Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions aujourd’hui les défis en santé mentale auxquels sont confrontés les agriculteurs, éleveurs et producteurs canadiens.
Au cours de la première heure, nous accueillons Mme Lisa Ashworth, administratrice, Région 6, du Conseil d’administration de l’Alliance agricole du Nouveau-Brunswick, ma province. C’était l’ancienne région de M. Harvey.
Nous accueillons également Shawn Brook, président de Issues Ink, par vidéoconférence de Winnipeg, au Manitoba et Devyn Brook, gestionnaire de communauté de la Do More Agriculture Foundation.
De plus, nous accueillons Eduardo Huesca des Centres de santé des travailleurs de l’Ontario, il est coordonnateur de la sensibilisation et des programmes communautaires, Programme des travailleurs agricoles saisonniers, Hamilton; et Michelle Tew, infirmière en santé du travail, de la Clinique de Hamilton.
Bienvenue à tous. Nous allons commencer par des déclarations préliminaires de six minutes.
Madame Ashworth, voulez-vous commencer? Merci.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous.
Comme vous venez de l’entendre, je m’appelle Lisa Ashworth et je suis heureuse de m’adresser à vous aujourd’hui au nom de l’Alliance agricole du Nouveau-Brunswick. Notre organisation porte la voix des agriculteurs de notre province. Il se trouve que la santé mentale est un sujet dont nous avons beaucoup parlé dernièrement, en nous interrogeant sur ce que nous devons faire et comment y parvenir.
Il est encourageant de voir que les producteurs commencent à reconnaître publiquement que bon nombre d’entre nous et de nos collègues ont des problèmes de santé mentale, mais cela met aussi en lumière le fait que les problèmes auxquels fait face le secteur agricole sont uniques et qu’il y a de nombreuses lacunes et défaillances dans les services offerts quand les producteurs demandent de l’aide.
Lorsque j’ai reçu le courriel me demandant de faire cette présentation, il y a quelques jours, j’ai ri parce que j’avais l’impression que cela correspondait typiquement au stress que connait une famille agricole. Votre journée est bien remplie. Vous êtes en retard. Vous avez des échéances que vous ne respectez pas, puis vous vérifiez vos messages et on vous demande de faire une chose de plus. Vous dites: « Bien sûr, j’aimerais bien le faire », parce que c’est important et parce que quelqu’un doit le faire. Les agriculteurs et leurs familles sont des gens qui font avancer les choses. C’est notre culture, mais cette solide éthique professionnelle se paie souvent au prix fort. Nous commençons enfin, heureusement, à parler de ce prix.
En faisant quelques recherches, j’ai noté avec intérêt que, quelle que soit la revue scientifique, les auteurs des articles reconnaissaient tous que les agriculteurs sont à risque élevé d’avoir ou de développer des problèmes de santé mentale en raison de la nature unique de leur travail.
On trouve dans l’International Journal of Social Psychiatry un article de 2005 qui commence en déclarant que « les agriculteurs connaissent l’un des taux de suicide les plus élevés tous secteurs confondus et il y a des preuves que les agriculteurs sont plus à risque de développer des problèmes de santé mentale ».
Plus loin de nous, le Scandinavian Journal of Work, Environment & Health a conclu un article en déclarant que « les agriculteurs étaient plus susceptibles d’avoir des taux de dépression plus élevés que les autres groupes professionnels, mais aussi que leurs frères et soeurs qui ne travaillaient pas comme agriculteurs ».
Si toutes les recherches démontrent que notre profession nous prédispose à des problèmes de santé mentale, la première étape évidente consiste à nous demander « Pourquoi? » et c’est ce que nous faisons. Un article de 2013, portant sur les conditions de travail psychosociales, la santé mentale et le stress des producteurs laitiers, à l'échelle internationale a attiré mon attention. Il porte un titre marquant: « International Perspectives on Psychosocial Working Conditions, Mental Health, and Stress of Dairy Farm Operators ». Il contient des renseignements que vous avez déjà entendus de la part de témoins précédents. L'article dit:
Les exploitants de fermes laitières [...] sont confrontés à de nombreuses demandes et à de nombreux facteurs de stress dans leur travail quotidien [...] les fermes dépendent beaucoup des conditions extérieures, comme les conditions météorologiques, les fluctuations des marchés et la réglementation fixée par les autorités gouvernementales. Parmi les facteurs de stress externes possibles, mentionnons les épidémies, les questions fiscales et les attitudes négatives récentes de la société à l’égard de l’agriculture... Des exigences et des attentes professionnelles élevées, associées à un faible contrôle et à un manque de soutien social, peuvent mener à un milieu de travail psychosocial médiocre, à des niveaux de stress accrus, à une mauvaise santé mentale, à la dépression et, dans les pires cas, au suicide.
