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Bonjour. Je m'appelle Sofia Marquez. Je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de faire une déclaration préliminaire avant de répondre à vos questions.
Comme les membres du Comité le savent, je comparais devant eux aujourd'hui après avoir reçu une convocation le lundi 22 février. Auparavant, j'avais respectueusement refusé deux invitations par écrit par l'intermédiaire d'un avocat.
Mon refus a pu donner aux membres du Comité ou à d'autres Canadiens l'impression que je suis un témoin réticent ou que je représente l'Organisme UNIS et que je ne veux pas répondre refuser aux questions du Comité concernant les activités de l'organisation. Permettez-moi de rectifier les faits à ce moment-ci. Je suis ravie de comparaître devant vous en tant que simple citoyenne pour répondre à vos questions de façon honnête et au mieux de mes capacités. Je suis très fière de la façon dont je me suis conduite tout au long de ma carrière professionnelle et je n'ai rien à cacher.
J'aimerais vous donner des renseignements sur le rôle que je jouais au sein de l'Organisme UNIS et vous expliquer en quoi ma capacité d'aider le Comité dans le cadre de son étude est limitée.
Avant de travailler pour UNIS, j'ai obtenu une maîtrise en affaires publiques et internationales en 2014, à l'Université d'Ottawa. Par la suite, j'ai travaillé dans les domaines de l'analyse politique, de la gestion de projets et de l'élaboration de propositions dans les secteurs privé et à but non lucratif. Je n'ai jamais été lobbyiste-conseil ni occupé un poste dans lequel le lobbying était au cœur de mes responsabilités au sein d'une organisation.
J'ai commencé à travailler pour l'Organisme UNIS en juillet 2017 en tant que directrice associée de la stratégie. À ce titre, je dirigeais une équipe qui soutenait les efforts d'autres départements et des dirigeants dans l'élaboration de propositions spécialisées dans tous les secteurs, ce qui incluait les secteurs privé, public et à but non lucratif.
Au départ, je n'ai pas été embauchée pour agir à titre d'intermédiaire auprès du gouvernement ou d'autres intervenants. En juillet 2018, l'Organisme UNIS a constaté que mon travail avait progressivement et naturellement évolué pour se concentrer davantage sur la mobilisation externe, et j'ai accepté le poste nouvellement créé de directrice des relations avec le gouvernement et les intervenants, ainsi qu'un changement dans mes fonctions. Dans ce rôle, j'étais responsable des démarches auprès de tous les ordres de gouvernement, ainsi que des intervenants stratégiques du secteur à but non lucratif et du secteur privé relativement aux programmes nationaux dirigés par UNIS au Canada. Cela comprenait l'obtention de financement, la gestion de projets pour soutenir la mise en œuvre de programmes financés, et le respect des exigences en matière de rapports sur les initiatives existantes.
Tout ce travail était axé sur la promotion des possibilités pour les jeunes Canadiens de jouer un rôle dans le service et l'éducation, un objectif qui me tenait à cœur à l'époque et qui me tient toujours à cœur aujourd'hui.
Cependant, les responsabilités liées à mon poste n'incluaient pas la gestion des dons ou des relations avec des donateurs spécifiques, la recherche et la gestion de talents pour la Journée UNIS ou les activités secondaires qui y sont liées, ou toute participation aux projets internationaux de l'Organisme UNIS. Je n'ai pas non plus de renseignements sur la structure organisationnelle ou financière d'UNIS.
Je tiens à dire que si vous m'imaginez comme une lobbyiste salariée à temps plein, ce serait une mauvaise interprétation de mon rôle. J'occupais différentes fonctions, et le lobbying en faisait parfois partie. Mon travail lié aux différents gouvernements comprenait toutes sortes d'activités et de communications, notamment la supervision de la gestion de projets, la présentation de rapports sur les programmes financés par le gouvernement, ou même la compréhension — en termes généraux — des politiques relatives aux jeunes qui étaient en place. Je n'étais en aucun cas une lobbyiste à temps plein ni même de façon régulière auprès du gouvernement fédéral.
