FAIT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE
COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 1er mai 2001
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.)): La séance est ouverte.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous sommes heureux de recevoir aujourd'hui le ministre des Affaires étrangères de la République d'Albanie, M. Paskal Milo.
C'est un plaisir pour nous de vous accueillir. Nous sommes honorés de votre comparution devant notre comité. Pourriez-vous nous présenter les personnes qui vous accompagnent?
M. Paskal Milo (ministre des Affaires étrangères, République d'Albanie): Oui. Merci.
• 0915
Je suis accompagné aujourd'hui de M. Sulo, secrétaire
général du ministère des Affaires étrangères; de notre
ambassadeur au Canada, M. Bushati, et de M. Talka, le responsable
de secteur pour le Canada au ministère des Affaires étrangères.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Enchantée de faire votre connaissance. C'est la première fois que nous recevons la visite du ministre des Affaires étrangères de l'Albanie et nous sommes très heureux de vous accueillir parmi nous.
Voici comment nous procédons en comité: je vous invite à faire une déclaration, vous ou l'un de vos collaborateurs, après quoi nous vous posons des questions.
Je vous cède la parole.
M. Paskal Milo: Merci.
Comme vous l'avez dit, il s'agit de la première visite dans votre pays d'un ministre aux Affaires étrangères d'Albanie. C'est la première fois de l'histoire. Jamais un ministre des Affaires étrangères d'Albanie n'est venu au Canada. Pour cette raison, dès que mes collègues et moi-même avons commencé à préparer cette visite, nous avons cherché à ce qu'elle se tienne le plus tôt possible.
Nous avons évidemment des raisons de venir ici. Tout d'abord, nous voulons montrer à la population canadienne que nous avons un grand respect pour ce pays immense, qui joue un rôle très important sur la scène internationale et qui est membre à la fois de l'OTAN et du G8.
L'Albanie essaie de nouer d'excellentes relations et d'établir une coopération avec de nombreux pays, non seulement ceux qui l'entourent, en Europe, mais aussi sur d'autres continents, en particulier les grands pays qui jouent un rôle important. C'est pourquoi au cours des années nous avons tenté d'établir un rapprochement avec votre pays mais à cause de la transition qu'a traversé notre pays, une période difficile pour nous, les visites de haut niveau n'ont pas été possibles.
Nous avons toutefois déjà échangé des visites. D'autres ministres sont venus au Canada et le vice-président de votre Chambre des communes est venu en Albanie en 1996. Notre président d'assemblée devait venir au Canada en 1997, mais la crise du printemps de cette année-là l'en a empêché.
Mais nous sommes ici. Hier, nous avons inauguré l'ambassade d'Albanie. Un petit pays comme l'Albanie a ouvert une ambassade pour montrer ses intentions, comme je l'ai dit, vis-à-vis du Canada, pour montrer que nous aimerions renforcer la coopération dans tous les domaines. Hier, avec mes collègues et beaucoup d'autres ministres, nous avons discuté de coopération entre l'Albanie et le Canada, une coopération qui doit se concentrer non seulement sur les secteurs politiques et économiques, mais aussi dans les domaines de la culture, de l'éducation, des échanges universitaires, etc.
Nous avons discuté avec le ministre de la Défense de coopération dans ce domaine. Nous appartenons au Partenariat pour la paix et collaborons de près avec les autres partenaires de l'OTAN. Le Canada, membre de l'OTAN, soutient notre intégration à la structure de l'organisation.
J'aimerais maintenant parler brièvement de la situation en Albanie. L'Albanie traverse actuellement une période de transition. Ces quatre dernières années, il a fallu travailler dur pour surmonter les difficultés créées dans tous les pays d'Europe de l'Est, et en particulier en Albanie, après la crise de 1997.
• 0920
L'Albanie connaît maintenant la stabilité. Notre sécurité et
notre développement économique sont également excellents. Ces deux
dernières années, notre croissance économique a été d'environ
8 p. 100. Nous prévoyons la même chose pour cette année. Le taux
d'inflation varie entre 2 et 4 p. 100. Cela ouvre de bonnes
perspectives de développement microéconomique.
Le FMI et la Banque mondiale sont tous les deux présents en Albanie. Ils collaborent de près avec le gouvernement pour s'assurer que le développement économique se conforme de près aux paramètres qui nous permettent d'appliquer notre politique d'appui au développement stable d'une économie de marché.
Qu'en est-il de la situation politique? Notre pays est beaucoup plus stable politiquement qu'il y a quatre ans, lorsque les partis politiques s'entre-déchiraient. Ceux-ci ont appris et sont beaucoup plus modérés dans leurs relations les uns avec les autres.
Le Parti démocratique, principal parti d'opposition, ainsi que d'autres partis plus petits suivent des pratiques politiques excellentes. Nous n'avons plus autant de tensions que par le passé. Évidemment, au moment où je comparais devant votre comité et comme je suis moi-même parlementaire, je ne veux pas accuser l'opposition. Toutefois, cela se fait souvent dans notre Parlement, parce que tel est le rôle de l'opposition, de voir si le gouvernement fait des erreurs et de le critiquer.
À ce propos, je dois dire que notre opposition et notre gouvernement de coalition apprennent ensemble, chaque jour, comment pratiquer la politique, comment européaniser notre politique, nos relations et délaisser la politique telle qu'elle se pratique dans les Balkans. Comme Winston Churchill l'a dit il y a de nombreuses années, les Balkans produisent beaucoup plus d'histoire qu'ils n'en consomment.
Il nous faut donc apprendre. Nous devons nous conduire comme des politiciens modernes, apprendre à travailler ensemble pour relever les défis de ce petit pays et de l'Europe du Sud-Est en général. J'ai le plaisir de vous dire que nous avons fait d'excellents progrès dans les secteurs que je viens d'énumérer. De nouvelles perspectives s'ouvrent pour l'Albanie, au moment où elle passe d'une période de transition à une période de développement économique stable.
L'économie de marché s'améliore de jours en jours. Il en va de même pour les droits de l'homme et des minorités. Certes, nous avons des difficultés reliées à la sécurité, aux trafics illégaux et à la criminalité organisée ainsi qu'au chômage. Il y a évidemment d'autres problèmes communs à l'ensemble des Balkans issus des tensions et des conflits dans les pays voisins.
• 0925
Qu'en est-il de notre coopération avec ces pays? Je vous
assure que l'Albanie joue un rôle très important dans les relations
avec les autres pays pour la stabilité et la sécurité de la région.
L'Albanie mène le processus de coopération dans l'Asie du Sud-Est,
une initiative régionale très importante.
Dans deux semaines se tiendra à Tirana une réunion de tous les ministres des Affaires étrangères de l'Europe du Sud-Est, où nous discuterons d'intégration régionale européenne—comment l'intégration régionale aide nos pays à s'intégrer aux structures euro-atlantiques. Nous discuterons également brièvement de trafic et de criminalité organisés. Il nous faut dorénavant combattre avec succès ce phénomène qui n'est pas le seul lot des Balkans, mais celui de toute la communauté internationale.
Dans les relations avec les autres pays de la région, nous tâchons d'apporter notre contribution au règlement des tensions et des conflits. Nous cherchons par exemple à assurer la stabilité de la Macédoine. Les derniers développements dans ce pays montrent que celui-ci est trop fragile. Il doit y avoir une coopération entre les groupes ethniques là-bas—entre les Macédoniens, les Albanais et les autres communautés de petite taille.
Comme vous le savez, il y a deux mois, des groupes extrémistes ont organisé des actions en Macédoine en bordure de la frontière avec le Kosovo dans le but d'imposer des changements à la constitution et d'obtenir par la violence certains droits pour les Albanais. La majorité des Albanais ont rejeté cette méthode. L'Albanie a non seulement refusé de soutenir mais même condamné vigoureusement ces groupes extrémistes. Nous avons encouragé le dialogue—une solution pacifique—et nous continuons de le faire.
Dans la région, l'Albanie a de l'influence sur les Albanais du Kosovo, de la Macédoine ou du Monténégro. Elle jouera un rôle très important pour la stabilité de la région—la Macédoine en particulier. Nous essayons de convaincre les extrémistes de renoncer à leurs méthodes et de respecter les institutions et les solutions issues des partis politiques et des institutions légitimes.
Nous continuerons dans cette voie parce que cela est très important non seulement pour la Macédoine mais aussi pour l'Albanie. Car en l'absence de stabilité et de sécurité dans l'un des pays des Balkans—en l'espèce la Macédoine—, il n'y aura pas de stabilité en Albanie ou vice versa. Tout est relié à la stabilité des autres pays.
Nous ferons la même chose au Monténégro. Les dernières élections nous ont montré que la différence est trop faible entre ceux qui soutiennent l'indépendance et ceux qui préconisent la fédération. Il est indispensable de traiter ce dossier avec précaution car les tensions, les conflits ou même la guerre civile pourraient facilement éclater. C'est pourquoi l'Albanie favorise les solutions pacifiques, propices à l'équilibre interne, à une réduction des tensions, au profit de la stabilité interne du Monténégro, en faveur de la réconciliation nationale, mais aussi propice à la stabilité et à la sécurité de la région tout entière.
• 0930
Un autre morcellement de la fédération yougoslave, aujourd'hui
trop faible, aurait des répercussions dans toute la région qui ne
nous permettraient pas de poursuivre nos efforts en vue d'une
intégration européenne, aux structures euro-atlantiques, ce qui
nous enlèverait la possibilité de bâtir notre avenir.
Un autre point chaud des Balkans est le Kosovo. Chacun le sait. Je tiens à vous remercier vous et le gouvernement canadien aujourd'hui de l'appui que vous nous avez accordé pendant le conflit au Kosovo, pour l'aide que vous nous avez apportée pendant la crise humanitaire et par la suite, non seulement aux Albanais du Kosovo, mais à la République d'Albanie. C'est pourquoi le Canada est bien connu des Albanais, non seulement comme un grand pays mais pour l'appui vigoureux que vous nous avez accordé pendant le conflit.
La situation au Kosovo s'est beaucoup améliorée par rapport à il y a deux ans. Il a été très difficile d'amener le Kosovo à la situation où il est aujourd'hui. Il y a moins de crimes, moins de tension. La situation se normalise de jour en jour. Les institutions ont commencé à fonctionner. La cohabitation entre les Albanais et les Serbes a commencé à porter ses fruits.
Le Kosovo a besoin de perspectives beaucoup plus nettes. Créer une perspective pour l'avenir de ce pays est une lourde responsabilité, non seulement pour les communautés ethniques qui y habitent, mais aussi pour la communauté internationale et pour nous, pays voisin.
Le Kosovo est placé sous l'autorité internationale de la résolution 1244 du Conseil de sécurité de l'ONU, qui fait office de constitution temporaire pour le Kosovo aujourd'hui. Il y a encore place pour la mise en oeuvre de la résolution 1244, tout d'abord pour bâtir des institutions démocratiques et multiethniques.
Au Kosovo actuellement, il n'y a pas d'institution légitime chargée de gouverner le pays avec l'aide de la communauté internationale. La MINUK est là, et il y a un conseil qui compte des représentants des partis politiques albanais et de la minorité serbe. La question est de bâtir l'avenir de ce pays, non pas à longue échéance, mais à moyenne échéance dans les années à venir.
C'est pourquoi la communauté internationale réclame des élections générales à la fin d'octobre ou au début novembre. Vous êtes membre du G8, et ensemble vous avez décidé au bout du compte—y compris la Russie, qui à l'origine était contre—de tenir des élections à la fin de l'année, ce qui est très important, parce que pour la première fois les institutions que j'ai évoquées seront créées et seront les interlocuteurs responsables avec la communauté internationale, les institutions qui réaliseront l'autonomie gouvernementale de ce pays, qui est nécessaire.
• 0935
Nous ne parlons pas ici du statut définitif du Kosovo. Ni les
Albanais ni les Yougoslaves n'aiment parler de ce sujet, puisque
nous avons des points de vue différents, mais sur une chose nous
nous sommes entendus: il n'est pas possible actuellement de parler
de son statut définitif; il faut d'abord prendre le temps de calmer
les esprits au sujet des Serbes qui rentrent au Kosovo et d'essayer
progressivement de bâtir une société pluriethnique, ce qui n'est
pas chose facile dans les Balkans. C'est trop difficile.
Il y a des comportements historiques, pathologiques parfois, en particulier entre les Serbes et les Albanais. Nous pouvons parler de cohabitation, de coexistence, de société pluriethnique en théorie, et nous pouvons faire des sermons, mais il n'est pas facile sur le terrain de bâtir cette société et ce cadre. Mais il faut commencer à travailler progressivement.
Il y a des signes prometteurs. On discute actuellement au Kosovo du cadre juridique, ou de ce que les Albanais appellent la constitution temporaire du Kosovo, qui conduira aux élections générales. La MINUK fait actuellement du bon travail. Haekkerup essaie d'amener les Albanais et les Serbes à approuver ce cadre juridique. C'est une question de jours. Je ne pense pas qu'à l'avenir il y aura des conflits et des tensions qui détruiront ce que la MINUK et KFOR essaient de réaliser.
Je sais que le Canada a certains de ses ressortissants là-bas dans la KFOR, et vous et la population canadienne payez pour maintenir ces forces là-bas. Chose certaine, vous apportez une contribution importante à la stabilité et à la sécurité de la région tout entière. Vous êtes loin de l'Europe, mais vous savez que les tensions et les conflits là-bas sont importants pour le Canada, car ils peuvent se répandre partout très rapidement, et les intérêts des grands pays comme le Canada ne sont pas confinés au continent nord-américain mais englobent l'Europe.
C'est pourquoi j'espère que le Canada continuera de jouer ce rôle très important en Europe, en particulier en Europe du Sud-Est, pour instaurer une paix et une stabilité durables là-bas. Nous souhaitons la stabilité et la sécurité, car c'est le préalable à notre intégration à l'Union européenne et aux structures euro-atlantiques. Personne ne veut intégrer à des structures si importantes des pays qui entraîneront non pas la paix et la stabilité mais, au contraire, les tensions et les conflits. C'est pourquoi nos pays font de leur mieux.
