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Merci et bonjour, monsieur le président et membres du comité.
Je suis heureux d'être ici aujourd'hui et je vous remercie de me donner cette occasion de m’adresser à vous au sujet de cette question très importante pour le Service correctionnel du Canada. Au cours des dix dernières années, sous l’effet de différents facteurs, des changements importants sont survenus dans le profil de la population carcérale. Ces changements sont lourds de conséquences pour le SCC. L’augmentation du nombre de délinquants ayant des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie à leur arrivée dans nos établissements est l’un des principaux changements auxquels nous sommes confrontés. Ainsi, depuis 1997, le nombre de délinquants et de délinquantes ayant des problèmes de santé mentale au moment de leur admission dans le système correctionnel a augmenté respectivement de 71 et de 61 p. 100.
Notre organisation se doit de trouver des moyens de faire face à cette situation en offrant des services adéquats aux délinquants sous responsabilité fédérale qui ont des troubles mentaux. Nous devons également poursuivre nos efforts en vue d’améliorer tant la qualité des soins qui sont offerts à ces délinquants que leurs résultats correctionnels. Nous devons absolument poursuivre nos efforts en ce sens, car, en répondant aux besoins des délinquants atteints de troubles mentaux, nous les rendons moins vulnérables et les aidons aussi à diminuer le risque qu’ils présentent pour les autres, ce qui contribue à la sécurité des Canadiens
Au cours des cinq dernières années, nous avons intensifié nos efforts et continué à travailler avec diligence en vue d’inventorier les lacunes existant dans nos services de santé mentale, et de mettre en oeuvre un nouveau train de mesures — programmes, politiques, services et initiatives — pour remédier à ces problèmes. À l’appui de ces initiatives, nous avons reçu un montant de 29,1 millions de dollars réparti sur cinq ans pour améliorer la continuité des soins de santé mentale spécialisés après la mise en liberté, dans le cadre de l’Initiative sur la santé mentale dans la collectivité. En 2007, le SCC a reçu un nouveau montant de 21,5 millions de dollars réparti sur deux ans pour appuyer certains éléments clés de son Initiative sur la santé mentale en établissement. En outre, dans le budget fédéral de 2008, le SCC s’est vu accorder un financement permanent de 16,6 millions de dollars par an, à compter de l’exercice 2009-2010, pour la prestation en établissement de services de santé mentale.
Ces fonds ont largement contribué à assurer une continuité des soins de santé mentale pour répondre aux besoins des délinquants sous responsabilité fédérale depuis leur admission jusqu’à la date d’expiration de leur mandat. Par exemple, le SCC a mis en place un système informatisé d’examen et d’évaluation de tous les délinquants à leur admission; tous les établissements constituent une équipe multidisciplinaire de professionnels de la santé mentale chargée d’offrir des services essentiels de soutien et de santé mentale.
J’ai le plaisir de vous annoncer que certains éléments importants de la Stratégie en matière de santé mentale, une stratégie de portée générale, sont présentement mis en oeuvre, notamment ceux qui ont trait au renforcement des capacités dans les établissements fédéraux et au soutien qui doit être offert aux délinquants pour qu’ils réintègrent la collectivité en toute sécurité. Cette stratégie vise à améliorer la continuité des soins et des services offerts aux délinquants ayant des problèmes de santé mentale, depuis leur admission jusqu’à l’expiration de la période de surveillance dans la collectivité. Par exemple, grâce aux équipes interdisciplinaires de professionnels de la santé mentale nouvellement créées, les délinquants bénéficient d’un éventail complet et coordonné de soins en établissement; des travailleurs sociaux fournissent des services cliniques de planification du congé aux délinquants atteints de troubles mentaux qui sont mis en liberté.
Les centres de traitement du SCC constituent un autre élément important de la continuité des soins, en contribuant à répondre aux besoins intensifs et aigus des délinquants atteints de troubles mentaux. Les centres de traitement ont des critères d’admission et de congé bien définis. Il appartient aux professionnels de la santé mentale en poste dans les établissements réguliers de recommander l’admission de délinquants atteints de divers troubles mentaux.
Toutefois, il n’est pas toujours facile de convaincre un délinquant d’accepter de suivre un traitement. Comme les centres de traitement sont assimilés à des hôpitaux, ils sont assujettis aux lois provinciales régissant les soins de santé, y compris à la Loi sur la santé mentale. Les lois provinciales exigent qu’un patient soit hospitalisé de son plein gré ou en vertu d’un certificat d’internement, si le patient est jugé par un médecin comme étant inapte à donner son consentement. Ce certificat doit être renouvelé régulièrement.
