SECU Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent de la sécurité publique et nationale
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 27 octobre 2009
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare ouverte la 36e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous nous penchons aujourd'hui sur la santé mentale et la toxicomanie dans le système correctionnel fédéral.
Nous aimerions souhaiter la bienvenue à M. Craig Jones, directeur général de la Société John Howard, et à M. Graham Stewart. Soyez les bienvenus, messieurs.
Habituellement, nous accordons à chaque témoin dix minutes pour sa déclaration préliminaire, puis nous passons à la période des questions et observations. Nous sommes impatients d'entendre vos déclarations.
Qui voudrait ouvrir le bal? M. Stewart. C'est à vous la parole.
Je comparais aujourd'hui devant vous à titre de coauteur de A Flawed Compass: A Human Rights Analysis of the Roadmap to Strengthening Public Safety. J'ai rédigé cet ouvrage avec Michael Jackson, professeur de droit à l'Université de la Colombie-Britannique.
Ayant pris ma retraite de la Société John Howard il y a deux ans, je ne représente pas cette société ni ne m'exprime en son nom devant vous aujourd'hui, tâche qui incombe maintenant à Craig Jones.
Avant l'adoption de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition en 1992, le Bureau du solliciteur général a publié neuf documents importants sur les problèmes en droit correctionnel canadien, dans le contexte particulier de la nouvelle charte. Ces documents étaient le résultat de huit années de consultations publiques intenses. Il convient de remarquer que la révision du droit correctionnel tenait compte de la question des droits de la personne.
En 2007, le ministre de la Sécurité publique a créé un comité qui devrait le conseiller sur les problèmes importants auxquels faisait face le Service correctionnel du Canada. Présidé par Rob Sampson, le comité a présenté son rapport, dont toutes les recommandations ont été acceptées sur-le-champ par le gouvernement, sans qu'aucune consultation publique ne soit menée. C'est ce qui est actuellement mis en oeuvre au sein du SCC, le Service correctionnel du Canada.
Je devrais préalablement vous faire part que Michael Jackson et moi adhérons aux recommandations du rapport Sampson portant sur la santé mentale et appuyant sans réserve, comme nous d'ailleurs, la stratégie élaborée en 2004 par le SSC en matière de santé mentale. Ce qu'il est essentiel de souligner cependant, c'est que les services de santé mentale sont au coeur du système correctionnel qui exerce sur eux une influence. Les autres services et politiques du SCC peuvent contrecarrer les plans les plus judicieux dans ce domaine comme les intentions les plus nobles du personnel. C'est pourquoi des recommandations du rapport portant sur d'autres questions viennent mettre gravement en péril de nombreuses recommandations en matière de santé mentale. Une telle incohérence s'explique en partie par le fait que le comité n'a absolument pas tenu compte des droits de la personne.
Pourquoi la politique correctionnelle doit-elle avoir comme pierre d'assise les droits de la personne? Entre autres parce que ces droits visent à protéger tous les citoyens contre les abus susceptibles d'être commis par l'État. Un système carcéral qui ne respecte pas les droits de la personne tolèrent nécessairement les abus. Aucune preuve ne montre qu'un traitement violent, arbitraire et injuste favorise la réinsertion sociale du détenu à sa libération. Quelle leçon tire-t-on d'un tel traitement? Que la raison du plus fort est toujours la meilleure, ce qui est souvent à l'origine des actes criminels commis. L'efficacité d'un système correctionnel passe par le respect des droits de la personne.
On n'a pas tenu compte du rapport du groupe de travail créé par le SCC en 1997 et présidé par Max Yalden, ancien président de la Commission canadienne des droits de la personne, ni de la mise en garde suivante qu'il avait alors fait:
Il est particulièrement important de reconnaître la nature fondamentale des engagements du Canada, compte tenu que certains membres de la société canadienne, y compris des employés du SCC, ne partagent pas nécessairement les valeurs qui sous-tendent l'approche du Service en matière de droits de la personne. Dans ce contexte, il est indispensable d'affirmer clairement que les principes et les dispositions stipulés dans la LSCMLC découlent de normes universelles qui sont sanctionnées par toutes les démocraties avancées auxquelles le Canada se compare, que le Service souscrit à ces normes et qu'il est fermement résolu à les appliquer dans les établissements correctionnels fédéraux.
Pourtant, voici la réponse qu'a donnée le ministre Van Loan à une réponse qui lui a été posée lors d'une entrevue menée à CFRB sur les critiques contenues dans A Flawed Compass:
Les détenus bénéficient de la pleine protection de la Charte des droits et libertés. Ils peuvent formuler leurs plaintes au Bureau de l'enquêteur correctionnel. Ce n'est pas leur protection qui est en cause, c'est plutôt celle des honnêtes canadiens contre les criminels?
Il n'y a aucun régime totalitaire qui ne respecte pas les droits de la personne tant que ceux-ci ne viennent pas menacer ce qu'on estime être la sécurité publique.
Nous investissons énormément pour garantir notre droit d'être protégés contre les actes criminels: corps policiers, service des poursuites, tribunaux, pénitenciers, surveillance, etc., et ce sans qu'il en coûte quoi que ce soit aux particuliers. Cependant, il n'existe pratiquement aucun mécanisme public qui nous aide à préserver notre droit d'être protégés contre les abus commis par l'État.
Dans les faits, la charte n'offre aucune protection garantie contre un gouvernement qui choisit de ne pas tenir compte des droits de la personne lorsque cela lui convient. Nous devons savoir que notre gouvernement comprend ce que sont les droits de la personne et qu'il y croit. Nous devons savoir que, pour lui, la défense des droits de la personne est le moteur de la démocratie et qu'i faut impérativement les protéger tant sur le plan juridique que dans les faits. Nous faisons fausse route si le plan pour l'avenir du Service correctionnel du Canada et le traitement des détenus fait fi des droits de la personne et si le ministre de la Sécurité publique nous affirme que les droits de la personne ne sont pas compatibles avec la sécurité publique.
Dans la foulée de l'analyse du Service correctionnel et du traitement des détenus aux prises avec des troubles mentaux, il se dégage de nombreuses questions fondamentales susceptibles d'orienter le travail de votre comité. En voici quelques-unes:
Un système qui respecte les droits de la personne et qui traite correctement les détenus peut-il isoler longtemps les personnes atteintes de troubles mentaux graves sans même leur fournir une évaluation et un traitement psychologiques approfondis?
Peut-on refuser d'assujettir au moins la décision de placer ou de maintenir un détenu en isolement préventif à un mécanisme d'arbitrage indépendant et peut-on prétendre que la charte et l'enquêteur correctionnel protègent les droits de la personne de ce détenu?
Peut-on tolérer qu'on prétende que le détenu atteint d'un trouble mental peut recourir à un mécanisme efficace de règlement des griefs, lorsqu'il est souvent dans l'impossibilité de le faire en raison de sa santé mentale ou de son analphabétisme?
Un système qui respecte les droits de la personne peut-il tolérer que le comité Sampson recommande de priver de certains droits résiduels les détenus en isolement et qu'une jeune femme de 19 ans aux prises avec un trouble mental se suicide en s'étranglant dans une cellule d'isolement en présence de gardiens qui avaient reçu l'ordre de ne pas intervenir à moins qu'elle ne cesse de respirer?
