RNNR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des ressources naturelles
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 7 mai 2015
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour à tous.
Nous continuons aujourd'hui notre étude du renouveau de l'industrie forestière canadienne. Il s'agit d'une étude qui fait suite à celle effectuée par le Comité des ressources naturelles et qui a été présentée au Parlement en 2008. Nous allons entendre des témoins de différents milieux et régions du pays au sujet de l'industrie.
Nous allons écouter cinq témoins.
Nous accueillons Ben Voss, président et directeur général du Meadow Lake Tribal Council Resource Development LP. Nous vous souhaitons la bienvenue, monsieur. Nous recevons aussi, à titre personnel, le professeur Sudip Kumar Rakshit, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les processus de bioénergie et de bioraffinage à l'Université Lakehead. Soyez le bienvenu, monsieur. Nous accueillons également M. Sain, doyen et professeur à la faculté de foresterie de l'Université de Toronto. Bienvenue, monsieur. Nous recevons aussi M. Derek Gray, qui est professeur au département de chimie de l'Université McGill.
Nous allons également entendre par vidéoconférence depuis Vancouver, en Colombie-Britannique, Yvon Pelletier, président de Fortress Specialty Cellulose Inc. — bienvenue — et Marco Veilleux, vice-président du développement des affaires et projets spéciaux. Soyez le bienvenu, monsieur.
Ce sont là nos témoins pour aujourd'hui.
Comme à l'habitude, nous allons entendre d'abord les témoins selon l'ordre qui figure dans l'ordre du jour, et ensuite nous passerons aux questions et observations des membres du comité.
Vous disposez de sept minutes au plus pour présenter votre exposé. J'aimerais que vous respectiez tous cette durée, car, comme nous avons cinq exposés, cela représente passablement de temps. Nous voulons laisser suffisamment de temps aux membres pour poser des questions.
Nous allons commencer par M. Voss, président et directeur général du Meadow Lake Tribal Council. Allez-y, s'il vous plaît. Vous disposez de sept minutes.
Je vous remercie beaucoup. Bonjour et merci au comité de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui.
L'organisation que je représente aujourd'hui, MLTC Resource Development, s'intéresse vivement au renouveau de l'industrie forestière canadienne et à l'avenir de cette industrie, qui est l'une des plus anciennes au Canada. MLTC signifie Meadow Lake Tribal Council, comme le président l'a mentionné. L'organisation appartient à neuf collectivités des Premières Nations du nord-ouest de la Saskatchewan. Il s'agit d'un partenariat qui investit des capitaux privés et qui détient plusieurs entreprises en Saskatchewan et en Alberta. Nous investissons majoritairement dans l'industrie forestière et nous possédons également des immeubles, des hôtels, des entreprises de distribution d'engrais et de camionnage et des sociétés qui offrent des services de télécommunications.
Les chefs et les conseils des neuf Premières Nations ont la réputation d'exercer une gouvernance rigoureuse et de ne pas mélanger les affaires et la politique. Je suis fier de dire que, même si je n'appartiens pas à une Première Nation, j'éprouve un très grand sentiment d'humilité à travailler pour une organisation qui aide les Autochtones du Canada à contribuer à l'économie et à favoriser ainsi la prospérité. C'est principalement parce que nous sommes propriétaires que nous connaissons un si grand succès dans l'industrie forestière. Nous sommes propriétaires de la scierie, de la compagnie de gestion forestière, de l'entreprise d'exploitation forestière et de camionnage et nous contrôlons les activités de transformation à valeur ajoutée. En tant que propriétaires, nous contrôlons aussi l'exploitation de la ressource, la planification, les infrastructures et la façon dont les retombées profitent à la région.
Notre principale entreprise est NorSask Forest Products, qui est une usine de fabrication de montants à la fine pointe de la technologie et à grande production. Nous produisons annuellement 135 millions de pieds-planches et nous allons accroître cette production grâce à des investissements constants dans la technologie et l'innovation. Nos deux par quatre et nos deux par six de grande qualité sont vendus partout en Amérique du Nord et recherchés par nos clients en raison de la qualité exceptionnelle de nos produits, de notre excellent service à la clientèle et de notre très bonne réputation.
NorSask est l'une des quelques scieries qui n'ont pas fermé leurs portes à cause du ralentissement économique et elle est demeurée rentable et prospère dans un contexte des plus difficiles. NorSask emploie directement près de 200 travailleurs, dont 75 % sont des Autochtones, et près de la moitié de ceux-ci appartiennent à une Première Nation et sont assez jeunes.
Le nombre d'emplois régionaux dans les domaines de la planification, de l'exploitation, du transport, de l'entretien et de la transformation dépasse le millier, et un grand nombre de ces emplois sont occupés par des membres des Premières Nations. Tous ces emplois sont liés au rôle que jouent NorSask et MLTC sur le plan de la gestion forestière.
Malgré notre succès et notre résilience, nous subissons des pressions sans précédent en raison de l'accès limité au marché, des problèmes d'infrastructure, de l'absence de service ferroviaire, des faibles quotas, des coûts élevés de la main-d'oeuvre, de la pénurie de travailleurs dans les métiers spécialisés et de la concurrence de la part de multinationales étrangères pour l'obtention de ressources gouvernementales.
En 2007, nous avons constaté que l'industrie forestière devait se transformer. Les marchés du bois d'oeuvre s'effondraient. Le modèle traditionnel selon lequel une scierie et une usine de pâte à papier vont de pair n'était tout simplement plus viable. Pour demeurer rentables, les usines de pâte à papier ont besoin d'obtenir les copeaux à pâte, un sous-produit des scieries, à faible coût ainsi que d'importantes subventions gouvernementales pour pouvoir assumer les coûts des capitaux et de l'électricité. Les marchés de la pâte à papier diminuaient et, par conséquent, des usines de pâte à papier mettaient la clé sous la porte et l'avenir était incertain. Les usines de pâte à papier sont censées utiliser des essences de bois dur afin que les scieries puissent avoir accès au bois résineux.
La qualité du bois d'oeuvre dépend de la qualité de la fibre, et en Saskatchewan, nous trouvons la meilleure fibre au monde. Nous n'avons pas encore été touchés par le dendoctrone du pin, et les marchés le savent. Pourtant, nous dépendons encore des usines de pâte à papier, qui appartiennent habituellement à des intérêts étrangers, pour vendre notre bois dur et nos copeaux à pâte. Cette situation ne changera pas à moins que nous modifiions notre modèle.
Depuis 2013, nous avons investi plus de 20 millions de dollars dans la modernisation, l'expansion et la recapitalisation de notre scierie. Nous avons donc investi dans l'innovation parce que nous sommes confiants que le bois d'oeuvre sera toujours un produit très en demande, malgré les cycles du marché.
Selon nous, notre avenir dépend de notre capacité à accroître la valeur de nos ressources forestières plutôt que de miser uniquement sur le bois d'oeuvre et la pâte à papier. Nous devons trouver une utilisation pour tous les éléments, y compris une utilisation à valeur ajoutée de nos déchets. Nous nous sommes concentrés sur la bioénergie, en particulier la production d'électricité et de granules de bois. La production de granules de bois est assez simple, mais il faut trouver des marchés pour ce produit. D'un autre côté, il est très difficile de se lancer dans la production d'électricité sans la collaboration de la société d'électricité locale. Dans notre province, SaskPower est la société d'État provinciale qui détient le monopole dans le marché réglementé. En 2013, nous avons réussi à signer une entente d'achat d'électricité pour la construction d'une centrale à la biomasse de 36 mégawatts, qui sera la première du genre en Saskatchewan.
En 2014, nous avons entrepris la construction de la première usine de fabrication de granules de bois en Saskatchewan, conçue pour produire 10 000 tonnes par année de granules de première qualité utilisées pour le chauffage résidentiel et le nettoyage des déversements dans l'environnement. Nous croyons fermement que cette usine pourra être agrandie, car nous continuons de trouver de nouveaux débouchés en Amérique du Nord.
Il faut mentionner que les scieries qui appartiennent à des Premières Nations ne sont pas admissibles à un grand nombre de programmes de financement fédéraux ou provinciaux. Tout cela est donc possible grâce à des investissements privés. Nous ne pouvons pas bénéficier de la déduction pour amortissement accéléré, du crédit d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental, du programme d'aide à la recherche industrielle ni de tout autre programme de financement de l'innovation, et l'accord sur le bois d'oeuvre interdit habituellement le financement direct par le gouvernement des scieries. Ainsi, ce sont nous et des intérêts privés qui devons investir dans l'innovation, ce qui nous désavantage énormément par rapport au reste du secteur forestier et limite l'investissement dans l'innovation.
Je ne peux pas vous quitter aujourd'hui sans mentionner l'accord sur le bois d'oeuvre. On oublie souvent la Saskatchewan lorsque des ententes sont négociées avec le Canada. Notre quota n'est pas assez élevé. À l'heure actuelle, trois scieries sont en exploitation, mais une seule usine suffit pour atteindre le quota fixé. Dans d'autres provinces, comme la Colombie-Britannique — je ne vais pas toutes les nommer, mais il y en a plusieurs, on n'atteint pas les quotas. Les négociateurs ne semblent pas vouloir aider la Saskatchewan, car ils craignent qu'en modifiant l'accord on mette en péril le fragile consensus. C'est pourquoi ils estiment qu'il vaut tout simplement mieux maintenir le statu quo.
Nous recommandons fortement que l'accord sur le bois d'oeuvre soit restructuré afin que la Saskatchewan obtienne sa juste part. Transférer des quotas n'entraîne aucune perte d'emplois dans les autres provinces, mais si nous n'augmentons pas le quota de la Saskatchewan, cette province pourrait perdre un millier d'emplois.
En résumé, voici ce que je recommande au comité: créer des programmes de soutien financier et des incitations à l'investissement dans des produits forestiers diversifiés dont peuvent profiter les entreprises qui appartiennent à des Premières Nations; mettre l'accent sur le financement de programmes de formation dans les métiers spécialisés comme Northern Career Quest, qui est une très belle réussite selon nous; veiller à soutenir la propriété communautaire au Canada, en offrant notamment des garanties de prêts ou d'autres programmes de financement; équilibrer les quotas fixés dans l'accord sur le bois d'oeuvre afin de soutenir les scieries de la Saskatchewan sans causer du tort aux provinces qui ont des quotas excédentaires; accroître et améliorer les programmes de financement fédéraux pour les technologies novatrices afin d'encourager l'investissement canadien et la mise au point de technologies de pointe.
Je vous remercie d'avoir pris le temps de m'écouter. Je répondrai du mieux que je peux à vos questions.
J'espère que notre histoire sera utile au comité et que nous pourrons prouver que l'innovation dans l'industrie forestière existe bel et bien au Canada.
Je vous remercie.
Je vous remercie beaucoup pour votre exposé.
Notre deuxième témoin est le professeur Kumar Rakshit, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les processus de bioénergie et de bioraffinage de l'Université Lakehead.
La parole est à vous, monsieur, pour sept minutes.
Premièrement, j'aimerais dire que les professeurs font habituellement des exposés d'une heure...
Des voix: Oh, oh!
M. Sudip Kumar Rakshit: ... avec des présentations PowerPoint, mais on nous a dit de nous en tenir aujourd'hui à six ou sept minutes. Je vais faire de mon mieux pour ne pas dépasser les sept minutes.
Deuxièmement, je tiens à mentionner que je me suis établi au Canada il y a trois ans, alors j'ai une vision d'ensemble et une vision critique, qui n'est peut-être pas très patriotique, ce qui signifie que certains de mes propos pourraient déplaire, mais c'est mon point de vue.
Troisièmement, je ne suis pas un forestier, mais plutôt un ingénieur chimiste qui essaie d'élaborer des produits à valeur ajoutée fabriqués à partir de produits du bois et de la cellulose, comme les déchets agricoles. C'est dans ce domaine que je travaille. Je ne m'occupe pas des forêts; j'essaie d'utiliser le bois qui provient des forêts.
Comme toute industrie agroalimentaire, l'industrie forestière subit des cycles. Nous espérons qu'elle est en train de sortir d'un cycle de ralentissement pour entrer dans un cycle plus positif grâce aux ventes réalisées par la Colombie-Britannique en Chine. Hier, on a mentionné que la plateforme de transactions en renminbis pour le commerce avec la Chine sera profitable, mais mon collègue vient de me dire que l'approvisionnement de la Chine par la Russie causera du tort à la Colombie-Britannique. Il existe cependant d'autres façons d'augmenter nos ventes et de faire croître l'industrie. Il y a bien entendu les granules de bois, si le marché du logement aux États-Unis reprend, mais nous devons prendre dès maintenant des mesures stratégiques pour le long terme afin d'être de la partie. C'est ce que je crois.