La durée du séjour en centre de traitement varie énormément en fonction des besoins du délinquant. Un délinquant obtient son congé d’un centre de traitement pour l’une ou l’autre des raisons suivantes: l’équipe de soins cliniques estime que le traitement est terminé et que le patient peut sortir; le délinquant décide de quitter le centre ou refuse le traitement et ne peut y être maintenu d’autorité en vertu des dispositions de la loi provinciale compétente sur la santé mentale; une date de mise en liberté autorisée se présente, indépendamment de ce qui précède — libération d’office ou expiration du mandat. Il convient de noter que, dans certains cas, il peut être difficile d’admettre un délinquant dans un centre de traitement ou de l’y garder pour lui permettre d’obtenir l’aide et le soutien requis, sans son consentement.
Pour continuer de soutenir et de traiter le nombre croissant de délinquants atteints de troubles mentaux, le Service correctionnel déploie des efforts considérables pour renforcer ses ressources humaines. L’an dernier, le SCC a adopté une stratégie de recrutement et de maintien en fonction de professionnels de la santé, dont des psychologues et d’autres professionnels de la santé mentale. La mise en oeuvre de la Stratégie est en cours; elle est axée sur la communication et l’annonce des postes ouverts dans le secteur de la santé au SCC, le recrutement ciblé et la promotion d’un lieu de travail sain qui favorise le perfectionnement professionnel.
Les défis à relever en matière de santé mentale sont d’autant plus grands qu’à leur arrivée dans un établissement fédéral, quatre délinquants sur cinq ont des problèmes de toxicomanie, la moitié de ces délinquants ayant commis leur crime sous l’influence de la drogue, de l’alcool ou d’autres substances intoxicantes. Malheureusement, les problèmes de toxicomanie d’un délinquant ne se règlent pas dès le moment où il est admis dans un établissement. Le trafic de la drogue, qui inclut aussi bien des drogues illicites que des médicaments délivrés sur ordonnance, est un facteur qui contribue à la violence dans les établissements. La présence de drogue dans nos établissements est une menace pour la sécurité du personnel et des délinquants. Elle a une incidence significative sur la volonté et la capacité d’un délinquant de suivre, et d’achever, les programmes pour toxicomanes.
Empêcher l’introduction de drogue dans nos établissements est un défi constant; c’est grâce au travail diligent du personnel du SCC que nous arriverons à régler ce problème. En conséquence, dans le cadre de la Stratégie antidrogue, le SCC continue d’élaborer des plans et de prendre des mesures pour réduire la violence et la présence des drogues illicites dans nos établissements. Cette stratégie est centrée sur trois éléments clés — prévention, traitement et intervention — et sur la répression. Elle vise à privilégier une utilisation plus stratégique des outils de répression des drogues existants. Ses autres objectifs sont les suivants: mettre en place un programme de sensibilisation pour informer les employés, les entrepreneurs et les visiteurs des répercussions de l’introduction de drogues dans les établissements; accroître la surveillance des personnes susceptibles d’être impliquées dans le trafic de drogues; renforcer les mesures disciplinaires; mieux faire connaître aux délinquants les programmes de traitement de la toxicomanie qui leur sont offerts.
De plus, les membres du personnel du SCC utilisent divers moyens pour empêcher l’introduction de drogue dans les établissements: appareils à rayons X, détecteurs ioniques, ligne téléphonique sans frais, chiens détecteurs de drogue et campagne d’information du public. En janvier 2010, nous mettrons à l’essai, pour une période d’un an, un nouveau Modèle de programme correctionnel intégré dans certains établissements pour hommes et établissements communautaires. Le Modèle de programme correctionnel intégré s’appuiera sur les éléments les plus efficaces des programmes correctionnels existants et maximisera la contribution du Service à la sécurité publique en facilitant l’inscription des délinquants aux bons programmes, au bon niveau d’intensité, au bon moment.
L’adoption d’une approche intégrée pour répondre aux besoins des délinquants constitue la façon la plus efficace d’offrir nos services, particulièrement en ce qui concerne la transition des délinquants vers la collectivité. Tous ces moyens sont utiles pour rendre nos établissements sûrs et exempts de drogue, pour créer un environnement propice dans lequel les délinquants peuvent s’employer à devenir des citoyens respectueux des lois.
