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Nous allons ouvrir la séance de ce matin.
Nous tenons à remercier vos deux organisations de nous rencontrer aujourd’hui. Nous tenons la 41e séance du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Nord, dans le cadre de notre étude sur l'accès aux capitaux.
De la Banque de développement du Canada, nous recevons ce matin M. Robert Lajoie, vice-président, Financement et consultation pour le Manitoba, et directeur national, Services bancaires aux Autochtones; ainsi que M. John Connell, vice-président, Relations gouvernementales. Nous avons aussi avec nous des représentants du Conseil consultatif des terres des Premières Nations: le chef Austin Bear, qui en est administrateur et qui appartient à la Première Nation Muskoday, en Saskatchewan; et William McCue, administrateur lui aussi, et conseiller à l'île Georgina, en Ontario.
Nous avons eu une petite consultation préalable et, chef Bear, je crois que vous allez faire le premier témoignage, au nom du Conseil des terres des Premières Nations. Vous avez 10 minutes pour faire votre exposé. Nous entendrons ensuite l'exposé de la Banque de développement, puis nous passerons aux questions des députés.
Chef Bear, vous avez le micro pour les 10 prochaines minutes.
Bonjour, monsieur Richards; bonjour, mesdames et messieurs les députés.
Comme vous venez de l'entendre, on m’a présenté, et je m'appelle Austin Bear. Je suis le chef de la Première Nation crie Muskoday, du Traité no 6, qui est établie dans ce qui est aujourd'hui la Saskatchewan. Notre communauté vit à quelques kilomètres à peine de la ville de Prince Albert.
Merci, monsieur le président et membres du comité, d'avoir invité notre organisation à comparaître ce matin, et à vous parler des activités et des nouvelles concernant les Premières Nations de tout le pays.
Au nom du Conseil consultatif des terres, je vous remercie sincèrement de nous permettre de parler aujourd'hui de l'Accord-cadre relatif à la gestion des terres des Premières Nations et de ce qu’il nous a apporté en améliorant considérablement l'accès aux capitaux. Comme la majorité, sinon la totalité des Premières Nations peuvent en témoigner, la Loi sur les Indiens a eu un effet dévastateur sur nos communautés, économiquement, culturellement et socialement parlant. La faille fondamentale de ce texte est qu’il repose sur l'absence de toute reconnaissance des Premières Nations en tant que gouvernements, gouvernements qui sont certainement capables de prendre des décisions de façon compétente.
Ajoutons à cela une complète incertitude foncière, un lourd héritage de pollution, un cadastre flou et des problèmes de limites territoriales, un registre foncier qui ne s'appuie pas sur un règlement officiel et une bureaucratie inefficace qui répond à une loi datant d'il y a 100 ans. On comprend facilement pourquoi la situation crée de multiples problèmes.
Mes collègues et moi faisons partie d'un groupe croissant de Premières Nations qui, dans les années 1990, en ont eu assez de dépendre du gouvernement fédéral et de se tourner les pouces en attendant que les choses s'améliorent. En 1996, nous avons négocié et signé avec le Canada un accord qui nous soustrait à l'application de certaines des dispositions les plus révoltantes et les plus paternalistes de la Loi sur les Indiens; nous en avions grand besoin.
L'Accord-cadre reconnaît en premier lieu que nos communautés sont des gouvernements disposant de pouvoirs législatifs et administratifs sur nos terres et nos ressources naturelles. La terre, comme vous le savez sans doute, est inextricablement liée à nos cultures et à nos identités. L'accord-cadre est une expression du droit inhérent à l'autodétermination. Nous croyons que l'autorité du gouvernement vient du Créateur, pas du ministre des Affaires autochtones.
Cela peut vous sembler banal, mais il s'agit pour nous d'une question fondamentale de respect, qui est au coeur de nos systèmes de gouvernement. C’est même la base de nos cultures. En tant que principe de base de l'accord-cadre, il s'est traduit par des progrès concrets, mesurables et démontrés pour nos collectivités qui vivent dans l'ombre de la Loi sur les Indiens.
