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Je déclare ouverte la 26
e séance du Comité permanent de l'environnement et du développement durable.
Nous entamons aujourd'hui notre étude sur la gestion des déchets solides. Nous recevons quatre témoins: Plasco Energy; Tomlinson Environmental; M. Douglas Cardinal, qui témoigne à titre personnel; et BioWaste to Energy for Canada Integration, dont le représentant comparaît par vidéoconférence depuis Edmonton.
Je crois qu'il importe que le comité reconnaisse l'importance de cette étude sur la manière dont on gère nos déchets afin de tenir compte de leurs effets sur l'environnement, nos terres, notre eau et notre air. Il me semble que c'est la raison évidente pour laquelle le comité se penche sur la question. Cette étude nous permettra également d'examiner des manières de traiter une partie des déchets pour produire de l'énergie.
Je tiens à ce que vous sachiez dès le départ que nous nous attendons à ce qu'il y ait un vote dans les prochaines minutes. Nous écouterons donc les exposés et nous reviendrons immédiatement après le vote. Je m'excuse auprès des témoins, qui bénéficieront d'une petite pause. J'ignore si vous aurez le temps de prendre un café ou pas, mais espérons que ce sera le cas.
Nous commencerons par M. Edmond Chiasson, de Plasco Energy Group. Nous accordons 10 minutes à chacun de vous pour que vous fassiez votre exposé; une fois que tous les exposés auront été faits, les membres du comité vous poseront des questions.
Je laisse donc la parole à Edmond Chiasson, vice-président, Affaires publiques et communications corporatives, de Plasco Energy.
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Honorables membres du comité, je vous remercie sincèrement de votre gracieuse invitation et de l'intérêt que vous portez à l'important domaine de la gestion des déchets municipaux au Canada, qui constitue l'objet de vos travaux.
Comme le président l'a indiqué, je m'appelle Edmond Chiasson. Je vous demanderais de m'excuser si je me m'exprime qu'en anglais. Même si je porte un joli nom acadien de l'île du Cap-Breton, j'ai fait toutes mes études en anglais et au fil du temps, c'est cette langue qui a prévalu.
Je travaille pour Plasco Energy Group depuis huit ans. Je dois dire que même si j'ai appris beaucoup au sujet du monde complexe de la gestion des déchets et de la production d'énergie, n'étant ni ingénieur ni scientifique, je ne peux me prétendre expert quant à une technologie particulière, même après huit ans. Je tiens à le préciser d'entrée de jeu.
J'aimerais cependant faire une première remarque suivante pour que vous la considériez. Je pense qu'il y a une réalité indéniable dans le monde de la gestion des déchets. Cette réalité, c'est que notre société — et je ne parle pas que du Canada — ne gère pas très bien les matières dont on veut se départir. Nous n'avons pas réussi à concevoir des produits afin de réduire les déchets le plus possible une fois que leur vie utile est terminée. Nous n'avons pas vraiment compris comment réutiliser le plus grand nombre de matières possible et nous n'avons pas trouvé la meilleure manière de recycler les matières.
Nous avons accompli quelques efforts louables et réalisé d'excellents progrès au cours des 30 ou 40 dernières années, mais le fait demeure que la principale méthode de gestion des matières résiduelles dans le monde aujourd'hui, y compris au Canada, consiste à les ensevelir. En Ontario, par exemple, on a enseveli neuf millions de tonnes de déchets l'an dernier. Pensez à la quantité de déchets que cela représente. Au bout du compte, je pense que creuser un trou pour y ensevelir des matières n'est pas la solution. Il doit exister une meilleure façon de faire.
Mais comment peut-on agir mieux que nous ne le faisons maintenant? Au départ, nous devrions nous fixer un objectif. Plasco a pu constater qu'au Canada et dans d'autres pays, il semble que les décideurs s'entendent pour dire que sur le plan des bonnes pratiques de gestion des déchets, l'objectif est de ne produire aucun déchet.
