ENVI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de l'environnement et du développement durable
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 31 mars 2015
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte. Bienvenue à cette 50e séance du Comité permanent de l’environnement et du développement durable. Nous poursuivons aujourd’hui notre étude sur la chasse et le piégeage avec permis au Canada.
Pour l’occasion, nous accueillons, par vidéoconférence, M. Mark Boyce, professeur, Département de sciences biologiques, Université de l’Alberta.
Nous accueillons également par vidéoconférence les deux témoins que nous étions incapables de joindre plus tôt. Merci de votre patience.
Nous avons M. Ron Olson, directeur général, Manitoba Wildlife Foundation; et M. Jonathan Scarth, vice-président principal, Delta Waterfowl Foundation.
Merci à tous d’avoir accepté notre invitation.
Monsieur le président, pourrait-on demander aux témoins de nous envoyer la main afin que nous puissions savoir qui est qui?
D'accord. Si je ne m’abuse, M. Boyce apparaît sur l’écran de gauche.
Oh, pardon. Je fais erreur.
Donc, de la Manitoba Wildlife Foundation…
J’imagine que Ron Olson n’est pas encore installé.
Une voix: Pas encore; et, c’est « Rob ».
Le président: C’est Rob, vous dites? Pardonnez-moi. On m’a informé de l’erreur sur l’avis et j’ai oublié d’en prendre note.
Nous avons donc Rob Olson — encore une fois, je suis désolé — et Jonathan Scarth.
Nous allons d’abord entendre M. Boyce, suivi de Rob Olson et de Jonathan Scarth. Chaque témoin disposera de 10 minutes pour présenter son exposé. Nous passerons ensuite aux questions des membres.
Monsieur Boyce, vous avez la parole.
Merci de m’avoir invité à témoigner.
Je suis citoyen canadien et membre de la Société royale du Canada. Je suis également très actif au sein de la Wildlife Society, une organisation professionnelle dont la plupart des biologistes de la faune font partie.
Mon poste à l’Université du Manitoba est financé par l’Alberta Conservation Association grâce aux recettes tirées de la vente des permis de chasse et de pêche en Alberta. Fondée en 1997, l’Alberta Conservation Association s’assure que ces recettes sont affectées à la conservation au lieu d’être destinées aux coffres de la province.
Mon travail consiste à superviser les recherches sur la faune d’étudiants des cycles supérieurs. Je dirige un des plus importants programmes de recherche sur la faune au pays. Je me concentre notamment sur les gros mammifères, les animaux à fourrure et le gibier à plumes. Mon programme de recherche est financé par une longue liste d’organisations, dont le CRSNG et Delta Waterfowl. Depuis mon arrivée en Alberta, en 1999, le programme a attiré environ 30 millions de dollars en financement, mais très peu du gouvernement provincial. Toutefois, je travaille très étroitement avec le gouvernement albertain afin de définir les besoins de la province en matière de gestion de la faune.
Les chasseurs et pêcheurs constituent le principal stimulus en matière de conservation en Amérique du Nord. Nous appuyons la conservation plus que n’importe quel autre groupe d’intérêt. Sans les efforts et investissements des chasseurs et pêcheurs, la plupart des programmes de conservation en Amérique du Nord n’existeraient pas. De plus, les retombées économiques liées à la chasse, au piégeage, à la pêche et à d’autres formes d’activités récréatives en milieu naturel sont considérables.
En 2007, aux États-Unis, les retombées économiques de la chasse et de la pêche s’élevaient à 159 milliards de dollars. À titre de comparaison, c’est deux fois et demie plus élevé que toutes les exportations annuelles de pétrole du Canada. Selon la Commission canadienne du tourisme, le Canada pourrait tirer davantage de recettes de la chasse et de la pêche en raison des possibilités spectaculaires qu’offrent nos milieux naturels.
Avant d’arriver en Alberta, en 1999, j’ai vécu la plus grande partie de ma vie aux États-Unis. Donc, je connais bien le système américain de chasse, de pêche et de piégeage. J’aimerais vous souligner trois éléments de ce système.
Premièrement, le Cooperative Fish and Wildlife Research Unit System s'applique dans tous les États. On compte 40 de ces unités, toutes financées conjointement par le gouvernement fédéral, le gouvernement de l’État et les universités. Elles contribuent à satisfaire les besoins de l’état en matière de recherche et à former la prochaine génération de spécialistes de la recherche sur le poisson et la faune. Dans le cadre de ma maîtrise à la Univesrity of Alaska, j’ai participé à un programme coop dans une de ces unités.
Deuxièmement, l’éducation et la recherche sur la faune ainsi que la surveillance de la faune sont financées par le fonds Pittman-Robertson. Il tire ses recettes d’une taxe d’accise de 11 % sur la vente d’équipement de chasse, d’armes à feu et de munitions perçue par le Department of the Interior. Ces recettes sont redistribuées aux états selon un ratio de 25 %:75 %, le 75 % provenant du gouvernement fédéral.
Troisièmement, la Dingell-Johnson Act offre le même genre de soutien à la pêche en matière d’éducation, de surveillance et de recherche, grâce à une taxe d’accise sur la vente d’articles de pêche. Les programmes Pittman-Robertson et Dingell-Johnson ont joué un rôle essentiel pour assurer une entrée constante de fonds pour la faune et les pêches, un besoin criant au Canada.
En fait, nous pourrions faire mieux que les États-Unis à ce chapitre. Il suffirait d’inclure le matériel de camping, les jumelles et autres pièces d’équipement de plein air et d’utiliser ensuite ces fonds pour élargir notre soutien aux espèces non considérées comme gibier, notamment.
Les chasseurs et pêcheurs sont fiers d’être la principale source de financement des efforts de conservation en Amérique du Nord. Lorsque je vivais aux États-Unis, je n’ai jamais entendu quiconque se plaindre de la taxe d’accise Pittman-Robertson, notamment parce que la plupart des gens ignorent qu'ils paient cette taxe, puisqu'elle est incluse dans le prix de vente, contrairement à la TPS qui, elle, y est ajoutée.
Il est essentiel de poursuivre le financement des activités de surveillance et de recherche pour assurer une saine gestion des ressources fauniques. Le soutien provincial à la protection des ressources halieutiques et de la faune est parfois volatile. Par exemple, la semaine dernière, le ministère albertain de l’environnement et du développement durable des ressources a mis à pied 150 employés en raison de la baisse des revenus tirés de l’énergie qui découle de la baisse du prix du pétrole.
En plus de superviser la recherche sur le poisson et la faune, je pratique avec passion la chasse et la pêche. Ma conjointe et moi gérons une ligne de piégeage enregistrée dans les Rocheuses. Le Canada est un chef de file mondial dans le développement et la mise à l’essai de normes de piégeage sans cruauté et l’élaboration d’exigences juridiques connexes. Le piégeage constitue une source de revenus continue sur les terres de la Couronne. Bien gérée, cette activité peut générer des revenus de la fourrure équivalents à environ 25 % à 50 % des revenus générés par l'exploitation forestière sur le même territoire. Le piégeage produit des revenus chaque année et lorsque la rotation est fixée à 100 ans — comme c’est le cas dans les Rocheuses, notamment —, les revenus générés sur un même territoire grâce aux fourrures au cours de cette période constituent une somme amortie considérable.
De plus, les trappeurs fournissent un service important en contrôlant les problèmes liés à la faune. J’ai fait beaucoup de gestion du castor. Chaque année, au Canada, les dommages causés par les digues de castor aux infrastructures et aux récoltes coûtent des centaines de millions, même près d’un milliard de dollars, à l’industrie, aux municipalités et au secteur agricole.
En terminant, j’ajouterais que les chasseurs et trappeurs se passionnent pour le mode de vie traditionnel. C’est ce qui nous inspire.
Merci de m’avoir donné l’occasion de m’exprimer sur le sujet.
Merci beaucoup, monsieur Boyce. Merci d’avoir si bien respecté le temps qui vous était alloué.
Nous entendrons maintenant M. Rob Olson, directeur général de la Manitoba Wildlife Federation.
Monsieur Olson, vous avez la parole.
Je tiens à vous remercier de me donner cette occasion. Je suis très heureux de pouvoir m’exprimer sur le sujet de la chasse.
Je vais d’abord vous parler un peu de moi. Je suis un chasseur et un trappeur. J’ai consacré ma vie à la biologie et à la conservation des êtres vivants et des milieux sauvages. C’est ce qui nous définit, ma famille et moi. C’est très important pour moi et ma communauté. Je peux retracer mes origines sur au moins sept générations jusqu’en Norvège d’où ma famille est originaire.
J'ai vraiment de la chance d’occuper le poste de directeur général de la Manitoba Wildlife Federation. C’est un groupe formidable. Nos 14 000 membres se composent de chasseurs, de pêcheurs et de trappeurs répartis dans 100 clubs partout dans la province. Nous disposons d’un réseau de gens sensationnels voués à la conservation. Ils ont fait des choses incroyables. Uniquement au Manitoba, nous avons réussi à conserver plus de 30 000 acres d’habitat faunique pour des espèces de gibier, des espèces non considérées comme gibier et des espèces en voie de disparition. Nos clubs et membres sont très passionnés et tiennent à assurer la perpétuité des espaces sauvages.
Ces gens, des citoyens canadiens ordinaires, consacrent énormément de temps et d’argent à ces activités. Ils viennent de toutes les sphères de la société et font des choses incroyables à l’échelle locale.
On entend toujours parler d’environnementalisme. J’ai appris à l’université, et dans la vie, d’ailleurs, qu’il faut réfléchir sur le plan mondial, mais agir à l’échelle locale. Je crois que nos membres constituent un très bon exemple à cet égard. Ils travaillent sans relâche dans leurs collectivités. Il y a d’innombrables projets de rétablissement de l’habitat du poisson en cours, et ces gens travaillent seuls. Ils font des collectes de fonds à l’échelle locale et investissent leur propre argent dans ces projets. Ils sollicitent la participation de leurs enfants, de leurs conjoints et conjointes et de leurs familles afin de construire, par exemple, des structures pour permettre au poisson de frayer, et ils adorent ça. Ils aiment redonner à la nature. Ils installent des boîtes de nidification… Il existe divers projets de traitement de l’habitat visant à améliorer l’habitat faunique.
Au Manitoba, nous vivons une crise par rapport à l’orignal. La population est en chute libre. Nos membres organisent des consultations avec des chasseurs autochtones et tentent d’établir des relations et de forger des alliances afin de renverser la vapeur. Ils parcourent des centaines de milles pour participer à des réunions de consultation et de coordination visant à faire augmenter de nouveau la population d’orignaux. Ils font cela, simplement parce qu’on leur a demandé. Ils n’hésitent pas; ils se déplacent pour trouver une solution à cette crise. C'est à ce point important pour eux.
Mes collègues vont certainement parler de fonds, de l'importance économique et de la contribution des chasseurs en tant que défenseurs de l'environnement.
Pour ma part, j’aimerais parler brièvement de cette notion de chasseurs environnementalistes. La fédération fait beaucoup d’efforts pour recruter de nouveaux chasseurs et pêcheurs. Nous avons toujours cru que les chasseurs et pêcheurs jouent un rôle important dans la protection du poisson et des animaux et de leurs habitats. Une étude publiée récemment par l’université Cornell montre que les chasseurs sont quatre fois plus susceptibles que le citoyen moyen de participer aux efforts de conservation afin d’assurer la perpétuité des ressources durables.
Lorsque j’étais employé chez Delta Waterfowl, j’ai mis sur pied un programme de chasse pour les jeunes au Manitoba. Aujourd’hui, ce programme est offert à l’échelle du pays. C’est un de mes projets préférés. Le moment le plus important, pour moi, c’est le soir précédant la chasse. On dit aux jeunes: « Bon, demain matin, vous irez chasser le canard. Ce sera une belle expérience. Vous allez chasser votre viande et apprendrez comment l’apprêter et la faire cuire. Vous allez établir un lien avec votre nourriture. Alors, vous serez pour toujours responsables des canards. Vous devrez en prendre soin. C'est pourquoi vous devez toujours redonner plus que ce que vous prenez. »
C’est notre approche à la conservation, notre vision. Les chasseurs peuvent vraiment encourager l’environnementalisme, puisqu’ils ont une relation avec la ressource. C’est une belle occasion de solliciter leur participation en tant qu’environnementaliste. C’est ainsi que je les vois.
À mon avis, les anciennes règles ne s’appliquent plus. Qui sont les environnementalistes? Si vous demandez à un Canadien ce qu’est un environnementaliste, il pourrait vous répondre toutes sortes de choses. Il pourrait penser, par exemple, aux gens de Greenpeace qui s’attaquent aux baleiniers.
C’est peut-être la vieille mentalité. Je pose souvent ces questions aux gens. Ça m’intrigue. Je ne crois pas que les vieilles règles s’appliquent encore de nos jours. On remarque qu'un très grand nombre de citadins redécouvrent la chasse. Comme je l’ai dit, nous avons mis sur pied des programmes de recrutement pour aider les gens à se rapprocher de la terre, là d'où vient leur nourriture. Nous n’arrivons pas à suffire à la demande.
