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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 019 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er avril 2014

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    La 19e séance du Comité permanent de l'environnement et du développement durable est ouverte.
    Nous avons aujourd'hui le plaisir d'accueillir quatre groupes de personnes qui vont témoigner dans le cadre de notre étude sur la qualité de l'eau dans le bassin des Grands Lacs.
    Je souhaite la bienvenue à M. David Sweetnam, directeur exécutif de Georgian Bay Forever.
    Nous accueillons également M. Jan Ciborowski, professeur à l'Université de Windsor, James Brennan et Mark Gloutney, directeurs au sein de Canards Illimités Canada, et Mary Muter, vice-présidente du Sierra Club du Canada.
    C'est dans ce même ordre que nous allons procéder à moins que vous en ayez convenu autrement.
    Nous allons donc commencer par Georgian Bay Forever. M. Sweetnam, vous avez la parole. Je vais vous demander de nous présenter un exposé d'environ 10 minutes, après quoi nous entendrons l'autre témoignage avant de passer à nos deux séries de questions.
    Soyez le bienvenu.
    Merci, monsieur le président.
    Les effets du changement climatique sont à la fois étendus et profonds. Pour y faire face, il nous faut des modes de gestion évolutifs, mis en oeuvre par des institutions en mesure de réagir vite. Il nous faut en outre une réglementation qui ait la souplesse nécessaire, et aussi des systèmes d'alerte précoce.
    Selon le rapport sur le changement climatique rendu public hier par les Nations Unies, cependant, les maux entraînés par le changement climatique vont être d'une telle ampleur qu'il faudra mettre en oeuvre des mesures d'atténuation pour éviter les risques les plus graves. Réagissant à ce rapport, John Kerry, secrétaire d'État américain, a déclaré que d'après les données de la science, si nous ne prenons pas, dès maintenant, des mesures radicales, notre climat et notre mode de vie seront mis en péril.
    C'est à la fois un avertissement et un puissant appel à l'action.
    Les effets secondaires que le changement climatique aura sur l'environnement — et je parle là de la qualité de l'eau, des espèces envahissantes, du niveau des eaux, de l'érosion des habitats — ont de quoi nous alarmer. Mais les impacts économiques qui en découlent pourraient se chiffrer par milliards, portant gravement atteinte au tourisme, au prix des propriétés, à la navigation et à divers autres secteurs clés de l'activité économique. Il nous faut effectuer davantage de recherches sur les impacts économiques, mais au plan de l'environnement, les maux anticipés sont déjà manifestes.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs membres du comité, Georgian Bay Forever est heureux d'avoir été invité à vous présenter un exposé et à vous faire part de ses observations et de ses recommandations, et de contribuer ainsi à vos travaux qui visent essentiellement à protéger la qualité de l'eau et à promouvoir la viabilité environnementale de la région des Grands Lacs.
    Georgian Bay Forever est une organisation caritative créée il y a presque 20 ans. Elle s'est donnée pour mission de contribuer à la connaissance scientifique des écosystèmes aquatiques des Grands Lacs, et à diffuser des informations objectives afin que le public soit mieux à même de savoir ce qui se passe. Vous avez déjà recueilli le témoignage de divers chercheurs dont les travaux ont été financés par Georgian Bay Forever, ou avec lesquels nous avons collaboré au fil des ans.
    Les écosystèmes aquatiques de nos Grands Lacs demeurent gravement menacés. Les mesures qui ont été prises, telles que l'élevage d'espèces exotiques pour contrôler les gaspareaux, et les 30 millions de dollars consacrés chaque année aux moyens chimiques et biologiques de contrôler la lamproie marine nous permettent simplement d'éviter l'effondrement de systèmes déjà mis à mal. Récemment, les moules zébrées, et maintenant les quaggas qui les ont remplacées, ont miné les fondements mêmes de la chaîne alimentaire, ce qui a provoqué une nouvelle baisse de la biomasse de poisson, la population de diporéas, dont se nourrissent les poissons, ayant baissé de 95 % depuis l'année 2000.
    Le rapport de l'ONU ne fait que confirmer ce que l'on peut déjà constater dans les Grands Lacs. Selon ce rapport, une « large fraction » des espèces dulcicoles sont de plus en plus menacées d'extinction. Toujours selon le rapport, on assistera d'ici 2100 à une chute des stocks mondiaux de poisson.
    Selon les biologistes, il fut un temps où dans les lacs Michigan et Huron, on trouvait parmi de nombreuses autres espèces, 12 variétés différentes de truite de lac. Il n'en reste plus que deux. Dans la baie Georgienne, se trouve une des seules populations autonomes de cette espèce indigène ailleurs que dans le lac Supérieur et, dans la brochure qui vous a été, je crois, remise, vous pourrez me voir photographié avec un de ces poissons.
    Nous commençons tout juste à comprendre les incidences du changement climatique sur la qualité, certes, mais aussi sur la quantité de l'eau dans les Grands Lacs. Les grosses pluies qu'amènent des orages plus intenses ont entraîné une augmentation des rejets d'eaux usées non traitées, et le ruissellement des eaux de surface contaminées par les engrais agricoles ou à gazon ont été récemment mis en cause dans les rapports de la Commission mixte internationale faisant état dans le lac Érié de niveaux records d'algues nuisibles et toxiques.
    Mais cette prolifération ne touche pas seulement le lac Érié. La baie d'Esturgeon dans la région de Pointe au Baril, dans l'est de la baie Georgienne, éprouve actuellement des entraves à la circulation à la limite extérieure de la baie. À la page 2, vous trouverez une diapositive qui donne une idée de ce qu'il en est. Les impacts sont, dans cette région, sensiblement les mêmes que ceux que l'on constate actuellement dans le lac Érié. En raison de son odeur, de son goût et peut-être aussi de sa toxicité, on ne peut non seulement pas boire l'eau, mais même pas y être au contact.
    Georgian Bay Forever a financé des études sur les causes de cette prolifération d'algues et nos techniques de codage de l'ADN par code à barres permettent un diagnostic rapide de l'éventuelle toxicité de ces algues.
    La baisse du niveau d'eau a également contribué de manière indirecte à l'érosion des écosystèmes en raison du réchauffement de l'eau. Le réchauffement de l'eau y est en effet pour beaucoup dans l'évaporation des eaux des Grands Lacs encore plus que la couverture de glace que l'on a pu constater l'été passé, phénomène que nous comprenons moins encore. Vous pourrez voir, dans la brochure qui vous a été remise, que les niveaux de l'eau des lacs Michigan et Huron sont en fait inférieurs à ce qu'ils étaient en avril 2012, année où le niveau de l'eau avait baissé comme jamais auparavant.
(1535)
    C'est dire que malgré ce que peuvent en dire les médias, la situation est loin d'être rétablie.
    Il va nous falloir des instruments à la fois nouveaux et novateurs, une volonté plus affirmée et des délais de réaction plus brefs si nous voulons être à même de déceler les risques et les menaces qui surgissent, et d'y réagir. Il nous faut des données de référence plus complètes pour obtenir des mesures quantifiables de la biodiversité. Georgian Bay Forever a financé des études pilotes sur l'application de certains de ces nouveaux outils tels que le codage de l'ADN par code à barres.
    GBF a également noué des collaborations avec les municipalités riveraines en vue d'établir en commun des protocoles d'analyse de la qualité de l'eau. Cela va permettre aux cantons qui entourent la baie de contrôler la qualité de l'eau dans leurs secteurs respectifs. Nous étoffons nos connaissances en ce domaine en ajoutant à nos moyens actuels de nouveaux outils de diagnostic tels que le dépistage des sources de pollution microbienne, le but étant de mieux comprendre les origines des divers produits contaminants et d'en améliorer la gestion.
    Nous venons d'achever une étude approfondie des conditions historiques, en recourant aux concepts et méthodes de la paléolimnologie afin d'établir des conditions de référence nous permettant d'évaluer la qualité actuelle de l'eau et, par conséquent, de mieux comprendre les changements qui sont intervenus. Nous avons pu constater dans de nombreuses baies des algues bleu-vert, et, si la situation s'aggrave, ces zones vont vraisemblablement se dégrader.
    GBF a financé des recherches sur les terres humides riveraines que certains tiennent pour des usines de traitement des eaux des Grands Lacs, mais il nous faut admettre que, dans de nombreux domaines, nos connaissances sont incomplètes et qu'on ne peut guère fonder nos politiques sur des conclusions qui reposent elles-mêmes sur des données insuffisantes.
    Prenons, par exemple, la région de Honey Harbour, où nous avons, au cours des 10 dernières années, mené une part importante de nos recherches. Dans cette région, certaines des terres humides riveraines se sont agrandies par rapport à ce qu'elles étaient dans le passé, mais d'autres ont disparu. Si l'on veut être en mesure de prévoir les impacts sur les habitats du poisson et sur la qualité des eaux riveraines, nous allons devoir mieux comprendre les effets nets de ces changements. Nous manquons cependant de certaines données scientifiques de base, notamment en ce qui concerne les secteurs situés côté canadien.
    Plusieurs techniques permettraient de recueillir les renseignements qu'il nous faut. Citons, par exemple, les techniques de télédétection telles que les systèmes radars légers. Or, seul le gouvernement fédéral a les moyens nécessaires. Je précise qu'il s'agit non seulement d'améliorer la qualité de nos décisions actuelles, mais d'être à même de continuer à le faire dans un lointain avenir. Comme l'ont dit déjà plusieurs témoins, il nous faut comprendre que les Grands Lacs forment un système intégré. Il nous faut envisager la situation de manière holistique et entreprendre des analyses globales interdisciplinaires et ne pas s'en tenir à l'étude de tel ou tel bassin hydrographique pris individuellement. Le Canada et les États-Unis vont devoir financer conjointement les recherches nécessaires, et les projets et modèles d'assainissement devront recevoir des financements pluriannuels.
    Il n'y a guère de doute qu'il nous faut dès maintenant nous préparer aux changements que va éprouver le système, mais on comprend de mieux en mieux que la simple adaptation à des changements radicaux ne suffira peut-être pas, et nous allons devoir trouver le moyen d'atténuer les impacts qui sont à prévoir. Or, il faut pour cela réunir sans attendre les ressources nécessaires et recueillir d'urgence des données plus solides afin de mieux comprendre les changements que va subir le système.
    Comme l'a aussi dit le secrétaire d'État américain, John Kerry, certains prétendent que nous ne pouvons pas nous permettre de prendre les mesures nécessaires. Mais s'il y a quelque chose que nous ne pouvons vraiment pas nous permettre, c'est d'attendre.
    Face aux menaces qui se profilent, et qui risquent de se réaliser à très brève échéance, nos institutions sont effectivement un petit peu démunies. C'est pourquoi, étant donné que la baisse du niveau d'eau, essentiellement due au changement climatique, fait peser une menace sur la qualité de l'eau, et que le département d'État américain a, suite à la diffusion du rapport de l'ONU, manifesté l'urgence qu'il y a à réagir aux impacts du changement climatique, nous appelons le comité à recommander que le Canada et les États-Unis s'entendent d'urgence sur les mesures d'atténuation de la baisse du niveau d'eau dans les Grands Lacs, et en particulier dans les lacs Michigan et Huron.
    Étant donné que les Grands Lacs doivent être considérés comme formant un seul système, le Canada doit augmenter les crédits affectés aux projets d'assainissement des Grands Lacs, et porter ces financements à un niveau en rapport avec la responsabilité qu'il a, conjointement avec les États-Unis, de protéger les Grands Lacs. Il va par ailleurs falloir pour cela renforcer les mécanismes de collaboration transfrontalière afin de résoudre les problèmes qui se posent dans les Grands Lacs, tels que la prolifération d'algues, les espèces envahissantes, le niveau de l'eau et la qualité de l'eau.
    Il va falloir porter au niveau nécessaire les crédits qu'exige la mise en oeuvre du protocole de 2012 concernant l'Accord Canada-États-Unis relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs. Il faut en outre réunir les moyens d'assurer l'entrée en fonction des Conseils relatifs au niveau d'eau des Grands Lacs afin d'améliorer nos connaissances scientifiques sur ce qui se produit actuellement. Nous recommandons la mise en oeuvre d'un programme à court terme afin de surveiller de près et d'éliminer la carpe asiatique. Suite aux conclusions consignées dans l'étude sur les transferts interbassins entre les Grands Lacs et le Mississippi, nous appelons à la séparation de ces deux grands bassins.
    Nous recommandons que le Comité exécutif des Grands Lacs fasse tous les trois ans rapport à votre comité sur l'avancement des mesures de protection et d'assainissement des Grands Lacs, votre comité faisant à son tour rapport au Parlement. Et puis, le gouvernement doit finaliser l'Accord Canada-Ontario.
    Je voudrais pour terminer attirer l'attention du comité sur une étude que nous finançons actuellement sur les impacts de la baisse du niveau d'eau des Grands Lacs sur l'économie de la région. Cette étude est actuellement menée par le Mowat Centre de l'Université de Toronto en partenariat avec le Conseil de la région des Grands Lacs. Elle devrait démontrer les coûts très élevés qu'entraînerait tout retard dans la mise en oeuvre d'une solution à la baisse du niveau d'eau due au changement climatique, et confirmera combien il est important de prendre des mesures d'atténuation. C'est très volontiers que nous reviendrions devant le comité pour discuter des résultats de cette étude.
(1540)
    Je tiens, encore une fois, à remercier le comité de nous avoir offert cette occasion de contribuer à ses travaux.
    Merci, monsieur Sweetnam.
    Nous passons maintenant la parole au professeur Jan Ciborowski, de l'Université de Windsor.
    Professeur, vous avez la parole.
    C'est un plaisir pour moi d'avoir été invité à prendre la parole devant vous.
    Je m'appelle Jan Ciborowski et je suis professeur au département des sciences biologiques de l'université. J'y enseigne depuis 1984. Mon domaine est l'écologie aquatique et je cherche à mieux comprendre les liens entre les sources d'agression environnementale et le biote qui les subit. Je me livre depuis le début des années 1990 à des travaux portant sur les Grands Lacs.
    Compte tenu de l'étendue des surfaces englobées par les Grands Lacs, et des problèmes qui s'y manifestent, je me suis attaché à prendre part et aussi à contribuer à des travaux de recherche en collaboration avec divers organismes gouvernementaux des deux côtés de la frontière. Il s'agit de parvenir à mieux cerner les problèmes et à nouer des collaborations en rapport avec l'étendue des problèmes auxquels nous devons faire face. Je suis heureux de l'occasion qui m'est donnée d'apporter mon point de vue sur les questions qui retiennent actuellement l'attention de votre comité.
    Je voudrais maintenant aborder une à une les questions que vous avez énumérées. La première question est: dans quelles zones les problèmes environnementaux paraissent-ils les plus aigus?
    Lorsqu'il s'agit de cerner les zones où surgissent ces divers problèmes, on a le choix entre deux approches. Une première stratégie consiste à protéger les zones qui revêtent actuellement la plus grande importance tant au niveau de la nature qu'au niveau de l'économie, et en particulier les zones qui risquent de perdre leur valeur, soit en raison de la disparition des espèces, soit en raison de la destruction des habitats sur lesquels ces espèces dépendent pour leur survie. On se préoccupe, en même temps, de la perte de valeur économique et de la valeur esthétique, deux choses extrêmement importantes pour les populations environnantes.
    Les zones en question ont été diversement définies dans le cadre d'initiatives engagées par des groupes voués à la conservation, dont Conservation de la nature Canada, et, aux États-Unis, la U.S. Nature Conservancy. En 2000, la Conférence sur l'état de l'écosystème des Grands Lacs (CEEGL) a dégagé le concept d'aires d'investissement dans la biodiversité. C'est en fonction de ces aires qu'ont été menées une bonne partie des initiatives tendant à la protection également des rivages des Grands Lacs. Il s'agit des zones les plus importantes, car elles hébergent des espèces auxquelles on tient particulièrement, dont elles constituent le principal habitat, ou bien parce qu'il s'agit de zones particulièrement productives.
    Au Canada, la protection de ces zones est assurée dans le cadre des parcs provinciaux et des parcs nationaux, ainsi que dans certaines zones particulières. Le MRNO, les municipalités concernées et les organismes locaux de conservation participent aussi aux efforts en ce sens. Nul ne conteste que, pour protéger les espèces et leur environnement, il faut protéger et rétablir leur habitat. Cela relève, à l'échelle nationale, des responsabilités du COSEPAC, qui identifie les espèces en péril au sein de leur habitat et, au niveau fédéral, du ministère des Pêches et des Océans, qui est chargé de l'application des dispositions législatives concernant l'habitat du poisson.
    La seconde stratégie, qui contribue elle aussi à une meilleure compréhension du phénomène, consiste à restaurer les zones dont la dégradation nuit à une utilisation bénéfique. Dans les années 1970, la Commission mixte internationale avait identifié 14 utilisations bénéfiques des eaux des Grands Lacs et des terres environnantes. On considère comme zones problématiques, les zones dont l'utilisation bénéfique a été diminuée. On concentre sur elles les efforts de restauration afin de rétablir, justement, ces utilisations bénéfiques.
    Quarante-deux zones problématiques ont été identifiées, dont 12 situées entièrement au Canada, et 5 qui relèvent des responsabilités des deux pays puisqu'elles entourent, dans la région des Grands Lacs, des voies interlacustres. Des 17 zones problématiques relevant entièrement du Canada, 3 ont pu être retirées de la liste, et 2 sont en cours de rétablissement. Les 7 zones problématiques canadiennes qui restent et les 5 zones binationales demeurent dépréciées, la plupart en raison d'une dégradation de l'habitat et de la contamination des sédiments.
    Les atteintes les plus nombreuses, qui concernent toutes les zones problématiques, consistent en la dégradation de l'habitat du poisson et de la faune, et la déperdition des invertébrés benthiques dont s'alimente le poisson. Les dégâts constatés font obstacle aux travaux de dragage des sédiments qui permettraient la réhabilitation des terres, mais imposent également des limites à la consommation de poisson. L'autre grande atteinte à l'utilisation bénéfique de ces zones est l'eutrophisation, c'est-à-dire la prolifération d'algues nuisibles. Cela est vrai à la fois dans les zones problématiques des Grands Lacs et dans les zones protégées, ainsi que M. Sweetnam l'a fait remarquer plus tôt. Cela est particulièrement manifeste le long des rivages et dans les eaux littorales des Grands Lacs.
    Si nous souhaitons réellement rétablir ces zones, il nous faudra comprendre non seulement où, au juste, se manifestent les stress environnementaux, mais également la relation entre les facteurs stressants et la manière dont y réagissent les divers éléments de l'écosystème. Il nous faut parvenir à atténuer suffisamment les facteurs stressants pour rétablir les utilisations bénéfiques. Plus qu'une condition préalable à notre compréhension de ce qui se passe, une meilleure connaissance de ces facteurs en est la condition essentielle. Ce qu'il nous faut reconnaître, c'est que ce qui compte ce ne sont pas seulement les conditions moyennes, mais les conditions extrêmes. Les espèces disparaissent et des pans entiers de notre environnement sont détruits, non seulement en temps normal, mais lorsque la situation s'aggrave. Cela veut dire qu'il ne nous faut non seulement veiller à la moyenne des indicateurs, mais assurer une surveillance de tout instant.
    Du point de vue géographique, nous comprenons de mieux en mieux que, pour contrôler les facteurs stressants, il nous faut non seulement nous pencher sur ce qui se passe dans les lacs, mais également sur leurs apports. Alors que, dans le temps, les éléments nutritifs et les toxines étaient essentiellement véhiculés par l'atmosphère et des sources précises de pollution, notamment les usines de traitement des eaux usées et les eaux usées industrielles dont les canalisations aboutissaient directement dans les lacs, nous reconnaissons de mieux en mieux que ce qui est à l'origine de nos principaux problèmes, cela étant particulièrement vrai en cas de conditions météorologiques extrêmes, ce sont le ruissellement des engrais utilisés dans les fermes et le ruissellement des eaux des zones rurales et suburbaines.
(1545)
    Les eaux de ruissellement agricoles sont une des principales sources d'éléments fertilisants, et en particulier de phosphore, alors qu'antérieurement le problème était essentiellement dû aux matières agglomérées à des particules de sédiment. De plus en plus, la cause provient du phosphore dissout dans l'eau, car c'est de la biodisponibilité de cet élément que dépendent les algues, dont la prolifération autour des rivages est à la fois gênante et dangereuse. Le problème est en outre dû à l'hypoxie, c'est-à-dire à l'absence d'oxygène dans les parties les plus profondes du lac, phénomène dû à la décomposition de ces matières.
    Lorsque les rivages sont sableux ou rocailleux, on se trouve face à des algues nuisibles, telles que la cladophora, qui dépare les plages et les rivages et qui, lorsqu'elle se décompose, est à l'origine d'épidémies telles que le botulisme et est la cause de morts innombrables parmi les oiseaux et les poissons. S'agissant de rivages boueux ou limoneux, les nutriments ont tendance à se concentrer vers le milieu du lac où ils causent une prolifération dangereuse d'algues bleues.
    En fait, les zones problématiques du point de vue environnemental forment un continuum. Il ne s'agit pas de distinguer les zones qui se portent mieux des zones qui se portent le plus mal, car il y a tout un éventail de conditions. Beaucoup de mes travaux collaboratifs, et des travaux menés par d'autres, nous aident à mieux comprendre et à mieux quantifier les divers types d'activités humaines, leur degré d'intensité, l'étendue des activités agricoles, le degré de développement, la densité démographique et la présence de routes près des divers affluents qui se vident dans le bassin hydrographique.
    On trouve autour des lacs, plus de 5 900 bassins hydrographiques et bassins d'alimentation. Nous avons pu quantifier l'étendue du développement, et les stress que cela entraîne, ce qui nous permet de savoir là où ces stress sont les plus forts, là où ils le sont moins et, par conséquent, là où les risques sont les plus graves.
    Nous avons pu profiter des nouvelles techniques — la télédétection, notamment — afin d'établir des cartes des lacs et des terres entourant les Grands Lacs dans le cadre du programme de cartographie et d'évaluation environnementale. Ces cartes indiquent, selon les cas, de 34 à 210 types de facteurs stressants différents. Le fait de savoir là où ils se manifestent nous permet de repérer les plus graves et les plus anodins, et de savoir où se situe le point de dégradation et de perte du biote, les deux choses qui retiennent le plus notre attention. Cela nous a permis de ranger les zones dans un ordre prioritaire, la priorité étant accordée à celles où les risques de dégradation biologique sont les plus grands, ainsi que celles qu'on devrait le mieux parvenir à rétablir. Nous avons ainsi pu également identifier les zones qui posent le plus grand risque pour la santé des Grands Lacs.
    La rivière Detroit et la rivière Maumee nous ont toujours paru être celles qui posent les plus grands risques, mais les cartes établies récemment, et les nouvelles techniques génétiques, nous ont portés à reconnaître que, par exemple, la rivière Thames et la rivière Sydenham, charrient elles aussi de gros volumes de nutriments qui sont la cause d'une prolifération dangereuse d'algues à la fois dans le lac Sainte-Claire, près des rives nord du lac Érié et dans d'autres zones, les résultats étant largement les mêmes que ceux qu'on avait attribués jusqu'ici à la rivière Maumee.
    Citons également, parmi les nouvelles menaces à l'écologie et à l'économie, les effets de...
(1550)
    Excusez-moi, je vais devoir vous interrompre un instant. Nous avions prévu 10 minutes pour votre intervention. Vous en êtes arrivé à la huitième minute. Il vous reste, je vois, un certain nombre de pages. Je ne sais pas si vous voulez les ranger par priorité. Je suis désolé d'avoir à vous interrompre, mais je vais rallonger votre temps de parole en conséquence.
    Je vous remercie.
    Le développement des rives, et la baisse occasionnelle du niveau de l'eau, comme nous le disait M. Sweetnam, et plus particulièrement la menace que posent des espèces envahissantes, sont les principaux risques auxquels nous devons faire face. Le risque de voir la carpe asiatique s'introduire dans les Grands Lacs par le chenal de Chicago et par d'autres voies, représente peut-être la plus grande menace pour la chaîne alimentaire. Cela se classerait au haut de toute liste des priorités.
    Une nouvelle annexe est venue s'ajouter à l'Accord relatif à la qualité de l'eau des Grands Lacs. On trouve dans cette annexe, une liste de 12 zones problématiques ou de zones à assainir. Des groupes de travail binationaux ont été constitués. Ils ont pour mission de s'attaquer à ces problèmes selon un calendrier très serré, et j'ai bon espoir que cela va aboutir à une liste des priorités et à des stratégies adaptées aux problèmes.
    De nombreux efforts ont été engagés afin d'accélérer la restauration de ces zones. Aux États-Unis, des centaines de millions de dollars ont été investis dans le cadre d'une initiative de rétablissement des Grands Lacs et en particulier des zones les plus affectées. Au Canada, les sommes investies sont plus modestes, mais on continue à s'attaquer à des risques bien définis. On attend de bons résultats de l'initiative portant sur les nutriments qui filtrent dans les Grands Lacs, initiative, espérons-nous, que la province engagera à son tour.
     Cependant, ce qui me paraît devoir être, au cours des cinq prochaines années, la principale menace est l'absence de plans permettant d'évaluer l'efficacité de ces mesures correctives. De gros investissements ont été consentis afin de réparer les dommages. Nous semblons, cependant, avoir en même temps perdu la capacité de communiquer entre nos deux pays. Ainsi que M. Sweetnam le disait tout à l'heure, les efforts engagés doivent en effet être binationaux, étant donné l'ampleur des travaux à réaliser. Nous semblons avoir perdu la capacité de voyager, d'interagir avec nos homologues, deux choses pourtant essentielles.
     Si nous entendons comprendre dans quelle mesure nos efforts sont efficaces, il nous faut savoir quelle était la situation antérieure, où nous en sommes après la mise en oeuvre de ces diverses mesures, quels sont les problèmes qui se posent à l'échelle du bassin, et dans quelle mesure nous parvenons à corriger la situation. Il est absolument essentiel de comprendre que les lacs et le biote ne se soucient pas des frontières politiques, car tout dépend de l'écoulement, dans les lacs, toutes sources confondues, de matières provenant des divers bassins hydrologiques.
    C'est pour cela qu'il nous faut coordonner nos efforts au niveau des divers paliers de gouvernement. Les contraintes budgétaires, et les limites imposées au déplacement et à la communication ont nui sensiblement à ce que nous pouvons savoir de l'efficacité des efforts entrepris. D'après moi, la réorganisation des ministères, et la rationalisation des dotations en personnel, s'ajoutant aux restrictions dont je viens de faire état, ont créé de réels obstacles.
    J'ai bon espoir que le nouvel Accord sur la qualité de l'eau des Grands Lacs, les études et les efforts menés par ces groupes de travail vont permettre de rétablir les communications nécessaires et j'ose espérer que va reprendre le dialogue qui a été interrompu.
    Je vous remercie, monsieur Ciborowski.
    Nous passons maintenant la parole à M. James Brennan, de Canards Illimités.
    Monsieur Brennan.
    Mesdames et messieurs, bonjour. Au nom de Canards Illimités Canada, je vous remercie de cette occasion d'aborder un enjeu de grande importance devant le comité. Je m'appelle James Brennan. Je suis directeur des affaires gouvernementales de cette organisation. Je suis basé ici à Ottawa et je suis accompagné aujourd'hui par mon collègue Mark Gloutney, qui est, lui aussi basé à Ottawa. Mark est directeur des opérations régionales pour la région de l'Est.
    Notre organisme est extrêmement préoccupé par la quantité et la qualité de l'eau du bassin des Grands Lacs en raison de son importance capitale pour la sauvagine et notre mission fondamentale. D'ailleurs, pour la communauté de conservation de la sauvagine, la région écologique des Grands Lacs et de la vallée du Saint-Laurent revêt une importance d'envergure continentale. En effet, les habitats des milieux humides côtiers des lacs de la région inférieure abritent des millions de canards, d'oies et de cygnes migrateurs, tandis que les milieux humides intérieurs sont des aires de nidification pour les innombrables oiseaux qui font la migration le long du Mississippi et des couloirs de l'Atlantique. Aujourd'hui, nous aimerions aborder deux enjeux importants de la qualité de l'eau, c'est-à-dire, les problèmes liés aux sédiments et les problèmes propres à l'eau.
    Le problème des sédiments englobe tous les enjeux liés aux particules en suspension dans l'eau ou déposées au fond ou sur les rives des plans d'eau, que ce soit à cause de l'érosion ou pour d'autres causes. Souvent, des niveaux élevés de sédiments entraînent des problèmes de turbidité ou d'accumulation de contaminants. Ces problèmes, qui sont souvent locaux et bien connus, ont servi de fondement aux stratégies de restauration mises en oeuvre depuis des décennies.
    D'un autre côté, les problèmes d'eau touchent souvent un lac ou même un bassin versant complet. Comme vous pouvez vous en douter, ces problèmes peuvent avoir d'importantes répercussions sociales, économiques et écologiques. Les problèmes d'eau découlent souvent des activités qui se déroulent dans le bassin versant, tant des activités dans l'eau ou proche de l'eau que des activités sur la terre ferme adjacente. Par exemple, la surcharge en phosphore est l'un des problèmes issus de l'utilisation des terres d'un bassin hydrographique qui peut avoir des répercussions d'envergure sur la qualité de l'eau.
    Bien que les problèmes de sédimentation et de ruissellement dans les Grands Lacs demeurent importants, notre savoir-faire touche plus particulièrement les milieux humides et l'eau. Conséquemment, la suite de nos commentaires portera sur les problèmes de la qualité de l'eau. Nous sommes heureux, à cet égard, de pouvoir faire état de bonnes nouvelles. La conservation et la restauration des terres humides sont un élément pratique et extrêmement efficace de tout effort tendant à une amélioration de la qualité de l'eau des Grands Lacs.
    Je voudrais maintenant passer la parole à M. Gloutney qui va se charger du reste de notre exposé.
(1555)

