes sont indispensables à une évaluation légitime et productive, il faut conclure qu'il est encore trop tôt pour mettre en oeuvre l'entente de libre-échange.
    Permettez-moi seulement de dire, en terminant, que si le gouvernement colombien est sérieux dans les efforts qu'il prétend entreprendre, il devrait se montrer favorable à l'idée qu'une véritable évaluation des incidences sur les droits humains soit réalisée au préalable, et de manière autonome. Cela n'empêcherait pas les échanges commerciaux et les investissements de se poursuivre.
    Les gouvernements peuvent continuer de négocier et de mettre en oeuvre des réductions de tarifs qui bénéficieront aux produits des deux pays, pour instituer une sorte de système préférentiel généralisé qui permettrait d'améliorer la situation pour les exportateurs canadiens de même que pour les consommateurs colombiens, que vous prétendez vouloir aider. Cela vous permettrait de dire à la population canadienne que vous avez agi avec toute la diligence nécessaire. C'est une situation qui ne ferait que des gagnants.
    Je vous remercie. Toutes mes excuses.
(1615)
    Nous en recevons beaucoup. Mais vous avez dépassé votre temps de quatre minutes, et c'est un manque de considération pour le comité. Les autres témoins auront moins de temps et la période de questions devra être abrégée. Je suis désolé, mais je le répète constamment. Je vous ai parlé avant la séance et tout juste avant que vous preniez la parole et, malgré cela, vous avez dépassé votre temps.
    Monsieur Casey, pour 10 minutes, si vous le voulez bien.
    Merci également aux membres du comité de me donner l'occasion de participer aux délibérations et à l'étude du projet de loi C-2.
    Je veux d'abord vous présenter très brièvement l'association que je représente ici. Il s'agit de l'Association des produits forestiers du Canada, la voix nationale de l'industrie canadienne des produits forestiers qui regroupe les producteurs de bois, de pâtes et papier et autres produits.
    D'un point de vue économique, le secteur forestier représente environ 12 p. 100 du PIB provenant du secteur manufacturier. Nous employons directement 240 000 Canadiens et, indirectement, un autre groupe de 366 000 Canadiens répartis au pays. Compte tenu du caractère rural de cette industrie, notre base économique compte environ 200 communautés canadiennes, d'un océan à l'autre.
    Au cours de notre force économique et de notre viabilité à long terme, il y a notre capacité à vendre nos produits sur les marchés étrangers. En effet, la valeur de nos produits échangés sur les marchés à l'extérieur du pays s'élève à environ 24 milliards de dollars; ce qui représente bien plus que 50 p. 100 des produits que nous fabriquons. Nous sommes donc le quatrième plus grand exportateur canadien et le plus grand exportateur de produits forestiers dans le monde.
    Comme la plupart des gens le savent, la majeure partie de notre production est acheminée aux États-Unis, soit environ 70 p. 100 de nos produits. Une autre partie importante de notre production, soit environ 16 p. 100, est destinée à certains pays asiatiques, notamment la Chine et l'Inde, tandis qu'un autre 6 p. 100 se retrouve sur les marchés européens. Enfin, tout le reste de notre production est vendue à d'autres pays dans le monde, notamment des pays d'Amérique du Sud. C'est pourquoi nous sommes heureux de pouvoir participer aux délibérations de ce comité puisque, de toute évidence, cet accord représente pour nous une occasion d'accroître la prospérité de notre industrie.
    Vous, les membres de ce comité et autres députés, connaissez très certainement les défis économiques que ce secteur a eu à relever au cours des dernières années. Nous avons assisté à la fermeture de nombreuses scieries et à des pertes d'emplois qui ont, évidemment, eu de graves répercussions sur les communautés. D'ailleurs, il y a dans vos circonscriptions de nombreuses communautés qui ont été touchées directement par les problèmes qu'a connus cette industrie au cours des dernières années.
    Mais il y a des signes encourageants à l'horizon, des indices qui nous disent que l'industrie se relève. La demande pour des produits du bois est à la hausse et les prix sont majorés en conséquence. La demande de produits de pâte et papier est également à la hausse tout comme les prix.
    Il est encore trop tôt pour dire s'il s'agit d'une augmentation ponctuelle ou d'une tendance à long terme. Néanmoins, l'industrie continue de planifier en vue du moment où les marchés se redresseront. Comme nous prévoyons effectivement une reprise, nous avons instauré une stratégie en quatre volets pour aider l'industrie ou la positionner afin qu'elle soit d'attaque au moment de la relance.
    D'abord et avant tout, il revient au secteur d'investir et d'améliorer sa productivité. C'est ce que nous avons fait, même en cette période de récession économique.
    Deuxièmement, nous devons continuer à améliorer notre performance environnementale et nos pratiques de gestion des ressources forestières. Ce que nous avons fait. Nous voulons être en mesure de tirer parti de ces améliorations et pratiques dans un marché où les critères en matière d'environnement sont de plus en plus utilisés comme critères d'achat.
     Permettez-moi une parenthèse pour dire que nous sommes heureux que cet accord de libre-échange englobe un accord distinct sur les priorités en matière d'environnement selon lequel la gestion des ressources et la gestion durable des ressources constituent des priorités dans le contexte de la collaboration entre les deux pays.
    Le troisième volet de notre stratégie consiste à chercher des moyens d'optimiser la ressource, c'est-à-dire tirer le maximum de la fibre ou de l'arbre. Une partie importante de cette démarche consiste à intégrer les nouveaux éléments que sont la bioéconomie, les bioproduits et la bioénergie à la gamme de nos produits, pour nous permettre, là encore, d'obtenir la plus grande valeur possible de chaque arbre et de minimiser le gaspillage.
    Le dernier volet, que j'ai inscrit quatrième parce qu'il me permet d'enchaîner avec la suite de mon témoignage, c'est la croissance et l'expansion de nos marchés. Dépendre pour 70 p. 100 du marché américain est un peu trop risqué; d'ailleurs, il suffit de se rappeler de cette bataille du bois d'oeuvre pour s'en convaincre. Nous aimerions donc diversifier ces marchés et prendre de l'expansion ailleurs.
    Cet accord, le projet de loi C-2, est un bon exemple des possibilités d'expansion de ces marchés et du potentiel qu'ils représentent. Laissez-moi vous dire quel est ce potentiel. Ce potentiel repose principalement sur les pâtes et papier et le carton; très peu de bois. Ces produits ne nous font pas vraiment penser à un secteur qui repose sur le bois. Peut-être y a-t-il un certain travail de sensibilisation à faire de ce côté-là, mais disons que cela ne fait pas partie des discussions que nous avons aujourd'hui.
    Globalement, la Colombie importe chaque année pour 740 millions de dollars de produits forestiers. Le plus intéressant, c'est que nous voyons ce chiffre augmenter chaque année de 13 p. 100. C'est donc un marché important en pleine croissance.
    Il y a également trois autres créneaux importants où nous voyons des possibilités.
    L'un d'eux est le papier journal. La Colombie importe chaque année pour environ 60 millions de dollars de papier journal. De ce chiffre, la part du lion nous revient avec 41 millions de dollars. Actuellement, aucun droit tarifaire n'est imposé à ce produit. Cet accord commercial est donc avantageux pour nous puisqu'il précise qu'aucun droit tarifaire ne sera imposé dans un avenir prévisible, ce qui nous donne une certaine sécurité, voire une sécurité à long terme, concernant ce marché.
(1620)
    Le deuxième créneau, c'est celui des pâtes et papier. La Colombie importe annuellement pour environ 125 millions de dollars de produits de pâtes et papier. Là aussi, nous constatons une croissance annuelle de 17 p. 100 des importations, ce qui constitue pour nous un marché d'expansion.
    Toutefois, nous ne sommes pas présents dans ce marché, probablement en raison des droits tarifaires de l'ordre de 5 à 10 p. 100 qui visent ces produits, alors que nos compétiteurs, le Brésil et le Chili, profitent non seulement de leur proximité géographique mais de l'absence de droits tarifaires, ce qui leur donne un meilleur accès à ce marché. Le fait d'éliminer ces droits tarifaires nous permettra, à tout le moins, d'être sur un pied d'égalité ou de profiter des mêmes règles que nos principaux compétiteurs susmentionnés.
    Le troisième créneau, et possiblement le plus important: la gamme des produits de papier non couché et de carton. À ce chapitre, les importations de la Colombie s'élèvent à environ 450 millions de dollars chaque année. Là aussi, il y a augmentation. Nos expéditions de ces produits vers ce marché ne comptent que pour environ 12 millions de dollars. Les autres joueurs importants sont l'Allemagne, les États-Unis et le Brésil.
    Tout comme au Canada, en Allemagne et aux États-Unis, il y a des droits tarifaires de l'ordre de 10 p. 100 qui s'appliquent aux produits destinés à ce marché. L'accord dont nous discutons ramènerait ces droits tarifaires à zéro, nous donnant ainsi un énorme coup de pouce par rapport à notre compétiteur immédiat, les États-Unis, et nous ouvrirait un marché potentiel de 450 millions de dollars pour cette gamme de produits. Cela nous permettrait également de couper l'herbe sous le pied du Brésil, un autre de nos grands compétiteurs.
    Nous estimons que ces trois secteurs du marché offrent un énorme potentiel, soit 740 millions de dollars. Même si, selon une perspective nationale, cette somme peut vous sembler moins importante, en réalité, bon nombre des produits que nous exportons là-bas viennent de régions précises du pays.
    Ainsi, la majeure partie du papier journal vient d'entreprises du Québec et de la Nouvelle-Écosse. Quand on parle d'expédier des produits d'une valeur de 41 millions de dollars provenant d'une région précise, on parle de maintenir en activité un certain nombre de scieries pendant plus longtemps.
    Chaque fois que nous avons l'occasion d'ouvrir de nouveaux marchés ou d'élargir des marchés, nous ne pouvons qu'applaudir. C'est pour cette raison que nous appuyons très fermement le projet de loi C-2 et les objectifs visés. Nous vous invitons à suivre notre exemple et à appuyer ce projet de loi.
    Encore une fois, merci beaucoup d'avoir pris le temps de nous écouter.