Pour beaucoup de nos Premières Nations, les principales retombées ont été le développement économique et un accès plus facile aux capitaux. Dans les communautés qui ont décidé d’adhérer à l’accord-cadre, on peut prendre en quelques jours ou quelques semaines les décisions qui demandaient des mois ou des années — quand on pouvait les prendre — sous le régime de la Loi sur les Indiens. Ainsi, on fait pratiquement disparaître les coûts fonciers inutiles qui se mesurent en temps et en autres dépenses tangibles. On diminue ou on élimine du même coup les occasions manquées à cause de ces interminables délais.
Avoir un statut juridique clair, pouvoir acquérir et détenir des propriétés, pouvoir emprunter et signer des contrats, pouvoir prendre de l'expansion et investir des capitaux, et pouvoir engager des poursuites judiciaires: voilà autant de droits dont les gouvernements des Premières Nations ne disposent pas clairement. Et autant de raisons qui découragent les prêteurs et les autres partenaires financiers.
Un registre foncier qui est appuyé sur un texte officiel, qui est électronique et qui permet un enregistrement instantané, voilà ce que nous avons créé en collaboration avec de grands acteurs du secteur financier et avec le gouvernement du Canada. Ces améliorations ont attiré l'attention non seulement des grandes institutions financières, mais aussi des investisseurs indépendants et des assureurs. Pour la première fois, on peut souscrire une assurance titre sur des terres situées dans une réserve. Tous ces avantages ont été obtenus sans risque de compromettre l'intégrité foncière des réserves.
La firme d'experts-conseils KPMG vient de terminer trois études sur des Premières Nations qui ont adopté leur propre code foncier; elle conclut que les Premières Nations participant à l'accord-cadre exécutent leurs transactions plus efficacement que le Canada. Elles réussissent à le faire pour moins cher que le Canada. Chez elles, le nombre de transactions augmente au rythme moyen de 9 % par an, alors que dans les Premières Nations fonctionnant sous le régime de la Loi sur les Indiens, ce nombre diminue en moyenne de 1 % chaque année.
L'accord-cadre outille mieux les Premières Nations pour qu'elles améliorent leurs systèmes et processus de gestion foncière, notamment sur les plans de la gouvernance et de la prise de décisions; il les aide aussi à profiter des occasions qui se présentent. De plus, l'accord-cadre soutient les efforts de développement économique dans les réserves. Il a contribué à y augmenter le nombre d'entreprises, et la majorité des nouvelles entreprises appartiennent à des Autochtones, ce qui révèle une augmentation de l'activité entrepreneuriale.
Les Premières Nations participantes diversifient leur économie en s'associant avec de nouveaux partenaires. Elles commencent à noter une évolution dans la qualité des emplois offerts, qui exigent maintenant un niveau supérieur d'instruction et de formation spécialisée. Récemment, des membres des Premières Nations ont créé au moins 2 000 emplois dans des collectivités des Premières Nations.
Les Premières Nations participantes ont connu une augmentation de l'investissement interne et de l'investissement externe dans leurs collectivités; dans un échantillon de 17 Premières Nations seulement, ces investissements se chiffrent à environ 101 millions de dollars. Précisons que ces investissements touchent plus de secteurs qu'avant: infrastructures matérielle et immatérielle; régénération d'entreprises; croissance et création d'entreprises.
Il vaut la peine de souligner que ces résultats ont exigé un travail énorme et soutenu, et le règlement de difficultés considérables; pourtant, aucune des Premières Nations ayant adhéré à l'accord-cadre n'a manifesté l'intention de renoncer et de revenir au régime de la Loi sur les Indiens — aucune des 54 ou 55 Premières Nations opérationnelles, aucune des 112 Premières Nations signataires.
Bien entendu, nous serons heureux de répondre à vos questions.
Merci, monsieur.
Merci, mesdames et messieurs du comité.
[Français]
Monsieur le président et membres distingués du comité, je vous remercie de l'invitation à me joindre à vous aujourd'hui afin d'appuyer votre étude sur l'accès au capital et de vous informer de l'appui offert aux entrepreneurs autochtones par la Banque de développement du Canada, ou BDC.
En tant que directeur national des Services bancaires aux Autochtones de BDC, je dirige une équipe dévouée et passionnée qui sert un marché des plus complexe, dynamique et affichant la plus forte croissance au pays.
[Traduction]
Pour ceux d'entre vous qui connaissez moins bien la BDC, je vais d'abord vous donner un aperçu de ses activités au service des entrepreneurs canadiens. Je parlerai ensuite de nos Services bancaires aux Autochtones, les SBA.