[Français]

    Les milieux humides sont les usines de traitement de l'eau de la nature. Les milieux humides abondants et intacts absorbent le phosphore et rendent d'autres services importants en réduisant la quantité...

[Traduction]

    Je vous demande un moment, s’il vous plaît. Je n’entends pas la traduction dans mes écouteurs, et j’ignore si je suis le seul dans ce cas.
    Je vous demande pardon, recommencez s’il vous plaît. Je remets le chronomètre à zéro.

[Français]

    Les milieux humides sont les usines de traitement de l'eau de la nature. Les milieux humides abondants et intacts absorbent le phosphore et rendent d'autres services importants en réduisant la quantité d'impuretés qui entrent dans nos ruisseaux, nos rivières et les Grands Lacs.
    Canards Illimités Canada a récemment complété des travaux de recherche pour évaluer les répercussions de la perte des milieux humides du bassin versant du lac Simcoe. Comme beaucoup d'entre vous le savent, ce bassin est au coeur de l'une des régions rurales les plus exploitées au Canada. Situé à environ une heure au nord de Toronto, sa superficie est d'environ 744 km2.

[Traduction]

    Nos travaux scientifiques démontrent clairement que les milieux humides jouent un rôle critique dans la résolution des problèmes de qualité d'eau du lac Simcoe. Les résultats obtenus nous ont fait sérieusement réfléchir. Par exemple, si nous devions perdre les derniers milieux humides d'une des petites rivières qui approvisionnent le lac, le sous-bassin hydrographique de la rivière Black qui passe proche du village de Sutton, les répercussions considérables comprendraient les suivantes: une hausse du taux de phosphore de 891 %, soit l'équivalent d’un versement de 47 tonnes ou de 22 000 sacs d'engrais à pelouse dans la rivière chaque année; une diminution de 13 % du volume d'eau entrant dans la nappe phréatique, qui a des effets directs sur la qualité de l’eau; une augmentation des sédiments de 251 %, qui nuiraient aussi à la qualité de l'eau; et une augmentation du taux d'azote de 260 %, qui affecterait l'utilisation de l'eau par le public à des fins récréatives.
    Les recherches nous apprennent également qu’en retirant de l'eau le phosphore excédentaire des milieux humides de la rivière Black, les municipalités de la région économiseraient quelque 300 000 dollars par année. La perte de nouveaux milieux humides affecterait considérablement les investissements faits dans les installations locales de traitement de l'eau du bassin versant du lac Simcoe. La perte d'environ 25 % des milieux humides restants, soit 2 088 hectares, annulerait tous les efforts annuels d'enlèvement du phosphore de l'usine d’épuration de Sutton. La perte de 52 hectares de milieux humides additionnels annulerait l'augmentation de la capacité d'enlèvement du phosphore visée par les récents travaux de 3,8 millions de dollars pour mettre à niveau l'usine de Sutton.

[Français]

    Les recherches subséquentes ont relevé que les milieux humides du bassin du lac Simcoe auraient une valeur économique annuelle de 11 172 $ par hectare ou de 435 millions de dollars.
    Parmi les services de grande valeur, mentionnons le contrôle de l'eau, la filtration de l'eau, la réduction des inondations, le traitement des eaux usées, les loisirs, les habitats fauniques et la régulation climatique.
    En bref, la science démontre clairement que les investissements dans des infrastructures naturelles, comme les milieux humides, sont critiques pour protéger et rehausser les investissements dans les infrastructures artificielles. Bien que les données que nous venons de vous présenter visent précisément le lac Simcoe, nous pouvons les appliquer à l'ensemble du bassin des Grands Lacs. Nous obtiendrions alors les mêmes résultats.
    Conséquemment, nous avons raison d'être extrêmement préoccupés par l'actuel taux de perte des milieux humides en Ontario.

[Traduction]