Plasco appuie cet objectif, et nous espérons contribuer à l'atteindre. Nous pensons que notre contribution peut être mieux évaluée dans le domaine de l'innovation technologique, dont il est sûr question dans votre étude. Comment peut-on mieux valoriser les matières que nous envoyons actuellement au dépotoir? Il faut veiller à ce que ces matières sont envoyées là où elles auront la meilleure deuxième utilité, et juste avant que le camion à ordures ne prenne le chemin de la décharge, voyons ce que l'innovation a à offrir. C'est là que Plasco entre en jeu.
Plasco Energy Group est une entreprise d'Ottawa qui met au point sa propre technologie afin d'améliorer la valorisation énergétique des déchets. Le principal processus et la propriété intellectuelle de Plasco remontent à plus de 25 ans; l'entreprise travaille en partenariat depuis le début avec le Conseil national de recherches. Pour simplifier les choses le plus possible, le processus de Plasco permet de gazéifier les déchets pour en faire un carburant qualifié de gaz synthétique, qui peut être utilisé pour produire de l'électricité au moyen de moteurs à combustion interne. Le facteur clé que les non-ingénieurs comme moi doivent comprendre, c'est que plutôt que de brûler les déchets — ce qu'on appelle l'incinération, la combustion ou l'énergie produite à partir des déchets —, Plasco utilise la chaleur pour faire passer les déchets de l'état solide à l'état gazeux. Espérons que nous nous souvenons tous d'avoir appris cela dans nos cours de sciences. Il s'agit du processus de gazéification.
Même si la gazéification est une technologie bien connue et éprouvée, elle n'est pas encore une technologie commerciale entièrement établie pour la gestion des déchets des municipalités, là où chaque sac d'ordure est différent. Voilà pourquoi cette technologie en est encore à l'étape d'innovation du cycle de développement. Cependant, nous sommes enfin prêts pour l'étape de la commercialisation.
Pourquoi notre entreprise et d'autres compagnies font-elles cela? C'est le pouvoir de l'innovation. Nous le faisons parce que nous pensons que la gazéification a le potentiel de produire plus d'énergie d'une tonne de déchets que la technologie existante, et plus il y a d'énergie, plus il y a de valeur. Nous croyons que cette technologie présente des avantages supérieurs pour l'environnement, principalement en produisant des émissions atmosphériques plus propres, en récupérant l'eau plutôt que de l'utiliser et en déduisant le volume de déchets qui prennent le chemin des décharges.
Au final, nous pensons que la technologie offre une solution qui pourrait être meilleure pour bien des communautés. Voilà pourquoi nous faisons cela. Bien entendu, le potentiel d'une technologie de rupture pourrait se traduire par de bonnes affaires et des emplois, ici, au pays. Ce n'est toutefois pas chose facile. Ce qui semble logique sur papier ne fonctionne pas toujours dans la réalité. Mais après 25 ans, nous pensons que nous sommes prêts à aller de l'avant.
Et qu'a fait Plasco jusqu'à présent? Nous avons recueilli environ 400 millions de dollars pour faire progresser notre technologie et avons dépensé plus de la moitié de ce capital au Canada. C'est une bonne chose, car nous avons créé 130 bons emplois à temps plein et nous avons travaillé avec des entreprises canadiennes, lesquelles ont agi à titre de principaux fournisseurs dans le cadre de la construction de notre système et continueront de faire partie de notre chaîne d'approvisionnement quand notre technologie sera commercialisée.
Nous avons effectué beaucoup d'études de marché afin de savoir où notre technologie conviendrait le mieux. Nous avons construit une installation de démonstration à l'échelle commerciale pour prouver que notre technologie est au point, et nous sommes maintenant prêts à entreprendre la prochaine grande étape, celle du déploiement commercial en bonne et due forme. Nous collaborons avec la ville d'Ottawa, le gouvernement de l'Ontario et le gouvernement du Canada pour édifier une première installation commerciale ici même à Ottawa, et ce projet poursuit son cours. Nous sommes également à la recherche d'occasions de projets dans d'autres provinces.
