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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 022 
l
1re SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 24 avril 2020

[Enregistrement électronique]

(1405)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Bienvenue à la première partie de la 22e séance du Comité permanent des finances de la Chambre des communes. Conformément à l'ordre de renvoi du mardi 24 mars, le Comité se réunit pour étudier la réponse du gouvernement à la pandémie de la COVID-19.
    Afin de faciliter le travail de nos interprètes et d'assurer le bon déroulement de la réunion, j'aimerais souligner quelques règles.
    L'interprétation de la vidéoconférence fonctionnera pas mal de la même manière que lors des séances ordinaires, et plusieurs d'entre vous ont déjà témoigné devant les comités. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, l'anglais et le français. Parlez aussi lentement et aussi clairement que possible pour les interprètes. Votre bouton de mise en sourdine est situé dans le coin inférieur. Veuillez désactiver votre micro jusqu'à ce qu'on vous donne la parole.
    En tant que président, et au nom du Comité, je tiens à remercier tout le monde d'être là. Nous nous sommes efforcés d'inviter un grand nombre de témoins. Je sais, par exemple, que la SARM essaie de se joindre à nous depuis environ trois semaines. Il y a huit témoins dans ce groupe, ce qui est beaucoup. J'aimerais donc que vous respectiez le plus possible les cinq minutes afin que nous ayons le temps de poser des questions.
    Sur ce, nous allons commencer.
    Passons d'abord, si possible, à Mme Cathy Heron, mairesse de la Ville de St. Albert.
    Je remercie les membres du Comité de m’avoir invitée à prendre la parole. Il s’agit d’une excellente occasion de présenter certains des travaux entrepris par St. Albert à l’échelle municipale durant la phase d’intervention en réponse à cette pandémie et de discuter des possibilités et des défis que nous prévoyons à moyen et à long terme alors que nous nous préparons à amorcer la reprise.
    Je m’appelle Cathy Heron, et j’ai l’honneur d’être la mairesse de la Ville de St. Albert. Je suis également vice-présidente de l’Alberta Urban Municipalities Association.
    St. Albert se classe régulièrement parmi les meilleures collectivités canadiennes où vivre et élever une famille. Située dans la région métropolitaine d’Edmonton, notre municipalité, qui compte plus de 66 000 habitants, connaît les mêmes possibilités et les mêmes défis que les grandes villes, tout en gardant son charme de petite ville. Au cours des dernières années, St. Albert a joué un rôle de chef de file sur plusieurs fronts, notamment en obtenant une renommée internationale à titre de ville intelligente, en interdisant la thérapie de conversion et en étant reconnue comme la collectivité la plus saine du Canada.
    En date d’aujourd’hui, l’Alberta Health Services a signalé que 27 résidants de St. Albert avaient contracté la COVID-19. Parmi ces cas, 3 sont toujours actifs et 24 patients se sont rétablis. Heureusement, aucun de nos concitoyens n’a succombé à la maladie, et nous espérons qu’il en sera ainsi.
    Le détachement local de la GRC et les services municipaux de maintien de l’ordre déclarent que nos concitoyens réussissent très bien à se conformer aux ordonnances de santé publique, en évitant les grands rassemblements et en respectant l’éloignement physique. Nos entreprises et nos résidants ont démontré leur volonté de faire les sacrifices nécessaires pour que notre ville puisse surmonter ce défi et créer une nouvelle normalité au sein de notre collectivité. Nous sommes vraiment reconnaissants du taux de conformité élevé à St. Albert, et tout porte à croire que cet esprit de coopération subsistera. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles nous n’avons pas encore jugé nécessaire de déclarer un état d’urgence à l'échelle locale.
    Lorsque l’Organisation mondiale de la santé a déclaré la pandémie, nous avons activé notre centre des opérations d’urgence pour centraliser et coordonner notre réponse à la COVID-19. Je pense que les mesures instaurées à St. Albert pour contrer la pandémie sont semblables à celles adoptées par d’autres municipalités du Canada. Par exemple, nous avons pris des mesures pour reporter l’acquittement de taxes et de frais de services publics, en plus de rendre gratuit le service de transport en commun et d'appliquer des mesures de réduction des coûts, notamment par la mise à pied temporaire de 30 % de notre effectif.
     Bien que nous en soyons encore à la phase d’intervention en réponse à cette pandémie, le conseil municipal de St. Albert a déjà créé un groupe de travail sur la relance, qui est chargé de nous guider pendant le reste de l’année 2020 et au cours de l’année suivante. Au bout du compte, la réussite de la relance future dépendra de notre capacité d’accéder à des sources de fonds dans l’immédiat. Ce dont nous aurons besoin de la part du gouvernement fédéral, c’est l’assurance que le soutien fédéral sera plus accessible et aligné sur celui du gouvernement provincial.
    Il est essentiel d'accorder un soutien fédéral aux municipalités en guise de renfort, et ce, pour trois raisons. Tout d'abord, le gouvernement fédéral a le meilleur accès, et le plus abordable, aux liquidités des marchés. Ensuite, il est possible de prolonger un programme fédéral, ce qui s’avérera nécessaire, selon moi, au fur et à mesure que nous connaîtrons les répercussions à long terme de la pandémie. Il faudra donc du temps pour que les municipalités adaptent leurs modèles de gouvernance et de fonctionnement à la nouvelle manière de faire les choses, et le retour à une situation économique positive sera retardé en fonction de ce délai. Enfin, c’est dans les municipalités que la reprise économique aura lieu. Encourager les villes à s’endetter davantage ou à enregistrer un déficit ne fait que retarder la reprise. Notre cadre financier étant désuet, nous nous trouvons à un point de bascule, et nous avons des possibilités limitées en matière de flux de trésorerie.
    En cette période d’incertitude, les Canadiens ont besoin de soutien et de leadership. Peu importe sa provenance, ce soutien doit être fiable et aligné, et le tout doit transcender la politique partisane. En tant que dirigeants municipaux, nous serons aux premières lignes quand viendra le temps de repenser nos collectivités dans le monde de l’après-COVID, mais nous avons besoin des outils nécessaires pour y arriver. Tout compte fait, les trois ordres de gouvernement ont un rôle à jouer pour appuyer les Canadiens pendant la période d’intervention en réponse à la pandémie, ainsi que durant la période de reprise. La Ville de St. Albert est résolue à travailler avec les gouvernements provincial et fédéral afin de trouver des solutions destinées à aider les résidants et les entreprises au cours des prochains mois.
    Je le répète, le soutien fédéral destiné à protéger les municipalités apportera de la certitude et permettra à des villes comme la nôtre de se concentrer sur la prestation de services de première ligne qui sont essentiels aux résidants et aux entreprises de nos collectivités. Toute aide, qu’il s’agisse d’injection de ressources ou de capitaux, devra être accessible rapidement et facilement. Les municipalités ont toujours apprécié à sa juste valeur la taxe sur l’essence, qu’elles considèrent comme l’outil idéal pour l’octroi de soutien.
    Je crois que c’est la toute première fois dans l’histoire récente que notre ordre de gouvernement réclame une telle aide, et nous ne prenons pas cette demande à la légère.
    Je vous remercie encore une fois de m’avoir donné l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui et de vous parler de l’expérience de St. Albert. J’espère ne pas avoir dépassé les cinq minutes.
(1410)
    C’était à une demi-minute près.
    Nous allons maintenant entendre M. Mike Hurley, maire de la Ville de Burnaby.
     Je vous remercie de me donner l’occasion de m’exprimer aujourd’hui.
     Merci au Comité et, en particulier, à mon député, Peter Julian, d’avoir pris cette initiative.
    Je crois que ces dialogues sont importants. Ils permettent d’échanger de l’information, de sorte que tous les ordres de gouvernement puissent travailler ensemble et s’entraider, le tout pour le bien commun des Canadiens. Nous sommes très reconnaissants du soutien que le gouvernement fédéral s’est employé à fournir et des efforts qu’il a déployés jusqu’à présent, dans le contexte de la pandémie, et nous vous en remercions tous.
    À l’échelon municipal, nous poursuivons nos efforts, de concert avec nos collectivités locales, grâce au dévouement extraordinaire de nos employés, qui fournissent des services essentiels et indispensables pendant de nombreuses heures, tout en faisant preuve d’un engagement inébranlable envers nos résidants. Cependant, les administrations locales ont encore besoin, de toute urgence, de l’appui du gouvernement fédéral pour soutenir les collectivités et assurer une reprise réussie.
    Les administrations locales et leurs collectivités respectives continuent de souffrir parce qu’elles n’ont pas droit à bon nombre des programmes fédéraux qui ont été récemment annoncés. Les administrations locales représentent l’instance la plus proche de la population, car elles fournissent des services essentiels pour répondre aux besoins des résidants. Songeons aux services de protection, qui comprennent les pompiers, la police, l’eau, les égouts, les routes et le drainage, ainsi que la collecte des déchets. Ces services répondent aux besoins fondamentaux de nos citoyens, d’où la nécessité de les maintenir afin d’assurer l’habitabilité et la viabilité.
    Les administrations locales demeurent le mécanisme qui permet de garantir la sécurité continue des collectivités, tout en veillant à ce que les citoyens reçoivent les services de base auxquels ils s’attendent en tant que Canadiens, peu importe l’endroit où ils vivent. Les programmes offerts actuellement par le gouvernement fédéral, à savoir la Subvention salariale d’urgence du Canada, la Subvention salariale temporaire et l’Aide d’urgence du Canada pour le loyer commercial, ont été mis en place pour aider les entreprises canadiennes, mais aucun de ces programmes n’est offert aux administrations locales. Pourtant, nous travaillons tous les jours sur le terrain et nous nous efforçons de répondre directement aux besoins des citoyens et des collectivités.
    Plus précisément, la Subvention salariale d’urgence du Canada fournit aux propriétaires d’entreprises 75 % du montant des salaires des employés afin de maintenir la continuité des activités et de garder les employés au travail. Si la portée de ce programme était élargie de façon à inclure les administrations locales, notre ville, qui figure parmi les grands employeurs de la région, pourrait maintenir en poste ses employés. Pour la Ville de Burnaby, les fermetures d’installations, dont les centres de loisirs avec piscines, les patinoires, les bibliothèques et les centres culturels, se sont traduites par des pertes de recettes considérables. L’impact financier de ces pertes représente actuellement entre 5 et 6 millions de dollars par mois. Les coûts prévus liés à la pandémie dépassent largement les dépenses habituelles. La pandémie est en train de provoquer une crise financière, et les administrations locales auront du mal à s’en remettre sans aucune aide. Certaines d’entre elles pourraient d’ailleurs ne jamais s’en remettre.
    La perte de recettes et les dépenses supplémentaires ont obligé la Ville de Burnaby à licencier 1 500 employés dévoués et travailleurs. Nous cherchons continuellement des moyens de réduire les coûts en ajustant les activités et en annulant ou en reportant des projets qui sont pourtant nécessaires pour la collectivité. Quoi qu’il en soit, ces mesures ne ralentissent aucunement l’hémorragie financière. Les personnes vulnérables de la collectivité, en particulier les sans-abri et les personnes âgées, tirent le diable par la queue. Les programmes offerts précédemment par les autres ordres de gouvernement ont maintenant été transférés aux administrations locales.
    La Ville de Burnaby a étendu les services des centres d’accueil pour répondre aux besoins de sa population itinérante, et nous continuons à tendre la main aux personnes âgées de la collectivité pour nous assurer que leurs besoins fondamentaux sont satisfaits quotidiennement. Aucun financement n’est prévu pour l’un ou l’autre de ces programmes, mais notre administration locale — le gouvernement du peuple — a fait et continue de faire l’impossible pour s’assurer que les besoins des citoyens sont comblés. Il s’agit d’un travail très important, voire crucial, mais cela ne peut pas durer indéfiniment.
    À tout le moins, le gouvernement fédéral doit procurer aux administrations locales un financement semblable aux programmes d’aide financière offerts au milieu des affaires. Cela nous permettrait de réembaucher les employés qui ont été mis à pied afin de fournir les services dont notre collectivité a tant besoin.
(1415)
    Une aide fédérale s’impose, et tous les ordres de gouvernement doivent travailler ensemble pour veiller à ce que tous les citoyens, quel que soit leur quartier, de Burnaby à St. John’s, puissent traverser cette crise et braver la tempête.
    J’espère que vous vous rendrez compte que le soutien aux administrations locales est un élément essentiel pour assurer une reprise réussie après cette pandémie. J’espère aussi que le gouvernement fédéral examinera sérieusement l’appel lancé par la FCM, qui réclame des fonds de fonctionnement d'urgence ciblés pour les municipalités, ainsi que ma demande d’élargir la portée de la Subvention salariale d’urgence, et celle des autres programmes mentionnés plus tôt, afin d’y inclure les administrations locales.
    Nous voulons accélérer la mobilisation de notre personnel et de la collectivité en vue d’entreprendre l’important travail de relance économique. Le Canada pourra ainsi redevenir le pays prospère que nous connaissons et que nous aimons tous.
    Encore une fois, je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de vous faire part de mes observations et de mes préoccupations.
    Merci beaucoup, monsieur Hurley.
    Nous allons maintenant entendre le maire de la Ville de New Westminster, M. Jonathan Coté.
     Merci beaucoup. C’est un plaisir d’être parmi vous. Je vous remercie de l’occasion qui m’est offerte de parler de certains des défis auxquels font face les villes.
    Mes observations d’aujourd’hui porteront vraiment sur les conséquences pour les organismes de transport en commun. Je suis actuellement maire de la Ville de New Westminster, mais je préside également le conseil des maires du Grand Vancouver, qui représente les 21 maires de la région et la Première Nation de Tsawwassen.
    TransLink, notre organisme de transport en commun, fournit des services de transport en commun et un soutien au principal réseau routier, en desservant 2,5 millions de personnes dans la région métropolitaine de Vancouver.
    Nous savons que la COVID-19 a eu des effets dévastateurs dans tout le pays et sur tous les aspects de la société, mais ces effets ont été particulièrement catastrophiques pour les réseaux de transport en commun. Ici, à TransLink, notre principale source de revenus provient des tarifs de transport en commun et, puisque le nombre d’usagers a diminué de 80 %, notre organisme est en train de perdre 75 millions de dollars par mois. Cette situation n’est certainement pas viable, et cela crée une pression énorme sur notre organisme de transport.
    Malgré une baisse importante du nombre d’usagers des transports en commun, nous constatons que 75 000 habitants du Grand Vancouver dépendent encore fortement de notre réseau de transport en commun. Nos sondages révèlent que, parmi les trajets effectués aujourd’hui sur notre réseau de transport en commun, 9 sur 10 d’entre eux sont liés à des services essentiels, que ce soit pour aller travailler dans une épicerie, pour faire ses courses ou pour un déplacement lié à des soins de santé. Notre réseau continue d’offrir des services essentiels et des options de transport essentielles. En outre, 150 000 ménages du Grand Vancouver ne possèdent pas de voiture, ce qui signifie que bien des gens de notre région n’ont pas d’autres moyens de transport.
    Compte tenu de la crise qui sévit en ce moment, TransLink a pris des mesures difficiles pour réduire considérablement ses services; ainsi, l’offre de services de transport en commun a été réduite d’environ 40 % dans la région.
    En dépit de ces répercussions très graves, qui touchent les usagers de toute notre région, TransLink estime que nous perdrons encore entre 40 et 50 millions de dollars par mois en raison du manque à gagner attribuable à la crise. Je saisis donc l’occasion qui m’est offerte de témoigner devant le Comité pour implorer le gouvernement fédéral d’examiner comment il peut jouer un rôle à titre de partenaire et contribuer à la viabilité des services de transport en commun, non seulement pendant la crise, mais aussi par la suite. D’autres pays dans le monde ont déjà reconnu l’importance des services de transport en commun, à la fois dans l’immédiat et durant la reprise, et ils ont mis en place des programmes de secours d’urgence.
    Du point de vue de TransLink, nous savons que les défis que nous devons relever en matière de prestation de services de transport en commun sont les mêmes que ceux auxquels font face les principaux organismes de transport en commun dans tout le pays, et nous reconnaissons qu’il s’agit vraiment d’une question nationale.
    Pour l’instant, nous nous employons à gérer la crise, après quoi nous commencerons à planifier la reprise. Nous sommes convaincus qu’un réseau de transport en commun viable et fonctionnel sera nécessaire pendant ces deux phases. Comme il s’agit d’un problème national qui touche les organismes de transport en commun partout au pays, nous voulons que le gouvernement fédéral examine sérieusement les possibilités en matière de secours d’urgence, en mettant l’accent sur le travail effectué par la FCM, qui propose un plan destiné à maintenir la viabilité du transport en commun dans notre pays.
(1420)
    Merci beaucoup, monsieur le maire.
    Entendons maintenant le président de la Fédération canadienne des municipalités, M. Bill Karsten.
    Soyez le bienvenu. À vous la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    La Fédération canadienne des municipalités remercie votre comité de son invitation.
    Je tiens aussi à prendre le temps de remercier les autres maires qui ont pu se joindre à nous, aujourd'hui, ainsi que tous les témoins qui viennent vous informer.
    Au nom de nos membres, permettez-moi de dire à quel point nous sommes reconnaissants au gouvernement fédéral d'avoir pris les mesures qui, jusqu'ici, permettent ces réunions. Nous lui sommes également reconnaissants de sa rapidité à appuyer les Canadiens au milieu de la pandémie actuelle.
    La situation exige des mesures d'urgence.
    Permettez-moi d'être tout de suite clair. Au nom de plus de 2 000 municipalités membres de toutes tailles de partout dans notre pays, nous restons unis et unanimes. La crise financière qui guette les municipalités canadiennes aggrave le risque qu'affrontent les Canadiens. Elle touche les communautés, petites et grandes, urbaines et rurales, de manière singulière. Des coûts imprévus surgissent alors que les municipalités appuient des mesures sanitaires de première ligne et fournissent les services centraux d'intervention. En même temps, leurs revenus s'effondrent. La crise causera des pertes irrémédiables. On a ainsi perdu des millions de dollars en reportant l'acquittement de taxes foncières, de frais de service et de frais imposés aux usagers, comme ceux des transports en commun, qu'a mentionnés le témoin précédent. Dans ce dernier cas, les pertes des villes et des communautés s'élèvent à 400 millions de dollars par mois, seulement du fait de la baisse de l'achalandage.
    Nous estimons que 25 000 emplois municipaux ont disparu, tandis qu'on n'a pas pourvu à 7 000 autres emplois temporaires. Dans une grande mesure à l'instar de ceux de Burnaby, les chiffres sont à peu près les mêmes à Halifax, soit environ 1 500. Il s'agit de services essentiels, et non pas de luxe, que les dirigeants municipaux doivent maintenir maintenant plus que jamais: police, service des incendies, ambulances quand on en a besoin, eau potable et ramassage des ordures.
    Disposant de peu de moyens financiers et obligés, par la loi, à ne pas faire de déficits, les élus locaux affrontent des difficultés inédites. Dans une comparution antérieure devant votre comité, nous avions affirmé que les principales locomotives de l'économie du Canada étaient la personnalité des villes et des communautés. Les crises qui apparaissent déstabilisent cette économie et le quotidien de tous les Canadiens.
    Faute de remèdes provinciaux ou fédéraux notables contre les baisses graves des revenus découlant de la pandémie de COVID-19, notre fédération réclame le partenariat de tous les ordres de gouvernement. Voilà la raison de notre présence ici, aujourd'hui, et voilà pourquoi, hier, notre fédération a lancé un appel urgent, à la grandeur du pays, pour la direction d'un mouvement au nom des villes et des communautés de tout le pays. Nous réclamons le financement d'urgence des frais de fonctionnement des municipalités, au moins 10 milliards de dollars d'allocations directes pour le financement ciblé du fonctionnement d'urgence de tous les pouvoirs locaux. Nous proposons une formule hybride, fondée sur le Fonds de la taxe sur l'essence, avec une allocation fondée sur l'achalandage des transports en commun des villes qui en possèdent, en grande partie comme on l'a décrite tout à l'heure.
    Ensuite, accorder un financement supplémentaire d'urgence pour les autorités locales que, pour leurs frais de fonctionnement, la COVID-19 soumet à des pressions financières très singulières. Nous demandons un engagement pour réévaluer ce financement supplémentaire dans quatre mois. Et que les autorités locales puissent transférer les allocations inutilisées dans le programme fédéral de la taxe sur l'essence, pour les dépenses en capital, pour aider, le moment venu, au rétablissement de l'économie canadienne.
(1425)
    Détrompez-vous: les dirigeants municipaux travaillent d'arrache-pied pour aider les Canadiens à traverser la crise. Nous voyons que les provinces ont un rôle qu'elles ne devraient pas abdiquer. Cependant, nous ne pouvons pas laisser ce principe plonger les municipalités dans une profonde austérité. L'urgence est simplement trop grande, trop grave. Il faut une intervention fédérale immédiate.
    Notre partenariat fédéral-municipal, dont nous sommes très fiers, a donné des résultats remarquables, comme nous le savons. Le renforcement de ce partenariat, maintenant, protégera les Canadiens pendant la pandémie. Nous sommes prêts à collaborer avec vous tous, pour que les Canadiens, après la crise, s'en sortent avec le moins de dommages possible.
    Merci encore une fois de votre invitation. Je serai heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Karsten.
    La parole est maintenant à madame la ministre Wawzonek, du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.

[Français]

    Bonjour, tout le monde.
    Je vous remercie de votre invitation.

[Traduction]

    Je me nomme Caroline Wawzonek, ministre des Finances, de la Justice et procureure générale des Territoires du Nord-Ouest.
    Ne voulant pas prendre plus de cinq minutes de votre temps, mais risquant de rater l'objectif d'une minute ou deux, je ferai de mon mieux.
    La COVID-19 a révélé la profondeur des vulnérabilités économiques et sociales des Territoires du Nord-Ouest, particulièrement dans les petites communautés, de l'accès aux soins de santé à l'absence de liens Internet dans nos foyers en passant par la confiance dans nos transporteurs aériens pour assurer notre sécurité alimentaire. Le moteur de notre économie, hors le secteur public, est notre industrie des ressources minérales, diamants en premier lieu, un produit de luxe exposé à des fluctuations qui échappent à notre volonté. Notre population souffre de nombreuses vulnérabilités sanitaires préexistantes, d'une faible diplomation et d'antécédents récents, sur le plan individuel et collectif, de traumatismes hérités en partie des pensionnats. La COVID-19 nous a brutalement rappelé les répercussions collectives de ces réalités et de ces autres difficultés.
    Malgré tous ces facteurs d'adversité, je suis fière du ralliement des habitants, des entreprises et des communautés des Territoires du Nord-Ouest derrière les mesures sanitaires instituées pour neutraliser la COVID-19 et lui interdire l'entrée dans nos communautés éloignées.
    Voyons maintenant les difficultés et les occasions que la COVID-19 a révélées et les réponses qui, à notre avis, sont nécessaires au renforcement et à la viabilité du Nord.
    L'un de nos points forts, c'est notre population. Elle très forte et très résiliente. Nous excellons dans la collaboration, comme l'a prouvé celle des pouvoirs publics et des autorités autochtones.
    Un autre atout est nos ressources minérales. L'immensité des Territoires du Nord-Ouest conserve un important potentiel minéral, par exemple le lithium et les terres rares, dont l'importance pourrait augmenter si la COVID-19 met à l'ordre du jour le recours accru à l'énergie verte.
    Les Territoires du Nord-Ouest sont la clé ouvrant l'océan Arctique et le passage du Nord-Ouest. La COVID-19 n'a aucune prise sur l'importance géopolitique de l'Arctique et son potentiel économique direct.
    Sur le plan de notre diversité culturelle, nous célébrons et protégeons 11 langues officielles. Chacune est traduite dans notre assemblée législative. Les connaissances culturelles, particulièrement l'intérêt dans les cultures et les langues autochtones soulèvent de plus en plus d'intérêt dans le reste du monde.
    Beaucoup de nos points forts n'ont pas été entamés par la COVID-19. Des faits anecdotiques accumulés jusqu'ici portent à croire que la vigueur des mesures annoncées par le gouvernement fédéral plus l'appui de notre propre gouvernement aux habitants et aux entreprises des Territoires du Nord-Ouest ne contribueront pas peu à la stabilisation de la situation économique immédiate. Nous sommes particulièrement reconnaissants des programmes qui ont ciblé précisément le Nord, par exemple l'enveloppe de 8,7 millions de dollars pour appuyer les transporteurs aériens des Territoires du Nord-Ouest.
    En ce qui concerne les difficultés révélées par la COVID-19, c'est dans les Territoires du Nord-Ouest que se trouve, au Canada, le pire déficit en infrastructures. Nos aéroports ne peuvent pas accueillir tous les avions, seuls quelques centres régionaux possèdent une poignée de refuges d'urgence, et l'insécurité alimentaire est grande. La COVID-19 a mis en évidence et, parfois, exacerbé ces faiblesses.
    Voici d'autres exemples. En éducation, notamment. Actuellement, tous les districts scolaires ont du mal a assurer une éducation sur le Web, très souvent sans accès suffisant, dans les foyers, au matériel informatique et avec une connectivité limitée avec Internet à la grandeur du territoire.
    Le confinement a entraîné une augmentation du chauffage et de la consommation d'énergie, dont les coûts sont déjà très élevés. La plupart des communautés comptent sur le mazout pour le chauffage domestique. Ce combustible est souvent la principale source de production d'électricité. À moins de croire que la chute récente du prix du mazout n'y soit favorable, il faut se rappeler que le mazout est acheté longtemps d'avance et expédié dans les communautés sur des routes de glace.
    Les logements surpeuplés et l'insécurité du logement, qui conduit à un logement de caractère transitoire, ont favorisé des promiscuités avec des personnes souvent déjà en moins bonne santé, le terreau parfait pour la propagation de la COVID.
    L'absence d'infrastructures pour les transports inféode les communautés aux transporteurs aériens pour les chaînes de ravitaillement en nourriture et en médicaments. Aujourd'hui, ces transporteurs sont dans le pétrin, et au moins l'un d'eux a déposé son bilan.
    Actuellement, nos propres sources de revenus sont très limités, désormais encore plus sollicités par nos efforts pour soulager immédiatement les pressions financières découlant de la réponse collective à la COVID-19. De plus, on s'attend à un impact majeur, du fait du non-acquittement des impôts sur le revenu des particuliers et des entreprises et de la diminution des redevances sur les ressources minérales. Même si nous sommes reconnaissants de l'aide financière que le Canada a accordée jusqu'ici, nous aurons certainement besoin de plus encore.
(1430)
    Nous sommes déjà enserrés dans un cadre financier étroit, qui limite notre capacité d'être un investisseur important dans des produits majeurs et de participer à des partenariats d'investissement aux modalités prédéfinies.
    Des occasions sont également à saisir. Note gouvernement a dû faire une pause dans ses travaux ordinaires et la poursuite de ses priorités, pour stopper la COVID-19, mais, en nous remettant à planifier le retour à notre activité, nous pouvons réfléchir aux modalités de ce redémarrage, avec une vision de nos aspirations envers nous-mêmes pour l'avenir.
    Nous essayons de distinguer les projets prêts à mettre en œuvre, mais qu'on pourrait retarder en raison de contraintes financières. Plusieurs autres projets sont presque mûrs pour la prochaine étape, des projets dont on a entamé la conception, la planification ou l'obtention de permis. Ils englobent, par exemple, la connectivité plus grande des télécommunications et l'augmentation de leur capacité, l'agrandissement de la capacité hydroélectrique de la centrale de la Taltson, en vue de rapprocher les Territoires du Nord-Ouest d'une utilisation domestique et industrielle d'énergies plus propres, qui pourraient ensuite conduire à une position de chef de file dans l'extraction minière verte; l'exploration de la province géologique des Esclaves, avec la possibilité de procurer au Nunavut son premier corridor direct de transport; le prolongement des lignes de transport d'hydroélectricité dans le sud du territoire; l'introduction et l'agrandissement de projets communautaires d'exploitation de l'énergie solaire et éolienne.
    Voici quelques recommandations. Premièrement, assurer une souplesse suffisante d'emprunt et une plus grande diversité des options de partenariats dans les investissements, notamment des occasions, pour les gouvernements autochtones, d'agir à titre de partenaires sociaux. Cela comprend la capacité de cumul de fonds, parfois avec des dollars à leur pleine valeur.
    Deuxièmement, accélérer l'établissement du Fonds de 2020 pour un réseau à large bande et la réalisation de la promesse d'un accès à ce réseau dans tous les foyers et toutes les communautés des Territoires du Nord-Ouest.
    Troisièmement, fixer des objectifs socioéconomiques pour l'Arctique et le cadre politique du Nord, qui peuvent être financés pour leur réalisation immédiate ou la planification immédiate de la prochaine étape et s'engager à le faire en collaboration avec les communautés du Nord et de l'Arctique, qui sont impatientes d'être traitées sur un pied d'égalité avec le reste du Canada.
    Nous savons que les pays qui investissent dans l'Arctique en profitent vraiment, grâce aux ressources naturelles, aux savoirs traditionnels ou à de nouvelles occasions dans les communications et le transport. Convaincus que c'est également vrai pour le nord du Canada, nous avons hâte d'être un partenaire permanent avec le Canada pour atteindre cet objectif.
    Je vous remercie.
(1435)
    Je vous en prie.
    La parole est maintenant à Mme Claire Bolduc, préfète de la Municipalité régionale de comté de Témiscamingue.
    Madame Bolduc, nous vous écoutons.