Pouvons-nous accepter un système correctionnel qui reconnaît que la plupart de ses détenus sont atteints de troubles mentaux graves et/ou sont toxicomanes, mais qui n'affecte que 2 p. 100 de son budget aux programmes mis en oeuvre pour s'attaquer à cette situation?
La toxicomanie touchant la plupart des détenus et allant souvent de pair avec la maladie mentale, pouvons-nous accepter qu'aucune des recommandations du comité Sampson relatives à la drogue ne traite de prévention, de réduction des préjudices ou de traitement, alors que 13 autres proposent d'être plus sévères, ce qui se traduit souvent par des droits de visite davantage restreints? Pouvons-nous adhérer à des recommandations qui considèrent le soutien familial et communautaire comme un problème de sécurité, sans reconnaître que le détenu et sa famille ont le droit de se voir et que ces visites sont essentielles au maintien du lien familial crucial?
Dans un système respectant les droits de la personne, les pénitenciers compteraient-ils davantage d'agents de correction que de soignants dans les ailes psychiatriques? En revanche, de nombreuses cliniques médico-légales de consultation externe n'ont aucun agent de correction. Comment pouvons-nous tolérer une telle disparité? Pouvons-nous accepter que les programmes aient de longues listes d'attente, alors que le comité Sampson affirme qu'il faut priver les détenus de leurs droits pour les motiver à y participer?
Pouvons-nous appuyer des recommandations visant à abolir la libération d'office, la seule solution qui s'offre parfois aux détenus atteints de troubles mentaux ou aux détenus démunis, tout en sachant que des milliers sont mis en liberté dans la collectivité sans soutien, sans supervision ou sans traitement de suivi? Pouvons-nous tolérer que les détenus aux prises avec une maladie mentale ou les détenus démunis soient incarcérés le plus longtemps possible, alors qu'on dit à la population et à ces détenus qu'ils peuvent être admissibles à la libération conditionnelle?
Pouvons-nous accepter que des modifications profondes voire radicales soient apportées au système correctionnel sans que leur efficacité ne soit avérée et malgré les données prouvant le contraire qui sont affichées sur le site Web du ministère?
Pouvons-nous tolérer qu'on supprime de la LSCMLC le principe de longue date de l'imposition aux détenus de la sanction la moins restrictive?
Pouvons-nous accepter de vagues promesses d'améliorations dans nos pénitenciers, alors que les politiques en matière de détermination de la peine et de libération graduelle réduiront inévitablement l'efficacité du système correctionnel en raison de l'augmentation considérable de la population carcérale, du manque d'installations et de la pénurie de personnel adéquatement formé?
Adhérerions-nous à la recommandation de construire une super-prison, un pénitencier ayant des niveaux de sécurité multiples et pouvant accueillir des catégories spéciales de détenu, et ce sans justifier comment il sera possible d'offrir des programmes et des services adaptés dans une telle structure monolithique?
Si nous avons à coeur le traitement efficace et approprié des détenus, confierons-nous la planification du futur régime correctionnel à un groupe de néophytes sous la présidence d'une personne qui est loin d'être impartiale, et donnerons-nous à ce groupe un vaste mandat, des ressources minimales et un délai impossible de 50 jours pour présenter des recommandations qui ne seront pas soumises à un mécanisme de consultation publique? Agirions-nous ainsi dans le domaine de la défense, dans celui de la santé ou dans celui du maintien de l'ordre?
Accepterions-nous une transformation du système correctionnel qui reposerait sur un rapport qui fait fi des droits de la personne ou ne reconnaît pas que le respect de ceux-ci doit être la pierre d'assise d'un système correctionnel efficace?
Nous sommes convaincus que le comité ne mènera pas à bien sa mission essentielle si ses principes, ses décisions et ses recommandations ne prônent pas sans équivoque que l'efficacité du système correctionnel et le traitement des détenus atteints de maladies mentales passent par le respect des droits de la personne.
Je vous remercie de votre attention.
Merci, monsieur le président. Merci, mesdames et messieurs les membres du comité.
Je présente mes commentaires à deux auditoires aujourd'hui: d'abord à vous, les membres du comité spécial, et ensuite aux historiens du futur.
Je vous dirai d'abord que je suis content d'avoir l'occasion de présenter au comité les opinions de la Société John Howard du Canada. Vous savez que nous sommes un organisme de bienfaisance sans but lucratif gouverné par des bénévoles qui s'engagent à promouvoir des réactions justes et humaines aux causes et aux conséquences du crime.
Nos 65 agents de première ligne offrent des programmes et des services fondés sur les preuves qui ont pour but d'assurer la réinsertion sûre et efficace des détenus à la fin de leurs peines. Nous offrons aussi de nombreux services aux jeunes pour les détourner des rouages de la justice pénale.
Nous souscrivons au principe selon lequel le crime est un problème communautaire et qu'une réaction intelligente devrait faire participer la collectivité. Au nom de nos agents de première ligne, de nos bénévoles et de nos conseils d'administration, nous vous remercions donc, vous les membres du comité, de nous donner la chance de vous apporter notre message.
Mon second auditoire, ce sont les gens de l'avenir. Je ne me fais pas d'illusions sur mes chances de modifier le programme du gouvernement en matière de lutte contre la criminalité, dont les composantes législatives contredisent les preuves, la logique et les principes de l'efficacité, de la justice et de la compassion. Le gouvernement a répété que son programme en matière de lutte contre la criminalité ne sera pas influencé par les preuves de ce qui réduit ou ne réduit pas la criminalité et de ce qui crée ou ne crée pas des collectivités plus sûres. Donc, si nous ne pouvons le persuader en nous appuyant sur les preuves de l'efficacité et sur les principes de la justice et de la compassion, nous parlerons aux historiens, aux criminologues et aux parlementaires du futur pour leur montrer que des objections ont été soulevées quand a été débattu le programme du gouvernement en matière de lutte contre la criminalité.
Il convient de préciser un peu le contexte. Les prisons sont le dépotoir où l'on jette les malades mentaux du Canada. Il ne devait pas en être ainsi lorsque, dans les années 70 et 80, les provinces ont fermé leurs hôpitaux psychiatriques et ont transféré les soins aux collectivités. Comme on le sait maintenant, les ressources destinées aux soins communautaires ne se sont jamais matérialisées et, à mesure que de plus en plus de gens ont cessé de prendre leurs médicaments ou ont été victimes des lacunes créées par les restrictions budgétaires dans les services sociaux provinciaux, beaucoup d'entre eux ont été criminalisés et ont fini dans les prisons fédérales. Le système carcéral fédéral est la seule structure de l'État qui ne peut pas dire « Désolé, toutes les places sont prises. » De sorte qu'aujourd'hui, nous sommes confrontés à une crise de la santé mentale et de la toxicomanie dans nos prisons fédérales.
Parallèlement, les gouvernements ont poursuivi une expérience utopiste d'ingénierie sociale appelée « la prohibition des drogues ». Cette politique transforme un problème de santé publique, l'usage des drogues et la toxicomanie, en un problème de justice criminelle et a pour effet de remplir les prisons de gens qui ont besoin de soins médicaux psychiatriques et de traitement de désintoxication.