[Français]

    Je serai heureux de répondre à vos questions en français, si vous le désirez.

[Traduction]

    Merci, monsieur Casey, de l'Association des produits forestiers du Canada.
    Cet exposé soulève un certain nombre de questions. Nous avons moins de temps que je ne l'espérais, mais nous allons quand même tenir une ronde de questions. Nous débuterons par une ronde de sept minutes, ce qui signifie que les questions de chaque intervenant et les réponses ne doivent pas prendre plus de sept minutes au total.
    Nous commençons par M. Cannis, notre vice-président.
    Merci, monsieur le président.
    Tout d'abord, je tiens à accueillir chaleureusement chacun et chacune d'entre vous.
    Je remercie également nos invités de la Colombie de témoigner devant notre comité.
    J'aimerais tout d'abord dire à M. Ferro, qui nous parle de la Colombie, que j'ai vraiment apprécié son témoignage, surtout lorsqu'il a dit que, comme d'autres pays, la Colombie a aussi ses problèmes. Si quelqu'un parmi vous croit qu'il n'y a pas de problème ailleurs, alors je ne sais pas sur quelle planète il vit.
    J'ai été ému lorsqu'il a parlé de la violence familiale par rapport aux femmes et aux enfants et ce qui doit être fait à ce sujet. J'y reviendrai dans une minute.
    Monsieur Ferro, si j'ai bien compris — j'essaie juste de sauver du temps et de m'assurer que votre réponse sera consignée —, vous croyez que cet accord commercial aidera à régler certains problèmes qui sont là aujourd'hui et y seront demain et le jour suivant. En fait, si nous n'allons pas de l'avant avec cet accord de libre-échange, nous ne faisons que retarder davantage le moment de s'attaquer à certains de ces problèmes.
    Est-il exact de dire cela?
(1625)
    Absolument. Vous avez tout à fait raison.
    Merci.
    Nous devons faire quelque chose et nous devons continuer de déployer des efforts pour obtenir des résultats. À long terme, ce sont les résultats qui comptent.
    Excellent.
    J'aimerais poser une question à Mme Hallé. Approuvez-vous l'accord commercial que le Canada a signé avec les États-Unis?

[Français]

    Il s'agit d'une tout autre question. Mon intervention d'aujourd'hui ne porte pas sur la...

[Traduction]

    Approuvez-vous l'accord commercial que le Canada a signé avec Israël?
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. On parle ici du Canada et de la Colombie, et M. Cannis sait très bien que ses questions doivent porter sur le témoignage.
    Bien sûr, monsieur le président... J'essaie simplement d'expliquer mon point de vue.
    Il s'agit d'un comité sur le commerce et, comme par hasard, il pose des questions sur ce sujet.

[Français]

    J'aimerais que vous me laissiez terminer ma réponse.

[Traduction]

    C'est lui qui m'a interrompu, pas moi. C'est le membre du NPD qui a été impoli.

[Français]

    Je suis désolée, je n'avais pas terminé ma réponse. J'étais en train de dire que je considère que mon intervention d'aujourd'hui concerne l'accord de libre-échange Canada-Colombie et ne porte pas sur mon appui ou mon opposition à l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis.

[Traduction]

    J'y arrive.
    J'essaie de faire valoir mon point. Approuvez-vous ces accords commerciaux, oui ou non?

[Français]

    Je ne suis pas opposée à l'Accord de libre-échange entre le Canada et la République de Colombie en soi, si c'est votre question.

[Traduction]

