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Merci, monsieur le président.
Je remercie M. Fraser et Mme Dzerowicz pour leurs commentaires. Ils s'expriment toujours avec beaucoup d’éloquence. Je dois cependant affirmer très respectueusement que je ne suis pas d'accord.
Dans le cas de l’accès à l’information, comme l'a dit M. Fraser, il est relativement courant que les comités fassent part de leur décision au conseiller parlementaire.
Pour répondre à Mme Dzerowicz, on nous a confié la gestion des dépenses financières pendant cette pandémie. Nous devons assumer cette responsabilité. Le Parlement a confié au Comité des finances la responsabilité ou la gestion de toutes les dépenses gouvernementales liées à la COVID-19. Par conséquent, ma requête fait partie de nos tâches.
À mon avis, le commissaire à l’éthique cherche plutôt à déterminer s’il y a eu violation de l’éthique. La question dont nous débattons ici porte sur la procédure financière, sur le contrôle des finances, et elle mérite une réponse. D’autres questions similaires pourraient surgir au cours de ces prochains mois, et dans son rôle de gestionnaire des dépenses du gouvernement fédéral, le Comité des finances sera appelé à les examiner. La Chambre des communes nous a confié cette responsabilité.
J’espère que nous recevrons des réponses au cours de ces prochaines semaines. Je ne pense pas qu’un délai d’un mois soit trop serré, loin de là. Nous recevrons ainsi les réponses qu'il nous faut pour assurer l’intendance que la Chambre des communes nous a confiée en mars, au début de la pandémie.
Nous ne savons pas combien de temps cette pandémie durera. Nous ne savons pas quels autres programmes il faudra créer pour y faire face. Nous sommes responsables d'examiner en profondeur les questions non résolues afin d’obtenir les renseignements nécessaires, et c'est ce que vise cette motion.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Alors je sonne le départ de la course, aujourd’hui. Je suis très heureuse d’être ici. Merci beaucoup de m’avoir invitée à faire le point sur l'intervention de l’Agence à la pandémie de la COVID-19.
[Français]
Comme on me l'a suggéré, pour éviter des difficultés techniques, je parlerai seulement en anglais.
[Traduction]
On m'a suggéré de m’exprimer en anglais afin d'éviter de causer des difficultés techniques en changeant souvent de langue.
Trois collègues m'accompagnent: Frank Lofranco, sous-commissaire de la Surveillance et de la mise en application de la loi, Teresa Frick, directrice de la Surveillance et Ruth Stephen, directrice de Recherche, politiques et éducation. Ils sont venus pour fournir des détails sur certains programmes, si le Comité le désire.
Je vais d’abord vous présenter un aperçu de l’Agence, puis je me concentrerai sur notre intervention à la pandémie.
Notre agence est un organisme fédéral indépendant financé principalement par les institutions financières qu'elle réglemente. Nous avons pour mandat de protéger les consommateurs canadiens de produits et services financiers. Nous suivons pour cela deux approches principales.
Premièrement, nous supervisons les entités financières sous réglementation fédérale, principalement les banques, pour veiller à ce qu'elles se conforment aux mesures de protection des consommateurs prévues dans la loi ainsi que les engagements publics et les codes de conduite. Deuxièmement, nous encourageons la littératie financière en fournissant de l’éducation et en attirant l'attention des consommateurs sur les problèmes qui les menacent et sur leurs droits. La meilleure façon de protéger les consommateurs est de les éduquer.
J’ai été nommée commissaire en août dernier. Je comparais donc devant ce comité pour la première fois. Depuis ma nomination, nous nous sommes concentrés sur la planification de la prochaine étape de l’évolution de l’Agence.
Même avant les défis très particuliers que soulève la COVID-19, nous étions déjà très occupés. Comme vous le savez, les changements apportés à la Loi sur l’ACFC et à la Loi sur les banques, qui ont reçu la sanction royale en décembre 2018, ont considérablement renforcé le rôle de l'Agence. Ils confèrent de nouveaux pouvoirs à la commissaire, ils intègrent la littératie financière au cœur de notre mandat et modernisent le cadre de protection des consommateurs canadiens de produits et services financiers. Certaines de ces dispositions sont entrées en vigueur le 30 avril dernier. Nous mettrons les autres en vigueur à mesure que nous rédigerons la version définitive des règlements et que l’industrie et l’Agence seront prêtes à effectuer à leur mise en œuvre.
