:
Je souhaite la bienvenue aux membres du comité.
Je vais à présent procéder à l'ouverture de la séance no 21 du Comité permanent de l'environnement et du développement durable.
Nous entendrons trois témoins aujourd'hui. Il s'agit de M. Chris McLaughlin, directeur exécutif, Bay Area Restoration Council, de Mme Nancy Goucher, gestionnaire de programme, Protection environnementale du Canada, et de Conrad deBarros, chef de projet, Office de protection de la nature de Toronto et de la région.
Nous disposons d'une heure et demie pour la séance publique. La sonnerie d'appel se fera entendre à 17 h 15. Nous espérions réserver une période de 20 minutes pour poursuivre la séance à huis clos, mais nous allons réduire cette période à 15 minutes et tenter de conclure les témoignages et les questions à 17 heures au plus tard.
Nous commençons avec M. Chris McLaughlin, du Bay Area Restoration Council, qui fera une déclaration préliminaire d'une dizaine de minutes.
Bienvenue, monsieur McLaughlin.
:
Merci, monsieur le président. Merci, mesdames et messieurs les membres du comité. Au nom du conseil d'administration, du personnel et des bénévoles du Bay Area Restoration Council, communément appelé le BARC, je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole au sujet de cette question importante.
Mon intervention durera moins de 10 minutes et portera principalement sur la partie (c) de la motion adoptée par le comité, soit les pratiques exemplaires qui faciliteront la mise en œuvre de nouvelles mesures d’assainissement locales dans le bassin des Grands Lacs.
Premièrement, je vais parler du port de Hamilton et de son plan d'assainissement. Je sais que plusieurs témoins ont déjà abordé cette question. Je vais vous donner un bref aperçu des activités du BARC et de la situation dans le secteur du port. Je vais aussi faire quelques observations sur le programme des secteurs préoccupants des Grands Lacs en général.
Dans les deux cas, mes observations ont un lien avec le rôle fédéral dans les efforts d'assainissement locaux. Je m'intéresse particulièrement aux caractéristiques des processus de mobilisation des intervenants qui mènent à la réussite ou à l'échec.
Le BARC représente l'intérêt public en ce qui a trait à la restauration du port de Hamilton et de son bassin versant. Il est issu du tout premier groupe de citoyens mis sur pied en 1971 dans le quartier nord de Hamilton, qui surplombait le port -- en fait, il est issu de la cuisine de Gil Simmons. Ce groupe de citoyens a été le premier à dire que c'était assez.
Durant l'élaboration du plan d'assainissement du port de Hamilton dans les années 1980, le groupe de citoyens s'est transformé en comité de consultation publique, puis s'est constitué officiellement en organisme sans but lucratif en 1991 après le lancement du plan d'assainissement. C'est à ce titre que nous poursuivons nos activités depuis 1991.
Le BARC fait partie du groupe officiel d'organismes dirigé par le gouvernement et qui est chargé de mettre en œuvre le plan d'assainissement à Hamilton; et, fait intéressant, ce groupe est également chargé des activités visant à évaluer l'état d'avancement du plan d'assainissement. Un processus multi-intervenants nous permet de recueillir de l'information et d'établir des consensus en vue de suivre les progrès réalisés.
Afin d'encourager l'activité et l'action communautaires, le BARC offre des programmes destinés aux écoles, des programmes de bénévolat, des événements pour les bénévoles et des ateliers communautaires. Il prépare aussi des rapports d'évaluation sur des questions d'actualité et offre des occasions de s'impliquer et de militer dans la sphère numérique. Je vais revenir à ce dernier point dans une seconde.
Le BARC a récemment lancé à nouveau un site Web à l'adresse hamiltonharbour.ca. Nous appelons ce projet le forum communautaire numérique parce que la plupart du contenu sera créé par la communauté. Le but du projet n'est pas seulement de fournir de l'information. Nous donnons la parole aux gens qui veulent soumettre leurs idées, qui veulent faire part de leur expérience et qui souhaitent donner l'exemple. Le projet ne fait que débuter, mais déjà il a attiré un soutien important du gouvernement de l'Ontario et d'autres institutions qui y voient l'occasion de favoriser une mobilisation plus profonde de la communauté, des groupes communautaires et des particuliers ayant le savoir et l'initiative nécessaires pour entreprendre les types de changements aux niveaux individuel, institutionnel et commercial qui seront requis pour poursuivre la mise en place du plan d'assainissement et atteindre les objectifs liés au retrait de la liste des secteurs préoccupants.