La Roumanie et la Bulgarie sont dorénavant membres associés de l'Union européenne. Début avril, la Macédoine a signé l'accord de stabilisation et d'association. Quant à elle, l'Albanie achève les pourparlers avec l'Union européenne pour entamer des négociations en vue d'un accord de stabilisation et d'association.
• 0940
Les 16 et 17 mai, la troisième réunion au niveau du groupe de
direction entre l'Union européenne et l'Albanie se tiendra à
Tirana. Il y sera question d'autres points relatifs à la situation
en Albanie et des critères qui s'appliqueront à notre pays. Nous
espérons qu'au sommet de Göteborg à la mi-juin, l'Union européenne
autorisera l'Albanie à entreprendre des négociations en vue d'un
accord de stabilisation et d'association.
La Croatie est presque prête à signer cet accord. La Yougoslavie et la Bosnie-Herzégovine créeront les mécanismes pour réaliser prochainement des études de faisabilité relatives à cet accord. Voilà où en est l'intégration de l'Albanie et des autres pays de la région à l'Union européenne.
Nous essayons aussi de nous intégrer à l'OTAN. Nous sommes membres du Partenariat pour la paix. Nous participons à toutes les activités. Il y a à peine deux semaines, en Albanie, les membres de l'OTAN et de l'armée albanaise ont effectué certains exercices, et d'autres se tiendront en Albanie en juillet. Le 7 mai, nous serons à Bruxelles pour discuter au CPEA du projet de document sur l'Albanie et la situation en général dans le pays. L'Albanie sera représentée par une délégation de haut niveau conduite par le premier ministre.
Qu'en est-il des relations avec les autres pays? Je suis heureux de dire que nous avons d'excellentes relations avec les États-Unis. Nous avons d'excellentes relations avec nos pays voisins, l'Italie et la Grèce. Les investissements italiens sont les premiers en Albanie, et ceux de la Grèce arrivent en deuxième place. Ces deux pays sont les plus proches partenaires de l'Albanie.
Nous avons de bonnes relations avec les autres pays européens et nous avons des échanges politiques intenses et beaucoup de relations économiques avec eux.
J'aimerais continuer, mais je ne veux pas accaparer votre temps, que je sais précieux.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Très bien, car nous avons des questions à vous poser nous aussi.
M. Paskal Milo: Très bien. Je pourrai donner davantage d'explications en réponse aux questions.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.
La parole est à M. Martin.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, AC:) Merci, madame la présidente.
Monsieur Milo, merci beaucoup d'être venu nous rendre visite au Canada. Nous savons que c'est la première fois, comme vous l'avez dit, qu'un ministre des Affaires étrangères de votre pays vient au Canada et j'espère que ce ne sera pas la dernière. Je vous souhaite la bienvenue.
Il a beaucoup été question de la grande Albanie. Pouvez-vous nous dire si le gouvernement de Tirana souhaite la réaliser grâce aux populations albanaises des pays voisins? Pouvez-vous nous dire s'il y a des liens entre l'UCK et votre gouvernement? Dans l'affirmative, en quoi consistent-t-ils?
Merci.
M. Paskal Milo: Y a-t-il d'autres questions ou puis-je répondre...
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Ce sera une personne à la fois. Nous devons répartir le temps disponible pour que chacun ait autant de temps que les autres. Il fait partie de l'opposition.
M. Paskal Milo: J'aimerais répéter ce que j'ai dit hier à propos de la grande Albanie, parce que nous mettons des parenthèses en tant qu'Albanais... J'aimerais vous dire qu'au ministère des Affaires étrangères, nous avons préparé un petit ouvrage en anglais qui sera distribué dans deux semaines. J'en enverrai des exemplaires à notre ambassade ici et vous aurez l'occasion de voir de façon détaillée la position de l'Albanie sur cette question. Nous y expliquons le contexte historique de ce que l'on appelle la grande Albanie, ce qu'est la réalité et pourquoi aujourd'hui certains utilisent ce slogan et dans quel but.
• 0945
Tout d'abord, comme je suis historien, j'aimerais vous dire
quelques mots. Il n'y a jamais eu d'État appelé la grande Albanie,
comme ont prétendu ou prétendent encore certains pays des Balkans
qui veulent eux-mêmes créer une grande Grèce, une grande Serbie,
une grande Bulgarie ou une grande Roumanie. À l'époque médiévale,
tous ces pays avaient des États ou des empires et ils prétendent
aujourd'hui vouloir inclure tous ces pays dans la grande Grèce, par
exemple. N'oubliez pas l'Empire byzantin. Certains milieux
nationalistes grecs prétendent aujourd'hui avoir les mêmes
territoires que ceux que possédait jadis l'Empire byzantin.
En ce qui concerne la grande Serbie, on sait très bien ce qui avait été prévu, et l'ex-Yougoslavie était plus ou moins la grande Serbie. C'est pourquoi cette fédération a été détruite, parce que la philosophie de cet État reposait uniquement sur l'idéologie de la grande Serbie. Il y a d'autres fédérations qui sont fortes et continueront de l'être, parce que le concept de la fédération est un concept moderne et n'est pas le vieux concept de l'État.
Prenons le cas de la grande Roumanie. Il y a aujourd'hui en Roumanie un parti appelé le parti de la grande Roumanie, de Vadim Tudor. C'est le deuxième parti politique en importance en Roumanie, avec 87 députés et 27 sénateurs. C'est le deuxième parti après celui de M. Iliescu, qui est au pouvoir. Le chef de ce parti, Vadim Tudor, a été candidat aux présidentielles en Roumanie. Il a été en ballottage avec le président Iliescu. C'est un grand danger pour ce pays, et en réalité c'est un parti vigoureux qui a beaucoup d'influence.
Je ne veux pas mentionner les autres, mais il y a des partis en Bulgarie, en Grèce, etc.
Qu'en est-il de la grande Albanie? Il y a, évidemment, parmi les Albanais, des gens et des petits partis politiques qui rêvent de créer une prétendue grande Albanie mais qui n'emploient pas l'expression. Celle-ci a été employée pour la première fois durant la Seconde Guerre mondiale, lorsque les Italiens et les Allemands ont divisé la Yougoslavie après l'occupation. À l'époque, l'Albanie était occupée par les Italiens. Lorsque les Italiens ont occupé la Yougoslavie, eux et les Allemands ont divisé le Kosovo et toutes les parties de la Yougoslavie. Les Italiens ont ensuite annexé une partie du Kosovo—pas tout le Kosovo, une partie seulement—à l'Albanie. Le Kosovo et l'Albanie avaient été occupés par les Italiens, et les Italiens, pour satisfaire le nationalisme albanais à l'époque, ont dit qu'ils aidaient les Albanais à créer la grande Albanie. C'est l'origine de l'expression.
Les Albanais eux-mêmes aujourd'hui, dans les cercles nationalistes, affirment ne pas vouloir créer une grande Albanie mais l'Albanie naturelle, l'Albanie réelle, ce qui signifie regrouper tous les territoires albanais dans les Balkans, à savoir la Macédoine, le Kosovo et les Albanais du Monténégro. Certains d'entre eux évidemment prétendent qu'elle devrait englober les territoires aujourd'hui habités par les Albanais du nord-ouest de la Grèce.
• 0950
Les partisans de cette idée sont peu nombreux. Les principaux
partis politiques d'Albanie, du Kosovo et de la Macédoine
n'appuient pas l'idée de la grande Albanie. Le gouvernement
albanais a une autre idée sur la façon dont nous allons rassembler
les Albanais dans l'avenir. Cette idée, c'est d'être réunis dans la
grande famille d'une Europe unie, grâce à l'intégration européenne.
Il vaut beaucoup mieux attendre 10 ou 15 ans que de se battre et de
s'entre-tuer.
À propos de l'UCK, le gouvernement albanais n'a aucune relation avec les extrémistes, avec les dirigeants de l'UCK. Nous ne les connaissons pas et nous ne les acceptons pas. Nous avons la même position que vous.
Parlez-vous de l'UCK au Kosovo—parce que l'UCK au Kosovo n'existe plus—ou parlez-vous de l'armée de libération de la Macédoine, l'armée nationale de libération?
M. Keith Martin: Les deux.
M. Paskal Milo: Au Kosovo, il n'y plus d'UCK. Comme vous le savez, en vertu des accords signés avec le dirigeant albanais au Kosovo après le conflit, l'UCK n'existe plus. Elle a été transformée en corps transitoire, le corps de protection inter-Kosovo... j'ignore son nom. Cela n'existe donc plus au Kosovo.
Qu'en est-il des extrémistes de Macédoine qui ont créé une autre armée de libération nationale là-bas? Nous n'avons aucune relation avec eux et nous les combattons, eux et leurs actions. Nous n'appuyons que la méthode pacifique de règlement des problèmes.
M. Keith Martin: Merci.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Il y a deux autres questions.
Monsieur Dubé, je pensais que nous pourrions entendre votre question, puis celle de M. Patry et que le témoin pourrait répondre aux deux. Est-ce que cela vous irait?
[Français]
M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Je ne suis pas un membre régulier du Comité des affaires étrangères et du commerce international et je voudrais vous poser des questions sur des aspects internes.
Sur la feuille qu'on a ici, on voit que 8 p. 100 des gens de votre pays sont d'origine grecque et qu'on y parle l'albanais et le grec. Votre Parlement fonctionne-t-il dans les deux langues ou dans une seule langue? Seulement en albanais?
[Traduction]
M. Paskal Milo: Il est beaucoup question actuellement de la montée des minorités dans les Balkans et en Albanie.
D'après le dernier recensement officiel, tenu en 1989, la minorité grecque en Albanie comptait environ 60 000 membres. Il s'agit du principal groupe minoritaire en Albanie. Le deuxième est la minorité macédoine et il y a d'autres petits groupes comme les Serbo-Croates, un millier environ, dans un village du nord de l'Albanie. Nous avons des Roms, des Gitans, comme tout autre pays des Balkans, mais nous n'avons pas de chiffres sûrs dans leur cas, parce qu'ils n'ont pas été recensés en 1989.
• 0955
En Albanie, les droits des minorités sont respectés, en
application de textes et de lois appliqués en Albanie. Le premier
est la Constitution. Celle-ci a été rédigée avec l'aide du Conseil
de l'Europe, dont un professeur grec bien connu, député du
parlement européen, M. Tsatsos. Il faisait partie du groupe du
Conseil de l'Europe qui a rédigé la constitution albanaise,
approuvée il y a deux ans.
Nous avons donc une constitution européenne, une constitution moderne, qui fait une place aux minorités. Nous avons aussi une loi sur l'enseignement préuniversitaire dans laquelle sont prévus les droits des minorités en matière d'enseignement dans leur propre langue, et beaucoup d'autres droits.
Je n'ai pas tous les détails, mais je peux vous dire qu'il y a des centaines d'écoles pour les minorités en Albanie. Dans certains cas, nous payons les enseignants pour que les écoles restent ouvertes, même s'il n'y a pas d'élèves. C'est le cas, par exemple, de la population du sud qui appartient à la minorité grecque. Entre 40 et 60 p. 100 des familles travaillent en Grèce. Elles habitent en Grèce. Les villages sont aujourd'hui vides.
Nous payons les enseignants pour qu'ils restent dans les écoles, pour qu'ils les gardent ouvertes malgré l'absence des élèves, car sinon ils partent en Grèce avec leurs enfants et ils mettent leurs enfants dans des écoles grecques. Voilà ce qui se passe là.
Évidemment, il y a des aspects qu'il faut améliorer. Nous ne prétendons pas que l'Albanie soit un modèle de perfection en matière de traitement de ses minorités. Nous continuons à travailler avec ces minorités. Nous avons signé la convention du Conseil de l'Europe sur les minorités.
Nous l'avons ratifiée au Parlement et nous allons envoyer dans les jours qui viennent le premier rapport officiel sur les droits des minorités en Albanie au Conseil de l'Europe, car nous avons signé la convention.
Vous m'avez posé une question sur les autres langues au Parlement. À notre Parlement, nous ne parlons que l'albanais, conformément à la Constitution, car la minorité grecque au Parlement ne représente pas un pourcentage qui justifierait l'emploi de la langue grecque. Il n'y a que quatre députés minoritaires grecs actuellement au Parlement.
La vice-présidente (Mme Coleen Beaumier): Merci.
Monsieur Patry, vous avez la parole.
M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Merci beaucoup.
Merci d'être venue nous rencontrer, excellence.
J'ai eu le plaisir il y a quelques années de déjeuner avec un parlementaire albanais qui faisait partie de la minorité grecque, ici au Canada, à la Chambre des communes. Cette rencontre a été vraiment très agréable.
Vous venez de répondre à une de mes questions. Je voulais vous demander quel était le rôle de la minorité au Parlement et au gouvernement, mais vous venez de me répondre que vous avez quatre députés dans cette situation.
Je crois que de nombreux Albanais cherchent à quitter leur pays. Nous l'avons vu souvent à la télévision. Ils essaient de partir en Europe, surtout en passant par l'Italie, apparemment à cause de la pauvreté, du chômage et de diverses autres raisons. Est-ce que cette tendance à quitter le pays s'est ralentie au cours des derniers mois? Qu'en pensez-vous?
• 1000
Je vous prierais de me répondre aussi vite que possible car
nous allons devoir partir à la Chambre qui va commencer ses
délibérations dans quelques minutes.
M. Paskal Milo: Certainement.
En ce qui concerne votre première question, je précise que le parti des droits de l'homme participe au gouvernement de coalition. Il représente les intérêts de la minorité grecque et il y a deux ministres du gouvernement qui appartiennent à cette minorité grecque.
M. Bernard Patry: Bon.
M. Paskal Milo: Pour ce qui est de votre deuxième question, sur les Albanais qui quittent le pays, effectivement on constate maintenant que les Albanais ont plus tendance à rester chez eux. C'est évidemment une simple tendance actuellement, mais elle évolue positivement.
