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D'accord, nous allons entamer la séance. Je rappelle à tous que nous poursuivons notre étude sur l'examen de la version améliorée de la Nouvelle Charte. Nous avons accueilli plusieurs témoins par le passé, et nous allons continuer de le faire.
Nous sommes très heureux de recevoir Tim Laidler, directeur exécutif, Veterans Transition Network, et bien sûr Ron Griffis, qui a représenté ici à quelques reprises l'Association canadienne des vétérans des forces de la paix pour les Nations Unies.
Je vous souhaite la bienvenue à tous les deux.
Comme nous l'avons sans doute expliqué, nous allons entendre chacun de vos exposés durant 10 minutes avant de passer aux séries de questions.
Avez-vous décidé qui va commencer?
Ron, je suis content de vous voir. Allez-y.
Anciens combattants, membres du Comité permanent des anciens combattants, je vous salue au nom de la principale organisation canadienne d'anciens combattants des forces de la paix, l'Association canadienne des vétérans des forces de la paix pour les Nations Unies. Merci de nous avoir invités à témoigner devant votre comité.
L'exposé que je vais vous présenter résume les suggestions et l'information que j'ai reçues, à ma demande, de nos membres et de leurs familles, qui font partie de nos 28 chapitres partout au Canada.
Je souligne que j'étais membre du Groupe consultatif sur la Nouvelle Charte des anciens combattants, présidé par Muriel Westmorland. Nous avons soumis notre rapport final, intitulé Honorer notre engagement envers les nouveaux vétérans et leurs familles: la Charte évolutive en action, au gouvernement le 15 juin 2009. Très peu de progrès ont été accomplis depuis le dépôt de cet excellent rapport.
Nous savons pertinemment que l'ombudsman des vétérans Guy Parent a déjà témoigné devant votre comité. En principe, nous soutenons son témoignage, qui n'a omis aucun aspect de la question.
Nous appuyons aussi la lettre datée du 15 novembre 2013 que le groupe de consultation des anciens combattants a envoyée au ministre des Anciens Combattants, l'honorable . Ce groupe est composé de 20 organisations d'anciens combattants qui se réunissent régulièrement pour discuter de questions d'intérêt commun qui portent sur les anciens combattants et leurs familles. Notre organisation a participé à l'élaboration des conclusions mentionnées dans la lettre, dont une copie figure dans mon mémoire.
Cette lettre indique tout d'abord que l'allocation pour perte de revenus doit couvrir tous les revenus gagnés avant la libération, être versée durant toute la vie et être indexée, par exemple, selon les revenus de carrière projetés des militaires des Forces canadiennes.
Ensuite, la lettre précise qu'il faut augmenter l'indemnité d'invalidité maximale pour refléter ce qui est accordé aux travailleurs civils qui reçoivent des dommages-intérêts généraux devant les tribunaux.
Il est aussi question de l'iniquité qui doit cesser concernant l'allocation pour perte de revenus des réservistes de classes A et B en raison de blessures attribuables au service, qui couvre moins de 90 jours.
Le rapport présenté par Mme Westmorland met également l'accent sur les familles, en particulier les personnes soignantes, les épouses ou les conjointes. C'est très embarrassant que le gouvernement ait complètement ignoré cet aspect de la vie des anciens combattants. Le moins qu'on puisse dire, c'est que les personnes soignantes, les conjointes et les épouses ne sont pas respectées et sont oubliées.
Bien des partenaires d'anciens combattants ont laissé passer un nombre incalculable d'occasions d'études et d'emplois pour être des conjointes de militaires. Leur loyauté envers leurs conjoints réduit leur développement spirituel et leur capacité de progresser sensiblement dans leur domaine et de mener des études supérieures.
Le livre extrêmement intéressant et révélateur de Dianne Collier, intitulé Hurry Up and Wait: An Inside Look at Life as a Canadian Military Wife et publié aux éditions Creative Bound de Carp, en Ontario, détaille de façon très réaliste la vie de conjointe de militaire et, par extension, de conjointe d'ancien combattant.
Sans conteste, il est accepté de nos jours qu'un ménage canadien doit reposer sur le conjoint et la conjointe ou le mari et l'épouse, qui occupent tous les deux des emplois rémunérateurs à l'extérieur de la maison. Si l'ancien combattant prend part à un des nombreux programmes financés par Anciens Combattants Canada et que sa conjointe est la principale personne qui lui donne des soins à la maison, il est tout à fait impossible pour l'un ou l'autre de participer à des programmes qui aident à assumer les responsabilités financières futures et à économiser en vue de la retraite.
