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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 017 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 28 avril 2009

[Enregistrement électronique]

(0910)

[Traduction]

    Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale, la dix-septième. Nous continuons notre examen, prévu par la loi, de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques.
    Nous accueillons aujourd'hui M. Dufour, du Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale. Il présentera ses collaborateurs. Nous avons aussi quelqu'un qui n'est pas sur la liste qui nous a été remise et qui représente le ministère de la Sécurité publique du Québec, M. Frédérick Laberge. Nous accueillons aussi M. Raymond Prime, du Centre des sciences judiciaires.
    Bienvenue à tous, veuillez vous présenter et nous donner un peu de contexte. Nous écouterons vos exposés, puis nous passerons aux questions et observations. Votre exposé liminaire peut durer une dizaine de minutes, comme vous voulez. Nous sommes prêts à vous écouter.
    Qui sera le premier?
    Monsieur Dufour, allez-y, nous écouterons ensuite M. Prime.

[Français]

    Je voudrais d'abord vous remercier de nous avoir invités à comparaître devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Je voudrais vous présenter les gens qui m'accompagnent, soit M. Frédérick Laberge, directeur du secteur de la biologie au Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale et directeur de l'administration, ainsi que Mme Diane Séguin, directrice adjointe en biologie au Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, à Montréal.
    On va vous lire un mémoire qu'on a préparé, pendant une dizaine de minutes, et on pourra ensuite répondre à vos questions.
    À Montréal, en 1914, le gouvernement du Québec créait le premier laboratoire d'expertise judiciaire en Amérique du Nord. Aujourd'hui, le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, sous la responsabilité du ministère de la Sécurité publique du Québec, est à l'image des laboratoires judiciaires modernes d'expertises scientifiques.
    Nos domaines d'activités sont la toxicologie, la biologie et l'ADN, les documents et les écritures, la chimie, les incendies et les explosions, la balistique, le génie électronique et informatique, la médecine légale et la certification ainsi que la vérification des appareils de jeu.
    La mission de notre laboratoire est de réaliser des expertises objectives pour soutenir et éclairer l'administration de la justice du point de vue scientifique. Il s'agit de procéder à des expertises en sciences judiciaires et en médecine légale pour l'administration de la justice et le soutien aux enquêtes policières et judiciaires.
    Je vais maintenant parler de notre rôle. Au Canada, seuls le Québec et l'Ontario ont des laboratoires de sciences judiciaires qui font leurs propres analyses d'ADN. Les autres provinces et territoires font effectuer leurs analyses par les Services des laboratoires judiciaires de la Gendarmerie royale du Canada.
    Le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale a pour responsabilité d'effectuer les analyses biologiques des échantillons biologiques recueillis sur les lieux de crime par la police sur le territoire québécois. Les profils génétiques obtenus à la suite de ces analyses sont versés au fichier criminalistique de la Banque nationale de données génétiques à des fins de comparaison avec le fichier des condamnés et avec les autres profils génétiques versés dans le fichier criminalistique.
    Le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale est la seule organisation autorisée à alimenter le fichier criminalistique pour les profils génétiques recueillis sur les lieux de crime au Québec. Les ordonnances de prélèvement d'ADN d'un condamné par les cours de justice du Québec sont exécutées par la police québécoise et sont ensuite envoyées directement à la Banque nationale de données génétiques pour la réalisation des analyses biologiques et la consignation du profil génétique au fichier des condamnés. Le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale n'intervient pas concernant la mise à jour du fichier des condamnés.
    Pour ce qui est de notre contribution à la Banque nationale de données génétiques, je précise que le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale consacre 5,7 millions de dollars par année, incluant les frais fixes, et dispose de 50 ETC, c'est-à-dire des employés à temps complet, pour réaliser son mandat concernant les analyses biologiques. Malgré ces ressources extrêmement limitées, au 30 mars 2009, le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale a versé au fichier criminalistique plus de 15 674 profils génétiques, soit une contribution représentant plus de 32,6 p. 100 de la contribution totale, qui se chiffre à 48 227 profils génétiques. À ce jour, l'Ontario a contribué à plus de 18 898 profils génétiques, ce qui représente une contribution de 39,1 p. 100, et les Services des laboratoires judiciaires de la Gendarmerie royale du Canada ont contribué à 14 655 profils génétiques, ce qui représente une contribution de 28,3 p. 100.
    Je vais maintenant parler de la contribution fédérale à la participation du Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale à la Banque nationale de données génétiques. Lors des négociations concernant la création de la Banque nationale de données génétiques et la participation du Québec à ce programme national, il avait été entendu que le gouvernement fédéral participerait au financement des coûts générés par l'administration des nouvelles activités reliées au fonctionnement de la Banque nationale de données génétiques. Depuis août 1999, le Québec a conclu deux ententes de financement relativement aux analyses biologiques afin de contribuer au fichier criminalistique de la Banque nationale de données génétiques.
    Une première entente signée le 12 août 1999, d'une durée de trois ans, soit du 1er avril 1999 au 31 mars 2002, prévoyait une reconduction automatique aux mêmes conditions pour une période supplémentaire d'un an ou jusqu'à ce qu'une nouvelle entente soit négociée entre les parties, conformément à cette clause.
(0915)
    L'échéance de l'entente a été reconduite au 31 mars 2003. Selon les termes de cette entente, le gouvernement fédéral remboursait au Québec 20 p. 100 du coût moyen des dossiers d'analyses biologiques complétés par le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale. En septembre 1999, ce coût moyen a été établi à 2 645 $ par une firme comptable. La contribution fédérale par dossier était donc de 529 $, c'est-à-dire 20 p. 100 de 2 645 $.
    Une deuxième entente, d'une durée de trois ans, soit du 1er avril 2003 au 31 mars 2006, comprenant un prolongement automatique pour une année supplémentaire, c'est-à-dire 2006-2007, a été conclue en 2004. En vertu de cette entente, le Canada remboursait au Québec la somme de 771,76 $ pour chaque dossier d'analyses biologiques complété par le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale pour une infraction désignée, au sens de l'article 487.04 du Code criminel, jusqu'à concurrence de 11 311 dossiers d'analyses biologiques. Ce montant de 771,76 $ représentait 23,3 p. 100 du coût moyen admissible pour le traitement d'un dossier d'analyses biologiques.
    Au 31 mars 2007, le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale a réalisé toutes ses obligations concernant cette entente. Depuis le 31 mars 2007, le gouvernement du Québec essaie, par la négociation, d'obtenir un financement adéquat et à long terme concernant sa participation importante au programme de la Banque nationale de données génétiques.
    Afin de prolonger le financement des activités biologiques jusqu'à la conclusion des négociations sur une nouvelle entente à long terme, le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec concluaient en juillet 2008 une entente intérimaire portant sur le partage des coûts de la réalisation des analyses biologiques. Cette entente prévoit le versement au Québec d'une contribution fédérale de 2,3 millions de dollars pour chacune des années financières 2007-2008 et 2008-2009.
    La négociation de l'entente à long terme est particulièrement ardue puisque le gouvernement fédéral a refusé jusqu'à maintenant de bonifier la contribution financière qu'il octroyait dans le cadre de l'entente antérieure, alors que l'adoption de nouvelles lois fédérales le 1er janvier 2008, soit les projets de loi C-13 et C-18, vient s'ajouter à la charge de travail du Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale. Le Québec devrait ainsi recevoir plus de 1 500 dossiers d'ADN supplémentaires par année sans qu'aucune compensation financière additionnelle ne lui soit versée. Une nouvelle infrastructure, l'ajout d'équipements spécifiques, ainsi que des ressources additionnelles s'avèrent indispensables afin de se conformer à cette nouvelle législation. Cette problématique fait l'objet de représentations constantes auprès des autorités fédérales.
     Je vais maintenant traiter du groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur l'ADN.
    Le gouvernement fédéral a relancé les travaux du groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur l'ADN en avril 2008 afin d'élaborer un plan de travail pour le renouvellement des ententes sur les analyses biologiques avec les provinces et territoires. En juin 2008, une proposition de plan de travail a été présentée aux sous-ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables de la justice et de la sécurité publique.
    Selon l'approche proposée, les étapes du plan de travail sont les suivantes: un plan de travail à court terme, soit de six à douze mois, visant à déterminer les coûts réels des analyses ainsi que la capacité actuelle des laboratoires et à évaluer l'augmentation de la charge de travail découlant de l'entrée en vigueur des projets de loi C-13 et C-18; un plan de travail à long terme, soit de 18 à 24 mois, visant à examiner la manière dont les analyses génétiques sont utilisées par les partenaires internationaux, la possibilité d'utiliser de manière plus efficiente cette technologie dans le système judiciaire, les coûts qui y sont liés et divers modèles de prestation de services et de partage des coûts.
    Le Québec s'est objecté à cette approche, indiquant qu'il avait accepté l'entente intérimaire de 2007-2009 en se fondant sur le fait que des négociations sérieuses devaient être amorcées dès 2008-2009 et qu'il ne pouvait pas se permettre d'attendre deux ans de plus avec le même niveau de financement. Le Québec a également insisté sur le caractère national du programme et sur la contribution essentielle du Québec et de l'Ontario à la Banque nationale de données génétiques, c'est-à-dire une contribution représentant plus de 72 p. 100 des profils génétiques versés aux fichiers criminalistiques de la Banque nationale de données génétiques.
(0920)
    En août 2008, le gouvernement fédéral a mandaté Services conseils du gouvernement pour qu'il réalise une étude des coûts et de la capacité des trois laboratoires canadiens: le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, le Centre of Forensic Sciences et le laboratoire de la Gendarmerie royale du Canada. Cette étude devait servir de base pour la négociation de la nouvelle entente sur le financement des analyses biologiques. Le dépôt du rapport était prévu pour la fin de décembre 2008.