M. Bernard Patry: Merci.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci, monsieur le ministre. Nous savons que vous êtes un historien et nous sommes donc particulièrement heureux de vous avoir accueilli à ce comité à l'occasion de cet événement historique qu'est l'inauguration de votre ambassade au Canada. J'espère que nous aurons l'occasion de vous retrouver bientôt. Je sais que vous avez rencontré les hauts fonctionnaires du gouvernement, mais nous vous sommes reconnaissants d'être venu rencontrer des députés à ce comité. Merci beaucoup.
M. Paskal Milo: Merci à tous de m'avoir donné cette occasion de vous rencontrer. J'espère vous accueillir un jour à Tirana pour poursuivre cette discussion dans les Balkans.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci. Nous sommes nombreux à souhaiter aller vous rencontrer là-bas aussi.
Nous allons faire une pause de cinq minutes.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Nous reprenons nos travaux.
Avant que nous passions à notre témoin suivant, M. Casey souhaite faire une déclaration.
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Je souhaiterais attirer l'attention du comité sur une démarche qui a déjà commencé et qui progresse remarquablement. C'est vraiment très intéressant, et c'est quelque chose qui a commencé presque par hasard. Il s'agit d'une proposition qui consiste à faire venir des parlementaires palestiniens et israéliens au Canada pour rencontrer des parlementaires canadiens et voir avec eux quel rôle pratique et concret le Canada pourrait jouer dans ce conflit.
Au début, nous avions invité un représentant de la Palestine et l'ambassadeur d'Israël à notre caucus, et ils nous ont dit que le Canada était mieux positionné que n'importe quel autre pays pour établir des passerelles et des communications entre les deux parties en présence. Ils nous ont dit que tout ce que nous pourrions faire pour jeter ces passerelles serait utile.
Nous avons donc entamé des démarches pour inviter des législateurs israéliens et palestiniens à Halifax en octobre. Cette initiative a bénéficié de la pleine coopération du ministre des Affaires étrangères, John Manley, et de ses adjoints, et le projet est pratiquement en place.
• 1010
Quand j'ai soumis cette proposition à John, il m'a répondu:
«C'est une bonne idée, mais je n'ai pas d'argent.» Air Canada a
accepté d'assumer une bonne partie des déplacements. Des groupes
juifs et arabes au Canada ont consenti à s'occuper du logement et
des repas de leurs représentants. La Nouvelle-Écosse a proposé de
défrayer le coût des locaux où se tiendrait la rencontre, au World
Trade and Convention Centre ou même à Province House. J'espère que
ce sera Province House. La ville de Halifax est d'accord pour nous
fournir toute l'aide possible.
Le lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-Écosse a accepté de participer aux rencontres. Le Président de notre Chambre, Peter Milliken, va inviter les Présidents des deux Parlements concernés à choisir chacun six députés qui viendront en octobre à Halifax rencontrer les députés canadiens. La conférence sera coprésidée par Bill Graham et moi-même, mais nous souhaiterions que le comité y participe et qu'il y ait des représentants du Canada pour entendre les idées qui seront proposées.
L'objectif n'est pas de déterminer qui a tort ou qui a raison ni comment on en est arrivé là, mais de voir comment le Canada pourrait contribuer à établir des passerelles en vue d'une solution aux problèmes en cours.
Les choses ont évolué d'une façon extraordinairement encourageante, et je n'en reviens pas de toute la collaboration que nous avons reçue de toutes parts.
Le Centre canadien Lester B. Pearson pour la formation en maintien de la paix de Cornwallis, en Nouvelle-Écosse, aura un rôle clé à jouer en guidant nos délibérations sur les questions délicates, en nous maintenant sur la bonne voie et en nous aidant à trouver les meilleures réponses possible.
Les organisations estudiantines des universités de Halifax ont accepté de nous fournir autant de bénévoles qu'il nous en faudra pour faciliter le déroulement de cette rencontre.
Tout va donc très bien. La semaine prochaine, notre président va envoyer les invitations aux présidents des deux assemblées.
Parallèlement à ces rencontres, nous aurons des entretiens commerciaux au niveau des trois pays. Les chambres de commerce du Canada atlantique, de la Palestine et d'Israël vont coordonner leurs rencontres commerciales pour voir quelles sont les ouvertures et accroître les échanges.
C'est donc globalement une initiative passionnante qui a progressé très vite grâce à la collaboration de tous.
Je voudrais inviter les députés de tous les partis à y participer, car il s'agit d'une initiative totalement dénuée de parti pris politique. Tout s'est passé dans un esprit extraordinaire. Peter Milliken y participe, j'y participe et le ministre y participe. C'est une idée excellente. Je pense que c'est un projet très positif pour notre pays. J'espère sincèrement que tous les partis vont y participer et apporter leurs idées dans le débat, car il va y avoir énormément de changements, de permutations et de combinaisons au fil de cette discussion. Dès que nous aurons la confirmation des Palestiniens, qui est peut-être déjà arrivée, nous enverrons le dossier d'information à chacun des députés pour que vous sachiez tous de quoi il s'agit et que vous ayez une idée du contexte et de l'organisation de cette initiative. Encore une fois, je vous invite sincèrement à participer à ce débat et à y apporter toutes vos idées, car tout le monde a des choses judicieuses à dire sur ce sujet.
Enfin, voilà ce que je voulais vous dire.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.
M. Bill Casey: Merci d'avance pour votre aide et votre collaboration.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Je crois que nous partageons tous votre enthousiasme pour votre projet, et je vous remercie aussi de nous en avoir informé par anticipation avant l'annonce officielle.
M. Bill Casey: Je vous en prie, et j'espère que nous allons tous être associés à cette démarche.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.
M. Bill Casey: Je crains de devoir vous quitter maintenant.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.
Dans la foulée du récent sommet de Québec, qui a été, je crois, un grand succès, nous allons avoir ce que nous appelons un debriefing en jargon militaire.
Bienvenue aux représentants du commerce. Nous accueillons aujourd'hui Marc Lortie, le coordonnateur principal pour les relations fédérales-provinciales, et représentant personnel du premier ministre pour le Sommet des Amériques, et Claude Carrière, directeur général, Direction générale de la politique commerciale, et négociateur en chef de la zone de libre-échange des Amériques.
Monsieur Lortie, vous avez la parole.
M. Marc Lortie (coordonnateur principal pour les Relations fédérales-provinciales, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci beaucoup, madame la présidente.
Je suis très heureux de revenir vous rencontrer pour faire le point sur le fond du sommet de Québec qui a été un grand succès.
• 1015
J'ai rencontré votre comité à l'occasion d'une réunion
d'information quelques jours avant le sommet pour lui donner un
aperçu de notre objectif et du cadre général de cette rencontre.
J'aimerais donc me concentrer ce matin sur le principal résultat,
la déclaration politique; vous donner au besoin quelques précisions
sur cette déclaration politique, les grandes lignes de la
déclaration et du plan d'action; et informer le comité du suivi qui
va être donné au sommet.
[Français]
Je tiens à vous remercier beaucoup de votre invitation de faire le suivi sur le résultat du Sommet de Québec. Avant d'aborder les thèmes principaux, permettez-moi de lever mon chapeau, de remercier la population de la ville de Québec pour sa patience et sa compréhension devant ce grand événement international. Il y a eu beaucoup de préoccupations chez nos concitoyens. Il faut les comprendre et je crois qu'il faut, à ce stade-ci, savoir les remercier pour leur compréhension. J'ajouterais également mes remerciements aux autorités municipales et aux autorités provinciales du Québec pour le bon déroulement de ce sommet, qui était une très grande entreprise pour le Canada.
J'aimerais soulever quelques points de la Déclaration politique qui a été émise et rendue publique dimanche après-midi le 22 avril.
D'abord, au paragraphe 5, il y a la clause démocratique dont on avait parlé avant le sommet ici même, au sein de votre comité, madame la présidente. Cette clause démocratique contenue dans le paragraphe 5 est très claire et donne à l'ensemble de l'hémisphère, non pas une directive, mais un sens politique axé sur le respect des valeurs démocratiques, sur le respect et le renforcement des institutions démocratiques. Cette volonté politique des chefs d'État a été traduite de façon directe par une clause démocratique.
La clause démocratique a obtenu l'assentiment général, je devrais dire enthousiaste également, de tous les participants autour de la table, de tous les leaders, qui voyaient dans ce geste le signal politique qu'on devait envoyer à ce stade-ci pour s'assurer que certaines jeunes démocraties de l'hémisphère puissent renforcer leurs valeurs démocratiques.
Qu'est-ce qu'elle dit, la clause démocratique? Essentiellement, elle dit deux choses. La première, c'est que si vous voulez continuer à participer au processus du sommet, vous devez appartenir à la grande famille démocratique et que, si jamais il y avait un retour aux vieux démons du militarisme dans l'hémisphère, cela pourrait se faire, mais cela aurait des conséquences. C'est le coeur de la Déclaration politique et des discussions qu'il y a eu entre les leaders, à Québec, pendant ces deux jours et demi.
Les chefs d'État et de gouvernement ont conclu qu'ils allaient se consulter en cas d'altération ou de suspension d'un régime démocratique et, bien sûr, se tourner ensuite vers l'organisation politique que nous possédons dans les Amériques, c'est-à-dire l'Organisation des États américains.
[Traduction]
Je pense que cette clause démocratique est très importante. On envoie à toute la région un signal important pour lui dire que si nous voulons resserrer les liens de notre hémisphère, cela ne pourra se faire que sur la base d'un fondement extrêmement important, les valeurs démocratiques. Telle est l'intention de cette clause démocratique. C'est aussi le message politique que les dirigeants voulaient lancer, une clause politique très ferme.
De plus, le premier ministre, pour que les choses soient parfaitement claires, a abordé au cours de sa retraite les deux grands aspects de cette clause démocratique. Il s'agit d'abord du processus de la ZLEA, puisque nous négocions depuis trois ans en vue de conclure un accord de libre-échange des Amériques. En second lieu, il s'agit des activités de la Banque interaméricaine de développement. Cette banque est en fait l'instrument financier des Amériques. Elle a un budget annuel de 8 milliards de dollars. Cette fois-ci, c'est pour un cycle de cinq ans. Elle a un poids financier considérable.
• 1020
Le premier ministre a tenu à préciser que la clause
démocratique porterait à la fois sur le processus du Sommet des
Amériques, y compris la ZLEA que nous sommes en train de négocier,
et aussi les activités de la Banque interaméricaine de
développement qui ne font pas partie intégrante du sommet. La
Banque existe depuis longtemps.
Ceux d'entre vous qui connaissent bien l'histoire de l'Amérique latine se souviendront que les activités de cette banque ont été très controversées dans le passé. Par exemple, à l'époque de l'élection de Salvador Allende au Chili en 1970, la Banque a bloqué toutes sortes de prêts au pays. Quand Pinochet a pris le pouvoir en septembre 1973, la Banque a immédiatement rouvert la porte aux prêts et à l'aide financière au Chili.
C'est pourquoi nous avons tenu à veiller à ce que les activités de la Banque soient aussi couvertes par la clause démocratique.
[Français]
Bien sûr, les chefs d'État et de gouvernement ne représentaient que 84 p. 100 des actionnaires de la Banque interaméricaine de développement. Donc, la formule utilisée par le premier ministre a été celle d'inviter les gouverneurs de la banque à respecter la clause démocratique dans leurs activités. On sait que 16 p. 100 des actionnaires de la banque n'étaient pas présents à Québec. Bien sûr, il y a d'autres pays qui participent à cette banque. Je pense au Japon, à l'Allemagne, à la France, à l'Italie, à l'Espagne et à la Grande-Bretagne, qui sont des participants à la banque mais qui n'étaient pas à Québec. Donc, le premier ministre a invité les gouverneurs à respecter cette clause.
Le deuxième point sur lequel j'aimerais attirer l'attention des distingués membres de ce comité est la charte démocratique. À l'invitation du premier ministre du Pérou, Perez de Cuellar, les leaders qui ont vu leur démocratie menacée au cours de la dernière année ont retenu l'idée péruvienne de développer, dans le contexte de l'Organisation des États américains, une charte de la démocratie. C'est donc une mission qu'ont confiée les leaders à leurs ministres des Affaires étrangères. Ces derniers vont se réunir très prochainement, plus précisément les 3 et 4 juin, à San José, Costa Rica, pour faire le point et pour entreprendre les travaux de développement d'une charte démocratique dans le cadre de l'OEA.
[Traduction]
Le troisième aspect important que je souhaiterais mentionner, c'est l'engagement politique très ferme que les dirigeants ont pris sur le processus de négociation de l'Accord de libre-échange des Amériques. Claude Carrière développera ce thème un peu plus tard.
Les dirigeants ont écouté le président de l'Argentine présenter un rapport sur la réunion des ministres du commerce qui a eu lieu le 7 avril à Buenos Aires et ont répété dans la déclaration politique leur engagement à poursuivre les négociations et à les terminer d'ici janvier 2005, à terminer le processus de mise en oeuvre d'ici la fin de 2005, et à mettre en oeuvre l'Accord du libre-échange des Amériques en 2005.
Peut-être convient-il ici de mentionner la réserve formulée par le Venezuela. Le président du Venezuela a souhaité formuler une réserve car, comme il l'a expliqué aux autres dirigeants, la Constitution du Venezuela ne l'autorise pas à imposer un échéancier à son Parlement. Il a donc souhaité qu'on dise: si possible, d'ici la fin de 2005, plutôt que: au plus tard en 2005. Les autres dirigeants ont expliqué que tout le monde était dans la même situation, mais le président du Venezuela a estimé qu'il était important de formuler cette réserve pour lui éviter de passer outre à son devoir constitutionnel de respecter l'indépendance du Parlement national.