Avec l’appui du gouvernement fédéral, le BARC est également en train de créer le site randlereef.ca. Le récif Randle, comme vous le savez sans doute, est le pire dépôt de goudron de houille qui demeure au pays. Le site Web célèbre la réussite du jalon le plus important de la renaissance du port – l’installation de confinement environnemental qui permettra de confiner et d'éliminer toutes les matières toxiques, y compris les HAP et d’autres toxines, dans les sédiments du récif Randle et ailleurs dans le port.
Troisièmement, le BARC a produit en 2012 le plus récent bulletin de rendement consacré au plan d’assainissement du port de Hamilton en utilisant, comme je l’ai signalé plus tôt, une démarche consensuelle mettant à contribution de multiples intervenants de divers secteurs du bassin versant. Dans l’ensemble, les progrès accomplis sont considérables, mais les défis qui restent le sont aussi.
Nous avons sans doute franchi le cap de mi-parcours vers le retrait du port de Hamilton de la liste des secteurs préoccupants, un résultat qui a nécessité de nombreuses petites victoires en cours de route. Bien que plusieurs projets majeurs soient en cours pour améliorer le traitement des eaux usées et assainir les sédiments contaminés, l’avenir du plan d’assainissement est incertain. La question la plus importante est celle de savoir si, au bout du compte, l’environnement réagira aux nombreux projets imaginés pour améliorer la qualité de l’eau et d’autres facettes environnementales dans le port de Hamilton.
Dans notre plus récent bulletin de rendement, la seule note qui a baissé avait trait au manque de progrès au chapitre du contrôle de l'érosion et de la mise en place d'une gestion améliorée et plus durable des eaux pluviales.
L'érosion produit des sédiments qui encrassent les installations de gestion des eaux pluviales, ruinent les habitats aquatiques et rejettent du phosphore dans les eaux réceptrices. Il s'agit d'un problème urbain et d'un problème rural. Il touche les sites de construction autant que les exploitations agricole et il touche des milliers de pelouses et d'entrées de cour. La solution ne sera pas facile.
Il faudra réduire les sédiments et le phosphore pour atteindre nos objectifs en matière de qualité de l'eau. Les efforts que nous avons consentis jusqu'à présent ont nettement amélioré la situation, mais ce n'est pas encore suffisant. Dans les études de politiques, c'est ce qu'on appelle un « déficit de mise en œuvre » : l'écart entre les objectifs que nous fixons et les résultats que nous obtenons.
L'intervention fédérale peut avoir des incidences positives sur les déficits de mise en œuvre. Réduire les contraintes externes sur les responsables de la mise en œuvre, affecter suffisamment de temps et de ressources à la résolution de problèmes, améliorer la coordination et la collaboration dans le cadre des initiatives locales communes, voilà ce que le gouvernement fédéral peut faire en vue de réduire les déficits de mise en œuvre dans des processus tels que les plans d'assainissement.
Une étude récente sur l'histoire du programme des plans d'assainissement dans les Grands Lacs a relevé certaines caractéristiques de ces plans. Dans le cadre de l'étude, on a recueilli des commentaires anonymes de plusieurs dizaines d'intervenants ayant une expérience directe dans l'élaboration et la mise en œuvre de plans d'assainissement dans la région des Grands Lacs : des gens du Canada et des États-Unis, des membres des Premières Nations et des fonctionnaires fédéraux — des gens de tous ces horizons ont participé.
Les auteurs de l'étude ont recueilli et regroupé les éléments qui suivent, en trois étapes. Ils ont recueilli les connaissances directes au sujet des points forts et des limites des plans d'assainissement. Cela a permis de relever ce qui a fonctionné et ce qui n'a pas fonctionné dans le programme des plans assainissement. Par la suite, cela a permis d'élaborer des options stratégiques en vue d'améliorer les processus liés aux plans d'assainissement — en vue, devrais-je dire, d'améliorer la résolution de problèmes environnementaux, la prise de décisions locales de manière collaborative et le processus de prise de mesures — mais les plans d'assainissement étaient l'objet de mon étude.
Des participants de partout au Canada et aux États-Unis, des membres des Premières Nations, des fonctionnaires fédéraux et d'autres encore ayant participé à l'élaboration de plans d'assainissement ont classé ces options en fonction de leur avantage, de leur faisabilité et de leur probabilité de réussite. Je vais vous présenter un échantillon des options stratégiques qui, à mon avis, conviennent le mieux au rôle du gouvernement fédéral.
Premièrement, il faudrait que la coordination gouvernementale soit assurée par des cadres supérieurs ayant une formation et de l'expérience en médiation des méthodes de groupe et sachant se débrouiller dans les arènes politiques.
