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Nous reprenons nos travaux.
Je constate que M. Ken McLaughlin, un des historiens de notre région, se trouve ici, dans l'auditoire. Et comme il s'intéresse à l'histoire, j'aimerais mentionner que c'est la deuxième fois qu'un comité permanent du Parlement visite la région de Waterloo.
Juste à titre d'information, durant la séance, lorsque nous serons rendus aux questions du Bloc québécois, vous aurez besoin des appareils pour entendre la traduction. Vous devrez sélectionner le canal 1 et, de cette façon, vous serez en mesure de comprendre les questions et commentaires du Bloc.
Nous allons commencer par les exposés. Cet après-midi, nous parlerons des travailleurs étrangers temporaires et des travailleurs sans papiers au Canada. Nous y consacrerons la plus grande partie de l'après-midi.
Nous allons d'abord entendre les exposés, chacun étant de cinq à sept minutes. Après quoi, les membres du comité poseront des questions, en commençant par les libéraux, avec M. Karygiannis; nous passerons ensuite au Bloc, avec M. St-Cyr et M. Carrier, puis aux conservateurs, de ce côté-ci, avec M. Komarnicki et Nina Grewal.
Il s'agit du deuxième voyage de Nina Grewall à Waterloo, ce qui vous montre un peu à quel point le comité a subi des changements avec le temps au niveau de ses membres. Sur les 12 membres du comité, deux y siègent depuis trois ans.
Pour commencer, j'aimerais inviter M. Patrick Dillon, gérant et secrétaire-trésorier du Provincial Building and Construction Trades Council, à prendre la parole.
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Bonjour. Merci de nous donner l'occasion de présenter notre point de vue au comité.
Comme on vient de le dire, je m'appelle Patrick Dillon. Je suis un gérant et le secrétaire-trésorier du Building and Construction Trades Council de l'Ontario, un organisme-cadre qui représente les syndicats des métiers de la construction dans la province et qui est le porte-parole des travailleurs de la construction à l'échelle provinciale.
Avant de parler de notre industrie, j'aimerais d'abord évoquer ses caractéristiques, notamment sa nature cyclique. Notre industrie connaît des hauts et des bas par intervalles, selon la conjoncture économique. Ces cycles d'expansion et de ralentissement se font parfois à l'échelle provinciale et, d'autres fois, de façon plus étendue à l'échelle nationale.
Il arrive aussi, particulièrement dans une province comme l'Ontario, que le cycle d'expansion et de ralentissement se limite à une région, sans nécessairement toucher l'ensemble de la province. De fait, au moment même où l'on se parle, les régions de Toronto et d'Ottawa grouillent d'activités. Il y a des régions comme Hamilton ou ici, dans la région de Kitchener, où le secteur manufacturier a commencé à perdre du terrain, ce qui a un effet radical sur la construction. Par ailleurs, Thunder Bay est une région à faible taux d'emploi dans la province. Windsor est une autre région aux prises avec le chômage. Ces exemples montrent bien les cycles d'expansion et de ralentissement.
Parmi les autres caractéristiques de notre industrie, mentionnons la mobilité de ses employeurs et de ses travailleurs. En effet, nous nous déplaçons non seulement d'une province à l'autre, mais aussi d'une région à l'autre et, à l'intérieur d'une même région, d'un chantier à l'autre. Ce qu'il y a de particulier dans le domaine de la construction, c'est que le milieu de travail lui-même est de nature temporaire. Plus nous travaillons fort, plus vite nous perdons nos emplois : nous sommes probablement les seuls travailleurs dans la société à vivre cette situation. Telle est la réalité de notre industrie, mais nous l'acceptons et nous l'assumons.
Pour entrer dans le vif du sujet, en ce qui concerne les travailleurs étrangers temporaires, j'aimerais dire dès le départ que, dans le domaine de la construction, nous sommes en général en faveur de l'immigration. Nous ne sommes pas contre l'immigration; nous ne sommes pas contre l'automatisation. Nous essayons d'être assez progressistes, mais nous avons des préoccupations à l'égard de l'immigration, des travailleurs étrangers temporaires et des travailleurs sans papiers, et nous allons expliquer pourquoi.
Pour ce qui est des travailleurs étrangers temporaires, nous croyons que les Canadiens, le gouvernement canadien et les gouvernements provinciaux doivent davantage s'assurer que les Canadiens, les jeunes Canadiens et les jeunes Canadiens sous-employés ont une occasion d'acquérir une formation. Je parle de notre province, mais je crois que cela s'applique à tout le pays. À mon avis, si nous donnons aux jeunes des possibilités de formation, particulièrement dans notre industrie, ils viendront suivre la formation.
Juste à titre d'exemple, je vais utiliser mon propre métier. Je suis, de profession, un électricien. On a placé une annonce pour embaucher 75 apprentis dans la région de Hamilton qui, comme je l'ai dit, est une région aux prises avec un problème de chômage assez grave. Après avoir mis cette annonce, on a reçu, en un jour seulement, 1 800 candidatures pour les 75 postes d'apprentis et ce, sans vraiment faire une vaste campagne de recrutement.
C'est donc signe que les jeunes sont disponibles et qu'ils saisiront ces occasions si on les leur offre. Nous devons nous assurer de donner aux chômeurs et aux jeunes diplômés des universités, des collèges et des écoles secondaires une occasion de pratiquer des métiers — une assurance qui doit être en place.
Le recours à des travailleurs étrangers temporaires pour combler les besoins de formation à long terme serait, selon moi, inacceptable pour l'industrie de la construction et pour l'ensemble de l'économie canadienne. Comme leur nom l'indique, les travailleurs étrangers temporaires constituent une aide temporaire. Ils entreront au pays, mais — si le recours à des travailleurs étrangers temporaires fait partie de votre stratégie à long terme — le travail pour lequel on aura besoin d'eux ne sera probablement pas achevé durant la période où ceux-ci voudront rester. Par conséquent, si au lieu d'embaucher les apprentis, vous avez recouru à des travailleurs étrangers temporaires et si ces derniers partent sans que personne n'ait eu une possibilité de formation en apprentissage, vous créerez un énorme vide.
J'aimerais faire une référence aux propos du professeur David Foot, de l'Université de Toronto. Je l'ai entendu parler au congrès de l'Alberta Trades Council, en Alberta, l'année dernière. C'est précisément le message qu'il a transmis aux principaux acteurs de l'industrie dans la province de l'Alberta, c'est-à-dire que si vous retenez les services de travailleurs étrangers temporaires pour répondre à une forte demande, c'est bien, mais pour ce qui est du plan de formation à long terme, vous devez donner l'occasion aux jeunes Canadiens et aux jeunes Canadiens sous-employés; vous devez ensuite passer au plan à long terme de l'immigration et, enfin, aux travailleurs étrangers temporaires.
En ce qui concerne les travailleurs sans papiers, nous avons là de vrais problèmes.
Il y a quelques années, le gouvernement fédéral a lancé le programme CREWS, à Toronto, auquel les travailleurs et les employeurs ont été invités à participer. Je crois que le programme a connu un succès raisonnable. Certains s'y sont opposés, mais c'étaient surtout des gens qui participaient à l'économie clandestine. Ces derniers n'aiment pas les règles et les règlements auxquels il faut se conformer.
Nous nous préoccupons vraiment des travailleurs eux-mêmes. S'ils sont entrés illégalement au pays ou s'ils travaillent illégalement, ils sont exposés au plus haut point à l'exploitation. Il n'y a aucun doute là-dessus. C'est ce que nous avons vu se produire à Toronto. Nous avons même placé une annonce dans le journal, il y a quelques mois, où l'un des syndicats qui essayait de venir en aide aux travailleurs sans papiers leur promettait de ne pas les dénoncer s'ils se manifestaient pour obtenir de l'aide concernant leur formation et des questions de santé et de sécurité et pour les aider à obtenir leurs documents. J'ai cru que c'était assez fascinant, mais le message que nos représentants au gouvernement fédéral doivent retenir, c'est que l'exploitation est encore bien vivante.
Relativement aux travailleurs sans papiers, si l'on permet aux entrepreneurs de notre industrie de la construction d'emprunter ce genre de comportement, on crée des règles du jeu inégales pour les entrepreneurs légitimes et les travailleurs légitimes dans la province de l'Ontario. Les preuves sont là, et elles sont nombreuses à démontrer comment ces gens évitent de payer leur TPS, leurs cotisations au RPC et à l'assurance-emploi, leurs impôts sur le revenu, et tout ce qui s'ensuit.
Des gens viennent à nos réunions syndicales pour dire: « Pourquoi suis-je à une réunion syndicale? À quoi bon appartenir au syndicat? Je fais 10 $ l'heure de plus qu'un travailleur sans papiers » — à leur connaissance — « et pourtant cette personne empoche, chaque semaine, 300 $ ou 400 $ de plus que moi. »
C'est un très grave problème. À ce stade-ci, les syndicats et les employeurs légitimes travaillent ensemble pour essayer de soutenir la concurrence, mais tôt ou tard on commencera à faire des choses douteuses si le gouvernement se croise les bras devant le problème des travailleurs sans papiers.
Voilà, je crois que c'est tout pour mes observations sur les travailleurs sans papiers.
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Merci beaucoup, monsieur le président et membres du comité. Je m'appelle Sean Strickland. Je représente le Conseil des métiers de la construction de Waterloo, Wellington, Dufferin et Grey. Nous préférons l'appellation yourlocaltrades.ca pour faire court. Nous sommes une affiliation de 15 syndicats dans l'ensemble de ces quatre régions, et nous représentons environ 8 000 travailleurs de la construction dans cette zone géographique.
Les observations dont j'aimerais vous faire part aujourd'hui se placent du point de vue local. Vous venez d'entendre M. Dillon parler de certains des problèmes auxquels fait face la province. Même si ce ne sont pas les mêmes problèmes, j'aimerais faire part aujourd'hui au comité de certaines expériences particulières que nous avons connues.
Tout d'abord, j'ai remis au greffier un exemplaire d'une résolution sur les travailleurs étrangers temporaires que nous avons récemment adoptée à notre assemblée annuelle. Comme il s'agit d'une résolution assez longue, j'aimerais tout simplement la paraphraser en disant qu'elle souligne le fait que notre conseil reconnaît le rôle essentiel que peuvent jouer les travailleurs étrangers dans la stratégie d'affaires d'une entreprise. Nous reconnaissons que les travailleurs étrangers font partie de l'économie canadienne. Nous reconnaissons qu'ils peuvent combler des pénuries de main-d'oeuvre au Canada et apporter de nouvelles compétences et connaissances pour aider à stimuler la croissance économique du pays. Mais nous avons quelques préoccupations.
