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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HUMAN RESOURCES DEVELOPMENT AND THE STATUS OF PERSONS WITH DISABILITIES

COMITÉ PERMANENT DU DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 1er novembre 2001

• 1103

[Traduction]

La présidente (Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.)): Je vous souhaite la bienvenue à la 37e, séance du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées.

Nous accueillons aujourd'hui des témoins intéressants qui ont réalisé une merveilleuse étude intitulée Mesurer la qualité de vie: L'utilisation des retombées sociales par les parlementaires.

C'est toujours un plaisir de recevoir des collègues parlementaires comme témoins. Je veux en particulier souhaiter la bienvenue à la Dre Carolyn Bennett et à John Williams.

Notre premier témoin aujourd'hui est Richard Paré, de la Bibliothèque du Parlement. Richard, je vous souhaite la bienvenue au comité. Je sais que vous avez une déclaration liminaire à nous présenter.

M. Richard Paré (bibliothécaire parlementaire): Merci, madame la présidente.

Madame la présidente, membres du comité,

[Français]

étant bibliothécaire parlementaire, j'ai accepté avec plaisir l'invitation du comité, et cela pour plusieurs raisons.

[Traduction]

Permettez-moi d'abord de passer en revue les services que la Bibliothèque du Parlement offre aux parlementaires.

• 1105

Vous êtes tous au courant de l'aide que la bibliothèque offre à des comités comme le vôtre ainsi qu'aux députés et aux sénateurs. Il est possible cependant que vous connaissiez moins notre mandat plus général, qui consiste à permettre aux parlementaires de trouver des connaissances et des renseignements pertinents et actuels.

À cet égard, la bibliothèque a organisé une série de séminaires, une sorte d'université sur la Colline, pour donner aux parlementaires de tous les partis et à leur personnel la possibilité d'obtenir des renseignements et d'échanger des vues sur des questions de politique publique, dans le cadre de diverses manifestations, comme des conférences, des panels, des réunions de groupes de réflexion, etc.

Vous entendrez aujourd'hui ceux et celles qui ont participé à notre première série de séminaires, qui a pris la forme de tables rondes visant à étudier en détail le sujet suivant: Mesurer la qualité de vie: L'utilisation des retombées sociales par les parlementaires. Les tables rondes de cette série ont montré les résultats positifs qui peuvent découler de la collaboration entre partenaires du Parlement et du gouvernement.

Je voudrais, à cet égard, souligner la contribution de nos partenaires, le Bureau du vérificateur général du Canada, Statistique Canada et le Secrétariat du Conseil du Trésor. Je voudrais également mentionner le travail d'organisation des tables rondes réalisé par Donald Lenihan, du Centre pour la collaboration gouvernementale.

Ces tables rondes ont été un modèle de forum neutre, dans le cadre duquel un grand nombre de parlementaires, d'universitaires, de fonctionnaires et d'experts de la politique publique se sont rencontrés pour étudier les moyens de recourir à de nouveaux outils de gouvernance pour aider les parlementaires à travailler plus efficacement au service de tous les citoyens.

Je ne sais pas s'il existe au ciel un lien spécial entre saint Paul et saint Albert, mais je ne peux pas penser à un succès plus grand que celui qu'ont remporté les tables rondes grâce à la contribution de la Dre Carolyn Bennett, députée de St. Paul's, et de M. John Williams, député de St. Albert. Ces deux éminents parlementaires ont coprésidé les tables rondes et ont conjointement rédigé le rapport publié par la Bibliothèque du Parlement et le Centre pour la collaboration gouvernementale.

Je tiens également à mentionner la contribution de Bill Young, analyste principal à la Direction de la recherche parlementaire de la Bibliothèque.

Je crois savoir que ce rapport sera distribué à tous les représentants élus du pays. Je peux pour ma part vous assurer que la Bibliothèque diffusera largement l'information concernant la publication de ce rapport.

[Français]

En terminant, je tiens à remercier les membres du comité de l'occasion qui m'est fournie de présenter ce rapport et de discuter de ses conclusions.

[Traduction]

Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci.

Notre témoin suivant est Donald G. Lenihan, directeur du Centre pour la collaboration gouvernementale. Je vous souhaite la bienvenue, monsieur.

[Français]

M. Donald G. Lenihan (directeur, Centre pour la collaboration gouvernementale): Merci beaucoup, madame la présidente. J'aimerais vous remercier de l'occasion qui m'est offerte de présenter le rapport.

[Traduction]

Je voudrais vous remercier de l'occasion que vous me donnez de dire quelques mots au nom du Centre au sujet de sa participation à ce projet. Je voudrais parler, dans les quelques minutes dont je dispose, de l'origine du projet et de la façon dont il s'inscrit dans les grands changements qui nous entourent.

Permettez-moi tout d'abord de dire que ce rapport, comme Richard l'a noté, sera distribué à 8 000 à 9 000 personnes, un peu partout dans le pays. Il fait partie d'une série intitulée Changing Government, dans laquelle il s'inscrit particulièrement bien.

Le contexte gouvernemental est en train de changer rapidement et radicalement sous nos yeux. On peut penser à la mondialisation, à la mobilité des populations, à la révolution des technologies de l'information, etc. et tout dernièrement, au 11 septembre. Je ne crois pas qu'il y en ait parmi nous qui sachent vraiment où cela nous mènera, mais nous reconnaissons tous, je pense, que le monde évolue et que le gouvernement et la gouvernance doivent évoluer en parallèle.

Bref, le monde devient plus interdépendant, ce qui crée de nouveaux défis pour le gouvernement. Cela nous ramène au rapport et à ce qu'il permet de réaliser.

J'ai l'impression que, depuis dix ans, beaucoup de ces choses que nous appelons de nouveaux outils ont été mises au point par les gouvernements pour tenter de relever certains de ces défis: des partenariats de toutes sortes, intergouvernementaux, internationaux, privés ou publics, de nouveaux mécanismes de gouvernance internationale, comme l'Organisation mondiale du commerce et d'autres, ainsi que de nouveaux moyens de mesurer et d'évaluer l'utilité de nos politiques et de nos programmes. C'est de ce dernier point que notre rapport traite.

À mesure que nous commençons à nous servir de ces nouveaux outils et à comprendre ce qu'ils peuvent faire pour nous dans un monde en pleine évolution, il est extrêmement important de nous rendre compte qu'ils ont des applications tant administratives que politiques. Pour les exploiter, les rendre efficaces et les comprendre, il faut que les politiciens et les fonctionnaires se parlent et collaborent ensemble pour créer de nouveaux outils et apprendre à s'en servir dans un monde différent.

• 1110

Voilà qui nous amène finalement à ce projet particulier. Il est clair, compte tenu de la substance du rapport, que le projet représente une importante contribution. Il montre comment les outils de mesure de la qualité de vie peuvent servir tant aux politiciens qu'aux fonctionnaires, de façon qu'ils se soutiennent et se complètent mutuellement.

Fait au moins aussi important, comme Richard l'a déjà mentionné, le processus même est très différent. Ce n'est pas une réunion ordinaire de comité. C'est une occasion pour des gens de tous les partis, de la fonction publique, de beaucoup de ministères différents, des universités et d'ailleurs de s'asseoir ensemble et de se parler des moyens de créer er d'utiliser ces outils à l'avenir. Ils font vraiment partie de l'orientation future du gouvernement.

Pour terminer, permettez-moi de dire que j'ai été très heureux et très fier de participer à ce projet. Je voudrais remercier sincèrement tous mes collègues qui y ont participé aussi, et notamment nos partenaires du Conseil du Trésor, de Statistique Canada, du Bureau du vérificateur général et tout particulièrement de la Bibliothèque du Parlement, pour leur vision, et bien sûr John et Carolyn, dont la collaboration démontre que ce travail est un effort pour en arriver à un meilleur gouvernement, un excellent effort d'ailleurs.

Merci beaucoup.

La présidente: Merci.

J'étais à la recherche des auréoles. Je sais que vous les avez gardées dans vos serviettes, mais elles referont certainement surface.

Je ne sais pas laquelle ou lequel des deux, de Carolyn ou de John, parlera en premier. Vous pouvez vous taper dessus pour décider.

Je suis heureuse de donner la parole à la Dre Bennett.

[Français]

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): En tant que politiciens, nous devons tenir compte des personnes et des promesses politiques. Prenons l'exemple de la santé, de la sécurité et de la qualité de l'air. La capacité de prendre des mesures de ces phénomènes et la possibilité de demander que des comptes soient rendus n'ont jamais été aussi grandes qu'à notre époque de cynisme vis-à-vis du gouvernement.

Notre rapport dit qu'il est très important d'utiliser les nouveaux outils de gouvernance pour aider les parlementaires à participer plus directement à l'élaboration des politiques, pour stimuler le débat parlementaire, pour augmenter l'apport des citoyens aux débats publics et pour améliorer la responsabilisation.

[Traduction]

Ce matin encore, au Comité des finances, Kathleen Connors, de la Fédération nationale des syndicats d'infirmières/infirmiers, a cité l'affirmation du Dr Gord Guyatt selon laquelle les dépenses de santé du gouvernement de l'Ontario sont passées de 17,7 milliards de dollars en 1995 à 18,4 milliards en 2001, ce qui représente une augmentation de 3,8 p. 100. Ensuite, ils se sont battus, au comité, sur la question de savoir si, oui ou non, les dépenses réelles par tête ont baissé de 6,7 p. 100.

De notre côté, nous disons qu'il est vraiment démodé aujourd'hui de se battre au sujet du montant qu'on a consacré à telle ou telle chose. Nous préférons parler des résultats que nos dépenses nous ont permis d'obtenir, plutôt que de nous poser des questions pour déterminer si on n'a pas placé le logement des personnes âgées dans le budget de la santé pour pouvoir affirmer qu'on a dépensé davantage. Il y a beaucoup de cynisme au sujet de la façon dont les nombres sont manipulés. Nous voulons essentiellement que les gens visent haut et s'engagent à s'intéresser surtout aux résultats.

Il est extrêmement important que les citoyens soient consultés sur ce qui leur redonnerait confiance dans le système de santé, sur la façon de fixer les objectifs et de progresser pour les atteindre.

M. John Williams (St. Albert, Chambre des communes, Alliance canadienne): Merci, docteure Bennett.

Si vous me permettez de poursuivre, madame la présidente, je dirai que ce rapport quitte les sentiers battus et établit une nouvelle façon de penser dans le domaine de la mesure de la qualité de vie. Il élargit les paramètres.

J'ai fait inscrire au Feuilleton depuis un certain temps un projet de loi d'initiative parlementaire qui imposerait que tous les programmes soient évalués. Tout d'abord, quel aspect de la politique publique le programme est-il conçu pour réaliser? Une fois cela établi, dans quelle mesure le programme atteint-il ses objectifs?

Toutefois, mesurer la qualité de vie est un paramètre beaucoup plus étendu. Au lieu de prendre un programme particulier pour mesurer ses répercussions sur la société, nous croyons que le gouvernement devrait considérer un aspect beaucoup plus vaste de la société, comme son bien-être, par exemple. Le programme est-il propice au bien-être des citoyens? Est-il d'une qualité suffisante pour que nous en soyons satisfaits ou bien faut-il l'améliorer?

• 1115

Si ces améliorations peuvent être réalisées... Elles ne s'inscrivent pas nécessairement dans le domaine de la santé. Peut- être y a-t-il un règlement environnemental qu'il conviendrait d'améliorer. Plus tôt aujourd'hui, je me suis servi de l'exemple des étangs bitumineux de la Nouvelle-Écosse, qui constituent un problème environnemental touchant la santé et qui mettent bien sûr en cause des compétences provinciales et fédérales et une foule de ministères. Il s'agit pourtant d'un petit problème très régional et très local.

Si l'on envisage des problèmes d'envergure nationale, comme le bien-être de la population—je ne parle pas de santé, mais de bien- être—, on commence à se rendre compte de la complexité de la question. Toutefois, malgré cette complexité, nous devrions quand même être disposés à nous interroger sur ce que nous pouvons faire pour veiller au bien-être de nos citoyens. S'il y a des lacunes, comment y remédier? Est-ce que les programmes conçus pour remédier aux lacunes correspondent bien à ce que veut la société et à ce qu'elle est disposée à payer? Parce qu'il y a toujours un équilibre à établir entre ce qu'on paie et ce qu'on reçoit.