Pour ce qui est de la bioénergie et des substances biochimiques, il y a trois choses importantes à ne pas oublier lorsqu'il s'agit d'en produire à partir du bois. Il faut premièrement avoir la technologie nécessaire. Dans bien des cas, nous l'avons, mais elle coûte trop cher. Un bon exemple est la production d'alcool à partir du bois. C'est possible sur le plan technique, mais pas à un prix abordable du point de vue des ventes. Il faut avoir la technologie, il faut la rentabilité et une réglementation adéquate. Dans ce contexte, c'est possible, et je vais vous en dire un peu plus long à ce sujet.
Premièrement, parmi les facteurs qui limitent le développement de la bioénergie et de substances biochimiques à partir du bois, il y a le transport du bois de la forêt à la scierie, qui coûte au Canada entre 100 et 120 $ par tonne. À lui seul, ce coût nous rend moins compétitifs que des pays émergents, où ce transport est beaucoup moins cher.
Deuxièmement, il y a la nature de la matière première du point de vue de la technologie. Nous fabriquons au Canada beaucoup de produits à partir d'amidon. Nous fabriquons également beaucoup d'éthanol et d'autres produits à partir d'huiles végétales, mais en fabriquer à partir de la cellulose constitue toujours un problème. C'est en raison de la nature même de cette substance, et nous n'y pouvons rien. La cellulose et la lignine sont composées de molécules très difficiles à travailler, et c'est pourquoi nous ne sommes pas en mesure de fabriquer des produits avec ces substances à un prix concurrentiel.
Troisièmement, des pays émergents comme le Brésil, l'Inde et la Chine en fabriquent un grand nombre à des prix que nous ne pouvons pas égaler.
Quatrièmement, il y a l'industrie pétrolière et le prix du brut. C'est très important dans le contexte actuel. Il y a des répercussions non seulement sur les carburants de transport, comme la plupart des gens le pensent, mais aussi sur quelque 5 000 produits, car le pétrole brut entre dans la fabrication de produits de plastique de tous les jours. Il n'y a pas que le transport. Je vais d'ailleurs vous donner un exemple qu'on mentionne souvent au Canada. Dans l'industrie pétrolière, 4 % du pétrole produit sert à fabriquer des plastiques et le reste est utilisé pour les transports. Ce 4 % permet de générer 40 % des profits de l'industrie. C'est ce que nous devrions faire dans le cas du bois, c'est-à-dire essayer de voir si nous ne pourrions pas fabriquer des produits de plus grande valeur que la pâte à papier et le papier pour occuper une plus grande part du marché.
Je vais parler maintenant de certains produits qui en sont à différentes étapes du développement. Je ne peux pas les nommer tous, mais je vais en mentionner quelques-uns. Il y a notamment le biobrut, qui est produit actuellement par une compagnie pétrolière au Canada. À partir du bois, on peut faire un produit dont les caractéristiques sont similaires à celles du pétrole, et on peut en tirer un certain nombre d'autres produits. Il y a aussi le polystyrène et l'acide succinique. Nous parlons tous de la production d'acide succinique et d'ambre à Sarnia, mais il faut savoir qu'on ne produit pas ces substances à partir du bois ou de la cellulose, mais bien à partir de fécule de maïs, ce qui est différent et beaucoup plus facile à faire. Nous devons alors examiner les autres types de produits que nous avons.
Il y a des produits chimiques en vrac qu'on peut produire en grandes quantités et à un faible coût. Il y a aussi des produits chimiques qu'on produit en petites quantités, car le coût est élevé, et il y a des produits qui se trouvent entre les deux. Après de nombreuses discussions, les gens dans mon domaine ont conclu qu'il faut trouver un juste milieu parce que nous ne serons probablement pas en mesure de produire ces deux premiers types de produits avec succès. Nous ne serons peut-être pas en mesure de produire des produits chimiques en vrac, car les profits ne sont pas élevés, et nous ne pouvons pas concurrencer certains des pays émergents. L'idée de produire du bouleau pour le traitement du cancer est sans doute bonne, mais les quantités seront très petites. Il faut donc miser sur les produits intermédiaires, comme les fibres cellulosiques ou certains polyalcools, qu'on trouve sur le marché.
Le Canada a une longueur d'avance sur le plan de la production de certains de ces produits. Il a notamment une longueur d'avance pour ce qui est de la production de nanocellulose, mais comme ce n'est pas un produit chimique qu'on peut vendre en vrac, les revenus sont moindres.
En raison de problèmes comme le changement climatique, on risque un jour de... Le désinvestissement dans l'industrie pétrolière pourrait nous faire voir le bois d'une autre manière, sur les plans économique et social. On parle toutefois ici de produits qui en sont à différentes étapes de développement.
Pour terminer, j'aimerais faire quelques suggestions dont vous pouvez tenir compte si vous avez à prendre des décisions. Il y en a cinq.
Premièrement, nous, les scientifiques, croyons que nous ne devrions pas travailler sur la production d'éthanol, parce que cela ne nous rapportera rien — à tout le moins dans le cas de la production à partir de la cellulose. Nous pouvons en produire avec du maïs, du blé et d'autres produits au Canada. Même dans le cas des autres produits, nous devons attendre que le prix du pétrole remonte. À 60 $, et même à 120 $, certains des produits ne sont pas rentables. À 60 $, il est certain que ce n'est pas rentable.
Deuxièmement, pour ce qui est des granules de bois, nous en exportons en Europe parce que les pays européens en achètent. Même si nous en exportons depuis la Colombie-Britannique en contournant le Golfe du Mexique, les pays européens sont disposés à en acheter. Dans ma ville, Thunder Bay, nous importons des granules de la Norvège ou du Texas, qui sont ce qu'on appelle des granules perfectionnées. En tant que scientifique et citoyen de cette municipalité, je me suis adressé à bien des gens pour obtenir du financement qui permettrait de produire ces granules perfectionnées, qui peuvent être exposées à la neige et à la pluie et être tout de même utilisées efficacement pour le chauffage.
Nous exportons à l'étranger des granules de bois ordinaires, mais nous importons au Canada des granules de bois perfectionnées. Si nous avions la technologie nécessaire pour produire des granules perfectionnées, nous pourrions en utiliser davantage sans avoir besoin d'en importer à un prix élevé. Cela vaut pour d'autres produits également. Il suffit simplement d'avoir la technologie. Si la Norvège et d'autres pays peuvent en produire, nous pouvons en produire également. Il faut seulement faire le nécessaire pour y parvenir.
Troisièmement, certaines des organisations représentées ici aujourd'hui fabriquent des produits de cellulose dissoute. De nombreuses entreprises au Canada produisent de la cellulose dissoute qu'elles exportent à l'étranger pour la fabrication de la rayonne, que le Canada importe ensuite. Quand je réfléchissais à cela ce matin, je me suis dit que les rôles sont complètement inversés. Je suis originaire de l'Inde, et à l'époque de l'occupation britannique, les Anglais exportaient le coton de l'Inde au Royaume-Uni pour en faire des tissus qu'ils revendaient ensuite en Inde. Mahatma Gandhi n'approuvait pas cela et disait que les Indiens ne devaient plus acheter ces tissus.
C'est exactement ce que nous faisons au Canada. Nous exportons en vrac de la cellulose dissoute en Inde, au Brésil ou dans d'autres pays, où on l'utilise pour fabriquer de la rayonne et nous achetons ensuite la rayonne à un prix plus élevé que celui de notre propre matière première. Je me demande alors pourquoi certaines de ces entreprises, appuyées par le gouvernement et certaines politiques, ne fabriquent-elles pas ce produit à valeur ajoutée ici? Pourquoi pas? Comment pouvons-nous permettre qu'un de nos produits soit exporté à l'étranger pour qu'il serve à fabriquer un produit à valeur ajoutée, que le Canada importe ensuite?
Il existe beaucoup d'autres exemples de la sorte. Les déchets solides de la Ville de Toronto sont envoyés aux États-Unis. La Ville paie pour expédier les déchets solides aux États-Unis, où ils sont envoyés dans un site d'enfouissement. Avec ce revenu, les États-Unis cultivent par exemple des tomates, qui sont vendues à Toronto. On se trouve alors à payer deux fois. On paie pour expédier les déchets solides et on paie ensuite pour les tomates, alors que tout pourrait être fait ici.
C'est très facile à comprendre. C'est la même chose que nous faisons avec la cellulose dissoute que nous vendons en vrac.
Quatrièmement, lorsque je suis arrivé au Canada, j'ai été nommé titulaire d'une chaire de recherche, car à Thunder Bay — je vous donne ici un exemple classique — il y avait cinq papetières; mais quatre d'entre elles ont fermé leurs portes. On nous a demandé de mettre sur pied un institut de recherche qui s'appelle le Biorefining Research Institute. Nous voulions donner une autre signification au mot « valeur ajoutée », mais lorsque nous nous adressons aux organismes de financement gouvernementaux, on nous dit qu'il faut amener une industrie à contribuer à la recherche à hauteur de 50 %.
On dit que les professeurs demandent toujours de l'argent. Comment puis-je obtenir ces 50 %? Est-ce que je m'adresse à l'usine Résolu à Thunder Bay, qui tire le diable par la queue, et je lui dis « J'ai une excellente idée, et j'ai besoin de votre soutien ». Elle me répondra qu'elle n'a ni le temps ni l'argent pour contribuer ne serait-ce qu'à hauteur de 20 % ou 30 %. Alors comment puis-je obtenir l'argent pour mener la recherche?
Je ne vous dis pas de donner comme ça de l'argent aux professeurs. Je sais qu'il y en a qui prennent l'argent et qui n'aboutissent à rien. D'un autre côté, les industries ne peuvent pas penser s'approprier cet argent. Il faut donc mettre en place un mécanisme qui fasse en sorte qu'on essaie à tout le moins d'arriver à un résultat afin d'éviter qu'on se contente d'empocher seulement l'argent. Dans notre cas, du moins à Thunder Bay, parce que nous sommes loin des grandes villes, trouver un partenaire industriel qui nous aiderait à réaliser un bon projet axé sur l'industrie relève pratiquement de l'impossible. Tous les organismes de financement nous disent que l'industrie doit assumer entre 40 et 50 % du coût de la recherche.
En dernier lieu, je dirais que nous devons sortir un peu des sentiers battus. Produire des substances biochimiques, aux yeux d'un travailleur d'une papetière, cela signifie seulement produire de la liqueur noire et de la liqueur blanche. Peut-être faut-il aller un peu plus loin. C'est ce que je voulais dire lorsque j'ai parlé de prendre des décisions stratégiques. Je vais terminer en citant un ministre saoudien du pétrole, qui aurait dit ceci: « L'âge de pierre n'a pas pris fin parce qu'il n'y avait plus de pierres ».
C'est pourquoi j'ai dit au début que nous devrions examiner de façon stratégique ce que nous devrons faire avec notre bois lorsque l'ère du pétrole sera révolue. C'est ce que j'ai essayé de faire valoir en vous donnant quelques exemples.
Je vous remercie beaucoup. Je n'ai pas parlé pendant une heure, mais peut-être pendant huit minutes.
Je vous remercie beaucoup, monsieur, pour votre exposé.
La parole est maintenant à M. Sain, doyen et professeur à la faculté de foresterie de l'Université de Toronto.
Je vous remercie beaucoup, monsieur, d'être ici avec nous aujourd'hui.
Je vous remercie de m'accueillir. C'est un plaisir pour moi d'être ici aujourd'hui.
Avant de commencer notre discussion, j'aimerais d'abord présenter un exposé qui s'appuie sur mon expérience des différentes industries forestières dans le monde.
Les forêts constituent l'une des plus importantes ressources du Canada. Nous abritons environ 10 % des forêts du monde et 27 % de la forêt boréale planétaire. C'est l'une de nos ressources les plus précieuses, à l'instar des ressources minières, pétrolières et autres. Je pense qu'il est temps de voir nos ressources naturelles non pas comme un produit, mais plutôt comme une technologie de pointe à valeur ajoutée et comme un service.
Nous vivons aujourd'hui dans un monde où tout est mondial. Il n'y a pas de différence entre l'Est et l'Ouest, le Sud et le Nord, la Chine et l'Inde ou le Brésil et le Canada. Par conséquent, je vous recommanderais d'abord et avant tout, même si vous examinez l'industrie du bois d'oeuvre résineux et l'accord sur le bois d'oeuvre conclu avec les États-Unis, de trouver des façons, par l'entremise de la réglementation et des politiques, d'aider cette industrie conventionnelle et très rentable à exploiter des marchés autres que les États-Unis, en particulier la Chine, l'Inde, le Brésil, la Colombie — qui est devenue un marché très important — et le Chili.
Nous devons réfléchir à la façon d'accaparer une part de ces marchés. La Chine est le marché le plus important; nous ne pouvons pas le nier. L'Inde est le second plus important, et pourtant, nous ne l'avons pas encore exploité. C'est un point important que je veux souligner.