Nous avons réalisé des progrès remarquables au cours de cette dernière année. Nous avons actualisé notre vision et nos énoncés de mission, mis en place une nouvelle structure organisationnelle, créé une nouvelle équipe de direction, dont Frank Lofranco fait partie depuis deux mois. Nous avons aussi publié nos priorités stratégiques et amélioré la transparence de notre processus d'arbitrage. Il nous reste bien sûr encore beaucoup à faire.
L’Agence a une équipe d’environ 160 employés qui travaillent de chez eux depuis la mi-mars. Comme ceux de nombreux organismes, nos employés ont eu de la peine à s’adapter à cette nouvelle réalité. Toutefois, j'ai le plaisir d'affirmer que, grâce aux efforts dévoués de notre équipe, nous avons réalisé de bons progrès même en ces circonstances très particulières.
Voici donc les mesures que nous avons prises face à la COVID. Du côté de la surveillance, nous avons maintenu un contact étroit avec les institutions financières que nous réglementons. Nous leur avons communiqué de façon proactive nos attentes, y compris celle de fournir un accès sécuritaire aux services financiers, surtout pour les consommateurs vulnérables. Nous avons ajusté nos priorités afin de permettre aux institutions financières de réaffecter leurs ressources internes pour adapter leurs transactions et répondre à la demande d’aide financière. Au cours de ces derniers mois, nous avons par exemple interrompu les consultations que nous menions auprès de l’industrie sur le nouveau cadre, mais nous venons de les reprendre, et elles avancent bien. Nous reconnaissons toutefois la nécessité de demeurer souples, car il se pourrait que nous devions à nouveau adapter nos priorités aux circonstances particulières que nous vivons tous.
Malgré les perturbations et les pressions considérables auxquelles les banques ont fait face, elles se sont efforcées de continuer à fournir leurs services financiers. Elles continuent aussi à aider les consommateurs vulnérables qui demandent un allégement financier. Nous fournissons des données à ce sujet dans nos documents d’information.
Nous considérons ces mesures d’allégement comme des engagements envers le public. Nous tenons donc à ce qu’elles soient mises en œuvre de façon équitable et efficace. À cette fin, nous recevons chaque semaine, depuis avril, un rapport sur les reports de paiement de prêts hypothécaires et sur d’autres produits de crédit. D’après nos données, bien que la mise en œuvre ne se soit pas déroulée à la perfection, la plupart des demandes des consommateurs ont été approuvées en temps opportun.
Du côté de l’éducation, l’Agence fournit aux consommateurs des renseignements objectifs et factuels par l’entremise de son centre d’appels et de ses ressources en ligne. Le volume d’appels que reçoivent nos centres a augmenté de 28 % par rapport à celui de la même période de l’an dernier. Le nombre de visiteurs de nos ressources en ligne a considérablement augmenté, car nous avons rapidement affiché de nouveaux renseignements liés à la pandémie et nous en avons fait la promotion. Nous les mettons à jour à mesure que la situation évolue.
Enfin, en poursuivant ses programmes de recherche, l’Agence surveille les tendances et les comportements des consommateurs de produits et de services financiers. Par exemple, nous nous appuyons sur les données de référence établies par l’Enquête canadienne sur les capacités financières que nous avons publiée l’automne dernier. Ce mois-ci, nous lancerons deux nouveaux sondages mensuels pour mettre à jour cette information et pour évaluer les changements causés par la pandémie. Les résultats de ces sondages nous aideront à orienter nos efforts de supervision. Ils nous permettront aussi de parfaire et de mettre à jour les renseignements éducatifs que nous offrons aux consommateurs.