Je connais la Loi sur le lobbying et le Code de déontologie des lobbyistes et j'étais au courant de leur existence quand je travaillais pour l'Organisme UNIS. Comme les membres du Comité le savent, au titre de la Loi sur le lobbying, la responsabilité d'enregistrer des lobbyistes salariés incombe au directeur d'une organisation. Cependant, pour appuyer la réponse d'UNIS aux demandes de la commissaire au lobbying et à d'autres demandes du gouvernement fédéral, j'ai fourni tout mon calendrier et mes dossiers à mon ancien employeur afin qu'on puisse estimer le temps que j'ai consacré aux relations avec le gouvernement fédéral à quelque titre que ce soit.
Je sais que l'Organisme UNIS a effectué un enregistrement en vertu de la loi, datant de janvier 2019, qui m'inclut en tant que lobbyiste salariée au sein de l'organisation. Je n'ai pas participé à ce processus, qui a eu lieu après mon départ de l'Organisme UNIS, et je ne peux pas fournir de renseignements au Comité à ce sujet.
Bien sûr, je peux vous dire ce dont je me souviens du rôle que j'ai joué dans l'élaboration de la proposition de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant en avril et en mai 2020, comme je l'ai déjà fait pour le comité des finances en août dernier. Je ne peux le faire que de mémoire, puisque mes dossiers appartiennent à mon ancien employeur.
Je peux vous dire qu'avant la création de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant, l'Organisme UNIS avait soumis au gouvernement une proposition spontanée de programme d'entrepreneuriat étudiant, qui, nous l'espérions, allait être un moyen de soutenir les jeunes Canadiens pendant et après la première vague de la pandémie. Cette proposition a été présentée à la et à la pendant la première moitié du mois d'avril 2020. Elle n'était en aucun cas liée à ce qui allait devenir la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant et elle était axée sur un autre type de mobilisation des jeunes sur le plan de l'envergure et du modèle.
Je peux également vous dire que je savais que Rachel Wernick avait communiqué avec Craig Kielburger et avait relevé la volonté du gouvernement de mettre sur pied un programme de bénévolat étudiant d'une bien plus grande portée le 19 avril. Dans ce contexte, j'ai joué un rôle actif et j'ai consacré la majeure partie de mon temps à mobiliser mes collègues de l'Organisme UNIS pour rédiger une proposition à l'intention d'EDSC, qui a finalement été fournie au gouvernement sous forme de proposition officielle le 22 avril.
Je crois comprendre que la proposition de services a été largement diffusée au sein du gouvernement après le 22 avril, bien que je ne sois pas au courant des communications au sein du gouvernement. Pour confirmer le tout, j'ai participé à une séance d'information par téléphone avec Craig Kielburger, Michelle Kovacevic et Rachel Wernick le 24 avril, comme l'indique le dossier.
Par la suite, entre le 8 et le 22 mai, j'ai reçu de nombreuses demandes de renseignements complémentaires de la part d'EDSC dans le cadre du processus d'élaboration des propositions, et j'y ai répondu. Toutefois, à partir du 22 mai, je n'ai plus participé à aucune activité liée à la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. Toutes les responsabilités relatives à la proposition ou à des négociations relevaient des dirigeants d'UNIS, et à ce moment-là, je ne participais plus aux communications avec le gouvernement.
Je ne suis plus directrice des relations avec le gouvernement et les intervenants au sein de l'Organisme UNIS depuis le 31 juillet de l'année passée, comme vous le savez tous, et je poursuis ma carrière. Je continue à promouvoir l'éducation et la mobilisation des jeunes au Canada, et je suis très fière du travail que notre équipe a accompli pour faire avancer ces dossiers au sein d'UNIS, en particulier pendant une pandémie. J'ai été vraiment déçue de voir ces efforts sapés et finalement anéantis au cours des derniers mois.