Pour commencer, permettez-moi de vous rappeler que la BDC est la seule banque au Canada qui se consacre exclusivement au soutien des entrepreneurs; nous nous concentrons sur l'aide aux petites et moyennes entreprises. En tant que prêteur complémentaire, nous avons une plus grande tolérance au risque que les autres institutions financières et nos tarifs sont fixés en conséquence. Cependant, nous ne sommes pas le prêteur de dernier recours. Je précise qu'en vertu des directives du Conseil du Trésor, la BDC doit être rentable. La BDC ne reçoit pas de crédits de l'État pour financer ses activités courantes. Elle paie d'ailleurs des dividendes au gouvernement du Canada depuis 1997.
[Français]
Nous sommes fiers d'aider plus de 30 000 PME canadiennes qui, à leur tour, emploient 674 000 Canadiens et génèrent 192 milliards de dollars en revenus annuels.
[Traduction]
Environ 15 % de nos clients, soit 5 000 débiteurs, sont des exportateurs. Nous offrons du financement, mais aussi du capital de croissance et de transfert d'entreprise, c'est-à-dire ce qu'on appelait le financement subordonné. Nous offrons aussi des services de consultation abordables et nous sommes le plus gros investisseur de capital de risque au Canada. Environ 1,25 % de nos 30 000 clients, soit 378, sont autochtones; leurs actifs valent 184 millions de dollars.
J’aimerais prendre quelques minutes pour parler de notre équipe. Les SBA sont disponibles dans tout le pays et sont dispensés par neuf employés dynamiques qui cumulent plus de 55 ans de service. Notre équipe veut soutenir la communauté autochtone. Ses membres occupent 13 postes bénévoles dans leur collectivité. Nous avons six bureaux répartis dans différentes régions du pays, mais nous collaborons avec les établissements financiers autochtones et les quelque 100 succursales de la BDC.
Le but des Services bancaires aux Autochtones est d'aider les entrepreneurs autochtones à réussir plus rapidement, en leur offrant exactement le soutien dont ils ont besoin. En plus d'offrir des solutions de financement souples et des services de consultation abordables, les SBA gèrent le capital destiné à assurer la croissance des entreprises autochtones, le Fonds de développement des entreprises autochtones et le concours national de plans d'affaires pour les jeunes Autochtones E-Spirit.
Les SBA ne se contentent pas d'offrir des services uniques: ils les offrent d'une manière qui respecte la culture autochtone et qui tient compte des défis particuliers auxquels font face les entreprises autochtones. D’ailleurs, je suis métis moi-même, et plusieurs membres de notre équipe qui grandit sont autochtones.
Les entrepreneurs autochtones puisent surtout dans leurs économies personnelles pour lancer leur entreprise, et même pour en financer le fonctionnement. Consciente de cette réalité, la BDC tente d'améliorer l'accès aux capitaux des entrepreneurs autochtones qui exploitent des entreprises viables dans les réserves ou en dehors de celles-ci, au moyen de ses solutions de financement à modalités souples.
Avec le capital destiné à assurer la croissance des entreprises autochtones, qu'ils soient établis dans une réserve ou non, les entrepreneurs autochtones peuvent demander jusqu'à 25 000 $ pour la mise sur pied d'une entreprise et jusqu'à 100 000 $ pour une entreprise existante. En plus, ils ont accès aux autres prêts de la BDC pour compléter leur financement. Nous n'exigeons pas de frais de dossier ni de frais annuels. Les entreprises que nous soutenons peuvent avoir un ratio d'endettement/fonds propres de 4:1, alors que la norme est 3:1. Nous remboursons aussi à la collectivité une partie de l'intérêt payé sur l'emprunt, en vertu d'une disposition spéciale.
Comme vous l'ont dit certains témoins que vous avez entendus dans le cadre de cette étude, les entrepreneurs autochtones établis à l'intérieur des réserves ne peuvent pas garantir leurs emprunts au moyen de leurs terres et de leurs actifs, en vertu de l'article 89 de la Loi sur les Indiens. Pour contourner cet obstacle, dans les réserves, la BDC octroie surtout ses prêts à des sociétés.
Cela a pour but de simplifier le processus d'exécution, vu l'interdiction de saisir ou de vendre des biens appartenant à des membres de la bande. Dans le cas de biens immobiliers, nous garantissons nos prêts par une hypothèque sur bien-fonds cédée à bail et obtenons une résolution du conseil de bande nous garantissant l'accès à ses terres en cas de défaut de remboursement.