J'aimerais aussi insister sur le fait qu'en tant que doyen de la Faculté de foresterie, je connais de nombreux aspects de la foresterie et je sais ce qui souvent n'est pas envisagé comme étant un produit forestier. Par exemple, les sous-produits d'une papetière que nous transformons près de Montréal ont une valeur beaucoup plus élevée que la fibre conventionnelle parce que nous sommes dans une économie mondiale et que la Malaisie, l'Indonésie et le Brésil produisent de l'eucalyptus qui coûte environ 40 à 50 $ la tonne. Je parle de deux matières simples produites par l'industrie des pâtes et papiers. Il y a premièrement la lignine, qu'on appelle la liqueur noire. Mes chers collègues savent tous qu'on utilise le terme liqueur noire. La deuxième est la fibre.
Au Canada, nous savons très bien faire du papier et des bateaux. Nous devrions penser autrement et utiliser ces produits très précieux d'une façon différente. Dans le cas de ces deux ressources, il faudrait procéder à une transformation sur le plan de la technologie tout comme dans le domaine du commerce ou des affaires.
Comment encourager une telle transformation? Tout d'abord, nous avons beaucoup de gens brillants. Je suis fier d'être un citoyen canadien. Je sais que nous avons des gens de talent d'un océan à l'autre. De la Colombie-Britannique au Québec en passant par l'Alberta et l'Ontario, on trouve la plus importante diversité dans le monde. Je peux vous le garantir parce que j'ai voyagé aux quatre coins de la planète.
Si des jeunes proposent une idée nouvelle qui permet d'utiliser un produit de la forêt ou la biomasse forestière, donnez-leur la chance d'exploiter cette idée et de la faire adopter par le milieu des affaires.
Qu'est-ce que je veux dire exactement? Je veux dire que vous devez être stratégiques; vous ne pouvez pas soutenir tout le monde. Il faut établir un lien entre l'industrie forestière et les grandes industries du pays. Je parle des industries de la spectrochimie, de l'automobile, de l'emballage, de l'électronique et de la biomédecine.
Personnellement, je crois que si ces deux matières, la lignine et la fibre, sont bien transformées, d'une façon novatrice, chaque industrie peut en bénéficier, et l'ensemble du pays également, non seulement sur le plan de l'économie et de la création d'emplois, mais aussi pour ce qui est de notre réputation dans le domaine de la protection de l'environnement, ce qui ferait de nous un chef de file mondial.
Je signale certains des produits en question, particulièrement les dérivés de la cellulose, comme celui que j'ai nommé: un dérivé à valeur ajoutée de la cellulose dissoute, comme la rayonne. Si on va plus loin, on obtient une fibre de carbone. On peut l'obtenir à partir de la lignine, l'un des matériaux intervenant à point nommé dans l'industrie des transports.
Le Boeing 787 d'aujourd'hui est plus léger de 40 % que celui d'hier. Ses ailes sont plus légères. Il brûle moins de carburant. La fibre particulière de carbone qui permet ce rendement peut provenir de la lignine.
Autre exemple: nos automobiles emploient des dérivés de la biomasse forestière sous forme de micro- et de nanofibres. Ce n'est pas la première fois que, au Canada, on se sert synergiquement des biotechnologies et des nanotechnologies et qu'on les commercialise. Nous sommes les chefs de file de la bioéconomie et nous devons améliorer notre position comme nous le pouvons.
Autre point que je tiens à mentionner: pour faciliter l'innovation et la commercialisation aux établissements de recherche, aux universités, il faut encourager les jeunes entrepreneurs, non à demander de l'emploi, mais à en créer. Demandez-leur de créer des emplois, et ils le feront pour eux et ils innoveront dans ces domaines, c'est-à-dire les matériaux biocomposites et bionanocomposites, l'échange de droits d'émission de carbone, la mise en place de conditions favorables au développement de bioraffineries et de la plate-forme bioéconomique.
Facilitez l'adoption d'une politique et l'édiction de règlements qui permettent de saisir les nouveaux marchés et qui facilitent la création de meilleures entreprises pour l'industrie des produits forestiers, dans les produits verts nouveaux ainsi que dans les services écologiques et les services de santé. Je tiens aussi à dire que les forêts peuvent être utiles à nos secteurs de la santé. Elles peuvent concourir à notre réussite écologique dans les communautés urbaines.
Je précise: Encouragez-les en leur donnant un très petit capital de démarrage pour la fabrication d'un produit qui pourrait stimuler la croissance de notre industrie des produits forestiers classiques. J'encouragerais cette industrie à conclure un contrat de licence ou à acquérir cette société dérivée, après ce succès. Pourquoi est-ce si important? Parce que l'image de marque et le mécanisme d'une stratégie internationale sont importants. C'est à la portée d'une petite entreprise. Si une société comme Resolute ou Timbec se décide et acquiert cette compagnie et devient une mégacompagnie d'envergure mondiale, elle peut parvenir beaucoup mieux à ce résultat.
Je tiens aussi à mentionner, dans le peu de temps qui me reste, la nécessité de privilégier des lois qui englobent une politique d'achat pour les administrations publiques. Si une petite compagnie, sur la voie de la réussite, essaie de commercialiser son premier produit, nous devrions avoir une politique d'acquisition qui permet d'acheter le produit le plus rapidement pour lui permettre de le lancer sur le marché mondial. Il est important pour la Chine de savoir si cette compagnie possède déjà un produit commercialisé. Elle ne participera pas à des échanges avec nous à moins que cette compagnie ait lancé ce nouveau produit. Le gouvernement a donc ce rôle à jouer et il devrait continuer de le jouer dans le contexte actuel.
Nous n'avons pas encore constaté toute l'importance de l'économie de la forêt urbaine. Je parle ici dans le contexte des échanges des droits d'émission de carbone et de la santé des forêts. L'économie d'aujourd'hui vise l'objectif de villes soutenables. Dans les paysages urbains, faits de béton et gigantesques, vivent 70 % de nos concitoyens. Il faudrait envisager la construction d'édifices en hauteur [Note de la rédaction: inaudible], en envisageant à cette fin toutes les modifications législatives nécessaires pour aplanir les obstacles. C'est maintenant le moment d'agir. C'est le moyen de le faire. Nous avons la technologie et nous devrions avoir la volonté et le cran de mettre en place tous les facteurs favorables. Je sais que, à Toronto, ce sont les pompiers. Le paysage devrait être suffisant pour nous permettre de le faire en toute sûreté, et nous savons que c'est le cas. C'est donc maintenant le temps d'agir.
Les services de loisirs et de santé devraient être un moyen d'agir dans ce domaine particulier.
Je tenais à préciser que, dans l'économie d'aujourd'hui, il faut s'unir pour survivre. Il n'y a pas de séparation entre l'Alberta, la Saskatchewan ou le Québec. Nous devons collaborer, ne pas répéter ce que nous faisons ni le financement que nous accordons. Nous devons établir une synergie pour maximiser l'utilisation de nos ressources.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup pour votre exposé.
Écoutons maintenant M. Derek Gray, qui est professeur au département de chimie de l'Université McGill.
Merci d'être ici. Allez-y. Nous vous écoutons.
Je remercie le comité de me donner l'occasion de témoigner devant lui.
Comme le comité le sait trop bien, cela fait plus d'une décennie qu'il est évident que nous vivons une époque de changements radicaux dans l'industrie des produits forestiers. Les conséquences sur les entreprises et les travailleurs de l'industrie, particulièrement dans les petites villes manufacturières de tout le Canada ont été catastrophiques. Des détails figurent dans un article du Globe and Mail publié en décembre dernier, dans lequel on énumère au moins une douzaine d'usines fermées. Mes collègues ici savent, tout comme vous, qu'il y en a beaucoup d'autres. Les perspectives sont assez sombres.
Cependant, j'aimerais suggérer que tous ces malheurs ont vraiment un bon côté. Pendant la dernière décennie, sous l'aiguillon, peut-être, de cette catastrophe, les matériaux lignocellulosiques ont connu une explosion de créativité scientifique et technologique et de l'innovation, avec l'appui des universités, des entreprises et du gouvernement. Voilà pourquoi je pense que la situation n'est pas aussi sombre que je le croyais quand j'ai commencé à rédiger cet exposé.
Mes collègues ont déjà donné des exemples de cette créativité et des percées. Mentionnons le concept de bioraffinerie. L'usine de pâte kraft n'existe plus. C'est maintenant le lieu de transformation la plus efficace possible des ressources forestières en une gamme de produits. Je suis complètement d'accord avec Mohini, pour dire que l'emploi de matériaux ligneux et de matériaux composites, dans le secteur de l'automobile et même de l'aéronautique, notre secteur d'excellence, et l'emploi de charpentes en bois d'ingénierie dans le bâtiment pourraient constituer un immense marché.
Essentiellement, je m'intéresse à la production et à l'emploi de matériaux nanocellulosiques. C'est à eux que je consacrerai le reste de mon exposé. Il existe deux catégories de nanocelluloses. La première est la cellulose nanocristalline. Si, en fait, vous pouvez vous imaginer un grain de riz dont on réduirait la taille un million de fois et qu'on le tirerait de la cellulose, telle serait la cellulose nanocristalline. L'autre catégorie est la cellulose nanofibrillaire, qui est vraiment formée comme un brin de spaghetti, mais, en gros, d'un diamètre réduit à son millionième.
Depuis le début des années 1990, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, le CRSNG, a appuyé notre recherche fondamentale sur la cellulose nanocristalline par le processus des subventions à la découverte. Notre problème était de ne pouvoir en fabriquer qu'en petites quantités au laboratoire. Pour en tester les applications, il en fallait plus. On y a pourvu grâce à une extrapolation entreprise par l'Institut canadien de recherches sur les pâtes et papiers, maintenant FPInnovations. Cela a conduit à la formation de CelluForce, une coentreprise de FPInnovations et de Domtar, qui, avec l'appui du gouvernement, a positionné le Canada comme chef de file de la production de nanocellulose.
J'ai dressé la liste de quelques producteurs canadiens actuels de nanocellulose. CelluForce, bien sûr, loge dans une usine de Windsor, au Québec. L'usine de Domtar, au Québec, est probablement encore la plus grosse usine mondiale capable de fabriquer de la cellulose nanocristalline. Alberta lnnovates Technology Futures peut produire de la cellulose nanocristalline dans une petite unité pilote à Edmonton. On peut aussi en fabriquer grâce à un nouveau procédé mis au point par des chercheurs du CNRC, dans un laboratoire de biochimie de Montréal; et on pouvait en obtenir aussi pendant un certain temps, de Bio Vision Technology, de Nouvelle-Écosse. On peut aussi obtenir de Blue Goose Biorefineries, de Saskatoon, les quantités de cellulose nanocristalline nécessaires à des travaux de développement. De même, et c'est probablement la nouvelle la plus excitante actuellement, on a récemment inauguré une usine de filaments de cellulose d'une capacité de cinq tonnes par jour, à la papeterie de Kruger, à Trois-Rivières.
Dans tous les cas, ces entreprises ont bénéficié de l'appui de la province et du gouvernement fédéral. On peut faire remonter la plus grande partie de cette activité industrielle à l'appui du CRSNG et à la recherche fondamentale. Je pense que la marche à suivre pour les nouveaux matériaux serait de combiner les efforts des universités et de l'industrie.
On a proposé beaucoup d'applications pour les matériaux nanocellulosiques. Beaucoup d'entre eux, comme je l'ai dit, au début, tendent à avoir une valeur vraiment élevée, mais, en même temps, à être produits en petits tonnages. Cela ne changera pas grand-chose à la situation de l'industrie des produits forestiers. Cependant, on perçoit, à l'horizon, une foule d'applications à plus grande échelle.
L'une d'elles concerne les nanofilaments de cellulose, qui, bien que produits par l'industrie des pâtes et papiers, peuvent être fabriqués moyennant des modifications relativement petites dans l'usine, et peuvent servir dans l'industrie des pâtes et papiers pour améliorer les propriétés du papier et du carton, particulièrement leur résistance et leurs propriétés de surface. On a proposé de se servir de ces produits nanocellulosiques comme additifs dans la récupération du pétrole et du gaz. Il semble qu'ils amélioreront les propriétés de durcissement du béton. Les applications visant à améliorer les propriétés de renforcement et de matériaux d'emballage barrière pourraient constituer un immense débouché pour ces matériaux tout comme les applications comme agents de renforcement dans les composites à base de polymères.
On trouve ici réunies beaucoup de compétences dans ce domaine chez les témoins ici présents.
Mais il faut se rendre à l'évidence qu'il faudra bien plus que la seule nanocellulose pour remplacer la production perdue dans l'ensemble de l'industrie canadienne des pâtes et papiers. Du moins, nous pouvons espérer que ces ressources et ces matériaux durables et carboneutres contribueront à procurer beaucoup de débouchés aux vastes ressources forestières du Canada.
Je n'ai aucune recommandation à formuler pour le comité, mais je serai heureux de répondre à ses questions sur le sujet.
Je vous remercie de votre attention.
Merci beaucoup.
Entendons maintenant nos derniers témoins, par vidéoconférence, depuis Vancouver, chez Fortress Paper. Accueillons les représentants de Fortress Specialty Cellulose Ltd., MM. Yvon Pelletier et Marco Veilleux respectivement président et vice-président, Développement des affaires et projets spéciaux.
Messieurs, soyez les bienvenus. Merci d'être avec nous.