En mai 2008, le SCC a organisé un symposium international axé sur la recherche de solutions aux problèmes de santé mentale des délinquants, une occasion de consulter d’autres services correctionnels au sujet de leurs pratiques exemplaires. En décembre 2008, le SCC a tenu un colloque sur la gestion de l'interdépendance entre les gangs et la drogue dans les pénitenciers fédéraux. Ce symposium s’est révélé particulièrement réussi pour ce qui est de permettre aux employés des services correctionnels canadiens et à leurs homologues étrangers de mettre en commun idées et pratiques exemplaires pour s’attaquer aux problèmes liés aux gangs et à la drogue.
Comme vous le savez peut-être, le 20 avril 2007, le gouvernement a annoncé la création d’un Comité d’examen indépendant chargé d’évaluer les priorités opérationnelles, les stratégies et les plans d’activité du SCC, et ce, dans le but ultime d’améliorer la sécurité publique. Le Comité a déposé son rapport en décembre 2007. Ce rapport contenait 109 recommandations regroupées autour de cinq grands thèmes: les obligations des délinquants; l’élimination des drogues dans les établissements; l’emploi et l’employabilité des délinquants; l’infrastructure physique; l’élimination de la libération d’office et son remplacement par la libération conditionnelle méritée.
En février 2008, le SCC a mis sur pied une Équipe de transformation pour coordonner la réponse du Service au rapport du Comité d’examen. Dans le budget de 2008, 122 millions de dollars répartis sur deux ans ont été alloués au programme de transformation du SCC. Ces fonds ont permis au SCC de franchir la première étape essentielle de sa transformation.
Outre nos efforts de lutte contre les problèmes de santé mentale et de toxicomanie, nous avons privilégié les domaines suivants: la gestion de la population; la sécurité; l’évaluation et les interventions correctionnelles; l’éducation et l’emploi; les délinquantes, les délinquants autochtones et appartenant à des minorités ethnoculturelles; la transition vers la collectivité; les victimes; la gestion des ressources humaines; l’infrastructure physique. Je crois que nous sommes en bonne voie d’améliorer le système correctionnel fédéral et d’être ainsi mieux en mesure de remplir notre mandat pour ce qui est de contribuer à la sécurité publique.
En terminant, j’aimerais vous remercier de m’avoir permis de vous parler des efforts que fait le SCC pour répondre aux besoins des délinquants ayant des problèmes de santé mentale et de toxicomanie, et d’évoquer certaines des stratégies et des mesures que nous avons mises en place.
Merci, monsieur le président.
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Oui, monsieur le président. Je n'ai pas de mémoire écrit. Je vais improviser, comme j'ai l'habitude de le faire. Je vous demanderais toutefois de vous reporter au rapport que nous avons publié en octobre 2007. Je suppose que vous y retrouverez la plupart de mes observations, ainsi qu'une ou deux des 109 recommandations sur une ou deux pages de ce rapport.
Le rapport se trouve dans le site Web du SCC; c'est un document public. Il contient un certain nombre de chapitres consacrés à la santé mentale. Je crois que 10 ou 11 recommandations portent sur la santé mentale. Il s'agit des recommandations 47 à 58, pour être plus précis.
Je voudrais seulement dire un certain nombre de choses, après quoi je pense qu'il vaudrait sans doute mieux que je réponde aux questions, monsieur le président, ou que vous procédiez comme vous en avez l'habitude.
Je conseille au comité de ne pas considérer la santé mentale isolément des autres questions concernant les services correctionnels. Ce n'est qu'un problème parmi bien d'autres. Quand notre comité a examiné le Service correctionnel, nous avons constaté que tous les éléments du casse-tête sont reliés les uns aux autres. On ne peut pas s'occuper de la santé mentale sans s'occuper de l'infrastructure. Si l'on règle le problème de l'infrastructure sans s'attaquer aux questions touchant la santé mentale ou la toxicomanie ou les programmes, cela ne marche pas non plus. Les solutions concernant le système correctionnel fédéral doivent être globales, si vous voulez.
Pour ce qui est précisément de la santé mentale, le Comité d'examen en a parlé et je ne sais pas ce qu'en pense le comité, mais comme vient de l'expliquer le commissaire, avec les millions de dollars qu'il consacre à la santé mentale et aux programmes de santé, en fait, le Service correctionnel du Canada crée son propre système de santé. Les détenus des prisons fédérales ne sont pas visés par la Loi fédérale sur la santé et pour cette raison, même si ces établissements se trouvent en Ontario, en Saskatchewan ou en Colombie-Britannique où il y a un système de santé, le système correctionnel fédéral crée son propre système. Cela l'expose fortement à dédoubler les services et à réinventer la roue. À mon avis, si vous établissez un système de santé parallèle à l'intérieur du réseau correctionnel fédéral, dans la cour du système de santé ontarien, l'argent des contribuables fédéraux risque fort de ne pas être entièrement dépensé à bon escient.