Lorsque nous finançons des projets des Premières Nations, nous travaillons en étroite collaboration avec d'autres prêteurs comme des banques à charte, des coopératives de crédit et des institutions financières autochtones pour accorder des fonds à des entrepreneurs autochtones. Nous nous acquittons de notre mandat de prêteur complémentaire en prenant plus de risques sur les projets que nous finançons et en nous associant à d'autres prêteurs pour compenser un déficit de financement pour leurs projets. Ce faisant, nous fournissons un financement qui ne pourrait probablement pas être obtenu autrement tout en réduisant l'exposition au risque des autres prêteurs. En travaillant de concert avec les institutions financières autochtones, nous aidons ces dernières à atteindre un plus grand nombre d'entrepreneurs et à accorder plus de capitaux.
Notre Fonds de développement des entreprises autochtones, le FDEA, accorde des prêts de microcrédit aux entrepreneurs autochtones. Ces microprêts de 2 000 $ à 20 000 $ sont mis à disposition par l'entremise d'organisations autochtones locales partout au Canada, comme la Nuu-chah-nulth Economic Development Corporation, en Colombie-Britannique. Ces prêts sont jumelés à des activités de formation et de mentorat continu en gestion des compétences.
Ce fonds a été créé lorsque des entrepreneurs autochtones ont signalé un besoin de mentorat en gestion des affaires. Cette initiative facilite l'accès au capital d'entrepreneurs autochtones qui ne satisfont généralement pas aux conditions requises pour obtenir un prêt. De plus, la collectivité tire grandement parti des volets formation et mentorat qui y créent une capacité entrepreneuriale. Le FDEA sert également de modèle de gestion à d'autres collectivités.
Nos Services bancaires aux Autochtones, les SBA, visent également à conscientiser la population, particulièrement les jeunes autochtones. Comme vous l'avez entendu de la bouche d'autres témoins, l'acquisition de compétences en affaires et la prise de conscience des possibilités de travail indépendant sont des éléments clés de la réussite économique des collectivités des Premières Nations.
Notre moyen d'atteindre la jeunesse autochtone a été la mise en place du Concours de plans d'affaires pour les jeunes Autochtones E-Spirit. Comme il repose sur l'utilisation d'Internet, ce concours nous permet d'atteindre les jeunes qui vivent dans des régions reculées. Il comprend des modules, de l'accompagnement et l'élaboration de plans d'entreprise en ligne, en plus d'intégrer un volet de mentorat pour les Aînés. Les écoles peuvent aussi recevoir un ordinateur pour accéder aux ressources en ligne.
Les équipes E-Spirit doivent présenter un plan d'affaires complet ainsi qu'un enregistrement vidéo visant à promouvoir leur idée d'activité commerciale. Les prix décernés aux gagnants s'accompagnent de prix en argent: 4 000 $ pour le prix Or, 2 000 $ pour l'Argent et 1 000 $ pour le Bronze. De plus, des prix spéciaux de reconnaissance sont remis aux équipes qui ont apporté une contribution exceptionnelle dans diverses catégories. Le concours E-Spirit permet à de jeunes Autochtones de développer des compétences en gestion des affaires et contribue au développement de l'esprit d'entrepreneuriat dans l'ensemble de la collectivité. À ce jour, plus de 6 500 étudiants de niveau secondaire III, IV et V y ont participé.
[Français]
Pour conclure, je réaffirmerai notre engagement à mettre à profit le potentiel des PME autochtones. Nous travaillons afin d'assurer qu'elles aient tous les outils et l'appui nécessaires à leur réussite. Avec l'équipe des Services bancaires aux Autochtones, nos priorités sont d'améliorer l'expérience des clients et d'accroître notre rayon d'action ainsi que notre visibilité. Nous bâtissons notre équipe et nous développons davantage nos habilités ainsi que nos connaissances uniques à ce domaine, et ce, afin de mieux servir les entrepreneurs autochtones et de soutenir leur croissance.
Je vous remercie de votre attention. Ce sera pour nous un plaisir de répondre à vos questions.
Les dispositions de la Loi sur les Indiens en ce qui concerne la gestion des terres, tout comme les obstacles et les entraves qui existent dans ce domaine, se compliquent davantage, ou se renforcent davantage, du fait de ce que vous venez d'exprimer.