Le gouvernement a renouvelé son engagement à poursuivre cette folie avec la Stratégie nationale antidrogue. Au mépris de l'expérience américaine et des preuves qui en ont été tirées, la Stratégie nationale antidrogue ajoute, pour la première fois, des peines obligatoires pour les crimes liés à la drogue. L'expérience américaine montre que la stratégie consistant à « sévir » contre les auteurs de délits liés à la drogue ne fait que remplir les prisons et les pénitenciers de petits utilisateurs dont beaucoup présentent manifestement des signes de maladie mentale qui, dans la plupart des cas, existait avant le début de leurs problèmes de toxicomanie.
La prohibition des drogues a eu aussi d'autres conséquences. Elle a produit une cohorte endurcie de jeunes hommes violents formés dans la brutalité impitoyable des bandes, qui se disputent les profits de la drogue, et c'est ce qui a créé le « profil changeant des délinquants » du SCC.
Bien que beaucoup d'entre eux souffrent des effets de l'utilisation prolongée des drogues, ces jeunes hommes n'ont pas tous une maladie mentale, mais ils créent de réels problèmes de gestion pour le Service correctionnel du Canada. Et les prisons sont devenues, comme l'a dit un Autochtone membre d'une bande, des « écoles de gladiateurs » pour les jeunes hommes qui séjournent périodiquement dans le système de la justice pénale.
Nos prisons fédérales sont donc devenues des écoles de gladiateurs où nous formons des jeunes hommes à l'art de la violence extrême et entreposons des malades mentaux. Tout cela était prévisible pour quiconque s'est soucié d'examiner l'expérience passée de la prohibition de l'alcool, mais comme nous refusons d'apprendre de l'histoire, nous sommes condamnés à toujours refaire les mêmes erreurs.
Et ceci nous amène au présent. J'exhorte le gouvernement fédéral à faire participer la Commission de la santé mentale du Canada à l'élaboration d'une stratégie nationale qui permettrait de réaliser une collaboration et une coordination entre la justice pénale fédérale/provinciale/territoriale, les systèmes correctionnels et de santé mentale pour, premièrement, promouvoir une offre harmonisée et rentable des services aux délinquants qui présentent des maladies mentales identifiables et, deuxièmement, appliquer des modèles novateurs de prestation communautaire des services pour ces délinquants et concentrer les ressources en particulier sur les délinquants atteints de troubles mentaux qui ont aussi des problèmes de toxicomanie et vivent dans des circonstances sociales désavantageuses, la population qui présente les plus grandes difficultés en matière de prestation de services et de réintégration sociale.
Une stratégie nationale permettant de s'attaquer aux problèmes de santé mentale dans le système correctionnel doit tenir compte du fait que la grande majorité des détenus du système correctionnel souffrent de troubles concomitants: ils ont un problème de santé mentale et un problème de toxicomanie, ce qui signifie que les deux problèmes doivent être traités simultanément.
Si le gouvernement atteint ses objectifs, on estime que la population actuelle pourrait augmenter de 3 000 lits pour les hommes et de 300 pour les femmes. Ce sont là des estimations prudentes car, jusqu'à présent, personne n'a rendu publics les coûts et les conséquences prévus du programme de lutte contre la criminalité. Mais nous pouvons faire certaines prévisions générales en nous fondant sur l'expérience américaine.
Tout d'abord, le surpeuplement accroît les tensions entre les détenus. Parmi les premiers effets notables du surpeuplement, il y a une élévation de la tension artérielle, tant systolique que diastolique. L'élévation de la tension artérielle ouvre la voie à des syndromes métaboliques, y compris le diabète et les maladies cardiovasculaires. Le premier effet évident sera donc de créer des conditions qui favoriseront l'apparition de problèmes de santé chroniques plus tard.
Le second effet immédiat, c'est que le surpeuplement augmente l'incidence de la transmission d'infections virales et bactériennes entre les détenus. Les détenus des prisons surpeuplées sont donc plus malades que les autres. Le surpeuplement rend aussi les prisons moins habitables parce que les polluants atmosphériques malodorants accentuent l'effet psychologique négatif et entraînent des perturbations du comportement et des symptômes de dépression.
À l'heure actuelle, le système fédéral a déjà un taux d'occupation double de 10 p. 100. Personne, à ma connaissance, n'a évalué le fardeau pour la santé de la population que représenteront les projets de loi sur la criminalité lorsqu'ils entreront en vigueur mais il est prudent de présumer que dans nos prisons — qui sont déjà des incubateurs pour le VIH et l'hépatite C — commenceront à pulluler de nombreuses autres maladies infectieuses lorsqu'elles se rempliront.
À ma connaissance, personne n'a évalué les conséquences de cette élévation de la prévalence des maladies infectieuses en termes de besoins de main-d'oeuvre dans le système fédéral. Il y a aussi des gens qui doivent travailler dans les prisons.
En deuxième lieu, il faut noter que la tension accroît le niveau de stress chez les détenus et le personnel. À mesure que la tension s'accroît, les membres du personnel se sentent de moins en moins en sécurité et limitent leurs contacts personnels avec les détenus. Ils adoptent une attitude plus prudente et gardent davantage leurs distances avec les détenus dans les rangées. Ceci contribue à accroître la tension en créant un cycle qui s'amplifie lui-même et dans lequel les membres du personnel et les détenus perçoivent un degré d'anxiété élevé dans le comportement non verbal les uns des autres. Les différends qui auraient pu être résolus par la conversation revêtent un caractère d'affrontement et les membres du personnel, pour se protéger, portent des vêtements plus lourds comme des vestes à l'épreuve des coups de couteau.
Le comportement symptomatique de la maladie mentale est parfois traité en prison comme un problème de discipline, plutôt qu'en tant que problème médical. Ce cycle dégrade rapidement la qualité du milieu de travail pour le personnel et les gardiens, un résultat que le comité devrait examiner attentivement parce que ce problème et d'autres finiront par inciter de bons agents des services correctionnels à quitter la profession. Comme le SCC le reconnaît, il a déjà du mal à attirer et à retenir du personnel. La croissance rapide du taux d'incarcération ne peut qu'aggraver ce problème.
Troisièmement, l'augmentation des niveaux de stress s'accompagne d'une hausse des tentatives d'automutilation et de suicide. Comme Alison Liebling l'a écrit, le suicide chez les détenus n'est pas exclusivement ou principalement un problème psychiatrique. Plusieurs voies psychologiques peuvent mener au suicide en prison et l'une d'elles est l'isolement social qui accompagne la gestion d'une population en croissance rapide. De plus, il y a au moins trois types différents de suicide en prison mentionnés dans les publications: les détenus condamnés à la prison à vie, les détenus atteints de troubles psychiatriques et ceux qui supportent mal la prison. Ces derniers sont généralement les plus jeunes et sont non violents. Ils correspondent exactement à la population qui sera visée par les nouvelles règles.
Liebling soutient que les femmes sont beaucoup plus nombreuses que les hommes en termes de blessures auto-infligées par détenu (jusqu'à 1,5 incident par semaine) et qu'il n'est pas rare chez les femmes en prison qu'il y ait de 20 à 30 incidents de « coupure » au cours de leur peine.
Quatrièmement, l'élévation du stress s'accompagne de problèmes de gestion de la population. À mesure que les populations deviennent plus difficiles à gérer et à contrôler, le personnel se tourne vers la ségrégation et d'autres formes de contrôle des délinquants, et celles-ci sont toujours infligées de façon disproportionnée à ceux qui sont le moins capables de s'adapter au rythme du changement et qui agissent mus par le désespoir et la frustration. Ici encore, les symptômes des troubles mentaux se manifestent sous forme de mauvaises conduites qui perturbent l'ordre dans l'établissement. Les personnes qui ont une maladie mentale se voient infliger des traitements particuliers et habituellement plus durs que ceux qu'on impose aux autres.