    Alors, si vous ne vous opposez pas à ces deux accords de libre-échange, et je pourrais en nommer d'autres, par exemple celui que le Canada s'est engagé à conclure... Si nous l'examinons plus attentivement, cet accord commercial s'inspire en grande partie des autres accords, à l'exception peut-être de l'amendement proposé par mon collègue, Scott Brison, qui l'améliore. Alors, si vous approuvez ces accords commerciaux, pourquoi n'approuvez-vous pas celui-ci?
    Je poursuis monsieur le président, si vous le permettez. Nous avons parlé des syndicats, des déplacements de population et des enlèvements. J'ai ici des statistiques dont j'aimerais faire part à M. Benedict. Ainsi, en 2002, il y a eu environ 2 882 enlèvements et, en 2009, il y en a eu 2 013. Quant aux homicides, en 2002, on en a compté 28 837 et près de 50 p. 100 moins en 2009, soit 15 000.
    En ce qui a trait aux syndicats et à leurs membres, j'ai en main certaines données. En gros, le nombre de dirigeants syndicaux et de travailleurs syndiqués a augmenté, passant de près de 800 000, en 2002, à presque 1,5 million, en 2009, soit une augmentation de 76 p. 100. Monsieur, j'ai aussi des statistiques sur le nombre de dirigeants syndicaux nommés et le nombre de syndicats créés, et j'insiste sur ce mot, parce que vous en avez parlé, par exemple, de 74, en 2006, ce nombre est passé à 164, en 2009. Une augmentation de 80 p. 100.
    Soit, quelqu'un m'a menti ou je vous mens, et je m'en excuse si c'est le cas, monsieur le président, mais peut-être que quelqu'un peut réfuter ces chiffres.
    En 2002, 196 dirigeants syndicaux ont été tués. En 2009, nous en avons compté 28. À mon avis, c'est déjà 28 de trop et je crois que tout le monde ici pense la même chose. Le fait est que c'est arrivé et qu'actuellement la Colombie déploie beaucoup d'efforts pour régler la situation.
    Pour ce qui est des femmes, j'aimerais ajouter, monsieur le président, qu'en ce qui a trait aux initiatives multilatérales, dans le cadre de la onzième session du Conseil des droits de l'homme, la Colombie de même que la Nouvelle-Zélande ont favorisé l'adoption de la résolution 11/8 sur la mortalité et la morbidité maternelles évitables et les droits de la personne. En outre, dans le cadre de la douzième session du Conseil des droits de l'homme, la Colombie et le Mexique ont fait campagne pour l'adoption de la résolution 12/17 sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes. Ces gestes s'inscrivent dans la foulée des travaux des autres organismes internationaux avec lesquels la Colombie collabore.
    Je vais conclure sur ceci afin de permettre à toute personne d'utiliser le temps de parole qu'il me reste. J'en déduis donc que nous nous trouvons face à une nation qui déploie tous les efforts possibles pour se sortir d'une situation difficile.
    Monsieur Casey, je termine avec vous, puis-je dire à mes électeurs que les emplois qu'ils ont au Canada, en tant qu'électeurs et contribuables, pourraient être mis en péril s'ils ne peuvent vendre leurs produits de façon concurrentielle et, par conséquent, qu'ils ne peuvent payer les études de leurs enfants, l'hypothèque ou même leur épicerie? Est-ce que les emplois de mes électeurs ici à Toronto sont menacés?
(1630)
    Je vois cela en termes plus positifs. Je crois que cela permettra de créer des emplois.
    Mais si nous prolongeons le processus de discussion de l'accord...
    Cet accord permet d'élargir nos marchés. Nous avons du succès sur les marchés actuels et je crois que cet accord offre la possibilité d'une expansion des marchés dont nous profitons déjà.
    Peu importe le temps qu'il reste, monsieur le président, je laisse la place aux membres du comité qui veulent y répondre.
    Monsieur Benedict, vous avez une minute pour nous faire part de vos commentaires.
    Oh, je ne prendrai que 30 secondes. Je serai heureux de parler de chiffres aussi longtemps que vous le voudrez. Ces chiffres nous ont été fournis par des organisations qui relèvent de la Confédération syndicale internationale, la CSI. Ils ne correspondent pas tout à fait à ceux fournis par le gouvernement. Je suis d'ailleurs ouvert à toute discussion parallèle sur ce sujet.
    La même chose s'applique aux travailleurs visés par les conventions collectives. Leur nombre a diminué tout comme le nombre de conventions collectives signées; des statistiques importantes et différentes de celles concernant le nombre de personnes qui se sont jointes aux syndicats et les organisations syndicales créées par le gouvernement afin qu'elles appuient ses prises de position.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Laforest.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour à tous les témoins. Bonjour, monsieur Ferro, en Colombie.
    J'ai une première question pour M. Casey. Monsieur Casey, j'ai été un peu étonné de vous entendre dire que l'Accord de libre-échange entre le Canada et la République de Colombie permettrait d'accroître éventuellement... En tout cas, cet accord vous semble important.
    Je vais mettre cela en parallèle avec autre chose. La semaine dernière, j'ai assisté à la réunion pour les États généraux du bois dans la construction qui était organisée par le Conseil de l'industrie forestière du Québec. D'ailleurs, mon collègue M. Guimond y était aussi. Nous avons entendu plusieurs conférenciers, et nous avons assisté aux conférences pendant une majeure partie de la journée.
    On mettait en lumière les éléments sur lesquels il faut travailler pour augmenter la productivité. Jamais il n'a été question d'un accord de libre-échange avec la Colombie. Jamais personne n'a mentionné un tel accord, qui est si peu important pour le développement de l'industrie forestière. Bien d'autres pays sont beaucoup plus importants, du point de vue des débouchés. On a parlé de recherche et développement, de méthodes de coupe de la fibre, de méthodes de coupe, et surtout de garanties de prêts — que le gouvernement conservateur nous refuse encore. C'est ça qui va sauver l'industrie forestière. Vous, vous nous dites que c'est l'Accord de libre-échange entre le Canada et la République de Colombie qui va nous sauver. Je trouve ça complètement disparate.
    Il est certain que ce n'est pas le marché le plus important pour nous; ce sont plutôt ceux de la Chine, de l'Inde, des États-Unis, de l'Europe. Toutefois, c'est un marché assez important. Ce n'est pas un marché de bois, c'est un marché de pâtes et papiers. Telle est la possibilité. On vend pour 41 millions de dollars de newsprint — je ne connais pas le mot en français — en Colombie. Le marché est donc assez important pour quelques usines au Québec, comme AbitibiBowater, et peut-être aussi Kruger, je crois, qui veut avoir accès au marché colombien.
    Monsieur Ferro, j'ai une question pour vous.
    Pourriez-vous parler lentement?
    D'accord, je vais parler plus lentement, si le président me permet de...
    Merci beaucoup.
    Au sujet de l'Accord de libre-échange entre le Canada et la République de Colombie, vous dites qu'il faut être patient, que cet accord va favoriser un plus grand respect des droits de la personne en Colombie. C'est en quelque sorte ce que vous nous avez dit, si je ne me trompe pas.
    Oui, j'en suis certain. Cependant, on doit travailler chaque jour pour changer l'attitude et le comportement des gens et des agents publics. Si on ne travaille pas à changer la situation, rien ne va se passer dans les prochaines années.
(1635)
    Je vais vous poser une autre question. Pourquoi l'Accord de libre-échange entre le Canada et la République de Colombie favoriserait-il un plus grand respect des droits de la personne en Colombie? Depuis de nombreuses années, il y a des accords entre la Colombie et d'autres pays qui n'ont pas conduit à une amélioration ou à un plus grand respect des droits de la personne, au contraire.
    Je me reporte à votre document. Depuis 1995, la Colombie est membre de l'OMC. Elle entretient une union douanière avec la communauté andine depuis 1969. De plus, la Colombie a un accord de libre-échange avec le Chili depuis 2006. Quant à l'accord avec le Mercosur — le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay et le Paraguay —, il est en vigueur depuis décembre 2005. Enfin, l'accord de libre-échange avec le Mexique date de juin 1994. C'est mis à part les accords préférentiels partiels.
    Jamais, à ma connaissance, ces accords n'ont conduit à un plus grand respect des droits de la personne. Ce n'est pas ce que nous dit la plupart des témoins qui nous parlent des droits de la personne. Au contraire, il y a eu une détérioration de la situation en question, et ce ne sont pas des accords de libre-échange qui vont conduire à son amélioration. On nous propose des amendements à un projet de loi pour qu'après la signature de l'accord, la Colombie ainsi que le Canada fassent une étude pour évaluer la situation par rapport aux droits de la personne. Or, je ne peux pas vous croire quand vous nous dites que la situation va vraiment s'améliorer. Toutes les autres ententes nous prouvent le contraire.
    J'aimerais vous entendre à ce sujet.
    Je crois que le Canada est différent des autres pays avec lesquels la Colombie a conclu un accord de libre-échange. La présence des entreprises canadiennes va améliorer les choses. De la même manière que nous travaillons, comme Colombiens et Canadiens, nous pouvons améliorer la manière dont les compagnies travaillent avec les communautés et la population. C'est ce qui va changer les choses. Il y a des gens avec des principes différents. Ce n'est pas la même chose qu'auparavant. Je crois que c'est l'effort des citoyens et des personnes qui ont des principes qui va changer les choses.
    Si je vous comprends bien, monsieur...
    C'est nous, travailleurs...
    Si je vous comprends bien, monsieur Ferro, vous croyez beaucoup à la qualité d'une telle entente en raison de la crédibilité des entreprises canadiennes. Par conséquent, vous seriez sûrement favorable à la proposition unanime des membres du comité, l'année passée, selon laquelle un accord de libre-échange devrait, s'il devait être conclu, être associé à une étude indépendante au préalable. Cela ne changera rien.
    Si l'accord est vraisemblablement bon, pourquoi ne pas se permettre d'attendre et de faire une véritable étude indépendante sur les droits de l'homme? Cela permettrait à tous d'avoir le véritable portrait, juste, équitable et indépendant. Ensuite, tout le monde serait en mesure de voir s'il y a amélioration ou pas. Il faut se donner des balises pour pouvoir faire une évaluation.
    Je crois que le but d'une telle étude serait de contrecarrer l'accord de libre-échange. Je ne nie pas le fait que nous avons un problème de droits de la personne. La question qui se pose est de déterminer comment changer cette situation, comment fortifier la situation des syndicats et des syndicalistes. Il s'agit du problème à résoudre. C'est à ce que nous devons tous travailler pour changer la situation. C'est là que nous devons apporter une solution à la situation et aux problèmes de la Colombie.
    Je vous remercie, monsieur Ferro.