Dès le début de la pandémie, nous avons travaillé en étroite collaboration avec les intervenants pour mieux comprendre les problèmes auxquels les consommateurs font face. Il s'agit de nos 18 réseaux de littératie financière, qui réunissent plus de 600 organismes communautaires partout au pays. Nous communiquons également avec les organismes de réglementation provinciaux sur des questions d’intérêt mutuel et nous collaborons étroitement avec les membres du Comité de surveillance des institutions financières, le CSIF qui, comme vous le savez, regroupe des représentants du ministère des Finances, de la Banque du Canada, de la SADC, du Bureau du surintendant des institutions financières et de notre agence. De plus, notre agence participe activement aux activités d'organismes internationaux comme l’OCDE, avec laquelle nous échangeons de l’information et des idées et où nous nous renseignons sur les pratiques exemplaires appliquées dans d'autres pays.
Nous avons lancé toutes ces initiatives afin de réaliser la vision de l'Agence, qui est de se placer en tête de l'innovation en matière de protection des consommateurs de produits et services financiers. Il est crucial que ces derniers fassent confiance au système financier, surtout en temps de crise. Les mesures que l'Agence et ses partenaires ont prises face à la pandémie visent à renforcer cette confiance, et l’Agence est déterminée à collaborer avec les autres organismes pour maintenir les mesures de protection sur lesquelles les consommateurs comptent.
Voilà qui termine ma déclaration préliminaire. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
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Je vais essayer. Apparemment, il est difficile de briser cette habitude.
Le BSF fait partie du ministère de l'Innovation, des Sciences et du Développement économique et le est responsable des politiques en matière d'insolvabilité par le truchement de la législation et de la réglementation. À titre de surintendante, je travaille en étroite collaboration avec mes collègues d'ISDE et je dispose également de pouvoirs d'émettre des instructions qui me permettent de fournir une orientation additionnelle sur les exigences juridiques de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, ou la LFI.
Comme mentionné dans les documents, le BSF est d'abord et avant tout une organisation financée par la méthode du crédit net. Ses revenus couvrent tous les coûts directs des activités ainsi que les coûts indirects des diverses dépenses gérées centralement.
Outre le BSF, les principaux intervenants du système d'insolvabilité sont les syndics autorisés en insolvabilité, ou SAI, les débiteurs, les créanciers et les tribunaux. Les SAI individuels et les SAI constitués en personnes morales qui travaillent dans le secteur privé sont les seuls professionnels autorisés à administrer des procédures d'insolvabilité permettant aux débiteurs d'être libérés de leurs dettes. Ces professionnels suivent une formation poussée et participent à un processus d'accréditation rigoureux avant d'être autorisés par le BSF; ils doivent répondre aux normes de pratique établies dans la LFI et aux règlements de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, la LACC, dont le Code de déontologie des syndics et les instructions du surintendant.
Les débiteurs ont des droits et des responsabilités en matière d'insolvabilité, dont la divulgation complète et honnête de leurs actifs et de leur passif et la collaboration pendant tout le processus. Les débiteurs consommateurs, eux, doivent participer à deux séances de consultation en insolvabilité. Ils risquent de subir des conséquences s'ils omettent de remplir leurs obligations, comme le refus d'une libération, une ordonnance de payer des montants additionnels aux créanciers, ou même des accusations au criminel. La majorité des débiteurs sont honnêtes et collaborent pleinement et, après avoir été libérés, ils peuvent profiter d'un nouveau départ financier.
Les créanciers ont eux aussi des droits et des responsabilités dans le système d'insolvabilité. Ils ont le droit de recevoir une partie des montants collectés par le débiteur. Ils ont un rôle à jouer dans la procédure d'insolvabilité, ils doivent respecter la suspension des procédures et ne peuvent pas tenter de recouvrer une créance qui a fait l'objet d'une libération.
Les tribunaux jouent un rôle important, qui varie selon le type de procédure d'insolvabilité. Au titre des modifications législatives de 2009, des libérations d'office additionnelles sont prévues pour certains types de faillites qui réduisent la nécessité d'avoir recours aux tribunaux dans la majorité des procédures de faillite.
Parlons maintenant de certains programmes du BSF et des mesures que nous avons prises pour aborder la pandémie de COVID-19.
