Passer au contenu
;

NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain







CANADA

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 016 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 18 octobre 2006

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, je déclare ouverte cette 16e séance du Comité permanent de la défense nationale, conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le 16 mai dernier qui, elle, concerne l'étude de la situation en Afghanistan.
    Je vais d'ailleurs rappeler le contenu de cette motion au Comité:

Que le Comité étudie les divers aspects de la mission des troupes canadiennes en Afghanistan, tels que sa durée, l'état des troupes et des équipements, le rapport entre le volet de la mission directement lié aux opérations de combat et celui qui vise à contribuer à la reconstruction du pays ainsi que les critères d'évaluation qui permettront d'évaluer le succès de cette mission, le tout afin de déterminer s'il est possible de la mener à bien tout en assurant les autres obligations du Canada sur la scène internationale.
    Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui l'honorable Gordon O'Connor, ministre de la Défense nationale, qui est accompagné du chef d'état-major de la Défense, le général Hillier ainsi que du sous-ministre à la Défense, M. Elcock.
    Comme à l'habitude, monsieur le ministre, vous aurez du temps pour vos remarques liminaires, après quoi nous passerons à une première série de questions de 10 minutes suivant un ordre convenu d'avance. Je vais vous céder la parole pour vos remarques liminaires.
    Monsieur le ministre, c'est à vous.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je suis heureux de me retrouver de nouveau parmi vous, dans la « cellule de guerre », nom qui est je crois tout à fait approprié pour un comité de la défense.
    C'est la deuxième fois que je comparais devant vous en qualité de ministre de la Défense nationale et je me réjouis d'avoir l'occasion de faire le point sur nos progrès dans le cadre de cette mission importante.
    Si vous le voulez bien, commençons par parler de l'importance que cette mission revêt pour le Canada. Les raisons n'ont pas changé depuis le début de la mission. Le 11 septembre 2001, des terroristes ont provoqué l'écrasement de quatre avions, ils ont tué quelque 3 000 personnes dont 24 Canadiens. Ce faisant, ils ont changé irrémédiablement notre façon de percevoir le monde. Les attaques terroristes qui ont eu lieu par la suite nous ont rappelé le genre de menaces qui pèse sur notre société.
    Nous nous sentons en sécurité au Canada, mais nous ne devons pas oublier à qui nous le devons. Les Forces canadiennes se trouvent en Afghanistan où elles effectuent des opérations militaires dont le but est justement de protéger les intérêts du Canada. Elles sont là-bas pour débusquer ceux qui ont abrité et appuyé les auteurs des attaques du 11 septembre. Elles travaillent sur le terrain pour nous protéger contre d'éventuelles attaques violentes qui seraient lancées sur notre territoire.
    Et puis, comme vous le savez fort bien, la mission afghane va bien au-delà de ça. Elle vise aussi à permettre au Canada de faire face à ses responsabilités internationales. Nous ne sommes pas le seul pays menacé par le terrorisme, puisqu'il s'agit d'une menace mondiale. Les pays de l'OTAN travaillent côte-à-côte pour déraciner le terrorisme et le Canada joue un rôle de premier plan à cet égard.
    C'est avec plaisir que j'ai constaté, lors d'une récente rencontre des ministres de la défense de l'OTAN, que la Pologne s'est engagé à accroître son niveau de contribution en Afghanistan. J'ai encouragé d'autres membres de l'OTAN à faire davantage dans le sud de l'Afghanistan et à assumer une partie de notre fardeau. Nous nous attendons aussi à ce que nos alliés engagent davantage de soldats et lèvent les restrictions qu'ils ont imposées sur l'utilisation de leurs troupes déjà sur place.
    De plus, nous sommes en Afghanistan parce qu'il nous incombe, à nous qui appartenons à une nation riche et prospère, à une nation libre, d'aider celles et ceux qui, de par le monde, ne bénéficient pas des mêmes avantages que nous. C'est notre devoir de membres de l'Organisation des Nations Unies, du G8 et de l'OTAN. C'est notre devoir parce que notre gouvernement veut redonner au Canada sa réputation de chef de file international et de partenaire fiable dans la défense des libertés et de la démocratie dans le monde.
(1535)

[Français]

    Les Canadiens ont à coeur de tendre une main secourable quand on leur en fait la demande. Cette tradition existe depuis des générations.

[Traduction]

    Nous sommes en Afghanistan à l'invitation du gouvernement afghan. La vie est rude pour un petit afghan, et ce dès la naissance. Les Afghans sont aux prises avec des problèmes multiples, comme les systèmes de soins médicaux qui sont inadéquats, les logements qui sont inadaptés, les structures d'enseignement qui sont lamentables, la violence qui est institutionnalisée, ainsi que l'injustice et la pauvreté. Ce ne sont là que quelques-uns des défis auxquels presque tous les enfants afghans sont confrontés. Et elle est là, mesdames et messieurs, la grande raison pour laquelle nous sommes en Afghanistan.
    La mission n'est pas facile. Je sais le prix que les Canadiens ont déjà dû payer. Je me suis entretenu avec les familles des soldats tombés au combat et j'ai regardé dans les yeux ceux qui les connaissaient et qui les aimaient. Il est donc important, à l'heure où nous apprenons que cette guerre vient de faire une nouvelle victime, de nous rappeler pourquoi le Canada est en train de faire de tels sacrifices. Nous ne pouvons pas permettre aux Talibans de retrouver leur dominance, de faire de nouveau main basse sur l'Afghanistan, de réinstaurer leur régime de terreur et de tyrannie, d'afficher leur manque de respect pour les droits de la personne, de punir et de terroriser leurs compatriotes, d'assassiner des innocents, et d'abriter ceux qui pourraient nous menacer et menacer nos familles, au Canada et à l'étranger.

[Français]

    Mais comme le premier ministre l'a signalé dans son allocution aux Nations Unies, le succès en Afghanistan ne peut être assuré par les seuls moyens militaires. La reconstruction et le développement sont nos principaux objectifs en Afghanistan et ils demeurent une priorité absolue pour le Canada.
    C'est pourquoi les Forces canadiennes et leurs collègues des autres ministères adoptent une approche pangouvernementale pour aider l'Afghanistan à se rebâtir.
    Ils fourniraient aux Afghans l'occasion de rebâtir le pays dans le cadre de la Stratégie pour le développement national de l'Afghanistan, et ce, en collaboration avec la communauté internationale.

[Traduction]

    Notre armée appuie tous ces objectifs en instaurant un milieu sûr susceptible de favoriser l'accélération des programmes de développement et d'aide, éléments sine qua non d'une stabilité véritable et durable. Comme l'a souligné le président Hamid Karzai lors de sa visite au Canada le mois dernier, aucun pays ne devient démocratique du jour au lendemain ou après une élection ou deux. Ainsi, comme je l'ai dit à de nombreuses reprises, nous saurons que nous avons réussi en Afghanistan quand ce pays et son gouvernement connaîtront la stabilité, quand les terroristes et leurs réseaux d'appui locaux auront été écrasés et qu'ils ne pourront plus trouver refuge sur place, et quand les forces de sécurité afghanes seront bien établies et qu'elles évolueront sous le contrôle ferme et légitime du gouvernement de l'Afghanistan.
    Une fois qu'il sera évident que tous ces facteurs sont en place de façon durable, nous saurons que nous avons atteint notre objectif. Il demeure que nous avons déjà réalisé des progrès sensibles en Afghanistan. Je sais qu'on vous a parlé de quelques-unes de nos réussites les plus importantes, les mieux connues. L'Afghanistan a tenu sa première élection pluraliste, des millions de réfugiés sont rentrés au pays, les enfants ont commencé à retourner à l'école, les insurgés ont été désarmés et démobilisés et l'armée nationale ainsi que la police nationale afghanes ont été mises sur pied.
    Je tiens, en outre, à informer les Canadiens à propos de nos succès les plus récents. Mesdames et messieurs, malgré les très grands défis auxquels nous sommes confrontés, nous avons réalisé de véritables gains au cours des six derniers mois. Nos progrès dans la région de Kandahar ont permis de jeter les bases à une amélioration continue de la situation. L'opération Méduse n'est qu'une de nos récentes réussites. L'été dernier, les Forces canadiennes ont assuré la sécurité de nos alliés, soit les Britanniques et les Hollandais, pour leur permettre de se déployer dans le sud de l'Afghanistan. Sans l'appui du Canada, il n'aurait pas été possible d'étendre aussi vite que la présence de l'OTAN dans le sud du pays.
    En juillet, sous la tutelle de l'OTAN, les Forces canadiennes ont assumé le commandement des opérations dans le sud du pays et nous effectuons actuellement des missions de patrouille et de combat dans des secteurs qui, auparavant, étaient considérés comme des sanctuaires talibans. Tous les jours, les hommes et les femmes qui servent là-bas sous le drapeau canadien rencontrent des Afghans ordinaires, travailleurs et pacifiques, ils participent à des rencontres avec des aînés, ils assurent l'acheminement de l'aide au développement et font une véritable différence dans le quotidien des Afghans. Nous aidons ce pays à rebâtir son armée grâce en étant présents au centre de formation nationale et en participant à des opérations conjointes avec des unités afghanes de l'armée et de la police nationales.
    Tout cela nous permet d'étayer la capacité interne de l'Afghanistan et de nous rapprocher de notre objectif ultime qui est d'instaurer l'indépendance et la stabilité du pays. À la faveur de nos opérations dans les régions de Pashmul et de Panjwai, nous avons semé les graines du développement. Nous sommes en train de créer des zones de développement afghanes dans des régions stratégiques, sorte de poches caractérisées par la stabilité et la reconstruction d'où la relance pourra faire tache d'huile.
    Il demeure que le changement prend du temps. Ici, au Canada, nous n'apprécions pas toujours les répercussions de ce qui se passe aussi loin de chez nous. Nous passons à côté des petites mesures, pourtant très importantes, qui sont prises au quotidien, des projets comme le réseau d'adduction d'eau que l'équipe canadienne provinciale de reconstruction a bâti à l'Université de Kandahar, des retombées positives, pour un hôpital afghan, d'un simple don canadien de fournitures médicales et de literie, ou encore des séances destinées à favoriser le mieux-être de la femme — mesure concrète que les Canadiens ont prise pour améliorer la qualité de vie des Afghanes. Tous ces projets, qui n'ont rien d'extraordinaires au Canada, nous valent la gratitude éternelle du peuple afghan.
    J'ai vu l'excellent travail des hommes et des femmes qui portent notre uniforme et de leurs homologues civils, et j'ai vu les résultats auxquels ils parviennent, mais les Canadiens ne font pas que prendre part à des opérations de combat. Les Forces canadiennes sont aussi là-bas pour contribuer à instaurer la stabilité et la confiance grâce auxquelles les Talibans ne pourront pas regagner leur mainmise.
    Je me trouvais en Afghanistan il y a deux mois et j'ai vu, de mes yeux, ce que nos militaires y font. Je voulais m'entretenir avec eux, sur le terrain, pour parler des défis auxquels ils sont confrontés. Au terme de ma visite, j'ai déclaré que le Canada pouvait et devait faire plus, et j'ai voulu savoir comment nous pourrions appuyer davantage nos forces armées. Ils m'ont répondu: en nous donnant plus de matériel et de personnel.
    Afin d'assurer la pérennité de nos efforts de reconstruction, notre gouvernement a immédiatement entrepris de renforcer notre présence militaire en Afghanistan. Nous sommes en train de déployer une compagnie d'infanterie supplémentaire pour assurer la protection de l'équipe provinciale de reconstruction et nous augmentons le nombre de sapeurs pour s'occuper des projets de construction. De plus, nous avons décidé d'envoyer un escadron de chars d'assaut et des véhicules blindés de dépannage pour apporter un soutien à notre groupement tactique. Nous fournissons aussi à nos forces une capacité antimortiers, notamment un système radar de détection des armes ennemies. Mon gouvernement veille à ce que nos troupes disposent de tout ce dont elles ont besoin pour faire leur travail et il s'est engagé à déployer quelque 450 soldats de plus dans la région.
    Mesdames et messieurs, le Canada sait, depuis le début, que cette mission allait être difficile, mais les Forces canadiennes sont parmi les meilleures du monde et elles réalisent des progrès dans l'une des régions de l'Afghanistan où la situation est particulièrement volatile. Nous sommes fiers de nos soldats.
(1540)
    Mesdames et messieurs, si le Canada et ses partenaires de la coalition abandonnaient maintenant l'Afghanistan, les Talibans reprendraient le pouvoir. Ils interdiraient de nouveaux aux femmes de travailler, laissant ainsi des milliers de familles sans revenu. Ils fermeraient les écoles et les collèges de jeunes filles. Ils détruiraient de façon inconsidérée les institutions culturelles et les monuments. Le stade de football servirait de nouveau aux bastonnades et aux exécutions hebdomadaires.
    Nous serions transformés en spectateurs honteux de l'exécution sommaire de civils afghans, de l'incendie des maisons et de la destruction de la propriété privée. Nous serions condamnés à attendre dans la peur qu'Al-Qaïda s'installe et se sente de nouveau chez lui dans ce pays pour en faire une base à partir de laquelle il pourrait de nouveau terroriser le monde entier.

[Français]

    Monsieur le président et membres du comité, il ne fait aucun doute que le travail accompli en Afghanistan par nos soldats, marins, hommes et femmes de la force aérienne, est d'intérêt national.
    Il ne fait aucun doute que c'est ce que nous devons faire. Leurs efforts aident à protéger les Canadiens contre le terrorisme. De plus, les militaires aident le Canada à assumer ses responsabilités sur la scène internationale. Ils aident à améliorer la vie des gens qui se battent pour accéder aux droits et privilèges que de nombreux Canadiens tiennent pour acquis.
    C'est pour ces raisons que ce gouvernement est déterminé à poursuivre cette mission jusqu'à la fin.