Je ne veux pas faire perdre de temps au Comité en répétant ce que vous ont déjà dit les témoins précédents, mais il est important de noter qu'en lisant les délibérations, la plupart des choses que j’avais notées comme étant prioritaires dans mon intervention ont été biffées de la liste parce qu’elles avaient déjà été mentionnées.
Cela met en évidence le fait que nous sommes un pays diversifié où les entreprises et la géographie sont très différentes, mais les problèmes liés à la santé mentale sont en fait très semblables. Nous avons des guerres commerciales. Nous avons des accords commerciaux. Nous avons des taux d’intérêt. Beaucoup de culpabilité liée au fait d’essayer de trouver un équilibre entre le travail et la famille. La plupart d’entre nous vivons sur notre lieu de travail. La liste des facteurs de stress est très longue et la question suivante est: « Qu’allons-nous faire pour que cela change? »
Pour revenir au Nouveau-Brunswick, nous n’avons encore rien fait, mais nous essayons. Nous n’avons pas de programme de sécurité agricole ni de services de santé mentale organisés. Nous sommes une très petite province, alors les ressources sont toujours un défi. Nous avons décidé d’essayer de travailler ensemble. Dans l’Île-du-Prince-Édouard et en Nouvelle-Écosse des accès à des services de conseils sont offerts aux membres des fédérations d’agriculture. Ces deux provinces ont également des ressources assignées aux programmes de sécurité agricole.
Nous avons convenu d’une approche régionale en matière de sécurité agricole, de partage des connaissances et de programmes, dans la mesure du possible. Au Nouveau-Brunswick, l’Alliance croit fermement que les initiatives en matière de santé mentale relèveraient naturellement de la sécurité agricole.
Comme d’autres témoins l’ont déjà mentionné au Comité, nous pensons que l’adoption d’une approche coordonnée par le gouvernement fédéral en matière de développement et de prestation des ressources en santé mentale est souhaitable. Cela élimine le dédoublement et le gaspillage de ressources précieuses et fait en sorte que les petites provinces et les régions éloignées aient ce dont elles ont besoin pour soutenir leurs producteurs et leurs familles.
Pour obtenir des bienfaits à l’échelle nationale, nous avons besoin de plus de gens formés en premiers soins en santé mentale et nous avons besoin d’un accès fiable à des réseaux à large bande. Les services de télésanté et de vidéoconférence pourraient être essentiels dans les régions éloignées, si le service Internet était fiable et à haute vitesse.
Pour terminer, j’aimerais poser une question qui découle de l’expérience personnelle de notre famille en matière de services de santé mentale au cours des derniers mois. Pourquoi les soins primaires en santé mentale ne sont-ils pas couverts par l’assurance-maladie de la même façon que la santé physique? Des interventions rapides font non seulement économiser de l’argent au système d’assurance-maladie à long terme, mais elles sauvent aussi des vies.
Je tiens à vous remercier d’avoir consacré du temps à cette question et j’ai hâte de connaître les mesures qui découleront de ces discussions.
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Plutôt que de vous citer des statistiques, mon objectif était de partager une histoire. J’ai animé cette année une discussion en groupe avec deux jeunes femmes incroyables, Kim Keller et Lesley Kelly, de la Do More Agriculture Foundation, lors d’une réunion de technologie agricole à Edmonton.
Nous n’avions aucune idée du nombre de producteurs qui seraient intéressés par cette conversation. Nous n’avions aucune idée du taux de participation, mais l’organisateur voulait que ce débat ait lieu.
On nous a placés dans une grande salle de conférence et nous l'avons vu se remplir, certains visages était familiers, mais beaucoup ne l'étaient pas. Tous étaient là pour avoir cet échange.
J’avais prévu de commencer par trois questions. Chacune d’entre elles était un filet de plus en plus grand pour amener le public à voir l’impact de la maladie mentale.