La collectivité des chasseurs est très diversifiée. Nous accueillons beaucoup plus de femmes que vous le pensez. Elles sont si nombreuses à vouloir essayer la chasse, que nous ne pouvons pas satisfaire à la demande. Les nouveaux Canadiens sont le segment de la population qui démontre le plus d’intérêt à l’égard de la chasse, de la pêche et du piégeage. Ils ne correspondent pas à l’image que vous vous faites d’un chasseur.
Mais, ils se croient environnementalistes. Ils seraient surpris d'apprendre qu'ils ne le sont pas. Ils s’affichent fièrement comme environnementalistes et se dévouent sincèrement à la cause. Les gens me disent souvent: « Comment pouvez-vous chasser et avoir l’environnement à cœur? Vous tuez les animaux dont vous dites vous soucier. » Nous ne pratiquons pas la conservation pour avoir plus d’animaux à chasser; parce que nous chassons, nous devons faire de la conservation. C'est notre devoir. Selon nous, c'est notre responsabilité.
Nous disons aux nouveaux chasseurs et aux jeunes qui participent à nos programmes que notre mentalité, soit de redonner plus que ce que l’on prend, ne s'applique pas uniquement à la chasse. Nous utilisons tous des ressources, que ce soit dans nos maisons ou avec nos voitures. Nous avons tous besoin de ressources pour vivre. L’économie canadienne repose sur les ressources; nous les puisons directement de la terre. Si nous pouvions appliquer ces principes environnementaux à nos activités quotidiennes, nous redonnerions toujours plus que ce que nous prenons. Si nous pouvions appliquer la mentalité du chasseur chaque fois que nous utilisons une ressource, nous serions dans une bien meilleure position sur le plan environnemental et beaucoup plus susceptibles de protéger l’environnement.
J’aimerais dire, en terminant, que je suis conscient qu’il peut y avoir une certaine controverse à considérer les chasseurs comme des environnementalistes et à les inviter à témoigner — il en a été question tout récemment dans les médias. Je comprends cela. J’encourage tous les participants ici présents, peu importe leur allégeance politique, à nous voir, moi, ma conjointe et ma famille, comme une ressource. Faites-nous participer davantage. Lancez-nous un défi; les chasseurs aiment les défis. Nous ne reculerons devant aucun défi si le résultat est avantageux pour l’environnement, les animaux et leurs habitats. Considérez-nous comme des environnementalistes. Nous nous considérons nous-mêmes comme une ressource; utilisez-nous davantage.
Cela dit, je vous remercie encore une fois de cette occasion de venir témoigner. Nous vous en sommes reconnaissants.
Merci, monsieur Olson, pour ce cri du coeur.
Nous entendrons maintenant M. Jonathan Scarth, vice-président principal de la Delta Waterfowl Foundation.
Je vous souhaite la bienvenue.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, merci. Je vous suis reconnaissant d'avoir l'occasion de présenter des observations.
En guise de contexte, Delta Waterfowl est un organisme de bienfaisance international qui est voué à la conservation et à l’exploitation durable de la sauvagine. Nous représentons la communauté des chasseurs au canard du Canada et des États-Unis, mais nos remarques concernent aussi bien les contributions des chasseurs que celles des piégeurs et des pêcheurs à la ligne.
D’entrée de jeu, nous dirons, au sujet de votre étude sur la chasse et le piégeage avec permis au Canada, qu’il était temps. Je tiens à remercier le comité d’avoir pris l’initiative de se pencher sur les contributions que notre communauté, soucieuse de l’exploitation durable, apporte à l’environnement, et d’avoir jugé qu’il était prioritaire d’examiner notre relation unique et symbiotique avec la nature.
Le lien entre, d’une part, la chasse, la pêche et le piégeage et, d’autre part, l’environnement et le développement durable, mérite d’être étudié; il montre comment on peut stimuler les investissements dans l’environnement de la part de ceux qui en tirent des bienfaits. La chasse, la pêche et le piégeage sont des activités méconnues, trop souvent présentées comme étant des sources de conflit ou des pratiques à réprimer pour assurer la conservation et poursuivre des objectifs environnementaux. La vérité est tout autre. On dit parfois que les chasseurs, les pêcheurs sportifs et les piégeurs sont les premiers et les meilleurs défenseurs de l’environnement. C’est une opinion acceptée par toute notre communauté, laquelle investit plus que tout autre segment de la société dans la conservation. Pourtant, nous continuons d’essuyer les critiques simplistes des opposants à la chasse et à l’utilisation de la nature, des gens qui s’intéressent bien peu à l’environnement, mis à part leurs attaques à l’endroit de ceux qui investissent le plus dans la conservation.
On peut décrire de diverses façons la relation entre la communauté de l’exploitation durable et l’environnement. Commençons par donner quelques exemples et données brutes.
Les chasseurs au canard qui appuient notre organisation peuvent se targuer d’avoir établi l’un des modèles d’investissement dans l’environnement les plus anciens et les plus efficaces en Amérique du Nord. Aux États-Unis, les timbres fédéraux sur la chasse aux oiseaux migrateurs et la conservation — communément appelés duck stamps — sont produits par le Fish and Wildlife Service depuis 1934; c’est le permis fédéral qu’il faut obtenir pour chasser les oiseaux migrateurs. Depuis la création des timbres, en 1934, les ventes de timbres fédéraux ont généré plus de 800 millions de dollars en revenus. Cet argent a servi à acheter ou à louer plus de six millions d’acres de terres humides aux États-Unis, y compris des terres protégées qui font partie du réseau national de sanctuaires fauniques du Fish and Wildlife Service américain.
Évidemment, la sauvagine n’est pas la seule espèce sauvage à bénéficier de la vente de timbres. De nombreuses espèces d’oiseaux, de mammifères, de poissons, de reptiles et d’amphibiens dépendent des terres humides. Le tiers des espèces en péril ou menacées des États-Unis trouvent nourriture et refuge dans les sanctuaires créés grâce aux timbres fédéraux. Les timbres ont aussi été avantageux pour la population. Pour les chasseurs, les sanctuaires sont des endroits où ils peuvent exercer leur passion, tandis que les autres amateurs de plein air y vont pour faire de la randonnée ou de la photo, observer les oiseaux et explorer la nature. Les terres humides purifient les sources d’approvisionnement en eau, emmagasinent les eaux de crue, réduisent l’érosion du sol et la sédimentation, capturent le CO2 et servent d’aires de frai pour des espèces de poisson importantes pour les pêches sportives et commerciales.
Ce modèle a été largement reproduit: aujourd’hui, dans la quasi-totalité des provinces et des États d’Amérique du Nord, la vente de permis de chasse, de pêche sportive et de piégeage génère des fonds qui sont consacrés à l’environnement. Aux États-Unis — et Mark a mentionné ces statistiques —, les ventes annuelles de permis de chasse par les États ont dépassé 764 millions de dollars en 2009, et les ventes de permis de pêche ont dépassé 600 millions de dollars. Le Canada a importé ce modèle en 1985, lorsqu’il a créé le Timbre sur la conservation des habitats fauniques du Canada, qu’il est obligatoire d’obtenir pour chasser le canard. Les revenus découlant du timbre sont investis par Habitat faunique Canada dans des projets d’habitat.
Les frais de permis ont été suivis, aux États-Unis, par la perception d’une taxe fédérale d’accise sur la majeure partie du matériel de chasse, de pêche et de tir sportif. La taxe s’est appliquée à la chasse à compter de 1937, et à la pêche sportive à compter de 1950. Aujourd’hui, elle produit des revenus de près de 400 millions de dollars par année, qui sont consacrés à la conservation. De plus, la taxe entraîne des fonds de contrepartie qui stimulent encore plus d’investissements publics et privés dans la conservation. Ces modèles existent depuis tellement longtemps qu'ils sont tenus pour acquis, tant par la communauté de l’exploitation durable, qui cherche sans relâche à mettre à profit les investissements, que par les gens qui ne chassent pas et qui, en majorité, ne sont pas conscients de ce fondement de la conservation et de l'environnement.
Les succès de la communauté de l’exploitation durable en matière de conservation s’expliquent non seulement par le modèle de revenus tirés des permis, mais aussi par la philanthropie privée et les contributions volontaires, dont Rob a beaucoup parlé.
Selon une étude publiée récemment dans le Journal of Wildlife Management et résumée dans la revue Scientific American, les gens qui se disent à la fois chasseurs et ornithologues amateurs sont près de cinq fois plus susceptibles que les autres de s’occuper de gérance des terres. Ils sont également près de trois fois plus susceptibles que le reste de la population de faire des dons pour la conservation. L’article les appelle des « supervedettes de la conservation ».
Outre leurs contributions directes en argent et en temps, les chasseurs au canard participent directement à la gestion des espèces surabondantes, comme c’est le cas présentement de l’oie de l’Arctique, de l'oie des neiges et de l'oie de Ross. Je note à ce sujet que nous nous heurtons souvent à l’opposition de groupes anti-chasse, qui s’opposent à la gestion scientifique, mais qui ne contribuent aucunement à l’environnement ou à la conservation. Étant donné l’importance cruciale de la prédation dans le maintien des populations fauniques, les piégeurs jouent un rôle grandissant dans la gestion du gibier et des espèces en péril.
Ce sont aussi les groupes de chasseurs et de pêcheurs à la ligne qui sont à l’avant-garde des efforts visant l'adoption de politiques et de programmes environnementaux qui intègrent l’exploitation durable et à l’avant-garde du travail mené en collaboration avec les milieux des ressources et de l’agriculture pour maintenir les populations d'animaux sauvages et de poissons. J'ai déjà comparu au comité pour vous parler de notre programme de services de gestion différente des terres et le Plan de conservation national, deux initiatives dont les coûts sont payés en partie par la communauté des chasseurs.
Pour les membres de la communauté de l’exploitation durable, cette volonté extraordinaire d’investir dans la conservation est une deuxième nature. Le chasseur qui investit dans la conservation le fait en partie par intérêt personnel éclairé et informé. L’expérience même de la chasse est pour nous prioritaire, et nous redonnons à l’environnement pour profiter de l’abondance que la nature nous offre. C’est pourquoi nous contribuons à la recherche et à l’aménagement de la faune.
Fondé il y a plus de 100 ans, notre organisme est devenu un organisme de recherche grâce à l'importante contribution d'un philanthrope qui s'était engagé à remplacer par deux canards chaque canard qu'il récoltait à l'automne.
Ce désir de payer pour l’amélioration de l’environnement se distingue de l’opinion exprimée par d’autres secteurs de la société qui sont moins informés sur les questions environnementales. Une enquête récente de Nanos a révélé que 71 % des gens « appuient » ou « appuient dans une certaine mesure » l’imposition de nouvelles taxes aux entreprises qui émettent des gaz à effet de serre, mais qu’une minorité — de 37 à 41 % — est prête à envisager de nouvelles taxes sur l’essence et le mazout de chauffage.
L’engagement des chasseurs, des pêcheurs et des piégeurs envers la conservation provient aussi du lien émotif intense qu’ils ont avec l’environnement. Un nombre disproportionné d’entre eux redonnent à la nature après avoir pris le canard qui leur servira de repas. C’est un lien unique, et tout indique que ceux qui l’entretiennent sont beaucoup plus susceptibles de contribuer à la conservation environnementale, que ce soit en y consacrant du temps, de l’argent ou des efforts.
Je vous remercie de votre attention. Le comité a pris une sage décision en étudiant cette question.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci beaucoup, monsieur Scarth.
Nous passons maintenant à la première série de questions. Les interventions seront de sept minutes chacune. Nous commençons par M. Sopuck.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup aux témoins.
Monsieur Boyce, j'aimerais simplement vous informer que j'ai reçu des bourses du programme Dingell-Johnson pour ma maîtrise; je suis donc très favorable à cette idée précise.
Ma première question, très directe, s'adresse à M. Olson. En quoi est-il important que le Comité permanent de l'environnement et du développement durable étudie cette question?
C'est important, parce qu'en tant que communauté, ce sont les gens... Si cette communauté est déterminée à prendre des mesures concrètes pour l'environnement de façon à l'améliorer, vous devez alors solliciter sa participation. Pour ce faire, vous devez la connaître, et pour la connaître, vous devrez l'étudier.
Je dirais que c'est l'aspect le plus important. Invitez-nous à participer, faites appel à nous, incluez-nous, mettez-nous au défi, tendez-nous la main et nous la prendrons. C'est à mon avis la principale raison pour laquelle il est essentiel que vous sollicitiez une plus grande participation de notre part.
Monsieur Scarth, comme on le sait, tant les libéraux que le NPD s'opposent à ce que le Comité de l'environnement mène cette étude...
J'invoque le Règlement, monsieur le président.
En fait, c'est faux. Certes, nous avons tenu une conférence de presse sur les autres sujets que nous pourrions étudier, mais il est faux de dire que nous sommes contre cette étude. Nous y sommes favorables.
Eh bien, selon le communiqué de presse du NPD, le NPD exhorte le Comité de l'environnement à revoir ses priorités. Manifestement, les autres partis ne considéraient pas ce sujet comme une priorité.