[Traduction]

    Je serai heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Nous allons commencer notre première série de 10 minutes par M. Dosanjh.
    Merci, monsieur le ministre et merci à vous général Hillier de vous être rendus à notre invitation. Il s'agit, à l'évidence, d'une question importante et nous appuyons tous nos soldats ainsi que l'objet de la mission.
    J'ai deux ou trois questions à vous poser et j'espère que nous pourrons en traiter dans les 10 minutes qui me sont accordées.
    Monsieur le ministre, au mois de mai, le gouvernement annonçait son intention de tenir un débat et un vote en Chambre sur la prolongation de la mission en Afghanistan. Toutefois, et vous en conviendrez avec moi, après avoir pris un tel engagement, il aurait normalement dû fournir aux Canadiens et aux parlementaires le genre de renseignements qui est nécessaire pour décider de prolonger ou non la mission de deux ans et il aurait dû, pour le moins, soumettre cette proposition à la Chambre des communes.
    On peut supposer que le gouvernement du Canada avait accès à des renseignements du MDN, des Affaires étrangères, de l'OTAN et de ses alliés au sujet de la situation en Afghanistan à l'époque, informations qui devaient porter sur des aspects comme: l'ampleur de la remontée des Talibans; l'afflux de Talibans en provenance du Pakistan; les sanctuaires talibans au Pakistan; les problèmes de corruption au sein du gouvernement afghan et leur impact sur la reconstruction et le développement, de même que sur l'instruction des forces armées; l'absence d'engagements des autres alliés de l'OTAN quant au nombre de soldats déployés sur le terrain et même les importantes réserves formulées par ces mêmes alliés; l'absence de reconstruction à cette période et, bien sûr, la gravité des problèmes que représente la culture du pavot et tout ce qui en découle.
    Si je me souviens bien, monsieur le ministre, le gouvernement ne nous a absolument pas parlé de ces questions-là durant le débat, sur la foi de renseignements dont il aurait disposé à cet égard.
    Le gouvernement persiste et signe dans sa propension à ne pas divulguer l'information. Votre ministère a même refusé à notre comité de lui faire bénéficier de séances d'information bihebdomadaires. Vos fonctionnaires, qui relèvent donc directement de vous, nous ont dit d'aller nous faire voir ailleurs, ce que je trouve inacceptable dans le cas d'un comité du Parlement. C'est d'ailleurs même répréhensible.
    Mais revenons-en à la question qui nous préoccupe. En précipitant la décision de prolonger cette mission, après un débat suivi d'un vote, sans dire aux Canadiennes et aux Canadiens ce qu'il savait ou aurait dû savoir, ne pensez-vous pas que le gouvernement a en fait mystifié les Canadiens?
(1545)
    Je vais essayer de répondre aussi simplement que possible à cette question complexe. Il est vrai que nous avons tenu un débat, en mai dernier, au sujet de la prolongation de la mission en Afghanistan et qu'à cette occasion vous avez eu la possibilité de poser des questions et d'obtenir les réponses que vous recherchiez. Permettez-moi toutefois de vous rappeler que le débat du mois de mai n'est intervenu que trois mois après que les Libéraux eurent pris un engagement envers l'Afghanistan. Ce sont eux, en effet, qui ont décidé de déployer un groupement tactique et l'EPR dans la région de Kandahar, à compter de février. Que savaient-ils les Libéraux alors? Est-ce que le gouvernement dont vous faisiez alors parti savait tout cela au sujet des Talibans et de tout ce dont vous venez de me parler?
    Durant ces trois mois, rien n'a essentiellement changé entre ce que votre gouvernement savait et ce que notre gouvernement a appris. Cela étant, je ne pense pas que nous n'avons mystifié personne.
    Je vais essayer de répondre à votre autre question, parce que vous m'avez en fait posé plusieurs questions en une. Vous pouvez faire venir devant votre comité n'importe quel fonctionnaire de mon ministère et de tout autre ministère d'ailleurs qui aurait un intérêt dans les questions de défense. Il vous suffit de demander. Ce faisant, vous ne manquerez jamais d'informations. Le chef d'état-major, le sous-ministre, moi-même et n'importe quel employé de notre ministère sont prêts à venir témoigner devant votre comité et à ne rien cacher. Les fonctionnaires de mon ministère vous fourniront tous les renseignements dont vous avez besoin.
    Monsieur le ministre, ne retournez pas l'argument parce qu'il se trouve qu'à l'époque vous saviez que les Talibans étaient en train de reprendre du poil de la bête. Vous n'en avez pas parlé à la Chambre. Peu importe que je l'aie su ou pas, là n'est pas la question. La question c'est de savoir si les Canadiens étaient au courant. Il est possible que des gens au cabinet le savaient. Mais les Canadiens, eux, le savaient-ils? Le ministre de la Défense qui vous a précédé a sillonné le pays pour prononcer des discours sur le genre de problèmes auxquels nous risquions de nous heurter en Afghanistan... mais vous, vous n'avez rien révélé.
    Passons à la question suivante qui concerne les Talibans. Nous avons appris, d'après ses récentes déclarations publiques, que le général Hillier a parlé ouvertement des négociations suivies que mène le gouvernement afghan avec les Talibans, notamment avec leurs chefs. Quand on vous a récemment posé la question à ce sujet, monsieur, vous avez admis ne pas être au courant de l'état des négociations et avez laissé entendre que vous n'aviez pas à être au courant parce que — et je vous cite — il s'agissait d'une affaire d'insurrection afghano-afghane.
    Monsieur O'Connor, en tant qu'ancien général, vous savez à quel point nous sommes engagés en Afghanistan. Je suis troublé par le fait que vous ayez déclaré ne pas être au courant des discussions avec les insurgés afghans — d'ailleurs, le général Hillier a été beaucoup plus ouvert que vous en révélant que les Afghans négociaient avec les chefs talibans dont il dit que la plupart sont des modérés — parce que vous-même et le Premier ministre êtes les régisseurs de cette mission.
    Nous devons savoir plusieurs choses. Quelle est l'ampleur et l'étendue des négociations que le gouvernement afghan a entreprises avec les Talibans? Avec qui négocient-ils? Négocient-ils avec ceux-là même qui voulaient commettre des meurtres hier ou qui pourraient vouloir le faire demain?
    L'autre question importante, c'est que la définition de « Taliban » évolue. Nous ne savons pas à combien de combattants talibans nous avons affaire à Kandahar ou dans le pays en général. J'aimerais savoir comment vous définissez les talibans, aujourd'hui en Afghanistan, et combien de rebelles talibans sont opposés à nos 2 000 soldats.
(1550)
    Monsieur le ministre, il est reste un peu moins de trois minutes.
    Eh bien, il s'agit-là, encore une fois, d'une question multiple.
    Je l'ai déclaré au Parlement, et je vais me répéter, qu'il appartient au gouvernement afghan de négocier avec l'insurrection. Si le gouvernement négocie, c'est que cela le concerne. Il n'appartient pas au Canada de participer aux négociations avec les insurgés.
    Le Canada fait partie de l'OTAN, comme la bonne trentaine de pays alliés qui ont déployé des troupes en Afghanistan. Le commandant et le quartier général de la FIAS traitent régulièrement avec le gouvernement afghan et c'est à ces gens-là qu'il appartient de gérer toute la question de l'insurrection, en liaison avec le gouvernement de Kaboul. Les responsables de la FIAS sont sans doute en communication avec le président Karzai et avec ses ministres pour parler des négociations, s'il y a de telles négociations. Quoi qu'il en soit, il ni au gouvernement du Canada ni aux militaires canadiens de négocier avec les Talibans. Nous avons des responsabilités très claires et nous nous limitons à notre mandat.
    Quant à savoir combien de Talibans se trouvent sur le terrain, je vais demander au général Hillier d'essayer de vous répondre et de vous donner éventuellement d'autres détails au sujet des Talibans.
    Monsieur le ministre, je dois préciser d'abord que les négociations ou plutôt l'invitation faite aux Talibans de changer de camp — je n'ai jamais déclaré que qui que ce soit était en train de négocier avec les Talibans. Négocier avec eux présupposerait que l'on est prêt à accepter certaines de leurs revendications et peut-être même à leur remettre le sud de l'Afghanistan. À ma connaissance, rien de tel ne se produit, du moins pas en ce qui concerne le gouvernement de l'Afghanistan.
    Je parlais en fait d'un programme du gouvernement afghan qui consiste à instaurer la paix par le truchement de la sécurité et donc à inciter les gens à quitter les Talibans pour adhérer au processus politique et s'exprimer au Parlement plutôt que de faire parler les armes à Kandahar pour parvenir à leurs fins. Ce programme a déjà donné des résultats et nous sommes quasiment sur le point d'assister à un renversement de situation, ce qui est tout à fait intéressant pour l'Afghanistan.
    Pour définir les Talibans, nous nous appuyons sur nos sources de renseignements. Nous savons qui sont leurs commandants et nous savons qui ils sont; nous savons quelles unités ils ont, et nous savons où ils évoluent. Dans le sud de la région de Kandahar, les Talibans se distinguent très nettement des autres groupes présents dans le secteur. D'après tous ces renseignements dont nous disposons, en collaboration avec les Afghans et avec la communauté internationale, il ne fait aucun doute que nous sommes attaqués par des Talibans. Quant à leurs nombres, ils varient dans le sud du pays. Je ne cherche pas ici à éviter votre question, mais les nombres varient. Ils varient parce que les Talibans concentrent parfois leurs efforts sur la province d'Helmand et, parfois, sur la région de Kandahar.
    Pendant l'opération Méduse dans la région de Panjwai, nous avons dénombré jusqu'à 1 000 combattants talibans. Ils sont parvenus à augmenter leurs effectifs en contraignant de jeunes hommes de la région — sans emploi, qui craignent les Talibans et qui préféreraient ne pas les voir sur place — à s'armer et, parfois, à combattre à leur côté. Nous croyons qu'ils étaient donc plus de 1 000 dans le sud du pays, dans notre secteur de responsabilité. Combien d'entre eux sont des combattants acharnés? C'est impossible à dire.
    En réalité, nous essayons de mettre la main sur leurs chefs, sur ceux qui les dirigent, qui les organisent, qui leur procurent de l'argent, des armes et des munitions et qui leur ordonnent, par-dessus tout, de tuer d'autres Afghans et d'essayer de tuer nos militaires.
(1555)
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Bachand pour 10 minutes, puis ce sera autour de Mme Black.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Je souhaite la bienvenue à nos visiteurs.
    Monsieur le président, vous avez commencé la réunion en faisant la lecture de la motion que le Bloc québécois avait déposée le 16 mai, qui portait exactement sur la durée, l'équipement, etc. Cependant, vous n'avez pas fait mention de la motion que le Bloc québécois a déposé le 4 octobre. On demandait justement des briefings toutes les deux semaines.
    En effet, nous nous attendions à ce que toutes les deux semaines, un haut fonctionnaire du ministère de la Défense nationale vienne nous dire où sont rendues les troupes, ce qu'on entend faire, ce qu'on a fait la semaine dernière et ce qu'on pourra probablement faire la semaine prochaine. Toutefois, ce n'est pas ce que le ministère nous a répondu.
    Je veux rappeler les arguments qui ont concouru à la prise de position du comité relativement à la motion du briefing. Voici les arguments: les Canadiens n'ont pas d'information de leur gouvernement au moment où l'on se parle; les Québécois n'ont pas d'information du gouvernement fédéral sur ce qui se passe en Afghanistan; les membres du Parlement n'ont aucune information sur ce qui se passe actuellement en Afghanistan; et pire encore, les membres du Comité permanent de la défense nationale n'ont aucune information sur ce qui se passe actuellement.
     On aura beau nous dire que le lieutenant-général Gauthier viendra nous voir et que le brigadier-général Benjamin est déjà venu, il reste que ces derniers sont dans leurs aires de compétence et ils n'en sortent pas. Par conséquent, nous n'avons pas de briefing lorsque vient le général Benjamin, puisqu'il ne fait que parler alors des dispositions prises pour ne pas manquer de munitions, de nourriture, de ceci ou de cela.
    Le général Gauthier, lui, viendrait nous présenter les dispositions prises pour augmenter les troupes et pour ajouter peut-être une infanterie ou des tanks pour telle ou telle autre raison. Toutefois, ce n'est pas ce que le comité veut savoir; il veut savoir ce qui se passe. Étant donné que ce gouvernement a toujours prôné la transparence, ce type de réponse est très décevante. Il s'agit là de ma première question.
     Avant que vous me répondiez, monsieur le ministre, je tiens à vous dire que si nous perdons la bataille de l'information au Canada, nous perdrons la bataille en Afghanistan. Cela s'est toujours déroulé de la même façon. La bataille au Vietnam a été perdue en territoire américain, et non au Vietnam. C'est la même chose pour nous, puisque nous nous dirigeons maintenant dans la même direction. C'est pour cette raison qu'avec la responsabilité qui nous incombe, nous voulons avoir ce type d'information. Je ne vois pas pourquoi vous voulez nous en priver.
    Monsieur le ministre, avez-vous donné votre accord pour garder dans l'ignorance le Comité permanent de la défense nationale?
    Êtes-vous lié à la décision de nous envoyer seulement visiter des bases ou de nous faire écouter des généraux qui viendront une fois de temps à autre?
    Avez-vous personnellement pris cette décision, ou sont-ce les fonctionnaires de votre ministère qui ont pris cette décision?

[Traduction]

    Je vous en prie, monsieur le ministre.
    Merci beaucoup.
    J'ai vu cette demande et j'ai rendu cette décision parce que J'ai cru comprendre que vouliez obtenir des précisions sur nos plans. Or, vous ne saurez jamais ce qui se prépare, parce que nous sommes dans le cadre d'opérations militaires. Je ne vais certainement pas faire courir des risques à nos soldats en Afghanistan en fournissant des informations privilégiées à ce comité sur ce qui va se passer dans la région de Kandahar.
    En revanche, vous pourrez faire venir n'importe quand des fonctionnaires de la Défense et des officiers pour vous expliquer ce s'est passé ou donner des précisions sur ce que fait le ministère de la Défense. Toutefois, je ne viendrai jamais ici, et personne de chez moi ne viendra jamais ici pour vous dire ce qui va se passer la semaine prochaine ou la semaine suivante à Kandahar.

[Français]

    Monsieur le président, ce n'est pas ce que dit la résolution. Elle dit que le comité se fera instruire toutes les deux semaines quant à l'état et à l'évolution de l'intervention.
    Je comprends qu'on ne veuille pas mettre les militaires en danger en nous disant une semaine d'avance, peut-être devant un parterre bondé de journalistes, qu'on sera à tel endroit et qu'on y mènera une opération secrète. Je sais que vous ne pouvez pas le faire. Par contre, toutes les deux semaines, vous pourriez nous renseigner sur l'évolution de la situation. Actuellement, nous n'apprenons absolument rien.
    Ce qu'on apprend, monsieur le ministre, est très inquiétant. Vous connaissez la formule 3D: défense, diplomatie et développement. Or, je pense que cette formule 3D est en train de se changer en: détournement de la mission, déviation des objectifs de la mission et dérapage en perte de vies. En effet, des soldats meurent toutes les semaines, et on ne sait pas exactement ce qui s'est passé au cours de ces deux dernières semaines. On ne comprend pas l'évolution de la mission non plus. Alors, quand on passe de la formule 3D, développement, défense et diplomatie, à détournement, dérapage et déviation, je pense qu'il y a un grave danger que vous devez absolument corriger.
    Et vous me direz ce que vous pensez de la déclaration du général Richards, que j'ai rencontré moi-même à Kaboul. D'après lui, si on ne corrige pas les choses dans les six prochains mois, 70 p. 100 de la population va apporter son soutien aux talibans. On va la perdre, la bataille. Et pour la gagner, il faut que vous informiez les Canadiens et les Québécois de ce qui se passe, afin qu'ils voient qu'il y a une certaine évolution et que les sacrifices imposés aux soldats ne servent pas à rien. Si vous ne le faites pas, on se retrouvera justement dans six mois et on verra que les choses se sont détériorées.
     Alors, j'aimerais que vous réagissiez à ces propos.
(1600)

[Traduction]

    Monsieur le ministre.
    Tout d'abord, pour ce qui est des commentaires du général Richards, je crois qu'il essayait de faire savoir à sa hiérarchie et à la population que l'OTAN doit déployer des efforts plus soutenus en Afghanistan. Qu'il ait été jusqu'à mentionner une période de six mois, cela le concerne, c'est sa décision.
    Ce que je peux vous dire, c'est que ce problème va durer beaucoup plus longtemps que six mois. Cette échéance de six mois n'a rien de magique. Même si aucun progrès important n'est réalisé sur le terrain dans les six prochains mois, cela ne veut pas dire que 70 p. 100 des résidents du sud du pays vont se ranger du côté des Talibans. C'est la façon dont le général Richards a décidé d'exprimer le fait qu'il faut déployer davantage de militaires en Afghanistan et qu'il faut lever les restrictions relatives à l'utilisation des troupes afin que nous puissions les engager au combat.
    C'est sa façon à lui d'annoncer ce genre de besoin au public et, soit dit en passant, nous sommes d'accord avec lui.