Nous vous écoutons.
[Français]
Monsieur le président et membres du comité, c'est un honneur pour nous de témoigner aujourd'hui. Malheureusement, nous ne pouvons pas être présents à Ottawa, mais nous participons tout de même à la réunion par vidéoconférence.
[Traduction]
Pour ceux qui l'ignorent, Fortress Paper Limited est une société de portefeuille dont le siège est à Vancouver. Aujourd'hui, nous avons trois investissements majeurs dans trois sociétés. La première fabrique du papier pour billets de banque et du papier infalsifiable en Suisse. Les deux autres sont des usines de pâte pour transformation chimique situées au Canada, dont je parlerai sous peu.
Pendant toute son existence, Fortress Paper a voulu cibler le haut de gamme, le produit ayant le plus de valeur. Nous avons surtout investi dans les types de produits qui procurent une marge élevée. Indéniablement, nous avons ciblé les pâtes pour transformation chimique destinées au secteur des textiles depuis la fin des années 2009-2010. D'autres occasions à saisir se dessinent à l'horizon et j'en parlerai bientôt.
Comme certains de nos collègues l'ont expliqué, nous partons d'une usine de pâte à papier. L'élément de départ est le processus de transformation en pâte à papier, mais nous poussons la chose un peu plus loin. Nous prenons la cellulose tirée du bois, nous la purifions et nous l'expédions principalement en Asie pour sa transformation en rayonne.
Je parlerai de certaines observations très intéressantes qui ont été faites plus tôt. Le reste des constituants, la lignine et les hémicelluloses, servent aujourd'hui surtout à des fins énergétiques, mais il se fait beaucoup de travail pour utiliser l'hémicellulose obtenue par notre procédé et la transformer en produits de plus grande valeur.
Pourquoi les textiles?
Parce que leur croissance est beaucoup plus forte que celle du PIB mondial. En 2014, le marché était d'environ 93 millions de tonnes. En 2016, on prévoit qu'il se situera à 101 millions de tonnes.
L'examen des fibres qui constituent le marché des fibres textiles révèle qu'il est constitué à 67 % de fibres synthétiques, polyester surtout, et que l'autre fibre importante est le coton. Comme certains d'entre vous le savent, le coton stagne, et sa disponibilité est appelée à diminuer. La rayonne est là pour prendre la relève, saisir l'occasion, et sa croissance est beaucoup plus rapide que celle des autres fibres. C'est un marché en croissance, très prometteur.
En 2009, Fortress a fait des acquisitions au Québec. La première a été l'usine de Fortress Specialty Cellulose de Thurso, transformée en usine de pâte pour transformation chimique à la fin de 2012. Elle possède une capacité de 200 000 tonnes et on peut la reconvertir en usine de pâte à papier. Ce n'est pas ce que nous voulons faire, mais c'est possible en cas de marché déprimé. La transformation de la pâte pour transformation chimique et la construction d'une installation de cogénération sur place a été réussie avec un investissement notable de plus de 300 millions de dollars.
Nous avons aussi acquis Fortress Global Cellulose, à Lebel-sur-Quévillon, où nous avons investi jusqu'à 40 millions de dollars. Le modèle d'entreprises que nous avons développé pour cette usine était de la transformer en usine de pâte de bois de résineux pour transformation chimique. Elle aurait été l'une des usines les moins coûteuses, mondialement, dans sa catégorie. Malheureusement, le projet a dû s'arrêter l'année dernière, après l'application, par la Chine, d'un droit d'importation sur les produits nouveaux qui proviennent de nouvelles usines. Ce droit de 23,7 % frappe les nouvelles acquisitions construites au Canada. Le projet est mort et enterré.
Il a été question des différents programmes fédéraux mis sur pied depuis 2008. Nous avons participé à la plupart d'entre eux. Nous pouvons dire qu'il y en a eu, et il y en a encore, d'excellents, mais le premier créé dans la période de dépression de 2008 à 2010 a été le programme d'écologisation des pâtes et papier. C'était un excellent programme, souple, facile d'accès, qui a suscité des investissements notables et permis au secteur d'accroître sa compétitivité. Beaucoup d'usines qui, aujourd'hui, continuent de produire et créent des emplois ont eu recours à ce programme.
L'autre programme, comme vous le savez, et qui existe toujours, est le programme d'investissements dans la transformation de l'industrie forestière, le programme d'ITIF, et, comme M. Gray l'a dit plus tôt, il s'est fait tellement de travail au cours des cinq à dix dernières années pour créer de nouveaux produits, que la demande dont ce programme fait l'objet dépasse ses capacités de financement. La demande est environ dix fois plus forte que l'offre. Donc l'industrie offre beaucoup de potentiel de développement permanent.
Nous tenons aussi à remercier le gouvernement fédéral pour son appui permanent à la recherche-développement pour aider à la transformation de notre industrie.
Fortress a beaucoup investi dans la transformation secondaire de l'industrie. J'ai aimé certaines observations, faites plus tôt, et nous nous conformerons à certaines d'entre elles. La totalité de notre production est exportée en Asie, et une grande partie de notre pâte pour transformation chimique retourne en Europe et en Amérique du Nord — nous ne nous sommes pas concertés, avant la convocation, pour uniformiser nos exposés — et elle revient sous forme de serviettes non tissées, d'essuie-tout et de produits textiles qui remplacent des fibres non écologiques comme le polyester et le coton.
On peut développer des industries tertiaires au Canada, et ce devrait être encouragé et appuyé. Le développement de nos produits tertiaires au Canada, aujourd'hui, est possible. Notre usine qui produit de la cellulose spéciale est un bon exemple du modèle intégré mis de l'avant par l'Association des produits forestiers du Canada, il y a quelques années, et elle s'inscrit dans l'avenir de notre industrie: une usine de pâte pour transformation chimique accompagnée d'une installation de cogénération et située à proximité d'une société en bonne santé qui produit du bois d'oeuvre de feuillus. Il est possible de pousser un peu plus loin le modèle de développement intégré en produisant des bioproduits, des biomatériaux et des produits biochimiques, pour un jour alimenter une unité productrice de cellulose pour l'industrie du textile haut de gamme, ici, au Canada.
Le Canada doit appuyer l'innovation et la création de produits et mettre en place l'environnement favorable. Nous avons besoin d'attirer de nouveaux joueurs dans notre industrie, comme des sociétés des secteurs des textiles, de la chimie, de l'alimentaire et des produits pharmaceutiques. Nous devons sensibiliser les Canadiens et le monde à la possibilité que les produits de l'avenir soient vraisemblablement fabriqués à partir de ressources renouvelables et que l'un des matériaux bruts renouvelables parmi les plus pratiques est le bois.
Fortress comprend tout à fait l'importance du développement de l'industrie tertiaire au Canada. Les barrières tarifaires, comme la taxe à l'importation imposée par la Chine sur la pâte pour transformation chimique produite au Canada depuis 2013, ont causé un tort financier considérable à notre société et elles ont aussi mis fin à un projet d'investissement de 300 millions de dollars à Lebel-sur-Quévillon.
Nous avons des stratégies d'investissement, mais nous n'avons pas de capacité financière ni d'appui. D'où cette idée, entre autres: est-ce que le gouvernement est prêt à faciliter ce développement de nouveaux produits, cette innovation, au Canada, en créant un fonds de développement facile à gérer pour les produits verts?
Je vous remercie de votre temps et j'ai hâte d'entendre vos questions.
Merci beaucoup pour votre exposé.
Encore une fois, je tiens à vous remercier tous d'être ici et à vous remercier pour vos exposés extrêmement intéressants. C'est le genre de discussion que j'espérais que nous aurions sur l'innovation, et la discussion se poursuivra à la faveur des questions et des observations de nos membres, à commencer par Mme Crockatt, qui dispose de sept minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à vous tous.
Nous entendons de plus en plus parler au comité de la reprise que vit le secteur forestier canadien et, aujourd’hui, je me sens vraiment transportée par cet enthousiasme et cette fièvre qui déferle sur votre industrie. Tout cela, c’est grâce à des hommes comme vous qui stimulent beaucoup l’innovation.
Je tiens donc à tous vous remercier pour vos contributions.
J’aimerais d’abord m’adresser à M. Voss, en partie parce que nous avons la même alma mater, à Saskatoon, et parce que mon neveu travaille pour West Wind Aviation. Nous avons donc quelques liens qui nous unissent.
Certaines des innovations dont vous parlez me rendent particulièrement enthousiaste, notamment celles concernant l’embauche d’Autochtones, une chose que nous cherchons beaucoup à améliorer. Non seulement vous lancez une révolution technologique, vous employez également beaucoup d’Autochtones. J’aimerais que vous nous expliquiez un peu plus pourquoi, selon vous, vous avez réussi à ce chapitre. Le gouvernement vous a-t-il aidé et, si oui, comment?
Nous avons connu une circonstance commune en Saskatchewan, soit une pénurie de main-d’œuvre. Nous avons beaucoup de pénuries de travailleurs qualifiés et le taux de chômage chez les Autochtones est extrêmement élevé. Nous le savons.
Dans la région de Meadow Lake, il y a beaucoup d’Autochtones, notamment des jeunes. L’âge moyen de cette population est de 17 ans. Le conseil tribal de Meadow Lake est composé de 13 membres dont la moitié vit dans la réserve et l’autre, hors réserve. Les collectivités sont très éloignées les unes des autres.
Nous travaillons en étroite collaboration avec les collèges régionaux ainsi que les collèges professionnels et techniques afin de créer autant de programmes de formation des métiers spécialisés que possible. Nous avons participé à certains programmes fédéraux, notamment le Northern Career Quest. Comme je l’ai souligné dans mes notes, c’est un programme qui a connu beaucoup de succès. Nous souhaitons voir le programme se poursuivre et être mis à jour, car c’est le programme avec lequel nous avons obtenu les meilleurs résultats, principalement en raison de sa grande souplesse. Il permet de répondre à des besoins immédiats auxquels on ne peut pas habituellement répondre avec des programmes de financement ordinaires. C’est formidable.
Lorsque nous nous sommes mis à la recherche d’employés, nous avons découvert que la majorité des postulants étaient autochtones. Nous avons donc ajusté notre milieu de travail afin qu’il soit plus inclusif et qu’il corresponde davantage aux besoins uniques des jeunes. Ce n’est pas une question autochtone, c’est simplement la réalité de la nouvelle génération, mais il a également fallu que…
Nous comptons beaucoup d’employés de moins de 25 ans. Ils recherchent des choses particulières. Nous avons donc fait de grands efforts pour les aider et les soutenir.
Nous sommes syndiqués. Il faut donc travailler avec le syndicat pour nous adapter à une nouvelle façon de penser.
Dans l’ensemble, je dirais que nous avons fait tout ce qu’il était possible de faire pour rassembler notre effectif et lui permettre de réussir. Mais, cela ne s’est pas fait sans difficulté. Il faut…
Pourriez-vous nous parler d’une ou deux choses précises qui vous ont vraiment aidé afin que le comité puisse en apprendre davantage sur certaines des meilleures pratiques?
Comparativement à d’autres sociétés forestières en Saskatchewan, nous comptons le plus grand nombre d’employés autochtones. Habituellement, les Autochtones composent environ 5 % ou 10 % de l’effectif, alors que chez nous, ils composent 75 % de l’effectif. Notre société appartient aux Premières Nations. Il est donc clair que nous favoriserons la création d’emplois au sein de notre collectivité. D’ailleurs, c’est ce que beaucoup d’intervenants souhaitent, notamment les ministères fédéraux. Ils veulent que les gens quittent l’aide sociale et se joignent à la population active. L’idée obtient beaucoup d’appui.
Le conseil tribal de Meadow Lake offre plusieurs programmes sociaux et de santé fructueux qui aident les gens à terminer leurs études secondaires, à amorcer une formation postsecondaire et à obtenir des prérequis pour certains métiers. Cela signifie qu’un grand nombre de candidats ont obtenu les compétences nécessaires pour poser leur candidature à un emploi. Nous ne disposons pas vraiment d’un programme de travailleurs étrangers temporaires. Nous avons beaucoup de postulants qui sont habituellement de la région. En ce sens, c’est un peu une histoire de réussite.
Nous souhaitons que l’accent soit mis davantage sur l’acquisition de compétences de la vie courante afin d’aider les gens à s’intégrer lorsqu’ils quittent une région très rurale pour s’installer à Meadow Lake. Meadow Lake n’est pas une région urbaine — elle ne compte que 5 000 habitants —, mais ces gens éprouvent néanmoins tout un choc lorsqu’ils arrivent.
Ils ne savent pas ce que c’est que de louer un appartement, d’établir un style de vie, de fonder une famille et de s’installer dans la collectivité. Il faut donc aider les jeunes à comprendre ces aspects de la vie. Lorsque nous réussissons à renforcer ces capacités, les gens deviennent des employés stables qui s’engagent envers l’entreprise.
Nous comptons beaucoup de candidats solides, des étoiles montantes. Nous les utilisons à titre d’exemple pour faire du recrutement et les résultats sont concluants.