[Français]

     Mesdames, messieurs les membres du Comité, je vous remercie beaucoup de nous avoir invités à contribuer à cet exercice et à nous pencher sur les moyens financiers qui ont été mis en place pour soutenir l’ensemble de la population canadienne dans le contexte de la pandémie de la COVID-19.
    Je suis préfète élue de la MRC de Témiscamingue. Je représente un territoire de 19 000 km2 qui compte 19 municipalités, un comité municipal et 16 000 habitants. Quatre communautés autochtones se trouvent également sur ce territoire et nous comptons énormément de territoires non organisés. Les principales activités du Témiscamingue sont associées à l’agriculture, à la forêt, aux activités manufacturières et au tourisme.
    Vous aurez compris que notre territoire est essentiellement rural et que ses espaces sont multifonctionnels. À titre de préfète de la MRC, je suis également membre du conseil d’administration de la Fédération québécoise des municipalités, qui est une voix pour les régions au Québec. Nous avons tous été surpris par la pandémie. Elle nous a bousculés, elle nous a inquiétés et elle va nous inquiéter encore longtemps. Les effets tant à moyen qu’à long termes engendreront des répercussions majeures qui marqueront les activités et le fonctionnement de la société pour longtemps.
    Je tiens à remercier le gouvernement canadien de l’aide qu’il a annoncée rapidement. Le gouvernement a mis en place des programmes et des mesures, et ce, de façon très rapide, pour aider la population à surmonter ses difficultés. Au nom des Témiscamiens et des Témiscamiennes, je remercie le gouvernement du Canada et tous les partis qui ont contribué à cette décision. Je vais maintenant porter à votre attention quelques éléments que j’aimerais que le gouvernement prenne en compte pour que ses interventions aient tout le succès qu’elles méritent.
     Tout d’abord, l’aide accordée aux entreprises, si intéressante soit-elle, néglige complètement les toutes petites entreprises. Les critères qui ont été mis en place pour cette aide financière empêchent les petites entreprises de s’en prévaloir puisqu’elles n’atteignent pas les seuils fixés. Elles sont donc privées de cette aide, pourtant cruciale dans les communautés rurales. Ce sont souvent des entreprises saisonnières, agricoles ou touristiques. Elles contribuent à la qualité de vie dans les communautés, les villages et les municipalités. Elles contribuent aussi à l’occupation du territoire et elles mettent en lumière des ressources du milieu et des savoir-faire locaux. Nous avons besoin que ces entreprises survivent à la crise. Leur disparition de nos régions constituerait une perte réelle et importante. Nous en perdons déjà et nous en perdrons probablement beaucoup d’autres avant qu’elles ne puissent être remises en exploitation.
    Par conséquent, serait-il possible de réfléchir aux seuils qui ont été fixés et à la manière d’apporter de l’aide à ces entreprises qui ne les atteignent pas? Pour le dire en bon québécois, ces entreprises ne cadrent pas dans les programmes. Pourraient-elles avoir accès à des mesures qui leur permettront d’être admissibles à l’aide si précieuse qui a été mise en place?
    De plus, au cours des dernières semaines, nous avons vécu au rythme du confinement, des achats et des services en ligne, du télétravail, de la télémédecine et du télé-enseignement. Or, dans les communautés rurales, nous vivons loin des services et nous devons nous déplacer pour y avoir accès. En effet, nous n’avons pas accès à un réseau Internet haute vitesse de qualité et le réseau que nous avons, de mauvaise qualité, cesse parfois complètement de fonctionner. Nous demandons donc au gouvernement canadien, lequel a débloqué des sommes majeures pour brancher le Canada rural, de déclarer essentiel le service Internet haute vitesse. Une fois Internet haute vitesse déclaré service essentiel, son déploiement deviendra obligatoire et se fera plus rapidement. Par ailleurs, il faudra que son coût soit comparable pour l’ensemble des Canadiens.
    Enfin, on ne peut pas passer à côté de l’importance des médias locaux. Alors que la radio de Radio-Canada n’a parlé du Témiscamingue qu’une seule fois depuis le début de la pandémie, notre radio locale, elle, parle aux citoyens et aux citoyennes du Témiscamingue tous les jours. Nos chaînes télévisées communautaires relaient les nouvelles et convainquent les gens de respecter les mesures mises en place. Nous avons besoin que nos médias locaux soient soutenus.
(1440)
     J'aurai certainement d'autres interventions à faire concernant l'aide apportée aux municipalités, mais à tout le moins, ces trois règles vont permettre à des régions rurales de traverser plus facilement cette situation difficile.
    Internet haute vitesse, le soutien aux médias locaux et, surtout, l'accès des très petites entreprises aux aides gouvernementales, feront toute la différence pour le Canada rural.
    Je vous remercie encore une fois de votre attention.
    Je reste avec vous pour répondre à vos questions.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous accueillons maintenant le président de l'association des municipalités rurales de la Saskatchewan, M. Raymond Orb.
    Soyez le bienvenu, monsieur.
    Je me nomme Ray Orb et je suis le président de l'association des municipalités rurales de la Saskatchewan. Je suis né, j'ai été élevé et je vis dans la petite communauté agricole de Cupar, 625 habitants, au nord-est de Regina.
    Notre association représente les 296 municipalités rurales de la province, dont elle est le porte-parole depuis plus de 100 ans.
    Je remercie le comité permanent de l'invitation à venir projeter un éclairage sur les difficultés qu'affrontent les municipalités rurales de Saskatchewan en raison de la pandémie de COVID-19. Nous applaudissons les mesures fédérales visant à en ralentir la propagation: promotion de la distanciation sociale et du confinement à la maison, quand c'est possible.
    Même si nous aimons bien un bon nombre de dispositions du plan d'intervention économique, il importe de noter que beaucoup de ruraux de la Saskatchewan se sentent oubliés par le train de mesures du gouvernement. Pendant des années, un sujet permanent de préoccupation, dans la Saskatchewan rurale, a été la connectivité et la capacité de transmission à large bande. Les mesures de distanciation sociale et d'isolement prises contre la COVID-19 soulignent l'importance de l'accès à des services Internet fiables et à haute vitesse.
    Plus que jamais, les mots d'ordre sont télétravail et accès aux soins et à l'éducation à partir du foyer. À défaut de pouvoir le faire, les habitants des régions rurales mal desservies sont ceux qui écopent. Comme les Canadiens de partout dans le pays essaient de rester en contact avec leur famille, leurs amis et leurs collègues par Internet, beaucoup d'habitants des municipalités rurales de la Saskatchewan restent socialement isolés.
    Nous croyons qu'un investissement plus important et une innovation plus grande sont nécessaires dans les municipalités rurales pour donner accès à des services qui aident à protéger la santé et le mieux-être des habitants. La connectivité est d'une importance capitale, puisque les entreprises rurales et les producteurs agricoles commencent à envisager un rétablissement économique qui inclut la participation à la nouvelle économie en ligne. Les années 2019 et 2020 ont été particulièrement éprouvantes pour les producteurs agricoles de la Saskatchewan. Les disputes commerciales actuelles avec la Chine et la perturbation des transports en raison de barricades illégales ont sensiblement éprouvé le portefeuille de nombreux agriculteurs. Voilà maintenant que la COVID-19 s'ajoute aux désagréments subis par les fournisseurs de denrées de notre pays.
    Les producteurs agricoles s'inquiètent des perturbations qui entravent l'achat et la livraison d'intrants agricoles comme le carburant diesel et les engrais, ainsi que la vente et la livraison de leurs produits. Comme les exploitations sont touchées par les incertitudes de la campagne 2020, les crédits de soutien aux entreprises ne sont pas suffisants en raison du fort endettement de beaucoup de producteurs. Il faut d'autres mesures à beaucoup d'entre eux, pour qu'ils puissent résoudre leurs problèmes de liquidités et maintenir leurs exploitations.
    L'accès aux mesures fédérales d'aide aux entreprises, notamment à la subvention salariale d'urgence du Canada et au compte d'urgence pour les entreprises canadiennes, risque d'être d'une efficacité limitée, en raison des formes de structuration des exploitations agricoles. Certaines sont incapables de démontrer leur admissibilité aux mesures fédérales d'aide au revenu et aux entreprises, en raison des pratiques de l'industrie et des entreprises. Il s'agit notamment de l'inconstance des revenus et de la rémunération par dividendes plutôt que par des méthodes plus traditionnelles. Ces méthodes empêchent beaucoup d'exploitations à atteindre les critères d'admissibilité.
    Malgré les mesures prises pour alléger le fardeau fiscal des entreprises, le gouvernement est quand même allé de l'avant avec les augmentations de la taxe fédérale sur le carbone, qui frappe brutalement l'ensemble des agriculteurs canadiens. Sa majoration, le 1er avril, a augmenté les coûts d'intrants comme le combustible, ainsi que les coûts de production et de transport. Alors que le gouvernement essaie d'accroître la disponibilité des capitaux pour les entreprises, des estimations montrent que, en 2020, cette taxe fédérale majorera d'au moins 2,38 $ l'acre, en moyenne, les coûts encourus dans une exploitation céréalière de la Saskatchewan. Nous incitons vivement le gouvernement à exempter les producteurs agricoles de cette taxe carbone ou à offrir d'autres mesures d'aide directe pour en neutraliser les majorations.
    Notre association comprend que la pandémie exige l'effort de tous. Le gouvernement fédéral, les provinces et les autorités locales doivent participer à l'effort. En Saskatchewan, les municipalités rurales s'adaptent à la situation pour maintenir les routes ouvertes pendant la période printanière d'interdiction de la circulation, pour que les joueurs ruraux comme les agriculteurs puissent faire circuler des produits essentiels alors qu'ils se préparent à une autre campagne agricole pour nourrir les communautés du pays et du monde entier. Les municipalités appliquent des mesures de soulagement pour le versement de la taxe foncière, par exemple des sursis, l'extension de délais et la non-application de peines contre les payeurs retardataires, pour aider les contribuables et les entreprises qui tirent le diable par la queue. Elles continuent de fournir tous les services essentiels obligatoires, même en cette période d'incertitude, avec un personnel réduit en raison de la maladie, des mises à pied et des contraintes budgétaires.
(1445)
    Les municipalités rurales ont toujours fait face à une capacité très limitée de générer des revenus à partir des services qu'elles fournissent, car elles perçoivent cet argent à l'aide de taxes sur les propriétés qui se trouvent sur son territoire, et il s'agit surtout de terres agricoles. La COVID-19 et les réalités de l'arrêt des activités économiques font ressortir cette situation. Il faut que les échelons supérieurs de gouvernement se rendent compte des répercussions négatives à moyen et à long terme sur la qualité et le niveau de services essentiels fournis par les municipalités à leurs citoyens. La prestation de ces services et l'entretien de l'infrastructure essentielle utilisent plus de 80 % des revenus entrants d'une municipalité. Cela fournit peu d'occasions de réduire les coûts sans réduire aussi les services fournis par la municipalité.
    À l'issue de la crise de la COVID-19, lorsque le pays aura besoin de mesures de relance de l'économie, n'oubliez surtout pas de tenir compte des municipalités rurales dans la conception des programmes de relance économique. Par exemple, avec ses 163 000 kilomètres, l'infrastructure routière municipale de la Saskatchewan est la plus longue au Canada. Les projets d'infrastructure rurale, notamment les routes et les ponts, sont essentiels à la croissance des industries des ressources naturelles, de la fabrication, de l'agriculture et du tourisme. Tout programme de relance économique doit donc prévoir un volet sur les petites collectivités afin de veiller à attribuer des investissements aux collectivités de moins de 5 000 habitants, ce qui leur permettra de se concentrer sur des réparations stratégiques pour les routes et les ponts qui appuient ces industries essentielles. Il faut simplifier le financement. Par exemple, le Fonds de la taxe sur l'essence est un modèle simple qui existe déjà.
    En terminant, au nom des municipalités rurales de la Saskatchewan, j'aimerais remercier le Comité permanent des finances de nous avoir donné l'occasion de contribuer à cette conversation importante.
    Merci beaucoup, monsieur Orb, d'avoir soulevé ces points.
    Avant de donner la parole au dernier témoin, j'aimerais donner aux membres du Comité un aperçu de l'ordre des intervenants pour les questions. Nous commencerons par une série de questions de six minutes pendant laquelle nous entendrons M. Cooper, qui sera suivi de M. Fragiskatos, de M. Ste-Marie et de M. Julian.
    La parole est maintenant au dernier témoin, M. Brandon Ellis, qui représente le St. John's Board of Trade.
    Monsieur Ellis, vous avez la parole.
(1450)
    Merci, monsieur le président. Je suis heureux de vous revoir et de revoir les membres du Comité. Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner dans le cadre de vos délibérations aujourd'hui.
    Comme vous venez de le dire, je m'appelle Brandon Ellis, et je suis spécialiste en plaidoyer politique pour le St. John's Board of Trade. La communauté d'affaires de St. John's, comme toutes les autres au pays, affronte actuellement des défis sans précédent. Notre organisme est en communication constante avec tous les échelons de gouvernement afin de leur révéler ce que nous ont dit nos membres. Le St. John's Board of Trade reconnaît que la COVID-19 a provoqué une crise de santé publique et une crise économique. Ces deux crises sont inextricablement liées et doivent être traitées de toute urgence.
    Nous accueillons favorablement un grand nombre des éléments des programmes gouvernementaux qui ont été annoncés, par exemple la subvention salariale. D'innombrables emplois seront épargnés grâce aux mesures annoncées, mais ces dernières n'appuient pas un grand nombre d'entreprises qui ont besoin d'aide pendant cette période difficile. De nombreuses entreprises qui ne sont pas des services essentiels fonctionnent avec un personnel réduit au minimum ou sont complètement fermées depuis plus d'un mois. On leur a demandé d'attendre deux autres semaines avant que des fonds soient disponibles. Selon nous, c'est trop long, car ces entreprises attendent ces mesures de soutien depuis le mois de mars.
    Le gouvernement a prouvé qu'il pouvait verser des fonds rapidement et efficacement grâce à la réussite du programme de la Prestation canadienne d'urgence, qui est versée par l'entremise de l'Agence du revenu du Canada. Les entreprises canadiennes doivent recevoir de l'aide financière tout aussi rapidement. Dans quelques semaines, il sera tout simplement trop tard et de nombreuses entreprises devront fermer — certaines de façon permanente. Un sondage mené cette semaine par Restaurants Canada révèle qu'un restaurant indépendant sur deux ne s'attend pas à survivre si les conditions ne s'améliorent pas d'ici les deux prochains mois. De plus, 75 % des exploitants de restaurants sont très ou extrêmement inquiets au sujet de leur niveau d'endettement actuel. Nous savons que les réserves de liquidités de la majorité des petites entreprises ne sont pas suffisantes pour leur permettre d'attendre plusieurs semaines avant de recevoir de l'aide. Les entreprises touchées feront fort probablement augmenter le nombre de demandes de Prestation canadienne d'urgence.
    De plus, nous continuons de constater que de nombreuses entreprises qui ont besoin d'aide sont victimes des lacunes stratégiques des programmes d'aide. Comme on l'a mentionné plus tôt, il s'agit notamment des entreprises à propriétaire unique qui n'ont pas de masse salariale, mais qui utilisent plutôt des dividendes. Il faut élargir les critères et les rendre plus inclusifs pour veiller à ce que toutes les entreprises qui ont besoin d'aide puissent recevoir cette aide.
    La question des entreprises à propriétaire unique qui passent entre les mailles du filet nous préoccupe tous. En effet, si des entreprises satisfont aux autres exigences, il est déraisonnable et punitif qu'elles soient inadmissibles aux programmes gouvernementaux parce qu'elles ne sont pas constituées en société, comme l'énoncent actuellement certaines règles de quelques programmes. Nous demandons donc au gouvernement d'élargir les critères d'admissibilité au Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes aux entreprises à propriétaire unique qui ne sont pas constituées en société.
    Nous avons demandé au gouvernement d'élargir le plus possible les critères des programmes qu'il a mis sur pied. La semaine dernière, notre président, Andrew Wadden, un avocat à l'échelle locale et un propriétaire d'entreprise inquiet, a écrit à la ministre du Revenu national pour lui demander un remboursement complet de la TPS pour toutes les petites et moyennes entreprises. Le directeur parlementaire du budget a déjà terminé l'analyse partielle que nous avions demandée. Notre analyse démontre que cela visera de nombreuses entreprises qui ont désespérément besoin de fonds pour survivre. Nous demandons à ce que toutes les entreprises, et pas seulement celles qui se sont constituées en société, soient admissibles à un remboursement de la TPS qu'elles ont payée entre le 1er janvier et le 31 décembre 2019.
    Comme vous le savez peut-être, notre province fait face à des difficultés financières importantes à court terme, mais aussi à long terme. L'incertitude économique actuelle signifie que notre industrie pétrolière extracôtière est également dans une situation difficile. Cette industrie est un moteur économique essentiel de notre province et elle a également apporté une énorme contribution au Canada. Nous ne pouvons pas parler de la relance économique dans notre province sans invoquer le secteur pétrolier et gazier.
    Au cours des deux dernières décennies, notre secteur pétrolier extracôtier a représenté 25 % de notre PIB provincial. Les économistes prévoient que plus de 100 milliards de dollars en redevances et en revenus seront accumulés d'ici 2045, et que d'ici 2033, le secteur pétrolier et gazier générera 19 % de tous les emplois à Terre-Neuve-et-Labrador. De plus, l'industrie pétrolière de Terre-Neuve-et-Labrador fournira 3,3 milliards de dollars en recettes fiscales au reste du Canada. Nous encourageons donc le gouvernement du Canada à commencer à mettre en œuvre des politiques qui libéreront le plein potentiel de nos politiques relatives aux ressources pétrolières et gazières extracôtières et nous l'encourageons également à modifier des politiques précédentes, par exemple, le projet de loi C-69, qui s'est avéré problématique.
(1455)
    Nous avons également quelques commentaires au sujet de l'annonce concernant les loyers commerciaux qui a été faite aujourd'hui. Je serai heureux de répondre à toutes les questions des membres du Comité à cet égard.
    Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité et autres témoins de m'avoir donné l'occasion de témoigner aujourd'hui. J'ai hâte de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais remercier tous les témoins de leur exposé.
    Avant de donner la parole à M. Cooper, j'aimerais m'adresser au témoin de la Saskatchewan Association of Rural Municipalities.
    Monsieur Orb, j'aimerais obtenir un éclaircissement. Le carburant agricole est exempté de la soi-disant taxe sur le carbone. Parlez-vous en réalité du propane?
    Oui, surtout le propane utilisé pour le séchage des grains. C'est très important pour certains de nos agriculteurs.
    D'accord. Habituellement, cela entraîne une grande confusion et je tenais donc à obtenir des précisions.
    Monsieur Cooper, vous avez la parole. Vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président. J'aimerais également remercier les témoins de leur exposé approfondi.
    Il ne fait aucun doute que la COVID-19 a créé de nombreux défis auxquels font maintenant face les municipalités d'un bout à l'autre du Canada, non seulement en ce qui concerne les flux de trésorerie, mais également les coûts imprévus qui entraîneront des pertes irrécouvrables.
    J'aimerais poser mes questions à la mairesse de ma collectivité, Mme Cathy Heron.
    Madame Heron, je suis très heureux que vous soyez en mesure de participer à la réunion d'aujourd'hui. Je sais que l'administration de la ville de St. Albert a récemment présenté trois différents scénarios financiers sur les répercussions que pourrait entraîner la fermeture prolongée de ses installations municipales. Étant donné que St. Albert est représentative d'un grand nombre de municipalités de taille moyenne au Canada, j'aimerais que vous nous parliez de la viabilité financière d'une fermeture à long terme et de la différence entre une fermeture qui pourrait se terminer à la fin mai et une fermeture qui se prolongerait jusqu'à l'été ou même jusqu'à l'automne.
    Quels sont les défis que cela poserait sur le plan municipal?
    Merci, monsieur Cooper, d'avoir proposé ma participation à la réunion d'aujourd'hui. Je suis très heureuse d'être ici.
    Je crois que toutes les municipalités s'entendraient sur le fait que la durée déclarée de la pandémie et la durée de la fermeture de nos établissements récréatifs, de l'arrêt de notre transport en commun et de la fermeture des entreprises connexes auront une incidence sur la reprise des activités municipales.
    St. Albert a proposé trois scénarios. Actuellement, nous prévoyons un déficit d'environ 4,6 millions de dollars si nous reprenons les activités le 1er juin. Cela me semble toutefois très improbable. En effet, le gouvernement de l'Alberta envisage probablement d'attendre au mois de juillet pour la reprise des activités. Si l'arrêt des activités se prolonge jusqu'au 1er août, nous pensons que cela causera un déficit de 5,6 millions de dollars, et s'il se prolonge jusqu'en octobre, ce qui serait une situation très difficile, le déficit serait de 6 millions de dollars. Ces données concernent une ville de taille moyenne. Je suis sûre que les grandes villes ont des montants beaucoup plus élevés, mais ils augmenteraient au fil du temps.
    Certaines municipalités ont des réserves adéquates de liquidités. Elles pourraient donc liquider leurs investissements pour faire face à la situation actuelle. D'autres municipalités ont des marges de crédit, mais certaines municipalités n'ont pas accès à ces marges de crédit. Les répercussions économiques varieront selon la durée de la situation actuelle. J'espère que cela répond à votre question.
    Oui. Merci.
    D'après ce que je comprends, la municipalité de St. Albert n'a pas de marge de crédit en ce moment.
    Non, nous n'avons pas de marge de crédit.
    Dans votre exposé, vous avez fait allusion au plan de reprise des activités de la municipalité de St. Albert après la COVID-19. Manifestement, nous sommes au milieu de la phase initiale ou à mi-parcours de cette crise, mais c'est maintenant le temps de commencer à réfléchir à ce que nous pouvons faire à long terme à mesure que nous nous rapprochons de l'étape de la reprise qui arrivera, on l'espère, le plus tôt possible. Pourriez-vous nous donner un peu plus de détails à cet égard et nous dire si, à votre avis, il s'agit d'un modèle qui pourrait être utile à d'autres municipalités?
    Je serai heureuse de vous en parler.
    En quelque sorte, St. Albert a eu de la chance. En effet, notre directeur des affaires municipales était au beau milieu des feux de forêt de Fort McMurray, et il connaît donc très bien les interventions d'urgence. Il s'est donc assuré que la municipalité de St. Albert était prête à toute éventualité. Lorsque la pandémie est arrivée, nous étions prêts à passer à l'action immédiatement. Il a également suggéré qu'une partie de la période de la reprise des activités — et il a vu cela à Fort McMurray — soit prolongée. Il faut de 18 mois à deux ans, et nous voulions donc que notre groupe de travail soit prêt à agir le plus tôt possible.
    Notre plan conceptuel contient certains résultats escomptés et je présiderai un groupe de résidents. St. Albert peut toujours compter sur des bénévoles très éduqués et prêts à l'action, mais j'aurai recours à certaines personnes précises. Par exemple, j'aimerais obtenir la participation des chambres de commerce et de l'industrie du développement. De plus, j'aimerais qu'un ou une économiste fasse partie de ce groupe, surtout en ce qui concerne le volet sur la relance économique. Des représentants d'organismes à but non lucratif feront également partie de ce groupe, car ils pourront nous parler de certains besoins sociaux et psychosociaux qu'éprouveront les municipalités.
    Je serai heureuse de vous faire parvenir nos règlements et un aperçu de ce groupe de travail sur la reprise des activités si cela vous intéresse.
(1500)
    C'est très bien. Si vous pouviez envoyer ces documents au greffier, cela nous serait utile.
    J'aimerais aborder un autre enjeu qu'un grand nombre de personnes n'associent pas à la municipalité de St. Albert, c'est-à-dire l'itinérance. En effet, nous sommes l'une des collectivités les plus riches de la province et de nombreuses personnes seront donc surprises d'apprendre que l'itinérance représente un défi. À titre de mairesse, c'est un enjeu dont vous vous occupez, et un enjeu que vous avez mis en évidence et pour lequel vous avez démontré un grand leadership.
    J'aimerais donc que vous nous parliez de certains des défis liés à l'itinérance pendant la pandémie de la COVID-19, des lacunes que vous avez observées et d'un rôle supplémentaire que pourrait jouer le gouvernement fédéral à cet égard.
    Juste après les élections de 2017, j'ai créé un groupe de travail sur l'itinérance, car je reconnaissais que c'était un enjeu. Parfois, cet enjeu est tout simplement caché, surtout dans des collectivités riches comme la nôtre, mais il existe. Selon le dernier dénombrement, il y a environ 160 sans-abri dans notre ville, qui vont de personnes sur le point de devenir des sans-abri jusqu'à des personnes qui vivent dans des conditions difficiles dans la vallée de notre rivière.
    Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous faisons partie de la région métropolitaine d'Edmonton, et la municipalité de St. Albert n'a donc pas accès aux fonds provinciaux pour l'itinérance. Le gouvernement provincial me répond toujours qu'il faut laisser la ville d'Edmonton s'occuper de nos sans-abri.
    Le maire d'Edmonton, Don Iveson, et moi-même discutons souvent du fait qu'il est injuste et inadéquat que la ville d'Edmonton doive s'occuper des résidants et des sans-abri de St. Albert, et nous avons donc tous les deux préconisé l'ajout de matelas et de lits ici, à St. Albert. Toutefois, à ce jour, je n'ai reçu aucun soutien de mon gouvernement provincial à cet égard. Je sais que le gouvernement fédéral a offert une mesure de soutien, mais cela passe toujours par la province et je n'y ai donc pas accès. Des organismes tels The Mustard Seed sont prêts à ajouter des lits dans notre Armée du salut. Nous sommes prêts à agir. Nous devons simplement avoir accès à du financement pour prendre soin de nos propres résidants.
    Les sans-abri qui peuvent avoir accès aux mesures de soutien dans leur propre municipalité, près de leur famille et de leurs amis et près de leur ville de résidence s'en tireront toujours mieux que ceux qui doivent se rendre dans une grande ville où ils devront peut-être adopter un mode de vie auquel il est parfois impossible d'échapper.
    D'accord. J'aimerais remercier le député et le témoin.
    J'aimerais souligner que si un autre témoin souhaite répondre à une question qui a été posée, ce témoin n'a qu'à lever la main. Il se peut que je vous voie, mais je ne peux pas voir tout le monde sur mon écran. Veuillez donc lever la main, et si je ne vous vois pas, veuillez attirer mon attention.
    La parole est maintenant à M. Fragiskatos.
    Monsieur Fragiskatos, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président. Je remercie les témoins également.
    Mes questions s'adressent à M. Karsten.
    Monsieur Karsten, je vous remercie beaucoup de présenter votre point de vue. Je suis certainement bien conscient des défis auxquels les municipalités sont confrontées. Je communique très régulièrement, presque quotidiennement, avec notre maire de London, en Ontario, Ed Holder, et notre président du budget, Josh Morgan, qui est en fait le représentant de London à la FCM. Je crois que vous connaissez M. Morgan. Il fait également un travail remarquable.
    Puis-je vous poser une question sur la demande de 10 milliards de dollars que la FCM a présentée au gouvernement fédéral? Est-ce un financement ponctuel, monsieur Karsten?
    Je vous remercie, monsieur Fragiskatos. Oui, je connais bien votre maire, et M. Morgan est un très bon membre du conseil d'administration à la FCM.
    Ce que nous avons demandé dans le communiqué d'hier, c'est en fait que ce soit réexaminé dans quatre mois. Je crois l'avoir indiqué dans ma note d'information. C'est important, car pour l'instant, nous ne faisons pas de prédictions sur les pertes que nous subirons dans bon nombre de nos sources de revenus, comme la perte de revenus découlant du report des impôts fonciers. Certaines municipalités ont fait des prédictions à cet égard, mais nous n'avons pas de données précises.
(1505)
    Je pose la question, toutefois, monsieur Karsten, pour souligner ce qui était indiqué dans le communiqué et ce que vous nous dites aujourd'hui. Certains craignent que cela conduise à une situation de dépendance, de sorte que si la crise économique devait se poursuivre, les municipalités continueraient de dépendre d'un important soutien financier du gouvernement fédéral.
    Que répondez-vous à ce genre de préoccupation?
    Ce que je réponds, avec tout le respect que je vous dois, c'est qu'il s'agit d'une crise. Nous savons que la COVID-19 n'était pas prévue et que nous vivons une période sans précédent. Très franchement, personne n'aurait pu prédire les pertes de revenus que nous subissons présentement. On parle de pertes de 400 millions de dollars dans le transport en commun et différents maires parlent de certains exemples personnels, et je ne peux pas prédire ce que l'avenir nous réserve pour ce qui est des pertes de revenus.
     Cependant, l'objectif n'est certainement pas de dépendre du financement fédéral. Les municipalités ont montré dans le passé, avec différents dirigeants, qu'elles utilisent le mieux possible chaque dollar qu'elles ont dans leurs budgets, et elles continueront à le faire.
     Je comprends, monsieur Karsten. Je ne veux pas vous couper la parole. C'est juste que le temps qui nous est imparti est limité, même si notre président est très généreux.
    Ce que je veux dire, c'est que je sais bien que la capacité des municipalités de recueillir des fonds est limitée par la Constitution. Il est entièrement valable que vous signaliez que vous avez besoin d'aide. Je pense que vous avez besoin d'aide, et j'espère que le gouvernement fédéral vous en offrira, mais je veux seulement connaître certains des paramètres quant à la façon de procéder.
    Vous avez parlé des provinces. Vous avez dit que votre association voit que les provinces ont un rôle à jouer et qu'elles ne devraient pas abdiquer leur responsabilité.
    En 2019, l'Institute on Municipal Finance and Governance de l'Université de Toronto a publié un document, et je vais en citer un bref passage.
À l'exception du Québec et de Terre-Neuve-et-Labrador, les gouvernements provinciaux du Canada perçoivent également un impôt foncier. Il est avancé que les prélèvements provinciaux servent à financer une partie de l'école publique, mais en fait, l'impôt foncier fait souvent tout simplement partie des recettes générales provinciales — il ne sert pas toujours à financer l'éducation.
    Dans le document, on conclut ce qui suit:
... si les gouvernements provinciaux abandonnaient la perception de l'impôt foncier, les municipalités auraient assez de revenus pour répondre à leurs besoins en dépenses et n'auraient pas à demander d'autres outils fiscaux.
    Cela étant dit, je sais que vous ne parlez pas ici d'ajouter des outils fiscaux, mais vous demandez de l'argent. Je me demande si la province devrait envisager de le faire. Je sais que des questions ont été soulevées quant à savoir si le gouvernement de l'Ontario pourrait envisager d'abandonner l'impôt foncier provincial.
    La FCM a-t-elle un point de vue sur le sujet?
    Non. En ce qui concerne l'impôt foncier, il existe certainement d'autres rapports en Amérique du Nord, et les associations provinciales du Canada se sont probablement toutes penchées là-dessus. Les recettes provenant de l'impôt foncier, en fonction d'une évaluation, constituent encore le modèle qui est encore utilisé dans toute l'Amérique du Nord. C'est sans doute le modèle que tout le monde utilise actuellement.
    Quel rôle devrait jouer la province?
     Vous faites valoir que les municipalités ont besoin d'aide. Je pense que l'on peut également faire valoir que tout le monde devrait participer. Que devrait proposer la province?
    Vous demandez 10 milliards de dollars au gouvernement fédéral. Quelle devrait être la contribution de la province?
    Encore une fois, je vous remercie de la question, vraiment. Je sais que l'intention est sincère concernant l'idée que nous devons aussi discuter avec les provinces, et c'est exactement ce que nous faisons.
    Je vous répondrais de façon respectueuse que la crise est tout simplement trop grave et urgente et qu'elle n'attendra pas qu'un débat relatif aux compétences soit mené. Il s'agit de la sécurité des Canadiens, et il faut que le gouvernement fédéral intervienne maintenant. Ce que j'ai dit hier, avec mon collègue Don Iveson, le maire d'Edmonton, et en fait, avec le maire de Gatineau, c'est que voulons que le gouvernement fédéral assume un rôle de chef de file. La Fédération canadienne des municipalités a un partenariat avec le gouvernement fédéral actuel. Les gains que nous avons faits sont sans précédent. Nous le respectons et nous en sommes reconnaissants. C'est le moment de faire preuve de leadership.
(1510)
    Je comprends. J'espère simplement qu'il y a une demande du côté des provinces. Je crois qu'elles doivent intervenir elles aussi.
    Je vous remercie d'en parler de cette façon, car ne vous y trompez pas, les maires de l'ensemble du pays et nos associations provinciales parlent également aux provinces.
    Messieurs, je dois vous interrompre ici. Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de M. Ste-Marie, et nous passerons à M. Julian ensuite.
    Monsieur Ste-Marie.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Bonjour à tous. Je tiens à saluer tous les témoins et à les remercier de leurs présentations et des éléments qu'ils ont soulevés.
    Madame Bolduc, vous en avez soulevé trois. J'aimerais y revenir. Vous avez mentionné que les toutes petites entreprises n'avaient pas accès aux programmes présentement en place. Pouvez-vous nous donner des exemples et nous suggérer des pistes de solution?
    Je vais maintenant poser mes autres questions en rafale. Vous avez suggéré que le service Internet haute vitesse soit considéré comme un service essentiel.
    La ministre Mme Wawzonek a demandé que les fonds soient débloqués afin de continuer à développer Internet haute vitesse en région. De votre côté, vous allez encore plus loin, et vous demandez que cela soit désigné comme un service essentiel. Qu'est-ce que cela veut dire?
    Par ailleurs, vous avez parlé de l'importance de soutenir les médias locaux. Encore là, pouvez-vous nous donner des exemples et nous suggérer des pistes de solution?
     Je vous remercie beaucoup de vos questions.
    Je vais donner un exemple concret. Une entreprise agricole en horticulture légumière et fruitière ne produit que durant la saison estivale. Souvent, les propriétaires ne se versent pas de salaire, mais des dividendes à la fin de la saison.
     La règle permettant aux entreprises canadiennes d'avoir accès la Prestation canadienne d'urgence prévoit qu'un salaire de 20 000 $ doit être versé. Ainsi, certaines petites entreprises ne peuvent recevoir la prestation, puisque le salaire a été versé en dividendes. Pourtant, cette aide est extraordinairement précieuse pour les entreprises, particulièrement cette année. En effet, les semences, certaines matières nécessaires à la production et certains fertilisants ont été plus difficiles à se procurer.
    La même chose s'applique en ce qui a trait aux commerces touristiques, aux activités touristiques. On est à peu près dans le même ordre d'idées. Comme les propriétaires de ces entreprises sont souvent rémunérés par dividendes, les entreprises ne sont pas admissibles à la prestation.
    Je peux aussi donner l'exemple d'un de mes collègues qui est propriétaire de 20 % d'une micro-brasserie et préfet de son territoire. Il ne peut pas avoir accès à la prestation, parce qu'un des critères d'admissibilité est que les propriétaires d'entreprise qui sont également des élus ne peuvent pas y avoir accès. Pourtant, il s'agit d'une petite entreprise importante dans sa communauté. On sollicite souvent ce genre de personnes pour travailler dans le monde municipal ou politique, parce qu'elles ont une bonne capacité de vision et de développement. On prive donc deux types de propriétaires de l'aide appropriée.
    Vous avez posé une question à propos d'Internet haute vitesse. À partir du moment où le CRTC, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, déclarera que le service Internet haute vitesse est un service essentiel qui doit être offert partout, à un prix équivalent sur tout le territoire canadien, on aura une attitude très différente à l'égard des grands fournisseurs. Actuellement, ils utilisent tous les programmes gouvernementaux à leur disposition pour améliorer la desserte très payante concentrée dans les milieux urbains. Or, bien souvent, les milieux ruraux — les agriculteurs, les forestiers et les pourvoyeurs — n'y ont pas accès. Quant aux entreprises touristiques, elles y ont peu accès.
    C'est extraordinairement intéressant pour eux de recourir aux subventions et aux aides prévues par les différents ordres de gouvernement. Cela ne fait qu'enrichir le bassin très payant et délaisser les autres populations.
    La demande est claire. Ce geste ne coûte rien au gouvernement, puisque les sommes ont déjà été annoncées. Cependant, cela va changer fondamentalement la donne relativement à la desserte Internet haute vitesse.
    En ce qui a trait aux médias locaux, ce sont ceux qui parlent des populations locales aux populations locales. On a besoin de ces médias pour transmettre des messages à la population. C'est une mesure qui touche à la culture locale, mais c'est aussi une mesure de la sécurité publique. Présentement, ces médias ont perdu des revenus publicitaires très importants. Les médias dépendent des publicités, mais ils ont perdu ce type de revenus.
    Comment le gouvernement pourrait-il compenser par des publicités appropriées? Nous ne demandons pas au gouvernement de donner des chèques en blanc. Cependant, nous lui demandons de mettre en place des campagnes publicitaires et des campagnes promotionnelles. Par exemple, une de ces mesures pourrait être que le gouvernement achète des espaces publicitaires dans les différents médias et qu'il les offre aux petites et moyennes entreprises. Le gouvernement ferait alors d'une pierre deux coups. En effet, il soutiendrait les médias locaux et il soutiendrait les petites entreprises.
    On peut réfléchir à ces mesures, qui coûtent peu, qui ont une portée importante et qui facilitent et favorisent le maintien de la vitalité des communautés rurales et des régions. Des mesures comme celles-là peuvent facilement être mises en place.
(1515)