Ce que nous essayons de faire grâce à ce rapport, c'est amener les gouvernements, les ministères, les universités et d'autres à penser selon ce schéma pour aboutir à des conclusions. Ces dernières devraient faire partie du débat de politique publique portant sur l'élaboration des programmes et non servir la veille des élections pour permettre à un gouvernement de dire qu'il propose un nouveau programme et qu'il y consacrera tant ou tant d'argent au profit des Canadiens. Comme la Dre Bennett vient de le dire, cela ne constitue plus une utilisation intelligente de l'argent des contribuables.

Il faudrait dire plutôt qu'on veut dépenser de l'argent au profit des Canadiens parce qu'il existe une lacune dans un domaine particulier et qu'en fonction des recherches et des analyses effectuées, tel ou tel programme bien conçu va remédier à cette lacune touchant la société. C'est un exercice beaucoup plus complexe, mais il donne aux parlementaires les connaissances de base nécessaires pour débattre une question et discuter des avantages et des inconvénients, de façon à échapper au simple débat partisan pour engager une discussion intellectuelle sur les meilleurs moyens d'utiliser l'argent des contribuables au profit des Canadiens. Je crois que cela résume assez bien le contenu du rapport.

Mme Carolyn Bennett: Lorsque nous considérons les dépenses publiques, nous devons nous rendre compte que beaucoup de nos indicateurs de qualité de vie ou de nos indicateurs sociaux sont en réalité des objectifs à long terme. Des objectifs qu'il ne suffit parfois pas d'évoquer d'une élection à l'autre. Cela ne se limite d'ailleurs pas aux dépenses gouvernementales. Le secteur privé a un rôle à jouer, tout comme le secteur bénévole et les particuliers.

Ainsi, si nous définissons certains objectifs reflétant la qualité de vie que nous souhaitons pour les Canadiens, nous devons nous interroger sur les moyens de veiller à ce qu'il y ait des politiques gouvernementales cohérentes pour les atteindre. Nous pouvons nous servir du régime fiscal ou d'autres moyens d'encourager ce que nous croyons être des comportements favorables pour les entreprises privées, pour le secteur bénévole—de bons programmes donnant de bons résultats—et aussi pour les simples particuliers.

Nous avons ainsi un secteur public noyé dans la société civile, mais nous finissons par nous retrouver face au problème qui se pose à chacun d'entre nous. Comme vous pouvez le voir dans la deuxième partie du rapport, qui traite de gouvernement vertical et horizontal, on procède à des mesures dans les «silos» du gouvernement, mais notre but est de faire passer ces mesures à l'échelle horizontale qui ne s'inscrit pas nécessairement dans les limites d'un seul ministère. Il y a donc le problème des silos, c'est-à-dire du cloisonnement, aux différents paliers de gouvernement, ensuite le problème des trois paliers qui livrent en même temps les mêmes batailles contre la pauvreté, la violence, l'itinérance, etc.

Dans ce fédéralisme complexe, nous... Je crois que l'Entente- cadre sur l'union sociale était une tentative dans ce sens, destinée à réaliser plus de responsabilité et de transparence et à consulter les Canadiens sur la nature de leurs priorités. Mais comment, ensuite, s'assurer que nous mesurons tous les résultats de la même façon? Mes collaborateurs me disent toujours que lorsque je commence à parler en public de résultats, je perds un peu mon auditoire. Je crois que nous avons besoin de mettre de l'avant des projets comme celui-ci pour faire cesser les conversations habituelles sur la question de savoir combien on a dépensé et pour amener les Canadiens ordinaires à se demander: «Oui, mais qu'avons- nous obtenu en échange? Quelles sont les vrais résultats? Vous avez dépensé tant sur la santé, alors pourquoi les listes d'attente sont-elles toujours aussi longues? Comment se fait-il que l'état de santé des enfants autochtones soit tellement mauvais?»

• 1120

Je crois que nous vivons une période extrêmement intéressante. Au gouvernement, c'est un peu aller contre l'instinct naturel que de craindre de fixer des objectifs, parce que si on ne les atteint pas... Il y a dans l'administration une mentalité qui tend à éviter les risques, mais si nous arrivons à lancer le débat public, je crois que les Canadiens seront enchantés de se joindre à nous dans cet exercice de planification à long terme dont le but est d'améliorer la qualité de vie de tous les Canadiens.

M. John Williams: Il s'agit aussi de fournir de l'information pour alimenter le débat politique. Nous avons entendu la Dre Bennett parler des changements de comportement dans les entreprises canadiennes. À mon avis, ce n'est peut-être pas une si bonne chose après tout.

Je me souviens d'un débat sur le logement que nous avons eu au cours de l'une de nos tables rondes. Un député a dit que nous avons besoin de plus d'argent pour le logement. Un autre a répondu que nous devrions peut-être analyser les raisons pour lesquelles les gens trouvent le logement inabordable. L'information est la même, mais nous commençons maintenant un débat politique basé, dans ce cas particulier, sur notre connaissance ou notre ignorance de la situation du logement ou sur la pénurie de logements abordables. Ce sont des perceptions et des perspectives politiques qui lancent le débat.

Je crois que c'est à cela que peuvent servir les indicateurs sociaux. Ils peuvent nous donner des faits raisonnablement exacts qui nous permettent de situer le débat. Les politiciens décident ensuite de ce qu'ils veulent en faire, plutôt que de recourir à des tactiques basées sur les sentiments pour gagner quelques voix de plus en dépensant un peu plus d'argent. Cette façon de procéder n'est jamais avantageuse pour les Canadiens. Ils méritent mieux.

Je pense que c'est un bon rapport, une bonne base. Il nous fait progresser assez sensiblement. Sur le plan intellectuel, il faudra un peu de temps pour qu'on l'absorbe et qu'on l'approuve, mais je tiens à féliciter tout le monde, M. Lenihan du Centre pour la collaboration gouvernementale, la Bibliothèque du Parlement et tous les autres qui ont pris l'initiative pour nous permettre d'aller de l'avant. Je crois que c'est une bonne première étape.

Mme Carolyn Bennett: Il est maintenant temps d'écouter les mesureurs.

La présidente: Nos mesureurs sont M. Mayne et M. Norris. M. Mayne appartient à la Direction générale des opérations de vérification du Bureau du vérificateur général. M. Norris est directeur général de la Statistique démographique et du recensement à Statistique Canada.

À vous, messieurs.

M. John Mayne (directeur principal, Direction générale des opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Merci, madame la présidente. Je vous remercie de me donner l'occasion de participer à cet examen du rapport Mesurer la qualité de vie. Nous sommes heureux d'avoir pu contribuer aux tables rondes et aux discussions qui ont abouti à ce rapport.

[Français]

La communication d'une information pertinente est la pierre angulaire de la reddition de comptes et d'une saine régie. Comme nous effectuons des vérifications au nom du Parlement, il est extrêmement important pour nous que l'information qui lui est communiquée soit de bonne qualité. Le Parlement doit obtenir une information juste et fiable sur un large éventail de sujets pour être en mesure de jouer son rôle, qui consiste à évaluer avec rigueur les actions du gouvernement et à l'en tenir responsable.

Les ministères fournissent actuellement au Parlement une information considérable sur leurs programmes et services dans leur budget des dépenses. Dans le chapitre 19 du rapport de 2000 du vérificateur général, nous avons fait rapport sur ces informations et nous avons constaté qu'il y avait encore beaucoup à faire pour que la présentation d'une information d'excellente qualité au Parlement devienne monnaie courante. Néanmoins, nous avons observé des améliorations et nous nous attendons à faire état d'autres améliorations dans le rapport sur le rendement de 2001, qui sera déposé prochainement.

[Traduction]

À notre avis, ce genre d'information sur les grandes retombées sociales dont il est question dans le rapport Mesurer la qualité de vie pourraient s'ajouter à l'information plus détaillée sur le rendement que reçoit actuellement le Parlement. Elle contribuerait à situer les réalisations des ministères et des organismes dans un contexte social plus large.

• 1125

De plus, comme l'indique le rapport, une telle information préciserait les nombreuses questions horizontales qui préoccupent les parlementaires et les Canadiens, par exemple la Stratégie fédérale en faveur des personnes handicapées. Comme nous l'avons indiqué dans le chapitre 20 de l'année dernière, le gouvernement doit trouver une solution à ces questions horizontales qui touchent plusieurs ministères, ce qui représente un défi important.

Comme le souligne le rapport, ces questions peuvent aussi constituer un défi pour les membres de comités. En juin dernier, votre comité, madame la présidente, a produit un rapport instructif sur le même sujet. Dans plusieurs de nos récents rapports de vérification, nous avons fait valoir l'importance d'un examen éclairé en comité parlementaire, en tant que moyen d'encourager la communication d'une information de meilleure qualité au Parlement et un examen plus rigoureux des activités gouvernementales.

Le rapport que vous examinez aujourd'hui présente plusieurs possibilités de nouvelles mesures, dont un examen approfondi en comité du budget des dépenses. Nous invitons le comité, madame la présidente, à envisager des possibilités pouvant renforcer l'examen parlementaire.

[Français]

Je vous remercie, madame la présidente. Il nous fait plaisir de discuter de ces questions importantes avec les membres du comité.

[Traduction]

La présidente: Merci.

Monsieur Norris.

M. Doug Norris (directeur général, Statistique démographique et du recensement, Statistique Canada): Merci, madame la présidente.

Nous avons été très heureux, à Statistique Canada, de participer à cet important projet de développement d'indicateurs sociaux. Notre rôle consistait à donner des conseils et de l'aide sur la disponibilité des données faisant partie de ces indicateurs ainsi que sur leur utilisation comme base de mise au point des indicateurs en question.

Je crois que le projet a permis de réaliser d'importants gains, non seulement en fonction de ses objectifs spécifiques, mais d'une façon plus générale sur le plan de l'élaboration des indicateurs sociaux.

C'est un sujet sur lequel beaucoup de groupes travaillent actuellement. Je crois qu'il y a de nombreux points communs entre ce projet et plusieurs autres qui sont réalisés ailleurs dans le pays et aussi un peu partout dans le monde. Je pense que ce projet a sensiblement contribué à l'effort général de développement, ce qui est très important.

Je ne voudrais pas prendre du temps en ce moment pour parler de mesures précises. Nous avons appris des choses sur la façon dont nos données du recensement et d'autres enquêtes peuvent servir à élaborer des indicateurs sociaux, ce qui nous a aidé à considérer notre propre programme et à y apporter certains changements.

Je crois que je vais m'en tenir là pour le moment. Je serais heureux de répondre à toute question qu'on voudra me poser. Je vous remercie.

La présidente: Merci.

Carolyn, avez-vous des observations?

Mme Carolyn Bennett: Ma seule observation, madame la présidente, c'est que mon collègue et moi aimerions beaucoup que les membres du comité lisent attentivement le rapport pour nous dire s'ils peuvent envisager de le faire déposer à la Chambre.

La présidente: C'est certainement une question que nous examinerons plus tard. Même si nous le voulions, nous ne pourrions pas le faire aujourd'hui parce qu'il n'y a pas quorum. Mais nous y penserons sûrement.

Je vais maintenant demander à M. Peschisolido...j'espère que j'ai correctement prononcé. J'avais manqué la séance au cours de laquelle vous aviez aidé tous les députés.

Merci. À vous.

M. Joe Peschisolido (Richmond, Alliance canadienne): Merci beaucoup, madame la présidente.

Je voudrais remercier chacun ici pour cette magnifique entreprise, en particulier la Dre Bennett et M. Williams, qui vient de partir.

J'ai toujours été frappé par la complexité de la politique publique. Au cours des campagnes et dans la confusion qui règne parfois dans le monde de la politique, nous avons tendance à oublier les dédales et les méandres de la politique publique. Je vous félicite du travail que vous avez fait pour surmonter ces complexités et pour en arriver à quelque chose de clair.

