Je déclare ouverte la 39e réunion du Comité permanent des anciens combattants.
[Traduction]
Ce matin, nous accueillons deux distingués invités: le colonel Hugh MacKay, médecin-chef adjoint des Forces canadiennes;
[Français]
et le colonel Marc Bilodeau, directeur, Politique de santé du Groupe des Services de santé des Forces canadiennes.
[Traduction]
Ce matin, le colonel MacKay fera une déclaration de moins de 10 minutes. Ensuite, nous passerons aux séries de questions.
J’ai bien aimé l’approche avec moins de contraintes que j’ai adoptée la semaine dernière, et je propose de faire de même cette semaine, sauf que nous n’irons pas aussi loin. Durant les périodes de questions, je vous serais reconnaissant de surveiller le président et ses indications, parce que je n’aime pas me servir du marteau. J’aime l’esprit de collégialité qui règne au comité et je ferai ce que je peux pour que cela ne change pas. Par contre, si vous ne regardez pas la présidence, vous entendrez peut-être des sons déplaisants.
Merci beaucoup.
Colonel MacKay, vous avez la parole.
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Merci beaucoup, monsieur le président et chers membres du Comité permanent des anciens combattants de la Chambre des communes.
Je suis très heureux d'avoir l'occasion de vous parler des soins médicaux offerts aux membres des Forces armées canadiennes, des traitements et des services fournis à nos militaires dans les Centres de soutien pour trauma et stress opérationnels et du soutien qu'ils reçoivent grâce au programme de gestion des cas quand ils opèrent leur transition à la vie civile à la suite d'un problème de santé qui les rend inaptes au service militaire.
Je suis accompagné aujourd'hui du colonel Marc Bilodeau, directeur, Politique de santé.
[Traduction]
Le principal objectif du Groupe des services de santé des Forces canadiennes consiste à fournir des soins aux membres des Forces armées canadiennes au Canada et à l’étranger. Comme les membres de la Force régulière sont exclus du régime de la Loi canadienne sur la santé, il incombe au Groupe des services de santé des Forces canadiennes de leur fournir des soins comme le font toutes les provinces et tous les territoires à l’égard de leurs citoyens.
En garnison, les soins ambulatoires sont fournis par un réseau de plus de 40 cliniques militaires disséminées dans tout le pays et à l’étranger. Notre approche interdisciplinaire, qui fait appel à divers professionnels de la santé militaires et civils — des médecins, des infirmiers, des infirmiers praticiens, des adjoints au médecin et des technologistes médicaux — et à toute une gamme d’autres fournisseurs de soins de santé, selon l’endroit, permet de procurer des soins de santé de haute qualité; elle est considérée comme un modèle à suivre dans le secteur civil et elle s’apparente au Centre de médecine de famille proposé par le Collège des médecins de famille du Canada. Si un service n’est pas offert dans une clinique militaire, nous aiguillons le patient vers le fournisseur civil de soins de santé le plus compétent en vue de lui garantir les soins dont il a besoin.
[Français]
Tant qu'un militaire fait partie des Forces armées canadiennes, il reçoit les soins dont il a besoin conformément au document intitulé Gamme de soins de santé des Forces armées canadiennes. Ce document accorde aux membres des Forces armées canadiennes un accès à des soins semblables à ceux auxquels les Canadiens ont droit. Cependant, quand un militaire a besoin d'un type de traitement très particulier qui ne fait pas partie de la gamme des soins de santé, il existe un processus pour autoriser des exceptions.
Les décisions relatives aux soins inclus ou exclus reposent sur les preuves médicales et elles sont révisées en fonction des progrès de la technologie, de la pharmacologie et du savoir dans le monde médical.
[Traduction]
Afin de traiter les blessures physiques parfois complexes subies par les membres des Forces armées canadiennes, les Services de santé des Forces canadiennes ont décidé d’intégrer d’autres physiothérapeutes à nos centres d’excellence civils affiliés pour la réadaptation grâce à la création du programme de réadaptation des Forces canadiennes en vue de renforcer les services normalement offerts par ces centres. Par ailleurs, l’acquisition de deux systèmes informatisés d’environnement de réadaptation, ou CAREN, situés à Edmonton et à Ottawa, a ajouté à la gamme des thérapies normalisées offertes aux membres des Forces armées canadiennes. Ces mesures visent à nous assurer que les militaires blessés ou malades souhaitant continuer à faire partie des Forces armées canadiennes bénéficient de conditions optimales et ont la possibilité d’atteindre cet objectif chaque fois que c’est possible.