Ma première question était la suivante: qui connaît quelqu’un qui s’est suicidé? Pratiquement toute la salle s’est levée. J'en ai encore des frissons. J’étais sidéré, dévasté et le coeur brisé, mais j’étais devant des centaines de personnes et nous devions continuer. Heureusement, j’étais avec deux des femmes les plus fortes et les plus impressionnantes que j’aie jamais rencontrées. Ensemble, nous avons discuté de la santé mentale en agriculture.
Après la séance, une fois nous avions quelque peu retrouvé nos esprits, je me dirigeais vers la réunion suivante et j’ai vu un homme âgé qui se dirigeait vers moi. Je me suis dit, bon sang, que va me dire ce monsieur?
Il m’a tendu la main et m’a dit: « Merci. Merci pour cette séance et merci de m’avoir sauvé la vie. » J'ai bafouillé un commentaire du genre: « Pardonnez-moi? » et il a donné ce qui semblait être une explication mûrement réfléchie. Il a dit: « Après avoir entendu cet exposé, je vais trouver un professionnel à qui parler. J’ai des difficultés et je ne voulais pas l’admettre. Merci. »
Cela m’a amené à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour aider les gens à comprendre ce que c’est que de souffrir d’une maladie mentale, pour soutenir les gens qui souffrent et de travailler aussi fort que possible à mettre en place les ressources nécessaires pour changer les choses.
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La Dre Andria Jones-Bitton, de l’Université de Guelph, a récemment mené une étude nationale sur la santé mentale des agriculteurs. L’enquête s’est déroulée de septembre 2015 à janvier 2016 et comprenait des agriculteurs de tout le Canada. Elle a constaté que 35 % des répondants répondent à la définition de dépression, 45 % répondent à la classification de stress élevé et 58 % répondent à la définition d’anxiété. Le plus préoccupant, cependant, c’est que 40 % des agriculteurs se sentaient mal à l’aise de demander de l’aide professionnelle par crainte de ce que les gens pourraient penser. Cela montre qu’il ne s’agit pas seulement d’une question individuelle, mais d’un débat culturel qui entoure l’industrie à l’heure actuelle et à laquelle nous pouvons participer.
La demande pour que les choses aillent plus loin est à l’origine de Do More Agriculture Foundation, est un organisme pancanadien sans but lucratif qui fait la promotion du bien-être mental de tous les producteurs canadiens. Nous nous efforçons de créer une culture dans l'agriculture par laquelle tous les producteurs canadiens sont autonomes, soutenus et soucieux de leur bien-être mental. Do More Agriculture Foundation a trois grands objectifs: sensibiliser, renforcer la communauté et soutenir la recherche.
À quoi cela ressemble-t-il en action? L’une de nos initiatives les plus stimulantes a abouti à un partenariat avec Financement agricole Canada appelé le fonds communautaire, qui vise à confier les premiers soins en santé mentale aux collectivités partout au Canada. Nous ne savions pas si les gens allaient présenter une demande pour le fonds communautaire et nous avons été sidérés par le fait que plus de 100 participants, ou plus de 100 communautés de l'ensemble du Canada ont fait une demande au fonds communautaire pour apporter les premiers soins en santé mentale à leurs communautés.
Nous sommes très enthousiastes à l’idée que de telles choses se produisent et que nous puissions renforcer les capacités de notre industrie afin de ne pas dépendre uniquement de l’équipe d’intervention en cas de crise. Nous dépendons des collectivités individuelles pour venir en aide aux voisins, aux amis et aux familles de façon nouvelle et améliorée, mais aussi pour leur donner tous les outils nécessaires pour gérer et soutenir une personne aux prises avec des problèmes de santé mentale.
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Bonjour et merci beaucoup de me donner l’occasion de contribuer à cette discussion très importante.
Je m’appelle Eduardo Huesca et je travaille pour les Centres de santé des travailleurs de l’Ontario, le CSTO, un réseau de cliniques financées par le ministère du Travail de l’Ontario comme ressource gratuite pour les travailleurs de l’Ontario et leurs employeurs.
Plus précisément, je suis le coordonnateur du programme des travailleurs agricoles saisonniers du CSTO, qui existe depuis 2006. Je suis accompagné de ma collègue Michelle Tew, infirmière en santé du travail qui travaille à notre programme depuis ses débuts.
