:
Bonjour, et bienvenue à la 50
e séance du Comité permanent des anciens combattants.
[Français]
Ce matin, nous commencerons l'étude de la section 17 du projet de loi .
[Traduction]
Pour donner un bon coup d'envoi à notre étude, nous aurons le plaisir d'entendre, durant la première heure de cette réunion, deux fonctionnaires distingués du ministère des Anciens Combattants: Michel Doiron, sous-ministre adjoint du Secteur de la prestation des services, et Bernard Butler, sous-ministre adjoint délégué du Secteur des politiques, des communications et de la commémoration.
[Français]
Cette portion de la rencontre se conclura à 9 h 45. Nous prendrons alors une brève pause, puis nous entendrons M. Guy Parent, ombudsman des vétérans, et Mme Sharon Squire, ombudsman adjointe et directrice générale des opérations, ainsi que M. Brian Forbes, président du Conseil national des associations d'anciens combattants au Canada.
[Traduction]
Chaque intervenant fera un exposé de sept minutes. Normalement, les invités disposent de 10 minutes, mais comme nous recevons aujourd'hui un plus grand nombre de témoins, nous devons réduire la durée des exposés en conséquence. Les députés auront ensuite l'occasion de poser des questions aux témoins.
[Français]
Monsieur Doiron, la parole est à vous.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
[Traduction]
Bonjour, monsieur le président, chers membres du comité, mesdames et messieurs.
Comme le président l'a dit, je m'appelle Michel Doiron et je suis le sous-ministre adjoint du Secteur de la prestation des services, à Anciens Combattants Canada. Je suis accompagné aujourd'hui de mon collègue, Bernard Butler, sous-ministre adjoint délégué du Secteur des politiques, des communications et de la commémoration.
Je tiens à vous remercier de me donner l'occasion de comparaître aujourd'hui devant vous pour aborder un sujet d'une grande importance et d'un grand intérêt pour les anciens combattants et leur famille, à savoir la réponse du gouvernement au rapport présenté par votre comité en juin 2014 et intitulé La Nouvelle Charte des anciens combattants: Allons de l'avant, dont certains éléments font partie du Plan d'action économique de 2015, soit le projet de loi . S'il est adopté, le projet de loi modifiera la Loi sur les mesures de réinsertion et d'indemnisation des militaires et vétérans des Forces canadiennes, communément appelée la Nouvelle Charte des anciens combattants, afin de répondre à plusieurs préoccupations et lacunes qui ont été cernées.
Le projet de loi contient essentiellement cinq modifications ou dispositions législatives.
La première disposition propose un énoncé d'objet afin « de reconnaître et d'honorer l'obligation du peuple canadien et du gouvernement du Canada de rendre un hommage grandement mérité aux militaires et vétérans pour leur dévouement envers le Canada » et elle établit également que la loi « s'interprète de façon libérale afin de donner effet à cette obligation reconnue ».
La deuxième disposition importante améliore la capacité d'Anciens Combattants Canada d'appuyer la transition vers la vie civile. Elle autorise Anciens Combattants Canada à fournir aux membres des Forces armées canadiennes et aux anciens combattants de l'information et des conseils en ce qui concerne les avantages et les services qui peuvent leur être offerts pour faciliter leur transition et à prendre des décisions en ce qui concerne les demandes d'avantages et de services avant la libération.
Trois autres modifications créent de nouvelles prestations pour les anciens combattants. Ces nouvelles prestations renforceront le soutien que fournit le gouvernement aux anciens combattants atteints d'une invalidité grave et à leur famille en vertu de la Nouvelle Charte des anciens combattants.
La première prestation, l'allocation de sécurité du revenu de retraite, permettrait d'offrir aux anciens combattants atteints d'une invalidité moyenne à grave — c'est-à-dire à ceux qui en ont le plus besoin — une aide continue versée sous forme de paiement mensuel de soutien du revenu dès qu'ils atteignent l'âge de 65 ans.
La deuxième prestation, l'allocation de secours pour les aidants familiaux, permettrait d'offrir aux anciens combattants admissibles une subvention annuelle non imposable de 7 238 $ afin d'accorder une certaine souplesse et un peu de répit à leurs aidants naturels, souvent leur époux ou d'autres membres de la famille dévoués, lorsqu'ils en ont besoin, tout en veillant à ce que quelqu'un soit là pour donner aux anciens combattants les soins dont ils ont besoin.
