:
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de me donner l'occasion de vous fournir quelques explications concernant le système de soins de santé des Forces canadiennes et, notamment, les méthodes et les moyens que nous utilisons pour fournir le soutien sanitaire aux troupes qui se trouvent en Afghanistan.
Je suis le Commodore Margaret Kavanagh. Je suis le directeur général des services de santé et le commandant du Groupe des Services de santé des Forces canadiennes. Je suis accompagnée aujourd'hui, comme vous l'avez dit, par le Brigadier-général Hilary Jaeger, médecin-chef.
Je souhaite commencer mes commentaires par une brève explication de la justification du caractère distinct, au Canada, du système de soins de santé militaire. La Loi constitutionnelle de 1867 a attribué au Parlement fédéral la compétence exclusive en ce qui concerne toutes les questions d'ordre militaire, y compris les soins de santé militaires. La Loi sur la défense nationale confère au ministre de la Défense nationale la gestion et la direction des Forces canadiennes, qui délègue à son tour aux Forces canadiennes, la gestion et la direction des Services médicaux et des Services dentaires.
En outre, la Loi canadienne sur la santé de 1984 exclut les membres des Forces canadiennes de la définition d'un « assuré ». Nous sommes également exclus de la couverture des régimes de soins médicaux et de soins dentaires de la fonction publique. En conséquence, une obligation juridique et morale élevée de fournir aux membres des Forces canadiennes, au Canada et à l'étranger, des soins de santé complets incombe à la direction des Forces canadiennes. En contrepartie de leur engagement et de leur responsabilité illimitée au service de leur pays, les militaires des Forces canadiennes doivent recevoir des soins de santé comparables à ceux qui sont fournis à l'ensemble des Canadiens, tout en étant taillés sur mesure pour répondre à leurs besoins spécifiques.
Le système de soins de santé des Forces canadiennes possède de nombreuses facettes. Dans sa version actuelle, il est lié d'une manière inextricable au système de soins de santé canadien sur tous les plans, tant fédéral que provinciaux. Si vous souhaitez mieux comprendre la manière dont nous prodiguons les soins de santé en Afghanistan, il est important de comprendre préalablement la manière dont nous prodiguons les soins de santé au Canada.
Nos activités au Canada préparent le personnel au déploiement, sur les plans médical et dentaire, et prodigue des soins à ceux et celles qui en ont besoin à leur retour. Nous exerçons des fonctions de santé publique et de protection de la santé; nous acquérons de l'équipement médical et des produits pharmaceutiques; nous formons des professionnels des soins de santé de concert avec le secteur civil; et nous fournissons des soins directs aux patients, principalement dans un cadre de soins de santé primaires. La quasi totalité des soins spécialisés, des services d'hospitalisation et des services de réadaptation sont maintenant acquis dans le système civil, au moyen d'une panoplie de dispositions.
D'une manière générale, les soins de santé au XXIe siècle sont très complexes. Ils nécessitent une surveillance professionnelle appropriée. En qualité de directeur général des Services de santé, je suis responsable envers le CEMD, par l'intermédiaire du chef--personnel militaire, en ce qui concerne la direction, la gestion et l'administration du système de soins de santé des Forces canadiennes. En qualité de commandant du Groupe de Services de santé des Forces canadiennes, il est de mon devoir de mettre sur pied et de soutenir des unités, des sous-unités et des individus compétents en matière de soins de santé et prêts au combat, qui sont capables de soutenir la marine, l'armée et la force aérienne dans les opérations. Cette responsabilité englobe le développement professionnel, la formation et la préparation du personnel de santé de manière à permettre à celui-ci d'exercer ses fonctions opérationnelles. Les Services de santé des Forces canadiennes comptent 19 groupes professionnels différents, allant des médecins et dentistes militaires spécialisés jusqu'à divers groupes de techniciens médicaux et dentaires, dont chacun est formé d'une manière particulière et fait l'objet d'exigences spécifiques en matière de perfectionnement professionnel.