• 1025
Puisque j'en suis au Venezuela,
[Français]
le Venezuela a également joint deux réserves au premier paragraphe et au paragraphe 6 de la Déclaration politique. Il souhaitait voir ajouter, après les mots «démocratie représentative», les mots «et participative». Les leaders ont convenu que «démocratie représentative» était le souhait qu'il fallait retenir, que c'était le renforcement de la démocratie représentative. Cependant, le président Chavez, faisant référence à la Constitution du Venezuela, dans laquelle on parle de démocratie participative, souhaitait voir ce mot inscrit, ce qui n'a pas été fait. Dimanche matin, il a donc inscrit deux réserves après les mots «démocratie représentative», disant que le Venezuela réservait sa position. Il voulait respecter sa Constitution, qui parle de démocratie participative.
Enfin, j'aimerais conclure sur d'autres activités qui ont été importantes. On a parlé du renforcement du mécanisme de contrôle des drogues. Les leaders ont discuté et accepté de renforcer les mécanismes de coopération pour combattre les drogues illicites dans l'hémisphère.
Il y a eu également, notamment de la part des leaders venant des Antilles, un appel très pressant pour faire face au fléau qui se répand de plus en plus dans les Antilles, le fléau du sida. À cet égard, la Banque mondiale et la Banque interaméricaine de développement, notamment la Banque mondiale, ont annoncé qu'elles allaient, immédiatement après le sommet, développer un programme et injecter 150 millions de dollars dans la lutte contre le sida dans la région des Caraïbes.
Nous avions fait référence, à la dernière réunion, à l'importance de certaines déclarations de la société civile, et j'aimerais mettre en lumière surtout celle des leaders autochtones, qui s'étaient réunis ici en congrès le 30 mars. Les leaders autochtones des Amériques s'étaient réunis et avaient fait une déclaration qui a été distribuée à l'ensemble des leaders comme de nombreuses autres déclarations, mais celle-ci avait une importance primordiale. Elle a été retenue par les leaders pour mettre en lumière l'importance de la Déclaration d'Ottawa des leaders autochtones et elle a été retenue dans le plan d'action également pour lancer un plus grand processus d'inclusion dans la gouvernance des populations autochtones.
C'était un geste assez innovateur. C'était un geste que les populations autochtones souhaitaient et qui, dans le contexte du Sommet des Amériques et de l'OEA, n'avait pas été lancé tout à fait fermement. Je crois que, cette fois, nous sommes engagés fermement sur cette voie-là.
• 1030
Enfin, vous verrez, dans la Déclaration politique
et le plan d'action, l'importance que nous attachons à
la société civile, l'importance d'inclure la société
civile dans la mise en oeuvre du plan d'action et
dans le développement de la
gouvernance, l'importance de la société civile pour
renforcer les valeurs démocratiques. Ce thème
a été présent pendant le Sommet des Amériques.
Il a également été très présent pour tous les autres groupes qui se réunissaient en parallèle à Québec, et notamment dans les divers forums qui se sont réunis dans le contexte du Sommet des peuples des Amériques, qui a eu lieu parallèlement au Sommet des Amériques ou quelques jours avant.
Enfin, madame la présidente, nous avons fait un effort très grand pour assurer le suivi du sommet. Nous avons mis sur pied un nouveau mécanisme pour renforcer le suivi du sommet et surtout engager les institutions financières qui participaient au sommet dans le financement direct, concret, réel du plan d'action mis de l'avant par les chefs d'État et de gouvernement.
À cet égard, la Banque mondiale et son président, James Wolfensohn, ont annoncé aux leaders que la banque mettrait à la disposition du Sommet des Amériques et de la mise en oeuvre du plan d'action des sommes importantes, pour les trois prochaines années, variant entre 12 et 16 milliards de dollars américains. Immédiatement, le président Wolfensohn a accepté d'injecter un milliard de dollars pour la connectivité, pour connecter les Amériques ensemble, ce qui répondait à l'agenda du gouvernement canadien, et le président de la Banque interaméricaine de développement, M. Iglesias, a dit essentiellement aux chefs d'État et de gouvernement que sa banque était la banque des Amériques et qu'elle mettait à la disposition des gouvernements un budget de 40 milliards de dollars sur cinq ans pour que ces gouvernements puissent atteindre leurs objectifs de mise en oeuvre du plan d'action.
C'étaient des déclarations fort importantes parce qu'au cours des derniers sommets, une des critiques les plus fermes des groupes qui ont suivi les activités du sommet portait sur le manque d'engagement des institutions financières pour soutenir le plan d'action.
[Traduction]
En outre, la BID a annoncé le financement de 21 projets particuliers rattachés au plan d'action du Sommet des Amériques. Tout d'abord, ses représentants ont collaboré étroitement avec nous à l'élaboration d'un plan d'action. Ils n'ont pas chiffré le montant de ces 21 projets, mais la BID a décidé de lancer plusieurs initiatives. Je vais vous en présenter une.
Dans le domaine de la connectivité, l'un des grands défis consiste à former des enseignants au niveau secondaire. Si l'on veut lancer de nouvelles technologies, il faut s'assurer que les enseignants sont en mesure d'initier les élèves à ces nouvelles technologies. Pour qu'ils aient le bagage nécessaire, il faut les former, et cela coûte cher. La banque prépare un plan d'action pour former ces enseignants du secondaire. Il s'agit d'une dizaine de millions d'enseignants dans l'ensemble des Amériques.
Le suivi du sommet est
[Français]
le test de vérité. Nous serons jugés, madame la présidente, si nous sommes en mesure de mettre en oeuvre ce plan d'action. Les dispositions qui ont été prises à Québec par nos institutions financières ont été extrêmement encourageantes à cet égard. Au gouvernement canadien, nous avons l'intention de faire un suivi très étroit. Ce premier suivi commencera à San José, Costa Rica, la première semaine du mois de juin, où je réunirai les autres sherpas des 34 pays pour lancer le processus de mise en oeuvre.
Je tiens à signaler également que la Banque interaméricaine de développement et la Banque mondiale ont signé un accord formel établissant un mécanisme de suivi, entre elles, sur le Sommet de Québec, sur les actions à prendre qui ont été acceptées au Sommet de Québec.
• 1035
Je voudrais, pour conclure, signaler les autres
documents qui ont été émis et acceptés par les chefs
d'État et de gouvernement. Le premier concerne la
Colombie. À l'invitation du président du Mexique,
on a accepté une résolution de soutien au
processus de paix du président Pastrana
en Colombie. Il y a également eu une
déclaration sur la connectivité, Connecter
les Amériques, qui se retrouve dans les documents que
nous avons fait circuler. Enfin, le premier ministre
a, au nom du groupe, fait une déclaration sur Haïti,
dans sa déclaration finale, demandant essentiellement
au président Aristide de respecter ses engagements du
mois de décembre dernier, de les mettre en oeuvre, et
invitant le secrétaire général de l'Organisation des
États américains à se rendre à Haïti pour engager le
dialogue entre les diverses composantes de la vie
politique haïtienne.
L'exemple qui a inspiré les discussions à Québec à cet égard a été celui du Pérou, le Pérou qui a établi une table ronde de dialogue, sous la présidence de l'Organisation des États américains et du Canada, qui a commencé à se réunir au mois de juillet dernier et qui a amené le restauration de la démocratie, des institutions démocratiques au Pérou. C'est un exemple qui nous a inspirés lorsque le premier ministre a dit qu'on souhaitait envoyer une mission dirigée par le secrétaire général de l'OEA.
Voilà, madame la présidente, les grands axes de la substance du Sommet de Québec. Ce fut un sommet très fort, un sommet qui a engagé les Canadiens. Il y a eu une très grande couverture de presse, une très grande couverture médiatique, et les Canadiens et les Canadiennes d'un bout à l'autre du pays se sont sentis engagés dans ce processus, ont émis leurs opinions et on en parle toujours. Ce fut un moment très fort pour la diplomatie canadienne.
Je serai très heureux de répondre à vos questions, madame la présidente, mais avant, pour conclure, je vais céder la parole à Claude Carrière, qui va nous entretenir de l'accord de libre-échange, avec votre permission.
M. Claude Carrière (directeur général, Direction générale de la politique commerciale I, négociateur en chef, Zone de libre-échange des Amériques, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Madame Marleau, membres du comité, vous savez peut-être que les ministres du Commerce se sont réunis à Buenos Aires, deux semaines avant le Sommet de Québec, pour recevoir un rapport des négociateurs sur l'état des négociations et pour donner instruction aux négociateurs pour la prochaine étape, sous la présidence de l'Équateur.
M. Pettigrew était devant le comité le 15 mars, aux ides de mars, si je me souviens bien. Si je me souviens bien, il a également mentionné qu'il avait trois objectifs qu'il poursuivrait à Buenos Aires. Le premier était de continuer à tenter de convaincre ses collègues de rendre publics les textes de négociation, le deuxième, de travailler avec ses collègues pour donner instruction aux négociateurs sur la marche à suivre pendant les prochains 18 mois, et le troisième, de renforcer le comité sur la participation de la société civile.
Les ministres ont atteint les trois objectifs qu'ils s'étaient donnés. Vous savez que les ministres ont décidé que les textes seraient rendus publics après le sommet, dès qu'ils seraient disponibles dans les quatre langues officielles. Le texte, donc, sera rendu disponible dès que possible. Le travail continue sur la traduction dans celle des quatre langues qui reste encore à faire.
[Traduction]
En ce qui concerne le deuxième objectif, les ministres ont donné des instructions aux comités et ont fixé des échéances fermes aux négociateurs pour qu'ils s'entendent sur les méthodes et modalités des négociations d'accès aux marchés d'ici avril 2002, afin que les négociations puissent débuter en mai 2002.
• 1040
Ils ont aussi confirmé la décision de créer un nouveau groupe
de négociation chargé d'examiner les questions générales et
institutionnelles. Ce groupe commencera à élaborer les nouveaux
chapitres et éléments d'un accord, par exemple le préambule, les
définitions générales, les liens entre cet accord et les autres
accords et les dispositions concernant la transparence et les
questions institutionnelles.
Notre troisième objectif était de renforcer le comité de la société civile. Les ministres sont convenus de charger le comité de la société civile d'élaborer un nouveau processus d'échange mutuel avec la société civile au niveau de l'hémisphère et de publier plus d'information sur le site Web du secrétariat. Le comité de la société civile a aussi été chargé de collaborer avec la BID et d'autres membres du comité tripartite pour financer des programmes d'information dans les petits pays afin que le comité contribue à une plus grande transparence des négociations au cours des 18 prochains mois.
Madame la présidente, tels étaient les trois objectifs que s'était fixés le Canada à la réunion des ministres du commerce. Ces trois objectifs ont été atteints.
Enfin, les ministres se sont entendus sur un calendrier ferme et clair de négociation, qui répondait aux souhaits à la fois du Brésil et des États-unis concernant la conclusion des négociations et l'entrée en vigueur d'un accord. Les négociations devront se terminer au plus tard en janvier 2005, et la mise en application devra se faire au plus tard en décembre 2005.
Sur ce, madame la présidente, je me ferai un plaisir de répondre aux questions des membres du comité.
La vice-présidente (Mme colleen Beaumier): Merci.
Monsieur Solberg, vous avez la parole.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, AC): Merci beaucoup, madame la présidente.
Ma première question, et j'aimerais vous la poser à tous deux, est de savoir quels sont les plus gros obstacles au progrès futur des négociations sur la démocratie et le commerce. Quels sont les problèmes qu'il faut déblayer tout de suite pour pouvoir avancer? Je vois bien le problème d'ensemble, mais il y a manifestement toutes sortes d'autres difficultés. Quels sont les problèmes sur lesquels nous devrions nous pencher et que pouvons-nous nous attendre à voir surgir d'ici quelque temps?
M. Marc Lortie: La question de la démocratie doit être envisagée non pas à court terme, mais à moyen et à long terme. N'oublions pas qu'il y a 25 ans, il y avait 19 dictatures militaires dans cet hémisphère. On a tendance à l'oublier, mais c'est une réalité importante.
Du point de vue géopolitique, je dirais que c'est très important pour le Canada car à une époque où l'Europe axe son développement sur l'Union européenne et l'Asie, particulièrement l'Asie de l'Est, nous devons nous demander dans quelles directions le Canada va se développer et intensifier ses relations. Les Amériques sont une région extraordinaire pour nous. C'est notre région, avec 800 millions d'habitants, dont 500 millions vivent au sud du Rio Grande, au sud des États-Unis. C'est encore une terra incognita pour nous. C'est un territoire neuf, mais qui recèle un potentiel colossal si nous savons partager des valeurs communes.
• 1045
La clause démocratique est venue du Brésil et de l'Argentine.
Lorsque le Paraguay voulait encore une fois recourir à la force
militaire il y a quatre ans—ça ne fait pas très longtemps—, les
militaires ont décidé que la démocratie n'était pas la voie à
suivre et qu'un régime militaire serait préférable pour le
Paraguay. Ils voulaient revenir au pouvoir avec un coup d'État, et
ce sont les ministres des Affaires étrangères de l'Argentine et du
Brésil qui sont allés à Asuncion et leur ont dit que s'ils
faisaient cela, ils ne leur permettraient plus de faire partie du
MERCOSUR.
Par conséquent, lors du sommet de Québec, nous avons essentiellement pris cette volonté politique qui avait été exprimée en avril 1997 à Asuncion et nous l'avons appliquée partout dans les Amériques. C'était un message important qui s'adressait à tous les peuples des Amériques, disant que nous devions maintenir la démocratie.
Cependant, dans certains pays, la démocratie est très jeune et les institutions démocratiques sont encore très fragiles. Nous devons faire respecter le plan d'action et la déclaration politique afin de nous assurer que les institutions démocratiques demeurent vibrantes et qu'elles produisent les résultats que nous souhaitons tous. À cet égard, je vous exhorterai à toujours surveiller la façon dont la démocratie se porte dans les Amériques car il s'agit là du fondement et d'un processus permanent.
Le plan d'action prévoit par ailleurs que les parlementaires devront jouer leur rôle. Cette année, vous êtes l'hôte d'une réunion du FIPA où les parlementaires peuvent échanger leurs points de vue. Par ailleurs, la banque est prête à financer de meilleurs liens entre les parlements et les parlementaires des Amériques grâce à l'utilisation de nouvelles technologies. Cela apporte une nouvelle dimension qui n'existait pas auparavant.