J'aimerais insister sur ma prochaine remarque. Même si nous aimons raconter notre histoire et sommes fiers de notre parcours, nous sommes convaincus qu'il se passe quelque chose de plus grand que cela et qu'il se développe un certain nombre d'autres technologies dans ce secteur au Canada. Plasco n'est pas seul dans l'aventure. L'an dernier, McKinsey and Company a effectué une étude d'envergure pour Ressources nationales Canada et vos collègues du comité concerné, et a déterminé essentiellement que le Canada a un potentiel immense dans le domaine émergeant de la valorisation énergétique des déchets. Nous espérons que vous examinerez ce rapport dans le cadre de vos délibérations et de vos travaux, car il laisse entendre que le Canada peut devenir un chef de file mondial quand cette technologie en sera à la prochaine étape.
Il y a environ cinq ans, Anthony Cary, haut commissaire du Royaume-Uni, a exprimé le souhait de visiter notre installation. Nous avons appris qu'en raison des engagements qu'il a pris au chapitre des objectifs de gestion des déchets et de l'énergie renouvelable, le Royaume-Uni était en train d'élaborer un nouveau cadre stratégique pour soutenir des technologies comme celle de Plasco. Nous considérons que le Royaume-Uni a accompli des travaux exemplaires qui pourraient intéresser les décideurs canadiens. Si vous me le permettez, je ferais remarquer que cette démarche d'élaboration de politique a été conçue et est mise en oeuvre par un gouvernement de coalition constitué du premier ministre conservateur Cameron et du chef libéral-démocrate Nick Clegg. Il arrive donc parfois que certaines questions stratégiques transcendent les allégeances politiques. Grâce à cette politique, d'importants projets de développement voient le jour au Royaume-Uni, dont deux sont actuellement en construction et se traduisent par des investissements de plus de 600 millions de dollars et par la création de 1 500 emplois. D'autres projets s'en viennent. Est-ce un exemple dont le Canada pourrait s'inspirer? Doit-on conclure que si la politique est bonne, le secteur privé suivra?
Je dis parfois qu'il y a 10 ans, Plasco comptait 5 employés qui tentaient, dans un petit entrepôt de l'est d'Ottawa, de déterminer où ils s'en allaient et s'ils seraient encore en affaire dans quelques mois. Sachez que Plasco est un bon exemple d'innovation en plein essor au Canada. Maintenant fort de 400 millions de dollars et de 130 employés à temps plein, nous croyons que nous disposons d'une des technologies qui peuvent permettre au Canada de se démarquer sur la scène mondiale.
Nous serions ravis de vous faire part de nos réflexions sur la manière dont le gouvernement pourrait aider une industrie émergente comptant des entreprises qui peuvent être des chefs de file mondiaux. Nous ne sommes peut-être pas Google et nous ne concevons peut-être pas de voiture sans chauffeur, mais si nos technologies peuvent contribuer de manière substantielle à relever le défi mondial de la gestion des déchets et de l'assainissement de la planète, nous aurons accompli quelque chose de bon pour le monde.
Merci.
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Oui, merci, monsieur le président. Je vous remercie, moi aussi, de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole devant le comité aujourd'hui.
Je m'appelle Michael Walters et je travaille dans le domaine de la gestion des déchets depuis plus de 40 ans. Je suis au service de Tomlinson, R.W. Tomlinson, depuis quatre ans. Ma carrière a commencé au ministère de l'Environnement en 1972, alors que je m'occupais de l'autorisation de nouveaux sites d'enfouissement. J'ai ensuite été responsable du choix de l'emplacement et de la conception des nouveaux sites d'enfouissement, et de l'autorisation des activités des municipalités et du secteur privé. Ces derniers temps, je m'occupe des activités de valorisation des déchets du secteur privé, et je dois prendre soin de parler un peu plus lentement par considération pour l'interprète, car le sujet me passionne.
Comme je travaille dans le domaine des sites d'enfouissement depuis plus de 40 ans, je me suis toujours intéressé à la valorisation des déchets. J'aime participer à des activités qui ont un effet tangible, dont je vais vous parler dans le temps qui m'est accordé aujourd'hui. Je vais me concentrer principalement sur les innovations et les pratiques exemplaires que Tomlinson met en oeuvre dans le domaine du recyclage des matériaux de construction et de démolition.