    Bien que Services Conseils du gouvernement ait terminé ses travaux depuis la fin de janvier 2009, le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale n'a reçu ni le rapport final ni les recommandations de cette étude. À ce jour, aucune autre négociation n'a été entreprise entre les parties pour arriver à une entente sur le financement des analyses biologiques. Le gouvernement fédéral a conclu au même moment des ententes sur les analyses biologiques avec les autres provinces et territoires qui utilisent les Services de laboratoire judiciaire de la Gendarmerie royale du Canada.
    Depuis la création de la Banque nationale de données génétiques, plus de 11 500 concordances ont été réalisées, aidant ainsi les enquêtes policières à résoudre des crimes. Le succès de ce programme dépend essentiellement de l'alimentation et de la mise à jour du fichier criminalistique et du fichier des condamnés.
    Le Québec, par la voie du Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, contribue activement au développement de la Banque nationale de données génétiques. À ce jour, 32 p. 100 des profils génétiques qui ont été versés au fichier criminalistique de la Banque nationale de données génétiques proviennent du Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale. Cette contribution pourrait être encore plus importante si le financement fédéral permettait de réaliser l'ensemble des analyses biologiques demandées par les corps de police lors des enquêtes criminelles.
    Faute de financement adéquat, le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale n'est pas en mesure actuellement de réaliser les analyses biologiques relatives aux infractions identifiées en vertu des projets de loi C-13 et C-18. Cette situation a pour conséquence de diminuer considérablement les effets positifs du programme de la Banque nationale de données génétiques au Canada.
    Afin de régulariser cette situation et de permettre ainsi que la Banque nationale de données génétiques obtienne des résultats optimaux, le gouvernement fédéral doit assumer une plus grande responsabilité concernant le financement de ce programme national en octroyant le financement nécessaire pour effectuer la totalité des analyses des dossiers d'infractions désignées en tenant compte de l'impact des projets de loi C-13 et C-18 ainsi que de la demande réelle des analyses biologiques à réaliser par les laboratoires canadiens.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Prime, êtes-vous prêt aussi à nous donner votre exposé?
    Vous avez la parole.
     Oui et merci, monsieur le président.
    J'aimerais vous présenter mon collègue. Voici M. John Newman, directeur adjoint du Centre des sciences judiciaires. C'est notre expert, et je vais lui demander plus tard de m'aider à répondre à vos questions.
    Au Canada, trois grands laboratoires offrent des services de sciences judiciaires, comme on vous l'a déjà dit. Ce sont des services semblables, pour ce qui est de l'analyse de l'ADN. En Ontario, ces services sont offerts par le gouvernement provincial et dans les autres provinces, par la GRC. En Ontario, le Centre des sciences judiciaires offre des services aux forces de l'ordre, aux procureurs, aux coroners, aux pathologistes et à d'autres enquêteurs. Nous acceptons parfois des dossiers d'avocats de la défense, et dans certaines circonstances, nous leur offrons nos services. Nous sommes l'un des rares laboratoires gouvernementaux nord-américains à le faire.
    Signalons que malgré nos liens, il y a une distinction à faire entre notre travail et celui de la banque nationale de données génétiques, ici, à Ottawa. Les laboratoires de l'Ontario, du Québec et de la GRC sont des utilisateurs de la banque de données génétiques et contribuent à son fichier de criminalistique. Nous sommes des partenaires essentiels puisque sans nous, il n'y aurait pas de point de comparaison pour les profils des condamnés. Le CSJ donne un solide soutien à la BNDG, et je peux vous donner des exemples éloquents de notre travail, qui en prouvent la valeur pour l'élucidation des crimes, le blanchiment d'innocents et la prévention de la criminalité dont des Canadiens peuvent être victimes.
    Les corps policiers ontariens recueillent des preuves sur les lieux de crime et nous les envoient. Le type de preuve peut beaucoup varier, qu'il s'agisse d'échantillons de liquides corporels, de meubles ou même, de véhicules. Pour l'expert en criminalistique, le gros du travail est de trouver l'échantillon biologique, pour qu'on puisse procéder à une analyse d'ADN. Cela demande beaucoup de travail, qui peut ralentir le reste du processus et qui est associé aux problèmes de ressources dont vous a parlé, en exprimant ses frustrations, le constable en chef Egan, il y a quelques semaines. Quand on trouve les échantillons nécessaires, des profils d'ADN sont établis puis envoyés à la banque nationale de données génétiques.
    Dans mon exposé, j'aimerais répondre à quatre questions sur la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques et sur la banque de données elle-même. Est-ce que ça fonctionne? Que pouvons-nous faire de plus? Quelles sont les limites actuelles? Comment peut-on améliorer les choses?
    L'élément clé de la réussite, pour la banque de données, c'est le nombre de correspondances entre le fichier des condamnés et le fichier de criminalistique qui peuvent faciliter l'enquête. Rappelons que lorsqu'un profil est saisi dans le fichier de criminalistique, il fait automatiquement l'objet d'une recherche, pour établir des correspondances avec tous les profils de la base de données. Cette recherche se fait en permanence, pour tous les profils. La banque de données fait ce qu'aucune personne ne peut humainement faire, en examinant incessamment les profils de criminalistique et ceux des contrevenants, pour l'ensemble du pays. Même si les policiers ont mis fin à l'enquête avec les moyens classiques, elle est toujours en cours, à la banque de données.
    La banque de données génétiques permet la résolution de crimes divers, des introductions par effraction jusqu'aux homicides. On en voit la valeur manifeste quand on songe qu'on a pu étudier des preuves qui avaient été conservées, dans des dossiers non résolus de décennies antérieures, et clore ces dossiers. Un des premiers projets du Centre a consisté à revoir des dossiers d'agression sexuelle à Toronto remontant jusqu'à 20 ans, pour apaiser les victimes et obtenir justice pour elles.
    Prenons des exemples d'aide donnée par la banque de données génétiques aux enquêteurs. En 1991, un homme s'est introduit par effraction dans l'appartement d'une femme de 63 ans, Muriel Holland, et l'a agressée sexuellement avant de la tuer. L'enquête, au moyen de méthodes classiques et d'analyses d'ADN a porté sur plus d'un millier de suspects, pendant une décennie. L'affaire a été résolue après la création de la banque de données génétiques, grâce à une correspondance avec un échantillon antérieur fourni par un contrevenant de 43 ans. Le chef du service des homicides de la police régionale de Peel a par la suite déclaré:
Sans la banque de données génétiques, on aurait peut-être jamais résolu ce crime. La banque de données génétiques est un outil incomparable qui rapproche la science et le système judiciaire. Je ne saurais trop insister sur les énormes avancées qu'elle nous permet de réaliser.
    Voici un autre exemple qui montre comment l'élimination de suspects grâce à la banque de données génétiques peut permettre de mieux cibler une enquête. Une fillette de 10 ans, Holly Jones, est disparue de son quartier, à Toronto. Sa dépouille a été retrouvée quelques jours plus tard, dans le lac Ontario. Pendant l'enquête, les Torontois craignaient pour la sécurité de leurs enfants, et la police a reçu plus de 1 600 appels de citoyens qui avaient des tuyaux à fournir aux enquêteurs. On a obtenu un profil d'ADN à partir de substances trouvées sous les ongles de l'enfant et on l'a comparé aux données du fichier des condamnés, sans succès. On oublie trop souvent que la banque de données génétiques peut en un instant écarter des milliers de suspects potentiels. Cela permet de mieux cibler les ressources policières et d'éviter que des innocents soient détenus indûment.
(0925)
    On a fini par trouver un suspect qui a été inculpé. Il a décidé de plaider coupable, et son identification par profil génétique n'est certainement pas étrangère à sa décision. Voilà un exemple de l'effet des analyses d'ADN sur le système judiciaire. Dans de nombreux cas, l'accusé, confronté à la preuve par ADN, choisit de plaider coupable. On épargne ainsi beaucoup en éliminant un procès, et on évite aussi de traumatiser ceux qui participeraient à la procédure.
    En 2008, les projets de loi C-13 et C-18 ont apporté des changements, permettant notamment le recours à la banque de données génétiques pour des enquêtes sur de nouvelles infractions. Je vais vous donner un exemple de la façon dont ces changements affectent les laboratoires opérationnels et créent pour nous des exigences supplémentaires.
    La police régionale de York a saisi 49 kilogrammes d'ecstasy et des articles connexes, dont la valeur totale était de quelques millions de dollars. Des 11 articles envoyés au laboratoire pour examen, quatre profils d'ADN ont été tirés et envoyés au fichier de criminalistique. L'enquête a suivi son cours et a donné lieu à un plaidoyer de culpabilité, assorti d'une peine assez lourde de neuf ans et demi. En outre, l'un des profils génétiques correspondait à celui d'un échantillon de lieu de crime pour une tentative de meurtre non résolue remontant à 2005. Cette enquête se poursuit. Le laboratoire de drogue était directement associé au crime organisé et à ses diverses ramifications internationales.
    Grâce aux changements apportés par les projets de loi C-13 et C-18, les policiers peuvent songer à se servir de preuves d'ADN pour d'autres infractions. Malheureusement, en raison de nos ressources limitées, je l'ai déjà dit, nous ne pouvons pas fournir systématiquement des analyses d'ADN dans les affaires de drogue, même si cela était rentable.
    Notre capacité de fournir des analyses d'ADN dans le cadre d'enquêtes policières n'est limitée que par les ressources dont nous disposons. Les demandes d'analyse dépassent nos capacités; nous nous servons donc de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques pour déterminer quels dossiers seront acceptés. Nous avons évalué le volume supplémentaire attribuable aux projets de loi C-13 et C-18 à 1 500 dossiers par an.
    Mon collègue vous a déjà parlé de la formule de financement associée à la création de la banque nationale de données génétiques. L'Ontario et le Québec ont reçu une subvention correspondant à 20 p. 100 du coût moyen des services d'analyse d'ADN en échange des services fournis à la BNDG, un service national. L'Ontario reçoit actuellement environ 2,3 millions de dollars, une somme qui n'a pas changé depuis 2005, malgré l'augmentation de la demande et du volume de travail.