[Traduction]

    Nous devrons y revenir au second tour, monsieur Ste-Marie.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    C'est maintenant au tour de M. Julian. Au prochain tour, M. Morantz sera le premier intervenant et il sera suivi de M. McLeod.
    Monsieur Julian.
     Merci beaucoup, monsieur le président
    Je remercie tous les témoins de leur présence. Nous espérons que vos familles sont en santé et en sécurité.
    Nous formons le comité fédéral des finances, et nous savons que le gouvernement fédéral obtient la majeure partie des dollars fiscaux dans ce pays. Il est très pertinent que nous tenions cette séance aujourd'hui. Bien sûr, mes questions s'adresseront aux deux maires de ma région qui travaillent fort, essentiellement 24 heures sur 24, sept jours sur sept, depuis le début de la pandémie. J'ai tout d'abord une question pour le maire Hurley et une autre pour le maire Coté.
    Monsieur Hurley, vous avez parlé de la subvention salariale et du fait qu'elle ne s'applique pas aux municipalités malgré les appels répétés en ce sens. Dans quelle mesure est-il important que la subvention salariale soit également accessible aux municipalités? Comment devrait-elle être mise en œuvre pour les villes?
    Monsieur Coté, vous avez parlé de façon très éloquente des répercussions sur le réseau de transport en commun dans la vallée du bas Fraser. Si le gouvernement fédéral n'offre pas d'aide, quelles répercussions la pandémie aura-t-elle à long terme sur les réseaux de transport en commun, tant dans la vallée du bas Fraser que partout ailleurs au pays?
    Monsieur Julian, je vous remercie de ces deux ou trois questions que je pense que vous m'avez posées.
    Tout d'abord, si la subvention salariale d'urgence était offerte aux municipalités également, nous pourrions ramener au travail une bonne partie de nos travailleurs et leur donner d'autres tâches dans la ville. Comme nous le savons tous, la pandémie a créé de nombreux problèmes sociaux dans la ville. Des personnes âgées ne peuvent pas faire leur épicerie et ne peuvent pas quitter leur domicile, pour ne donner qu'un exemple. Le problème de l'itinérance prend une ampleur sans précédent et, comme vous le savez, nous avons ouvert des arénas pour que les sans-abri puissent rester dans un endroit sûr et chaud tout en respectant les règles de l'éloignement social, ce qui, comme nous le savons tous, est si important. Pouvoir ramener notre personnel réduirait de beaucoup la pression qui est exercée sur ces deux plans seulement et nous permettrait de faire encore davantage que ce que nous faisons actuellement.
    Je vais vous dire ce que je propose quant à la manière dont cela pourrait être géré au sein du gouvernement fédéral. Étant donné que, depuis de nombreuses années, les villes ont versé des centaines de millions de dollars dans le cadre du régime d'assurance-chômage, sans qu'aucune partie de cet argent ne soit vraiment retirée de la banque, pour ainsi dire, par des employés municipaux, cela pourrait être harmonisé, à mon avis, avec la subvention salariale d'urgence. Nous pourrions ainsi ramener notre personnel au travail pour qu'il accomplisse le travail qui doit être effectué dans la ville.
    Si le gouvernement harmonisait en quelque sorte les deux mesures pour un ajout de 20 %, nous pourrions ramener notre personnel au travail, au lieu qu'il reste à la maison à toucher 55 %, et nous pourrions commencer à en faire encore plus dans nos collectivités. C'est ainsi que je propose au gouvernement d'examiner la question.
(1520)
    Monsieur le maire Coté.
    Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, notre organisme de transport en commun envisage déjà de réduire l'offre de services d'environ 40 % dans son réseau ici, dans le Grand Vancouver. Si, au cours des prochains mois, toutefois, nous ne pouvons pas obtenir d'aide provinciale et fédérale et que nous continuons à perdre les revenus que nous prévoyons malgré les réductions, nous devrons avoir une discussion difficile sur la possibilité de réduire encore davantage l'offre de services de transport en commun.
    Je pense que les citoyens trouveront très étrange qu'au sortir de la crise sanitaire, au moment de la reprise économique, ils aient un réseau de transport défaillant qui leur offrira de moins en moins de solutions de mobilité au moment même où ils auront besoin de plus en plus de solutions. Je crois que nous faisons face à une crise financière dans l'immédiat, mais aussi à des problèmes à long terme. Selon les estimations, le déficit des revenus de notre réseau de transport en commun oscillera entre 450 et 700 millions de dollars cette année. À l'heure actuelle, nous puisons dans nos réserves pour éponger les pertes, mais ces réserves avaient été mises en place pour maintenir et construire notre réseau de transport en commun. Elles seront entièrement épuisées d'ici la fin de l'automne, à la fin de l'année.
    Voilà ce qui devrait certainement mettre en évidence la situation d'urgence à laquelle nous sommes confrontés. Je tiens également à préciser que les défis que nous devons relever sont des défis que les principaux organismes de transport en commun de partout au pays doivent relever.
     Je vous remercie. J'ai une brève question de suivi, d'abord pour le maire Côté, puis pour le maire Hurley.
     Vous avez signalé que vous apportiez de l'aide aux sans-abri. Les programmes d'infrastructure ont besoin de financement. Brièvement, quelles sont les autres mesures que le gouvernement fédéral pourrait prendre?
    Je vais répondre. Dans l'immédiat, nos besoins concernent les problèmes financiers qui découlent de la perte de nos revenus, et c'est là-dessus que nous nous concentrons. À long terme, lorsque nous commencerons à rebâtir nos collectivités et notre pays après la crise sanitaire, je crois que des organismes comme les organismes de transport en commun seraient tout désignés pour des projets d'infrastructure prêts à démarrer. Je pense qu'il est un peu prématuré d'en discuter maintenant, mais lorsque nous entrerons dans la phase de la reprise, je pense qu'il serait intéressant que le gouvernement fédéral, les villes et les organismes de transport en commun discutent de la façon de réaliser des projets d'infrastructure.
    Vouliez-vous ajouter quelque chose, monsieur Hurley?
    De notre côté, en ce moment, les besoins concernent notre population vulnérable, nos sans-abri. Nous ne recevons aucune aide de la part du gouvernement fédéral pour ces gens. Bien que nous entendons dire que du soutien est offert, nous n'en avons pas obtenu. Le nombre de personnes vulnérables augmente de façon fulgurante, et je parle tant des sans-abri que des gens qui risquent de devenir des sans-abri. Nous ne serons pas en mesure, à nous seuls, de soutenir ces personnes pendant une longue période. C'est pourquoi il faut que les gouvernements fédéral et provincial nous aident à apporter l'aide dont ces populations ont tant besoin. Ce serait là notre demande dans l'immédiat, au-delà de la subvention salariale qui nous permettrait de ramener nos employés au travail.
    Merci à tous.
     Au sujet des projets d'infrastructure, je pense qu'il est important — et cela vaut également pour la Saskatchewan Association of Rural Municipalities et la Fédération canadienne des municipalités — qu'ils soient prêts à démarrer le moment venu. Je sais qu'il y a eu des préoccupations à cet égard.
    C'est maintenant au tour de M. Morantz, qui sera suivi de M. McLeod. Il s'agit d'interventions de cinq minutes.
(1525)
    Je vous remercie tous de vos exposés. C'est très intéressant. Je connais extrêmement bien les ennuis financiers que subissent les municipalités. Je suis l'ancien président du comité des finances ainsi que de l'infrastructure à la Ville de Winnipeg, sous la direction du maire Bowman. Je dois dire, au risque de m'exprimer comme Bill Clinton, que je ressens votre douleur.
     Monsieur Karsten, je crois que le maire Hurley soulève un point intéressant concernant l'idée d'offrir la subvention salariale aux municipalités. Pourquoi ne pas adopter cette approche par opposition à une subvention directe alignée sur la structure de distribution par habitant de la taxe sur l'essence?
    À vrai dire, nous avons toujours estimé que les municipalités devraient être admissibles à la subvention salariale. Nous en avons fait part aux ministres et à la vice-première ministre. La question a certainement été soulevée au Cabinet, et nous étions déçus d'entendre le ministre des Finances et le premier ministre dire que les municipalités n'y seraient pas admissibles, mais cela ne couvrirait tout de même pas toutes nos pertes.
    Comme je l'ai mentionné, à Halifax, nous avons mis à pied 1 500 personnes, et ce sont des travailleurs occasionnels et à temps partiel pour l'instant. Au fur et à mesure que nous examinerons nos budgets et que nous verrons toutes les pertes financières auxquelles nous sommes confrontés, nous devrons aller plus loin.
    Vous avez travaillé dans le milieu municipal et je vous en remercie. Toute cette crise met certainement en évidence une chose dont nous parlons depuis un certain nombre d'années — et je suis sûr que le maire Bowman en parle —, à savoir le cadre financier dépassé dans le cadre duquel nous travaillons tous.
    Vous venez de me devancer pour ma prochaine question. Depuis des années, nous réclamons un nouveau pacte pour les municipalités. Lorsque je siégeais au conseil, c'était certainement une demande importante, et j'aimerais vous entendre à ce sujet.
    Cela fait maintenant des décennies que les municipalités demandent de nouveaux pouvoirs en matière d'imposition dans la prise de décision et une plus grande autonomie concernant leurs dépenses. Si cela avait été fait il y a des années, pensez-vous que les municipalités seraient mieux placées aujourd'hui pour affronter la tempête?
     Certainement, avec le recul, je vous répondrais simplement oui. Il n'est jamais trop tard pour en discuter.
    En réalité, monsieur Morantz, le cadre est fondamentalement décalé par rapport au rôle que jouent les municipalités aujourd'hui, un décalage qui s'est accentué au cours des quatre, cinq, six ou sept dernières années. Lorsque nous aurons traversé la crise, ne vous y trompez pas, nos dirigeants locaux seront prêts à tenir ces discussions difficiles, bien sûr sans que l'on doive rouvrir la Constitution, si possible. Toutefois, l'heure n'est pas à ces discussions.
    Je ne saurais trop insister sur le fait que — et je suis dans le monde municipal depuis maintenant 16 ans — nous vivons une crise. Lorsque nous disons ignorer ce que nous devrons sabrer dans deux mois, il ne s'agit pas de la perte de revenus en tant que telle. Il ne s'agit pas des difficultés financières. Il s'agit de la perte de la capacité de savoir ce que nous devrons faire ensuite. Malheureusement, cela devra se traduire par une perte de services essentiels.
    Merci, monsieur Karsten.
    À ce sujet, je crois qu'il est important que les gens comprennent que les municipalités doivent équilibrer leurs budgets. Elles ne peuvent pas simplement imprimer des billets comme le gouvernement fédéral peut le faire, ni même enregistrer des déficits. Lorsque des baisses de revenus comme celles-ci se produisent, l'effet est immédiat, et je vous remercie d'être venus et d'avoir soulevé ces points.
    J'aimerais seulement poser une question brève, monsieur le président, si vous me le permettez.
    Monsieur Karsten, en ce qui concerne la voie à suivre, la fédération est-elle en train de réfléchir, de planifier des choses ou d'adopter des politiques concernant la réouverture de l'économie?
(1530)
    J'ai fait allusion au fait — et nous en sommes très reconnaissants — que nous communiquons directement avec la vice-première ministre Freeland. Nous essayons de nous rencontrer par téléconférence une fois par semaine avec elle ou avec la ministre de l'Infrastructure, Catherine McKenna. Nous discutons de ce dont M. Easter vient de parler, soit qu'il faut nous assurer que les programmes sont prêts à démarrer. Nous pouvons être des partenaires majeurs dans la reprise, certainement par les infrastructures et par d'autres moyens. Des discussions sont donc également en cours à cet égard, mais notre priorité pour l'instant, c'est la situation financière difficile et la crise que nous vivons.
    Je comprends. Merci.
    Je n'ai plus de question, monsieur le président.
    Merci à tous.
    C'est maintenant au tour de M. McLeod, qui sera suivi de M. Poilievre.
    Monsieur Polievre, vous vouliez soulever un point plus tôt. Je ne vous ai pas vu. Êtes-vous d'accord pour attendre votre tour?
    D'accord. Alors, je cède la parole à M. McLeod.
    Allez-y, monsieur McLeod.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les maires de leurs exposés et tous les témoins d'aujourd'hui. J'ai eu cinq mandats en tant que maire de ma petite ville dans les Territoires du Nord-Ouest, et je comprends donc toutes les préoccupations qui ont été exprimées et les recommandations.
     Je veux également souhaiter la bienvenue à la ministre Wawzonek et à Mme Shaleen Woodward. Je vous remercie de votre présence. Votre exposé était très informatif.
    J'ai deux ou trois questions.
    Comme la ministre le sait, dans le Nord, nous vivons des temps très incertains. La dernière chose que les gens des Territoires du Nord-Ouest voulaient, c'était de vivre dans une plus grande incertitude, mais malheureusement, nous faisons face à une situation où la compagnie Dominion Diamond Mines a déposé une demande de protection contre l'insolvabilité.
    Madame la ministre, pourriez-vous parler de certaines des mesures — je crois que vous avez parlé de la limite de dette — au sujet desquelles le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest aimerait que le gouvernement du Canada apporte une certitude à court terme? De quoi le Nord a-t-il besoin présentement? C'est ma première question.
    Merci, monsieur McLeod.
    Je vais parler brièvement du secteur minier en particulier. Je sais que vous disposez d'un temps limité dans ce tour.
    Pour l'instant, le secteur des ressources minérales n'a pu bénéficier d'aucune des mesures que le gouvernement fédéral a annoncées jusqu'à présent. En général, les entreprises sont trop grandes ou leur structure organisationnelle fait en sorte qu'elles n'y sont pas admissibles. À l'heure actuelle, certaines de nos entreprises ont pris des mesures pour envoyer leurs travailleurs chez eux et continuer à les payer. Elles les ont envoyés dans leurs collectivités éloignées pour les protéger, pour protéger notre système de santé, mais elles n'ont accès à aucune partie des fonds, bien qu'elles soient elles aussi confrontées à de sérieuses contraintes sur le plan des revenus et des coûts. C'est un autre secteur à examiner. Je sais qu'il y a de nombreuses demandes, mais celle-ci n'a pas encore été traitée, et les répercussions sur les trois territoires sont importantes.
    Par ailleurs, il y a des aspects plus généraux. Je sais qu'il en a été question à deux ou trois reprises, mais les services Internet constituent un énorme problème présentement. Une aide à cet égard serait utile, et il ne faut pas oublier que les coûts fixes sont élevés dans le Nord; le coût de la vie et les coûts pour faire des affaires sont élevés. Que nous abordions la question sous l'angle des coûts ou de l'idée de mettre plus d'argent entre les mains des gens ou des entreprises qui paient ces coûts, je crois que nous aurons besoin de cette marge de manoeuvre. Parfois, le fait de donner de la latitude aux gouvernements communautaires ou aux gouvernements provinciaux et territoriaux, dans notre cas, nous aide à régler ces problèmes de la façon la plus ciblée possible.
    Merci.
    Vous avez mentionné qu'en raison de la COVID-19, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest avait fait une pause dans ses affaires courantes. Je crois que le gouvernement fédéral a en bonne partie fait la même chose concernant le budget qu'il était censé présenter le 30 mars dernier. Sa présentation a été reportée.
    J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus sur ce que le gouvernement fédéral peut faire pour vous aider dans la reprise, au moment où l'économie des Territoires du Nord-Ouest sort de la pandémie et commence à examiner les prochaines étapes.
(1535)
    Je vous remercie pour cette question.
    Il n'y a aucune limite à ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour nous, dois-je dire très honnêtement.
    Lorsque tout s'est arrêté, nous étions en pleine session consacrée au budget. Au lieu de forcer l'adoption du budget à la toute fin de la session et au début de la crise de la COVID, nous avons décidé de fonctionner avec des crédits provisoires. Nous allons reprendre nos travaux à un certain moment au printemps, probablement en respectant diverses règles — comme c'est le cas pour vous également — en vue d'adopter un véritable budget. Nous nous attendions à un excédent budgétaire, mais maintenant, nos prévisions de recettes seront probablement très différentes.
    Il y a deux choses que je voudrais souligner. Il y a notamment le processus que nous allons devoir suivre. Nous avons ici un gouvernement de consensus, ce qui est un peu différent des autres provinces et territoires du Canada. Lorsque nous reprendrons nos travaux, nous devrons prendre d'autres engagements et communiquer davantage avec les différents intervenants, les gouvernements autochtones et les gouvernements communautaires pour leur garantir que nous sommes au fait de ce qui se passe sur le terrain dans l'ensemble des Territoires du Nord-Ouest.
    En ce qui concerne la situation et les prévisions de recettes à l'heure actuelle, alors que nous essayons de prévoir l'évolution de la COVID-19 et de notre réponse, il ne fait pratiquement aucun doute que nous aurons besoin d'une marge de manoeuvre financière. Je crois que quelqu'un a dit plus tôt que tout le monde devrait participer. Je dois dire très honnêtement que le gouvernement territorial souhaite participer, mais, pour le faire efficacement, il aura besoin d'une certaine marge de manoeuvre, étant donné que nos sources de revenus en ce moment s'amenuisent.
    En outre, nous devons regarder plus loin, nous pencher sur la conjoncture économique que nous envisageons dans un an, dans deux ans ou dans cinq ans, et nous devons essayer de voir cela comme une occasion qui s'offre à nous au lieu de rester simplement embourbés dans les affaires quotidiennes, dont nous devons tout de même nous occuper. Le Cadre stratégique pour l'Arctique et le Nord met en lumière un grand nombre des défis auxquels nous faisons face dans le Nord. Si nous voulons stimuler l'économie en général, nous devons déterminer quels projets contribueront à stimuler immédiatement l'économie, qu'il s'agisse de projets qui en sont à l'étape de la planification ou de projets prêts à démarrer. Dans les deux cas, ce sera avantageux. Nous devons aussi nous demander ce que nous pouvons faire pour régler certains des problèmes sous-jacents qui sont véritablement mis en relief. D'autres personnes en ont parlé.
    Je vois un signe de la main, alors je vais m'arrêter là.
    Merci, madame la ministre Wawzonek.
    La parole est maintenant à Pierre Poilievre, et ensuite, ce sera au tour de Sean Fraser.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, et je remercie tous les témoins pour leur présence.
    Nous accueillons aujourd'hui des représentants de quelques municipalités, ce qui m'a fait penser aux augmentations colossales de revenus dont les municipalités ont bénéficié au cours des trois dernières décennies.
    Au début des années 1990, le gouvernement fédéral ne finançait aucunement les infrastructures municipales. Le gouvernement Chrétien a alors pris la décision de contribuer au financement des infrastructures municipales en assumant le tiers du coût d'un nombre limité de grands projets, et le gouvernement Martin a ensuite instauré le remboursement de la TPS et une taxe sur l'essence.
    Par la suite, le gouvernement Harper a doublé le transfert de la taxe sur l'essence et il a augmenté massivement le budget d'immobilisations du gouvernement fédéral destiné aux infrastructures municipales. Il y a eu ensuite l'importante récession mondiale. Même si cette récession a eu d'énormes répercussions sur les revenus du gouvernement fédéral et des provinces, elle n'a pas eu une incidence considérable sur les recettes des municipalités, car les revenus tirés des impôts fonciers ne sont pas touchés d'une façon aussi immédiate que les recettes provenant de l'impôt sur le revenu et de l'impôt des sociétés.
    Néanmoins, les gouvernements fédéral et provinciaux ont accordé un financement ponctuel de 40 milliards de dollars, qui s'est ajouté à l'ensemble du financement que reçoivent régulièrement les municipalités, ce qui a engendré un transfert massif et monstrueux des coûts d'immobilisation des municipalités vers les gouvernements fédéral et provinciaux. Le nouveau gouvernement Trudeau a à son tour augmenté massivement les mêmes transferts, et je crois que, dans un récent budget, il a doublé le transfert de la taxe sur l'essence. Corrigez-moi si j'ai tort à ce sujet.
    Au cours des 30 dernières années, les municipalités ont donc bénéficié d'une augmentation spectaculaire de leurs revenus. En fait, durant la période précédant 2013, les recettes des municipalités ont augmenté deux fois plus rapidement que le taux d'inflation et le taux de croissance de la population combinés pendant une décennie. La situation n'est pas la même dans tous les ordres de gouvernement.
    Nous avons observé une énorme hausse des recettes des municipalités. Aujourd'hui, les municipalités demandent 10 milliards de dollars pour quatre mois, et, si j'ai bien compris les témoignages, nous serons de retour ici dans quatre mois pour discuter d'une autre demande de fonds.
    Le fardeau des contribuables canadiens ne cesse de s'alourdir. Ce sont ces mêmes contribuables qui paient des impôts fonciers aux municipalités. Ils ne viennent pas d'une autre planète; ce sont les mêmes personnes. Il n'existe pas d'autres contribuables.
    Ma question s'adresse à Brandon Ellis, du St. John's Board of Trade, qui représente les entrepreneurs et les entreprises qui se trouveront à payer pour tout cela. Ce sont eux qui donnent du travail à nos jeunes et qui sortent les gens de la pauvreté en leur offrant d'excellents emplois.
    Monsieur Ellis, est-ce que vos membres sont préoccupés par l'énorme fardeau fiscal qu'ils devront assumer en raison du quart de billion de dollars ajouté à la dette par les gouvernements cette année et des demandes apparemment sans fin de nouvelles dépenses, qui devront être financées par l'argent des contribuables?
(1540)
    Je vous remercie, monsieur Poilievre, pour votre question.
    Lorsque j'ai comparu devant le Comité il y a un an, et je sais que plusieurs membres actuels étaient présents, j'ai affirmé que nos membres sont préoccupés depuis les 25 dernières années par l'ampleur du déficit. Nous sommes en train de mener un sondage, et lorsque nous aurons les résultats, je pourrai les transmettre au Comité. Je dirais que nos membres vont craindre également que le déficit et les dépenses élevés d'aujourd'hui se traduisent par une hausse des impôts demain. Je crois que cela constituera aussi une préoccupation.
    Oui, c'est compréhensible. Il y a deux ans seulement, le gouvernement fédéral a tenté d'assommer vos membres avec de nouvelles taxes, particulièrement avec des pénalités aux petites entreprises qui économisaient. Cela témoigne d'une vision à très court terme, car les entreprises qui ont économisé sont celles qui sont les mieux placées pour faire face à la tempête. Nous devrions encourager plutôt que punir les entrepreneurs qui ont adopté ce comportement responsable, mais c'est ce que le gouvernement fédéral a tenté de faire.
    Certains témoins ont fait remarquer qu'il est plus facile pour le gouvernement fédéral d'emprunter sur les marchés étrangers du crédit, ce qui est vrai en quelque sorte. Toutefois, Bloomberg News a révélé hier que la cote AAA du Canada est en péril précisément parce que le gouvernement fédéral est perçu par les prêteurs comme étant vulnérable en raison des garanties qu'il doit donner aux provinces et aux municipalités. Si le Canada perd sa cote AAA, nous devrons payer des taux d'intérêt plus élevés sur notre énorme dette qui ne cesse de croître, ce qui signifie qu'il y aura moins d'argent à dépenser pour des services précieux auxquels nous tenons tant.
    Êtes-vous préoccupé, monsieur Ellis, à propos du fardeau supplémentaire qu'une baisse de la cote de crédit du Canada pourrait imposer aux contribuables que votre association représente?
    Oui, nous estimons que cela pourrait entraîner un fardeau considérable. Je me suis entretenu hier avec quelques-uns de nos comptables professionnels agréés, qui ont affirmé que c'était une grande préoccupation. Ils ont expliqué que nous sommes aujourd'hui moins bien placés qu'il y a 10 ans pour nous sortir d'une récession économique. Les comptables professionnels agréés sont préoccupés. Ils sont réticents à prendre des risques. Je suis moi-même assez préoccupé.
    Merci à tous.
    Je suis désolé, monsieur Poilievre, mais votre temps est écoulé.
    La parole est maintenant à M. Fraser. Ensuite, nous aurons peut-être le temps pour quatre autres questions.
    Monsieur Fraser, allez-y.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je remercie tous nos invités pour leurs témoignages.
    Mes questions vont s'adresser d'abord exclusivement à M. Karsten de la Fédération canadienne des municipalités. Je suis ravi de vous voir. Je suis partagé en ce qui concerne la position que vous avez présentée, monsieur Karsten. Je comprends tout à fait que les municipalités vivent une situation urgente depuis quelques semaines, comme à peu près tout le monde, mais je trouve que mon collègue, M. Fragiskatos, et M. Poilievre ont fait valoir de bons points.
    Je veux me concentrer sur la partie de votre témoignage où vous avez reconnu que les provinces ont un rôle à jouer.
    J'ai réfléchi notamment au fait que des gouvernements provinciaux pourraient comparaître devant le comité des finances et affirmer qu'ils sont en mauvaise posture. Je sais que notre invité de Terre-Neuve pourrait probablement affirmer que c'est le cas pour sa province. Si les provinces venaient nous dire qu'elles souhaitent que le gouvernement fédéral assume certains de leurs coûts d'exploitation habituels, notamment la rémunération des enseignants, quelle serait la différence entre cette situation, où les provinces feraient valoir qu'elles font face à une diminution très considérable de leurs revenus et qu'elles sont préoccupées à propos de l'avenir, et la présente situation où les municipalités demandent des fonds? La province de Terre-Neuve a parlé publiquement de sa mauvaise posture.
    Pourriez-vous nous expliquer la différence?
(1545)
    Bien sûr. Je vous remercie, monsieur Fraser, pour votre question.
    La différence est simple. Comme je l'ai dit il y a un instant, il s'agit de pertes de revenus irrécupérables. Il n'existe aucune façon, aucun mécanisme qui permettrait aux municipalités d'imposer quoi que ce soit ou d'instaurer une nouvelle façon de faire pour le paiement des impôts fonciers, par exemple, pour récupérer cet argent à un moment donné. Nous ne pouvons pas enregistrer un déficit. Il est vrai qu'en théorie nous pourrions examiner des façons d'emprunter de l'argent, mais comment allons-nous rembourser ces emprunts?
    C'est là où réside le problème, et c'est pourquoi nous vivons une telle crise aujourd'hui. Le problème, comme nous en avons discuté brièvement avec le député de Winnipeg, c'est que le cadre financier des municipalités ne fonctionne pas. Ce n'est pas du tout le bon moment pour s'occuper de ce problème, alors, quelle autre option s'offre à nous, outre celle de réclamer de l'aide au gouvernement fédéral?
    Il s'agit effectivement des mêmes contribuables. Nous représentons ces mêmes Canadiens. Les municipalités sont aux premières lignes; elles fournissent les services les plus fondamentaux à leurs résidants, notamment les services de police et les services d'incendie. Lorsque les revenus ne sont pas au rendez-vous, nous devons envisager des coupes dans les budgets. Ce n'est pas un très joli portrait.
    Il me semble que vous reconnaissez peut-être que, dans un monde idéal, vous devriez plutôt faire appel à la source de financement à laquelle vous étiez habitué. Les municipalités, qui sont plus ou moins des créations des provinces, s'adresseraient, dans une situation parfaite, aux gouvernements provinciaux pour demander des fonds. Vous affirmez je crois que nous ne sommes pas dans une situation parfaite. Est-ce plus ou moins cela?
    Je vous remercie, monsieur Fraser, d'avoir exprimé cela ainsi. C'est lié à ce que j'ai dit plus tôt, à savoir que les provinces doivent travailler avec nous.
    Très honnêtement, les nombreuses conversations que j'ai eues avec le premier ministre me permettent de dire que certains membres du Cabinet reconnaissent que les municipalités éprouvent parfois des difficultés à traiter directement avec les gouvernements provinciaux.
    Ce que nous demandons, plus que tout... Oui, nous demandons entre 10 et 15 milliards de dollars pour nous protéger contre nos pertes financières, mais nous...
    Mon temps est limité, monsieur Karsten, et j'aimerais vous poser une autre question.
    Dans certaines provinces — c'est le cas au Québec je crois, mais mon collègue, M. Ste-Marie, peut me corriger si j'ai tort — il existe des lois qui contribuent à décourager les conversations directes entre le gouvernement fédéral et les municipalités. Je ne veux pas poser un jugement sur ce type de loi, mais je m'attends à ce qu'il y ait une conversation entre ces deux ordres de gouvernement à un moment donné.
    Si nous fournissons une aide pour certains coûts d'exploitation urgents, les provinces pourraient vouloir récupérer une partie de cet argent pour d'autres domaines dans lesquels il y a normalement un partenariat avec les municipalités. Si nous offrons une aide financière pour permettre aux municipalités de continuer de fonctionner, craignez-vous que cela aura une incidence ou mettra en péril la capacité de participer pleinement à la reprise si, par exemple, des investissements de capitaux ne sont pas possibles, car trop d'argent aura été attribué pour les coûts d'exploitation?
    Soyez aussi bref que possible, monsieur Karsten.
    Nous avons des préoccupations, mais, je le répète, nous avons besoin en ce moment que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership. La reprise est la prochaine étape. Dans l'immédiat, il faut s'occuper de la crise à laquelle nous faisons face.
    Je vous remercie tous.
    Je vais laisser M. Ste-Marie, M. Julian, M. Cumming et Mme Dzerowicz poser chacun une question, mais auparavant, j'ai une question pour le représentant de la Saskatchewan Association of Rural Municipalities.
    Monsieur Orb, au cours des dernières semaines, la Canadian Cattlemen's Association, le Conseil canadien du porc, la Fédération canadienne de l'agriculture et quelques autres organismes ont parlé des programmes de gestion des risques de l'entreprise, qui ont subi des compressions en 2013 de l'ordre d'environ 15 %, du programme d'assurance des prix du porc et du bétail et d'un programme de retrait pour l'industrie bovine. Que disent vos membres à propos de ces programmes et quelle est l'incidence de ces programmes sur l'industrie céréalière?
(1550)
    Bien entendu, l'industrie du bétail subit beaucoup de pression actuellement en raison des répercussions de la COVID sur certains abattoirs en Alberta. Je sais que nous nous entretiendrons avec notre ministre provincial de l'Agriculture la semaine prochaine. Nous avons déjà discuté avec la ministre Bibeau, et elle est au courant du programme de retrait. C'est une préoccupation pour nous.
    L'industrie céréalière nous préoccupe. Nous nous inquiétions notamment du transport du grain et des travailleurs dans l'ensemble de cette industrie, notamment les agriculteurs et leurs familles, ainsi que de la livraison du grain, par exemple dans les ports. Nous avons d'ailleurs eu une conversation avec les autorités du port de Vancouver il n'y a pas très longtemps.
    Nous sommes très préoccupés, et nous avons demandé au gouvernement fédéral, en particulier à la ministre Bibeau, de se pencher sur les programmes Agri-stabilité et Agri-investissement. Ce sont les programmes de soutien dont peuvent bénéficier les éleveurs de bétail et les producteurs de grains. Il est vrai qu'il y a eu des compressions, et nous demandons au gouvernement fédéral d'apporter plus rapidement des correctifs aux programmes. Ils existent pour une raison, mais ils ont des lacunes en ce moment, auxquelles il faut remédier.
    Merci, monsieur Orb.
    Allez-y, monsieur Ste-Marie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    D'abord, j'aimerais dire à M. Fraser qu'il est possible de débloquer les fonds tout en respectant les champs de compétence. On peut penser à l'entente sur le logement social ou à l'argent pour les infrastructures.
    Ma question s'adresse encore à vous, madame Bolduc.
    Selon vous, quelles mesures pourraient être mises en place pour aider les entreprises ou les organismes qui offrent des services de proximité?
    Tout d'abord, ce sont souvent de très petites entreprises qui offrent des services de proximité et elles n'ont pas accès à du financement ou à un prêt. Actuellement, le meilleur moyen de les aider est de leur donner des subventions directes pour combler le manque à gagner causé par les derniers mois de pandémie. Il n'est pas nécessaire que ce soit de grosses sommes. Cela leur permettrait de relancer leurs activités, parce que, souvent, ces entreprises n'ont pas accès à du financement ou à des prêts pour leur fonctionnement ou leur fonds de roulement.
    Deuxièmement, il faut reconnaître la contribution des partenaires dans les entreprises qui s'engagent en politique municipale, provinciale ou fédérale. Ce sont les entrepreneurs qui sont sollicités pour faire de la politique, justement parce qu'ils ont été performants dans la gestion de leur entreprise. Nous les voulons dans nos milieux.
    Ce sont là deux moyens faciles de répondre aux besoins des entreprises qui offrent des services de proximité.
    La dernière façon de les aider, et peut-être la plus importante, serait de mettre en lumière le coût environnemental découlant du fait de faire affaire avec des entreprises qui viennent de très loin et de facturer ce coût. Cela mettrait vraiment en évidence l'importance d'avoir des entreprises de proximité. Cela se ferait à plus long terme. C'est sûr que cela ne se ferait pas très rapidement, mais cela permettrait certainement de donner un élan considérable à tout ce qui concerne les services de proximité.
    En terminant, je dirai un mot sur les services de proximité du gouvernement. Je parle davantage des services de proximité provinciaux que fédéraux. Ici, les bureaux de Service Canada ne sont plus accessibles en personne. Ils le sont seulement par Internet, ce qui prive toute une population de services concrets. Cela prive aussi les gens des milieux ruraux d'emplois offrant de bons salaires. C'est peut-être une autre façon de penser les services de proximité.
    Je vous remercie beaucoup.
    J'espère que cela a répondu à votre question.

[Traduction]

    Je vous remercie tous les deux.
    Monsieur Julian, la parole est à vous.
    J'ai une dernière petite question pour le maire Coté et le maire Hurley. Le gouvernement fédéral a beaucoup d'outils à sa disposition dans le domaine bancaire. Nous savons que dans certaines localités des coopératives de crédit ont réduit à zéro leurs taux d'intérêt pour les cartes de crédit et les marges de crédit.
    Est-ce que le gouvernement fédéral devrait utiliser ses outils pour réduire les taux d'intérêt et les pénalités hypothécaires imposés par les grandes banques canadiennes?
(1555)
    Cela ne fait aucun doute à mes yeux. Nous avons vu cela durant la crise du logement, qui n'est toujours pas terminée. À mon avis, les grandes banques jouissent d'un passe-droit pour ce qui est de participer à la solution durant la présente crise. De leur côté, certaines petites coopératives de crédit de la Colombie-Britannique font leur part en diminuant leurs taux d'intérêt et, dans certains cas, en éliminant les taux d'intérêt pendant quelques mois pour permettre aux gens de passer au travers de la crise.
    Selon moi, il ne fait aucun doute que les grandes banques devraient faire également leur part en gelant les taux et, en fait, je crois, en gelant les paiements pendant quelques mois pour aider le pays. Après tout, pendant de nombreuses années, elles se sont enrichies et elles ont été protégées par notre gouvernement, alors je pense qu'il est temps qu'elles fassent leur part pour les Canadiens.
    Monsieur le maire Coté, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Je n'ai pas grand-chose à ajouter. Je pense que les municipalités et les agences de transport en commun peuvent chercher à emprunter, quoique, habituellement, le financement par emprunt sert à investir dans des projets d'immobilisations. Nous ne cherchons pas à obtenir des emprunts pour combler des déficits de fonctionnement.
    Je crois que toute aide financière provenant des provinces ou du gouvernement fédéral destinée à réduire les frais liés au service de la dette serait utile, du moins de notre point de vue. Cependant, cette aide ne nous permettrait pas de résoudre la crise immédiate à laquelle nous faisons face.
    D'accord. Je vous remercie tous.
    M. Cumming posera une seule question, puis Mme Dzerowicz fera de même.
    Monsieur Cumming, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Ellis. Je vous remercie d'avoir parlé de l'importance du secteur des ressources, car c'est un secteur qui contribuera à générer des revenus après la crise. Le gouverneur de la Banque du Canada nous a parlé de l'importance du secteur des ressources au sein de l'économie et du rôle important qu'il jouera lors de la reprise. Vous avez confirmé ses propos.
    Que disent vos membres, particulièrement ceux dans le secteur des ressources, au sujet de ce qu'il faut faire pour que ce secteur puisse prospérer dans votre région?
    Je vous remercie beaucoup pour votre question.
    Je vais répondre rapidement, monsieur le président. J'encourage tout le monde à consulter le site imaginethepotential.ca. Il met en lumière tout ce qui est formidable à propos du secteur pétrolier et gazier de Terre-Neuve-et-Labrador et tout le potentiel de ce secteur.
    La Noia est l'association qui représente notre industrie pétrolière et gazière. D'après ce que je sais, elle demandera un certain investissement au gouvernement fédéral. Je ne peux pas vous dire quelle en sera l'ampleur, mais nos membres nous ont dit souhaiter que le gouvernement leur laisse le champ libre dans une certaine mesure et qu'il permette à certains projets énergétiques d'aller de l'avant.
    Comme je l'ai dit durant mon témoignage, le projet de loi C-69 est assez problématique. Nous en avons parlé, à l'instar de la Chambre de commerce du Canada.
    Merci beaucoup, monsieur Ellis.
    Madame Dzerowicz, la dernière question vous appartient. Allez-y.
    Oui, merci beaucoup.
    Je tiens à remercier tous les témoins pour leurs exposés et leur participation à cette excellente conversation que nous avons eue au cours des deux dernières heures.
    Ma dernière question, rapidement, s'adresse à M. Karsten. Vous avez fait un excellent travail en vue de présenter une proposition au gouvernement fédéral. Pouvez-vous nous donner une meilleure idée de la proposition qui a été faite à l'échelon provincial?
    Merci, Mme Dzerowicz. C'est une excellente question.
    Il faut comprendre — et je suis certain que vous la comprenez — la complexité de... La Fédération canadienne des municipalités travaille directement avec les députés et avec les fonctionnaires... en d'autres termes, elle travaille directement avec le gouvernement, tous les chefs de parti et leur caucus.
    Nous ne jouons pas un tel rôle avec les provinces; les décisions relèvent donc de chaque province et de chaque territoire. Il se passe beaucoup de choses en même temps et c'est pourquoi nous croyons qu'en temps de crise comme celle que nous traversons actuellement, le gouvernement fédéral doit assurer un rôle de leadership. Nous ne contrôlons pas ce qui se passe dans les provinces et les territoires. De nombreux maires s'expriment à ce sujet, mais ils ne le font pas d'une voix unie.
(1600)
    Merci à tous.
    Je sais que vous n'avez pas tous pu poser beaucoup de questions, mais les exposés sont consignés dans le compte rendu. D'autres personnes les entendront et l'information se rendra jusqu'en haut. Ces renseignements aident grandement le gouvernement à prendre des décisions en cette période de pandémie. Je tiens donc à vous remercier sincèrement tout un chacun pour votre présence.
    Je vais maintenant laisser le greffier faire un test avec les témoins du prochain groupe. La séance est suspendue pendant ce temps. Merci à tous.
(1600)

(1610)
    Je crois que nous sommes prêts à continuer. Nous reprenons les travaux.
    Mesdames et messieurs les députés et les témoins, je vous souhaite la bienvenue à la deuxième partie de la réunion 22 du Comité des finances de la Chambre des communes.
    Comme vous le savez d'après l'avis publié, nous nous réunissons conformément à l'ordre de renvoi du mardi 24 mars pour étudier la réponse du gouvernement à la pandémie de la COVID-19. Nous avons hâte d'entendre les critiques constructives et les suggestions des témoins aujourd'hui.
    Sur ce, je vous remercie de votre présence. Comme nous recevons sept témoins, nous devons respecter un horaire serré. Ainsi, je vous demande de vous limiter à cinq minutes ou moins pour vos exposés afin que nous tenions une série complète de questions.
    Nous allons commencer avec Adam Brown de l'Alliance canadienne des associations étudiantes.
    Bienvenue, monsieur Brown. Vous avez la parole.
    Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, et bonjour aux autres témoins.
    J'aimerais d'abord reconnaître les terres traditionnelles des peuples du Traité no 7 et de la région 3 de la nation métisse de l'Alberta, où je me trouve aujourd'hui.
    Je m'appelle Adam Brown. Je suis le président de l'Alliance canadienne des associations étudiantes, ou ACAE. Je suis aussi le vice-président externe de l'association des étudiants de l'Université de l'Alberta et j'en suis à ma cinquième année d'université. J'obtiendrai bientôt un diplôme dans les domaines du droit, de l'économie et des affaires.
    L'ACAE est une organisation non partisane sans but lucratif qui représente plus de 360 000 étudiants des collèges, écoles polytechniques et universités de l'ensemble du Canada. Par l'entremise d'un partenariat officiel avec l'Union étudiante du Québec, avec laquelle je partagerai mon temps de parole aujourd'hui, nous nous faisons la voix des étudiants du pays.
    Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner devant le Comité. Je me souviens avoir témoigné devant vous il y a quelques mois à peine pour discuter de l'aide aux étudiants dans un contexte très différent. Depuis notre dernière rencontre, la pandémie mondiale de la COVID-19 a mis fin abruptement aux sessions de nombreux étudiants. À une période où les élèves se préparaient à leurs examens de fin d'année et à un été au travail, leur expérience d'éducation a été transférée en ligne, et bon nombre de ceux qui avaient prévu travailler pendant l'été ont vu leurs possibilités d'emploi disparaître en quelques jours seulement.
    Je ne saurais trop insister sur le bouleversement que vivent les étudiants de l'ensemble du pays. Tout comme les autres Canadiens, les étudiants doivent vivre avec le malaise causé par l'incertitude. Comme bon nombre d'autres Canadiens, nous aimerions savoir quand nous allons pouvoir revenir à nos activités quotidiennes, à nos salles de classe qui faisaient partie de notre routine, à notre travail qui nous permettait de subvenir à nos besoins et à la compagnie de nos amis qui sont si importants dans notre vie d'étudiant.
    En tant que leader étudiant, j'aimerais vous remercier pour l'aide annoncée la semaine dernière. De nombreux étudiants pourront recevoir la Prestation canadienne d'urgence ou la Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants et ainsi avoir un revenu qu'ils auraient autrement perdu. Je tiens aussi à souligner que les étudiants auront plus de difficulté que jamais à économiser pour payer leurs frais de scolarité en septembre et que les conditions généreuses associées aux prêts et bourses du Canada faciliteront leur accès à l'éducation.
    Cela étant dit, l'ACAE croit qu'on peut toujours faire mieux. À notre avis, un groupe de personnes a été oublié dans l'annonce de cette semaine: les étudiants internationaux, notamment ceux qui sont coincés au Canada en raison de la pandémie de la COVID-19 et qui ne peuvent rentrer chez eux. Ces étudiants ont été déplacés en raison de la pandémie mondiale et sont coincés dans un pays qu'ils connaissent bien, certes, mais qui n'est tout de même pas le leur.
    J'aimerais que vous essayiez un instant de vous mettre à leur place. N'auriez-vous pas peur, vous aussi?
    Les étudiants internationaux qui sont coincés au Canada peuvent recevoir la Prestation canadienne d'urgence s'ils ont suffisamment travaillé, mais ils ne sont pas admissibles à la Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants ni à bon nombre des initiatives en matière d'emploi qui ont été annoncées. Ainsi, même si de nombreux étudiants internationaux arriveront à se débrouiller, certains autres ne recevront aucun soutien du gouvernement canadien pour s'acheter de la nourriture, payer le loyer ou se procurer le nécessaire. N'oublions pas que les déplacements internationaux sont perturbés depuis l'éclosion de la pandémie de la COVID-19 et que bon nombre des étudiants étrangers ne peuvent rentrer chez eux.
    Je vous demanderais aussi de vous demander ce que vous souhaiteriez qu'un gouvernement étranger fasse pour un étudiant canadien coincé ailleurs dans le monde. C'est la question que pose l'ACAE.
    Il ne faut pas oublier que les étudiants internationaux font partie intégrante des campus canadiens. Ils paient très cher l'éducation qu'ils reçoivent ici et leur contribution à l'économie canadienne représente 10 milliards de dollars. Ainsi, les étudiants internationaux doivent obtenir notre soutien et avoir accès à une éducation de grande qualité au Canada en septembre prochain.
(1615)