La troisième prestation, l'indemnité pour blessure grave, équivaudrait à un montant non imposable de 70 000 $ pour aider les membres des Forces armées canadiennes et les anciens combattants les plus gravement blessés et malades.
Ces nouvelles prestations s'ajouteront à la gamme actuelle de services et d'avantages établis dans la Nouvelle Charte des anciens combattants et elles renforceront les mesures de soutien offertes par le gouvernement du Canada à ceux qui ont été blessés pendant qu'ils servaient leur pays ainsi qu'à leur famille.
Comme il a été annoncé dans le budget, un personnel supplémentaire s'occupera de régler les retards dans la prestation des services, plus particulièrement à l'égard des militaires et des anciens combattants atteints des invalidités les plus graves et à l'égard de leur famille. Nous embaucherons plus de 100 gestionnaires de cas permanents qui offriront des services individuels améliorés. L'embauche d'une centaine d'employés, temporaires et permanents, responsables des décisions relatives aux pensions, permettra d'améliorer le délai de traitement des demandes de prestations d'invalidité présentées par les anciens combattants. Cela fait partie de notre engagement en matière d'excellence du service.
[Français]
Je vous remercie pour le temps que vous m'avez accordé.
[Traduction]
Sur ce, monsieur le président, j'invite les membres du comité à poser leurs questions à Bernard ou à moi.
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Merci, messieurs Doiron et Butler, de votre présence ici aujourd'hui.
C'est incroyable comme les questions de M. Lemieux font ressortir le cynisme et l'incrédulité absolue qui règnent, parce que c'est, pour moi, du déjà-vu: on nous jette de la poudre aux yeux, notamment lorsque le député a délibérément insisté sur la reconnaissance de l'obligation qui doit s'interpréter « de façon libérale » afin d'y donner effet. Je dis cela parce que depuis le temps que je siège ici, j'ai constaté tout le contraire. Dans un de ses rapports, le vérificateur général parle du nombre de gens dont la demande est refusée et du nombre de ceux qui interjettent appel, dont 60 % finissent par avoir gain de cause. Il est renversant de voir les anciens combattants faire face à tant de difficultés.
Pour en revenir au projet de loi, permettez-moi de vous expliquer pourquoi cette mesure législative ne fait qu'accroître mon cynisme. Prenons l'exemple de l'indemnité pour blessure grave; un montant de 70 000 $ sera accordé à certains anciens combattants qui souffrent d'une maladie causée par « un seul événement soudain postérieur au 31 mars 2006 » — je ne m'inquiète pas tant de la date — bref, « un seul événement soudain » ayant entraîné « une détérioration importante de [leur] qualité de vie ».
Je vous ai déjà posé la question, à vous et à d'autres, et on m'a répondu: « Eh bien, il est peu probable que les gens atteints du syndrome de stress post-traumatique soient admissibles parce que ce trouble survient plus tard. » À moins que les rapports médicaux puissent miraculeusement l'attribuer à un seul événement soudain, ces gens n'ont pas de chance, et on nous rétorque: « Eh bien, ils ont droit à d'autres prestations. » Ces gens souffrent-ils d'un « seul événement soudain »? Ainsi, vous marginalisez davantage ceux qui sont atteints du syndrome de stress post-traumatisme. C'est une blessure cachée.
Alors, dites-moi, quel en est l'avantage pour ceux qui souffrent du syndrome de stress post-traumatique?
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D'ici là, nos anciens combattants attendent. Ils attendent que tout le monde soit en poste.
En tout cas, je ne suis pas extrêmement familier avec le dossier, mais cela me fait penser à mon ami Jacques. Jacques a 92 ans. Une de ses jambes a été pulvérisée dans la campagne d'Italie à l'âge de 18 ans. Il a subi sa dernière opération à la jambe au mois de février. Il m'a parlé des services qu'il recevait.
Il m'a dit que son histoire était toujours simple. Il est parti avec une dizaines d'amis ramper dans des tranchées et se faire tirer dessus pendant un an et demi en Italie. Il a enterré la moitié de ses amis. Quand il est revenu, il ne pouvait plus marcher. Son père l'a pris dans ses bras pour descendre du train. Il n'a jamais pu faire de sport. C'est tout, il a eu besoin d'aide pour vivre.