Depuis ma nomination au poste de surintendante en octobre 2018, j'ai établi trois objectifs stratégiques pour le BSF, soit l'engagement auprès des intervenants, la conformité et l'excellence organisationnelle.
En grande partie grâce à l'engagement accru du BSF auprès des intervenants — notamment de l'Association canadienne des professionnels de l'insolvabilité et de la réorganisation, soit l'ACPIR, et les SAI du Canada —, le BSF a été en mesure d'agir rapidement à la pandémie de COVID-19 en faisant paraître sa première note d'orientation le 13 mars 2020. Nous avons immédiatement autorisé les SAI à exécuter certaines tâches à distance qu'ils auraient habituellement eu à faire en personne, entre autres l'évaluation initiale du débiteur et la prestation de consultations en insolvabilité. Depuis, nous avons prolongé cette mesure de flexibilité au 31 mars 2021 afin de favoriser la distanciation sociale, d'aider les débiteurs à recevoir les services de la manière qu'ils et elles préfèrent, de tirer profit de la technologie et de dégager d'importantes efficiences du système.
Depuis le 13 mars 2020, le BSF a fait paraître 10 notes d'orientation, dont plusieurs au nom de l'Agence du revenu du Canada et de Revenu Québec, afin de s'assurer que le système fonctionne de façon efficace et efficiente. Nous nous sommes efforcés de rendre les exigences de conformité plus claires, là où il se doit, et avons intégré de plus belle la technologie et d'autres méthodes d'efficience.
Et, le plus important sans doute, j'ai fait usage du pouvoir qui m'est conféré en vertu de la LFI pour demander une ordonnance pour le compte des 451 000 dossiers d'insolvabilité, voire plus, qui ont été ouverts avant la pandémie et pour ceux qui ont été déposés au 30 juin dans les 10 provinces et les trois territoires du pays, avec prise d'effet le 27 avril 2020. Ceci a permis aux débiteurs ayant déposé une proposition de consommateur de manquer trois paiements additionnels entre le 13 mars 2020 et le 31 décembre 2020, en évitant que leur proposition ne soit présumée annulée, en reconnaissance du fait que plusieurs débiteurs ayant déposé des propositions de consommateur se sont retrouvés sans travail et incapables de continuer à faire leurs paiements comme convenu dans leurs propositions. Notez que les défauts de paiements devront avoir été compensés à un moment donné avant que la proposition de consommateur n'arrive à échéance. L'ordonnance a aussi permis de prolonger les délais à la demande, pour des aspects comme les assemblées de créanciers, les demandes au tribunal et les médiations.
Les agents du BSF d'un bout à l'autre du pays ont rejoint les SAI dans les premières semaines de la pandémie pour procéder à une vérification de leur situation, afin de s'assurer qu'ils pourraient fonctionner efficacement. Le BSF a également mis en place une adresse courriel dédiée et une équipe d'intervention spéciale en réaction à la pandémie pour répondre avec exactitude, uniformité et rapidité à toutes les questions à ce sujet provenant des SAI et des intervenants canadiens.
Nous continuons d'explorer des manières d'utiliser la technologie pour effectuer nos tâches de conformité avec le plus d'efficacité possible à distance, notamment pour ce qui est des inspections des pratiques des SAI, des interrogatoires de débiteurs, de la présidence des assemblées des créanciers, de l'opposition aux libérations, de la tenue d'enquêtes criminelles, de l'utilisation de signatures électroniques et de la validation des transferts de fonds électroniques.
Nous avons également redoublé d'efforts pour nous assurer que les débiteurs disposent de renseignements exacts et fiables quant aux options qui s'offrent à eux pour régler leurs difficultés financières. L'année dernière, nous avons lancé un portail sur les solutions en matière de dettes, portail qui est rattaché à notre site Web et dont nous avons fait la promotion avec l'aide de nos partenaires, entre autres l'Agence de la consommation en matière financière du Canada, l'ACFC. Nous avons émis une note d'orientation à l'intention des débiteurs dans le contexte de la COVID-19 et élaboré une série de billets pour les médias sociaux à ce sujet, qui seront publiés tout au long de l'été. Cette année, le BSF a lancé une fonction activée par une carte géographique pour aider les débiteurs à trouver un SAI dans leur région. Au cours de la prochaine année, nous espérons élaborer de nouveaux outils interactifs pour aider les Canadiens à trouver la meilleure solution à leurs problèmes de dette.