D'après les renseignements contenus dans le site Web et les procédures visant à autoriser un travailleur étranger temporaire à travailler au Canada, vous êtes probablement tous au courant des démarches et des exigences. L'offre doit être authentique; les salaires et les conditions de travail doivent être comparables à ceux des Canadiens qui ont la même occupation; les employeurs doivent avoir déployé des efforts raisonnables pour embaucher ou former des Canadiens pour le travail. C'est l'un des aspects qui nous inquiètent. Un autre aspect qui nous préoccupe quelque peu, ce sont les travailleurs étrangers qui comblent une pénurie de main-d'oeuvre. Et l'emploi du travailleur étranger créera directement de nouvelles possibilités d'emploi ou aidera à conserver des emplois pour les Canadiens.
Voilà donc juste un aperçu de certaines des exigences à respecter avant qu'un travailleur étranger temporaire soit autorisé à travailler au Canada. Cette approbation est accordée par RHDSC, en fonction d'un avis relatif au marché du travail fourni par le personnel gouvernemental; cet avis déterminera si un candidat peut ou ne peut pas travailler. Notre question est la suivante: comment détermine-t-on, au bout du compte, l'avis relatif au marché du travail?
Ces dernières années, nous avons observé des cas où des gens de métiers se retrouvent sans emploi — je pense entre autres aux mécaniciens de chantier et aux électriciens —, alors qu'il y a des projets de construction en cours pour lesquels des travailleurs étrangers temporaires sont embauchés, surtout pour installer le matériel de fabrication. Ce qui se passe, d'après notre expérience, c'est que de la façon que les projets de construction sont accordés, une bonne partie du matériel de fabrication... Beaucoup de gens pensent que les travailleurs de la construction ne font que construire des bâtiments, mais ils s'occupent aussi de l'installation des convoyeurs, des trains de roulement et des systèmes d'automatisation dans les usines. Souvent, ces dossiers d'appel d'offres sont sollicités à différentes phases.
Il arrive parfois que les propriétaires aiment les résultats à la première phase de l'appel d'offres, mais que pour la deuxième phase, ils se disent: « Bon, voyons si nous pouvons amener le fabricant de cet appareil à venir ici et à l'installer parce que c'est du travail spécialisé.» Ils peuvent donc faire une demande de permis de travail temporaire et embaucher les soi-disant travailleurs spécialisés afin d'installer l'appareil. Souvent, ces travailleurs étrangers temporaires travailleront côte à côte avec des ouvriers canadiens. Ce qui motive le propriétaire du projet de construction varie probablement, mais c'est attribuable aux coûts ou peut-être à la possibilité d'exploiter le travailleur étranger temporaire.
Dans des situations de ce genre, nous entendons souvent certains de nos gens de métiers dire que ces travailleurs étrangers temporaires ne travaillent pas selon les normes de travail canadiennes; ils travaillent durant leurs pauses, ils travaillent durant leurs heures de repas. Je crois que Mme McLaughlin vous en parlera plus en détail tout à l'heure. Ils travaillent 12 à 14 heures par jour.
Il y a donc de quoi s'inquiéter lorsque des travailleurs étrangers temporaires viennent au pays, d'une part, à cause du fait qu'il existe des gens de métiers accrédités canadiens qui sont aptes à faire ce travail, mais pour une raison ou pour une autre, il n'y a pas eu de communication avec les employeurs — c'est-à-dire les conseils des métiers de la construction — sur la disponibilité de ces gens de métiers. Il s'agit donc d'un problème pour nous. D'autre part, il y a le problème qui se présente sur les lieux de travail. Ces travailleurs sont-ils formés? Sont-ils accrédités?
Et je ne parle même pas de la communication. Nous avons eu des cas d'électriciens — qui savent très bien combien il est dangereux de travailler dans le domaine de l'électricité — qui ont travaillé avec des travailleurs étrangers qui ne parlaient pas l'anglais. Comment peut-on saisir les subtilités et les aspects liés à la sécurité en travaillant avec l'électricité à haute tension quand on est aux prises avec ces obstacles à la communication? La résolution proposée par notre conseil porte précisément sur la communication.
Je remarque sur votre site Web que si l'on veut un avis relativement au marché du travail, on soumet une demande au bureau des travailleurs étrangers temporaires à Saint John, au Nouveau-Brunswick. J'imagine que les gens là-bas parlent au personnel de Service Canada de notre région pour déterminer s'il y a une pénurie de main-d'oeuvre pour ce métier particulier. Je n'en suis pas sûr. Mais ce que je sais, c'est qu'il y a des années, quand ces travailleurs étrangers temporaires étaient autorisés à entrer au pays, on communiquait avec les conseils du travail locaux pour déterminer s'il y avait du chômage dans leurs corps de métiers. Cette communication n'existe plus.
Notre résolution stipule que nous aimerions que RHDSC consulte les conseils des métiers du bâtiment locaux pour établir plus exactement la disponibilité des gens de métiers qualifiés sur le marché local avant d'accorder des permis à des travailleurs étrangers. Nous pensons que certaines améliorations pourraient être apportées sur le plan de la communication.
Quelques-unes des autres préoccupations et problèmes liés aux travailleurs sans papiers sont à caractère anecdotique; j'imagine que c'est la façon de les décrire. Mais ces histoires et ces situations m'ont été communiquées par nos sections affiliées. Par exemple, des peintres et des vitriers ont eu connaissance d'un cas où des travailleurs étrangers vivaient dans une grange en milieu rural, dans des conditions déplorables selon n'importe quelle norme canadienne, travaillant 12 ou 14 heures par jour à peindre des maisons. C'est une préoccupation.
Nous avons aussi parlé de l'aspect lié à la sécurité au travail et des qualifications. Quel est le niveau de qualification de ces travailleurs étrangers temporaires à leur arrivée? Quand cet avis relativement au marché du travail est accordé et que le travailleur arrive, jusqu'à quel point est-il clair et est-il clairement défini que la personne de métier, ce travailleur étranger temporaire, a bel et bien les compétences voulues pour effectuer le travail?
Je sais qu'il ne me reste plus de temps. J'ai couvert un vaste éventail de problèmes liés aux travailleurs étrangers temporaires.
Ce que je veux que vous vous rappeliez, c'est la communication. Nous aimerions qu'il y ait une plus grande communication avec les conseils des métiers du bâtiment avant que ces permis soient accordés.
Merci, monsieur le président.
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Bonjour et bienvenue à Waterloo.
[Traduction]
Merci d'être venue et d'étudier ce sujet important.
Je suis ici aujourd'hui pour présenter quelques observations sur mes recherches en vue d'une thèse de doctorat sur les problèmes liés à la santé, aux droits et à l'accès à l'indemnisation des travailleurs agricoles saisonniers.
La plupart des étudiants au doctorat rêvent d'effectuer le genre de recherches que je mène. J'ai pu passer mes étés dans les vignes du Niagara et mes hivers au Mexique et en Jamaïque. Mais avant de vous laisser emporter par des images envieuses de piña coladas et de plages de sable blanc, j'aimerais vous dire que ce que j'ai découvert n'avait malheureusement rien à voir avec des vacances et des vies idylliques. Bien au contraire.
Après leur séjour au Canada, un grand nombre de travailleurs étrangers retournent chez eux où ils vivent dans la misère. J'ai côtoyé ces travailleurs et leurs familles pendant trois ans et j'ai interrogé leurs défenseurs, leurs employeurs, des médecins hygiénistes et des autorités gouvernementales. Permettez-moi de citer un travailleur, qui a décrit succinctement les problèmes associés au travail dans une société dont vous ne faites pas partie:
Certains patrons sont bons, mais d'autres... sont tout à fait abominables, le bien-être de leurs travailleurs ne les intéresse pas... j'imagine que nous ne sommes que des machines jetables pour eux... ils nous font travailler jusqu'à ce que nous soyons au bout du rouleau. Ils nous remplacent alors par d'autres.
En effet, le traitement des employeurs varie considérablement, allant de très bon à tout à fait épouvantable. Mais les travailleurs sont bel et bien liés à un employeur et ne sont pas libres d'en changer. Bien souvent, les travailleurs sont perçus et traités comme des machines, travaillent de longues heures dans des conditions éprouvantes, accomplissent des tâches répétitives et précaires. Ils ne sont pas jetables uniquement au figuré; ils le sont dans les faits. Les travailleurs migrants peuvent être congédiés et rapatriés en tout temps et peuvent facilement être remplacés. Des milliers de gens attendent leur tour et sont prêts à venir quand on jugera que le travailleur précédent ne convient plus ou n'est plus disposé ou apte à faire le travail.
La vulnérabilité extrême et la facilité avec laquelle on peut disposer des travailleurs étrangers temporaires font en sorte qu'il est difficile pour eux de se prévaloir de leurs droits, puisque toute demande pourrait compromettre leur place dans le programme.
Mon mémoire décrit plus en détail les difficultés auxquelles les travailleurs sont confrontés quand il s'agit de recevoir des soins médicaux et des indemnités. Il explique que de nombreux travailleurs ne peuvent même pas obtenir leur propre carte santé. Ils font face à un système qui ne les intègre pas dans les collectivités ni ne leur fournit l'information adéquate sur leurs droits, et qui met beaucoup trop l'accent sur leur relation employeur-employé. Pour eux, les droits sur papier ne se transforment pas forcément en droits dans la pratique.
Les abus dans ces programmes sont très bien documentés.
Aujourd'hui, j'aimerais parler des dimensions humaines et sociales de la migration transnationale.
Depuis 1966, le programme a fait venir des travailleurs au Canada chaque année. Bien des travailleurs temporaires sont au pays depuis des décennies et ne passent que quatre mois avec leur famille entre leurs périodes de travail. Quelles en sont les répercussions?
À Vancouver, Erika Del Carmen Fuchs a témoigné sur des cas précis de travailleurs qui étaient rentrés chez eux au Mexique, malades et blessés. Je peux vous assurer qu'il ne s'agit pas simplement d'anecdotes ou d'histoires. Dans les régions qui envoient des travailleurs au Canada, je me suis rendu compte que ce travail à l'étranger affligeait profondément de nombreuses familles. J'ai rencontré des veuves de travailleurs qui avaient perdu la vie au Canada. Les veuves n'ont reçu aucune aide et pouvaient à peine nourrir leurs enfants. En désespoir de cause, certaines d'entre elles ont quitté leurs enfants pour travailler au Canada.