C'est toujours simple mais, d'un autre côté, il y a toujours des formulaires à remplir, toujours des alinéas, des petits paragraphes à prendre en compte. Il est capable de naviguer sur Internet, il peut clavarder avec ses neveux et ses nièces, il n'a pas peur d'un ordinateur, mais pour lui, c'est une insulte d'être forcé, d'être contraint de la sorte. Quand on a vécu ce qu'il a vécu, on a besoin de parler à un être humain.
C'est un peu diffus, mais...
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Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie de l'occasion qui m'est donnée d'offrir des commentaires sur la section 17 de la partie 3 du projet de loi .
Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant le comité, mais je tiens également à vous remercier du rôle important que vous avez joué au cours des dernières années, ce qui nous a amenés à la situation actuelle.
[Traduction]
Votre rapport intitulé La Nouvelle Charte des anciens combattants : Allons de l'avant, publié en juin 2014, a aidé à orienter le débat, à définir les priorités et à mobiliser la communauté des vétérans. Il a également permis de fournir au gouvernement un plan d'action approuvé à l'unanimité pour régler les questions touchant les vétérans. Il est indéniable que des mesures en ce sens sont actuellement prises.
Avec le recul, je suis particulièrement heureux que le rapport et l'analyse actuarielle du Bureau de l'ombudsman des vétérans sur l'amélioration de la nouvelle Charte des anciens combattants, publiés en octobre 2013, aient pu faciliter votre travail.
Le projet de loi constitue un progrès significatif en vue de régler plusieurs enjeux qui préoccupent les vétérans et leurs familles depuis longtemps. Comme le projet de loi réduit l'écart par rapport aux changements nécessaires, il est important qu'il soit adopté rapidement et mis en oeuvre sans délai.
Les travaux du Bureau de l'ombudsman des vétérans ont été efficaces à ce jour parce qu'ils sont fondés sur des données probantes. Les résultats sont mesurés en fonction des principes d'équité que sont la pertinence — les bons programmes et les bons services sont-ils en place pour répondre aux besoins? —, le caractère suffisant — les bons programmes et les bons services sont-ils dotés de ressources suffisantes? — et l'accessibilité — les critères d'admissibilité créent-ils des obstacles injustes, et peut-on avoir accès rapidement et facilement aux avantages et aux services d'Anciens Combattants Canada?
[Français]
Il est trop tôt pour que je puisse me prononcer sur l'efficacité du projet de loi. Le Parlement est toujours saisi du projet de loi et son règlement n'a pas encore été publié. Par conséquent, la mise en oeuvre n'a pas été amorcée. Je peux toutefois vous faire part aujourd'hui de mon point de vue de principe. Passons donc en revue l'initiative proposée sous cet angle d'équité.
[Traduction]
Le projet de loi et son règlement tiennent-ils compte des principes d'équité en matière de pertinence, de caractère suffisant et d'accessibilité? J'estime qu'ils en tiennent compte, du moins, en principe.
Il est tenu compte de la pertinence grâce à la nouvelle allocation de sécurité du revenu de retraite à être versée aux vétérans atteints d'une invalidité modérée ou grave, afin de leur procurer un soutien permanent de revenu mensuel à compter de l'âge de 65 ans, ce qui permettra de répondre à un nouveau besoin des vétérans et de leurs familles. La pertinence s'applique également à l'embauche de nouveaux employés de première ligne afin d'offrir un meilleur soutien individuel aux vétérans.
Il est tenu compte du caractère suffisant, en principe, grâce à la parité entre l'allocation pour perte de revenus accordée aux anciens réservistes blessés, qui auront dorénavant droit au même montant de revenu minimum, par l'entremise du Programme d'allocations pour perte de revenus, que celui qui est accordé aux vétérans de la Force régulière. L'embauche de nouveaux employés de première ligne afin d'offrir un meilleur soutien individuel aux vétérans tient également compte du critère du caractère suffisant.