Si vous aviez une recommandation à formuler au gouvernement au sujet des programmes que vous avez utilisés, lesquels devraient être renforcés et offerts de nouveau? Quel a été le meilleur modèle pour vous?
Il s’agit d’un programme propre à la Saskatchewan. Il a connu beaucoup de succès et d’autres provinces étudient ce modèle.
Nous étudions certains programmes offerts en Alberta et en Colombie-Britannique qui sont propres à l’industrie forestière, mais nous aimons beaucoup le programme Northern Career Quest. C’est un programme merveilleux.
Merci.
Monsieur Sain, j’aurais une question à vous poser. Dans le cadre d’un échange précédent, vous avez dit: « Nous avons certains produits à Toronto qui pourraient être utilisés en collaboration avec l’Alberta. » Au cours des prochaines années, l’Alberta aura besoin d’aide en raison de la baisse du prix du pétrole.
J’aimerais que vous nous parliez un peu des programmes fédéraux auxquels vous avez participé. Lesquels ont fonctionné? Selon vous, quelles sont les pratiques exemplaires futures ou les nouvelles possibilités?
D’abord, l’Alberta regorge de ressource forestière. Mais, en raison des revenus que génèrent les sables bitumineux, le secteur forestier n’est pas très actif dans cette province depuis un certain temps. Mais des sociétés, comme Alpac et de nombreuses autres sociétés plus petites, tentent de changer cela en introduisant de nombreuses nouvelles technologies, comme la nanocellulose, les matériaux faits de lignine sèche et les matériaux fibreux utilisés dans le secteur automobile, et en remettant en service les forêts situées sur les terres appartenant à l’industrie des sables bitumineux.
Il s’agit d’une occasion exceptionnelle pour l’Alberta. Il y a aussi des terres dans le secteur minier à récupérer. Pourquoi l’industrie forestière de l’Alberta ne développerait-elle pas des compétences en gestion lui permettant de faire pousser des arbres plus rapidement pour les transformer en grains? Ils pourraient être utilisés pour produire de la bioénergie de façon durable pour faire fonctionner les systèmes de l’industrie des sables bitumineux. Ce n’est qu’un exemple d’une excellente possibilité.
Une fois que le secteur forestier de l’Alberta sera aligné sur l’industrie pétrochimique, il lui sera très facile de fournir l’industrie. Par exemple, la nanocellulose peut être utilisée pour le forage. Beaucoup de produits pétroliers sont utilisés pour le forage et cela pollue la boue. Les sociétés pourraient utiliser un produit biochimique très écologique pour remplacer les produits pétroliers. Il y a de nombreuses applications. Je ne voudrais pas vous ennuyer, mais selon moi…
Merci, madame Crockatt, mais votre temps est écoulé.
Merci, monsieur.
Monsieur Rafferty, de l’opposition officielle, vous avez la parole pour sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Je suis d’accord avec vous, monsieur le président. Ce groupe de témoins est captivant. Merci au greffier d’avoir réussi à les réunir.
Un des commentaires formulés par M. Pelletier a capté mon attention. Il a parlé d’attirer de nouveaux partenaires, notamment les sociétés pharmaceutiques. Je me suis dit: « Pourquoi ne pas sortir des sentiers battus? » Je ne me souviens plus si c’est le professeur Sain ou le professeur Rakshit qui a fait cette suggestion, mais je vais sortir des sentiers battus. Ma question s’adresse aux deux chimistes.
Il y a quelques mois, la Chambre des communes a adopté une motion proposant de mettre fin à l’utilisation des microbilles qui se retrouvent dans nos cours d’eau et nos lacs. Comme vous le savez, monsieur Rakshit, le lac Supérieur n'est pas rempli de ces microbilles, mais on en trouve.
Pour être plus précis, on retrouve ces microbilles dans les produits pharmaceutiques, comme le dentifrice ou les nettoyants pour le visage. Elles se retrouvent ensuite dans nos cours d’eau, car les installations de traitement des eaux ne peuvent pas les recueillir. Je ne suis peut-être pas le premier à sortir des sentiers battus sur cette question, et je serais déçu si c’était le cas, mais serait-il possible de remplacer ces microbilles par un produit du bois? Peut-être les nanocristaux, s’ils ne sont pas réduits 1 million de fois, mais, disons, seulement 1 000 fois…
Monsieur Gray et monsieur Rakshit, j’aimerais vous entendre à cet égard.
Merci, monsieur le président.
La réponse est oui. La cellulose est un polymère plutôt abrasif qui pourrait très bien fonctionner à titre de stabilisateur dans bon nombre de dentifrices et autres produits pharmaceutiques. Il y a de nombreuses applications possibles. Il faut d’abord déterminer s’il y a suffisamment de matériel disponible et si sa qualité est suffisante pour la commercialisation.
Lui est chimiste; je suis davantage un ingénieur chimiste.
C’est certainement possible. On peut transformer ces nanocelluloses et fibres cellulosiques en produits chimiques intelligents ou leur ajouter certaines caractéristiques pour qu’ils cadrent mieux avec les produits visés.
Dans ce cas, que peut faire le Canada pour être un chef de file à cet égard, avant que les gens n’écoutent l’enregistrement de cette séance et se disent: « Ce député à une bonne idée »? Que pouvons-nous faire pour être les premiers et que pourrait faire le gouvernement pour nous aider à y parvenir? Je parle en termes généraux, car, comme vous le dites, il y a beaucoup d’applications possibles, mais pour le moment, je cible les microbilles.
Tout a commencé ici-même.
Alors, que peut-on faire? Vous avez parlé du prix et des quantités. Quand on pense à tous les produits qui utilisent les microbilles, il faudrait des produits en quantités énormes pour les remplacer. Que doit-on faire? J’imagine que le gouvernement aurait un rôle à jouer.
J’ignore comment vous répondre en une minute, mais oui. Certaines universités, notamment l’Université McMaster, à Hamilton, ont des compétences dans ce domaine, car elles disposent de chimistes qui se spécialisent dans les colloïdes et les nanocristaux. De plus, elles sont très bonnes pour trouver des fonds. Donc, il faudrait utiliser les recherches du CRSCN dans le principal secteur, car il faut stabiliser ces particules, mais aussi les fonds du CRD. La vraie difficulté, c’est de trouver une société prête à affronter Procter & Gamble. Il est là, le problème. D’ailleurs, à ma connaissance, Procter & Gamble a appuyé ce genre de recherche à Hamilton. C’est un des facteurs contributifs.
Si je ne m’abuse, un de mes collègues a parlé de la participation d’entrepreneurs. Puisque les gens fabriquent leur propre savon à la maison, ils pourraient peut-être se procurer des nanocristaux et s’en servir pour fabriquer, disons, du dentifrice et des produits nettoyants. Mais, il faudrait que les étudiants s’impliquent dans l’activité entrepreneuriale.
Si vous me le permettez, j’aimerais prendre encore une minute de votre temps.
Le programme FONCER du CRSNC est encourageant, car il permet aux étudiants des cycles supérieurs et postdoctoraux d’acquérir des compétences générales pour mener des activités entrepreneuriales. Donc, ça se fait déjà. En tant que député, il vous faut simplement mettre de la pression sur les gens. Je vais vous fournir une liste de noms.
Merci. Je serais heureux de faire cela. En passant, je ne veux pas détenir le brevet pour cette idée. Je dis simplement que le gouvernement pourrait détenir le brevet.
Auriez-vous quelque chose à ajouter, monsieur Rakshit?
Je ne veux pas vous décevoir, mais vous n’êtes pas le premier à y penser.
Il y a deux autres éléments dont il faut tenir compte. La plupart des régions du monde n’ont pas le problème que nous avons dans le lac Supérieur. Vous proposez une solution à un problème très singulier. Cela m’amène à souligner un point que j’ai omis de mon exposé: est-il possible de fabriquer un produit à partir de matériaux que nous seuls possédons?
Malheureusement, et ça s’applique aussi à de nouveaux produits comme celui-ci, les pays émergents nous rattrapent toujours. Je vais vous donner un exemple. Le type de bois que nous avons ici est fait de longues fibres dont la cellulose est de meilleure qualité que celle de l’eucalyptus. Mais au cours des 10 ou 15 dernières années, des pays émergents, comme le Brésil, ont créé et développé un type d’eucalyptus à longues fibres. Ce n’est pas parce que l’on crée quelque chose que l’on conserve une longueur d’avance. Nous devons toujours rester à l’avant-garde, sinon les autres vont nous copier ou obtenir la technologie nécessaire pour concurrencer.
Monsieur Voss, vous avez brièvement parlé de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux. J'aimerais seulement avoir votre avis, car cet accord expire l'an prochain. D'après ce que je comprends, si rien n'est fait, on maintiendra simplement le statu quo.
Avez-vous dit que vous n'étiez pas tout à fait sûr que le gouvernement devrait renouveler un accord qui possède les mêmes caractéristiques?
Il y a deux avis sur cette question. Si on apporte des changements mineurs, les États-Unis profiteront de l'occasion pour demander un réexamen de l'accord et la tenue de renégociations massives. Nos négociateurs canadiens hésitent donc toujours à apporter des changements, et ils espèrent que le statu quo sera simplement renouvelé. Toutefois, la Saskatchewan a été injustement traitée pendant toute la durée de la mise en oeuvre de l'accord. En effet, lorsque les scieries n'étaient pas en activité, il y avait suffisamment de quotas. Mais maintenant que les marchés du bois d'oeuvre connaissent une reprise, il y a trois scieries en activité où il n'y en avait qu'une auparavant et les quotas ne sont plus suffisants, alors que dans d'autres provinces, la dendroctone du pin ponderosa a causé la fermeture d'un grand nombre de scieries et elles présentent maintenant un excès de quotas. Il suffirait donc de petits changements pour ajuster les choses, mais on craint que cela compromette les négociations
Merci. Merci, monsieur Rafferty.
La parole est maintenant à M. Regan, du Parti libéral. Vous avez sept minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Le commentaire de M. Gray au sujet de Proctor & Gamble a soulevé mon intérêt. On m'a déjà fait valoir que les États-Unis possèdent environ 20 énormes entreprises comme Proctor & Gamble qui peuvent se permettre de mener une grande partie de leurs propres recherches, ce qui procure un énorme avantage à ce pays dans le domaine de la recherche. Je ne sais pas comment nous pourrions en créer davantage au Canada. Veuillez réfléchir à la question pendant que je m'adresse à M. Pelletier pendant quelques instants.
[Français]
Monsieur Pelletier, vous avez parlé du besoin d'attirer des nouveaux joueurs au sein de l'industrie. Comment devrait-on faire cela?
Beaucoup de nos clients ailleurs dans le monde n'ont pas de production au Canada. Je crois que si on travaillait avec les gouvernements fédéral et provinciaux, et qu'on établissait des programmes pour faciliter leur intégration dans certaines des nos provinces, certains produits pourraient être très compétitifs. Cela pourrait attirer des clients vers nous. On en connaît quelques-uns qui viennent à la pêche de temps à autre, mais ils ne franchissent pas le pas. Si certaines conditions existaient, je crois que nous serions capables de les attirer car nous avons des avantages énormes. Nous avons beaucoup de fibre, cela a été dit plus tôt. Quand on considère le tout globalement aujourd'hui, cette fibre est de qualité et compétitive. Elle n'est pas comme celle des Brésiliens, mais elle est compétitive.
Sur le plan énergétique, les coûts d'énergie sont très bas dans certaines provinces comparativement au reste de la planète. Nous avons donc certains avantages.
Par ailleurs, vous savez sûrement que les coûts d'investissement sont assez élevés au Canada. Je le sais pour avoir moi-même investi, autrefois avec mon ancienne compagnie, et maintenant. Les nouveaux investisseurs hésitent donc à investir 100, 200 ou 300 millions de dollars au Canada. Il faut les aider à s'installer chez nous et à produire ici ces nouveaux produits.
A-t-on besoin de faire davantage de bioraffinage au Canada? Envisagez-vous cela? Quel rôle le gouvernement jouerait-il à cet égard?
[Traduction]
J'aimerais également avoir l'avis de M. Gray et de M. Rakshit à cet égard, si possible, et si le temps le permet.
D'accord.
Merci.
Notre scierie sera éventuellement transformée en bioraffinerie.
Nous avons parlé de l'excellent programme ITIF. Le problème, en ce moment, c'est que nous avons soumis... et il n'y a pas assez de fonds. Nous avons un plan de deux à cinq ans qui vise à augmenter nos activités dans le domaine de la biochimie et des bioproduits, mais notre capacité financière actuelle ne nous permet pas de le faire par nos propres moyens. Ce sont des nouveaux produits, et ils présentent des risques, etc. Le programme ITIF nous convient, car il nous aide à progresser plus rapidement, et au lieu de 10 ans, il nous faudra peut-être seulement deux à cinq ans. Nous collaborons également avec le gouvernement provincial pour explorer les moyens d'accélérer certains des investissements. C'est certainement un modèle qui fonctionne bien.