Une de nos recommandations concernant la santé mentale est qu'il y ait une meilleure coordination entre les services offerts aux détenus incarcérés dans les pénitenciers fédéraux et ceux qui leurs sont fournis à l'extérieur. Ces détenus finiront par être libérés et être desservis par le système de santé fédéral-provincial. Une intégration est nécessaire. Je sais que le commissaire fait de gros efforts en ce sens, mais c'est très difficile quand la loi dit que les détenus des établissements fédéraux ne sont pas visés par la Loi sur la santé.
Une observation intéressante que nous formulons dans notre rapport est que pour fournir des services de santé mentale, il faudrait considérer que le pénitencier est à l'intérieur de l'hôpital et non pas que l'hôpital est à l'intérieur du pénitencier. Il vaut la peine de réfléchir un peu au sens de cette phrase. J'invite le comité à le faire lorsqu'il visitera ces établissements.
Je vais vanter les mérites d'un projet qui a été lancé en Ontario, non pas parce que c'est moi qui l'ait lancé quand j'étais le ministre des Services correctionnels de l'Ontario, mais parce qu'il a été mis en oeuvre par un gouvernement de l'Ontario, à Brockville. Si vous en avez l'occasion, je vous conseille d'aller visiter l'établissement psychiatrique de Brockville où un pénitencier a été créé à l'intérieur d'un hôpital. En entrant, vous verrez que c'est un endroit sécurisé où il y a des gardes, mais où les détenus sont davantage traités comme les patients d'un hôpital et se comportent différemment qu'ils ne le font dans certains établissements fédéraux que le Comité d'examen a visités.
Ce système est un peu mieux intégré dans le système provincial de soins de santé. En fait, il est géré par l'Hôpital d'Ottawa.
L'infrastructure fait partie des recommandations de notre rapport. Le Comité d'examen a recommandé la création d'ensembles carcéraux, non pas pour avoir d'énormes prisons, comme certains l'ont laissé entendre, mais pour permettre au commissaire d'inclure un hôpital dans un pénitencier et de pouvoir faire passer les détenus d'un établissement à l'autre, d'une installation à l'autre, à l'intérieur du même périmètre, si vous voulez.
Cela permettrait une efficience opérationnelle considérable, une énorme efficience sur le plan de la prestation des services et je dirais, comme le Comité d'examen y a fait allusion, que cela permettrait également de réaliser des économies grâce à une meilleure gestion d'un groupe beaucoup plus petit. Commissaire, vous avez une cinquantaine d'établissements, n'est-ce pas?
Un dernier mot au sujet de la santé mentale. Nous y avons fait allusion dans notre rapport, mais pas de façon précise.
En ce qui concerne la santé mentale, le Comité d'examen estime que le principal objectif du Service correctionnel devrait être de stabiliser le délinquant et de lui dispenser les soins nécessaires. Il se retrouvera ensuite au sein de la population carcérale générale ou il sera libéré de prison et ne bénéficiera pas nécessairement du niveau de services auquel il aura été habitué dans l'établissement. Il est donc nécessaire de le stabiliser afin qu'il puisse vraiment vivre comme un citoyen respectueux des lois à l'extérieur de la prison et compter sur les services disponibles dans la collectivité où il se retrouvera. Si on l'habitue à un haut niveau de service au sein d'un établissement pour le libérer ensuite dans un milieu où il n'aura qu'un faible niveau de service, c'est le préparer à un échec.
Certains chiffres concernant la récidive des délinquants ayant des troubles mentaux, que le commissaire ou l'enquêteur correctionnel vous ont fournis, montrent que c'est bien ce qui se passe. Ces personnes, qui sont habituées à recevoir un niveau de service personnalisé à l'intérieur de l'établissement, se retrouvent livrées à elles-mêmes quand elles sont libérées. Voilà pourquoi le principal objectif devrait être de les stabiliser afin qu'elles puissent vivre comme des citoyens respectueux des lois dans la collectivité.