    L'importance des analyses d'ADN se voit dans le fait que l'Association canadienne des chefs de police et l'Association internationale des chefs de police ont adopté des résolutions demandant une augmentation des ressources consacrées par le gouvernement aux analyses d'ADN, afin que les services policiers puissent s'acquitter de leur tâche de protection du public et d'arrestation des criminels.
    On a beaucoup écrit sur la valeur des analyses d'ADN, mais on ne se rend pas très bien compte de leur incidence sur nos laboratoires. La charge de travail des services de biologie judiciaire a augmenté beaucoup plus que dans les autres services conventionnels de sciences judiciaires. Ainsi, on peut maintenant élucider des dossiers, par exemple des cas d'agressions sexuelles sans suspect, et la preuve d'ADN devient cruciale pour trouver les coupables de crimes auparavant non élucidés.
    Avant la banque de données génétiques, il y avait peu d'espoir de résoudre des crimes comme les introductions par effraction. Ce sont des crimes à volume élevé, qui comptent pourtant beaucoup aux yeux des citoyens et qui contribuent de manière significative au nombre de données et à l'efficacité de la banque de données. Ainsi, sachez que lorsqu'un policier nous donne un échantillon tiré d'une introduction par effraction, un profil sur trois correspond à un dossier de contrevenant ou de criminalistique.
    Au sujet des limites de la banque de données, il ne faut pas oublier qu'une correspondance entre deux profils d'ADN n'établit pas nécessairement la culpabilité. Les enquêteurs doivent évaluer la valeur de la correspondance dans le contexte de l'enquête, sachant que l'ADN peut s'être trouvée là par hasard, sans désigner le coupable. Pensons à un mégot de cigarette laissé sur les lieux d'un crime avant que celui-ci ne soit commis.
    Les échantillons fournis à nos experts judiciaires, de par leur nature, présentent souvent des défis particuliers et nos experts doivent comprendre et bien exprimer les limites des tests effectués. Un échantillon peut être dégradé, putréfié, ou présenter un mélange de substances corporelles de plus d'une personne, et l'ADN récupérée à partir d'échantillons de moindre qualité peut ne fournir qu'un profil partiel. N'empêche que ce profil partiel peut faire l'objet de comparaisons et fournir des renseignements précieux pour l'enquête. Les profils partiels peuvent aussi servir à écarter des suspects.
    Les laboratoires au Canada appliquent un système de contrôle de la qualité très rigoureux, qui définit les critères d'interprétation et de présentation des résultats, y compris pour les profils d'ADN partiels.
(0930)
    Vous savez que d'autres pays versent dans leur base de données le profil des personnes arrêtées, et vous connaissez les enjeux que cela présente. On vous a aussi dit que le système canadien exige qu'il y ait une intervention judiciaire pour que le profil d'un condamné soit versé à la banque de données, ce qui fait baisser le nombre de profils enregistrés. Pour des scientifiques comme nous, ce ne sont pas des questions sur lesquelles nous nous prononcerons. Disons toutefois cette évidence: plus il y a d'échantillons dans la banque de données, plus elle sera utile. Disons aussi que d'après notre expérience, il serait utile de verser dans la banque de données génétiques le profil des victimes. Nous savons aussi que dans certains cas, des suspects qui font l'objet d'échantillonnages réguliers et qui sont écartés des enquêtes sur des agressions sexuelles sont prêts à fournir d'eux-mêmes des échantillons à la banque de données génétiques.
    La liste actuelle des infractions désignées englobe probablement la plupart des cas pour lesquels on peut trouver de l'ADN sur les lieux d'un crime. L'allongement de la liste produira de moins en moins de résultats.
    Nous savons qu'on a envisagé la création d'un fichier des personnes disparues et que cela pourrait être utile, si c'était un fichier national, pour les enquêtes des policiers et des coroners. Ce fichier pourrait être très vaste, très coûteux et d'une valeur probablement limitée à quelques cas. On pourrait toutefois envisager une solution plus limitée, en songeant qu'il est possible de trouver de l'ADN nucléaire à partir d'échantillons tirés de restes humains non identifiés.
    En conclusion, l'importance des analyses d'ADN a été reconnue par le gouvernement fédéral et par les provinces, et une loi a été adoptée pour créer la banque nationale de données génétiques. Cette alliance entre la science et la loi a été utile pour les sciences judiciaires et a permis à notre centre de mieux s'acquitter de son mandat d'appui scientifique à l'administration de la justice et à la promotion de la sécurité publique pour les citoyens de l'Ontario.
    Merci.
(0935)
    Merci beaucoup.
    Nous apprécions sincèrement votre contribution.
    Quelqu'un d'autre veut-il faire un exposé liminaire? Monsieur Laberge? Non?
    Bien. Suivant notre habitude, pour les questions et commentaires, nous commencerons par le Parti libéral.
    Monsieur Kania, c'est à vous.
    Merci à tous nos témoins. Vous savez sans doute que nous avons déjà consacré deux journées à l'étude de cette question. Pour moi, aujourd'hui, c'est le jour de la science. J'aimerais qu'on parle de l'aspect scientifique: les progrès effectués, les lacunes, l'évolution, en fonction de deux objectifs. D'une part, on cherche à blanchir des innocents, d'une manière fiable. D'autre part, on veut condamner, ou faciliter la condamnation des coupables, en évitant de condamner des innocents.
    La dernière fois, nous n'avions pas parlé des faux positifs. J'aimerais que nous en parlions, particulièrement dans le contexte de la science et des méthodes à notre disposition, parce que j'ai l'impression que pour le profane, quand quelqu'un est condamné grâce à une preuve d'ADN, c'est qu'il est coupable. Nous comprenons que ce n'est pas nécessairement le cas, et j'aimerais que nous en parlions. Celui qui connaît le mieux l'aspect scientifique de la question peut me répondre.
    Des témoins précédents vous ont sans doute appris que tout profil génétique est associé à une statistique de probabilité correspondant au degré de pertinence du résultat. Les résultats pouvant donner lieu à des profils complets sont associés à des statistiques très impressionnantes et solides. Je parle des profils partiels pour vous signaler que souvent, en réalité, les résultats doivent être interprétés et sont alors associés à une évaluation du degré de fiabilité de la correspondance établie.
    La preuve d'ADN ne donne pas lieu, à elle seule, à une condamnation. D'autres preuves doivent y être associées.
    Je vais laisser John vous répondre, au sujet de la valeur scientifique des résultats.
    J'aimerais qu'on poursuive dans la même veine. Ce que vous dites, si je comprends bien, c'est que si on trouve sur les lieux d'un crime un mégot de cigarette, ça ne veut pas dire nécessairement que celui qui l'a fumé est coupable. Mais ce n'est pas l'objet de ma question. Dites-moi si les correspondances établies sont vraiment fiables. Il y a évidemment des paramètres de preuve sur lesquels on peut se fier pour déterminer si une personne est coupable ou non. Si la GRC ou un autre corps policier fait son enquête et constate une correspondance entre l'ADN trouvé sur les lieux du crime et un échantillon du fichier des condamnés, qu'est-ce qui nous dit que ce résultat est fiable à 100 p. 100, qu'on évitera de condamner injustement quelqu'un, et s'il est possible de disculper quelqu'un, qu'on pourra s'assurer que cette personne est vraiment innocente?
    On nous a dit que des erreurs étaient commises. Il y a l'exemple d'un Britannique qui a été arrêté, alors qu'il est impossible qu'il ait commis le crime. Il était en fauteuil roulant. On allait procéder à son arrestation, après avoir conclu qu'il était coupable. Voilà le genre de problème que je veux soulever. Je veux qu'on m'assure que lorsqu'on condamne quelqu'un, on ne se retrouvera pas 20 ans plus tard à constater notre erreur grâce à de nouveaux moyens techniques. Je ne voudrais pas qu'on constate que toute une série de contrevenants n'auraient pas dû être condamnés. On parle des progrès technologiques, et je constate que la loi en tient compte.
    J'ai une autre question. Je comprends qu'on veuille toujours améliorer les choses, mais pourquoi faut-il des progrès technologiques en ce domaine-ci? Ces méthodes ne sont-elles pas déjà suffisamment fiables? Ne peut-on pas déjà s'y fier? Quel problème essaie-t-on de corriger?
(0940)
    Si vous permettez, je vais répondre. Commençons par la soi-disant erreur britannique. Mon accent vous aura dit que j'ai encore quelques contacts avec mon pays d'origine, la Grande-Bretagne. Sachez qu'au Royaume-Uni, ce qu'on appelle ici l'erreur britannique est appelée autrement. Mes collègues du Royaume-Uni m'ont dit que dans les circonstances, la banque de données génétiques avait probablement fonctionné comme il se devait. On se servait à l'époque d'une technologie qui faisait moins de distinction entre les sujets, mais malgré cela, comme l'a dit Ray dans son exposé, une correspondance dans la banque de données génétiques ne donne pas nécessairement lieu à une condamnation, ne détermine pas la culpabilité.
    Dans ce cas-là, une correspondance a été établie dans la banque de données. La police a mené enquête. Elle n'a pas inculpé cette personne. Il n'y a pas eu de procès, puisque comme ici, une correspondance dans la banque de données n'est qu'une première étape. C'est un outil d'enquête. Les policiers notent la correspondance, mènent leur enquête auprès du suspect, puis déterminent l'importance de cette correspondance dans le cadre de l'enquête avant de décider si des accusations doivent être portées.
    Je pense que ce que vous voulez savoir, c'est: s'il y a une correspondance dans la banque de données, quelle est sa précision, lorsqu'il s'agit identifier une personne, à l'exclusion de toutes les autres? C'est cela?
    Je pense qu'avec les techniques actuelles, une correspondance dans la banque de données génétiques signifie qu'en théorie, il est possible que telle personne ne soit pas la source de l'échantillon. Cette possibilité est toutefois extrêmement, extrêmement faible et on entre dans la question scientifique et théorique des possibilités et des détails pratiques.
    Étant donné qu'il reste encore une mince possibilité, puisque la science a ses limites, que fait-on pour en arriver à un point où il n'y aura plus de doute? Vous me dites que ce n'est pas parfait, et j'en déduis qu'on y travaille encore et qu'il faut en tenir compte. Où en sommes-nous? Quelles sont les prochaines étapes?
    Il faut bien comprendre que les scientifiques ne travaillent pas dans un monde parfait. La science est le domaine de l'incertitude, de l'inconnu et de la découverte de renseignements qui améliorent la confiance, mais les scientifiques ne travaillent pas avec des absolus. Comme l'a dit Ray, pour toute correspondance dans la banque de données, il y a une analyse statistique qui établit cette possibilité théorique. Peu importe les progrès effectués ou le nombre des tests que nous faisons, il y aura toujours une possibilité, théorique, qu'une correspondance ait été établie par coïncidence, mais c'est une possibilité qui, d'ores et déjà, est infinitésimale.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant au Bloc Québécois.
    Monsieur Ménard, vous avez la parole.