Voilà donc les observations générales que je voulais faire sur la question de l'Accord de libre-échange des Amériques. En ce qui concerne les obstacles, les difficultés et les empêchements, je laisserai Claude répondre.
M. Claude Carrière: Madame la présidente, en ce qui concerne la ZLEA, je dirais que nous aurons deux principaux défis à relever. Le premier concerne toujours le leadership des États-Unis dans le processus, c'est-à-dire si les États-Unis continueront ou non à faire preuve de leadership à cet égard, plus particulièrement en ce qui concerne le pouvoir de stimulation du commerce que le président Bush a dit vouloir demander au Congrès. Le ministre surveillera ce qui arrivera dans ce dossier au cours des prochains mois afin de voir si les États-Unis ont la capacité et la volonté politique d'engager des négociations alors qu'ils s'engagent dans une nouvelle étape.
L'autre défi continue d'être comment, individuellement et collectivement, nous réagirons aux plus petites économies et aux préoccupations de ces pays au sujet des négociations. Nous avons indiqué que nous comprenons leurs préoccupations et que nous allons tenter d'en tenir compte. Nous avons tenté de démontrer que, au cours des négociations de l'Accord de libre-échange entre le Canada et le Costa Rica, nous avons signalé notre volonté d'adapter l'entente pour répondre aux besoins d'une plus petite économie. Nous pouvons nous servir de cela pour montrer comment nous pouvons introduire l'asymétrie et d'autres notions semblables dans la Zone de libre-échange des Amériques.
Je dirais que ce sont là les deux principaux défis que nous devons relever.
Merci, madame la présidente.
M. Monte Solberg: Je ne suis pas certain si j'ai beaucoup de temps.
Je suis tout simplement curieux au sujet des problèmes que nous avons rencontrés récemment avec le Brésil et je me demande s'ils vont ou non continuer. Peut-être que les gens ont une perspective plus générale et disent... J'aimerais savoir si à votre avis les Brésiliens sont tout à fait engagés à conclure cette entente. On craint qu'ils ne soient pas tout à fait d'accord avec l'Amérique du Nord—avec les États-Unis et le Canada plus particulièrement—en ce qui concerne la ZLEA.
M. Marc Lortie: En ce qui concerne le Brésil, comme vous le savez, il y a quelques mois, avant le sommet on s'est beaucoup demandé si les Brésiliens viendraient même au sommet. Eh bien, l'un des participants les plus actifs a été le président Cardoso. Il est un dirigeant exceptionnel, il a une vision de son pays dans les Amériques et il a transformé son pays depuis 1993. Tout d'abord, lorsqu'il était ministre des Finances, il a transformé le modèle économique du Brésil. Ensuite, il est devenu président, et au cours des huit à dix dernières années de ses deux mandats comme président, il a intégré davantage le Brésil aux Amériques.
N'empêche que seulement 19 p. 100 du commerce du Brésil se fait avec l'Amérique du Nord. Le Brésil est une grande puissance en Amérique du Sud: il a la moitié de la population, la moitié du PIB et la moitié du territoire d'Amérique du Sud. C'est cela le Brésil, et il négocie avec l'Europe et fait des affaires également avec l'Asie.
Par conséquent, les Brésiliens ne veulent pas être bousculés, et c'est ce qu'ils disent. Ils ne veulent pas être bousculés dans le contexte des négociations. La principale raison, c'est qu'ils ont ouvert leur économie au cours des huit dernières années. Les investisseurs étrangers et les produits étrangers entrent au pays alors que ce n'était pas le cas auparavant. Ils ont ouvert leur marché et ont dit qu'ils allaient négocier la ZLEA, mais qu'ils ne voulaient pas être bousculés. Ils veulent avoir le temps d'absorber tout cela. Ils ont déjà ouvert leur économie et la ZLEA signifie une ouverture encore plus grande de leur économie. Ils doivent prendre le temps. Ils ont accepté en 1998 de le faire sur une période de sept ans, jusqu'en 2005, et ils veulent qu'on les laisse respecter cette date. Les dirigeants au sommet de Québec ont accepté ce point de vue et le Brésil a joué un rôle extrêmement constructif non seulement à Québec mais au cours de la préparation du sommet.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.
[Français]
Monsieur Paquette.
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Merci beaucoup pour vos présentations. J'aimerais commencer par un commentaire qui va mener à mes questions.
Selon moi, le principal défi qu'avaient les chefs d'État au Sommet de Québec, c'était de briser le mur de la méfiance face à l'ensemble des négociations. De ce point de vue-là, il me semble que le Sommet de Québec n'est pas un succès, c'est-à-dire que, contrairement à ce à quoi on aurait pu s'attendre, je n'ai pas l'impression que l'appui populaire à la négociation de la Zone de libre-échange des Amériques a augmenté de façon substantielle dans l'ensemble des pays des Amériques à la suite du Sommet de Québec.
D'ailleurs, on n'a pas parlé du tout des effets positifs que pourrait avoir la Zone de libre-échange des Amériques. On ne sait pas plus maintenant qu'avant le sommet quel intérêt nous avons, comme population des Amériques, à ce qu'il y ait cette intégration économique, même si je partage l'avis qu'on en tirerait des bénéfices. Mais toujours est-il que ça n'est pas ressorti du tout de l'ensemble de cette rencontre à Québec.
Un des problèmes, à mon avis, demeure toujours le manque de transparence. Je ne dis pas qu'il n'y a pas eu des efforts de faits en ce sens, mais ça demeure insuffisant. Par exemple, on nous a annoncé, après la rencontre de Buenos Aires, que les textes seraient rendus publics. Ça fait presque un mois maintenant et on n'a toujours pas les textes. Vous nous dites qu'ils sont traduits dans deux des langues manquantes. J'imagine que le français est maintenant disponible, avec l'armée de traducteurs que nous avons à Ottawa. Donc, c'est probablement du côté du portugais qu'il y a des problèmes.
Si ces textes sont traduits en français et en anglais, pourquoi les membres du comité n'y auraient-ils pas accès dès maintenant sans qu'on les rende publics pour qu'on puisse préparer—et on sait que le contenu de ces documents n'est pas évident—le débat public sur ces documents qui deviennent, avec le temps, de plus en plus obsolètes parce que, évidemment, la négociation se poursuit? Donc, c'est ma première question. Est-ce que ces textes sont maintenant disponibles en français et en anglais et est-ce qu'il ne serait pas possible qu'ils soient rendus accessibles pour les membres de ce comité, et quand pensez-vous qu'ils seront rendus publics?
Une autre question porte sur les positions canadiennes. Quand on parle de manque de transparence, c'est aussi le fait que le gouvernement canadien a fait connaître sa position sur cinq des neuf tables de négociation. Il en reste quatre, dont deux sont particulièrement stratégiques par les temps qui courent, concernant les investissements et le mécanisme de règlement des différends. La propriété intellectuelle demeure aussi un enjeu très important, de même que les services. Donc, quand la position canadienne sur ces quatre tables de négociation sera-t-elle connue?
• 1055
Je me permets de poser toutes mes questions en
même temps. La clause démocratique, à mon avis, a
toujours un lien avec la transparence. Or, nulle part
on ne mentionne le rôle des parlementaires dans la
négociation. On parle de la société civile, et je
suis tout à fait content de voir qu'on se préoccupe de
façon tout à fait légitime du rôle de la société
civile dans les négociations, mais des parlementaires,
on ne dit pas un mot. Pourtant,
comme vous l'avez mentionné vous-même,
le principal objectif de la clause démocratique est de
renforcer la démocratie représentative, ce qui n'est
pas toute la démocratie. Alors, j'ai été un peu étonné.
Dans le plan d'action, le seul rôle des parlementaires est d'échanger sur des pratiques démocratiques, ce qui est tout à fait louable, mais on ne parle pas du tout du processus de négociation qui est en cours.
Je mentionne, au passage, que je trouve un peu étrange qu'on ne mentionne que le FIPA comme organisme, alors que cet organisme a à peine un mois d'existence, peut-être deux, alors que la Conférence des parlementaires a maintenant trois ou quatre ans d'existence. Je ne dis pas qu'elles doivent s'exclure mutuellement, mais je trouve un peu étrange qu'on mentionne seulement le FIPA au détriment d'autres associations de parlementaires.
On a tenu, au sein du Sommet des peuples, un forum des parlementaires. J'avais d'ailleurs invité l'ensemble des députés de la Chambre des communes à y participer. Entre autres, j'avais invité par écrit notre président de comité à présider une des séances. Malheureusement, aucun représentant du Parti libéral du Canada ne s'est présenté à cette rencontre-là. Mais on était une centaine de parlementaires des Amériques et on constatait que les parlementaires ne jouaient un rôle actif dans la négociation que dans très peu de pays. Cela pourrait être un atout excellent pour les gouvernements pour combler une partie du déficit démocratique.
Toujours à propos de la clause démocratique, je comprends très bien que le choix ait été de renforcer la démocratie représentative et je suis d'autant plus étonné de voir qu'on n'attribue aucun rôle aux parlementaires dans le processus de négociation. Il n'en demeure pas moins que cela ne couvre pas toute l'envergure de la démocratie.
Entre autres, concernant les droits de la personne—et je terminerai là-dessus—, la semaine dernière, un groupe d'une école de ma circonscription est venu manifester ici, dans le cadre d'une activité d'Amnistie internationale, concernant le dossier des enfants de la rue au Guatemala et au Honduras qui sont carrément éliminés physiquement. C'est aussi vrai au Brésil et dans plusieurs autres pays. Il y a eu 600 assassinats d'enfants au Honduras au cours de la dernière année. Qu'est-ce qui va être fait pour dépasser la première étape, qui est le renforcement de la démocratie représentative, pour aller vers une véritable défense des droits humains, pour s'assurer, finalement, que l'ensemble des pays qui vont faire partie de la Zone de libre-échange des Amériques s'engagent à respecter les droits de la personne?
J'ai exposé tout cela un peu en vrac, mais tous ces éléments se touchent. À mon avis, ils sont un fil conducteur par rapport à la transparence qui doit s'accroître. Encore une fois, je constate que, malgré les efforts importants qui ont été faits, ça demeure insuffisant.
M. Marc Lortie: Madame la présidente, merci beaucoup.
Je vais tenter de répondre à quelques-unes de vos questions. Vous avez ouvert des pistes très larges. Vous avez parlé de méfiance à l'égard de la population, à l'égard de l'accord de libre-échange. En termes diplomatiques, si vous me permettez l'expression, ce qu'on essaie de faire en négociant l'accord de libre-échange, ce n'est pas d'augmenter la méfiance, mais de créer davantage de confiance entre les nations.
Nous, on ne les connaît pas, les Amériques. Quand il y a eu des tensions en Amérique centrale, quand il y a eu des tensions entre l'Argentine et le Chili, pour la première fois dans l'histoire du XXe siècle, le Vatican a dû intervenir pour mettre fin au conflit entre deux nations voisines. Qu'est-ce qu'on fait, en ce moment, quand on crée des accords d'intégration économique? Qu'est-ce qu'on fait? Est-ce qu'on crée de la méfiance ou si on crée de la confiance entre les hommes et les femmes de la région des Amériques?
Le plan principal, l'objectif politique de la création d'une zone de libre-échange est d'augmenter la confiance entre les hommes et les femmes de la région. C'était l'objectif numéro un de l'Union européenne. Il faut s'en rappeler. Fort heureusement, l'Amérique n'a pas passé à travers de guerres fratricides comme celles que l'Europe a connues. L'accord de libre-échange n'est pas un instrument de méfiance. Il doit être vu comme un instrument de confiance entre les hommes et les femmes.
• 1100
Deuxièmement, dans la Déclaration politique,
nous parlons de la création de la prospérité. Comment
allons-nous réduire la pauvreté dans les Amériques? Il
faut toujours bien situer le Sommet des Amériques: 32 pays
en développement, deux pays
développés, deux économies développées. Nous sommes
dans un forum Nord-Sud. Comment allons-nous créer la
prospérité?
Le message n'a peut-être pas passé, mais le premier objectif sous le thème de la création d'une plus grande prospérité, d'une prospérité plus juste dans les Amériques, passe par un accord de libre-échange. Nous allons donner à certaines économies la chance de se développer à cet égard.
Vous avez fait allusion à la perspective d'une plus grande transparence, d'une plus grande ouverture, je crois. Les négociateurs, et surtout le ministre, ont atteint leurs objectifs à cet égard à Buenos Aires.
Dans combien de temps les textes seront-ils disponibles? Eh bien, ils seront disponibles très bientôt, parce que le portugais, m'a-t-on dit, est presque complété maintenant. Alors, c'est une question de semaines ou de jours. Claude me dit que c'est une question de semaines.
M. Pierre Paquette: C'est difficile à comprendre pour nous. On nous a dit qu'il y avait 900 pages de disponibles en anglais et en espagnol, et ça prend plus d'un mois pour traduire 900 pages en portugais. Vous comprenez que plus le temps passe, moins ces textes-là sont pertinents. J'ai bien hâte d'avoir la deuxième série.
M. Marc Lortie: J'aimerais simplement vous signaler qu'ils vont avoir toute leur pertinence, parce que la négociation va se poursuivre jusqu'en décembre 2005.
M. Pierre Paquette: Justement, il y a eu, par exemple, une fuite d'un texte le 29 novembre, et on nous a dit de ne pas tenir compte de ce texte-là parce que la négociation avait avancé depuis ce temps-là. Alors, ça va être la même chose. Les textes qui sont traduits présentement sont des textes qui datent déjà de deux mois au moins. Je veux simplement mentionner que plus le temps passe, moins ces textes-là sont pertinents, même s'ils ont une pertinence. Je souhaite qu'on les ait le plus rapidement possible.
M. Marc Lortie: Je pourrais peut-être répondre à la question de la position canadienne sur la transparence. Enfin, c'est ce que je voulais dire comme approche générale sur l'accord de libre-échange. C'est à la fois un instrument pour créer davantage de prospérité et un instrument pour créer davantage de confiance et non pas de méfiance.