Le surpeuplement entraîne donc une élévation du degré de stress qui se transforme en hausse de la tension qui se manifeste sous forme de violence.
Je vais maintenant conclure.
Si le gouvernement est déterminé à accroître le taux d'incarcération au Canada, il imposera à court terme des coûts importants au Service correctionnel — des coûts qui se manifesteront dans la gestion sécuritaire de la population, dans les niveaux de stress du personnel et des détenus et dans l'incidence de la violence dans son ensemble. Le service devra combler beaucoup de postes vacants dans son personnel thérapeutique — travailleurs sociaux, psychologues et spécialistes de la toxicomanie — s'il veut éviter les pires effets de la surpopulation sur les détenus qui ont des troubles concomitants. Comme le responsable de l'enquête sur les services correctionnels vous l'a dit, « nombre d'établissements ne disposent pas du personnel, du financement ou de l'équipement nécessaires pour répondre de façon appropriée aux besoins des délinquants souffrant de troubles mentaux... Les équipes interdisciplinaires de professionnels de la santé mentale doivent être sur place, mais dans certains établissements, elles n'existent que de nom seulement. »
Je vous dirais en terminant qu'il se peut que nous nous dirigions vers une période très difficile pour le Service. Il faut de toute urgence que le gouvernement augmente la capacité du Service pour remédier à ces problèmes avec la diligence qu'il met à chercher à accroître le taux d'incarcération.
Je vous remercie du temps et de l'attention que vous avez consacrés à cette question urgente.
Merci.
Nous allons entreprendre sans plus tarder notre période de questions et commentaires en débutant avec l'opposition officielle.
Monsieur Holland, vous avez sept minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Un grand merci aux témoins qui sont venus comparaître devant nous aujourd'hui. Nous venons d'entendre un témoignage très objectif qui nous brosse un portrait inquiétant de l'orientation que nous sommes en train de prendre avec la politique de lutte contre la criminalité de ce gouvernement.
Permettez-moi d'abord, monsieur Jones, de citer un commentaire que vous avez formulé au début de votre déclaration. Vous avez indiqué que « le programme du gouvernement en matière de lutte contre la criminalité... contredit les preuves, la logique et les principes de l'efficacité, de la justice et de la compassion ». Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il s'agit là d'une affirmation percutante. Pourriez-vous nous indiquer plus précisément ce qui vous amène à penser de la sorte?
Nos voisins du Sud, les États-Unis, nous permettent de profiter d'une expérience sociale à grande échelle en matière d'incarcération et de conséquences du crime. Vous savez sans doute que les États-Unis sont les chefs de file mondiaux sur le plan de l'incarcération et que le quart des personnes détenues dans le monde entier se retrouvent dans une prison américaine. Environ 1 p. 100 de la population des États-Unis fait l'objet d'une forme quelconque de surveillance judiciaire. C'est un exercice qui a entraîné des dépenses faramineuses sans toutefois permettre de réduire les taux de criminalité dans la mesure où l'on aurait pu s'y attendre.
Ainsi l'expérience des États-Unis, au même titre que celle du Royaume-Uni, nous montre que l'augmentation du taux d'incarcération n'a pas pour effet de réduire le taux de criminalité. De fait, il y a de plus en plus d'indications, toujours en provenance de ces deux pays, qu'un taux d'incarcération accru pourrait plutôt faire grimper le taux de criminalité en raison du phénomène de la détentionnalisation suivant lequel l'expérience de l'incarcération enracine les criminels et rend plus difficile leur réinsertion sociale. De nombreuses preuves indiquent — certains documents apparaissent comme référence dans mon mémoire et je serai heureux de vous les fournir — que le simple fait d'augmenter le taux d'incarcération ne permet pas de réduire la criminalité.
Nous avons pu le constater, dans certains des exemples que vous avez donnés, notamment aux États-Unis et en Californie tout particulièrement, où le gouverneur a déclaré que le système est en train de crouler sous son propre poids. On a dû récemment remettre en liberté des milliers de prisonniers parce qu'on n'avait tout simplement pas de place pour eux, dans un État où le taux de récidive atteint maintenant 70 p. 100, un chiffre renversant... Sept détenus sur dix se rendent coupables de nouveaux crimes, alors que le taux correspondant est de 36 p. 100 au Canada.
Avez-vous l'impression que nous sommes en train d'emprunter la même trajectoire que les Américains ont amorcé au début des années 1980? Nous laissons-nous entraîner sur la même voie?
Nous ne sommes pas ici aujourd'hui pour étudier la philosophie de M. Jones et de la John Howard Society; nous nous intéressons aux problèmes de santé mentale et de toxicomanie dans nos prisons.
Je vois où M. Holland veut en venir avec ses questions et je comprends bien le but visé par M. Jones, mais il ne faudrait pas nous éloigner du sujet véritable de notre étude: les problèmes de santé mentale et de toxicomanie au sein du système correctionnel.
Très bien. J'ai apporté cette précision dès le départ et nous devrions continuer de nous en tenir à l'essentiel.
Poursuivez, monsieur Holland.
Il est extrêmement important de comprendre que pas moins de 80 p. 100, d'après ce que nous a dit M. Head, des détenus ont des problèmes de toxicomanie et, je crois — M. Jones pourra toujours me corriger si je me trompe — que la manière dont nous traitons les problèmes de santé mentale et de toxicomanie est au coeur de ce débat, d'autant plus que les Américains ont fait l'essai d'une approche particulière qui est maintenant appliquée ici au Canada.
Je veux donc savoir si vous êtes d'avis que cette approche mise à l'essai aux États-Unis correspond bel et bien à la trajectoire que nous empruntons actuellement.
Je pourrais peut-être poser la même question à M. Stewart. Suivons-nous la trace de nos voisins américains dans ce dossier et pouvons-nous nous attendre aux mêmes résultats catastrophiques?
Je crois que nous aurons droit à une version édulcorée de l'expérience américaine; je ne pense pas que nous irons jusqu'à l'hyperincarcération. Mais ce qu'il faut surtout retenir, c'est que si nous augmentons le taux d'incarcération au Canada, nous allons faire grimper l'incidence et la gravité des troubles de santé mentale au sein de notre système correctionnel, une problématique que le gouvernement se doit de prendre en considération s'il compte emprunter cette avenue.
Il est particulièrement important de bien savoir que nous ne pouvons pas considérer les services de santé mentale offerts dans les prisons sans tenir compte de la situation de l'établissement lui-même ou des autres politiques qui dictent notre gestion des services correctionnels.
Les problèmes créés aux États-Unis originent essentiellement de deux mesures : l'imposition de peines minimales obligatoires sévères, et la réduction des mécanismes de libération. On s'est ainsi retrouvé avec des peines de plus en plus rigoureuses. Une fois qu'on accepte comme principe que les peines minimales obligatoires vont enrayer le crime, l'intensification de l'activité criminelle se justifie d'elle-même. Le système américain s'est donc placé, en faisant appel à ces deux mécanismes, dans une situation que personne n'avait prédit et que personne ne croyait possible.