[Traduction]

    Merci.
    Merci, monsieur Laforest.
    Nous passons maintenant la parole à M. Julian pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence ici aujourd'hui.
    J'ai des questions pour chacun d'entre vous, alors je vais vous demander d'être plutôt bref.
    Je vais commencer avec vous, monsieur Ferro.
    Vos commentaires me semblent assez inquiétants, ne serait-ce qu'au sujet des attaques du président Uribe à l'endroit des militants pour les droits de la personne comme en témoigne le dernier reportage de la BBC où il affirme: « ... ces intérêts bien ancrés selon lesquels le fait d'être au service des droits de la personne ne fait que favoriser les politiques souhaitées par ceux qui sont de connivence avec le terrorisme. » Il établit ainsi clairement des liens entre les organisations de défense des droits de la personne et les organisations terroristes.
    Il y a aussi cette histoire récente qui fait état des actes de la police secrète colombienne connue sous le nom de DAS. C'est l'histoire de cette journaliste ciblée, Claudia Julieta Duque, qui a reçu des menaces selon lesquelles sa fille de 10 ans allait être violée et taillée en pièces. Elle a mentionné qu'en une journée elle avait reçu 70 appels de menaces de la police secrète colombienne.
    Selon elle, le président Uribe...
... prononçait des discours contre ses opposants.
Ces discours étaient synchronisés avec les actions que la police secrète menait contre nous. Il y a un lien clair entre un discours qui accuse et une police secrète qui attaque.
    Monsieur Ferro, étiez-vous au courant de ces commentaires formulés par le président Uribe et des actions de la DAS, la police secrète colombienne. Ou est-ce tout nouveau pour vous?
(1640)
    Il s'agit de commerce...
    Absolument. Nous savons très bien que le 7 août, le régime de M. Uribe prendra fin. Nous allons élire un nouveau président dans quelques semaines et il y a fort à parier que le successeur de M. Uribe ne sera pas un partisan de ce genre de politiques. Nous savons qu'il y a maintenant un bureau indépendant du procureur général et je crois que les responsables feront leur travail.
    À mon avis, si certaines personnes ont enfreint la loi, elles seront traduites en justice comme l'ont été les nombreux députés colombiens qui étaient de connivence avec les paramilitaires. Nous espérons que le système judiciaire colombien fera son travail et que justice sera rendue.
    Merci monsieur Ferro. Je vais laisser la parole aux autres témoins, mais j'aimerais signaler que M. Santos, candidat du parti du président Uribe, a dit exactement la même chose. Il a accusé les organismes de défense des droits de l'homme d'être au service du terrorisme. Il a d'ailleurs été accusé lui-même, à de nombreuses reprises, d'être tout aussi corrompu et agressif vis-à-vis de ces organismes que M. Uribe.
    J'aimerais passer la parole à Mme Hallé.

[Français]

    Je vous remercie de votre présence aujourd'hui.
    Pourriez-vous nous parler un peu plus des attaques contre les Autochtones et les Afro-Colombiens?
    De plus, un témoin précédent — le seul témoin engagé dans les droits de la personne en Colombie — a parlé des attaques des paramilitaires contre les gais et les lesbiennes en Colombie. Pourriez-vous aussi parler de cette augmentation de la violence contre les avocats des droits de la personne et les militants syndicalistes depuis 2008? C'est important. Certains de mes collègues parlent seulement de la période allant jusqu'à 2007 et ils oublient cela. Je pense qu'il est important d'entendre un témoignage sur cette augmentation depuis 2008.
    Dernièrement, vous avez dit que pour le Canada — c'est très clair et j'espère que ce message est compris autour de cette table —, le fait de pousser en faveur de l'établissement de cette entente fera en sorte, si je vous cite bien, de répudier le travail des ONG canadiennes en Colombie et pourrait mettre en danger les Canadiens en Colombie.
    Pourriez-vous commenter ces trois points?
    Oui.
    Premièrement, par rapport à la situation des peuples autochtones et des peuples afro-descendants, on sait qu'en Colombie il y a actuellement 5 millions de personnes déplacées à l'intérieur du pays. Après le Soudan, c'est le deuxième pays au monde où il y a le plus de personnes déplacées à l'intérieur d'un pays. La majeure partie des personnes qui ont été victimes de déplacements forcés sont des afro-descendants et des Autochtones. Donc, ce sont vraiment les populations les plus vulnérables et celles qui ont été le plus touchées par la situation des déplacements forcés de populations.
    Dans le département du Choco, où on travaille, des communautés autochtones sont actuellement menacées par l'implantation d'un projet de développement minier qui risque de contaminer l'eau potable dont ces communautés ont besoin pour survivre et pour tous leurs besoins quotidiens.
    Sont-elles menacées par les militaires et les paramilitaires colombiens qui sont liés avec le gouvernement?
    Elles reçoivent constamment des menaces de la part des paramilitaires qui sont directement en lien avec l'État colombien. Il y a des quantités phénoménales de preuves sur les liens entre la stratégie paramilitaire et l'État colombien, mais je n'ai pas le temps ni le loisir aujourd'hui de faire état de toutes ces preuves. Par contre, il y a une quantité phénoménale de documents à cet égard.
(1645)
    Et ces problèmes ont augmenté depuis 2008.
    Oui. On voit vraiment une augmentation des attaques et de la stigmatisation faite de la part des membres du gouvernement à l'encontre des défenseurs des droits de la personne. Le président Uribe a accusé les défenseurs de droits de la personne d'être des trafiquants de droits de la personne au service du terrorisme. Ce sont des accusations extrêmement graves et qui, pour nous, mettent en danger nos accompagnateurs sur le terrain. Quand on fait une association directe entre les défenseurs des droits de la personne et le terrorisme, c'est un message qui donne le feu vert aux paramilitaires pour attaquer les défenseurs des droits de la personne. En ce sens, on considère que cela augmente passablement les risques que l'on court sur le terrain.
    Merci beaucoup, madame Hallé.