Monsieur Scarth, pourquoi en est-il ainsi, à votre avis? Pourquoi cette étude est-elle prioritaire? Pourquoi n'accorde-t-on pas à la communauté des chasseurs et des piégeurs le mérite qui lui revient pour ses efforts en matière de conservation?
Je pense que la plupart des Canadiens ignorent dans quelle mesure les chasseurs, les pêcheurs à la ligne et les piégeurs contribuent à la conservation, que ce soit par le financement — par la perception de taxes, comme nous l'avons vu — ou par des activités philanthropiques. Je pense que les gens du milieu de l'exploitation durable tiennent le financement pour acquis, tandis que les gens de l'extérieur de ce milieu n'en savent rien.
Monsieur Scarth, je crois comprendre que Delta Waterfowl a demandé du financement dans le cadre du Plan de conservation national, le programme pour les milieux humides dont Delta assure la prestation par l'intermédiaire du programme des Services de diversification des modes d'occupation des sols. Pouvez-vous décrire ce programme et nous dire en quoi il est important? Pourquoi les chasseurs s'intéressent-ils à la conservation des habitats sur les terres agricoles privées?
Le programme des Services de diversification des modes d'occupation des sols a commencé à évoluer au fil de nos conversations avec les agriculteurs. Il s'agissait d'une discussion avec la communauté des chasseurs, qui souhaitait conserver des zones d'habitat plus vastes sur des terres qui étaient pour la plupart des terres privées. Essentiellement, la sauvagine et les canards dépendent des terres privées du Midwest américain et du Canada.
Nous avons entrepris un dialogue avec les agriculteurs et nous avons alors découvert que nous avions beaucoup plus de points en commun que de différences. Le programme des Services de diversification des modes d'occupation des sols est fondé sur l'utilisation de mesures incitatives, le respect des droits de propriété et la collaboration avec le milieu agricole, contrairement aux autres modèles, qui visent à reprendre les habitats des propriétaires fonciers privés ou à réglementer leurs activités. Les discussions ont permis de tracer la voie; nous avons trouvé des similitudes avec les gens qui cultivent la terre, ce qui favorise la collaboration entre les chasseurs et les agriculteurs. C'est ce qui a mené à la création du programme. Nous nous réjouissons de l'essor qu'il connaît dans l'ensemble du pays.
Monsieur Olson, je m'intéresse au phénomène des citadins qui commencent à pratiquer la chasse. Évidemment, il s'agit d'une fausse dichotomie que de dire que la question de la chasse et du piégeage est un enjeu rural. Ce n'est manifestement pas le cas. Je suis né à Winnipeg et j'y ai grandi. L'automne venu, je me levais tôt pendant les fins de semaine pour aller chasser avec mon père. Monsieur Olson, pourquoi les citadins semblent-ils se tourner en grand nombre vers la chasse et la pêche, alors que pendant de nombreuses années, ils étaient peu nombreux à s'adonner à ces activités? Pourquoi s'y intéressent-ils maintenant?
Nous ne savons pas précisément pourquoi. Dans le cadre de notre programme de plein air à l'intention des femmes, nous réservons 75 places pour les femmes chaque année, au mois de mai; les places se vendent rapidement. J'y ai participé l'an dernier pour enseigner aux femmes comment découper du poisson en filets, notamment. Je leur ai demandé pourquoi elles étaient là. Ce sont de jeunes professionnelles de la ville. Elles n'avaient aucun lien particulier avec la campagne et n'avaient pas vécu sur une ferme. Elles répondaient: « Vous savez, nous sommes si déconnectées, de nos jours. » Elles trouvent cela troublant. C'est comme si cette distanciation les incitait à rétablir le lien. Elles ont besoin d'authenticité; elles veulent vivre une expérience authentique. Elles ont des préoccupations par rapport à leurs aliments; elles veulent donc se les procurer elles-mêmes. Elles veulent avoir ce sentiment de fierté associé à la capacité de se procurer et de préparer leur viande elles-mêmes et d'en connaître la provenance. C'est comme préparer ses propres conserves. On en tire une certaine fierté.
Je pense que c'est ce qui explique ce phénomène, et il prend de l'ampleur. Nous offrons actuellement un programme en collaboration avec un groupe appelé Food Matters Manitoba; aucun de ses membres ne correspond au portrait type d'un chasseur, à l'idée qu'on en a, mais ce sont maintenant des chasseurs. Ils nous demandent de participer aux cours d'économie domestique pour enseigner aux jeunes de la ville — en particulier les jeunes Autochtones du centre-ville de Winnipeg — comment nettoyer et préparer la bernache du Canada et le canard pour en faire des fajitas. Il y a 15 ou 20 ans, on n'aurait jamais pensé se retrouver dans une école du centre-ville de Winnipeg pour enseigner comment nettoyer et cuisiner l'oie.
Cela démontre à quel point la demande est forte et à quel point les gens ont besoin de rétablir ce lien. Nous considérons évidemment qu'il s'agit d'un phénomène formidable, parce que nous pouvons maintenant tous les inviter à participer à la conservation. C'est là l'avantage. Nous pouvons les amener à devenir des écologistes. Je pense que maintenant qu'ils ont vécu cette expérience — et c'est ce que démontre la recherche —, nous pourrons plus facilement inviter les citadins à participer à l'étude du comité.
Comme vous le savez, monsieur Olson, le programme de plein air à l'intention des femmes est offert dans ma circonscription. J'ai également eu le plaisir d'y être un instructeur l'an dernier. J'enseignais la pêche à la mouche. Je partage certainement les sentiments que vous avez exprimés au sujet des femmes qui pratiquent la chasse et la pêche et du grand enthousiasme dont elles font preuve à l'égard de la conservation.
Je pense que mon temps est écoulé.
Merci beaucoup.
Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup de vos témoignages. J'ai certainement beaucoup appris. Étant donné le temps dont vous disposez et votre expertise, je vais passer directement des questions de fond qui se rapportent à vos connaissances, votre expertise et votre expérience sur le terrain.
Monsieur Olson, j'ai été frappé par certains de vos propos qui ont été rapportés dans le Calgary Herald. Je vais en faire la lecture. C'était en 2010; vous avez dit ce qui suit:
Nous avons perdu 80 % des milieux humides qui existaient à l'arrivée des colons européens et nous continuons de perdre ce qui reste. Ce n'est pas une bonne chose pour nous, chasseurs de canards, mais cela nuit aussi à la rétention des eaux de crue et à la qualité de l'eau destinée à la population urbaine. Ces milieux abritent également des espèces en péril.
J'aime beaucoup cette citation parce que vous y avez inclus tous les aspects dont nous devons discuter. Comme vous l'avez indiqué tous les trois, ce n'est pas uniquement lié à la chasse et au piégeage. C'est lié à la conservation, aux milieux humides, à la perte d'habitats et aux espèces en péril. J'aimerais que vous nous parliez davantage de l'interrelation de tous ces éléments, de la nation de perte d'habitat et de l'idée selon laquelle il s'agit du milieu de vie de nos espèces en péril.
Je vous cède la parole, monsieur Olson.
Oui. Je pense que dans notre esprit, nous divisons les choses entre les villes et les régions rurales. Parfois, nous les voyons comme étant distinctes. En fait, c'est souvent le cas. Elles sont séparées. Nous faisons aussi des distinctions entre les chasseurs et les environnementalistes. Nous avons une certaine idée du genre de personnes qui chassent, et nous avons les urbains, qui ne sont pas des chasseurs.
Tout est lié, n'est-ce pas? Quand vous vieillissez et que vous vivez depuis longtemps sur cette terre, vous voyez cela. Il y a des liens partout. Il nous faut comprendre que tout est lié et nous servir de cela.
En ce qui concerne les milieux humides, dans ma province, les personnes qui en ont sans doute le plus besoin sont celles qui vivent à Winnipeg. Notre ville est réputée pour ses inondations, n'est-ce pas? On nous met des bottes de caoutchouc aux pieds à la naissance et nous les remplaçons au fur et à mesure que nous grandissons. C'est une ville qui se fait inonder. Elle se trouve dans une plaine inondable. Nous avons des inondations tout le temps, alors on pourrait dire que les gens de la ville, ici à Winnipeg, ont probablement besoin de ces milieux humides plus que quiconque, mais il faut leur faire faire le lien pour qu'ils comprennent. Comment s'y prendre?
Les nombreux Winnipégois auxquels je parle sont si occupés. Ils sont occupés. Ils travaillent fort, ils ont des enfants, et ils ont tous les problèmes que nous avons tous en tant qu'humains, comme vous le savez, comme entretenir les relations et toutes ces choses. Comment pouvons-nous les faire sortir de Winnipeg, leur montrer ces milieux humides et les amener à s'en soucier assez pour qu'ils rédigent un chèque?
Ce qui est magique avec les agriculteurs, c'est qu'ils ont aussi besoin des milieux humides. Ils le savent. Ils ont l'expertise. Ils possèdent les terres, alors ils sont essentiels dans la conservation des milieux humides. Cependant, là où la magie se produit, c'est quand on peut inclure les Winnipégois, les amener à se joindre aux agriculteurs et à faire ce lien. Pour moi, la séance d'aujourd'hui et le travail du comité, c'est là où la magie se produit.
Bob Sopuck chasse depuis toujours. Nous avons Bob, mais nous voulons vous avoir, vous aussi. Nous voulons que vous deveniez des gens de plein air. Nous voulons que les gens qui sont ici aujourd'hui et qui ne pêchent pas essaient ces activités, conservent les milieux humides, ou contribuent à leur protection. Pour moi, il faut gagner du terrain, et pour cela, il faut que de nouveaux humains s'y mettent.
Nous devons encourager encore plus de femmes à s'y mettre, et nous y travaillons. Comment faire pour amener les femmes de Winnipeg à se préoccuper d'un petit étang près du village de l'ouest du Manitoba où vit Bob? Comment faire? Les amener à devenir des passionnées de plein air est une bonne façon d'y arriver, car une fois qu'elles y sont et qu'elles ont la piqûre, nous obtenons un taux de conversion de 90 %. Si nous pouvons convaincre des femmes de venir une fin de semaine, 90 % d'entre elles vont continuer de s'adonner à des activités de plein air. Elles ne nous ont jamais dit non quand nous sommes revenus leur demander de nous aider dans nos activités de protection. Elles donnent toujours.
Il faut abattre les obstacles. Il faut établir davantage de liens. Il faut attirer plus de gens et trouver des façons uniques de le faire. C'est le côté agréable de la chose, et c'est la possibilité qui se présente.
Je crois que vous seriez surpris d'entendre les expériences des gens qui sont à cette table. Je suis d'une famille de chasseurs et de trappeurs. Nous ne le faisions pas parce que c'était amusant. Nous le faisions parce que nous étions pauvres et que c'était notre façon d'avoir de la viande. Les gens ont tous des antécédents différents.
Monsieur Scarth et monsieur Boyce, je pense à cette citation et, en particulier, à ce que M. Olson a dit sur l'importance de la perte des milieux humides, et je pense à la perte d'habitat en général. Est-ce que l'un de vous peut me parler de la perte d'habitat et de l'effet qu'elle produit sur la chasse et la pêche?
Il ne fait aucun doute que la perte d'habitat représente l'attaque la plus importante que la faune et les populations de poissons subissent à l'échelle de l'Amérique du Nord. Je pense que n'importe quel groupe de conservation va le reconnaître. C'est la lutte que l'on continue de mener pour veiller à ce que des habitats soient gérés en fonction des besoins de la faune. Cela ne signifie pas qu'il faut réserver ces habitats strictement pour la faune. Divers usages sont compatibles. L'un des principaux objectifs de notre programme de recherche est de trouver des façons de faire en sorte que l'extraction de l'énergie soit compatible avec le maintien des populations fauniques sur les terres. Nous pouvons faire beaucoup de choses pour mettre en oeuvre des pratiques exemplaires, coordonner la construction des routes et des lignes de transport d'énergie de manière à protéger des habitats fauniques.
La perte d'habitat est certainement la pire menace pour l'avenir des poissons et de la faune en Amérique du Nord et dans le monde.
J'ajouterais aux commentaires de Mark que l'influence de l'habitat et de la prédation sont en quelque sorte les deux côtés de la même médaille. Prenons l'exemple des canards qui se reproduisent. La plupart des espèces nichent dans les hautes terres, dans les herbes des prairies. Quand il y a moins de zones recouvertes d'herbes où les canards peuvent nicher, le succès des nids s'en trouve diminué. Il est plus facile pour la moufette, le raton laveur ou le renard de trouver les nids, et les populations de prédateurs sont nettement plus nombreuses parce que nous avons généralement géré le paysage des prairies à leur avantage, et au détriment des oiseaux nicheurs.
J'ajouterais à ce que Mark a dit que soutenir la gestion de ce paysage par l'utilisation et par les activités de conservation est la bonne solution. Nous sommes une communauté agricole. Nous allons cultiver des grains. Nous allons cultiver des aliments et des fibres. Nous pouvons aussi favoriser la croissance des canards et du gros gibier, dans ce paysage, mais il faut en faire une gestion active. Ce qui d'après moi est unique du point de vue de la chasse, de la pêche et de la trappe, c'est que les gens comprennent la nécessité de faire une gestion du milieu. Il ne s'agit pas de créer de petits parcs: c'est inefficace. On ne peut soutenir un écosystème ainsi, dans la plupart des cas. Le soutien à la gestion active fait partie des convictions essentielles de ceux qui préconisent la pérennité des usages.