Il est tenu compte de l'accessibilité grâce à l'assouplissement des critères d'admissibilité de l'allocation pour déficience permanente, aide financière mensuelle d'environ 600 à 2 800 $ versée à vie aux vétérans dont les possibilités d'emploi ou perspectives d'avancement professionnel sont limitées en raison d'une blessure ou d'une maladie grave attribuable au service. Il en est également tenu compte grâce à la nouvelle indemnité pour blessure grave proposée, qui permettra d'offrir un montant forfaitaire non imposable de 70 000 $ en appui aux membres et aux vétérans des Forces armées canadiennes les plus gravement malades ou blessés.
À l'avenir, alors que les modifications proposées par le projet de loi auront un effet positif pour ce qui est de répondre aux besoins des vétérans et à ceux de leurs familles, nous devrons nous pencher sur l'indemnisation visant les répercussions non financières pour compenser la douleur et la souffrance, la transition de la vie militaire à la vie civile, et la prestation des services centrée sur les vétérans.
En outre, nous ne devons jamais perdre de vue que la nouvelle Charte des anciens combattants est un document « évolutif » qui doit être examiné et mis à jour de façon régulière.
[Français]
Je crois que, collectivement, nous devrions être rassurés face à la situation actuelle puisque nos efforts ont des effets réels en ce qui a trait à remédier aux problèmes de longue date qui touchent les anciens combattants et leurs familles.
[Traduction]
Cela ne veut pas dire que l'écart a été comblé. Cependant, si ces nouvelles initiatives sont considérées comme des mesures prises pour s’engager à améliorer continuellement les avantages et à les adapter en fonction des besoins changeants des vétérans, il s'agit alors d'un indicateur très positif pour l'avenir.
Monsieur le président, j’aimerais indiquer au comité que, pas plus tard qu’hier, nous avons publié une version actualisée des annonces que nous avons faites récemment concernant vos recommandations et de la façon dont elles ont amélioré la situation des anciens combattants et de leur famille. Nous avons apporté des copies de ce document qui seront distribuées aux membres du comité après les exposés.
Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis prêt à répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Le CNAAC se réjouit de l’occasion qui lui est donnée ce matin de parler au comité du projet de loi et, en particulier, de la partie de la loi qui traite de la réforme de la Nouvelle Charte des anciens combattants.
Premièrement, je tiens à souligner que nous avons pu constater, ces derniers mois, plusieurs éléments nouveaux importants ayant eu une incidence positive sur le fonctionnement d’Anciens Combattants Canada et sur la relation du ministère avec le groupe des anciens combattants. Il nous faut louer le ministre, , et le sous-ministre, Walt Natynczyk, pour leur engagement dynamique à l’égard de la réforme globale de la Nouvelle Charte des anciens combattants et l’amélioration de la culture administrative au sein d’ACC.
En ce qui concerne plus particulièrement les réformes de la charte, il est juste de dire qu’un élan important et un dynamisme considérable se font sentir compte tenu des différentes recommandations formulées par le ministre, lesquelles ont abouti à l’élaboration des modifications législatives soumises au Parlement qui représentent manifestement la volonté du gouvernement de réagir aux propositions formulées par votre comité permanent, l’ombudsman des vétérans, le Groupe consultatif d’anciens combattants, le Comité consultatif de la Nouvelle Charte des anciens combattants et les organismes membres de notre CNAAC.
Malheureusement, bon nombre des annonces du ministre et des modifications législatives proposées représentent, à notre avis, des demi-mesures et, de toute évidence, elles ne donnent pas suite à toutes les recommandations que vous et les nombreux groupes consultatifs susmentionnés avez formulées. Toutefois, après des années de ce que j’ai qualifié d’inertie inacceptable de la part d’ACC, on décèle des signes concrets de la première phase d’un changement graduel positif. Il demeure de notre devoir et, si je peux me permettre de le mentionner respectueusement, de votre devoir ainsi que de celui du groupe des anciens combattants, de maintenir la pression exercée sur le gouvernement pour mener à bien cette initiative essentielle visant à éliminer les injustices qui demeurent dans la charte.
Monsieur le président, j’aimerais faire maintenant quelques remarques générales sur le projet de loi et sur l’incidence qu’il aura sur la Nouvelle Charte des anciens combattants.
Premièrement, l’accent qui est nettement mis sur les anciens combattants lourdement handicapés est louable; d’ailleurs, le CNAAC a toujours été d’avis que la grande priorité pour la communauté des anciens combattants et le gouvernement doit être les anciens combattants gravement handicapés.