En fait, si vous demandez au directeur de l'établissement de Brockville quel est son principal objectif, c'est bien celui-là, je pense. Son travail est un peu plus difficile en raison de la brièveté du séjour au sein des établissements provinciaux. Il est plus court que dans les établissements fédéraux. Il doit mettre l'accent sur la stabilisation, car les détenus ne restent pas assez longtemps pour que le traitement ait des effets positifs.
Monsieur le président, voilà ce que j'avais à dire. J'apprécie que vous examiniez ce sujet très important et je suis prêt à répondre à vos questions.
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Je vais vous donner quelques réponses dont une, brièvement, au sujet des programmes offerts.
J'ai mentionné brièvement dans ma déclaration préliminaire les mesures que nous prenons en ce qui concerne le modèle de programme correctionnel intégré. Pour répondre à la question que vous avez soulevée au sujet de l'accès aux programmes, cela nous permettra d'orienter les délinquants vers les phases préliminaires des programmes au moment de leur admission. Au lieu d'attendre huit à neuf mois ou même 10 mois avant que les délinquants ne commencent à participer aux programmes, ils pourront le faire dès leur admission. C'est là un changement important dans notre stratégie qui contribuera largement à résoudre le problème auquel vous avez fait brièvement allusion.
Pour ce qui est des maladies infectieuses contagieuses, nous avons actuellement 250 délinquants dont les tests de VIH sont positifs et environ 4 100 qui sont porteurs de l'hépatite C. Ces chiffres ont augmenté graduellement. Il ne s'agit pas d'augmentations énormes. Nous pouvons fournir au comité les chiffres exacts.
Nous avons seulement des chiffres pour les détenus qui acceptent de subir un test. Il n'y a pas de test obligatoire au moment de l'admission. S'il y a une énorme augmentation du nombre de délinquants qui arrivent avec des maladies infectieuses au lieu d'être contaminés pendant leur incarcération, nous ne sommes pas vraiment en mesure de le savoir, sauf si les détenus acceptent de subir des tests. Nos chiffres tiennent compte uniquement de ceux qui ont accepté de les subir.
Pour ce qui est de nos mesures répressives, nous croyons honnêtement que si nous ne créons pas un milieu sûr pour les délinquants qui participent aux programmes, ils ne voudront pas sortir de leur cellule. Dans certains de nos établissements, surtout ceux à sécurité maximum et certains établissements à sécurité moyenne, les délinquants sont fortement incités à participer à la sous-culture de la drogue et choisissent donc de ne pas participer aux programmes. En général, environ 20 p. 100 des délinquants choisissent de ne pas participer aux programmes.
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Il y en a plusieurs. Elles correspondent, dans une large mesure, à notre programme de transformation global.
Notre première priorité est d'avoir des établissements sûrs dans l'ensemble du pays. Si nous n'avons pas un milieu sûr dans lequel le personnel pourra travailler et dans lequel les délinquants pourront choisir de participer aux programmes qui leur sont offerts, nous ne serons pas efficaces.
Notre deuxième priorité est d'avoir la capacité d'évaluation la plus moderne qui soit pour évaluer les besoins des délinquants afin que nous puissions établir les plans correctionnels les plus efficaces qui nous permettront de répondre aux besoins des détenus. Ensuite, il s'agit d'avoir les programmes les plus efficaces — d'après les résultats empiriques — pour répondre aux besoins des délinquants pendant que ces derniers purgent leur peine dans nos établissements et pendant qu'ils sont en transition dans la société, sous notre surveillance.
J'essaie également de faire en sorte que nous ayons des ressources humaines solides et c'est pourquoi nous recrutons le meilleur personnel masculin et féminin du pays pour travailler dans notre service et que nous leur donnons les meilleures possibilités d'apprentissage et de perfectionnement. Nous avons aussi une bonne stratégie de rétention pour les garder. Tout cela vise à faire en sorte que nous ayons un ensemble de moyens solides pour fournir des services correctionnels.
En même temps, une de mes priorités est de veiller à ce que nous soyons bien reliés à ce que j'appellerais l'avant-garde et l'arrière-garde du système. Je suis convaincu qu'il reste beaucoup de travail à faire en ce qui concerne nos relations avec les collectivités, avec le système de justice pénale ainsi que les agences de services sociaux qui s'occupent de certains des problèmes auxquels nous sommes continuellement confrontés.