Merci beaucoup, monsieur Scarth.
C'est maintenant au tour de M. Toet, qui a sept minutes.
Monsieur Toet.
Merci, monsieur le président.
Je remercie nos invités d'aujourd'hui. Vos propos sont utiles et instructifs.
J'aimerais poursuivre un peu dans la même veine que Mme Leslie, concernant la conservation de l'habitat et la remise en état de l'habitat. Je pense que les deux vont de pair dans une grande mesure.
J'aimerais simplement avoir la perspective de chacun de nos témoins — une perspective très rapide — sur ceux qui, d'après vous, joueront un rôle essentiel dans la conservation de l'habitat et la remise en état de l'habitat.
Monsieur le président, je parle au nom d'une organisation qui s'occupe de la sauvagine, et comme je l'ai dit précédemment, une part disproportionnée des canards nicheurs — de 80 à 90 % — dépendent de terres privées que l'on appelle la région des fondrières des Prairies. Cette région prend naissance en Iowa et s'étend jusqu'au Minnesota, au Dakota du Nord et du Sud, au Montana, à la Saskatchewan et à l'Alberta. Ce sont 275 000 milles carrés d'habitat qui sont pratiquement exclusivement de propriété privée. Le but de notre organisation est de travailler avec les propriétaires de cette vaste région, car ils sont le pivot. Ce sont les gens qui possèdent les terres et qui les gèrent, et ils forment un élément critique de l'équation, d'après nous.
Je suis d'accord avec M. Scarth. En ce moment, la perte d'habitat se fait essentiellement sur les terres agricoles. Les prix des denrées sont relativement élevés depuis quelques années maintenant, alors il est certain qu'il faut établir des liens avec les propriétaires fonciers, les agriculteurs et les éleveurs de bovins. D'un côté, nous devons établir des liens avec eux et les encourager à participer davantage à la conservation. Nous ne pouvons pas le faire pour eux. Cela doit venir d'eux, et la différence est énorme. Ce sont eux qui doivent mener le mouvement. C'est essentiel, et il faut une très longue conversation.
De l'autre côté, cependant, nous devons trouver le moyen d'établir des liens avec la majorité urbaine afin de lui faire comprendre la valeur de ce qui se trouve là-bas, sur les terres agricoles. C'est ce qui est difficile. Du côté des exploitations agricoles, je pense que nous sommes sur la bonne voie grâce aux organisations comme Delta Waterfowl. Je pense que c'est en train de se produire, et que d'autres organisations font aussi de l'excellent travail. Le défi, c'est d'établir les liens avec les gens des secteurs urbains, et ce sera d'après moi l'autre partie de la conversation. Je pense qu'il reste beaucoup à faire sur ce plan.
Oui.
J'ajouterais à cela qu'en plus de l'agriculture, et ce, surtout en Alberta, le développement industriel a des effets très importants sur la perte d'habitat.
On peut faire un certain nombre de choses, notamment un programme de mesures compensatoires axées sur la conservation dans le cadre duquel les diverses entreprises qui utilisent des terres à des fins d'exploitation minière ou d'exploitation des sables bitumineux doivent investir dans des propriétés destinées à la conservation. L'Alberta Conservation Association gère un certain nombre de propriétés du genre. Il en a acheté, par exemple, pour Syncrude et Suncor, et pour d'autres grandes sociétés pétrolières. Ces terres sont donc gérées et mises de côté pour la faune, en guise de moyen d'atténuer les conséquences du développement industriel.
De plus, on s'attend à ce que l'industrie remette en état les terres qui ont été perturbées et modifiées par le développement industriel. Parfois, il faut de nombreuses années pour que cela se produise, mais au bout du compte, les terres peuvent être remises en production et restaurées de manière à reprendre leur rôle initial d'habitat faunique, si c'est bien fait. La remise en état de l'habitat faunique est donc un élément très important de la situation d'ensemble.
Il est bon de vous entendre tous dire qu'il semble y avoir un réel changement de cap, que nous avons un meilleur engagement de la part des agriculteurs et que nous avons aussi un meilleur engagement de la part de l'industrie, qui veille à ce que ses responsabilités, ses besoins et sa croissance à long terme soient durables. Il y a, d'après moi, des tendances positives.
Je voulais revenir à M. Olson. Vous avez mentionné plusieurs fois la nécessité d'obtenir l'engagement des jeunes Canadiens des régions urbaines. Vous avez parlé des femmes, mais aussi des jeunes Canadiens des régions urbaines et des nouveaux Canadiens qui se trouvent dans nos centres urbains, dont il faut obtenir l'engagement. Nous en avons beaucoup parlé dans notre étude sur le Plan de conservation national. Nous avons consacré toute une partie de cette étude à cela.
Je me demande si vous pourriez nous parler du travail que votre organisation fait, la Manitoba Wildlife Federation, et certains des clubs qui comptent parmi vos membres, pour rejoindre nos jeunes des régions urbaines et pour les amener à participer à de tels programmes de sorte qu'ils deviennent les protecteurs de l'environnement que nous souhaitons.
Oui, je serais ravi d'en parler. C'est ce qui me passionne. Ma passion, c'est d'amener les jeunes à faire du plein air. C'est de la magie. Vous les y emmenez, et cela les change. Je me souviens de la première chasse que nous avons organisée pour des jeunes. Un jeune a attrapé son premier canard, le matin, et cela a été pour lui toute une expérience — chargée d'émotion en plus. Nous sommes revenus au camp — nous avions 16 jeunes, à cette première chasse — et nous avons nettoyé le canard. Nous lui avons montré comment faire, et il l'a fait. Sa petite soeur était là aussi, même si elle était encore trop jeune pour chasser. Nous avons ensuite fait cuire le canard. Il l'a fait cuire et l'a servi à sa mère. Nous avons appelé cette chasse « Du canard pour souper ». Les parents sont revenus et les enfants ont servi du canard à leurs parents. Le jeune était ému.
Je suis ému quand j'y pense. Ç'a été un moment formidable. Il était ému. Il avait les mains qui tremblaient; il est sorti de la cuisine en tenant le plat, et il avait les mains qui tremblaient. Sa mère était émue. Je me suis demandé ce qui se passait. Je ne m'attendais pas à cela. Elle a dit qu'il n'avait jamais rien cuisiné de sa vie et qu'il ne savait même pas d'où sa nourriture venait. Il n'avait aucune idée de l'origine de sa nourriture, aucun lien. Après cela, le lien s'est fait. C'est une expérience qui fait grandir en tant qu'humain — une expérience que trop peu de gens acquièrent de nos jours.
Il y a eu cette chasse, et nous en sommes maintenant à 16 parties de chasse à l'échelle du Manitoba. Nous emmenons des jeunes chasser la sauvagine, le cerf et le dindon. Nous les encadrons. Nous leur donnons énormément de formation à la sécurité.
La demande est très forte, Lawrence, et nos bénévoles sont parfaitement préparés pour les emmener et leur montrer comment faire. Comme je l'ai dit, nous avons maintenant au centre-ville des programmes dont le but est d'amener les jeunes à manger des fajitas à l'oie et de les faire sortir du périmètre.
Pour nous, la difficulté, c'est le financement. Nous applaudissons le Plan de conservation national, qui est excellent, et nous estimons que travailler avec les agriculteurs est essentiel pour protéger l'habitat, ainsi qu'avec le secteur de l'énergie, comme M. Boyce l'a dit. Des fonds ne feraient pas de tort, car cela nous permettrait d'emmener des jeunes faire du plein air. Si nous pouvons les y emmener, ils seront là pour faire le travail de conservation et pour motiver le travail lié au plan de conservation.
Nous aurions besoin de l'aide de vous tous ici. Je parle de petits montants d'argent, juste un peu d'argent pour nous aider à faire sortir ces jeunes de leur quartier. Nous allons être limités. Nous pouvons travailler avec les agriculteurs et avec le secteur de l'énergie. Nous avons démontré qu'il existe des possibilités, mais nous devons encourager les jeunes et leurs parents, les mères en particulier, et nous aurions besoin d'un peu d'aide pour cela.
Nous devrons y revenir plus tard, peut-être en réponse à une autre question. Le temps de M. Toet est écoulé.
Il est excellent pour faire la conversation, mais il ne pense pas au temps.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Monsieur McKay, vous avez sept minutes.
Je suis désolé d'avoir manqué l'essentiel de votre témoignage. Le décalage horaire et un mauvais rhume se conjuguent pour me faire souffrir.
Ce que vous avez dit à propos des Manitobains qui viennent au monde avec des bottes de pluie aux pieds à cause des inondations qui se produisent régulièrement m'a fait penser à ce que nous nous attendons à voir au cours des prochaines semaines — une autre inondation en Saskatchewan ou au Manitoba. J'ai l'impression que c'est très lié à la gestion de l'habitat et au conflit inhérent entre l'agriculteur qui souhaite tirer le maximum de sa terre pour produire des denrées — ce qui est facile à comprendre compte tenu des prix actuels — et l'habitat des canards et des autres animaux qui diminue inévitablement.
Je ne vois pas bien ce qui peut être fait, outre la bonne volonté que manifesteraient les municipalités et les gouvernements provinciaux et fédéral pour amener les Canadiens à penser au coût des inondations annuelles pour les économies dans les Prairies, mais aussi pour l'économie canadienne. Les agriculteurs ont accès à leurs terres plus tard et doivent les dégager plus tôt.
Mais vous sauriez cela mieux que moi. J'aimerais vous entendre sur cette question. On dirait qu'il manque un aperçu global de la façon d'atténuer ce qui arrive aux bonnes gens du Manitoba chaque année.
Nous pourrions commencer par M. Olson.
Je pense qu'il est tout à fait possible d'obtenir l'engagement des producteurs agricoles. Je pense que la clé, c'est de déterminer comment le faire. Il est vrai que vous êtes en concurrence avec le prix des grains, mais même dans cet environnement, il y a des possibilités dans les exploitations agricoles. Souvent, malgré les prix élevés des denrées, on préfère ne pas exploiter les terres marginales. J'ai été élevé sur une ferme, et les secteurs qui entourent les milieux humides et les ruisseaux sont souvent peu productifs et présentent des risques. Donc, même dans ce contexte, il est possible de conserver des milieux.
L'important, c'est la façon d'aborder les agriculteurs. Ils ressemblent beaucoup aux chasseurs, probablement, en ce sens que si vous arrivez dans une collectivité et dites qu'il ne faut pas drainer, ce fermier toujours prêt à vous aider à remplacer votre pneu à deux heures du matin, ce fermier amical, charmant, qui est prêt à tout vous donner, va se transformer en personne prête à se battre pour sa terre et pour ses choix personnels de gestion de sa terre. Vous attaquez leur communauté quand vous vous mettez à leur faire de la pression avec des règlements. Il faut effectivement des règles et des règlements, mais il n'est pas nécessaire de commencer ici. Si vous frappez quelqu'un avec un bâton, ça cause un litige. La clé, c'est d'aller dans les communautés agricoles et de les aborder d'une certaine façon. C'est ainsi que vous allez réussir à obtenir leur engagement.
Il va falloir de l'argent, mais ce n'est pas que l'argent. Compte tenu de mon expérience avec les agriculteurs et la conservation, j'ai toujours pensé que l'agent était important, mais qu'il n'était pas tout. Votre façon de travailler avec les agriculteurs et d'obtenir leur engagement importe davantage.
Je vais ajouter quelque chose avant de laisser la parole à Mark.
C'est tout à fait vrai. Parce qu'il faut respecter la situation de l'agriculteur ou de l'éleveur concernant ces terres privées, je pense qu'un programme de mesures incitatives conviendrait mieux que la réglementation ou l'achat de terres à des fins de conservation. Il existe de nombreux précédents. Nous sommes en fait l'un des rares pays industrialisés à ne pas avoir de programme de conservation qui aurait ce genre de portée. La politique agricole des États-Unis comporte depuis longtemps des mesures incitatives. La Communauté économique européenne a ce qu'elle s'est mise à appeler la multifonctionnalité — différentes façons de produire des biens et services environnementaux ainsi que des aliments et des fibres, sur les terres agricoles privées.
Il y a donc des précédents. Comme Rob l'a dit, l'orientation est très importante, mais les modèles sont là. Il s'agit de faire de la conservation une culture dominante. Il s'agit de faire en sorte qu'elle soit importante pour les comtés, les agriculteurs et les éleveurs, plutôt qu'une chose à laquelle on pense après coup, une fois que les routes sont construites et les fossés creusés. Il faut que cette question se discute à la table du comté, avec les autres questions courantes liées à l'économie et l'infrastructure.
Est-il vraiment possible de mesurer la réussite à ce chapitre? En fait, il serait bon d'inciter les agriculteurs, qui sont probablement... Une certaine proportion des agriculteurs sont tout à fait disposés à cesser d'exploiter des terres — certainement celles qui sont peu productives —, mais d'autres ne le feront tout simplement pas. Le problème s'ils ne le font pas, c'est que les Manitobains sont alors victimes d'inondations. Je sais que mes propos sont réducteurs, mais à long terme, nous ne pouvons pas continuer à agir comme nous le faisons.