En sa qualité de médecin-chef des Forces canadiennes, le médecin-chef se concentre sur la surveillance professionnelle de la pratique de la médecine clinique dans les Forces canadiennes. Je dispose également des services d'un homologue au médecin-chef en la personne du directeur des Services dentaires, qui est responsable de la surveillance professionnelle de la pratique de l'art dentaire dans les Forces canadiennes.
Les principales responsabilités du Brigadier-général Jaeger englobent la détermination des politiques cliniques; la délimitation des champs de pratique cliniques — ce qui veut dire simplement la détermination des tâches particulières qui incombent à chaque catégorie de fournisseurs de soins de santé; la détermination des contenus cliniques professionnels, tant des cours officiels des FC tels que ceux qui sont offerts par notre école à Borden, que des cours qui font partie de ce que nous nommons le « programme de maintien des compétences cliniques » et enfin, l'examen en dernier ressort des plaintes concernant, soit les soins cliniques, soit la pratique des FC en matière de santé au travail. Le médecin chef établit les priorités des FC en matière de recherche médicale, exerce les fonctions d'interlocuteur entre le Groupe des Services de santé des Forces canadiennes et les organismes provinciaux de réglementation professionnelle, et exerce les fonctions de gardien en ce qui concerne la déontologie professionnelle en matière clinique et la compétence pour pratiquer la médecine dans le cadre des FC.
Une comparaison approximative dans le domaine civil de nos relations serait celle entre le président du conseil d'administration d'un hôpital et son chef du personnel médical. Je qualifie la comparaison d'approximative en raison de la grande complexité des fonctions, par rapport à celle qu'on trouve au sein d'une institution unique, que provoquent les aspects sanitaires de l'organisation militaire des soins de santé. Moi-même, mon équipe de commandement, ainsi que les chefs professionnels et techniques dans les domaines médical et dentaire, travaillons de concert pour fournir aux militaires un continuum de soins de santé, tant au pays que dans les missions outre-mer.
Pour cela, le système des soins de santé des Forces armées canadiennes exerce nombre des fonctions de détermination des politiques qu'exercent également Santé Canada et le Service de santé publique, les fonctions de prestations des soins de santé des qui incombent aux régimes provinciaux de santé, la médecine du travail qui relève habituellement des régimes de santé et sécurité des travailleurs, ainsi que les activités d'acquisition et de distribution du matériel et des produits pharmaceutiques qu'on trouve dans le secteur civil. Par ailleurs, nous travaillons en étroite collaboration avec plusieurs autres ministères fédéraux, en particulier celui des Anciens Combattants, afin d'offrir le service le plus approprié aux membres des Forces armées canadiennes en activité et lors de leur transition vers la vie civile.
Lorsque le Groupe des services médicaux des Forces armées canadiennes reçoit l'ordre de participer à des opérations, nous amorçons un processus de planification opérationnel pour déterminer les services sanitaires indispensables à chaque opération. Avant tout, nous évaluons les risques en fonction de la mission, des tâches assignées au personnel des Forces armées et du cadre géographique de la mission. Grâce à notre service de renseignements médical, nous connaissons les risques sanitaires naturels présents dans la région — par exemple le paludisme — et nous préconisons les mesures de prévention qui s'imposent.
De plus, notre service du renseignement nous informe de l'état sanitaire du pays d'accueil, ce qui nous permet de déterminer exactement ce qui devra être fourni à la mission, soit en totalité par le Canada, soit grâce à une participation conjointe de ses alliés. Nous devons tout prévoir, des mesures préventives aux soins de routine, tant du côté médical que du côté dentaire, y compris une pleine capacité en spécialités médicales et en chirurgie. Nous devons disposer d'une chaîne d'évacuation robuste par des moyens terrestres et aériens pour satisfaire les besoins tactiques, ainsi que d'une capacité d'évacuation stratégique par avion pour ramener les patients au Canada.