Je crois qu'il y a deux grandes questions à aborder. D'abord, comment élargir le débat? Je pense qu'en définitive, c'est une question politique dans le cadre de laquelle on oblige les politiciens à agir, comme vous l'avez mentionné, docteure Bennett, en forçant la société civile à considérer les résultats. Mon deuxième point porte sur les outils réels à utiliser pour s'occuper de questions telles que la déficience, le logement et d'autres aspects importants de la politique publique.

Cela étant dit, j'ai deux questions à poser. La première ne s'adresse à personne en particulier. J'aimerais tout simplement avoir une réponse. Comment faire pour élargir le débat et l'étendre à l'ensemble du domaine politique pour que de plus en plus de personnes et d'organisations commencent à parler ce langage? Ensuite, y a-t-il des changements particuliers que vous ayez faits ou des outils précis que vous ayez considérés qui permettraient d'examiner ces questions horizontales chevauchant les ministères et les secteurs de compétence? Cette question s'adresse plus particulièrement à M. Norris ou M. Mayne.

• 1130

Mme Carolyn Bennett: Pour ce qui est des prochaines étapes, l'annexe 1 présente certaines des options que nous avons envisagées.

S'il y a des choses que ce comité peut faire pour nous aider à progresser, je crois que ce serait vraiment important. Nous croyons vraiment que si le Parlement exerce son pouvoir d'étudier les questions horizontales—c'est quelque chose que le vérificateur général a noté avec une grande satisfaction dans le chapitre 20 de son rapport de l'année dernière, à cause de la difficulté que cela comporte—ce serait l'endroit le plus indiqué pour convoquer les différents ministres et voir ce qu'il convient de faire.

Je pense en outre que toutes sortes de gens se sont mêlés de mesurer les choses de différentes façons. Le Conseil du Trésor a 17 mesures. Considérons aussi ce qui arrive quand les Nations Unies s'occupent de calculer des moyennes. Eh bien, le Canada passe de la première à la troisième place. Il s'agit d'une moyenne des indicateurs, mais est-ce que les indicateurs se prêtent au calcul d'une moyenne? Je ne crois pas vraiment que nous sachions si un aspect est important tandis qu'un autre l'est moins. Comment déterminer ce que cela signifie? Comment pouvons-nous faire, au Canada, pour mesurer de la même façon des listes d'attente et d'autres choses pour que les gens comprennent vraiment ce qu'on leur dit? Il existe une science pour le faire. Les spécialistes des sciences sociales devraient s'entendre sur des solutions pour que les parlementaires soient au courant.

Sur le plan politique, je crois que vous avez raison. Si nous promettons des rues plus sûres, des collectivités en meilleure santé, un air plus propre, etc., comment dire à nos électeurs que nous l'avons fait, ou bien que nous n'avons pas pu le faire pour telle et telle raison, mais que nous allons continuer à faire des efforts? Je suis peut-être une idéaliste, mais je pense que l'honnêteté est à l'ordre du jour. Nous pouvons dire: j'ai essayé, mais je n'ai pas réussi.

Nous devons évoluer. Dans une culture d'apprentissage exempte d'erreur—nous en parlons dans le rapport—, on peut évoluer. Les pilotes de ligne l'ont fait. Ils perdent leur permis non seulement s'ils font une erreur, mais aussi s'ils omettent de signaler une erreur. Les médecins devraient également évoluer vers une culture dans laquelle on admet qu'on a fait une erreur et on montre qu'on a changé le système de façon qu'il ne soit plus possible de répéter la même erreur.

En politique, j'espère qu'il viendra un jour où nous pourrons dire: nous avons essayé cette formule, mais elle n'a pas marché, alors nous reprenons à zéro parce que le gouvernement a adopté une nouvelle culture d'apprentissage. On cesse ainsi de «se faire prendre». J'ai été très heureuse de collaborer avec John Williams dans ce projet parce que cela nous aidera, au niveau du comité, à nous débarrasser au moins partiellement de toutes ces questions partisanes. Si nous visons tous le même but, nous devons faire preuve d'une plus grande honnêteté, reconnaître qu'il n'y a pas de gouvernement parfait et être disposés à essayer certaines choses plutôt que d'autres.

Vous voudrez peut-être parler des outils.

M. John Mayne: Je n'ai pas grand-chose à ajouter, madame la présidente. Si, comme le comité l'a fait, le gouvernement pouvait se concentrer sur les principales questions horizontales, s'il était possible de créer un système de comités et de sous-comités pour examiner les possibilités, il serait peut-être possible d'avancer. Comme nous l'avons signalé dans le chapitre mentionné par la Dre Bennett, cela a des incidences sur la façon dont les gens de l'administration vont réagir parce qu'ils ont les mêmes problèmes que les comités quand il faut s'attaquer aux nombreuses questions horizontales qui se posent dans la plupart des ministères. Il n'est pas facile de trouver des solutions permettant de se concentrer sur ce genre de questions. Le rapport ainsi que le travail de votre comité ont déjà donné une idée des moyens possibles d'agir, mais il faudrait pouvoir en faire plus.

La présidente: Monsieur Lenihan.

M. Donald Lenihan: Je voudrais poursuivre dans la même veine que John Mayne pour répondre plus précisément à votre question concernant les outils à utiliser pour étudier les questions dites horizontales, c'est-à-dire les problèmes qui chevauchent plusieurs secteurs et semblent s'étendre partout. C'est un sujet qui est constamment revenu sur le tapis au cours des tables rondes. La discussion a été vraiment intéressante, comme en témoigne le rapport.

• 1135

J'ai l'impression qu'il y a ici deux choses vraiment fondamentales. L'une d'elles, c'est le langage. Si vous parlez à des gens dans la rue—je suppose que c'est quelque chose que vous faites souvent dans votre métier—, vous vous êtes sûrement aperçu que les gens ne parlent pas la même langue que le gouvernement. Ils parlent la langue naturelle de la politique. Ils veulent un air plus pur, une plus grande sécurité, davantage de services pour les personnes handicapées, etc. Ils ne découpent pas les choses en petits morceaux. Ils ont un point de vue holistique—j'aurais préféré éviter ce mot affreux—et c'est ainsi que se présente essentiellement le langage naturel de la politique.

Si l'on passe du côté du gouvernement, les choses sont découpées en tout petits morceaux: ainsi, ce qui était un problème de déficience se transforme en un grand assortiment de choses différentes dans tout un éventail de ministères différents. Par souci d'équité envers le gouvernement—je suis en fait un ami du gouvernement—, je dois dire qu'il y a beaucoup de bonnes raisons pour qu'il en soit ainsi, et aussi quelques mauvaises.

Tout ce que je peux dire, c'est que pour améliorer le gouvernement, il faudrait trouver un moyen de rapprocher ces deux situations. Nous commençons avec le langage et, comme Carolyn l'a dit, l'insistance sur les résultats est le langage naturel de la politique. C'est le langage naturel de la politique publique. Ne serait-ce que pour cette raison, nous devrions insister sur les résultats pour être en mesure de communiquer les uns avec les autres. C'est une chose dont nous nous soucions tous beaucoup.

Une voix: Nous...?

M. Donald Lenihan: Le second point est que, s'il est vrai que le langage nous amène à examiner les résultats et les choses que nous comprenons et dont nous nous soucions ordinairement, il est également vrai que nous avons besoin d'une structure pour nous organiser. Les comités et les ministères sont tous organisés autour de différentes choses, comme des mandats découpés en petits morceaux. Encore une fois, il y a de bonnes raisons à cela. Le Parlement a un comité pour le développement des ressources humaines, un autre pour le patrimoine canadien. C'est ce que je veux dire par le découpage en petits morceaux.

Nous avons peut-être besoin d'un second niveau, un autre moyen d'organiser les comités et les activités correspondantes. C'est encore une fois l'idée des résultats. Si nous nous concentrons sur les résultats visés, nous arriverons peut-être à persuader les gens de centrer leurs activités autour de ces résultats. Nous aurions ainsi un moyen beaucoup plus efficace de surmonter le cloisonnement tout en continuant à travailler à l'intérieur des «silos». Voilà le truc.

La présidente: Monsieur Norris.

M. Doug Norris: Je voudrais peut-être ajouter un commentaire concernant les mesures. Notre travail sur les indicateurs sociaux a sûrement modifié notre façon de mesurer et de faire des enquêtes. Aujourd'hui, on insiste sûrement beaucoup plus sur la question des résultats et sur ceux d'entre eux qu'il importe de mesurer dans une enquête.

De plus, nos enquêtes ont une plus grande portée et sont plus horizontales. Je pense en particulier à l'enquête sur les enfants, qui ne se limite pas du tout aux enfants puisqu'elle s'étend à leur famille, à leur voisinage, à leur classe et à toute leur école. En même temps, nous examinons les incidences de chacune de ces dimensions sur ce qui arrive aux enfants.

Enfin, il y a eu un grand changement dans le domaine des mesures: c'est la transition vers les enquêtes longitudinales qui suivent les mêmes personnes pendant une longue période. Encore une fois, l'enquête sur les enfants en est un bon exemple. Nous essayons ainsi de déterminer ce qui engendre vraiment des résultats positifs.

La présidente: Merci.

[Français]

Madame Folco, vous avez la parole.

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Merci, madame la présidente. Je m'excuse, mais je ne pensais pas que c'était mon tour.

Je remercie ma collègue, le docteur Bennett, d'être venue aujourd'hui. Je dois vous avouer que j'ai lu votre rapport assez rapidement, madame Bennett, mais j'ai certainement l'intention de le relire plus en profondeur.

La section 1.6 de votre rapport est intitulée: «Qu'est-ce que cela veut dire pour les parlementaires?» D'une part, l'orientation que vous voulez donner est une orientation qui peut servir facilement les organismes non gouvernementaux, et c'est très bien ainsi.

D'autre part, comme parlementaires et politiciens, nous avons, j'espère, les mêmes objectifs que les ONG en ce qui regarde la société, mais nous utilisons peut-être d'autres moyens de réaliser ces objectifs.

Je me demandais, à la lecture de ces paragraphes qui, pour moi, sont assez vagues, je dois l'avouer, si vous pouviez, d'une part, nous donner une idée de la façon dont nous pourrions travailler pour réaliser les objectifs que vous énoncez et, d'autre part, nous donner des exemples concrets de ce que vous voulez dire dans la section 1.6.

[Traduction]

Mme Carolyn Bennett: Je crois que, dans le cas des parlementaires, les choses commencent par les promesses électorales. Comment démontrer que vous avez fait ce que vous avez promis aux électeurs de faire, qu'il s'agisse d'une population en meilleure santé ou d'autre chose?

• 1140

Si nous pouvions passer à l'étape suivante, qui consiste à définir un ensemble d'objectifs comme il y en a dans les politiques cohérentes du gouvernement et même des ONG... J'espère bien qu'il y a des ONG qui s'efforcent d'améliorer certains résultats. Nous devrions pouvoir trouver des moyens de mesurer ces résultats. L'exemple que nous utilisons souvent sur le plan du financement est celui du programme antitabac de la Californie. Si le club antitabac de la Légion n'a jamais réussi à persuader un fumeur de cesser de fumer, il serait normal de lui couper son financement, n'est-ce pas? Il est très clair que c'est la décision qu'il faut prendre lorsqu'une organisation ne s'acquitte pas de son mandat.

J'espère que nous en arriverons à une bien plus grande collaboration entre le secteur public, le secteur bénévole et le secteur privé pour la définition des objectifs et des moyens de les mesurer. C'est une mission conjointe. J'espère que cela peut également se faire dans les comités parlementaires. Comment dire quels résultats nous voulons obtenir? Quels sont les résultats qui, à notre avis, sont les plus importants à mesurer? Qu'allons-nous utiliser pour les mesurer? Avons-nous un consensus entre les mesureurs, les ONG et la société civile sur ce qu'il faut mesurer, c'est-à-dire sur les choses qui comptent vraiment pour les gens?

Il est évident que, pour moi, la confiance que les Canadiens placent dans leur système de santé est extraordinairement importante. Je crois que c'est la seule protection que nous ayons contre un système à deux niveaux. Quelles mesures permettraient aux Canadiens de savoir que le système fonctionne vraiment? Est-ce le résultat après une crise cardiaque? Qu'est-ce que les Américains obtiennent que les Canadiens jugent supérieur à ce qu'ils ont ici? Voilà la vraie consultation pour les parlementaires, non seulement avec la société civile, mais aussi avec les ONG.