Les enfants de ces migrants font face à la dépression et à l'alcoolisme puisqu'ils sont forcés de grandir sans leurs parents à la maison. Des enfants de 12 ans s'élèvent eux-mêmes. Ces longues absences répétées ont détruit des mariages. Quand les femmes tombent enceintes pendant le programme, un grand nombre d'entre elles font des fausses couches parce qu'elles travaillent dans des conditions difficiles et ne peuvent pas avoir accès à des soins prénatals. D'autres mènent leur grossesse à terme, retournent chez elles, donnent naissance à leur bébé et repartent la saison suivante.
Les travailleurs blessés au Canada ne peuvent pas revenir. Beaucoup ne peuvent travailler dans leur pays non plus. D'autres développent de graves maladies au Canada, comme le cancer et une insuffisance rénale. Dans ces situations, les travailleurs sont normalement renvoyés chez eux. Certains réussissent à s'enfuir et à présenter une demande de statut de réfugié avant d'être déportés. Rentrer chez eux, c'est signer leur arrêt de mort. Puisqu'ils cotisent à des programmes d'avantages sociaux au Canada, ils n'ont aucune protection chez eux pour recevoir des traitements de survie.
Les travailleurs étrangers temporaires contribuent à l'économie canadienne, et tous les Canadiens en bénéficient indirectement. Les producteurs font face à des pressions incessantes devant la concurrence mondiale — tellement que bon nombre d'entre eux prétendent qu'ils ne pourraient pas survivre sans ces travailleurs remarquables. Les travailleurs, dont beaucoup sont devenus dépendants de leurs emplois au Canada pour subvenir aux besoins de leur famille, ne veulent pas perdre la chance de travailler au pays.
Puisque ce sont tous des facteurs importants à prendre en considération, je ne soutiens pas que nous devrions tout simplement abolir le programme. Mais il existe des moyens de faire en sorte que le système soit plus humain et plus juste. Mon mémoire formule un certain nombre de recommandations comme un mécanisme d'appel pour les congédiements et les rapatriements, une assurance-maladie complète et le droit de changer d'employeur librement.
La seule solution valable face à toutes ces lacunes toutefois consiste à accorder à ces travailleurs leur citoyenneté au bout du compte. Même si ce ne sont pas tous les travailleurs qui souhaitent émigrer au Canada, ceux qui le veulent devraient avoir le choix. Ceux qui ne le veulent pas devraient tout de même être libres de changer d'employeurs et de partir, au besoin, quand des urgences et des obligations familiales surviennent, sans craindre qu'ils n'auront jamais le droit de revenir.
Le système d'immigration canadien doit reconnaître la valeur de ces travailleurs présumément peu qualifiés et, en tant que Canadiens, nous ne devrions jamais considérer des gens simplement comme des unités économiques. Nous devrions aussi reconnaître ce qu'il en coûte de vivre dans un pays où un individu n'est jamais considéré comme un citoyen et est séparé de sa famille année après année.
Si des travailleurs tombent malades pendant qu'ils travaillent ici, le Canada a aussi l'obligation morale de s'occuper d'eux. Ils ne sont pas que des travailleurs dont on peut disposer à sa guise, mais aussi des parents, des frères, des conjoints et des amis.
Quand ce programme a commencé dans les années 1960, la crainte que des Antillais noirs s'établissent dans les milieux ruraux canadiens préoccupait les responsables de l'immigration, qui ont conçu une structure pour faire en sorte que de tels travailleurs ne restent jamais au Canada à la fin de leurs contrats. Près d'un demi-siècle plus tard, ce raisonnement est obsolète et ne reflète pas les valeurs du Canada.
Quel est le raisonnement actuel pour empêcher ces gens durs à la tâche de devenir citoyens? Si ces travailleurs sont assez bons pour travailler ici pendant 40 ans et que nous prétendons les traiter comme tous les autres Canadiens, pourquoi alors ne peuvent-ils pas devenir Canadiens? Combien d'années de travail faut-il avant qu'on se rende compte que ces pénuries de main-d'oeuvre sont permanentes, et non pas temporaires, surtout dans l'industrie agricole?
Un élément crucial pour évaluer une société, c'est la manière dont elle traite ses membres les plus faibles. Permettez-moi de répéter: un élément crucial pour évaluer une société, c'est la manière dont elle traite ses membres les plus faibles. Ces travailleurs font partie des résidents du Canada les plus vulnérables. Ils ne sont même pas considérés comme des membres de notre société. À une époque où il est question des droits de la personne à l'échelle internationale, la manière dont nous traitons ces gens dans notre société montre bien l'écart qui existe entre le genre de société que nous prétendons être et celle que nous sommes.
J'espère sincèrement que nous pourrons travailler ensemble à aligner nos actions sur nos principes.
Merci beaucoup de m'avoir donné l'occasion de vous faire part de ces réflexions aujourd'hui. Je vous en suis vraiment reconnaissante et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Merci.
Je vais commencer la période des questions pour les libéraux.
Je crois que vous avez vraiment parlé ce dont je voulais discuter en détail. Vous avez dit que certaines personnes viennent ici pendant 40 ans. En tant que pays, nous devons vraiment examiner quelle sorte d'immigration nous avons et décider si nous optons pour la solution à court terme ou à long terme.
De la manière dont est conçu le système de points d'appréciation actuel, tel qu'il a été adopté en 2002, les gens de métiers ne peuvent pas faire partie du programme. Ils ne peuvent tout simplement pas. Les travailleurs non qualifiés ne peuvent pas y participer. Autrement dit, Frank Stronack de Magna International ne pourrait pas être ici aujourd'hui. Une personne plus près, Frank Hasenfratz de Linamar, qui vit à proximité, à Guelph, et qui compte quelque 10 000 employés, ne pourrait pas entrer au pays de nos jours. Pour vraiment prendre un exemple encore plus près, Mike Lazaridis, de Research In Motion — les BlackBerrys — ne serait pas ici aujourd'hui, car son père était un apprenti.
Ce changement au système de points d'appréciation a fait augmenter les chiffres dans la catégorie des travailleurs sans papiers. En réalité, il a fait bondir leur nombre, avec tous les problèmes connexes exprimés par les groupes des métiers du bâtiment.
Par ailleurs, nous avons la situation des travailleurs étrangers temporaires: les gens viennent ici seuls, sans leur famille.
Ça nous rappelle presque l'impôt de capitation pour les Chinois. Nous avions besoin d'eux pour bâtir le chemin de fer. Une fois qu'il a été construit, nous avons essayé de nous départir d'eux, ce qui a donné lieu à toutes sortes de problèmes — les « fils sur papier », etc.
Je veux vous demander à vous tous si nous ne devrions pas, comme Canadiens, nous concentrer davantage sur une augmentation du nombre des immigrants admis au pays, et reconnaître que l'immigration a été le moteur, est le moteur et, compte tenu de la démographie, continuera d'être le moteur du pays. J'aimerais que vous répondiez tous à cette question, car il est important de nous entendre tous.
Madame McLaughling, pourriez-vous commencer?
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J'aimerais faire une observation.
Tout d'abord, le gouvernement semble avoir recours à des expédients pour n'importe quelle circonstance à laquelle il essaie de s'attaquer. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que les problèmes liés aux travailleurs migrants au pays sont quelque peu différents de ceux des travailleurs étrangers temporaires dont nous parlons pour le secteur de la construction.
Pour répondre à votre question sur l'accroissement de l'immigration, je vous renvoie aux quatre points de notre mémoire sur la manière dont nous croyons que l'immigration devrait être examinée au pays, étant donné que les travailleurs étrangers temporaires permettent en partie de combler les demandes accrues de notre industrie. Mais je ne pense pas que l'on puisse discuter de ce qui fonctionne dans notre industrie et l'appliquer à l'agriculture.
Nous croyons que les jeunes Canadiens devraient avoir la chance d'être formés. Nous ne voulons pas voir un système de points d'appréciation qui n'exerce pas une certaine pression sur l'industrie canadienne pour éviter d'avoir à former des jeunes Canadiens. Nous pensons que ça devrait être la priorité. Le chômage chez les jeunes au Canada devrait être la suivante, ainsi qu'une stratégie de l'immigration à long terme, suivie des travailleurs formés à l'étranger pour répondre à la demande accrue dans notre industrie.
Pour terminer, les permis temporaires pour les travailleurs formés à l'étranger devraient être accordés pour une région d'une province ou par province. Il ne sert pas à grand-chose de faire venir un grand nombre de travailleurs formés à l'étranger pour satisfaire à la demande accrue en Alberta et qu'ils finissent par travailler à Toronto dans l'économie souterraine.
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Merci, monsieur le président. J'ai quelques commentaires et quelques questions.
Premièrement, d'après le recensement, la population de notre pays a augmenté de 1,6 million de personnes en cinq ans et 1,1 million de ces personnes étaient de nouveaux arrivants au Canada. Il semble donc que notre population augmente grâce à l'immigration.
Je crois que M. Dillon a dit qu'il était difficile de représenter les travailleurs sans papiers et qu'il y a assurément des abus, dans certains cas peut-être envers les travailleurs étrangers temporaires. Pensez-vous que ces travailleurs sans papiers sont ici parce qu'ils n'arrivent pas à obtenir légalement ces emplois?
Deuxièmement, j'aimerais vous poser une question sur la transition. Vous avez dit que les travailleurs temporaires sans papiers peuvent devoir répondre à certaines demandes régionales ou à court terme, mais dans certaines parties du pays des métiers sont très recherchés. Nous venons de tenir des audiences en Alberta, en Colombie-Britannique et en Saskatchewan. Les personnes qui répondent aux offres d'emploi ne sont pas qualifiées pour ces emplois. Que penserez-vous de donner aux travailleurs étrangers temporaires la possibilité d'obtenir une résidence permanente en fonction de leur expérience au pays et leur expérience professionnelle? Je sais que le Programme des candidats des provinces commence à être utilisé par les provinces qui peuvent désigner des personnes dont elles ont besoin dans le but de leur accorder une résidence permanente.