Je serai ravie de répondre à toutes les questions que le Comité peut vouloir me poser.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Madame Marquez, je vais parler lentement, bien que mes secondes comptent.
Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
J'étais présente au Comité permanent des finances, et j'aimerais valider quelques éléments avec vous afin de nous permettre de faire la lumière sur certains faits. Je sais que vous aviez des recherches à faire également, au sujet de vos appels téléphoniques, par exemple.
J'ai quelques questions à vous poser, entre autres, au sujet du 20 avril.
Vous aviez mentionné, le 13 août, que vous deviez aller vérifier dans votre journal d'appels s'il y avait eu un appel le 20 avril. Est-ce que cette tâche a été faite et l'information validée?
C'est une date déterminante, selon nous. Le 20 avril, il s'agissait d'un appel concernant le ministère de l'Emploi et du Développement social et celui des Finances.
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Je suis ici aujourd'hui pour parler au nom de ce petit bonhomme. Je vous présente Wesley Cowan.
Lorsque je m'adresse à vous aujourd'hui, j'espère que vous entendrez les mots d'un père qui est ici pour parler au nom de son fils. Je suis le fier père de Wesley Cowan, un petit garçon qui a perdu la vie le 23 avril 2006 en chutant d'une balançoire. Pour nous qui l'aimions, cette tragédie nous a poussés à transformer la douleur en raison d'être, ce à quoi nous nous sommes consacrés pendant des années. Nous avons décidé de construire des écoles au Kenya. Nous avions eu l'assurance de Dalal Al-Waheidi, de Craig Kielburger, de Marc Kielburger et de Roxanne Kielburger que les écoles que nous allions bâtir, avec la participation de donateurs, porteraient son nom. Celui-ci devait être inscrit sur une plaque apposée à chaque école, afin que Wesley laisse sa marque tout en aidant les enfants du Kenya.
Ce matin, je sais que vous vous êtes probablement préparés à la séance d'aujourd'hui en suivant des routines et des procédures. Je tiens toutefois à vous assurer que les routines et les procédures ne permettront jamais vraiment de comprendre ce que j'espère vous dire aujourd'hui. Pour ma part, lorsque j'ai appris que l'Organisme UNIS et Enfants Entraide étaient mêlés à un scandale, et que les assurances données aux donateurs étaient désormais remises en question, j'ai eu l'impression que la tombe de mon fils avait été ouverte, profanée et vidée. C'est comme si l'endroit que je croyais sûr et sécuritaire pour le corps de mon enfant devenait en quelque sorte dangereux et menaçant. Je me trouvais là, et je ne savais pas exactement comment c'était arrivé. Je ne savais pas exactement qui était responsable, mais je comprenais que quelque chose n'allait pas. Ce sentiment de sûreté, de sécurité et de réconfort a été bafoué, et le mal est fait. C'est ainsi que je me sens devant vous aujourd'hui.
Je dois vous avouer que je ne voulais vraiment pas témoigner devant votre comité ce matin en raison des procédures. Or, j'estime que si des députés veulent connaître ma vérité, je dois accéder à leur demande. Pour être juste envers Craig Kielburger, Robin Wiszowaty et David Stillman, qui est membre du conseil d'administration d'Enfants Entraide et de l'Organisme UNIS, je tiens à dire d'entrée de jeu qu'ils m'ont inondé d'appels téléphoniques, de courriels, de messages texte et de messages vocaux après que j'ai savonné la tête à M. Kielburger à propos des allégations de l'article du magazine Bloomberg sur Enfants Entraide et l'Organisme UNIS. Selon l'article, le personnel aurait dit aux journalistes qu'on disait souvent à la blague que les plaques devraient être posées avec du Velcro puisque, dès que les donateurs quittent les lieux, elles sont souvent retirées des écoles qu'ils croient avoir construites.