    Malgré la valeur considérable des services rendus par les milieux humides, la perte de milieux humides du bassin versant des Grands Lacs se poursuit, et ce, à un taux substantiel. C’est ainsi que, dans le sud de l'Ontario, nous avons perdu 72 % des milieux humides, soit une superficie de 1,4 million d'hectares. Cela représente les trois quarts de la superficie du lac Ontario. Les pertes s'accentuent puisque nous avons perdu 70 854 hectares de milieux humides, en blocs de 10 hectares ou plus, entre les années 1982 et 2002. Dans le bassin versant du lac Érié, plus de 85 % des milieux humides ont été perdus. La perte des milieux humides côtiers des Grands Lacs a également été importante, c'est-à-dire de la même envergure. La perte des milieux humides du côté américain des Grands Lacs est comparable à 65 %.
    Pendant un instant, imaginons quel serait le résultat si nous étendions les résultats de nos recherches sur la rivière Black à l'ensemble du bassin des Grands Lacs, c'est-à-dire à une superficie de quelque 245 000 kilomètres carrés. Imaginez quelles seront les répercussions désastreuses si nous continuons à perdre les milieux humides du bassin des Grands Lacs. Si vous le voulez bien, prenez aussi un moment pour imaginer une situation totalement différente, dans laquelle nous travaillerions tous ensemble pour que les milieux humides existants demeurent intacts et fonctionnels et dans laquelle nous ferions des efforts considérables pour restaurer les milieux humides perdus ou dégradés.
    Pour Canards Illimités Canada, une telle situation permettrait d’économiser des millions de dollars d’investissements à fonds perdu dans des travaux de restauration environnementale. Cela profiterait aux industries axées sur l'exploitation durable ou les ressources renouvelables qui dépendent de la santé et de l'intégrité du bassin des Grands Lacs, aux secteurs vigoureux du tourisme et de l’agriculture et à la santé des populations. Cela apporterait des avantages sociaux et écologiques importants, comme des habitats sains pour les poissons et les animaux, ainsi que la possibilité, pour des générations à venir de Canadiens et de Canadiennes, de vivre l'expérience de la nature.
    Comment pouvons-nous atteindre cet objectif?
    Nous réalisons des progrès sur le plan des programmes et de la reconnaissance des rôles que jouent les milieux humides comme élément viable de la solution. C’est ainsi que le récent Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs indique de façon explicite que les milieux humides sont des habitats importants. Des partenariats de longue date, comme celui du Plan nord-américain de gestion de la sauvagine, restent en vigueur et continuent à investir sur le terrain dans des travaux de conservation des habitats. En Ontario seulement, ce partenariat a permis la conservation de 7 millions d'hectares grâce à un investissement de 193 millions de dollars.
    Le Programme de conservation des zones naturelles d'Environnement Canada constitue un outil fédéral de préservation des terres qui a permis à des partenaires de conservation, comme Canards Illimités Canada, d'acheter et de protéger à jamais des habitats de milieux humides d'importance critique, comme certains milieux humides côtiers des Grands Lacs et d'autres ensembles de milieux humides intérieurs d'importance.
    Bien que ces programmes et ces initiatives soient excellents et doivent se poursuivre, nous réitérons que nous devons en faire davantage. Canards Illimités Canada propose donc que, à l’avenir, nous collaborions avant tout pour nous assurer que les Canadiens aient pleinement conscience de l’intérêt des milieux humides et de leur importance pour la qualité de l’eau. Nous devons veiller à accroître nos efforts de conservation et de restauration des milieux humides dans tout le bassin versant des Grands Lacs. Comme nous l'avons déjà expliqué au comité, la conservation des milieux humides devrait être la pierre angulaire du Plan de conservation national du gouvernement du Canada.
    Notre seconde priorité devrait être de veiller à ce que la conservation des milieux humides dispose d’un financement à long terme. Canards Illimités Canada demande au gouvernement du Canada d’accroître son soutien financier aux efforts de conservation des milieux humides par l'établissement d'un nouveau fonds national de conservation des milieux humides. Canards Illimités Canada est prêt et disposé à financer ce fonds à la hauteur des investissements du gouvernement du Canada.
    Le troisième élément en importance de notre programme devrait être de travailler avec les autres ordres de gouvernement pour nous assurer que toute planification repose sur des données scientifiques, soit bien coordonnée et tienne compte de l'ensemble du milieu; et s'assurer d'adopter des politiques appropriées pour atteindre nos objectifs de conservation des milieux humides.
    Enfin, nous devons nous engager à travailler avec nos partenaires au concept d'environnement fonctionnel et élaborer des programmes qui encouragent les gens à faire des choix bénéfiques pour les milieux humides et, conséquemment, pour la qualité de l'eau.
(1600)
    Je vous remercie, monsieur Gloutney. Nous allons laisser le résumé de côté pour l’instant. Nous y reviendrons plus tard.
    La parole est maintenant à Mme Muter.
    Bonjour à vous, mesdames et messieurs qui siégez au Comité permanent de l'environnement et du développement durable. Je vous sais gré de vous pencher aujourd’hui sur les questions qui touchent les Grands Lacs. Je sais que vous avez déjà entendu d’autres témoins sur ces questions et je vous suis reconnaissante de prendre le temps de m’écouter.
    Pour me présenter brièvement, je vous dirais que je suis bénévole à temps plein et que je travaille sur la qualité de l'eau des Grands Lacs, y compris sur les milieux humides, depuis plus de 25 ans. Je viens du secteur de la santé publique, ce qui fait que lorsque j'ai offert pour la première fois de prélever des échantillons d'eau dans les aires de loisir de la baie Georgienne, pour savoir si on y trouvait des bactéries comme l'E. coli et les streptocoques fécaux, c'était un travail que je faisais déjà depuis longtemps avant la tragédie de Walkerton. Je savais alors fort bien quels pouvaient être les effets de taux aussi élevés de ces bactéries dans l'eau, en particulier pour les jeunes enfants apprenant à nager. Pour moi, il découle de cette expérience qu'Environnement Canada doit adopter des normes bactériologiques plus rigoureuses pour assurer la sécurité des utilisateurs de l'eau douce à des fins récréatives.
    Aujourd'hui, les commentaires que j'entends vous faire s'inscrivent dans le prolongement de ce que Mme Pat Chow-Fraser, de l'Université McMaster, vous a dit la semaine dernière. Cela fait maintenant plus de 10 ans que nous collaborons avec elle pour identifier et pour évaluer les milieux humides qui se trouvent sur les rives est et nord de la baie Georgienne. C'est une première, car aucun organisme gouvernemental n'a fait ce type de travail auparavant.
(1605)
    Lorsque j'assiste à des réunions binationales sur les Grands Lacs, j'y vois souvent des cartes qui ne montrent pas les vastes milieux humides de la baie Georgienne. Tous les groupes qui s'intéressent aux Grands Lacs, y compris les organismes gouvernementaux, savent maintenant que les milieux humides les plus vastes, de la plus haute qualité et les plus diversifiés, mais également les plus fragiles de toute la région des Grands Lacs se trouvent dans la baie Georgienne.
    Vous savez fort bien que les milieux humides constituent des habitats importants pour les poissons et, de façon plus générale, pour la faune. Ils jouent aussi un rôle important en éliminant les nutriants et les produits chimiques de l'eau. Comme l'a indiqué l'orateur précédent, 70 % des habitats humides du lac Ontario et du lac Érié ont disparu, et il est donc de plus en plus nécessaire de protéger les bons habitats humides qui restent dans les Grands Lacs.
    Cela fait maintenant 14 ans que le niveau de l'eau est bas dans la baie Georgienne. Mme Chow-Fraser a constaté que nous avons perdu, en moyenne, 24 % des habitats des poissons en milieux humides. On sait que, dans les zones de faible profondeur permanente, la qualité de l'eau se dégrade parce que les échanges nécessaires avec les eaux libres de la baie Georgienne sont insuffisants.
    Au cours des trois derniers étés, sur les rives sud de la baie, y compris dans le parc provincial de Wasaga Beach, on a observé un taux de mortalité important des sauvagines et des poissons, qui jonchent fréquemment les plages. On n'en connaît pas la cause avec certitude, mais il semble que cela soit lié au faible niveau de l'eau, qui a pour effet de concentrer les nutriants dans des eaux peu profondes ou plus chaudes, propices à la croissance des algues, et qui facilitent la prolifération des bactéries.
    Nous constatons, sans pouvoir dire précisément pourquoi, que des poissons morts de trois à cinq pieds appartenant à des espèces menacées, comme l'esturgeon, s'échouent sur le rivage. De tels phénomènes feraient la une des journaux si cela se produisait sur les rives du lac Ontario, mais comme cela se produit dans une région éloignée, peu couverte par la presse, personne n'en entend parler.
    Cet été, nous allons mettre sur pied un programme de détection du botulisme chez les personnes. Des bénévoles vont ramasser des oiseaux et des poissons morts depuis peu. Nous les congèlerons pour les faire analyser dans un laboratoire situé sur le nouveau campus universitaire d'Oshawa qui est équipé pour détecter les toxines botuliques en toute sécurité. Nous espérons ainsi avoir enfin la cause de ce phénomène.
    Je n'ai pas le temps, aujourd'hui, d'aborder toutes les questions concernant les Grands Lacs, et je vais donc me concentrer sur la carpe asiatique et sur les niveaux d'eau.
    Je suis convaincue que vous êtes tous au courant des menaces importantes que posent les espèces de carpe très envahissantes qui sont rendues aux portes des Grands Lacs, à Chicago. La carpe argentée se nourrit en filtrant les micro-organismes qui se trouvent au bas de la chaîne alimentaire des espèces indigènes de nos eaux, et perturbent cette chaîne. Ces poissons peuvent avaler chaque jour l'équivalent de leur poids et finir par dépasser les 100 livres, et mesurer quatre à cinq pieds de long.
    Ils frayent trois fois par année et les adultes peuvent pondre jusqu'à un million d'oeufs à chaque fois. Il n'y a actuellement aucune espèce de ce type dans les Grands Lacs. Les autres espèces envahissantes de carpes se nourrissent à même les plantes des milieux humides et les détruisent en les arrachant. Ces poissons très envahissants pourraient coûter jusqu'à huit milliards de dollars au secteur de la pêche à des fins récréatives sur les Grands Lacs.
    Au début de janvier dernier, le U.S. Army Corps of Engineers a publié un rapport sur les solutions qui s'offrent pour empêcher ces poissons de s'implanter dans les Grands Lacs. La période de commentaires publics sur ce rapport a pris fin hier, mais permettez-moi de vous signaler deux de nos préoccupations.
    Tout d'abord, ce rapport ne fait aucunement état des risques que posent ces poissons pour les eaux canadiennes. Pêches et Océans Canada a réalisé, en 2005, une excellente évaluation des risques qui montrait que quatre espèces qui sont maintenant présentes dans la rivière Mississippi risquent fort de s'infiltrer dans les eaux canadiennes. L'espèce la plus agressive est la carpe argentée. Pêches et Océans Canada a estimé qu'elle pourrait se répandre dans tous nos lacs et toutes nos rivières jusqu'à la baie James au nord et jusqu'à l'Alberta à l'ouest. En 2009, le MPO et le U.S. Army Corps of Engineers ont évalué conjointement les risques auxquels nous faisons face. Ils estiment que, si la carpe argentée devait s'implanter dans le lac Michigan, elle s'infiltrerait dans toutes les eaux du lac Huron, de la baie Georgienne et du lac Érié dans les cinq ans.
    C'est là un risque inacceptable et il faut que le Canada dise aux autorités américaines de façon plus claire que, dans le cadre de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, les États-Unis sont tenus d'empêcher ces poissons de pénétrer dans les Grands Lacs. Le coût des mesures de prévention est bien inférieur aux millions de dollars que nous devons dépenser, par exemple, pour contenir le plus possible le nombre d'individus d'une autre espèce envahissante, la lamproie de mer. Les scientifiques savent maintenant que nous ne parviendrons jamais à l'éradiquer.
    En second lieu, le U.S. Army Corps of Engineers a énuméré huit solutions pour empêcher la carpe asiatique de pénétrer dans le lac Michigan. Cette espèce se trouve maintenant à 60 milles de l'entrée des Grands Lacs, à Chicago. Parmi ces options, il y a le statu quo, c'est-à-dire les barrages électriques. L'été dernier, cet organisme a rendu publiques des vidéos prises à ces barrages électriques montrant des bancs de poisson de quatre pouces qui les franchissent sans problème. En d'autres termes, ces barrages ne constituent pas une solution. La seule solution responsable est la séparation totale des eaux du lac Michigan et de la rivière Mississippi.
(1610)
    Permettez-moi d'aborder maintenant la question des niveaux d'eau. Nous avons là la possibilité de remédier au laxisme des cinquante dernières années dans ce domaine. C'est au cours des années 1950, et au début des années 1960, que les chenaux navigables des Grands Lacs ont été officiellement dragués la dernière fois pour les creuser. Le Canada et les États-Unis avaient alors conclu un accord qui imposait au U.S. Army Corps, pour pouvoir creuser les chenaux navigables à 27 pieds, d'appliquer des mesures compensatoires dans la partie supérieure du cours de la rivière Sainte-Claire.
    Cette rivière relie le lac Huron au lac Érié, en passant par le lac Sainte-Claire et la rivière Detroit. Environnement Canada n'a toutefois pu s'entendre avec le U.S. Army Corps sur le nombre de seuils immergés ou de ralentisseurs qu'il faudrait poser dans le lit de la rivière. Le projet a été financé intégralement par les Américains, mais au bout de 10 ans, le Congrès des États-Unis a retiré les fonds, mais pas l'autorisation. Nos gouvernements ont reconnu que les niveaux du lac Michigan, du lac Huron et de la baie Georgienne s'abaissaient en permanence à la suite de l'approfondissement des chenaux navigables, mais ils ont cru qu'il s'agissait là d'un phénomène ponctuel qui ne se reproduirait pas.
    Toutefois, lorsqu'à compter de 1999 les niveaux d'eau ont perdu quatre pieds, nous avons commencé à collaborer avec une équipe d'ingénieurs, car nous soupçonnions que quelque chose s'était produit dans la rivière Sainte-Claire qui participait à la baisse soudaine du niveau d'eau plus importante que celle causée par la diminution des précipitations. Quinze ans ont maintenant passé et la Commission mixte internationale a confirmé que l'érosion en amont de la rivière Sainte-Claire a contribué à la faiblesse des niveaux d'eau. Cela fait maintenant près d'un an que la CMI a informé nos gouvernements que les niveaux d'eau du lac Michigan, du lac Huron et de la baie Georgienne doivent être relevés en appliquant des mesures souples dans la rivière Sainte-Claire.