[Français]

    Comme nous avons peu de temps, je considère que mon collègue a bien exprimé une partie de nos inquiétudes. Personnellement, comme j'ai fait une carrière en droit criminel, je suis d'avis qu'il s'agit de l'un des progrès les plus extraordinaires survenus au cours du dernier siècle pour aider les policiers à résoudre des crimes.
     Bien qu'il y ait effectivement encore de petits risques, le degré de certitude est tel que ces programmes doivent être développés. Toutefois, nous avons d'autres inquiétudes auxquelles j'aimerais que vous répondiez.
    Avons-nous, fournissons-nous, actuellement, les ressources nécessaires pour répondre à la demande —, la demande des enquêteurs et celle des nouvelles lois? Je remarque que nous avons devant nous des gens responsables de l'analyse de plus des deux tiers des échantillons d'ADN.
     Je crois que vous pourrez répondre rapidement à la première question que je vais poser, et nous pourrons passer par la suite aux questions qui découlent de votre réponse.
    Quel est le délai, chez vous, pour fournir à un policier les résultats d'une analyse d'ADN?
(0945)
    Actuellement, dans les laboratoires du Québec, nous sommes « en mode urgence ». Quand un dossier est soumis par un corps policier, qu'il s'agit d'une infraction, que le suspect est en liberté, qu'il est en fuite, il faut trouver rapidement la réponse. On mettra alors toutes nos énergies à résoudre rapidement ce dossier, à trouver des profils génétiques qui pourraient générer des correspondances dans la banque.
    Comme nous sommes « en mode urgence », les dossiers ordinaires, c'est-à-dire les dossiers arrivant au laboratoire et qui ne sont pas classés urgents parce qu'ils s'insèrent dans le processus normal, peuvent être mis en attente durant un an parce que nous sommes « en mode urgence » continuellement.
    En ce qui concerne un dossier urgent, on pourrait donner les résultats aux policiers en dedans de deux semaines. On reçoit actuellement environ 5 000 dossiers par année au Québec et on a la capacité d'en traiter 3 000. On est donc constamment « en mode urgence ». On est capables de répondre aux demandes urgentes, mais, en fait, tous les dossiers sont urgents parce que même un dossier d'agression sexuelle qui ne sera pas traité avant un an pourrait permettre de résoudre d'autres crimes.
    Merci. Je suis « en mode urgence » aussi à cause du temps dont je dispose, mais j'aimerais savoir autre chose. On s'est fait dire, au début, que les cas urgents représentent 1 p. 100 des cas. Est-ce à peu près cela?
    Oui, environ.
    Alors, dans 99 p. 100 des cas, il y a une attente qui dure plus d'un an.
    Oui.
    Et vous êtes incapables de rattraper ce retard, si je comprends bien.
    Oui.
    Les délais vont donc continuer d'augmenter à moins que l'on ne vous donne des ressources supplémentaires.
    En raison des nouvelles lois qui sont entrées en vigueur.
     Est-ce la même situation chez vous, monsieur Prime?

[Traduction]

    Dans notre laboratoire, au cours des deux dernières années, nous avons fait beaucoup d'efforts pour accélérer le traitement, selon les recommandations d'un rapport du vérificateur général de l'Ontario. Nous avons adopté des pratiques qui nous ont permis de faire passer le traitement des cas plus faciles, comme les introductions par effraction, à 30 jours. Pour les cas moins urgents, nous avons quelques mois. Nous visons toutefois un temps de traitement de trois mois.
    Nous commençons à peine. Je le répète, nous avons changé nos méthodes et nous n'avons pas encore de mesures. Nous améliorons nos temps de traitement, mais nous avons un système assez semblable à celui dont le Québec vous a parlé, pour les cas urgents.
    Par ailleurs, nous disons aussi simplement aux policiers que nous n'acceptons pas certains types de dossiers. Nous ne pouvons pas continuer à traiter des dossiers dont nous savons qu'ils causeront des retards. Nous avons donc entrepris d'annoncer que nous ne prendrions aucun travail supplémentaire résultant des projets de loi C-13 et C-18 à moins qu'ils répondent à des critères très stricts associés à la sécurité publique. Nous avons donc ainsi réduit de beaucoup notre charge de travail.

[Français]

    Sauf erreur, chez vous, les délais sont peut-être plus courts, mais c'est que vous avez décidé d'éliminer des cas.

[Traduction]

    C'est exact. Il y a des cas que nous n'acceptons pas, et nous limitons soigneusement la quantité de preuves que nous acceptons, aussi, pour chaque dossier.

[Français]

    Quelle est la cause fondamentale de ces délais que j'estime inacceptables? On s'est d'ailleurs fait dire qu'au moment de l'établissement de la banque, les délais devaient être d'environ deux mois au maximum.

[Traduction]

    Nous aurons une réponse.
    M. Laberge veut parler.

[Français]

    C'est ce que nous visons. Au Québec, nous voulons avoir un délai de deux mois pour la majorité des dossiers. Malheureusement, vu la grande popularité de l'expertise, depuis 2000, nos dossiers au Québec sont passés de 1 000 à plus de 5 000. On a été en mesure d'augmenter notre productivité grâce à la robotisation et à l'amélioration des techniques. On a optimisé nos ressources pour traiter plus de dossiers, mais, malheureusement, on constate qu'il manque de ressources.
    Au Québec, nous recevons toujours 5 000 dossiers, mais faute de ressources, on ne peut en traiter qu'environ 3 000. Le nombre de cas augmente d'année en année, de sorte que la capacité est limitée. Finalement, nos délais sont plus longs à cause de cette augmentation. Telle est notre réalité actuellement.
     Comme en Ontario, au Québec, on ne donne pas de priorité aux dossiers en vertu des projets de loi C-13 et C-18, sauf exception. On accorde la priorité à certains dossiers, par exemple ceux mettant en cause une agression sexuelle. Pour nous, ce sont des dossiers majeurs qui doivent être traités en priorité. Les délais de traitement de ces dossiers sont plus courts que ceux des dossiers portant sur les introductions par effraction, par exemple.
(0950)
    Pourquoi manque-t-il de ressources? Lorsque vous avez accepté de collaborer avec la banque nationale, n'avez-vous pas conclu des ententes avec elle afin qu'elle vous fournisse des ressources? Qu'est-il advenu de ces ententes?
    Effectivement, lorsque le Québec s'est engagé en 1996, il avait conclu une entente avec le gouvernement fédéral pour subventionner une partie de notre contribution à la banque nationale. Cette entente était censée être permanente. On négocie cette entente tous les trois ou cinq ans, avec des années d'option.
    On n'a pas d'entente permanente depuis 2007 et on est en train de négocier avec le fédéral à cet effet. On n'est pas encore arrivés à conclure une entente. Il faut rappeler que la contribution à la banque nationale amène du travail additionnel.
    Comme l'Ontario l'a dit, nos dossiers ne sont jamais fermés. Tant qu'un dossier n'est pas résolu, il reste ouvert. Éventuellement, les policiers peuvent présenter de nouvelles demandes. Il peut s'agir de dossiers de 2001, pour lesquels on doit refaire des analyses. Les dossiers restent ouverts tant et aussi longtemps qu'ils ne sont pas réglés. Vous pouvez constater l'effet multiplicateur de cette situation.
    Monsieur Prime, en Ontario, êtes-vous satisfait de vos ententes de financement, ou y a-t-il le même retard que celui que vous constatez au Québec, c'est-à-dire deux ans depuis le renouvellement de la dernière entente?

[Traduction]

    Vous avez la parole, monsieur.
    Nous avons les mêmes problèmes. Nous avons une entente semblable à celle du Québec avec le gouvernement fédéral, et nous sommes dans la même situation. Nous attendons le renouvellement de l'entente. Nous essayons aussi d'obtenir une augmentation de la proportion du financement accordé à l'Ontario et au Québec, et la reconnaissance du fait que nous contribuons à un service national et que le nombre de profils fournis est très important. C'est le cas pour les deux provinces. Nous faisons certainement notre part, sinon plus.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant aux néo-démocrates.
    Monsieur Davies, c'est votre tour.
    Merci, monsieur le président.
    Tout d'abord, mes excuses, j'ai raté le début de votre exposé. Il me faudrait peut-être une banque de données des salles de comités pour m'y retrouver un peu mieux.
    Voici ma première question. Nous le savons, la banque de données génétiques sert non seulement à obtenir des condamnations, mais aussi à disculper ceux qui ont été condamnés à tort. Avez-vous des statistiques sur le nombre de condamnés qui ont été blanchis, dans de vieux dossiers?
    Il n'est pas facile de répondre à cette question.
    J'ai mentionné que chaque fois qu'on consulte la banque de données et qu'on écarte des suspects, on blanchit des gens. Mais vous nous demandez s'il y a des gens en prison qui ont été blanchis. À ce stade, je dirais qu'il est encore trop tôt pour le dire.
    Prenez les affaires David Milgaard et Lynda Shaw. Avec le temps, les meurtres commis dans ces cas-là ont été imputés à d'autres personnes. C'était avant la création de la banque de données et donc avant que l'on puisse examiner ces prélèvements. Ceux qui ont un casier judiciaire ne sont pas forcément dans la banque de données et c'est donc une des possibilités.
    Dans beaucoup de cas, l'analyse génétique a servi à innocenter des gens. Notre laboratoire offre ce service à d'autres provinces par souci d'indépendance, quand elles veulent l'avis d'un deuxième laboratoire indépendant du premier.
    Nous savons donc que ça arrive. On le fait régulièrement, mais pas parce qu'un autre nom a émergé de la banque nationale.