[Français]

Mme Raymonde Folco: Puis-je continuer?

[Traduction]

Ce que vous dites signifie qu'à l'heure actuelle, il n'y a pas de vraies consultations entre le Parlement, les ONG et la société civile. C'est votre hypothèse. Si vous dites que nous avons besoin de vraies consultations, vous sous-entendez qu'il n'y en a pas actuellement.

J'ai pourtant l'impression que les consultations se multiplient et que nos contacts avec les ONG influent de plus en plus sur les décisions qui se prennent au Parlement. N'êtes-vous pas de cet avis? En quoi pensez-vous que cela puisse être amélioré?

Mme Carolyn Bennett: De deux façons. D'abord, on a convenu, dans une entente-cadre, de consulter les Canadiens sur leurs priorités. Je ne crois pas que nous le faisons de la bonne façon. Les groupes de travail fédéraux-provinciaux-territoriaux ont été proches des intervenants, même dans le cas du programme des enfants ou du programme de santé. La société civile se sent exclue de l'entente entre les provinces et le fédéral sur la structure de compte rendu. Nous ne faisons pas ce qu'il faut.

Votre ministre a été remarquable en laissant à notre comité de la condition des personnes handicapées le soin de trouver les résultats que la communauté des personnes handicapées acceptera comme indicateurs de la qualité des services dispensés. Je m'inquiète cependant de voir beaucoup de consultations aller de silo en silo, avec les ONG et les groupes de référence d'un ministère ou de l'autre. Je ne crois pas que cela suffise. J'espérais que la consultation s'étendrait aux questions horizontales et utiliserait efficacement le Parlement. Le genre de consultation qui se fait quand on examine des questions horizontales est très différent de celui qui a lieu dans les ministères au niveau du silo, c'est-à-dire au niveau des aspects très précis dont chaque ministère est responsable.

Si, comme Peter Newman l'a dit, la politique est l'art de rendre possible ce qui est nécessaire, alors le fait de déterminer ce qui est nécessaire devient inévitablement une décision politique. Ce n'est pas une décision de fonctionnaires. Par conséquent, le genre de consultation qu'il y a avec les ONG et la société civile est une question différente.

• 1145

Comme parlementaires, nous devrions demander: Qu'est-ce que vous voulez? Quel indicateur de qualité de vie est nécessaire? De leur côté, les fonctionnaires devraient demander: Comment allons- nous dispenser ce service? Comment allons-nous le mettre en oeuvre? C'est évidemment un genre différent de consultation.

La consultation qui se fait dans la fonction publique peut parfois sembler excessive pour les Canadiens, qui se demandent pourquoi ils sont consultés deux fois sur ce qu'ils veulent. Nous devons renforcer le rôle du Parlement dans le cadre des questions portant sur le genre de société que les Canadiens souhaitent, sur leurs priorités et sur leur confiance dans la cohérence des moyens de mesure. Que faut-il penser des mesures effectuées par le Fraser Institute dans le domaine des listes d'attente? Pourquoi leur accorde-t-on tant de crédit quand l'institut peut mesurer cinq fois la même personne parce que son nom figure sur cinq listes d'attente différentes? C'est une mauvaise méthodologie, et il faut le dire clairement aux Canadiens parce que le Parlement a pris position en affirmant qu'il ne tolérerait plus les mesures mal conçues.

La présidente: Madame Folco, très brièvement.

Mme Raymonde Folco: J'ai l'impression que les Canadiens nous ont dit ce qu'ils voulaient dans le domaine de la santé, par exemple. La majorité des Canadiens veulent un bon système de santé, c'est-à-dire, pour certains d'entre nous, le système que nous avions il y a quelques années. Si la question est de savoir ce que notre société souhaite dans ce domaine, je crois que nous le savons très clairement. Je ne vois pas la nécessité d'aller encore une fois demander aux gens ce qu'ils veulent. Bien sûr, il y aura toujours dans la société des gens aisés qui préféreront un système de santé à deux niveaux, parce qu'ils seraient alors avantagés. Mais si l'on considère l'ensemble de la société, je crois que la réponse à la question sera assez uniforme. Pourquoi avons-nous besoin de poser la question encore une fois? Je ne suis pas sûre de vous avoir bien comprise.

La présidente: Très brièvement.

Mme Carolyn Bennett: La Loi canadienne sur la santé ne mentionne la mesure de la qualité que dans le préambule. Lorsque nous parlons de transférabilité, d'accessibilité et de toutes ces choses, nous supposons qu'il s'agit de soins de haute qualité. Il est cependant possible de s'en tirer en dispensant des soins de seconde catégorie dans certaines régions. Nous avons besoin de déterminer les taux de réadmission pour connaître la valeur des soins à domicile. Nous devons effectuer des mesures très sérieuses sur les tables fédérales-provinciales pour nous assurer qu'on nous ne trompe pas en parlant d'accessibilité. Accessibilité signifie recevoir des soins au moment voulu.

Que signifie au juste l'expression au moment voulu? En Nouvelle-Zélande, le nouveau commissaire à la santé et à la déficience a établi des règles très sérieuses sur le caractère opportun des soins. Si nous pouvons montrer aux Canadiens qu'il existe à ce sujet des normes fondées sur des mesures de la qualité ou sur l'administration de médicaments non contre-indiqués... Parmi les personnes âgées, 30 p. 100 des hospitalisations sont dues à des interactions entre médicaments. Ces situations occasionnent un important gaspillage, alors qu'on peut les prévenir. Nous pouvons en faire beaucoup pour augmenter la confiance que les Canadiens ont dans leur système. Nous avons beaucoup de gens qui s'agitent en essayant de prouver que notre système de santé est affligé de problèmes vraiment très graves, mais nous pouvons rebâtir la confiance de la population dans le système.

La présidente: Merci.

Madame Guay.

[Français]

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Merci, madame la présidente. J'aimerais féliciter toute l'équipe pour son rapport. Je n'ai pas eu le temps, moi non plus, de tout le lire, mais je m'engage à le faire au cours des prochaines heures.

Vous parlez de juridictions. Cela m'inquiète un peu, parce que la santé est de juridiction provinciale. Quand on parle des enfants et de l'éducation, on parle d'une juridiction qui est entièrement provinciale.

Je me demande si, dans votre rapport, vous avez tenu compte du travail qui se fait dans certaines provinces. Vous parlez de mesurer l'efficacité de certains programmes, de certaines politiques en matière de santé et de politiques de services de soins à domicile. Toutes ces politiques sont instaurées par les gouvernements des provinces.

Je m'inquiète. Assisterons-nous à un autre dédoublement ou vise-t-on plutôt à mettre sur pied des initiatives complémentaires de ce qui se fait déjà dans les provinces? En tiendra-t-on compte, et est-on prêt à travailler conjointement? On ne peut pas refaire ce qui a déjà été fait. Il est très coûteux d'instaurer des politiques de ce genre.

Il faudrait peut-être se servir de ce qui se fait de bon présentement et voir s'il est possible de mettre ces mesures en oeuvre ailleurs.

• 1150

J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet et je vous poserai d'autres questions par la suite.

[Traduction]

Mme Carolyn Bennett: Vous avez parfaitement raison. Vous pouvez voir dans le rapport que deux des provinces ont procédé de bas en haut pour faire ces mesures. Terre-Neuve et le Labrador ont vraiment décidé de se concentrer sur cette question de mesures.

À part cela, nous pensons vraiment, qu'on parle des garderies du Québec ou... Je trouve vraiment que les importants résultats sociaux positifs de cette initiative constituent un bon exemple. On a également constaté que les cancéreux de la Colombie-Britannique se portent généralement mieux que ceux des autres régions du pays.

Si nous mesurons tous de la même façon, nous pourrons prendre les pratiques exemplaires de certaines régions pour les appliquer dans tout le pays. C'est une perspective très intéressante. Même au niveau international, qu'il s'agisse des normes ISO de gestion des usines ou d'autre chose, il y a des moyens d'établir des normes permettant d'effectuer des mesures. Si nous pouvions le faire adéquatement au Canada, nous aurions beaucoup à partager avec le monde en prenant, comme vous le dites, ce qui se fait remarquablement bien dans une région pour l'étendre au reste du pays et au reste du monde.

[Français]

Mme Monique Guay: Madame Bennett, je vais vous donner un exemple qui m'a fait sourire. Le Conseil national du bien-être social a produit un rapport. Il y a un manque au niveau du logement social. Au Québec, entre autres, il existe une autre politique. On paie une partie du loyer à certains propriétaires pour que les gens puissent se loger à des prix qu'ils peuvent payer. Quand on reçoit de l'aide sociale, on n'a pas beaucoup de moyens. Dans l'étude dont je viens de parler, il était écrit que pour sortir les gens de la pauvreté, les garderies à cinq dollars étaient peut-être un excellent outil. En effet, pour un petit salarié qui a des enfants et qui peut bénéficier du programme, c'est absolument extraordinaire.

Nous nous rejoignons donc. Cette étude a été réalisée par le Conseil national du bien-être social et elle affirme que cette mesure, qui ne vient pas du gouvernement du Canada, aide à sortir les gens de la pauvreté.

Si vous adoptez cette philosophie, je pense qu'il s'agit d'une excellente idée. Ces outils peuvent servir à tous et à toutes, à toutes les provinces et au Canada.

J'aimerais aborder un dernier point. Il s'agit de toute la question de la politique et de la partisanerie politique. Nous sommes tous des élus de partis différents. Il n'est pas facile de s'entendre, bien que dans les comités et les sous-comités, on ait réussi à présenter des rapports unanimes. Je trouve extraordinaire qu'on réussisse à faire ce genre de travail, à ne pas s'arracher les cheveux sur la tête, et à faire des choses constructives. Cela n'est pas toujours facile, car il y a parfois une ligne de parti à suivre ou une élection qui approche. Comment fait-on pour contourner cela? Avez-vous des suggestions qui pourraient nous aider à voir les choses à plus long terme, plutôt qu'à court terme? Après deux ou trois ans, on se relance en élection. Il n'est pas toujours facile de pouvoir fonctionner ainsi.

Il faudrait pratiquement retirer ces dossiers du monde politique, mais cela n'est pas non plus souhaitable parce nous représentons la population. Il faut donc qu'il y ait un lien qui se fasse et je me demande comment y arriver. Comment peut-on élargir le débat? J'aimerais savoir aussi quelle est la prochaine étape pour vous, après ce rapport.

• 1155

[Traduction]

Mme Carolyn Bennett: Je suis bien d'accord. Nous devrions essayer de nous concentrer sur ce qui marche bien. Dans certains des sous-comités du Parlement, on voit des parlementaires qui travaillent ensemble, accentuant ainsi les éléments positifs. On prend les petites choses qui marchent bien et on va de l'avant.

Nous devons en même temps nous baser sur des preuves. La médecine fondée sur l'expérience clinique permet de rapprocher toutes sortes de gens qui ont des méthodes différentes. Ce sont les preuves qui comptent.

Pour revenir à votre exemple du logement abordable, il y a des gens en politique qui se battent pour le logement social, d'autres qui se battent pour le revenu et d'autres encore qui se battent, comme dans l'exemple mentionné par John Williams lorsqu'il a parlé des discussions à l'une des tables rondes... Nous devons également convenir que nous utilisons les mêmes phrases. Toutefois, lorsque que la SCHL mesure le pourcentage de Canadiens qui consacrent plus de 50 p. 100 de leur revenu au loyer, le résultat constitue un fait incontestable. Il arrive donc que nous puissions, malgré des points de vue divergents, nous entendre sur des faits. C'est l'autre outil dont nous disposons, un véritable outil scientifique.

La présidente: Monsieur Lenihan.

M. Donald Lenihan: Merci.

Je voudrais préciser un point que Carolyn a abordé, en le considérant peut-être sous un angle un peu différent.

L'un des aspects de ces outils qui, à mon avis, semble très prometteur à long terme, mais probablement pas à court terme, c'est leur capacité de renforcer le débat public. Je crois que Carolyn a utilisé mon le mot de «preuve».