Tous ces aspects des soins de santé sont actuellement satisfaits en Afghanistan grâce à de solides ententes multinationales et grâce à nos installations situées sur la base aérienne de Kandahar. Nous avons par ailleurs des ententes avec nos partenaires de la coalition, qui prévoient que dans l'éventualité où nos installations seraient débordées par un afflux massif de blessés, leurs services accueillent nos patients.
En conclusion, la mise en place d'un service de soins de santé efficace en appuie de nos troupes déployées en Afghanistan nécessite non seulement une solide capacité sur le terrain, mais également des mesures appropriées de préparation au déploiement et de réadaptation après le déploiement. Pour s'acquitter de toutes ces tâches, les Forces armées canadiennes ont besoin d'un personnel médical atteignant les plus hauts degrés de l'excellence en tant que professionnels militaires et médicaux, appuyées par un système civil de soins de santé efficace.
Enfin, nous devons assurer ce niveau de soutien médical à une époque où tous les pays occidentaux luttent pour faire face à la demande en personnel de leur régime de soins de santé. Néanmoins, le personnel médical civil et militaire qui travaille au sein du système de santé des Forces armées canadiennes se consacre à la santé et au bien-être des hommes et des femmes qui servent au sein des Forces armées.
Voilà qui met un terme à mon exposé liminaire. Je demanderai au médecin-chef d'évoquer certains problèmes cliniques qui relèvent du contexte opérationnel actuel.
:
Merci, commodore Kavanagh.
Monsieur le président et membres du comité, j'apprécie d'avoir la possibilité de vous entretenir de sujets qui suscitent votre intérêt à la suite de expériences opérationnelles récentes des Forces canadiennes.
J'aimerais commencer par faire certaines observations générales concernant les blessures subies au cours des opérations modernes. Mes observations sont basées sur des données des États-Unis sur leurs expériences militaires en Irak et en Afghanistan. Cependant, les données canadiennes semblent confirmer ces tendances.
La tendance à laquelle il faut accorder davantage d'importance est que les soldats survivent présentement à des situations auxquelles ils n'auraient pas survécu dans des conflits antérieurs. Cela ne peut probablement pas être attribué à un développement en particulier, mais à une combinaison d'efforts. De meilleurs renseignements, de meilleures tactiques, de meilleurs véhicules et, certainement, de meilleurs gilets de protection balistique ont tous joué un rôle important.
[Traduction]
Mais aux services de santé, nous pensons que ce succès est notamment dû à l'amélioration des soins sur le champ de bataille, qui commence au niveau du soldat, chacun d'entre eux ayant suivi une formation supplémentaire en premiers soins, où il apprend à faire un garrot et à se servir de notre nouveau pansement compressif et des agents hémostatiques dont il est toujours équipé.
Les soldats sont encadrés par des militaires qui ont suivi une formation concernant les soins à donner aux blessés en situation de combat. Il s'agit d'un cours de deux semaines où ils acquièrent des compétences supplémentaires. Nos techniciens médicaux sont formés initialement en tant qu'infirmiers de soins primaires et au rang de caporal, ils sont également formés aux soins émergents et peuvent effectuer un triage sélectif en matière de soins ambulatoires. La quasi-totalité des patrouilles envoyées en Afghanistan sont accompagnées d'un technicien médical.
Les techniciens médicaux sont encadrés par un adjoint médical ou par un médecin militaire, et nous disposons évidemment, sur la base aérienne de Kandahar, d'un hôpital de dimension réduite, mais très efficace. Les membres du comité apprendront sans doute avec intérêt que cet hôpital est le premier établissement militaire canadien à utiliser un tomodensitogramme.
Nos militaires soignants sont désormais plus sûrs de leurs compétences, grâce au programme d'entretien des aptitudes cliniques, dans le cadre duquel le personnel soignant en uniforme est détaché des cliniques de l'armée pour être affecté dans un établissement de santé offrant toute la gamme des services et nécessitant une gamme beaucoup plus vaste de compétences, à raison de 20 p. 100 du temps de travail pour un médecin de médecine générale et de près de 100 p. 100 pour un médecin spécialiste.