La prestation de soins de santé mentale est une priorité. Les Services de santé des Forces canadiennes disposent à cet égard d’un système complet qui fournit des soins cliniques fondés sur des données probantes dans la majorité des cliniques militaires partout au Canada et en Europe. Nous continuons d’intensifier nos efforts pour lutter contre les stigmates de la maladie mentale et la prévenir grâce à notre programme En route vers la préparation mentale. Les soins de santé mentale débutent souvent dans nos cliniques de soins primaires, et les patients sont confiés, quand il le faut, à nos équipes multidisciplinaires de santé mentale comprenant des psychiatres, des psychologues, des travailleurs sociaux, des infirmiers spécialisés en santé mentale, des conseillers en toxicomanie et des conseillers spirituels. Ces équipes se spécialisent dans le diagnostic et le traitement de toutes les maladies mentales, ce qui comprend les traumatismes liés au stress opérationnel, ou TSO, mais aussi la dépression, l’anxiété et les problèmes de dépendance.
Nous avons aussi sept Centres de soutien pour trauma et stress opérationnels, ou CSTSO, qui sont des centres d’excellence se spécialisant dans la prestation de soins aux victimes de traumatismes liés au stress opérationnel tels que l’état de stress post-traumatique. Nos CSTSO sont situés dans les grandes bases militaires, mais ce sont aussi des centres d’aiguillage régionaux pour les militaires d’autres bases. En outre, les sept CSTSO font partie du Réseau conjoint pour traumatismes liés au stress opérationnel, qui comprend aussi les cliniques pour TSO d’Anciens Combattants Canada. En vertu d’un PE tripartite, ce réseau autorise le soin des militaires, des anciens combattants ainsi que des membres et des anciens membres de la GRC dans des installations militaires ou celles d’ACC, quand nous jugeons que cela convient pour un patient donné.
Afin de renforcer notre programme de santé mentale, nous sommes en train de faire l’essai du Système de surveillance des résultats signalés par les clients; cela permettra d’évaluer rapidement les résultats des traitements et contribuera à optimiser les soins individualisés. Nous sommes aussi en train d’apporter des améliorations au Système d’information sur la santé des Forces canadiennes pour y rendre possible l’entrée directe de notes sur la santé mentale. Cela favorisera de meilleures communications en temps opportun entre les cliniques de soins primaires et les professionnels de la santé mentale, ce qui renforcera encore plus les soins qu’ils offrent en collaboration.
Le programme de santé mentale comporte un solide élément de recherche. À l’heure actuelle, la recherche porte principalement sur l’analyse des résultats de l’Enquête sur la santé mentale dans les Forces canadiennes de 2013. En outre, au Centre d’excellence national en matière de santé mentale chez les militaires et les vétérans, dont la création a été annoncée récemment, des recherches sont menées sur les aspects particuliers de la santé mentale des militaires et des anciens combattants.
Les membres des Forces armées canadiennes ayant des besoins médicaux plus complexes profitent aussi du programme de gestion des cas, qui a été établi il y a plus de 10 ans et qui offre des services dans toutes les cliniques des Forces armées canadiennes au Canada. Les gestionnaires de cas sont des infirmiers spécialisés qui font partie intégrante de l’équipe de prestation des soins aux patients et qui facilitent cette prestation tout au long d’une période complexe de soins médicaux. Le but de ce programme est d’aider les membres des Forces armées canadiennes à comprendre les systèmes médical et administratif. L’objectif premier consiste, quand c’est possible, à retourner le militaire au service actif après une maladie ou une blessure complexe; cependant, dans le cas de ceux qui souffrent d’un état médical chronique ayant entraîné des contraintes permanentes à l’emploi et qui ne satisfont plus aux conditions de l’universalité du service, nous collaborons de près avec ACC pour les aider à passer à la vie civile de la façon la plus sûre possible.
À l’heure actuelle, 66 gestionnaires de cas travaillent avec les membres des Forces armées canadiennes; leur charge de travail est énorme, et ils doivent donc hiérarchiser les cas en fonction de leur complexité et des soins nécessaires. Le personnel du programme de gestion des cas collabore de très près avec celui d’Anciens Combattants Canada; nous réalisons actuellement des analyses et des travaux pour optimiser la transition des militaires libérés passant du programme du MDN à celui d’ACC.