    Après plus de 100 ans d'interventions de l'homme, y compris par le dragage, les niveaux d'eau du lac Michigan, du lac Huron et de la baie Georgienne ont été abaissés de 50 centimètres ou de 20 pouces. Aucun autre Grand Lac n'a connu une telle évolution. Les autres sont gérés par des organismes de contrôle qui sont en mesure de maintenir le niveau d'eau de leur lac. Aucune mesure de compensation n'est venue atténuer cette perte. Cela fait que nous avons aujourd'hui un déséquilibre important des niveaux d'eau dans les Grands Lacs. Ces niveaux sont à la moyenne, ou au-dessus de la moyenne à long terme dans le lac Supérieur, le lac Érié et le lac Ontario alors qu'ils sont inférieurs de 34 centimètres, 13 pouces, à leur moyenne à long terme dans les lacs Michigan et Huron, et dans la baie Georgienne.
    Le gouvernement américain a maintenant décidé d'aller de l'avant et assure une partie du financement du U.S. Army Corps pour qu'il prépare un nouveau rapport général d'évaluation des mécanismes de compensation sur la rivière Sainte-Claire. Au Canada, on m'a assuré que trois ministres importants du cabinet et plusieurs députés s'efforcent d'obtenir une réponse coordonnée du gouvernement du Canada. Nous attendons cette réponse. Le Canada ne dispose malheureusement d'aucun organisme gouvernemental comme le U.S. Army Corps Engineers qui soit en mesure de mener à bien un tel projet. Il faut que nous siégions à la table et annoncions notre volonté de défendre le point de vue de la CMI et que nous y consacrions des fonds afin de pouvoir devenir un partenaire dans la résolution de ce problème.
    Le froid et les chutes de neige observés au cours de l'hiver dernier dans les Grands Lacs ont fait grimper temporairement les niveaux d'eau, mais le déséquilibre est toujours là. De plus, pratiquement tous les experts nous disent qu'il s'agit là d'une anomalie passagère et non pas d'un changement du climat. Seul un pour cent de l'eau des Grands Lacs est renouvelable et 99 % de celle-ci provient de l'ère glaciaire. Il est maintenant temps d'agir pour rééquilibrer les niveaux d'eau en prenant des mesures pour corriger les effets des interventions humaines sur la baisse du niveau d'eau dans le lac Michigan, le lac Huron et la baie Georgienne en creusant la rivière Sainte-Claire.
    Je dispose ici de graphiques pour illustrer ce que je viens de vous dire, et vous devriez en avoir une copie pour voir l'augmentation de la débitance de la rivière Sainte-Claire au cours des 100 dernières années. Pour l'essentiel, c'est là la capacité du chenal.
    Les membres du comité ne l’ont pas, parce que le document n’était pas dans les deux langues officielles. J’ai le document, mais ce n’est pas le cas des autres membres du comité.
    Oh, d’accord.
    Madame Muter, votre temps est écoulé. Vous pourrez y faire référence en répondant aux questions qui vous seront posées.
    Passons aux séries de questions. J’aimerais préciser...
    Je m’excuse; allez-y.
    Il y a deux documents auxquels nous n’avons pas eu accès et qui pourraient nous être utiles: le tableau dont vient de parler Mme Muter et les commentaires de M. Ciborowski — je dois dire qu’ils ont piqué ma curiosité. Serait-il possible de demander que ces deux documents soient remis à la greffière et traduits en vue de les distribuer aux membres? Je vous serais reconnaissant d’avoir au moins cela.
    Nous le ferons. Je m’excuse; je n’avais pas remarqué que les commentaires de M. Ciborowski n’étaient pas disponibles dans les deux langues. J’avais le document devant moi.
    D’accord. Passons aux séries de questions. Je tiens à vous rappeler que nous devrons probablement lever la séance à 17 h 15 en raison de la sonnerie d’appel pour les votes prévus. Commençons la série de questions de sept minutes.
    Monsieur Carrie, allez-y.
(1615)
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd’hui. J’ai beaucoup de questions. J’aimerais sans plus attendre poser une question aux représentants de Canards Illimités.
    Selon ce que j’en comprends, le gouvernement accorde actuellement encore environ 370 000 $ à votre projet en collaboration sur les milieux humides du lac Simcoe et du sud-est de la baie Georgienne par l’entremise du Fonds d’assainissement du lac Simcoe et du sud-est de la baie Georgienne. J’aimerais que vous nous parliez un peu plus de ce programme.
    Monsieur Gloutney.
    Notre projet vise à sensibiliser davantage les gens aux milieux humides et à leur protection dans la région géographique visée par le fonds, soit la baie Georgienne et le lac Simcoe.
    C’est composé de divers éléments. Certains aspects concernent directement les activités de restauration des milieux humides. Il y a également la cartographie du secteur en vue de donner des renseignements détaillés aux responsables de l’aménagement du territoire au sujet des milieux humides s’y trouvant. L’autre aspect principal est la communication. Nous diffusons nos informations sur le territoire aux responsables de l’aménagement du territoire et aux partenaires en vue de leur permettre de commencer à comprendre et à inclure la protection des milieux humides dans leurs processus officiels d’aménagement du territoire et les divers plans d’urbanisme municipaux.
    Parfait.
    Je considère comme vraiment important que les gens comprennent l’importance des milieux humides. Pourriez-vous nous expliquer comment les milieux humides contribuent à restaurer et à maintenir la qualité de l’eau des Grands Lacs et la santé de l’écosystème?
    C’est une question très vaste.
    En effet.
    Je pense qu'elles le font de nombreuses façons. D'abord et avant tout, elles le font en interceptant les nutriments et les sédiments et en les empêchant de s'infiltrer dans le lac et de perturber son écosystème; c'est la principale façon.
    L'un des avantages des zones humides, c'est qu'elles sont des habitats essentiels. Elles sont importantes pour la sauvagine — et c'est pourquoi Canards Illimités s'y intéresse —, mais aussi pour une multitude d'autres espèces extrêmement importantes, comme les poissons que l'on trouve dans les Grands Lacs et le bassin des Grands Lacs, qui sont importants pour les gens. Ils sont l'une des plus fortes densités d'espèces en péril que l'on trouve dans nos zones humides le long des Grands Lacs.
    L'autre avantage important des zones humides, c'est qu'elles atténuent les risques d'inondation en emmagasinant et en interceptant l'eau qui s'infiltre dans les systèmes.
    Dans mon exposé, j'ai aussi parlé des fonctions de ces zones humides et des conséquences économiques de leur présence.
    J'étais un peu inquiet quand vous avez mentionné que 72 % des vastes zones humides intérieures du sud de l'Ontario ont disparu ou ont été converties pour d'autres utilisations au cours des 200 dernières années, et que ce processus se poursuit.
    Vous avez aussi parlé de la possibilité de les remettre en état. Avez-vous des données sur le rythme auquel cela se produit? Comment cela se déroule-t-il?
    Selon notre évaluation, nous continuons de perdre du terrain, et les zones humides disparaissent plus rapidement que ce que nous pouvons faire pour inverser la tendance.
    Nous restaurons plusieurs milliers d'acres de terres humides chaque année dans le cadre des activités de Canards Illimités. De nombreuses autres personnes travaillent à la conservation sur le terrain. Les offices de protection de la nature organisent des activités de remise en état, mais encore une fois, probablement à plus petite échelle que Canards Illimités. Certains de nos autres partenaires de la conservation font un peu avancer les choses, mais si l'on disait que l'on restaure 3 500 acres de terres dans le sud de l'Ontario, ce serait une bonne approximation.
    Tout à l'heure, nous avons entendu d'autres témoins qui ont parlé de diverses politiques gouvernementales que nous pourrions mettre en place aux échelons municipal, provincial et fédéral. J'aimerais savoir si vous avez des idées sur ce qui pourrait être fait.
    Pourriez-vous me dire précisément ce que vous voulez dire? Parlez-vous de politiques particulières?
    Oui.
    Eh bien, Canards Illimités a suggéré à tous les ordres de gouvernement de mettre en place de vastes mesures de protection des zones humides partout au pays. Il y a des politiques en vigueur, et des politiques particulièrement efficaces au Canada atlantique, où la majeure partie des zones humides sont protégées et où des stratégies d'atténuation sont en place afin de trouver des solutions pour restaurer les zones humides qui sont inévitablement disparues.
    En Ontario, il n'y a pas de politique semblable en vigueur. Il y a cependant des mesures dans le cadre de la Loi sur l'aménagement du territoire de l'Ontario, qui prévoit la politique sur les terres humides pour l'Ontario, mais nous aimerions certainement voir les politiques en vigueur dans les Maritimes être appliquées partout au Canada.
(1620)
    Puis-je ajouter quelque chose?
     M. Colin Carrie: Bien sûr.
    M. Mark Gloutney: Je pense que ce qui est important, c'est de créer une certaine certitude. Nous avons parlé des politiques de protection des zones humides, et l'élément clé, comme Jim l'a mentionné, c'est la stratégie d'atténuation, lorsqu'on tente d'éviter, de minimiser et de compenser les pertes. Je crois que si nous pouvons intégrer ces éléments à une politique, cela permettra au gouvernement de remplir son mandat et offrira une certitude sur le plan du développement.
    C'est donc un avantage pour le développement et l'industrie, car ils ont une certaine confiance pour la suite des choses. Ce que nous entendons quand nous travaillons avec l'industrie, c'est que ce qui leur nuit le plus, c'est l'incertitude liée à la réglementation environnementale.
    Monsieur Carrie, il vous reste 10 secondes. Nous pourrons les ajouter au temps de parole de quelqu'un d'autre plus tard.
    Monsieur Bevington, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les témoins. Je crois que vous avez brossé un tableau plutôt sombre de la situation dans les Grands Lacs et dans certaines zones qui sont menacées.
    Monsieur Ciborowski, je m'intéresse aux produits chimiques dans le réseau hydrographique. Vous avez parlé des hydrocarbures aromatiques polycycliques, des oestrogènes dans l'environnement. Qu'est-ce qui explique principalement que ces choses entrent dans...
    Je n'en ai pas parlé précisément. Les oestrogènes dans l'environnement peuvent être des sous-produits du BPC, par exemple, mais ils proviennent également des produits de soins personnels. Il a été observé qu'ils ont des effets là où les usines de traitement des eaux usées rejettent leurs matières, mais ils sont tellement dilués par l'eau que ces effets n'ont pas été observés à plus grande échelle.
    Les hydrocarbures et autres produits chimiques hydrophobes qui ne se mélangent pas à l'eau et ont tendance à rester dans les sédiments sont des sous-produits industriels qui existent depuis de nombreuses années. Ils sont encore présents dans les sédiments, et lorsque les sédiments sont dragués ou qu'ils sont emportés en raison des niveaux d'eau, alors ils peuvent être réintroduits dans le réseau hydrographique et avoir alors des effets.
    Connaissez-vous le TFA? C'est un acide perf...
    Perfluorique?
    Un acide perfluorique.
    Pas très bien.
    On n'en a donc pas cherché la présence dans le réseau hydrographique des Grands Lacs?
    Je ne le sais pas.
    D'accord. C'est intéressant, mais je vais m'en tenir à cela.
    Monsieur Sweetnam, nous avons eu une grande discussion ici au sujet du rapport entre la qualité de l'eau et la quantité d'eau. C'est une question que j'aimerais clarifier, et je pense qu'étant donné que vous parlez de la baie Georgienne, vous pourriez vraiment nous expliquer pourquoi la qualité de l'eau et la quantité d'eau sont des concepts synonymes.
    Je pense que cela dépend aussi de l'emplacement géographique. La côte Est de la baie Georgienne forme un archipel où il y a beaucoup d'échancrures côtières. Certaines sont davantage reliées à la baie que d'autres. Quand le niveau des eaux baisse, ce lien varie beaucoup. La circulation de l'eau entre les échancrures, qui permet de diluer les nutriments côtiers qui y entrent, est considérablement réduite.
    Par exemple, dans la baie Sturgeon, étant donné que le niveau d'eau est beaucoup plus bas, on peut voir dans la présentation que la charge interne en phosphore dans cette baie ne peut pas être diluée suffisamment pour permettre son absorption dans le système. À ce moment, les concentrations augmentent et les conditions sont propices à la prolifération d'algues bleu-vert, ce qui nuit à l'utilisation de l'eau.
    Il y a deux autres baies que l'on nomme ici, soit la baie Nord et la baie Sud, qui sont très près l'une de l'autre, mais dont la bathymétrie, la structure des bassins, est assez différente. Nous avons constaté que les conditions qui existent dans la baie Sturgeon pour la prolifération d'algues bleu-vert existent aussi dans ces baies. Puisque nous pouvons remonter dans le temps pour examiner différents types d'associations végétales et prévoir les effets des niveaux d'eau supérieurs ou inférieurs qui existaient, nous savons qu'il y a toujours eu une prolifération d'algues bleu-vert dans ces baies, en raison encore une fois des effets des niveaux d'eau. Nous ne pouvons pas dire précisément combien d'années cela peut durer, mais nous savons qu'il y a une prolifération d'algues bleu-vert à cet endroit également.
(1625)
    Il y a une autre question que j'ai posée à certains témoins ici. Ce dont personne ne veut parler, c'est de l'industrie agricole. Selon vous, sera-t-il nécessaire, dans l'avenir, de réglementer les activités sur les terres agricoles afin de limiter la libération de nutriments dans les Grands Lacs, si nous voulons vraiment qu'il y ait des changements à ce chapitre?
    La question s'adresse à n'importe lequel d'entre vous.
    Je serai heureux d'y répondre.
    Cela fait l'objet de beaucoup d'attention, en particulier en Ohio, car on dit que le bassin de la Maumee est la plus grande source de prolifération d'algues dangereuses. Le milieu agricole envisage sérieusement de mettre en place un programme volontaire de pratiques exemplaires de gestion afin d'éviter la réglementation. Les principaux enjeux semblent être le moment choisi pour le rejet des nutriments et l'intensité du rejet. Des pratiques exemplaires de gestion peuvent assurément être mises en place afin de réduire le ruissellement de ces nutriments provenant des terres agricoles. Cela concerne les types d'engrais utilisés, la manière dont ils sont appliqués, que ce soit à la surface ou dans les matières. Je pense qu'il s'agit d'un domaine d'exploration active, et c'est certainement une question dont le milieu agricole devra s'occuper, volontairement ou par la réglementation.
    Oui, et j'ajouterais qu'il y a des meilleures pratiques agricoles qui doivent être encouragées en travaillant avec le milieu agricole. J'ai assisté à une réunion du Forum binational où le propriétaire d'une très grande exploitation agricole sur la rive sud du lac Érié a expliqué qu'il laissait ce qui restait de sa récolte après avoir amassé le maïs. Il recouvrait ensuite tout cela sur le terrain, et avec les années, il se formait un paillis qui retenait l'eau et les nutriments dans le sol et qui empêchait le ruissellement.
    Il y a aussi des règles pour empêcher le rejet de fumier ou des eaux usées sur les terres agricoles durant l'hiver, quand le sol est gelé, car cela permet aux nutriments de pénétrer dans les cours d'eau adjacents. Il est absolument essentiel de mettre en place une réglementation afin d'empêcher que cela se produise.
    Il faut également surveiller l'aquaculture en parcs à filet et la quantité de phosphore qui peut être libérée, étant donné que ces activités s'intensifient, par rapport aux systèmes fermés où l'effluent de ces activités doit être traité comme les autres activités industrielles. C'est quelque chose qu'il faut surveiller.