En 1974, le Canada avait un taux d'incarcération de 89 pour 100 000. Aux États-Unis, ce taux était de 159 personnes pour 100 000 habitants. Trente ans plus tard, notre taux d'incarcération est passé de 89 à 109, alors qu'il a grimpé à 750 pour 100 000 aux États-Unis. La différence est énorme.
Il faut bien comprendre qu'une croissance semblable vous oblige à transformer vos gymnases en dortoirs, ce qui diminue d'autant les loisirs des détenus. Vous n'avez plus suffisamment de cellules pour répondre à la demande. Vous ne disposez plus du personnel en place pour offrir les programmes et les services de santé mentale.
J'ai une autre question qui découle logiquement de ces considérations. Il ne fait aucun doute que cet exercice a entraîné d'énormes coûts sociaux et financiers, mais si l'on compare les taux de criminalité au Canada, où le taux d'incarcération est demeuré relativement stable, et ceux des États-Unis et du Royaume-Uni, dans quelle mesure cela a-t-il contribué à vraiment rendre les collectivités plus sûres? Autrement dit, compte tenu de ces milliards de dollars qui ont été consacrés aux prisons et de tous les problèmes sociaux que cela a provoqués, l'expérience n'a-t-elle pas démontré que les collectivités américaines n'en sont pas devenues plus sûres pour autant et que les États-Unis sont devenus en fait un pays plus dangereux?
Le taux de crimes contre les biens est à peu près semblable au Canada et aux États-Unis et il en a toujours été ainsi. Le taux de crimes avec violence, particulièrement au moyen d'une arme à feu, est environ trois fois plus élevé aux États-Unis. Au cours de la période de 30 ans à laquelle je faisais référence, la criminalité a suivi les mêmes tendances au Canada et aux États-Unis — je parle de tendances, pas de chiffres absolus. Nous paraissons avoir obtenu, sans miser sur l'incarcération, exactement les mêmes résultats que les Américains ont atteints en ayant recours à l'incarcération massive. Nous semblons donc avoir fait montre de beaucoup de perspicacité à cet égard en comparaison de nos voisins du Sud. Nous avons obtenu les mêmes avantages sans vraiment miser sur l'incarcération.
Dans les États qui dépensent maintenant davantage pour leurs prisons que...
Peut-être pouvons-nous garder ces observations pour un peu plus tard, car nous allons manquer de temps.
Monsieur Ménard.
[Français]
Je vous remercie beaucoup de votre présence.
Nous entendons, hélas, des gens prétendre que le chemin qu'ont suivi les États-Unis constitue la voie à suivre. Je pense exactement le contraire. Je vois que vos convictions sont basées sur des connaissances objectives que nous pouvons tous vérifier.
Cependant, je voudrais aller plus loin, relativement à l'étude que nous faisons présentement, qui porte sur le problème de la santé mentale dans les prisons. Je constate que nous avons créé au Québec, et que nous avons encore, l'Institut Philippe-Pinel, du nom de ce médecin français qui fut le premier à dire qu'il fallait détacher les fous et les traiter avec gentillesse. Je constate que cet institut n'a pas grandi suffisamment et qu'il est incapable de recevoir les cas les plus difficiles, c'est-à-dire les malades qui ont tué ou, encore, commis des crimes extrêmement violents.
Avez-vous des explications à nous donner, et pouvez-vous nous dire pourquoi, au Canada, nous n'avons pas plus d'institutions qui peuvent recevoir des malades mentaux qui ont eu des comportements criminels, qui ont représenté et qui peuvent représenter encore un danger important pour la sécurité d'autres personnes?
[Traduction]
Merci pour cette question à laquelle je me ferai un plaisir de répondre.
Lors de sa comparution devant votre comité, le commissaire du Service correctionnel a fait une déclaration — et je crois qu'elle est citée dans mon mémoire — qui jette un peu de lumière sur cet aspect. Permettez-moi de citer une partie de son témoignage du 29 mai 2006:
Quatre-vingt pour cent environ des délinquants ont des problèmes de toxicomanie vis-à-vis de l'alcool ou des drogues. Douze pour cent d'entre eux environ ont à l'heure actuelle un problème de santé mentale diagnostiqué et les difficultés qui vont avec.
Il s'agit là d'une façon essentiellement archaïque de voir les choses dans le contexte de notre nouvelle compréhension plus vaste de la concomitance des problèmes de santé mentale et de toxicomanie. Je suis heureux que vous ayez posé la question, car cela me permet de traiter directement de cet aspect. Jusqu'à tout récemment, il était généralement reconnu au sein de la population que les problèmes de toxicomanie et les troubles de santé mentale étaient essentiellement dissociables et pouvaient être traités séparément et, en outre, que certains cas de toxicomanie pouvaient être associés à des problèmes de comportement personnel et ainsi entraîner d'une certaine manière la stigmatisation des individus en question.
Nous avons maintenant une compréhension bien différente de la situation. Les preuves médicales et scientifiques aujourd'hui disponibles nous apprennent que les problèmes de toxicomanie se manifestent généralement après l'apparition d'un quelconque problème de santé mentale, avec un délai pouvant souvent atteindre jusqu'à 10 ans. Alors si nous interprétons la déclaration du commissaire à la lumière de ce que nous savons actuellement au sujet de l'association entre toxicomanie et santé mentale, nous serions justifiés de croire qu'environ 80 p. 100 des détenus actuellement incarcérés souffrent de troubles concomitants.
Comme vous vouliez savoir pourquoi il en est ainsi, je vous dirais que notre compréhension des problèmes de santé mentale et de toxicomanie a évolué très lentement. C'est la raison pour laquelle je vous exhorte à solliciter la contribution de la Commission de la santé mentale du Canada, car elle produit ce qui se fait de mieux en matière de preuves et de données scientifiques, et vous vous rendrez compte au fil de vos délibérations qu'il est impératif d'avoir recours à un modèle de traitement intégré pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et de toxicomanie. Dans la perspective d'une hausse du taux d'incarcération — et je présume que le gouvernement envisage sérieusement cette avenue — je m'inquiète des ressources qui deviendront nécessaires pour dispenser ces traitements, car le Service correctionnel se retrouve déjà dans l'impossibilité de combler les postes en question, de trouver le personnel thérapeutique dont il a besoin. C'est donc une préoccupation sur laquelle vous pourriez peut-être vous pencher.
[Français]
Croyez-vous que le type d'institutions pénitentiaires que nous avons est propice au traitement de personnes souffrant de maladie mentale, et de personnes dont les comportements dangereux sont une conséquence de la maladie mentale dont elles souffrent?
Vous appelez à une révolution dans la construction du type d'institutions dans lesquelles on les place. Pouvez-vous nous dire, aussi, quel genre de compétences il faudrait exiger des gens qui doivent assurer la sécurité du public face à ces personnes malades mentales?
[Traduction]
Je suis appelé à parcourir le pays et j'ai l'occasion de m'entretenir avec des psychiatres, des travailleurs sociaux et différents spécialistes qui travaillent aux premières lignes dans les prisons, et j'ai aussi quelques contacts au SCC. Tous me disent — et j'ai toutes les raisons de les croire — que le SCC a la capacité d'offrir des traitements d'avant-garde en matière de santé mentale et de toxicomanie. Le problème, c'est qu'il est extrêmement difficile de trouver des candidats pour occuper ces postes.