Deuxièmement, il faudrait s'assurer de la continuité de la coordination gouvernementale. Autrement dit, il ne faut pas que les rôles de coordination soient délaissés pendant de longues périodes et il faut réserver à ces rôles un temps suffisant.
Troisièmement, il faudrait élaborer des ententes avec les intervenants et des plans de travail pour la mise en œuvre qui comportent des responsabilités assignées, des échéanciers, des livrables, ainsi que des critères explicites pour mobiliser de nouveaux intervenants et susciter de nouvelles idées.
Quatrièmement, il faut lier directement les données scientifiques et la surveillance aux besoins stratégiques se rapportant à la restauration des utilisations bénéfiques.
Cinquièmement, il faudrait établir un cadre stratégique global d'élaboration et de mise en œuvre des plans d'assainissement qui prévoit une certaine souplesse au niveau local.
Fait important, les résultats démontrent que ce n'est pas seulement la structure, mais aussi les caractéristiques du processus de résolution de problèmes qui comptent pour la réussite des plans d'assainissement. C'est un élément qui a une grande incidence sur le rôle que joue le gouvernement fédéral dans le rétablissement des eaux littorales des Grands Lacs.
Pour assurer un impact optimal, il faudrait définir le rôle fédéral au moins en partie à l'aide de principes tels que les suivants : il est possible de partager le pouvoir sans y renoncer, si bien que vous devez appuyer la collaboration; nous pouvons choisir nos actions, mais pas leurs conséquences, si bien que vous devez favoriser la souplesse; et c'est notamment grâce à des incitatifs et au travail de champions que les résultats souhaités pourront être obtenus, si bien que vous devez appuyer les intervenants locaux. Les cadres supérieurs de la fonction publique ne peuvent pas contrôler les problèmes et donner des ordres aux intervenants locaux et s'attendre à de bons résultats, mais une intervention fédérale efficace peut faire en sorte que les processus locaux de résolution de problèmes mettant à contribution de multiples intervenants aient la capacité, l'adaptabilité et l'autorité morale requises.
C'est la voie qu'il faut emprunter pour établir un mécanisme concret et efficace de résolution de problèmes.
Merci, monsieur le président.
Bonjour et merci, monsieur le président, de me donner l'occasion de prendre la parole aujourd'hui.
C'est pour moi un honneur d'être parmi vous aujourd'hui. Si je me fie aux transcriptions, on peut espérer que les recommandations issues de votre rapport seront favorables. Je suis encouragée par la qualité de vos questions et de vos témoins, alors je vous félicite.
Comme il a été dit, je m'appelle Nancy Goucher et je suis gestionnaire du programme de l'eau chez Protection environnementale.
Il s'agit d'une organisation environnementale qui inspire le changement en vue de promouvoir un mode de vie plus écologique. Un de nos principaux objectifs est de protéger les Grands Lacs. Nous avons la réputation de savoir communiquer avec le public au sujet de questions qui lui tient vraiment à cœur.
En premier lieu, vous devez comprendre à quel point les Canadiens se soucient des Grands Lacs. Selon un sondage McAllister réalisé en 2007, près des trois quarts des Ontariens et des Québécois sont très préoccupés par la pollution de leurs lacs et de leurs rivières. La même proportion de répondants estiment que les Grands Lacs sont essentiels à notre survie. Quatre-vingt-quatorze pour cent estiment que la qualité de l'environnement aura une incidence sur la santé de leurs enfants et de leurs petits-enfants. Les gens se soucient des Grands Lacs; ils se soucient de la santé des Grands Lacs. Voilà pourquoi il est si important que vous preniez des mesures concrètes pour protéger les Grands Lacs.
Dans le cadre de votre étude, vous posez trois questions. Mes remarques porteront sur la troisième : la mise en œuvre d'autres mesures d'assainissement pour restaurer la qualité de l'eau dans les Grands Lacs. J'ai regroupé mes observations en trois catégories. La première a trait à l'amélioration de la lutte contre les espèces envahissantes; la deuxième a trait à un engagement du gouvernement fédéral à titre de partenaire à part entière dans la gestion de la qualité de l'eau dans les Grands Lacs; et la troisième signale quelques tâches relativement faciles que vous devriez accomplir dans l'immédiat.