[Français]

    D'accord.
    Vous avez déjà déclaré, monsieur le ministre, qu'une solution basée sur la défense uniquement ne nous mènera pas à la victoire. Il s'agit de ma dernière question.
    Continuez-vous de penser de cette façon? J'aimerais que vous nous parliez aussi de la bataille de l'information. Pensez-vous que vous pouvez continuer longtemps à tenir dans l'ignorance non seulement le Parlement, mais aussi le peuple canadien?
     Je félicite quand même les journalistes, qui souvent ont le courage de s'y rendre et de faire des reportages. C'est eux qui nous rapportent l'information, pas le gouvernement canadien. Entendez-vous corriger cela? Pouvez-vous revoir votre position, sur la base de l'argument que j'ai donné plus tôt?
    Nous ne voulons pas savoir où seront les troupes la semaine prochaine, mais dans deux semaines, quand nous aurons un briefing, nous verrons ce qu'ils ont fait au cours des deux dernières semaines, et les parlementaires, ainsi que les Canadiens et les Québécois, constateront à quelle vitesse évolue la mission pour le moment.
    Seriez-vous prêt à reconsidérer cela sur la base des briefings des deux dernières semaines, et non d'un briefing portant sur ce qui se produira dans deux semaines?

[Traduction]

    Monsieur le ministre, il reste deux minutes.
    Eh bien oui, monsieur Bachand, je crois au trois D. Notre gouvernement croit au trois D et nous n'avons pas modifié l'engagement initial pris pour la région de Kandahar. Nous ne négligeons aucun des trois D — le développement, la défense et la diplomatie — et notre pays fait des efforts sur ces trois plans, pas uniquement en Afghanistan en général, mais aussi dans la région de Kandahar.
    Pour ce qui est de l'information, comme je le disais tout à l'heure, votre comité pourra convoquer qui il veut au ministère pour obtenir des renseignements. Je suis prêt à reconsidérer votre motion, parce que j'avais cru comprendre que vous vouliez connaître nos plans. Nous sommes d'accord: cela n'aurait pas été convenable pour nos militaires. Nous réexaminerons donc votre motion et je vous en reparlerai.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Mme Black à présent, puis nous donnerons la parole au côté gouvernemental pour 10 minutes.
    Merci à vous trois d'être venus rencontrer le comité.
    Je vais tout de suite entrer dans le vif du sujet et étant donné que je n'aurai qu'une seule occasion de vous poser des questions, je vais être aussi brève que possible.
    En Afghanistan, il existe tout un éventail de groupes d'allégeance tribales différentes, surtout dans le Sud. Certains recherchent la paix et la sécurité, mais d'autres ne veulent qu'accroître les tensions et poursuivre la violence. J'aimerais savoir comment vous faites, au combat, pour faire la différence entre ces groupes et comment vous vous assurez que nos opérations dans la province de Kandahar ne sont pas en train de pousser les gens du côté des insurgés?
(1605)
    Madame Black, je vais demander au général Hillier de vous répondre, parce que je crois qu'il pourra le faire beaucoup mieux que moi.
    Tout d'abord, nous appuyons les Afghans, parce que nous sommes chez eux; je parle ici du processus politique. Ils sont en train de rebâtir leurs institutions politiques à partir de la constitution qu'ils ont mise au point et qu'ils améliorent. Comme le président travaille en liaison avec le gouverneur de Kandahar, avec le gouvernement de cette province, il contribue à déterminer quels sont les éléments qui participent au processus politique et quels sont ceux qui, comme les Talibans — quelle que soit leur tribu ou région d'appartenance — ne veulent pas adhérer à ce processus politique et veulent employer la violence. En travaillant au côté de l'armée nationale afghane — qui est une organisation très professionnelle mise sur pied très rapidement et qui devrait parvenir à assurer une partie plus importante des fonctions de sécurité — en travaillant aussi avec la police nationale, mais surtout avec les institutions gouvernementales en Afghanistan, nous contribuons à faire la part entre ceux qui contribuent au processus politique et ceux qui favorisent la violence. Si nos alliés afghans ont affaire à des éléments violents, nous les aidons à atténuer la menace, à neutraliser cette menace, à la dévier et, en même temps, nous les aidons à accélérer la reconstruction et à accroître la capacité du gouvernement.
    Nous sommes toujours très prudents dans nos opérations de combat. D'abord, nous n'engageons d'opération qu'en réponse à un besoin. Deuxièmement, nous n'intervenons pas à moins qu'il y ait une véritable menace pour les Afghans, pour nous-même ou pour les autres membres de la communauté internationale présents sur place. Troisièmement, quand nous conduisons des opérations de combat, nous le faisons pour atteindre une cible précise, en liaison avec les forces afghanes, car nous voulons réduire au strict minimum les dégâts collatéraux — les personnes qui sont chassées de leur maison, les maisons qui sont détruites, etc. — et nous n'engageons nos militaires que si les Talibans sont présents dans la région.
    Durant l'opération Méduse, dans la région de Panjwai, par exemple, certains villages ont été détruits et les résidents ont été contraints de quitter le secteur parce qu'ils estimaient qu'il était devenu trop dangereux pour eux d'y rester, tout cela parce que les Talibans y avaient transporté la violence --
    Mais il y a beaucoup plus que les Talibans sur place, parce qu'il y a tous les autres groupes qui leur ressemblent un peu.
    C'est exact et c'est pour cela que les élus qui forment le gouvernement de l'Afghanistan, s'occupent de la situation et que nous appuyons la sécurité et la reconstruction... ce sont les Afghans qui gèrent ce genre de relations complexes; quant à nous, nous les appuyons dans cette démarche, sans plus.
    Plus tôt cette année, le MDN a signé avec le général Gulalai un contrat portant sur la prestations de services à notre base de Kandahar. S'agit-il du même général Gulalai décrit par Reuters et une organisation des droits de la personne de l'ONU comme un seigneur de guerre? Je me demande quelle véritables garanties nous avons de ne pas traiter avec des seigneurs de guerre quand nous signons des contrats avec ce genre de personnages en Afghanistan.
    L'Afghanistan et le parlement afghan sont pleins de gens que vous pourriez qualifier d'anciens seigneurs de guerre. Comme il y a aussi des femmes parlementaires, cette institution est donc un microcosme de la société et de la culture afghane. Il n'est donc pas inhabituel de traiter avec des gens que vous baptisez d'anciens seigneurs de guerre. C'est comme ça dans ce pays.
    Avons-nous des garanties quelconque au sujet du général Gulalai?
    Je ne sais pas quel genre de garanties nous pourrions obtenir.
    Relativement à ses activités, je suppose.
    Je devrais répondre à celle-là. Je ne connais personnellement pas cet individu, je ne sais pas quel genre de contrat nous avons conclus avec lui et je ne sais pas non plus quelles sont ses activités actuelles. C'est le genre de détails qu'il est difficile d'obtenir dans un pays neuf.
    Pour aller dans le sens de ce que le ministre vient de dire, je préciserai que nous avons affaire à un pays détruit qui connaît la violence depuis 25 ans.
    Certes, je comprends cela.
    Tout le monde dans ce pays a participé à la violence à un moment donné ou à un autre et tout le monde est décrit sous un certain jour, en fonction d'une certaine idée, d'une perception ou que sais-je encore: il peut s'agir d'un seigneur de guerre, d'un bon type ou d'un mauvais type, etc. Certaines de ces descriptions appartiennent au passé et bien des gens qui ont été actifs dans le passé et qu'on a appelé seigneurs de guerre à une certaine époque ont intégré le processus politique. Beaucoup jouent maintenant un rôle très positif et tout n'est donc pas négatif.
    L'ancien gouvernement a fait livrer des obusiers Howitzer M777 et des munitions Excalibur à nos militaires dans la région de Kandahar. J'aimerais savoir combien coûte chaque obus. Le savez-vous?
    Non, je ne peux pas vous dire cela a priori. Nous vous obtiendrons cette donnée.
    On a refusé de me répondre quand j'ai posé la question.
    Ah bon? Le prix d'un obus?
    En fait, vous voulez connaître le prix des obus Excalibur.
(1610)
    Oui.
    Ils sont chers.
    Oui, je le sais.
    Je ne sais pas exactement combien ils coûtent, mais comme le ministre vous l'a dit, nous allons lui fournir l'information.
    Merci. J'ai hâte de l'obtenir.
    Tous ce que je peux vous dire, c'est qu'il s'agit d'un obus coûteux parce que c'est une munition de précision. Pour en revenir à la question que vous posiez, celle de savoir si nous ne sommes pas en train d'écarter des gens du processus démocratique à cause des dégâts collatéraux, il se trouve que c'est précisément pour cela que nous voulons utiliser ce genre de munitions contre ceux qui ont recours à la violence contre nous-même ou les Afghans; de plus, je le répète, il s'agit d'un obus très coûteux. Je communiquerai cette information au ministre.
    Merci.
    Général Hillier, l'année dernière, en plein milieu de la campagne électorale, vous avez signé un accord de transfert de détenus avec le ministre afghan de la défense nationale. Oublions un instant le bien-fondé éventuel de cette mesure et dites-moi si l'ancien ministre de la Défense, Bill Graham, avait approuvé cette entente. Vous avait-il donné l'autorisation de la signer au nom du gouvernement canadien?
    En fait, je pense que oui. Je peux vous garantir que je n'allais certainement pas me présenter pour la signer de mon propre chef. Nous sommes tous d'accord, par ailleurs, avec le fait qu'il fallait conclure cette entente. Elle concernait ce qui se passe en Afghanistan et nous étions tous d'accord, aux Affaires étrangères et à la Défense nationale, sur le fait que c'était la chose à faire.
    J'ai fait office de mandataire en partie parce que j'avais la confiance du ministre de la défense afghan que je connaissais à titre personnel et en partie parce que je me trouvais sur place quand tout le monde était prêt à signer l'entente.
    Tout d'abord... Il y a deux parties à votre question. D'abord, il y a le fait que nous nous attendions à ce que les pays membres de l'OTAN augmentent leurs effectifs en Afghanistan et, quand l'ancien gouvernement a engagé nos troupes dans la région de Kandahar, je crois savoir qu'il était parti du principe que cela se ferait dans le cadre de l'opération Liberté immuable et que nos troupes seraient transférées à la FIAS. Par ailleurs, il était prévu que, dans la dernière phase de l'opération Liberté Immuable, l'ensemble des troupes alliées se retrouveraient engagées côte-à-côte.
    Le gouvernement savait que des pays avaient exprimé des réserves, mais je suppose qu'il espérait tout de même que celles-ci finiraient par être levées et nous continuons d'ailleurs d'espérer que tel sera le cas un jour. L'OTAN est partie du principe que nous sommes tous ensemble sur le théâtre afghan et que, si nous sommes en difficulté, d'autres pays de l'OTAN se porteront à notre secours. Si l'inverse se produisait et qu'un autre pays de l'OTAN soit en difficulté, c'est nous qui irions l'aider. Nous sommes certains qu'avec le temps, les pays lèveront leurs réserves.
    Ma dernière question concerne la prime de risque que les soldats blessés en Afghanistan ne perçoivent plus après leur rapatriement. Cela me paraît étrange et je me demande si nous ne pourrions pas rebaptiser cette prime pour l'appeler, par exemple, « prime de récupération » afin que ces soldats blessés ne soient pas pénalisés financièrement quand ils retournent au Canada après leur travail en Afghanistan.
    Nous allons corriger la situation. Je l'ai déjà dit publiquement et le chef de d'état-major de la Défense également. Nous allons corriger la situation et nous allons nous assurer d'être justes envers ces gens-là. À l'heure actuelle, pour avoir droit à la prime de risque, il faut se trouver dans une région à haut risque et, quand quelqu'un est grièvement blessé et qu'il est évacué, par définition, il ne se trouve plus dans un secteur à haut risque.
    Comme je l'ai dit, nous allons agir le plus rapidement possible pour corriger la situation afin que nos soldats blessés n'aient pas à souffrir financièrement, mais pour une fonction publique, cela nécessitera tout de même quelques semaines. Nous allons concevoir une autre indemnité grâce à laquelle nous aurons la certitude que personne ne perdra d'argent.
(1615)
    Merci beaucoup, madame Black, vous êtes en plein dans les temps.
    Nous allons passer du côté du gouvernement et je crois que c'est Mme Gallant qui va ouvrir le ban, après quoi nous entendrons M. Hawn.
    Je vais effectivement partager mon temps avec M. Hawn.
    J'en reviens sur la question de la sécurité de nos soldats, compte tenu du type de théâtre d'opération où ils se trouvent. Comme les chars d'assaut constituent une plate-forme défensive susceptible de protéger nos soldats en Afghanistan, que doit faire le Canada pour s'assurer que nous avons suffisamment de spécialistes pour servir à bord de ces chars?
    Je vais laisser le soin au général Hillier de vous répondre.
    Madame Gallant, je crois que je serais exclus de l'Arme blindée cavalerie — à laquelle j'appartiens — si je disais que les chars d'assaut sont une arme défensive. Ils sont déployés sur ces théâtres d'opération pour favoriser le succès de notre mission qui consiste à aider les Afghans à parvenir à un niveau de sécurité suffisant pour rebâtir leur pays et il se trouve que ce type de matériel permet, en même temps, d'assurer une protection accrue aux militaires qui se trouvent à bord et qui sont appelés à remplir des missions bien particulières. Ces chars d'assaut sont déjà sur le terrain. Une certaine mise en train s'impose avant de les déployer dans la région, mais nous sommes presque prêts pour certains d'entre eux et, d'ici quelques jours, les commandants sur le théâtre des opérations pourront les engager de la façon qu'ils jugent appropriée.
    Le mouvement est enclenché depuis un certain temps déjà. Au Canada, nous avions commencé par rassembler tous les chars d'assaut dans une seule unité, dans l'Ouest du pays. Ce faisant — par rapport à la situation antérieure où nous avions trois unités en différents endroits au Canada —, nous sommes parvenus à une plus grande synergie qui nous permet de former plus efficacement et plus économiquement les équipages de char, de même que les équipes et escadrons de soutien qui sont nécessaires à la conduite de missions de ce genre. Nous avons donc regroupé l'instruction sur char d'assaut dans l'Ouest du pays où nous disposons d'une excellente zone d'entraînement à Wainwright, en Alberta, dans laquelle nous avons beaucoup investi afin d'en faire une zone d'entraînement de classe internationale où nous pouvons reproduire les situations que les équipages retrouverons en Afghanistan, par exemple, afin de préparer nos militaires à ce genre de missions. C'est d'ailleurs ce que nous faisons actuellement. Les équipages de char sont prêts à être déployés. Toutefois, avant cela, nous voulons leur dispenser une instruction spécifique à la mission. C'est la seule raison pour laquelle nous avons attendu deux ou trois semaines après les annonces et après fois que nous avons reçu l'autorisation d'entamer cette mission. Nous avons néanmoins tout de suite envoyé les chars en Afghanistan.
    L'instruction — qui a consisté à mettre les équipages à niveau en fonction des dernières modifications, des derniers perfectionnements apportés aux véhicules — a été dispensée avant le déploiement; tout s'est très bien passé et nous étions d'ailleurs prêts pour cela.
    Monsieur Hawn.
    Merci, monsieur le président. Merci messieurs de vous être joints à nous.
    Ma première question s'adresse au ministre.
    Monsieur le ministre, il a beaucoup été question, à la Chambre des communes et au Sénat, d'un apparent déséquilibre dans le rôle assumé par le au Canada dans le cadre de cette mission. Je vais commencer par une remarque ou une suggestion, après quoi je vous demanderai de réagir. Nous faisons partie d'une coalition de 36 ou 37 pays chargés d'assurer la défense, le développement et la diplomatie sur place. Peut-on justement affirmer, étant donné la région géographique où nous intervenons et la capacité des forces que nous avons déployées là-bas, que nous assurons beaucoup plus une mission guerrière qu'une mission d'aide au développement et à la diplomatie, mais que celle-ci est équilibrée quand on considère l'ensemble de la coalition? Après tout, c'est la coalition tout entière qui réalisera l'objectif fixé.
    Je suis d'accord avec vous pour dire que c'est la coalition tout entière qui atteindra les objectifs fixés. Par exemple, les Canadiens ne participent que très peu à la lutte contre le trafic de drogue et la culture du pavot. Cet aspect relève de la responsabilité des Britanniques et d'autres pays. Dans le Sud, dans la province de Kandahar, nous avons d'autres responsabilités et nous agissons sur les trois plans: défense, développement et diplomatie. Il ne faut pas non plus oublier notre rôle à Kaboul. Nous y avons une équipe de conseillers stratégiques de 15 officiers qui conseillent le président et les organisations gouvernementales sur la façon de s'organiser, de régler les problèmes qui se posent et de transmettre les consignes des ministres aux gens sur le terrain. À cet égard, cette équipe contribue à l'instauration d'un modèle de gouvernance.
    Dans la région de Kandahar, notre équipe EPR, composée de gens des Affaires étrangères, de l'ACDI, de la GRC et de la Défense, travaillent sur les questions de développement et de gouvernance. Ils aident le gouverneur de la province. Évidemment, c'est surtout du groupement tactique dont ils est question à la radio ou à la télévision, parce que c'est lui qui garantit la sécurité pour permettre aux autres Canadiens de mener à bien leurs efforts de développement. Mais nous ne sommes pas les seuls, parce que vous devez vous rappeler que les États-Unis administrent également des programmes d'aide au développement en Afghanistan, tout comme le gouvernement afghan. Nous aussi, nous administrons de tels programmes, par le truchement de l'ACDI et des Affaires étrangères. Notre groupement tactique a pour mission d'assurer la sécurité dans la province de Kandahar, au côté de la police et de l'armée afghanes, pour permettre la conduite des programmes de développement.
(1620)
    Ainsi, la mission est équilibrée quand on considère l'action de toute la coalition.
    Oui.
    Un volet de cette mission consiste à former les membres de l'armée et de la police nationales afghanes. Ma question s'adresse à la fois au ministre et au chef d'état-major parce qu'ils ne sont tous deux davantage au fait de ce qui se passe sur le terrain. Les problèmes sont différents dans le cas de l'instruction des soldats et des policiers afghans. Quels sont les défis les plus complexes auxquels nous sommes confrontés? Que faisons-nous pour y faire face? Quelles sont nos chances d'aboutir et quand espère-t-on y parvenir?
    Je commencerai par vous parler de l'armée. L'un des difficultés auxquelles nous nous heurtons, c'est que, même si cette responsabilité a été principalement confiée à un pays, trois ou quatre autres armées alliées interviennent à différentes étapes. Même le Canada participe à l'instruction des soldats afghans au niveau de groupes-compagnies dans la région de Kaboul. Le problème, c'est que trois ou quatre pays participant peuvent avoir des méthodes différentes. C'est un problème pour l'armée afghane qui doit être bâtie autour d'une doctrine et de procédures communes.
    Si je ne m'abuse, ce sont les États-Unis qui sont ultimement responsables de la formation des soldats afghans. Eh bien, les Américains sont venus nous voir, ainsi que les Français et d'autres qui travaillent auprès de l'armée afghane, pour veiller à ce que nous appliquions une seule et même doctrine.
    L'autre problème dans le cas de l'armée Afghane, c'est l'équipement. Pour l'instant, cette armée est dotée d'un matériel datant de l'ère soviétique. une partie de ses armes et de ses véhicules ont plusieurs dizaines d'années. L'OTAN est en train d'agir très rapidement pour la doter d'armes plus récentes, même si elles viennent aussi de l'ex-Union soviétique. En effet, comme d'anciens membres du Pacte de Varsovie ont intégré l'OTAN, ils se débarrassent de leurs armements soviétiques qui peuvent être donnés à l'Afghanistan.
    Les problèmes dans le cas de la police sont très sérieux. Les militaires sont payés régulièrement, mais les méthodes de paiement des policiers varient grandement d'une province à l'autre et le versement des soldes est irrégulier. Certains policiers sont payés à intervalles réguliers, mais pas tous, ce qui occasionne des problèmes. Les policiers qui ne touchent sont leur solde doivent trouver de l'argent ailleurs, d'une façon ou d'une autre, et il arrive qu'ils ne soient pas... Dans certaines régions, les gens ne s'adressent pas forcément à la police pour obtenir de l'aide. Ça, c'est un problème.