[Français]

    Je voudrais parler d'un cas réel qui est survenu au Québec. Un individu ayant des problèmes mentaux s'est lui-même accusé d'agression sexuelle. Les policiers ont orienté leur enquête sur ce suspect, qui avait déjà purgé une peine pour agression sexuelle. En faisant le profil génétique de cet individu, il s'est avéré que ce n'était pas ce profil qu'on avait retrouvé sur la victime. Les policiers ont dû refaire leur enquête. Cet individu aurait été condamné pour un crime qu'il n'avait pas commis. Il s'agit là d'un exemple qui démontre le succès de cette banque.
(0955)

[Traduction]

    Merci.
    J'aimerais aborder une question connexe. Avez-vous une idée ou avez-vous des chiffres du nombre d'aveux découlant de la communication à l'avocat de la défense du fait qu'il y avait correspondance génétique?
    Autrement dit, la base de données facilite-t-elle le travail de la justice en suscitant un plus grand nombre d'aveux lorsque cette preuve est soumise?
    Nous savons que cela arrive. Dans les deux exemples que je vous ai donnés, il y a eu plaidoyer de culpabilité.
    Mais nous, nous sommes des scientifiques. Nous travaillons dans des laboratoires. Nous ne tenons pas ce genre de chiffres.
    Je ne sais pas si Jonathan en a.
    C'est une question qu'on nous pose souvent.
    Il est difficile, voire impossible, d'effectuer une analyse sérieuse — pour reprendre votre exemple — auprès d'avocats de la défense pour déterminer qu'est-ce qui a amené leur client à plaider coupable. Dans l'exemple que Ray a donné, les enquêteurs de la police ont bien dit que la preuve génétique avait été un facteur important, mais, pour nous, ce n'est pas un fait avéré. Il est presque impossible de le savoir.
    Pigé.
    J'aimerais parler de la preuve, et, si on peut, de l'aspect scientifique. Évidemment, la protection et l'intégrité des prélèvements sont essentielles si l'on veut avoir une chaîne de possession impeccable des éléments de preuve. J'imagine que c'est essentiel pour les prélèvements. Pourriez-vous me dire un peu comment ça se passe? Avez-vous des inquiétudes à ce sujet? Comment cela se fait-il?
    Assurer la continuité fait partie de notre travail. En milieu médico-légal, une des choses les plus importantes est de s'assurer que la preuve qui parvient au laboratoire est celle qui est présentée au tribunal. Depuis toujours, c'est quelque chose dont nous nous faisons un point d'honneur.
    Ces dernières années, nous avons aussi eu accès à des systèmes d'information de laboratoire qui permettent de suivre les éléments de preuve au sein du laboratoire. Nous commençons par l'examen des lieux du crime. Nous formons les policiers pour qu'ils sachent comment protéger les éléments de preuve et ce qu'il faut en faire. Nous avons des spécialistes au service de police, habituellement à l'identification, qui recueillent les éléments de preuve. Lorsque ceux-ci arrivent au laboratoire, ils reçoivent un identificateur unique. À l'heure actuelle, nous nous servons du code à barres pour suivre les éléments à chaque étape de l'analyse. Ils sont également suivis dans le système d'information du laboratoire.
    Il y a ensuite une méthode pour renvoyer les éléments dans des emballages adéquats et selon des numéros de cachet pour identifier tout article susceptible d'être difficile à identifier d'une autre façon. Par exemple, tous les tubes de prélèvement sanguin se ressemblent et c'est pour ça qu'il faut leur attribuer un cachet unique. Pour le retour, nous avons des méthodes pour nous assurer qu'on reçoit le paquet cacheté. Nous avons des systèmes qui permettent de prouver que l'emballage n'a pas été ouvert ni altéré. Des cachets cassables, par exemple.
     Nous avons des méthodes très perfectionnées pour suivre la chaîne et les mouvements des articles à l'intérieur du laboratoire.
    Merci.
    Le message que j'entends, c'est qu'il est toujours bon d'avoir plus de moyens, et c'est le message fort que j'entends du Québec. Où estimez-vous avoir besoin de plus de moyens pour améliorer votre banque de données? Est-ce qu'il vous faut plus de personnel, d'équipement ou de travaux de recherche? Si vous aviez plus de fonds, qu'en feriez-vous?

[Français]

    Il serait principalement investi au niveau des experts, puisque c'est quand même une analyse... Pour pouvoir arriver à des résultats, il faut quand même faire des analyses exhaustives, notamment aussi, lorsqu'on a des profils qui ne sont pas uniques, c'est-à-dire des profils mélangés. C'est donc une expertise, et on ne peut pas automatiser cela. Il faut vraiment que l'apport humain soit là.
     Au Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, ce qui nous manque principalement en ce moment, ce sont des experts pour faire ces analyses et, éventuellement, aller témoigner devant les cours de justice.
(1000)
    À cela, je voudrais seulement ajouter ceci: lorsque des gens, de nouveaux experts, viennent travailler avec nous, ils ne vont pas automatiquement travailler à des dossiers la semaine suivant leur arrivée. Ce n'est pas ainsi que ça fonctionne.
    Les gens qui viennent travailler chez nous doivent avoir un baccalauréat, une maîtrise ou un doctorat. Ils ont besoin d'un an et demi à deux ans de formation au laboratoire avant de pouvoir témoigner à la cour. Les gens qui travaillent chez nous font les expertises judiciaires, témoignent à la cour et font également de la formation.
    Aussi, il faut comprendre que, lorsque quelqu'un commence à travailler dans notre laboratoire, que ce soit en biologie ou dans d'autres secteurs, il reçoit une formation qui dure un an, un an et demi. On aurait peut-être besoin que quelque 30 ou 35 personnes puissent se pencher sur les dossiers liés aux projets de loi C-13 et C-18, comme on est censés le faire et qu'on ne fait pas parce qu'on n'a pas assez de personnel. Néanmoins, ça ne signifie pas que l'embauche de 35 personnes demain matin nous permettrait de nous pencher sur ces dossiers en trois semaines ou six mois.
    D'abord, on ne peut pas engager 35 personnes en même temps et les former. Il faut le faire par groupes de cinq ou six personnes, et il faut prendre le temps de les former adéquatement pour qu'elles puissent bien faire le travail et aussi aller témoigner devant la cour.
    C'est une mise à niveau qui est à peu près de trois à cinq ans. Pour arriver à mettre les choses à niveau, cela prend au moins trois ans.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Avez-vous quelque chose à rajouter?
    Je serai bref. Je veux seulement m'assurer que vous compreniez bien que ce ne sera pas seulement des jérémiades à propos de manques de fonds. Nous faisons de gros efforts dans nos laboratoires pour simplifier nos services. Nous faisons des études d'ingénierie sur le déroulement du travail pour réduire le travail à faire dans les laboratoires. Par exemple, dans notre programme sur les introductions par effraction, nous avons confié à la police le soin de faire le prélèvement pour que ce que nous recevions soit standard. Il n'y a pas que les vêtements, les chapeaux et les coeurs de pommes et tout le reste. C'est la police qui fait les prélèvements pour nous. Nous ne les faisons plus pour essayer de réduire notre charge de travail, mais il nous faut vraiment plus de moyens, essentiellement du personnel.
    Nous nous servons de la robotique. Si une technologie nouvelle nous permet de faire les choses plus rapidement, nous nous y adaptons. Mais il nous faut des gens pour analyser ces prélèvements, extraire les découpes, rechercher les taches quasi invisibles de sang ou de sperme ou d'autres liquides organiques sur des objets parfois très grands, comme des draps, des tapis ou des vêtements. Ce sont des gens qu'il nous faut.
    Très bien, merci.
    Je donne la parole à M.Norlock.
    Merci beaucoup d'être venus ce matin, messieurs. C'est très instructif pour nous.
    J'aimerais revenir sur la question concernant la certitude qu'un échantillon d'ADN identifie bien une personne. Cela m'amène dans deux domaines dont s'occupent les trois centres.
    Il y a d'abord les empreintes digitales. On s'est beaucoup fié aux empreintes digitales par le passé. Pourriez-vous nous dire quel est le degré de certitude de la correspondance d'une empreinte, une fois que vous avez les indices voulus, 11 ou 12, je crois, par rapport à l'ADN et aux indices qui montrent que cet ADN correspond bien au sujet — plus il y a d'indices, plus il y a certitude. Je dirais que c'est l'équivalent des empreintes digitales. J'aimerais que vous nous en parliez et ensuite que vous nous parliez de la théorie scientifique selon laquelle l'un ou l'autre pourra appartenir à une personne autre que la personne qui a donné cette empreinte ou ce prélèvement d'ADN. Pour le grand public, certains diront qu'il est possible pour vous d'obtenir un bon prélèvement et de faire une bonne analyse, mais que le prélèvement n'appartienne pas à la personne identifiée. Mais dans l'univers des chances, on dirait que c'est extrêmement peu probable.
    Pourriez-vous dire que les empreintes sont équivalentes à l'ADN puis faire cette analyse, parce qu'aujourd'hui, on accepte entièrement les empreintes digitales parce que c'est un fait prouvé scientifiquement. Mais il n'est que récemment que l'ADN a été admise en preuve devant les tribunaux et parfois, on doute de tout ce qui est nouveau.
    Un des deux messieurs des centres ou Mme Séguin peut répondre.
(1005)
    Je pourrais peut-être commencer, vu qu'il y a une certaine ironie dans ce que vous venez de dire. Aux États-Unis, un rapport de la National Academy of Sciences déposé récemment critique les laboratoires américains en particulier, ainsi que la science des empreintes digitales dans son ensemble, parce qu'elle ne serait pas à la hauteur de celle de l'ADN et ne serait pas abordée avec la même rigueur scientifique. Il y a donc une certaine ironie dans ce que vous venez de dire, vu les défis que nous affrontons.
    Mais il s'agit de deux choses différentes. En matière d'empreintes digitales, il s'agit d'apparier deux images puis de les comparer. Pour ce qui est de l'ADN, il y a appariement de chiffres. Vous créez un profil auquel vous pouvez associer des chiffres dans le cas d'une comparaison et vous êtes en mesure d'affirmer qu'il y a correspondance exacte entre deux chiffres dans le cadre des comparaisons que vous effectuez. L'étape suivante est d'évaluer la signification de cet appariement et la probabilité de trouver un autre individu choisi au hasard qui aurait cet appariement.
    Je demanderais à John de vous donner les détails.
    Je pense que Ray a bien résumé les choses. Les empreintes digitales diffèrent de l'ADN, dans la mesure où les empreintes digitales ne sont pas une caractéristique héritée. Vous ne pouvez pas regarder les empreintes digitales de vos parents, par exemple, puis les vôtres, et voir des similitudes entre les deux.
    L'ADN, par contre, est une composante héritée transmise de parents à rejetons. Nous examinons des composantes au sein de l'ADN, ce dont Ray a parlé comme de chiffres, et pouvons comparer ces chiffres avec ceux de la population en général, afin de déterminer la fréquence ou la rareté de la présence de chacune des composantes. Ensuite, en tenant compte d'un certain nombre de composantes différentes, nous composons une représentation de plus en plus détaillée du profil et nous établissons l'importance de l'appariement à partir d'une comparaison avec des banques de données indiquant la fréquence des composantes individuelles — si elles sont communes ou rares, prises individuellement.
    Pour les empreintes digitales, nous examinons simplement, comme l'a indiqué Ray, les deux empreintes: celles connues et celles inconnues. Nous nous posons ensuite la question suivante: « Sont-elles exactement pareilles? Y a-t-il appariement ou pas? » S'il y a appariement, on estime que la personne est identifiée. Avec l'ADN, vu les parentés entre les gens, si deux profils sont appariés ou sont exactement pareils, les composantes du profil et le nombre de composantes qui constituent le profil déterminent jusqu'à quel point c'est un profil qui est rare dans la population en général. Avec les empreintes digitales, ce n'est pas possible.