Ma troisième question est la suivante. Est-ce que votre chambre des métiers ou vos syndicats seraient prêts à accepter les travailleurs étrangers temporaires afin de les représenter et de les défendre si ces droits sont accordés au niveau provincial? Devrions-nous avoir une norme fédérale minime pour traiter des cas des travailleurs étrangers temporaires?
J'aimerais que M. Dillon réponde en premier, et si quelqu'un d'autre veut ajouter quelque chose, qu'il ou elle n'hésite pas à le faire.
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Monsieur le président, je vous remercie infiniment de votre fermeté pour que le comité redémarre, je l'espère.
J'aimerais vous parler un peu de M. Cadotte et de moi-même. Nous sommes tous les deux des retraités du secteur manufacturier et travaillons un peu avec les travailleurs migrants de notre collectivité. En fait, nous avons travaillé à la chaîne à l'emballage des produits de la récolte pour un grand emballeur à Dresden, en Ontario, pendant de nombreuses années. Nous avons alors pris conscience des enjeux auxquels étaient confrontés les travailleurs migrants à force d'expérience, d'interactions sociales et de travail à leurs côtés.
J'aimerais vous raconter quelques moments importants de ma vie. Un jour, nous avions congé de l'usine d'emballage et nous avons réussi à inviter quelques travailleurs migrants à souper chez nous. Ce jour-là, un membre de la secte rastafarienne de Jamaïque, un membre de la secte chrétienne de la Jamaïque et un membre des premières nations du Canada se sont retrouvés chez moi. J'étais très fier de pouvoir inviter chez moi des travailleurs migrants afin qu'ils rencontrent ma famille et interagissent avec des Canadiens, ce qui est très rare.
J'ai éprouvé la même fierté le 26 janvier dernier quand 350 membres du syndicat des travailleurs canadiens de l'automobile ont manifesté devant une usine de transformation de poisson à Wheatley, en Ontario, pour exprimer l'extrême importance des droits des travailleurs migrants et étrangers et pour signifier que nous étions prêts à nous battre pour eux.
Ces deux événements ont marqué ma vie. Je suis très heureux de les avoir vécus, et nous allons continuer de travailler avec les travailleurs migrants.
M. Cadotte va maintenant prendre le relais et vous présenter la position des Friends of Farmworkers.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, Friends of Farmworkers est un groupe originaire de Chatham-Kent, en Ontario. C'est une coalition communautaire de personnes qui partagent le point de vue qu'il faut que la communauté se mobilise pour les travailleurs étrangers temporaires. Nous sommes tous bénévoles et avons des parcours divers. Les Friends of Farmworkers ne sont liés à aucun organisme, mais travaillent tout de même avec des groupes confessionnels, des groupes de défense de la justice sociale, des défenseurs du travailleur et quelques organisations culturelles et communautaires.
Nous croyons que le Canada a besoin de ces travailleurs et qu'ils devraient jouir des mêmes programmes que les travailleurs canadiens, y compris du droit de résidence permanente. Plusieurs membres du groupe travaillent depuis longtemps avec des travailleurs agricoles et ont créé une coalition informelle après la mort d'un jeune travailleur marié à Charing Cross, en Ontario, à une ferme de culture et de transformation de champignons, en 1979.
Nous nous sommes intéressés de plus près aux problèmes auxquels sont confrontés les travailleurs étrangers temporaires après le décès de deux travailleurs de ce type à la ferme de champignons Peeters, près de la ville de Blenheim, à Chatham-Kent, en mars et en avril 2007. Phunsak Phathong et Ulai Buapatcha, qui étaient tous les deux dans la jeune trentaine et en bonne santé physique, sont morts à la même résidence, à 30 jours d'intervalle en 2007. Ils venaient tous les deux de la Thaïlande et étaient inscrits au programme des travailleurs temporaires peu qualifiés. Le rapatriement de leurs corps a causé beaucoup de difficultés, parce que l'employeur n'estimait pas avoir la responsabilité d'y contribuer sérieusement.
Nous avons ouvert le dialogue avec la communauté thaïe locale pour exprimer notre consternation devant ces deux décès et avons découvert les nombreux problèmes auxquels sont confrontés les travailleurs étrangers chez nous et ailleurs au Canada. Nous allons donc essayer de vous aider à en comprendre l'ampleur au cours des prochaines minutes.
Quand nous avons parlé aux travailleurs des problèmes qu'ils vivaient, nous avons été sidérés par le manque de ressources qui s'offraient à eux. Nous avons tout de suite vu la nécessité d'un processus d'arbitrage pour examiner les plaintes et proposer des règlements, ou à tout le moins d'un mécanisme pour proposer des solutions aux conditions actuelles des travailleurs étrangers qui nous réclament des changements.
À l'échelle locale, l'un des problèmes est le non-respect des normes canadiennes dans les logements offerts aux travailleurs. À notre avis, bien des logements sont dangereux et insalubres. Nous pensons que les options d'hébergement offertes aux travailleurs étrangers pourraient avoir des conséquences désastreuses si nous n'adoptons pas les lignes directrices. Près d'une usine de transformation de poisson à Wheatley, en Ontario, jusqu'à 28 travailleurs ont vécu ou vivent toujours dans un dortoir qui de toute évidence, ne devait pas servir d'unité de logement. Les lieux devaient servir de point de vente au détail, puis ont été convertis en bureaux, avant de servir de logement pour les travailleurs de l'usine. La communauté thaïe fait ce qu'elle peut pour aider ces travailleurs étrangers, mais c'est une toute petite communauté qui ne dispose pas de beaucoup de ressources.
Nous avons également entendu parler de propriétaires locaux qui ont eu des expériences plus que déplorables avec ce type de travailleurs. L'un d'eux, qui croyait que les 16 femmes qui vivaient dans son appartement de deux chambres y habiteraient bien au-delà de la saison des récoltes, a retenu les femmes qui restaient après la fin de la saison. Il les a confinées à son unité de logement afin de s'assurer du paiement du loyer. Il a fallu négocier et déployer bien des efforts diplomatiques pour que ces travailleuses soient libérées et qu'elles puissent déménager dans des logements plus convenables, situés près de leur employeur suivant.
Ce ne sont là que deux des problèmes que nous avons rencontrés à l'échelle locale dans nos efforts pour aider les travailleurs étrangers à régler leurs problèmes.
Nous craignons aussi le risque d'abus des travailleurs étrangers, notamment par les salaires. Plus particulièrement, nous avons été informés que leurs salaires différaient beaucoup des salaires offerts pour le même travail à des travailleurs locaux à certains endroits. Nous savons, par exemple, que certains employeurs refusent de payer du temps supplémentaire au-delà de la semaine de travail normale et que le nombre d'heures de travail peut être bien inférieur au nombre d'heures promis dans les contrats.
Nous ne savons pas trop comment les règles de sécurité en milieu de travail sont expliquées aux travailleurs qui ne comprennent pas l'anglais. Nous savons qu'il y a des gens du coin qui enseignent l'anglais langue seconde en milieu de travail, mais nous croyons que le gouvernement devrait autoriser les travailleurs à toucher un salaire pendant qu'ils apprennent la langue.
Nous sommes d'avis qu'aucun travailleur ne devrait être tenu en esclavage économique par des agents ou des organismes tiers, notamment pour le renouvellement de visa et les restrictions de passeport. Nous avons beaucoup de contacts avec les travailleurs de la région, ils viennent des pays d'Amérique latine et des Caraïbes. Nous savons qu'à Chatham-Kent-Essex, ces travailleurs ont des défenseurs qui militent pour lever les obstacles culturels et linguistiques auxquels ils sont confrontés.
Les nombreux travailleurs participant au programme des travailleurs agricoles saisonniers en vigueur avec les pays d'Amérique latine et des Caraïbes savent qu'il existe des règles régissant les conditions des travailleurs et leurs différences. Nous croyons qu'il faut améliorer les paramètres du programme des travailleurs agricoles saisonniers afin que les travailleurs aient voix au chapitre dans les décisions qui sont prises à leur sujet et qu'il est impératif de négocier des accords bilatéraux et multilatéraux avec les gouvernements des pays émergents.
La solution passe par la révision des accords existants en vue de l'établissement d'une charte des droits des travailleurs étrangers. Cette charte des droits devrait conférer à tous les travailleurs du Canada les mêmes droits qu'aux travailleurs canadiens. Nous estimons que si un travailleur étranger paye des taxes et des cotisations obligatoires au RPC, à l'AE et à la CSPAAT, il devrait jouir des mêmes droits et des responsabilités que les autres. La réputation du Canada à l'échelle internationale devrait souffrir de ce traitement honteux des travailleurs étrangers.
Merci.
Je représente la Federation of Sisters of St. Joseph of Canada.
Dans mon travail au bureau de la justice systémique de la fédération, j'entre en contact avec beaucoup de travailleurs migrants de la Thaïlande et de l'Indonésie gravement exploités au Canada. Ces travailleurs sont arrivés dans le Sud de l'Ontario dans le cadre du programme des travailleurs étrangers temporaires. Certains travailleurs avec qui nous avons parlé ont des postes satisfaisants, mais ce n'est pas le cas pour un nombre troublant de personnes. Leurs expériences diffèrent suffisamment pour nous porter à croire qu'il y a deux sources de travailleurs migrants qui viennent au Canada de la Thaïlande et de l'Indonésie.
Tous les travailleurs à qui nous avons parlé ont été victimes de fraude soit en Thaïlande, soit en Indonésie. Ils ont dû verser environ 10 000 $ canadiens à l'agence de recrutement pour obtenir un emploi. Ils ont contracté des prêts pour être en mesure de payer et certains ont des intérêts pouvant atteindre 60 p. 100. On leur a tous dit qu'ils feraient tellement d'argent au Canada qu'ils pourraient rembourser leur prêt en quelques mois. Ils n'ont pas été informés des déductions que l'agent au Canada retiendrait de leur paie pour l'hébergement, les repas et le transport, entre autres.
Cela dit, j'ai parlé de deux sources de travailleurs. En effet, certains travailleurs ont obtenu un emploi légitime, c'est-à-dire qu'ils ont été conduits à l'endroit mentionné sur leur contrat quand ils sont arrivés au Canada, mais bien d'autres n'ont jamais eu de contrat légitime avec un employeur au Canada, contrairement à ce qu'ils pensaient. Ce deuxième groupe de travailleurs, à ce que je sache, semble constitué de travailleurs supplémentaires recrutés par l'agence au nom d'un agent canadien. Ils se sont retrouvés dans des situations d'exploitation extrême au Canada parce qu'il n'y a jamais eu de placement professionnel légitime pour eux; l'agent qui a préparé le contrat au Canada les a placés dans une situation illégale dès le départ.