Nous pouvons être fiers de donner à nos soldats une meilleure chance de revenir vivant des opérations, mais pour un certain nombre de ces militaires, la chance est sans doute relative, dans la mesure où ils peuvent se trouver confrontés à d'importants handicaps. L'effet combiné de l'efficacité de notre matériel de protection individuelle et de la tendance actuelle de l'adversaire à attaquer avec des engins explosifs de fortune se traduit par des types de blessures différents de ce que l'on connaissait antérieurement. Les blessures au thorax et à l'abdomen sont moins nombreuses, alors qu'elles le sont davantage aux extrémités et entraînent un plus grand nombre d'amputations traumatisantes. Les traumatismes crâniens sont plus nombreux que lors des conflits précédents. De ce fait, dans la planification des soins sur place, le chirurgien orthopédiste est tout aussi indispensable que le chirurgien généraliste, alors qu'au cours des précédents conflits, ce dernier était au centre de l'action, l'orthopédiste étant considéré comme un atout facultatif.
[Français]
Ce type de blessures nécessite de multiples interventions chirurgicales lorsque les victimes reviennent au Canada, ainsi qu'une longue période de réadaptation.
Je crois que les membres du comité savent déjà que les Forces canadiennes ne fournissent pas ces services, mais que nous travaillons en collaboration avec des institutions et des prestataires civils. L'étendue des Forces canadiennes au Canada, conjuguée aux responsabilités provinciales en matière de soins de santé, pose un défi constant, celui d'assurer l'uniformité de la qualité des soins de santé à nos membres. C'est un défi que nous avons relevé.
Il est important de noter que les Forces canadiennes, contrairement aux forces des États-Unis, ne peuvent exploiter un hôpital de soins tertiaires ou un centre de réadaptation. Nous n'avons pas les employés en soins de santé appropriés pour cela et, même si nous faisions un effort pour regrouper tous les blessés des Forces canadiennes dans un seul établissement, ce qui causerait de nombreux désavantages du point de vue de la famille, du membre et du réseau de soutien social, nous n'aurions pas assez de patients pour développer ou maintenir un niveau acceptable d'expertise.
[Traduction]
Les membres du comité aimeraient peut-être également savoir comment nous organisons les soins de santé mentale pour les militaires déployés, et ils se demandent peut-être si nous en faisons assez pour prévenir, détecter et traiter la maladie mentale. Sans doute sera-t-il préférable pour vous que je décrive toutes les activités de santé mentale qui entourent le cycle du déploiement. Ces activités ne relèvent pas toutes des services de santé. L'entraînement suivi avant le déploiement est une importance capitale pour au moins deux raisons : tout d'abord, plus le militaire a confiance en ses aptitudes, plus il pourra réagir en cas de danger; et deuxièmement, plus il a le sentiment de faire partie d'un groupe homogène, mieux cela vaut pour sa santé mentale, et l'entraînement collectif est extrêmement important pour favoriser l'homogénéité dans l'équipe.
Tous les soldats subissent un contrôle psychosocial général mais minutieux avant leur déploiement. Normalement, les conjoints sont invités à y assister également. Ces séances permettent d'évoquer les préoccupations personnelles ou les circonstances qui vont aggraver les difficultés du militaire, qu'il s'agisse de sa propre santé, d'un parent souffrant ou d'une procédure judiciaire en instance, et d'évaluer les conséquences du déploiement sur ces éléments de stress. Le militaire subit également une visite médicale générale avant de recevoir le feu vert pour partir en mission.
[Français]
Pendant qu'il est sur le théâtre d'opérations, le membre peut avoir accès à une équipe de soins en santé mentale qui compte un psychiatre, une infirmière en santé mentale et un travailleur social. Les membres peuvent aussi discuter de leurs problèmes avec un aumônier ou un omnipraticien militaire.