Mais auparavant, permettez-moi de parler un peu de notre entreprise. C'est fort intéressant. J'ai travaillé pour de grandes entreprises, mais Tomlinson n'a pas son pareil. Il s'agit d'une entreprises familiale qui a vu le jour en 1969, laquelle offre des services de construction civile lourde, de l'environnement, de construction et d'entretien de routes, et de développement de sites à sa clientèle constituée des secteurs institutionnel, municipal, commercial et industriel.
Tomlinson fournit également de l'équipement de chantier et du matériel de construction comme de l'agrégat de minéraux concassés, de l'asphalte chaud et du béton prémélangé. Nous oeuvrons principalement dans la région de la capitale nationale, mais nous travaillons également dans l'Est de l'Ontario et à Gatineau. Nous sommes en fait en expansion.
Tomlinson compte plus de 1 200 employés, dont des ingénieurs professionnels, des comptables agréés, des technologues, des techniciens, des gens de métier hautement qualifiés et des employés de bureau. Grâce à sa taille et à sa solidité financière, notre entreprise dispose de l'expérience et de l'expertise nécessaires pour gérer de nombreux projets. De plus, comme elle est possédée et exploitée à titre privé, elle a la souplesse qu'il faut pour réagir rapidement à l'évolution des besoins de sa clientèle.
Maintenant que j'ai fait un survol de notre entreprise, permettez-moi de vous parler de l'initiative que nous avons lancée dans la région d'Ottawa dans le domaine des déchets de construction et de démolition.
J'ai commencé à me passionner pour ce domaine en 2006, alors que Tomlinson y travaillait déjà. À l'époque, la ville d'Ottawa avait présenté au conseil un simple aperçu de l'historique de tonnage pour la ville, qui s'élevait alors à plus d'un million de tonnes de déchets, dont 320 000 tonnes venaient du secteur résidentiel et de vos maisons. Mais 240 000 tonnes étaient constituées de matériaux de construction et de démolition, et les 440 000 tonnes par année restantes venaient des secteurs industriel, commercial et institutionnel. On en entend beaucoup parler, mais ces secteurs sont en fait nos écoles et nos hôpitaux.
Nous travaillons dans tous les secteurs que j'ai énumérés et dans tout ce qui concerne la valorisation des déchets, mais dans le temps dont je dispose, je traiterai du marché de la construction et de la démolition pour vous dire ce que nous avons pu réaliser. Dans la ventilation que je viens de présenter, plus de 25 % des déchets produits par la ville d'Ottawa viennent du secteur de la construction et de la démolition.
Tomlinson a vu que c'était un important marché à percer en 1997. Nous avons conçu notre installation de recyclage des déchets de construction et de démolition, puis après avoir obtenu les permis, nous l'avons construite afin de faire complément à la division à grande capacité qui sert ce marché. Notre installation de recyclage des déchets de construction et de démolition est située au site d'enfouissement de Springhill, dans la ville d'Ottawa.
Depuis le début des activités, il y a 17 ans, nous avons pu peaufiner le processus au point de valoriser plus de 70 % des matériaux que nous recevons. C'est 70 %.
Nous récupérons du bois blanc, qui est utilisé dans l'industrie agricole et horticole, principalement sous la forme de litière pour les bovins. Il faut que les matériaux satisfassent à certains critères ou à certaines spécifications dans cette industrie. Les autres produits ligneux sont transformés en biomasse utilisée par l'industrie de la production d'énergie. Nous récupérons des métaux ferreux et non ferreux utilisés dans l'industrie de la ferraille. Nous récupérons aussi le carton que nous envoyons à notre installation de récupération de Carp pour qu'elle fasse la mise en balle pour le marché. Nous broyons le béton et la brique pour en faire de l'agrégat. Le gypse que nous traitons est quant à lui utilisé comme amendement de sol dans le domaine agricole.