Dans notre travail au bureau de justice systémique, nous accompagnons des survivants de la traite de personnes qui ont demandé un permis de séjour temporaire à titre de victimes de la traite. Cette expérience nous a appris beaucoup de choses sur la traite de personnes au Canada. Quand on écoute l'histoire des travailleurs migrants de la Thaïlande et de l'Indonésie qui entrent dans le groupe des travailleurs supplémentaires, on se rend compte qu'il y a beaucoup d'éléments importants de la traite dans leur histoire selon la définition des Nations Unies de la traite de personnes.
Premièrement, il semble y avoir un lien direct entre la fraude et la fausse représentation de la part de l'agence de recrutement en Thaïlande ou en Indonésie concernant le salaire et les conditions de travail et la fraude commise au Canada quand l'agent recruteur amène les travailleurs sur un lieu de travail non indiqué dans le contrat, qu'il finit par leur dire qu'ils sont illégaux et qu'il exige jusqu'à 1 000 $ quand les travailleurs demandent un permis de travail légal, sans jamais ne leur en donner un. Nous connaissons ce lien direct entre la fraude commise dans le pays d'origine et la fraude commise au Canada parce que bien des travailleurs disent avoir rencontré le recruteur canadien à l'agence en Thaïlande. En fait, ils considèrent ce recruteur comme leur employeur.
La définition du trafic selon les Nations Unies comprend également des éléments de contrôle et de coercition. Pour commencer, les travailleurs sont pris au piège par l'énorme dette qu'ils doivent rembourser dans leur pays d'origine. Ils savent que leur famille va beaucoup souffrir s'ils ne la remboursent pas. Ils sont pris au piège aussi par leur méconnaissance de l'anglais et des lois du travail au Canada. De plus, certains travailleurs sont pris au piège parce qu'on leur a confisqué leur passeport. D'autres se sont faits prendre leur contrat dès leur arrivée à l'aéroport. Beaucoup ont reçu l'ordre de ne pas quitter la ferme, faute de quoi ils seraient déportés parce qu'ils sont ici illégalement, même si c'est le recruteur qui les a placés dans une situation d'illégalité.
Enfin, il y a beaucoup d'éléments d'exploitation extrême que je ne décrirai pas faute de temps, mais je suis prête à répondre à vos questions à la période de questions.
Bref, avec la fraude, la fausse représentation, le contrôle, la coercition, l'exploitation et le crime organisé, il y a beaucoup d'éléments du trafic dans ces histoires. Cependant, aucun de ces travailleurs ne viendra demander de permis de séjour temporaire à titre de victime de la traite parce qu'ils ne se sentent pas protégés par le régime.
Pour commencer, le fardeau de la preuve qu'exige CIC pour montrer qu'ils étaient sous l'emprise d'un agent est trop grand. Les agents de CIC comme de la GRC cherchent des indicateurs de dommages corporels, de menaces de dommage corporel ou de séquestration.
Ces histoires nous montrent que les agents peuvent prendre les travailleurs migrants au piège de différentes façons. Les travailleurs migrants sont pris au piège par des dettes énormes, leur méconnaissance de l'anglais et leur crainte d'être arrêtés et déportés parce qu'ils sont illégaux, ce qui les mettrait dans l'impossibilité totale de rembourser leur dette. Le fardeau de la preuve est trop élevé parce que la priorité du gouvernement est de poursuivre les trafiquants et que les tribunaux pénaux exigent des normes de contrôle très élevées.
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Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du groupe.
Avant de commencer, j'aimerais vous mettre un peu en contexte. Le diocèse de London intervient auprès des travailleurs étrangers temporaires dans le cadre du programme des travailleurs agricoles saisonniers depuis au moins 30 ans. Il offre des programmes paroissiaux qui vont du simple accueil des travailleurs à l'intégration de ces personnes dans la vie de la paroisse, en passant par le déploiement de programmes de sécurité à vélo et la défense des droits fondamentaux des travailleurs. Nous avons rendu cette intervention officielle il y a trois ans par la création d'un comité des travailleurs migrants au ministère et en septembre dernier, nous avons présenté notre mémoire écrit à ce comité. Depuis, nous avons continué notre travail et je vous dirais, au sujet du contenu du document que nous avons préparé pour vous, que nous avons vu des cas plus graves depuis. Nous sommes donc encore plus convaincus que le programme des travailleurs temporaires peu qualifiés mérite toute l'attention de notre diocèse, en particulier.
Le programme des travailleurs temporaires peu qualifiés donne lieu à des abus plus graves que ceux dont nous avons été témoins au cours de nos 30 années de travail avec le programme des travailleurs agricoles saisonniers.
Je dois aussi préciser que notre diocèse englobe certaines des meilleures terres agricoles du Canada. L'une des serres les plus importantes du pays se trouve sur notre territoire, donc il n'est pas surprenant que les travailleurs agricoles qui se retrouvent dans des serres ou dans les champs soient particulièrement concentrés sur notre territoire.
Depuis mars 2007, nous appuyons le travail de Gerry et Lek VanKoeverden, qui ont pu nous accompagner ici aujourd'hui, j'en suis très heureuse. Ce sont deux bénévoles qui sacrifient leur temps et leurs ressources pour sensibiliser les migrants thaïlandais dans notre région. Ce sont deux anciens directeurs du CUSO en Asie du Sud-Est. Nous sommes très contents d'avoir parmi nous des personnes qui ont les compétences linguistiques et le bagage qu'il faut pour parler directement aux travailleurs et véritablement comprendre en profondeur leurs problèmes. Nous sommes également heureux que Gerry et Lek siègent à notre comité parce que ce sont eux-mêmes des agriculteurs, donc nous savons que nous pouvons avoir une perspective équilibrée. Nous ne positionnons pas l'Église et les travailleurs contre les agriculteurs, rien du genre. Nous estimons plutôt qu'il faut trouver une solution communautaire équilibrée à ce problème et à ce titre, nous constatons qu'il y a beaucoup de problèmes pour l'agriculteur comme pour le travailleur dans le programme des travailleurs temporaires peu qualifiés.
Je vais céder la parole à Gerry et à Lek, qui vont vous raconter quelques-uns des incidents qui les occupent depuis deux ans à ce chapitre. Ce sont les personnes les mieux placées pour vous présenter le reste de notre exposé.
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Bonjour, tout le monde.
Ma femme, Lek, et moi travaillons auprès des travailleurs migrants thaïlandais depuis janvier, lorsque nous avons appris qu'il y avait des Thaïlandais dans la région. En fait, ils sont ici depuis quatre ou cinq ans, mais les travailleurs migrants sont si discrets que vous ne remarquez pas leur présence. C'est un voisin qui en avait sept qui nous a mis au courant, et avec lui, nous les avons aidés à communiquer, parce qu'il y avait certains problèmes de communication. C'est ainsi que nous avons commencé à enseigner l'anglais. Nous avons plusieurs classes, une fois par semaine à Leamington, Blenheim et Dresden, et c'est là où nous avons appris tous les problèmes qu'ils ont rencontrés.
Tout ce que j'ai entendu correspond à ce que Soeur Sue a dit à propos de leur histoire en Thaïlande — leur endettement. Lorsqu'ils arrivent ici, ce sont des esclaves pris au piège de l'endettement. Voilà ce que sont les gens qui arrivent d'Asie pour travailler dans le cadre du programme de travailleurs peu spécialisés.
Nous essayons donc de les aider en leur enseignant l'anglais et aussi en essayant de leur faire comprendre leurs droits, ce qui est très difficile. Nous travaillons aussi, par exemple, au secours des travailleurs. Deux groupes de travailleurs sont venus ici en septembre dernier: un groupe de 35 femmes à Chatham et un autre de 100 personnes à Toronto. Ces gens arrivent ici et en l'espace de deux ou trois semaines, tout le travail est terminé. Ces gens paient 10 000 $ pour faire le voyage jusqu'ici et après une semaine ou deux, tout est terminé; ils n'ont plus de travail. Leur employeur n'a plus de travail pour eux. Alors que vont faire ces gens? À qui s'adressent-ils? Vont-ils appeler RHDSC? Que peuvent-ils faire? Le ministère n'a pas le mandat d'aller sur le terrain de toute façon, alors il ne peut pas se rendre sur place et essayer de régler les choses.
Nous essayons donc d'établir des liens entre certains employeurs qui ont besoin de main-d'oeuvre, qui ont obtenu des AMT auprès de RHDSC. Ils ont besoin de main-d'oeuvre et ils peuvent alors transférer ces gens dans le cadre des AMT. Ce n'est pas très compliqué, mais nous avons réussi à aider 49 personnes de cette façon, à Toronto et à Chatham, qui s'étaient perdues dans le système. Ils sont encore nombreux à travailler dans des ateliers clandestins, à travailler au noir, dans divers endroits. J'ai des noms, mais je ne crois pas que je devrais les mentionner ici, mais ce sont des endroits où l'on travaille pour de l'argent liquide. Ces travailleurs n'ont pas d'assurance-santé. Ils ne sont pas protégés par la loi. Ils travaillent dans des ateliers clandestins. Je dirais que la moitié des travailleurs migrants thaïlandais en Ontario sont illégaux.
C'est très difficile d'aider ces gens, alors tout ce que nous pouvons faire, c'est leur enseigner l'anglais. Dans un cas, nous leur avons fourni des matelas sur lesquels ils pouvaient dormir, parce qu'ils n'en avaient pas, et nous avons pu aussi apporter une aide médicale très limitée à quelques-uns d'entre eux. Pour la grande majorité des gens, nous ne pouvons pas faire grand-chose. Des gens viennent les voir, des agents qui leur promettent d'obtenir pour eux un statut de réfugié. Et ils leur donnent des prix. Ils vont leur dire « Pour 1 500 $, je vais obtenir pour toi un statut de réfugié pendant un an. Pour 3 000 $, tu auras le statut de réfugié pendant deux ans ». Évidemment, c'est de la frime, mais c'est le genre de choses auxquelles ces gens désespérés sont exposés, et les agents en main-d'oeuvre qui les utilisent illégalement les forcent souvent à demander un statut de réfugié en échange de quoi ils s'engagent à continuer de s'occuper d'eux.