M. Pierre Paquette: Et pouvez-vous me répondre sur le rôle des parlementaires?
M. Marc Lortie: Sur le rôle des parlementaires, vous savez qu'il y a eu une résolution à l'Assemblée générale de l'Organisation des États américains au Guatemala, qui demandait aux pays participants d'engager davantage les parlementaires. Cette résolution de l'OEA a mené à la création du Forum interparlementaire des Amériques. Pourquoi le FIPA est-il mentionné et pas les autres associations? Le FIPA émerge d'une résolution de l'OEA, qui était présente à Québec, ce qui explique son insertion dans le plan d'action.
Certes, les autres parlementaires qui souhaitent s'engager dans la construction hémisphérique le font de façon dynamique et ils le font sur une base régionale, sur une base hémisphérique, sur une base nationale. Ils s'engagent dans le dossier. L'engagement des parlementaires est extrêmement important, mais la résolution de l'OEA visait la création de ce forum qui a été créé ici, à Ottawa, les 6 et 7 mars dernier. Mais le rôle des parlementaires est très important. D'ailleurs, ce comité-ci fait l'examen même de la construction hémisphérique depuis plusieurs années. Ça, c'est le travail des parlementaires.
M. Pierre Paquette: Sauf qu'il n'y aura pas de vote pour...
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.
Excusez-moi, monsieur Paquette. Je veux m'en tenir scrupuleusement au temps qui est accordé à chacun, pour que tous aient l'occasion de poser une question. Nous vous reviendrons au deuxième tour de table si vous voulez poursuivre.
La parole est à M. Robinson.
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Merci, madame la présidente.
Je m'excuse si je n'étais pas ici au cours des exposés, mais en fait il y a un débat à la Chambre en ce moment sur l'Accord de libre-échange. Aujourd'hui, c'est une journée réservée à l'opposition et nous parlons surtout du chapitre 11. Encore une fois, je m'excuse de mon retard. Si les questions que je voulais poser ont déjà été soulevées, de toute évidence les témoins me le diront, et je lirai la transcription.
Je crois que M. Paquette voulait savoir—je suis arrivé à la toute fin de sa question—à quel moment le texte serait disponible. Je suis désolé, je n'ai pas entendu la réponse. Quand pourrait-on s'attendre à ce que soit terminé ce difficile travail de traduction?
M. Claude Carrière: Le plus tôt possible.
M. Svend Robinson: Nous n'avons donc aucune idée, pour ce qui est du nombre de jours ou de semaines?
M. Claude Carrière: Si, c'est une question de semaines.
M. Svend Robinson: Il faudra des semaines pour le traduire.
M. Claude Carrière: Oui.
M. Svend Robinson: Très bien.
Ma question s'adresse à M. Lortie. J'ai quelques questions au sujet de la sécurité lors du sommet. Le ministre responsable de la sécurité au niveau provincial pour la Sûreté du Québec a annoncé qu'il avait des préoccupations au sujet du traitement des prisonniers à la prison d'Orsainville et ce, avec raison. Ils ont été traités de façon épouvantable, bien souvent de manière contraire à la loi. Je voudrais demander à M. Lortie, du point de vue fédéral, quel rôle la police fédérale, la GRC, a joué lors de ce sommet, plus particulièrement en ce qui a trait à leur utilisation de gaz lacrymogène et de balles de plastique contre des manifestants pacifiques, non violents.
J'ai dit très clairement à plusieurs reprises que je n'approuvais absolument pas le recours à la violence de la part d'une poignée de protestataires. Cela était inacceptable, et mes collègues, mon chef et moi-même l'avons certainement dit. Ce que je demande à M. Lortie, c'est qu'il me dise quelles lignes directrices étaient en place pour la GRC concernant l'utilisation de gaz lacrymogène et de balles de plastique contre des manifestants pacifiques, non violents.
J'ai personnellement été témoin de l'une de ces manifestations—il y en a eu de nombreuses—à l'extérieur du mur, soit un groupe d'environ 200 personnes qui étaient assises et qui chantaient. Ces personnes ne représentaient aucune menace pour qui que ce soit, et la police est intervenue. Après un bref avertissement, du gaz lacrymogène a été lancé sur la foule et par la suite, alors que les gens battaient en retraite, des balles de plastique ont été tirées.
C'est scandaleux. C'est illégal. C'est une agression de la part de la GRC. Je voudrais demander à M. Lortie quelles lignes directrices étaient en place relativement à l'utilisation de balles de plastique au sommet.
M. Marc Lortie: Madame la présidente, la GRC serait sans doute mieux placée que moi pour répondre aux questions concernant la sécurité. Je dirai cependant que les quatre forces policières—la Sûreté du Québec, la police municipale de Québec, la police municipale de Sainte-Foy et la Gendarmerie royale du Canada—ont à mon avis fait un travail exemplaire pour s'assurer que la réunion puisse avoir lieu et que puissent avoir lieu également des manifestations pacifiques. C'est ce qui s'est produit à Québec. Mais ils ont dû contrôler les actes trop agressifs qui accompagnent malheureusement ces événements internationaux.
M. Robinson voudrait en savoir davantage au sujet des lignes directrices, et je recommande vivement au député d'inviter les dirigeants de la GRC à répondre à ces questions, au besoin, ou d'inviter le ministre responsable de la sécurité publique à répondre à ces questions.
M. Svend Robinson: Très bien. M. Lortie dit donc qu'il n'est pas en mesure de répondre aux questions concernant, par exemple, la quantité de gaz lacrymogène qui a été utilisée par la GRC ou les balles de plastique qu'ils ont utilisées.
M. Marc Lortie: C'est exact.
M. Svend Robinson: Madame la présidente, je vais certainement proposer que nous invitions à venir témoigner ceux qui sont en mesure de répondre à ces questions.
• 1110
Je suppose que M. Lortie pourrait remettre au comité—je lui
demanderais de le faire—une liste de toutes les organisations qui
ont participé en consultation avec les quatre ministres, je crois,
et des représentants de quelque 20 pays au sommet. Pourrait-il
remettre la liste complète au comité, ainsi qu'une liste de ceux
qui ont été invités mais qui ont choisi de ne pas participer?
M. Marc Lortie: Absolument.
M. Svend Robinson: J'aimerais bien recevoir ces renseignements, madame la présidente.
J'ai une dernière question. En ce qui concerne le chapitre 11—et ma question s'adresse à M. Carrière—, nous avons constaté, c'est le moins que l'on puisse dire, un revirement important dans la position prise par le gouvernement à partir du 5 avril dernier, lorsqu'en réponse à des questions qu'a posées mon collègue M. Blaikie, le ministre Pettigrew déclarait catégoriquement que le Canada n'appuyait absolument pas une disposition dans la ZLEA concernant les investisseurs et l'État, alors que maintenant le premier ministre et le ministre disent que le chapitre 11 a en fait raisonnablement bien fonctionné. En fait, à un moment donné, le ministre a dit qu'il fonctionnait très bien.
M. Carrière pourrait-il indiquer quand on peut enfin s'attendre à ce que le Canada rende publique sa position sur cette disposition? Le porte-parole du ministre, M. Sébastien Théberge, a dit la semaine dernière et je cite: «Nous n'avons pas encore rendu publique notre position car nous n'en avons pas une.» Franchement, il est tout à fait consternant que nous n'ayons toujours pas une position sur cette question après la longue consultation que le gouvernement dit avoir faite. Je demande donc à M. Carrière quand nous pouvons nous attendre à ce que le gouvernement du Canada élabore enfin une position sur cette disposition dans le chapitre 11 dans le contexte de la ZLEA.
M. Claude Carrière: Nous travaillons très fort pour essayer de convaincre nos collègues de l'ALENA d'engager un dialogue sur la clarification de certains éléments du chapitre 11. Récemment, ils nous ont laissé entendre qu'ils étaient prêts à entreprendre ces discussions. En même temps, nous tenons des consultations générales sur ces éléments spécifiques afin de discuter avec nos partenaires commerciaux des éclaircissements que nous recherchons. Lorsque nous aurons atteint ces objectifs, cela se reflétera dans la ZLEA.
M. Svend Robinson: Nous ne connaissons donc toujours pas notre position, mais nous tenons des consultations à ce sujet?
M. Claude Carrière: Nous sommes en train d'élaborer des idées spécifiques afin d'en parler avec nos partenaires pour éclaircir certains éléments du chapitre 11.
M. Svend Robinson: Quelle indication avons-nous du Mexique, par exemple, qu'ils seraient prêts à s'engager dans des discussions, comme le ministre le dit, sur des éclaircissements au sujet du chapitre 11? Plus spécifiquement, quel est l'échéancier en ce qui concerne ces discussions? Je crois comprendre qu'il y aura des réunions au début du mois, à Washington, n'est-ce pas? Pourriez-vous préciser pourquoi nous croyons que le Mexique serait intéressé à apporter des éclaircissements au chapitre 11?
M. Claude Carrière: Ils nous ont dit qu'ils étaient prêts à en discuter pour y apporter des éclaircissements. Il y a déjà eu un entretien à ce sujet et il y en aura d'autres—en fait, la semaine prochaine à Washington, et par la suite. Donc, oui, nous nous sommes engagés dans un processus de négociation avec le Mexique et les États-Unis.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.
Monsieur Harvard, vous avez la parole.
M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Merci, madame la présidente.
Tout d'abord, monsieur Lortie, je vous félicite pour ce sommet qui a été un assez grand succès. Je pense que la plupart des Canadiens sont soulagés que les choses se soient assez bien passées finalement. Il y a eu certainement des préoccupations au sujet de la sécurité, mais je pense que les choses se sont assez bien passées.
J'aimerais que vous nous parliez du plan d'action par rapport à l'adoption de la clause de la démocratie. Vous avez mentionné, comme M. Carrière, que des dates avaient été fixées pour la ZLEA—signature en janvier 2005, le tout devant être terminé à la fin de 2005. Or, vous ne mentionnez aucune date relativement au plan d'action concernant le développement des démocraties, et je peux comprendre qu'il s'agit là d'une chose tout à fait différente. Cependant, j'aimerais savoir, si l'on reconnaît que certaines des démocraties des Amériques sont jeunes et fragiles, pour reprendre quelques expressions que vous avez vous-même utilisées, comment, à l'instar des pays des Amériques, allez-vous évaluer le travail qui a été effectué et le succès entourant la clause de la démocratie? Comment allez-vous faire respecter cette clause?
• 1115
Si un pays ou un nombre de pays s'engagent à renforcer leur
démocratie mais ne font rien, que pouvez-vous faire?
Je sais que vous et d'autres avez mentionné l'exemple du Paraguay qui, il y a quatre ans, je crois, avait manifesté l'intention de retourner à une dictature militaire. L'Argentine et le Brésil lui ont laissé savoir en des termes on ne peut plus clairs qu'il y aurait peut-être des conséquences très graves si ce pays en venait à cela, et je suppose qu'ils se sont inclinés. Bien.
C'est une chose pour un pays d'annoncer qu'il voudrait faire quelque chose d'aussi draconien. Les gens peuvent le constater, évaluer la situation et agir en conséquence. Je ne pense pas que ces choses soient aussi difficiles à évaluer que peuvent l'être d'autres développements plus subtils qui peuvent se faire extrêmement lentement ou que l'on pourrait qualifier tout simplement d'atermoiements.
J'aimerais savoir ce que vous en pensez, monsieur Lortie. Comment évaluez-vous ce succès? Si le développement n'est pas assez rapide, si nous sommes tous d'accord pour dire qu'il est tout simplement trop lent et que cela est inacceptable, comment les rappelez-vous à l'ordre? Comment leur donnez-vous un petit coup de pied pour que nous renforcions la démocratie non seulement dans un pays, mais dans tous les pays des Amériques? Pouvez-vous nous décrire un peu comment on procéderait?
M. Marc Lortie: Merci beaucoup, monsieur Harvard, de vos observations initiales au sujet du succès du sommet. Je pense que cela a été une excellente expérience pour tous les Canadiens. À cet égard, je suis très heureux que les jeunes particulièrement aient été soudainement très engagés dans le débat. Je pense que nous ferons des progrès vis-à-vis des Amériques si nous avons le plein engagement de notre population.
Comment évalue-t-on le succès? Il existe un critère. Y a-t-il une façon d'évaluer le succès de la règle démocratique, de s'assurer que nos libertés fondamentales sont protégées et encouragées ou non? La réponse c'est que par l'intermédiaire de l'OEA, lors des rencontres multilatérales que nous tenons constamment, il faut que les pays et les gouvernements s'engagent à renforcer leur démocratie. On peut voir s'ils tiennent ou pas à le faire. On s'assure que leur société civile participe également au progrès. Nous le faisons au niveau des diplomates dans nos cercles respectifs.
Mais plutôt que de mesurer la démocratie dans les pays, que de dire que tel ou tel pays est plus démocratique qu'un autre, les chefs de gouvernement veulent que soit envoyé aux intéressés un message politique leur disant que si la règle de la démocratie est abandonnée ou mise entre parenthèses—et comme je l'ai dit tout à l'heure, il n'y a pas si longtemps, il y a 20 ou 25 ans il y avait dans cet hémisphère 19 dictatures militaires—, ce geste politique aura des conséquences. S'ils ne veulent pas respecter cette règle, c'est leur problème, mais les pays de l'hémisphère ont pris des décisions très fermes sur cette question.
En même temps, nous avons dit, comme nous l'avons dit au président Aristide dimanche matin: Comment comptez-vous renforcer la démocratie dans votre région? Que faites-vous pour renforcer la démocratie à Haïti en ce moment même?
Mais qu'avons-nous fait de notre côté? Nous avons décidé de réfléchir ensemble, d'envoyer le secrétaire général de l'OEA et d'essayer collectivement de trouver les moyens d'aider Haïti.