Quand doit-on laisser tomber l'approche volontaire moins stricte et prévoir une série de mesures incitatives suivant la formule de la carotte et du bâton? Vous me dites que les États-Unis et l'Union européenne ont des mécanismes semblables. Est-ce ce que vous nous recommandez?
J'ai une remarque qui répond directement à la question.
Un couvert de prairie permanente est bel et bien un mécanisme fort important pour limiter les inondations. Il existe des programmes. En fait, Canards Illimités offre même un programme d'investissements visant la réduction des émissions de carbone. Les prairies emmagasinent très efficacement le carbone de façon presque permanente.
Je possède une exploitation agricole dans l'État de l'Iowa, et il y a certains endroits du terrain où la terre arable noire atteint presque ma taille en profondeur. C'est le fruit de 9 000 années d'accumulation. Des tonnes et des tonnes de carbone sont donc emprisonnées dans le sol des prairies indigènes.
En transformant les terres peu productives en couvert de prairie permanente, nous assurons une protection contre les inondations, mais en plus, nous enfouissons chaque année jusqu'à 30 tonnes métriques de carbone par hectare dans ces sols. Planifier un couvert de prairie permanente est un des changements les plus importants à apporter à la gestion de certains bassins hydrographiques lourdement touchés par les inondations. Nous pouvons donc atteindre ces deux objectifs en prélevant une taxe sur le carbone et en taxant les industries qui produisent trop d'émissions.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie tous de votre présence, aujourd'hui.
Je suis heureux de voir toutes sortes de gens intervenant dans le domaine de la chasse, de la pêche et de la conservation. Je pense que la conservation nous intéresse beaucoup. Il se fait des études relativement au Plan de conservation national. Chaque fois, bien sûr, on mentionne l'importance de l'investissement et de la recherche pour pouvoir prendre les bonnes décisions quand on intervient, qu'il s'agisse d'interventions monétaires ou d'interventions de soutien à la science, par exemple.
Monsieur Boyce, en ce qui a trait au soutien à la science, en vue d'assurer la conservation pour maintenir les activités de chasse et de piégeage, les investissements et la recherche sont-ils suffisants? Bien sûr, on pourrait toujours faire mieux, mais à quel endroit pourrions-nous faire mieux sur le plan fédéral?
[Traduction]
En tant que biologiste chercheur, je vais toujours dire qu'il faut plus de recherches. Mais d'un point de vue plus pratique, je pense que nous ne savons souvent pas comment prendre les bonnes décisions en matière de gestion. Nous ignorons par exemple comment limiter le plus stratégiquement possible les inondations de la région de Winnipeg. Mais en effectuant des recherches et en examinant d'autres façons stratégiques d'utiliser les sols, nous pouvons revoir la gestion des terres et déterminer quelles pratiques sont les plus avantageuses pour la protection contre les inondations et la conservation de la faune.
Il y a toujours de nouveaux outils créés pour que nous puissions mieux planifier l'aménagement du territoire, par exemple, où il y a actuellement un grand besoin de recherche. Il faut essayer de trouver la meilleure façon de réaliser le développement industriel sur le terrain. Nous avons par exemple 761 000 puits de pétrole et de gaz dans l'Ouest canadien. Il n'y a pas que la plateforme d'exploitation qui dérange l'environnement, mais aussi toutes les infrastructures qui l'accompagnent, comme les routes, les lignes électriques, les pipelines et la fragmentation des habitats. Tout est fait au hasard sur le territoire, sans planification soignée ou utilisation des meilleures pratiques de gestion pour assurer la survie tant de la faune que du développement industriel.
Il y a d'énormes possibilités à ce chapitre et un besoin d'améliorer la planification de l'aménagement du territoire. Il s'agit selon moi du domaine pour lequel le besoin de recherche est le plus criant aujourd'hui.
[Français]
Je vous remercie beaucoup de vos commentaires sur la meilleure planification du territoire pour conserver les habitats.
Vous soulevez un autre problème dans vos recherches, soit les répercussions des changements climatiques sur les populations de caribous et sur d'autres populations. Vous avez fait beaucoup de recherches sur ces sujets.
En quoi les changements climatiques ont-ils un effet important sur les pratiques de chasse et de piégeage, par exemple en ce qui concerne les populations de caribous surtout dans le Nord? Pouvez-vous développer votre pensée sur ce sujet?
[Traduction]
Nous avons réalisé une étude sur les troupeaux de caribous, de même que sur les troupeaux de rennes de l'Ancien Monde, et presque tous sont en déclin. Il ne s'agit donc pas seulement des troupeaux de caribou des bois de la forêt boréale, mais aussi des troupeaux migrateurs. Seuls deux ou trois troupeaux de l'Amérique du Nord ne sont pas en déclin, et un ou deux en Sibérie. Pratiquement tous les troupeaux du monde entier sont en déclin, ce qui est attribuable à un certain nombre de facteurs.
Dans le cas du caribou boréal, nous comprenons que la perturbation de l'habitat crée un habitat favorable à l'orignal et au chevreuil. Or, il en découle une augmentation des populations de loups, ce qui entraîne une plus grande prédation du caribou. Voilà ce qu'on appelle la compétition apparente, un phénomène qui a été démontré en Sibérie et partout au Canada. Ainsi, le développement industriel associé au bois d'oeuvre et à l'exploitation pétrolière et gazière a des conséquences non pas directes, mais secondaires sur le caribou des bois.
Dans le Nord, le changement du climat influence le moment où le caribou arrive dans les aires de mise bas. À l'arrivée du caribou, la végétation est déjà parvenue à maturité et a déjà dépassé son stade le plus nutritif, de sorte que la situation nutritionnelle de nombreux troupeaux migrateurs du Nord a été touchée par les changements climatiques. Les perturbations sont d'ailleurs plus prononcées dans le Nord que partout ailleurs sur le globe.
C'était tout le temps dont M. Choquette disposait.
Nous allons maintenant écouter M. Carrie, qui dispose de cinq minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président. J'aimerais simplement apporter une précision à l'intention de mon confrère de Drummond, qui dit que nous devrions avoir un plan national de conservation. En fait, le premier ministre en a justement annoncé un en mai dernier. L'objectif est d'investir 252 millions de dollars afin de conserver et de restaurer le milieu naturel du Canada pour les générations d'aujourd'hui et de demain. Dans le cadre du plan, le gouvernement verse 50 millions de dollars sur cinq ans à la restauration des milieux humides. Je crois même que le NPD a voté contre le plan.
Quoi qu'il en soit, j'aimerais que les témoins nous donnent des exemples de projets qui ont été financés par le programme dans leur province ou au sein de leur organisme.
Merci.
Je pense qu'il a été dit plus tôt que le Plan national de conservation contribue à la croissance et à l'expansion du programme de services de diversification des modes d'occupation des sols, ou ALUS, qui vise pour la première fois à faire participer les propriétaires de terres privées et les gouvernements locaux aux efforts de conservation.
Permettez-moi d'expliquer le fonctionnement du programme ALUS. Les comtés sont les instances locales qui gèrent les fonds et concluent des accords avec les propriétaires fonciers dans le but de conserver les secteurs qui sont moins productifs et qui sont intégrés aux zones humides, comme Rob l'a mentionné. L'objectif global est de faire participer à la fois les propriétaires des terres et les gouvernements locaux afin que la conservation devienne une activité courante.
Ce programme se déroule bel et bien grâce au soutien du Plan national de conservation, et nous espérons qu'il s'étendra un jour à l'ensemble du pays.
Excellent.
Monsieur le professeur Boyce, vous avez dit être spécialiste de la gestion des grands mammifères. J'ai lu à propos d'une application sur la chasse à l'orignal à laquelle vous avez participé en 2012. Pourriez-vous s'il vous plaît nous en expliquer le fonctionnement? Quel genre de données avez-vous pu recueillir grâce à l'application?
J'imagine que vous ne verrez pas très bien à l'écran, mais il s'agit d'une petite application. Lorsque vous l'ouvrez, un tableau s'affiche et vous demande d'entrer le nombre de taureaux, de vaches, de veaux et d'animaux non identifiés que vous avez vus pendant une sortie de chasse, de même que le nombre d'heures que vous avez passé à chasser ce jour-là.
Quand un permis de chasse à l'orignal est délivré à un chasseur, le ministère de l’Environnement et du Développement durable des ressources lui demande de participer à ce programme volontaire afin de fournir de l'information sur le nombre d'orignaux qu'ils voient chaque jour sur le terrain. L'idée m'est venue d'un voyage que j'ai fait en Norvège il y a quelques années, où un programme exige que les chasseurs déclarent à une station de contrôle le nombre d'orignaux qu'ils ont aperçus après chaque jour de chasse. Il existe en effet une forte corrélation entre le nombre d'orignaux aperçus chaque jour et la population d'orignaux.
En Alberta, nous dépensons 600 000 $ par année à la surveillance des populations d'orignaux, une somme qui suffit à peine à visiter 10 secteurs de gestion de la faune. Le coût est de 60 000 $ par secteur en raison du temps extrêmement coûteux d'utilisation de l'hélicoptère. À ce rythme, nous n'évaluons que 10 % des secteurs de gestion des orignaux en Alberta. Il nous faut donc 10 années pour avoir une idée du nombre d'orignaux qui composent la population. L'application nous permettrait donc de recueillir l'information presque gratuitement avec la collaboration des chasseurs.
Le chasseur saisit dans l'application le nombre d'orignaux qu'il a aperçus, même s'il se trouve quelque part dans la forêt où il n'y a pas de téléphonie cellulaire. Lorsqu'il sera en route vers la maison, l'appareil iPhone ou Android enverra les données à une tour, qui les téléchargera directement sur mon ordinateur.
La magie de nos comités, c'est qu'ils nous permettent tous d'apprendre des choses. M. Olson a parlé d'une crise de l'orignal dans son secteur, et je me disais que vous pourriez en discuter tous les deux pour voir si un outil pourrait être utilisé et mis en œuvre.
J'ai une dernière question. Monsieur Olson, vous avez dit que votre objectif est de préserver les régions sauvages à jamais. Je pense que c'est exactement ce que vous avez dit. Vous cherchez à recruter des chasseurs et des écologistes. Comment votre organisme noue-t-il le dialogue avec les nouveaux Canadiens, les femmes et les jeunes pour les inciter à s'adonner à la chasse et au piégeage? Vous en avez fait mention. Pourriez-vous préciser quelque peu votre pensée? Il serait merveilleux que toutes nos communautés y participent.
Ai-je le temps d'écouter la réponse?
Nous commençons par les écoles des quartiers défavorisés du centre-ville. Nous essayons de nouer le dialogue avec les nouveaux Canadiens qui s'y trouvent. Nous tentons de rétablir le lien entre les jeunes autochtones et leurs activités traditionnelles de plein air. Nous publicisons également notre programme de recrutement. En fonction de leur expérience, les gens peuvent obtenir de l'information à différents niveaux partout à Winnipeg, et dans les grandes sources médiatiques. Nous essayons donc de nouer le dialogue de différentes façons.
Nous recrutons également dans les points de vente des détaillants de plein air d'ici. Les nouveaux Canadiens sont souvent attirés d'abord par la pêche, et lorsqu'ils vont en magasin, nous leur faisons connaître la chasse aussi. Nous intervenons à plusieurs niveaux, auprès des jeunes des écoles jusqu'aux adultes dans divers lieux de Winnipeg.
[Français]
Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie également les témoins d'être parmi nous aujourd'hui. Vos témoignages étaient très intéressants.
Ma question, qui est assez large, s'adresse à chacun d'entre vous.
J'aimerais savoir si l'on a suffisamment d'éléments provenant de toutes les sources et si l'on prend des décisions avisées en matière de gestion de la faune, exception faite de la recherche scientifique, bien entendu.
Nous pourrions commencer par M. Boyce et passer ensuite à MM. Olson et Scarth.
Je vous écoute.
[Traduction]
Je crois qu'il nous manque souvent de l'information. Nous n'avons pas nécessairement les recherches qu'il nous faudrait pour prendre de bonnes décisions en matière de gestion. Cela s'applique à pratiquement tous les cas de gestion de la faune. Nous avons généralement besoin de plus de renseignements sur la façon de bien faire les choses.
Un exemple me vient à l'esprit: j'ai récemment visité une région du sud de l'Alberta qui abrite le tétras des armoises. La Alberta Conservation Association essayait d'inciter les agriculteurs locaux à déplacer la charge des pâturages hors des zones de la plaine, qui regorgent d'armoises, dans l'espoir de limiter les dégâts dans ces secteurs. Or, le bétail a malheureusement été déplacé directement dans l'aire de nidification du tétras des armoises, où la présence de gros bétail a nui à la reproduction de l'espèce dans ces hautes terres.
En l'absence de surveillance de l'habitat et de recherches en modélisation, les décisions prises relatives à la gestion de la faune étaient sans fondement et allaient à l'encontre du but recherché. Nous avons toujours besoin de mieux comprendre la complexité de la nature.
[Français]
Je vous remercie beaucoup, monsieur Boyce.