Les Premières Nations, et je parle de ma propre expérience, doivent accroître leur capacité d'éducation et de formation. Nous avons des étudiants qui veulent aller à l'université après leur secondaire. Chaque année, le financement disponible ne suffit que pour environ 60 % des besoins de ceux qui sont admissibles et prêts à amorcer des études postsecondaires.
L'autre côté de la médaille concerne, bien sûr, les possibilités de formation et d'emploi, tant dans la catégorie métiers que professions. Le manque de ressources et de soutien est flagrant, non seulement du côté des responsabilités et des débouchés offerts par le fédéral. On le voit dans les provinces aussi. La province crée des possibilités pour les Premières Nations et les autres peuples autochtones.
Le renforcement des capacités et des pratiques de bonne gouvernance, la planification financière, la planification de l'utilisation des terres sont des éléments déterminants si l'on veut optimiser l'utilisation des terres et créer de nouveaux débouchés fonciers en vue de s'assurer des revenus. Il reste beaucoup à faire de ce côté.
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Merci de me donner l'occasion de témoigner aujourd'hui. Comme je l'ai dit, grâce à la Mesure relative à la gestion des terres, notre collectivité a eu la chance de pouvoir augmenter ses revenus par la mise en valeur de ses terres. Il y a aussi la question de l'accès... La façon de continuer à améliorer notre situation passe par l'augmentation du financement, que ce soit au moyen d'un partenariat avec le gouvernement ou d'une augmentation des crédits alloués pour les infrastructures de nos collectivités.
Bien sûr, nous utilisons nos revenus autonomes. Nous le faisons en ce moment même pour quelque chose qui nous tient vraiment à coeur, notre réseau d'alimentation en eau, qui est devenu vétuste. Nous avons tenté de négocier avec le ministère des Affaires indiennes pour avoir accès aux capitaux nécessaires pour refaire ce réseau. Malheureusement, notre collectivité figure, comme tant d'autres, sur la longue liste d'attente des dépenses en immobilisations prioritaires, et je peux comprendre que ceux qui n'ont pas d'eau passent avant nous. Même si nous avons l'ordre de faire bouillir l'eau, nous sommes quand même au bas de la liste.
La nécessité d'emprunter des fonds ou d'utiliser nos revenus autonomes pour réparer l'infrastructure de notre collectivité mine notre capacité de soutenir d'autres priorités, comme l'éducation. Toutefois, comme je l'ai dit, nous finançons tout de même une part de l'éducation postsecondaire qui, je crois, est financée à 80 ou 85 %. Nous essayons, dans la mesure du possible, d'utiliser nos revenus autonomes pour compenser ce que nous ne pouvons pas obtenir du MAINC.
Je pense que ce dont nous avons besoin, c'est d'un partenariat avec des institutions financières. Ça fait plaisir d'entendre nos amis annoncer ces programmes. C'est la première fois que j'entends cela, et on dirait bien que j'aurai une nouvelle très intéressante à présenter à notre conseil. Si seulement nous pouvions obtenir du Canada qu'il s'engage à nous aider davantage dans les priorités qui concernent l'infrastructure, que ce soit au moyen de capitaux ou de l'accès au plan d'action, cela permettrait aux Premières Nations d'aller encore et de participer encore plus activement à l'économie. Nous ne voulons pas être obligés de faire appel à d'autres sources pour nous gouverner. Nous devrions être une Première Nation autonome et c'est ce que nous visons. Le fait d'assumer la gestion de nos terres contribue à la réalisation de cet objectif.
Austin, as-tu quelque chose à ajouter? Merci.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être ici ce matin. Nous avons eu des discussions vraiment intéressantes. Bien sûr, nous avons parlé de l'article 89 et des restrictions qu'il impose.
Monsieur Lajoie, vous avez parlé des hypothèques sur bien-fonds cédées à bail et de l'accès aux terres. Bien sûr, tout ceci est relié à la même question. Vous avez dit que pour effectuer les opérations dont vous aviez besoin, vous deviez obtenir une résolution de la bande. Nous voyons donc comment tous ces acteurs interagissent. Vous avez également parlé du cas où il y a un défaut et de ce que cela peut entraîner. Je me demande si vous pouvez nous parler, tout d'abord, des conséquences qui en résultent pour une entreprise qui suit ce processus particulier, lorsqu'il y a eu un défaut.