Pour revenir à votre première question, c'est difficile de lutter contre Proctor & Gamble. Ce n'est pas facile du tout.
Je crois que nous devons contourner le problème posé par Proctor & Gamble. Toutes les grandes entreprises ont une certaine durée de vie. Des petits pays comme la Finlande arrivent à mettre sur pied des industries de calibre mondial à partir de rien, avec une population beaucoup plus petite que celle du Canada. Nous devons encourager les entrepreneurs à lancer la prochaine Proctor & Gamble.
J'aimerais répondre à l'autre question sur les produits biochimiques du secteur tertiaire.
L'un des problèmes principaux à cet égard, c'est le coût du pétrole brut. Il y a de nombreux exemples de produits qui peuvent être fabriqués à partir de bioressources, mais on ne peut pas les fabriquer de façon économique à l'échelle appropriée. Il y a plusieurs paramètres. L'échelle doit être appropriée, et le produit doit être fabriqué à un prix plus économique que celui des matières premières, surtout maintenant que le pétrole brut est à 60 $ ou même à 100 $, si nous ne sommes pas concurrentiels, mais à 60 $, nous devrons attendre. L'un des premiers commentaires que j'ai formulés, c'est que nous devrons attendre que le prix du pétrole remonte avant que nous puissions penser à certains de ces produits. Entre-temps, nous devons tenter de réduire les coûts de différentes façons.
Par exemple, nous tentons de faire cela depuis peut-être 25 ans dans le cas du bioéthanol et, selon moi, c'est le plus petit dénominateur. Ces choses traditionnelles ne fonctionneront pas, et nous devrons avoir recours au génie génétique, etc., pour y arriver. Je ne dis pas que nous devrions arrêter, mais que nous devons continuer de chercher une technologie moins dispendieuse.
Monsieur Voss, je vous ai mentionné plus tôt que ma mère est née à Medstead, et vous avez dit que vous êtes né 10 milles plus loin. En fait, je devrais dire qu'elle a grandi là-bas, car elle est née à Glenbush.
Mais ce n'est pas la seule raison pour laquelle j'aimerais vous poser une question. Vous avez parlé de la nécessité d'améliorer les programmes et d'étendre leur portée. Selon vous, quels programmes fédéraux devrait-on créer, améliorer ou étendre?
On a mentionné ITIF, et ce serait un excellent programme. Nous souhaitons faire une demande dans le cadre de ce programme, surtout en ce qui concerne nos initiatives liées à la bioénergie, car il s'agit de technologies de pointe et habituellement, lorsque nous ne pouvons pas attirer du financement, nous nous contentons toujours de solutions technologiques moins dispendieuses qui font moins peur aux banques. Les investissements innovateurs sont directement liés à la technologie de pointe, et si nous essayons quelque chose de nouveau, les banques ne sont pas intéressées, et les investisseurs craignent de prendre des risques.
Nous nous tournons donc vers les technologies éprouvées et garanties par les ingénieurs, et c'est ce qu'on construit. Lorsque nous souhaitons mettre au point quelque chose d'excitant et de nouveau et adapter les technologies qui sortent des universités — ce que nous aimerions beaucoup —, nous avons de la difficulté à nous qualifier pour obtenir du financement.
Toutes ces choses ont été mentionnées. Par exemple, l'industrie de granulation pourrait fabriquer des granules torréfiées, ce qui représente un nouveau marché pour remplacer le charbon. Ce serait une nouvelle technologie fantastique, mais elle n'est pas vraiment éprouvée au Canada. Nous devrions donc importer cette technologie d'ailleurs ou collaborer avec des universités pour l'améliorer. Nous aimerions beaucoup établir d'autres partenariats dans ce domaine.
Les programmes que j'ai mentionnés et qui fonctionnent pour la plupart des entreprises forestières, notamment la Déduction pour amortissement accéléré ou les programmes de RS & DE, ne fonctionnent pas pour les entreprises qui appartiennent aux Premières Nations. En effet, notre structure organisationnelle nous empêche de nous qualifier, ce qui signifie qu'il y a des lacunes à cet égard. Nous aimerions beaucoup qu'on comble ces lacunes, car nous sommes essentiellement pénalisés comparativement à nos pairs.
Merci, monsieur Voss.
Merci, monsieur Regan.
Nous entamons maintenant la série de questions de cinq minutes. Nous entendrons d'abord M. Trost, ensuite Mme Block et enfin, M. Caron.
Monsieur Gray, vous avez dit qu'il fallait contourner Proctor & Gamble. Pourquoi ne pas lui vendre la technologie ou collaborer avec l'entreprise?
Oui, cela fonctionne dans certaines circonstances, mais il faut un récepteur, c'est-à-dire que vous devez connaître, au sein de l'entreprise, une personne intéressée qui vous fait confiance. Cela prend du temps, car cette entreprise est presque trop grande et difficile à déplacer dans une direction ou une autre. Les dirigeants de cette entreprise ne risqueront pas leurs marchés en perdant du temps sur une initiative qui n'est pas clairement établie.
Toutefois, la réponse est oui, on peut certainement collaborer avec cette entreprise, et on peut certainement lui servir de fournisseur. Par exemple, un fournisseur de nanocristaux de cellulose sera validé par Proctor & Gamble et l'entreprise achètera ses produits. Toutefois, elle souhaitera presque certainement avoir deux fournisseurs. C'est l'autre élément auquel nous sommes toujours confrontés.
Merci, monsieur le président.
Certains de ces éléments ont été abordés, mais j'aimerais poser une question plus directe à leur égard. Je présume que M. Pelletier serait la meilleure personne pour répondre à cette question.
Vous avez fait référence au Programme d'écologisation des pâtes et papiers, et nous avons beaucoup parlé du programme ITIF. Veuillez m'expliquer encore une fois pourquoi ces programmes ont été productifs, et pas seulement pour votre entreprise. Je n'essaie pas d'être désobligeant, mais tous ceux qui comparaissent devant notre comité nous disent toujours que tout l'argent que nous leur donnons produit de bons résultats, et nous aimerions donc savoir non seulement comment cet argent a aidé l'entreprise, mais également pourquoi ce sont de bons programmes pour l'ensemble de l'industrie et, manifestement, pour les collectivités concernées.
Veuillez donc me décrire le Programme d'écologisation des pâtes et papiers. Il s'agissait d'un programme un peu plus ambitieux qui n'a pas été exécuté de la même façon, mais le programme ITIF a été renouvelé, et il est possible qu'il soit renouvelé à l'avenir.
Veuillez donc m'expliquer pourquoi ces deux investissements étaient aussi stratégiques pour l'ensemble de l'industrie. Veuillez utiliser l'exemple de votre entreprise et généraliser par la suite.
Nous collaborons avec le gouvernement, l'APFC, etc. depuis le début du programme, il y a de nombreuses années. Cela nous a permis d'augmenter le potentiel de notre industrie pour améliorer le coût des produits, la productivité, etc. Le Programme d'écologisation des pâtes et papiers concernait surtout l'amélioration des actifs existants.
Le problème, c'est que nous avons connu une période très difficile et nous avons eu de la difficulté à avoir accès à des fonds. Le Programme d'écologisation des pâtes et papiers a aidé un grand nombre d'intervenants de l'industrie à passer au quartile suivant sur la courbe de coût. Cela a contribué à éviter la vente d'environ 50 % plus d'actifs au cours des cinq ou sept dernières années. Ils sont toujours là aujourd'hui, ils prospèrent, ils construisent et ils développent, etc. Ce programme, à mon avis, a été essentiel à la productivité actuelle d'un grand nombre d'actifs.
J'espère que cela répond à votre question.
Je crois que le programme ITIF a été un bon programme. Il a produit de nombreux bons projets. Dans le cadre de son récent renouvellement, et je crois que je l'ai mentionné plus tôt, il a connu un surnombre d'inscriptions à 10 reprises, avec plus de 1 milliard de dollars en projets présentés pour les 94 ou 96 millions de dollars offerts sur une période de deux ou trois ans. Donc, pour revenir aux points qu'ont fait valoir mes collègues plus tôt, on a mené de nombreuses bonnes recherches, mais pour financer ces projets aujourd'hui, nous avons besoin de l'aide du gouvernement.
Comme l'a mentionné mon collègue plus tôt, nous ne pouvons pas nous adresser à notre banque ou à une institution financière typique pour financer ces projets. Nous n'obtenons pas l'argent nécessaire, et nous devons donc nous adresser au gouvernement fédéral et aux gouvernements provinciaux pour pouvoir mener nos activités.
Un très grand nombre de projets sont offerts aujourd'hui pour nous aider à devenir plus concurrentiels.
J'aimerais préciser que dans notre demande pour le programme du PEPP, en particulier, nous n'avons pas été confrontés aux contraintes habituelles liées au préfinancement ou aux dépenses initiales; les règles concernant les demandes dans le cadre du programme étaient donc beaucoup plus faciles à suivre. Je crois que c'est l'un des éléments principaux — en plus de l'esprit du programme, qui visait à moderniser l'industrie —, c'est-à-dire la facilité d'accès au fonds et aux demandes. Les membres de l'équipe de RNCan ont exercé une bonne gouvernance et ont versé les fonds très rapidement, et quelques critères ont facilité grandement les choses. Cela concorde avec certains commentaires que j'ai formulés plus tôt aujourd'hui.
Permettez-moi de terminer ceci, car il me reste environ 20 secondes pour les autres témoins.
Cette souplesse que vous avez observée dans les programmes du gouvernement est-elle plus économique que des programmes normatifs et limités? C'est ce que j'entends dans les témoignages livrés aujourd'hui. J'aimerais savoir si les quatre autres messieurs, surtout dans le milieu universitaire, mais également dans le domaine des affaires, sont d'avis que cette observation est exacte.
Monsieur Gray.
La réponse est oui.
Dans les milieux universitaires, la souplesse des subventions à la découverte, qui sont essentiellement des subventions de démarrage qui vous permettent de mener des recherches dans les domaines de votre choix, est absolument formidable. Je fais l'envie de tous mes collègues au sud de la frontière.
Si une autre personne souhaite poser cette question aux autres témoins, elle peut le faire.
La parole est maintenant à Mme Block.
Vous avez cinq minutes. Allez-y.
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais me joindre à mes collègues pour souhaiter la bienvenue aux témoins. La discussion est très intéressante jusqu'ici. Cela ne vous surprendra pas si je pose un grand nombre de mes questions à M. Voss, car je viens de la Saskatchewan.
J'aimerais ajouter au compte rendu que ma famille et moi-même avons passé beaucoup de temps dans le parc provincial Meadow Lake. Je présume que c'est lié aux installations près du lac Jeanette. Je me souviens qu'il y a environ 10 ans, j'ai participé à des consultations sur certains travaux menés par les intervenants du parc qui visaient à reconfigurer les routes pour aider votre industrie, et même votre organisme, je crois, à transporter du bois d'oeuvre par camion à l'extérieur du parc. Même si nous avons perdu la route qui offrait un accès direct à Flotten Creek, nous avons obtenu d'excellentes routes qui ont amélioré l'accès à nos installations. Nous en sommes reconnaissants, et nous appuyons fortement tous les développements économiques qui se sont produits dans cette région par la suite.
J'aimerais revenir sur certaines choses que vous avez mentionnées dans votre exposé. Vous avez parlé de certains défis auxquels vous faites face relativement à l'accès aux programmes fédéraux. Je sais que RNCan entretient une relation de longue date avec votre organisme par l'entremise du Programme forestier des Premières Nations et l'Initiative de foresterie autochtone, et j'aimerais donc vous donner l'occasion de nous expliquer comment cela a contribué à vos activités et à la réussite de votre entreprise.
Nous utilisons un large éventail de programmes fédéraux et provinciaux, mais surtout des programmes fédéraux. FPInnovations est un partenaire de premier plan et il reçoit beaucoup de financement du gouvernement fédéral.
L'Initiative de foresterie autochtone est un partenaire à de nombreux égards. Par exemple, lorsque nous devons utiliser une toute nouvelle technologie dans la coupe du bois, nous devons former les personnes qui l'utiliseront — c'est une technologie de pointe, on ne parle pas des scies à chaîne et des débusqueurs qu'on utilisait autrefois —, et nous en profitons donc directement de cette façon.
Nous collaborons très étroitement avec les consultations communautaires. De nombreux travaux sont menés dans le cadre de la gestion durable des forêts. Comme vous l'avez mentionné plus tôt, cela influence beaucoup les discussions sur nos plans forestiers avec nos collectivités, y compris les collectivités non autochtones. Nous mettons l'accent là-dessus. Plusieurs enjeux liés à l'infrastructure sont visés dans ce processus, notamment l'utilisation plus efficace de l'infrastructure de base, par exemple les routes et la façon d'éviter leur destruction par la surutilisation.