Je tiens également à préciser une chose, car je sais que les médias nous écoutent. J'ai reçu beaucoup de demandes de la part des médias, mais j'ai évité de commenter officiellement la situation pour de très bonnes raisons. Je suis moi-même un représentant des médias. Je ne veux pas aller dans cette direction. Je n'aime pas la couverture médiatique à laquelle aurait probablement droit un donateur américain qui est lié, comme je le suis, à une possible collecte de millions de dollars. Je ne voudrais pas que cela soit rattaché à mon fils et à nos efforts. Je n'ai voulu ni contribuer à la vente de journaux des magasins ni aider les blogueurs à générer des clics ou à augmenter leur auditoire aux dépens de mon beau garçon.
Soyons clairs: le nom de Wesley, son visage, ses quatre années de vie et son héritage ont été utilisés par Enfants Entraide et l'Organisme UNIS pour faire de l'argent. D'une certaine manière, laisser les médias s'enrichir de la même façon est douloureux et tout simplement insupportable.
Avant de répondre à vos questions, je demande à chacun d'entre vous, que je vous voie sur l'écran ou non, de faire appel à votre conscience en ce moment. Je ne sais franchement pas de qui je dois me méfier. Si certains d'entre vous cherchent à se servir du visage de Wesley, de son nom, de sa vie ou de son héritage comme carte politique à une fin autre que découvrir la vérité au nom des donateurs, je vous demande avec respect d'annuler maintenant mon témoignage.
Cela étant dit, je vais résumer brièvement les faits. J'ai créé la collecte de fonds Wesley Smiles Coalition quelques jours après que nous ayons laissé Wesley dans son mausolée. Notre groupe a payé de ses poches Enfants Entraide et l'Organisme UNIS pour se rendre trois fois au Kenya, alors qu'aucun d'entre nous n'avons beaucoup de moyens. Nous avons eu un accès illimité aux opérations sur place et au personnel kenyan, que nous avons interviewé avec l'aide de l'équipe de réalisation d'un documentaire que j'avais engagée et payée.
À Salt Lake City, je crois que nos efforts ont permis de récolter un peu moins de 100 000 $ en 2006. En Floride, lorsque je me suis associé à l'un des plus grands districts scolaires des États-Unis, nous avons pu amasser plus de 100 000 $, que je sache, et d'après ce qu'on m'a dit.
Je sais également qu'au fil des ans, des chèques importants ont été envoyés à Enfants Entraide et à l'Organisme UNIS grâce à mes conférences aux États-Unis, et aussi de la part de gens qui ont vu ma conférence TED. En tout, je présume que des millions de dollars ont été recueillis en mon nom. En fait, j'ai récemment discuté au téléphone avec David Stillman, membre du conseil d'administration de l'Organisme UNIS ou d'Enfants Entraide, qui m'a dit ceci: « Les gens ont vu ce que vous avez fait pour votre fils, monsieur Cowan. Votre geste a incité des groupes comme les soudeurs, Walgreens, Unilever ou Allstate à mettre la main à la pâte. Beaucoup de gens nous ont demandé ce qu'ils pouvaient faire pour leur entreprise si un type pouvait accomplir une telle chose pour son fils. Ils ont donc adopté des villages grâce à vous. »
Je veux vous dire une chose, car je trouve important de voir les faits sur papier. J'ai essayé d'obtenir des chiffres par écrit. J'ai demandé à plusieurs reprises un compte rendu de toutes les sommes qui ont été recueillies en rapport avec l'héritage de Wesley Cowan et, à ce jour, ces chiffres ne m'ont pas été remis. J'aimerais les connaître. J'ai demandé maintes fois un compte rendu des montants que notre groupe et nos groupes ont versés à Enfants Entraide et à l'Organisme UNIS pour nous rendre au Kenya, où nous avons séjourné dans leurs installations et participé à leur programme. À ce jour, je n'ai toujours pas reçu ces chiffres.
