FAIT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE
COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 24 octobre 2001
Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.)): Mesdames et messieurs, un peu de silence, s'il vous plaît.
Nous avons le plaisir, cet après-midi, d'accueillir le ministre du Commerce international.
Monsieur le ministre, bienvenue et merci d'être venu.
Chers collègues, nous avons aujourd'hui un horaire fort chargé. Le ministre va d'abord nous parler de la réunion ministérielle qui aura lieu à Doha. Il parlera ensuite des modifications proposées à la Loi sur la SEE, que nous sommes en train d'examiner, comme vous le savez, monsieur le ministre.
• 1530
Vous êtes ici jusqu'à 17 h 30. Nous pourrions poursuivre la
discussion jusqu'à 17 heures. Je propose, si vous êtes d'accord,
que l'on consacre la première heure à la réunion de Doha, et la
demi-heure qui reste, à la Loi sur la SEE. On évitera ainsi de
mêler les deux sujets, qui sont complètement différents.
Vous pourriez peut-être nous parler de la réunion ministérielle de Doha, et nous décrire la position que défendra le Canada. Au bout d'une heure, nous ferons une pause et nous aborderons ensuite la Loi sur la SEE. D'accord?
Monsieur Duncan.
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): J'aimerais avoir une précision. Combien de temps vont durer l'exposé et la période de questions?
Le président: Le ministre pourrait peut-être nous le dire.
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international): Monsieur le président, je n'ai pas entendu la question de M. Duncan.
Le président: Oui, l'acoustique dans cette pièce laisse à désirer. Remarquez, il y a bien des choses ici qui laissent à désirer, comme certains membres du comité, certaines chaises.
Des voix: Oh, oh!
Le président: La perfection ne fait pas partie de la vie parlementaire.
M. Pierre Pettigrew: L'exposé durera le temps que vous voulez. La réunion de Doha est importante. Je pense que vous voulez tous savoir sur ce qui s'est passé à Mexico et à Singapour. Mais je peux aussi me taire. Si vous ne voulez pas que je parle, je ne le ferai pas.
Le président: Non, nous voulons entendre ce que vous avez à dire. Les membres du comité veulent également vous poser des questions.
M. Pierre Pettigrew: Monsieur le président, vous pourrez également poser des questions sur le bois d'oeuvre ou autres sujets. Je tenais surtout à vous parler de la réunion de Doha et de la SEE parce que ces dossiers sont très actifs. Je ne veux rien exclure.
Le président: Je pense, monsieur le ministre, que nous allons plutôt procéder de la façon suivante. Pourquoi ne parlez-vous pas et de la réunion de Doha et de la SEE? Nous discuterons des deux thèmes en même temps. Les membres du comité voudront peut-être aborder toute une foule de sujets, même si nous faisons une pause pour la forme et que nous consacrons le reste du temps à la SEE.
M. Pierre Pettigrew: Oui. Nos collègues voudront peut-être discuter des événements du 11 septembre, des échanges commerciaux, des frontières, ainsi de suite. Je ne sais pas ce que vous disent les électeurs dans vos circonscriptions. J'avais décidé de ne parler que de la réunion de Doha et de la SEE. Toutefois, je ne veux pas empêcher les membres du comité de soulever d'autres préoccupations ou de me donner des conseils sur d'autres sujets.
Le président: D'accord.
[Français]
M. Pierre Pettigrew: Et j'en suis...
[Traduction]
Le président: C'est ce que nous allons faire, monsieur le ministre.
Je tiens à vous dire que, dans ma circonscription, les électeurs parlent beaucoup des efforts que déploie le ministre du Commerce international en vue de trouver des débouchés commerciaux pour notre pays.
M. Pierre Pettigrew: Vous avez de bons électeurs.
Le président: Ils sont merveilleux. Si vous veniez nous voir plus souvent, ce serait encore mieux.
Monsieur le ministre, voulez-vous commencer? Nous passerons aux questions une fois votre exposé terminé.
M. Pierre Pettigrew: Merci beaucoup, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis très heureux d'avoir l'occasion de vous parler aujourd'hui d'importants développements survenus dans les deux secteurs de mon portefeuille, la promotion du commerce et la politique commerciale.
Je vous présenterai et déposerai d'abord les objectifs que poursuivra le Canada à la quatrième réunion ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce. Je vous exposerai la position que défendra le Canada, monsieur le président.
