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Monsieur le président, je tiens à remercier le Comité permanent de la défense nationale de m'avoir invitée à traiter de la présence canadienne en Afghanistan, tout particulièrement des aspects liés au développement.
Je suis accompagnée aujourd'hui de M. Robert Greenhill, président de l'ACDI, et de M. Philip Baker, directeur général du programme de l'Afghanistan à l'ACDI.
Je vous adresse la parole aujourd'hui pour parler des efforts que font le gouvernement du Canada, nos partenaires afghans, notamment le gouvernement démocratiquement élu de Hamid Karzaï, et nos partenaires canadiens dans l'ensemble de l'Afghanistan, et plus particulièrement dans la région de Kandahar.
Au cours de mon voyage là-bas au mois d'octobre, j'ai pu constater combien la collaboration entre les Forces canadiennes et la GRC, entre le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et l'ACDI, est efficace.
L'Équipe provinciale de reconstruction, qui comprend des membres des Forces canadiennes, des diplomates et des agents de développement de l'ACDI, est la pierre angulaire à partir de laquelle nous poursuivons nos objectifs dans la région. Comme le président Karzaï l'a lui-même souligné lors de sa visite au Canada, la mission de nos troupes est essentielle pour assurer la sécurité et pour créer un climat de paix. Sans la sécurité, rien ne peut se construire ni se développer.
[Traduction]
Nos troupes ont pour mission de protéger... dans un but bien précis. Leur rôle est d'élargir, à Kandahar, le rayon d'action du gouvernement afghan élu démocratiquement. Et le rôle de l'ACDI, au sein de l'EPR, est de trouver des solutions aux sources d'insécurité. C'est de contribuer à mettre en place les conditions d'un développement durable. Il faut donc commencer par répondre aux besoins essentiels de la population.
[Français]
Par l'intermédiaire de l'Équipe provinciale de reconstruction, nous mettons en oeuvre un éventail d'activités à Kandahar. Par exemple, 5 millions de dollars sont consacrés à la vaccination de tous les enfants contre la polio dans le sud de l'Afghanistan, y compris 350 000 dans la province de Kandahar. Nous avons aussi consacré 4,9 millions de dollars à la distribution de vivres à des milliers de familles déplacées et touchées par la sécheresse. Rappelons que toutes ces personnes doivent maintenant faire face aux rigueurs de l'hiver.
Nous avons versé 3,1 millions de dollars à d'importantes initiatives visant les infrastructures dans six districts de Kandahar, par exemple des ponts et des barrages de corrections. Ces initiatives servent à améliorer la vie et la productivité de plus de 500 000 habitants de Kandahar.
La population a également bénéficié d'un programme de travaux rémunérés en argent comptant pour réparer des routes rurales dans Kandahar.
[Traduction]
Des représentants de l'ACDI ont récemment rendu visite à des aînés dans des villages, y compris dans des villages des districts de Panjwai et de Zharey. Ils ont pu entendre ces leaders communautaires de Kandahar leur parler des besoins urgents de leurs collectivités. Ils nous ont dit qu'ils ont besoin d'une aide humanitaire à court terme, tout particulièrement pour aider ces familles déplacées par les violentes mais vaines attaques des talibans dans le district de Panjwai. Ils nous ont dit qu'ils ont besoin d'une aide au développement constante pour les aider à reconstruire leurs collectivités, pour les aider à créer des possibilités d'emploi constructives pour les jeunes.
Les conseils du district de Kandahar ont récemment dressé par ordre de priorité une liste de leurs besoins les plus urgents, par exemple l'accès à l'eau potable, des ponts et des systèmes d'irrigation.
[Français]
En plus d'initiatives orchestrées par l'Équipe provinciale de reconstruction, le gouvernement canadien joue un rôle prépondérant dans l'appui aux programmes nationaux afghans qui sont déployés dans tout le pays, et plus particulièrement à Kandahar.
Le ministre de l'Aménagement et du Développement ruraux, M. Ehzan Zia, est récemment venu au Canada pour parler à la population canadienne des progrès enregistrés dans son pays au chapitre du développement. Le ministre Zia a exprimé sa gratitude envers le Canada pour l'appui que nous fournissons au Programme de solidarité nationale. Ce programme a été conçu par son ministère. C'est également lui qui l'administre. Le Canada appuie ce programme, car il donne des résultats probants. Il reflète également les principes qui sont au coeur de notre action et que nous partageons avec le gouvernement afghan: la démocratie et l'égalité entre les femmes et les hommes. En vertu de ce programme, les projets sont administrés par des conseils de développement communautaire élus par les collectivités locales. Des femmes siègent à ces conseils.
À Kandahar, jusqu'à présent, ces programmes ont donné d'excellents résultats dans près de 400 villages. D'autres villages en profiteront bientôt. À Kandahar, les projets de l'Équipe provinciale de reconstruction sont achevés au rythme d'environ 10 à 20 nouveaux projets par mois. Pour l'instant, ils sont déployés dans sept districts de Kandahar. Nous finançons leur déploiement dans deux autres des 17 districts de Kandahar. Ils le seront également ailleurs.