Le chef Bear pourrait peut-être ensuite donner le point de vue de l'autre côté, celui de la bande, en ce qui concerne les conséquences d'un défaut sur un prêt dans une collectivité.
Robert, vous pourriez peut-être commencer.
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En fait, l'article 89 de la Loi sur les Indiens ne s'applique plus à ma Première Nation.
M. Earl Dreeshen: Oui.
Chef Austin Bear: Cependant, s'il s'agit d'un cas où un membre de la réserve souhaite obtenir une hypothèque pour une résidence, il peut obtenir un droit enregistré sur la terre. Ce droit peut garantir une hypothèque — non pas la terre elle-même, parce que le droit de propriété n'appartient pas à notre Première Nation, mais le droit enregistré relatif à un bail peut faire l'objet d'une hypothèque.
C'est la même chose pour un entrepreneur. S'il s'agit d'agriculture, il y a des personnes qui détiennent des droits fonciers découlant d'un bail. Ce sont des droits à long terme et ces droits peuvent être hypothéqués à une banque. La garantie pour la banque sera les revenus que génère un tel droit. En cas de défaut, elle conclut une entente pour obtenir les revenus provenant de la terre en question.
Si rien ne marche, nous n'utilisons plus les garanties ministérielles, si elles existent encore. Si cela est nécessaire, si c'est une hypothèque résidentielle, la Première Nation de Muskoday garantira ce prêt ou, faute d'un meilleur terme, elle prendra en charge le prêt. Si le propriétaire de la résidence, le membre de la bande fait défaut, nous allons respecter les conditions de l'hypothèque et nous prendrons possession de cette résidence. Nous allons soit la vendre à un autre membre de la bande soit en faire un logement social. Ce sont là les possibilités.
Pour les prêts aux petites entreprises, c'est à peu près la même chose. Nous pouvons garantir les prêts accordés à des entrepreneurs. Nous en avons garanti un certain nombre à l'heure actuelle. Ce sont là les possibilités qui sont offertes. Pour les besoins de la banque ou des prêteurs, nous préparons toujours une résolution du conseil de bande. C'est la décision la plus solide que vous pouviez obtenir du chef et du conseil, de sorte que nous les fournissons. Ce ne sont pas des résolutions du conseil de bande prévues par la Loi sur les Indiens. Nous n'aimons pas beaucoup les appeler maintenant des résolutions du conseil de bande. Nous les appelons des résolutions relatives aux terres.
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Merci d'avoir posé cette question.
Du côté éducation, nous sensibilisons les jeunes avec le programme E-Spirit et nous essayons de les convaincre qu'il y a de l'avenir dans l'entrepreneuriat.
J'ai l'exemple d'une jeune entrepreneure. Elle avait quitté sa collectivité pour travailler dans un centre urbain. Elle voulait y revenir et ensuite, acheter un commerce. Il y avait un motel à vendre qui était situé tout près de la Première Nation; nous avons donc travaillé en étroite collaboration avec la IFA de la région et le prix d'achat était de 300 000 $. Elle n'avait pas beaucoup de fonds propres. Sa Première Nation lui en a donné une partie. L'IFA lui a accordé d'autres fonds propres et nous avons ainsi pu accorder une première hypothèque pour financer 180 000 $ sur le total de 300 000 $.
Une jeune entrepreneure, une Première Nation, un retour dans la collectivité, aucun antécédents commerciaux, quelques études — il est évident que cela représentait un risque sur le plan de l'expérience, mais un risque que nous étions prêts à courir parce qu'elle voulait travailler dans sa collectivité et favoriser la croissance de sa collectivité. C'est un cas où nous avons accordé un soutien à une jeune entrepreneure qui n'avait pas beaucoup d'expérience et nous allons continuer à l'aider si elle veut développer cette entreprise. Nous pouvons le faire grâce à nos services de consultant, au mentorat, au coaching, pour l'aider à consolider son entreprise. C'est un exemple.
Elle va peut-être devenir un modèle pour les autres jeunes de la collectivité. Nous aidons un entrepreneur à la fois. Il s'agit donc de sensibiliser les jeunes au programme E-Spirit en espérant que les étudiants comprendront qu'ils peuvent avoir un avenir comme entrepreneur. Nous aidons également les jeunes lorsqu'ils nous demandent de l'aide pour des projets.