Le rapport de l'ombudsman des vétérans présente très clairement les embûches que rencontrent les militaires blessés au service du Canada. Il laisse entendre respectueusement que, si la conjointe est la principale personne qui donne des soins au militaire, ils sont destinés à vivre sous le seuil ou à la limite de la pauvreté, selon la définition acceptée au Canada.
Les conjointes de militaires des Forces canadiennes sont traitées comme des citoyennes de deuxième classe, car en étant fidèles à leurs conjoints qui servaient dans les forces et en restant à la maison, elles ne peuvent pas gagner leur vie convenablement ou mener des études supérieures. De telles études leur permettraient d'obtenir des emplois pour aller de l'avant avec leurs conjoints et d'accéder à de nouvelles fonctions.
Les comptables, les infirmières, les policiers, les travailleurs sociaux, les professionnels dentaires, les administrateurs, les psychologues, les gens d'affaires, etc. comptent parmi les nombreuses professions qui permettent une réorientation de carrière. Il faut que l'ancien combattant ou le militaire des Forces canadiennes grièvement blessé qui doit prendre sa retraite ou travailler dans sa communauté voie plus qu'une faible lueur au bout du tunnel.
Je signale respectueusement qu'il est temps d'apporter des changements à la Nouvelle Charte des anciens combattants. Plusieurs groupes consultatifs d'experts bien intentionnés et respectés ont formulé bien plus de 200 suggestions pour améliorer cette Charte. Sauf votre respect, le gouvernement a pris bien peu de mesures. Je vous invite à apporter les changements proposés à la Nouvelle Charte des anciens combattants et à donner aux anciens combattants du Canada les soins et le soutien adéquats, ainsi que les indemnités qu'ils méritent et auxquelles ils ont droit.
Parmi les personnes à qui j'ai demandé conseil avant mon témoignage, Gloria et Ed Blizzard de Wilmot, en Nouvelle-Écosse, se trouvent exactement dans la catégorie dont je viens de parler. M. Blizzard ne va pas bien. Si Mme Blizzard lui survit, elle va rencontrer des difficultés. Ce n'est qu'un exemple parmi les très nombreux cas de militaires qui vont éprouver des problèmes.
J'ai inclus respectueusement ce rapport dans mon mémoire. Merci beaucoup de votre attention.
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Je vous remercie tous de m’avoir invité.
J’apprécie que le gouvernement consacre du temps à l’examen de la Nouvelle Charte des anciens combattants. En ma qualité de directeur exécutif du Réseau de transition des vétérans, d’ancien combattant ayant servi en Afghanistan et subi des blessures de stress opérationnel, mais qui s’en est bien sorti, je peux dire que des améliorations méritent d’être apportées.
Cela dit, je tiens aussi à dire qu’il y a des résultats positifs et à souligner les bonnes parties de la Nouvelle Charte des anciens combattants qu’il faut conserver. J’espère que le projet de loi ne sera pas entièrement rejeté, car notre programme a été lancé en 1997 ainsi que peuvent l’attester nos cliniciens qui m’ont demandé de mentionner ici aujourd’hui qu’il y a un grand nombre de plaintes au sujet de la Loi sur les pensions. Je voulais que ce soit clair dès le début.
Pour mieux informer le comité, je vais parler un peu de moi, de mes antécédents et de mes expériences avec les anciens combattants qui ont participé à mon programme et aux noms desquels je m’adresse à vous.
J’ai été déployé en Afghanistan en 2008. J’avais 22 ans et j’étais chargé de protéger les convois d’approvisionnement qui traversaient Kandahar pour se rendre aux bases opérationnelles de la région. C’était évidemment une mission des plus stressantes et dangereuses.
Cependant, je peux dire sans aucun doute que durant mon séjour en Afghanistan, je n’avais ni peur ni d’appréhension à entreprendre cette mission. Il n’était pas nécessaire qu’un officier donne l’ordre, à moi ou à mes collègues, d’accomplir cette mission. Nous étions jeunes et fonceurs et nous voulions prendre ces risques. C’était la raison de notre entraînement et de notre engagement dans les Forces canadiennes. Pour nous, c’était un atout et je crois que c’est cette attitude qui a fait de nous des soldats efficaces sur le champ de bataille, qui nous a incités à prendre ces risques et à engager l’ennemi.
Je me souviens d’une fois où nous devions récupérer un véhicule aérien qui s’était écrasé au beau milieu de nulle part. Pour y arriver nous devions traverser un champ de mines, un ancien champ de mines russe. De nombreux véhicules afghans qui avaient explosé jonchaient le long du chemin qui avait été tracé un peu à la devinette et en testant le sol. Nous savions pertinemment que les fortes pluies pouvaient déplacer des mines. Je me trouvais dans le véhicule en tête du convoi et il y avait de fortes chances que nous passions sur une mine, mais jamais l’idée de mourir ne m’a effleuré.