    Le chiffre de 46 tonnes utilisé pour représenter la quantité de phosphore qui est versée est l'estimation actuelle de l'un des groupes de la baie Georgienne pour la charge des activités actuelles d'aquaculture. C'est donc considérable.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Sopuck, pour sept minutes.
    Monsieur Ciborowski, je vois dans votre biographie que vous êtes un spécialiste des invertébrés benthiques. Pouvez-vous nous parler de la succession de la communauté biologique des invertébrés benthiques dans un lac, en utilisant le lac Érié comme exemple, de l'état parfait à l'état dans lequel il se trouve actuellement, en fonction de l'introduction de phosphore? Comment change-t-elle?
    Cela dépend de quelle partie du lac il est question, car nous avons un bassin ouest peu profond...
    Prenez la pire partie.
    D'accord. Le bassin ouest est un bon exemple. C'est peut-être la meilleure étude des Grands Lacs, car il a été affecté le plus longtemps par la pollution. Quand les conditions sont propices, il y a brassage des eaux, il y a suffisamment d'oxygène, les éphémères sortent, comme les corydales, et s'en tirent très bien. Ils ont besoin d'oxygène au fond du lac, car ils s'enfouissent dans les sédiments. S'il y a des périodes calmes ou une concentration élevée de nutriments et que les algues se déposent au fond, les niveaux d'oxygène tombent à zéro, les éphémères meurent, et les animaux qui peuvent les remplacer sont les vers de vase ou les oligochètes, et ils témoignent des conditions de pollution.
    L'ouest du lac Érié est constamment retourné; c'est un exemple de condition extrême. Il peut y avoir beaucoup d'oxygène durant la majeure partie de l'année, mais il faut seulement cinq jours sans oxygène pour éliminer cette population, pour éliminer l'aliment de base des poissons.
(1630)
    Les éphémères sont-ils complètement disparus du lac Érié?
    La population s'est rétablie en 1992. C'est d'ailleurs ce qui m'a permis de faire mes débuts là-bas. Il n'était pas censé y en avoir, mais elles ont très bien repris le dessus. Il n'y a que dans la partie est du lac près de Leamington qu'elles ne sont pas revenues. Les populations connaissent des hauts et des bas d'une année à l'autre, et nous essayons encore de comprendre ce qui explique ces déclins cycliques. Elles semblent se rétablir, mais elles ne sont pas ce qu'elles étaient. Quand nous parlons des éphémères à cet endroit, leur cycle est tout à fait le contraire de ce qu'il était avant les années 1950 lorsqu'elles ont complètement disparu pour la première fois.
    Bien.
    J'aimerais que les représentants de Canards Illimités me disent à quel endroit se trouvent les terres humides que nous perdons. Qu'est-ce qui explique exactement ces pertes? Que se passe-t-il sur le terrain?
    Nous pensons qu'elles sont attribuables à une multitude de facteurs différents. L'expansion urbaine, le développement urbain et l'expansion industrielle grugent les terres humides et ont des répercussions. Nous perdons constamment des terres agricoles. Ce sont les principaux facteurs qui expliquent les changements qui s'opèrent dans les terres humides. D'un point de vue historique, vous diriez que c'est uniquement l'agriculture qui est en cause, mais je pense que ce n'est plus le cas maintenant et que c'est surtout l'expansion.
    Je m'adresse encore une fois aux représentants de Canards Illimités. On s'intéresse beaucoup au concept des habitats de réserve grâce auquel la perte de milieux humides dans une région est atténuée dans une autre, et c'est parfois dans une proportion de deux à un. Je crois que c'est un moyen d'obtenir auprès de l'industrie des sommes importantes qui pourraient ensuite être remises au secteur agricole pour restaurer et recréer des milieux humides.
    Pensez-vous qu'il serait judicieux de changer la politique fédérale pour encourager fortement la création d'habitats de réserve et l'atténuation hors site?
    Oui. Nous l'avons d'ailleurs déjà dit au comité et nous répétons que ce serait sans aucun doute une approche viable.
    Bien.
    À propos des pratiques de gestion exemplaires, madame Muter, je crois que vous avez dit que les agriculteurs préfèrent les pratiques volontaires. Cela dit, dans le cas des terres agricoles, le problème repose sur l'envergure des activités, n'est-ce pas? Nous savons quoi faire, mais les mesures sont mises en oeuvre à une si petite échelle qu'elles ne font pas vraiment de différence.
    Est-ce une bonne description de la situation?
    Je pense que c'est une bonne description, et je crois qu'il y a des collectivités, par exemple aux alentours du lac Simcoe, où on a commencé à travailler avec les fermiers, et il s'agit d'un groupe unique. Il faut les faire participer. On ne peut pas seulement leur imposer des règles qu'ils n'aiment pas, et il est donc préférable de collaborer avec eux.
    Je sais qu'un fermier de l'Ohio a créé une sorte de groupe et qu'il encourage les autres fermiers à adopter le même genre de pratiques. Ces démarches peuvent être reprises par d'autres, et je pense que c'est la meilleure façon de s'y prendre.
    Si le gouvernement en faisait la proposition, seriez-vous favorable à une initiative, à un programme à grande échelle sur les biens et services environnementaux au Canada, en vertu duquel les agriculteurs recevraient, par l'intermédiaire du portefeuille de l'Agriculture, des fonds pour la prestation de services environnementaux à l'ensemble de la population?
    Je pense que c'est une idée formidable. Je sais que l'agriculteur de l'Ohio qui a commencé à le faire a indiqué qu'il a dépensé beaucoup d'argent pour passer à d'autres types d'équipement. Essentiellement, il a été obligé d'arrêter d'utiliser le matériel qu'il utilisait auparavant.
    Il a fallu plusieurs années avant que ses récoltes atteignent le volume des années antérieures. Il avait cessé d'utiliser des fertilisants, des pesticides et des herbicides. Il a réussi à faire certaines économies, simplement en modifiant ses pratiques agricoles. Toutefois, la conversion est coûteuse. Il faut donc une mesure incitative, c'est certain.
(1635)
    Parce que les Américains et les Européens ont mis en place de très importants programmes d’incitatifs en matière d'environnement et que le Canada semble être le seul pays qui n'en ait pas. Personnellement, je suis un fervent partisan de cette approche, car je pense que le problème est une question d'échelle. Ce n'est pas que nous ne savons pas quoi faire.
    Pour ce qui est des pratiques exemplaires de gestion, je ne sais pas à qui poser la question. Quant à la réduction du phosphore qui se rend dans les Grands Lacs, avons-nous des renseignements quantitatifs sur les effets de certaines pratiques exemplaires de gestion sur la réduction des rejets de phosphore dans les cours d'eau, puis dans les Grands Lacs?
    Un de nos problèmes, étonnamment, c'est que nous avons bien peu d'informations. C'est un point que je n'ai pu faire valoir. Malgré tous les efforts, toutes les tentatives, le financement pour la recherche fondamentale n'est pas au rendez-vous, comme M. Sweetnam l'a indiqué. Lorsque le financement dont on dispose est limité, on le consacre à la restauration, mais on ne finance pas la recherche pour savoir si cela fonctionne ou non. L'absence de données adéquates sur les résultats constitue l'un des véritables obstacles auxquels nous sommes confrontés.
    Merci, monsieur Sopuck.
    Nous passons maintenant à M. McKay, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais commencer par le dernier commentaire de Mme Muter sur le fait que le lac Supérieur est formé à 99 % d'eau de la période glaciaire et 1 % d'eau de surface. Je ne suis pas certain d'avoir bien compris.
    Cela vaut pour tous les Grands Lacs; 99 % provient du retrait des glaces de la période glaciaire. C'est donc un dépôt glaciaire. Un pour cent est une ressource renouvelable, qui est renouvelée grâce aux précipitations sous forme de pluie et de neige.
    Pour l'ensemble de l'eau des Grands Lacs, 1 % est renouvelable...
    C'est exact.
    ... et le reste vient du passé.
    C'est exact.
    Vraiment? On en apprend tous les jours.
    C’est exact, et l’eau perdue dans la rivière Sainte-Claire provient d'un dépôt glaciaire; elle se perd en raison de l’augmentation du débit sortant.
    Donc, le dur hiver que nous avons connu et l’accumulation de neige et de glace ne nous aideront pas.
    Ils nous aideront en partie, mais nous devons gérer les Grands Lacs de façon beaucoup plus responsable. Il n'y a même pas de débitmètre au point critique de la rivière Sainte-Claire; on ne sait même pas ce qui s’y passe.
    Cela m’amène à ma deuxième question. J’aimerais entendre vos commentaires et ceux de M. Sweetnam à ce sujet. En gros, vous dites que le niveau des lacs Supérieur, Érié et Ontario est normal, mais que celui du lac Michigan et de la baie Georgienne dans le lac Huron est historiquement bas. D’après ce que je comprends, il n’y a aucun moyen, selon la configuration actuelle, de restreindre le débit du lac Sainte-Claire…
    La rivière Sainte-Claire...
    ... et de la rivière Sainte-Claire. C’est curieux. Comment procéderiez-vous? Vous utiliseriez un barrage? Vous avez parlé de ralentisseurs.
    C’est ce que nous avions d'abord convenu: l’installation de ralentisseurs au fond de la rivière Sainte-Claire. La CMI a examiné la situation dans le cadre de son étude de 17 millions de dollars sur les Grands Lacs. Elle a étudié les diverses options, qui sont décrites dans son rapport sur le rétablissement du niveau des lacs Michigan et Huron.
    Nous croyons qu’il faut étudier la situation de façon plus générale, et qu’il est possible de le faire de façon responsable à l’aide d’un clapet qui monte et qui descend, ou d’une structure au fond de la rivière qui pourrait ralentir son débit.
    Avant d’entreprendre de tels travaux, il faut stabiliser le lit de la rivière. Sous le pont Blue Water, à l’extrémité nord de la rivière, le lit est à 60 à 70 pieds de profondeur. Les navires n’ont besoin que de 27 pieds pour...
    Parce que le lit s’est creusé...
    C’est cela. On a enlevé la couverture de roches: le banc de sable et de gravier qui agissait à titre de déversoir naturel du débit sortant. On l’a creusé pour la navigation, et on a recueilli le sable et le gravier. Les activités humaines altèrent la rivière depuis 100 ans.
    On pourrait recouvrir le fond, pour stabiliser le lit de la rivière et y installer des structures, mais cela nécessite des travaux d’ingénierie de modélisation. Nous savons qu’il faut une modélisation tridimensionnelle de haut niveau.
    Le U.S. Army Corps étudie maintenant la situation. Nous voulons que le Canada participe à cette étude.
    En fait, il y a certaines différences sur le plan scientifique. L’eau ne s’écoule pas vers la partie la plus creuse de la rivière. Le goulot d’étranglement, la partie la moins creuse de la rivière, l’en empêche. C'est à cet endroit que l’écoulement sera entravé.
    Ce qui a été constaté dans l’étude sur le secteur supérieur des Grands Lacs... En fait, en 2012, le débit de la rivière St. Clair a diminué de 12 %. Cette année-là, nous avons enregistré un débit minimum record. L’évaporation contrôle le niveau de l’eau.
    En regardant les modèles historiques mis au point par la NOAA, la National Oceanic and Atmospheric Administration des États-Unis, on voit très clairement que ce sont l’évaporation et la température de l’eau qui déterminent le niveau des lacs et non les précipitations. D’importantes avancées scientifiques ont été réalisées au cours des deux dernières années.
(1640)
    Est-ce à dire que même si nous rétablissons l’écosystème, de 60 à 20 pieds, cela ne fera aucune différence? Est-ce que c’est ce que vous êtes en train de nous expliquer?
    Lorsque l’eau sera à un niveau plus élevé, le débit additionnel du courant permettra un écoulement plus rapide, mais lorsque ce débit reviendra à son régime habituel, l’écoulement restera en deçà de 1 % de ce qu’il était avant l’érosion et le dragage, car les niveaux de l’eau sont plus bas.
    La question ne se prête pas vraiment à une réponse rapide en moins de cinq minutes. C’est un peu plus compliqué. Je crois qu’en essayant de trop simplifier, on nuit à la science, qui est pourtant bien établie…
    Ici, nous sommes férus des réponses en 30 secondes.
    La deuxième question porte sur l’accord qui doit être conclu entre le Canada et l'Ontario .
    Le gouvernement ne l’a pas encore signé. Nous espérons seulement que le processus sera mené à terme.
    Certains Autochtones m’ont dit que l’Ontario appuie l’accord, que les Premières Nations appuient l’accord, que les municipalités appuient l’accord…
    Tout le monde appuie l’accord. Il ne reste qu’à le signer.
    Alors, qu’est-ce qui bloque? Quelle est la marche à suivre?
    Je ne sais pas si c’est une question de traduction…
    Le Canada et les États-Unis?
    L'hon. John McKay: Le Canada et l’Ontario.
    D’après ce que dit l’Ontario, il ne reste qu’à faire un peu de traduction ou quelque chose d’autre, puis à signer les documents.
    Ici, au comité, nous savons bien de quoi il retourne. Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste encore un peu de temps. Je vous rappelle, monsieur McKay, que la réponse n’aura pas besoin d’être donnée en 30 secondes si vous ne prenez pas 5 minutes pour poser la question.
    Vous remarquerez que mes questions sont restées très courtes.
    Dans l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, la quantité et la qualité semblent intimement liées et indissociables. Pour peu qu'il soit mis en oeuvre, l'accord arrivera-t-il selon vous à s'attaquer à tous les problèmes que vous avez soulevés, des terres humides à tout le reste?
    Je pense qu'en ce moment, nous craignons que l'ampleur des répercussions des changements climatiques rende imperceptibles les effets escomptés. Je pense que nous songeons peut-être à son effet sur 20 ans, et nous craignons donc un peu que le libellé de l'accord concernant les niveaux de l'eau ne soit peut-être pas aussi explicite que nous l'aurions souhaité.
    Je pense que les réflexions et les délibérations à ce sujet ont considérablement progressé. Je suis beaucoup plus optimiste quant à l'endroit où cet accord nous mènera, mais, selon moi, lorsque nous réfléchissons à son effet à long terme, cela nous inquiète un peu.
    L'accord comporte quelques problèmes de mise en oeuvre.
    Oui, je suis aussi de cet avis. Les délais pour l'établissement des objectifs sont très courts, mais, comme je l'ai indiqué, on prévoit très peu de temps pour les mettre en oeuvre.
    J'ajouterais simplement qu'il faut se demander si le financement permettra de respecter les modalités de l'accord.
    D'accord.
    Nous allons maintenant passer à M. Jacob.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. David Sweetnam.
    Vous avez parlé de cyanobactéries. C'est un sujet qui me préoccupe beaucoup et qui préoccupe également bon nombre de mes électeurs. Ma circonscription est magnifique. Elle a des montages et des lacs. C'est l'Estrie, c'est le comté de Brome—Missisquoi. Il y a plusieurs lacs, dont le lac Brome, le lac Champlain — je ne les nommerai pas tous —, qui ont des organismes dont le mandat est de rétablir la qualité de l'eau.
    Je sais que vous travaillez sur la baie Georgienne et que vous avez accordé une subvention à l'Université York pour l'acquisition de connaissances sur les déclencheurs de la prolifération des cyanobactéries. D'une part, quelle est l'influence de la qualité de l'eau et les dangers que cela pose pour les gens qui l'utilisent? D'autre part, pourriez-vous nous faire un résumé des résultats de cette recherche?