Malheureusement, le député n'ignore pas qu'on s'attend à ce que le Service correctionnel du Canada règle tous les problèmes sociaux qui n'ont pas été résolus depuis longtemps. J'essaie donc de faire en sorte que nous soyons mieux reliés aux services situés à l'avant-garde et à l'arrière-garde afin que les gens qui entrent dans le système carcéral puissent avoir accès aux services et à l'aide dont ils ont besoin, dès le départ et lorsqu'ils ne sont plus sous notre responsabilité, quand ils ont purgé leur peine, pour pouvoir rester dans la société et s'y comporter en citoyens respectueux des lois.
Je crois que vous démontrez que vous avez une grande compétence dans votre domaine. J'ai toujours dit que gérer la délinquance voulait dire gérer l'échec. Je parle d'échec personnel, d'échec de l'éducation, de la famille, de la société et, de plus en plus, d'échec des services de santé mentale. Il serait intéressant d'aller voir les priorités de l'enquêteur correctionnel. Ses priorités seraient sûrement totalement différentes des vôtres, mais je ne veux pas m'étendre sur le sujet.
Je sais que le problème principal, celui qui pourrit tous les autres, ce sont les substances intoxicantes. Cela ne me surprend pas. En 1966, 90 p. 100 du temps, l'alcool était invoqué comme raison pour commettre un crime. Maudit alcool! C'était tout. Tranquillement, cela a évolué vers la drogue. Évidemment, on ne l'invoque pas souvent comme excuse, mais on sait très bien que c'est la raison principale. C'est pourquoi je ne pense pas que des sentences minimales vont aider beaucoup à diminuer la criminalité si on ne s'attaque pas aux sources du problème.
Vous le savez, Matsqui a constitué un échec. Cette prison avait été créée spécialement pour réintégrer les drogués. J'ai remarqué que votre service avait conclu des ententes avec des organismes de l'extérieur pour traiter les cas les plus durs de personnes qui avaient développé une dépendance considérable aux drogues, comme Portage au Québec. Je ne sais pas s'il y a des modèles, comme Daytop à New York.
Pourriez-vous me dire quelles sommes sont dépensées pour traiter à l'extérieur des gens qui ont un problème sérieux de dépendance aux substances intoxicantes?
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Oui. Pour ce qui est de la première question que vous avez soulevée au sujet de l'isolement, vous avez parfaitement raison, l'Enquêteur correctionnel en a parlé lors de son témoignage devant le comité.
Un des problèmes que nous avons toujours eus dans le Service correctionnel, c'est que lorsque des détenus ont un comportement inacceptable, notre première réaction est de répondre à ce comportement extérieur. C'est parfois un comportement violent qui risque d'entraîner des blessures pour autrui ou pour l'intéressé. Nous avons toujours essayé de limiter ce comportement afin que nous puissions stabiliser le détenu, puis évaluer ou établir quelles sont les autres mesures à prendre.
Malheureusement, dans le cas des personnes souffrant de troubles mentaux, ce genre de situation a tendance à se répéter. Quand le détenu est en crise, nous prenons les mesures appropriées, ce qui peut inclure son isolement, nous le calmons, nous le renvoyons avec les autres, puis son comportement inacceptable se répète. À moins d'avoir les moyens de faire participer ces personnes à certains des programmes plus spécialisés dont elles ont besoin pour que leur comportement se stabilise ou qu'elles puissent avoir accès, par exemple dans certains des cas les plus graves, à nos centres de traitement, à nos centres psychiatriques, c'est un cycle qui nous pose certains problèmes.
C'est problématique. Cela cause des difficultés chaque jour aux femmes et aux hommes qui travaillent dans ces établissements, car il ne fait aucun doute dans mon esprit qu'ils essaient de trouver la façon la plus humaine et la plus sûre de faire face à ce genre de comportement en respectant l'intéressé. Certains des cas les plus graves posent un sérieux défi.
Pour ce qui est de votre question concernant l'accès aux programmes, surtout pour les délinquants souffrant de troubles mentaux, je dirais que nous avons certainement besoin d'un appui continu pour les initiatives et le financement de notre initiative pour la santé mentale communautaire ainsi que notre initiative pour la santé mentale en établissement. Nous sommes toujours très loin d'avoir une formule qui convient entièrement à tous, mais ce sont des étapes essentielles pour que nous puissions résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés quotidiennement.
Ce financement nous a permis de progresser énormément par rapport à la situation qui était la nôtre il y a 10 ans. Il nous reste encore beaucoup de chemin à faire et beaucoup de travail à accomplir pour que les détenus reçoivent un soutien à leur sortie du système correctionnel afin que lorsqu'ils réintègrent la société, ils puissent y rester plus longtemps, sans commettre de nouvelles infractions.