Nous croyons que la nouvelle génération de leaders dans le domaine des armes de combat est très au fait du rôle crucial qu'elle joue en matière de santé mentale du personnel. Ces leaders doivent prendre en considération les réactions émotionnelles possibles lors de chaque incident, ils doivent encourager le soutien des pairs et ils ne doivent pas hésiter à demander des conseils.
À la discrétion du commandant de la force d'intervention, un processus connu sous le nom de « décompression dans une troisième location » est déclenché. Pour la mission en cours, cela implique un arrêt de quelques jours à Chypre dans le but de minimiser la tension associée au retour à la maison. Alors que le but de cette activité est le repos et la récupération des soldats, il y a aussi un élément pédagogique par lequel nous espérons que les membres deviendront capables de reconnaître, de comprendre et, dans certains cas, de contrôler leurs réactions émotionnelles à certaines situations.
[Traduction]
Au bout de quatre à six mois après leur retour, tous les militaires déployés subissent ce que nous appelons un examen post-déploiement étendu, qui se compose d'un questionnaire normalisé assez complet, puis d'une entrevue individuelle plus ou moins structurée avec un professionnel de la santé mentale. À notre avis, il s'agit d'un excellent outil de détection précoce des problèmes de santé mentale et de la difficulté à faire face au stress. En outre, nous considérons que c'est bien au bout de quatre à six mois qu'il faut procéder à cet examen, chez certaines personnes, des symptômes initiaux auront disparu spontanément, tandis que dans d'autres cas, l'apparition des symptômes aura été retardée ou l'individu acceptera plus facilement de reconnaître qu'ils ont été présents depuis son rapatriement. Évidemment, un militaire qui s'inquiète de sa santé mentale peut en tout temps obtenir de l'aide auprès de différentes sources, sans devoir attendre cet examen.
[Français]
Si un membre ressent le besoin d'avoir une évaluation additionnelle ou un traitement, il peut être acheminé au prestataire de soins approprié. Nous croyons que nos membres profitent d'un meilleur accès aux soins en santé mentale que le Canadien moyen. Mais nous savons aussi que plus les traitements appropriés commencent tôt, meilleures sont les chances de récupération pour le membre. Pour ces raisons, nous sommes en train d'augmenter le nombre de nos prestataires en santé mentale dans tout le pays. En travaillant avec Anciens combattants Canada et la Gendarmerie royale du Canada, nous établirons un réseau conjoint de cliniques de santé mentale.
[Traduction]
Monsieur le président, mesdames et messieurs, j'aurais encore bien des choses à vous dire concernant les Soins de santé dans les Forces armées canadiennes, mais je ne veux pas priver les membres du comité de leur temps de parole. Le commodore Kavanagh et moi-même tenons à vous remercier de votre intérêt et de votre attention; nous sommes prêtes à répondre à vos questions.
:
Nous sommes assurément mieux lotis aujourd'hui qu'il y a cinq ans. Il y a plus de cinq ans, en 2000, nous avons lancé un projet baptisé Rx2000, qui comportait entre autres une vaste opération de mise à niveau d'amélioration des services que nous offrons sur le territoire.
Pour vous donner quelques exemples, il n'y avait jadis dans un très grand nombre de nos bases que du personnel en uniforme. Il pouvait y avoir un chirurgien et deux ou trois médecins, plus quelques techniciens en uniforme. À l'heure actuelle, dans la très grande majorité des cas, plus de la moitié des membres du personnel sont des civils, et on compte dans chaque base au moins deux à trois fois plus de personnel médical, personnel infirmier, infirmiers praticiens, médecins, auxiliaires psychosociaux comme des psychologues, des travailleurs sociaux, etc., pour répondre aux besoins de nos effectifs. Cet état de chose est la résultante directe du projet que nous avons commencé à mettre en place il y a cinq ans et demi.