Je vous relate cet incident pour souligner à quel point il est nécessaire de maîtriser ses émotions pour accomplir efficacement la mission. Il faut maîtriser aussi ses émotions dans d’autres métiers au Canada. Pensez aux policiers ou à ceux qui travaillent dans la haute finance, dans certaines situations extrêmement stressantes il faut apprendre à changer nos réactions émotionnelles.
Lorsque nous ramenons au Canada quelqu’un qui a vécu ce genre d’expérience, il n’est pas suffisant de dire que c’est une victime de trouble de stress post-traumatique, car, cela ne définit pas vraiment la complexité du problème qu'il vit. La majorité des anciens combattants — plus de 400 participent actuellement à notre programme — se trouvent dans une situation où ils doivent adopter une nouvelle expression émotionnelle, changer le comportement qui leur a permis de s’en sortir dans des endroits comme l’Afghanistan et comment ils réussiront désormais ici au Canada.
Le lien que cela a avec la Nouvelle Charte des anciens combattants est que pour bénéficier de nombre des avantages, il faut avoir un diagnostic d’ESPT ou une libération pour raisons médicales fournie par l’armée. L’une des recommandations que je formule à la fin de ma déclaration vise à régler cette question, car les statistiques montrent qu’actuellement seulement 14 % des anciens combattants ayant servi dans les forces ont recours aux services offerts par le ministère des Anciens Combattants. La majorité des personnes qui participent à notre programme n’ont jamais recouru aux services offerts par le gouvernement. Nous avons tous très souvent entendu dire que la stigmatisation, particulièrement en ce qui concerne la santé mentale, est l’un des facteurs contributifs. Il y a aussi le fait que les formalités administratives ne facilitent pas le traitement des demandes de prestations.
Encore une fois, je pense qu’il existe des points très positifs tels que les allocations pour perte de revenus qui permettent aux gens de recevoir une bourse d’études s’élevant jusqu’à 75 000 $ pour se recycler. C’est un excellent programme, mais qui est tout simplement difficile d’accès pour quelqu’un qui — sachant que les anciens combattants sont très frustrés du fait qu’il n’y a jamais assez de services pour eux — hésite à demander de l’aide. Cela aussi incite à penser que le gouvernement n’en fait pas assez.
Pour revenir au Réseau de transition des vétérans, le programme que je dirige, nous offrons un programme de 10 jours qui aide les hommes et les femmes en période de transition. Ils n’ont pas de diagnostic complet indiquant qu’ils sont atteints de troubles de stress post-traumatique, de dépression ou d’autres troubles de santé mentale et, par conséquent, il arrive souvent qu’ils ne soient pas admissibles à du counselling ou à d’autres programmes. Ils participeront d’abord à notre programme où ils peuvent se consulter mutuellement.
C’est un travail de groupe, d’égal à égal. Ils prennent conscience de leur état et voient ce que font leurs pairs pour s’en sortir. Beaucoup ont recours à d’autres services. Chaque année, nous présentons à l’Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans une étude sur l’évaluation par les pairs qui montre les effets positifs de notre programme sur leurs échelles d’évaluation de l’ESPT et de la dépression. Nous évaluons aussi la qualité de vie.
Puisque je parle de notre programme, j’en profite pour remercier le comité de l’aide qu’il nous a accordée pour obtenir un financement du fédéral en 2012. J’ai eu le privilège de faire un exposé ici en décembre 2011, et 11 mois après, nous étions une organisation nationale financée par le fédéral. Le comité doit s’en attribuer le mérite; ce qui prouve que l'on peut aboutir à des résultats positifs en travaillant dans le système.
J’arrive à mes derniers points sur les recommandations.
Celle à laquelle j’ai fait allusion vise à supprimer l’exigence voulant que les anciens combattants doivent avoir des troubles de santé mentale ou des troubles physiques pour être admissibles aux prestations. J’ai beaucoup entendu parler d'un « GI Bill » canadien au sein de notre communauté, d'une aide financière aux anciens combattants les plus susceptibles d’avoir des troubles de stress post-traumatique ou d’autres troubles de santé mentale, ceux qui ont combattu dans des endroits comme l’Afghanistan ou la Bosnie quand la situation était vraiment difficile. Les statistiques montrent qu’ils sont prédisposés à avoir des troubles de santé mentale et des difficultés à retourner sur le marché du travail.
Si nous pouvions avoir une sorte de « GI Bill » comme les Américains ont, et qui permettrait à ces personnes de reprendre des études, peu importe qu’ils soient blessés ou non, cela offrira à nos anciens combattants de fortes chances de réintégrer rapidement la société avant qu’ils ne passent 5, 6 ou 10 ans à vivre avec des problèmes et que leur état s’empire au point de nécessiter une intervention de la collectivité médicale.