Le Comité directeur d’ACC et des FAC a créé un groupe de travail dont le mandat consiste à élargir la portée de la définition de « gestion des cas » en vue de permettre l’analyse des éléments liés au continuum des soins pour les militaires et leur famille. La période de transition au moment de la libération est une étape cruciale en vue de garantir la continuité à long terme des soins destinés aux militaires en cours de libération. Tous les membres des FC en transition sont soumis à une évaluation normalisée dont l'objet est de cerner le degré de complexité de leur passage à la vie civile. Chaque fois qu’il est établi qu’un militaire a des besoins complexes pour opérer sa transition, l’équipe multidisciplinaire se consulte en vue d’éliminer à l’avance les obstacles repérés risquant de nuire à une transition convenable des points de vue de la santé et des études et sur les plans financier, professionnel et psychosocial. Dans certaines circonstances, l’équipe demande que la période de transition soit prolongée pour garantir une transition sans danger. Chaque cas est géré individuellement en fonction des besoins propres à la personne.
[Français]
L'équipe multidisciplinaire facilite la transition des soins, notamment l'aiguillage du militaire libéré vers des spécialistes et un médecin de famille dans la collectivité où il a décidé de vivre. Le gestionnaire de cas aide aussi le militaire à obtenir sa carte-santé provinciale avant sa libération et à demander toutes les autres prestations auxquelles il a droit, par exemple celles du RARM, d'ACC et du RPC, ainsi que celles versées par les programmes de réadaptation professionnelle, entre autres.
Quand le militaire parvient à la date de sa libération, bien qu'il n'ait dès lors plus droit aux soins dispensés par les Forces armées canadiennes, l'équipe aura tout mis en place pour garantir la continuité des soins par l'intermédiaire du régime provincial des soins de santé ou d'ACC, ou des deux.
[Traduction]
En conclusion, les Forces armées canadiennes sont déterminées à optimiser les soins de santé offerts à nos membres en uniforme durant leurs années de service et à maximiser leurs chances de retourner au service actif après une maladie ou une blessure. Dans le cas des membres des Forces armées canadiennes qui ne peuvent malheureusement pas poursuivre leur carrière militaire, nous nous engageons à leur donner accès à des soins de santé de haute qualité et à les aider le mieux possible pour leur garantir la continuité des soins par l’intermédiaire d’ACC ou du système de santé civil lors de leur transition à la vie civile.
Merci, monsieur le président, de votre attention.
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Merci, monsieur le président.
Tout d’abord, messieurs, merci beaucoup de votre présence aujourd’hui. Merci à tous les deux de votre service. Je suis certain de parler au nom de l’ensemble du comité en vous offrant nos condoléances pour la perte de l’un de vos frères d’armes en Irak, soit M. Doiron. Je sais que cela touche durement tout le monde. Je tiens donc à vous offrir à tous mes sincères condoléances.
Monsieur, dans votre avant-dernier paragraphe, vous dites que tout est en place pour garantir la continuité des soins par l’intermédiaire du régime provincial des soins de santé ou d’ACC. Comme vous n’êtes pas sans le savoir, monsieur, environ cinq millions de Canadiens n’ont actuellement pas de médecin régulier. Dans notre bureau, nous voyons beaucoup de personnes qui ont peur de quitter les excellents services de soins de santé qu’ils reçoivent du MDN et d’aller dans le soi-disant secteur public ou privé. Dans bon nombre de collectivités, les gens n’ont pas accès dans le système provincial de soins de santé aux soins qu’ils recevaient avant. L’une des choses proposées depuis très longtemps, c’est de permettre aux militaires libérés de continuer de profiter des services médicaux des FAC jusqu’à ce qu’ils se trouvent un docteur, parce qu’il arrive bien des fois, comme vous le savez, monsieur, qu’après leur libération ils n’aient pas de docteur ou que certains types de services ne soient pas disponibles dans les secteurs public ou privé en dehors du MDN. Avez-vous envisagé à votre niveau de permettre aux membres des FAC d’avoir un accès continu aux services médicaux des FAC durant au moins un ou deux ans après leur libération pendant leur transition vers des services publics ou privés?
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Merci, monsieur le président.
Je veux insister un peu sur les services de santé mentale pour comprendre la synergie entre Anciens Combattants et le MDN.
Vous avez parlé d'un programme de réadaptation des Forces canadiennes, et de toute évidence, il existe des services de réadaptation et un programme d'assistance professionnelle par l'entremise d'Anciens Combattants.