[Traduction]

    Monsieur Benedict, nous avons accueilli précédemment un témoin du CCCI qui nous a parlé de l'amendement libéral en signalant que cette proposition manque de crédibilité et qu'un processus non crédible pouvait créer d'importants dommages.
    Comment décririez-vous cet amendement? À votre avis, manque-t-il de crédibilité? Nous n'en sommes qu'au début des témoignages des représentants des groupes de défense des droits de la personne et des organisations syndicales, mais nous pouvons déjà affirmé que les commentaires initiaux sont très négatifs.
    Comme je l'ai dit, c'est une initiative intéressante. C'est probablement un premier pas positif. Il y a effectivement une lacune, mais c'est au niveau de la capacité, parce que cette initiative n'est ni indépendante ni annonciatrice de mesures concrètes.
    Diriez-vous qu'elle manque de crédibilité?
    Elle manque effectivement de crédibilité.
    Merci.
    Enfin, monsieur Casey, j'aimerais vous parler du bois d'œuvre...
    Monsieur Julian, votre temps est écoulé.
    ... et des milliers d'emplois perdus en raison de cet accord incroyablement néfaste signé par les conservateurs.
    Monsieur Trost, vous avez la parole.
    Merci monsieur le président.
    Si je n'utilise pas tout le temps qui m'est alloué, je le partagerai avec mon collègue, M. Ed Holder.
    Monsieur Ferro, ainsi que quelques membres du comité le savent, j'ai recommandé au comité de vous inviter à témoigner à la suite de l'entretien d'environ 15 à 20 minutes que nous avons eu à notre réveil du vol de nuit dans l'avion qui me ramenait de Bogota.
    Ce qui m'a incité à vous inviter comme témoin devant ce comité c'est que vous êtes du milieu des affaires et préoccupé de la défense des droits de la personne et du développement pour la population là-bas. C'est à cela que se résume votre travail.
    Il semble y avoir consensus chez la plupart des témoins que nous avons entendus à l'effet que cet accord est profitable pour le Canada sur le plan économique. Cependant, nous discutons toujours de ses incidences sur la Colombie. Très simplement, à votre avis, cet accord et les accords subséquents, puisqu'il servira d'exemple pour un accord avec l'Union européenne et les États-Unis, faciliteront-ils la vie du Colombien moyen? Dans l'affirmative, pourquoi?
    Un coup d'oeil aux statistiques sur le commerce nous indique que les échanges commerciaux entre le Canada et la Colombie se sont accrus, mais là encore, il y a un problème concernant les statistiques fournies par la Colombie.
    Il y a quelque 20 ans déjà, j'étais statisticien en chef de la Colombie et je peux vous dire que le problème des statistiques colombiennes, c'est qu'elles sous-estiment le nombre de produits acheminés de la Colombie au Canada. La raison, et c'est un fait reconnu par Statistique Colombie et Statistique Canada, est que la plupart des produits exportés qui transitent par les ports américains, qui ne sont donc pas acheminés directement au Canada, figurent comme des exportations colombiennes vers les États-Unis et non pas des exportations vers le Canada.
    Lorsque je me penche sur la situation de la Colombie et du problème des syndicats, je peux dire qu'être reconnu comme syndicat en Colombie est un privilège étant donné que seul le secteur le plus moderne de l'économie est suffisamment important pour reconnaître la validité d'un syndicat.

[Français]

    Les petites et moyennes industries, qui sont des industries familiales, ne sont pas syndiquées.

[Traduction]

    C'est exactement la même situation au Canada.
    La croissance résulte d'une demande de biens et services. Je crois que l'accord commercial avec le Canada entraînera la création d'emplois en Colombie et permettra également de réduire le prix de certains produits dont nous avons besoin.
(1650)
    Selon moi, l'élément central du principal argument avancé par les opposants à l'accord, les militants syndicaux, etc., et je résume leur prise de position, est qu'ils n'aiment pas les politiques mises en oeuvre par le président au cours des huit dernières années et qu'ils le tiennent responsable de la plupart des problèmes liés aux droits de la personne et ainsi de suite. En conséquence, nous ne devons pas conclure cet accord.
    Il faut regarder plus loin. Comme vous l'avez fait remarquer, la Colombie a un système judiciaire indépendant et des procureurs généraux indépendants. Est-ce que cet accord porte sur autre chose que le passé? Est-ce que cet accord transcende l'administration Uribe? Est-ce que cet accord est tourné vers l'avenir?
    Je regarde le candidat du Parti vert et celui du parti du président Uribe qui sont au coude à coude. Les deux appuient l'accord commercial. Qu'est-ce que les Colombiens pensent de tout cela? En quoi cet accord est-il axé sur le futur? Ne serait-il pas plutôt lié au passé?
    On parle ici de l'avenir. Je souhaiterais présenter quelques données importantes. Avant l'arrivée au pouvoir de M. Uribe, les ministres de l'Éducation restaient en poste moins d'un an; pour cette raison, aucune politique touchant l'éducation n'a pu être mise de l'avant.
    Depuis l'arrivée de M. Uribe, les choses sont autrement; la ministre actuelle occupe son poste depuis huit ans déjà. On s'est beaucoup plus penché sur le système d'éducation. Il existait des problèmes de qualité, mais l'avenir dépend de l'éducation des Colombiens et des possibilités qu'ils ont d'obtenir de meilleurs emplois, soit des emplois de qualité, qui permettraient aux Colombiens, ainsi qu'à leur famille, de vivre convenablement.
    Vous avez soulevé plusieurs points intéressants. Je souhaite revenir sur ce qu'accomplit votre entreprise dans le domaine du développement social. Votre entreprise est-elle la seule dans son genre? En Colombie, y a-t-il d'autres entreprises qui oeuvrent dans le domaine du développement social? Nous avons beaucoup entendu parler du fait que les grandes entreprises pourraient donner de mauvaises conditions à leurs employés. Est-ce que de bonnes mesures sont prises?
    Oui. L'une des choses que nous avons fait, et l'ambassade canadienne y a participé , a été de rassembler des entreprises d'exploitation minière et d'autres entreprises de sorte que nous puissions appliquer des principes d'invitation à l'engagement, puis passer d'une stratégie philanthropique à une stratégie de responsabilité sociale préconisant le développement durable.
    Aucune entreprise privée ne peut remplacer l'État pour ce qui est de la promotion des droits et du développement. Ce que nous devons faire, c'est construire des institutions et renforcer la fonction publique, qui rendrait des comptes à la population, et qui serait compétente et honnête. Voilà le genre de choses qui seraient profitables à la société colombienne.
    Je laisserai le reste du temps qui m'était alloué à M. Holder, s'il en reste.
    Merci à nos invités. Je vous sais gré d'être présents aujourd'hui.
    Il y a tant de choses à dire, et si peu de temps.
    Je souhaiterais peut-être que ce soit vous, madame Hallé, qui me répondiez. Je ne vous ai pas beaucoup entendu parler aujourd'hui. Pourrais-je vous poser une simple question, que je ne veux aucunement idéologique? Croyez-vous qu'un accord de libre-échange, disons, entre la Colombie et le Canada, créerait nécessairement plus d'emplois, des deux côtés, et, à votre avis, un tel accord serait-il bon ou mauvais? D'après vous, une activité économique accrue créerait-elle plus d'emplois?

[Français]

    Cela créerait peut-être plus d'emplois, je ne le sais pas, mais il faut penser au type d'emplois que cela créerait. En Colombie, concrètement, ce qui se passe avec les projets de développement...
    Est-ce que je suis trop près du micro?

[Traduction]

    Excusez-moi. Mon intention n'est pas de vous interrompre, mais il ne reste que 30 secondes, alors je présumerai que c'est un « oui », en quelque sorte.
    Mme Tania Hallé: Non, excusez-moi. Mais c'est vraiment...
    Des voix: Oh, oh!

[Français]

    Excusez-moi, mais c'est pitoyable. Cette façon de procéder est vraiment irrespectueuse et déplorable.

[Traduction]

    Non, non. Non, je ne suis pas...
    Mais vous parlez des emplois... Je ne souhaite pas commencer à argumenter avec Peter Julian; je souhaite seulement m'adresser à vous, madame Hallé, et je ne veux pas interpréter vos propos...
    Des voix: Oh, oh!
    M. Ed Holder: Ce que je souhaitais dire, c'est que...
    Monsieur le président, c'est ridicule. Je ne suis pas ici pour débattre avec M. Julian à ce sujet.
    Je ne suis pas non plus ici pour argumenter avec vous, Peter. Je suis ici pour parler à nos invités.