Nous pouvons maintenant passer à M. Olson ou à M. Scarth.
[Traduction]
Bien, j'imagine que je peux répondre.
Je suis d'accord avec M. Boyce. Je pense que nous avons rarement suffisamment d'information ou de données de qualité suffisante pour prendre des décisions éclairées en matière de gestion. Il nous manque toujours des renseignements, et j'imagine que la situation ne va pas changer.
Prenons l'exemple du Manitoba, qui connaît une crise de l'orignal, mais qui n'a pas suffisamment d'argent pour faire des relevés aériens afin de compter les bêtes, comme M. Boyce l'a dit. Nous ignorons combien d'orignaux se trouvent sur le territoire, et n'avons aucune idée du nombre qui sont abattus. Nous jouons constamment aux devinettes. Nous devons faire venir M. Boyce au Manitoba avec son application, car je pense que l'espoir réside du côté de la science citoyenne et du peuple.
Les questions des coûts liés aux soins de santé, de la prévention du crime, de l'éducation et du vieillissement de la population coûtent tellement cher au Manitoba et sont si importantes que les orignaux ne feront jamais partie des 100 enjeux prioritaires de la plupart des gens d'ici, peu importe les efforts que nous déployons en ville pour rapprocher les gens de la ressource. Nous devons faire preuve de créativité et d'innovation, mais il n'y aura jamais assez d'argent. Nous allons devoir prendre des décisions et mobiliser la population des collectivités.
La bonne nouvelle, c'est que les gens en savent beaucoup. Nous ne leur avons pas demandé de participer, mais nous devrions le faire par l'entremise de votre comité. Les chasseurs et les piégeurs sur le terrain, de même que les peuples autochtones ont beaucoup de connaissances. Les recherches démontrent apparemment que les observations des chasseurs en Norvège correspondaient aux données recueillies à l'aide des relevés aériens. C'est fantastique. Nous pourrions ainsi économiser de l'argent en évitant d'envoyer des hélicoptères pour compter les orignaux.
En tant qu'écologistes et environnementalistes, nous allons devoir faire preuve de créativité et d'innovation puisque nous n'aurons jamais l'argent dont nous avons besoin. Il n'y en a jamais eu, et il n'y en aura jamais. La clé, c'est de faire participer les gens des collectivités. Il y a bien des connaissances dont nous n'avons pas encore tiré profit.
[Français]
Je vous remercie beaucoup.
Est-ce qu'il me reste du temps de parole, monsieur le président?
Il me reste 30 secondes? D'accord, merci.
[Traduction]
Je vais répondre à la première partie de votre question, où vous demandiez si nous réunissons tous les éléments. Je demande instamment à tous les membres du comité, en tant que décideurs, d'envisager les autres éléments ayant trait au recrutement et au maintien des chasseurs, des pêcheurs à la ligne et des piégeurs sur le terrain.
Les politiques entraînent bien des conséquences imprévues, qu'il s'agisse de l'ensemble du dossier sur l'enregistrement des armes à feu, ou du dossier sur la cruauté envers les animaux, qui complique la chasse, la pêche et le piégeage sur le terrain. Lorsque vous vous attarderez aux investissements sur le plan environnemental, je vous demande instamment d'envisager l'effet négatif que ceux-ci pourraient avoir sur le milieu.
Merci.
Merci.
L'année dernière, la Gendarmerie royale du Canada a voulu se départir de son chapeau de fourrure emblématique en rat musqué — elle a dit subir la pression des groupes de défense des animaux. Le caucus conservateur de la chasse et de la pêche, que je préside, s'est immédiatement emparé de la question. C'était certes un problème mineur, mais hautement symbolique. Après que notre gouvernement ait infirmé la décision de la GRC, il était vraiment remarquable de recevoir à mon bureau un flot de courriels provenant de chaque communauté rurale et autochtone, qui nous remerciaient d'avoir infirmé la décision.
Monsieur Olson, pourriez-vous nous expliquer pourquoi cette question paraissant insignifiante a provoqué une réaction aussi viscérale au sein de certaines collectivités?
Je pense que la réaction a été viscérale, parce que nous, les chasseurs et les trappeurs, nous sommes passionnés pour notre culture. Nous le sommes tout autant que les agriculteurs de la Saskatchewan pour leurs terres. Nous pouvons être vos meilleurs amis, mais si vous nous attaquez, nous pouvons devenir vos pires ennemis. Nous préférons l'amitié. Nous sommes plus disposés à aimer qu'à combattre. Nous voulons faire le bien.
Dans les années 1980 et 1990, j'ai senti que nous étions beaucoup plus sur la défensive qu'aujourd'hui, et nos sensibilités, même les plus petites, provoquaient chez nous de fortes réactions. Cela définit qui nous et nos familles nous sommes. C'est ce que nous faisons. Que nous soyons autochtones ou non, cela définit nos modes de vie. La moindre atteinte, qui peut sembler minime à certains, nous touche au coeur. Notre réaction sera viscérale et, parfois peut-être, exagérée.
Je pense que, maintenant, notre situation s'est améliorée. Je ne ressens plus cette réaction. Il y a 15 ans, j'aurais peut-être hésité à avouer, dans une réception, que j'étais chasseur et trappeur. Plus aujourd'hui. Les gens font la queue, devant ma porte, pour obtenir de la viande. C'est différent. J'ignore pourquoi. J'ignore ce qui est en train de changer. Je l'apprécie seulement. Il n'est pas canadien de ne pas respecter les cultures. Nous nous respectons mutuellement. Nous respectons les choix personnels. C'est important aussi. Je pense que quand on commence à empêcher quelqu'un de vivre selon ses choix, on s'attire une réaction agressive, parce que ce n'est pas canadien. Nous n'aimons pas les comportements non canadiens.
Entièrement d'accord. Nous, les législateurs, nous sommes à l'écoute de la société. Les gens nous parlent et, d'après nos renseignements, sur cette question... et notre gouvernement est un très chaud partisan de la chasse, de la pêche et du piégeage. Nous n'avons pas peur d'en parler. Avec vous, je conviens que la société a évolué.
Monsieur Scarth, vos observations sur le rôle des règlements par rapport aux incitations visant les terres privées m'ont beaucoup intéressé. Une loi, la Loi sur les espèces en péril, est en vigueur. Pouvez-vous nous dire comment elle s'applique aux terres agricoles privées?
Je ne peux pas concevoir de message plus négatif, pour un propriétaire foncier, que celui qui fait de la présence d'une espèce en voie de disparition sur ses terres un élément de passif plutôt qu'une source potentielle de revenus ou d'encouragement. Je dis souvent à qui veut m'entendre que si on veut voir proliférer les chevêches des terriers, il faudrait payer les propriétaires fonciers pour chacune de ces chouettes qui atteint l'âge adulte et qui prend son envol à partir de leurs terres, et c'est le bon signal à envoyer. C'est ainsi qu'on devrait concevoir la politique, quand il s'agit de droits à la propriété privée.
Pour les terres de la Couronne, la situation, évidemment, est tout à fait différente, mais, pour les terres privées, le fait de plutôt donner un caractère de passif à une espèce qu'on veut voir se multiplier constitue, d'après moi, une réaction perverse, contraire au but recherché.
Monsieur Boyce, pourriez-vous répondre à la question touchant la Loi sur les espèces en péril, vous aussi?
C'est une question très complexe. Le dossier que je connais le mieux est celui du tétras des armoises du sud-est de l'Alberta et du sud-ouest de la Saskatchewan. La population de cet oiseau est passée d'environ 2 000 en Alberta et de 5 000 dans tout le Canada, en 1968, à 15 mâles maintenant en Alberta et à moins que cela, autour d'un lac de la Saskatchewan, dans le Parc national des Prairies. Ce déclin a été imputable, très visiblement, à la mise en valeur du pétrole et du gaz dans la région et au forage de puits de pétrole directement dans l'habitat essentiel de cet oiseau, sur les terres privées ainsi que celles de la Couronne des deux provinces.
Le décret de protection d'urgence promulgué en janvier 2014 pour protéger l'oiseau, le très peu de spécimens qui restent, et assurer la protection des habitats essentiels a entraîné de fortes réactions. Celle des propriétaires fonciers n'a rien à voir avec leurs travaux agricoles, mais plutôt avec le fait qu'ils recevaient du secteur pétrolier de l'argent pour avoir autorisé la présence de puits sur leurs terrains et dans les terres de la Couronne qu'ils avaient louées. C'est certainement une affaire très complexe. En fait, c'est la première fois qu'un tel décret entraîne ce genre de conséquences pour les propriétaires.
Merci, monsieur le président.
Monsieur Boyce, j'ai beaucoup de questions pour vous. Peut-être qu'elles ne s'adresseront qu'à vous. Nous sommes ici, comme M. Sopuck l'a dit, en notre qualité de législateurs fédéraux. Vous avez soulevé la question de la planification de l'utilisation des sols et vous venez de parler de la Loi sur les espèces en péril. Beaucoup de solutions, malheureusement, ne sont pas fédérales. La Loi sur les espèces en péril l'est, absolument, mais beaucoup de plans d'utilisation des sols sont provinciaux ou municipaux...
Que reste-t-il à faire aux législateurs fédéraux? Pouvons-nous invoquer seulement la Loi sur les espèces en péril? Est-ce la seule solution à notre disposition? Comment pouvons-nous collaborer avec les provinces pour régir la planification de l'utilisation des sols et nous assurer que l'habitat ne sera pas englouti par un projet quelconque de mise en valeur? Comment réagir à cela à l'échelon fédéral?
Il est sûr qu'il faut faire de la recherche d'une forme de collaboration entre l'État fédéral et les provinces sur les questions de planification de l'utilisation des sols une priorité. En fait, c'est une priorité internationale, parce que les mêmes questions, exactement, sur les changements d'utilisation des sols se posent dans l'ouest des État-Unis.
Je proposerais la mise sur pied d'un comité d'experts de la Société royale du Canada, du Conseil national de recherches Canada et de l'organisme homologue américain pour élaborer une stratégie pour la planification de l'utilisation des sols dans l'ouest de l'Amérique du Nord. C'est un problème très complexe. En fait, j'ai cherché une façon de le qualifier dans Wikipedia et j'ai trouvé qu'il posait un dilemme inextricable, parce que, peu importe la solution appliquée, il y aura des conséquences économiques, agricoles, forestières et ainsi de suite. Nos intérêts dans le sol sont tellement divers qu'il est très difficile de les concilier de façon stratégique, de savoir comment coordonner, notamment, le développement industriel.
Je n'ai pas de solution claire et toute prête à offrir, parce que presque toutes ces espèces sont touchées très gravement. Par exemple, la réponse des aménagistes au problème du caribou est très différente de ce qu'elle serait pour le grizzly de la même région tout comme elle le serait pour le tétras dans le sud-est de l'Alberta. La recherche d'une façon stratégique d'appliquer judicieusement la planification de l'utilisation des sols est l'un des problèmes les plus complexes de l'écologie moderne.
Encore une fois, ma proposition serait d'appuyer la participation de la Société royale du Canada à un comité d'experts chargé de résoudre ce problème très difficile de planification.
Dans mon témoignage, j'ai lancé des idées pour favoriser davantage la faune et le piégeage grâce au fonds Pittman-Robertson, par exemple, et au fonds Dingell-Johnson, en ce qui concerne la pêche. Ces fonds contribueraient énormément à mobiliser des appuis à l'échelon provincial.
Aux États-Unis, les fonds proviennent de l'application d'un droit de timbre sur les munitions, les armes à feu et les articles de pêche. Le ministère de l'Intérieur les répartit ensuite entre les États, proportionnellement à leur contribution. L'État doit égaler la mise fédérale. Cela provoque un flux continu d'argent qui permet les études aériennes, l'appui aux projets de recherche et les programmes de sensibilisation aux États-Unis. Un tel mécanisme serait un progrès énorme pour le Canada, pour assurer un financement continu.
Merci. C'est incroyablement important.
Que pensez-vous de la Loi sur les espèces en péril? Avez-vous des opinions de dernière minute sur les espèces en péril et les améliorations qu'on pourrait apporter dans ce dossier?
Je pense que les responsables de la conservation sont devenus très nerveux à cause de cette loi parce que, comme vous savez, en 1930, on a confié la gestion des ressources naturelles aux provinces, et ce décret de protection d'urgence nous fait craindre une contestation possible de la constitutionnalité de cette loi.
Nous pensons que cette loi est extrêmement importante et nous espérons que le Parlement continuera de l'appuyer contre les contestations juridiques actuelles. Cette loi est la pomme de discorde entre la ville de Medicine Hat, qui est un important actionnaire de la pétrolière LGX qui étend ses opérations dans l'habitat essentiel du tétras des armoises, et l'État fédéral qu'elle poursuit.
Merci, monsieur le président.