Je dis bien commencé à mettre en place, parce que l'opération se poursuit, elle n'est pas terminée, et nous n'arrêtons pas d'apporter des améliorations. Il faudra encore quelques années avant que tout ne soit terminé. Mais comme c'est le cas pour le personnel médico-sanitaire en uniforme, la concurrence est féroce pour le personnel médico-sanitaire civil. Malgré tout, les choses se sont nettement améliorées par rapport à l'époque où j'étais général et où je voyais moi-même des patients.
:
Mais ils ne reviennent pas tous à Petawawa. Tout dépend de la brigade dans laquelle ils sont déployés. Les soldats de la 2
e Brigade viennent de Petawawa. Dans le cas de la dernière rotation, ces soldats appartenaient à la 1
ère Brigade et ils étaient tous originaires en majorité d'Edmonton ou de Shilo au Manitoba. Comme l'a dit le chef des services médicaux, on a de meilleures ressources en ville que dans les régions rurales. C'est la même chose dans la vie civile.
Le projet dont j'ai déjà dit un mot, le projet Rx2000, comportait un important volet santé mentale. Il va permettre de renforcer le personnel qui s'occupe des problèmes de santé mentale. Mais en réalité, Petawawa est un peu en retard au niveau de la mise en oeuvre du projet, et cela pour plusieurs raisons. Nous avons là-bas des problèmes d'infrastructure, nous avons du mal à recruter des professionnels prêts à aller travailler dans la vallée de l'Outaouais. C'est une réalité incontournable aujourd'hui. C'est une région qui est déjà mal desservie dans le secteur civil. Il est difficile de faire venir des professionnels dans les régions un peu plus éloignées; et dans ce cas-ci, à deux heures de route d'Ottawa, c'est ce qu'on considère comme une région éloignée.
Mais nous ne négligeons pas Petawawa pour autant. Nous essayons de trouver une solution, et nous avons déjà en place un plan très vigoureux dans ce sens. Petawawa est également appuyée par toutes les ressources que nous avons ici à Ottawa. Je sais qu'elles ne sont pas sur place et que cela ne répond pas vraiment aux voeux des gens. Mais nous avons un plan pour remédier au problème, et cela malgré le fait qu'il y a à Ottawa des ressources déjà considérables qui servent à cela et qui peuvent être envoyées sur place — en plus du fait que nous pouvons également envoyer des patients à Ottawa — en réponse à leurs besoins.
Mais je le répète, je ne pense pas avoir vu les données que vous avez sous les yeux. Comme on dit, il y a les statistiques, et il y a les fichues statistiques, et tout dépend de la façon dont on les interprète. Nous sommes également en train de mettre en place un système d'archivage électronique fort bien fait, ce qui nous permettra également de mieux analyser toutes les données épidémiologiques relatives à toutes sortes de conditions médico-sanitaires lorsque ce système sera entièrement opérationnel. Je le répète, nous ne sommes pas encore là, mais cela s'en vient. D'ici là, tant que nous n'aurons pas la possibilité d'analyser toutes les statistiques, je répugnerais un peu à en tirer trop de conclusions.
:
En ce qui concerne les médecins, par exemple, il nous manque environ 30 p. 100 de nos effectifs d'omnipraticiens dans les grades de capitaine et de major, c'est-à-dire les gens qui fournissent actuellement les soins dans les bases. C'est donc un problème.
Pour les francophones, c'est encore pire. Nous avons une pénurie encore plus importante de médecins francophones.
Nous essayons de faire face à ce défi et de pallier cette pénurie en embauchant des médecins civils. Cela nous demande un effort constant.
En ce qui concerne les pharmaciens, la pénurie est de l'ordre d'environ 50 p. 100 dans tout le pays. Une fois de plus, nous nous tournons vers le secteur civil pour embaucher des pharmaciens civils.