[Français]

    Si c'est ce que vous voulez savoir, je ne sais pas si cela vaut la peine de créer ces emplois si, pour ce faire, on déplace des populations et on tue des femmes et des enfants.
(1655)

[Traduction]

    [Note de la rédaction: inaudible] ... nous allons devoir continuer.
    Je suis désolé. Vous manquez simplement de temps.
    Nous allons maintenant faire un deuxième tour de table rapide. Je crois que nous aurons le temps pour trois questions. Ces trois questions ne devront pas prendre plus de cinq minutes, et cela comprend les réponses.
    Je vais commencer avec M. Brison.
    Nous pouvons ensuite revenir à vous, monsieur Holder, si vous souhaitez poursuivre sur la question sans être interrompu.
    Pour le moment, nous laisserons la parole à M. Brison, pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à chacun de nos témoins d'aujourd'hui.
    Je vais commencer avec vous, monsieur Casey, qui êtes ici au nom de l'Association des produits forestiers du Canada. Votre industrie a vécu d'immenses difficultés au cours des dernières années et a connu d'importantes pertes d'emplois; des collectivités entières ont été affligées en raison du manque de possibilités et de la perte de marché.
    Croyez-vous que cette entente de libre-échange pourrait avoir des effets positifs en créant du travail et en protégeant des emplois dans des endroits comme la Colombie-Britannique, le Québec et les provinces de l'Atlantique?
    Absolument. Ce n'est pas une panacée. Ce n'est pas une solution magique qui fera disparaître le problème.
    Les marchés se referont. Nos marchés primaires doivent se refaire en premier. Nous avons encore besoin du marché des États-Unis pour nous relever. Nous avons besoin que le marché de l'habitation redevienne fort de sorte que nous puissions accroître notre présence dans le domaine du logement. Il faut que ce soit notre principal pilier.
    Bien sûr, le fait d'élargir nos marchés en Asie, en Chine et en Inde, dans ces pays où nous sommes actuellement des acteurs importants, est également une partie importante de l'équation. Mais tous les autres marchés que nous pouvons saisir au passage, comme celui de la Colombie, où vous réduisez les tarifs... Nous sommes déjà compétitifs là-bas. Nous pourrons nous montrer encore plus féroces envers nos plus grands concurrents, qui sont le Brésil, les États-Unis et l'Allemagne.
    Merci.
    Monsieur Ferro, merci beaucoup de vous être présenté devant nous aujourd'hui pour nous faire connaître votre point de vue, en tant que Colombien oeuvrant pour l'investissement responsable et travaillant dans les domaines des droits, des affaires et du commerce.
    Dites-vous que les investissements qui proviennent des entreprises canadiennes et qui visent à créer ces emplois dont la Colombie a besoin pourraient améliorer les conditions sociales en Colombie et stimuler là-bas l'investissement responsable dans le domaine de l'éducation?
    Oui, et pour ce qui est de l'aide... Par exemple, regardez l'autre côté de la médaille. L'année dernière, nous avons payé 70 millions de dollars pour des importations d'entreprises canadiennes. Je crois qu'il s'agit là d'un gros montant.
    Le genre de produits que nous importons du Canada, mis à part les camions et le matériel d'exploitation minière, sont également sur la table, et font aussi l'objet de consultations sur les droits de la personne et l'engagement social dans la collectivité. Là-bas, le Canada est un expert et a un rôle à jouer, et je crois que dans l'avenir, la Colombie aura besoin du genre d'expertise que le Canada peut lui offrir.
    Est-ce que la violence qui sévit en Colombie découle de la guerre civile, soit de cette guerre qui a d'abord éclaté en raison de croyances idéologiques, et qui ressemble maintenant davantage à une guerre de la drogue?
    Absolument. Le problème que posent les déplacements de population, c'est que les seigneurs de guerre qui contrôlent un territoire ont le monopole du commerce de la drogue; là-bas, donc on se bat pour contrôler son territoire.
    Dans ce sens, le professeur Giddens a dit, dans un article bien connu, qu'un territoire frontalier est un territoire où il n'y a aucune loi ni aucune institution d'État; c'est exactement ce qui se passe en Colombie. Dans plusieurs régions du pays, nous n'avons aucune présence de l'État: il n'y a aucune institution d'État, et l'État n'offre aucune aide, aucun service d'éducation ni aucun emploi susceptible de permettre à la population de bénéficier de conditions de vie convenables.
    Il y a trente ans, avant Cerrejón, aucun Colombien n'était expert de l'exploitation minière ou de l'exploitation du charbon. Maintenant, presque tous les employés qui se trouvent ici, c'est-à-dire 10 000 employés, sont des Colombiens. Ils ont été formés en Colombie et reçoivent des salaires convenables, qui leur permettent de vivre plus décemment.
    Croyez-vous qu'un engagement d'ordre économique et que des investissements étrangers pourraient aider la Colombie à se sortir de ce commerce de la drogue, qui se fait dans la violence?
(1700)
    Absolument, parce qu'il n'y a aucune culture qui soit aussi profitable que le commerce de la drogue.
    Monsieur Benedict, j'aimerais vraiment parler plus longtemps avec vous pour examiner les changements en profondeur. Vous avez commencé en disant que vous voyiez cela comme un signe positif. Puis, lorsque vous avez répondu à la question de M. Julian, vous avez dit que ce n'était pas crédible.
     Nous aurons la chance de discuter entre nous pour examiner la question en profondeur, et les membres du comité pourront se rencontrer chaque année pour recevoir des témoins comme vous et examiner le rapport, qui sera rédigé par des fonctionnaires canadiens; je doute que l'on cesse de vous voir comme un détracteur, bien que vous exigiez maintenant que chaque accord de libre-échange stipule tout cela. Il faudrait d'abord que l'une de vos organisations membres appuie un tel accord.
    Je serais certes heureux d'une telle possibilité. La politique a, entre autres, un rôle pédagogique. Si je pouvais vous aider à en apprendre davantage sur les avantages de cet engagement d'ordre économique pour les droits de la personne, je le ferais sans faute d'une façon ou d'une autre.
    Merci, monsieur Brison. Nous attendons ce moment avec impatience.
    Monsieur Holder, allez-vous recommencer? Nous avons cinq minutes de ce côté-ci. Vous en faites ce que vous voulez.
    Merci. Je crois que je vais poser d'autres questions, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Madame et messieurs les invités, encore une fois, je comprends ce que vous avez dit.
    Il y a deux ou trois semaines, nous avons accueilli Murad Al-Katib, un transformateur de la Saskatchewan, un exportateur de légumineuses, principalement, qui nous a parlé des difficultés liées à l'importation d'haricots rouges en Colombie. Il a dit que le tarif douanier pour les haricots rouges était de 60 p. 100.