Premièrement, des espèces envahissantes telles que la moule zébrée et la lamproie ont eu un effet dévastateur sur les Grands Lacs jusqu'à présent, mais aucune n'a eu un effet comparable à celui qu'aurait la carpe asiatique si elle s'introduisait dans les Grands Lacs. La carpe asiatique est en quelque sorte un super-poisson. Elle peut avaler des quantités massives de nourriture — jusqu'à 20 % de son poids en une seule journée. Elle est extraordinairement athlétique et peut sauter hors de l'eau jusqu'à une hauteur d'un mètre et elle est adaptable et survit dans des conditions où d'autres espèces périssent. Nous l'appelons le poisson-zombie parce que la carpe asiatique peut survivre hors de l'eau pendant 48 heures. Ainsi, elle peut supplanter les espèces indigènes et dévaster les pêches commerciales et récréatives. Elle peut modifier les écosystèmes et dissuader les gens de s'adonner à des activités récréatives parce que les carpes qui sautent peuvent blesser les gens et endommager le matériel. Je vous invite à regarder les vidéos dans YouTube.
En ce moment, le Army Corps of Engineers tente de trouver un moyen d'empêcher la carpe asiatique de se faufiler dans les Grands Lacs. Protection environnementale collabore avec nos homologues américains pour s'assurer que la solution qu'ils choisissent règle le problème une fois pour toutes, ce qui, à notre avis, nécessite la construction de barrières entre les Grands Lacs et les bassins du Mississippi de façon à bloquer de façon permanente l'interaction entre ces plans d'eau. Selon la solution qu'ils choisiront, les coûts s'élèveront à 5 milliards de dollars ou à 18,4 milliards de dollars, et il faudra jusqu'à 25 ans pour achever les travaux.
J'ai espoir que nous pourrons gagner ce combat contre la carpe asiatique. Nous faisons preuve d'initiative en ce moment et je félicite les gouvernements fédéral et provinciaux d'avoir pris des mesures. Par exemple, il semble que le Centre canadien des eaux intérieures ouvrira sous peu un laboratoire de recherches sur la carpe asiatique.
J'ai deux recommandations à formuler. D'abord, il faudrait adopter un règlement sur l'éviscération de la carpe asiatique dans le cadre de la Loi sur les pêches, de façon à ce que toute carpe asiatique importée au Canada soit assurément morte avant qu'elle ne franchisse la frontière. Ensuite, il faudrait que le Canada encourage les États-Unis à ériger une barrière permanente entre les Grands Lacs et le Mississippi. Il se pourrait qu'on nous demande une contribution financière. J'aimerais signaler l'importance d'affecter des fonds à la lutte contre la carpe asiatique, lutte qui nécessite des fonds additionnels en sus des ressources requises pour faire face aux autres enjeux dans les Grands Lacs.
Je passe maintenant à mon deuxième point. La gestion des eaux relève de tous les niveaux de gouvernement et, d'une certaine manière, elle est la responsabilité de chaque propriétaire et de chaque utilisateur d'eau. C'est ce qui rend la protection de cette ressource si complexe. J'aimerais voir le gouvernement fédéral reconnaître son rôle à titre de partenaire clé dans la protection des eaux du Canada, y compris les Grands Lacs.
De récentes décisions du gouvernement fédéral peuvent être interprétées comme une prise de distance envers ce partenariat. Les réductions de personnel radicales à Environnement Canada et au MPO en sont un exemple. Jim Bruce, un ancien employé d'Environnement Canada qui a déjà témoigné devant le comité, a signalé qu'en 1978 il y avait 168 scientifiques et techniciens à Environnement Canada et au MPO affectés à des programmes de lutte contre la pollution dans les Grands Lacs. Il n'est pas facile d'obtenir des données pour effectuer une comparaison, mais compte tenu des récentes compressions aux budgets de fonctionnement, il est probable que nous disposons d'une fraction de cette capacité aujourd'hui.
Ce que nous savons, c'est que, d'ici 2016, Environnement Canada aura la moitié du budget qu'il avait en 2007. Nous craignons que cela ait un impact direct sur la santé et la sécurité des Canadiens. Par le passé, nous avons eu à tirer des leçons de telles situations. Dans les cinq années qui ont précédé la tragédie de Walkerton, où 7 personnes sont mortes et 4 800 sont tombées malades, le ministère de l'Environnement de l'Ontario a coupé son budget de 68 %.
Le Canada a la responsabilité d'être un bon partenaire des États-Unis dans la gestion des Grands Lacs. Dans le cadre de l'initiative de restauration des Grands Lacs, les États-Unis ont investi 1,68 milliard de dollars depuis 2010. Cela ne tient pas compte des fonds affectés aux réseaux d'approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées ni de la contribution des municipalités et de leurs partenaires. Encore une fois, on ne dispose pas des données canadiennes correspondantes, mais selon les documents budgétaires canadiens, le plan d'action pour les Grands Lacs a obtenu seulement 13 millions de dollars depuis 2010. Même si on garde à l'esprit la différence par habitant, le Canada verse une fraction de ce que les États-Unis investissent.