Deuxièmement, il est évident, après l’examen des principales modifications législatives, que le diable se cache dans les détails puisque le projet de loi fait plusieurs références à des règlements et des orientations stratégiques qui n’ont pas encore été formulés pour soutenir les dispositions générales de la loi. À mon avis, tant que ces règlements n’auront pas été établis, il ne sera pas possible d’évaluer les critères d’admissibilité précis applicables aux principales prestations proposées dernièrement ni les « facteurs à considérer » — souvent mentionnés dans le projet de loi — dans l’application de la nouvelle loi. Il incombera à la communauté des anciens combattants, et à vous-mêmes, de surveiller de près les projets de règlement et les orientations stratégiques pour garantir que la portée des dispositions générales de la loi n’est pas diluée ni indûment limitée.
Troisièmement, il va sans dire que des contraintes budgétaires subsistent. En effet, après avoir passé en revue les annonces du ministre et les modifications législatives, nous constatons que les propositions du ministre ont été structurées de manière à respecter l’enveloppe budgétaire et que, par conséquent, les prestations proposées sont destinées à des cohortes précises d’anciens combattants, et non à l’ensemble des anciens combattants. Malheureusement, il nous semble que l’obsession du gouvernement à l’égard de l’équilibre budgétaire en cette année d’élection demeure, pour le moment, un frein à la réforme complète de la Nouvelle Charte des anciens combattants.
Quatrièmement, comme je l’ai dit au ministre dans ma correspondance récente et dans ma communication au Sommet des anciens combattants, il reste encore beaucoup à faire pour corriger les lacunes connues de la charte. On ne peut pas dire que la situation actuelle est parfaite sous ce rapport, mais il s’agit d’une première étape importante vers une loi réparatrice.
Monsieur le président, je sais que nous sommes pressés par le temps et que mon mémoire est plutôt long. J’ai remis ce document aux membres du comité, mais j’aimerais faire ressortir certaines de mes préoccupations à propos du projet de loi ainsi que les lacunes et les injustices qui n’ont toujours pas été éliminées de la charte.
Premièrement, l’allocation pour perte de revenus doit être augmentée pour passer de 75 % de l’ancien revenu militaire à 100 %, conformément aux recommandations que formulent depuis longtemps le Comité consultatif sur la Nouvelle Charte des anciens combattants, le Groupe consultatif d’anciens combattants et le CNAAC — ou, au moins, à 90 %, comme le propose mon collègue, l’ombudsman des vétérans. La réduction actuelle de 25 % du revenu est inacceptable, surtout si l’on songe que cette perte de revenu est imposée au moment où les anciens combattants et leur famille affrontent une période de transition au cours de laquelle ils s’efforcent de réintégrer la société civile canadienne.
Cet aspect revêt une importance particulière pour les anciens combattants atteints d’une incapacité permanente. À cet égard, il faudrait que l’approche fondée sur les gains probables au cours de la carrière, désignée par votre comité, soit adoptée afin de tenir compte de l’impact réel de la perte de revenus dans une nouvelle carrière. Cette proposition peut être appliquée en poursuivant la réforme de l’allocation pour déficience permanente ou de l’allocation supplémentaire pour déficience permanente, ou encore en procédant à une évaluation distincte fondée sur le mécanisme qu’on utilise dans les tribunaux civils canadiens pour confirmer la future perte de revenus chez les demandeurs grièvement blessés.
Deuxièmement, la politique relative au régime d’invalidité de longue durée du RARM doit être retirée de la législation applicable aux anciens combattants et être appliquée uniquement aux incapacités non liées au service.
Outre le chevauchement inutile des programmes, comme le RARM et la Prestation pour perte financière, l’indemnisation des anciens combattants et de leurs personnes à charge ne devrait pas relever de l’industrie de l’assurance dont le mandat consiste, bien souvent, à réduire le plus possible le risque pour l’assureur que représentent les personnes blessées ou handicapées. Je décris davantage cet enjeu dans le document, et je vous laisse lire ces renseignements plus tard.
Troisièmement, ACC devrait favoriser l’équité entre les pensions d’invalidité et les dommages et intérêts octroyés par les tribunaux civils.