Notre entreprise continue de voir les occasions sur le marché de la construction et de la démolition dans la région d'Ottawa. Avec plus de 240 000 tonnes de déchets produits annuellement ou 24 % des déchets que produit la municipalité, nous savons qu'une partie importante des matières sont encore envoyées aux sites d'enfouissement. Pour valoriser un plus grand volume de matériaux de construction et de démolition qui ne sont pas encore recyclés à Ottawa, Tomlinson est en train de faire autoriser l'édification d'une nouvelle installation de recyclage qui sera située dans l'ouest de la ville, près de notre centre de récupération des déchets de Carp. La ville d'Ottawa a déjà approuvé le plan de cette nouvelle installation, et nous devrions recevoir la confirmation de conformité environnementale du ministère de l'Environnement sur le plan dans les prochaines semaines. Quand cette usine sera construite et fonctionnelle en 2015, nous pourrons recevoir, traiter et recycler de 100 000 à 150 000 tonnes de matériaux de construction et de démolition de plus par année dans ce marché. Nous sommes ravis de cette nouvelle initiative qui a le potentiel d'augmenter la quantité de matières récupérées.
Notre usine de Springhill recueille 51 000 tonnes, dont nous valorisons 32 000 tonnes. Avec la nouvelle installation qui pourrait ouvrir, ce 32 000 tonnes représente environ 3,2 % des matières recyclés dans la ville d'Ottawa. Si nous pouvons envoyer à cette nouvelle installation le tonnage qui, nous le savons, existe, nous augmenterons de 10 à 13 % le volume de matériaux valorisés dans la région d'Ottawa. Quand on y pense, c'est une contribution considérable. Non seulement c'est bénéfique pour l'environnement, mais c'est aussi avantageux sur les plans économique et financier. Ce projet nous enthousiasme beaucoup. C'est un bon mariage quand on peut récupérer et réutiliser des matières tout en étant rentable.
C'est ce que j'ai expliqué ici aujourd'hui. Plus tard cette semaine, vous recevrez l'information que je vous ai présentée aujourd'hui pour que vous ayez plus de détails. Le document comprend la ventilation des diverses composantes pour expliquer les quantités que nous recyclons.
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Merci de m'avoir invité.
J'observe ce que nous faisons à notre environnement en général, un point qui m'a toujours préoccupé. Je pratique l'architecture et l'urbanisme depuis maintenant 50 ans, fonctions dans le cadre desquelles je me suis beaucoup occupé de l'aménagement des communautés et j'ai travaillé avec les Autochtones du Nord.
Ce qui me préoccupe le plus, c'est le fait que même de mon vivant — je me souviens que quand j'étais enfant, dans l'Ouest, je pouvais boire l'eau des rivières, nager dans leurs eaux et y attraper des poissons à mains nues —, toutes les rivières sont maintenant polluées et ne sont plus que des égouts. Je me demande donc s'il est sensé de faire ce que nous faisons aux rivières, à l'eau, à la nappe phréatique, que les sites d'enfouissement polluent, et à la terre elle-même?
Nous ne pouvons nous considérer comme étant distincts de notre environnement, comme nous le faisons pourtant. Nous nous pensons déconnectés de notre environnement, mais il n'en est pas ainsi. Nous faisons partie de cet environnement. Si on commence à polluer une rivière, on se pollue soi-même et on pollue ses enfants. Quand on pollue l'environnement, c'est son propre corps qu'on pollue. Nous léguons aux générations futures un héritage très destructif pour l'ensemble de l'humanité.
Nous devrions utiliser notre technologie, notre pouvoir de réflexion et nos ressources pour nettoyer les dégâts laissés en grande partie par ma génération. Au cours des 50 dernières années, nous avons créé tant de problèmes dans l'environnement que nous commençons à en ressentir les effets à l'échelle internationale.
Quand je travaillais avec les communautés du Nord — comme celle d'Oujé-Bougoumou, un village cri de la baie James —, nous nous inquiétions de la quantité d'énergie que nous y transmettions. Nous avons donc utilisé des déchets pour implanter un système de chaudière et un système de chauffage centralisé dans la communauté afin d'alimenter chaque ménage en eau chaude et en chauffage plutôt que d'utiliser des carburants fossiles et du pétrole qui coûtent plus cher et sont plus polluants pour l'environnement.