Je tiens à parler d'abord de la Loi sur les espèces en péril et des observations ainsi que des questions de M. Sopuck et de Mme Leslie à ce sujet. Infailliblement, il me revient à l'esprit l'étude que le comité a faite, il y a quelques années, et pendant laquelle nous avons accueilli les représentants d'une association d'éleveurs de bovins — de l'Alberta, je crois. Ils nous avaient fait observer que si une espèce en péril est trouvée sur les terres d'un éleveur, il faut supposer que ces terres sont bien gérées. J'ai trouvé l'observation très intéressante. Très souvent, quand il trouve une espèce en voie de disparition sur ses terres, le propriétaire hésite à le signaler, parce qu'il s'expose à recevoir la visite de quelqu'un qui lui dira de modifier toutes ses opérations, même si l'espèce prospère dans cet habitat.
Ce qui m'amène à un autre point. Je montrais à certains de mes collègues des photos que j'ai prises de ma fenêtre hier matin, avant de prendre l'avion pour Ottawa, celles de deux cerfs se nourrissant à une mangeoire d'oiseaux dans ma cour. C'était à l'intérieur du périmètre, Rob. Il y a donc beaucoup d'animaux sauvages. J'ai des renards, des moufettes, des coyotes et des cerfs en abondance. À l'intérieur même des limites de la ville de Winnipeg, sur mon terrain.
Revenons à la question de la conservation des terres humides. Sur mon terrain de 5 acres, j'ai laissé subsister environ 2,5 acres à l'état naturel de zone humide. Je subis en fait beaucoup de pressions de mes voisins et, particulièrement, de l'industrie de la construction, qui cherche toujours des endroits pour se débarrasser de ses matériaux de remblayage. Ils viennent sans cesse me dire que cette zone humide sur mon terrain pose un problème et que je devrais la remblayer.
Comment vaincre ce genre d'attitude en milieu urbain et même de la part de ces gens qui considèrent tout de suite ces zones humides comme un problème plutôt que comme une réponse élégante à beaucoup de questions?
Monsieur Olson.
C'est une question de sensibilisation. Une partie du plan national de conservation est consacré à la sensibilisation des Canadiens. Quelqu'un a demandé ce qu'un groupe fédéral comme le vôtre pouvait faire pour aider l'environnement et pour s'occuper de milieux comme les terres humides.
Vous aurez des comptes à payer, messieurs. Vous payez déjà. Quelle a été la facture de l'inondation de 2011 au Manitoba? Est-ce qu'elle s'élevait à des centaines de millions? Vous payez actuellement. En fin de compte, c'est vous qui devrez payer pour, voyons, 90 % des catastrophes? Allez-vous vous contenter de réagir après coup et de payer après que les dommages sont causés, après qu'il est trop tard, ou allez-vous agir en amont? Vous pouvez prévoir un financement proactif.
Le secteur de l'énergie complique beaucoup la situation du tétras en Alberta. C'est un problème plus complexe, d'une certaine manière, mais le principe est le même. Si vous ne voulez plus d'inondations, en agissant en amont, vous pourriez économiser sur la réparation des dégâts après coup.
L'avenir nous le dira. Nous devons éprouver cette méthode et faire des mesures pour voir si c'est possible. Nous croyons que ce l'est, mais les essais ont manqué de conviction. Pour changer la donne, mettez-vous à l'écoute des gens. Les menaces et l'interdiction de faire paître les vaches...
Mon premier emploi était la recherche de chevêches des terriers en Saskatchewan. Personne n'a voulu m'adresser la parole tant que je n'ai pas dit que j'avais été élevé sur une ferme, que je n'étais pas un fonctionnaire fédéral et que j'étais là simplement pour collaborer. Ces gens adorent ces chouettes, mais ils sont terrifiés à l'idée de perdre la maîtrise de leurs terres. Tout cela nécessitera du financement.
Vous, vous êtes des percepteurs et, en fin de compte, vous devez payer les dégâts causés par les inondations. Voulez-vous contribuer au rétablissement d'une espèce en voie de disparition? Savez-vous ce que ça coûte? C'est une mission presque impossible. Il faut agir en amont. Comme en fin de compte vous acquitterez la facture, pourquoi ne versez-vous pas d'abord l'argent? La facture sera moins salée, et c'est possible.
J'adore l'idée de créer un comité d'experts, comme l'a proposé M. Boyce. Nous avons besoin de votre argent. Si vous le voulez, c'est possible. Vous devez faire un investissement qui doit être judicieux. Les comités d'experts sont une excellente façon de canaliser les investissements pour obtenir des résultats éblouissants, mais nous avons d'autres trucs pour y parvenir maintenant. Au lieu de payer plus tard, pourquoi ne pas payer maintenant et moins?
Monsieur Scarth, à ce sujet, vous avez effleuré, dans votre exposé, la question des efforts de partage des coûts des services de diversification des modes d'occupation des sols, les ALUS, et du plan national de conservation, auxquels participaient aussi les chasseurs. Le concept des ALUS m'intrigue beaucoup. Vous en avez eu une expérience au Manitoba, je crois. Pouvez-vous nous parler du succès que vous avez obtenu grâce aux ALUS et de leur efficacité ainsi que de la coopération nécessaire pour que ce concept donne de bons résultats?
Oui. Merci beaucoup.
Notre vision des ALUS est un partenariat privé-public dans la conservation. Prenons l'analogie des infrastructures, où le gouvernement fédéral collabore depuis longtemps avec les provinces, les municipalités et, depuis un peu moins longtemps, avec les entreprises privées pour construire des routes, des ponts et les autres infrastructures nécessaires. D'après moi, le problème n'est pas différent de cela.
Il faut que la conservation soit le courant dominant. Elle ne doit plus être marginalisée ou être une notion à laquelle on pense après coup. Dans son témoignage, M. Boyce a mentionné la notion de compensation, c'est-à-dire que si on fait de la construction dans un habitat d'une région et qu'on le modifie, on devrait investir en retour plus que ce que coûte le remplacement de cet habitat ou le gérer de manière à remplacer la nouvelle empreinte écologique. Je pense que, grâce à ces notions, nous pouvons mettre sur pied un plan national qui comportera à cette fin des investissements fédéraux, provinciaux, municipaux et privés.
L'autre élément des ALUS, qui est d'une importance essentielle, c'est qu'ils mobilisent les autorités locales. Nous avons effectivement un projet au Manitoba, deux en Saskatchewan et trois, pour le moment, en Alberta. Dans l'île-du-Prince-Édouard, il s'agit d'un programme à la grandeur de la province qui mobilise plus de 85 % des producteurs agricoles de l'île. Il est réalisé de manière à encourager l'aménagement de ce que j'appelle des superzones tampons autour des champs de pommes de terre pour empêcher le ruissellement d'atteindre les cours d'eau tributaires, souvent à saumons et à truites. Cette solution plaît extrêmement aux propriétaires fonciers, beaucoup plus que les autres dont nous avons parlé aujourd'hui qui, comme vous l'avez entendu, provoquent des batailles rangées.
Nous avons maintenant un différend avec la ville de Medicine Hat. Est-ce un résultat éblouissant? Pour moi, manifestement, la réponse est non. Voulez-vous vraiment être poursuivis par cette ville, la plus proche de l'habitat du tétras des armoises? D'après moi, c'est une catastrophe stratégique.
Merci, monsieur Scarth. Encore une fois, M. Toet a été fidèle à lui-même. Mais c'est une excellente réponse.
Allez-y, monsieur Carrie.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Revenons à M. Olson. Il m'a servi beaucoup de belles citations. L'une d'elles était qu'il n'était pas canadien de respecter les différentes cultures. Ici, au Canada, la chasse et le piégeage sont si importants pour notre identité et ils font partie de notre culture.
Vous avez aussi dit que le fait de frapper quelqu'un avec un bâton, c'était désormais controversé. Je pense que l'une des raisons est que, vous savez, il y a quelques années, peut-être vous sentiez-vous un peu embarrassé d'être chasseur... Je sais que le gouvernement a retenu la leçon du gouffre financier qu'a été le registre inefficace des armes d'épaule et de son effet sur les chasseurs et les agriculteurs respectueux des lois.
Je me demandais si vous pouvez en dire un peu plus, je vous en prie, sur l'importance culturelle, en la décrivant, de la chasse et du piégeage avec permis au Canada. Vous avez mentionné l'importance de ces activités chez les Autochtones et les Premières Nations, et, vous savez, c'est simplement un mode de vie. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
Ce qui est extraordinaire à propos du Canada, à mon avis, c'est notamment son multiculturalisme. Il y a toutes sortes de groupes culturels ou autres: les Terre-Neuviens, les chasseurs de phoques, les pêcheurs de homards de la Nouvelle-Écosse, les Premières Nations de la Colombie-Britannique, les chasseurs d'orignaux. Chacun de ces groupes a une culture qui lui est propre, qui fait partie de lui et qui le définit. Cette culture compose le tissu de la vie des communautés et soulève les passions.
La diversité culturelle de notre pays constitue l'une des grandes forces du Canada. Toutes les cultures sont importantes les unes pour les autres et pour les collectivités.
Au Manitoba, je n'ai pas le droit de chasser l'orignal; c'est plutôt un privilège. Notre culture de la chasse n'est pas protégée par la Constitution, contrairement à celle des Métis et des Premières Nations. Il y a toutefois un lien qui nous unit. En tant que chasseurs, nous avons des liens solides. Aussi, c'est en famille que nous chassons, avec nos grands-pères, nos pères, nos mères ou nos soeurs. Nous passons ensemble une semaine en forêt, ce qui nous permet de resserrer nos liens. C'est là que nous réglons parfois nos problèmes familiaux. C'est très important à nos yeux. Cela fait partie de nous et suscite bien des émotions. Des hommes peuvent même se mettre à pleurer. Nous affichons cette culture.
C'est extrêmement important. Ce n'est pas une question d'argent, selon moi, même si c'est important sur le plan économique. Le secteur des pourvoiries occupe une place importante. La chasse nous rapporte beaucoup. Si c'était une entreprise, elle contribuerait largement à l'économie. Cependant, il ne s'agit pas d'argent ni d'économie. C'est une question de culture. C'est ce qui nous définit en tant que peuple. Il s'agit de la signification que cela a pour nous.
Au bout du compte, c'est tout ce que nous avons, alors c'est extrêmement important. On le voit et on le sent dans chaque collectivité. On entend des histoires à propos de la vie de ces gens et de leur communauté. C'est incroyable. C'est une culture riche, profondément enracinée et d'une grande valeur.
C'est très bien. Je vous remercie beaucoup.
Vous avez parlé de certaines choses que le gouvernement fédéral peut faire. Il est extrêmement important que nous travaillions avec nos partenaires. Nous avons participé récemment à une rencontre fédérale-provinciale-territoriale sur la biodiversité. Nous avons reconnu que les frontières n'existent pas pour les animaux et que nous devons travailler globalement à protéger notre biodiversité.
Pourriez-vous nous dire ce que le gouvernement fédéral pourrait faire d'autre pour accroître les efforts en matière de conservation des habitats.
Je crois que créer un comité d'experts comme celui dont M. Boyce a parlé est important. Il faut réunir des gens brillants pour orienter les efforts. C'est important. Il faut aussi faire participer la population locale, les chasseurs et les agriculteurs. Il faut d'excellents chercheurs comme M. Boyce, mais il faut également la contribution de citoyens compétents. Aussi, ultimement, il faut un plan et des investissements. Ces deux éléments sont nécessaires.
J'aimerais d'ailleurs revenir sur les investissements. Lorsqu'il y a des inondations, c'est vous qui fournissez des fonds. C'est vous qui payez la facture, alors vous devez être proactifs. Vous devez investir dans la prévention des inondations, à laquelle les collectivités locales peuvent contribuer. Il faut investir intelligemment. C'est ce qu'il faut faire selon moi.
Il faut investir aussi dans la promotion du plein air auprès des Canadiens. C'est ce que je proposerais également. Je ne parle pas seulement de la chasse, je parle du plein air en général. Il existe de nombreuses façons d'y parvenir. Des petits groupes comme le nôtre, qui comptent de nombreux bénévoles, peuvent y contribuer avec peu de moyens. Il faut penser que la conservation des habitats et les inondations coûtent cher.
Il faut aider des gens comme nous et le personnel du bureau où je travaille à amener les néo-Canadiens et les jeunes à s'intéresser au plein air et à l'environnement et à en faire des environnementalistes. Cela ne coûte pas grand-chose, mais on en tire des bénéfices. Nous investissons toujours dans la conservation des habitats, mais nous investissons peu dans la participation des Canadiens, et je dirais que cela est aussi important sinon davantage.
Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie chacun d'entre vous pour votre contribution.
Je suis tout à fait d'accord avec vous, monsieur Olson. Soit nous payons maintenant, soit nous payons plus tard.
Les Canadiens ne semblent pas s'en rendre compte, et c'est peut-être même le cas du gouvernement. Dans le cas des inondations à Calgary, des inondations répétées au Manitoba ou des inondations dans la région de Don Valley, la facture est très élevée pour le gouvernement et les compagnies d'assurances. Les importants paiements d'assurance entraînent presque inévitablement une hausse des primes. Tout le monde ici qui détient une police d'assurance est touché par cela. Dans le contexte politique actuel, il est très difficile de faire passer ce message.