Les scientifiques nous disent que trois des quatre Grands Lacs de l'Ontario sont en déclin. La situation se détériore en raison des tempêtes qui sont plus fréquentes et plus intenses, de la charge en éléments nutritifs qui augmente, et de la menace de nouvelles espèces envahissantes. Ce n'est pas le moment d'imposer des compressions aux activités scientifiques et de surveillance. La Coalition du budget vert recommande que nous augmentions le financement destiné à la gestion des Grands Lacs à 115 millions de dollars par année.
De plus, compte tenu du manque de clarté concernant la capacité fédérale affectée à la protection de la qualité de l'eau des Grands Lacs, je suggère que des rapports annuels soient produits au sujet des effectifs et des budgets de fonctionnement liés aux Grands Lacs. Dans ces rapports, il faudrait décrire les mesures déjà prises en réponse aux questions prioritaires et les mesures qui seront prises pour faire face aux nouvelles préoccupations.
Enfin, il y a quelques mesures qui pourraient être prises immédiatement.
Premièrement, il faudrait que nous signions l'Accord Canada-Ontario, aussi appelé l'ACO. L'ACO précédent a expiré en juin 2012. Il est essentiel de mettre en place un ACO révisé afin de démontrer notre engagement à respecter nos obligations dans le cadre du protocole de 2012 découlant de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs. Nous attendons présentement l'approbation des huit ministères fédéraux concernés. Tout ce que vous pourriez faire pour accélérer ce processus serait apprécié.
Deuxièmement, il y a le soutien et le respect à l'égard de la Commission mixte internationale, une institution de renommée mondiale qui a joué un rôle crucial pour prévenir et résoudre les différends liés à l'eau entre le Canada et les États-Unis. La réussite de la Commission mixte internationale est en partie attribuable à son aptitude à prendre des décisions fondées sur des faits scientifiques et à demeurer relativement neutre sur le plan politique. Cela doit continuer.
Nous devrions commencer par nous assurer que les trois sièges que nous avons à la Commission sont toujours occupés. L'année dernière, un de ces sièges est demeuré vacant pendant plus d'un an et un autre l'est demeuré pendant quelques mois. Depuis janvier, nous avons un autre siège vacant. Il nous faut un groupe complet de commissaires qui sont intelligents et capables d'interpréter des données scientifiques en vue de rendre des décisions raisonnables sur des questions transfrontalières complexes liées à l'eau. Faute de commissaires solides, il est difficile de savoir si nous défendons adéquatement les intérêts canadiens, d'autant plus que notre groupe est relativement petit comparativement à celui des États-Unis.
Pour conclure, nous savons que les Canadiens se soucient des Grands Lacs et qu'ils veulent que leurs dirigeants politiques prennent les mesures requises pour faire face aux menaces actuelles et naissantes. Nous vous demandons de travailler de manière concertée pour protéger les lacs contre les espèces envahissantes, d'investir davantage dans les ressources scientifiques, de signer l'ACO et de nommer un commissaire ayant les compétences requises à la Commission mixte internationale.
Merci.
Bonjour à tous. Je m'appelle Conrad deBarros. Je travaille à l'Office de protection de la nature de Toronto et de la région à titre de gestionnaire de projets. Ma tâche est de coordonner le Plan d'assainissement pour les secteurs préoccupants à Toronto et dans la région.
Je vous remercie de m'avoir invité à cette réunion et de me donner la chance de partager mon point de vue sur les efforts déployés pour protéger et améliorer la qualité de l'eau et la santé de l'écosystème du bassin des Grands Lacs.
Étant donné que des témoins précédents ont déjà parlé des initiatives et des besoins relatifs aux secteurs des Grands Lacs, notamment le lac Érié, les rivières Thames et Grande, et la rive sud-est du lac Huron, j'aborderai plus précisément le lac Ontario dans ma présentation, surtout l'extrémité ouest du lac. Pourquoi le lac Ontario? Cinquante-six pour cent de la population ontarienne vit dans la région du lac Ontario. Cette urbanisation contribue à la perte du couvert et des habitats naturels, et altère ainsi le cycle hydrologique et la qualité de l'eau. La rivière Don, qui se jette dans le port intérieur de Toronto, a été reconnue comme une des rivières les plus polluées du Canada. La pollution du lac Ontario est aussi causée par les autres Grands Lacs et la rivière Niagara qui s'y jette.