Il existe d'autres moyens d'utiliser les déchets, et il faut recourir le plus possible à l'innovation, mais c'est un peu comme si chaque fois que nous arrivons avec une nouvelle idée, au lieu d'obtenir le soutien du gouvernement — dont la bureaucratie est constituée de compartiments qui ne communiquent pas les uns avec les autres —, nous éprouvons énormément de difficultés à avoir une aide quelconque sur le plan de l'innovation dans le développement et l'aménagement des communautés afin de trouver des moyens novateurs de résoudre les problèmes d'énergie.
Je considère que si nous ne planifions pas adéquatement dans le Sud, nous ne le faisons certainement pas correctement dans le Nord, car dans les communautés du Nord, l'environnement est encore plus fragile.
On peut marcher dans la toundra et quand on revient cinq ou six ans plus tard, les traces de pas y sont encore visibles parce que la toundra est très fragile. Si nous voulons développer le Nord de façon harmonieuse afin de ne pas le détruire, nous devons modifier nos habitudes dans le Sud, car si nous faisons dans le Nord les mêmes dégâts que nous causons ici, ce sera encore plus dévastateur.
Je m'inquiète énormément du fait que tous nos systèmes, comme nos réseaux d'égout, fuient et polluent les aquifères. Sous Ottawa, toute l'eau souterraine est polluée par les réseaux d'égout, qui sont archaïques; pourtant, nous ne les changeons pas.
Il existe de nouvelles technologies pour améliorer même les réseaux d'égout qui détruisent et polluent l'eau souterraine. Nos égouts sont tellement sollicités qu'en raison de la manière dont ils sont conçus, ils se déversent dans les bassins d'épuration qui, une fois ouverts, laissent s'écouler leur contenu dans les rivières qui s'en trouvent polluées. Nous devons repenser et redessiner tous nos systèmes.
J'ai travaillé pour Plasco pendant environ 10 ans depuis que l'entreprise a vu le jour. Je pense que c'est une formidable solution que d'utiliser les déchets pour produire de l'énergie au lieu de polluer le réseau d'eau souterraine.
Le gouvernement devrait appuyer de telles initiatives, car la manière dont nous agissons n'est pas du tout économique. Nous affirmons que nous utilisons cette technologie parce qu'elle représente la solution la plus économique, mais au bout du compte, combien d'argent entre en jeu et est-ce économique? Ce ne l'est pas quand on cause à l'environnement des dommages considérables qu'on devra nettoyer.
Dans le Nord, j'ai travaillé avec une communauté dans une région où on a extrait du cuivre, en laissant un lac d'acide sulfurique entouré d'une haute clôture où il est indiqué qu'il est interdit d'entrer. Je suis convaincu qu'il en coûterait 1 ou 2 milliards de dollars pour nettoyer ce dégât. C'est ce que nous faisons, voyez-vous?
Nous devons repenser chaque technologie que nous implantons dans le Nord. Ce n'est pas logique d'aménager toute une communauté autour d'un réseau d'égout archaïque au lieu de le faire en fonction de la culture et de la manière dont ses habitants devraient travailler et vivre ensemble. Il est insensé d'aménager toute une communauté en fonction des anus. Il faudrait envisager de peut-être le faire en faisant preuve de bon sens.
Nous devons repenser ces technologies. Je veux toujours adopter les technologies et j'insiste pour qu'elles soient utilisées dans les projets auxquels je participe. Par exemple, le Musée des civilisations, un projet auquel j'ai travaillé, est alimenté à l'énergie géothermique; il y a 30 ans, nous avons utilisé l'eau de la rivière pour chauffer et climatiser l'édifice.
Nous devons adopter les technologies et soutenir celles qui permettent d'assainir les rivières et la terre, car c'est l'héritage que nous devrions laisser à nos enfants.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les membres du comité de me donner l'occasion de vous parler grâce à une technologie formidable. Je n'ai pas participé à beaucoup de vidéoconférences, alors il faudra que vous me pardonniez si je vous regarde étrangement.
Je représente BioWaste to Energy for Canada Integration Initiative, ou BECii, pour faire court. Je vais utiliser cet acronyme, parce que la version complète est plutôt longue, bien qu'elle corresponde précisément à ce que nous faisons.