Dans la seule province de Kandahar, avec l'appui de notre gouvernement et d'autres donateurs, les projets de l'Équipe provinciale de reconstruction ont donné des résultats probants améliorant la vie des villageois et de la population rurale. Par exemple, plus de 1 000 puits ont été creusés et 800 pompes manuelles distribuées; quatre grands réservoirs d'eau ont été mis en service; 100 kilomètres de canaux d'irrigation ont été remis en état; le réseau de transport provincial a été amélioré, ainsi que le réseau électrique, ce qui représente 150 kilomètres de nouvelles routes, quatre ponts, 50 kilomètres de lignes d'énergie électrique, 10 transformateurs et 42 génératrices d'électricité.
[Traduction]
Le ministre Zia a dit aux Canadiens que cette aide était à la fois cruciale et appréciée. La mission militaire du Canada vise d'abord et avant tout à aider Kandahar à se relever de la dévastation causée par plus de 25 ans de conflits. Si, au chapitre de la diplomatie et du développement, le Canada déploie davantage d'efforts à Kandahar, il travaille également dans le reste du pays. Les progrès auxquels nous contribuons dans le reste de l'Afghanistan participent à stabiliser l'ensemble du pays. Consolider ces progrès, c'est veiller à ce que ces régions ne soient plus sujettes à l'instabilité.
[Français]
Les efforts fournis par les Forces canadiennes, l'ACDI, les Affaires étrangères et la GRC en vue de stabiliser Kandahar contribuent à instaurer le climat de sécurité nécessaire au développement. Les progrès réels que nous enregistrons dans le reste du pays prouvent que le progrès est bel et bien possible. Ils prouvent que Kandahar aura également sa part de progrès une fois que la région sera stabilisée.
[Traduction]
Le Canada se concentre sur le développement, et le développement fonctionne, mais c'est un travail de longue haleine et le Canada s'est engagé à long terme. Nous avons toutes les raisons de croire que nous atteindrons nos objectifs, de concert avec nos partenaires. Deux millions de fillettes vont maintenant à l'école. Sous le régime des talibans, aucune petite fille n'allait à l'école.
[Français]
À l'échelle de l'Afghanistan, on a recensé jusqu'à présent plus de 8 100 projets découlant du travail des conseils communautaires, et moins de 1 p. 100 de ces projets ont été attaqués par des rebelles. C'est précisément pour cette raison que nous travaillons avec des partenaires locaux, des conseils élus, des représentants de la population, et que nous nous assurons qu'ils dirigent pleinement ces projets, parce que ces personnes jouissent d'un appui considérable. Il n'y a pas meilleur moyen de promouvoir la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit.
En plus de fournir de l'aide au Programme de solidarité nationale, le Canada est le premier donateur au programme national de microcrédit, connu sous l'acronyme MISFA, Mécanisme de microfinancement et de soutien en Afghanistan. Grâce à ce programme lancé par le gouvernement afghan en juin 2003, au-delà de 200 000 personnes à faible revenu ont reçu des petits prêts. Elles ont ainsi pu ouvrir un commerce alimentaire ou acheter du bétail, ou lancer un autre genre de petite entreprise. L'Afghanistan comporte un énorme potentiel de libre entreprise.
C'est pour cette raison qu'en septembre dernier, le gouvernement du Canada a versé 12 millions de dollars au MISFA. Cette somme provient des 40 millions de dollars que le Canada a réservés au MISFA. Le programme finance 13 établissements de microfinancement qui offrent divers services financiers en vue de générer des revenus et le développement des entreprises, de même que des prêts personnels aux gens à faible revenu. Les montants empruntés sont investis dans des entreprises des secteurs du commerce et de la vente au détail, de l'agriculture et de l'élevage, de l'artisanat et de la fabrication.
Cette initiative, qui constitue l'un des rares moyens d'améliorer directement le statut et les conditions de vie des femmes et de leur famille, a donné d'excellents résultats jusqu'à maintenant. Elle permet d'aider des Afghans, et surtout des femmes, puisque ces dernières représentent 75 p. 100 des bénéficiaires. En tout, des prêts de plus de 70 millions de dollars ont été accordés dans 18 provinces de l'Afghanistan, et 98 p. 100 de ces prêts ont été remboursés avec intérêts.
Je suis convaincue que nous devons trouver les moyens pour continuer de renforcer cette démocratie naissante, de fournir un appui tenace, un appui efficace à ces gens de très grande volonté, de très grand potentiel. Les Afghans d'un bout à l'autre du pays veulent subvenir à leurs propres besoins et à ceux de leur famille.
Nous nous concentrons sur Kandahar, et notre travail donne des résultats probants. Kandahar est le foyer le plus instable. Si nous le stabilisons, nous pourrons continuer de progresser ailleurs en Afghanistan dans les régions les plus stables. Nous ne pouvons tourner le dos au défi que nous sommes en mesure de relever.