[Français]

    Par exemple, dans le cas d'un match au hasard, si cinq éléments génétiques ont été vérifiés et que nous ayons une identité entre les deux individus, il faut faire plus de sites génétiques. Plus on augmente le nombre de sites génétiques testés, plus on arrive à discriminer entre deux individus. Deux individus peuvent posséder cinq sites génétiques identiques, mais en faisant plusieurs autres sites génétiques, on va finir par les distinguer.
    Par conséquent, plus on fait de sites génétiques, et que certains sont identiques à 13 sites génétiques, par exemple, plus on approche, à l'aide de calculs statistiques, d'une fréquence d'apparition d'un profil correspondant à ces 13 sites génétiques, qui est de 1 personne sur 600 milliards d'individus qui pourrait posséder ces 13 sites génétiques identiques.
    On en arrive à des fréquences, dans la population... C'est très rare de retrouver un individu ayant le même profil qu'un autre. Pour cinq sites génétiques, on pourrait avoir une fréquence d'apparition d'un profil correspondant à ces cinq sites génétiques qui serait de 1 personne sur 3 millions, par exemple. Grâce à plus de sites génétiques, on arrive à discriminer de plus en plus.
    Les technologies évoluent, on fait de plus en plus de sites génétiques, et on arrive à des résultats qui nous permettent de discriminer de façon presque certaine entre deux individus.

[Traduction]

    Merci.
    Histoire de simplifier les choses, ce que nous voulons, c'est attraper le méchant. L'ADN d'une personne identifiée, d'un suspect, en d'autres termes, vous donne... Dans nos tribunaux, si, en plus d'autres preuves, les empreintes digitales relevées sur la scène du crime correspondent à celles du suspect, on estime généralement qu'on tient le méchant, le coupable. Serait-il exact de dire qu'un appariement de l'ADN de la personne sur les lieux du crime avec les échantillons prélevés sur les lieux du crime vaut au moins une empreinte digitale — pour revenir à l'allusion au milieu scientifique américain faite par M. Prime —, si ce n'est mieux? De dire que c'est au moins aussi bien, mais probablement mieux? Est-ce bien résumer la situation?
(1010)

[Français]

    C'est une méthode d'identification de personnes. Par contre, si on retrouve les empreintes digitales ou l'ADN, le profil génétique, de la personne sur un lieu de crime, on peut seulement dire que la personne se trouvait sur les lieux du crime; on ne peut pas nécessairement dire qu'elle est coupable.
    C'est un outil d'enquête au même titre que les empreintes digitales sont un outil d'enquête pour les policiers.
    Un élément d'enquête, additionné à plusieurs éléments d'enquête, nous permet de faire des liens et, éventuellement, d'accuser quelqu'un.
    Au Québec, il y a eu le cas de William Fyfe, un tueur en série ayant admis huit ou neuf meurtres. La première fois qu'on l'a arrêté, c'était sur la base d'une empreinte digitale trouvée sur un cadre de porte.
    Cependant, toutes les autres preuves amenées par la suite pour le condamner étaient des preuves d'ADN. Par exemple, cela incluait l'ADN trouvé à l'intérieur d'une bague qui appartenait à une femme qu'il avait tuée, qui avait été emmenée chez sa mère à Barrie, en Ontario. Les policiers avaient réussi à mettre la main sur la bague et à identifier la victime.
     Il n'en reste pas moins qu'au début, il avait été arrêté grâce à une empreinte digitale sur un cadre de porte. Par la suite, l'ADN a permis de relier les autres meurtres qui ont suivi.

[Traduction]

    Merci.
    Je m'efforce toujours de chercher les pratiques exemplaires. En ce qui concerne la banque de données d'ADN du Canada et nos avancées dans le domaine de la criminalistique, y a-t-il un pays qui va plus loin que nous et dont nous pourrions nous inspirer? Ou sommes-nous aussi avancés que quiconque pour ce qui est de l'emploi de l'analyse de l'ADN et de son caractère acceptable ou non devant nos tribunaux?
    Nous pouvons tous apprendre les uns des autres. Aucun service n'est perçu comme la référence en matière d'analyse génétique médico-légale. Tous apprennent des autres, qu'il s'agisse du Centre de sciences judiciaires et de la GRC au Québec; du Centre de sciences judiciaires et du FBI ou du Québec et du Forensic Science Service du Royaume-Uni. Il y a des différences d'un endroit à l'autre.
    J'ai consulté certains de mes collègues d'ailleurs, et le Canada est à l'avant-garde de l'application de cette technologie qui vient épauler la justice.
    Il va falloir terminer ici.
    Monsieur Oliphant, à vous.
    Merci à tous d'être ici aujourd'hui.
    La beauté du travail de député, c'est que l'on rencontre des gens qui connaissent des sujets tellement mieux que nous, et vous nous avez tous appris quelque chose.
    Monsieur Newman, je veux vous remercier pour ce que vous avez dit à propos des sciences. Toute ma vie, j'ai essayé de faire comprendre que la science est bien plus un art que les gens ne le pensent. C'était très important.
    Je veux revenir à la question des moyens. Corrigez-moi si je me trompe, mais d'après le cadre législatif actuel, nous sommes déjà au maximum de ce que nous pouvons nous offrir pour faire ce qu'il y a à faire vu la liste actuelle d'infractions désignées. Si on en augmente le nombre ou si l'on supprime le pouvoir discrétionnaire, nous allons surcharger le système. C'est dans ma tête.
    Pour faire suite à ce que vient de dire M. Newman, il y a différentes normes et technologies dans le monde, et les changements technologiques ne baissent pas forcément le coût. De fait, elles pourraient les faire augmenter de sorte que, ou il vous faut plus de moyens pour faire votre travail ou vous devez trouver une autre façon de le faire.
    Pensez-vous qu'il faudrait faire plus de travail ou faire ce que nous faisons maintenant, mais mieux. Y a-t-il des façons d'accomplir ce travail avec les mêmes moyens ou simplement avec plus de moyens?
    C'est une combinaison des deux, et M. Prime y a fait allusion. Comme travailleurs de laboratoire, nous sommes toujours à la recherche de façons de travailler plus rapidement et plus efficacement, mais à un moment donné il y a toujours une limite à notre capacité de travail.
    On prévoit que le projet C-18 créera 1 500 cas de plus, soit une augmentation d'à peu près le tiers de notre charge de travail. Nous ne sommes pas capables d'utiliser les nouvelles technologies ou de changer la façon dont nous travaillons pour suffire à cette demande sans cesse croissante. La police veut que nous traitions plus de cas plus rapidement. Nous sondons chaque année nos collaborateurs de la police, et tel est le message que nous recevons systématiquement depuis que l'on se sert des données génétiques dans les tribunaux. Ils en veulent davantage et ils les veulent plus vite.
(1015)
    J'imagine que le Québec et le Canada ont la même réponse?

[Français]

    Tout à fait, mais au Québec, et également en Ontario, il y a eu beaucoup d'améliorations sur le plan des techniques pour trouver des économies d'échelle.
    Depuis l'an 2000, les coûts à l'unité ont diminué de façon considérable. Par contre, comme on a beaucoup plus de demandes, cela coûte forcément plus cher.
    Cela dit, ça ne demanderait pas énormément d'argent supplémentaire pour nous rattraper. Ce ne sont pas des sommes exorbitantes.

[Traduction]

    Est-ce que l'Ontario ou le Québec ont recours à des laboratoires privés pour s'occuper de l'excédent?
    En un mot, non.

[Français]

    Non.

[Traduction]

    À la différence de la GRC, donc, qui a un contrat avec un laboratoire privé, Maxxam, vous ne faites pas cela.
    Effectivement.
    Que pensez-vous de la privatisation et de l'idée de refiler votre travail extrêmement sensible à des entreprises privées?

[Français]

    On est assez réticents par rapport à cela, puisque c'est une expertise très pointue, qu'on maîtrise très bien. Et en fin de compte, si on ouvrait ce secteur au privé, il y aurait un risque de perte d'expertise. C'est notre position.
     Compte tenu du volume d'activités, on pense qu'on devrait être en mesure d'avoir des laboratoires gouvernementaux efficaces qui pourraient remplir adéquatement le mandat sans que l'on s'adresse au privé.
    Si on s'adressait au privé, il faudrait payer. Le secteur privé ne ferait pas cela gratuitement. Alors, les sommes qui devraient...