Notre programme fonctionne directement avec les travailleurs agricoles saisonniers de l’Ontario afin de mieux comprendre leurs expériences de travail, de cerner les principaux problèmes de santé au travail qui les touchent et de répondre par des initiatives, des recommandations, des ressources pédagogiques adaptées à la langue et à la culture qui sont utiles à ces travailleurs et à leurs employeurs pour appuyer la Santé et la sécurité au travail à la ferme.
Grâce à notre travail, nous avons cerné les problèmes de santé mentale qui touchent les travailleurs agricoles saisonniers de l’Ontario. Nous constatons également que ces résultats se reflètent dans un nombre croissant de recherches effectuées par des universités de premier plan partout au Canada. Plus récemment, des données cliniques ont également commencé à émerger d’un nombre croissant de centres de santé communautaires de l’Ontario qui gèrent des cliniques de soins de santé primaires spécialisées pour les travailleurs saisonniers dans ces régions. Ces données identifient également la détresse mentale chez ces travailleurs.
De plus, à l’instar des conclusions présentées sur le manque ou les limites du soutien en santé mentale actuellement offert aux agriculteurs, nous avons constaté, dans le cadre de notre travail, des difficultés à trouver des ressources en santé mentale pour aider les travailleurs agricoles saisonniers dans les régions rurales locales où ces travailleurs résident.
Notre intention aujourd’hui n’est pas d’essayer d’éclipser ou d’occulter l’importance de comprendre la santé mentale des agriculteurs canadiens et d’y répondre. Grâce à notre travail, nous reconnaissons les défis extrêmement difficiles auxquels font face les agriculteurs et améliorons notre connaissance à cet égard. Nous reconnaissons leur résilience et leur force, et nous tenons à remercier les agriculteurs qui ont déjà témoigné devant le Comité et qui ont parlé de leur expérience de ces questions.
Nous tenons également à féliciter les responsables d’initiatives importantes qui leur ont apporté un soutien essentiel. Nous avons travaillé fort pour gagner la confiance des agriculteurs de l’Ontario et nous considérons notre programme comme un soutien pour eux. Bon nombre des agriculteurs avec qui nous travaillons, qui nous invitent dans leurs fermes à présenter nos séances d’information aux travailleurs agricoles saisonniers qu’ils embauchent, ont été soulagés d'établir des liens avec nous après avoir éprouvé de grandes difficultés à trouver des ressources efficaces en matière de Santé et de sécurité au travail pour répondre aux besoins particuliers des travailleurs agricoles saisonniers et s’acquitter de leurs responsabilités législatives envers eux en qualité d’employeurs.
Aujourd’hui, nous avons l’intention de nous faire l’écho du témoignage du Dr Patrick Smith, chef de la direction nationale de l’Association canadienne pour la santé mentale, qui nous rappelle de ne pas oublier l’expérience des travailleurs agricoles saisonniers dans le cadre de cet examen.
Encore une fois, nous ne voulons absolument pas laisser entendre que les agriculteurs et les travailleurs agricoles saisonniers sont en concurrence pour être l'objet de nos préoccupations, nous voulons plutôt reconnaître l’occasion qui s’offre à nous de chercher à mieux comprendre les problèmes de santé mentale auxquels est confrontée l’industrie agricole et de relever le défi de trouver des solutions pour ce secteur qui ne laissent personne pour compte.
La santé mentale des agriculteurs et celle des travailleurs agricoles saisonniers qu’ils embauchent sont liées. Nous avons eu des conversations fructueuses avec la Dre Andria Jones-Bitton et son équipe de l’Université de Guelph sur le fait que, tout comme les problèmes de santé mentale d’un agriculteur ont des effets directs sur sa famille, ils peuvent aussi avoir des répercussions sur les travailleurs qu’il gère. De même, un travailleur qui éprouve des problèmes de santé mentale peut affecter son employeur.