Comme vous l'avez tous très justement dit, il s'agit d'une politique publique complexe. Si on met en place une mesure, elle a une incidence sur une chose et elle peut avoir des conséquences sur une autre chose. J'aime bien l'idée qu'a proposée M. Boyce de créer un comité d'experts, mais il devient alors très compliqué d'élaborer un plan pour l'infrastructure verte. Autrement dit, aucune infrastructure ne devrait être construite tant que les répercussions sur l'environnement ne sont pas déterminées.
Je présume que vous avez tous les trois réfléchi à cela. Je vais commencer avec M. Olson. Si vous pouviez élaborer un plan pour l'infrastructure verte dans le cadre de ce que vous avez parlé aujourd'hui, à quoi ressemblerait-il? Y a-t-il d'autres pays selon vous qui réussissent bien ou même mieux que nous à cet égard?
Je vais répondre très brièvement, car je crois que M. Scarth et M. Boyce devraient plutôt répondre à cette question. Je vais seulement parler des collectivités locales. Je sais qu'il existe des mécanismes.
Il y a notamment les Services de diversification des modes d'occupation des sols, qu'on désigne par l'acronyme anglais ALUS. Ce qui est fantastique à propos de ce programme, c'est qu'il mise sur la participation de la population locale. C'est l'élément clé. Dans le passé, presque tout venait d'en haut, c'est-à-dire du gouvernement fédéral, par l'entremise d'un règlement, ou bien une importante ONG achetait des terres. On ne mobilisait pas les gens, notamment les agriculteurs.
La capacité des collectivités locales est étonnante. Elles sont capables de recueillir des fonds. Leurs capacités sont étonnantes et elles comptent des gens brillants, bien davantage qu'on a souvent tendance à le croire. On pense plutôt que les idées doivent venir des scientifiques, de personnes qui possèdent un doctorat. Ce n'est pas nécessairement le cas. Les communautés locales ont une très grande capacité.
Le gouvernement fédéral doit penser à une certaine décentralisation. Il y a bien sûr des questions de gouvernance, mais il y a un modèle qui est en train... Il y a des modèles que nous pourrions examiner, mais il est certain que l'argent doit se rendre dans les collectivités locales pour qu'elles puissent s'investir. Il faut les amener à consacrer du temps et de l'énergie ainsi qu'à investir leurs propres fonds.
Je vais vous donner un exemple en particulier. Je ne pense pas que la protection de l'environnement soit nécessairement incompatible avec le développement économique. Je peux vous donner comme exemple le système proposé pour la conservation de l'habitat du caribou en Alberta.
Il existe des cartes qui indiquent la valeur actuelle nette des ressources d'hydrocarbures qui se trouvent sous la surface de la terre en Alberta. On peut ainsi déterminer les endroits où la valeur de ces ressources est tellement élevée qu'il sera probablement impossible d'y protéger l'habitat du caribou. Par contre, il y a des endroits — dans la région des monts Caribou, par exemple, dans le nord, et dans la région du lac Bistcho, dans le nord-ouest — où la valeur actuelle nette des ressources d'hydrocarbures est extrêmement faible. Déterminer les endroits où il sera possible de préserver l'habitat du caribou et accepter que d'autres endroits seront sacrifiés au nom du développement me semble être une bonne stratégie.
Ce n'est pas ce que nous faisons en ce moment en Alberta. Nous essayons plutôt de sauver tous les troupeaux. Aucun de ces endroits n'est protégé contre le développement industriel. Le développement s'effectue n'importe comment partout dans la province.
J'ajouterai que j'exhorte le comité à ne pas envisager de la même façon la stratégie visant les terres privées et la stratégie concernant les terres publiques. Je pense que les modèles qui concernent la stratégie pour les terres privées sont liés à l'infrastructure. Vous le savez déjà. Je suis tout à fait d'accord avec M. Boyce à propos de la planification de l'utilisation des terres privées et publiques.
Je vous remercie.
Je vous remercie.
Monsieur Scarth, je vous ai déjà entendu vous décrire comme un avocat en voie de guérison, alors je vais parler de législation.
Le 24 novembre dernier, tous les députés ont reçu une lettre signée par un certain nombre de groupes, notamment Delta Waterfowl et la Manitoba Wildlife Federation, au sujet du projet de loi C-592, qui est un projet de loi d'initiative parlementaire présenté par la députée néo-démocrate de Notre-Dame-de-Grâce—Lachine. Il s'agit d'une mesure législative qui vise à modifier le Code criminel en ce qui concerne la cruauté envers les animaux.
Dans la lettre que nous avons reçue, il est écrit:
Le projet de loi C-592 reprend le même libellé qui a fait en sorte que tous les autres projets de loi précédents ont été rejetés.
On fait référence ici aux autres projets de loi concernant les droits des animaux.
S'il est adopté, ce projet de loi criminaliserait involontairement toutes sortes de pratiques acceptées, traditionnelles et nécessaires, notamment la production alimentaire, la chasse, la pêche, le piégeage, la recherche sur des animaux, des sports et loisirs et la propriété privée.
Monsieur Scarth, pouvez-vous nous parler des répercussions juridiques d'un tel projet de loi, surtout si un juge décide de l'interpréter d'une manière très extrême? Quelles seraient les conséquences sur la chasse et le piégeage?
Je vais répondre à la deuxième partie de la question en premier. Les effets pourraient être dévastateurs. Cette mesure est comme celles auxquelles j'ai fait référence tout à l'heure, dont les conséquences involontaires ou volontaires sur la chasse, la pêche et le piégeage seraient dévastatrices du point de vue du maintien de ces activités. Elle envoie le message aux adeptes de ces activités, qui investissent dans la conservation de l'environnement, que ces pratiques ne seront plus tolérées.
Je crois que, sur le plan juridique, on peut franchir le seuil entre les droits de propriété et les activités criminelles, comme cela a été le cas avec le registre des armes à feu, c'est-à-dire qu'un chasseur respectueux de la loi pouvait être accusé de se livrer à une activité criminelle. J'exhorte le comité à réfléchir aux effets des politiques sur la communauté des chasseurs, des pêcheurs à la ligne et des trappeurs, car elles peuvent avoir des conséquences involontaires et négatives sur un secteur qui investit massivement dans la conservation de l'environnement.
C'est intéressant. Lorsque j'ai fait mes propres recherches sur ce projet de loi, parce qu'il porte sur la question... le NPD a présenté deux autres projets de loi et les libéraux en ont également deux qui sont dans la même veine. Au début des années 2000, les libéraux ont aussi présenté le projet de loi C-15B.
Tous ces projets de loi portent sur la question de savoir si les animaux ressentent la douleur. Bien sûr, les mammifères peuvent ressentir la douleur, mais pour ce qui est des invertébrés — ce projet de loi en particulier concerne les invertébrés — si on mène des recherches pour savoir si un homard ou un poisson au bout d'un hameçon ressent de la douleur, on peut dire honnêtement que rien n'est clair.
Je le répète, si un juge interprète ce projet de loi... heureusement, il ne sera jamais adopté, j'en suis sûr. Il pourrait vraiment mettre en péril ces activités auxquelles nous tenons.
Pouvez-vous en dire un peu plus long, monsieur Scarth, au sujet des conséquences involontaires des projets de loi comme le projet de loi C-592 et du registre des armes d'épaule sur les chasseurs et les trappeurs et leurs très importantes activités de conservation?
Nous avons parlé plus tôt du symbole que représentent la GRC et le registre des armes à feu. Ce registre était devenu le cri de ralliement des chasseurs, non seulement parce qu'il imposait un fardeau administratif aux chasseurs, mais aussi à cause du message négatif qu'il envoyait, à savoir que cette activité n'était pas valorisée ou appropriée.
Je pense que c'est pour cette raison que la réaction au registre des armes d'épaule a été aussi vive dans la majeure partie des régions rurales du Manitoba et dans les collectivités autochtones. En mettant en place ce registre, on laissait entendre que cette activité était choquante et devait être réglementée. On s'est très peu préoccupé des investissements et du désir de recruter davantage de chasseurs, de pêcheurs et d'autres personnes pour profiter des ressources fauniques de notre pays. Je crois que la passion qui s'est manifestée est celle dont nous avons parlé ce matin.
Je vous remercie, monsieur le président.
Monsieur Boyce, vous avez parlé un peu des puits de gaz et de pétrole en Alberta et de leur incidence. Il y a quelques années, notre comité s'est déplacé dans le cadre d'une de ses études. Au pied des montagnes en Alberta, nous avons eu l'occasion de voir — grâce à l'organisme Conservation de la nature Canada, auquel nous nous sommes associés pour financer ce type de projets afin qu'ils puissent se poursuivre — comment le secteur de l'élevage bovin peut cohabiter avec l'industrie pétrolière et gazière. Nous avons vu certains puits et pipelines et nous avons constaté que l'industrie travaille avec le secteur de l'élevage bovin pour s'assurer que ses activités permettent de préserver la faune et les habitats pour l'avenir.
Je présume que vous êtes au courant de ce genre de projets. Avez-vous constaté leur réussite?
Tout à fait. En fait, un de mes projets de recherche sur lequel je travaille depuis plusieurs années porte sur la gestion de l'accès. Des projets ont été réalisés au pied des pentes de l'est des montagnes de l'Alberta. Nous avons travaillé avec Shell et diverses sociétés forestières pour installer des barrières sur des routes — en particulier les nouvelles routes qui mènent aux nouveaux puits et aux nouvelles zones de coupes à blanc — en vue de réduire la circulation de loisir sur ces routes. Les barrières sont étonnamment efficaces pour préserver la faune. Des wapitis et des grizzlis utilisent ces endroits comme s'il n'y avait pas de route. La circulation sur les routes est en fait le principal dérangement.
La gestion de l'accès est un moyen très efficace de permettre le développement sur les terres publiques tout en assurant la protection de la faune. Il est certain qu'il n'y a pas nécessairement des conséquences négatives si le développement est effectué intelligemment.
Je vous remercie.
Monsieur Olson, il y a quelques semaines, j'ai eu le plaisir d'assister au souper annuel de la Manitoba Wildlife Federation, et j'ai été agréablement surpris d'apprendre, mais peut-être que j'aurais dû le savoir, que le président de cette fédération habite dans ma circonscription, plus précisément à Winnipeg. Je pense que cela en dit long sur la participation des collectivités urbaines. Dans quelle mesure est-ce important selon vous que le président, Brian Strauman, vive dans un milieu urbain et qu'il comprenne le lien entre...?
Il semble que cela peut aider les citadins à mieux comprendre la nécessité de protéger l'environnement et à mieux comprendre la chasse et le piégeage ainsi que leurs effets positifs.
Je suis d'accord. Je crois que c'est très utile que notre président soit de Winnipeg; c'est très important. Ce qui fait la force de notre conseil d'administration composé de 10 citoyens canadiens, c'est que ces gens sont des Canadiens ordinaires comme moi et que la moitié d'entre eux viennent de la ville et l'autre moitié de la campagne. Il est intéressant d'entendre les points de vue des deux. Les agriculteurs parlent de certaines choses, et les citadins demandent pourquoi ils assèchent les terres humides. Il y a un dialogue entre les deux.
C'est donc fantastique que notre président soit un citadin. Cela nous permet de comprendre le recrutement à Winnipeg, mais ce qui est merveilleux, c'est que notre conseil d'administration se compose de Manitobains des régions rurales et des milieux urbains. Ils peuvent établir des liens, discuter et se comprendre. Ils comprennent tous que les agriculteurs doivent protéger l'environnement, qu'ils ont un rôle à jouer à cet égard, car, en tant que Canadiens, ils ont le devoir de le faire. De leur côté, les gens de Winnipeg comme Brian comprennent qu'ils doivent eux aussi faire leur part. La responsabilité doit être partagée également.
Il est donc merveilleux d'avoir les deux.
Durant votre exposé, vous avez parlé à quelques reprises de la mobilisation. J'espère que vous allez partir aujourd'hui avec le sentiment que la mobilisation va s'accroître avec le temps, car vous avez raison. Il est essentiel que les chasseurs, les trappeurs et les pêcheurs contribuent à la protection de l'environnement. Vous avez tous parlé de ce que font les chasseurs, les trappeurs et les pêcheurs pour préserver l'environnement. Comme on le mentionne dans l'article dont M. Scarth a parlé, ils sont les superstars de la conservation de l'environnement. Ce sont eux qui font le travail sur le terrain, et je pense que nous devons continuer de les faire participer de plus près.
Je vous remercie pour le temps que vous nous avez accordé aujourd'hui.
Je vous remercie beaucoup, monsieur Toet.
En ce qui me concerne, j'aimerais dire que nous avons entendu bien des témoignages ces dernières semaines, mais c'est la première fois qu'on parle clairement, comme vous l'avez fait monsieur Scarth, à la page 3 de votre exposé, de la collaboration des pêcheurs et des chasseurs avec les agriculteurs par l'entremise des Services de diversification des modes d'occupation des sols. Je crois que c'est ce qui a été le plus clairement exprimé aujourd'hui, et il m'a semblé très important de le souligner.
Ceci étant dit, nous voulons remercier chacun d'entre vous pour la passion que vous manifestez et pour avoir pris le temps de comparaître devant nous aujourd'hui. Nous nous excusons auprès de nos témoins à Winnipeg pour ne pas avoir été en mesure d'établir la connexion lors de notre dernière réunion.
La séance est levée.
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