Il faut souligner qu’au lieu de mettre en oeuvre la recommandation formulée depuis longtemps, le ministre a plutôt proposé une nouvelle indemnité pour blessure grave au montant de 70 000 $. Cette indemnité est destinée uniquement aux anciens combattants atteints d’une incapacité temporaire et à ceux qui touchent une pension d’invalidité élevée. À cet égard, il faut savoir que l’indemnité pour blessure grave apporte son lot de problèmes de définition, notamment en ce qui concerne les critères d’admissibilité et les facteurs que les décideurs doivent prendre en considération pour déterminer la portée et l’étendue de cette nouvelle indemnité. Bien que nous appuyions cette nouvelle indemnité accordée en raison de la situation des plus difficiles que connaissent les anciens combattants lourdement handicapés, la décision d’ACC d’indemniser cette catégorie d’anciens combattants en particulier plutôt que d’augmenter graduellement toutes les pensions d’invalidité nous préoccupe. J’ajouterais peut-être qu’au cours des six ou sept dernières années, cette recommandation a été systématiquement formulée non seulement par votre comité, mais aussi par tous les autres groupes consultatifs qui ont examiné la charte.
Quatrièmement, il faut étudier davantage la possibilité de faciliter l’accès à l’allocation pour déficience permanente et l’admissibilité à un niveau de catégorie supérieur. On se rappellera que l’ombudsman des vétérans, M. Parent, dans son étude empirique de la charte, a conclu que 50 % des anciens combattants lourdement handicapés ne touchaient pas l’allocation pour déficience permanente et, par conséquent, ne touchaient pas non plus le supplément à cette allocation, et que 90 % de ceux qui la recevaient ne touchaient que la pension de grade 3, soit le grade le plus faible. La proposition du ministre d’élargir la définition réglementaire de l’allocation pour déficience permanente est louable, mais encore une fois, ne répond pas pleinement à tous les aspects de la réforme de cette importante allocation. C’est particulièrement vrai pour les anciens combattants lourdement handicapés qui ne remplissent pas les critères d’admissibilité à l’allocation pour déficience permanente, mais son impact est plus vaste encore si nous tenons compte du fait que le montant de l’allocation est un élément important de la nouvelle allocation de soutien du revenu de retraite, comme M. Butler l’a signalé ce matin.
Nous demeurons persuadés que la proposition que nous avons présentée au comité permanent à cet égard est la meilleure façon d’améliorer l’accès à l’allocation pour déficience permanente, c’est-à-dire qu’une fois qu’on a établi qu’un ancien combattant est atteint d’une incapacité permanente, l’indemnité d’invalidité qu’il touche devrait être le principal facteur à retenir pour déterminer le grade de l’allocation pour déficience permanente auquel il a droit. Si vous recevez une indemnité d’invalidité de plus de 78 %, vous devriez avoir droit au grade 1 de l’allocation pour déficience permanente. Une indemnité d’invalidité de 48 à 78 % devrait donner droit au grade 2 de l’allocation pour déficience permanente. Cette formule est simple et directe, et elle découle de l’indemnité d’invalidité.
Cinquièmement, il faut revoir l’allocation de secours pour les aidants familiaux, car elle ne procure pas tout le soutien financier dont les familles des anciens combattants lourdement handicapés ont besoin lorsque ceux-ci ont besoin de beaucoup de soins. Cette allocation, tel qu’elle a été présentée par le ministre, est louable, car elle constitue un soutien ciblé qui permet aux soignants d’avoir le répit dont ils ont besoin, mais, à mon avis, elle ne répond qu’à une seule préoccupation des soignants des anciens combattants lourdement handicapés. Dans bien des cas, ces familles doivent aussi composer avec une diminution du revenu parce que le conjoint ou la conjointe a dû abandonner son emploi. La perte de 25 % du revenu de l’ancien combattant en vertu du RARM ou de l’allocation pour perte de revenus entraîne souvent une crise financière au sein de la famille.
Je n’en ai que pour quelques minutes, monsieur le président. Merci.
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Merci, monsieur le président. Je remercie également nos témoins d’être venus.
En fait, cette discussion est intéressante. Permettez-moi de poser une question à ce sujet.