Parviendrons-nous à un résultat? Je n'en sais rien. C'est à nous de prendre notre décision. Sur une base bimensuelle, nous mesurerons le degré d'intérêt, le degré d'engagement et nous pourrons le faire car le secrétaire général reviendra au quartier général de l'OEA et fera un rapport sur sa mission. C'est à ce niveau que la décision sera prise. C'est un exemple.
M. John Harvard: Je ne citerai pas de pays, mais disons que dans un pays les médias sont aux ordres du gouvernement ou sont l'organe du gouvernement. Il n'y a guère de diversité dans l'éventail d'opinions exprimées par les médias et nous le savons tous. Ce gouvernement ne veut rien faire. Que pouvez-vous faire d'autre qu'exprimer le fond de votre pensée? Y a-t-il quelque chose que vous pouvez faire?
M. Marc Lortie: Il n'y a pas grand-chose que nous puissions faire dans un tel cas. Mais en même temps, nous essayons d'inciter tous les participants à renforcer le principe de la démocratie.
Cela peut-il renforcer les fondations des droits de l'homme, par exemple, dans certains pays? Vous parlez de la presse. De nos jours, très peu de journalistes dans notre hémisphère sont emprisonnés pour avoir attaqué le régime. Il n'y a pas très longtemps, ce n'était pas le cas. Par conséquent, si cela devient le cas, il est possible de dénoncer cette situation. C'est un moyen d'aborder le problème.
La démocratie est également le meilleur régime pour la promotion des droits individuels. Un peu plus tôt tout à l'heure nous avons parlé des droits de l'homme. Comment défendre et protéger les droits de l'homme dans un système démocratique qui en est la garantie? Il y a non seulement le droit d'assemblée, mais également le droit de dénonciation et le droit d'opposition. C'est un principe fondamental de la démocratie.
Comment le mesurer? Quand dans une société la population se plaint de la manière dont elle est traitée dans son pays par son régime politique, il est toujours possible de mesurer la qualité de la démocratie ou la démocratie du régime. Si cela ne correspond pas à vos valeurs, vous avez l'instrument pour intervenir. Vous avez le conseil exécutif de l'OEA. Vous avez les relations bilatérales. La Déclaration de Québec permettra désormais de dire aux responsables que la manière dont ils traitent leur population n'est pas la bonne et que s'ils s'entêtent sur cette voie qui ne respecte ni la transparence ni les institutions démocratiques, il y aura des conséquences.
Les conséquences sont là. Chacun devra assumer ses responsabilités. Certains vous répondront que cela n'a pas d'importance puisqu'il y a 20 ans cela semblait ne pas déranger la population.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.
Monsieur Martin, allez-y.
M. Keith Martin: Merci beaucoup, madame la présidente, et merci, monsieur Lortie et monsieur Carrière, d'être venus nous rencontrer.
Monsieur Lortie, bien entendu, la démocratie doit commencer chez soi, et le premier ministre va avoir énormément de mal si nous n'apportons pas certains changements au niveau de la communication du contenu de la ZLEA au public canadien. Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous quand vous dites que la population s'est sentie impliquée. Si la population s'était sentie impliquée, il n'y aurait pas eu ces milliers de personnes qui se sont rendues au sommet de Québec pour manifester, pas plus que nous n'aurions entendu des gens dans nos circonscriptions parler d'un malaise à propos de la ZLEA, malaise qui, à mon avis, repose en grande partie sur des mythes et des interprétations erronées.
Donc qu'allez-vous proposer au premier ministre? Quels mécanismes allez-vous proposer afin qu'il puisse dissiper ce malaise dans la société? Comment pouvez-vous fournir des conseils utiles—le mot important ici étant utile—au public canadien afin qu'il ait l'impression d'être impliqué? S'il fait cela, il y aura beaucoup moins de protestations, car la plupart des protestataires se plaignent de choses qu'ils appuieraient autrement.
Ma deuxième question traite du trafic des drogues, et vous avez mentionné une parenthèse au sujet de la Colombie. Comme nous le savons, le règlement du problème des stupéfiants est essentiel pour l'instauration de la paix en Colombie. Savez-vous quels seront les éléments de ce plan? Je crois que les étoiles sont bien alignées à l'heure actuelle, après avoir été en Colombie en février et après avoir dialogué avec le président Pastrana. Il s'est engagé, à l'instar de quelque 17 autres pays latino-américains, à préparer un plan.
Le gros de ce plan porte évidemment sur la consommation des drogues ici en Amérique du Nord. Comme vous le savez, les Américains ont changé leur fusil d'épaule, si je puis dire. Ils veulent s'attaquer au problème de la consommation au pays.
• 1125
Est-ce qu'il y a des éléments de ce plan qui traitent du
trafic des drogues illicites, et pouvez-vous nous dire de quoi il
s'agit?
M. Marc Lortie: Pour ce qui est de la ZLEA et de la démocratie, je crois que le débat dans la société canadienne est bien sain. Les jeunes et les autres qui croient que la ZLEA n'est pas une bonne façon de procéder ont exprimé leurs points de vue, et ils sont sincères.
Comment se fait-il que le gouvernement canadien participe à ce point à la ZLEA? Parce que nous avons de l'expérience dans le domaine des accords de libre-échange, et nous nous fondons en matière de politiques sur l'expérience. Nous avons commencé en 1987-1988 avec la négociation de l'Accord de libre-échange avec les Américains. Nous l'avons étendu en 1992-1993 au Mexique, et ensuite en 1996 nous avons conclu un accord avec le Chili. Lundi dernier nous avons signé un accord avec le Costa Rica.
Tout cela traite du même sujet—c'est-à-dire, créer une plus grande prospérité pour les Canadiens qui participent aux échanges commerciaux. N'oublions pas que 45 p. 100 de notre PIB dépend du commerce, donc on a raison de...
M. Keith Martin: Je suis désolé de vous couper la parole, mais je ne me suis peut-être pas exprimé suffisamment clairement.
Nous avons deux solitudes ici. Il y a l'interprétation de libre-échange que vous et M. Carrière et la plupart d'entre nous à cette table avons, et il y a aussi ce grand malentendu—des craintes légitimes—de la part d'autres individus. Comment allons-nous combler ce fossé entre le gouvernement qui accepte ces accords de libre-échange et la société qui exprime des préoccupations mais qui ne croit pas avoir voix au chapitre? Comment allons-nous combler ce fossé?
M. Marc Lortie: Nous allons le faire en informant davantage les gens, et non moins. Les Canadiens qui sont préoccupés expriment leurs préoccupations légitimes. La ZLEA est des fois perçue comme étant synonyme de la mondialisation. Des jeunes Canadiens en particulier se demandent parfois s'ils ont les outils appropriés pour faire face à un monde de ce genre, pour faire face aux affaires internationales. Ils se demandant s'ils sont bien équipés, bien en mesure de faire face à cette situation.
Il y a un changement, et nous devons l'expliquer. Nous devons faire les tournées qui s'imposent pour essayer de l'expliquer.
Vous dites qu'il y a un grand fossé, mais si j'ai bien compris le dernier sondage en matière de libre-échange, une grande majorité de Canadiens appuient le libre-échange. Il existe néanmoins des préoccupations, et nous devons y répondre. Nous devons maintenir un dialogue constant. Je crois que c'est ce que font d'ailleurs nos politiciens, ils parlent des avantages du commerce, ils parlent des avantages d'un libre-échange.
Il est paradoxal de voir dans vos circonscriptions et à Québec que les forces antimondialisation s'en prennent à la ZLEA, parce que la ZLEA fixe essentiellement les règles permettant d'éviter une mondialisation sauvage. C'est ce que fait cet instrument. L'accord est là pour veiller à ce que tous, gros et petits, respectent les règles. C'est de cette façon-là qu'on peut contrôler la mondialisation.
Ce message n'est pas bien compris, car beaucoup de monde croit que la ZLEA ne s'applique qu'aux affaires multilatérales et aux sociétés multinationales. Il nous incombe d'expliquer ce que c'est que cet accord, ce qu'il sera et les expériences que nous avons des accords de libre-échange. Quelle est l'expérience du Canada en matière d'accords de libre-échange? Est-elle décevante, acceptable ou positive? En ce moment les Canadiens sont d'avis que l'expérience est positive. Cela est ressorti très clairement dans le dernier sondage.
Cependant, il faut poursuivre nos efforts, parce que le problème existe et qu'il faut s'y attaquer. Il faut discuter des idées et il faut participer au débat.
• 1130
Pour ce qui est du trafic des stupéfiants en Colombie, les
chefs voulaient appuyer complètement le président Pastrana. Le
président Pastrana a lancé un processus de paix qui est lié
directement au trafic de la drogue, parce que les guerrilleros en
Colombie sont financés entièrement à partir du produit du trafic de
la drogue. Il y a donc un lien direct entre le processus de paix et
le trafic de la drogue en Colombie.
La déclaration du président Bush lors de l'ouverture de la première séance le samedi matin avait quelque chose de nouveau. C'était la première fois que le président américain soulignait l'importance d'examiner les problèmes du trafic de la drogue du point de vue de la consommation, de la demande, comme vous venez de le dire, et non seulement de celui de l'offre. Au fil des ans, les pays de l'Amérique latine en particulier se sont plaints et disaient que l'administration américaine n'était pas prête à s'attaquer aux problèmes de la consommation et de la demande. La déclaration du président Bush samedi matin à ce sujet était assez intéressante car elle traduisait une évolution de la mentalité américaine.
Qu'est-ce que le nouveau mécanisme signifie pour la Colombie? Il s'agit d'un processus à long terme. Il n'y a pas de solution facile qui permettra à la Colombie de regagner le contrôle de son territoire et de garantir que le processus de paix sera couronné de succès. Le président Pastrana a fait preuve de beaucoup de courage avec le lancement de ce processus. Tous les chefs réunis à Québec voulaient exprimer leur appui. Nous allons suivre la situation de près et espérer que tout s'arrangera. Mais nous allons suivre cela de près, dans un esprit de collaboration et d'amitié, avec les autorités de la Colombie.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci beaucoup.
Madame Lalonde, vous avez la parole.
[Français]
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Merci, monsieur Lortie et monsieur Carrière.
Je voudrais dire d'emblée que ce qui m'a réjouie dans ce sommet, c'est la volonté très manifeste des Québécois et des Québécoises de mieux connaître et comprendre les Américains du Sud, à commencer par les Mexicains. Je dois dire—et ça ne m'arrive pas souvent de dire cela—que nos principaux journaux au Québec se sont vraiment donné le mot pour donner une information documentée et assez large pour que quiconque voulait s'informer sur les partenaires et les enjeux des négociations puisse le faire.
Le Sommet des peuples a été aussi un grand succès. C'était très frustrant pour les Québécois et les Québécoises de voir ce sommet se tenir sur leur territoire sans que le premier ministre du Québec puisse, d'aucune espèce de façon, accueillir les visiteurs en leur nom. J'ai même lu que Lysiane Gagnon avait fait un joli rêve là-dessus. Ça faisait longtemps que je ne l'avais vu rêver comme ça.
J'ai quelques questions très précises et directes. Il y a eu des inconvénients pour les citoyens qui vivaient dans les alentours de la place forte, de la place assiégée. La députée de Québec était ici tout à l'heure et elle me priait de vous demander si vous alliez assumer les coûts directs et indirects encourus par tous les marchands et les citoyens qui ont eu des problèmes liés au sommet. Des gens ont dû déménager parce qu'ils étaient vraiment incommodés par les gaz lacrymogènes, faire garder leurs enfants, etc.
• 1135
Il y a une question qui m'intéresse. À
plusieurs reprises, j'ai lu dans les journaux le
nombre de ces balles qui ont été tirées
par la Sûreté du Québec. J'espère qu'on va
les interdire à l'avenir. On a dit que la GRC en avait
tiré bien davantage, mais on n'a jamais su le
nombre. J'aimerais l'avoir.
Deuxièmement, parlons de la négociation. Le chapitre 11 est, bien sûr, un problème extrêmement important, et les citoyens, qui sont inquiets, commencent, sans tout comprendre, à savoir qu'il peut y avoir une perte de pouvoir pour les gouvernements, pour les États, dans l'application du chapitre 11. Vous avez dit qu'il y aurait peut-être une déclaration négociée—en tout cas, c'est ce que j'ai compris—entre les gouvernements. J'aimerais que vous soyez précis là-dessus.
Mais je voudrais surtout vous demander ceci. Si le Canada, comme M. Pettigrew l'a laissé entendre, n'est pas d'accord sur l'esprit du chapitre 11 ou, à tout le moins, sur l'interprétation qui en a été donnée, comment se fait-il que ce même article 11 se retrouve dans l'entente avec le Costa Rica? C'est la première chose que j'ai voulu faire vérifier, et je suis extrêmement surprise. Alors que le Canada avait vraiment, disons, le gros bout du bâton, comment se fait-il qu'il n'ait pas cherché à avoir un autre type de clause que celle qui apparaît dans l'ALENA? Je ne dis pas que les mots sont les mêmes, mais l'esprit est vraiment le même.
Pour la suite des négociations, j'aimerais vous entendre aussi, parce que la volonté des parlementaires—et elle n'a pas été diminuée par tout ce qui s'est passé—, c'est d'être associés le plus possible à ces enjeux-là. Les enjeux, finalement, auront des effets sur les gens, tant ici qu'en Amérique du Sud. Cette question du développement économique n'est pas sans lien avec la capacité des gouvernements de conserver leur marge de manoeuvre et avec, bien sûr, les retombées, parce qu'une entente de libre-échange seule, ça ne produit pas le développement; ça peut même faire le contraire. Même si le Québec et le Canada ont été, dans l'ensemble, gagnants, il y a eu, au Québec et au Canada, des perdants de ces ententes de libre-échange. Plus tôt on le sait, mieux on peut se préparer à faire en sorte qu'ils puissent être préparés à cela et ne pas en subir d'inconvénients.