Pour ce qui est de nous préparer à une possible augmentation du nombre de dossiers d'insolvabilité, nous commencerons par examiner la situation au cours des dernières années, puis des dernières semaines. Nous surveillons de près les taux d'insolvabilité en comparaison avec ceux de la dernière récession importante au Canada, en 2008-2009, qui a eu une incidence sur les taux d'insolvabilité en ce sens qu'un sommet a été atteint: plus de 158 000 dossiers, soit 5,83 dossiers par tranche de 1 000 adultes en 2009.
En 2019, le nombre brut de dossiers d'insolvabilité a atteint plus de 140 000, mais il faut comprendre que la population du Canada a également avancé en âge au fil du temps, de sorte que cela équivalait à 4,64 dossiers d'insolvabilité par tranche de 1 000 adultes, un taux qui avait été relativement stable depuis 2011, période pendant laquelle il était resté en dessous de cinq, compte tenu des répercussions de la récession.
Dans les semaines qui ont suivi le début de la COVID-19 au Canada, les taux d'insolvabilité en vertu de la LFI ont descendu plus bas que les taux de 2009 et de 2019. Pour ce qui est des dossiers d'insolvabilité d'entreprise, cette baisse s'est manifestée dans la semaine du 8 mars et pour ce qui est des dossiers d'insolvabilité de consommateur, elle s'est manifestée dans la semaine du 15 mars. Depuis, ils sont demeurés bien en dessous des taux de 2009 et de 2019. Nous pouvons présumer, avec une certaine confiance, les raisons pour lesquelles les taux d'insolvabilité sont demeurés bas. Nous les attribuons aux appuis offerts par le gouvernement en matière de finance et de liquidité, les niveaux réduits de la mise en application des obligations en matière de dette par les créanciers, et l'incertitude concernant l'avenir des entreprises et des employés.
Pour ce qui est des dossiers déposés en vertu de la LACC, au 25 juin, nous avons reçu 27 dépôts, soit le plus important volume de dépôts pour un T2 et plus du double de la moyenne trimestrielle sur 10 ans. Le taux de dépôt le plus élevé suivant a été de 17, au T1 de 2012. Cependant, pour certaines années, nous constatons une montée en flèche pour un même trimestre, suivie d'une importante baisse à d'autres trimestres. Il est donc trop tôt pour dire s'il s'agit là d'un signe d'une année record; il faut mentionner par ailleurs que les chiffres sont généralement très bas.
Il est important d'insister sur le fait que l'insolvabilité est un indicateur décalé. Dans les documents que j'ai fournis, vous pouvez voir à la diapositive 8 la corrélation entre les taux d'insolvabilité et les baisses du PIB. Le nombre de dossiers d'insolvabilité augmente quand le PIB diminue, et cette augmentation peut aussi survenir dans le trimestre qui suit une baisse du PIB. Les décisions inhérentes au dépôt formel d'un dossier d'insolvabilité sont complexes et nous savons que les particuliers et les entreprises qui peuvent être techniquement insolvables n'effectueront pas toujours un dépôt formel.
Une multitude de facteurs influeront sur les taux d'insolvabilité futurs. Historiquement, le BSF n'a jamais fait de prévision des taux d'insolvabilité. Nous avons un modèle pour prévoir les revenus, qui est passablement fiable du fait que la plus grande partie des frais sont payés à la fin de la procédure d'insolvabilité, alors nous basons nos prévisions sur les données courantes liées aux dépôts plutôt que sur les données de dépôts prévues. Nous avons eu des discussions avec nos homologues au Canada et à l'étranger, afin de déterminer s'il existait un modèle de prévision fiable et, si oui, de quelle manière il pourrait s'appliquer dans le contexte des incertitudes actuelles. Notre travail à ce sujet se poursuit.