Cependant, les militaires peuvent faire certaines tâches que les civils ne peuvent pas faire. Il y a une différence entre les deux. Le fait d'avoir trop de civils pour fournir les soins nuit à notre flexibilité, surtout lorsque de nombreux militaires sont déployés. Pour ceux qui restent derrière, le travail devient de plus en plus difficile.
[Traduction]
Ce sont des gens dévoués. Ils tirent fierté de bien faire leur travail. Ils savent que ce qu'ils font est important et ils tiennent absolument à s'assurer que, surtout lorsqu'il s'agit de blessés qui rentrent au pays... Jamais je n'ai entendu quelqu'un dire « Je pars pour le week-end; je ne pourrai pas être là pour accueillir l'avion qui revient. » Jamais je n'ai entendu de réactions comme ça.
[Traduction]
Je vais répondre en anglais parce que je pense que je vais mieux l'expliquer.
C'est une question d'arithmétique. Un certain nombre de médecins sont déployés en Afghanistan. Nous avons un nombre donné d'infirmières et d'infirmiers. Nous avons un certain nombre de techniciens en soins médicaux. Ces personnes ne sont donc pas disponibles pour dispenser des soins au Canada.
Non seulement elles ne sont pas disponibles mais leurs remplaçants, qui sont déjà en formation préalable au déploiement, ne sont pas disponibles non plus. Dans certains cas, ceux qui les remplacent, parce qu'ils sont en congé post-déploiement, mettent un peu de temps à revenir au travail. C'est donc dire que pour chaque personne déployée, il y a en fait entre deux et deux personnes et demie qui ne sont pas disponibles au Canada pour faire le travail qui doit être fait.
D'un autre côté, ce genre de travail est très motivant. De fait, à bien des égards, c'est la raison pour laquelle ils se sont enrôlés. C'est l'expression la plus authentique de ce que cela veut dire d'être un dispensateur de soins de santé dans l'armée. Ce peut donc être très motivant, sauf peut-être pour les familles.
:
J'ai maintenant une liste de souhaits.
Malheureusement, j'ai oublié la première partie de la question. Que voulez-vous savoir? Ce qui manque?
Une voix: Le genre de blessures.
Bgén Hilary Jaeger: Oh, le genre de blessures. Je suis désolé.
Avant que tout le monde ne porte des vêtements pare-balles et avant que l'on achète des vêtements qui couvraient davantage le corps avec des plaques de céramique et autres choses, les blessures de guerre typiques lors des conflits comme ceux du Vietnam, de la Corée et de la Seconde Guerre mondiale étaient une combinaison de blessures causées par des shrapnels, des projectiles balistiques ou des coups de fusil pointé. Il y a maintenant très peu de coups de fusil, il y a des blessures causées par les shrapnels, mais puisque le tronc est protégé, ces blessures sont presque toujours dans les extrémités.
La blessure typique au ventre qui était très difficile à traiter pendant la Seconde Guerre mondiale et la guerre de Corée et celle du Vietnam n'est plus très courante aujourd'hui et n'a certainement rien à voir avec les autres choses qui posent davantage un problème. Ces blessures étaient habituellement fatales. On n'a peu de chance de survie lorsqu'on reçoit une balle à la poitrine ou en plein coeur.
Étant donné que ce genre de blessure est maintenant plus rare, nous avons proportionnellement beaucoup plus de blessures aux extrémités et de traumatismes crâniens. Nous avons été impressionnés par la capacité de certains de nos soldats de se remettre de ces traumatismes crâniens fermés. Le docteur Bennett vous dira que qu'un coma de trois sur l'échelle de Glasgow peut être attribué à un décès. Il y a des gens qui sont arrivés à notre établissement de traitement qui avaient un trois à l'échelle de Glasgow et qui sont sortis de l'hôpital deux mois et demi ou trois mois plus tard, et aucun d'entre nous n'aurait pu prédire un tel résultat. Ces nouveaux types de blessures nous apprennent donc beaucoup de choses.