Je pense que l’ombudsman a avancé un bon argument, à savoir que bon nombre de ces circonstances sont très personnelles, ce qui signifie qu’elles sont propres à la personne à laquelle on envisage d’accorder des prestations. Par exemple, on peut facilement penser que l’APR qui correspond à 70 % du revenu militaire devrait passer à 80, 90 ou 100 % de ce revenu, mais le vétéran qui reçoit cette allocation peut avoir accès à d’autres prestations. Chaque cas est très particulier.
Par exemple, si un ancien combattant est blessé d’une façon modérée à grave, l’indemnité d’invalidité est-elle prise en considération? Cela peut représenter un paiement forfaitaire substantiel dont la limite maximale s’élève à 300 000 $. En plus de ce paiement, il y a le paiement forfaitaire pour mutilation du RARM. Si un membre des forces perd un bras, un oeil, deux yeux, ou un bras et une jambe, il pourrait recevoir un paiement forfaitaire substantiel en plus de tout genre d’APR.
La troisième chose que je mentionnerais est la pension militaire. Certes, certains soldats sont trop jeunes pour avoir droit à cette pension, mais d’autres soldats y sont admissibles et pourraient recevoir leur pension militaire.
Je pense qu’il y a de nombreux facteurs à prendre en considération. Si vous me le permettez, j’aimerais interroger l’ombudsman à ce sujet.
Lorsque vous plaidez pour un niveau d’APR, par exemple, tenez-vous compte des autres prestations auxquelles un ancien combattant pourrait avoir droit?
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie tous les deux d'être là.
Il y a beaucoup d'éléments mobiles, dans cette discussion, et je pense qu'entre autres problèmes, les gens ont de la difficulté à comprendre certaines des nouvelles prestations, l'indemnité pour blessure grave, par exemple, et l'allocation pour relève d'un aidant familial. Elles sont très précises et visent des besoins très particuliers qui ont surgi.
En ce qui concerne l'indemnité pour blessure grave, par exemple, monsieur l'ombudsman, une personne pourrait s'en prévaloir plus d'une fois. Si vous êtes blessé par balle et que vous vous en remettez complètement, vous n'aurez pas de prestations d'invalidité parce que vous vous êtes rétabli complètement, ce qui est formidable. Vous êtes quand même admissible à l'indemnité pour blessure grave parce que votre rétablissement est très difficile, et cela pourrait se produire plus d'une fois. C'est une indemnité très particulière répondant à un besoin très précis. C'est un exemple.
Nous parlons de perfection, et nous cherchons manifestement toujours la perfection. Monsieur Parent, aurons-nous un jour 100 %? Est-ce que cela demeurera un processus continu? Je crois que oui. Nous allons toujours essayer d'en faire plus et de faire mieux parce que les choses changent. Je l'ai dit déjà, qu'en 1938, nous ne savions pas que nous aurions des centaines de milliers d'anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale. En 1948, nous ne savions pas que nous aurions des dizaines de milliers d'anciens combattants de la guerre en Afghanistan. Dans 20 ans, nous pourrons dire que nous ne savions pas qu'il y aurait des dizaines de milliers d'anciens combattants à la suite d'autre chose. Donc, est-ce un processus continu?
Quand il y a du nouveau, l'ombudsman et le vérificateur général publient toujours des rapports comportant de bonnes et de mauvaises nouvelles. L'opposition relève toujours les mauvaises nouvelles; c'est ça, la politique. Nous relevons toujours les bonnes nouvelles, et c'est ça aussi, la politique. Mais est-il juste de dire que c'est un processus continu?
C'est du progrès. Nous devons mettre cela aux voix. Nous devons soutenir cela. Franchement, il faut le soutien de tous les côtés, mais je sais que cela ne se produira pas parce que c'est aussi de la politique. Cependant, sommes-nous devant un processus continu auquel nous devons tous nous engager pour qu'il y ait du progrès, et ce, constamment? Est-ce que ça va finir un jour?
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Merci, monsieur le président et merci aussi, madame et messieurs les témoins.
Il est évident que tous ceux qui sont ici présents se soucient des anciens combattants. Personne ne se donne pour mission d'aggraver leur situation. Nous visons tous le mieux. Nous essayons tous d'y parvenir et, comme mon collègue l'a dit, nous provoquons beaucoup de changements. Pendant la Première Guerre mondiale, lorsqu'il pilotait un Sopwith Camel...
Des voix: Oh, oh!