Je vais aborder quelques points pendant les 10 minutes que vous m'accordez. Je vais parler de la raison d'être de BECii, des installations que nous avons créées, ainsi que des organismes membres de BECii, ce qui vous donnera une idée de ce que l'organisme fait, peut faire et envisage de faire à l'avenir. Je vais aussi parler de notre vision des déchets biologiques, en ce qui concerne les déchets urbains solides et les déchets industriels.
Je ne vais pas pousser les choses au point de vous dire que nous avons comme vision la disparition des sites d'enfouissement. Il s'agit d'une solution qui comporte au moins trois volets, mais qui utilise la technologie existante de nos membres et de bien d'autres intervenants du secteur industriel.
BECii est une organisation sans but lucratif établie par des entreprises. Cependant, elle est ouvertement commerciale et cherche à améliorer le succès commercial de ses membres. Les entreprises membres qui ont fondé BECii ont reconnu très tôt qu'il n'y a pas de solution miracle, pour les déchets biologiques. Toute solution globale pour les déchets urbains, les déchets ICI et les rebuts classifiés ou désignés — tous les flux de déchets qui aboutissent au site d'enfouissement — exige au moins des technologies multiples qui se conjuguent pour un traitement complet.
Nous reconnaissons aussi que bien des découvertes et technologies nouvelles découlent de l'interface de technologies existantes. Nous voulions pousser plus loin l'intersection de la technologie, ou l'effet de bord. BECii existe donc pour promouvoir et faciliter l'intégration et l'intersection des technologies. À cette fin, nous devions réunir un certain nombre d'entreprises, que je vais vous nommer, mais nous devions aussi établir des installations. BECii est une organisation virtuelle et physique — virtuelle en ce sens que nous pouvons être n'importe où au pays et, même, dans le monde, grâce aux projets d'intégration que nos entreprises membres réalisent, et ce, n'importe où.
Nous avons des installations, à l'emplacement de la première bioraffinerie canadienne, située à environ 20 kilomètres au nord de Vegreville, en Alberta. Certains d'entre vous connaissent peut-être l'endroit, car il y a aussi à Vegreville une très grande installation de traitement des demandes d'immigration.
Ce que nous avons réussi à établir sur place est un bâtiment de 3,5 millions de dollars, cofinancé par Diversification de l'économie de l'Ouest, la province de l'Alberta et les membres industriels de BECii. On y trouve un assez grand laboratoire humide, de l'espace pour des usines pilotes, des ateliers d'usinage, des bureaux pour ceux qui portent le complet, des salles de classe, des salles de conférence et ce que j'appellerai un grand campus où peuvent être établies des usines pilotes additionnelles. Le partage des lieux avec la bioraffinerie existante — et je vais en parler un peu parce que la bioraffinerie fait partie de nos membres — permet l'intégration à l'échelle commerciale sur place, là où les gens s'y connaissent.
En ce qui concerne les membres de BECii, nous en avons 10 en ce moment. Je vais les énumérer très rapidement, mais la liste se trouve sur notre site Web. Je vais commencer par Algae Grow and Harvest Technology Incorporated, qui travaille à l'amélioration de la production d'algue. Cela semble particulier, mais elle utilise les nutriments recyclés des déchets pour promouvoir la croissance des algues.
Biomass Technologies Incorporated travaille à des produits d'amélioration du sol et à des façons nouvelles d'agglomérer des matières. C'est donc à la fin de la chaîne de valeur. Emergent Waste Solutions est une société axée sur la pyrolyse. Elle ne s'intéresse pas tant à la pyrolyse qu'au produit énergétique qu'on peut en obtenir, ainsi qu'aux coproduits de grande valeur qui viennent du charbon actif et du noir de carbone.
Ever Green Ecological Services est une entreprise de collecte des déchets. Elle travaille à la conception de centres de récupération des matières supérieurs et très efficaces — vous entendrez souvent parler des CRM pendant votre étude —, et elle s'intéresse aussi au recyclage.