    Ce qui est particulièrement important au sujet des haricots rouges, c'est qu'ils constituent l'aliment protéique de base des Colombiens. Il en a parlé avec beaucoup de passion, parce que l'un des défis que doit relever le Canada, c'est qu'il n'y a effectivement pas de marché pour le haricot rouge en Colombie en raison des difficultés associées aux tarifs. Il en a parlé presque comme s'il s'agissait d'un droit de la personne: comme s'il y avait une obligation de mettre entre les mains des Colombiens des aliments nutritifs et convenables. Son commentaire m'a beaucoup touché.
    Monsieur Casey, vous avez fait un commentaire différent. Vous n'avez pas beaucoup parlé des problèmes de tarif, même si vous en éprouvez dans certains domaines. Avez-vous effectué une étude pour comprendre les répercussions de l'accord de libre-échange sur les Canadiens et, au bout du compte, les Colombiens, si et quand la mise en œuvre de cet accord a lieu? Quelles seraient les répercussions sur les emplois pour les Canadiens et les emplois pour les Colombiens?
    Parce que, en passant, ne l'oublions pas, nous parlons d'un échange important entre nos pays et ce que nous disons maintenant, c'est qu'il faut mettre en place un système axé sur les règles assorti, je crois, de conditions importantes en matière de travail et d'environnement qui n'existent pas actuellement.
    Monsieur Casey, comprenez-vous ce que seraient les répercussions économiques de votre industrie?
    De notre côté, comme je l'ai dit plus tôt dans mon exposé, nous envisageons un marché d'environ 750 millions de dollars par année en produits forestiers, et c'est ce qu'ils importent. Si nous devenons plus compétitifs dans ce marché, nous augmenterons évidemment ce que nous vendons déjà là-bas, et qui vaut environ 60 millions de dollars.
    Donc, passer de 60 millions de dollars à n'importe quel montant supérieur sera utile. Cela permettra de conserver des scieries et peut-être d'ouvrir de nouvelles installations et de créer de nouvelles lignes de produits, selon le cas. Je crois qu'on peut dire sans crainte de se tromper qu'à tout le moins, des emplois seront conservés, mais je pense que les emplois augmenteront si nous obtenons un meilleur accès.
    L'autre point que j'aimerais soulever — et ça rejoint peut-être un peu ce que vous disiez à propos des haricots —, c'est que certains des produits que nous vendons là-bas sont une version d'un produit brut. Pour ce qui est de la pulpe, évidemment, on la transforme en d'autres produits. Il s'agit donc de vendre un produit brut à leur industrie de fabrication de papier, qui est évidemment en expansion, étant donné que leurs importations de pulpe augmentent à une vitesse incroyable, d'environ 17 p. 100 par année. Si je comprends bien, tout ce qui peut aider leurs industries à prendre de l'expansion localement avantagera leur économie et augmentera leur niveau de vie.
    Notre industrie paie en moyenne 47 000 $ par année, un assez bon salaire, alors je présume que si nous pouvons obtenir la même chose en Colombie, ce sera un assez bon salaire là-bas aussi. Je ne pense pas que les salaires seront aussi élevés, mais tout ce qui peut aider en ce sens, je crois, serait avantageux pour leur économie.
    Merci.
    Madame Hallé, je précise, pour le compte rendu, que mon intention n'était pas du tout de déformer votre position, alors je vous remercie. Même si j'ai été un peu confus à la fin, je ne veux certainement pas déformer votre point de vue. Je veux que cela soit très clair.
    Monsieur Ferro, vous vivez là-bas. Vous y êtes 12 mois par année. L'une des choses dont vous avez beaucoup parlé, c'est la responsabilité sociale des entreprises. Je n'en ai pas entendu beaucoup parler. Mais ce que je vous ai entendu dire plus tôt dans votre exposé, c'était que vous songiez à fonder un collège d'enseignement postsecondaire, de formation. Vous avez 10 000 employés à Cerrejón.
    J'essaie de comprendre pourquoi votre société ferait cela. Qu'est-ce qui a inspiré votre entreprise à choisir d'entreprendre cette démarche, qui me semble être une attitude assez progressiste envers les Colombiens? Pourriez-vous m'aider à comprendre, s'il vous plaît?
(1705)
    Il existe une raison très importante. Les ressources naturelles non renouvelables s'épuiseront un jour. Essentiellement, dans quelques années, il n'y aura plus de charbon à extraire de notre mine. Qu'arrive-t-il à la population quand il n'y aura plus de mine? Que feront les gens? Comment pourront-ils vivre? Quel genre d'emplois occuperont-ils?
    Nous devons créer une infrastructure industrielle qui permettra à la population d'avoir un niveau de vie élevé après la fermeture de la mine. Nous sommes dans l'industrie du développement durable. La seule façon d'y arriver, c'est de pouvoir créer une infrastructure industrielle qui ne dépend pas du charbon.
    Je comprends que vous vivez actuellement à Kanata, alors à moins que ce ne soit en Colombie, vous passez en réalité beaucoup de temps au Canada; je voulais préciser mes propres commentaires.
    Des élections auront lieu le 30 mai 2010. Nous avons vu des sondages récemment qui laissent entendre que cinq des meilleurs candidats à la présidence — et je crois comprendre qu'il y en a six — appuient l'accord de libre-échange, monsieur Ferro, et qu'environ moins de 5 p. 100 de la population appuie le Polo Democrático Alternativo, qui est contre le libre-échange. Avez-vous une opinion à savoir pourquoi 95 p. 100 de la population de la Colombie appuie les partis qui sont en faveur de l'accord de libre-échange?
    Il y a une raison fondamentale qui explique cela: nous croyons que les Colombiens sont un peuple de travailleurs. Nous travaillons fort et nous voulons améliorer notre qualité de vie. Nous savons que la seule façon de l'améliorer, c'est d'avoir des emplois, et de bons emplois. La seule façon d'y arriver, c'est d'intégrer une économie mondiale. Une façon d'y parvenir consiste à conclure des accords de libre-échange avec des pays comme le Canada.
    Je ferai une parenthèse. Une des choses qui me fait peur si nous ne signons pas cet accord de libre-échange est la suivante. Je vous ai dit que nos importations provenant du Canada se chiffraient à 70 millions de dollars l'an passé, et c'est une moyenne parmi les choses que nous achetons du Canada; la prochaine fois, nos importations proviendront du Brésil ou de la Chine. Je crois donc qu'il est extrêmement important et dans l'intérêt bien compris du Canada et des Canadiens de signer cet accord d'échange.
    Et j'imagine qu'il nous est permis d'avoir un petit intérêt bien compris dans le processus.
    Je vous remercie de votre témoignage, monsieur.
    Merci, monsieur Holder.
    Il nous reste du temps pour deux questions rapides, je crois.
    Monsieur Guimond, cinq minutes.