Mon dernier point porte sur les problèmes liés au Tribunal des anciens combattants (révision et appel). Pour beaucoup d’anciens combattants, s'y présenter est une détresse psychologique éprouvante et souvent lorsqu’ils suivent notre programme, nous devons consacrer du temps à composer avec les émotions qu'ils ont ressenties au tribunal. Souvent, il ne s’agit que de la façon dont ils sont traités, pas vraiment du contenu. Ils ont l’impression de faire l'aumône, de se battre et d'implorer qu’on leur donne leurs droits. Ce qui va à l’encontre de l’éthique militaire relative à l’autosuffisance et la compétence. Il serait très utile de prendre des mesures pour régler ce problème. Je recommanderais de supprimer totalement ce tribunal et de permettre aux anciens combattants de régler leurs différends devant une cour de justice.
Voilà qui met fin à ma déclaration. Merci beaucoup.
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Je vous remercie de nouveau, monsieur le président.
Je tiens surtout à remercier les témoins d'être parmi nous et de participer à nos travaux sur la révision de la Nouvelle Charte des anciens combattants. C'est très apprécié.
Monsieur Laidler, vous avez mis en avant un programme par l'entremise du Réseau de transition des vétérans. On dit qu'il est vraiment très efficace. Je vous remercie des efforts qui ont été fournis en ce sens et j'espère que vous allez poursuivre ce bon travail.
Je crois savoir que votre groupe a élaboré ce programme de concert avec les organismes Wounded Warriors et True Patriot Love afin de permettre aux vétérans, surtout ceux de l'Ontario, de la Colombie-Britannique et des Maritimes, d'accéder à des ressources. Toutefois, il ne semble pas disponible au Québec.
J'aimerais que vous nous disiez quelles étapes nous devrions suivre et de quelles ressources, financières ou autres, vous auriez besoin pour rendre cet excellent programme accessible d'un océan à l'autre, en passant par le Québec. Je trouve désolant qu'il n'y soit pas disponible pour le moment.
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Merci pour la question sur le financement du programme et sa capacité d’expansion au Québec.
Vous avez raison. Nous avons commencé en étant financés par la Légion royale canadienne de la Colombie-Britannique, puis nous nous sommes agrandis à l’échelle nationale grâce à l’aide de la Direction nationale de la Légion royale canadienne, représentée ici aujourd’hui; une aide de 500 000 $ équivalente au financement offert par le gouvernement fédéral. Depuis, Wounded Warriors et la Fondation La patrie sur le coeur ont aussi financé notre programme et recueilli un certain pourcentage d’anciens combattants qui étaient passés à travers les mailles du filet entre leurs services et ceux des ministères de la Défense nationale et des Anciens Combattants.
Je suis heureux d’annoncer aujourd’hui que la Fondation La patrie sur le coeur nous a octroyé 50 000 $ de plus l’an dernier pour les frais de construction d’une clinique où les services seront offerts en français, nous pourrions donc réaliser nos programmes au Québec cette année. Si les résultats sont positifs, si les cliniciens peuvent offrir le haut niveau de qualité dans la prestation de nos services, le programme sera mis en oeuvre en français d’ici la fin de l’année au Québec.
J’ajoute que nous formerons alors des cliniciennes qui exécuteront le programme, un programme destiné uniquement aux femmes car nous offrons un counseling propre à chaque sexe.
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Monsieur le président, c’est un grand plaisir et un honneur pour moi d’être de retour au comité. En tant qu’ancien combattant et de député, je suis ravi d’être ici.
J'ai entendu mentionner le terme « fonceur » et l’expression « dépêchez-vous et attendez ». Je les ai entendus très souvent quand j’étais membre des FC. L'expression était destinée aux membres en service et à leurs conjoints. Je me souviens très bien de cette expression.
J’ai quelques questions que j’adresse en particulier à M. Griffis.
Tim, je vous connais depuis quelque temps. J’estime que le programme à l’élaboration duquel vous avez contribué et qui a été fondé par M. Westwood est de tout premier ordre. Je pense que plus il y a de personnes — qu'elles défendent les intérêts de la Légion ou ceux de la Fondation La patrie sur le coeur — qui voient l'effet du programme, mieux c'est. Je suis heureux d’apprendre que vous allez offrir vos services en français, car il est important de le faire. Je vous remercie aussi pour vos observations.