Pour répondre à votre première question, un centre de détention n'est pas l'endroit idéal pour traiter une maladie mentale. Je vais tâcher de ne pas minimiser le problème. Je dirais que plus le taux d'incarcération grimpe, moins l'environnement devient favorable au traitement des maladies mentales.
Plus la population carcérale sera nombreuse, plus les agents correctionnels qui doivent traiter régulièrement avec les détenus seront distants et prudents. Et c'est justement ce genre de contact personnel, le modelage de comportements pro-sociaux, qui est bénéfique pour les personnes souffrant de maladie mentale ou de toxicomanie. À mesure que la foule grandira, moins il y aura de ces contacts sociaux.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je suis heureux de pouvoir vos poser des questions. Je remplace M. Davies, qui doit prendre la parole à la Chambre.
Merci pour votre présentation. J'ai pu en entendre la majeure partie. J'ai aussi lu votre rapport. En tant qu'ancien ministre des Services correctionnels de l'Ontario, je sais assez bien ce qui se passe sur la scène provinciale. À l'époque, le système correctionnel provincial était aussi vaste que le système fédéral. Je ne sais pas si c'est toujours le cas, je me doute que... C'est à tout le moins l'état actuel des choses. Qui sait ce qui va se passer maintenant?
Mais avant cela, dans les années 1980, alors que j'étais conseiller municipal à la Ville de Hamilton, j'ai dirigé un groupe de travail chargé d'examiner les services communautaires offerts en matière de santé mentale aux personnes qui vivaient dans la rue. Nous avons été témoins du phénomène dont vous parlez à la page 2, le syndrome de la récidive. En effet, il se produit un incident quelconque, on appelle la police et on envoie l'individu à l'hôpital. Cela peut durer un certain moment. Il se peut qu'il en sorte, comme il se peut qu'il y reste. L'individu finit par se retrouver en prison pendant quelque temps, avant de retourner dans la rue. Et l'histoire se répète: la police, l'hôpital, la prison. C'est une véritable porte tournante. Et rien n'indique que les choses s'améliorent, pas plus du temps que j'étais ministre que maintenant.
Nous savons à quel point la situation est déplorable; en tout cas, elle l'est certainement en Ontario. Je ne sais pas si c'est la même chose à l'échelle du pays, mais on a décidé, à la fin des années 1960 et dans les années 1970, de désinstitutionnaliser les patients des hôpitaux psychiatriques, en les sortant des arrière-salles. Et c'est réellement ce que c'était: des arrière-salles cadenassées et sombres, des endroits oubliés de la société. L'argent ainsi économisé devait être réinvesti dans les services qui allaient devenir nécessaires dans la collectivité, sachant que ces personnes devaient être réintégrées dans la société. Cependant, cet argent a carrément été absorbé par le gouvernement de l'époque, qui l'a inscrit dans ses recettes générales. On a simplement déplacé le problème, en le sortant des prisons et des hôpitaux pour l'amener dans les rues et les foyers de deuxième niveau, comme on les appelle à Hamilton, qui offraient des services à ces personnes. Quoi qu'il en soit, je fais la parenthèse simplement pour vous donner un aperçu de la situation en Ontario.
L'exemple le plus près de nous est aux États-Unis, là où la population de détenus a connu une croissance fulgurante en très peu de temps. Le régime américain, si je ne m'abuse, repose toujours sur les pénitenciers privés. Au cours de la dernière décennie, la construction et l'exploitation de prisons a été pendant un certain temps l'industrie la plus florissante aux États-Unis. Si le but de construire une prison est de faire des profits, il est sensé d'y faire entrer plus de prisonniers pour mousser ses revenus.
Je suis curieux de savoir s'il y a des leçons à tirer de l'expérience des États-Unis avec ce genre de système, système que nous nous apprêtons à adopter, d'ailleurs. Que sait-on à propos des programmes de traitement de la toxicomanie, de l'embauche de professionnels? Autrement dit, est-ce que la privatisation du système a permis de remédier au problème qui nous occupe? Peut-on prendre exemple sur ce qui a été fait là-bas? Peut-on aussi apprendre quelque chose de leurs erreurs?
Je vous répondrai brièvement avant de céder la parole à Graham.
Ce que j'en conclus après avoir étudié le modèle américain, c'est que le Canada ne doit pas reproduire ce qui se fait aux États-Unis.
Je crois qu'il faut préciser d'emblée qu'un pénitencier ne peut jamais offrir un environnement propice aux traitements psychiatriques. Premièrement, on parle souvent de la psychiatrie comme le parent pauvre de la médecine au pays, comme l'a dit le sénateur Kirby. Il faut donc se douter qu'on n'accorde pas plus d'attention aux services psychiatriques offerts à l'intérieur des murs d'une prison. Ce n'est pas une grande priorité. La première vocation de nos établissements demeure celle d'une prison, pas celle d'un centre de traitement.
Il suffit de comparer les établissements psychiatriques des centres de détention avec les hôpitaux psychiatriques communautaires, comme l'Institut Philippe Pinel à Montréal (et je souhaite que vous aurez l'occasion de le visiter), pour s'apercevoir que ce sont deux mondes complètement à part. À l'Institut Pinel, il n'y a pas de gardiens sur les lieux, tandis que dans nos établissements fédéraux, il y a plus de gardiens que de travailleurs en santé mentale. Le personnel est assigné à des groupes fixes de détenus et il travaille avec eux continuellement, jour et nuit, dans les cours extérieures et dans les aires de loisirs. C'est un modèle totalement différent, et j'espère que vous aurez l'occasion de voir à quel point la situation est différente quand votre établissement est considéré avant tout comme un hôpital plutôt qu'une prison.
La réalité est que les établissements psychiatriques demeurent une considération de deuxième ordre au sein d'un grand système correctionnel. On accorde la priorité aux politiques qui portent sur les grands problèmes, les questions budgétaires et le fonctionnement global des établissements fédéraux, et il est très rare que l'on se penche sur les problèmes de santé mentale. Par exemple, on songe actuellement à abolir la libération d'office. Une telle mesure aurait un impact énorme sur les plus défavorisés, notamment les personnes souffrant de maladie mentale. On ne ferait que permettre à de plus en plus de gens aux prises avec de graves problèmes de santé mentale de retourner dans la collectivité sans soutien ni supervision. Ce genre d'approche en matière de justice pénale à l'égard des personnes atteintes de maladie mentale est tout simplement incompatible avec les méthodes éprouvées de traitement des maladies mentales.
Nous pouvons vous donner différents exemples de modèles appliqués au pays, qui pourraient s'avérer très révélateurs. Autrement, on se retrouve avec des systèmes qui ne font que recycler les gens, comme M. Christopherson l'a mentionné.
Si nous ne faisons rien pour changer les choses, que nous n'arrivons pas à prodiguer des traitements efficaces et que nous n'offrons pas un soutien adéquat aux personnes qui réintègrent la collectivité, étant aussi vulnérables qu'elles le sont et avec toutes les difficultés qu'elles vivent au jour le jour, vous pouvez être sûrs qu'elles vont se retrouver derrière les barreaux avant longtemps, et pas nécessairement pour des crimes graves. Fait intéressant, le département de recherche a démontré que le taux de récidivisme n'était pas plus élevé chez les personnes atteintes de maladie mentale que chez les détenus qui n'ont pas été désignés comme tels, mais c'est à cause de l'environnement social.