    Par ailleurs, la police n'est pas très riche en équipement. On voit les policiers se déplacer en camionnettes Toyota enrubannées, mais ils sont courageux. Je dois vous dire que les soldats et les policiers sont très courageux. Ils montent au combat sans aucune protection ou presque et font du très bon boulot.
    Je vais laisser la parole au chef d'état-major.
    Merci, monsieur le ministre.
    Je vous dirai, monsieur Hawn, que nous voulons reproduire, dans le cas de la police nationale afghane, l'expérience de la mise sur pied et de l'expansion de l'armée nationale afghane.
    Je sais à quel point il est difficile de changer même les plus petites choses dans une armée, comme les Forces canadiennes, et qu'il est encore plus difficile de bâtir quelque chose à partir d'un Livre blanc. Eh bien, en trois ans et demi, presque quatre, nous avons accompli un miracle.
    Ce sont les Américains qui ont mené le bal en la matière et personne d'autre qu'eux n'aurait pu le faire. Nous sommes maintenant engagés dans le Sud, au coté de plusieurs kandaks qui viennent juste d'arriver dans la province de Kandahar; nous cherchons à les aider à se former et à se perfectionner et nous cherchons à les appuyer pour qu'ils deviennent des kandaks très compétents, voire des bataillons autonomes de l'armée afghane.
    En tout juste quatre ans, ces quelques 30 000 soldats ont accompli des miracles, malgré les énormes défis auxquels ils sont confrontés.
    Le premier de ces défis, c'est le taux d'analphabétisme qui est de 60 p. 100 parce qu'il est en partant très difficile d'intégrer un illettré dans l'armée et de transformer en soldat.
    Deuxièmement, comme les Afghans veulent d'une armée qui soit le reflet de leur pays, ils recrutent dans toutes les tribus pour constituer des bataillons multi-ethniques ou multi-tribaux. Toutefois, cela pose problème pour les familles quand les bataillons se déplacent dans une autre région. Comme les systèmes de transport en public sont quasiment inexistants et qu'il est impossible pour ces recrues de faire parvenir leur solde à leurs familles, beaucoup décident de ne pas rester dans l'armée.
    Troisièmement, ces gens-là n'ont quasiment jamais cessé d'être en opération depuis la constitution des premiers bataillons ce qui provoque évidemment une élimination naturelle des effectifs parce que les soldats en ont assez d'être loin de leurs familles. Malgré des pertes importantes, cette nouvelle armée est parvenue à stabiliser ses effectifs en très peu de temps, ce qui lui permettra de reconstituer les unités actuelles avant d'entreprendre son expansion.
    Malgré tous ces défis, notamment sur le plan de l'équipement dont le ministre vous a parlé, nous sommes témoins d'une aventure extraordinaire. Chapeau bas aux Américains et aux Afghans pour la façon dont ils s'y sont pris.
    La police nationale afghane, quant à elle, se trouve dans la même situation à l'échelle du pays que l'armée nationale il y a deux ans et demi. Tout le monde est maintenant bien conscient que nous allons devoir tous collaborer pour amener la police nationale afghane au rang de force de sécurité viable dont un pays a besoin pour assurer son développement à long terme.
    Les États-Unis ont investi des sommes énormes dans cette entreprise. Au cours du dernier mois, je crois qu'ils se sont engagés à investir 1,2 milliard de dollars. Nous devons nous-même remplir un rôle important dans le sud du pays pour contribuer à la formation des policiers dans la province de Kandahar pour toutes sortes de bonnes raisons, que nous devrons encadrer et équiper. En fait, nous envisageons d'agir de plus en plus sur ce plan au fur et à mesure de l'augmentation des effectifs de policiers afghans.
    Pour en revenir à l'armée nationale afghane, je terminerai en précisant qu'au cours de l'année qui vient de s'écouler, nous avons joué un rôle modeste, mais lourd de conséquences. Le centre national de formation de l'armée nationale afghane est administré par 15 de nos officiers, sous-officiers et jeunes soldats qui prennent en main les soldats afghans ayant été dégrossis par des militaires d'autres pays. Notre équipe encadre donc ces officiers, sous-officiers et soldats afghans pendant trois ou quatre semaines pour leur faire participer à des exercices au niveau du bataillon. Ils commencent au niveau d'une section de 10 hommes, pratiquent des exercices à tirs réels, et vont jusqu'au niveau du bataillon pour confirmer la compétence de ces hommes avant qu'ils ne soient déployés quelque part en Afghanistan. Les résultats que nous avons obtenus à ce titre sont tout simplement incroyables et nous n'avons reçu que des éloges pour l'extraordinaire travail de ces quelques jeunes majors et sergents-majors, sous-officiers et officiers canadiens.
(1625)
    Merci, monsieur Hawn.
    Voilà qui met un terme à notre première série de questions. Nous allons maintenant passer à une deuxième série de cinq minutes en commençant par M. McGuire qui sera suivi de M. Calkins.
    Monsieur McGuire.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le président, je tiens à mentionner que nous appuyons la requête de M. Bachand qui vous a demandé de reconsidérer la motion. Je ne vois pas comment elle aurait pu être mal interprétée étant donné que, dans le passé, les différents comités de la défense ont demandé exactement la même chose aux gouvernements précédents pour pouvoir s'acquitter de leur travail. Je suis heureux que vous avez accepté de reconsidérer cette motion. Nous pouvons donc espérer bénéficier d'exposés réguliers et, comme vous le disiez, nous devrions ainsi être mieux informés et aptes à mieux faire notre travail.
    J'ai deux questions à vous poser, la première au sujet des déploiements.
    Je crois que la durée des déploiements est de six mois et que vous-même, monsieur le ministre, avez déclaré que nous devons nous attendre à rester en Afghanistan pendant pas mal de temps encore. Étant donné les faibles effectifs de nos forces armées, trouvez-vous juste de renvoyer nos soldats en Afghanistan cinq ou six fois de suite, parce que c'est probablement ce qui va se passer? Si nous devons retenir une leçon quelconque de ce qui s'est produit dans d'autres parties du monde, il faudra beaucoup de temps avant que le gouvernement, les forces armées et la police de ce pays puissent prendre la relève.
    Ce doit être très lourd pour qui que ce soit d'être déployé aussi souvent. Je sais que nos militaires sont des durs à cuire et qu'ils font un excellent travail, mais il va bien falloir que cela cesse un jour. Comment comptez-vous réconcilier nos engagements envers l'OTAN et le manque d'effectifs dans les forces armées?
    Je vais essayer de vous répondre en partie, après quoi je céderai la parole au général Hillier.
    Pour l'instant, notre engagement va jusqu'au mois de février 2009. Nous n'avons pas déterminé ce qu'il adviendra ensuite. Notre pays est engagé envers l'OTAN. Nous devrons peut-être rester là-bas plus longtemps — qui sait? —, mais je crois que le gouvernement prendra ce genre de décision vers 2008.
    En ce qui concerne notre engagement actuel, jusqu'à la fin février 2009, nous allons essayer de faire de notre mieux — étant donné que nous essayons par ailleurs d'augmenter les effectifs de l'armée — pour réduire au minimum le nombre de rotations dans les zones de combat. Si le recrutement donne des résultats et si nous réaffectons des personnels au sein des forces armées, nous devrions avoir un effectif suffisant — sauf dans certaines spécialités de soutien — pour nous retrouver fin février 2009 sans avoir eu à demander à un grand nombre de nos soldats de retourner dans cette zone. Personne ne devrait être redéployé cinq ou six fois en Afghanistan. Il pourrait y avoir des exceptions, mais je crois que c'est peu probable.
    Je cède la parole au chef d'état-major.
(1630)
    Vous savez, monsieur, après avoir passé deux ans à Ottawa, je serais prêt à retourner en Afghanistan n'importe quand. Les choses y sont moins complexes et moins intenses et j'apprécierais sans doute beaucoup plus ce genre de travail. C'est vraiment ce que je pense.
    Des voix: Oh, oh!
    Général R.J. Hillier: Laissez-moi vous dire une chose, monsieur. D'abord, nos déploiements sont fonction des conditions et non du temps passé sur place, et nous prenons grand soin à respecter cette formule. Certaines affectations peuvent durer moins longtemps que d'autres. Dans le cas des fonctions de commandement, comme celles qu'assume le général Fraser, il n'est pas possible de changer rapidement les personnels. Il faut laisser l'encadrement assez longtemps sur place pour instaurer des relations avec les gouverneurs des provinces de Kandahar, d'Helmand, de Zaboul et d'Orouzgan et avec tous les autres intervenants sur place. C'est pour cela que la durée de nos déploiements est fonction d'un ensemble de conditions.
    Les déploiements les plus intenses peuvent durer moins de six mois. Nous jugerons au fur et à mesure et nous serons prêts à réagir et à nous adapter pour parvenir aux meilleurs résultats possibles. La durée des déploiements est d'abord fonction des conditions.
    Deuxièmement, nous devons augmenter nos effectifs. Un grand nombre de nos unités sont de vrais squelettes. Nous devons donc pouvoir recruter et, pour cela, disposer des ressources nécessaires qui nous permettront de payer les recrues, d'augmenter nos effectifs et de doter les unités — surtout les unités de combat dans l'infanterie, mais pas uniquement celles-là — afin de les porter à leur capacité nominale, ici, au Canada.
    Je vais vous dire ce qui se passe en fait. Supposons que le groupement tactique doive se déployer avec trois compagnies d'infanterie. Eh bien, pour obtenir ces trois compagnies — étant donné qu'il n'est actuellement pas possible de parvenir à un effectif de 140 soldats par compagnie, nous nous sommes limités à 90 ou 95 —, nous devons regrouper quatre, cinq ou même six compagnies pour en obtenir trois qui partiront en mission. Nous devons augmenter nos effectifs et nous nous intéressons à cette question d'une façon toute particulière.
    Nous devons recourir à l'ensemble des Forces canadiennes pour réaliser nos missions. Au cours des 10 dernières années, nous avons tous été très occupés, mais ce sont les opérations de déploiement qui ont été les plus intenses et qui ont nécessité la mobilisation du plus grand nombre de personnes. Je n'ai pas les chiffres exacts, mais je crois que, pour assurer la totalité de nos opérations outre-mer au cours des 12 à 15 dernières années, nous avons mobilisé 40 à 45 p. 100 de l'ensemble des Forces canadiennes.
    Je vais vous donner un exemple du genre de répercussions que des décisions prises il y a 10 ans peuvent avoir aujourd'hui. En 1994-1995, nous avons subi d'énormes réductions budgétaires. Nous avons économisé de l'argent, nous avons réduit considérablement les effectifs et l'équipement des Forces canadiennes — ai-je suffisamment cogné sur le clou? — afin de nous conformer aux budgets alloués.
    Nous avons donc retiré quelque 500 à 600 millions de dollars de nos unités opérationnelles pour les consacrer à des établissements d'entraînement dont l'avenir était peut-être un peu plus certain et nous avons cessé d'envoyer nos gens aux quatre coins du pays pour leur offrir la meilleure combinaison de formation et d'expérience. Nous avons donc été privé d'une importante partie des fonds dont nous avions besoin. Nous avons bloqué les gens dans leurs unités, ce que nous pensions formidable parce que la stabilité est importante. C'est vrai, à moins que vous vous retrouviez dans une unité de combat qui est envoyée en opération tous les 18 ou 24 mois. Ce faisant, le spécialiste des transmissions ou le jeune sapeur du génie se retrouve à faire toutes les missions, tandis que ceux qui font partie de la structure de formation... Comme nous n'avions pas d'argent pour renvoyer les instructeurs dans des unités opérationnelles, nous nous sommes retrouvés avec certains militaires dont la poitrine est recouverte de médailles, tandis que d'autres n'ont rien.
    Nous devons donc parvenir à un équilibre et à une meilleure utilisation de nos effectifs. Nous allons nous attarder aux affectations qui exigent le plus pour les spécialistes et nous allons chercher à faire tourner le plus de gens possible. L'idéal serait que, pour chaque militaire envoyé en Afghanistan entre maintenant et la fin de la mission en février 2009, il n'y ait qu'une seule affectation. Nous savons que cela ne sera pas possible, mais nous allons chercher à parvenir à ce résultat autant que faire se peut.
    Nous allons donc confier à des gens qui sont actuellement à l'instruction un rôle différent de celui qui correspond au métier qu'ils ont choisi. Nous allons leur dire que, pour les deux ou trois prochaines années, ils seront intégrés à l'infanterie et qu'ils pourront réintégrer leur GPM de choix ensuite. Nous allons nous tourner vers les réserves pour voir combien de réservistes nous pourrions intégrer dans une arme régulière, pour de plus longues périodes, à moins que nous ne leur offrions des contrats de longue durée et que nous leur donnions la chance d'être formés et encadrés. Pour tout dire, nous allons mobiliser absolument toutes nos ressources.
    Plus important encore, nous allons mettre en oeuvre toute un train de mesures à l'intention des hommes et des femmes qui servent actuellement pour nous, notamment en réglant les problèmes d'indemnité dont il a été question tout à l'heure. Tout aussi important, nous allons nous occuper de leurs familles comme nous ne l'avons jamais fait en 15 ans et demi.
    Merci, général.
    Je vous ai permis de déborder un peu, parce que votre réponse était très importante, mais le temps pour cette question est écoulé.
    Nous allons revenir à M. Calkins, avant de passer à M. Bouchard.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur le ministre, et vous-même, général, de vous être rendus à notre invitation. Monsieur le ministre, le fait que vous ayez réagi aussi rapidement à l'invitation de ce comité est tout à votre honneur, tout comme le fait que vous soyez venu témoigner deux fois sur le même sujet. Je tiens à vous en remercier.
    Vous vous souviendrez peut-être, monsieur le ministre, que la première fois que vous avez rencontré le comité, je vous ai posé une question au sujet du véhicule Nyala, parce que c'était quelque chose de relativement nouveau pour moi. Depuis, nos forces ont eu la possibilité d'évaluer ce véhicule sur le théâtre des opérations et j'aimerais savoir la conclusion que l'on tire de ces essais en service et si les Forces canadiennes envisagent de continuer à l'utiliser dans le cadre de leurs opérations — et pas uniquement en Afghanistan. Est-ce que ce matériel occupera une place prépondérante dans l'avenir? J'espère que vous allez pouvoir nous parler de l'efficacité du Nyala et des résultats que vous avez obtenus sur le plan opérationnel jusqu'ici.
(1635)
    Encore une fois, je commencerai par quelques remarques avant de céder la parole au général Hillier qui en connais davantage au sujet du Nyala que moi-même.
    Le Nyala est un merveilleux véhicule pour le genre de mission que nous accomplissons actuellement en Afghanistan. Il a été renforcé pour résister à l'explosions d'une mine. Malheureusement, comme les Talibans relient trois ou quatre mines ensemble, il arrive que quatre mines explosent en même temps. Jusqu'ici, le Nyala n'a subi qu'un seul incident avec mort d'homme et nous sommes en train de faire enquête à ce sujet parce que les circonstances nous paraissent très étranges.
    Sinon, ce sont d'excellents véhicules. Comme vous le savez, c'est la deuxième série de Nyala que nous achetons et la plupart de ces véhicules seront acheminés le plus rapidement possible en Afghanistan pour y équiper nos troupes.
    Je donne la parole au chef d'état-major.
    Je dois vous dire, monsieur, que nous sommes absolument ravis du Nyala. C'est grâce à ce véhicule que des Canadiens sont encore en vie aujourd'hui. Il n'est pas parfait, parce qu'un véhicule parfait, ça n'existe pas. Il y a toujours des compromis à faire entre les avantages et les inconvénients de ce genre de matériel.
    Nous en avons acheté un nombre suffisant et nous sommes en train d'en recevoir livraison. Ce véhicule a des qualités exceptionnelles pour les déplacements en convoi, sur des pistes et en terrain plat, mais il n'est pas très bon en terrain accidenté ou fortement raviné. Il n'a pas été vraiment prévu pour ça.
    Il est donc tout à fait exceptionnel dans ce secteur. Il fonctionne très bien en relief un peu accidenté, mais ce n'est pas vraiment le genre de véhicule que l'on utilise en permanence en relief mouvementé. Nous l'avons acheté afin d'assurer une plus grande protection aux équipages contre les explosions d'engins improvisés et contre les attaques suicides. À cet égard, il a merveilleusement rempli son rôle.
    C'est un jeune soldat, le cavalier Wilson du Royal Canadian Dragoons, qui a été tué à bord d'un Nyala. Nous avons déjà pris certaines mesures pour corriger la situation — et je ne vous dirai pas ce dont il s'agit, parce qu'il en va de la sécurité des opérations — et nous pensons que celles-ci devraient nous permettre d'éviter de tels incidents ou du moins d'en réduire la probabilité. On est jamais sûr à 100 p. 100. Nous continuons d'évaluer ce véhicule pour voir s'il est possible de l'améliorer davantage.
    D'ici la fin du mois, je pense que nous devrions avoir reçu près de 100 Nyala. Nous allons les déployer en Afghanistan, mais si nous devons intervenir ailleurs dans le monde, hors de l'Afghanistan, il est évident que nous utiliserons ceux que nous avons jusqu'à ce que tout le parc soit utilisé. Nous sommes en train d'étudier différentes formules afin de pouvoir dire à notre ministre s'il s'agit d'un véhicule que nous voudrions avoir en plus grand nombre ou si nous en désirons un autre. Nous aimerions avoir des véhicules qui sont à la pointe de la technologie pour résister à des explosions et à des attentats suicides tout en permettant d'évoluer en terrain accidenté et de débarquer rapidement le personnel à bord en cas de besoin.
    J'ai eu la chance de conduire ce véhicule, d'essayer le poste de tir télécommandé et d'effectuer un périple en qualité de passager par une température extérieure de 50 degrés celcius. Il n'est pas très confortable d'y être agglutiné avec sept autres militaires quand il fait 50 degrés à l'extérieur, mais les gens sont prêts à supporter cela parce que c'est un bon véhicule dans lequel ils ont confiance.
    Merci beaucoup, c'est bien d'entendre ça.
    J'ai toujours estimé que la sécurité des soldats est très importante. Quand nous avons commencé à déployer nos troupes dans la région de Kaboul, nous avons enregistré des pertes dès le début des opérations parce que nous étions équipés de Jeeps Iltis, et j'étais horrifié de voir que nous ne disposions pas d'un matériel comme le Nyala. Je suis heureux de constater ce qui se passe et je constate avec plaisir que nous allons mieux équiper nos militaires sur place.
    Pour poursuivre dans la même veine, maintenant que nous sommes en train de déployer les chars Léopard et qu'il y a déjà sur place des véhicules Nyala, des VBL III et des G Wagon, les Forces canadiennes souhaiteraient-elles que nous envisagions l'acquisition d'autres types de matériel?
    Chaque fois qu'il y a un incident en Afghanistan, les Forces canadiennes évaluent très rapidement la situation pour en connaître la cause et pour trouver des façons d'améliorer la situation. Cela s'entend de l'examen de tous les véhicules que nous utilisons là-bas et de leur modification éventuelle afin d'en améliorer la sécurité. Cela veut dire que nous examinons les parcs de véhicules pour voir s'il y a lieu de les employer en opération.
    Nous avons soumis un certain nombre de véhicules à des essais destructifs. Nous simulons des attaques suicides et des choses du genre sur les divers véhicules que nous utilisons afin de voir si certains résistent mieux que d'autres à ce genre d'attaques.
    Personnellement, j'aurais envie d'aller encore plus loin.
(1640)
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Bouchard avant de revenir à M. Hiebert puis de repasser à M. Cannis.
    Monsieur Bouchard pour cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Merci également, monsieur le ministre, d'être parmi nous cet après-midi, accompagné du général et du sous-ministre de la Défense nationale.
    Avant de poser ma question, je dois vous dire que j'ai été très heureux de vous entendre dire que vous êtes prêt à reconsidérer votre décision pour informer le comité quant à l'évolution de la mission en Afghanistan. En effet, nous sommes intéressés à suivre cette évolution. En tant qu'élu, je suis souvent interpellé par mes concitoyens à propos de ce qui se passe en Afghanistan.
    J'en arrive donc à ma question, monsieur le ministre.
    Le Canada va-t-il déployer les avions de combat F-18 lors d'opérations avec les pays de l'OTAN ou encore avec les Américains? Nous savons que nous avons au Canada deux bases où se trouvent des F-18, des avions de combat, de chasse, soit à Bagotville et à Cold Lake. Y-a-t-il un plan de préparation, dans l'hypothèse où des F-18 seraient appelés à participer à des opérations?