[Traduction]

    Elles doivent être payées et réaliser des bénéfices. Donc…

[Français]

    Exactement.

[Traduction]

    C'est ce qui m'inquiète de la privatisation. Je vais donc tout faire pour m'assurer qu'on cesse de sous-traiter ce travail.
    Comme il me reste à peine 20 secondes, je vais parler d'éducation et de recherche et de développement. Les gouvernements d'une certaine obédience — je ne nomme personne — n'aiment pas consacrer de l'argent à la recherche et au développement. D'autres au contraire cherchent à les promouvoir. C'est un domaine où le Canada pourrait avoir un avantage concurrentiel — il pourrait créer des technologies et les exporter dans le reste du monde. Croyez-vous que nous avons ce qu'il faut pour le faire?
    Il faut amener les universités à s'y intéresser. Le Canada est un petit marché, c'est donc difficile. Nous avons conclu des ententes avec l'Université de Toronto pour mettre sur pied un programme de sciences judiciaires, et certains de ses étudiants viennent dans notre laboratoire régulièrement, nous travaillons aussi avec d'autres universités.
    Mais n'y a-t-il pas un nouveau laboratoire à l'Institut universitaire de technologie de l'Ontario? Est-ce qu'il n'y a pas de sciences judiciaires là-bas?
    Oui, il y a un programme à l'Université de Toronto et le nôtre, à l'Institut universitaire de technologie de l'Ontario, dont vous venez de parler, et il y en a d'autres dans le nord. Il y a beaucoup de programmes. C'est ce que l'on appelle l'effet CSI. Aujourd'hui, beaucoup de jeunes veulent se lancer dans le domaine médico-légal.
    J'ai besoin d'une seconde pour revenir sur quelque chose que je vous ai entendu dire, monsieur Oliphant, au début de votre présentation. Vous avez dit quelque chose à propos de l'élimination du pouvoir discrétionnaire judiciaire, ce qui créerait plus de travail pour nous. Je veux préciser que le travail que nous faisons en laboratoire n'est pas touché par le pouvoir discrétionnaire judiciaire, à savoir, d'après ce que je sais, si le juge déclare que les prélèvements doivent être envoyés à la banque nationale de données génétiques. Ce facteur-là n'alourdit pas notre charge de travail.
    Merci.
    Madame Séguin, vouliez-vous intervenir?

[Français]

    Oui.
    Je participe à des congrès internationaux, comme M. Newman, et nous misons beaucoup sur la recherche et le développement. Nous devons nous maintenir au même niveau que les autres laboratoires mondiaux. Nous devons être capables de comparer nos résultats avec ceux des autres pays, que ce soit avec les États-Unis, l'Amérique latine ou même l'Europe. On doit maintenir ce niveau et, pour cela, ça prend des ressources pour continuer à faire de la recherche et du développement.
    On a des étudiants de Lausanne, en Suisse, qui viennent faire des stages dans nos laboratoires au Québec parce que nos technologies sont quand même assez avancées. On présente, dans des congrès internationaux, des études qu'on fait au laboratoire. Il est donc très important de conserver ce niveau. La recherche et le développement sont très importants. On ne peut pas simplement les mettre de côté.
(1020)

[Traduction]

    Monsieur Coleman, à vous.
    Je tiens moi aussi à remercier les témoins d'avoir pris le temps de venir et de nous informer sur cette technologie très importante du point de vue des sciences.
    Je voudrais fouiller un peu plus la question du modèle de service, que M. Oliphant vient d'aborder. Je veux m'assurer de bien comprendre.
    À cause de la demande croissante, des fournisseurs privés ont-ils vu le jour? Y a-t-il des gens dans le privé qui voudraient offrir ce service?

[Français]

    Au Québec, il y a une compagnie qui voudrait bien essayer d'accéder à ce domaine d'activités, mais ça se limite à une seule présentement. Il faut dire aussi que, par rapport à l'entreprise privée, nos critères d'assurance de la qualité sont extrêmement élevés.
     Actuellement, le laboratoire est en processus d'accréditation ISO, que nous obtiendrons probablement au cours de l'année. Il faudrait que les fournisseurs obtiennent ces accréditations pour pouvoir offrir ces services. Ce n'est pas quelque chose de simple à obtenir.
    Il y a toute la question de la chaîne de possession dont on a parlé un peu plus tôt. Lorsque les policiers nous apportent des dossiers, la chaîne de possession à l'interne, au laboratoire, est assurée. Les échantillons sont apportés, on peut confirmer leur intégrité tout au long du processus. Et, lorsqu'on émet un rapport et qu'on observe une concordance, évidemment on ne fait pas seulement constater une concordance et donner l'information: on analyse le dossier et on s'assure que la concordance est valable, et que tous les éléments du dossier ont été vérifiés.
    Ça devient difficile, si on passe par le privé pour traiter un élément de la chaîne, de s'assurer de cette intégrité de la chaîne de possession. Il est donc important aussi, pour nous, de pouvoir contrôler tous les éléments des analyses tout au long de la chaîne.

[Traduction]

    Je comprends cela et je l'accepte. J'imagine que j'établis un parallèle à tort ou à raison avec les soins de santé et le travail de diagnostic qui se fait tant dans les services publics qu'à l'écart, dans les laboratoires privés.
    Êtes-vous au courant de cas où les services de police se sont adressés directement à des fournisseurs du service privé pour ce genre de chose?
    Monsieur Prime, je pense que vous aimeriez répondre aux deux questions.
    Je vais répondre aux deux questions. Je voudrais dire que selon mon expérience auprès des applications judiciaires du secteur privé, comme c'est un domaine très étroit et petit, ce n'est pas vraiment un secteur lucratif. Par le passé, ceux qui dans le secteur privé ont offert des services judiciaires sont ceux qui fournissent des témoignages pour conduite en état d'ébriété ou avec facultés affaiblies parce qu'il y a un gros volume de travail judiciaire, ou qui font des comparaisons de graphologie, parce qu'ils n'ont pas beaucoup de frais généraux.
    Il y a eu de petites entreprises de données génétiques en Ontario. Il a été question de Maxxam, et il y a du travail qui se fait à l'Université Lakehead. En général, ces entreprises se consacrent à d'autres activités judiciaires, comme les tests de paternité, où il y a un volume suffisant. C'est un petit domaine qui existe parce qu'il peut attirer des gens déjà entièrement formés provenant de laboratoires comme le nôtre et celui de la GRC et peut-être du Québec. Il y a donc cette différence.
    Pouvez-vous me rappeler la deuxième partie de votre question?
    Savez-vous s'il y a des services de police — municipaux, provinciaux ou nationaux — qui s'adressent directement à des laboratoires du secteur privé?
    La police ontarienne peut s'adresser à un laboratoire privé après avoir épuisé toutes les possibilités chez nous. Elle a le droit de le faire et nous savons qu'elle le fait à l'occasion.
(1025)
    Dans le même ordre d'idées, j'aimerais mieux comprendre le modèle qui a été mis sur pied au Québec et en Ontario, la décision ayant été prise — par le gouvernement provincial j'imagine — de créer des entités distinctes. Peut-être est-ce une question de volume. Pourquoi y a-t-il trois entités, je veux dire celle du Québec, celle de l'Ontario et une autre, nationale, au lieu d'une seule, à l'échelle nationale? Il n'y en a pas dans les autres provinces.

[Français]

    Au Québec et en Ontario, nous disposons de corps de police provincial, la Sûreté du Québec et l'OPP. Ces organisations policières sont différentes de celles des autres provinces et territoires.
    Les sciences judiciaires sont de responsabilité provinciale.
    Je voudrais vous faire remarquer que le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, au Québec, a été fondé en 1914, il y a 95 ans. C'est le plus vieux laboratoire en Amérique du Nord. Le deuxième à voir le jour a été celui de Chicago en 1928.
    Vous demandez si les policiers voudraient faire affaire avec des entreprises privées pour l'analyse d'ADN. C'est la confiance en notre laboratoire et en d'autres types de services que nous offrons qui fait qu'ils viendront chez nous, car ils sont sûrs que les services seront rendus selon les règles de l'art.

[Traduction]

    De quel ministère relevez-vous?
    Du ministère de la Sécurité publique et des services correctionnels.
    Et au Québec?

[Français]

    Au Québec, c'est le ministère de la Sécurité publique.

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons y revenir plus tard.
    Nous allons maintenant passer au Bloc Québécois.
    Madame Mourani, à vous la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, madame et messieurs. Je vais poser une brève question et je céderai ensuite la parole à mon collègue M. Ménard.
    Si je comprends bien, même si votre organisme relève du ministère de la Sécurité publique, il n'est pas lié à la police. Vous êtes une institution indépendante. Est-ce exact?
    Absolument. Nous sommes une unité de services autonome. Les médias parlent souvent du laboratoire de la police, mais nous sommes un laboratoire autonome. Nos bureaux sont situés dans l'édifice de la Sûreté du Québec, et c'est peut-être pour cette raison qu'il y a confusion. Nous sommes une unité de service autonome, et les corps policiers sont nos clients.
    Est-ce la même chose en Ontario?

[Traduction]

    En Ontario, nous sommes une entité distincte de la police. Nous relevons du même ministère que la police provinciale de l'Ontario, mais nous sommes indépendants du service de police.