Monsieur Griffis, je tiens à vous féliciter pour votre rôle de fournisseur de soins. J’ai participé, avec d’autres personnes, à la création de la Fondation La patrie sur le coeur en partie parce que Rick Hillier avait lancé le Fonds pour les familles des militaires et que les problèmes et les contraintes que connaissent les familles étaient discutés plus ouvertement. C’est une question que les gouvernements qui se sont succédé ces cinquante dernières années n’ont pas abordée comme il aurait fallu. Je vous remercie donc de l’avoir soulevée. Les Canadiens la comprennent beaucoup mieux maintenant. En tant que plus grand contributeur du Fonds pour les familles des militaires, la Fondation La patrie sur le coeur lui accordait une attention particulière.
Ma question porte sur le montant maximal de l'indemnisation pour dommages corporels qui selon moi, en tant qu’ancien combattant et aussi avocat, engendre beaucoup de confusion dans les tribunaux civils.
Dans un tribunal civil, l’évaluation des dommages est essentiellement un paiement unique. Le gouvernement étudie actuellement la possibilité d’un versement unique, est-ce approprié? Cela va-t-il régler la question? Les tribunaux civils ne tiennent pas compte du fait que les anciens combattants recevront une aide pour suivre des études ou une formation et, souvent, des services de soutien à domicile dans le cadre du Programme pour l’autonomie des anciens combattants en fonction de leur statut, un déménagement après leur carrière militaire, une aide à long terme avec des modifications nécessaires à domicile, la santé… Rien de tout cela n’est disponible au tribunal civil dans le cas d'une poursuite pour négligence.
Selon vous, devrait-on débattre des prestations et de leurs coûts dans le cadre des discussions portant sur un versement unique? Ils n’existent pas au tribunal civil.
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Il me semble que le tribunal civil convoquerait un actuaire qui indiquerait que la jeune personne, ou la personne ayant subi des blessures, recevra toute sa vie un certain montant indexé sur coût de la vie et un remboursement de dépenses diverses.
Je suis d'accord avec vous sur les cas que vous avez mentionnés et sur certains points que vous avez soulevés. Des anciens combattants préfèrent recevoir un versement unique et d’autres doivent recourir à la Loi sur les pensions. Il faut en tenir compte.
J’ai constaté récemment qu’il semble que ce soit les anciens combattants âgés qui demandent des prestations. Je sais qu’ils préféreraient le versement unique, car ils recevront en même temps ce versement en plus de leur pension. Ils m’ont demandé de communiquer avec ACC et m’ont dit : « Je vous prie d’ajouter le montant de ma pension — 100 $ de plus par mois ou quel que soit le montant — à mon versement unique et de me le remettre; je ne veux pas l’augmentation de pension. »
C’est intéressant de ce point de vue, mais je prends aussi en considération l'ancien combattant plus jeune, comme le major Campbell et le caporal Kerr — qui est un exemple excellent à Sudbury — dont il faudra examiner très attentivement la situation afin d’assurer leur sécurité financière future. Vous avez soulevé judicieusement cette question. Il faudra y réfléchir intelligemment pour trouver une solution juste et équitable. Encore une fois, je souhaite qu’un actuaire intervienne et prenne des mesures de ce genre. C’est, à mon avis, un sujet très délicat.
Je vous suis vraiment reconnaissant de votre présence.
Monsieur Griffis, il y a d'anciens combattants plus âgés qui diront qu'ils aimeraient bien avoir le paiement forfaitaire. J'ai parlé à quelques-uns d'entre eux et ils m'ont dit qu'ils ne savaient pas combien de temps il leur restait à vivre, et que s'ils allaient obtenir 30 000 ou 40 000 $, ils aimeraient les avoir maintenant pour les utiliser comme ils l'entendent.
Toutefois, il y a d'anciens combattants plus jeunes, comme M. Laidler, qui viennent tout juste de sortir des forces. S'ils reçoivent un diagnostic de trouble de stress post-traumatique grave ou qu'ils ont perdu des membres, et que nous décidons soudainement de... Certains anciens combattants parlent d'un « barème des accidents ». Nous leur versons un montant forfaitaire de 200 000 ou de 300 000 $.
Je ne pense pas que quelqu'un ait reçu plus de 300 000 $, monsieur Laidler, mais je pourrais me tromper. Toutefois, il y a eu des paiements de 300 000 $. Si vous étiez caporal, vous recevriez environ 60 000 $, n'est-ce pas?
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Monsieur Laidler, je me tourne maintenant vers vous parce que vous êtes un jeune ancien combattant. Vous n'étiez probablement pas en Afghanistan à l'époque où mon cousin, Christos Karigiannis, a été tué. Je pense que c'était juste un peu avant votre arrivée.
Avez-vous rencontré d'anciens combattants de votre groupe d'âge qui appuient le paiement forfaitaire, ou sont-ils majoritairement favorables au versement d'une pension accompagnée d'avantages offerts dans la Nouvelle Charte des anciens combattants, comme le programme de retour aux études?