Notre priorité est d'essayer de trouver une solution et d'ériger un meilleur modèle pour ce système. Il y a sept exploitants de serre à Leamington et lorsqu'ils ont compris les problèmes liés au fait de traiter avec un entrepreneur en main-d'oeuvre, ils en sont arrivés à l'idée qu'ils doivent s'occuper eux-mêmes de leur paperasse, traiter directement avec les travailleurs, traiter directement avec RHDSC et donner une certaine stabilité au programme.
Nous avons tenu une réunion avec ces employeurs il y a quelques semaines, encore une fois pour essayer de régler leurs divers problèmes et examiner la paperasse pour essayer de faire fonctionner ce programme.
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Merci beaucoup, monsieur le président. J'aimerais simplement faire un bref commentaire.
Premièrement, l'une des histoires qui font la manchette à Leamington depuis environ un an et demi est celle de deux travailleurs migrants qui participaient au programme des travailleurs agricoles saisonniers et qui ont été renvoyés chez eux et rapatriés à cause de la musique dans la serre. Ils n'aimaient pas la musique rock qu'on y faisait jouer et l'employeur les a retournés immédiatement chez eux parce qu'ils se plaignaient.
Deuxièmement, un des conseillers du gouvernement libéral ontarien embauchait des gens qui travaillaient à sa production de fruits fragiles depuis 29 ans. L'un d'eux, qui avait épandu des pesticides pendant 29 ans sans aucun équipement de protection, a été atteint d'un cancer au cerveau. Eh bien, ce conseiller libéral très généreux a décidé que c'était dans son intérêt de retourner ce travailleur en Jamaïque, où il n'y avait aucun traitement.
Si vous dites que c'est un traitement équitable pour les travailleurs migrants, je vais vous dire que les libéraux ont des oeillères et ne regardent pas ce qui arrive aux travailleurs migrants. Je suis désolé de ne pas être objectif à ce sujet, mais nous n'en pouvons plus. Quelqu'un doit dire que ce n'est pas une question de statistiques; ce sont des gens qui se blessent à la ferme, des gens qui sont blessés et malades et que l'on rapatrie lorsqu'ils ont une blessure et qui ne peuvent pas être réintégrés dans le programme. Cela me met en colère quand on ramène cela aux statistiques, alors que nous savons que des gens sont blessés et malades et sont renvoyés chez eux à cause de ces maladies, et qu'ils n'ont aucun recours.
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Merci beaucoup de poser la question.
Lorsque deux travailleurs sont morts dans des circonstances très mystérieuses, en tant que membres d'une communauté, nous avons cru qu'il y avait probablement un lien entre le travail qu'ils faisaient et leur décès, bien que la cause des décès n'ait pas encore été clairement établie. Nous attendons toujours les rapports médico-légaux — nous attendons ces rapports depuis plus d'un an.
Je vais vous dire que cette affaire a occasionné beaucoup de stress dans notre communauté — et nos amis ici attribueront mes commentaires à la communauté en général — lorsque nous avons su que ces travailleurs n'avaient rien et ne pouvaient pas se permettre le rapatriement de leur dépouille. Bien qu'ils aient été incinérés, l'employeur n'a pas contribué au rapatriement des dépouilles pour qu'elles soient remises aux familles.
Aucune accusation criminelle n'a été portée. Comme les décès se sont produits à l'extérieur des lieux de travail, il n'y a eu, que je sache, aucune demande faite au titre des accidents du travail. J'ai été en contact avec la police; aucun rapport sur la cause des décès n'a été produit. J'attends toujours.
Je me suis entretenu aussi avec des agents de la municipalité concernant les règlements s'appliquant à la résidence des travailleurs. La résidence en soi était en assez bon état, je dirais, mais à ma grande surprise, il n'y a aucun règlement municipal, provincial ou fédéral régissant les résidences des travailleurs migrants. Ils peuvent dormir où ils veulent — dans la rue ou n'importe où.
Alors pour répondre à votre question, il n'y a eu aucun résultat jusqu'à présent; nous y travaillons encore. Nous sommes des bénévoles et nous avons très peu d'argent.
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Votre explication m'apparaît très bonne, très intéressante. J'encourage tous les organismes qui agissent auprès de travailleurs à bien documenter tous les cas d'abus qui pourraient se produire. S'il y a des jugements de la cour, c'est encore mieux, car il y a des personnes, comme M. Karyigiannis, qui tentent de banaliser cette situation, mais il y en d'autres. Il n'est pas le seul.
Donc, il faut qu'on soit en mesure de répondre à ces gens en leur disant que c'est plus qu'anecdotique. Il y a des problèmes majeurs par rapport à ces programmes, en raison du fait que la relation d'autorité entre l'employeur et l'employé n'est pas appropriée.
Vous avez parlé aussi de toute la question des règles. Quand les travailleurs étrangers viennent travailler chez nous, généralement, la plupart des ressources dont ils ont besoin, la plupart des lois, comme les lois sur le travail, l'éducation, la formation, la sécurité au travail, l'accès à l'école, dépendent du gouvernement provincial.
Ne serait-il pas plus logique que toutes les responsabilités de ce programme de travailleurs étrangers soient entièrement dévolues aux provinces, sauf peut-être l'aspect de la sécurité nationale et celui de la santé, qui, traditionnellement, relèvent du fédéral. Ne devrait-on pas tout transférer cela aux provinces qui, elles, seraient plus à même de faire le lien entre un travailleur étranger qui obtient un visa et la protection de ce travailleur étranger, le respect des normes du travail, des normes en santé et sécurité au travail, etc.? Cela ne serait-il pas plus efficace comme système?
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Je présume que vous avez reçu des copies de mon exposé. Je le survolerai rapidement, puisque nous sommes légèrement pressés par le temps. Je résumerai les premières pages du document, qui font brièvement l’historique de FARMS.
En 1966, le gouvernement du Canada a pris en charge l’administration du Programme des travailleurs agricoles saisonniers. Cette année-là, on avait accueilli 264 travailleurs étrangers. Le programme a été maintenu jusqu’en 1987, alors que le gouvernement fédéral a annoncé qu’il mettait fin à son financement. Le programme a donc été privatisé, et les agriculteurs de l’Ontario ont mis en place un bureau administratif.
Dans le document que je vous ai remis, vous trouverez un bref aperçu de notre organisme et du rôle de ses différents intervenants, de même que du travail administratif que se partagent les agriculteurs, Service Canada, les gouvernements étrangers et les personnes-ressources locales.
Les gouvernements étrangers, les travailleurs saisonniers et le gouvernement du Canada — par l’entremise de Service Canada et du Programme des travailleurs étrangers temporaires, je crois que c’est comme ça qu’on l’appelle maintenant — ont tous leur rôle à jouer pour assurer l’application de pratiques exemplaires dans le cadre de ce programme.
L’engagement continu et l’appui soutenu du gouvernement contribuent à assurer le bon fonctionnement du Programme des travailleurs agricoles saisonniers.
FARMS veille à maintenir des règles du jeu équitables pour tous les volets du programme. En ce qui a trait à la diffusion de l'information, nous surveillons nous-mêmes ce qui se passe et pouvons évidemment signaler à Service Canada tout cas de non-conformité, d'atteinte à l'intégrité des données, etc.
Environ 80 p. 100 du contigent est composé de travailleurs qui reviennent année après année. Les employeurs ont bien sûr consacré beaucoup de temps et d'efforts à former les travailleurs; il est donc très important pour eux que ces derniers reviennent d'une année à l'autre. Les travailleurs étrangers constituent une source fiable de main-d'oeuvre peu spécialisée pour les secteurs de l'horticulture et de la culture du tabac, dans un contexte de pénurie à l'échelle locale; et c'est un problème de plus en plus flagrant. En retour, le travailleur étranger obtient un salaire qui lui permet d'améliorer sa qualité de vie, ainsi que celle de sa famille.
Pour ce qui est de l'hébergement, les employeurs doivent faire inspecter annuellement leurs logements, ou leurs dortoirs, si vous préférez, par le ministère de la Santé.
Des représentants des cinq gouvernements étrangers participant au programme sont détachés en Ontario. Chacun dispose d'un bureau où l'on peut le joindre en tout temps. Ils sont évidemment ici pour représenter les intérêts de leurs travailleurs.
Une de nos importantes pratiques exemplaires consiste à négocier directement avec l'industrie, les gouvernements étrangers et les compagnies aériennes.
Nous assurons aussi la tenue de séances d'étude annuelles régionales et nationales visant notamment à déterminer les améliorations à apporter au programme, tant au profit des employeurs que des employés. Nous nous réunissons chaque année pour examiner le programme.
Nous permettons à quelque 15 500 familles étrangères d'améliorer leur qualité de vie, chose qu'elles ne pourraient probablement pas faire autrement.
Je céderai maintenant la parole à Paula Goncalves, qui abordera l'aspect voyage.
CanAg Travel est l'agence de voyage qui s'occupe des déplacements des travailleurs agricoles, et nous travaillons en étroite collaboration avec les gouvernements étrangers ainsi que les Services-conseils aux exploitations agricoles canadiennes. Nous sommes, en quelque sorte, le dernier maillon de la chaîne administrative pour tout ce qui touche à l'organisation et à la logistique des voyages.
Nous réservons les billets d'avion et nous coordonnons, de pair avec les employeurs, la venue des travailleurs étrangers. Lorsque ces derniers arrivent en Ontario, nous envoyons quelqu'un les accueillir à l'aéroport, les accompagner aux postes de Douanes et Immigration Canada et veiller à ce que tous leurs documents soient en règle, avant de les faire monter à bord d'autobus qui les conduiront à bon port. L'aéroport Pearson est notre principal point d'entrée.
Nous offrons également une ligne d'urgence que les travailleurs peuvent appeler en tout temps, par exemple s'ils doivent rentrer à la maison en cas de maladie ou de mortalité dans leur famille. Nous avons du personnel disponible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, pour leur venir en aide.
Au fond, on s'assure, en étroite collaboration avec les agriculteurs, que si on accueille 15 500 travailleurs par an, on en ramène autant à la maison. Si certains manquent à l'appel, il faut signaler la raison de leur séjour prolongé, que ce soit pour cause de maladie ou autre. Nous travaillons étroitement avec les gouvernements afin qu'on n'oublie personne à la fin de l'année.
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Merci à vous, monsieur le président, et aux honorables membres de m'avoir invité aujourd'hui.