[Traduction]

    Certainement. Du point de vue du public et de l'utilisation de l'eau par l'écosystème, on pourrait faire valoir que les cyanobactéries font partie de l'écosystème et, par conséquent, des processus naturels. Toutefois, selon moi, lorsque nous parlons des cyanobactéries et de leur prolifération nocive, nous faisons davantage allusion à leurs répercussions sur les humains qui utilisent l'eau. Dans ce contexte, même la menace d'une prolifération de cyanobactéries peut nuire à la valeur des propriétés. Si une prolifération de cyanobactéries se produit, qu'elle soit toxique ou non, personne ne peut boire l'eau ou toucher à celle-ci, entre le moment où la prolifération se manifeste et celui où elle est identifiée, et vous ne pouvez pas non plus laisser votre chien se baigner, de peur qu'il en meurt ou qu'il ait des problèmes si les algues sont toxiques. On ne peut pas toucher à l'eau, parce que les toxines peuvent être absorbées. Les hépatotoxines — qui sont des néphrotoxines — peuvent pénétrer dans votre système et vous causer de sérieux problèmes de santé.
    Sur le plan économique — à Sturgeon Bay, par exemple —, si les proliférations de cyanobactéries sont un problème récurrent, vous courez le risque de ne pas être en mesure de vendre votre chalet, en particulier si la situation s'aggrave progressivement dans cet emplacement géographique.
    Au cours des 20 ou 30 dernières années, nous avons remarqué que les proliférations de cyanobactéries dans les lacs intérieurs devenaient de plus en plus fréquentes. Notre recherche consistait en partie à étudier les déclencheurs biochimiques et à nous demander la raison pour laquelle les cyanobactéries ne proliféraient pas toujours, même si elles éliminaient toujours efficacement le phosphore de leur environnement. L'algue eucaryote — l'autre algue — domine jusqu'à ce que quelque chose déclenche la prolifération des algues bleu-vert et qu'elles envahissent le milieu.
    Comme Mme Ciborowski en a parlé, nous examinions l'effet de l'anoxie sur les eaux de fond qui contiennent des détritus. Les algues eucaryotes normales meurent et tombent au fond de l'eau où elles pourrissent. Ces algues absorbent tout l'oxygène contenu dans cette eau. À ce stade, les conditions redeviennent celles de la préhistoire, soit les conditions qui existaient sur la Terre lorsqu'il n'y avait pas d'oxygène et que les algues bleu-vert dominaient. Ces algues utilisent des produits chimiques autres que l'oxygène pour alimenter leurs processus biochimiques, et ce, d'une manière beaucoup plus efficace que les algues de type eucaryote — qui ont besoin d'oxygène.
    Dès que le milieu est anoxique, le fer ferreux des sédiments libère du phosphore. Ces organismes utilisent le phosphore comme une sorte de fertilisant, si vous voulez, et ils peuvent, en fait, se déplacer dans la colonne d'eau, de haut en bas. Ces organismes peuvent monter dans les zones oxygénées et un peu eutrophes où ils ont accès à la lumière du soleil, puis se laisser tomber comme des tourelles de plongée pour saisir les éléments nutritifs qu'ils désirent, et remonter par la suite. Ces organismes sont donc mobiles; ils peuvent monter et descendre à leur guise.
    Nous avons maintenant rédigé un article sur ces genres de déclencheurs, en collaboration avec M. Lewis Molot de l'Université York, et la revue Freshwater Biology a accepté de le publier. Nous souhaitions découvrir cette science fascinante et un peu ésotérique.
    Une fois que ces organismes dominent, ils peuvent certainement, compte tenu de la grande quantité de phosphore que le réseau des Grands Lacs leur fournit — le phosphore étant un peu le nutriment limitant —, produire ces énormes écumes de surface que nous associons tous aux proliférations de cyanobactéries. Toutefois, les cyanobactéries se multipliaient déjà dans la colonne d'eau, et cette colonne abritait déjà un grand nombre de ces organismes.
(1645)
    D'accord. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Woodworth.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie également les témoins. Je trouve cette étude particulièrement gratifiante. C'est l'une de celles que j'avais demandé que nous menions et, comme j'habite le long de la rivière Grand et que je m'intéresse à la qualité de l'eau tout autour de moi, cette étude suscite tout particulièrement mon intérêt.
    Si vous me le permettez, j'aimerais vous poser quelques questions, madame Ciborowski, en commençant par l'Initiative sur les nutriments dans les Grands Lacs que vous avez mentionnée. Je suppose que je vous demanderai tout d'abord si vous jouez un quelconque rôle dans cette initiative.
    Oui, dans une certaine mesure. Nous les aidons à prélever des échantillons dans certaines régions. L'une des principales raisons pour lesquelles il est difficile de connaître l'état des Grands Lacs, c'est qu'au fil des ans, le financement accordé pour surveiller les Grands Lacs et mener des recherches a diminué. Nous comprenons mieux l'état du lac Érié que celui de tous les autres Grands Lacs. Nous connaissons la quantité de nutriments qui est déversée dans le lac chaque année, et nous utilisons ce renseignement pour prédire s'il y aura des proliférations de cyanobactéries. Mais, en fait, bon nombre des affluents n'ont pas été contrôlés depuis 10 ou 15 ans. Ceux qui sont surveillés sont de moins en moins nombreux, et nous supposons que certains de ces affluents se comportent de la même façon que ceux qui sont surveillés.
    L'Initiative sur les nutriments dans les Grands Lacs a fourni des fonds pour assurer la surveillance de 12 des affluents canadiens du lac Érié, dans lesquels nous n'avons pas prélevé d'échantillons depuis environ cinq ou six ans. Ces affluents comprennent les rivières Grand, Sydenham, Thames et Détroit. Cette dernière est surveillée 24 heures par jour, hiver comme été. L'une des principales motivations de l'initiative est de comprendre le lien qui existe entre la charge en polluants phosphorés et les proliférations de cyanobactéries que nous observons.
(1650)
    C'est une excellente nouvelle, et je m'en réjouis. Je crois comprendre que, même si l'initiative met l'accent sur le lac Érié, les données scientifiques et les approches adoptées dans le cadre de l'initiative pourront être appliquées aux autres Grands Lacs et, en fait, à d'autres plans d'eau au Canada. Est-ce votre impression?
    C'est tout à fait exact. Le lac Érié est la vedette parce que nous disposons de la plus grande quantité d'information à son sujet et qu'il est étudié par le plus grand nombre de scientifiques. Par conséquent, nous comprenons mieux les relations qui existent. Nos connaissances peuvent certainement être appliquées aux différents Grands Lacs et, comme on compte presque trois lacs en un seul dans le lac Érié, nous pouvons utiliser les renseignements sur sa partie profonde et sa partie peu profonde pour tirer des déductions sur d'autres parties des Grands Lacs.
    En fait, j’étais impatient d’employer pour la première fois le mot « oligotrophie », je crois, qui évoque un milieu que l’on retrouve dans la partie profonde du lac Érié et qui est caractérisé par l’absence de phosphore. Par conséquent, je crois comprendre que ces lacs sont constitués de différents niveaux et que l’Initiative sur les nutriments dans les Grands Lacs permettra d’établir des objectifs binationaux en matière d’écosystème lacustre et de phosphore ainsi que des buts en matière de réduction de la charge en phosphore. Est-ce aussi votre impression?
    C’est vrai, et je suis en fait membre du groupe de travail chargé d’estimer ces objectifs en s’appuyant sur les données scientifiques les plus fiables. En ce moment, la ligne directrice qui a été proposée pour le lac Érié correspond à 11 000 tonnes métriques par année. Au cours d’une année normale sur le plan des précipitations, l’écoulement est inférieur à cela et il n’y a pas de proliférations de cyanobactéries. Toutefois, lorsque notre automne et notre hiver sont pluvieux, l’écoulement dépasse la quantité normale d’eau, et la quantité de phosphore qui entre dans le lac peut s’élever à 18 000 ou 20 000 tonnes métriques. C’est à ces moments-là que nous connaissons de graves proliférations des cyanobactéries.
    Les faits semblent indiquer que ces objectifs pourraient être trop élevés, compte tenu du comportement des algues bleu-vert dont M. Sweetnam parlait. Certaines personnes pensent qu’il faudrait peut-être viser une réduction de 30 % pour certains bassins hydrographiques. La question qui se pose est la suivante: cette approche est-elle réaliste, et comment pourrons-nous atteindre un jour ces objectifs en matière de réduction, compte tenu des conséquences économiques qu’ils auront et des pratiques de gestion exemplaires dont nous disposons?
    Je pense que nous avons entendu dire que la Grand River Conservation Authority travaillait en fait au même projet, en vue d’établir des pratiques de gestion exemplaires. Toutefois, j’ignore si nous avons déjà déterminé les résultats que donneront ces pratiques. Est-ce que cet aspect fait également l’objet d’une étude, c’est-à-dire l’effet qu’auront les pratiques de gestion exemplaires qui sont en cours d’élaboration?
    C’est une importante étape du processus. Il faut aussi reconnaître que différentes rivières reçoivent différents écoulements qui proviennent, par exemple, de l’agriculture, par opposition à des régions rurales ou des banlieues. Nous tentons aussi de faire valoir que la rivière Maumee, qui semble attirer beaucoup l’attention, est touchée principalement par l’agriculture, et que pour la rivière Grand, qui est exposée à un mélange de régions urbaines et rurales, nous aurons probablement besoin d’une solution différente de celle que nous utilisons pour certaines des autres régions. C’est un aspect qui intéresse énormément le groupe de travail.
    Votre temps...
    J’aillais justement dire que le président allait m’interrompre alors que j’ai encore deux questions à poser.
    Vous aviez raison.
    Nous allons maintenant passer à M. Jacob.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Combien de temps me reste-t-il?