[Français]

    J’aimerais remercier le Comité encore une fois de m'avoir invité à venir témoigner et à porter la voix des étudiants canadiens.
    J'ai bien hâte de répondre à vos questions.
    Je vais maintenant passer la parole à mon collègue Philippe LeBel de l’Union Étudiante du Québec.
    Je vous remercie, membres du Comité, de nous donner l'occasion de nous exprimer devant vous aujourd'hui.
    Je ne répéterai pas évidemment tout ce qu'a dit mon collègue. Il va sans dire que l'aide promise par Ottawa cette semaine était très attendue.
    En tant qu'étudiant-chercheur, je vais vous parler plus particulièrement aujourd'hui de la recherche et de son financement. L'annonce de la prolongation des bourses de recherche est évidemment plus que bienvenue. Par contre, pour réduire les répercussions de la crise, il va falloir que l'aide soit bien administrée. Il y a deux choses importantes.
    La première chose est qu'il existe deux types de financement: direct et indirect. Pour ce qui est du financement direct, on parle des étudiants et des étudiantes qui ont reçu directement une bourse des organismes subventionnaires fédéraux parce qu'ils ont postulé dans le cadre d'un concours. En ce qui concerne le financement indirect, lorsque les chercheurs et les chercheuses demandent une subvention pour un projet, ils peuvent inclure une bourse pour un étudiant ou une étudiante à la maîtrise ou au doctorat. Ce sera donc important que la bonification qui est prévue d'allonger la durée des bourses soit accordée autant pour les financements directs qu'indirects.
    La seconde chose à ne pas oublier est le financement des projets eux-mêmes. Plusieurs dépenses auront été engagées pendant la période d'arrêt des activités. Par exemple, beaucoup de recherches dans le domaine de la santé nécessiteront d'avoir accès à des lignées cellulaires ou à des lignées animales. L'entretien de ces lignées pendant la période d'éloignement social ou leur redémarrage par la suite va engendrer des coûts et des délais supplémentaires pour terminer les projets. Pour assurer la réussite des étudiantes-chercheuses et des étudiants-chercheurs, il ne faut pas seulement qu'elles ou ils reçoivent de l'argent, il faut aussi que les moyens financiers et techniques soient en place pour qu'ils puissent terminer leur projet.
    Cela conclut ma présentation.
    Je vous remercie encore de l'invitation.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre le représentant de l'Université Carleton. Vous avez déjà témoigné devant le Comité, monsieur Lee. Allez-y.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous remercie de m'avoir invité.
    Je vais faire quelques annonces, très rapidement. Premièrement, je tiens à dire que je n'offre aucun service de consultation à qui que ce soit, où que ce soit. Deuxièmement, je ne suis aucunement en situation de conflit d'intérêts puisque je n'ai d'investissements dans aucune entreprise. Troisièmement, je ne suis associé à aucun parti politique; je ne fais aucun don à un parti politique et je n'accepte jamais qu'on installe des affiches sur mon terrain en période électorale.
    Vous m'excuserez de regarder à ma droite plutôt que de regarder mon minuscule ordinateur portatif, où se trouve la caméra. J'ai un écran beaucoup plus grand à ma droite: un écran de 24 pouces.
    Depuis les années 1960, le Canada s'est bâti une solide réputation en offrant un filet de sécurité sociale efficace dans de nombreux volets de la société canadienne, comme le soutien du revenu des aînés, la Sécurité de la vieillesse, le Supplément de revenu garanti et le Régime de pensions du Canada; le soutien du revenu des personnes sans emploi par l'entremise de notre fameux programme d'assurance-emploi; le soutien social offert aux personnes à faible revenu et aux personnes défavorisées; le logement social et le soutien aux enfants.
    Maintenant, le gouvernement du Canada a lancé la Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants, qui sera offerte du mois de mai au mois d'août. Je suis heureux de voir qu'il s'agit d'une mesure temporaire, qui sera offerte par l'entremise de l'Agence du revenu du Canada. Le gouvernement a aussi annoncé la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. Ce sont là de bonnes innovations qui s'ajoutent aux programmes préalablement annoncés.
    Nous pourrions certainement apporter quelques améliorations à ces programmes — parfois petites, parfois plus importantes —, mais chacun des programmes destinés aux entreprises et aux particuliers se fonde sur plusieurs hypothèses critiques officieuses ou qui n'ont pas fait l'objet de discussions adéquates.
    La première hypothèse veut que ces programmes de dépenses de quelque 200 milliards de dollars visent une aide temporaire de quelques mois seulement.
    Selon la deuxième hypothèse, puisque ces dépenses sont absolument nécessaires, nous ne pouvons pas discuter des conséquences ou nous en soucier.
    Selon la troisième hypothèse, si la pandémie demeure et que nous ne trouvons pas de vaccin — c'est-à-dire n'est pas temporaire —, nous devrons maintenir ces dépenses sans précédent.
    Selon la quatrième hypothèse, un nombre important d'entreprises ne pourront rouvrir avant que le coronavirus ne soit éradiqué ou presque disparu.
    J'aimerais me centrer sur les enjeux stratégiques qui remettent directement en question ces hypothèses. Au cours des prochains mois, des milliers d'entreprises — surtout des petites entreprises — mourront. Selon les paroles immortelles — et je n'essaie pas de tourner la situation à la blague — de John Cleese de Monty Python, elles ne seront pas au repos; elles cesseront d'exister. Il n'y aura plus d'emploi dans ces entreprises. En effet, il est tout à fait concevable de penser qu'un plus grand nombre de petites entreprises que de Canadiens mourront du coronavirus au cours des 12 prochains mois. Par conséquent, les politiques fiscales et monétaires du gouvernement doivent se centrer sur la survie des PME.
    Pourquoi est-ce que je m'intéresse tant à ce secteur si je ne consulte aucunement ses membres? Je vais vous donner un petit cours d'appoint.
    Selon les données de Statistique Canada, environ 1,2 million de petites entreprises du Canada comptent moins de 99 employés — ce qui correspond à la définition d'une petite entreprise —, et assurent 70 % de tous les emplois. Il n'y a que 22 000 moyennes entreprises qui ont de 100 à 499 employés et qui assurent 20 % des emplois. Les 3 000 grandes entreprises du pays assurent 10 % des emplois.
    Comme je l'ai dit au début de mon exposé, nous offrons un ensemble diversifié et bien structuré de programmes d'infrastructure sociale aux particuliers, mais nous ne faisons pas un aussi bon travail pour les entreprises. En effet, au cours des dernières années, la démonisation de certains propriétaires de PME au sujet de la taxation a fait en sorte que nous n'avons pas discuté de la centralité essentielle des PME pour l'emploi dans notre économie, et que nous ne la comprenons pas. Heureusement, ces présomptions semblent avoir disparu avec la crise.
    Je vais conclure dans une minute.
    Avant de penser aux autres approches possibles, nous devons savoir où nous en sommes de façon générale. Il semble de plus en plus probable que le déficit fédéral atteigne les 200 milliards de dollars en 2020, soit 10 % du PIB. Oui, c'est soutenable à court terme, mais comme je l'ai dit au Comité à l'automne et au printemps derniers, il est trompeur de faire valoir la solidité budgétaire du gouvernement du Canada en utilisant un ratio de la dette au PIB de 30 % parce que lorsqu'on tient compte des gouvernements provinciaux plus faibles — selon la pratique normalisée de l'OCDE —, alors nous arrivons plutôt à un ratio de la dette au PIB de 90 %, et ce, avant la crise.
    Lorsqu'on calcule l'effondrement du PIB, le dénominateur, plus un déficit de 200 milliards de dollars et le ratio de la dette au PIB de 30 % du budget de l'année dernière, on arrive maintenant à 50 %. Lorsqu'on ajoute au moins deux années de dépenses à 200 milliards par année, alors on approche du pourcentage de la dette au PIB du premier ministre Chrétien en 1995, qui a donné lieu à la plus importante réduction des effectifs de l'histoire du Canada. Il aura fallu trois décennies — les années 1970, 1980 et 1990 — pour nous rendre là où nous nous rendrons en trois ans à peine.
(1620)
    Ces chiffres démontrent le caractère gargantuesque de la situation, mais il existe d'autres solutions que de prier pour l'apparition d'un vaccin.
    Nous devons immédiatement classer toutes les fermes et les secteurs de l'industrie en fonction du risque d'infection au coronavirus à l'aide de la méthode de classification utilisée par Hendrik Streeck, un épidémiologiste de premier plan de l'Université de Bonn. Il procède à la classification des secteurs à faible contact et à faible risque, comme celui de la vente au détail — à l'exception des bars, des restaurants et des salles de divertissement — par opposition aux secteurs et aux activités où les contacts et les risques sont importants, c'est-à-dire où se trouvent un grand nombre de personnes à proximité les unes des autres pendant de longues périodes, comme les bars, les restaurants et les lieux de rassemblements sportifs. Bien sûr, les travailleurs de la santé de première ligne et les aînés dans les résidences font partie de cette deuxième catégorie.
    Nous devons élaborer un plan — comme le font l'Allemagne, le Danemark, la Saskatchewan et le Québec à l'heure actuelle — pour réactiver certaines parties de notre économie tout en appliquant les mesures de distanciation appropriées, afin d'assurer la survie des PME, de l'emploi, de notre économie et de notre société.
    Merci.
(1625)
    Merci beaucoup, monsieur Lee.
    Nous allons maintenant entendre le président-directeur général de Community Food Centres Canada, Nick Saul.
    Monsieur Saul, vous avez la parole.
    Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui.
    Je m'appelle Nick Saul. Je suis PDG des Centres communautaires d'alimentation du Canada. Je suis accompagné de ma collègue Sasha McNicoll, notre responsable des politiques.
    Les CCAC cultivent la santé, l'esprit d'appartenance et la justice sociale dans les communautés marginalisées du Canada par le pouvoir de la nourriture. Grâce à notre réseau national de 200 organisations, nous travaillons à éradiquer la pauvreté et l'insécurité alimentaire, ainsi qu'à améliorer le bien-être des Canadiens à faible revenu. En tout, 83 % des personnes à qui nous venons en aide ont un revenu inférieur au seuil de faible revenu: 37 % sont sans emploi et 24 % touchent des prestations d'invalidité.
    J'aimerais vous remercier, les vaillants fonctionnaires et vous, d'avoir réagi si rapidement pour veiller à ce que le plus de Canadiens possible reçoivent l'appui financier dont ils ont besoin pour traverser cette crise. J'aimerais aussi remercier Julie Dzerowicz, notre députée, de se faire une si ardente défenseure de nos efforts.
    Nous sommes reconnaissants du financement de 5 millions de dollars que nous avons reçu d'Agriculture et Agroalimentaire Canada pour aider des organisations d'un océan à l'autre à fournir une assistance alimentaire d'urgence aux Canadiens les plus durement touchés. Ces fonds ont eu un effet positif immédiat. C'est Erin Beagle, directrice générale de Roots to Harvest, à Thunder Bay, qui a déclaré: « Il y avait déjà beaucoup d'incertitude avant, mais le financement que nous avons reçu du gouvernement fédéral par les CCAC nous permet de croire que nous arriverons à nous en sortir, il nous procure une certaine certitude à un moment où il y a tant d'incertitude. C'est un soulagement pour les personnes qui sont déjà vulnérables et qui vivent dans la pauvreté. Je suis vraiment contente de pouvoir dire que nous sommes là. Ce n'aurait pas été possible sans ce financement. »
    Cela dit, nous savons qu'il y a des millions de Canadiens en détresse. Nous avons beaucoup de pain sur la planche pour lutter contre la crise de l'insécurité alimentaire qui ne cesse de s'aggraver. Le Dépôt, par exemple, notre centre communautaire d'alimentation partenaire de Montréal, reçoit 110 nouvelles demandes de services chaque jour, soit l'équivalent de ce qu'il reçoit normalement en un mois, et il a déjà dépensé la moitié de son budget alimentaire annuel dans les 30 derniers jours.
    Bien avant que la crise de la COVID ne nous frappe, 4,4 millions de Canadiens, soit un sur huit, vivaient dans l'insécurité alimentaire. Du nombre, 65 % ont un emploi, mais ne gagnent pas encore assez d'argent pour mettre du pain sur la table. Le travail précaire, les bas salaires, le peu d'heures de travail et l'absence d'avantages sociaux sont malheureusement la norme pour des millions de travailleurs, particulièrement des femmes, des jeunes et des membres des communautés racialisées. Presque un tiers — un tiers — des personnes souffrant d'insécurité alimentaire ont des revenus supérieurs au seuil du faible revenu. Même pour ceux ayant un revenu considéré suffisant, le coût de la vie est rendu tel, presque partout au pays, qu'ils n'arrivent plus à joindre les deux bouts.
    Selon nos études récentes, l'insécurité alimentaire imprègne tous les aspects de la vie des gens. Elle nuit à leur santé physique et mentale, accentue l'isolement social et l'exclusion culturelle, érode les relations avec les proches et crée un tort irréparable à la vie des enfants. Ces réalités nous coûtent des milliards de dollars chaque année.
    Les mesures prévues dans le plan d'intervention économique du Canada, particulièrement la Prestation canadienne d'urgence, est une bouée de sauvetage pour bon nombre de Canadiens ayant perdu leur emploi à cause de la COVID, mais nous devons continuer de trouver des moyens d'atteindre les personnes encore en difficulté. Comme le Centre canadien de politiques alternatives l'a fait ressortir, 1,4 million de Canadiens sans emploi n'ont pas reçu de soutien au revenu de l'AE ni de la PCU en avril. Nous sommes contents de l'augmentation du crédit pour la TPS/TVH, qui sera d'une aide inestimable pour les Canadiens à revenu faible ou modeste. Comme la crise se poursuit, nous espérons qu'il y aura une autre augmentation pour le crédit octroyé en juillet.
    Notre travail consiste normalement à rassembler les gens autour d'une bonne alimentation plutôt qu'à leur fournir des denrées de base de manière isolée. Si nous sommes fiers de pouvoir aider nos partenaires à se réorganiser pour offrir une aide alimentaire d'urgence aux centaines de milliers de Canadiens qui en ont un besoin urgent, nous ne pourrons pas continuer de compter, en temps ordinaire, sur ce qui ne devrait être qu'une réponse charitable d'urgence pour répondre à ce qui devrait être considéré comme les nécessités de base de la vie. Comme la PCU, toute nouvelle prestation devrait être suffisante, dès le départ, pour créer une certaine stabilité, un revenu de base en-dessus duquel les gens ne peuvent pas tomber. C'est le genre de politique sur le revenu qu'il faut envisager, parce que c'est ce qui aurait le plus grand potentiel d'instaurer une plus grande équité au sortir de la pandémie de COVID-19.
    Il est absolument impératif que nous continuions d'utiliser le système fiscal fédéral pour soutenir adéquatement les gens à toutes les étapes de leur vie. On pourrait, par exemple, rendre le crédit d'impôt pour personnes handicapées remboursable, comme nous l'avions proposé dans notre mémoire prébudgétaire. De même, nous devons miser sur l'aide offerte par l'Allocation canadienne pour enfants, la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti, puis travailler en complémentarité pour mieux venir en aide aux adultes à faible revenu en âge de travailler grâce à la hausse de l'Allocation canadienne pour les travailleurs. Pour les travailleurs canadiens, nous avons besoin de politiques afin de lutter contre la précarité d'emploi et de créer de meilleurs emplois, dotés de salaires et d'avantages sociaux plus élevés. Ensemble, ces mesures nous permettront de mieux respecter l'obligation juridique du Canada de garantir le droit à l'alimentation de ses citoyens.
(1630)
    Les sociétés qui réduisent les inégalités observent une amélioration de la productivité, de la réussite scolaire, de la santé et du bien-être. Nous bénéficions tous des efforts pour créer une économie plus juste et le filet de sécurité sociale nécessaire pour aider les gens à y participer et à rebondir. C'est aussi ce qui nous aidera à nous prémunir contre les chocs, qui sont inévitables.
    Encore une fois, je vous remercie de votre attention et de votre travail acharné en ces temps difficiles. Ma collègue Sasha et moi-même sommes prêts à répondre à toutes vos questions et à continuer de travailler avec vous à bâtir un Canada plus équitable.
    Merci.
    M. Pierre Céré, porte-parole du Conseil national des chômeurs et chômeuses est notre prochain intervenant, si je ne me trompe pas.

[Français]

     Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés du Comité permanent des finances, je vous remercie de nous inviter et de nous donner cette occasion de partager avec vous notre réflexion concernant les mesures d’urgence qui ont été mises en place par le gouvernement canadien suite à la crise sanitaire.
    Je suis porte-parole du Conseil national des chômeurs et chômeuses. À ce titre, je vais m’attarder tout particulièrement sur les mesures de remplacement du revenu visant les travailleurs et les travailleuses qui ont perdu leur emploi en raison de la pandémie de la COVID-19. Cette pandémie a littéralement provoqué un séisme dans le monde du travail, faisant basculer d’un seul coup vers le chômage des millions de personnes. C’est un choc à peu près jamais vu dans notre histoire récente, sinon lors de la Grande Dépression provoquée par le krach boursier de 1929.
    On évalue à ce jour que plus du tiers de la population active est tombé au chômage. En date du 23 avril, soit hier, 7,1 millions de personnes avaient demandé la Prestation canadienne d’urgence, la PCU. C’est énorme. Au climat anxiogène de la crise sanitaire s’est donc ajoutée celle du chômage. Le revenu, vous le savez, est au cœur de la vie des gens et des familles. C’est avec cela qu’on paie les comptes, le loyer ou l’hypothèque, l’épicerie, les médicaments et les autres besoins de la famille.
    Pendant que la machine de Service Canada implosait de toutes parts devant le nombre exorbitant de demandes de prestations, que son système en ligne tombait en panne, que les lignes téléphoniques ne répondaient plus et que les bureaux fermaient, la population se demandait de quoi elle vivrait et à quoi elle aurait droit comme revenu de remplacement face au chômage. Nous nous posions les mêmes questions, et nous devions répondre aux questions de personnes manifestement désemparées qui appelaient à nos bureaux, par milliers, chaque jour. Au début, chaque jour de silence gouvernemental et d’absence d’orientation claire nous a semblé durer un siècle. Y aurait-il un assouplissement des règles de l’assurance-emploi pour permettre à toutes les catégories de travailleurs et de travailleuses d’être protégées? Y aurait-il plutôt des mesures d’urgence temporaires? Nous l’ignorions. La population l’ignorait et cela a ajouté au climat d’anxiété. Tout cela a pris plus d’une semaine à se résoudre.
    En effet, depuis l’adoption par le Parlement, le 25 mars dernier, d’un unique programme d’urgence de remplacement du revenu, la Prestation canadienne d’urgence, le climat s’est assaini. On a senti que les gens, de façon générale, commençaient à être rassurés. La mise en œuvre de la PCU, le 6 avril, et la rapidité des paiements ont contribué à faire baisser la pression qui pesait sur les familles. Il faut reconnaître que la couverture de ce programme était très étendue, incluant notamment les salariés, mais aussi les travailleurs et travailleuses autonomes ayant perdu leur emploi du fait de la crise sanitaire. Cependant, il ne faut pas oublier pour autant qu’il demeurait des trous importants dans ce filet social d’urgence.
    Nous sommes intervenus avec vigueur à plusieurs reprises afin de souligner ces lacunes et force est de constater que nous, comme d’autres intervenants de la société civile et du monde politique, avons été entendus. Je crois qu’il est tout à l’honneur du présent gouvernement d’avoir pris en considération d’autres points de vue pour les intégrer aux suites à donner à la PCU. Ces suites ont été annoncées le 15 avril, soit la semaine dernière, pour les travailleurs et les travailleuses d’industries saisonnières en fin de prestations d’assurance-emploi et ne pouvant reprendre leur emploi habituel; pour les personnes ayant terminé ou terminant leurs prestations d’assurance-emploi; et pour les travailleurs et les travailleuses ayant subi une baisse de revenus parce qu’ils sont passés de temps plein à temps partiel. D’autres suites ont aussi été annoncées cette semaine, le 22 avril, avec la mise en place d’une PCU pour les étudiants et les étudiantes, que nous saluons. Pour parler franchement, beaucoup de personnes ont poussé un long soupir de soulagement. Il fallait s’assurer que personne n’était laissé de côté et qu’il ne restait plus de trous dans le filet social.
     J’aimerais maintenant attirer votre attention sur deux éléments. Le premier est de nature factuelle. Encore aujourd’hui, le service aux citoyens de Service Canada est dysfonctionnel et grandement insuffisant, voire chaotique. Partout au pays, les 600 bureaux de Service Canada sont fermés et personne ne répond au téléphone. À part un formulaire en ligne pour demander d’être rappelé, il n’y a absolument aucun moyen de contacter qui que ce soit à Service Canada. Il faut que cela soit réglé, et au plus vite. À l’heure actuelle, le dossier de milliers, sinon de centaines de milliers, de prestataires est actuellement bloqué et sans issue.
(1635)
     En second lieu, pour qu'un programme gouvernemental fonctionne, encore faut-il que les gens le connaissent et le comprennent. Il faudrait vraiment que le gouvernement déploie une importante campagne de publicité par l'entremise des grands médias afin d'informer la population des nombreux programmes existants, car ils sont nombreux, et des modalités qui s'y rattachent. Il faut un véritable plan de communication, lequel a grandement manqué jusqu'à présent.
    Enfin, je ne saurais terminer sans rappeler qu'une crise comme celle que nous connaissons peut devenir le vecteur nécessaire pour repenser l'importance de nos couvertures sociales. C'est la crise des années 1930 qui a mené à la création du programme d'assurance-chômage. La Seconde Guerre mondiale a donné lieu à la mise en place de différents programmes sociaux assurant une meilleure redistribution des richesses, ce que nous avons appelé l'État-providence.
    Avec la crise actuelle, nous avons été à même de constater les manquements de nos protections sociales, plus particulièrement de notre régime d'assurance-emploi. Cette crise doit nous amener à lancer un vaste chantier de refonte de ce programme. Les solutions ne sont pas connues à l'avance, mais il nous faut réfléchir et apporter des réponses modernes, en phase avec les réalités de notre siècle, notamment la réalité du travail autonome, du télétravail et du travail temporaire, des effets qu'aura la transition environnementale sur le monde du travail, et bien d'autres sujets.
    La crise de la COVID-19 n'est peut-être qu'une grande répétition avant la prochaine crise, la crise climatique, celle qu'évoquait récemment Louise Arbour, ancienne juge à la Cour suprême, lors d'une entrevue télévisée.
    Nous avons devant nous d'immenses défis, et il faudra être à la hauteur. Nous croyons que le gouvernement actuel a la capacité politique et intellectuelle nécessaire pour enclencher un tel chantier. Il doit le faire en tendant la main aux oppositions constructives ainsi qu'à la société civile.
    Je vous remercie de votre attention.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Céré.
    Je vous remercie de ces recommandations brèves et concises.
    Écoutons maintenant Mme Agnes Laing, propriétaire de la Corona School of Gymnastics.
    Allez-y, madame Laing.
    Bonjour, honorables députés. Je souhaite remercier le Comité de m'avoir invitée à venir m'exprimer devant vous.
    Je m'appelle Agnes Laing et je suis propriétaire et directrice générale de l'école de gymnastique Corona située ici, à Ottawa. Qui aurait pu prédire qu'un jour, le nom de notre école serait synonyme d'une pandémie mondiale aussi dévastatrice?
    Je suis reconnaissante envers les dirigeants du Canada d'avoir agi avec tant de cœur, d'efficacité et de compassion pour l'ensemble des Canadiens. Je sais que dans votre tentative de sauver des vies, vous êtes également confrontés à une crise économique dramatique. Je comprends et j'appuie la décision du gouvernement de fermer tous les services non essentiels.
    Je suis ici devant vous non seulement à titre d'employeuse, d'entraîneuse, de mentor et d'entrepreneure, mais aussi à titre de spécialiste de l'industrie de la gymnastique. Au cours des 48 dernières années, j'ai vu des milliers d'enfants franchir nos portes, des générations de familles, y compris celles du premier ministre actuel.
    À l'heure actuelle, tous les sports amateurs et récréatifs sont à l'arrêt. Cet arrêt aura une incidence sur la santé de nos enfants, comme sur les milliers de personnes que nous employons dans notre sport. Pour vous donner un ordre de grandeur, seulement en Ontario, il y a 200 clubs, 118 000 gymnastes et 4 600 entraîneurs et administrateurs. À l'échelle nationale, la gymnastique est le septième sport en importance.
    Je voudrais aujourd'hui vous parler du dilemme auquel est confrontée toute la discipline de la gymnastique. Nous ne pouvons exercer aucune forme de distanciation sociale de par la nature de notre sport. Il y a beaucoup d'enfants dans les régions confinées, où les entraîneurs doivent poser les mains sur les gymnastes pour assurer leur sécurité. Il y a beaucoup de surfaces constamment touchées, ce qui rend la transmission inévitable. Les écoles de gymnastiques ont besoin d'installations intérieures de 12 000 à 30 000 pieds carrés, qui sont habituellement louées, ce qui représente des frais énormes. En Ontario seulement, les loyers, les taxes et les salaires que doivent payer les écoles de gymnastique totalisent 62,8 millions de dollars par année.
    Si nous voulons que nos écoles survivent, elles auront besoin d'un soutien accru du gouvernement pour payer les loyers. Le loyer moyen, en Ontario, oscille entre 150 000 $ et 250 000 $ par année, et comme nos écoles ne toucheront aucun revenu pendant une période qu'on prévoit assez longue, nous aurons besoin d'aide pour conserver nos espaces et les rouvrir lorsqu'il sera sûr de le faire pour nos enfants.
    J'aimerais aussi souligner que bien d'autres sports, au Canada, comme le football, le soccer, le hockey et la natation, sont tous financés par les organisations municipales administrées par les villes. La gymnastique est indépendante de tout cela.
    J'aimerais vous donner une idée de ce à quoi ressemble une école comme la nôtre et bien d'autres au pays. C'est une organisation unique. Pour nous, il est pratiquement impossible de rassembler notre matériel et de l'entreposer ailleurs. La plupart des écoles possèdent un demi-million de dollars de matériel. Si nos propriétaires nous mettent à la porte, nous n'aurons nulle part où l'entreposer, et lorsque nous serons prêts à recommencer, nous ne pourrons pas trouver d'installations assez grandes, qui répondent à nos critères pointus de hauteur et de fosses au sol, que nous pourrons payer.
    Je tiens aussi à ce que vous sachiez que 60 % des employés d’écoles comme la nôtre sont des étudiants. Nous sommes très centrés sur notre sport, et 87 % de nos adeptes sont de sexe féminin. Celles-ci représentent 78 % de nos employés au total. De plus, leurs compétences ne s'adaptent pas très facilement à d'autres formes d'enseignement.
    Je vous remercie du temps que vous nous avez accordé, et sur une note plus légère, voici une photo de votre premier ministre à l'âge de12 ans. J'ai eu le plaisir de lui enseigner.
    Je suis disposée à répondre à toutes vos questions.
(1640)
    Merci infiniment, madame Laing. Oui, je pense que nous constatons les conséquences uniques de cette pandémie sur certaines institutions et certaines industries. J'ai quelques petits-enfants qui font de la gymnastique aussi.
    Nous écouterons maintenant Paul Davidson, président, et Wendy Therrien, directrice d'Universités Canada.
    Monsieur Davidson, la parole est à vous.
    Quel plaisir de voir tous les participants à cette réunion, députés comme témoins. J'ai très hâte que nous puissions de nouveau nous réunir en un même endroit. Je vous remercie de cette invitation. Je vous remercie de mener cette étude et je vous remercie du travail extraordinaire que vous faites, tous et toutes, témoins comme députés, en cette période difficile.
    J'aimerais prendre un cours instant pour rendre hommage à toutes les personnes et les communautés victimes de la terrible tragédie survenue en Nouvelle-Écosse cette semaine.
    Je suis accompagnée aujourd'hui de Wendy Therrien, qui dirige nos activités en matière de politiques et d'affaires publiques. Elle se fera un plaisir de répondre aux questions qui pourront suivre.
    Nous avons déjà comparu devant ce comité, mais je vous rappelle que nous représentons les 95 universités du pays. Ensemble, les universités du Canada représentent une entreprise de 35 milliards de dollars, qui stimule beaucoup la prospérité économique. Elles sont source d'emploi pour plus de 300 000 personnes. Les universités sont des piliers de leurs communautés, elles en sont souvent le plus grand employeur et se trouvent à alimenter abondamment les chaînes d'approvisionnement locales. Plus de la moitié des revenus des universités viennent de sources autres que les gouvernements fédéral et provinciaux.
    Les universités du Canada font partie intégrante de la stratégie d'équipe du Canada pour faire face à la pandémie: pour réduire les risques, pour trouver un remède et pour accélérer la reprise économique. Vous savez, en l'espace d'une dizaine de jours, les universités canadiennes ont fait migrer plus de 1,4 million d'étudiants vers l'apprentissage en ligne. On disait qu'il ne serait pas possible d'y arriver en 10 ans, et nous l'avons fait en 10 jours. De plus, 70 universités ont créé des fonds d'urgence pour les étudiants, afin d'offrir un soutien supplémentaire aux personnes laissées pour compte ou touchées par les événements des dernières semaines. Ces sommes s'ajoutent aux 2,2 milliards de dollars en aide aux étudiants que les universités offrent chaque année en puisant à même leurs propres ressources.
    Si l'on pense à la réaction à la pandémie de COVID, bien sûr, les universités participent activement à la course pour trouver un vaccin et un traitement, grâce aux investissements en recherche faits par le gouvernement fédéral. Les universités fournissent également de l'équipement de protection individuelle. Elles ont converti des dortoirs en unités d'hébergement pour les travailleurs de la santé de première ligne. C'est ce qu'ont fait l'Université Western et d'autres campus du pays. Elles convertissent également des laboratoires de recherche en centres de dépistage pour accroître la capacité de dépistage rapide, puisque les universités et toutes les communautés participent à cet effort national.
    Permettez-moi de remercier les membres du Comité et du gouvernement d'avoir complètement recréé le filet de sécurité sociale en l'espace de quelques semaines, à peine, et d'avoir injecté des liquidités record pour maintenir l'économie. Comme M. Brown l'a mentionné il y a quelques instants, nous sommes particulièrement heureux de l'investissement de 9 milliards de dollars qui a été annoncé un peu plus tôt cette semaine pour venir en aide aux étudiants, notamment grâce à la PCU, à des modifications au régime d'aide financière aux étudiants et au soutien annoncé pour favoriser des occasions d'emploi, des occasions d'apprentissage en milieu de travail et le bénévolat. Ces mesures sont essentielles pour aider les jeunes en ce temps de pandémie, afin qu'ils puissent poursuivre leurs études à l'automne, puis contribuer leur vie durant à construire un Canada plus fort.
    Cela dit, il demeure urgent de veiller à ce que les universités puissent recommencer à accueillir des étudiants et à leur offrir l'éducation de qualité dont ils auront besoin pour réussir dans l'économie après la COVID. La réussite des étudiants est étroitement liée à la robustesse des universités. Les membres du Comité doivent savoir que les universités sont soumises à de grandes pressions financières. Beaucoup de mises à pied et de pertes d'emploi sont imminentes, et cela mettra en péril l'aptitude des universités de contribuer à relancer l'économie et à accélérer la reprise au Canada.
    L'une des plus grandes sources de revenus des universités canadiennes et des collectivités dans lesquelles elles évoluent vient des étudiants étrangers. J'en ai déjà parlé à ce comité. Les étudiants étrangers contribuent davantage à l'économie canadienne que l'exportation de bois d'œuvre, de blé ou de pièces automobiles. Ils procurent 6 milliards de dollars de revenus en frais de scolarité aux universités chaque année. Pour de nombreuses institutions, ces revenus représentent plus de la moitié de tous les revenus tirés des frais de scolarité. Avec la fermeture des frontières et des centres de demande de visas, on peut s'attendre à une baisse considérable du nombre d'étudiants étrangers dans nos universités cet automne. Cette perte de revenus aura des conséquences directes sur l'ensemble des étudiants et l'aptitude des universités à répondre aux besoins des étudiants canadiens.
    Nous réclamons une aide d'urgence. Nous sommes en pourparlers avec les fonctionnaires fédéraux afin de concevoir tout un train de mesures pour aider les étudiants, stabiliser les activités universitaires et participer à la reprise économique. Par exemple, un investissement immédiat pour accroître la robustesse des cours offerts en ligne nous permettrait de faire trois choses.
(1645)
    Premièrement, cela permettra aux étudiants canadiens de continuer d'apprendre dans l'éventualité où l'enseignement en personne serait impossible en septembre pour des raisons de santé. Deuxièmement, cela permettra aux étudiants étrangers de continuer de s'inscrire dans nos universités et de se préparer à venir au Canada dès que les conditions le permettront. Troisièmement, cela renforcera notre aptitude à aider les personnes actuellement sans emploi et à leur donner accès à une éducation postsecondaire pour parfaire leurs compétences et construire notre capital humain.
    Nous avons déjà parlé de la nécessité de parfaire nos compétences et d'en acquérir de nouvelles, et comme plus d'un million de Canadiens sont sans emploi, c'est l'occasion dès maintenant de les aider à se former.
    Nous avons besoin de financement de toute urgence pour nous doter de nouveaux outils et de nouvelles plateformes, pour former les apprenants, les professeurs et le personnel et pour nous protéger contre les risques à la cybersécurité, qui sont de plus en plus complexes.
    Nous avons également besoin d'aide fédérale afin de compenser la perte de revenus provenant des étudiants étrangers. Un transfert fédéral direct ou un autre mécanisme aiderait les universités à faire le pont jusqu'à ce que les frontières rouvrent et que le traitement des demandes de visas revienne à la normale.
    Tout nous porte à croire que le Canada émergera plus fort de la pandémie dans le domaine des études internationales, mais les pertes de revenus à court terme pourraient avoir des effets catastrophiques.
    Enfin, quand on pense à la reprise, le Comité sait bien que les universités peuvent rapidement mettre de l'infrastructure en place au pays. Il y a des projets d'une valeur de plus de sept milliards de dollars qui sont prêts à démarrer et qui pourraient aider le Canada à atteindre ses objectifs de croissance inclusive et à favoriser les projets verts et accessibles susceptibles d'enrichir l'expérience des étudiants et d'accélérer la reprise.
    Je vous remercie encore une fois de nous permettre d'être parmi vous aujourd'hui.
(1650)
    Merci beaucoup, monsieur Davidson.
    Permettez-moi de dévoiler aux membres du Comité la liste de départ pour le prochain tour de questions. Nous commencerons par Mme Dancho. C'est votre première séance du Comité des finances, Raquel, et c'est vous qui allez ouvrir le bal. Nous passerons ensuite à MM. Fraser, Ste-Marie et Julian.
    Je cède maintenant la parole à M. Kevin Milligan, professeur à l'Université de la Colombie-Britannique.
    Kevin, nous vous écoutons.
    Monsieur le président, je vous remercie de l'invitation à comparaître devant votre comité.
    Mes observations vont être plutôt brèves. Je vais d'abord vous présenter quelques données avant de vous faire part de mes réflexions sur ce que l'avenir nous réserve.
    Pour ce qui est des données, j'ai analysé l'Enquête sur la population active de Statistique Canada pour le mois de mars en compagnie des économistes Tammy Schirle et Mikal Skuterud pour le compte de l'Institut C.D. Howe. Nous pouvons déjà constater pour mars — et je sais que la crise n'en était qu'à ses débuts — l'impact colossal de la COVID sur le travail des Canadiens.
    Plus de 2,2 millions de Canadiens s'étaient déjà retrouvés sans travail à ce moment-là. Il est important de préciser ici que l'on ne peut pas s'en remettre uniquement aux chiffres sur le chômage, car certains de ces travailleurs ne se trouvaient pas officiellement en chômage. Pour un grand nombre d'entre eux, c'était en effet davantage une situation de congé forcé, en ce sens qu'ils avaient conservé leur emploi, mais n'avaient plus qu'un petit nombre d'heures de travail, voire pas du tout. C'est un aspect primordial à retenir pour l'analyse de la conjoncture du marché du travail.
    Le nombre total d'heures travaillées a chuté de 18 % en mars par rapport à février. Les secteurs les plus touchés étaient ceux de la culture, de l'éducation et des services alimentaires. Ce sont les petits salariés, les femmes et les jeunes qui ont surtout souffert. À titre d'exemple, les femmes gagnant moins de 15 $ l'heure ont vu leur nombre total d'heures travaillées diminuer de 30 %.
    C'était donc la situation en mars. Comment les choses se passent-elles maintenant?
    Il est en fait difficile de répondre à cette question en raison d'un manque de données à jour. Les entreprises, grandes et petites, les organismes caritatifs et les familles ont à prendre, jour après jour, des décisions cruciales pour leur avenir et ont besoin pour ce faire de données récentes sur une situation qui évolue très rapidement dans le contexte de la crise actuelle.
    Statistique Canada a bien réagi en accélérant la publication de ses chiffres sur le PIB et en diffusant certains nouveaux produits d'information fournissant des données à jour. De plus, nous avons désormais accès trois fois par semaine à des données administratives sur la Prestation canadienne d'urgence. Nous nous réjouissons vivement de cette nouvelle option offerte par le gouvernement depuis la semaine dernière.
    Les chiffres rendus publics aujourd'hui même nous indiquent que 7,1 millions de Canadiens touchent maintenant la Prestation canadienne d'urgence. Comme quelqu'un l'a déjà souligné, c'est le tiers de notre population active. On n'a jamais rien vu de tel dans toute l'histoire des statistiques économiques. Il nous faut encore plus de données pour éclairer les décisions cruciales que les Canadiens doivent prendre pour l'avenir.
    Nous avons d'abord besoin d'une ventilation provinciale pour la Prestation canadienne d'urgence, car nous savons que la situation peut varier beaucoup d'une province à l'autre. Les familles et les entreprises locales doivent savoir à quoi s'en tenir afin de pouvoir planifier leur avenir économique.
    Il serait également bon de pouvoir compter sur des données administratives, avec ventilation par province, sur les autres nouveaux programmes qui sont mis en place, comme la Subvention salariale d'urgence, le Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes et la Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants. Il ne s'agit pas simplement de permettre aux universitaires de jongler avec toutes ces données; il faut surtout aider les entreprises et les familles elles-mêmes à établir des plans d'avenir dans cet environnement marqué par une grande incertitude.