Je m'appelle Ken Sy. Je suis arrivé au Canada il y a 38 ans. Après mes études universitaires, j'ai travaillé pour une grande banque à Toronto et j'ai mis sur pied ma première entreprise en 1980. Depuis une vingtaine d'années, je suis dans le domaine de l'importation et de l'exportation avec l'Extrême-Orient, et je suis grossiste-détaillant de produits de consommation à Toronto.
En 1986, j'ai aidé huit personnes, des réfugiés ou des immigrants clandestins, à s'installer à Toronto. Nous nous sommes liés d'amitié et nous avons toujours gardé contact. Aujourd'hui, toutes ces personnes sont bien établies à Toronto ou à Vancouver. Grâce à l'entreprise de fruits de mer que j'exploite depuis douze ans, je connais beaucoup de propriétaires et d'employés de restaurants et de supermarchés chinois, là où travaillent la plupart des sans papiers.
Beaucoup de préjugés sont véhiculés à propos des travailleurs sans papiers. On dit qu'ils volent des emplois aux Canadiens. C'est faux. Nous savons pertinemment que les sans papiers acceptent les emplois dont les Canadiens ne veulent pas ou pour lesquels ils ne sont pas qualifiés. Ils travaillent pour de faibles salaires et dans des conditions difficiles, ou encore sur des chantiers de construction.
On entend aussi que les travailleurs sans papiers abusent du régime d'aide sociale. Ça aussi, c'est faux. Les gouvernements fédéral et provinciaux transfèrent le plus possible la responsabilité des services sociaux aux municipalités, qui ont à peine les moyens d'aider les plus démunis. De plus, les sans-papiers ne sont pas admissibles aux prestations fédérales et provinciales.
Les travailleurs sans papiers ne contribuent pas à l'assiette fiscale. C'est faux. Même s'ils ne paient pas d'impôt sur le revenu, ils doivent débourser le montant de la TPS et de la TVP sur les biens et les services qu'ils se procurent. Par exemple, à l'achat d'une maison, ils doivent verser des droits de mutation et commencer à payer des impôts fonciers.
Selon une autre idée préconçue, les autorités d'application de la loi peuvent stopper l'immigration des sans-papiers et il est injuste pour ceux qui présentent une demande d'immigration en bonne et due forme que l'on accorde l'amnistie aux travailleurs sans papiers. On croit aussi que cela encourage davantage de gens à immigrer illégalement au Canada. Eh bien, selon le point de vue où l'on se place, je crois que cet argument est discutable. Avons-nous besoin de ces travailleurs? La réponse est « oui ». Alors, pourquoi vouloir les renvoyer à la maison?
Aucun changement ou processus d'application de la loi n'a permis de ralentir l'immigration de sans-papiers. Les travailleurs sans papiers sont attirés par les possibilités économiques. Ils ne seraient pas admissibles dans le cadre des programmes actuels d'immigration, qui favorisent les titulaires d'une désignation professionnelle. La modification de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et les contrôles exercés par l'Agence des services frontaliers du Canada ont déjà permis d'atténuer ces problèmes.
Les gens aiment manipuler la vérité pour arriver à leurs fins, et les bureaucrates préfèrent utiliser les termes « équité » et « privilège » pour se mettre à l'abri des critiques. Nous sommes une nation d'immigrants. Les immigrants, légaux et illégaux, sont des travailleurs acharnés. Ils paient des taxes, forment des communautés fortes, élèvent leur famille ici et contribuent à l'essor économique. Vous êtes-vous déjà demandé qui a assuré la poursuite du boom immobilier en Ontario au cours des dix dernières années? Ce sont les travailleurs sans papiers de la construction.
J'aimerais proposer une solution simple et viable aux membres du comité: permettez-leur de rester au pays en leur accordant un permis de travail de cinq ans, dont ils pourraient faire la demande à partir du Canada, à condition de réussir une entrevue et un examen d'anglais oral. Ils pourraient ensuite demander le renouvellement de leur permis de travail ou le statut d'immigrant admis, et on leur fait payer des impôts.
Essayez un instant de vous mettre à leur place. Méritent-ils notre respect et notre compassion? Méritent-ils d'être traités de façon plus humaine? J'estime que oui.
Merci beaucoup d'avoir pris le temps de m'écouter.
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Merci, monsieur le président. Merci à vous d'être ici.
Depuis une semaine déjà, on tient des consultations au sujet des travailleurs temporaires, et la question liée aux bonnes pratiques de travail, à la protection des travailleurs étrangers, à l'assurance qu'ils ne soient pas exploités, est récurrente.
Si vous étiez ici ce matin, vous vous rappellerez peut-être que j'ai posé une question sur une avenue de solution pour essayer de mieux protéger les travailleurs étrangers qui viennent consacrer de leur temps à bâtir le Canada tout en permettant aux compagnies de faire des profits, de protéger leur investissement, comme elles disent. J'aimerais connaître votre opinion à ce sujet.
En fait, quand un travailleur étranger arrive au pays, il est assigné à une entreprise en particulier et il ne peut pas — du moins c'est très difficile — changer d'entreprise en cours de route. Beaucoup de groupes qui représentent des immigrants ont encouragé les membres du comité à abolir cette restriction et à permettre aux travailleurs de passer d'un employeur à l'autre s'ils jugent que leurs conditions de travail ne sont pas satisfaisantes.
Beaucoup d'employeurs, en contrepartie, nous ont dit que pour faire venir un travailleur de l'étranger, ils doivent investir dans une agence de recrutement, dans le transport de cet individu. Alors, si la personne veut changer d'entreprise quelques semaines après son arrivée, ils sont alors incapables de rentabiliser leur investissement.
Pourrait-on considérer une solution mitoyenne où on permettrait facilement à un employé de changer d'employeur en cours de route s'il connaît des difficultés avec son employeur, mais où, le cas échéant, le nouvel employeur devrait prendre à sa charge les frais que le premier employeur a encourus, afin d'éviter que ce dernier ait une perte? Cela vous semblerait-il une solution intéressante pour la protection des travailleurs et la rentabilité des entreprises? Croyez-vous que le comité devait faire cette recommandation?
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Comme je l'indiquais, en fin de compte, il faut donner un avenir aux travailleurs, quelque chose à quoi s'accrocher. S'ils pouvaient demander le statut de résident permanent après cinq années de travail ici, les choses seraient différentes. À l'heure actuelle, ils ne détiennent qu'un permis de travail. Ils n'ont aucune idée de ce qui va leur arriver dans un an ou deux. Cela donne également l'occasion aux employeurs d'abuser du système. Si les travailleurs savaient qu'ils pouvaient assurément demander le statut de résident permanent après trois ou cinq ans, la réalité serait tout autre.
Je crois que la première chose à faire, ce serait de leur permettre de revendiquer le statut d'immigrant admis s'ils n'ont pas eu de démêlés avec la justice. La deuxième serait, pour les travailleurs, de pouvoir changer d'employeur, mais c'est un moindre mal. J'ai rencontré quelques travailleurs chinois sans papiers. S'ils avaient su...
Je dirai simplement que cela me désole de voir que ces gens-là doivent abuser du système. S'ils sont réduits à ça, c'est qu'ils savent qu'ils ne pourront jamais avoir le statut de résident permanent. La seule façon d'y arriver pour eux, c'est par un faux mariage. Une fois mariés, ils peuvent obtenir un permis de travail et trouver un emploi correct, dans le sens qu'ils n'ont plus à travailler au noir. Ils peuvent demander un numéro d'assurance sociale, gagner un salaire régulier, etc.
Je le répète, il faut donner un avenir aux travailleurs, quelque chose à quoi s'accrocher.
Je voulais notamment souligner l'une des origines des problèmes liés au traitement des demandes. Le gouvernement libéral précédent avait prévu un montant de 700 millions de dollars sur une période de cinq ans pour ces activités de traitement, ce qui représente 140 millions de dollars par année. Malheureusement, ce budget a été supprimé par le présent gouvernement. C'est ce que nous ont dit des fonctionnaires du ministère lorsque nous les avons interrogés.
J'abonde entièrement dans votre sens, monsieur Sy, lorsque vous dites qu'il faut en arriver à une solution dans le dossier des travailleurs sans papiers. On s'apprêtait à mettre en place un programme de régularisation, mais le gouvernement actuel s'en est débarrassé, ce qui est vraiment tragique, car nous nous retrouvons ainsi avec tous ces travailleurs sans papiers qui sont exposés à des abus de toutes sorte. Ils évoluent en marge de l'économie. Vous avez suggéré qu'on leur accorde un permis pour autant qu'ils maîtrisent l'anglais et satisfassent à toutes les autres conditions, qu'il fallait trouver un moyen de régulariser leur situation.
Quoi qu'il en soit, je veux remercier les témoins de ce groupe pour leur comparution et les exposés qu'ils nous ont présentés.
Vous allez céder la place à notre prochain témoin, M. Lambrinos.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
[Français]
Merci beaucoup de me donner l'occasion de faire une présentation aujourd'hui. Je souhaite la bienvenue en Ontario aux députés de la province de Québec, MM. Carrier et St-Cyr.
[Traduction]
Je veux vous assurer que nous comprenons bien les attentes quant à l'information supplémentaire à fournir. Je veux également profiter de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui pour vous donner quelques précisions concernant notre industrie.
Je vous parle au nom de l'Adult Entertainment Association of Canada. Voilà quelques années déjà que j'ai contribué à la création de ce regroupement d'intervenants de l'industrie en vue d'élaborer des pratiques d'autoréglementation permettant une collaboration avec le gouvernement.
Nous avons mis sur pied un sous-comité responsable des questions d'immigration. Ce sous-comité relevant de notre conseil d'administration s'emploie à améliorer le sort des travailleurs étrangers temporaires. Nous avons d'ailleurs discuté de la question avec les différents ordres de gouvernement.
Citoyenneté et Immigration Canada est déjà conscient de la nécessité d'améliorer le programme actuel. Les gens du ministère en ont discuté avec le comité. RHDSC sait qu'on doit améliorer les mesures de contrôle et de vérification de la conformité auprès des employeurs, mais personne ne peut rien faire sans les outils et le mandat requis.
Comme vous l'ont indiqué d'autres témoins aujourd'hui, nous proposons des initiatives de partenariat quant au traitement des avis relatifs au marché du travail et à la recherche de nouveaux employeurs. Il faut intervenir auprès des associations de gens d'affaires pour assurer un lien avec le gouvernement, car RHDSC ne travaille pas directement sur le terrain. Plus important encore, nous devons mettre en place des mesures préventives, plutôt que de nous limiter à la seule application des règles.