À la suite du scandale, et à mon grand désarroi, j'ai dû communiquer avec les membres du district scolaire de Broward, en Floride, et avec les personnes à la tête de nos efforts de Salt Lake City, en Utah, pour leur parler des rapports et de ma découverte. Il est horrible de passer des appels semblables.
J'aimerais aussi m'adresser aux blogueurs et aux gens sur Tweeter qui nous écoutent en ce moment. J'ai vu vos gazouillis ce matin. Comprenez-moi bien: je ne mène pas une campagne contre les Kielburger ou leur organisation. Je ne leur souhaite aucun mal, et à leur famille non plus. Je ne veux pas entacher le bon travail qui a pu être réalisé. Contrairement à ce que m'a dit le membre du conseil d'administration David Stillman lors d'un appel téléphonique qui a été transcrit fidèlement, je ne veux très manifestement pas nuire à l'héritage de son frère décédé Howie, dont le nom se trouve sur des écoles au Kenya. Je suis plutôt en train de parler au nom d'un enfant qui ne peut pas se défendre. C'est en tant que père de Wesley Cowan que je suis ici pour protéger son héritage, et je veux savoir pourquoi j'ai l'impression qu'il a été volé.
Pour terminer, avant de répondre à vos questions, je sais que tout le monde s'intéresse à une chose. J'ai une demande à l'intention des personnes riches, puissantes et influentes, des célébrités et des entreprises qui ont utilisé leur pouvoir pour élever Enfants Entraide et l'Organisme UNIS. Je vous exhorte de sortir de votre cachette à ce sujet et de faire une déclaration officielle, comme j'ai dû le faire aujourd'hui.
Prenez la parole pour soutenir Enfants Entraide, l'Organisme UNIS, Marc et Craig Kielburger. Divulguez l'ensemble de vos documents et de vos communications avec eux. Faites savoir aux gens comme moi et les autres donateurs qu'Enfants Entraide et l'Organisme UNIS n'ont rien à se reprocher. Prouvez-le. Faites-en la preuve avec votre marque et vos grands noms. Dites-le aux enfants du Canada et des États-Unis, et l'affaire sera réglée.
Sauf votre respect, je parle aussi de vous et de votre famille, monsieur le premier ministre . Je parle de toutes les entreprises qui traitent avec Enfants Entraide, comme Walgreens et d'autres. Je parle d'Oprah Winfrey et des membres du Oprah's Angel Network et de ses filiales. Je parle des chanteuses pop Demi Lovato, Nelly Furtado et Madonna, qui a envoyé sa fille Lourdes. Je parle du prince Harry, du Dalaï Lama, de Mia Farrow, de Nate Berkus, de Malala et tous les grands noms dont le profil, la crédibilité et le pouvoir ont permis à Enfants Entraide et à l'Organisme UNIS de générer des millions de dollars sur le dos des enfants et de mon fils décédé.
Je demande à tous ceux que j'ai nommés et qui pourraient appartenir à ces catégories de s'exprimer d'ici sept jours, car aucun d'entre vous n'a perdu quoi que ce soit. Or, j'ai perdu un enfant, et c'est pourtant moi qui me trouve devant les caméras alors que je n'en ai aucune envie. Si vous prenez la parole et dites au monde que vous vous portez garants de Craig et Marc Kielburger, de l'Organisme UNIS et d'Enfants Entraide, vous n'aurez rien perdu. Tandis que les projecteurs sont braqués sur cette affaire, tous ceux qui traient avec eux ont maintenant l'occasion d'utiliser leur vérité, leur lumière et leur pouvoir pour les défendre, le cas échéant. Si vous ne dites rien, votre silence sera éloquent. L'incertitude régnera pour des gens comme moi et mes donateurs, ainsi que pour l'héritage de Wesley Cowan, de Howie Stillman et d'innombrables autres regrettés — des gens comme moi, qui ont l'impression que la tombe de leur enfant a été profanée.