[Traduction]

    Monsieur Bouchard, pour l'instant, il n'est pas prévu d'envoyer des chasseurs en Afghanistan. Il ne faut jamais dire « fontaine je ne boirai pas de ton eau », mais pour l'instant ce n'est pas prévu. Si la situation devait évoluer, nous réexaminerions cette possibilité, mais il se trouve que d'autres pays assurent actuellement la couverture aérienne en Afghanistan et qu'il y a suffisamment de chasseurs sur place, mais nous demeurons toujours prêts à déployer nos CF-18 si besoin était. Nous nous sommes engagés envers l'OTAN à déployer six CF-18 en cas de crise. Nous nous en tenons à cela et nous avons les ressources nécessaires pour mettre ce plan en oeuvre.
    Voilà donc la situation actuelle en ce qui concerne les chasseurs.

[Français]

    Merci.
    Le Canada participe avec les pays de l'OTAN pour combattre le terrorisme.
    Monsieur le ministre, vous avez sans doute plusieurs échanges et conversations avec les ministres de la Défense de l'OTAN.
    Pourriez-vous nous communiquer les préoccupations de ces ministres de la Défense? Avez-vous également parlé d'échéancier ou encore de durée de mission? Si tel est le cas, pourriez-vous nous communiquer ce qu'ils disent relativement à la durée de la mission en Afghanistan?

[Traduction]