Ce que je veux dire, c'est que ce n'est rien de nouveau; cela a déjà existé. Si vous allez voir les anciens combattants plus âgés, les gens qui sont revenus de la Seconde Guerre mondiale, et si vous allez voir les gens de la faculté de génie, ils vous diront qu'ils étaient tous à Ajax. On parle de 15 000 à 20 000 personnes.
Diriez-vous que la majorité des jeunes anciens combattants préférerait le paiement forfaitaire ou une prestation qui leur serait versée tout au long de leur vie?
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Ces questions s'adressent à M. Laidler.
Soyez le bienvenu. Merci d'avoir servi le pays. Nous vous en sommes très reconnaissants.
Vous avez mentionné que votre programme est financé par le fédéral depuis 2012 et vous avez présenté des remerciements au comité à cet égard. J'aimerais avoir une meilleure idée du financement que vous recevez, dans l'ensemble. Cela dit, il est évident que lorsque nous finançons quelque chose, nous voulons examiner les critères et les taux de réussite.
Au sujet de la transition, qui est au centre du programme, comme le laisse entrevoir le nom de votre organisme, j'aimerais savoir combien de personnes participent au programme, quel est le taux de réussite et comment sont déterminés les critères de réussite.
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En 1997, la question du trouble de stress post-traumatique a fait couler beaucoup d'encre. Le programme a donc été créé et l'objectif était de savoir s'il aurait une incidence sur les symptômes du TSPT d'une personne. Il existe un lien étroit avec les symptômes de la dépression et l'estime de soi. Dans le passé, on utilisait trois mesures pour déterminer la réussite du programme.
Sur le plan statistique, nous avons observé une importante baisse des symptômes de la dépression et du TSPT pendant l'élaboration du programme. À la suite d'une étroite collaboration avec des chercheurs de partout au Canada lors de la conférence de l'ICRSMV, nous nous sommes graduellement éloignés, depuis deux ans, de l'idée que le stress post-traumatique était le seul indicateur, puisqu'il apparaît évident que ce n'est qu'un des problèmes auxquels les militaires sont confrontés lorsqu'ils quittent les forces.
Je dirais que dans une certaine mesure, nous portions des oeillères lorsqu'il était question de stress post-traumatique. Voilà pourquoi nous sommes passés à un questionnaire plus inclusif que l'on appelle OQ-45. Il s'agit du sondage normalisé sur l'évaluation du programme qu'utilise le ministère des Anciens Combattants. David Ross s'est fait le champion de ce sondage. Son organisme a le financement pour la faire. Nous l'utilisons. Il ne sert pas seulement à évaluer l'état de santé mentale général d'une personne, mais aussi la relation avec la famille, la satisfaction à l'égard de la carrière, etc. Encore une fois, nous l'avons fait pour le groupe, après le groupe, trois, six et douze mois plus tard, et ils ont tous eu beaucoup de succès. Je peux dire qu'il y a eu, dans le cas du questionnaire OQ-45, des augmentations cliniquement et statistiquement significatives.
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M. Blizzard était dans l'aviation. Il a été opéré plusieurs fois du cancer. Il est aussi diabétique. Le couple a dû vendre sa maison et s'installer ailleurs, un endroit très bien, mais c'est tout de même un nouveau domicile.
Mme Blizzard a appuyé son mari tout au long de sa vie. Ils ont une famille formidable et se tirent bien d'affaire, mais elle est préoccupée, étant donné que M. Blizzard lutte contre le cancer. Elle n'est allée au collège communautaire qu'une année, et elle est plus âgée. Ce qui la préoccupe, c'est que si le cancer ressurgit et que M. Blizzard décède avant elle, elle se retrouvera alors dans une situation difficile. Elle souhaite que cette question soit portée à l'attention du comité. Si elle avait eu l'occasion d'aller à l'école lorsqu'elle était plus jeune — qu'il s'agisse de cours au collège communautaire, à l'université ou de cours spéciaux —, le couple ne serait pas dans cette situation.
Étant donné mon âge et celle de mes collègues, il est normal que nous parlions souvent de cet aspect précis, parce que nous ne perdons pas seulement des membres en raison de leur déménagement, mais parce qu'ils décèdent. C'est une situation difficile. Dans la grande majorité des cas, c'est l'homme qui décède et la conjointe se retrouve seule.
Le mari de l'une des femmes dont nous nous occupons était à bord de l'avion qui a été abattu le 9 août 1974. Elle a fait ce qu'il fallait pour elle et ses enfants. Elle avait la capacité de le faire, tandis que Mme Blizzard ne l'a pas.