[Français]

    Le fait que vous soyez justement une institution indépendante contribue-t-il d'une certaine manière à ce que vous ayez une certaine liberté quant à vos décisions et à vos délais? Vous êtes carrément autonomes et vous ne subissez pas de pression pour bâcler le travail.
    On est autonomes, mais notre mandat est de soutenir l'administration de la justice. On ne travaille pas pour la Couronne ni pour la défense; on travaille pour le tribunal. On rapporte des faits et on présente des analyses au tribunal, et le juge apprécie la preuve. Les procureurs de la Couronne et ceux de la défense font leur travail. Nous ne faisons pas du travail d'avocat, mais c'est notre travail de dire que telle expertise a donné tel résultat.
    Plus tôt, Mme Séguin a parlé du jeune homme de la ville de Québec qui s'était lui-même accusé d'agression sexuelle. Lorsqu'on a présenté la preuve d'ADN, on a réussi à faire sortir ce jeune homme malade du circuit judiciaire afin qu'il consulte un psychologue ou un psychiatre. Il avait davantage besoin d'un psychiatre et d'un psychologue que d'être en prison; ce n'était pas sa place.
    On est indépendants et on fournit au tribunal des expertises. Si le traitement d'un dossier tarde, nos clients, que ce soit le bureau du coroner ou un corps de police, peuvent nous demander, à l'approche d'un procès, où en est tel dossier, et on va essayer de le traiter en priorité. Il est sûr que le manque de personnel et de financement entraîne un ralentissement.
    En est-il de même pour la GRC, ou administre-t-elle son propre centre?
    Il faudrait le demander à la GRC, qui n'est pas ici ce matin.
(1030)
    Vous n'êtes pas au courant?
    On travaille avec la GRC, qui a des Services de laboratoire judiciaire.
    Mais ils sont destinés à la GRC.
    Ils offrent des services à tous les territoires et toutes les autres provinces autres que l'Ontario et le Québec.
    J'ai trouvé la référence dont j'ai parlé plus tôt. Elle se trouve dans le rapport de la vérificatrice générale de mai 2007. J'aimerais avoir les commentaires de M. Prime et ceux du Québec. La vérificatrice générale parle des laboratoires judiciaires de la GRC:
Bien que les demandes de service urgentes puissent être traitées en moins de 15 jours, celles-ci ne constituent que 1 p. 100 de toutes les demandes de service. Dans les 99 p. 100 restants, qui représentent les demandes classées comme courantes, les SLJ ne parviennent en général pas à respecter la cible de 30 jours qu'ils se sont fixée pour ces cas. Bien que les délais d'exécution moyens se soient améliorés pour tous les autres genres d'analyses, ceux des demandes d'analyse génétique ont empiré — passant de 91 jours en 2003-2004 à 114 jours en 2005-2006 — et ce, malgré l'affectation de sommes accrues et de personnel supplémentaire. L'arriéré des demandes d'analyse génétique contribue pour beaucoup aux longs délais d'exécution.

Les laboratoires disposent maintenant [...]
     Reconnaissez-vous que les objectifs établis au départ sont valables? Des délais de 114 jours dépassent-ils ce qui est acceptable? En Ontario et au Québec, vous prenez plus que 114 jours pour remettre les analyses courantes d'ADN.
    Comme nous l'avons dit plus tôt, nous dépassons ce délai de 114 jours au Québec, et ce, pour la majorité des dossiers, même si nous faisons une priorisation fondée sur l'importance du dossier.
     Il reste que le niveau de nos délais est extrêmement élevé et qu'en fin de compte, ça donne lieu à une non-qualité. En effet, le service tarde à être dispensé et ça crée des délais énormes au sein de l'appareil judiciaire.
    De plus, si nous sommes en mesure de procéder à l'identification de quelqu'un dans le cadre de ces dossiers, mais que cette personne n'ait pas été identifiée, elle pourrait continuer à commettre des crimes. Déjà là, il y a un risque énorme.
    Cela dit, il nous serait très difficile de respecter un délai de 30 jours. Nous ne sommes pas en mesure de le faire présentement.
     Quoi qu'il en soit, je ne pense pas que tous les dossiers méritent d'être traités en 30 jours. Je pense par contre qu'une cible de 60 à 90 jours nous permettrait de traiter la majorité des dossiers.
     Il faudrait quand même disposer de lignes directrices en matière de priorisation des dossiers urgents. Pour respecter un délai de 30 jours, il nous faudrait beaucoup plus de ressources. C'est ce que nous pensons, au Québec.

[Traduction]

    Il y a certains doutes à propos des chiffres qui sont dans ce rapport parce que l'on compare les délais et les objectifs, qui sont théoriques.
    Nous avons des inquiétudes au sujet de la longueur des délais, et dans l'année écoulée nous avons consacré beaucoup d'efforts à les écourter. Nos chiffres les plus récents en biologie doivent avoisiner les 54 jours de délai en moyenne. Ça ne signifie pas qu'il n'y a pas quantité d'affaires importantes qui restent au laboratoire pendant des mois. Si nous traitons rapidement certaines affaires faciles, elles paraîtront mieux que celles qui traînent longtemps, ce qui nous donne une moyenne, et celle-ci a été raccourcie.
    Nous aimerions bien que toutes les affaires soient traitées en 30 jours et c'est ce que nous disent souvent les policiers. On a fait un sondage l'an dernier et on a demandé aux policiers pour quelles affaires ils avaient besoin de résultats rapides. Ils ont répondu 30 jours pour une affaire importante, comme un homicide, et entre 60 et 90 jours pour une introduction par effraction. Or c'est précisément le contraire de ce que nous pouvons faire facilement dans notre laboratoire.
    Nous savons bien que le client veut que le travail soit terminé dans un délai court, mais ce n'est pas toujours possible pour nous. Nous prenons des dispositions, comme Mme Séguin l'a dit, qui nous permettent de faire les choses importantes. Les choses qui ont des conséquences sur la sécurité publique sont faites très rapidement, mais le reste de l'affaire peut prendre des mois à aboutir.
    Monsieur Ménard, avez-vous une courte question à poser?

[Français]

    Avez-vous, avec le gouvernement fédéral, une entente qui est en vigueur actuellement ou en êtes-vous encore à négocier, comme c'est le cas du Québec, deux ans après l'expiration de votre dernière entente de financement?

[Traduction]

    Nous sommes dans la même situation que le Québec. Nous avons le même genre d'entente. Nous avons signé un renouvellement qui nous a accordé le même financement qu'en 2005. Nous n'avons pas obtenu d'augmentation, mais nous avons une entente provisoire.
(1035)
    Merci.
    Allez-y, monsieur Rathgeber.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être venus ce matin.
    Monsieur Prime, je crois qu'en 2007 à peu près — vous y avez fait allusion, je crois — le vérificateur général de l'Ontario a effectué une vérification exhaustive de votre centre à Toronto pour évaluer l'efficacité, la fiabilité et la rapidité du service et elle a recommandé des changements importants des systèmes et des marches à suivre pour aligner les délais sur ceux des grands laboratoires médico-légaux étrangers.
    Ma question est en deux volets. Premièrement, à quels laboratoires médico-légaux étrangers le vérificateur général vous a-t-il comparé? Deuxièmement, avez-vous trouvé des moyens pour raccourcir vos délais?
    Il se trouve qu'un rapport va parvenir au vérificateur général aujourd'hui pour l'informer de ce que nous faisons. Nous avons examiné de très près nos méthodes. J'ai dit que nous sommes allés faire le tour de nos clients pour déterminer les objectifs à fixer. Un élément essentiel de ce rapport ne portait pas en fait sur les délais, mais sur le fait que nous n'utilisions pas de cible pour nous fixer un objectif afin d'essayer d'obtenir de meilleurs délais. Nous avons examiné toutes nos activités et fixé des objectifs pour chacune d'elles au laboratoire en plus de ce qui concerne les données génétiques, dont nous discutons surtout aujourd'hui.
    Pour ce qui est des laboratoires auxquels on nous a comparés, tout vient du rapport de la GRC, si bien que c'était la GRC et la Suède, si je me souviens bien.
    Merci.
    Et le Forensic Science Service d'Angleterre aussi, je pense.
    Merci.
    Vous avez dit dans votre déclaration qu'il arrive que votre laboratoire fasse du travail pour des avocats de la défense dans des affaires criminelles?
    Oui, nous travaillons avec des avocats de la défense, mais nous essayons de collaborer aussi avec les procureurs. Nous ne faisons pas de travail sous le sceau du secret. Autrement dit, ils ne nous embauchent pas pour une affaire, par exemple. Mais s'ils veulent qu'un test en particulier soit effectué ou s'ils ont quelque chose qui doit être testé alors que la Couronne ne le voulait pas et qu'ils pensent que cela peut influer sur l'affaire, si nous pensons que c'est scientifiquement possible et que l'hypothèse peut être testée, alors nous allons accepter.
    Qui paie pour ça?
    C'est la province de l'Ontario qui paie. Nous l'acceptons comme un cas de plus.
    Nous essayons de traiter l'avocat de la défense de la même façon que nous traitons la police et les procureurs.
    J'ai une question de nature scientifique. Quel genre de prélèvement donne le meilleur ADN? Est-ce le cheveu ou la salive? Avez-vous une préférence? Une substance corporelle est-elle plus fiable qu'une autre?
    Pour bien comparer un prélèvement provenant d'un sujet à un prélèvement venu des lieux du crime, le sang est ce qu'il y a de mieux. C'est l'idéal parce qu'il est facile à prélever et qu'il est facile d'en tirer suffisamment d'ADN pour mener des analyses. Le sang est donc idéal.
    Pour ce qui est d'un prélèvement obtenu sur les lieux du crime, il est très difficile de répondre à cette question. Cela dépend de la quantité de l'échantillon, de ses conditions d'entreposage, etc. Comme Ray l'a dit, au laboratoire on reçoit de tout, de A à Z.
    Dans le cas d'un sujet, le sang est le meilleur prélèvement pour nous. Pour ce qui vient du lieu du crime, plus il y a de liquide organique, mieux c'est, mais encore une fois cela dépend des conditions d'entreposage.
    D'après mes souvenirs, quand un accusé est obligé de fournir un échantillon à la base de données, c'est habituellement des cheveux ou de la salive. Est-ce que je me trompe?
    C'est du sang.
    C'est du sang. Je me trompe.
    Merci.
    S'il n'y a pas d'autres questions, nous allons suspendre brièvement la séance pour permettre aux témoins de quitter la table.
    Merci beaucoup. Nous allons passer au huis clos. Votre témoignage nous a été très utile et nous vous en remercions. Merci encore.
    Nous interrompons nos travaux quelques instants.
    [Les délibérations se poursuivent à huis clos.]
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