Pendant notre travail sur le projet, j'ai pensé à un moment donné qu'il serait intéressant de feuilleter le hansard d'il y a une centaine d'années—je ne l'ai jamais fait, et quelqu'un va peut-être me contredire—pour voir ce que les parlementaires du siècle dernier disaient lorsqu'ils évaluaient un programme ou une politique. Je suppose qu'on pourrait trouver deux genres d'arguments. Le premier est du type qu'on appelle anecdotique. Par exemple, un député parle du cas particulier d'un électeur pour qui le programme a été ou n'a pas été très efficace, puis se sert de cette prétendue preuve pour défendre le programme ou pour l'attaquer. Le deuxième genre d'argument est d'un niveau nettement supérieur. C'est l'argument idéologique fondé sur de grands principes, un peu comme ceci: si vous voulez augmenter la production, vous devez réduire les impôts parce que cela motive les gens et qu'ils produisent alors davantage.

Vous avez donc ces deux types extrêmes d'arguments, et presque rien d'autre au milieu. Les deux sont valides, mais aucun n'est concluant. Le premier traite d'un cas particulier qui pourrait être vrai ou faux et d'une série d'autres cas, tandis que le second se fonde sur de grandes généralisations dont nous ne savons pas si elles sont ou non valables.

Au XXe siècle—peut-être mon ami de Statistique Canada me corrigera sur ce point—, nous avons réalisé de grands progrès grâce à des organisations comme Statistique Canada. Nous avons en effet commencé à suivre tous ces cas qui se trouvent au milieu. Nous avons commencé à nous interroger sur des choses telles que les taux de natalité, les taux de chômage et la croissance économique. Nous suivons beaucoup de ces renseignements, qui nous donnent des preuves à l'aide desquelles nous pouvons commencer à évaluer et à débattre la politique publique.

L'aspect réellement intéressant de l'insistance sur les résultats, c'est que nous avons aujourd'hui des technologies de l'information qui augmentent énormément nos capacités d'analyse. Nous pouvons suivre des résultats très complexes et obtenir des renseignements sûrs pour combler le trou qui se trouve au milieu. Si nous faisons bien cela, il restera encore beaucoup de latitude pour débattre la politique publique, mais nous pourrons le faire d'une manière beaucoup plus disciplinée qu'avant. Voilà, à mon avis, l'un des aspects les plus intéressants et les plus prometteurs de ces outils.

Mme Carolyn Bennett: Je voudrais juste ajouter qu'à mesure que les preuves s'accumulent, le sens politique des Canadiens s'affine, ce qui les amènera à tolérer de mois en moins la rhétorique partisane. C'est en renforçant la compréhension par les Canadiens du système fondé sur les résultats que nous réussirons à désamorcer certains de nos problèmes.

La présidente: Monsieur Mayne.

M. John Mayne: Permettez-moi de rappeler au comité qu'en septembre 2000, les premiers ministres du pays ont convenu de présenter un bilan de leurs systèmes de santé respectifs sur une base commune, afin de mettre les preuves à la disposition de tous. Le travail est actuellement en cours. Chacun doit publier le mois prochain un plan précis indiquant ce qui sera rendu public dans le premier rapport, qui paraîtra en septembre prochain. Je crois que ce sera là quelque chose qui intéressera énormément les Canadiens puisqu'on publiera une importante masse de données, obtenues d'une façon raisonnablement uniforme, sur les systèmes de santé du Canada.

La présidente: C'est bien. Merci.

Monsieur Bellemare.

• 1200

M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.): Carolyn et compagnie, j'ai pris des notes, mais il est difficile de poser une question simple. On a l'impression que vous nous avez donné un bon verre d'eau bien rafraîchissant, mais, quand on regarde d'un peu plus près, c'est plutôt un océan que vous nous avez donné à boire. Et je vais vous avouer que je ne suis pas un nageur. Je voudrais donc vous renvoyer quelques idées parce que vous nous avez inondés de vos idées. J'aimerais pouvoir faire un peu la même chose, puis vous demander de réagir.

Je crois que vous avez créé un paradis pour les défenseurs éloquents de la politique publique. Vous ne pouvez certainement pas toucher une personne ordinaire confrontée à des problèmes de nature anecdotique concernant la santé, la qualité de vie, la moisissure dans les appareils de ventilation ou les sans-abri.

Le problème que vous avez abordé est celui de la mesure de la qualité de vie. Comment peut-on évaluer une activité quelconque de bien-être financée par les fonds publics? Les fonds publics, c'est vraiment le langage que nous utilisons ici. Nous ne pouvons pas parler d'individus. Comment traitez-vous les indicateurs sociaux, de rendement ou de mesure? Parlons-nous d'analyse qualitative ou quantitative? S'agit-il d'individus ou de masses? Parlons-nous d'aspects sectoriels, par exemple de vieillissement, de différents genres de cancer et de maladies ou de sans-abri? Comment répartissez-vous tout cela entre le fédéral, les provinces, les administrations locales, les collectivités locales, un conseil d'hôpital par exemple, et les individus?

Je pense que vous voguiez un peu dans l'utopie lorsque vous avez parlé de la possibilité pour les parlementaires de travailler ensemble sans distinctions de niveau ou de parti. S'il y a des partis dans un pays, que ce soit au Canada ou ailleurs, s'il y a des partis au Canada même, aux niveaux fédéral, provincial et municipal, nous avons tout un éventail de points de vue. Il y a ceux qui dépensent et qui ne s'arrêtent que lorsqu'ils sont à court d'idées. C'est leur seule limite, leur capacité de dépenser étant illimitée. Il y a aussi des gens à l'autre extrême qui pensent que la bourse publique doit être réduite au strict minimum et dont le principe ou la philosophie, c'est chacun pour soi. C'est ainsi qu'on en arrive aux systèmes à deux ou trois niveaux: si vous avez de l'argent, vous achetez n'importe quoi n'importe où, à l'échelon local, dans la province, dans le pays ou à l'étranger.

Dans ce cas, la fiche de rendement de votre qualité de vie peut être très intéressante. Je dis cela avec un sourire. Vous auriez d'ailleurs plus d'une fiche de rendement parce que vous auriez différents intérêts. Vous allez inciter beaucoup de défenseurs de groupes d'intérêts à venir aux tables—parce qu'il y en aurait plusieurs—et vous manquerez alors l'objectif que vous avez mentionné au début, qui est d'en venir à un dénominateur commun, à une personne commune, à l'homme de la rue, à la femme en résidence et à toute personne touchée. Comment améliorer cela?

Je m'excuse si je vous ai haranguée, mais j'ai voulu vous rendre la monnaie de votre pièce.

Mme Carolyn Bennett: Je suis habituée.

Je crois que c'est une excellente question et je vais essayer d'y répondre. Les statistiques révèlent que la criminalité est en régression, mais le policier du coin peut facilement persuader les gens du contraire. Où sont les chiffres? S'agit-il d'une divergence d'opinion sur ce qui constitue un crime? Est-ce que ce sont les crimes avec violence qui augmentent ou qui diminuent? Je crois que nous pouvons développer le sens politique des gens sur ces dossiers.

Si les gens pensent que notre système correctionnel est trop indulgent, mais qu'on leur montre des chiffres établissant qu'au niveau fédéral, nous avons le taux de récidive le plus bas du monde, ce genre de fait est extrêmement important pour s'écarter de l'anecdote et mettre en perspective l'histoire du détenu qui s'est rendu coupable de tel ou tel crime. Il est extrêmement important de ne pas sous-évaluer l'intelligence des Canadiens.

• 1205

Dans l'exercice de la médecine, j'ai constaté qu'un diabétique, qu'il soit directeur de banque ou presque un sans-abri, peut se joindre à un groupe et apprendre vraiment à se soigner. Nous avons tendance à sous-évaluer les gens. Si nous pouvions concevoir un programme d'apprentissage politique fondé sur l'expérience pratique, les Canadiens sauraient se montrer à la hauteur. Avec l'aide d'ONG ou d'autres...

Il y a un groupe qui ne nous aide pas en ce moment et qui n'est pas venu à nos tables rondes. Ce sont les médias. Il faudra donc, à la prochaine étape, faire de la sensibilisation de ce côté. Dans notre évolution vers les indicateurs, je suis ennuyée par le fait que les médias ne trouvent pas le sujet assez intéressant pour augmenter le tirage des journaux. Il est plus avantageux pour eux de monter en épingle l'anecdote concernant quelque chose qui ne marche pas que de présenter les statistiques établissant qu'un programme fonctionne bien. Les comités de rédaction nous disent souvent qu'ils ne s'occupent pas de chiffres parce que les gens ne les comprennent pas. Par conséquent, ils refusent d'imprimer les chiffres.

Il faudrait peut-être que cela fasse l'objet de la prochaine série de tables rondes. Je ne sais pas. Mais je crois que nous devons donner aux Canadiens ce qui leur revient parce qu'ils peuvent comprendre ces notions. Je ne pratique pas la médecine sur une base anecdotique: si je dispose de preuves suffisantes concernant les effets thérapeutiques d'un médicament, je ne vais pas cesser de le prescrire parce qu'il n'a pas guéri un patient à qui je l'ai prescrit mardi dernier.

[Français]

M. Eugène Bellemare: Merci beaucoup.

[Traduction]

La présidente: Monsieur Spencer.

M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente.

Je suis heureux qu'il y ait dans la salle un agriculteur comme moi. La Dre Bennett a tellement parlé des silos, qu'elle doit avoir été... Cela me rappelle un silo qui se trouvait pas loin de chez moi. Il y avait un arbre qui poussait à l'intérieur. Nous voulions à ce point garder le silo que nous avons arraché l'arbre, peint le silo et remis le silo en état, mais qu'a-t-il apporté à la ferme? Il n'a plus rien à voir avec la ferme. J'aime bien que vous parliez de ces silos de dépenses du gouvernement qui affectent parfois certains autres secteurs. Peut-être découvrirons-nous la même situation quand nous verrons comment certains de nos programmes affectent d'autres secteurs.

J'ai apprécié aussi ce que M. Bellemare a dit, parce que j'aime bien parler de choses concrètes. Je veux vous poser une question sur les résultats de ce type de système. Je sais que nous parlons de programmes sociaux, mais je me demande si cette approche aura tout de suite un effet—l'évaluation du système de justice, par exemple.

Je vais vous donner deux ou trois exemples qui n'ont aucun rapport entre eux. Quelqu'un s'est plaint dans ma circonscription... C'est là une question délicate, et je crois que ce comité étudie la situation des personnes handicapées. N'en concluez pas, s'il vous plaît, que je sois en train de dire quoi que ce soit contre les personnes handicapées. Dans notre système scolaire, il y a une personne sérieusement handicapée sur le plan intellectuel, qui a été, de façon curieuse, placée par sa famille dans un établissement scolaire normal. Mais, pour rester là, cette personne a besoin de quelqu'un qui l'aide. Dans la même classe, il y a six ou huit élèves marginaux qui, s'ils continuent dans la filière normale, n'iront nulle part, pas même jusqu'à la 12e année. Cependant, si l'assistant affecté à la personne sérieusement handicapée sur le plan intellectuel—une personne dont le développement sera extrêmement limité—, si cet assistant donc était réaffecté à ces six élèves marginaux, ils pourraient être sauvés et devenir des éléments productifs de la société. Ils quitteraient la zone d'échec pour entrer dans celle du succès. Cela va-t-il affecter une telle situation?

• 1210

Mon deuxième exemple concerne les programmes d'alphabétisation de notre ville. J'ai parlé avec le chef de la bibliothèque de Regina. À cause des normes de performance suivies dans certains cas, le financement du programme d'alphabétisation a été réduit. Il n'a pas permis à des chômeurs de trouver un emploi ou à un petit salarié d'obtenir un travail mieux rémunéré, parce que le programme n'est, m'a-t-on dit, qu'une mesure provisoire. Les gens y apprennent l'anglais, ce qui leur permet d'accéder à un programme de formation et par la suite d'obtenir un emploi. Nous nous fondons sur la performance, mais il y a quelque chose qui ne marche pas. Cela va-t-il affecter la situation?

Autre exemple—j'aime parler de questions délicates, je suppose: nous sommes, à Regina, la capitale du crime du Canada.