Grow the Energy Circle Limited, aussi appelée GrowTEC, est une organisation pour l'agriculture zéro déchet, et sa propre bioraffinerie intégrée est en ce moment en construction. L'Université MacEwan est un partenaire universitaire de BECii et fait beaucoup de chimie analytique pour les membres. Growing Power Hairy Hill est l'emplacement des installations de BECii, et il s'agit aussi de la première bioraffinerie intégrée au Canada. Elle reçoit 300 tonnes de matières par jour. Cela comprend 200 tonnes de déchets organiques provenant de déchets urbains solides traités par digestion anaérobie et produisant une quantité suffisante de biogaz pour produire l'électricité nécessaire au fonctionnement d'une usine produisant 10 millions de gallons, ou 40 millions de litres d'éthanol par année.
Ces deux installations se trouvent sur le terrain d'un très grand parc d'engraissement de bovins, et tous les déchets vont directement de l'un à l'autre, de sorte que cette bioraffinerie intégrée ne donne pas de coproduits de faible valeur. C'est ce que nous appelons un cercle vertueux.
Je suis heureux d'avoir investi dans cette installation, et mon entreprise, Himark BioGas, dont je suis le directeur général, fournit la technologie de digestion anaérobie de cette installation. Himark est aussi membre de BECii, et nous nous concentrons sur la technologie de digestion anaérobie. Plus précisément, notre technologie facilite le traitement des déchets urbains solides, lesquels forment ce que nous qualifions de flux de déchets traditionnellement contaminés.
Il y a aussi Symbiotic Enviro Tek. Elle travaille à des bioréacteurs servant à la production d'algues intégrée aux bioraffineries et resserre les solutions d'énergie propre et de pyrolyse dans la seule optique de production de biocharbon, et non pour l'énergie. Ça semble beaucoup, et cela vous donne peut-être une idée impressionniste à la Monet, mais j'espère que cela se précisera.
BECii a comme vision de faire disparaître les sites d'enfouissement. Cela signifie, comme notre premier témoin l'a bien dit, que les matières de valeur devraient aller là où elles serviront le plus. Je tiens à préciser que l'énergie est généralement ce qui a la valeur la plus faible. Donc, l'incinération, la combustion, ce genre de choses sont bien moins souhaitables que de recycler les matières et les ramener dans le cycle des matières propres. Le centre de récupération des matières devient donc un élément clé de toutes les solutions qui font que les matières quittent le flux des déchets pour entrer dans ce que nous appellerons les trois macrocatégories.
Nos trois macrocatégories sont les matières organiques, les matières fraîches et les déchets urbains solides. Les déchets organiques sont ceux qui vont pourrir. Il devrait être évident que les matières recyclables ont de la valeur. Et il y a les combustibles. Nous aimons que les combustibles soient partiellement consumés, ce qui donne la gazéification ou la pyrolyse, en raison de la faible valeur de l'énergie. Vous pouvez vous débarrasser de certaines matières par la gazéification ou la pyrolyse, mais vous obtenez aussi un coproduit de plus grande valeur, sous la forme de charbon, de charbon actif ou de noir de charbon. Ce sont des produits de très grande valeur.
Revenons aux matières organiques. Il n'est pas étonnant que vous puissiez obtenir de l'énergie sous une forme renouvelable et acheminable, réduire les émissions, aussi bien directement que par compensation, et mieux utiliser des résidus de carbone récalcitrants. Il y a donc un peu de recyclage, même dans la digestion anaérobie.
Surtout, nous réduisons les facteurs négatifs, avec la digestion anaérobie. Il n'y a donc pas d'odeur, de suintement, de maladie et d'animaux nuisibles comme les rats, les mouettes et les coquerelles. Ceci permet de repositionner la gestion des déchets pour en faire une véritable entreprise commerciale et de la placer à l'avant-garde, plutôt que loin derrière, là où elle se trouvait par la force des choses.
Il existe des politiques louables, et je vais profiter de mes 20 dernières secondes pour vous signaler des politiques louables à envisager, comme interdire l'acheminement des déchets organiques et d'autres matières vers les sites d'enfouissement, établir un prix pour le carbone et travailler très fort avec les antitrusts pour faire la promotion de marchés concurrentiels dans ce secteur.
Merci beaucoup, mesdames et messieurs.