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Merci de ces précisions.
Monsieur Laidler, ce n'est pas la question que je voulais poser initialement, mais vous avez parlé à plusieurs reprises de l'aide que vous fournit la Légion. Bien entendu, les légions constituent des mécanismes d'aide formidables, mais elles ne sont pas toutes égales. Au Canada, certaines succursales sont en difficulté. Pour être honnête, elles sont en difficulté en raison du transfert des membres par le gouvernement.
Avant de poser la question, je vais raconter une anecdote, brièvement. La semaine dernière, dans ma circonscription, nous avons organisé des assemblées publiques avec d'anciens combattants. À la succursale 5, une femme nous a dit qu'elle y assistait parce qu'elle voulait nous raconter ce qui lui était arrivé la veille. Une personne du bureau du ministère des Anciens Combattants de Brandon l'a appelée pour lui demander si sa succursale de la Légion pouvait donner de l'argent à un ancien combattant, qui se trouve à être un ancien combattant de Thunder Bay. Il y a quelque chose qui ne va pas.
Cela vous préoccupe-t-il? Je sais que nous ne tarissons pas d'éloges pour la Légion et le travail qu'elle fait. Toutefois, le fait que les succursales de la légion n'aient peut-être pas l'appui dont elles ont besoin pour faire le travail qu'elles souhaitent accomplir est-il une de vos préoccupations?
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Oui, elle a été prise après midi.
Pourriez-vous nous indiquer ce que vous pensez de la façon dont votre programme, le RTV — on l'appelait le PTV, mais, maintenant qu'il est offert à l'échelle nationale, il est intitulé le RTV —, constitue l'une des nombreuses manières de traiter les problèmes de santé mentale ou les BSO?
Constatez-vous que certains anciens combattants réagissent bien à des séances de counseling typiques, comme celles offertes par un psychologue clinicien, alors que d'autres se plaisent à suivre un programme comme le vôtre parce qu'ils bénéficient du soutien de leurs pairs ou parce que cela leur permet de réintégrer leur milieu? Je serais ravi de savoir ce que vous en pensez. Peut-on dire sans crainte de se tromper qu'aucune solution ne convient à tous les anciens combattants, que nous devons offrir quelques services, y compris un nouveau programme comme le vôtre?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Il a été question un peu plus tôt de gens dont les cas sont en quelque sorte tombés entre les craques du plancher. Je vous présente aujourd'hui deux cas où des personnes se sont retrouvées pour ainsi dire assises entre deux chaises.
Le premier cas est celui d'Éric Aubé, un de mes amis, qui a récemment communiqué avec moi pour me faire part de son histoire. Éric était adjudant à la 52e Ambulance de campagne en même temps que moi. Il m'a dit qu'il avait participé à l'opération Cavalier en 1992 et que, bien qu'il ait été tenu en otage pendant 22 jours, tout s'était bien déroulé et qu'il était sain et sauf. Cependant, après qu'il s'est blessé pour la première fois en 24 ans de service, on lui a offert la porte. Éric s'est blessé au parcours du combattant.
Cette histoire illustre les problèmes auxquels les réservistes sont confrontés lorsqu'ils se blessent en cours d'entraînement. N'étant pas en mission, ils sont alors considérés comme l'équivalent de la Force régulière. Ils se voient souvent privés de compensation, ou encore ils reçoivent une compensation qui ne tient pas compte de l'emploi qu'ils occupent en dehors des forces armées.
Prenons l'exemple d'un policier au civil qui, lorsqu' il est disponible, travaille dans la Réserve. Disons qu'il subit, en cours d'entraînement, une blessure permanente qui l'empêche de travailler non seulement comme militaire dans la Réserve, mais également comme policier au civil. Ce policier subit alors deux pertes de salaire. Celle de son emploi au civil n'est aucunement compensée. Il se trouve à perdre un revenu pouvant être assez important. Il n'est pas rare que des personnes servent dans la Réserve même si elles y gagnent le tiers de leur salaire au civil, tout simplement parce qu'elles aiment servir dans la Réserve. Ces personnes sont pénalisées si elles se blessent dans l'exercice de leurs fonctions de réserviste, étant donné qu'elles ne reçoivent aucune compensation pour la perte de leur salaire au civil.