[Traduction]

    Vous disposez de cinq minutes.

[Français]

    D'accord.
    Ma question s'adresse à vous, monsieur Sweetnam.
    Le gouvernement fédéral pourrait-il jouer un rôle préventif ou curatif relativement à la prolifération des cyanobactéries?

[Traduction]

    Certainement. Je pense qu’en ce qui a trait aux proliférations de cyanobactéries que nous observons dans le bassin des Grands Lacs et au travail que Mme Ciborowski réalise et décrit, le gouvernement pourrait absolument jouer un rôle dans ce processus. Je confierai aux personnes qui participent à ce processus le soin d’en discuter.
    Il se peut que personne n’intervienne à proximité de certains des lacs intérieurs où l’on observe des proliférations de cyanobactéries, ce qui n’empêche pas les proliférations de survenir. Il se peut que le pH des pluies soit en train de changer ou qu’un facteur complètement différent intervienne, un facteur sur lequel nous n’exerçons aucun contrôle. Dans des cas comme ceux-là, il ne serait pas nécessairement désirable que le gouvernement intervienne directement ou à court terme, en particulier en appliquant un genre de solution réglementaire.
    Par conséquent, je pense qu’il faut examiner le problème en question. L’endroit ou le problème pourrait-il bénéficier d’une aide? Si je devais répondre par « oui » ou par « non », je dirais « oui », mais il faudrait que cette aide soit orientée précisément vers le problème en question.
(1655)

[Français]

    Merci beaucoup.
    Je vais partager le reste de mon temps de parole avec Mme Ashton.

[Traduction]