Entretemps, le BSF fait ce qu'il se doit pour s'assurer que le système d'insolvabilité puisse soutenir une augmentation importante du nombre de dossiers d'insolvabilité. En fonction de ce qui s'est passé en 2009 et des méthodes d'efficience additionnelles qui ont été adoptées dans le système d'insolvabilité, je suis persuadée que le système y arrivera.
Plus précisément, je dois souligner que le dépôt des dossiers d'insolvabilité s'effectue électroniquement auprès du BSF. Nous nous affairons tout de même à tester le système afin de nous assurer qu'il pourra traiter encore plus de dossiers. Nous avons prolongé les options de prestation de service à distance par les SAI et le BSF pour parvenir à dégager des méthodes d'efficiences. Les SAI ont également découvert des méthodes d'efficience au fil des années quant à la manière de livrer les services. Nous pouvons par ailleurs faire certains ajustements stratégiques aux exigences de conformité. Comme je le disais, nous avons réduit la durée des procédures devant les tribunaux grâce à une augmentation du nombre de dossiers pour lesquels les débiteurs peuvent obtenir une libération d'office et à l'augmentation du nombre de propositions de consommateur. Nous continuons d'explorer d'autres méthodes d'efficience du système, comme le recours à l'intelligence artificielle pour la détection de la non-conformité potentielle des débiteurs, un aspect qui fera l'objet d'un projet pilote cet automne.
Voilà qui conclut mes remarques liminaires. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Madame Lang, je vous remercie de vous être jointe à nous. Je vous remercie également de la présentation que vous avez faite au début de cette séance. Je tiens à tirer mon chapeau aux interprètes, qui ont fait un travail remarquable en vous accompagnant dans cette course.
Mes interventions portent aussi sur les statistiques que vous avez dévoilées et qui sont, ma foi, surprenantes. Je parle ici du rapport intitulé « Statistiques sur l'insolvabilité au Canada ». Les dernières données portent sur le mois de mai. En raison de la pandémie, je me serais attendu à ce que le nombre de cas d'insolvabilité et de faillites augmente. Or, vous précisez qu'au Canada, le nombre total de dossiers d'insolvabilité, donc de faillites et de propositions, a diminué de 8,2 % en mai 2020 par rapport au mois précédent. Le nombre de faillites a baissé de 3,9 %, et le nombre de propositions, de 10,3 %. Le nombre total de dossiers d'insolvabilité déposés en mai dernier a diminué de 50,3 % par rapport au mois de mai 2019. D'après ce que je comprends, c'est deux fois moins, alors que nous vivons une crise économique. Au Québec, si l'on se fie à vos données, il s'agit de 64 % de moins. C'est incroyable. Dans votre rapport, les chiffres suivent cette même tendance.
J'ai quelques hypothèses sur ce qui pourrait expliquer cela, mais j'aimerais que vous nous parliez des raisons de cette baisse éventuelle. Je ne suis pas certain que vous ayez les réponses sous la main. Les analystes de la Bibliothèque du Parlement indiquent que cela pourrait s'expliquer par un ralentissement des activités des tribunaux. Êtes-vous en mesure de commenter cela? Sinon, de quelle façon les programmes mis en œuvre par le gouvernement ont-ils pu également faire une différence dans ce cas?
D'autres hypothèses sont plus inquiétantes. Vous avez parlé de l'amnistie touchant les trois premiers paiements manqués, mais aussi du fait que les institutions financières ont conclu des ententes de report de paiements. Or, si les institutions financières ont conclu des ententes temporaires, on peut s'attendre à ce qu'il y ait un nombre massif de cas d'insolvabilité et de faillites à l'automne. Voilà ce qui est inquiétant.
Qu'avez-vous à dire sur ces hypothèses?
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Ce rapport a été rédigé après mon départ du BSF. J'ai été absente pendant environ trois ans.
Depuis mon retour, nous avons examiné de près ce que nous appelons le marché des services-conseils en gestion de dettes. Comme je l'ai mentionné, il y a d'excellents conseillers en crédit au Canada. Ils sont bien formés et cherchent vraiment à défendre les intérêts des débiteurs et à les aider à trouver des solutions, et ils sont souvent réglementés par les provinces.