    En terminant, je veux insister sur la nécessité de continuer à songer à l'avenir pendant que nous traversons la présente crise. Nous devons nous demander comment les prestations d'urgence que l'on rend maintenant accessibles pourront être bénéfiques pour les Canadiens au sein de l'économie partiellement ouverte avec laquelle nous devrons peut-être composer pendant un bon moment.
    En outre, il convient d'indiquer clairement, tant aux employeurs qu'aux travailleurs, comment se fera la transition lorsque viendra le temps de mettre fin aux prestations d'urgence. Il faut fournir des indications claires en ce sens pour que chacun puisse établir des plans et prendre toutes sortes de décisions, notamment en matière d'embauche.
    Enfin, nous devons nous assurer de tirer des enseignements de cette crise quant au soutien que nous offrons à nos travailleurs en chômage ainsi qu'à nos fonctionnaires qui assurent la mise en œuvre de programmes absolument essentiels en pareille situation.
    Merci de m'avoir donné l'occasion de vous soumettre ces quelques observations.
(1655)
    Merci beaucoup, monsieur Milligan.
    Avant de céder la parole à Mme Dancho, je veux juste rappeler aux membres réguliers du comité des finances qu'il nous faut réfléchir aux témoins que nous allons recevoir la semaine prochaine. Nous en discuterons après avoir entendu le présent groupe.
    Jeudi prochain, nous accueillerons dans un premier temps le ministre et ses collaborateurs pour leur rapport bimensuel sur la pandémie et les mesures prises par le gouvernement. Pour le second groupe, je proposerais de convoquer des témoins de différents secteurs que nous n'avons pas pu entendre jusqu'à maintenant.
    Pour la première portion de notre séance de vendredi, nous allons recevoir des témoins figurant sur la liste déjà établie relativement au soutien à offrir aux Canadiens qui ne sont pas admissibles aux mesures annoncées jusqu'ici. Le second groupe de témoins pour vendredi regroupera des représentants du secteur manufacturier et de l'industrie de la construction.
    Je vous demande d'y réfléchir, et nous allons y revenir à la fin de notre séance.
    Madame Dancho, je vous souhaite la bienvenue au comité des finances. Vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis ravie de pouvoir être des vôtres aujourd'hui pour poser des questions à nos témoins qui ont, de toute évidence, beaucoup réfléchi à ces enjeux. Je suis vraiment heureuse d'avoir accès à une telle diversité de points de vue en ces temps très difficiles.
    En plus d'être la députée de Kildonan—St. Paul, je suis la porte-parole de l'opposition pour tous les dossiers touchant la diversité, l'inclusion et les jeunes. L'un de mes rôles consiste donc à demander, au nom de tous les Canadiens, des comptes au gouvernement concernant ses politiques pour les jeunes. C'est donc sur ces aspects que vont porter mes questions.
    Je veux d'abord m'adresser à M. Adam Brown de l'Alliance canadienne des associations étudiantes.
    Monsieur Brown, pouvez-vous me dire combien d'étudiants vous représentez à l'échelle nationale?
    Nous représentons 360 000 étudiants à l'échelle du pays. Cela comprend notre partenariat avec l'Union étudiante du Québec.
    C'est vraiment beaucoup de monde.
    Monsieur Brown, on nous parle souvent des problèmes de santé mentale que pourraient causer l'isolement et le chômage. Je suis persuadée que vous entendez la même chose de votre côté. Les gens sont très inquiets. Ils sont confinés à la maison. Nous savons que les jeunes ont l'habitude de beaucoup socialiser.
    Discute-t-on également dans vos rangs de ces préoccupations concernant la santé mentale?
    Certainement. Nous approchons la fin avril, et les étudiants terminent leurs examens finaux. Normalement, ils s'apprêteraient à commencer un été de travail. Avec tout ce qui se passe actuellement pour les étudiants qui ne peuvent pas se rendre en classe, voir leurs amis ou, comme vous l'indiquiez, socialiser, il y a certes lieu de craindre que l'isolement accru ait des impacts sur la santé mentale.
    M. Davidson pourrait peut-être vous en dire plus long à ce sujet, mais je sais qu'un certain nombre d'établissements postsecondaires font de leur mieux pour offrir désormais des services de santé mentale en ligne. Je crois que, dans un moment comme celui-ci où l'on pourrait affirmer que la santé mentale est...
    ... cruciale...
    ... et que les étudiants vivent du stress, toutes les mesures de soutien sont certes les bienvenues.
    Merci, monsieur Brown.
    Avez-vous l'impression que l'impossibilité d'avoir accès aux perspectives d'emploi d'été habituelles est une grande source de déception, voire de dépression, pour nos étudiants?
    Je pense qu'un grand nombre d'étudiants se réjouissent toujours à la perspective de pouvoir travailler pendant l'été. Il importe notamment de souligner que bon nombre d'étudiants ont besoin du revenu gagné pendant la saison estivale pour payer leurs droits de scolarité à l'automne. Nous espérons que les étudiants pourront se tirer d'affaire au cours des prochains mois grâce aux différentes mesures annoncées cette semaine par le premier ministre dans le cadre de la Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants. Nous souhaiterions également que l'on augmente les bourses d'études à l'automne pour les aider à payer leurs droits de scolarité.
(1700)
    Merci, monsieur Brown.
    Il semble y avoir des sentiments partagés quant aux mesures annoncées par le premier ministre, mais je vois qu'il y a certains éléments que vous jugez satisfaisants. Je crains seulement pour la santé mentale des étudiants si on les incite ainsi à demeurer à la maison en touchant la prestation.
    Je me tourne maintenant vers M. Lee, professeur à l'Université Carleton. Je crois que vous êtes un expert du domaine de l'emploi. S'il est impossible pour les étudiants de travailler cet été, quelles seront d'après vous les répercussions sur leurs perspectives d'emploi à long terme et leur perfectionnement professionnel?
    Je crois que je devrais laisser M. Milligan vous répondre, car c'est lui l'expert en matière d'emploi.
    Cela dit, j'étudie les politiques publiques depuis le début de ma carrière dans l'enseignement. C'est presque un incontournable à Ottawa. C'est notre spécialité. Nous étudions la politique et les politiques.
    J'enseigne aussi depuis 32 ans. J'ai eu le grand privilège de travailler avec des jeunes remarquables et très dynamiques. Il est vrai que nous vivons une crise absolument épouvantable. Il est également vrai que les jeunes sont touchés de façon disproportionnée. Mon chèque de paye continue d'être déposé à la banque. C'est le cas pour nous tous qui sommes plus âgés. Nous ne subissons pas de perte de revenus. Nous ne perdons pas notre emploi.
    J'ai pu constater les répercussions sur mes deux enfants qui sont de jeunes adultes. Ils sont complètement dévastés et je trouve que c'est horrible, mais...
    Monsieur Lee, je suis vraiment désolée de devoir vous interrompre. Il ne me reste que deux minutes, mais je vous remercie...
    Je demeure toutefois optimiste pour nos jeunes en raison de leur grand dynamisme.
    Moi de même, mais je vais passer à une autre question, car je risque de manquer de temps. Soyez assuré que je comprends très bien ce que vous nous dîtes. J'étais moi-même étudiante il n'y a pas si longtemps et il me fallait un emploi d'été pour pouvoir payer mes factures et acquérir les compétences qui me servent maintenant.
    Monsieur Brown, je veux revenir à vous pour la minute et demie qu'il me reste.
    Avez-vous l'impression que les étudiants que vous représentez aimeraient pouvoir contribuer de façon significative à nos interventions dans le contexte de la pandémie? Avant de vous laisser répondre, j'aimerais vous aider à voir un peu mieux où je veux en venir.
    Notre chaîne d'approvisionnement alimentaire est aux prises avec d'importantes pénuries de main-d’œuvre. En raison des fermetures de frontières attribuables à la COVID-19, il nous est impossible de compter comme d'habitude sur les travailleurs étrangers temporaires. Comme vous l'avez peut-être appris, les conservateurs ont récemment proposé une solution à ces deux problèmes. Il serait extrêmement bénéfique que des étudiants puissent aller travailler dans les fermes de leur région pour combler ces pénuries de main-d’œuvre. On éviterait ainsi les bris dans notre chaîne d'approvisionnement alimentaire tout en permettant à des jeunes d'avoir des possibilités d'emploi pour l'été.
    Croyez-vous que les étudiants seraient prêts à relever le défi en faisant l'essai du travail agricole, une chose qu'ils n'auraient jamais cru pouvoir faire?
    C'est une question très intéressante. Nous en avons aussi discuté au sein de notre organisation.
    Je suis heureuse de l'entendre.
    Je pense que la plupart des étudiants veulent d'abord et avant tout trouver un emploi dans leur domaine d'études, question d'acquérir des compétences et d'enrichir leur curriculum vitae pour se donner de meilleures perspectives de carrière. J'espère par ailleurs que la nouvelle Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant en incitera plusieurs à contribuer de façon vraiment constructive à l'effort collectif de lutte contre la pandémie.
    Je suis tout à fait d'accord.
    Je soulignerais d'autre part qu'il y a certains coûts pouvant être associés au travail à la ferme pour les étudiants, notamment pour ce qui est du déménagement. Ce serait assurément un changement pour eux.
    Je crois que vous soulevez des préoccupations tout à fait pertinentes.
    Je sais que je vais manquer de temps, mais permettez-moi seulement de conclure, monsieur le président.
    Le premier ministre a parlé d'un effort de guerre. Les conservateurs croient qu'il est temps de voir les choses autrement pour proposer des solutions novatrices. Alors, pourquoi ne pas mobiliser nos concitoyens les plus en santé et les plus en forme pour voir s'ils souhaitent ajouter à leur bagage une nouvelle expérience qui leur permettrait d'acquérir une plus grande éthique de travail? C'est selon moi une occasion dont nous devrions sans doute profiter.
    Monsieur Brown, peut-être pourriez-vous en discuter avec vos membres et nous indiquer s'ils voient cette perspective d'un bon oeil.
    Certainement, je serai ravi de faire le suivi avec vous à ce sujet.
    Merci, monsieur Brown.
    Nous allons devoir nous arrêter là.
    Nous passons à M. Fraser qui sera suivi de M. Ste-Marie.
    Monsieur Fraser.
    Merci beaucoup.
    À mon point de vue, vous formez l'un des groupes les plus intéressants que nous ayons reçus depuis le début de cette étude. Malheureusement, j'ai seulement du temps pour quelques brèves questions, et je vous serais donc reconnaissant de bien vouloir répondre le plus brièvement possible.
    Je vais d'abord m'adresser à M. Milligan.
    Notre comité s'est déjà penché sur la possibilité d'offrir un revenu de base universel. Mon collègue, M. Julian, a proposé un montant de 2 000 $ par mois à cet effet. Je sais que vous avez eu l'occasion d'examiner cette possibilité. Quelle serait l'incidence d'une telle mesure sur le cycle habituel de dépenses du gouvernement du Canada?
    Je vous laisse d'abord répondre et nous verrons où cela nous mènera.
(1705)
    Certainement. Il va de soi que le coût d'une telle prestation dépend de la structure qui est mise en place. Disons au départ que si vous songez à verser 2 000 $ par mois à chaque adulte canadien, il vous faudra signer 30 millions de chèques. Une simple multiplication nous amène à un total de 60 milliards de dollars par mois. Comme notre PIB se chiffre à quelque 200 000 milliards par mois, c'est environ 30 % du PIB qui irait à cette forme de soutien du revenu avant même d'avoir aidé les petites entreprises, les grandes entreprises, le secteur culturel et tous les autres secteurs. J'ai l'impression que l'on mettrait ainsi beaucoup d'argent dans une même enveloppe.
    Sans même chercher à savoir si le projet est réaliste du point de vue financier, je me demande entre autres s'il est vraiment possible de le mettre en oeuvre dans la pratique. J'ai parfois l'impression qu'il y en a qui croient à tort qu'il y a quelque part dans les bureaux du ministère des Finances un simple bouton à presser pour envoyer de l'argent aux gens.
    Pouvez-vous nous dire si vous pensez que les différentes mesures que nous avons mises en oeuvre, comme la Prestation canadienne d'urgence, le remboursement de la TPS et la bonification de l'Allocation canadienne pour enfants, permettent en fait de diriger les fonds plus efficacement et plus rapidement vers un groupe de Canadiens peut-être mieux ciblé, comparativement à la nécessité de créer une base de données pour envoyer directement de l'argent à tous les Canadiens, qu'ils aient perdu leur gagne-pain ou non?
    Si nous disposons du temps nécessaire à la mise en œuvre d'un modèle pour le paiement d'un revenu de base universel, je ne doute pas que nous parviendrions, avec toutes les ressources à notre disposition, à mettre en place les systèmes administratifs nécessaires. Ce n'est pas vraiment problématique dans le cas d'un programme à long terme quand vous avez le temps de bien réfléchir à la question et quelques années pour concrétiser le tout.
    La situation actuelle est bien différente. Les Canadiens touchés avaient besoin d'un revenu aussi rapidement que possible. Je considère que le recours à une prestation d'urgence exigeant la présentation d'une demande à traiter par l'Agence du revenu du Canada était la solution permettant d'agir le plus rapidement dans les circonstances. Il n'y a effectivement personne qui a sur son bureau un bouton permettant l'envoi automatique de fonds.
    Si nous avions utilisé par exemple la base de données sur les déclarants de 2018, il aurait fallu dans un premier temps renverser la vapeur pour permettre l'envoi d'argent dans l'autre direction. Un certain ménage aurait ensuite été nécessaire pour tenir compte des décès, des naissances, des déménagements, des changements dans les coordonnées bancaires, etc. Lorsqu'il faut répéter ces opérations pour 30 millions de personnes, cela gruge énormément de temps.
    On a donc opté pour la prestation d'urgence en estimant que ce serait plus rapide que d'utiliser la base de données fiscales existante. Selon moi, ce choix s'est révélé pertinent comme vous le diraient tous ces Canadiens qui ont été heureux de recevoir cet argent dès le début avril.
    Merci beaucoup.
    J'ai une dernière question pour vous, monsieur Milligan.
    Vous avez indiqué qu'à un moment donné, nous devrions envoyer un message clair afin de permettre aux Canadiens de se préparer pour le moment où les prestations ne seront plus versées, vu qu'elles sont provisoires. Quand saurons-nous qu'il est temps d'arracher le sparadrap, pour ainsi dire, afin que les Canadiens puissent revenir à une économie axée sur le marché par rapport à une économie qui est soutenue provisoirement par les prestations d'urgence nécessaires?
    Je peux vous répondre aisément en vous disant que j'écoute les conseils des scientifiques et des experts de la santé sur la question, mais nous, les économistes et les analystes des politiques, devons également être prêts à agir une fois que les experts de la santé nous donnent le feu vert pour la transition. Je pense justement aux décisions sur le recrutement. Une société qui reçoit la subvention salariale et qui doit prendre des décisions en mai quant à l'embauche voudra savoir si la subvention sera versée en juin, en juillet ou en août. Il se peut que la subvention salariale soit réduite graduellement et passe de 75 % du salaire à 0 % sur une période de quelques mois. C'est une possibilité. C'est justement ce genre de renseignement que nous voudrions que les sociétés reçoivent lorsqu'elles prennent des décisions concernant l'embauche.
    Je comprends qu'il est impossible de fixer des échéances maintenant sans disposer de plus de renseignements sur la propagation du virus, car comme d'autres l'ont bien dit, c'est le virus qui décide. Cependant, nous devons être prêts le moment venu. Nous devons réfléchir à la façon d'éliminer graduellement ces programmes afin de revenir à une économie qui fonctionne pour tous les Canadiens.
    Monsieur le président, me reste-t-il du temps?
    Monsieur Brown, je vous remercie de votre travail. Je suis un ancien dirigeant du mouvement estudiantin et ancien membre de l'ACAE. Merci d'être venu témoigner aujourd'hui.
    Dans la foulée de ce qu'a dit Mme Dancho, sachez que j'ai parlé plus tôt aujourd'hui à un représentant de la Nova Scotia Federation of Agriculture qui cherchait à savoir si les étudiants pouvaient faire du bénévolat dans le secteur de la production agricole et recevoir la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant.
    Ma question pour vous tient compte des défis propres aux étudiants, qui doivent non seulement subvenir à leurs besoins, mais également mettre de l'argent de côté pour l'année qui commencera en septembre. Certains étudiants auront droit à la PCU, et d'autres à la nouvelle Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants. Toutefois, s'il n'y avait pas eu la bonification des programmes de bourses et de prêts étudiants et la nouvelle Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant, pensez-vous qu'un pourcentage élevé de vos membres ne pourraient pas se permettre de poursuivre leurs études et ne retourneraient pas aux études en septembre lorsque le prochain semestre commencera?
(1710)
    Absolument. Les dispositions prises par les divers gouvernements provinciaux, ainsi que l'excellente réponse du gouvernement fédéral, qui a doublé la bourse canadienne pour étudiants, aideront les étudiants, notamment ceux qui proviennent de familles à faible et moyen revenu, à retourner aux études à l'automne.
    Mon temps de parole est échu.
    Merci, monsieur le président.
    Oui, vous avez épuisé votre temps de parole.
    Merci à tous.
    Au tour maintenant de M. Ste-Marie, et ensuite ce sera M. Julian.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais d'abord remercier tous les témoins de leurs présentations fort constructives. Ma première question s'adresse à M. LeBel.
    Monsieur LeBel, j'aimerais que vous nous fassiez part de vos inquiétudes concernant la réalité des étudiants étrangers.
    Mon collègue Adam Brown en a beaucoup parlé.
    En ce moment, beaucoup d'étudiants internationaux ne savent pas s'ils vont pouvoir rester au pays ou y revenir en septembre pour commencer la prochaine session. Plusieurs personnes voudraient rester au Canada pour éviter le risque épidémiologique associé aux déplacements. Ces personnes voudraient aussi avoir de l'aide financière et travailler pendant l'été. En ce moment, il manque beaucoup de réponses de la part d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.
    Je vous remercie.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Céré, que je remercie également de sa présentation.
    En cas de faillite, les fonds de pension des travailleurs et travailleuses et des retraités sont mal protégés parce qu'ils ne sont pas considérés comme étant prioritaires dans la loi. Même le gouvernement fédéral passe avant eux. Les cas de l'usine White Birch et de Sears en sont de tristes exemples.
    Avec la crise actuelle, n'y aurait-il pas lieu d'agir immédiatement pour protéger les fonds de pension, avant qu'on assiste à une possible vague de faillites?
    Votre question s'adresse-t-elle à moi?
    Oui.
    D'accord. Comment envisagez-vous cela? La question des fonds de pension n'est pas ma spécialité. Mon carré de sable, c'est plutôt l'assurance-emploi, soit le revenu de remplacement pour les travailleurs et les travailleuses qui ont perdu leur emploi.
    J'imagine que vous avez vous-même réfléchi à des pistes de solution pour la protection des fonds de pension. À quoi pensez-vous?
    Oui, tout à fait.
    Lorsqu'on établit l'ordre de priorité des créanciers en cas de faillite, les fonds de pension passent en dernier. Quand les actifs sont liquidés, le travailleur ou la travailleuse qui a cotisé toute sa vie à un fonds de pension risque de voir son pécule amassé ainsi diminuer comme une peau de chagrin. Par conséquent, la possibilité que des faillites puissent être déclarées nous préoccupe.
    C'est une grande préoccupation, effectivement. S'il y a un danger de ce côté-là, il faut protéger ces gens. Le revenu est au cœur de la vie du monde. La santé est aussi importante, bien sûr, mais c'est le revenu qui permet aux gens de subvenir aux besoins de leur famille et de payer leur épicerie, le loyer ou l'hypothèque et leurs médicaments. Un jour, ils devront se rabattre sur leur revenu de pension, et, si celui-ci est touché à cause d'une situation économique comme celle que nous vivons actuellement, il faudra mettre en place des mesures de protection.
    Si vous me demandez quelles peuvent être ces mesures, je vous répondrai qu'il faut mettre en place une espèce de chantier de réflexion. Il faut aussi, parfois, réfléchir à toute vitesse et intervenir tout aussi rapidement. Intervenir rapidement ne veut pas dire que l'on se dispense du processus de réflexion. Il faut réfléchir et apporter des solutions rapidement.
    Cette question est fort importante. Il faut que les gens se penchent là-dessus et qu'ils apportent des solutions assez rapidement, surtout si les fonds de pension risquent d'être touchés, comme vous l'avez soulevé.
    Par ailleurs, j'aimerais vous rappeler que le gouverneur de la Banque du Canada, M. Stephen Poloz, est venu témoigner devant le Comité. Il s'inquiétait des limites que présente l'assurance-emploi, qui couvre mal les travailleurs et les travailleuses qui perdent leur emploi. Il disait que la capacité d'agir de la Banque du Canada, en adoptant, par exemple, de faibles taux d'intérêt, était limitée. Ce serait plutôt des programmes du gouvernement qui seraient en mesure de stabiliser l'économie. Il rappelait que l'assurance-emploi couvrait trop peu de personnes qui perdent leur emploi.
    J'ai donc bien aimé votre suggestion de nous pencher, une fois la crise passée, sur le programme d'assurance-emploi et sur les mesures à prendre pour avoir une meilleure couverture. J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet.
(1715)
    Il faut absolument le faire. C'est le principal programme social de remplacement du revenu en cas de chômage. Quant à la crise actuelle, le fonctionnement de ce programme s'est essentiellement effondré dès la première semaine. Il n'était pas prêt à affronter une telle crise, et ce n'est pas normal. Je reprendrai les mots du président du Conseil du Trésor qui, le 11 avril, a accordé une entrevue en profondeur au quotidien Le Soleil, un journal de Québec.
    En ce qui a trait au régime d'assurance-emploi, on peut lire dans Le Soleil: « [...] le filet de l'assurance emploi était un peu trop percé, ne couvrait pas assez grand, mais on n'a pas procédé assez rapidement à sa réforme. » Créé à la fin de la Seconde Guerre mondiale, le programme « n'était pas adapté » à la crise actuelle, selon lui. Il ajoutait: « On peut et on doit faire encore mieux. »
    Effectivement, le régime d'assurance-emploi aurait dû être en mesure de répondre à la crise que nous avons connue à partir de la mi-mars, même si elle était brusque, mais il en a été incapable parce qu'il est compliqué, lourd et judiciarisé. Un travailleur sur cinq se voit refuser l'assurance-emploi lorsqu'il perd son emploi, alors il devenait manifestement compliqué d'ouvrir ce régime à des pans de la population active qui sont exclus. Je pense, par exemple, aux travailleurs et aux travailleuses autonomes. Ils représentent 15 % de la population active et ils sont exclus de l'assurance-emploi.
    Le gouvernement a dû réagir en mettant en place un programme d'urgence et il a réussi à colmater les brèches. Tant mieux. Effectivement, après cette crise, qui est peut-être juste une répétition générale pour une crise à venir, il faut repenser et moderniser ce programme avec tous les acteurs de la société politique et civile.