Les ministères en cause ont évoqué bien des raisons pour justifier leur inaction: cela pose des difficultés, ce n'est pas de leur ressort, il y a des détails techniques à régler, etc. Ce que le gouvernement devrait faire à notre avis, et pas seulement pour notre industrie mais pour d'autres également, c'est de s'employer à favoriser la régularisation.
Le problème vient notamment du fait que la structure ministérielle actuelle du gouvernement est trop rigide. Les trois ministères se limitent à leur mandat respectif. Nous recommandons au comité que l'on désigne un chef de file en la matière. Lors de la Deuxième Guerre mondiale, c'est Dwight Eisenhower qui a hérité de ce rôle. Il faut bien se rendre compte que pour agir efficacement, il faut compter sur un leader semblable.
[Français]
En français, je pense que l'équivalent serait un capitaine de bateau.
[Traduction]
Le gouvernement a indiqué que les pressions devraient s'intensifier. On a déjà parlé d'une augmentation prévue de 25 p. 100 pour l'ensemble des aspects. Nous estimons qu'il faut tenir davantage compte des besoins des employeurs canadiens. Selon les estimations du gouvernement, le nombre de sans-papiers se situera entre 80 000 et 150 000, c'est-à-dire qu'un immigrant sur deux sera dans l'illégalité.
Vous connaissez tous le processus actuel. RHDSC effectue le premier examen. On procède aux vérifications nécessaires pour confirmer la situation de l'employeur. Le tout est ensuite soumis à l'approbation officielle de CIC. Comme vous le savez tous, 163 000 demandes ont été approuvées par RHDSC en 2006, mais seulement 113 000 d'entre elles ont reçu l'approbation de CIC, ce qui donne un taux de refus de 29 p. 100. Un nombre considérable d'immigrants savent donc qu'un emploi les attend au Canada. RHDSC a déjà donné son approbation quant aux employeurs concernés, mais CIC rejette les demandes. Nous croyons qu'il convient de s'employer en priorité à réduire le plus possible les activités illégales.
Si on compare la situation de notre secteur par rapport à la moyenne nationale, le taux d'acceptation par RHDSC est de 93 p. 100 pour les membres de notre association. La moyenne est de 80 p. 100 pour l'ensemble des industries au Canada. Pour ce qui est de CIC, le taux de refus moyen atteint 29 p. 100, ce qui représente un taux d'acceptation de 71 p.100, mais le taux de refus pour notre secteur est de 93 p. 100. Il est bien évident que l'on veut faire passer des messages pour des raisons que les membres de ce comité comprennent bien. Des mesures non officielles ont déjà été prises pour voir à ce que les ambassades n'acceptent que très peu de demandes de visa pour les danseuses exotiques, et nous croyons qu'il faut s'employer à empêcher ce genre d'agissements.
C'est ici qu'entre en jeu l'Agence des services frontaliers du Canada qui s'est vu confier le mandat d'expulser les personnes à risque. L'Agence nous a déjà indiqué que 4 000 criminels étaient en attente de leur expulsion. Un ordre de priorité a été établi pour les mesures à prendre par l'Agence, et nous savons de quoi il en retourne.
Monsieur le président, notre association s'est donné pour mandat de fournir des documents d'information pour la sensibilisation des travailleurs. Nous offrons ces documents en cinq langues, plutôt que seulement trois comme le gouvernement: l'anglais, le français et l'espagnol.
Nous effectuons des contrôles des établissements et des vérifications auprès des membres de notre industrie. Cela fait partie de notre mandat de nous assurer que les mesures de protection nécessaires sont en place dans tous les établissements de divertissement pour adultes qui relèvent de l'association.
Nous travaillons également en collaboration avec les municipalités en désignant des agents de liaison auprès des services de police pour nous assurer qu'il y a une démarche concertée de sensibilisation à la prévention au sein de l'industrie.
Le problème que nous avons, comme M. Linklater l'a signalé au comité, c'est que rien ne justifie la création d'une solution pour cette industrie. On a créé une solution, en disant: « C'est ce que nous voulons faire contre cette industrie. » Quelle est la justification? On nous répond: « Nous n'en sommes pas encore là. » Ce n'est pas ainsi que les choses fonctionnent. Habituellement, vous décelez un problème, puis vous trouvez une solution, et non l'inverse.
Je tiens à ajouter que nous avons déjà mis en service un numéro sans frais pour que les travailleuses puissent signaler de manière confidentielle tout abus ou problème au sein de l'industrie, et aucune plainte n'a été formulée en ce sens via notre ligne sans frais.
Nous avons également mené une série de consultations publiques au Canada, en Ontario, en août dernier. En résumé, ce que les femmes qui travaillent dans l'industrie nous ont dit, ce n'est pas qu'elles sont exploitées ou maltraitées, mais bien qu'elles travaillent très fort, respectent les lois, paient des impôts et fournissent une aide financière essentielle à leur famille à l'étranger, et qu'elles ont choisi de venir travailler au Canada en raison, principalement, de la bonne réputation de notre pays à l'échelle internationale.
Finalement, les experts nous ont indiqué que cette situation encouragera la création de réseaux illégaux et clandestins. Nous recommandons que vous interdisiez les agents de recrutement, les intermédiaires. Cela ne devrait pas être permis. Nous recommandons aussi qu'on permette aux candidates de poursuivre des études, qu'on leur accorde un visa de rentrée, comme le professeur l'a proposé, et qu'on leur donne la possibilité de changer d'employeur, comme l'ont demandé d'autres industries. Nous pensons qu'il doit y avoir une collaboration avec les associations.
Les solutions peuvent être simples. Ce que nous devons faire ensemble, c'est adopter une attitude proactive tout en décourageant la clandestinité.
À ce propos, nous allons vous revenir avec des informations supplémentaires.
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur Lambrinos, je vous remercie de votre présentation.
Beaucoup d'employeurs ont fait une présentation, devant le comité, sur les travailleurs étrangers temporaires. Au départ, le programme était conçu pour combler un manque de main-d'oeuvre. Dans le cas des travailleurs qualifiés, ça s'explique bien parce que dans bien des cas, on n'a tout simplement pas de personnel ayant les qualifications nécessaires pour occuper certains emplois.
Les travailleurs non qualifiés constituent une deuxième catégorie. Ils n'ont pas vraiment besoin de formation particulière pour occuper un emploi. Ce domaine s'est particulièrement développé au cours des dernières années, surtout dans les provinces de l'Ouest, où il y a le boum économique, le pétrole, etc. On ne trouve même plus d'employés pour verser le café chez Tim Hortons. C'est l'exemple qu'on nous a donné. Il faut faire venir la main-d'oeuvre de l'étranger.
Dans votre domaine, soit l'industrie du tourisme adulte ou du divertissement adulte, comme vous l'appelez, quel est le besoin de main-d'oeuvre de l'étranger?
:
Monsieur St-Cyr, je vais répondre en anglais.
[Traduction]
Nous avons déterminé que 40 p. 100 des membres de l'industrie en Ontario ont besoin de main-d'oeuvre étrangère. C'est en partie attribuable au fait qu'il existe des préjugés dans la société. Ce n'est pas dans l'ensemble du Canada, comme vous le savez sûrement. Il y a certains préjugés sociaux qu'on associe au fait d'être identifié. Il doit y avoir un certain respect de la vie privée dans l'industrie.
À la base, le terme « exotique » veut dire étranger. C'est donc une avenue pour les travailleurs étrangers, les danseuses, notamment. Mais on ne parle pas de tous les établissements et de toute la demande de main-d'oeuvre. On se fonde sur l'offre et la demande, et à certains endroits, il y a une demande pour ce genre de divertissement. L'un des problèmes vient toutefois du caractère autonome de la main-d'oeuvre; elle va là où il y a du travail, et c'est toujours le cas dans le domaine du divertissement. Elle parcourt le circuit; elle se déplace pour aller là où il y a du travail.
Ces établissements sont des entreprises à part entière. Il existe manifestement une demande. Honnêtement, j'ai constaté que si on ne répond pas à la demande, on finit par voir apparaître des activités non réglementées et non contrôlées.
:
Nous pensons que non, mais si on regarde les chiffres, c'est bien possible qu'il y en ait. Comment ils s'y sont pris, je l'ignore; peut-être avec de fausses pièces d'identité ou par l'entremise d'un réseau... Nous faisons tout pour qu'il y en ait le moins possible.
Ce que nous voulons souligner, par contre, c'est que le gouvernement doit aussi s'assurer que cette main-d'oeuvre est considérée comme non qualifiée, afin d'empêcher que les gens ne soient poussés à travailler dans des milieux non réglementés.
Dans certaines de nos recommandations, monsieur St-Cyr, nous avons parlé d'interdire les agents, les tiers entrepreneurs; c'est un problème dont on a parlé dans deux reportages des médias. Certains agents envoyaient des femmes non seulement dans des clubs, mais aussi dans des réseaux de prostitution. On les a fait entrer au pays avec un visa de danseuse exotique, mais maintenant elles font autre chose — elles peuvent être mannequins, notamment.
Ce que nous disons, monsieur St-Cyr, c'est qu'il y en a très probablement. Combien? Je l'ignore, particulièrement dans nos établissements. Puisque RHDSC refuse 93 p. 100 de nos demandes de main-d'oeuvre étrangère, il y en a probablement très peu. Nous ne voulons pas que les membres de notre association soient incités à embaucher des travailleurs illégaux.
Cela ne fait aucun doute, il y en a partout au Canada.
Madame Grewal?
Je vous remercie beaucoup de votre présentation.
Avant de lever la séance, j'aimerais informer les membres du comité qu'aujourd'hui, à 15 heures, nous avons observé une minute de silence à la Chambre, en mémoire du dernier soldat canadien ayant perdu la vie en Afghanistan. Je voulais vous transmettre cette information.
Une voix: Pourrions-nous faire de même?
Le vice-président (L'hon. Andrew Telegdi): Certainement.
Les membres du comité sont-ils tous d'accord pour que nous observions un moment de silence?
Des voix: Oui.
[Le comité observe un moment de silence.]
Le vice-président (L'hon. Andrew Telegdi): Merci.
Avant de terminer, j'aimerais que nous présentions une motion pour remercier la ville de Waterloo de son hospitalité et des installations qu'elle a mises à notre disposition.