Ces programmes nous permettent toujours d'englober plusieurs initiatives. Ce ne sont pas de gros montants et ils ne sont pas liés au capital, mais ils sont utiles. En tant qu'entreprise autochtone, nous entretenons de bonnes relations avec ces programmes nationaux actifs. Je crois que la plupart de ces groupes sont relativement enthousiastes au sujet de MLTC, car nous accueillons souvent des visiteurs. Au moins une fois par mois, un groupe autochtone de l'autre bout du pays vient visiter nos installations, afin de se renseigner sur Mistik Management et de comprendre comment un groupe de Premières Nations a réussi à être propriétaire des scieries et de toutes les industries connexes pendant plus de 30 ans.
C'était en décembre 2007 que notre comité a commencé son étude, dont le rapport a été déposé en 2008, compte tenu des facteurs structurels et de la conjoncture auxquels était confrontée l'industrie canadienne des produits forestiers. Bon nombre d'entre nous auraient qualifié cette période de la pire crise de l'histoire de l'industrie.
L'objectif de l'étude en cours est de se pencher sur ce qui s'est passé au cours des sept dernières années au sein de l'industrie. Je sais que vous avez intégré MLTC à l'époque où l'industrie souffrait le plus.
Comme je l'ai indiqué plus tôt, il y avait habituellement une grande société qui dominait l'industrie forestière. C'était le cas notamment en Saskatchewan et ailleurs au pays. Weyerhaeuser était le gros investisseur en Saskatchewan et y avait des scieries et des usines de pâte. On avait cette idée qu'il fallait réunir les deux types d'installations. L'une appuierait l'autre, à la fois en période d'abondance et de pénurie, en produisant le papier et le bois d'oeuvre. Mais Weyerhaeuser est partie. La société a tout vendu, a quitté la province et toutes les installations ont fermé leurs portes. Nous étions parmi une poignée de scieries indépendantes. Nous avons survécu. Nous étions en mesure de conserver certains avantages concurrentiels et de continuer à faire tourner la scierie, ce qui était une grande réalisation.
L'usine de pâte, qui existe toujours à Meadow Lake, a été mise sous séquestre et appartient maintenant à une entreprise étrangère. Il y a eu des changements énormes, des faillites colossales. La poussière est retombée, mais l'industrie voit les choses beaucoup moins en grand qu'auparavant. Il n'y a plus la cohésion, ni la coordination des efforts qui ont marqué le passé. La situation est fragile dans la mesure où les relations entre les divers intervenants ne sont pas aussi productives. Nous sommes une société différente, car nous appartenons à une Première Nation, mais la plupart des sociétés étrangères ne le comprennent pas. Ils ne comprennent pas vraiment la relation entre les Premières Nations et le secteur forestier, ce qui est de toute évidence un facteur énorme de nos jours. Nous avons beaucoup de pain sur la planche pour ce qui est de les sensibiliser, les aider à comprendre pourquoi il est important et pourquoi c'est bénéfique. Je vous dirais que le secteur manque cruellement d'investissements coordonnés. Voilà les principaux facteurs. Il se peut que c'était la même situation autrefois, et que pendant la crise les choses n'ont pas vraiment évolué.
En ce qui concerne les innovations sur le plan technologique dont on a beaucoup parlé aujourd'hui, il est difficile de réunir les investissements nécessaires, ce qui fait que personne n'a pu construire de grandes scieries, du moins en Saskatchewan, de façon innovatrice. On se demande tout simplement comment faire vivre l'industrie traditionnelle. Comment continuer à exister? Nous avons dû prendre une décision, c'est-à-dire nous lancer, essayer d'être indépendants, construire et réussir.
D'accord. Merci, monsieur Voss.
Merci à vous, madame Block.
Nous passons maintenant à M. Caron, à Mme Perkins et ensuite à M. Morin
Monsieur Caron, allez-y, je vous en prie.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie également tous les témoins pour leurs présentations.
Je vais me concentrer sur MM. Veilleux et Pelletier, de Fortress Paper.
Avant d'être élu député, j'étais économiste pour le Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, qui représentait les travailleurs de l'usine de Thurso à un moment où les choses étaient difficiles et où on parlait beaucoup de diversification de l'industrie. Lorsque l'usine a été acquise et transformée, cela fut une excellente nouvelle pour la municipalité et les travailleurs.
Vous avez mentionné que l'industrie et votre compagnie traversent des moments difficiles en raison de la plainte de la Chine. J'aimerais poser quelques questions par rapport à cela. Je sais que vous avez demandé au gouvernement canadien d'intervenir, ce qu'il a fait. On demande l'intervention d'un tribunal spécial. Où cela en est-il présentement?
Le processus suit son cours. Je crois que les gouvernements en sont à l'étape de former le tribunal ou le comité qui évaluera la plainte. Comme vous le savez, ce processus peut être très long.
On a vécu cela à de multiples reprises, particulièrement en ce qui concerne le bois d'oeuvre.
Craignez-vous que ce genre de plainte, que ce soit de la Chine ou d'autres pays, vienne jeter un froid sur la diversification de l'économie, en particulier en ce qui a trait à la pâte cellulosique ou de rayonne? D'autres marchés permettent une conversion et l'ouverture de nouveaux créneaux.
Concernant la pâte dissolvante utilisée dans la production de la rayonne en particulier, trois investissements majeurs étaient en discussion au cours des dernières années. Il y en a deux qui sont totalement arrêtés, dont le nôtre. Il est sûr que la mise en place par la Chine de la taxe sur l'importation qui s'applique à la pâte dissolvante canadienne a arrêté des investissements très importants au Canada. Quant à savoir si cela peut avoir des répercussions sur d'autres produits, je dirais que cela dépend de l'influence de la Chine sur le marché en question. Il est évident que la Chine présente un potentiel de protectionnisme et qu'elle n'est pas nécessairement compétitive dans certains produits.
Merci beaucoup.
En ce qui concerne nos marchés, je note aussi que nous n'avons aucun contrôle sur les actions d'autres pays.
Quelles mesures nous recommanderiez-vous d'adopter pour minimiser les risques que cela se produise, qu'il s'agisse de ce que vous produisez ou d'autres produits issus de la diversification de l'industrie?
En me fondant sur mon expérience de plusieurs années, entre autres avec la Chine, je vous dirais que les relations entre les diverses parties est l'élément le plus important. Pour garder les portes ouvertes, nous devons en effet maintenir de très bonnes relations avec le gouvernement chinois et, certainement, les améliorer.
Le Canada est moins concurrentiel maintenant pour ce qui est de certains produits, par exemple le papier journal ou la pâte en général. Il y a évidemment une diminution de la capacité du fait que nous ne sommes plus concurrentiels et que la production se déplace vers d'autres régions du monde.
En ce qui a trait à des produits comme la pâte cellulosique, la pâte dissolvante et la pâte de rayonne, croyez-vous qu'il y ait encore des possibilités d'expansion pour votre compagnie, voire même pour vos concurrents? Est-ce qu'il reste suffisamment de place pour que le Canada agisse?
Enfin, je vais vous poser la question corollaire, à savoir quel est l'état de la concurrence au point de vue mondial?
En ce qui concerne les usines, je crois qu'à court terme, soit entre zéro et cinq ans, la mise en vigueur de la taxe sur l'exportation vers la Chine va faire en sorte que les possibilités de conversion seront très minimes. D'ici 5 à 10 ans, le marché va continuer à prendre de l'expansion. L'Inde et l'Indonésie, par exemple, développent de plus en plus ce marché. C'est donc dire que d'autres marchés vont s'ouvrir et que de nouvelles possibilités vont s'offrir.
Pour ce qui est de la compétitivité de notre industrie, nous nous situons dans le deuxième quartile. Entre 40 et 50 % de nos coûts de production sont à l'échelle internationale. Cette information est publique. Nos usines peuvent être concurrentielles dans ce créneau.
Bref, en dépit de la poursuite actuelle, il y a encore de la place pour l'expansion, et en l'absence de cette poursuite, le Canada pourrait plus rapidement acquérir un rôle enviable dans le marché mondial.
Merci, monsieur Caron.
[Traduction]
C'est à votre tour, madame Perkins.
Vous disposez de cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie tous de votre témoignage aujourd'hui.
Nous avons beaucoup appris. Je ne sais pas trop où commencer, car vous avez tellement contribué à notre discussion.
Je vais commencer par le concept des occasions d'entrepreneuriat.
Je crois que c'était M. Gray qui a parlé du financement nécessaire aux activités d'entrepreneuriat et de lancement des produits. Certains d'entre vous savent peut-être ce que fait l'industrie du bambou pour promouvoir les vêtements, la literie, les serviettes et toutes sortes de produits fabriqués avec du bambou. La demande est très élevée. Vous évoquez la possibilité d'utiliser le bois afin de faire des produits qui pourraient aussi être très recherchés.
Le gouvernement accorde beaucoup de subventions aux universités, notamment aux programmes de robotique et d'innovation scientifique. Il me semble que nous venons d'accorder une subvention de recherche de l'ordre de 10 millions de dollars à un programme mené conjointement par l'Université Simon Fraser, l'Institut de technologie de l'Université de Toronto et l'Université Ryerson. On cherche à accroître les possibilités d'entrepreneuriat dans les domaines des sciences et des technologies afin d'offrir des produits novateurs.
Avez-vous entendu parler de ces investissements?
Je n'ai pas entendu parler de ce programme en particulier, mais le programme FONCER est un réseau d'universités canadiennes. Il y a également le réseau FIBRE, qui réunit tous les autres réseaux liés au secteur des produits forestiers et à l'environnement dans le milieu forestier. Ce réseau est très actif et la prochaine réunion aura lieu lundi. Lors de cette réunion, on encouragera les étudiants de deuxième et de troisième cycles à se renseigner sur les possibilités d'entrepreneuriat, par exemple. On y applique une approche axée sur les systèmes, et on encourage les étudiants à apprendre les techniques nécessaires. Donc je vous dis que oui, les fonds proviennent du...
Nous devrions examiner tout cela de plus près pour voir si les occasions présentées par les programmes existants...
Si vous voulez voir ce qui se passe, il suffit de faire une recherche Google sur « FIBRE », le réseau dirigé par M. van de Ven depuis Montréal. Le réseau réunit beaucoup d'intervenants de tout le pays.
D'accord, j'en suis ravie. J'y reviendrai plus tard, bien sûr.
Monsieur Voss, vous avez évoqué un problème de quota, en indiquant qu'il y a beaucoup de marge de manoeuvre en Colombie-Britannique mais que la situation est très serrée en Saskatchewan. Dans quelle mesure le gouvernement peut-il aider? Comment votre système de quota fonctionne-t-il et qui le dirige?
L'Accord sur le bois d'oeuvre résineux, dont est responsable le ministère du Commerce international, est géré par une organisation qui négocie avec les États-Unis pour fixer les modalités, en vertu desquelles le Canada est divisé dans différentes régions. La Saskatchewan fait partie de la région de l'Est canadien; l'Alberta et la Colombie-Britannique constituent une autre région. Des formules différentes ont été établies quant à l'application des quotas et les droits qui doivent être payés sur les exportations vers les États-Unis.
À l'époque où les négociations ont eu lieu, on a accordé à la Saskatchewan, qui produisait très peu de bois d'oeuvre, une toute petite part du quota. On ne savait pas que la production de la Colombie-Britannique allait chuter brutalement, mais les problèmes causés par le dendroctone du pin ponderosa ont été pires que prévu, et cette province a reçu un quota supplémentaire il y a quelques années. Or, la province ne s'en sert pas du tout. La Saskatchewan, de son côté, a augmenté sa production car nous n'avons pas cette bestiole, ce qui fait que...
Du côté du Canada, il n'y a pas moyen de changer le lieu de production du bois indiqué dans l'accord?
Voilà où les choses se corsent. Les opinions divergent. Nous croyons qu'il serait facile de le faire sans perturber les négociations, car il n'y aurait pas de changement au chapitre du quota global accordé au pays, mais les négociateurs sont très frileux face à la possibilité d'un changement quelconque, même des changements mineurs, qui pourraient entraîner, du côté américain...
[Français]
Merci beaucoup, madame Perkins. C'est tout le temps que nous avions pour ce tour de questions.
Je cède maintenant la parole à M. Morin pour cinq minutes.
Merci beaucoup.
Mes questions s'adressent à MM. Veilleux et Pelletier.
Je vais commencer par dire que j'ai été déçu d'entendre votre présentation en anglais. Mes questions seront en français.
Je suis content que vous ayez parlé de l'importance du programme Investissements dans la transformation de l'industrie forestière, ou ITIF. Mon collègue conservateur M. Trost a dit qu'il est important que chaque dollar dépensé par le fédéral soit maximisé et aille plus loin, et je suis d'accord là-dessus. Néanmoins, cela reste une question de chiffres.
L'année passée, le gouvernement conservateur a proposé de bonifier le programme ITIF de 90,4 millions de dollars sur quatre ans. Comme vous l'avez mentionné, les besoins de l'industrie forestière sont très grands. Dans son rapport prébudgétaire, l'Association des produits forestiers du Canada a demandé au gouvernement de bonifier l'enveloppe de 500 millions de dollars sur six ans, car elle considère que ce montant correspond réellement aux besoins de l'industrie forestière. Il est certain que quand l'industrie forestière reçoit de l'argent du fédéral ou d'un autre palier gouvernemental, vous en êtes quand même contents.