[Traduction]

    Merci.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Au tour maintenant de M. Julian, et ensuite ce sera M. Poilievre et Mme Dzerowicz.
    Monsieur Julian, je vous en prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins de leur participation aujourd'hui et de leur précieux travail.
    J'ai quelques petites questions, dont la première est destinée à M. Milligan.
    Monsieur Milligan, savez-vous que la Prestation canadienne d'urgence, comme l'a reconnu le ministre, est versée à tout le monde qui en fait la demande actuellement? Elle est déjà universelle. Le problème, cependant, surviendra plus tard, lorsque les gens qui sont dans le besoin seront punis.
    Saviez-vous que c'était une prestation universelle?
    Je sais pertinemment qu'il y a une case attestation et après qu'on la coche, on reçoit la prestation.
    Je me fie à ce que tous les Canadiens lisent soigneusement l'attestation. J'espère que tous les Canadiens la prendront au sérieux.
    Merci.
    Nous avons une prestation universelle. Le problème, c'est que bien des gens n'y ont pas droit, car ils ne répondent pas aux critères prévus par le gouvernement. Ces gens seront pénalisés et obligés de rembourser la prestation alors qu'ils auront des dettes énormes et connaîtront des difficultés. De nombreux autres pays ont déjà mis en place une prestation universelle, comme la France et les États-Unis, et il est donc faux d'affirmer que nous ne serions pas en mesure d'offrir une prestation universelle. Je tenais à le souligner.

[Français]

    Monsieur Céré, puisqu'il y a tellement de gens qui n'ont pas d'emploi et qui n'ont pas accès à la Prestation canadienne d'urgence à cause de toutes les conditions et de tous les obstacles qui sont mis en place, ne vaudrait-il pas mieux d'avoir une prestation canadienne d'urgence universelle? Ainsi, quelqu'un qui était déjà sans emploi avant que la crise commence pourrait accéder à cette prestation sans être obligé de rembourser le montant cet été.
    Ce qui est clair pour nous, c'est qu'il faut repenser l'ensemble de cette couverture sociale. Aujourd'hui, cela s'appelle l'assurance-emploi, mais on a appelé cela l'assurance-chômage pendant plus de 50 ans.
    Les solutions ne sont pas toutes écrites et calculées d'avance, et il y a plusieurs opinions dans une société. Il va falloir écouter l'ensemble des opinions. J'ai déjà vu des gens commencer à s'avancer. J'ai vu les 50 sénateurs se prononcer sur l'importance d'un tel programme de sécurité du revenu. Je salue cette initiative.
    Toutefois, il va falloir écouter tous les secteurs de la société et trouver la solution la plus équilibrée et celle qui répond le mieux aux besoins des travailleurs qui se retrouvent entre deux emplois régulièrement ou, comme dans le cas actuel, dans une crise très grave et qui ont besoin d'un revenu de remplacement.
(1720)

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Je vois que de nombreuses personnes n'y ont pas droit dans ma circonscription et partout au pays. Nous avons évoqué le nombre de personnes qui ont demandé la prestation d'urgence. Cependant, des millions de personnes n'y ont pas droit, et elles souffrent. Elles ont du mal à se nourrir. Elles ont du mal à se loger. C'est la raison pour laquelle Jagmeet Singh et d'autres, comme les 50 sénateurs que vous avez mentionnés, ont proposé d'en faire une prestation universelle. Elle s'y prêterait bien, c'est juste que beaucoup d'obstacles s'opposent aux gens.
    Monsieur Brown et monsieur Saul, vous avez parlé avec éloquence du nombre de personnes qui sont laissées pour compte, y compris des étudiants internationaux, et ma prochaine question est pour vous.
    Ne serait-il pas plus simple d'éliminer les obstacles à la prestation universelle afin que les étudiants internationaux et d'autres, comme les gens au chômage et qui ont du mal à se nourrir, puissent y avoir droit?
    M. Brown d'abord, et ensuite M. Saul.
    Il me semble que les étudiants internationaux peuvent recevoir la PCU. Cependant, lorsque la Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants a été annoncée plus tôt cette semaine, nous n'avons pas compris pourquoi les étudiants internationaux sont exclus. Actuellement, les étudiants internationaux ne peuvent travailler qu'un certain nombre d'heures, donc leur revenu dépend de ce facteur.
    Nous espérons que les étudiants internationaux profitent de la PCU dans la mesure du possible, mais il serait préférable de leur offrir également la PCUE.
    Merci.
    Monsieur Saul.
    Je serais certainement d'accord pour que l'on élargisse le plus possible l'admissibilité à la PCU. Il reste à voir si la vulnérabilité collective que nous connaissons tous en tant que société engendre un nouveau dialogue au pays sur la façon dont nous appuyons les gens qui ont été écartés de l'économie et de la société... Ce serait un dialogue très important.
    Nous devons avoir suffisamment de courage pour dire qu'il y a un seuil en dessous duquel personne ne devrait tomber. Que ce soit 2 000 $, 2 500 $ ou 3 000 $, il faut en parler. On pourrait alors voir s'il ne vaudrait pas mieux réformer l'assurance-chômage, augmenter l'Allocation canadienne pour le logement et l'Allocation canadienne pour les travailleurs et prévoir un régime d'assurance-médicaments.
    Je crois que nous devrions prendre notre courage à deux mains et dire que trop de nos concitoyens sont laissés pour compte. Cela nous coûte. Sur le plan moral également. Nous avons signé le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui prévoit le droit à la nourriture, et nous échouons lamentablement à ce chapitre.
    Je souhaite que le plus de personnes possible jouissent de la sécurité alimentaire, et ce n'est pas le cas maintenant.
    Je dois vous arrêter. Monsieur Julian, il ne vous reste que neuf secondes, et je sais que c'est insuffisant.
    Nous allons maintenant faire une série de questions de cinq minutes. M. Poilievre d'abord, et ensuite Mme Dzerowicz.
    [Difficultés techniques] du travail rémunéré d'élaboration de politiques pour le compte du gouvernement du Canada ou du Parti libéral du Canada?
    Je vous remercie de la question. Je suis toujours heureux de répondre à vos questions.
    J'ai donné des conseils en matière de politiques au cours des dernières semaines au gouvernement du Canada. Je n'ai pas été rémunéré.
    Je suis professeur dans une université publique financée par l'argent du contribuable, et j'estime qu'il est de mon devoir de prendre des appels de...
    Non, non, pardon, c'est juste que... Nous avons très peu de temps...
    Je vous rappelle que j'ai le droit de parole.
    M. Pierre Poilievre: ... peu de temps...
    M. Kevin Milligan: J'ai le droit de parole.
    M. Pierre Poilievre: ... très peu de temps...
    M. Kevin Milligan: J'essaie de répondre à la question, monsieur.
    Mais vous ne répondez pas à la question.
    J'aimerais bien pourtant.
    Je vous en prie, faites. Essayez.
    Bien sûr.
    Je réponds aux questions sur les politiques qui proviennent du ministère des Finances, du Bureau du premier ministre et même d'un député de l'opposition qui cherche de l'aide sur un projet de loi d'initiative parlementaire, telle que l'aide que vous m'avez demandée pendant l'été de 2017, lorsque vous m'avez appelé pour obtenir des conseils.
    M. Pierre Poilievre: C'est vrai.
    M. Kevin Milligan: J'étais heureux de le faire. Le projet de loi était solide. Je le ferai encore.
(1725)
    D'accord. Parfait.
    Je vais poser la question de nouveau, parce que votre réponse n'était aucunement pertinente. Est-ce que vous-même, ou une organisation pour laquelle vous travaillez, effectuez du travail rémunéré d'élaboration de politiques pour le compte du gouvernement du Canada ou du Parti libéral du Canada? Répondez par oui ou non si vous avez effectué un tel travail, disons, au cours des cinq dernières années.
    Je n'ai reçu aucun paiement du Parti libéral du Canada. J'ai actuellement un contrat avec EDSC qui porte sur une simulation microéconomique.
    Parfait. Merci beaucoup.
    Ma prochaine question porte sur la dette comme proportion du PIB. De nombreux économistes, dont vous, ont affirmé que la dette du gouvernement est bénigne puisqu'elle représente 30 % du PIB, et qu'il faut donc ne pas s'en inquiéter. Mais les gens qui avancent cet argument oublient que la dette que supporte l'économie du Canada n'est pas seulement la dette gouvernementale. Si l'on réunit tous les ordres de gouvernement, le rapport dette-PIB se chiffre maintenant à 89 %, selon le FMI. De plus, le total de la dette des entreprises et des ménages représente 356 % du PIB, soit le taux le plus élevé des pays du G7 après celui du Japon, ce qui nous rapproche du record établi en 2016.
    Monsieur Milligan, pensez-vous que nous pourrons continuer à alourdir notre dette nationale totale lorsqu'elle représentait déjà 3,5 fois notre économie en 2018, avant le coronavirus?
    Qu’il s’agisse de la politique budgétaire du gouvernement fédéral, des provinces ou de tous les ordres réunis, il faut que cette politique soit durable dans le long terme. Nous sommes actuellement aux prises d’une crise extraordinaire. En fermant partiellement l’économie, nous engendrons de la dette. La dette pourrait être celle des ménages ou celle des entreprises. Si les ménages ou les entreprises font faillite, ce seront alors les banques qui s’endetteront davantage.
    Nous répartissons la dette engendrée par les ménages et les entreprises et nous en transférons une partie au secteur public. La question qui se pose actuellement n’est pas de savoir si nous devrions avoir de la dette, mais comment la répartir entre les secteurs. Le virus est la cause de la dette. Il n’y a aucun autre facteur responsable actuellement. Il faut savoir comment répartir la dette. On se demande quelle part doit être assumée par le gouvernement fédéral et les provinces, et quelle proportion peut être supportée par les ménages et les entreprises. C’est tout à fait normal d’en parler en ce moment.
    D'accord. Mais vous ne parlez pas du jeu de passe-passe qui consiste à déplacer la dette d'un bout de la table à l’autre. Toute la dette doit être supportée par la même table, qui est l’économie canadienne. Le montant total de la dette est maintenant 3,5 fois plus grand que notre PIB. Le gouvernement actuel a ajouté, avec votre soutien enthousiaste, environ 100 milliards de dollars à la dette avant qu'un seul cas de coronavirus ne soit dépisté ici au Canada. Cela s’ajoute à notre dette totale. Il ne s’agit pas d’une dette qui a été enlevée à quelqu'un. On a augmenté la dette totale que doit supporter l’économie canadienne. Par conséquent, une fois la crise passée, nous aurons un fardeau encore plus lourd et moins de marge de manœuvre.
    Vous avez parlé de l’avenir. Pensez-vous que nous devrions équilibrer le budget fédéral à un moment donné, ou pensez-vous que nous pouvons tout simplement continuer à alourdir la dette nationale même après la réouverture complète de l’économie?
    J’espère que le député sera d'accord avec moi pour dire qu’une fois que le pire de la crise sera passé et que ses effets auront été atténués, ce sera le moment de déterminer notre politique budgétaire afin de nous assurer qu’elle est durable à long terme. Je suis d'accord qu’il nous faut une politique durable et que les mesures d’urgence ne peuvent être appliquées à long terme. Nous avons des mesures d'urgence extraordinaires en ce moment.
    Je dirais au Comité et au gouvernement qu’il ne faut pas trop se préoccuper pendant l'urgence de la durabilité des mesures prises actuellement, car si nous nous en soucions trop, il faudra réduire les mesures qui soutiennent les familles et entreprises canadiennes maintenant, les mesures qui leur permettent de survivre. Les revenus que nous leur versons actuellement nous donneront les meilleures bases possible pour relancer l'économie une fois la crise passée. Chaque dollar est dépensé à bon escient, à mon avis.
(1730)
    Monsieur Poilievre, nous avons légèrement dépassé votre temps de parole. Je dois vous arrêter.
    Au tour maintenant de Mme Dzerowicz, et ensuite ce sera M. Cumming.
    Super. Merci beaucoup, monsieur le président. Merci à tous les témoins de leurs excellents exposés sur ce sujet très important.
    Nous avons beaucoup de participants, mais je peux seulement poser des questions à une poignée de gens parce que j'ai moins de cinq minutes. Ma première question est destinée à M. Saul de Community Food Centres Canada.
    Vous avez indiqué que le gouvernement fédéral avait annoncé la somme de 100 millions de dollars pour aider les Canadiens qui éprouvent des difficultés sociales ou économiques à se procurer de la nourriture. Je sais que Community Food Centres Canada a reçu une partie de la somme.
    Ma question comporte deux volets. Tout d'abord, avez-vous une idée de la hausse de la demande aux banques alimentaires, c'est-à-dire le nombre de personnes qui se présentent aux banques alimentaires et leur profil? Voilà le premier volet.
    Le deuxième volet de la question est le suivant: Que devrions-nous faire de plus, selon vous, pour assurer maintenant la sécurité alimentaire, non seulement dans nos villes, mais partout?
    Pouvez-vous fournir une réponse?
    Après en avoir discuté avec certains chefs de file du milieu de l'alimentation de secours, je pense pouvoir affirmer sans crainte que la demande a augmenté de 25 à 50 %, selon la région. Je pense qu'il faut bien préciser que le secteur était en grande difficulté bien avant l'arrivée de la COVID. La grande majorité des personnes qui vivent dans l'insécurité alimentaire au pays n'iront jamais dans une banque alimentaire pour toutes sortes de raisons, que je ne vais pas mentionner ici.
    Les personnes qui ont recours aux banques — les communautés ethniques, les femmes, les jeunes — sont des groupes qui ont toujours été marginalisés, un problème que la COVID a grandement exacerbé. Soyons clairs: ces groupes ont été touchés de manière disproportionnée par la COVID. Il est tout simplement impossible de s'isoler lorsque cinq personnes vivent dans un appartement et partagent une seule salle de bains. Si une personne occupe un emploi qui est loin d'être prestigieux, il est peu probable que son employeur fasse preuve de souplesse; il lui sera impossible d'acheter plus de nourriture, d'autant plus que la personne n'a souvent même pas assez d'argent au départ pour acheter des aliments.
    Il y a beaucoup d'anxiété et de stress dans les communautés d'un bout à l'autre du pays, et bien des gens viennent nous voir la première fois parce qu'ils ont perdu leur emploi et ont besoin d'aide.
    À court terme, je pense que les 100 millions de dollars qui ont été débloqués ont eu des répercussions très positives et ont aidé de nombreuses personnes à traverser une période fort difficile, comme je l'ai dit dans mon exposé, et cette aide continuera à jouer un rôle important à moyen terme.
    Je suis toutefois d'avis que nous devons retrouver un soutien social et générer des revenus qui seront à toute épreuve à long terme. J'ai abordé certains de ces aspects. C'est une question de revenus. Les denrées alimentaires ne viendront jamais à bout de la faim. Les revenus, quant à eux, pourront régler le problème. Nous devons donc nous doter d'une forte infrastructure sociale et d'une économie qui crée des emplois permettant aux gens de réellement gagner leur vie et prendre soin d'eux-mêmes et de leur famille.
    Merci beaucoup.
    Ma prochaine question porte sur les remarques de M. Milligan et de M. Céré.
    Monsieur Milligan, vous avez dit que nous devrions recueillir des données que nous ne compilons pas pour l'instant.
    Monsieur Céré, vous avez affirmé que la pandémie nous offre l'occasion de réfléchir à la manière de faire évoluer notre régime d'aide sociale vers un système qui soutiendra mieux notre main-d'œuvre au XXIe siècle. Ce ne sont pas vos mots exacts, mais je vous paraphrase.
    Monsieur Milligan, pourriez-vous d'abord décrire un peu mieux les données que nous devrions recueillir? Je crois sincèrement que nous devons colliger plus de renseignements et être très conscients de leur nature.
    Monsieur Céré, je vous demanderais de nous parler des données additionnelles dont nous avons besoin, selon vous, ce qui sera un point de départ.
    Pour certains aspects des données, Statistique Canada doit faire appel aux provinces ou aux Canadiens et réaliser une enquête, ce qui peut être long. Aussi, le gouvernement du Canada fait déjà la collecte d'autres éléments d'information et sources de données. C'est ce que nous appelons des « données de gestion », c'est-à-dire des données qui sont employées dans l'administration des programmes. Il y en a du côté de la Prestation canadienne d'urgence.
    Depuis la semaine dernière, le nombre de demandeurs de la Prestation canadienne d'urgence est mis à jour trois fois par semaine, ce qui explique pourquoi nous savons qu'il y a maintenant 7,1 millions de Canadiens qui en bénéficient. C'est exactement le genre de données dont nous avons besoin. Nous devons toutefois nous assurer d'obtenir des données à jour et très actuelles pour les autres prestations d'urgence qui ont été mises en place. C'est un des volets. Nous pouvons tout de même améliorer les choses en utilisant des données de gestion semblables à partir d'autres sources gouvernementales, et en les rendant disponibles dans un format sécuritaire et respectueux de la vie privée, dans le but d'éclairer les décisions stratégiques ainsi que les décisions que tous les Canadiens doivent prendre.
(1735)
    Je vous remercie.
    Monsieur Céré, j'ignore si vous avez quelque chose à ajouter.
    Monsieur Céré, voulez-vous ajouter quoi que ce soit?

[Français]

    On comprend que le régime de l'assurance-emploi n'était pas préparé à une situation comme celle qu'on a connue. C'est un vrai cataclysme. Actuellement, le régime de l'assurance-emploi ne protège que 45 % des travailleurs. Cela exclut des parties importantes de la population et cette crise-ci nous en a fait la démonstration.
    La population active est à peu près de 20 millions de personnes au Canada, et 15 % de cette population sont des travailleurs ou des travailleuses autonomes. Ces gens-là ne bénéficient d'aucune protection de la part de l'assurance-emploi, sauf d'un peu de prestations de maladie. C'est un peu compliqué, et peu de gens y ont cotisé.
    Compte tenu de l'emploi temporaire et des nombreuses mutations qu'il y a dans le monde du travail, comme le télétravail, il va y avoir des transitions environnementales. Or celles-ci vont transformer le monde du travail, et le programme d'assurance-emploi n'est pas prêt à cela actuellement. C'est pour cela que le gouvernement doit lancer un vaste chantier pour réfléchir à tout cela et nous donner un régime moderne.