Mme Raymonde Folco: Vraiment? Je croyais que c'était Montréal.

M. Larry Spencer: Oh! Venez à Regina et vous vous sentirez mieux.

Cependant, notre problème vient essentiellement de l'existence de jeunes récidivistes graves. Presque chaque fin de semaine, il y a une soixantaine de vols de voitures. Les jeunes s'amusent à faire des balades dans des voitures volées, à se moquer du système de justice, etc. Dans ce silo de protection des jeunes contrevenants, nous oublions ce que nous laissons se produire.

Cette évaluation de la performance va-t-elle influer sur les décisions de justice d'une façon générale ou parlons-nous seulement des programmes sociaux?

Mme Carolyn Bennett: Eh bien...

M. Larry Spencer: Voilà qui va vous sortir pendant un moment de votre cabinet médical.

Mme Carolyn Bennett: Je retourne au contraire directement dans mon cabinet médical, car pour moi la justice est une question sociale.

Si l'on considère les jeunes contrevenants au Canada, on constate que 70 p. 100 d'entre eux ont des difficultés d'apprentissage ou souffrent du syndrome d'alcoolisme foetal. Cela ne me déplaît pas de voir ces chiffres, car ils indiquent que nous devons placer ces jeunes dans un milieu thérapeutique, où l'on rebâtira l'estime qu'ils ont d'eux-mêmes et où l'on cherchera à savoir pourquoi ils n'ont pas été bons en classe, pourquoi ils ont quitté l'école et pourquoi ils ont mal tourné.

Si l'on place ces jeunes dans un tel milieu et que l'on arrive à mettre sur pied un programme qui leur permette de ne pas récidiver... Regardez ce qui se passe dans le cas de Matt Geigen-Miller et de son fantastique programme de réhabilitation des jeunes. Je ne sais pas si vous l'avez eu comme témoin au Comité de la justice ou au cours de vos déplacements, mais si vous lisez ce qu'ont dit certains témoins au sujet de ce qui les a remis sur le droit chemin... Vous pourrez comparer avec l'incarcération, avec tous ces... Nous mettons plus de jeunes en prison que les Américains et nous obtenons de très mauvais résultats. Il faut pour ces jeunes des programmes communautaires et un milieu thérapeutique.

Si vous considérez notre système fédéral, vous verrez que le taux de récidive y est le plus bas du monde, parce que les jeunes y obtiennent des baccalauréats et y apprennent à lutter contre la toxicomanie et à maîtriser la colère. Ils bénéficient de tous ces programmes et ils en sortent avec de nouveaux amis, ce qui fait qu'ils ne récidivent pas.

À notre première table ronde, Geert Bouckaert, un Belge, a parlé de la façon de mesurer les choses, à partir d'une branche ou d'un hélicoptère. On verra un jour des villes plus sûres, parce que si ces jeunes ne récidivent pas, les rues de Regina seront moins dangereuses.

Ce sont toutes ces mesures, de la plus petite à la plus grande, qui font que les choses marchent. On ne se retrouve pas ainsi avec des politiques idiotes qui prévoient que l'on enferme les jeunes sans plus s'en occuper. Ensuite, quand ils sortent, ils vont récidiver. Si donc dans mon système, ils sortent et ne récidivent pas et que dans le vôtre, ils sortent et récidivent...on voit où est la meilleure politique.

• 1215

M. Larry Spencer: D'accord, c'est bon.

La présidente: Avant de poursuivre, je vais passer la parole à M. Lenihan, qui a quelque chose à ajouter à ce qu'a dit Mme Bennett.

M. Donald Lenihan: Là encore, je vais sans doute aller un tout petit peu plus loin que Carolyn.

J'ai deux points à préciser. D'abord, n'oublions pas la métaphore des outils. Dans la mesure où nous utilisons des outils, nous pouvons le faire pour la politique de pratiquement n'importe quel secteur. Rien ne dit qu'ils ne doivent servir que pour la politique sociale. On peut les employer pour la politique budgétaire, la gestion publique ou l'environnement. En d'autres termes, ces outils sont d'un usage général, et nous pouvons avoir recours à eux dans un tas de secteurs différents. Il se trouve que, dans ce cas, nous avons beaucoup parlé de politique sociale pour diverses raisons. Voilà pour le premier point.

Deuxième point. Comme il s'agit d'outils, peut-être devrais-je pousser un peu plus loin la métaphore et dire que je veux faire la distinction entre les outils eux-mêmes et leur usage. Prenons une tronçonneuse: vous pouvez vous en servir pour construire une maison, des tas de maisons; vous pouvez aussi l'utiliser pour couper des arbres dans une forêt. L'usage que vous en faites dépend de votre objectif.

Il en est de même ici, et c'est pourquoi la dimension politique est si importante. Rien n'est dit sur la façon d'utiliser ces outils; il y a une décision politique à prendre. Où allons-nous y avoir recours? Quels indicateurs choisirons-nous? Lorsque nous les utiliserons, les outils nous donneront une très bonne idée des informations que nous voulons réunir et ils nous indiqueront des façons de les comprendre et de les agencer que nous n'avions pas avant.

Ce qui est merveilleux dans le fait d'avoir ici en même temps Carolyn et John, c'est qu'ils démontrent que les outils n'ont pas en eux-mêmes de coloration politique. Ils ne sont ni de gauche ni de droite; ils ne sont pas plus pour les gouvernements provinciaux que pour le gouvernement fédéral ou les administrations municipales. Ce ne sont que des outils, de nouveaux outils. Et nous pouvons voir effectivement que le gouvernement de l'Alberta, qui est à une extrémité de l'éventail politique, est probablement plus avancé que toute autre administration du pays pour ce qui est de l'usage de ces outils. Par contre, nous pouvons trouver des gouvernements qui se situent à l'autre extrémité de cet éventail et que ces outils intéressent également beaucoup.

Tout est dans la façon dont vous vous en servez, et c'est là que se situe le véritable débat politique—que voulons-nous en faire?

La présidente: Avant que vous ne partiez, je dois vous dire que je suis un peu curieux. Monsieur Mayne, avez-vous quelque chose à nous dire sur tout cela du point de vue de celui qui mesure?

M. John Mayne: Eh bien! John a dit ce que j'aurais pu dire.

Il y a des mesures qui pourraient s'appliquer dans les divers cas dont vous parlez. Ce qu'aussi bien M. Williams que Carolyn Bennett ont dit, c'est que ces informations vont faciliter le débat, ce qui va ensuite permettre, on l'espère, de s'attaquer aux problèmes que vous avez cernés. Il existe une vaste gamme de questions auxquelles on pourra s'attaquer avec le genre de mesures dont on parle. Comme Don l'a dit, on utilise les mots «retombées sociales», mais ils couvrent certainement la plupart des secteurs qui intéressent les députés et les Canadiens.

La présidente: Monsieur Spencer, je vous donnerai vos deux ou trois minutes de plus.

Qui détermine ce que vous mesurez?

M. John Mayne: La Dre Bennett voudra certainement dire quelque chose là-dessus. On a beaucoup parlé de ce sujet au cours des tables rondes. Il soulève de nombreuses questions.

J'ai toujours pensé que ce dont nous parlons, c'est de diffuser des informations, dont une partie concernera certains groupes d'intérêts et une autre partie ne le fera pas. Je ne suis pas sûr qu'il existe un ensemble d'indicateurs les plus performants sur lesquels nous allons tous essayer de nous entendre. Je crois que l'on peut davantage dire que les gens disposeront d'une grande quantité de bonnes informations qu'ils utiliseront pour faciliter leur propre débat. Il s'agit de publier des mesures fondées sur des données de qualité, des mesures qui sont bien comprises, et de se débarrasser des mesures qui sont trompeuses, qui ne fournissent pas vraiment les indications qu'elles prétendent fournir.

La présidente: Qui donc jouera le rôle de chef de file et quel sera le rôle du parlementaire dans cette affaire?

Mme Carolyn Bennett: Il y a deux choses. Tout d'abord, lorsque nous consulterons les Canadiens sur leurs priorités, nous pourrons aussi leur demander de quelles informations ils ont besoin pour évaluer l'action du gouvernement. Mais il existe d'autres sujets sur lesquels nous devons consulter les professionnels, les ONG et les experts pour leur demander ce que nous devons mesurer. Est-ce la prévalence de la dépression, l'estime de soi dans le système scolaire ou la sécurité alimentaire? Comment mesure-t-on certains de ces secteurs?

• 1220

Je pense que cela doit se faire en collaboration. Je pense que cela doit se faire avec le Parlement et en consultant les experts. Et, bien sûr, nous avons dans ce domaine, Avec le Bureau du Vérificateur général et Statistiques Canada, certains des meilleurs spécialistes du monde. Cela peut donc se faire des deux façons, en fonction de la recherche dont nous avons besoin.

Le Conseil du Trésor a, je crois, choisi 17 indicateurs. Il demande maintenant aux ministères de passer à une gestion fondée sur les résultats. Ce sera ensuite aux comités parlementaires de jouer, lorsqu'ils traiteront du budget, de la planification et des priorités.

C'est un peu la question de ce qu'il y a dans les rapports. Comment peut-on s'assurer que les résultats que les ministères publient dans leurs rapports concernent des sujets qui intéressent les parlementaires et les Canadiens?

La présidente: Merci.

Toutes mes excuses, monsieur Spencer, mais vous avez maintenant deux ou trois minutes de plus...

M. Larry Spencer: Cela fait aussi partie de ce que je voulais entendre.

Il y a deux ou trois points dont je veux parler pour finir. J'ai une question écrite ici. Ne pensez-vous pas que nous avons au moins essayé de faire cela dans nos débats parlementaires en abordant quelque peu la question du point de vue de la performance? Et, deuxièmement, la chose dont vous avez parlé—que mesure-t-on?

Vous avez dit tout à l'heure que nous pouvons manipuler les chiffres. Bien sûr, nous pouvons le faire, mais, malheureusement, nous pouvons manipuler les mots, les mesures et les vues aussi. Soyons francs, dans le monde politique, nous donnons aux choses notre propre orientation. Ainsi, si nous considérons l'exemple que je vous ai donné au sujet de la personne intellectuellement handicapée, nous respectons des normes élevées à son égard, mais nous n'atteignons pas du tout les normes pour les autres. Alors, dans quel sens allons-nous?

Je suis heureux, cependant, que vous parliez des mesures parce que vous avez abordé le cas des récidivistes. J'ai assisté à Toronto aux audiences du tribunal qui s'occupe de la désintoxication. J'ai également assisté à Regina aux séances d'un conseil de détermination de la peine pour les jeunes, qui est dirigé par une femme de la Gendarmerie royale qui va bientôt prendre sa retraite. Elle veut instituer ce genre de choses. Ce qu'elle a fait jusqu'ici a permis de réduire fortement les taux de récidive, tout comme ce qu'a fait le tribunal de Toronto.

Donc, ce que vous êtes en train de dire, c'est que nous aurions la possibilité de prendre ce système axé sur les résultats et de l'appliquer même à nos décisions de justice ainsi qu'à nos décisions en matière de programmes sociaux, et aussi à nos propres débats au Parlement. Je pense que c'est une bonne approche, mais nous nageons à l'heure actuelle dans un océan.

Mme Carolyn Bennett: Quand on dispose d'organes comme Statistiques Canada, dont la réputation en matière de méthodologie est extrêmement forte, il importe de veiller à ce qu'il y ait un dialogue permanent pour décider qui va effectuer les mesures, comment on va procéder à leur sujet et sur quoi elles vont porter.

La présidente: Merci.

Monsieur Crête.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Merci, madame la présidente.

En dehors de toutes les questions de juridiction, je pense que c'est une bonne initiative que d'encourager cela. Comme députés, on a souvent à évaluer si une perception qui nous est donnée par des individus est la même que celle de la population en général.

Ma question portera sur ce qui suit. Je pense que tout relève de la crédibilité de ce qu'on fait. Même quant on a les études les plus scientifiques, si les gens au sujet desquels on a fait les études, après avoir reçu le rapport, ne croient pas fondamentalement qu'on a agi objectivement, on n'obtient pas de résultats.