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Je vous remercie. Je suis vraiment heureuse que vous ayez pris le temps de venir nous parler de cette question.
Chef Bear, vous avez en fait soulevé la question que j'allais vous poser; c'est la question des ajouts aux réserves, et le fait que le gouvernement devrait agir plus rapidement dans ce domaine.
Je sais que la Première Nation de Pic Mobert a un terrain et qu'elle a conclu une entente plus vaste sur l'utilisation des terres et elle attend simplement que le ministre la signe. Il aura fallu 22 ans pour finalement en arriver à ce stade. Je sais que le aurait déclaré ce qui suit:
Notre gouvernement s'est engagé à travailler avec les Premières Nations intéressées pour créer des emplois et des possibilités économiques et... Nous allons continuer à travailler avec les Premières Nations intéressées dans tout le Canada pour qu'elles puissent mettre en valeur leurs terres et leurs ressources, et établir ainsi des conditions qui permettront à ces collectivités d'être fortes, autonomes et prospères.
Nous avons un ministre qui a fait cette déclaration. En fait, mon collègue ici, M. Strahl, a parlé tout récemment au cours d'une émission de fin de soirée de « partenaires intéressés ».
J'aimerais obtenir une précision de votre part, chef Bear. Pensez-vous qu'il n'y a pas de Premières Nations qui soient des partenaires intéressés? Je crois que toutes les Premières Nations sont des partenaires intéressés. Elles veulent réaliser leurs projets, elles veulent que leurs collectivités soient des réussites. Est-ce que vous pensez la même chose?
Nous apprécions énormément tous les commentaires que nous obtenons aujourd'hui. Je vise en particulier l'expérience que vous avez acquise, chef Bear et M. McCue, pour ce qui est de la réalité concrète à laquelle font face les Premières Nations, à savoir les obstacles et les possibilités qui s'offrent à elles.
J'aimerais poser une question plus générale et vous demander, quelle est, d'après vous, l'importance de trouver une bonne solution et de la trouver maintenant? Je sais qu'au Manitoba et en Saskatchewan, les données démographiques sont telles que les peuples indigènes représentent une partie importante de la population des provinces, mais que l'on regarde la situation locale ou générale, on constate que ce sont les collectivités autochtones qui croissent le plus rapidement et où l'on retrouve le plus grand nombre de jeunes. Bien évidemment, cela impose de nombreuses responsabilités aux décideurs, qui peuvent assurer l'avenir de ces jeunes ou le détruire.
Je me demande si vous pourriez nous parler de ce sentiment d'urgence qu'il s'agisse d'aller de l'avant avec la LGTPN, ou des investissements pour l'éducation et la formation, du logement, des relations découlant des traités, et nous dire l'importance que nous, les parlementaires, devrions accorder à toutes ces questions et bien évidemment, avec le gouvernement. Je me demande si vous pouvez parler de cet aspect. Vous pourriez peut-être commencer, chef Bear.
C'est une très bonne question et une excellente remarque. C'est un aspect essentiel et absolument nécessaire, en particulier à ce moment de notre histoire, avec la poursuite de la construction de la nation du Canada, mais surtout, étant donné que les Premières Nations sont les bénéficiaires, les participantes et les partenaires intégrales de la construction du Canada et du renforcement de notre nation.
Nous ne pouvons plus tolérer en silence que le gouvernement dépense des centaines de millions de dollars en aide sociale et en services correctionnels, dont la plus grande partie est utilisée pour prendre soin des membres des Premières Nations dans le contexte le plus négatif que l'on puisse imaginer et comprendre. Nous devons transformer ces centaines de millions de dollars en possibilités, en la reconnaissance du fait que les Premières nations sont un élément essentiel de l'établissement et de la construction du Canada, notre nation, et ne pas les marginaliser et les laisser dépérir.
C'est ce dont nous devons convaincre les parlementaires, les comités comme le vôtre, les différentes parties du gouvernement qui siègent dans cette grande chambre et les Canadiens de toutes les régions de cette nation. C'est l'aspect sur lequel nous devons surtout insister lorsqu'on nous demande « Que pouvons-nous faire » et « Est-ce vraiment urgent? ». C'est ce que nous pouvons faire et la situation actuelle est urgente.
Merci.