Je vais aborder les trois questions ciblées par votre étude, en commençant par l'établissement des secteurs préoccupants sur le plan environnemental dans le bassin des Grands Lacs et de la priorité à accorder à chacun.
J'aimerais vous présenter un aperçu du secteur préoccupant de Toronto et de la région. La première diapositive délimite le secteur préoccupant et fournit des statistiques sur les éléments qui le composent. Par exemple, il renferme six bassins hydrographiques distincts et 45 kilomètres de la rive du lac Ontario. Il s'agit d'un secteur hautement urbanisé où l'urbanisation se poursuit.
Depuis 27 ans, l'Office de protection est un partenaire très actif qui travaille en collaboration avec Environnement Canada, les ministères de l'Environnement et des Ressources naturelles de l'Ontario et la Ville de Toronto pour coordonner et mettre en œuvre le plan d'assainissement.
Au cours de ces 27 ans, des progrès importants ont été accomplis en vue de remédier aux conditions environnementales ayant mené à la désignation de Toronto et de la région à titre de secteur préoccupant. Environ 35 hectares de zones humides et d'habitats de poissons ont été restaurés le long des rives; toutefois, ce processus est en cours et il reste encore du travail à faire. La qualité de l'eau le long des rives a été améliorée, mais il y a toujours des problèmes de pollution urbaine de source non ponctuelle dans la rivière Don et le port intérieur de Toronto durant les périodes de pluie.
La mise en œuvre du volet pour la rivière Don et le secteur riverain central, dans le cadre du Plan directeur pour la gestion des débits par temps pluvieux de la ville de Toronto, est essentielle pour protéger et améliorer la qualité de l'eau. II s'agit de la principale initiative nécessaire pour retirer la région de la liste de secteurs préoccupants.
Un des défis que doivent relever les secteurs préoccupants du port de Hamilton ainsi que de Toronto et de la région est la croissance de leur population et le développement urbain.
La diapositive projetée montre que nous avons beaucoup de difficulté à maintenir la qualité de l'eau dans les affluents. La qualité de l'eau est mauvaise et nous parvenons à empêcher qu'elle se détériore encore. Le graphique sur cette diapositive illustre les tendances. La diapositive montre les niveaux de chlorure dans les cours d'eau du secteur préoccupant de Toronto et de la région de 1965 à 2004. Les niveaux de chlorure sont directement liés au développement urbain. En effet, plus il y a de routes, plus il y a de sel qui est déversé dans les cours d'eau à cause du salage hivernal, ce qui augmente les niveaux de chlorure.
Les sources non ponctuelles de pollution, particulièrement les sources non ponctuelles urbaines, sont très difficiles à gérer, comme Chris l'a signalé. Il s'agit de l'un des plus gros défis associés au développement du centre urbain de Toronto.
Au-delà des secteurs préoccupants du port de Hamilton ainsi que de Toronto et de la région, la croissance de la population pose aussi une menace pour la qualité de l'eau de l'extrémité ouest du lac Ontario; ce secteur, connu comme le Golden Horseshoe, s'étend de Niagara à la ville d'Oshawa.
Je vais passer à la deuxième question posée dans le cadre de votre étude, soit l'examen des efforts en cours ou prévus pour assainir les secteurs préoccupants.
La région élargie du Golden Horseshoe est l'une des régions dont la croissance est la plus importante en Amérique du Nord. On pense que d'ici 2031 la population de la région aura dépassé d'environ 4 millions le chiffre recensé en 2001 pour atteindre 11,5 millions d'habitants, ce qui représente plus de 80 % de la croissance de l'Ontario.
La diapositive que je projette présentement a trait à Toronto, mais elle vous donne une idée des difficultés que nous éprouvons et du taux d'accroissement de la population. Cela découle du développement urbain. Il est extrêmement difficile de protéger le couvert naturel lorsque le développement urbain s'étend et élimine ce couvert.
L'ampleur de la croissance à l'ouest du lac Ontario exercera de fortes pressions sur le couvert terrestre au fur et à mesure que le sol est asphalté et durci pour accueillir la hausse de population. La santé hydrologique des cours d'eau et des rivières ainsi que la qualité de l'eau et la santé des écosystèmes dans les affluents et le lac Ontario vont se dégrader si cette croissance n'est pas contrôlée.
:
Cette diapositive vous montre encore une fois la croissance démographique. Si vous regardez le graphique à gauche, il indique la croissance en Ontario. On peut voir la croissance démographique de 1950 à 2000 dans la région des Grands Lacs, y compris celle des États des Grands Lacs; la ligne mauve représente le taux de croissance en Ontario.