Il y a deux ans, nous avons reçu un appel d’un membre de la collectivité de Carlisle, en Ontario, entre Hamilton et Guelph, qui soutenait une agricultrice très désemparée après qu’un des travailleurs agricoles saisonniers qu’elle employait ait été hospitalisé suite à un empoisonnement à l’alcool lié à une dépression progressive. La dépression du travailleur avait atteint ce niveau de crise après le décès soudain d’un membre de sa famille proche et la prise de conscience qu’il ne pourrait peut-être pas retourner dans sa famille au Mexique avant la fin de la saison sans risquer de perdre son emploi sur la ferme ontarienne. Après coup, ses collègues ont constaté qu’ils avaient vu des symptômes de détresse chez cette personne, mais l’agricultrice a admis qu’elle ne les avait pas remarqués. Elle a été réveillée en pleine nuit, a dû appeler les services d’urgence, communiquer avec le consulat mexicain et trouver un moyen de soutenir les autres travailleurs qui avaient été témoins de la situation. Elle a été très éprouvée par cette expérience.
Une stratégie de soutien en santé mentale pour les agriculteurs qui offre, par exemple, de l’éducation sur les signes et symptômes de détresse mentale pourrait non seulement aider les agriculteurs à reconnaître et à comprendre les sentiments qu’ils peuvent ressentir ou reconnaître le comportement d’un mari, d’une épouse, d’un partenaire, d’un ami ou d’un voisin, mais aussi, si les travailleurs agricoles saisonniers sont inclus dans ce tableau comme étant potentiellement à risque, pourrait aider les agriculteurs à prévenir les crises de santé mentale chez les travailleurs qu’ils embauchent.
Nous appuyons les recommandations qui ont été présentées jusqu’ici à ce comité par des experts dans ce domaine. Cependant, nous suggérons de tenir compte de l’expérience des travailleurs agricoles saisonniers pour les inclure dans ces recommandations afin de mieux comprendre ce tableau et d’élaborer des réponses et des solutions inclusives.
Qu’il s’agisse de demander du financement pour la recherche dans ce domaine, y compris la recherche axée sur la santé mentale des agriculteurs ainsi que sur la santé mentale des travailleurs agricoles saisonniers ou peut-être la recherche innovante qui examine les recoupements entre les problèmes de santé mentale des deux groupes, cette inclusion et l’exploration possible des points communs et des différences pourraient permettre une meilleure compréhension entre ces groupes, créant un espace pour des recommandations qui pourraient s’appuyer mutuellement.
Dans le cas du travailleur sur le terrain qui rencontre l’agriculteur chez lui pour fortifier sa santé mentale, on peut imaginer qu'il amène avec lui un traducteur parlant l'espagnol ou le thaïlandais, par exemple, et qui connaisse bien les travailleurs agricoles migrants, pour ensuite envisager de l'envoyer auprès de travailleurs migrants susceptibles d'être intéressés.
Que le travailleur sur le terrain rende visite à l’agriculteur et au travailleur agricole migrant le même jour ou à des occasions distinctes, selon ce qu'on jugera le plus efficace, nous espérons, dans ce cas, que ce double objectif de soutien découlera de la même initiative pour qu'il soit possible de tirer parti de la collaboration avec les deux groupes et de favoriser ainsi une plus grande empathie, voire de créer un espace pour les relations entre agriculteurs et travailleurs agricoles de plus en plus sensibles à l'importance de la santé mentale.
Pour terminer, je dirais que les programmes permettant l’embauche de travailleurs migrants au Canada étaient, en eux-mêmes, une solution fédérale au stress vécu par les agriculteurs canadiens en raison des pénuries de main-d’oeuvre dans ce secteur. Par conséquent, d’une certaine façon, les travailleurs agricoles migrants font partie de cette conversation et de la solution aux problèmes de santé mentale des agriculteurs. Cela étant, nous espérons pouvoir envisager d'inclure ces travailleurs dans nos préoccupations concernant la santé mentale dans le secteur agricole et dans notre recherche de mesures efficaces grâce à la compréhension des enjeux. Il en résulterait une stratégie visant à soutenir un secteur agricole en bonne santé pour tous les intéressés.
Merci.
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Je vous remercie tous d’avoir pris le temps de participer à cette discussion.
Madame Ashworth, concernant le financement, vous avez parlé de la part de responsabilité du gouvernement fédéral, de la province ou de la région, puis à l'échelle locale.
Je crois, et c'est aussi le cas de beaucoup de gens à mon avis, que l’une des préoccupations exprimées dans nos recommandations est que nous ne voulons pas de processus trop bureaucratique. Comment le perfectionner pour que ces ressources aillent où il faut?