J'aimerais que vous me parliez des projets que vous aimeriez mettre en avant qui stimuleraient tant le secteur forestier au Canada que l'économie canadienne, si le gouvernement fédéral bonifiait davantage ce programme. Je suis souvent désolé de voir que le gouvernement conservateur, qui dispose de ressources financières limitées, donne davantage d'argent au secteur automobile qu'au secteur forestier.
Si le gouvernement fédéral bonifiait le programme ITIF à la hauteur de ce que l'Association des produits forestiers du Canada demande, quelles initiatives votre entreprise et les autres qui sont représentées ici pourraient mettre en avant?
Je vais répondre à votre question et j'aimerais aussi faire un commentaire sur un point important qui a été soulevé plus tôt, lors de la réponse à la question précédente.
Il y avait des projets de plus d'un milliard de dollars pouvant permettre de développer des nouveaux produits et en améliorer la compétitivité, de même que favoriser l'utilisation de la fibre ici au Canada. Il y a énormément de projets de toutes sortes qui proviennent de différentes industries, qu'il s'agisse de bois, de papier, de pâte, et d'autres.
Sans être trop précis, nous continuons à développer la bioraffinerie. Certains de nos projets vont nous permettre d'utiliser des résidus, qui sont valorisés d'une certaine manière et de les développer pour fabriquer de nouveaux produits visant à remplacer des plastiques, des carburants, entre autres choses. Tout cela va améliorer la compétitivité.
Les travaux de recherche qui ont été faits au cours des cinq ou dix dernières années ont énormément de potentiel et peuvent contribuer à faire avancer plus rapidement notre industrie, au Canada, et la solidifier.
J'aimerais revenir au commentaire sur la fibre de bambou.
Excusez-moi, monsieur Pelletier, mais j'ai peu de temps et j'aimerais vous poser une autre question.
Vous avez parlé de bioraffinerie. Appuyez-vous la demande de l'Association des produits forestiers du Canada selon laquelle le gouvernement devrait rediriger tous les capitaux non déployés du Fonds de biocarburants ProGen de Technologies du développement durable Canada, d'une valeur de 500 millions de dollars, vers un fonds de bioraffinerie qui serait utilisé pour tous les débouchés en bioénergie, biochimie et biomatériaux?
C'est le cas, absolument. Nous nous sommes penchés sur ce fonds à plusieurs reprises. Les commentaires que nous avons entendus est qu'il n'est pas utilisé et qu'il est très difficile à utiliser. Par ailleurs, il y a là énormément de potentiel pour faire avancer l'industrie forestière.
Avez-vous l'impression que le gouvernement fédéral est peu réceptif à l'idée de modifier les critères d'admissibilité à ces programmes?
Je ne peux pas répondre à cette question directement parce que je crois que la demande a été faite récemment. Je ne suis donc pas en mesure de faire des commentaires sur ce sujet.
[Traduction]
Votre temps de parole s'est écoulé. Les néo-démocrates profiteront d'une autre série de questions.
Au tour maintenant de M. Leef.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à vous tous.
Certains de vos propos m'ont intéressé tout particulièrement. Vous avez apporté des éléments techniques, qui sont très différents de ce que nous avons entendu dans le cadre de notre étude jusqu'à présent. C'est un excellent complément aux témoignages que nous avons déjà recueillis.
J'aimerais poser une question à chacun d'entre vous, si nous en avons le temps. C'est peut-être une question un peu rêveuse, et vous aurez à être succincts. Selon vous, quel est l'avantage dont dispose le Canada actuellement par rapport à tous les autres pays qui pourra nous servir? Je ne veux pas me limiter à la ressource brute. Pensez à l'innovation, aux compétences, aux ressources humaines, à la diversité, à l'action politique, aux volumes de production, aux politiques ou aux lois. Tout est possible. Quel est l'avantage qui fait que le Canada est unique au monde?
Je crois que le Canada est chef de file en ce qui concerne le développement du concept de bioraffinerie. Les produits de notre université ne peuvent pas être comparés à ceux fabriqués à grande échelle. Nous devrions nous concentrer sur ce concept et travailler avec tout le secteur des produits forestiers afin de le développer et de fabriquer à grande échelle des produits à commercialiser. Voilà l'essentiel.
J'aimerais aussi vous parler de l'entrepreneuriat. Les jeunes veulent monter leurs propres entreprises, et c'est ce qu'ils font. L'Université de Toronto donne naissance à 364 entreprises chaque jour. J'ai des étudiants en foresterie qui ont mis sur pied des entreprises. Nous devons les encourager. Nous devons leur offrir un soutien afin qu'ils puissent créer un produit commercial, qui sera ensuite repris par une usine comme celle de M. Pelletier. Nous serons ainsi intégrés au secteur et nous aurons accès au marché international et aux capitaux. C'est ce que nous devons faire.
Merci.
Vous nous avez dit de ne pas parler de la ressource brute, mais nous l'avons, et nous travaillons sur tous ces aspects. Nous sommes chefs de file dans bien des domaines, comme je l'ai indiqué à maintes reprises, notamment pour ce qui est de la cellulose nanocristalline et la fibre de carbone.
Je le répète, malgré ces innovations, nous ne sommes pas en mesure d'être concurrentiels vis-à-vis du prix de bien des produits qui sont issus du secteur pétrolier. Lorsque le prix remontera, nous serons de nouveau concurrentiels.
Nous avons le savoir-faire, nous avons les scientifiques. Les entrepreneurs travaillent sur des produits, mais pas pour en faire une distribution à grande échelle. Ce sont des produits à valeur élevée fabriqués en petite quantité. Leur fabrication est limitée par l'approvisionnement en d'autres matières brutes.
Je peux vous donner une autre perspective. Je suis ingénieur de formation et j'adore la technologie.
Il se passe plein de choses intéressantes au chapitre de l'innovation au Canada, mais je dirais que l'avantage qui nous distingue, c'est notre proximité du marché américain. Le plus grand marché de consommateurs au monde est à notre porte, à six heures de route. Il est très facile de fabriquer nos produits ici et de les expédier vers ce marché, et la plupart des entreprises du monde souhaitent s'implanter ici pour accéder à ce marché. C'est donc un avantage naturel et je ne sais pas si nous en profitons autant que nous ne devrions.
L'exportation de la matière brute, par opposition à la production sur place, mérite une analyse qui pourrait donner des pistes évidentes.
Nous l'avons indiqué dans notre exposé, et M. Voss vient de le répéter, c'est-à-dire que nous devons rapatrier certaines productions qui ont lieu ailleurs. Je crois que nous devrons créer les conditions propices ici. Certains acteurs se penchent sur la question, mais comme je l'ai indiqué, ils ne vont pas plus loin parce que les conditions nécessaires ne sont pas tout à fait réunies.
Là encore, il faut travailler à l'échelon fédéral et provincial avec certains partenaires afin de créer ces conditions propices, et je crois que nous aurons des produits très innovateurs issus du cycle de développement.
Pour la gouverne de tous, le cycle de développement ne dure pas une, deux voire trois années. C'est 5, 10 ou 15 années pour un seul produit. Le produit auquel je pense existe sur le marché depuis 15 ans et on commence maintenant à s'y intéresser vraiment.
Nous devons assurer les conditions propices entre le présent et 10 ans dans l'avenir, et nous ne le faisons pas suffisamment. Il faut prévoir les conditions nécessaires.
[Français]
Il y a un autre facteur clé. Les forêts canadiennes sont gérées sur une base durable. C'est une ressource qui est très bien gérée au Canada; nous sommes des leaders à cet égard. Nous avons accès à une fibre renouvelable qui sera là pour plusieurs années. C'est l'une des conditions clés. De plus, il y a un réseau de recherche très développé au Canada. Plusieurs personnes sont très passionnées par la foresterie et le secteur forestier. Ce sont des éléments qui jouent en faveur de l'industrie canadienne et du Canada en général, mais il faut mettre en place les bonnes conditions pour attirer cette troisième transformation.
Je vous remercie.
[Traduction]
Merci, monsieur Leef.
Je cède maintenant la parole à M. Caron et à M. Rafferty.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président. Effectivement, je vais partager mon temps avec M. Rafferty.
J'ai une seule question. Monsieur Pelletier, vous sembliez vouloir vraiment faire un commentaire sur le bambou. Je vous donne ici l'occasion de le faire.
Le bambou fait partie des produits qui a été mentionnés tout à l'heure, mais c'est une petite portion du marché. J'ai parlé d'une autre fibre, le Tencel, qui pourrait se développer au Canada. Elle occupe une grande part de ce nouveau marché et il y a des possibilités de développer ce marché au Canada. Ces gens veulent investir un peu partout dans le monde et ils n'ont pas nécessairement pris une décision finale. Il serait intéressant de s'asseoir tous ensemble afin de créer les conditions pour qu'ils viennent au Canada et y construisent leurs unités de production pour fabriquer cette fibre.
[Traduction]
Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Rakshit et monsieur Voss, vous avez tous les deux parlé des problèmes de compétitivité que connaît le Canada. Vous avez mentionné notamment le transport et les marchés. Je vous demanderais de répondre tous les deux brièvement à ma question.
Quel est le rôle du gouvernement fédéral? Devrait-il jouer un rôle plus agressif, afin de réduire le manque de compétitivité que vous avez évoqué tous les deux? Messieurs?
Je vais m'attarder davantage aux questions pratiques, plutôt que celles liées à l'innovation.
Les déficits en matière d'infrastructure sont accablants. Pendant la période allant de 2007 à 2010, la ligne ferroviaire menant jusqu'à Meadow Lake a été détruite, ce qui semble inconcevable, lorsqu'on songe à notre besoin d'expédier nos produits vers les marchés. Il n'existe plus de voie ferroviaire, et nous dépensons donc des dizaines de millions de dollars chaque année pour entretenir des autoroutes afin d'acheminer nos produits au marché. La question d'actualité brûlante, c'est le grain et tous les produits dérivés, que l'on transporte avec grande difficulté vers les marchés. Il faut utiliser les camions, car les chemins de fer ne sont pas fiables. C'est un problème fondamental d'importance nationale qu'il faut résoudre. Ce serait le rôle du gouvernement fédéral.
Quant à notre capacité d'adopter de nouvelles technologies, vous trouverez que la plupart des programmes du gouvernement fédéral nous encouragent à créer des emplois, mais pas forcément à en éliminer. Les investissements technologiques suppriment des emplois, et c'est en fait une bonne nouvelle, car on en conserve ainsi d'autres. Préfériez-vous fermer la scierie parce qu'elle n'est pas viable, ou encore investir dans de nouvelles technologies et former des gens en conséquence? Nous avons une belle occasion d'adapter certains de nos programmes et d'examiner ce secteur de notre économie, ce qui nous permettrait de former des gens dans des technologies de pointe afin qu'ils puissent manier l'équipement perfectionné, plutôt que de recruter de simples ouvriers dans une usine. Je crois que c'est ce que veulent la plupart des jeunes gens de toute façon.
Si j'ai bien compris votre question, l'un des problèmes, c'est les frais de transport, comme je l'ai indiqué plus tôt. Si on compare nos frais à ceux des économies émergentes, on constate que leurs frais de transport et de main-d'oeuvre sont plus bas, et ces pays ne sont pas confrontés aux mêmes exigences environnementales. Tous ces facteurs réunis font que notre activité de transformation... Nous dépensons plus de 120 $ en transport, ce qui gruge beaucoup nos recettes.
Quant aux usines de pâte et de papier existantes, comme celle de Thunder Bay dont on a parlé plus tôt, je crois qu'elles deviendront des centrales d'énergie dans 10 ans. Le secteur va déjà dans ce sens: 50 % de ces usines produiront des granulés plutôt que... Justement au sujet des granulés, comme nous le savons tous, nous expédiions des granulés vers l'Europe depuis la Colombie-Britannique, mais il est maintenant question d'expédier ce produit depuis Thunder Bay, car avec les nouvelles technologies, il est désormais possible de transborder les granulés des petits vraquiers vers les plus grands. Avant, le coût était prohibitif. Au moins une société, Rentech, a mis au point une technologie qui rendrait...
Je n'en connais pas tous les détails. Lorsque je suis arrivé, je trouvais cela bizarre qu'il était possible d'exporter depuis la Colombie-Britannique, mais non de Thunder Bay, mais il semble que Rentech a maintenant résolu ce problème. Si c'est effectivement le cas, et j'ai entendu dire que Rentech a conclu un contrat de 10 ans, à ce moment-là plus de sociétés s'y intéresseront et les entreprises du secteur auront moins de problèmes de viabilité.
Merci à vous tous d'être venus aujourd'hui. La réunion a été fort intéressante et très utile pour notre étude.
Merci à M. Voss, M. Gray, M. Rakshit, M. Sain, M. Pelletier et M. Veilleux. Nous vous sommes très reconnaissants de votre présence. Vos témoignages alimenteront notre étude.
La séance est levée.
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