M. Ted Opitz: Il fallait que je le place.
Mais vous savez, à l'époque, il y a eu beaucoup de changements, comme en 1938. Jamais nous n'aurions pu prévoir l'ampleur des problèmes ni, ensuite, la Corée. Par exemple, nous avons subi la psychose traumatique du soldat et l'épuisement au combat. Le syndrome de stress post-traumatique a seulement été diagnostiqué dans les années 1970 comme affection réelle. Possible, donc, qu'on découvre de nouveaux maux, parce que, les blessures de guerre évoluent aussi et leurs causes aussi. Elles sont causées par différents systèmes d'armes et d'autres facteurs. Comment les traitez-vous?
Recherche et développement pour la défense Canada, comme l'ombudsman le sait très bien, et l'Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans et d'autres encore travaillent quotidiennement à de nouveaux traitements du syndrome de stress post-traumatique. Ils essaient d'anticiper et de découvrir, grâce à des marqueurs génétiques, les sujets susceptibles, qu'on pourrait traiter plus tôt ou prémunir. L'activité est intense.
À propos, le demi-sourire de l'ombudsman suffit à me rendre heureux pour la journée.
Comme M. Hawn l'a dit, le ministre se soucie absolument de la question. Vous avez assisté, monsieur, à un sommet des anciens combattants. Le ministre le prouve en en discutant avec les intéressés. Son sous-ministre, je pense que tout le monde sera d'accord, fait partie de l'élite: mon ancien patron le général Walt Natynczyk, qui était absolument le bon candidat pour l'emploi, et qui s'en acquitte brillamment.
Nous sommes beaucoup de vétérans, de ce côté-ci, trois. Beaucoup de membres du cabinet du ministre sont des anciens combattants, l'un étant encore le président-directeur général d'une unité médicale. Alors, si cela ne rime pas avec engagement, j'ignore absolument ce que cela signifie.
Je sais que le gouvernement et le ministre sont absolument déterminés à faire bouger les choses, et ce comité, mesdames et messieurs, ne sera jamais au chômage. Nous aurons toujours du travail. Nous aurons toujours des problèmes à régler année après année, pour les anciens combattants, parce que c'est un problème en évolution constante pour les anciens combattants. De nouveaux traitements se feront découvrir ou de nouveaux problèmes se révéleront, et nous devrons les régler. Voilà pourquoi le comité existera toujours, je pense, jusqu'à la fin des temps. Nous devons combler un écart qui rétrécit toujours, mais qui ne se ferme jamais tout à fait. Voilà pourquoi je pense que nous devons nous y attaquer.
Des témoins — pour répondre à certaines de vos observations de tout à l'heure sur la nature de certains des problèmes — ont dit que le vocabulaire employé pour communiquer avec les anciens combattants changera et ils ont dit comment ils se mettaient à leur niveau pour mieux se faire comprendre, en évitant de parler comme la loi. Je veux dire que la loi nous cause des problèmes; je dois m'y reprendre à deux ou trois fois, parfois, pour la comprendre et, pourtant, cela fait partie de mon travail. Il faut la clarifier. On le fera. Les nouveaux préposés seront formés et éduqués pour travailler dans ce sens et pour répondre à ce besoin. Les communications seront incessamment améliorées, et cela se fera. Est-ce que ce sera demain matin? Non.
Mais l'évolution fera que, comme le sous-ministre l'a dit... On commencera à mettre en oeuvre ce plan avec les modifications pour lesquelles, nous en convenons, vous avez tous conseillé au comité de voter. Il sera mis en oeuvre et, comme vous l'avez dit plus tôt, on fera la prestation du service aux anciens combattants.
Compte tenu de certaines de mes observations et vu que des témoins ont déjà laissé entrevoir une partie des prochaines modifications: intelligibilité et flexibilité accrues, simplification du processus de demande, traitement accéléré des demandes, conseils donnés aux anciens combattants, l'initiative doit maintenant, comme vous le savez tous, s'intégrer en douceur. Vous savez que dès l'embauche d'une recrue, elle apprendra, pendant toute sa carrière ce qu'il faut savoir sur le ministère. À son départ à la retraite, il ne subsistera aucun mystère. Elle saura beaucoup mieux comment se tirer d'affaire. Je pense que, d'ici les quelques prochaines années, cela commencera à paraître.
Monsieur Parent, qu'en pensez-vous?