    J’adresse ma question à Mme Muter.
    J’aimerais que vous formuliez des observations sur le lien qui existe entre ce dont nous parlons aujourd’hui et les changements climatiques. Compte tenu du climat politique dans lequel nous évoluons en raison des députés ministériels, les mots « changement climatique » sont de plus en plus souvent considérés comme inconvenants. Je me demande si vous pourriez faire le lien entre le changement climatique et ce que vous observez dans les Grands Lacs.
    Le changement climatique est là. Il intervient. Les faits le prouvent clairement maintenant. Le rapport qui vient d’être publié démontre que le phénomène est encore plus effrayant que nous le pensions.
    En ce qui concerne ses répercussions sur les Grands Lacs, elles sont évidemment liées au réchauffement de la température de leurs eaux. La professeure Pat Chow-Fraser de l’Université McMaster a observé des températures de 27 degrés à des endroits où des populations de brochets vivaient. Ces températures sont supérieures à celles auxquelles ces populations peuvent survivre normalement.
    Par conséquent, oui, les changements climatiques réchauffent les eaux, ce qui favorise les proliférations de cyanobactéries et accroît leur durée. De plus, des températures de l’eau plus élevées entraînent une évaporation accrue. Au cours de la dernière décennie, l’étendue de la couche de glace a diminué considérablement. L’hiver que nous venons de traverser est une exception, mais, avant cela, le niveau de l’eau de tous les Grands Lacs avait diminué, en raison du rétrécissement de la couche de glace, des eaux plus chaudes et de l’évaporation accrue.
    Pour donner brièvement suite à ma question, le gouvernement fédéral peut-il jouer un rôle à cet égard?
    Le gouvernement fédéral peut, bien entendu, jouer un rôle à cet égard. Nous devons tous prendre des mesures pour réduire autant que faire se peut les répercussions des changements climatiques et, évidemment, les facteurs, quels qu’ils soient, qui contribuent aux changements climatiques. Il va de soi qu’il faut réduire les gaz à effet de serre et pouvoir déterminer la façon dont nous pouvons nous adapter d’une certaine manière aux changements climatiques.
    Nous pensons que l’une des plus importantes mesures que nous pouvons prendre consiste à obtenir le pouvoir de retenir l’eau dans tous les Grands Lacs qui sont touchés par le changement climatique. On prévoit que les répercussions des changements climatiques sur les lacs Michigan et Huron seront très substantielles, mais, en ce moment, nous avons seulement le pouvoir de retenir l’eau dans les lacs Supérieur et Ontario ainsi que dans le lac Érié, dans une certaine mesure. Toutefois, nous ne pouvons rien faire pour l’énorme plan d’eau qui se trouve au milieu.
    Nous affirmons que la meilleure mesure de gestion et d’adaptation que nous pourrions prendre consisterait probablement à se faire accorder un certain pouvoir de retenir l’eau dans tous les Grands Lacs, puis de constituer une commission équilibrée chargée de surveiller la quantité d’eau dans tous les Grands Lacs. À l’heure actuelle, nous établissons les débits de sortie mensuels des lacs Supérieur et Ontario. Les débits sont mesurés toutes les heures. Nous ne disposons d’aucun mécanisme semblable pour protéger la rivière Sainte-Claire.
    Je mentionne rapidement l’importance de l’investissement fédéral dans la recherche. Je représente un certain nombre de collectivités situées près du lac Winnipeg, où les proliférations de cyanobactéries suscitent des préoccupations semblables. Comme vous le savez, l’interruption du financement fédéral dans la Région des lacs expérimentaux représente une énorme perte sur le plan du travail de prévention et de protection qui doit être réalisé.
    Je me demande si vous pourriez tous les deux formuler de brèves observations concernant l’annulation des travaux de recherche du gouvernement fédéral et l’incidence que cela a sur votre travail.
    Mme Muter pourrait peut-être commencer, et M. Sweetnam pourrait suivre.
    Il vous reste 10 secondes, alors soyez très brefs.
    L’Ontario a maintenant repris ces travaux. Ils sont financés de nouveau et se déroulent en ce moment. Ce sont donc d’excellentes nouvelles.
    Le gouvernement fédéral devrait-il financer le personnel de recherche?
    Absolument, oui. Dites-vous que c'est ainsi qu'on a pour la première fois démontré que le phosphore était l'une des principales causes de la formation d'algues, et qu'il s'agit du contexte qui permet la réalisation de tels projets de recherche. Il n'y a aucun autre contexte comme celui-là pour le faire.
    Il y a eu un communiqué de presse aujourd'hui.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Toet, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais laisser M. Woodworth finir de poser ses quelques questions d'abord. Nous verrons ensuite s'il me reste du temps.
    Bonne chance.
    Des voix: Oh, oh!
    Vous avez probablement raison.
    Merci beaucoup, monsieur Toet.
    Je veux simplement rassurer ma collègue de l'autre côté: l'Initiative sur les éléments nutritifs des Grands Lacs correspond en réalité exactement au type de recherche qu'elle réclame.
    En fait, monsieur Ciborowski, j'aimerais que vous me disiez — en particulier parce que vous travaillez aux questions entourant les cibles et les objectifs de réduction — quel est l'échéancier prévu pour la réalisation de la recherche et la présentation de recommandations.
    C'est un très court échéancier. Les lignes directrices doivent être prêtes pour septembre 2016, je pense, et il faut avant cela avoir obtenu les commentaires du public. Les groupes d'experts se réuniront trois ou quatre fois par année pour faire concorder la recherche scientifique, faire les recommandations, puis les évaluer et déterminer s'il est possible de les mettre en oeuvre.
(1700)
    C'est excellent. Je suis simplement heureux de voir que le gouvernement a réagi à ce problème aussi rapidement qu'il l'a fait.
    Ma deuxième question porte sur une chose que vous avez dite et qui m'a intrigué, soit que « nous » quantifions les risques et préparons des cartes. Je me demandais qui c'était, ce « nous », et si c'était lié à l'Initiative sur les éléments nutritifs des Grands Lacs.
    Non, ça ne l'est pas. C'est une recherche à laquelle je participe avec des collègues de l'Université du Minnesota Duluth. Nous recevons du soutien de l'agence de protection environnementale américaine, l'EPA, ainsi que des fonds d'Environnement Canada, pour la conception de cartes qui précisent les stress les plus importants et les plus faibles, et qui apparient le stress avec les réponses biologiques.
    J'aimerais bien...
    Vous avez donc reçu des fonds d'Environnement Canada pour faire le type de recherche dont ma collègue de l'autre côté parlait.
    Eh bien, nous avons officiellement obtenu des fonds pour créer les cartes. Nous n'avons pas en ce moment de fonds pour cela.
    D'accord. Il faudra que nous nous penchions là-dessus. Merci beaucoup.
    Je vais redonner la parole à M. Toet.
    Vous avez deux minutes, monsieur Toet.
    Merci.
    Madame Muter, vous venez de citer une personne qui a témoigné à notre dernière séance, Patricia Chow-Fraser, concernant la hausse de la température dans les Grands Lacs. Pouvez-vous quantifier cela pour nous? Elle n'a pas pu le faire. Savez-vous quelles étaient les températures et ce qu'elles sont maintenant? Vous pouvez me dire les températures actuelles. De combien ont-elles augmenté?
    Je ne peux pas vous donner de réponse précise parce que tout dépend de l'endroit où les échantillons sont prélevés; les Grands Lacs sont immenses. Par ailleurs, Mme Chow parlait de la température dans une des baies où l'eau est peu profonde, raison pour laquelle la température était si élevée. À notre avis, il s'agit d'un autre facteur qui a contribué à la mortalité massive de poissons et d'oiseaux sur les plages méridionales de la baie Georgienne, où la température de l'eau est plus élevée.
    Vous voulez peut-être parler de la température moyenne après le renversement des eaux des lacs, qui se produit au printemps. J'ignore si nous faisons des recherches à ce sujet. C'est...
    La température dont la NOAA fait état représente une augmentation de cinq degrés Fahrenheit, ou deux degrés Celsius, de la température moyenne globale de l'eau dans les Grands Lacs.
    Ces recherches ont été menées plus au nord, dans le lac Supérieur. On a extrapolé comment cela se traduirait plus au sud, dans les lacs Michigan et Huron ainsi que dans la baie Georgienne. Par conséquent, l'extrapolation devient une façon de faire des estimations.
    Oui. D'accord.
    Je trouve très intéressant qu'on nous présente des éléments probants factuels pour ensuite nous dire qu'on ne sait pas vraiment de combien de degrés la température de l'eau a augmenté. Nous invitons des témoins qui citent des études selon lesquelles certains changements auraient été observés; or, on ne peut pas nous donner les points de base à partir desquels ces changements ont été déterminés. Il nous est donc vraiment difficile de savoir quelle est la température, quels changements ont eu lieu et de combien de degrés la température a changé.
    Eh bien, David vient de vous le dire. Il s'agit d'une agence américaine. Aucune agence canadienne ne fait ce genre de travail.
    Merci.
    Nous pourrions transmettre ces renseignements à la greffière.
    Merci.
    J'aimerais poser une question aux représentants de Canards Illimités.
    J'ai trouvé très intéressant de voir certains des chiffres que vous avez avancés relativement à la valeur économique, à l'estimation de la valeur des hectares de terrain ou de milieux humides dans le bassin du lac Simcoe. Sans entrer dans trop de détails — puisque nous n'avons pas beaucoup de temps —, j'aimerais savoir si vous pourriez nous donner une idée de la façon dont vous êtes parvenus à ces chiffres. Je parle du montant de 11 172 $.
    Ce chiffre a été tiré d'un rapport publié par la Fondation Suzuki. Les chercheurs ont calculé la valeur combinée de tous les bienfaits des milieux humides. Ils ont fait valoir l'enlèvement du phosphore, les possibilités d'activités récréatives, la réduction des inondations et — je n'ai pas lu le rapport depuis un certain temps — les problèmes liés au carbone, soit la séquestration du carbone et les gaz à effet de serre. Ils ont tenu compte de tous ces biens et services dont nous bénéficions grâce aux milieux humides.
    Merci beaucoup. Merci, monsieur Toet.
    C'est à votre tour, monsieur Bevington. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Moi aussi, j'aimerais aborder la question des milieux humides parce que, au cours des deux dernières années, dans cette enceinte, nous avons beaucoup entendu parler du fait que le gouvernement actuel a aboli l'obligation de soumettre les fossés de drainage des agriculteurs à une évaluation environnementale. Les ministériels en ont beaucoup parlé. Je me dis qu'il doit bien exister des centaines de milliers d'agriculteurs et des centaines de milliers de fossés de drainage. À quel point les fossés de drainage non réglementés contribuent-ils à l'élimination des milieux humides au Canada?
(1705)
    Les tranchées de drainage servent à drainer les terres humides. Depuis un certain temps, nous faisons valoir que pour résoudre le problème, il faut l'attaquer à la source, c'est-à-dire la perte de terres humides dans le paysage.
    C'est essentiellement ce qui me préoccupe. S'il n'est plus nécessaire d'obtenir un permis ou une autorisation pour accroître le drainage dans une région donnée, un grand nombre de terres humides pourraient disparaître, n'est-ce pas?
    Une partie essentielle de notre travail en matière de politiques consiste à cerner vraiment le besoin de conserver les terres humides dans le paysage. Les politiques à cet égard doivent permettre de répertorier les terres humides et de déterminer celles qui doivent être protégées. À certains endroits au pays, le drainage n'est ni réglementé et ni encadré, ce qui contribue à la perte des terres humides.
    Fort bien, alors. Je veux simplement que mes collègues ici présents comprennent bien ce point.
    Monsieur Ciborowski, j'ai soulevé la question de l'acide trifluoroacétique. Une étude réalisée en 2002 a révélé des taux élevés de ce composé dans les lacs. C'était il y a 12 ans. Voulez-vous dire qu'aucune autre étude n'a été effectuée à ce sujet?
    Il se peut fort bien qu'il y en ait, mais comme cela ne relève pas de mes compétences, je ne peux vous donner de réponse directe.
    D'accord. Comment pourrions-nous savoir quels produits chimiques font l'objet de tests dans les Grands Lacs actuellement? Quel organisme pourrait nous renseigner à ce sujet?
    Au Canada, ce serait Environnement Canada, alors qu'aux États-Unis, ce serait l'EPA.
    Publient-ils des listes des composés faisant l'objet de tests?
    Ces composés font l'objet d'une surveillance régulière dans les Grands Lacs comme tels. Mais ici encore, il s'effectue moins de tests dans une certaine mesure. Dans les Grands Lacs, on procède actuellement en soumettant chaque lac à une année d'étude intensive en effectuant une rotation. L'an dernier, on a étudié intensivement le lac Ontario; on devrait donc disposer d'informations à jour sur ce lac. Cette année, c'est le tour du lac Érié; les parties recueilleront donc des données sur les conditions de ce lac.
    Selon vous, est-ce que certains produits devraient faire l'objet de tests dans ces lacs? Devrait-on faire des recherches en profondeur concernant certains produits chimiques? C'est un petit jeu de mots, mais...
    Il s'agit d'un volet fondamental de la surveillance, et on surveille régulièrement les sédiments présents dans l'eau. Nos ressources ne nous permettent toutefois pas de surveiller ces tendances. Une foule d'information attend inutilement dans les bases de données parce qu'il n'y a pas de scientifiques pour les interpréter et les publier. L'information pourrait donc exister, mais elle dort dans les bases de données au lieu d'être interprétée et publiée.
    J'aurais quelque chose à ajouter concernant les nouveaux produits chimiques. Par exemple, tout le monde aime bien l'idée de ces savons liquides qui ont des propriétés antimicrobiennes. Les fabricants ont ainsi commencé à intégrer des nanoparticules d'argent à leurs produits de soins personnels. Il y a bioaccumulation de ces particules qui demeurent dans l'environnement. Aucun lien n'est établi entre l'ajout d'une composante à un produit d'hygiène personnelle et la qualité de l'eau. Il n'existe actuellement aucun processus d'examen permettant de confirmer un tel lien. C'est ce qui nous incite à préconiser une approche préventive de façon à ce qu'on agisse avant que de telles choses puissent se produire. Si l'on pouvait réglementer en ce sens les produits qui finissent par se retrouver dans un plan d'eau, je crois que l'on pourrait commencer à agir de façon davantage proactive que réactive.
    Merci.
    Nous passons à M. Storseth qui profitera des cinq dernières minutes.
(1710)
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier nos témoins de leur présence aujourd'hui. C'est amusant de voir aller mes collègues du NPD dans l'opposition. Ils sont toujours prêts à taxer tout ce qui respire et à réglementer tout ce qui existe. Et si jamais ça cesse d'exister, ils auront encore un impôt pour cela.
    Pour que les choses soient bien claires, ce ne sont pas les fossés eux-mêmes qui posent problème, mais les terres humides que nous devons veiller à maintenir et à protéger. C'est ce qu'il faut faire d'abord et avant tout.
    Oui. C'est la perte de terres humides qui est problématique.
    Alors, si nous établissons la réglementation la plus rigoureuse qui soit pour les fossés, est-ce que cela va nous aider à protéger les terres humides?
    Probablement pas.
    D'accord.
    Vous avez dit quelque chose d'intéressant concernant les pertes de terres humides de l'ordre de 65 à 80 % selon l'étude dont vous nous avez parlé. Je ne vous ai toutefois pas entendu citer la cause principale de ces pertes de terres humides dans la région des Grands Lacs.
    Les pertes sont surtout attribuables au développement et à l'étalement urbain ainsi qu'à l'expansion industrielle des grands centres.
    Ce ne sont donc pas le pétrole et le gaz naturel qui sont responsables.
    La pollution est aussi un facteur.
    Oui, mais ma question ne portait pas sur la pollution.
    Pour ce qui est des pertes directes, ce sont donc les facteurs responsables en ajoutant les activités agricoles qui ont toujours cours dans le secteur.
    Savez-vous quelle proportion de ces pertes de 65 à 80 % serait attribuable à l'étalement urbain?
    Une large part de ces pertes de terres humides découle des conversions effectuées lorsque les agriculteurs ont défriché leurs terres pour ensuite les aménager. On peut sans doute affirmer que l'activité agricole est responsable à hauteur de 80 %.
    Puis l'étalement urbain a fait son oeuvre.
    Oui, les choses ont changé depuis.
    Madame Muter, vous parliez de pollution. Pourriez-vous nous en dire davantage?
    La pollution touche des secteurs comme le port de Hamilton où les eaux sont bien sûr extrêmement contaminées. Les plantes des zones humides ne peuvent pas se développer dans un habitat semblable, et on se retrouve avec une monoculture de deux ou trois espèces capables de survivre dans des eaux polluées.
    Excellent, merci. Je voulais juste préciser les choses.
    Ma deuxième question fait suite à vos commentaires sur la remise en état de l'habitat. C'est un aspect que nous avons déjà abordé en comité, notamment dans le cadre de notre étude à ce sujet. Pourriez-vous me parler de vos projets les plus fructueux en la matière et des stratégies qui semblent produire les meilleurs résultats? Comme je suis persuadé que je vais manquer de temps, profitez-en donc pour me glisser un mot sur les coûts associés à ces initiatives.
    La réhabilitation et la restauration sous-entendent habituellement de restaurer le réseau hydrologique. Si le drainage du milieu humide est attribuable à un fossé ou à un détournement quelconque d'un cours d'eau, pour restaurer le réseau hydrologique... il faut recréer la capacité du bassin de retenir l'eau pour restaurer le réseau. Le milieu revit et il revit très vite. C'est la façon dont nous procédons habituellement.
    Qu'est-ce que cela signifie sur le plan économique? La restauration coûte cher. Il en coûte de l'ordre de 10 000 à 20 000 $ par hectare pour rétablir des milieux humides sur le territoire.
    Excellent, je vous remercie beaucoup.
    Si vous voulez un exemple...
    M. Brian Storseth: Oui, s'il vous plaît.
    M. James Brennan: Il y en a beaucoup. Il y a certainement celui du marais Second, à Oshawa, ou celui du marais Tiny, dans le comté de Simcoe. Il y a beaucoup d'exemples dont nous pouvons nous inspirer.
    Merci beaucoup.
    Il vous reste toute une minute.
    Ah oui? Excellent, merci.
    Vous avez dit qu'il en coûte 10 000 $ par hectare, environ, mais est-ce vrai aussi pour d'autres régions? Nous avons parlé du lac Winnipeg, par exemple; les coûts seraient-ils exponentiels autour des Grands Lacs?
    Le grand facteur qui entre en jeu dans les Grands Lacs, c'est la valeur des terres et le coût de l'accès aux terres. Si l'on peut intervenir sur une propriété où l'on travaille avec le propriétaire, qui souhaite la restauration en question, et qu'on n'a pas à absorber de coûts supplémentaires pour accéder aux terres, les coûts restent à peu près les mêmes.
    Nous avons également parlé de l'étalement urbain. Y a-t-il des promoteurs qui voient là une niche qui profite à leurs projets de développement? Est-ce un phénomène qui prend de l'ampleur?
    Nous en voyons effectivement beaucoup d'exemples dans des villes comme Winnipeg, où il y a vraiment eu de grands engagements à créer des milieux humides pour le traitement des eaux de ruissellement, entre autres. Cela fait d'ailleurs augmenter la valeur du marché du logement, parce que les gens aiment voir de l'eau de chez eux, si bien qu'il est très bénéfique à bien des endroits d'inclure des milieux humides d'aspect naturel dans des complexes de développement. On commence à en voir en Ontario. L'adoption de cette pratique est plus lente que ce à quoi nous nous attendions.
(1715)
    Chose certaine, cela devient important quand on commence à parler de partenariats.
    Merci infiniment, monsieur Storseth, pour ce mot de la fin.
    Je tiens à remercier tous nos témoins de leur participation d'aujourd'hui.
    Sur ce, je vais déclarer la séance levée.
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