[Traduction]

    Merci, monsieur Céré.
    Je pense bel et bien qu'il y aura des leçons à tirer d'ici la fin de la crise.
    C'est maintenant au tour de M. Cumming, après quoi nous écouterons Peter Fragiskatos.
    Allez-y, monsieur Cumming.
    Merci, monsieur le président.
     Je remercie tous les témoins qui sont avec nous aujourd'hui.
    Mes premières questions s'adressent à M. Brown.
    Ça ne paraît peut-être plus, mais j'ai déjà été étudiant. Un de mes bons souvenirs de cette époque, c'est que les emplois d'été ne servaient pas seulement à payer mes frais de scolarité; l'objectif était de vivre une expérience, de sortir et de contribuer à la société.
    Ma question fait suite aux propos de Mme Dancho, en quelque sorte. Ne croyez-vous pas que nous devrions aider l'industrie alimentaire ou les entreprises qui sont encore ouvertes, ou qui sont au front, et qui ont certainement besoin d'un coup de pouce? L'école d'ingénieurs de ma province m'a dit avoir proposé de faire travailler de nombreux étudiants à des projets de recherche.
    J'aimerais simplement savoir ce que vous en pensez. Je crois que les étudiants veulent participer plutôt que de seulement recevoir une prestation.
    Tout à fait. Je pense que la question comporte deux volets. D'une part, si les étudiants vont travailler dans un contexte où le virus est toujours bien présent au Canada, nous devons nous assurer que leur milieu de travail est sécuritaire pour eux, ou encore, qu'ils travaillent à partir de leur domicile lorsque c'est possible.
    D'autre part, je trouve utile d'embaucher des étudiants, que ce soit pour divers projets de recherche ou dans d'autres secteurs qui contribuent à traverser cette crise. J'espère en effet que la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant pourra servir aussi lorsque des entreprises et des organisations ne peuvent pas payer les étudiants.
    Je ne proposais pas de placer les étudiants dans un milieu dangereux. En réalité, je pense que tout ce qu'ils feront sera réglementé et que nous respecterons des normes sanitaires convenables.
     Je veux poursuivre dans cette veine et vous demander de faire le suivi auprès de vos membres. Il va y avoir une crise alimentaire, et je pense que les étudiants ont une occasion formidable d'aider dans ce secteur, puisqu'il est de plus en plus difficile de faire venir des travailleurs étrangers dans la province.
    Je vais maintenant m'adresser à M. Lee.
    Une des choses qui m'a frappé dans votre témoignage d'aujourd'hui, monsieur Lee, c'est que la situation est insoutenable. Nous avons des fonds d'urgence. Nous sommes tous conscients de leur importance, mais vous avez dit qu'il fallait planifier la relance de l'économie et le retour au travail. C'est ce que les gens veulent faire, et vous avez proposé d'y arriver au moyen d'une analyse sectorielle. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet et nous faire part de vos réflexions en ce sens?
    Oui. Je suis profondément convaincu que c'est ce qu'il faut faire, et je ne suis pas désinvolte ou insouciant à propos de ceux qui sont dans une situation à risque. J'en suis la preuve puisque je suis un homme de 65 ans qui prend des médicaments immunosuppresseurs pour l'arthrite. Je cours donc un triple risque devant cet horrible virus.
    Lors de mes très nombreuses lectures du New York Times, du Globe et du Wall Street Journal, et du plus grand nombre possible d'épidémiologistes de premier ordre, j'ai remarqué qu'ils disent sans cesse que tout le monde ne court pas un risque égal. Nous le savons grâce à des données empiriques.
    Dans les maisons d'hébergement, les résidences pour personnes âgées, les foyers Extendicare, ou quel que soit leur nom, nous savons que ces personnes sont tragiquement exposées à un très grand risque, notamment parce qu'elles se trouvent dans un espace clos, et en raison de leur âge et de leur santé fragile. Quant à moi, si je me précipite dans un Loblaws pendant dix minutes à sept heures du matin, où je me tiens à trois mètres de toute personne, il est complètement absurde de penser que je cours un risque égal à celui d'un travailleur de la santé de première ligne, qui est tous les jours aux côtés de personnes atteintes du coronavirus. Je ne suis pas exposé au risque.
    Pour paraphraser les épidémiologistes, nous devrions évaluer chaque entreprise et chaque profession « à faible contact et à faible risque », pour reprendre l'expression de M. Streeck, à l'Université de Bonn. Lorsqu'une personne entre dans un magasin de détail pendant cinq ou dix minutes, le contact est faible et le risque aussi, comparativement aux travailleurs des centres d'hébergement, des bars ou des événements sportifs. D'ailleurs, le virus est apparu en Allemagne à la suite d'un événement de musique où des milliers de personnes ont bu et dansé ensemble.
    Par conséquent, nous devrions évaluer le risque et déterminer quelles entreprises représentent un risque faible, puis les rouvrir lentement, tout en maintenant des mesures d'éloignement convenables. Pour l'instant, ma seule critique ne vise pas la réponse du gouvernement à la crise, mais plutôt le fait que nous traitons tout le monde comme s'ils couraient un risque équivalent. Nous fermons tout, à l'exception des services essentiels. Or, si ces services essentiels ne sont pas fermés, ce n'est pas parce qu'ils représentent un risque moindre, mais bien parce qu'ils sont essentiels à l'économie.
    Je suggère fortement de réaliser une analyse mesurée, scientifique et fondée sur des données probantes de chaque emploi, chaque entreprise, et ainsi de suite. Je dirais que bon nombre des commerces de détail sont à faible contact et à faible risque, à l'exception bien sûr des bars et des restaurants. Si je vais dans un magasin d'encadrement avec mon diplôme, et que j'y reste cinq minutes pour parler du cadre, de la couleur et du verre, puis que j'y laisse mon diplôme, il n'est pas crédible d'affirmer que je cours un risque équivalent à celui d'un médecin. Je me tiens à trois pieds des autres, comparativement à un médecin dans un hôpital qui travaille auprès de personnes représentant un risque. Nous devons réaliser une telle évaluation.
(1740)
    Monsieur Lee, nous devons nous arrêter ici.
    Nous allons maintenant écouter M. Fragiskatos, après quoi les députés suivants pourront poser une question chacun: M. Ste-Marie, M. Julian, Michael Cooper et Annie Koutrakis.
    Peter Fragiskatos, la parole est à vous.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les témoins, je vous remercie.
    Monsieur Milligan, vous n'êtes pas un spécialiste des municipalités, mais je voudrais quand même vous poser une question sur la demande récente que la Fédération canadienne des municipalités a soumise au gouvernement fédéral. Comme vous le savez peut-être, la Fédération demande à Ottawa une aide d'au moins 10 milliards de dollars. Vous enseignez à des étudiants. Vous savez que les étudiants de niveau postsecondaire vivent dans les villes. Avez-vous des conseils ou des réflexions sur la façon dont le gouvernement fédéral devrait composer avec une demande semblable?
    Encore une fois, si nous songeons plus particulièrement aux commissions de transport et aux enjeux des administrations locales, nous constatons que le virus creuse la dette à ce chapitre. Il faut se demander si cette dette devrait être remboursée par les commissions de transport et les administrations locales, par les provinces ou par le fédéral. C'est ainsi que nous devons envisager la question.
    Pour ma part, j'estime que les provinces sont plus au courant des enjeux de leurs réseaux de transport. Il y a des divergences entre les provinces quant au financement et aux structures des réseaux. Je pense qu'il appartient aux provinces de décider quelles institutions doivent être financées, et comment elles doivent obtenir les fonds. Je pense aussi que le gouvernement fédéral peut jouer un rôle en fournissant une partie de l'argent.
    Il faut donc que les décisions soient plus décentralisées. Je doute que le gouvernement fédéral à Ottawa soit bien placé pour décider quelle commission de transport doit obtenir quel type de financement, mais je pense que le portefeuille fédéral est en mesure de prendre en charge une grande part du fardeau à ce chapitre. Ce serait possible en remettant des fonds aux provinces, qui seraient ensuite répartis en fonction des circonstances locales.
    Vous pensez donc que la province devrait jouer un rôle très important, étant donné que les municipalités font partie intégrante des provinces?
(1745)
    C'est mon avis. Là encore, c'est parce que les provinces ont des ententes fort différentes avec les administrations locales. À partir d'Ottawa, il serait vraiment difficile de concevoir un programme qui convienne à tous, d'un bout à l'autre du pays.
    Je pense que le gouvernement fédéral a la capacité d'absorber une grande part de la dette attribuable à la crise, mais j'estime que les décisions de financer une commission de transport ou une autre devraient vraiment incomber aux capitales provinciales.
    Dans ce cas, monsieur, que pensez-vous de l'argument suivant? Je sais que nous avons encore une fois parlé des étudiants, et que d'autres questions ont été soulevées ici. On pourrait peut-être m'accuser de m'écarter du sujet principal, mais, comme je l'ai dit, les villes et l'expérience des villes sont si importantes à la réalité quotidienne des Canadiens. Je m'en voudrais de ne pas profiter de l'occasion pour continuer à vous interroger sur ce sujet. Que pensez-vous de l'argument que les provinces commencent à invoquer lorsqu'elles disent, par exemple, qu'elles n'ont pas les fonds nécessaires pour aider les municipalités? Elles n'ont pas cette capacité, et la totalité ou la grande majorité de l'aide financière devrait être assumée par le gouvernement fédéral. Que pensez-vous d'un tel argument?
    Je pense que leurs livres comptables sont mis à rude épreuve. Lorsque nous pensons au cadre et à la durabilité à long terme de la politique fiscale, il est vrai qu'au cours des 20 prochaines années, les provinces auront à composer avec un important fardeau en matière de soins de santé. Ce n'est pas aussi vrai pour le gouvernement fédéral. Je pense donc qu'on peut dire que les gouvernements provinciaux auront du mal à absorber une dette supérieure, à l'avenir.
    Cela dit, lorsque nous aurons traversé la majeure partie de la crise et que les choses se seront un peu calmées, je l'espère, compte tenu de la vitesse de la crise, je pense qu'il sera possible de prendre des décisions fort importantes à long terme sur la forme que prendront les transferts fiscaux au sein de notre fédération. Je pense que nous devons les repenser complètement. Ce que nous faisons dans l'urgence est une chose, mais nous devons également définir une trajectoire à long terme qui soit logique pour les gouvernements fédéral et provinciaux.
    J'ai une très courte question.
    Le président: [Inaudible]
    M. Peter Fragiskatos: D'accord, monsieur le président, je vais m'en tenir à M. Milligan.
    Monsieur, vous avez dit qu'un revenu de base universel n'est pas vraiment universel, puisqu'il n'aide pas les personnes qui ont certains besoins sociaux en raison desquels ils dépendent du gouvernement plus que d'autres. Dans une baladodiffusion récente avec David Herle, je crois que vous avez donné l'exemple d'une personne qui pourrait être handicapée physiquement, et qui a plus besoin du gouvernement qu'une autre personne en bonne santé. Pourtant, elles pourraient recevoir un revenu de base universel égal. C'est une aide distribuée de manière égale, mais dont les résultats sont très inégaux, en quelque sorte.
    Pourriez-vous étoffer cette idée?
    Bien sûr, tout dépend de la façon dont nous structurons une telle prestation. Mais souvent, lorsque le revenu de base est proposé, l'idée est de remplacer les prestations existantes. Le problème, c'est que ces prestations sont très souvent basées sur le besoin. Si vous êtes une personne handicapée bénéficiant de l'aide sociale, et que vous avez besoin d'un fauteuil roulant, vous pouvez en obtenir un.
    Dans certains modèles de revenu de base, où nous remplacerions toutes les prestations existantes par un seul chèque, cette personne devrait essayer d'acheter son fauteuil roulant avec un chèque. Je doute que ce soit la bonne solution. Je pense que nous devons avoir des prestations en fonction des besoins et de la situation particulière, plutôt qu'une solution unique.
    Bien. Nous devons nous arrêter ici.
    Avant de passer aux questions individuelles, j'ai une question pour les deux témoins à qui nous n'en avons pas encore posé.
    Monsieur Davidson ou madame Therrien, nous devons nous pencher sur des moyens de sortir de la crise. Les projets d'infrastructure en sont certainement un, comme vous l'avez mentionné. Pouvez-vous nous donner un exemple de projet d'infrastructure possible, ses retombées et la vitesse à laquelle il pourrait être réalisé?
    Madame Laing, à propos des gymnastes, quelle solution voyez-vous à votre problème de loyer? L'Aide d'urgence du Canada pour le loyer commercial qui a été annoncée sera-t-elle utile, ou y a-t-il encore une lacune à combler?
    Je vais donner la parole à M. Davidson ou à Mme Therrien.
    Merci, monsieur le président.
    Les universités sont sur la ligne de front des efforts déployés. Nous serons là pendant la période de stabilisation, et nous voulons être là pour la reprise. Comme vous le savez, les universités ont la réputation de pouvoir exécuter des projets d'infrastructure rapidement et comme il se doit. Nous l'avons fait à l'époque du gouvernement de M. Harper. Nous l'avons fait aussi pendant le premier mandat de M. Trudeau.
    Parmi les projets d'infrastructure qui nécessitent vraiment de l'attention, il y a de l'entretien reporté. D'un bout à l'autre du Canada atlantique, il faut effectivement faire de nombreux travaux d'entretien. Il peut également être question de l'infrastructure numérique, pour faire preuve de rigueur en matière de cybersécurité et offrir une expérience en ligne. Il y a aussi l'infrastructure verte, pour que nos campus répondent aux attentes des jeunes d'aujourd'hui, qui s'attendent à vivre et à travailler dans des milieux écologiques. De plus, il y a l'accessibilité de l'infrastructure conformément à la dernière mesure législative sur l'accessibilité adoptée par le Parlement, afin que les universités soient des endroits inclusifs.
    C'est un aspect important de la reprise, et nous sommes prêts. Nous avons présenté aux responsables des projets prêts à démarrer d'une valeur de 3,8 milliards de dollars. D'autres projets d'une valeur de 3,2 milliards de dollars sont presque prêts, ce qui signifie que 7 milliards de dollars peuvent être distribués d'un bout à l'autre du pays, tant dans des grandes que des petites collectivités. C'est ici que je mentionne de nouveau que les universités sont des piliers de l'emploi dans les collectivités, où les chaînes logistiques locales et les retombées de ce genre d'investissements se traduisent par des emplois de qualité et de meilleurs milieux d'apprentissage pour nos étudiants.
(1750)
    Merci.
    Madame Laing, avez-vous une réponse, s'il vous plaît?
    Il a été très intéressant d'entendre parler des nombreuses crises auxquelles se heurte notre pays. Je me rends compte que le sport est probablement la toute dernière priorité, mais en vous écoutant tous, je me suis rappelé que 80 % de nos employés sont étudiants. Au bout du compte, les enfants seront gravement touchés par le manque d'activités physiques au cours de la prochaine année, et ce que le gouvernement a fait pour nous sera formidable pendant quelques mois, mais cela ne maintiendra pas à flot des établissements comme le nôtre.
    Personne ne sera capable de garder ses portes ouvertes et d'être prêt, car on ne pourra pas tenir le coup sans revenus et avec 250 000 $ de dettes. Il y a aussi le fait que nous faisons partie des organisations qui ne peuvent pas, comme vous l'avez tous dit, reprendre lentement leurs activités économiques. Nous ne pouvons rien faire compte tenu de nos contacts étroits, et même si nos enfants ne sont pas malades, ils ont tendance à porter le virus, et les personnes qui travaillent avec eux sont sans aucun doute d'âge moyen et plus âgées, comme moi.
    Merci beaucoup, madame Laing.
    Monsieur Gabriel Ste-Marie, veuillez poser une brève question, s'il vous plaît, et ce sera ensuite au tour de M. Julian.

[Français]

    Monsieur LeBel, dans votre présentation, vous avez soulevé les enjeux concernant les étudiantes-chercheuses et les étudiants-chercheurs.
    Pouvez-vous illustrer leurs défis et leurs besoins à l'aide d'un exemple? Pouvez-vous nous donner des pistes de solution?
    Je suis étudiant au doctorat en microbiologie et je travaille directement dans les fermes. S'il avait fallu que cette crise éclate pendant la phase pratique de mon projet, j'aurais été obligé d'attendre un an, peut-être même deux, avant de pouvoir recommencer la même étude, parce qu'il doit y avoir une configuration expérimentale complète.
    C'est donc très important que les organismes qui subventionnent la recherche prévoient aussi cela dans la réponse à la crise et qu'ils puissent donner du financement supplémentaire afin que certains étudiants et certaines étudiantes puissent obtenir leur diplôme. Sinon, c'est comme si l'on jetait des millions de dollars à la poubelle à cause de la crise.
    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    C'est au tour de M. Julian, qui sera suivi de M. Cooper.
    Allez-y, monsieur Julian.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Céré. Beaucoup de gens sans emploi s'endettent. D'ailleurs, le niveau de dettes des familles canadiennes est le plus élevé du monde industrialisé.
    Pendant la crise, est-ce important que le gouvernement fédéral exerce ses responsabilités en obligeant les grandes banques canadiennes, qui font d'énormes profits, à réduire leurs taux d'intérêt et à cesser de pénaliser les gens? Par exemple, les caisses populaires ont amené leur taux d'intérêt à zéro.
    Le gouvernement fédéral devrait-il utiliser ces outils pour que les chômeurs et les chômeuses ne soient pas trop endettés après la crise?

[Traduction]

    Allez-y.
(1755)

[Français]

    Bien sûr, les travailleurs construisent la société. Tout ce que nous voyons autour de nous, ce sont des travailleurs et des travailleuses qui l'ont fait. La crise actuelle est brutale et le taux de chômage est brutal. Il faut s'assurer que les gens ne sortent pas de cette crise plus endettés ou dans de plus mauvaises conditions qu'auparavant.
    La Prestation canadienne d'urgence a été mise en place comme un revenu de remplacement, et c'est tant mieux. On a réussi à colmater des brèches dans le cas des travailleurs saisonniers, des gens qui perdaient leurs prestations de chômage, des gens qui avaient une baisse de revenu et des étudiants. C'est tant mieux.
    Cependant, il faut intervenir à d'autres égards, comme dans le cas des cartes de crédit, des taux d'intérêt usuraire et de bien d'autres aspects. Il y a de multiples préoccupations à propos desquelles il faut intervenir. Il faut s'assurer que les gens et la société peuvent sortir de la crise plus forts. Il faut se préparer et préparer la couverture sociale à d'éventuelles crises.
    Le moment présent est historique, comme l'ont été d'autres moments dans l'histoire de notre société. Il faut en tirer les leçons, aller plus loin et en sortir plus forts.

[Traduction]

    Merci à vous deux.
    Nous allons passer à M. Michael Cooper, qui posera une brève question, et ensuite à Mme Annie Koutrakis.
    Je vais poser ma question à M. Lee.
    Monsieur le professeur, je suis parfaitement d'accord avec vous lorsque vous dites que c'est intenable. Le confinement ne dure que depuis cinq semaines, et des milliards de dollars ont été dépensés. Il est difficile d'imaginer un ou deux autres mois.
    Dans votre exposé, vous avez donné l'exemple de quelques pays, dont l'Allemagne et le Danemark. Vous pourriez peut-être en dire un peu plus sur ce qu'ils font.
    Vous avez également parlé d'un vaccin. J'ai entendu des gens dire qu'à défaut d'en avoir un, nous devrons essentiellement poursuivre le confinement. Dans le cas du SRAS, 17 années se sont écoulées, et il n'y a pas de vaccin.
    L'une de mes préoccupations alors que nous tentons de trouver une porte de sortie à la crise, tout en étant guidés par les responsables de la santé publique, c'est le changement d'objectif, qui s'éloigne de l'objectif du confinement, c'est-à-dire d'aplatir la courbe et d'éviter que nos hôpitaux soient débordés. Je me demande si vous avez la même préoccupation.
    Il y a deux parties à votre question. Je vais d'abord me pencher sur la première.
    Je ne prétends pas être médecin ni épidémiologiste. Je regarde tous les jours les conférences de presse, dans lesquelles Trump est entouré de scientifiques, et je lis évidemment les rapports médicaux au Canada.
    Je suis vraiment fasciné par le premier ministre du Québec, M. Legault, qui prend selon moi des mesures très novatrices pour tenter de relancer l'économie tout en reconnaissant que nous n'avons pas de vaccin. Comme nous le savons, il y a d'autres maladies pour lesquelles nous n'avons pas de vaccin. Il n'y en a pas pour la grippe. Je sais que beaucoup de personnes se fâchent lorsqu'on fait la comparaison, mais mon père est décédé des suites d'une pneumonie causée par la grippe. Ce n'est pas une maladie insignifiante. Elle est horrible, à sa façon, mais nous avons pourtant réussi à nous adapter, à poursuivre nos activités et à prendre des précautions.
    Pour ce qui est des pays européens, j'ai lu tout ce que j'ai pu trouver. Ils ont adopté une approche axée sur les risques qui, en passant, est préconisée au Canada par l'Institut C.D. Howe, à Toronto. Nous évaluons différents métiers, différentes professions, différentes industries et différentes entreprises pour déterminer le niveau de risque.
    Je crois qu'il y a une voie à suivre, car la dette totale au pays — des entreprises, des ménages et de l'État — représente 350 % du PIB. J'exhorte tout le monde à lire la lettre d'opinion de David Rosenberg que le Financial Post a publiée aujourd'hui, dans laquelle les chiffres sont examinés.
    Merci.
    Nous allons passer à Mme Annie Koutrakis pour terminer.
    Vous avez la parole, madame Koutrakis.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins de leurs observations et de leurs exposés. La discussion s'est révélée très intéressante et a donné de très bonnes pistes de réflexion pour l'avenir.
    Ma question est pour M. Davidson et Mme Therrien d'Universités Canada.
    Dans une lettre d'opinion publiée sur votre site Web, il est écrit que les universités sont bien placées pour apporter une contribution immédiate et importante à la réponse à la pandémie de la COVID-19. Pouvez-vous en dire plus long sur cette affirmation et donner plus de détails sur la collaboration entre les universités, l'industrie et les gouvernements pour répondre à la pandémie? Comment utilise-t-on le financement fédéral pour soutenir les projets tout en maintenant un milieu de travail sécuritaire pour les chercheurs?
(1800)
    J'invite Mme Therrien à répondre.
    Vous avez la parole, madame Therrien.
    Allez-y.
    Merci beaucoup de poser la question. En fait, les universités du Canada sont ravies des investissements dans la recherche du gouvernement fédéral, qui permettent à des laboratoires partout au pays de participer à la mise au point d'un vaccin contre la COVID-19.
    Les universités canadiennes ont aussi collaboré avec leurs provinces respectives et les autorités sanitaires locales pour fournir de l'équipement de protection individuelle aux travailleurs de première ligne et les soutenir dans la réponse, et elles font également de la recherche en sciences sociales pour comprendre les répercussions de la COVID-19 sur la population du pays et pour appuyer les efforts de préparation en vue d'autres crises.
    Ce sont des exemples de ce que nous avons pu faire pour contribuer à la réponse, et nous réfléchissons à l'importance de pouvoir relancer rapidement le milieu de la recherche, car même si les travaux urgents se poursuivent, la majorité de la recherche est laissée en jachère, et il sera important de pouvoir relancer rapidement l'écosystème de recherche pour appuyer l'innovation et la reprise économique de notre pays.
    Merci beaucoup à vous deux.
    Madame Sasha McNicoll, vous n'avez pas eu l'occasion d'intervenir. Voulez-vous faire une observation pour conclure les témoignages?
    Je dirai juste que nous pensons aux gens qui souffrent le plus de l'insécurité alimentaire et de la pauvreté, et que lorsque la vie reprendra après la crise, nous devons mettre l'accent sur les adultes seuls, car 43 % des gens en situation d'insécurité alimentaire sont des adultes seuls. Le gouvernement fédéral offre des prestations très généreuses aux enfants et aux aînés. Par conséquent, nous vous encourageons vraiment tous à réfléchir à la meilleure façon de soutenir les adultes seuls à l'aide de mesures comme le remboursement du crédit d'impôt pour personnes handicapées, surtout celles qui ne peuvent pas travailler.
    Bien. Merci d'avoir saisi l'occasion.
    Je vais demander aux députés de rester un instant. Nous devons nous pencher sur les thèmes pour la semaine prochaine. J'ai une proposition.
    Je remercie les témoins du temps qu'ils ont pris pour comparaître et de leurs bonnes propositions. Nous allons avoir sous peu un résumé des témoignages, mais s'il y a une chose que nous constatons dans ces audiences, c'est que nous avons certainement beaucoup de leçons à tirer d'une crise comme celle-ci. Nous devons nous occuper des aspects urgents du problème, des revenus, des entreprises, des loyers et ainsi de suite, mais il y a aussi des changements stratégiques qui peuvent être apportés à l'avenir.
    Je vous remercie tous de vos exposés.
    Je reviens aux députés. On m'a dit que nous aurons peut-être un problème jeudi prochain. Nous aurons au moins deux heures à notre disposition, mais les whips ne nous autoriseront peut-être pas à siéger pendant quatre heures. Nous verrons bien, mais je propose que nous nous prononcions maintenant sur quatre groupes de témoins, même si nous pourrions n'en avoir que trois.
    Le premier groupe jeudi serait composé du ministre et de fonctionnaires. C'est nécessaire pour savoir où en est le gouvernement, pour produire le rapport bihebdomadaire sur la pandémie. C'est une exigence de la Chambre des communes, une motion.
    Je propose d'avoir un deuxième groupe de témoins d'ordre général. Nous avons tous des témoignages que nous n'avons pas pu entendre, et ce serait une sorte de groupe de rattrapage.
    Pour vendredi, soit le troisième groupe, je propose que la première discussion porte sur le soutien aux Canadiens n'ayant pas droit aux mesures annoncées jusqu'à maintenant. Il en était question dans les séances ordinaires que nous tenions il y a longtemps.
    Enfin, je propose que le dernier groupe soit une combinaison de représentants du secteur manufacturier et du secteur de la construction. Ce serait surtout pour voir ce que nous pouvons faire maintenant, pour examiner certaines des propositions sur ce que nous pourrons faire lorsque ce sera terminé.
    C'est ce que je propose. Quelqu'un est-il en désaccord?
    Est-ce que cela vous va, monsieur Julian? Bien.
    Êtes-vous d'accord, monsieur Cumming?
(1805)
    Oui, mais je m'apprêtais à faire une suggestion, monsieur le président.
    Le président: Oui.
    M. James Cumming: Il me semble qu'une grande partie de ce que nous entendons, d'un témoin à l'autre, concerne les répercussions sur les petites entreprises. J'aimerais entendre la ministre, si c'est possible. Je sais que la ministre Ng a comparu devant d'autres comités. Je pense qu'il serait utile que le comité des finances l'entende ainsi que ses fonctionnaires à propos de certains programmes annoncés, et qu'il entende aussi la ministre Fortier, peut-être. Le premier choix serait la ministre de la Petite Entreprise.
    Pouvons-nous examiner cela la semaine prochaine, monsieur Cumming, et nous préparer à cette fin pour la semaine suivante? Est-ce trop tard?
    Volontiers. Je pense tout simplement que nous devons les entendre. Plus nous attendons... car je crois que c'est plus lié à l'intervention d'urgence et à ces programmes.
    Je pense qu'il vaut mieux tôt que tard, mais je m'en remets à vous, monsieur le président.
    Bien. Nous verrons ce que nous pouvons faire.
    Je pense que c'est une bonne suggestion. Nous avons certainement entendu le ministre des Finances, qui assume la responsabilité de manière générale, mais nous devons aussi entendre des ministres ayant des responsabilités précises dans certains des domaines auxquels s'appliquent les programmes. Nous pourrions peut-être faire quelque chose du genre.
    Mesdames et messieurs, je sais qu'une cérémonie aura lieu bientôt pour honorer les victimes en Nouvelle-Écosse. Nous voudrons peut-être également y participer.
    Sur ce, je remercie tout le monde.
    Merci, chers collègues, de votre persévérance. N'oubliez pas que les propositions de témoins pour la semaine prochaine doivent être présentées d'ici 18 heures, dimanche soir.
    Je remercie encore une fois tout le monde et je mets fin à la séance.
    La séance est levée.
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