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Merci, monsieur le président, et je remercie nos témoins pour leur présence ici.
Comme M. Ménard l'a mentionné, il a été avocat pendant longtemps et certains d'entre nous, de ce côté-ci, ont également étudié la question, mais sous un angle différent.
Une des choses que l'on dirait, je pense, du côté de l'application de la loi, c'est qu'au cours des 30 ou 35 dernières années, la situation a beaucoup changé dans les provinces en ce qui concerne les problèmes de santé mentale. Un des instruments dont les policiers disposaient était d'une utilisation judicieuse de la Loi sur la santé mentale et les gens qui souffraient de troubles mentaux étaient souvent envoyés vers le réseau de la santé mentale plutôt que celui de la justice pénale.
Je reconnais qu'au niveau provincial comme au niveau fédéral, les services correctionnels se retrouvent maintenant avec des gens qui leur causent beaucoup de difficultés. En plus des délinquants ordinaires… nous avons maintenant des gens souffrant de troubles mentaux qui se retrouvent dans le système pénal. Je n'accuse personne, mais les outils dont nous disposons ont changé de façon regrettable.
Quand on parle du besoin de traitement, comme tous mes collègues l'ont fait, et qu'on reconnaît la nécessité d'un traitement, la difficulté, d'après ce que vous nous avons dit tous les deux et ce que j'ai lu, c'est que, comme le dit le proverbe, vous pouvez conduire le cheval à l'eau, mais vous ne pouvez pas le faire boire. Même si nous avons d'excellents programmes, car je crois que nous en avons, même s'il nous en faudrait peut-être plus, il n'y a pas de mécanisme. Je crois que M. Holland en a parlé. Nous n'avons pas de mécanisme pour forcer quelqu'un à suivre un traitement.
Je ne sais pas si vous auriez des suggestions quant à la façon dont nous pourrions le faire. Avez-vous besoin de plus de ressources si nous pouvons vous en trouver? Ou le problème est-il plus grave en ce sens que nous devons trouver un moyen de faire en sorte que ceux qui ont besoin d'aide obtiennent cette aide?
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Merci beaucoup, monsieur le président, pour cette question.
C'est un ensemble de plusieurs éléments.
Comme je l'ai brièvement mentionné, environ 20 p. 100 de la population carcérale refuse absolument de participer à des programmes. Ces personnes nous posent un sérieux problème. Ce sont celles qui vont sans doute être réincarcérées d'abord dans les prisons provinciales, puis finalement dans les nôtres, au cours des années à venir. Nous devons trouver un moyen de les motiver davantage pour qu'elles participent aux programmes.
Il ne fait aucun doute que la majorité des délinquants qui participent aux programmes veulent changer leur vie et qu'ils y sont assez déterminés. Ils se rendent compte que leur participation à des programmes est la première étape. Cela ne va pas régler tout ce qui les a amenés à enfreindre la loi, mais c'est un premier pas dans la bonne direction.
Nous devons également faire quelque chose pour les 20 p. 100 restants. Nous devons accroître notre capacité dans certains domaines reliés à nos programmes. Le financement que nous avons reçu jusqu'ici est un bon début et nous espérons qu'il sera maintenu au cours des années à venir afin que nous puissions faire progresser notre modèle de programme correctionnel intégré.
Nous croyons nécessaire d'apporter certains changements à notre infrastructure pour faciliter la mise en oeuvre des programmes, mais surtout, pour renforcer l'apprentissage quotidiennement dans les cellules, dans les aires de loisirs et dans les autres secteurs d'activité auxquels les détenus participent pendant la journée. Notre infrastructure actuelle nous en empêche et nous avons besoin d'apporter des changements sur ce plan-là.
Je dirais aussi qu'il faudrait trouver des moyens de motiver les délinquants qui ne sont pas incités à participer à des programmes. Pour le moment, si vous avez deux délinquants, un qui choisit de changer sa vie et de participer à des programmes et l'autre qui refuse de le faire, les deux bénéficient des mêmes privilèges à l'intérieur de nos murs. C'est très difficile, si le détenu décide de ne pas participer.