• 1225

Je vais vous donner un exemple, celui des personnes âgées. Il y a un certain nombre de personnes qui trouvent que le gouvernement fédéral est inaccessible par téléphone. On a une perception qui nous est donnée. On va voir le ministère, qui nous dit qu'on répond à 322 000 appels par année, qu'il y en a tant de milliers par mois et que tout va bien.

Si on était capable de mesurer correctement... Je pense qu'on a les outils pour mesurer correctement. Ce sur quoi je veux insister, c'est la crédibilité. Qu'est-ce que vous avez qui permettrait d'aller plus loin pour assurer cette crédibilité? Ce que vous faites est très pertinent.

Un autre exemple serait d'évaluer si l'assurance-emploi a contribué à diminuer ou augmenter la pauvreté chez certaines catégories de personnes. C'est très subjectif parce qu'on n'a pas d'information objective. Pour que les les députés, les gens qui représentent ces travailleurs ou les travailleurs eux-mêmes soient convaincus, il faudrait que les études elles-mêmes aient une crédibilité, qu'elles soient non seulement scientifiques, mais aussi perçues comme étant le reflet de la réalité. Est-ce qu'il y a encore des choses à faire à cet égard? Suggérez-vous qu'on mette de l'avant des volets de travail particuliers?

[Traduction]

Mme Carolyn Bennett: C'est intéressant pour ce qui est de l'accessibilité par téléphone. À l'une des premières tables rondes avec le Conseil du Trésor auxquelles on m'a demandé de participer, on m'a remis, à titre de présidente du Comité des personnes handicapées, une étude sur la gestion fondée sur les résultats pour les programmes destinés aux personnes handicapées de tout le pays. J'ai été étonnée de voir que l'on y abordait la question du nombre de personnes qui tombaient sur un poste occupé et du temps qu'elles passaient à attendre au téléphone. En tant que parlementaire, je ne pensais pas avoir personnellement besoin de quelque chose de ce genre sur le plan de la politique. Pour moi, l'étude évaluait un programme de la sécurité du revenu.

Je voulais savoir quelle mesure permettait de déterminer si quelqu'un pensait que son revenu était sûr. Si vous voulez mettre au point une mesure, ne devrait-ce pas être pour savoir si les gens pensent qu'ils disposent d'un revenu sûr ou s'ils croient qu'on va le leur supprimer dans une semaine—de la même façon que l'on fait une mesure au sein de la main-d'oeuvre canadienne pour savoir si les gens pensent qu'ils pourraient perdre leur emploi. Nous mesurons ce sentiment et nous lui accordons une grande importance.

Quoi qu'il en soit, c'est une question intéressante. Que mesurons-nous, ministère par ministère, programme par programme, et comment nous assurons-nous que les gens qui ont droit à ces programmes...? J'aimerais, en tant que présidente du Comité des personnes handicapées, étudier ce groupe de personnes qui ne font pas appel—par exemple, celles à qui on a refusé la pension d'invalidité du RPC et qui n'ont pas fait appel. Pourquoi ne l'ont- elles pas fait? Même s'il ne s'agit pas nécessairement d'un indicateur social, il y a probablement un certain nombre de personnes handicapées qui vivent de l'aide sociale municipale parce qu'elles n'étaient pas admissibles à la pension d'invalidité du RPC. Elles étaient trop malades pour pouvoir faire appel, ou elles n'avaient pas l'argent nécessaire pour retenir les services d'un avocat, ou encore elles venaient d'un pays où quand un gouvernement dit non, c'est non.

Je crois qu'il nous faut de meilleures informations pour certains programmes, afin de pouvoir planifier de meilleures politiques publiques. Mais il est intéressant de se demander ce qu'il faut mesurer et comment on doit s'y prendre.

[Français]

M. Paul Crête: Au fond, voici ce qu'on se demande: si on avait le système idéal, théoriquement, idéalement, on partagerait tous l'analyse d'une situation. Le débat politique consisterait seulement à déterminer quelles sont les meilleures solutions. Si ça permettait d'atteindre cet objectif, ce serait effectivement très intéressant, parce qu'on ne ferait pas de débat afin de savoir si c'est vrai ou si ça ne l'est pas, ou pour déterminer si on a le bon portrait de la situation sociale. On aurait un portrait qui pourrait être accepté par une vaste majorité, permettant d'avoir un consensus, et les débats politiques pourraient porter plus sur les solutions que sur une critique de la situation actuelle.

• 1230

[Traduction]

Mme Carolyn Bennett: Et nous nous demanderons également si, lorsque nous aurons les moyennes de données, elles nous diront la vérité. Nous ont-elles dit la vérité sur les femmes? Nous ont-elles dit la vérité sur les Autochtones? Que doit-on faire pour avoir des données ventilées afin de pouvoir prendre de meilleures décisions en matière de politique? Si l'on prend la question de la pauvreté des enfants, avons-nous les mesures concernant les personnes handicapées, les malades mentaux, les Autochtones et les mères célibataires? Disposons-nous de chiffres distincts pour chacun de ces groupes? Car il est clair qu'il va nous falloir des programmes différents pour nous occuper de chacun d'eux et que nous ne devons pas aborder la pauvreté des enfants de façon globale. Faute d'avoir ces données, il nous sera difficile d'élaborer des programmes adaptés à chacun de ces groupes, dont nous pensons qu'ils sont surreprésentés dans l'étude du problème de la pauvreté.

La présidente: Monsieur Lenihan.

[Français]

M. Donald Lenihan: Je pense que vous avez posé de très bonnes questions, des questions très profondes. Je me demande si je serai capable d'y répondre un tant soit peu. Je vais le faire en anglais, malheureusement, car il y a des nuances qui sont difficiles.

[Traduction]

Je vais répondre à tour de rôle aux deux questions que vous avez, me semble-t-il, posées. Dans la première, il s'agit de la légitimité: comment légitimer ce système et le rendre fiable? Et pourquoi devrions-nous croire en lui? Il existe un million de petites réponses et peut-être un million de grandes, mais, en fin de compte, il n'y a, en ce qui me concerne, qu'une grande réponse à cette question. Ce ne sera pas une réponse à court terme car on utilise une approche très floue pour l'organisation des activités et des informations gouvernementales.

Je crois que la réponse se trouve dans le mot «résultats», s'il appert que la gestion fondée sur les résultats constitue une meilleure façon de procéder. S'il en est ainsi, c'est n'est pas seulement parce cette méthode nous apporte des informations sur ce qui se passe dans le monde, mais aussi parce qu'il y a des leçons à tirer de ces informations.

Voilà donc comment on peut imaginer le cycle suivi au gouvernement. Tout d'abord, on s'entend sur certains résultats. On organise un débat: est-ce bien ce que l'on veut réaliser et comment va-t-on le mesurer? On s'entend sur certains indicateurs et ensuite sur certains programmes qui doivent nous permettre d'atteindre nos objectifs. Puis, on suit un cycle: nous appliquons les programmes pendant quelque temps; nous voyons comment ils fonctionnent; nous relevons les indicateurs; nous réunissons les données; et nous vérifions et évaluons le tout. Nous nous demandons alors si nous avons bien obtenu les résultats désirés. Si nous les avons atteints, très bien, mais si nous ne les avons atteints qu'en partie, les indicateurs—s'ils sont bons et utiles—nous aideront à voir ce qui n'a pas fonctionné dans le programme et ne nous a pas permis d'obtenir les résultats que nous voulions.

Nous amorçons ensuite la seconde phase. Nous nous disons: «Bon, nous savons maintenant quelque chose que nous ne savions pas avant.» Nous pouvons, par exemple, resserrer le programme ou ajuster les indicateurs, de façon à ce que nous ayons la deuxième fois un programme vraiment plus solide. Nous allons réduire l'écart entre le programme et les résultats que nous essayons d'obtenir.

En d'autres termes, si tout est bien fait, cela devrait devenir un cycle d'apprentissage. Nous allons nous améliorer et nous rapprocher de plus en plus de notre objectif final. C'est la meilleure façon de savoir que nous sommes sur le bon chemin. On va ainsi accroître notre faculté d'apprentissage, améliorer nos programmes et renforcer notre aptitude à les évaluer. Voilà la première chose, et cela ne va pas se faire à court terme. Je crois que ce sera plutôt un projet à long terme.

La deuxième question que vous posez est également très intéressante: qu'est-ce que cela signifie? Supposons que nous nous améliorions de plus en plus. Cela va-t-il signifier que les parlementaires vont se retrouver au chômage? Va-t-on atteindre un point où il suffira de déterminer quel sera le meilleur moyen d'atteindre notre objectif? La réponse doit être non. Ce sujet est très, très souvent revenu dans les tables rondes. La raison en est que—et nous revenons à la métaphore de l'outil—on peut utiliser une tronçonneuse pour construire une maison; on peut l'utiliser aussi pour couper des arbres dans la forêt. On peut s'en servir pour faire toutes sortes de choses. Il en est de même pour des outils comme celui-là.

Je vais vous exposer la situation d'une façon légèrement différente. Supposons que nous voulions vérifier nos progrès en matière de pauvreté. Il n'y pas de définition de la pauvreté. Il n'y a pas de définition qui fasse autorité et il n'y en aura jamais, parce qu'elle n'est que le reflet—et on en revient à certaines de vos questions—de ce à quoi nous accordons de la valeur. Je crois que c'est là un domaine où vous êtes experts, n'est-ce pas? Vous représentez des gens qui ont des points de vue différents sur ce que cela signifie d'être pauvre. C'est à partir de là que l'on décidera quels indicateurs on utilisera, quels programmes on mettra sur pied, etc. Mais ce débat de points de vue est permanent et il durera éternellement—n'est-ce pas?—parce que nous changerons d'avis et cesserons de nous entendre. C'est ce que fait une société pluraliste.

Il y a donc toujours des choix à faire sur la façon de définir la pauvreté, sur la façon de définir l'air pur, sur la façon de définir l'aide que l'on apporte aux gens. Ce sont ces éléments que nous allons essayer de mesurer. Avec la pratique, nous mesurerons de mieux en mieux ce que vous nous demanderez de mesurer. Mais vous allez constamment nous demander de mesurer différentes choses, et c'est normal; c'est la manière de tester le système.

La présidente: Monsieur Mayne.

M. John Mayne: Juste un petit commentaire. Je suis certainement d'accord avec le député pour dire que la question de la crédibilité et de la qualité de l'information est extrêmement importante. Si, dans une initiative comme celle-ci, la crédibilité fait défaut, son utilité disparaît et nous n'aboutirons à rien.

• 1235

Comme Don l'a dit, la question se présente sous plusieurs aspects, et on utilise les mesures qui ont été établies. Vous avez parlé plus tôt d'un processus de consultation et des façons d'obtenir le genre de mesures qui pourraient intéresser particulièrement certains groupes ou certains comités. Ainsi que Don l'a déclaré, la pauvreté est un exemple. Il existe trois ou quatre mesures différentes de la pauvreté, et je pense qu'elles feraient toutes l'objet de discussions. Ensuite, en fonction de votre propre système de valeurs, vous utiliseriez l'une ou l'autre de ces mesures.

Le second aspect de la qualité, bien sûr, c'est de savoir si ces mesures sont bien faites—la question de l'exactitude. On s'attend à ce que les Statistiques Canada du monde aient bien défini les mesures, aient recueilli les données convenablement et n'aient pas utilisé les moyennes pour tromper les gens. Il est donc important de prendre en considération ces aspects plus techniques—il faut que les mesures soient bien faites pour être crédibles. Je pense qu'il faut se soucier de la qualité et de la crédibilité, à la fois en s'assurant que les gens comprennent bien ce qu'elles sont et ce qu'elles ne sont pas et en veillant à ce que les informations et les données sur lesquelles elles se fondent soient raisonnablement exactes.

La présidente: Merci.

[Français]

Madame Folco.

Mme Raymonde Folco: Je vais vous demander votre indulgence, madame la présidente, parce qu'il y a trois aspects dont je voudrais faire état maintenant.

Tout d'abord, je parlerai du rôle des médias, qui a été soulevé par Mme Bennett tout à l'heure. Ce que je remarque de plus en plus quand je lis le journal, surtout certains journaux canadiens, c'est qu'au lieu de nous donner un aperçu de ce qui se passe, on nous donne une anecdote. M. Untel est arrivé, il s'est passé ceci... Et à partir de cette anecdote, on généralise.