    Le plus grand défi qui se pose actuellement aux ministres et aux chefs d'état-major de la défense des pays membres de l'OTAN , c'est qu'il faut reconstruire la société afghane.
    Comme nous l'avons dit à plusieurs reprises, nous essayons de rebâtir un pays du point de vue de la gouvernance, nous essayons d'améliorer la vie de ces gens-là et nous essayons de leur garantir la sécurité. C'est un grand défi permanent pour l'OTAN. Il est possible que je me trompe, mais je crois savoir qu'on estime la population de l'Afghanistan à quelque 26 ou 27 millions d'habitants. Notre PIB est 119 ou 120 fois supérieur à celui de ce pays pour une population à peu près identique — soit 33 millions d'habitants — ce qui vous donne une idée du retard de l'Afghanistan. C'est un grand défi pour l'OTAN, mais aucun des ministres n'a jamais douté que nous allions réussir. Nous avons généralement confiance dans l'aboutissement de la mission, parce que nous sommes parmi les pays les plus riches du monde.
    Quant à l'échéancier, il en existe un qui est la fin février 2009 dans notre cas, mais il y a aussi des échéanciers qui dépendent d'ententes conclues à Londres et en Allemagne. Il faudra avoir réalisé un certain nombre de choses en 2010, puis en 2011 et ainsi de suite. Il y a donc des échéances.
    On entend, dans les nouvelles, des observateurs de la situation en Afghanistan affirment que le problème va s'éterniser et qu'il n'y a pas d'échéancier pour le retrait complet des forces de l'OTAN. L'OTAN, quant à elle, ne dit pas qu'elle va rester sur place jusqu'en 2012 ou 2015. Pour l'instant, l'Alliance essaie d'instaurer les conditions que j'ai mentionnées tout à l'heure dans mon intervention: mettre en place un système de gouvernance grâce auquel le gouvernement central et les gouvernements des provinces pourront offrir des services à la population; essayer de réparer l'infrastructure routière, les ponts, les écoles et ainsi de suite, et rebâtir toutes ces infrastructures pour que la société puisse de nouveau fonctionner; essayer d'écraser suffisamment l'insurrection pour qu'elle ne vienne plus perturber le quotidien de la population. C'est cela que l'OTAN essaie de faire.
(1645)
    Merci. Votre temps est écoulé.
    Nous allons passer à M. Hiebert, puis à M. Cannis.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous, monsieur le ministre, de vous être déplacé.
    Dans vos remarques liminaires, vous avez dit que la réussite de cette mission serait évaluée au regard de trois objectifs: l'instauration d'un gouvernement stable, la mise en échec des terroristes et l'impossibilité pour eux de retrouver des sanctuaires, et l'établissement des forces nationales afghanes. Pourriez-vous expliquer au comité le genre de progrès nous avons réalisés sur ces trois fronts.
    Je vais commencer par le niveau national. Ce que nous voyons quotidiennement à la télévision à propos de l'Afghanistan, nous le devons au fait que notre presse nationale s'intéresse naturellement à ce que nous faisons parce que c'est important pour elle; et puis, les Canadiens aussi veulent savoir ce que nous faisons. Toutefois, il faut comprendre ce qui se passe en Afghanistan en général. Il est possible que je me trompe, et le chef d'état-major ou le sous-ministre pourront toujours me corriger, mais je crois que le pays est subdivisé en quelque 34 provinces et l'insurrection sévit dans six ou sept d'entre elles. Ailleurs, il règne une stabilité relative, du moins pour un pays comme l'Afghanistan. Voilà pourquoi on n'entend pas beaucoup parler d'incidents dans le Nord ou dans l'Ouest. Même dans l'Est, les incidents sont relativement peu nombreux. Il arrive, de temps en temps, que l'on entende parler d'une attaque suicide à Kaboul, mais pour ce qui est du reste du pays, hormis les six ou sept provinces concernées, la situation est relativement stable.
    Pour l'instant, le défi se situe principalement dans le Sud, surtout dans les provinces de Kandahar et d'Helmand où se trouvent les Britanniques, de même que — dans une certaine mesure — dans les provinces voisines à l'est. Pour l'instant, l'OTAN et le commandement de l'OTAN essaient d'écraser l'insurrection dans ces provinces. Ailleurs, là où la situation est relativement calme, les différents pays membres de l'OTAN, le gouvernement local et même les ONG font ce qu'ils peuvent pour essayer d'améliorer la qualité de vie de la population.
    Dans les provinces du Sud et dans la province dont nous sommes chargés, Kandahar, les défis sont très grands. Nous essayons d'écraser l'insurrection et, en même temps, nous essayons d'améliorer la vie des habitants.
    Par ailleurs, comme je le disais plus tôt dans une de mes réponses, nous ne sommes pas tout seuls à nous occuper de développement dans la province de Kandahar. Les Américains réalisent de nombreux projets dans cette province, de même que le gouvernement afghan et le gouvernement du Canada qui administre différents programmes sur place. Il demeure que ce sont ces régions qui nous posent le plus de problème.
    Comme vous le savez, nous avons récemment perdu six soldats qui essayaient de reconstruire quatre kilomètres de route parce que les Talibans ne veulent pas que nous contribuions à la reconstruction. Ce réseau routier permet de relier les collectivités entre elles et, là où la route passe, il sera possible d'améliorer la vie des gens. Le travail de développement est très, très difficile dans le secteur dont nous sommes chargés de même que dans le secteur britannique, celui de Helmand.
    Mais peu importe, nous continuons à progresser et à faire du travail de développement. Nous bâtissons des routes et des écoles. Je vous ai mentionné quelques-unes de nos réalisations jusqu'ici. Dans les quelques mois à venir, nous allons lancer un nombre relativement important de projets dans la région de Kandahar grâce à l'arrivée d'une nouvelle compagnie. En effet, l'une des compagnies du Van Doos sera déployée dans la région de Kandahar d'ici la fin novembre. Elle se consacrera à la protection de l'EPR. Pour l'instant, comme les insurgés sont tellement actifs, nous devons consacrer beaucoup de ressources à la protection des équipes d'EPR et, de temps en temps, nous devons carrément affronter l'insurrection.
    Une fois que la compagnie du Van Doos sera sur place, dans la région de Kandahar, pour protéger l'EPR, nous pourrons débloquer le groupement tactique et l'escadron de chars afin qu'ils s'occupent des insurgés. Cela étant, nous aurons plus de souplesse pour protéger les travaux de développement. Nous pourrons faire davantage. C'est non seulement une question d'argent, mais aussi de volonté et il se trouve que nous allons disposer d'une meilleure protection pour favoriser la remise en état du pays.
(1650)
    Il vous une reste trente seconde.
    Je serai bref.
    Selon le professeur Sean Maloney, qui a témoigné devant votre comité il y a quelques semaines, les Talibans auraient tué quatre de nos soldats le 17 septembre, soit tout juste avant la reprise des travaux parlementaires, parce qu'ils voulaient manipuler les médias canadiens pour que ceux-ci montent l'opinion publique canadienne contre notre mission en Afghanistan. Pourriez-vous nous parler un peu du genre de traitement dont tout ce dossier a jusqu'ici fait l'objet dans les médias? Est-il trop question de pertes et pas assez des réussites enregistrées? Pensez-vous que les Talibans manipulent les médias?
    Je ne le crois pas. Ce genre de conspiration exigerait beaucoup d'efforts et je n'ai rien constaté de tel.
    Il est certain que l'organisation centrale des Talibans est très rusée. Elle essaie de manipuler l'opinion publique; elle cherche à le faire non seulement dans sa région d'influence immédiate, mais aussi dans les pays de l'OTAN et ailleurs. Elle veut faire passer le message que, d'une certaine façon, elle réussit et que nous, nous échouons, et cela pour que nos compatriotes aient l'impression que nous faisons fausse route.
    Il est vrai que les Talibans sont manipulateurs, mais je ne dirais pas que les quatre militaires ont été tués parce que les Talibans voulaient envoyer ce genre de message à ce moment-là. Ils essaient en fait d'envoyer en permanence des messages de ce genre.
    La couverture média est assez bonne. Nous avons des journalistes intégrés à nos forces à Kandahar qui relatent assez fidèlement ce qui se passe sur le terrain. J'aimerais tout simplement qu'ils parlent d'autre chose que de nos opérations; j'aimerais qu'ils parlent davantage de ce qui se passe dans la société afghane. Avant que je ne me rende en Afghanistan pour la première fois, j'ai suivi Peter Mansbridge à CBC. Comme il était dans la capitale de la province, Kandahar, j'ai pu voir ce qui se passait dans cette ville parce que les médias étaient sur place tandis qu'avant cela, je n'avait vu que des carcasses de véhicules sur le bord d'une route avec deux soldats, quelque part en arrière-plan. C'était cela l'impression que j'avais de l'Afghanistan, moi qui n'y avait jamais mis les pieds.
    Les médias sont justes. Ils rendent compte de ce qui se passe et ils le font d'une façon relativement précise; il demeure que j'aimerais qu'ils montrent un peu plus la vie ailleurs que sur le théâtre des opérations.
    Merci.
    Monsieur le président, me permettez-vous d'intervenir à ce sujet? Pour ce qui est des médias, j'avais un préjugé à la fois positif et négatif à leur égard.
    Je pense que le comité sera heureux de vous entendre à ce sujet. Allez-y.
    C'est le papier sur lequel était écrit ma recommandation au ministre relativement au déploiement de nos chasseurs F-18 que je viens de chiffonner...
    Des voix: Oh, oh!
    Général R.J. Hillier: En vérité, je suis tout à fait d'accord avec ce que le ministre a dit et il n'est pas nécessaire que je lui adresse une quelconque recommandation sur l'utilisation de nos avions.
    Cela étant, monsieur, j'en reviens à votre question.
    Laissez-moi vous dire que nous avons vu, dans les médias, des comptes rendus très équilibrés sur cette mission complexe et sur toute la dynamique qu'elle suppose. Les reportages de Lisa LaFlamme, de Christie Blatchford et de bien d'autres étaient très équilibrés et très complets, car ces journalistes ont vécu auprès de nos militaires, sur les lieux des projets de reconstruction, aux côtés des Afghans.
    Et puis, il y a les autres, ceux qui restent à côté de leurs téléscripteurs. Il y a une dizaine de jours, quand j'étais là-bas, j'ai rencontré un groupe de journalistes et je leur ai demandé s'il leur arrivait de sortir. La plupart d'entre eux m'ont répondu qu'ils ne le faisaient que très peu. Ils mourraient d'envie de mettre le nez dehors et ils auraient eu la possibilité de le faire, mais leurs bureaux chefs au Canada leur refusaient de sortir pour faire leur travail. À l'évidence, leurs patrons redoutent les pertes, ils craignent certainement que leurs primes d'assurance n'augmentent et il n'y a peut-être pas que cela.
    Nous invitons les bureaux chefs des organes de presse à changer de politique à cet égard.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Cannis, avant de revenir à M. Hawn.
    Merci, monsieur le président.
    Je commencerai par dire que les médias sont également frustrés parce qu'ils ne sont pas suffisamment renseignés pour être en mesure de donner des versions complètes. Cela étant, je tiens, moi aussi, à souhaiter la bienvenue au ministre qui est un ancien membre de ce comité ainsi qu'au général Hillier.
    Je remercie tout d'abord le ministre de nous avoir répondu honnêtement à propos de sa décision relative à la requête que lui avait adressée le comité. Personnellement, je l'apprécie beaucoup.
    Cela dit, monsieur le ministre, je m'exprime ici au nom de tous les membres du comité pour vous dire que vous n'avez rien à craindre. Nous n'avions pas l'intention de vous demander de nous faire part des plans confidentiels, de ce que vous prévoyez de faire en Afghanistan, parce que je sais à quel point vous-même, le général Hillier et nous tous d'ailleurs avons à coeur la sécurité de nos hommes et de nos femmes, surtout de ceux et de celles qui se trouvent sur ce genre de théâtre d'opérations. Je vais prendre l'exemple du conflit au Kosovo. Le Parlement et les parlementaires de tous les partis étaient régulièrement informés de la situation quand ils en faisaient la demande et même avant, de sorte qu'ils étaient en mesure de répondre aux nombreuses questions que leur posaient les électeurs et la population en général.
    Soit dit en passant, comme je vous l'avais suggéré, monsieur le ministre, en m'adressant à vous par l'intermédiaire du premier ministre, certains membres de l'opposition assermentés en qualité de conseillers privés étaient régulièrement informés. Étant donné que nous sommes en guerre, comme le Premier ministre Harper l'a déclaré, je ne vois pas de meilleur temps, pour notre chef de gouvernement, de tendre la main à l'opposition et de respecter la tradition.
    J'ai une autre remarque à vous faire avant de vous poser deux petites questions. Vous avez dit que le gouvernement veillait à fournir aux militaires ce dont ils ont besoin pour s'acquitter de leurs missions. Cela me réjouit, parce que ce que je trouve de très intéressant dans ce comité, que j'ai présidé dans le passé à l'époque où vous en étiez membre et même sous la présidence de M. O'Brien, c'est que nous sommes tous sur la même longueur d'ondes. Tout ce qui nous intéressait, c'était de savoir comment appuyer notre armée, même dans des temps très difficiles, à l'époque de l'examen des programmes, quand nous essayions de faire notre possible avec votre appui et celui des autres.
    Pour mémoire, je tiens aussi à rappeler aux membres du comité et à ceux qui nous regardent et nous écoutent que, dans le budget de 2005, le gouvernement précédent avait prévu près de 13 milliards de dollars pour l'armée. Comme vous vous en souviendrez, général Hillier, vous vous étiez félicité de cet engagement devant les caméras de la télévision parce que vous étiez réjoui de cet apport de fonds pour l'armée, et je vous remercie d'ailleurs pour ce que vous avez dit à l'époque.
    Monsieur le ministre, vous avez déclaré que le terrorisme est une menace mondiale et nous sommes tous d'accord sur ce point. La question que me posent mes électeurs — et je crois que c'est la même que se posent les Canadiennes et les Canadiens un peu partout dans notre très beau pays — c'est que s'il s'agit d'une menace mondiale, comme vous l'avez justement fait remarquer, pourquoi est-ce que le reste du monde n'est pas à notre côté? Je sais que vous étiez récemment en Slovénie où vous avez essayé très fort de convaincre les autres ministres de se joindre à cet effort. Je vous en remercie. Il se trouve qu'ils n'ont toujours pas répondu à cet appel. Ils ne le font pas à cause de ce que vous avez décrit comme des réserves. Eh bien, il n'y a aucune réserve à émettre quand vient le temps de protéger notre société. Ce devrait être partout pareil, en Pologne, en Italie, en Allemagne... n'importe où ailleurs dans le monde. Nous menons une lutte contre le terrorisme mondiale, comme le général l'a dit un jour.
    Ainsi, comme le déclarait le général Hillier, nous sommes des acteurs... je ne veux pas le citer très précisément, mais il a dit que nous sommes écoutés à l'OTAN. Des membres de notre comités se sont rendus au quartier général de l'OTAN et j'ai été très fier de la façon dont ces gens-là perçoivent la présence militaire canadienne en Afghanistan. Pour l'instant, nous n'obligeons personne d'autre à nous imiter en rappelant à nos alliés que nous avons pris une décision et qu'il est temps qu'ils participent. Le terrorisme ne se limite pas à l'Amérique du Nord. Cela étant, monsieur le ministre, que pourrait faire le Canada, selon vous, pour combattre ces réserves et contraindre le reste de la communauté internationale de se joindre à nous pour lutter contre le terrorisme?
(1655)
    Quand j'étais en Slovénie — et je crois vous en avoir parlé, parce que vous y étiez aussi — j'ai eu une rencontre avec les représentants des pays présents dans le Sud à l'occasion de laquelle nous avons parlé de nos défis communs. Je résumerai cette discussion en vous disant que je leur ai demandé de faire pression sur les autres membres de l'OTAN qui ne sont ni dans le Sud ni dans l'Est afin qu'ils oublient leurs réserves et qu'ils envisagent d'engager plus de troupes. Depuis cette époque, le chef d'état-major de la Défense a pris langue avec ses homologues d'autres pays. Ce processus se poursuit. J'ai, personnellement, commencé à discuter avec les ministres de la Défense d'autres pays afin de leur demander, comme je l'avais fait dans le cas des pays présents dans le Sud, de faire pression sur ceux qui maintenaient leurs réserves afin qu'ils débloquent davantage de troupes.
    Nous aurons une rencontre à Riga, en novembre. Les chefs de gouvernement s'y réuniront et j'espère que, d'ici là, nous aurons accepté cette réalité et que nous aurons commencé à régler ce genre de problèmes, du moins en partie.
(1700)
    Merci, monsieur le ministre.
    J'ai peur que vous n'ayez épuisé votre temps, monsieur Cannis.
    Nous allons revenir à M. Hawn, avant de passer à Mme Bennett.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse au général. il a été question de coeur et de raison, ce qui fait un peu slogan. Il est possible que les Canadiens soient davantage perçus comme des soldats alliant le coeur et la raison que ceux d'autres pays. Toutefois, comment évoluer le long de cette ligne très fine entre le coeur et la raison sans négliger la sécurité de nos gens et des Afghans que nous sommes chargés de protéger?
    Ça, monsieur, c'est la grande question? Vraiment! Il arrive que l'on n'ait pas raison à 100 p. 100, comme nous l'avons constaté de façon tragique quand nous avons perdu quatre hommes d'un peloton en visite dans un village où ils distribuaient des fournitures scolaires à tout un groupe d'enfants qui n'avaient qu'une envie, celle de vivre. Quatre de nos militaires ont été tués ce jour-là parce qu'ils participaient à ce genre de mission.
    Il faut constamment rechercher l'équilibre. Cela ne se fait pas depuis le quartier général de la Défense nationale, parce que je connais pas assez la situation sur place. Nous déployons des commandants d'unité, jusqu'au niveau des sous-officier subalternes, qui sont merveilleusement formés, préparés et appuyés. Tous les jours, heure par heure, ils jugent de cet équilibre: quand ils sont coincés dans un véhicule blindé en train de traverser une secteur à toute vitesse et qu'ils ne parlent à personne; quand ils sont débarqués, qu'ils traversent un village à pied et qu'ils y rencontrent les habitants; ou encore quand ils retirent leur casque, leurs lunettes de soleil ou de protection balistique et qu'ils prennent un risque pour établir le contact visuel. Nos militaires sur le terrain jugent quotidiennement, heure après heure, de ce qu'il faut faire.
    Pour les aider dans cette tâche, nous mettons à leur disposition une énorme quantité de matériel pour qu'ils ne soient pas contraints de prendre ce genre de décision sauf nécessité absolue. Ils peuvent bien sûr balayer un secteur pour s'assurer, dans toute la mesure du possible, qu'il n'y a pas de Talibans et pour aider les forces nationales afghanes à nettoyer le secteur.
    Et puis, nous avons des équipes COCIM qui passent tout de suite derrière pour commencer à instaurer des relations avec les aînés dans les villages et pour prendre note de ce dont la population a désespérément besoin. Ces équipes peuvent tout de suite livrer ce qui est nécessaire, parce qu'elles savent, pour moitié au moins, ce qu'il faut à ces gens-là. Nous avons constaté que c'est ce genre de travail, sur deux plans, qui donne les meilleurs résultats.
    C'est pour pouvoir agir de façon un peu plus ferme et déterminée que nous avons notamment recommandé au ministre, qui nous a transmis par la suite l'autorisation du gouvernement, de déployer une compagnie afin d'assurer la sécurité des équipes COCIM parce que c'est là que le bât blessait. Nous assurions, jusque-là, la sécurité du complexe de l'EPR, mais nous ne pouvions pas quotidiennement déployer suffisamment d'équipes COCIM à partir des ressources et des capacités dont nous disposions afin de leur permettre de rencontrer des gens sur le terrain. Pour cela, il fallait assurer une sécurité supplémentaire et c'est ce qui nous a amené à réclamer le déploiement d'une autre compagnie.
    Il faut donc agir sur plusieurs plans, monsieur Hawn. Ce n'est jamais parfait. Nous apprenons tous les jours. Tout à l'heure, le ministre vous a parlé des « leçons apprises ». Quand quelque chose se produit quelque part, nous dépêchons une équipe sur le terrain dans les deux heures qui suivent afin d'analyser ce qui s'est produit et d'en tirer des enseignements immédiats. Dans les deux à quatre heures suivantes, toute notre organisation en Afghanistan est saisie des constats. Dans les 24 à 36 heures, c'est Ottawa qui est au courant et qui peut commencer à chercher une façon d'améliorer la conduite des opérations. Il s'agit donc d'un processus d'apprentissage permanent qui constitue le troisième volet de notre action sur place.
    Bien. Merci, général.
    Monsieur le ministre, lors d'un récent débat en Chambre sur le Soudan, quelqu'un a dit que le ministre de la Défense nationale avait reçu une note indiquant que 1 200 ou 1 600 soldats supplémentaires — les chiffres variaient selon les versions — pourraient être envoyés au Soudan. Pouvez-vous nous en parler?
    Je ne suis pas au courant de cette note. Je ne me rappelle pas avoir reçu quelque chose de tel. Nous n'avons certainement pas les moyens, sauf si nous nous trouvions en situation extrême, d'envoyer autant de militaires ailleurs dans le monde et nous ne pourrions certainement pas tenir la distance. Je ne me rappelle pas avoir reçu ce genre de note.
    Peut-être qu'elle a été adressée à un autre ministre de la Défense nationale?
    Je ne sais pas. C'est possible.
    Général Hillier, vous rappelez-vous —?
    Je n'ai jamais envoyé ce genre de note, monsieur Hawn. De plus, je peux vous affirmé de façon catégorique que nous n'avons pas les 1 200 ou 1 600 militaires en question. Je viens tout juste de me livrer à un examen minutieux de nos opérations pour nous assurer que nous allons pouvoir répondre aux exigences de notre mission en Afghanistan, de façon pragmatique, avec logique, et je peux vous dire que nous n'avons pas les moyens d'entreprendre une mission importante ailleurs.
    Très bien, ça va.
    Ma prochaine question s'adresse à vous deux, messieurs.