Je vous remercie de m'avoir écouté, et je suis prêt à répondre à vos questions.
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C'est ce qui m'a incité à faire des enquêtes poussées.
Pardonnez-moi...
De tout ce que j'ai lu dans l'article du Bloomberg, ce point était le plus important et m'a convaincu d'enquêter. Peu de temps après la parution de l'article, j'ai reçu des photos qui ont probablement été prises au cours des derniers mois, et qui montrent toutes les portes de toutes les écoles situées sur tous les campus du Kenya. J'ai remarqué que la porte du bâtiment scolaire que nous avions ouvert le jour du premier anniversaire de la tragédie qui a coûté la vie à Wesley...
Nous nous étions fixé un objectif. Nous nous étions dit qu'à l'occasion du premier anniversaire de ce qui est arrivé à Wesley — je ne peux toujours pas prononcer le mot qui commence par M —, nous serions au Kenya pour ouvrir l'école.
Après avoir lu l'article du Bloomberg et reçu des photos des portes de chaque école située sur tous les campus du Kenya, j'ai vu que l'école que nous avions ouverte ne portait plus notre plaque. On y lisait le nom de Wesley et sa devise, « Être heureux chaque jour », que je porte sur un bracelet — nous en avons donné des milliers. À la place, l'école portait le nom d'Esther Grodnik, ainsi que de la Fondation Howie Stillman en petits caractères.
Je me suis demandé: « Qui est Esther Grodnik, et qui est la Fondation Howie Stillman? » Je suis allé voir le site Web de la fondation. J'ignore si leurs vidéos sont toujours en ligne, mais j'ai suivi le lien pou. J'ai vu une vidéo — je l'ai conservée, mais elle a peut-être été retirée — qui portait une marque d'horodatage. On y voyait une cérémonie d'inauguration pour l'ouverture du même bâtiment moins de deux semaines avant notre arrivée. Nous sommes allés au Kenya en pensant ouvrir cette école pour Wesley, mais la vidéo porte la date...
J'ai comparé la vidéo. Je l'ai vérifiée image par image, parce que j'ai de nombreuses séquences pour un documentaire. Les images montrent, ou suggèrent de façon accablante que l'école que les Stillman célébraient dans leur vidéo était la même que celle que nous avons inaugurée 13 jours plus tard, je pense. La cérémonie a été refaite pour nous avec les mêmes personnes, les mêmes chansons et tout le reste, mais avec des plaques différentes.
C'est assez dévastateur. Comme je l'ai dit à Craig Kielburger...
Vous savez, vous dites que 15 années se sont écoulées, mais je souffre de troubles de stress post-traumatique. Je parcours encore ces corridors la nuit. Les nuits les plus difficiles, je ferme les yeux et je retourne au campus d'Enelerai et à l'école que nous avons ouverte, en croyant que c'était le campus de Wesley. J'imagine le soleil se lever au Kenya et des enfants assis aux pupitres. Cette image m'a permis de traverser de nombreuses nuits. Lorsque j'ai vu la référence temporelle et le bâtiment de la Fondation Howie Stillman qui portait le nom d'Esther Grodnik, alors que nous pensions que notre plaque s'y trouvait, vous pouvez imaginer les questions que nous nous sommes posées et notre dévastation.
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Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Cowan, d’être venu nous voir. Nous sommes tous très bouleversés, surtout pour vous, comme père et comme celui qui déploie une énergie incroyable auprès des jeunes pour qu'ils aient foi en l'avenir et transforment le monde. Nous devons rendre hommage à cela. Je vous remercie de votre témoignage.