J'ai peut-être mal entendu. Pourriez-vous me rappeler ce que vous avez dit sur cette pyramide où les ressources se rendraient aux niveaux inférieurs, là où les choses se passent réellement?
Nous avons entendu d’excellents témoignages au sujet de Mme Brook et de sa mère. Il y a beaucoup de possibilités. Comment perfectionner cela?
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Cette question arrive à point nommé, étant donné la présence des autres témoins.
Nous réfléchissons à l'emploi de travailleurs étrangers temporaires depuis des années. Mais ce n'est pas ce que nous voulons. Nous voulons employer des gens de la région. Une entreprise agricole, c'est aussi un moyen de soutenir sa collectivité locale, mais nous n'arrivons pas à trouver des gens qui veulent bien venir travailler à 4 heures du matin. La plupart des gens ne veulent pas se salir, et tout cela.
C’est probablement le facteur de stress le plus important. Mon mari est très compétent dans son domaine. Il sait comment faire le travail, mais, quand on dépend de gens dont on ne sait pas s'ils vont venir ou non, c’est un stress incroyable — et c’est toute la famille qui en souffre.
Quand le téléphone sonne à 3 h 30 du matin, vous savez exactement ce qui se passe. Ce qu'on avait prévu de faire durant la journée est perdu. Comme nous sommes une exploitation assez grande, mon mari ne s'occupe pas, en principe, de la traite des vaches. Pour l'instant, il se débrouille, mais, quand quelqu’un ne se présente pas au travail, il s'en occupe. Le suivant en lice, mon fils, est parti faire ses études. Le plan de secours est maintenant absent pour au moins deux ans. Dès l’âge de 14 ans, notre fils a reçu ces appels à 3 h 30 du matin pour aller faire la traite. C’est ce qui se passe dans notre famille.
C’est un stress qui ne disparaît jamais. C’est quelque chose dont on ne se rend plus compte après un certain temps, et ce n’est pas sain. Nous le savons bien.
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C’est une excellente question.
Pour ce qui est des moyens novateurs, il y a certainement une progression vers la communauté en ligne. C’est quelque chose que nous avons vraiment travaillé à créer. Nous avons constaté que la création d'un espace de rencontre connaît beaucoup de succès. Qu’ils soient dans les champs ou ailleurs, peu importe, ils peuvent se connecter à du contenu, aux témoignages de gens qui ont vécu le même genre de choses. Que les gens aient ou non la confiance nécessaire pour téléphoner à quelqu’un et dire « écoutez, j’ai vraiment de la difficulté en ce moment », il est toujours possible de lire le témoignage de quelqu’un qui a vécu le même genre de situation ou qui a fait une certaine démarche et la partage, et c'est ainsi qu'on peut retrouver aussi un peu d’espoir.
C’est là que nous pouvons continuer d’explorer les moyens d'apporter une aide plus efficace. Nous avons progressé vers la création de programmes de soutien par les pairs. Je pense que ce sera modeste au début. Je pense que la première chose à faire est d'ouvrir un dialogue. Mme Ashworth a dit que ce sont des jeunes qui s'engagent dans l'agriculture et qu'ils n'appartiennent pas à la culture du « tu baisses la tête et tu fais ton travail ».
C’est aussi une occasion très intéressante pour le milieu agricole. Il y a une nouvelle vision et une possibilité novatrice, avec l'ouverture d'un dialogue qui n'existait peut-être pas, et cela peut faire partie de la culture dans laquelle nous parlons effectivement de ce qui se passe, dans laquelle nous parlons effectivement de la santé mentale et dans laquelle nous partageons nos expériences. C’est vraiment passionnant que l’agriculture devienne si inclusive. Les gens participent. Cela crée des échanges avec la population. Il y a du dialogue. Je pense que c’est une possibilité très intéressante.
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Merci. Je dois passer à un autre témoin. Mon temps est presque écoulé. Merci beaucoup.
Monsieur Huesca, je vous remercie beaucoup d’avoir éclairé la question des travailleurs migrants. Dans le cadre de cette étude, et pour des raisons légitimes, nous nous intéressons aux agriculteurs, mais ces travailleurs jouent un rôle énorme dans le bon fonctionnement d’une ferme. Ils ont été éclipsés dans cette étude. Merci d’avoir mis cette question en lumière.