Merci beaucoup.
Je suis d'accord avec vous, monsieur Jones. C'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai dit que la philosophie entourant la construction de prisons (plus il y a de prisonniers, plus il y a de l'argent à faire) allait totalement à l'encontre de ce à quoi devrait ressembler le régime du Canada, car cela ne cadre pas du tout avec les valeurs du peuple canadien.
Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup.
Et merci à nos témoins de s'être déplacés aujourd'hui.
Je vais essayer de voir la situation sous un angle positif. Si nous nous concentrons uniquement sur les aspects négatifs, nous n'obtiendrons jamais les résultats voulus ou l'idéal que nous souhaitons atteindre.
Je pourrais vous énumérer quelques-unes des bonnes mesures qui ont été prises récemment, notamment avec la Commission de la santé mentale du Canada et les montants investis dans ce secteur dans le cadre de nos différents budgets. Je pourrais vous faire part des témoignages des gens de mon compté à propos de la fermeture des établissements dont nous avons parlé — et ils voient la chose d'un bon oeil — et de la nécessité d'offrir de meilleurs services de soutien communautaires.
Je pourrais vous raconter plein d'histoires, mais cela ne ferait pas avancer la dossier qui nous est confié aujourd'hui. Des députés ont demandé à ce qu'on se penche sur la question, car nous reconnaissons qu'elle est problématique. J'aimerais toutefois qu'on évite de condamner ceux qui n'ont peut-être pas la même vision philosophique des choses que nous.
Ma première question s'adresse à M. Jones, qui représente actuellement la Société John Howard. Pouvez-vous nous décrire le genre d'établissement qui pourrait permettre la prestation de traitements adéquats en matière de santé mentale et de toxicomanie? Pouvez-vous nous donner une idée? Vous pourriez peut-être situer cet établissement dans le contexte de notre régime actuel, car il faut bien commencer quelque part. J'aimerais savoir quels sont les changements que nous devrions apportés, selon vous, et que le grand public jugerait raisonnables et acceptables. Après tout, les membres du Parlement doivent rendre des comptes à la population.
Pouvez-vous nous donner vos impressions à ce sujet? Je ne vous demande pas de nous décrire l'établissement idéal, mais quelque chose de pratique et de réalisable, et qui diffère du modèle actuel.
Et si on ne peut rester dans les limites du pratique, on pourrait se permettre de faire preuve d'un peu d'innovation.
Merci pour cette modeste question. Je peux vous répondre en trois phrases, comme je peux le faire en trois volumes.
Vous me posez une question extrêmement difficile.
D'abord, il faut savoir si le grand public est vraiment au courant de ce qui se passe, ou s'il ignore...
D'accord.
À investissement égal, tout démontre que les traitements offerts en milieu communautaire seront beaucoup plus efficaces, et qu'ils permettront aussi de réduire davantage le taux de criminalité, que ceux donnés dans un établissement carcéral. Toutefois, si nous devons offrir ces traitements aux malades en milieu carcéral (et j'estime qu'il est déjà trop tard pour nombre d'entre eux lorsqu'ils franchissent le seuil de la prison), il est impératif de créer des conditions qui soient aussi humaines et justes que possible. Cela signifie qu'il faut réduire le niveau d'incarcération et se doter d'imminents psychiatres et d'excellents travailleurs en psychologie.
Je dois vous dire que la situation est très problématique pour le service en ce moment. On m'a expliqué qu'il n'était pas en mesure d'offrir des salaires concurrentiels aux personnes qu'il souhaite garder en poste. Les provinces n'hésitent pas d'ailleurs à faire du maraudage. J'ai eu l'occasion de discuter avec une psychiatre de Vancouver, qui est aussi une jeune maman. Elle doit faire une heure de route matin et soir, car elle travaille à l'extérieur de la ville et sa famille habite dans le centre-ville de Vancouver. C'est le genre de défi récurrent auquel le service est confronté en matière de ressources humaines.
J'ai aussi parlé à des gens qui travaillent au service, certains depuis de nombreuses années, qui soutiennent que les pratiques canadiennes sont parmi les plus efficaces au monde quand on dispose des ressources nécessaires pour les appliquer.
Mais je me dois de répéter que si l'objectif est d'obtenir les meilleurs résultats qui soient en matière de réduction de la criminalité et de rétablissement véritable des personnes souffrant de maladie mentale, le milieu carcéral n'est pas la meilleure solution. À investissement égal, les milieux communautaires sont beaucoup plus efficaces.
J'imagine qu'on ne peut traiter la question en profondeur en cinq minutes.
Dans les établissements carcéraux, on suit actuellement un système selon lequel un consultant s'occupe d'un nombre x de détenus. J'ai écouté ce que vous avez dit. Vous avez affirmé que 80 p. 100 des détenus de nos prisons sont aux prises avec un problème de toxicomanie ou de santé mentale. Pour le bénéfice des membres du grand public qui liront les délibérations de ce comité, affirmez-vous que 80 p. 100 de la population carcérale actuelle devrait recevoir des traitements dans la collectivité plutôt que dans le cadre du régime carcéral fédéral?
On pourrait tirer toutes sortes de conclusions.
Un des grands problèmes de la société canadienne, est c'est le cas aussi ailleurs, c'est que la maladie mentale est encore stigmatisée malgré les années qui ont passé. Nous savons par expérience que plus on stigmatise les personnes atteintes de maladie mentale, plus on aggrave leur cas. Il ne faut donc pas se surprendre que certaines d'entre elles sombrent dans la criminalité. C'est un changement culturel qu'il faut opérer, c'est-à-dire de mettre un terme à la stigmatisation dans notre société.
Permettez-moi d'attirer votre attention sur les propos tenus par le premier ministre lorsqu'il a lancé la Stratégie nationale antidrogue. Il a reproduit une forme de stigmatisation qui diverge totalement de ce que l'on comprend de la concomitance de la maladie mentale et de la toxicomanie. C'est un projet que nous voulons faire changer de cap, et c'est aussi ce que veut faire la Commission de la santé mentale du Canada.
Nous nous arrêterons ici.
Il nous reste environ six ou sept minutes, que je vais tenter de partager équitablement.
Pour trois ou quatre minutes, monsieur Kania, je vous prie.
Merci d'être ici.
J'ai quelques propositions à vous faire d'après ce que vous nous avez dit. Vous avez indiqué qu'environ 80 p. 100 de la population souffre d'une maladie mentale ou de troubles concomitants?
Il va s'en dire que ces personnes doivent recevoir des traitements adéquats en prison avant d'être libérées, n'est-ce pas?
Et si elles reçoivent effectivement des traitements adéquats en prison avant de pouvoir profiter d'une libération conditionnelle, de façon à ce qu'elles soient supervisées et réintégrées à la collectivité, leur transition se déroule beaucoup plus facilement et, l'élément clé, elles présentent moins de risque de récidive. Est-ce exact?
Je crois que les statistiques démontrent que chaque détenu coûte environ 101 000 $ par an; et pour chaque personne en liberté conditionnelle, il en coûte 25 000 $ par année. Est-ce bien cela?
Très bien.
Selon le programme de justice des Conservateurs, on pourrait s'attendre à ce que l'ensemble de la société et chaque personne retirent certains avantages de cette dépense supplémentaire de 75 000 $. N'est-ce pas?