J'ai notamment constaté, dans le système territorial et provincial, que les délinquants savaient, vu la façon dont le système de réduction méritée de peine est conçue, qu'il était peu probable qu'ils perdent cette réduction de peine. Normalement, leur peine devait être réduite du tiers. Par conséquent, il leur suffisait d'attendre. Nous constatons qu'un grand nombre de jeunes délinquants qui entrent dans le système fédéral adoptent cette attitude et attendent simplement d'avoir purgé les deux tiers de leur peine pour être libérés, croyant qu'ils n'auront plus de comptes à rendre. Malheureusement, comme vous le savez, dans le système fédéral, ils restent sous notre supervision pour le dernier tiers, contrairement à ce qui se passe dans le système provincial.
Nous devons trouver un moyen de motiver ces délinquants pour qu'ils participent aux programmes, tant dans l'établissement que dans la collectivité, afin que nous puissions continuer à produire les résultats que les Canadiens attendent de nous sur le plan de la sécurité publique.
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Je vais simplement répondre aux questions qui ont été soulevées.
Sans aucun doute, pour que nous soyons entièrement efficaces, il faut que nous soyons mieux reliés aux services de soutien que les agences de service social fournissent un peu partout dans le pays.
Dans certains cas, cela pose des difficultés simplement en raison de notre situation géographique. Par exemple, nous avons des établissements à Sept-Îles et Port Cartier où les services de soutien qui seraient nécessaires si les gens étaient libérés dans le voisinage immédiat ne sont tout simplement pas disponibles. Ils se trouvent dans des villes comme Toronto, Montréal ou Vancouver et cela pose donc un problème. À d'autres endroits où nous devons être reliés à ces agences, elles n'arrivent déjà pas à répondre aux besoins des citoyens qui ne sont pas incarcérés. Cela pose donc certaines difficultés.
En ce qui concerne le recrutement et la rétention du personnel, surtout dans le domaine des soins de santé, c'est notre principale source de problèmes en ce moment. Nous commençons à faire des progrès pour ce qui est de l'embauche d'infirmières, de psychologues et de travailleurs sociaux. Mais nous avons des difficultés, en partie à cause de l'emplacement de nos établissements, mais aussi, comme les membres du comité le savent bien, à cause de la demande de professionnels de la santé dans toutes les régions du pays.
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Merci beaucoup, monsieur le président, pour les deux minutes. Je vais faire ce que je peux en deux minutes.
Le président: Je vais vous en accorder trois.
M. Blake Richards: Merci d'être venu.
Votre rapport fait mention du programme de transformation. C'est un excellent rapport et je conseille aux membres du comité qui ne l'ont pas lu de le lire, car il propose d'excellentes solutions pour apporter les changements nécessaires dans notre système correctionnel.
Vous avez mentionné cinq grands thèmes dans votre déclaration préliminaire. Il y en a trois qui s'appliquent directement, je pense, au sujet de notre étude sur la santé mentale et la toxicomanie. Principalement, si l'on s'attaque aux problèmes de santé mentale et de toxicomanie, c'est pour essayer de donner aux délinquants les outils dont ils ont besoin pour réussir dans la société. Je pense donc que ces trois éléments qui sont les obligations des délinquants, l'emploi et l'employabilité des délinquants et l'élimination de la drogue dans les établissements sont tout à fait pertinents. Quand nous parlons surtout de l'élimination de la drogue dans les établissements, même si les libéraux nient la réalité de cette situation, la première chose à faire pour mettre fin à la consommation de drogue est d'empêcher l'accès à la drogue. Si j'en ai la possibilité, je reviendrai sur ce sujet.
À propos de ce dont M. MacKenzie a discuté avec vous, j'apprécie certainement qu'on reconnaisse la nécessité de faire comprendre aux détenus comment se prendre en main. Nous pouvons leur fournir tous les programmes, toutes les options et tous les traitements possibles — et il est important de le faire — mais il faut faire en sorte que les délinquants ou les détenus acceptent de les suivre. Je suis satisfait de voir que vous étudiez la question, que vous comprenez et reconnaissez le problème et que vous vous en occupez.
Vous avez mentionné qu'il y a trois raisons principales pour lesquelles le détenu obtient son congé d'un des centres de traitement que vous avez établis pour les problèmes de santé mentale. La première est que l'équipe clinique estime que le traitement est terminé. La deuxième est que le délinquant ne veut plus suivre le traitement, qu'il le refuse et qu'il veut l'abandonner, ce qu'il faut changer, comme nous en avons parlé. La troisième est que le détenu a fini de purger sa peine.
Pourriez-vous m'indiquer le pourcentage de détenus dont le traitement cesse pour ces trois différentes raisons? J'aimerais avoir une idée des chiffres.