Finalement, sur le rôle des parlementaires, j'aimerais également souligner que le Forum des parlementaires. auquel nous avons participé, qui n'était pas organisé par le FIPA et auquel on aurait bien aimé voir M. Graham, a permis de comprendre à quel point il est important que ces débats-là se tiennent avec toutes les parties représentatives. Or, un des problèmes énormes du FIPA, c'est que les règlements qui ont été adoptés pour l'instant sont inacceptables, et en l'absence de garanties de changement, on ne peut que prendre ses distances par rapport au FIPA.
Monsieur Lortie, je vous invite à intervenir sur les questions concrètes et sur le reste.
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Vous avez trois ou quatre minutes pour répondre. Trois minutes.
M. Marc Lortie: Merci.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Vous n'avez pas été dure comme ça avec tous mes collègues, madame la présidente.
M. Marc Lortie: Je partage tout à fait votre avis sur l'intérêt des Québécois et des Québécoises et des autres Canadiens pour les grands enjeux du Sommet de Québec. On a eu une couverture médiatique extrêmement grande. On a eu des débats d'idées et des engagements. Je suis allé moi-même sur le campus universitaire et dans les cégeps, et les gens sont intéressés. Les gens sont intéressés à en savoir davantage. C'est formidable, parce qu'en général, on trouve toujours que les affaires internationales sont tellement ésotériques qu'on ne veut pas en parler. Mais là, on en a parlé. On en a parlé et on s'est rendu compte que les Canadiens et les Canadiennes veulent en savoir plus, qu'ils sont intéressés et qu'ils sont engagés. Alors, je trouve cela très encourageant pour l'avenir, parce que notre avenir et notre prospérité sont directement connectées avec l'international.
• 1140
Vous avez parlé de certaines frustrations.
Vous avez parlé également des inconvénients pour les gens de
Québec.
Vous savez que les marchands,
notamment ceux qui étaient à l'intérieur du périmètre,
ont reçu une correspondance avant le sommet
pour dire que s'ils encouraient des pertes de revenu à
cause de la tenue du sommet, le Bureau du Sommet
des Amériques 2001 était prêt à envisager
de leur verser une compensation à
cet égard. C'était pour les marchands
situés à l'intérieur du périmètre de
sécurité parce qu'il n'y avait pas la circulation
normale d'un samedi ou d'un dimanche pour les
restaurateurs, les pharmaciens et les autres commerces.
Cela dit, il y a des règles du jeu très précises...
Mme Francine Lalonde: En dehors du périmètre, il y en a qui ont eu...
M. Marc Lortie: En ce qui concerne les gens en dehors du périmètre, il y a, en ce moment, des consultations avec la mairie de Québec. Le maire de Québec a annoncé la semaine dernière qu'il allait accompagner les citoyens. Nous recevons, depuis la fin du Sommet de Québec, les diverses factures, les divers frais encourus par les citoyens et nous sommes en train d'examiner de quelle façon nous ferons face à ces questions. Je crois qu'au cours des prochains jours, en collaboration avec la Ville de Québec... La Ville de Québec est très impliquée dans ces questions-là.
Cela dit, on a beaucoup parlé d'inconvénients causés par les gaz, mais il y a quand même eu très peu de casse comme telle. J'ai moi-même visité le quartier Saint-Roch—je ne sais pas si vous avez eu la chance d'aller le voir—le dimanche, immédiatement après la fin du sommet, pour voir et constater les dégâts matériels qui étaient quand même très peu nombreux et très peu évidents à cet édifice situé au coin du boulevard Charest et de la rue de la Couronne. À part ça, vraiment, il y a eu très peu de casse comme telle dans l'ensemble de la ville et dans tout ce périmètre, et il faut s'en féliciter.
Cela dit, le Bureau du Sommet des Amériques va prendre ses responsabilités. Il va regarder cela et aviser très prochainement, je le souhaite.
En ce qui concerne le chapitre 11 et le Costa Rica, je vais laisser mon ami Claude Carrière répondre à cette question.
Enfin, vous avez mentionné le rôle des parlementaires. À ce sujet, les gouvernements ne sont pas tellement... Moi, je ne suis pas tellement engagé dans la constitution même du FIPA. Pour le rôle des parlementaires, il faut vraiment adresser la question aux parlementaires.
Mme Francine Lalonde: Comme vous en aviez parlé, j'ai voulu...
M. Marc Lortie: Très bien.
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): On peut revenir à cette question, madame Lalonde. Je vais donner à M. Carrière un peu de temps pour répondre, et ensuite nous passerons à M. Paradis. Vous pourrez revenir sur cette question plus tard.
[Français]
M. Claude Carrière: Pour le Costa Rica, il y a effectivement un article sur les investissements dans l'accord, qui est un article portatif, si vous voulez, mais qui fait référence à un accord existant entre le Canada et le Costa Rica sur la promotion et la protection des investissements. Cet accord est entré en vigueur en 1999. L'accord de libre-échange avec le Costa Rica ne comporte pas d'obligation concernant des investissements, mais il fait référence à un autre accord antérieur.
Mme Francine Lalonde: Qui comporte l'article qui est l'équivalent du chapitre 11?
M. Claude Carrière: Qui comporte un article sur le processus investisseurs-État avec le Costa Rica dans le cadre d'une entente bilatérale, oui.
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Je vais devoir vous interrompre.
Monsieur Paradis, allez-y.
[Français]
M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Merci, madame la présidente.
Dans un premier temps, je voudrais féliciter M. Lortie pour le magnifique travail qui a été fait, tant pour la préparation que pour la tenue du sommet. Pour le fond de négociation de textes avec l'ensemble des parties et tout ce que vous avez fait, je vous adresse mes félicitations.
Je voudrais reprendre un thème soulevé par M. Paquette et Mme Lalonde sur la participation des parlementaires. Tout à l'heure, vous avez très bien expliqué, monsieur Lortie, que le Forum interparlementaire des Amériques est une création souhaitée par l'OEA dans une résolution. Je pense qu'il est important de reconnaître cette différence qui existe entre le Forum interparlementaire des Amériques et la COPA. La création du Forum interparlementaire des Amériques est un geste important qui a été posé à Ottawa.
• 1145
Les parlementaires ont eu un rôle à jouer dans la
préparation de ce sommet. Nous avons eu un débat en
Chambre et ici, au Comité des affaires
étrangères et du commerce international, nous avons
reçu plusieurs
groupes et représentants. Pierre Marc Johnson
est venu nous parler d'environnement et toutes sortes de
groupes sont venus nous parler du sommet et de leurs
vues. Je pense que les parlementaires
jouent leur rôle en écoutant les représentations de ces
gens.
Bien sûr, lorsqu'il y a un sommet des chefs d'État comme celui-là, les quelque 400 parlementaires du Canada, ceux des États-Unis et ceux des autres pays des Amériques ne peuvent pas tous être autour de la table pour négocier. Je ne vois pas comment on pourrait arriver à la conclusion d'un texte ou d'un accord si tous les parlementaires étaient autour de la table pour négocier eux-mêmes. Donc, il y a des mécanismes qui existent.
Ma question concerne la Zone de libre-échange des Amériques et s'adresse plus particulièrement à M. Carrière ou à M. Lortie. À cause de sa situation géographique, parce qu'il est situé à côté des États-Unis, le Canada a développé son habileté à commercer avec les Américains. On veut maintenant intégrer les pays d'Amérique du Sud dans la Zone de libre-échange des Amériques. Nous avons un double système de droit au pays, le droit civil et le common law, ainsi qu'une double culture, la culture latine et la culture anglo-saxonne. Il y a 800 millions de personnes dans les Amériques. Les États-Unis en comptent 300 millions, et les autres pays réunis, 500 millions.
Qu'est-ce qu'on peut faire de plus? Comment le Canada pourrait-il jouer un rôle encore plus grand, tant au niveau du commerce, à cause de tous ces facteurs-là, qu'à celui des autres sujets qui ont fait l'objet de discussions au Sommet des Amériques de Québec, soit les droits de la personne, la démocratie et l'environnement? Comment pourrions-nous nous positionner encore davantage en tant que pays?
M. Marc Lortie: Merci beaucoup, monsieur Paradis.
Le Canada s'est positionné très fortement dans l'hémisphère lors du Sommet des Amériques, d'abord en faisant mieux connaître l'agenda des Amériques et ce qui se passait dans les Amériques. Engager notre population, s'intéresser, mieux connaître les Amériques, c'est déjà beaucoup et ça va donner des résultats. Vous allez voir que les jeunes vont se mettre à apprendre l'espagnol ou le portugais parce qu'ils savent que la maison commune qu'on habite s'appelle l'hémisphère, les Amériques. Il faut donc aller découvrir ce monde-là.
Où est-ce qu'on va se positionner davantage? Eh bien, le Canada s'est positionné très fortement en ce qui concerne les valeurs canadiennes. Nous voulons transmettre les valeurs canadiennes dans notre plan d'action, dans notre Déclaration politique, et les Canadiens vont se retrouver dans ce plan d'action. Il faut continuer à veiller au grain et assurer la mise en oeuvre du plan d'action. La crédibilité de notre sommet repose sur ça. Il faut s'assurer que la mise en oeuvre du plan d'action soit un succès. Si c'est un succès, je vous assure qu'on en sera tous les bénéficiaires. On a un plan d'action très détaillé et des engagements financiers solides à l'heure actuelle de la part de nos institutions financières, mais il faut s'assurer de faire le travail. Il faut aller sur le terrain.
Il y a également une nouvelle dimension. On a attaqué la question Nord-Sud, le défi que pose la situation de ceux qui possèdent plus et de ceux qui possèdent moins, et le thème de la connectivité. Le premier ministre a créé un Institut de la connectivité qu'on va accrocher au Centre de recherches pour le développement international, le CRDI, pour permettre à ces pays de s'engager sur la voie de la connectivité et de la modernité de la société. C'est un engagement que le Canada n'avait jamais pris auparavant. C'est nouveau. On parle aussi d'être engagé dans les affaires hémisphériques. Vous qui avez une connaissance très intime de ces questions, vous savez que nous sommes membres de l'OEA seulement depuis 10 ans. Il n'y a pas très longtemps que, dans le cadre de notre politique étrangère, nous sommes aussi engagés à l'égard des Amériques. Cela ne fait que 10 ans, mais cela a eu un impact significatif. La diplomatie canadienne a eu une réelle influence à l'intérieur des Amériques.
• 1150
Comme vous l'avez peut-être constaté à Québec,
plusieurs leaders et leurs
délégations étaient alors enthousiastes, affirmant que
nous constituions un contrepoids
politique à l'influence des États-Unis.
Il ne faut pas sous-estimer cela. Dans
l'esprit de tous les pays participants, le Canada
constitue un contrepoids politique à la
présence américaine qui, depuis 1823—il s'agit d'une
date précise, celle de la doctrine Monroe—, contrôle
la vie des citoyens des Amériques.
Le Canada constitue un
contrepoids politique, ce qui est un atout fantastique
pour nous, non seulement pour les gouvernements, mais
aussi pour
nos universitaires, nos Canadiens, nos gens d'affaires,
nos
organisations non gouvernementales et les touristes
canadiens. Si vous voyagez à travers les Amériques,
vous entendrez les gens dire qu'ils veulent faire des
choses avec vous parce que les Canadiens représentent
pour eux un contrepoids
politique formidable, très utile à la poursuite de leur
épanouissement.
Il faut donc mettre l'épaule à la roue. Nous aurons devant nous un immense chantier au cours des prochaines années. Nous avons les ressources nécessaires. Maintenant, il faut livrer la marchandise.
M. Claude Carrière: Au niveau du commerce, il y a deux éléments à considérer.
Premièrement, nous allons continuer à participer à la négociation de la Zone de libre-échange des Amériques. Nous allons travailler à mettre en oeuvre l'accord avec le Costa Rica. Nous devrions bientôt entreprendre des négociations avec les autres pays d'Amérique centrale. Les Antilles sont également intéressées à approfondir leurs relations commerciales avec le Canada. Nous allons également continuer à promouvoir le développement du commerce avec ces zones et l'Amérique du Sud, et promouvoir les investissements canadiens dans ces pays dans divers secteurs afin de continuer à participer à leur développement et au développement de liens plus profonds, et cela pas seulement au niveau commercial. Nous allons donc continuer à faire ce travail.
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Madame Lalonde, êtes-vous satisfaite de la réponse de tout à l'heure à votre question? Si non, voulez-vous la répéter aux fins du compte rendu?
[Français]
Mme Francine Lalonde: Mon intervention sera très courte.
L'entente avec le Costa Rica, qui a été reportée, comporte ce qui constitue l'essence des problèmes liés au chapitre 11. Le Canada a eu l'occasion de manifester qu'il voyait et qu'il reconnaissait qu'il y avait des problèmes et qu'il fallait changer quelque chose. Or, il ne l'a pas fait.
Comment expliquez-vous cela?
M. Claude Carrière: Madame, l'accord avec le Costa Rica comporte un article qui ne comporte aucune obligation et qui fait tout simplement référence à un accord précédent. L'accord précédent est un accord de promotion et de protection des investissements qui a été négocié en 1998 et qui est entré en vigueur en 1999.
Mme Francine Lalonde: [Note de la rédaction: inaudible] ...et qui correspond exactement au contenu du chapitre 11. Le Canada, en le reconduisant, en s'en vantant et en le donnant comme exemple, envoie un message parfaitement contraire à celui que M. Pettigrew prétend véhiculer, à savoir que le chapitre 11 pose de grands problèmes. Il l'a dit au cours d'entrevues. Je ne comprends pas que le Canada ait fait cela.
Est-ce à dire que sa vraie position est celle contenue dans l'entente avec le Costa Rica? Je ne le souhaite pas personnellement.
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci, madame Lalonde. Puisqu'il faut quitter la salle avant midi, je vous demande de réserver cette question et de la poser au ministre Pettigrew demain.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Oui. Je vais certainement lui poser des questions de nouveau. Merci.
La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Je tiens à remercier M. Lortie et M. Carrière de leur exposé et de leur présence ici aujourd'hui. J'estime que le commerce devient la question primordiale sur la scène internationale, et nous pensons pouvoir participer à tout l'enthousiasme qui l'entoure. Je vous remercie de nouveau.
La séance est levée.