Dites-moi, est-ce que le programme de justice actuel a réellement des retombées positives? Mais ce n'est peut-être pas l'objectif.
Certains qualifient les pénitenciers d'usines non polluantes à emplois bien rémunérés pour les gardiens de prison. Mais pour ce qui est de la réduction du taux de criminalité, cela n'a aucun effet.
Donc, en ce qui a trait à la réduction du taux de criminalité ou à la réintégration des prisonniers, ces réformes de justice qu'ils tentent de faire adopter par le Parlement vont aggraver le problème, plutôt que d'améliorer la situation actuelle. Est-ce exact?
On pourrait même aller plus loin. Il faudrait vous en enquérir auprès d'une autre personne, mais vous devez réellement poser des questions sur les conditions de travail au sein des prisons elles-mêmes, dans un contexte de surpopulation.
C'est juste. Mais, encore une fois, je vous dirais que ces différents changements qu'on propose sont tout à fait mauvais et contraires à de ce que nous devrions faire. Ils causeront du tort aux Canadiens en général parce que les cas de récidive augmenteront, en plus de nuire aux prisonniers parce que ceux-ci n'auront pas obtenu les traitements nécessaires avant d'être mis en liberté.
Êtes-vous tous les deux d'accord avec cette affirmation?
C'est le principal problème. Ainsi que l'a dit le député précédent, nous devons également tenir compte des aspects positifs, et il y en a. En particulier, la Stratégie en matière de santé mentale pour les délinquants lancée en 2004 par le Service correctionnel du Canada a été largement acceptée en tant que bonne stratégie. Elle ne transforme certainement pas les établissements psychiatriques en endroits idéaux, mais il s'agit d'une approche logique et systématique. Elle a également été appuyée par le comité Sampson.
Le problème, selon moi, c'est qu'il n'y a aucun espoir de mener à bien cette entreprise en raison des décisions contraires qu'on prend et des incidences qu'elles auront pour les institutions. Nous ne serons jamais capables de bâtir des établissements assez rapidement pour soutenir le rythme de la croissance. À elle seule, cette croissance de la population carcérale rendra quasiment impossible la mise en oeuvre de ce plan, même s'il s'agit d'un plan solide.
Voilà le problème. Il réside dans le contexte d'élaboration du plan, et non pas dans le plan en soi. Nous avons eu de bonnes idées, mais pourrons-nous les mettre en application?
D'après ce que j'ai compris, en ce moment, un fort pourcentage des détenus n'obtiennent pas les traitements dont ils ont besoin et, le moment venu, on ne pourra les mettre en liberté par le biais d'un mécanisme de libération conditionnelle parce qu'ils n'auront pas reçu le traitement voulu. Donc, en réalité, ce qui se produira avec ces modifications des conservateurs, c'est que les choses deviendront encore pires qu'elles ne le sont actuellement. N'est-ce pas?
Oui. Nous discutons notamment de la question de savoir si ces détenus devraient être dans la collectivité ou en prison. La réalité, c'est que tout le monde sera dans la collectivité. Tous les détenus sont libérés. Il s'agit simplement de savoir si ce sera maintenant ou plus tard. C'est une question de conditions de libération. Nous pouvons les laisser là un peu plus longtemps, car ils auront éventuellement accès à la libération conditionnelle — la libération d'office serait abolie —, puis les rejeter dans les communautés alors qu'ils auront reçu moins de traitements et aucun soutien. C'est une option.
Nous ne pouvons parler d'une amélioration des services de santé mentale dans les prisons sans tenir compte de ce contexte, à mon avis. Ces gens seront dans la collectivité. Reste à savoir si nous nous réserverons la possibilité de guider cette transition vers la collectivité en nous assurant que les ressources soient en place pour réduire le risque de récidive.
Monsieur le président, je suis resté ici à écouter les deux témoins, et je comprends leur position. Elle est certainement assez partisane. Monsieur Jones, vous avez mentionné si souvent le gouvernement actuel. Nous avons compris. Ce n'est pas la question qui nous occupe. Nous sommes ici pour parler de santé mentale, et nous avons les mêmes inquiétudes. Un certain nombre d'entre nous, de ce côté-ci, avons traité avec des spécialistes en santé mentale dans la rue. Nous comprenons cela. Nous savons que les provinces ont retiré ces services. Maintenant, pour une raison ou une autre, vous êtes enclins à croire que le gouvernement fédéral en est responsable.
J'en déduis que la solution serait selon vous d'éliminer les pénitenciers fédéraux. Si nous les éliminions, nous n'aurions plus tous ces problèmes dont vous avez parlé. M. Norlock vous a donné, je crois, l'occasion de nous préciser à quoi devrait ressembler un établissement correctionnel. Mais comment pourrions-nous modifier les établissements que notre pays, sous des gouvernements de toutes allégeances, a mis 100 ans à développer, pour en arriver au point dont vous nous parlez ici? Nous comprenons qu'il y a un problème. Nous sommes ceux qui avons demandé la réalisation de cette étude. Je n'arrive pas à comprendre de quoi vous parlez exactement.
Je pense que vous avez quelque peu paraphrasé de manière erronée les propos de M. Head. Si je ne m'abuse, M. Head a dit que le gouvernement avait déployé beaucoup d'efforts pour mettre la santé mentale à l'avant-plan dans les établissements. Il n'arrive pas à recruter le personnel dont il a besoin.
Quant à l'exemple que vous avez cité, j'ignore comment nous pourrions amener cette dame à se rapprocher de l'établissement carcéral. Elle habite où elle habite; l'établissement est là où il est. Si ce n'est de simplement ouvrir les portes, sauriez-vous me dire ce que nous pourrions faire pour régler le problème?
Oui, très brièvement, en ce qui concerne votre commentaire quant au fait que les conservateurs ont réclamé cette étude. Premièrement, c'est inexact, car c'est nous qui l'avons demandée. Deuxièmement, cela concerne des communications à huis clos, alors je ne crois pas que vous devriez en faire mention.
Discutons-en.
Je voudrais sincèrement donner aux témoins l'occasion de nous dire comment corriger le système, autrement qu'en éliminant simplement les établissements.
Eh bien, rapidement, nous avons un ensemble de propositions. Il y a la stratégie relative à la santé mentale. Si nous pouvions la réaliser, nous accomplirions beaucoup de progrès. Elle existe. Je suis ravi que ce comité qu'on a formé se penche sur ce problème particulier.
Ce que nous tentons de faire valoir, c'est qu'à moins de retirer les établissements psychiatriques du système carcéral... Ce qui, soit dit en passant, mérite réflexion selon moi. On ne retirera jamais du système la totalité des personnes aux prises avec un problème de santé mentale, mais pour ce qui est des soins continus aux malades chroniques, il faudrait déterminer si, en définitive, le système correctionnel fédéral devrait même administrer ces établissements.
Cela mis à part, il nous reste... Ce qui pose fondamentalement problème à mes yeux, c'est que l'orientation du système correctionnel minera tout potentiel d'agir en ce qui concerne cette stratégie. Celle-ci est concrète. Elle est assortie de fonds. Il y a une reconnaissance générale du fait qu'il s'agit d'une initiative positive.
Aujourd'hui, j'ai simplement tenté de faire valoir qu'on ne peut examiner la question de la santé mentale en faisant abstraction des autres orientations en matière de justice pénale.
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