Je reviens sur ce que vous avez dit. Il me semble qu'une ou des sessions de sensibilisation auprès des médias seraient fondamentales et que ce serait une priorité. Je ne veux pas m'attarder là-dessus parce que je pense qu'on est tous à peu près sur la même longueur d'onde.

Deuxièmement, je parlerai de l'interprétation des chiffres. Pour moi, les chiffres ont toujours été comme une photo. Quand on prend une photo, on prend tout ce qui se passe devant et derrière, et c'est à nous de décider ce qu'on veut cibler, ce qu'on veut regarder sur cette photo. Est-ce qu'on veut regarder l'arbre, l'ensemble de la forêt ou le petit garçon qui joue à côté, d'une part? D'autre part, comment interprète-t-on ce qu'on voit? Évidemment, il s'agit de faire toute l'analyse statistique, mais aussi d'analyser les causes de ce qui se passe.

Si, dans le domaine de la santé, on sait qu'il y a un certain nombre de maladies qui sont mieux traitées dans un endroit que dans un autre, il ne suffit pas de savoir que ça se passe; il faut savoir le pourquoi de ce résultat. Le problème que je vois par rapport à l'interprétation des statistiques et au fait d'aller chercher la cause du phénomène, c'est qu'il me semble que cette interprétation, des deux côtés, en est une qui n'est pas totalement objective, qui ne peut pas être totalement objective, parce que les personnes qui interprètent sont nécessairement influencées par une certaine connaissance, par une certaine philosophie, par une certaine manière de voir, par les valeurs de la société dans laquelle ils vivent et ainsi de suite.

Donc, toute la question de l'interprétation des statistiques est pour moi vraiment primordiale. Je voudrais revenir sur un autre élément qui, je le pensais, allait être soulevé par mon collègue M. Crête. C'est par rapport à l'ensemble du Canada et à la façon dont le Canada fonctionne par le biais des responsabilités provinciales.

Là-dessus, je vois ce qui s'est passé par rapport à la situation dans les métiers. Je me suis rendu compte, il y a quelques années, qu'un plombier ou un menuisier ne pouvait pas facilement voyager d'une province à l'autre et espérer pouvoir travailler dans toutes les provinces et satisfaire aux normes de travail dans ces provinces-là. Depuis, les provinces et le gouvernement fédéral travaillent en vue d'atteindre un genre d'équilibre—j'allais dire equalization en anglais—pour que les personnes puissent voyager partout au pays. C'est très bien. Je suis entièrement d'accord et je vois ce genre d'analyse que je veux proposer comme étant quelque chose qui permettrait de mettre sur un pied d'égalité un hôpital à Victoria et un hôpital à Terre-Neuve, par exemple, aussi bien qu'un hôpital à Toronto et un hôpital à Montréal.

• 1240

Cependant, on a vu comment les universités... Je sais que je donne l'impression d'aller un peu partout, mais j'espère que ça va se rassembler. On a vu les analyses des universités dans Maclean's et la façon dont les universités ont réagi quand on les a mises sur un pied d'égalité par rapport à un critère, c'est-à-dire le nombre de personnes diplômées et la discipline dans laquelle elles étaient diplômées. On a vu comment les universités ont réagi en disant que chacune des institutions avait un mandat spécifique et une façon spécifique de fonctionner. Donc, c'est une analyse qui a été rejetée en grande partie par les universités.

Je prends ce modèle et je l'applique aux provinces. Comment va-t-on faire pour que, par exemple, une province comme le Québec qui, après tout, a la compétence unique en matière de santé pour ne mentionner que ce système, ne nous dise pas qu'elle a sa manière de faire, qu'elle a des régies régionales, qu'elle a des CLSC, qu'elle a un système qui fonctionne tant bien que mal, mais qui est différent et qui correspond à ses valeurs et à ses façons de faire, tandis qu'à Victoria, il y a un autre système?

Je sais que vous allez me répondre que le dénominateur commun, ce sont les résultats, parce que vous êtes là pour nous le dire. Mais il me semble que les résultats doivent être interprétés, et ils le sont, à la lumière des valeurs que le système lui-même présente et véhicule. Pour moi, c'est un genre de cercle vicieux et je ne vois pas comment on peut s'en sortir.

C'était un peu long, madame la présidente, parce que ce que j'avais à présenter était un peu complexe.

[Traduction]

Mme Carolyn Bennett: Je commencerai par le troisième point. En ce concerne les analyses des universités, je pense que nos spécialistes des mesures sont mieux placés pour vous répondre. C'est la première fois que Maclean's faisait ça, et ce que ce magazine a appris, je pense, à la suite de la réaction des universités, c'est que certaines des mesures utilisées n'étaient peut-être pas objectives. Ils vont, à ce que j'ai pu comprendre, continuer à raffiner leurs analyses de façon à tenir compte des réactions des universités et des remarques des étudiants.

Pour ce qui est du deuxième point que vous avez soulevé, c'est-à-dire l'interprétation, il y a des chiffres bruts qui sont tout à fait trompeurs, d'accord? Lorsque j'exerçais la médecine, il y avait une obstétricienne dans mon hôpital qui avait un taux effroyable en matière de césariennes. Tous les médecins lui envoyaient leurs patientes parce qu'elle était la seule à mettre les bébés au monde par la voie vaginale: enfants qui se présentent par le siège, jumeaux, etc. Elle faisait un essai pendant la période de travail, et les chiffres bruts étaient dans son cas terribles. Mais jamais je n'enverrais une de mes patientes à un de ces obstétriciens qui ouvrent tout ce qui leur tombe sous la main.

Donc, les chiffres ne plaidaient pas en sa faveur, mais il m'incombait, en tant que médecin de famille, d'interpréter ces données pour mes patientes, qui ne voyaient que les chiffres bruts. Il y a, sans aucun doute, un rôle d'interprétation en fonction des valeurs de chacun.

J'étais de celles qui croyaient qu'il était bon de faire un essai pendant la période de travail. Un autre médecin aurait sans doute réagi différemment.

En ce qui concerne votre autre point, les médias, je dirai que l'un des avantages des chiffres et de leur interprétation—les deux rôles conjoints—c'est que les politiques et les gouvernements peuvent maintenant les publier eux-mêmes sur Internet. D'énormes possibilités s'offrent désormais à nous du fait que, si les médias ne nous aident pas, nous pouvons diffuser nous-mêmes certaines données pour améliorer l'éclairage politique du dossier.

M. John Mayne: Juste une courte...

Mme Raymonde Folco: Excusez-moi. Puis-je dire une petite chose?

Mme Carolyn Bennett: Oui.

Mme Raymonde Folco: Le Web fait également partie des médias.

Mme Carolyn Bennett: Et il diffuse des tas de mauvaises informations, mais c'est là un tout autre sujet.

L'autre exemple d'interprétation que je voulais utiliser est l'un de ceux qui concernent la longueur moyenne du séjour, dont on s'est servi, entre autres, pour évaluer les hôpitaux dans les analyses faites à leur sujet. Les chiffres relatifs aux hôpitaux des régions éloignées sont très mauvais, car ils doivent garder leurs patients jusqu'à ce que leur état de santé se soit stabilisé et leur permette de prendre l'avion pour rentrer chez eux. Leurs chiffres donc ne plaident pas en leur faveur.

• 1245

Nous allons indiquer ce que nous voulons que l'on mesure, mais notre travail de parlementaires sera ensuite d'interpréter les chiffres pour les gens, de façon à ce qu'ils ne pointent pas un doigt accusateur vers les hôpitaux. C'est ce qui est certainement arrivé avec la première série d'analyses portant sur les hôpitaux de l'Ontario, qui ont été extraordinairement mal interprétées par certaines personnes.

La présidente: C'est la politique qui est entrée en jeu.

Mme Carolyn Bennett: Oui.

La présidente: Monsieur Mayne.

M. John Mayne: Pour parler à nouveau du rapport sur les soins de santé sur lequel on travaille à l'heure actuelle et qui sortira dans un peu moins d'un an, il va se situer dans le cadre du système fédéral canadien, chaque province présentant son propre rapport, en utilisant toutefois un ensemble commun de mesures.

On peut supposer que dans chacun de ces rapports provinciaux, les chiffres vont être interprétés, un peu comme vous l'avez dit, dans le contexte de la situation qui prévaut au Québec ou en Colombie-Britannique, et c'est raisonnable. Ensuite, la population et les parlementaires, ou toutes autres personnes, vont faire eux- mêmes les comparaisons et décider si les explications et les interprétations qui figurent dans les rapports sont valables.

Il me semble que c'est une façon, dans le cas du Canada, de permettre la publication d'informations que l'on pourra comparer, tout en respectant le fait que les soins de santé, en particulier, relèvent essentiellement de la compétence des provinces.

La présidente: Et conformément à cette coutume familiale qui veut que celui qui parle le moins parle le dernier, je cède la parole à M. Norris.

M. Doug Norris: Merci.

J'ai trouvé les commentaires que vous avez faits sur l'interprétation des informations statistiques très instructifs. Je pense que vous avez tout à fait raison en ce qui concerne les limites de tous les types d'informations statistiques. Elles sont exactement telles que vous les avez présentées: il y a en bout de ligne une interprétation personnelle et des valeurs en fonction desquelles chaque personne juge les résultats, comme vous l'avez si bien dit.

Je crois, cependant, que nous avons fait des progrès, en ce sens que, lorsque nous considérons la situation dans son ensemble, les indicateurs attirent notre attention sur certaines de ses parties, mais il nous faut parallèlement effectuer des recherches plus poussées en matière de sciences sociales, où on prendra en ligne de compte, par exemple, différents systèmes de soins de santé et différents programmes en vigueur dans différentes provinces ou au sein de différents groupes démographiques, comme les Autochtones qui se distinguent des immigrants, etc.

Je crois que nous commençons à obtenir les données qui nous permettront de faire plus d'analyses approfondies. Mais même lorsque ce sera le cas, la perception de chacun restera un facteur, comme vous l'avez affirmé. Nous constatons que la recherche elle- même est beaucoup plus poussée de nos jours parce que nous avons plus de données et que nous pouvons les ventiler, et aussi parce que nous n'utilisons pas les moyennes. Comme Carolyn l'a mentionné, nous examinons la répartition des gens et nous étudions ce qui arrive à différentes parties de la population. D'une certaine façon, cela complique les choses, parce qu'on doit jongler avec davantage de chiffres, mais je pense que nous commençons à disposer d'outils qui nous aideront à régler certains des problèmes que vous avez mentionnés.

Mme Raymonde Folco: Mais ce n'est pas un système de valeurs individuel; c'est aussi un système de valeurs institutionnel.

M. Doug Norris: Oui.

En ce qui a trait aux médias, j'approuve toutes les observations qui ont été faites, mais, chose intéressante, nous avons de nombreux contacts avec les médias et nous constatons qu'ils s'intéressent aux chiffres. Oui, les chiffres leur posent des problèmes, et ils viennent nous voir pour nous dire qu'ils n'y touchent pas. J'ai entendu ce commentaire. Mais je pense que ça change. Ainsi, nous sommes sur le point de publier les résultats de notre dernier recensement national, et les médias nous ont tout dernièrement approchés pour nous dire qu'ils voulaient travailler avec nous. Ils estiment qu'il est très important de publier les résultats de cette consultation et ils veulent travailler avec nous pour savoir comment s'y prendre. On peut donc espérer que les médias se mettront bientôt à publier des articles. Nous allons travailler très étroitement avec eux pour essayer de communiquer les résultats du recensement par leur intermédiaire également. Je pense donc qu'on va voir certains changements.

La présidente: Sur ce, je veux vous remercier, Carolyn, et je vous prie de transmettre mes remerciements à John, l'autre John, à Doug, à Richard, à Donald et à tous ceux qui ont participé à votre forum. Merci d'être venus aujourd'hui. Je pense que nous avons eu des discussions très intéressantes qui, je l'espère, amèneront les membres du comité à en tenir d'autres. Merci encore.

• 1250

La séance est levée.

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