[Traduction]
La situation est de plus en plus stable grâce à la présence des Forces canadiennes et de ses partenaires, et nous avons trouvé des moyens productifs de travailler ensemble au bien du peuple afghan.
[Français]
La violence en Afghanistan n'est pas sans fin, et nous savons combien le progrès est possible grâce au développement. Tous les espoirs sont permis, et ils sont tout à fait réalistes.
[Traduction]
L'Afghanistan serait déjà perdu si nous n'avions pas cru à la détermination de son peuple et à sa force de caractère. Nous devons continuer à montrer une force de caractère égale dans nos efforts en vue d'appuyer leur développement.
[Français]
Monsieur le président, je vous remercie. Cela me fera plaisir de répondre aux questions du comité.
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C'est une grande question qui demande de grandes réponses en plusieurs volets.
L'ACDI continue de travailler avec ses partenaires dans l'ensemble de l'Afghanistan. Vous parliez notamment des droits des femmes, etc. Vous êtes probablement bien au fait du travail qu'effectue Droits et Démocratie, par exemple, une organisation de Montréal qui a formé plusieurs milliers de femmes dans le domaine de leurs droits, qui a ouvert des centres d'information pour les femmes, qui a ouvert des refuges pour les femmes en Afghanistan. Nous avons annoncé des projets — vous en avez la liste — d'alphabétisation pour les femmes, d'éducation professionnelle, des programmes d'aide au microcrédit afin qu'elles puissent prendre leur avenir en main — je l'ai constaté quand j'y suis allée en octobre —, notamment sur le plan de l'agriculture, afin qu'elles puissent recevoir de la formation et de l'aide pour la culture de petits jardins, pour être en mesure de vendre leurs fruits et leurs légumes de façon à augmenter leurs revenus.
Je vous signale aussi que récemment, à Montréal, nous avons eu l'occasion de recevoir à l'UQAM deux journalistes, deux nouvelles reporters afghanes qui, grâce à ces programmes que nous finançons, ont obtenu une formation en journalisme. Elles ont présenté une vidéo sur l'évolution des droits des femmes depuis 2001.
Est-ce qu'il reste beaucoup de travail à faire? Absolument, madame la députée, il reste beaucoup de travail à faire. C'est un pays, comme je l'ai dit dans mon allocution, qui a vécu la guerre durant plus de 25 ans. Les femmes ont été littéralement terrorisées. Oui, le travail est amorcé pour s'assurer que les femmes vont prendre leur avenir en main. Je vous signale aussi que 27 p. 100 des membres du Parlement afghan sont des femmes.
Je ne sais pas si je couvre l'ensemble de votre question.
Pas tout à fait.
L'hon. Josée Verner: S'il manque des informations, dites-le moi, parce que votre question comportait plusieurs volets.
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Il faut comprendre que l'année n'est pas terminée. Au fur et à mesure que les projets sont identifiés — que ce soit pour les femmes, les enfants ou dans d'autres domaines où l'on veut venir en aide à la population —, cela nous fait bien entendu plaisir de les annoncer et de les mettre en oeuvre.
En ce qui concerne les femmes, lors de ma visite en Afghanistan, j'ai annoncé que nous souhaitions mettre en place un programme d'éducation professionnelle pour 4 000 femmes afghanes. Nous visons également la formation de 4 000 enseignants.
Parlons de la situation de la femme en Afghanistan. Ces femmes n'avaient absolument aucun droit, les petites filles non plus, bien entendu, puisqu'elles sont les femmes de demain. Il faut donc agir à plusieurs niveaux. Il faut non seulement former les femmes de demain, mais également venir en aide aux femmes qui n'ont pas eu la chance d'avoir des droits, de prendre leur avenir en main et de gagner leur vie.
Nous portons assurément une attention extrêmement particulière à tous les projets qui peuvent être proposés afin de nous assurer de corriger cette situation.
J'en profite pour vous mentionner que lorsque j'étais en Afghanistan, j'ai eu l'occasion de rencontrer la directrice des Affaires féminines. Elle était en poste depuis quelques semaines seulement, car elle remplaçait l'ex-directrice qui avait été tuée. Elle m'a demandé deux choses : d'abord de venir en aide aux femmes afin qu'elles puissent prendre leur avenir en main, mais surtout d'assurer la sécurité, pour des raisons évidentes. Au fur et à mesure que nous serons capables d'élargir les programmes pour les femmes en Afghanistan, nous les aiderons davantage.
J'aimerais ajouter quelque chose à ce sujet. J'ai rencontré hier un représentant d'une ONG afghane qui est ici, au Canada. Il m'a clairement expliqué que plus on travaillera avec la population afghane, plus le problème de la sécurité s'amenuisera. Au fur et à mesure qu'on sera capable de protéger la population et de lui permettre de se prendre en main, y compris de prendre en main sa propre sécurité, on accomplira de grands pas en Afghanistan.