Toutefois, ce que je tenais à souligner, c'est la densité démographique. Les points bleus représentent le côté canadien des Grands Lacs. Si vous regardez de ce côté-ci, vous pouvez voir les secteurs où se produit la croissance, les secteurs en rouge et en orange, à l'ouest du lac Ontario. Pour atténuer l'impact de cette croissance rapide sur la santé des écosystèmes, il est important de ne pas se confiner aux deux secteurs préoccupants. Le concept des secteurs préoccupants n'a pas été mis au point pour répondre aux conséquences d'une vaste croissance démographique. Nous devons adopter une perspective plus régionale.
Nous devons commencer dès que possible la planification et la mise en œuvre d'une stratégie pour faire face à la croissance démographique dans ce secteur. Le lac Ontario montre déjà des signes de détérioration. Cladophora, une espèce d'algues vertes filamenteuses qui ressemblent à de longs cheveux verts qui poussent sur des surfaces dures au fond de l'eau, a proliféré en raison de l'invasion de moules zébrées et quaggas.
Les moules zébrées et quaggas, qui sont des espèces envahissantes, ont altéré le cycle des nutriments dans le lac. Elles concentrent les nutriments dans le fond de l'eau des zones côtières, ce qui augmente la productivité et crée une croissance excessive de Cladophora. Cette croissance excessive menace la qualité de l'eau et bouche les entrées d'eau des centrales électriques, ce qui peut entraîner des interruptions de service imprévues, et lorsqu'elles se détachent du fond du lac, elles sont rejetées sur la rive et forment d'horribles tas nauséabonds. Il y a un trop grand nombre de moules dans le lac Ontario; il y a trop d'algues près des côtes; il n'y a pas assez d'aliments pour les poissons; et il y a trop peu de poissons en eaux libres.
L'initiative de surveillance binationale intensive de 2008 sur le lac Ontario a permis de relever des faits intéressants. On estime qu'il y a 9,7 billions de moules dreissénidées dans les eaux des zones côtières du lac Ontario. Elles sont en mesure de filtrer le volume des eaux des zones côtières en un à sept jours environ. Cependant, le phosphore produit par ces moules n'était pas suffisant pour maintenir les populations de Cladophora. La concentration de phosphore des affluents aboutissant dans le lac était 234 % plus élevée que celle des usines de traitement des eaux usées, et le phosphore des affluents est un facteur déterminant pour ce qui est de la condition des zones côtières et de l'abondance de Cladophora et de moules zébrées dans certains secteurs.
Les modes d'utilisation des terres ont une incidence sur la qualité de l'eau des zones côtières, et les secteurs urbanisés ont l'incidence la plus forte. Encore une fois, nous devons nous pencher sur la croissance urbaine et nous devons commencer à faire face aux problèmes qui en découlent d'une manière plus durable.
Finalement, pour ce qui est de la dernière question de votre étude, soit la recommandation de pratiques exemplaires qui faciliteront la mise en œuvre d'autres mesures d'assainissement dans les secteurs préoccupants dans le bassin des Grands Lacs, j'aurais quelques points à signaler.
Mon premier point est que nous devons mettre l'accent sur le maintien des partenariats et l'achèvement des mesures amorcées dans les secteurs préoccupants. Pour bon nombre de secteurs préoccupants, l'aboutissement se profile à l'horizon : nous pourrons finir le travail et retirer ces secteurs de la liste. Nous avons atteint cette étape, mais nous devons rester alertes et conscients des nouvelles menaces.
L'établissement de partenariats est une des pratiques de gestion exemplaires qui est ressortie des 43 dernières années et plus d'expérience en matière de protection et de restauration des Grands Lacs. Aucun gouvernement, aucun organisme, aucun groupe à lui seul n'a la capacité et le savoir-faire pour assumer la tâche de préserver « la grandeur de nos Lacs ». J'emprunte cette expression à une personne que Chris et moi connaissons bien.
Nous disposons de nombreux partenaires compétents pour nous aider dans cette tâche. Nous devons les mobiliser et nous devons les mobiliser d'une manière stratégique.
Nous savons qu'il vaut mieux prévenir que guérir. Agissons de façon plus intelligente et occupons-nous des menaces prévisibles, comme la croissance de la population dans la partie sud des Grands Lacs ou l'expansion de l'industrie d'extraction qui se produit dans le bassin du lac Supérieur, afin de mettre en place des mesures préventives avant que les effets néfastes ne se manifestent. À certains égards, nous devons être proactifs plutôt que réactifs en ce qui a trait à la protection et à la restauration des Grands Lacs. C'est logique et c'est moins coûteux.