[Français]

     Bonjour à tous.
    Madame Hallé, je tiens à vous féliciter et à vous remercier de votre témoignage. Il était très éloquent et très clair, d'autant plus que vous avez l'expérience du terrain, en Colombie. Vous y avez passé plusieurs mois. Vous savez de quoi vous parlez, et c'est très éloquent. Je vous remercie encore une fois.
    Je suis agriculteur. Au cours de mon autre vie, j'ai été président d'un syndicat agricole. Si j'avais oeuvré en Colombie, je serais probablement sur la liste noire du gouvernement colombien. Je comprends ce qui se passe. Les déplacements de population touchent les familles, bien sûr, mais aussi les paysans et les agriculteurs.
    Dans le cadre de votre présentation, vous avez dit que le gouvernement finançait des déplacements de population. Pouvez-vous m'en dire un peu plus à ce sujet?
     Ce qui se passe, concrètement, c'est que l'armée, en collusion avec les paramilitaires, déplace les communautés paysannes lorsque des terres représentent un intérêt économique dans le cadre d'un éventuel projet de développement destiné à l'exportation. Il faut comprendre que ces communautés avaient une économie locale fonctionnelle, mais que celle-ci a été détruite. Ce ne sont pas des gens sans emploi à qui on a donné du travail. Ils avaient une économie fonctionnelle, mais l'armée les a déplacés parce que ces terres représentaient un intérêt économique. Ensuite, on finance les compagnies qui mettent en oeuvre des projets agro-industriels sur leurs terres. Ces paysans sont convertis en main-d'oeuvre bon marché dans les plantations. Non, leurs conditions de vie ne sont pas améliorées. Non, on n'a pas créé de bons emplois pour eux. C'est absolument faux.
    Au sujet du financement de ces entreprises par la financière agricole, on sait maintenant que plusieurs membres des CA de ces entreprises entretiennent des liens sérieux avec les groupes paramilitaires. C'est absolument déplorable. La principale compagnie de palme africaine dans le Bajo Atrato est Urapalma. Or, un des membres du comité directeur, Antonio Zúñiga Caballero, fait partie d'une famille reconnue pour ses liens avec le narcotrafic en Colombie. Les tentacules de cette famille se sont étendus jusqu'aux entités gouvernementales agraires. Sa fille, María Fernanda Zúñiga Chaux, était membre d'une autre entreprise de palme africaine dans le Curvaradó, mais elle était aussi directrice de Fido Agraria, une société fiduciaire de développement rural en Colombie. Cette entité, qui relève du ministère de l'Agriculture, a donné à l'entreprise Urapalma, dans laquelle est impliqué le père, l'équivalent de 1,85 millions de dollars canadiens en crédits de la banque agraire. Ça donne une idée de la façon dont les choses fonctionnent.
    Ces entreprises se sont établies sur les terres des communautés à la suite du déplacement forcé dont elles ont été victimes. La Brigade XVII de l'armée colombienne est directement impliquée. Elle s'est associée avec les paramilitaires pour effectuer ce déplacement forcé. Oui, il y a une responsabilité directe de l'État. Selon nous, l'application d'un traité de libre-échange entre le Canada et la Colombie ne fera qu'empirer ce genre de situation. C'est de cette façon qu'on met en oeuvre les projets de développement, dans ce pays.
(1710)
    Je respecte ce que disent les autres personnes autour de cette table, mais on dit qu'une entente de ce genre va améliorer la santé économique du pays et créer des emplois. J'aimerais que vous preniez le temps restant pour nous dire, selon l'expérience que vous avez acquise sur le terrain, en Colombie, quels seraient les bienfaits d'une telle entente en Colombie. Y en a-t-il?
    Ils sont très difficiles à voir. En effet, comme je le disais plus tôt, les communautés avec lesquelles nous travaillons avaient une économie locale fonctionnelle. Elles produisaient les denrées agricoles; elles allaient les vendre sur le marché local, puis sur le marché à l'échelle nationale. Pour ce qui est d'un accord de libre-échange, premièrement, on sait que les marchés agricoles des pays du Sud — et ce n'est pas seulement le cas de la Colombie — sont inondés par les denrées agricoles du Nord. Les paysans n'arrivent plus à écouler leur stock sur le marché local. On étouffe leur économie. C'est sans compter le fait qu'on a confisqué leurs terres pour mettre en oeuvre des projets agro-industriels comme celui de la palme africaine. Celle-ci est destinée à l'exportation. Soit dit en passant, la palme est destinée aux marchés européen et nord-américain, sous forme d'agrocombustible.
     Ces paysans sont transformés en travailleurs précaires dans les plantations. En fait, je devrais plutôt parler d'un nouvel esclavage. En effet, dans les plantations, les travailleurs ne gagnent même pas de salaire. En échange de leur travail, ils reçoivent des bons qui leur permettent d'obtenir leurs denrées alimentaires dans des magasins qui appartiennent aux mêmes entrepreneurs, donc aux compagnies de palme. On retourne à l'époque de la colonisation. C'est un nouvel esclavage. C'est la façon dont les projets de développement sont mis en oeuvre, en Colombie. On ne croit pas qu'un accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie améliorerait la situation. Je ne vois vraiment pas comment ce serait possible.

[Traduction]

    Merci.
    Vous pouvez poser une question très brève, monsieur Cannan. Vous avez deux ou trois minutes et ensuite M. Brison conclura.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins.
    J'ai une question rapide pour M. Casey. Je viens de la Colombie-Britannique, je représente le comté de Kelowna—Lake Country dans l'Okanagan, tout comme M. Julian, qui vient de la Colombie-Britannique, et je sais que la foresterie est un grand moteur économique. Je sais qu'il l'est en Ontario et au Québec.
    Je crois comprendre, à la suite de rencontres avec des gens de l'industrie forestière, que le plus grand avantage de cet accord c'est qu'il fournira de la certitude, que ce sera un échange axé sur des règles, que les investisseurs auront donc une certaine confiance et certitude. Pourriez-vous préciser ce que cela signifie pour les secteurs forestiers de ces provinces en particulier?
(1715)
    Oui. En particulier, le papier journal nous donne une grande certitude. Il n'y a pas de tarif à ce sujet pour l'instant, mais c'est une assurance. La Colombie pourrait obtenir un tarif en vertu de l'OMC d'environ 35 p. 100 tout au plus, je crois, et cela pourrait survenir n'importe quand. Cela garantit le taux nul sur le papier journal.
    Les autres domaines donnent une certitude en ce sens où une fois que tous les tarifs seront abolis, il s'agira fondamentalement d'une concurrence. Essentiellement, on peut être aussi productif que possible et faire mieux que ses compétiteurs dans d'autres pays. Nous sommes pas mal bons dans ce domaine, alors nous sommes assez confiants de pouvoir tirer avantage de ce nouveau marché. C'est une diversification.
    Je ne peux pas dire d'où proviennent les produits, mais si on augmente la proportion pour une région du pays, ils diversifieront leur produit là-bas. Cela fait de la place à d'autres domaines dans d'autres régions du pays. Il y a habituellement un équilibre parce que nous sommes un marché très global.
    Certitude et stabilité, comme l'accord sur le bois d'oeuvre...
    Absolument.
    Une voix: Oh, oh!
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Je crois que nous avons le temps pour une brève question. Vous pouvez prendre deux ou trois minutes, monsieur Brison, et ensuite nous conclurons.
    J'aimerais demander à chacun de vous quel rôle jouent les FARC en Colombie quant à la violence faite aux Colombiens, ainsi que le rôle du commerce de la drogue quant à la violence faite aux Colombiens.
    Deuxièmement, j'aimerais demander à M. Ferro qu'il nous parle du rôle du Venezuela dans l'accueil des FARC, du rôle de l'administration d'Hugo Chavez dans l'accueil des FARC — vous exercez des activités sur la frontière avec le Venezuela — et de manière plus générale, de la menace récente exprimée par M. Chavez de mettre fin au commerce avec la Colombie et de l'incidence que cette décision aurait sur l'économie.
    Troisièmement, monsieur Ferro, le président Uribe est président de la Colombie depuis 2002, et Hugo Chavez est à la tête du Venezuela depuis 1999. Pouvez-vous décrire ce qui s'est produit dans chacun de ces pays et nous dire si les choses se sont améliorées sous Chavez au Venezuela de même que sous le président Uribe en Colombie?
    Je suis désolé. Nous n'aurons peut-être pas la chance d'entendre les réponses. Les lampes clignotent pour indiquer que la Chambre des communes est sur le point de passer à un vote. Les députés doivent retourner sur la Colline du Parlement. Il nous faudrait obtenir un consentement unanime du comité pour poursuivre, même pour obtenir une réponse à cette question. Y a-t-il un consentement unanime...?
    Il n'y a pas de consentement unanime.
    Nous n'avons pas besoin de discours, merci.
    Il ne me reste plus qu'à conclure. Je regrette, monsieur Ferro, que vous n'ayez pas eu la chance de répondre à cette excellente question. Je vous remercie beaucoup de votre participation.
    Également, à notre groupe d'invités, je regrette que le temps soit aussi limité et que vous ne soyez pas toujours en mesure de terminer vos réponses. Je vous remercie d'avoir été des nôtres.
    C'est tout pour aujourd'hui. Nous nous reverrons jeudi.
    La séance est levée
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