Le deuxième cas que j'aimerais vous présenter et pour lequel je sollicite vos commentaires s'est produit lorsque je suivais mon cours d'élève-officier. Il y avait un cours jumeau, celui-là donné en anglais. Même si les deux groupes étaient animés par un esprit de compétition, personne ne souhaitait qu'un malheur arrive aux membres de l'autre groupe. Malheureusement, un jour, durant une séance d'entraînement, un jeune homme d'à peine 20 ans, qui n'était dans les forces armées que depuis quatre semaines, a sauté par-dessus un mur et est tombé tête première. Il est devenu paraplégique. Ce jeune élève-officier aurait probablement gagné un salaire substantiel après un certain nombre d'années. À la suite de cet accident, il risque d'être incapable d'occuper un emploi rémunérateur pour les 45 prochaines années, même s'il reçoit des services de réadaptation. Quelle compensation peut-on offrir à cette personne qui gagnait, à titre d'élève-officier en formation, probablement le même salaire que le mien, soit 1 300 $ par mois? Cet humble salaire que nous recevions dépassait à peine le seuil de la pauvreté à cette époque.
J'aimerais recevoir vos commentaires sur ces deux cas et voir ce qu'il y aurait lieu de faire pour remédier à ce genre de problèmes quand même assez fréquents.
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Je comprends votre point de vue par rapport à ce que vous avez dit. Je soutiens respectueusement que ces personnes auraient dû recevoir une indemnisation. Des prestations spéciales devraient être prévues pour les situations de cette nature.
Je déduis de vos observations que vous parlez du CMR ou du RMC. Mon fils est diplômé du CMR. Il reçoit en ce moment une pension d'Anciens Combattants en raison de son TSPT. Ma petite-fille est une étudiante de deuxième année au CMR. Si elle se blessait en participant à la course à obstacles — peut-être est-ce ce à quoi vous faisiez allusion lorsque vous parliez de l'homme qui s'est blessé et qui est maintenant paraplégique, selon vos dires —, je pense que certains dédommagements devraient être prévus.
Ces gens se sont enrôlés, mais ils ne se sont pas engagés à être blessés ou à vivre dans la pauvreté pour le restant de leurs jours. Ce sont certainement de tristes circonstances.
J'estime respectueusement que, dans des situations de cette nature, on devrait accorder des indemnités à ces gens, au lieu de leur verser les prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada ou une rémunération de ce genre. On devrait les indemniser.
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Il semble que, lorsqu'un soldat est déployé — et je pourrais avoir tort à ce sujet, mais je ne crois pas que ce soit le cas —, l'armée ne se soucie pas vraiment de la situation. Les choses pourraient avoir changé au cours des derniers jours, mais, lorsqu'un soldat est déployé, on lui dit où il doit se trouver à une certaine heure et une certaine date, et cela s'arrête là. Le soldat ou le membre de la force aérienne se rend peut-être chez lui et annonce à son conjoint qu'il s'en va dans tel ou tel pays pendant six mois ou une année. L'armée établira une permission ou un congé d'un genre ou d'un autre à son intention, mais, au bout du compte, elle se contentera de lui dire où il ira, et c'est ce qu'il fera.
Puis, lorsqu'un conjoint éprouve quelques difficultés quand, par exemple, un de ses enfants se casse un bras en pratiquant un sport, les époux font équipe pour s'occuper d'une situation d'urgence comme celle-ci. Toutefois, lorsque le soldat est parti, le travail d'équipe n'est plus possible. Le conjoint amène l'enfant à l'hôpital en ambulance ou par ses propres moyens, et la blessure est soignée. Lorsque le conjoint rencontre un problème lié à son logement, que l'habitation soit un LF ou sa propre maison, il lui incombe de le régler, que le vent ait fait voler quelques bardeaux ou qu'il s'agisse d'un problème électrique ou de plomberie.
De nos jours, il y a très peu d'endroits où les conjoints peuvent aller afin de demander de l'aide. Comme je l'ai indiqué, ces services ne sont simplement pas utilisés. On les a oubliés.
Cela met fin à l'intervention de M. Lizon, et nous avons terminé nos séries de questions.
Au nom du comité, j'aimerais vous demander quelque chose. Nous n'allons pas aborder ces questions aujourd'hui, mais nous vous serions reconnaissants de tout commentaire que vous pourriez nous faire parvenir à propos d'un problème qui, après plusieurs années, n'est manifestement pas réglé, à savoir le passage du MDN à Anciens Combattants Canada. Nous croyons comprendre que cette transition est toujours problématique et, aujourd'hui, nous avons eu l'impression que de nombreuses autres mesures pourraient être prises à cet égard. Si vous nous envoyez le fruit de toute pensée qui pourrait vous traverser l'esprit à ce sujet, nous vous en saurons gré, et nous l'ajouterons aux autres renseignements.
Au nom du comité, je tiens à vous remercier infiniment. Nous valorisons vos exposés qui nous sont très utiles.
Dans une minute, nous nous occuperons d'une motion, mais nous dirons d'abord au revoir et merci à nos témoins, puis nous suspendrons momentanément nos travaux.