[Français]

    Y a-t-il une chose plus importante que toutes les autres pour assurer l'avenir à long terme des Forces canadiennes?
(1705)

[Traduction]

    Y a-t-il une chose, plus importante que n'importe quoi d'autre, pour assurer l'avenir à long terme des Forces canadiennes?
    À long terme, après la mission: l'avenir à long terme des Forces canadiennes.
    Pour ce qui est de l'avenir à long terme des Forces canadiennes, je crois que nous devrons disposer d'un plan cohérent et des fonds nécessaires pour en assurer la mise en oeuvre. Il s'agira d'investir à long terme dans nos forces. Pendant de nombreuses années, celles-ci ont été sous-financées, ce qui a occasionné une pénurie d'effectifs. Le général vous a indiqué tout à l'heure que, quand l'armée veut déployer une compagnie d'infanterie, elle doit en fusionner deux.
    Nous sommes aux prises avec un énorme problème du point de vue du rééquipement de nos forces et nous devons relever le défi des effectifs militaires. Il faudra du temps et beaucoup d'argent pour que le Canada dispose d'une force armée efficace digne d'un pays du G-8.
    Merci.
    Excusez-moi, je ne voulais pas vous déstabiliser avec mon français.
    Disons que vous nous avez un peu pris par surprise.
    C'est Mme Bennett qui mettra un terme à cette deuxième série. Vous avez cinq minutes, madame.
    Vous savez, je pense, que les Canadiens ne sont pas encore très certains de ce que nous faisons là-bas et ils se demandent comment il se fait que la nature de notre mission a été modifiée en cours de route, surtout en ce qui concerne les trois D. J'aimerais savoir si vous avez prévu quoi que ce soit pour permettre aux Canadiennes et aux Canadiens de participer à la prise de décisions relativement à l'évolution de la mission, à la mesure dans laquelle...
    Nous pensions que nous étions là-bas pour protéger les écoles, mais celles-ci sont rasées par centaines. On dirait que l'on fait quelque chose d'autre que ce que nous pensions. Ce sera d'ailleurs ma première question. Comment votre gouvernement en vient-il à décider de dépenser plus d'argent soit dans les opérations militaires, soit dans l'aide au développement? En quoi les Canadiens seront-ils appelés à participer à ce genre de décision?
    Deuxièmement, j'aimerais savoir si, à leur retour au Canada, tous les militaires sont testés pour le SSPT et s'ils sont traités et pris en compte avant qu'on envisage de les renvoyer là-bas?
    Troisièmement, le général Hillier avait demandé... je crois savoir que les soldats, eux, sont traités à la base, mais leurs familles doivent attendre deux ans pour trouver un médecin de famille sur place. Vous continuez à ne pas estimer que les familles des militaires font partie de leur vie. Les militaires souffrant du SSPT risquent fort de tomber dans la violence familiale et j'estime que nous ne les appuyons certainement pas en n'aidant pas leurs familles.
    Je vais essayer de vous répondre le plus brièvement possible.
    En fait, rien n'a changé. Nous appliquons le même plan que celui du gouvernement précédent qui avait décidé d'envoyer des militaires à Kandahar. Le problème, c'est qu'au cours des derniers mois, l'insurrection a redoublé d'intensité, ce qui nous a contraints à mener davantage d'opérations de combat contre les Talibans.
    Vous aurez pu constater que nous ne faisons pas qu'accroître la capacité de notre armée pour mener des opérations militaires, des opérations de combat, mais que nous déployons également des ressources pour garantir le succès de la mission. Nous n'avons pas perdu de vue le fait que nous devons, en même temps, faire de l'aide au développement; le problème, pour l'instant, c'est que l'insurrection est beaucoup plus active qu'avant. Quand nous aurons maîtrisé cette insurrection, que nous l'aurons écrasée, nous pourrons insister davantage sur l'aide au développement. Il demeure que nous sommes tournés vers le développement, parce que nous voulons lancer des projets et obtenir des résultats. Vous avez lu, dans la presse, ce que cela donne, puisque récemment six de nos militaires ont été tués pendant qu'ils essayaient de reconstruire une route.
    Je vais inviter le chef d'état-major à vous en parler de façon plus précise, mais sachez qu'à leur retour de mission, nos militaires sont soigneusement évalués des points de vue physique, médical et psychologique.
    Quant aux médecins de famille, je vais vous dire une chose: officiellement, les Forces canadiennes et le gouvernement du Canada ne sont pas responsables des soins médicaux aux familles, sauf en régions éloignées. Le ministère de la Défense nationale est uniquement responsable des soins à apporter aux soldats, aux marins, aux aviateurs et aux aviatrices, ce qui n'a pas empêché les Forces canadiennes d'agir très rapidement dans les centres de soutien aux familles, dans les régions qui ne se trouvent pas aux alentours d'un grand centre urbain, pour prendre les dispositions voulues avec les autorités locales et essayer de mettre la main sur des médecins susceptibles de dispenser des soins sur place.
    Ce qui se passe à Petawawa est un exemple. Ce n'est pas une grande ville et il existe là-bas une pénurie de médecins. Toutefois, le centre local de soutien des familles et les autorités locales ont pris des dispositions pour faire venir des médecins à temps partiel afin de prendre les familles en charge. Cependant — comment dire? — ce n'est pas la responsabilité première du gouvernement fédéral.
(1710)
    Ce n'est pas ainsi que l'on traite les familles. On ne peut pas faire de médecine familiale si l'on ne voit pas toute la famille.
    C'est peut-être vrai, mais tout ce que je dis, c'est que nous essayons de faire de notre mieux et que, sauf dans des régions isolées, nous ne pouvons pas promettre que les Forces canadiennes...
    Pourquoi? Je pensais que vous vouliez appuyer nos militaires.
    Parce que, dès ce moment-là, on déborde en territoire constitutionnel. Ce sont les provinces qui sont chargées des soins médicaux et vous devriez le savoir, vous qui êtes médecin —
    Je sais que nos militaires ne sont pas correctement traités. Certains d'entre eux, monsieur le ministre, se trouvent sur une liste d'attente et ils doivent patienter jusqu'à deux ans.
    Je suis désolé, monsieur le ministre, le temps réservé à cette question est écoulé.
    Le temps est effectivement écoulé, mais si le général désire dire un mot à cet égard, ça ira.
    Voilà qui met un terme à notre deuxième série de questions. Nous passons maintenant à la troisième série; il nous reste 20 minutes et nous tournerons à raison de cinq minutes par question. Nous allons suivre l'ordre qui était convenu d'avance, soit le parti Libéral en premier avant de revenir au gouvernement, puis de passer au Bloc et, enfin, de revenir une dernière fois au gouvernement, ce qui devrait nous amener vers la fin de la séance.
    Je devrais bien pouvoir poser une autre petite question, monsieur le président.
    Eh bien, vous êtes maintenant tout en bas de la liste, mais si tout le monde rogne un peu sur son temps d'intervention, nous pourrons...
    Nous allons commencer par M. Dosanjh avant de passer à Mme Gallant, pour cinq minutes chacun.
    Monsieur le ministre, je tiens à ce qu'il soit consigné pour mémoire que je ne suis pas d'accord avec vous sur le fait que la mission est la même que celle qu'avait annoncée notre gouvernement. Celle-ci ne correspond plus du tout à l'objectif de départ. Nous ne parvenons pas vraiment à acheminer l'argent de l'ACDI à l'EPR. Tout ce que nous faisons depuis plusieurs mois, c'est la guerre. La sécurité fait partie de la mission, mais cette mission est complètement déséquilibrée.
    Il y a une question que je tiens à vous poser. Dans nos échanges à propos des préparatifs et des discussions que vous avez pu avoir quand vous avez déposé la motion de prolongation devant la Chambre, il est clairement ressorti que le général Hillier et d'autres militaires ont pris des mesures extraordinaires pour s'assurer que nous ne manquerions pas de soldats afin de pouvoir assumer cette mission jusqu'en 2009.
    Voici ma question, monsieur. Avez-vous véritablement songé au fait que nous risquions fort de nous retrouver au maximum de nos capacités en prolongeant la mission de façon précipitée, comme vous l'avez fait, jusqu'en 2009?
    Je vous répondrai très brièvement par l'affirmative, monsieur Dosanjh, parce que nous avons effectivement envisagé la chose, et je tiens à vous rappeler que vous avez voté contre le prolongement de la mission. Oui, nous avons fait ce genre de calculs sur les conseils du chef d'état-major de la Défense que j'inviterai à réagir à ce sujet dans un instant. Nous avons intégré cette dimension sur la foi des meilleurs conseils militaires que nous avons reçus à l'époque.
    Général.
    Je dirai simplement, d'un point de vue strictement militaire, que notre mission est demeurée la même, soit aider les Afghans à rebâtir eux-mêmes le pays qu'ils souhaitent en appliquant un processus politique démocratique afin de bénéficier de tous les bienfaits susceptibles d'en découler, ce qui veut dire, en ce qui nous concerne, que nous devons éliminer les terroristes et renforcer la sécurité et la stabilité pour les populations sur place.
    Nous effectuons énormément de missions de combat parce que c'est la menace à la sécurité à court terme qui constitue le principal obstacle à la reconstruction du pays. Quant à dire que c'est tout ce que nous faisons, c'est tout à fait faux. Nous menons toute une diversité d'actions de reconstruction dans le Sud en collaboration avec les Affaires étrangères et l'ACDI. Nous construisons des ponts et une route, nous apportons l'aide médicale dans les villages et nous contribuons à la reconstruction des écoles. Nous collaborons avec le gouverneur de Kandahar et les conseils des tribus pour les aider à se doter des moyens et des procédures efficaces qui leur permettront de donner à la population ce dont elle a besoin. Nous sommes en train d'aider la police nationale à se former et à s'équiper. Nous aidons la police à se hisser au niveau qui lui permettra de s'occuper entièrement des questions de sécurité une fois que l'armée afghane sera parfaitement opérationnelle et que la menace talibane aura été éradiquée.
    Nous faisons tout cela pendant que nous poursuivons les combats. Des centaines d'autres organisations sont présentes sur le terrain et d'autres pays dépensent aussi de l'argent au titre de la reconstruction, ce qui m'amène à vous préciser que je ne parle que pour une petite partie de cette vaste entreprise. Il demeure qu'il ne faudrait pas sous-estimer les effets de notre action.
    Une partie de l'argent de l'ACDI a permis de vacciner les enfants, chose qui va de soi au Canada où nos enfants sont systématiquement vaccinés contre les maladies les plus courantes. Nous n'avons même pas à y réfléchir, c'est automatique. En Afghanistan, c'est la première fois qu'une telle campagne de vaccination a lieu. Grâce au 2 millions de dollars de l'ACDI, 5 millions d'enfants ont été vaccinés contre la polio qui est la principale cause de décès dans ce pays. Quand on voit les petits enfants courir dans la rue — 55 p. 100 de la population a moins de 14 ans, ce qui fait que la moyenne d'âge est légèrement inférieure à celle des gens autour de cette table — on constate qu'ils portent les stigmates de la maladie et qu'ils sont assaillis de parasites, et l'on se rend tout suite compte que ces programmes font des merveilles pour les gens, pas uniquement à Kandahar, mais dans le reste de l'Afghanistan. On s'aperçoit que notre action ne consiste pas uniquement à combattre.
    Il sera nécessaire pour nous de livrer bataille tant que les Talibans continueront à s'attaquer au processus de reconstruction, parce que nous sommes là-bas pour aider les Afghans. Les Talibans sont les grands responsables de la guerre, mais les autres Afghans — la majorité de la population afghane ainsi que dans le sud de Kandahar — veulent que nous les aidions à reconstruire leur pays.
(1715)
    Une minute.
    Monsieur le ministre, s'il est question de qualifier la mission, il est évident que celle-ci a pour objet de stabiliser le pays, ce que je comprends. Il s'agit d'une mission militaire et de reconstruction. En fait, la raison d'être de cette mission, c'était la reconstruction, les militaires ne devant intervenir que pour assister l'EPR.
    Or, il semble que tout porte maintenant sur le côté défense, contrairement à ce qu'un porte-parole de l'OTAN a déclaré. En janvier dernier, le major Andrew Elms, porte-parole britannique des forces de l'OTAN, a dit qu'il fallait voir dans les forces militaires étrangères présentes en Afghanistan des policiers armés ne cherchant pas à engager le combat. Eh bien, ce n'est certainement pas la mission que nous conduisons aujourd'hui, monsieur.
    Je ne suis pas d'accord avec vous, monsieur Dosanjh. La mission est toujours la même. La mission de l'armée n'a pas changé d'un iota par rapport à celle que lui avait confiée le gouvernement précédent. Ce qui a changé, c'est que les insurgés sont maintenant plus actifs, ce qui a nécessité le déploiement d'une force armée supérieure, justement pour essayer d'écraser l'insurrection et de pouvoir assurer la reconstruction du pays.
    Notre gouvernement s'intéresse par-dessus tout au développement — à la gouvernance, au développement et à la sécurité. La sécurité vient en appui du développement et c'est ce que nous essayons de faire, malgré des conditions très éprouvantes.
    Merci, monsieur le ministre.
    Madame Gallant, après quoi nous repasserons au Bloc.
    Merci, monsieur le président.
    Que pourrions-nous faire pour mieux expliquer aux Canadiennes et aux Canadiens les réalisations incroyables, mais peu connues, de nos soldats en Afghanistan?
    Très souvent, ce sont les soldats eux-mêmes qui sont les meilleurs porte-parole. Beaucoup sont interviewés par les journaux locaux, par les médias locaux quand ils rentrent au pays, et ils peuvent alors expliquer leur situation. J'ai été impressionné par la qualité de nos soldats, de nos marins et de nos aviateurs et par l'éloquence avec laquelle ils expriment leurs sentiments vis-à-vis de la mission. Ils ne cessent de répéter qu'ils sont convaincus du bien-fondé de la mission.
    Même les familles des soldats que je rencontre à Trenton, quand nous accueillons les militaires à leur retour de mission, me disent et disent au chef d'état-major que leurs proches et elles-mêmes sont convaincus du bien-fondé de la mission. Je crois que nous pourrions aider la population à comprendre ce dont il retourne si nous permettions aux militaires d'expliquer ce qu'ils sont allé faire là-bas.
    À l'approche du Jour du Souvenir, certaines filiales de la Légion recherchent des conférenciers d'honneur. Les soldats de retour d'Afghanistan pourraient-ils être autorisés à témoigner de ce qu'ils ont vu là-bas?
    Oui.
    Pourriez-vous nous parler un peu des soins prodigués aux blessés sur le théâtre des opérations et à Landstuhl? Quel genre de soins nos blessés reçoivent-ils sur place et après leur évacuation?
    Je vais demander au chef d'état-major de vous répondre.
    Ils reçoivent des soins de qualité supérieure, madame Gallant. Je me suis entretenu avec de nombreux soldats blessés, principalement à Kandahar et à Landstuhl, en Allemagne, mais aussi ici, au Canada, dans les différents hôpitaux où ils se retrouvent. Tous, sans exception, ont été dithyrambiques à propos de notre hôpital de rôle 3 à Kandahar, qui est une installation multinationale dirigée par les Canadiens et où l'on retrouve des médecins et des assistants britanniques, américains et hollandais qui se partagent le fardeau. Cet hôpital de campagne dispose d'une équipe incroyable et les militaires — notamment les deux ou trois au chevet desquels je me suis assis quand je me trouvais sur place il y a deux semaines — nous disent qu'ils n'ont jamais reçu de soins d'une telle qualité. Ce sont pourtant des soins qu'on leur a prodigués dans un milieu hostile. Nous estimons nécessaire de dispenser ce genre de soins si nous voulons pouvoir leur demander de prendre des risques et d'accomplir des missions dangereuses.
    Deuxièmement, presque tous les blessés qui sont passés par Landstuhl — pour ne pas dire absolument tous — nous disent qu'il s'agit du plus formidable établissement médical au monde. C'est ce qu'ils en disent.
    Les familles qui se rendent à Landstuhl — comme cela arrive parfois quand nous nous attendons à ce que leurs proches restent plus de quelques jours sur place, surtout s'ils sont grièvement blessés — sont d'accord avec cette évaluation. À leur retour au Canada, elles nous disent qu'il n'y a rien de mieux que le Centre médical régional de Landstuhl.
    Afin de pouvoir dignement remercier les équipes qui travaillent là-bas, je leur ai rendu visite la semaine dernière. En novembre, je retournerai en Europe pour une série de réunions et, à cette occasion, j'irai remettre à ces équipes soignantes une mention élogieuse des Forces canadiennes à l'intention des unités parce qu'elles ont si bien soigné nos soldats et leurs familles.
    Au Canada, nous travaillons avec les centres régionaux. Je pense, par exemple, au centre de santé de l'Université de l'Alberta ainsi qu'à l'Hôpital Civic, à Ottawa, afin de soigner ces merveilleux jeunes gens et jeunes femmes qui retournent blessés d'Afghanistan.
    Il y a quelques semaines, le soldat Mike Spence était présent sur la Colline à l'occasion du rassemblement d'appui aux soldats canadiens, le fameux « vendredi rouge ». Lui-même et son père, qui est aussi militaire, sa mère et sa famille nous ont déclaré que Mike avait reçu des soins de qualité supérieure. Ils n'auraient pas réclamé quoi que ce soit de plus. Quand je suis allé au centre de santé de l'Université de l'Alberta, le personnel soignant a défilé pour me dire à quel point ces soldats blessés, ces hommes, ces gentilhommes, sont des patients merveilleux et il m'a demandé s'il était possible de les donner en exemple aux autres patients, parce que ces soldats ne se laissent abattre par rien. Ils veulent à tout prix aller mieux et sortir pour reprendre le cours normal de leur vie.
    Ce sont des soins de qualité supérieure que nous offrons, madame Gallant.
(1720)
    Merci.
    Dans le cadre de notre étude sur l'Afghanistan, des témoins sont venus me dire qu'il n'est pas approprié d'inciter les paysans à cultiver autre chose que de l'opium. Pourriez-vous nous dire pourquoi il est si important, au contraire, d'encourager les paysans à se tourner vers d'autres cultures?
    L'Afghanistan produit environ 90 p. 100 de l'opium distribué dans le monde. Pour l'instant, c'est le Royaume-Uni, au sein de l'OTAN, qui a pour responsabilité de lutter contre ce fléau.
    Le commerce de la drogue rapporte beaucoup d'argent aux Talibans. Les narcotrafiquants paient en effet les Talibans pour obtenir leur protection, ce qui permet à ces derniers de disposer de fonds pour se payer des soldats journaliers. Comme le chef d'état-major le disait tout à l'heure, le noyau taliban — c'est-à-dire l'organisation professionnelle — n'est pas forcément très important, mais les Talibans peuvent se payer des soldats à 12 dollars américains par jour, ce qui est un très bon salaire en Afghanistan, grâce au narcotrafic.
    Si l'on se contente de détruire les cultures sans indemniser les paysans, on se les met à dos. Certains d'entre eux estiment que c'est la seule culture qu'ils peuvent faire pousser actuellement. On ne leur a pas proposé d'autres choix.
    Comme je le disais, notre gouvernement et nos militaires ne participent pas à la lutte contre la drogue, mais force est de reconnaître que l'opium est la première raison de certaines de nos actions. Peu importe la solution à laquelle l'OTAN et le gouvernement afghan parviendront en fin de compte, il faudra que celle-ci comprenne le dédommagement des paysans. Il leur faut un gagne-pain pour pouvoir assurer la survie de leurs familles.
    La chose est encore à l'étude et je ne pense pas que l'on ait déjà arrêté une approche cohérente pour lutter contre le narcotrafic. Il arrive, de temps en temps, que l'armée et la police afghane se rendent dans ces régions et détruisent les cultures. Nous voulons, certes, détruire ces cultures afin d'éradiquer l'opium qui est nocive pour les populations, sauf sur un plan médical, mais nous devons trouver une solution pour indemniser les paysans afin de leur permettre de conserver un gagne-pain.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Bachand avant de revenir au gouvernement.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Dans notre recherche de résolution de conflit, puisque nous essayons toujours de faire en sorte que le conflit ne s'éternise pas, il existe un sujet que nous n'avons pas encore abordé aujourd'hui, la question du Pakistan.
     De plus en plus, on entend dire que les services secrets pakistanais donnent véritablement refuge aux talibans et que la frontière est extrêmement poreuse. C'est-à-dire que, lorsque les talibans sont repoussés, ils franchissent tout simplement la frontière, ils vont se ressourcer et se réapprovisionner du côté pakistanais, et ils reviennent attaquer les forces internationales.
     Je sais que votre visite à M. Musharraf, dernièrement, n'a pas été couronnée de succès. J'ai entendu M. Musharraf sur les ondes de la CBC. Il ne souhaitait pas croiser le fer militaire avec les soldats canadiens. Votre tentative relative à la possibilité qu'on fasse des patrouilles mixtes et autres était bonne, à mon avis.
    J'aimerais savoir si vous avez des discussions avec votre collègue le ministre des Affaires étrangères pour essayer de régler ce problème. Si on n'arrive pas à régler le problème pakistanais, à rendre la frontière plus hermétique ou à convaincre le gouvernement pakistanais de ne pas donner refuge aux talibans, il me semble que la résolution du conflit pourrait être beaucoup plus longue. Il circule des rumeurs à l'effet qu'il y aurait actuellement des ententes avec les talibans.
    J'aimerais savoir si des discussions sont entamées au gouvernement, entre vous et votre collègue des Affaires étrangères, pour essayer de résoudre ce problème.
(1725)