Je rappelle également que vous êtes un journaliste lauréat d’un Emmy Award, de sorte que vous n’avez probablement pas l’habitude de répondre à des questions. Il est vous est probablement plus facile d'en poser, mais nous vous demandons un peu de patience.
J’aimerais revenir sur la réponse que vous a donnée M. Kielburger, à savoir qu'il s'agissait d'une erreur. Il est possible qu’une erreur ait été commise, que, dans leur enthousiasme à obtenir plus de fonds, ils aient oublié de communiquer avec vous. Ce qui me préoccupe, c’est ce que nous avons vu dans l’article de Bloomberg, où on explique que les plaques sont munies de bandes Velcro et que le personnel semble trouver cette tactique plutôt amusante. C’était choquant. Il y a eu ensuite le documentaireThe Fifth Estate nous apprenant que la même tactique est employée pour les puits d’eau, qui sont payés simultanément par plusieurs donateurs.
Des membres du personnel d'UNIS nous a dit qu’il se passait des choses dans les écoles, mais vous l’avez confirmé. Cela a tout l'air d'une tendance à entretenir des relations trompeuses avec les donateurs. Selon vous, comment cette organisation peut-elle continuer à faire ce genre de travail?
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Je pense que David Stillman, qui est membre du conseil d’administration de la Fondation Stillman, a conclu que nous nous étions quittés en bons termes, mais, de mon côté, j’ai eu l'impression d'être en butte à un chien de garde. Je n’ai pas pu placer un mot, et le chien ne voulait pas que j’entre et allume les lumières.
Je suis parti troublé parce que ce qui avait été dit, au téléphone et dans l’échange dûment documenté, semblait avoir été directement contredit par le courriel qui a suivi le lendemain.
Simplement pour vous expliquer pourquoi je n’avais pas confiance, il m’a dit — je rappelle qu'il siège au conseil d’administration — et je vais vous épargner les jurons: « Est-ce que je travaillerais de nouveau avec Craig Kielburger? Oh que non. Est-ce que je voudrais travailler de nouveau avec Marc Kielburger? Oh que non. Mais je suis ici pour protéger l’héritage de mon frère et pour protéger le travail fait au Kenya, et c’est ce que je fais. »
Le lendemain, j’ai envoyé un courriel pour dire que, d’après ce que j’avais compris, ce n'était pas le grand amour entre lui et les frères Kielburger, mais que, si son objectif, comme membre du conseil d’administration, était de protéger l’héritage de son frère et de protéger le travail fait au Kenya, il pourrait me nommer au conseil. Il pourrait me nommer et me permettre d'intervenir, parce que je suis engagé. Il m’a répondu — je paraphrase — que, bien sûr que si, il aimait Craig et Marc Kielburger et il ne semblait pas vraiment enthousiaste à l’idée que je sois un décideur au conseil.
Quand on dit une chose et son contraire du jour au lendemain, la confiance se perd.
Bienvenue, monsieur Cowan, en ce vendredi après-midi. Merci de vous être rendu disponible.
Je ne suis pas très philosophe. Je suis plutôt un bon soldat dévoué. Je pense à cet ancien joueur de hockey sur glace, John Tonelli, des New York Islanders. Un bourreau de travail. On travaille fort, on respecte les règles, on a de la chance de temps en temps, on fait ce qu'on a à faire, et on se conduit bien. Je crois au karma. Fais ton chemin dans ce monde, fais ce que tu peux et contribue à tous les niveaux. Je vois la vie comme un long continuum. On ne sait jamais où cela va nous mener, mais il n'y a pas de pauses, c'est un continuum. Chacun de nous a son propre chemin.
D’après ce que j’ai lu aujourd’hui, votre chemin est très intéressant, et déchirant à certains égards effectivement. J'ai deux jeunes filles et je ne peux qu’imaginer. Mes plus sincères condoléances à vous et à votre famille pour ce que vous avez vécu.