Concernant les travailleurs migrants, de nombreux producteurs nous ont parlé de leurs difficultés à trouver de la main-d’oeuvre. Nous avons tendance à considérer les travailleurs migrants comme une simple statistique — il en vient tel nombre au Canada chaque année pour travailler, et les fermes ont besoin de tel nombre.
Selon vous, que pourrait faire le gouvernement fédéral pour amorcer cette conversation sur la santé mentale lorsque les travailleurs migrants passent par le processus de demande? Avez-vous des recommandations?
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Dans le cadre du programme du gouvernement fédéral, il y a une évaluation de la santé mentale des travailleurs qui arrivent. Il y a deux volets. Il serait peut-être bon que les travailleurs aient une certaine idée de ce à quoi ils peuvent s’attendre, par exemple à un certain sentiment d’isolement lorsqu’ils viennent dans notre pays, le fait qu’ils ne parlent peut-être pas la langue du pays ou qu’ils arrivent dans des villes rurales qui ne sont peut-être pas aussi diversifiées sur le plan ethnique et culturel ou qui ne reflètent peut-être pas leur origine.
Je pense aussi que, du côté du gouvernement fédéral, il devrait y avoir beaucoup d’éducation à l'intention des employeurs de travailleurs agricoles migrants pour les aider à mieux recevoir ces travailleurs. Dans beaucoup de ces villes rurales, on n’a peut-être pas l’expérience du travail avec une main-d’oeuvre d'origines diverses. Je travaille à Toronto. Dans les zones urbaines, on est en contact avec la diversité ethnique et culturelle. Dans certaines villes rurales, ce n’est pas la même chose. Je ne dis pas que c’est une bonne ou une mauvaise chose. C’est simplement la réalité. La situation est complexe quand on est un agriculteur qui a travaillé dans le cadre d'une certaine culture propre et qu’on fait venir un groupe de travailleurs, de sorte qu'il s'ajoute une dynamique du pouvoir ou des différences de communication. Sans une bonne introduction à certaines des choses qui pourraient se produire, les employeurs sont laissés à eux-mêmes pour régler beaucoup de problèmes.
L’éducation est double. Il s’agit, d'une part, de préparer les travailleurs migrants aux difficultés auxquelles ils peuvent s’attendre — ils n’ont pas de famille ici et beaucoup d’entre eux sont isolés —, mais il faut aussi s'occuper des employeurs et leur donner une petite idée.
J’aime beaucoup tous les discours sur le partage de témoignages et l’humanisation. Je pense que le souci de la santé mentale permet effectivement d'humaniser les relations, et c'est ce que font effectivement les témoignages. Si nous avions un programme de santé mentale permettant de partager ces témoignages, il faudrait veiller à ce qu'ils soient divers. Un agriculteur masculin parle de l’effet de la masculinité sur la stigmatisation de la santé mentale. Il y a peut-être une femme qui...
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Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de leurs présentations.
En tant qu'ancienne infirmière, j'aimerais d'abord m'adresser à Mme Tew, qui est infirmière.
Au Canada, 10 personnes se suicident par jour. On considère que le suicide est la neuvième cause de décès au pays. Parmi ces 4 000 personnes qui décèdent par année, plus de 90 % sont des agriculteurs.
Vous êtes infirmière. Que feriez-vous si un agriculteur, dont la ferme est près de sa maison, venait demander de l'aide en cas de crise? Comment pourrait-on aider cet agriculteur en détresse à prendre congé alors qu'il habite près de son lieu de travail?
Madame Tew, que faites-vous, sur le terrain, pour venir en aide aux agriculteurs en détresse?
Je vais passer à Winnipeg.
La Fondation Do More Ag a un site Web qui présente un nombre incroyable de services — c'est presque étourdissant. Il y a 13 services à l’échelle nationale, 6 programmes de formation, au moins un service par province et territoire. Supposons que je vive une crise de santé mentale et que je consulte ce site, où puis-je aller? Comment avoir accès au service qui me convient?
J’imagine quelque chose comme ce que notre gouvernement a mis au point pour les petites entreprises, je veux parler d'Innovation.canada.ca, qui permet aux petites entreprises d'exposer leur problème, ce qu’elles essaient de faire et comment elles essaient de le faire, et le site Web les aide à s'orienter vers les services des délégués commerciaux, des services de financement ou des services d’innovation.