[Traduction]

    L'un des défis auxquels nous nous heurtons dans le Sud tient à ce que nous avons affaire à des pashtounes... Ils sont environ 12,5 millions du côté afghan de la frontière, et ils constituent la tribu dominante dans les provinces de Kandahar et d'Helmand, de même que dans de nombreuses autres provinces dans le Sud et dans l'Est. À l'échelle du Pakistan, ils sont environ 22 millions. Ainsi, les pashtounes représentent en tout 33 millions d'individus, ce qui équivaut à la population du Canada. Il peut y avoir des exceptions, mais presque tous les Talibans sont des pashtounes.
    Sur la carte, il existe bien une frontière entre le Pakistan et l'Afghanistan, mais en réalité celle-ci est poreuse. Il y a des montagnes et des déserts qu'il est possible de traverser n'importe quand. Évidemment, on ne sait pas nécessairement, quand on voit passer des groupes de deux ou trois individus, qu'il s'agit de Talibans, parce que ce sont simplement des membres de la tribu.
    Les pashtounes n'ont pas besoin de montrer patte blanche à la frontière, pas plus dans un sens que dans l'autre, parce qu'ils ont le même genre de droits que la plupart des Autochtones canadiens qui peuvent librement franchir la frontière canado-américaine. Et cela, c'est un problème.
    Et puis... Comment dire? Histoire de compliquer les choses, l'Afghanistan entretient avec le Pakistan un différend quant à l'emplacement de la frontière.
    Quand j'ai rencontré le ministre de la Défense du Pakistan, lors de ma récente vite là-bas, et lors de ma réunion d'hier avec le président du Sénat, j'ai répété à mes interlocuteurs que nous apprécions ce que fait leur pays. Les pakistanais ont massé quelque 80 000 ou 90 000 hommes de troupe le long de leur frontière avec l'Afghanistan et ils suppriment des Talibans. Ils ont affaire à d'autres insurgés sur leur territoire, mais ils s'attaquent aux Talibans.
    Nous leur avons toutefois demandé de faire davantage parce que cette frontière représente une porte grande ouverte sur notre secteur. Comme les renforts talibans arrivent du Pakistan, nous avons demandé à nos homologues pakistanais de faire un effort supplémentaire.
    À titre de mesure très modeste destinée à renforcer la confiance, j'ai suggéré au président du Sénat que j'ai rencontré hier, et qui s'est montré très réceptif, d'accueillir un de nos officiers de liaison. Une journaliste pakistanaise — dont la connaissance de l'anglais ne devait pas être très bonne — a traduit « officier de liaison » par « soldats ». Moi, je voulais que nous placions un de nos officiers de liaison au sein du 12e Corps d'armée pakistanais, qui est stationné au sud de notre position, du côté pakistanais — dans le sud de notre province — et que nous intégrions un officier de liaison pakistanais à notre quartier général de Kandahar.
    Je n'ai jamais laissé entendre que nous enverrions des troupes alliées au Pakistan. Je me disais que, si nous avions des officiers de liaison des deux côtés de la frontière, nous pourrions accroître le niveau de confiance réciproque, ces gens-là ayant la possibilité de régler les problèmes courants et de s'échanger des informations.
    J'ai reçu des réactions plutôt positives à cet égard et j'entends poursuivre mon idée. Nous allons continuer, par le truchement de notre gouvernement — et l'OTAN va faire de même par le truchement de son commandement de la FIAS — d'inciter les pakistanais à faire davantage au niveau de la frontière. Plus nous pourrons investir d'efforts au niveau de cette frontière pour éliminer les Talibans et mieux nous nous en porterons, nous-même et l'Afghanistan.
(1730)
    Merci, monsieur le ministre.
    Nous allons bientôt manquer de temps. On me dit que le timbre nous appellera au vote à 17 h 30 et, si mes collègues du gouvernement me le permettent, je vais prendre une minute pour conclure.
    Merci beaucoup de vous être déplacés aujourd'hui. Nous comprenons — et je crois pouvoir parler pour tout le comité — les pressions qui s'exercent sur le MDN et les FC à cause de ce déploiement de très grande envergure. Nous avons demandé que des fonctionnaires et des représentants de ces deux institutions viennent rencontrer le comité et je dois dire que la collaboration a été plutôt bonne jusqu'ici. Nous comprenons qu'il arrive que des gens doivent reporter leur rencontre avec nous ou assumer d'autres fonctions, mais nous espérons, monsieur le ministre, que vous donnerez suite à votre intention de réévaluer cette question. Je pense pouvoir vous dire que le comité l'apprécierait beaucoup.
    Nous sommes également conscients qu'en ce moment de l'histoire de notre pays, notre comité est appelé à faire un travail extrêmement important. Nous allons nous atteler à la rédaction du rapport sur l'Afghanistan non seulement pour permettre au Parlement de mieux comprendre la situation, mais aussi pour mieux expliquer aux Canadiennes et aux Canadiens ce que nous faisons là-bas.
    J'ai vous ai trouvé tous les deux très francs dans vos réponses, ce que nous apprécions. Nous espérons que la situation s'améliorera dans les jours à venir et que nous allons commencer à obtenir les résultats que nous recherchons en Afghanistan.
    Avant de lever la séance, j'ai le plaisir d'annoncer au comité que la Chambre vient d'approuver notre déplacement à Petawawa prévu pour mardi prochain. Le greffier vous donnera des précisions à ce sujet, mais nous avons également une réunion de prévu lundi et je vous invite à tendre l'oreille pour avoir des nouvelles. Prévoyez un lever à l'aurore mardi prochain.
    La séance est levée.