La dernière pratique de gestion exemplaire est la vigilance constante. Nous devons maintenir nos efforts. Nous devons maintenir nos mesures de protection afin d'assurer qu'il n'y aura pas de régression après tous les investissements consentis au fil des ans. Nous devons être conscients que les lacs changent. Le climat change. Il y a de nouvelles menaces. Nous devons y faire face et nous devons apprendre à nous adapter.
:
Il sera probablement difficile de décrire exactement ce que cela va signifier. Un jour, il y aura une manchette dans le
Globe and Mail indiquant que le port de Hamilton n’est plus sur la liste des secteurs préoccupants. Ce sera une nouvelle partout dans le pays.
Il ne fait aucun doute que les vieilles perceptions persistent malgré les améliorations. Une grande partie de la communauté est coupée du secteur riverain. La communauté est spectaculaire avec la vallée de Dundas, l’escarpement et la rive. Elle a des atouts naturels que d’autres communautés partout au pays ne peuvent qu’envier et, pourtant, au fil de nombreuses décennies, il est devenu impossible à un moment donné — pas seulement sur le plan matériel, mais aussi sur le plan légal — de toucher au port de Hamilton. La plus grande partie de la rive avait été industrialisée. Elle était coupée de la communauté. Je pense vraiment que mon travail consiste à rappeler aux gens qu’ils habitent dans une ville riveraine.
Les impacts des investissements dans ces grands projets sont très importants, car 50 % de l’eau qui est rejetée dans le port de Hamilton passe par les usines de traitement. Cela veut dire que l’autre 50 % de l’eau ne passe par aucune technologie. La technologie ne sauvera pas la situation à cet égard. La lutte contre le phosphore et les autres sources de pollution chimique et biologique exigera une dimension humaine en plus de la dimension technologique, si bien qu’il faudra des changements sur le plan des lois, des politiques et des comportements pour accompagner une meilleure infrastructure de drainage des eaux pluviales, par exemple. Aujourd’hui, le trop-plein des eaux usées sera versé dans le port de Hamilton. Il y a encore deux milliards de litres d’eaux usées non traitées qui sont rejetées dans le port chaque année. Il s’agit d’une très petite fraction de la quantité autrefois déversée, et c'est grâce à l’amélioration du traitement des eaux usées, mais il y a encore des changements importants, à la fois technologiques et non technologiques, à apporter, qui sont parfois plus difficiles à mettre en œuvre.
Pour répondre à votre question, ce sera un pas en avant très important dans l’esprit de notre communauté. Je peux vous dire que la restauration du port suscite beaucoup d’enthousiasme. Vous ne pouvez pas vous tromper en appuyant ces projets. Vous ne pouvez pas vous tromper.
:
Absolument. De nombreux témoins différents sont venus vous dire que les changements climatiques auront des impacts sur les Grands Lacs.
Il y aura un certain nombre de changements fondamentaux. Les eaux seront plus chaudes et les pluies plus intenses et ces deux phénomènes vont entraîner une augmentation de la prolifération des algues, en particulier dans le lac Érié. D'autre part, en raison des eaux plus chaudes et des hivers plus doux, la couche de glace sera plus mince, ce qui occasionnera une plus grande évaporation et par conséquent une diminution du niveau des lacs. La situation sera plus complexe que cela, mais voilà quels sont les facteurs importants.
Pour ce qui est des solutions, je dirais que nous devons à la fois envisager des mesures d'atténuation et d'adaptation. Sur le plan de l'adaptation, les organismes de conservation et leurs partenaires sur le terrain ont fait un excellent travail en vue de construire des villes et des quartiers plus résilients.
Quant au rôle fédéral, je pense que le gouvernement a un rôle direct à jouer: en appuyant les collectivités pour les aider à réagir aux inondations et aux périodes de sécheresse, en finançant les mises à niveau des infrastructures et la planification d'urgence et en renouvelant le Programme de réduction des dommages dus aux inondations afin de ne plus construire dans des zones inondables.
Je pense également que les changements climatiques nous obligeront à rationaliser nos politiques de réglementation des eaux. Toutes les décisions que nous prenons relativement aux eaux devront tenir compte de l'impact des changements climatiques.
Par ailleurs, il nous faudra prendre des mesures d'atténuation. Au niveau provincial et même au niveau municipal, je pense que beaucoup de collectivités travaillent à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Là aussi, nous avons besoin d'un engagement plus ferme de la part du gouvernement fédéral.