Il semble que la Fondation Do More Ag a une très bonne base, mais je ne suis pas sûr que l’envoi d’un courriel au bas de la page soit la meilleure façon de communiquer avec des gens en crise. Les gens en crise ne réfléchissent peut-être pas aussi clairement que les autres, et ils sont vulnérables et dépassés. Est-ce que vous y avez songé? Est-ce que cela pourrait constituer une recommandation dans notre rapport, l'idée de créer une sorte de portail pour aider à orienter les gens vers les services dont ils ont besoin?
Au sujet de l’étude sur les services haute vitesse, M. Longfield et moi-même avons passé beaucoup de temps à en discuter, et nous sommes bien conscients des préoccupations des Canadiens des régions rurales et éloignées.
Nous approchons de la fin de cette étude. J’aimerais simplement remercier les femmes extraordinaires qui ont aidé à promouvoir le bien-être mental dans le secteur de l'agriculture, celles qui ont ouvert la porte juste un peu pour que nous puissions avoir une idée de ce que pourrait être un état d’esprit sain.
Je remercie également mes collègues du Comité d’avoir accepté de faire cette étude. Je l'avais proposée à l’occasion de la Journée Bell Cause pour la cause, et c’est un honneur pour moi de voir où cela en est et de constater que nous avons réussi à ouvrir ce champ de discussion.
La fin de semaine dernière, j’ai assisté au gala Ag for Life Harvest à Calgary. Ma femme devait m’accompagner, mais, pendant que j’étais au gala, elle terminait la récolte. Cela représente beaucoup de stress, mais il y a une chose dont on a parlé au cours de l'événement Ag for Life, c’est que leur dernier projet portait sur la sécurité agricole. Cette année, le thème sera l’éducation agricole. Comme le reste d’entre nous, je crois que les producteurs agricoles tiennent à ce que les Canadiens soient sensibilisés à la façon dont les aliments sont produits, aux résultats incroyables de la recherche et de l’innovation qui permettent aujourd'hui d'avoir l’approvisionnement alimentaire le plus sûr au monde. Évidemment que c'est ce qui compte aux yeux des agriculteurs. Et je crois que c'est quelque chose qui devrait être expliqué à nos concitoyens canadiens. Il faut faire la promotion de groupes comme Ag for Life et Do More Ag, et les gouvernements doivent veiller à promouvoir une stratégie « Ne pas nuire » pour nous aider à prévenir la diabolisation de notre secteur agricole.
À cet égard, différents groupes de personnes nous ont parlé du commerce, des barrières non tarifaires et des questions soulevées pour protéger les intérêts d’autres personnes dans d’autres pays. Les enjeux sont du même ordre pour nous concernant les produits dans notre propre pays, quand nous diabolisons un groupe, quand nous dressons un groupe contre un autre pour qu’il fasse la promotion de ce qu’il fait.
Concernant les autres mesures prises par les gouvernements — la taxe sur le carbone, qui représente des dizaines de milliers de dollars qui seront consacrés à l’agriculture —, il n’y a pas de marge supplémentaire pour ce genre de choses. Nous sommes dans concurrence internationale. C’est là que nous vendons nos produits. D’autres choses, depuis les changements apportés à l’étiquetage sur le dessus de l’emballage jusqu'au guide alimentaire, découlent toutes de réflexions qui semblent excellentes de l’extérieur, mais qui ne traduisent pas une juste compréhension de ce qui se passe sur le terrain.
J’espère que les organisations — celles qui ont comparu ici et d’autres — seront encouragées à nous fournir plus d’information pour que, dans le cadre de cette étude, nous puissions obtenir certains des points de vue et des solutions à cet égard.
J'aimerais poser une question à Devyn. Je vous ai suivie pendant longtemps. Je respecte le travail que vous et d’autres organisations avez accompli en pilotant ce dossier, et beaucoup d’autres groupes s'y sont joints. Que pouvons-nous faire, en matière de promotion éducative de l’agriculture, pour que l’on s’attaque aux générations de séparation entre les Canadiens des milieux urbains et ruraux et que nous puissions, comme Canadiens, travailler ensemble à trouver une solution pour cette merveilleuse ressource naturelle que nous avons?