Je suis également ici pour apprendre et notamment pour en savoir plus sur un témoin comme vous. Vous vous êtes engagé dans des activités de bienfaisance, pour aider des enfants, parce que vous le vouliez. C'était très important pour vous. Où en êtes-vous aujourd’hui? Où en étiez-vous lorsque vous avez lancé ces initiatives? Que voulez-vous faire désormais pour aider les enfants? Excusez-moi d’envisager les choses aussi largement, mais votre témoignage suscite beaucoup de questions pour moi.
Je vous cède la parole, monsieur Cowan. Merci d’être venu.
Je voudrais m'adresser aux personnes qui m’ont fait confiance au nom de la Wesley Smiles Coalition. Je vais parler à ces donateurs.
Au nom de tous les enfants, je leur dirai qu’ils ont parfaitement le droit de demander des réponses, de la transparence et de la reddition de comptes aux organismes de bienfaisance Enfants Entraide et UNIS. Ils ont tout à fait le droit de le faire, d'exiger des documents comme je l’ai fait, de demander une reddition de comptes. J'ajouterai que sans cela, l’esprit du Kenya se retrouvera dans nos propres collectivités, sans réponses et sans transparence.
À ceux qui ont fait des dons parce qu’ils me faisaient confiance en voyant la photo de mon fils, je dirai que je suis aussi venu témoigner ici pour eux aujourd’hui, parce que j’espère que ce processus produira toutes les réponses. J’espère mobiliser les gens qui sont au pouvoir, qui sont beaucoup plus puissants que moi, les gens qui sont, et je cite, beaucoup plus importants dans le monde que je ne le suis, afin de mettre fin à ce problème une fois pour toutes.
Vous n'avez qu'à venir vous présenter. Montrez-nous tous les documents. Montrez-nous tout, pour que les gens reprennent confiance et se remettent au travail, parce qu’au Kenya, les besoins sont grands et ils le seront encore plus pendant et après la pandémie.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Cowan, si ma voix tremble un peu, c’est que je ne sais pas vraiment quoi vous dire. Je suis au Parlement depuis 17 ans, et je ne pense pas avoir été plus ému qu'aujourd'hui en écoutant un témoin ouvrir son cœur à un comité. Tout ce que je peux dire, c’est que ce qui vous est arrivé m'attriste profondément. Je tiens à vous remercier pour votre courage et votre leadership. Je suis nouveau à ce comité et aujourd’hui, je tiens à ce que vous le sachiez, vous m'avez vraiment expliqué l’importance du travail que nous effectuons ici. Nous devons veiller à ce que votre fils Wesley nous a laissé soit bien protégé.
Ce qui m’attriste le plus, c’est l’effet qu’une personne comme vous, victime de fraude, a sur les bonnes personnes. Par la bonté que vous vouliez répandre dans le monde, vous avez attiré d’autres personnes de bien qui voulaient donner de leur temps pour apporter des changements. Notre monde a vraiment besoin de plus de gens de bien, de gens prêts à agir pour le bien, et je vous remercie d'être l'une de ces personnes.
Je n’ai pas beaucoup de questions à vous poser, mais je me demandais — parce que je commence vraiment à sentir l’effet que cette situation horrible aura non seulement sur vous, mais sur beaucoup d’autres personnes liées à cet organisme de bienfaisance — si vous pouviez expliquer aux gens qui nous regardent aujourd’hui pourquoi il est si important que nous fassions du bon travail.
Vous avez dit plus tôt que vous ne saviez pas vraiment qui sont les méchants. Nous ne savons pas non plus qui sont tous les contrevenants. Nous commençons à percevoir une image, une tendance. Pourquoi est-il si important de pointer les méchants du doigt pour rétablir la confiance? Nous devons accroître la transparence et renforcer la confiance dans le système, comme vous le disiez, parce qu'à l’avenir, nous aurons besoin d’un plus grand volume de bon travail comme celui que vous savez si bien accomplir.