Cependant, il y en a d'autres qui, en fait, se trouvent dans un vide réglementaire. Ils ne sont réglementés ni par mon bureau ni par les provinces. C'est parce qu'ils ne correspondent pas à la définition des lois provinciales. Ce que nous avons constaté, c'est que dans certains cas, ces intervenants jouent un rôle d'intermédiaire entre le débiteur et le syndic autorisé en insolvabilité. Ils parlent de défendre les intérêts du débiteur, mais leur véritable modèle d'affaires consiste essentiellement à amener le débiteur devant le syndic autorisé en insolvabilité pour déposer une proposition de consommateur.
Ce que nous avons observé, c'est que ce n'est pas toujours avantageux pour les parties en cause. Comme vous l'avez mentionné, le débiteur n'obtient pas toujours toute l'information, et les créanciers recouvrent parfois moins que dans d'autres dossiers.
C'est quelque chose que nous continuons d'examiner. C'est un projet à plusieurs volets. Nous allons nous pencher de près sur les SAI et nous assurer qu'ils savent que leurs obligations sont énoncées dans la loi, qu'ils doivent les respecter et que, s'ils ne le font pas, il y aura des conséquences.
Nous voulons aussi travailler avec les provinces. C'est un travail difficile, mais nous voulons lancer ce projet pour voir si nous pouvons combler les lacunes de ces dispositions législatives.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais simplement réitérer, madame Lang, à la suite de la question d'Elizabeth May, qu'il serait très utile pour nous d'avoir les solutions internationales que d'autres pays ont apportées, en raison de ce qui devient chronique au Canada. Le niveau d'endettement des familles est incroyablement élevé. Les profits du secteur bancaire sont incroyablement élevés. Je pense que les gens se rendent compte que c'est la politique du gouvernement qui met cette concentration de richesse entre les mains de quelques personnes. Les 1 % de Canadiens les plus riches ont autant de richesse que les 80 % au bas de l'échelle. Il y a là un problème. Il est certain que les 20 % les plus pauvres ont à peine 1 % de la richesse du pays. Voilà, en résumé, pourquoi tant de gens viennent vous voir.
Je m'intéresse aux facteurs que vous avez mentionnés plus tôt, qui ont été mentionnés de façon plus anecdotique, semble-t-il, en ce qui concerne les motifs des dossiers d'insolvabilité. Si je me souviens bien, 23 % étaient attribuables à des raisons médicales, qui pouvaient être une maladie ou une invalidité de longue durée, et 15 % à une séparation. Nous savons tous que cela peut coûter très cher aux familles. Dans l'ensemble, 38 % ou presque 40 % des faillites sont causées par des circonstances indépendantes de notre volonté. C'est un fait très intéressant. Nous aimerions avoir plus d'information.
L'autre chose sur laquelle nous aimerions nous pencher, c'est le nombre de consommateurs qui ont des relations à taux d'intérêt élevé avec leur banque, des entreprises de prêts sur salaire ou des sociétés émettrices de cartes de crédit. Nous n'avons pas du tout vu les banques ajuster leurs taux. En fait, elles ont engrangé des profits de 5 milliards de dollars jusqu'à maintenant dans le cadre de cette pandémie, ce que beaucoup de gens considèrent comme ignoble. Tout le monde est censé faire sa part, plutôt que de profiter des immenses largesses du gouvernement fédéral.
Avez-vous des chiffres sur le pourcentage de consommateurs et de petites entreprises qui sont victimes du taux d'intérêt élevé qui est basé sur votre cote de crédit, ce qui est vraiment une façon de gruger le public? Il est certain que les entreprises de prêt sur salaire, comme vous l'avez mentionné, avec un taux d'intérêt pouvant atteindre 700 %, sont un triste exemple de ce qui se passe sans que le gouvernement n'intervienne. Avez-vous une idée du type de consommateurs et de petites entreprises qui sont assujettis à ces taux d'intérêt élevés qui contribuent à leur faillite?