Qu'est-ce que j'aimerais avoir dans le théâtre? En fait, j'aimerais avoir n'importe quoi de plus en ce qui concerne le matériel médical. J'aimerais avoir deux fois plus de chirurgiens généralistes et de chirurgiens orthopédiques, afin de pouvoir maintenir la rotation indéfiniment. J'ai besoin de spécialistes bien formés, qui ont de l'expérience et qui sont très motivés.
Voulez-vous autres choses?
:
J'ai eu l'occasion de visiter Kandahar en mai et Landstuhl en Allemagne. J'ai donc vu les deux installations. Le surgeon général s'y rendra au cours de la prochaine année.
Au début de notre chaîne d'évacuation, notre installation à Kandahar est un hôpital en contreplaqué, mais il fournit des soins de premier ordre. Ils y font des choses fantastiques. Les Américains nous fournissent aussi une chaîne d'évacuation. Des services de soins intensifs se trouvent en arrière des avions. Lorsque les blessés arrivent à Landstuhl, ils reçoivent également des soins hors pair. Si un patient reste à Landstuhl assez longtemps ou si sa blessure est grave — d'habitude, un patient reste longtemps parce que sa blessure est grave — alors on fait venir sa famille.
Fisher House ressemble à la maison de Ronald McDonald, que vous connaissez peut-être au Canada. On y trouve un endroit où loger, du soutien et de la nourriture. Fisher House se trouve sur une base américaine, ce qui représente un environnement amical adapté à la réalité culturelle. Cela réduit le stress auquel fait face la famille, surtout lorsqu'elle n'a jamais été en Allemagne, ne parle pas allemand, et ne comprend pas la culture. De plus, le foyer se trouve à une distance de marche de l'hôpital. Les membres de notre personnel sont traités exactement de la même manière que les Américains qui utilisent cette installation. Ils réconfortent les blessés et leur famille, et s'en occupent.
Ces foyers se retrouvent sur plusieurs bases américaines. Le foyer a d'abord été mis sur pied par un homme et une femme dont le nom de famille était Fisher. Il s'agissait au début d'une oeuvre caritative lancée par deux Américains prospères. Après leur mort, ils ont laissé une fondation pour qu'on continue de faire fonctionner les foyers. Le réseau est en train de s'élargir. Les foyers sont désormais financés grâce à des levées de fonds.
Dans mon ancienne unité à Edmonton, la 1reAmbulance de campagne — j'étais le commandant sous la direction du général Cox...
Je vais à nouveau répondre en anglais dans l'intérêt de ma santé mentale et par souci de clarté.
Quand nous examinons les statistiques relatives au théâtre des opérations, nous utilisons diverses catégories établies selon la nature des traumatismes subis par les militaires. Ils peuvent être tués au combat, et par définition cela signifie essentiellement parce qu'ils ont été vus par le personnel médical, qu'il n'y avait plus de signes vitaux. Le personnel médical n'a pu que constater le décès.
Il y a aussi ceux qui sont décédés des suites de leurs blessures, statistique que l'on entend peu souvent. Il s'agit de personnes qui succombent à leurs blessures après avoir reçu des soins des professionnels de la santé.
Il y a ceux qui sont blessés au combat et l'expression se passe presque d'explications : ils sont blessés lors d'un contact direct avec un adversaire. La blessure n'est pas nécessairement due à une balle, un éclat d'obus ou une explosion. Cela peut signifier que le véhicule dans lequel la personne prenait place a quitté la route, a fait un tonneau ou a été impliqué dans un accident de la route: la personne est néanmoins blessée au combat.
L'autre grande catégorie englobe la maladie et les blessures autres que celles subies au combat. Ici encore, pas besoin d'explications. Une personne devient malade, et n'est pas blessée, ou elle est blessée en faisant une promenade, en tombant dans la douche, en se coupant avec un couteau dans la cuisine. Ce serait des blessures autres que celles subies au combat. Dans nos statistiques, il y a eu 171 blessés au combat et je ne crois pas que cela inclut la maladie et les blessures autres que celles subies au combat.