Nous venons d'étudier la santé mentale. Dans son rapport, et plus particulièrement au sujet des services de réadaptation d'Anciens Combattants, le vérificateur général est très heureux que la décision d'admissibilité soit prise dans un délai de deux semaines, et ce, 84 % du temps.
Je veux comprendre la question de l'admissibilité. Comment détermine-t-on qu'un membre a besoin de services de santé mentale? Quel est le délai d'attente pour qu'une telle décision soit prise?
Je veux comprendre la synergie entre les services de santé mentale offerts par l'entremise d'Anciens Combattants par rapport à ceux offerts par les Forces canadiennes. S'ils sont complètement distincts, cela m'amène à penser qu'il y a dédoublement des services, et je ne peux imaginer que ce soit le cas.
Parlez-nous un peu des gains d'efficience communs et de la décision d'admissibilité derrière l'obtention de services de santé mentale.
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Notre programme de santé mentale est conçu principalement pour offrir des soins aux membres des Forces canadiennes et aux réservistes qui y ont droit.
Cela dit, nous avons conclu une entente avec la GRC et Anciens Combattants Canada pour pouvoir prendre soin de certains anciens combattants ou membres de la GRC dans le cadre de notre programme de santé mentale. Nous pouvons également avoir accès aux cliniques TSO d'Anciens Combattants Canada pour certains de nos membres, au besoin, et ce serait habituellement pour un réserviste, et ce, parce que nous n'avons pas de base à proximité de son lieu de résidence.
Pour être admissible aux soins de santé mentale des Forces armées canadiennes, vous devez vous présenter à notre clinique. Habituellement, vous vous rendez à une clinique de soins primaires d'abord pour discuter de votre problème médical, et vous êtes ensuite aiguillé vers notre programme.
La gestion d'un patient commence habituellement à un établissement de soins primaires. Si le fournisseur de soins primaires estime que le patient a besoin de soins spécialisés, alors il sera aiguillé soit vers notre clinique de santé mentale, soit vers le CSTSO, selon la nature...
Nous procédons parfois à un dépistage. Nous le faisons dans le cadre de nos évaluations de santé régulières. Nous effectuons également un dépistage médical poussé postdéploiement environ six mois après leur retour. Si nous remarquons qu'une personne a des problèmes durant le processus de dépistage, nous lui téléphonerons pour discuter avec elle de sa situation et déterminer s'il est temps ou non qu'elle quitte les forces ou si elle souffre d'une maladie mentale pour laquelle nous devons l'aider.
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Oui, je le suis. La semaine dernière, mon camarade d'artillerie m'a même accusé d'être non qualifié.
De toute façon, cela a été une expérience très positive, car tout ce dont mes camarades et moi-même avions besoin, nous l'obtenions. On nous a remis en état et nous avons repris du service. En tout cas, nous étions au moins en bon état.
J'ai des exemples personnels à vous rapporter. J'ai un ami qui a été envoyé au collège. Il a 38 ans de service et il était censé avoir pris sa retraite l'an dernier, mais vous ne l'avez pas laissé partir parce que vous deviez soigner ses genoux et toutes sortes d'autres choses et on ne l'a pas libéré avant qu'il ne soit en pleine forme. Peut-être que vous le laisserez partir cet automne. C'est une très bonne chose.
Dans la même veine de ce que vous avez dit en réponse à d'autres questions, il me semble que, loin d'être passif, vous êtes très dynamique dans votre recherche de traitements. Vous êtes tourné vers l'avenir. Par rapport au groupe de travail, vous suivez le modèle de l'OTAN. Je présume que vous travaillez avec l'ICRSMV, l'Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans, et que vous consultez les excellents documents qu'il a publiés.
Vous pourriez peut-être nous donner plus de détails sur cette collaboration.
À ce propos, il convient de noter que l'an dernier le comité de la défense a produit une étude sur le soin à donner aux malades et aux blessés. Cette étude fournit des détails très précis sur bien des points dont nous avons parlé, sur les nombreux traitements en réalité virtuelle que vous offrez à ceux qui ont perdu un membre, etc., en collaboration avec l'hôpital d'Ottawa et d'autres organismes.
Pouvez-vous nous décrire comment s'appliquent certains de ces principes dynamiques dans votre travail quotidien et comment ils vous aident à forger et à ajuster les politiques?