Je parlerai aussi brièvement du projet de loi C-31, Loi modifiant la Loi sur l'expansion des exportations. Je serai ensuite heureux de répondre à vos questions sur n'importe quel sujet qui vous intéresse.
Je crois qu'il est important d'aborder en premier l'environnement actuel de nos activités de promotion du commerce et d'élaboration de politiques. Les problèmes avaient déjà commencé à poindre même avant le 11 septembre. Vous avez vu les chiffres pour le mois de juillet. Les attaques n'ont fait qu'empirer une conjoncture économique mondiale déjà difficile, de toute évidence.
L'économie mondiale affrontait son premier ralentissement simultané en vingt ans. L'économie américaine, aux dires d'Alan Greenspan, s'immobilisait peu à peu, et il en était de même pour la zone de l'Euro. Les économies de l'Asie de l'Est, qui dépendent du commerce des produits technologiques étaient, quant à elles, en perte de vitesse. Nous avons déjà pu constater tout cela dans notre balance commerciale. Au mois d'août, les exportations canadiennes étaient en baisse de 3,4 p. 100. Le renforcement de la sécurité à la frontière au lendemain des attaques terroristes a prouvé de façon éclatante à quel point la circulation des marchandises, des services et des personnes entre le Canada et les États-Unis est vulnérable aux perturbations.
En ce moment, les priorités du gouvernement consistent à montrer notre solidarité avec les États-Unis, à manifester notre engagement à agir aux États-Unis et à combattre les idées fausses concernant la politique canadienne, à nous protéger des mesures défavorables que le Congrès pourrait prendre au sujet de la frontière canado-américaine et à travailler chez nous à l'élaboration d'une stratégie frontalière qui tienne compte à la fois des impératifs de la sécurité et des besoins de la facilitation du commerce.
• 1535
Bref, nous devons trouver un nouvel espace nord-américain dans
lequel il nous sera possible de continuer à échanger des biens, des
services, des investissements et des voyageurs. Une façon de le
faire consiste à consacrer davantage d'énergie à nos efforts en vue
de renforcer le système commercial fondé sur les règles.
Heureusement, les membres de l'OMC mettent tous leurs efforts afin
d'assurer le lancement réussi d'un cycle de négociations visant la
croissance et le développement lors de la prochaine réunion
ministérielle qui se tiendra à Doha, au Qatar.
[Français]
L'objectif que poursuivra le gouvernement canadien à la quatrième Conférence ministérielle de l'OMC, qui se tiendra dans un peu plus de deux semaines à Doha, au Qatar, est le lancement des négociations sur un programme visant la croissance et le développement, tant au Canada que partout ailleurs dans le monde. Nous avons fait connaître la plupart de nos objectifs particuliers lors des préparatifs de la troisième Conférence ministérielle de l'OMC à Seattle, en 1999, notamment dans la réponse du gouvernement au rapport du comité sur le Canada et l'OMC. Toutefois, nos positions actuelles comportent certains changements de priorité, parce que nous avons attentivement écouté le point de vue des Canadiens sur la situation de notre commerce international et sur notre politique commerciale internationale et avons réagi à l'évolution, bien sûr, de la conjoncture mondiale.
Nos vastes consultations auprès des Canadiens nous ont démontré que, d'une façon générale, ils appuient le programme commercial du gouvernement. Le monde des affaires a pris conscience des perspectives découlant de l'accès aux marchés étrangers et des apports technologiques et commerciaux qui nous viennent d'ailleurs.
Les consommateurs souhaitent pouvoir acheter des biens et des services de qualité, qu'ils soient d'origine canadienne ou étrangère, et veulent en même temps l'assurance que le gouvernement maintiendra une certaine latitude dans des domaines clés comprenant notamment la santé, l'éducation, la culture et les services sociaux.
Pour leur part, certains groupes d'intérêt et organisations de citoyens s'inquiètent des incidences sociales et environnementales du commerce et s'attendent à ce que le Canada se préoccupe des priorités des pays en développement dans tout nouveau cycle de négociations commerciales.
Les provinces et les territoires sont depuis longtemps associés de très près à l'élaboration de notre programme commercial, autant par leurs multiples intérêts que par leurs responsabilités particulières. Eux aussi appuient en général le programme commercial du gouvernement et continuent à contribuer très sensiblement à notre stratégie et à nos tactiques commerciales.
Bien sûr, monsieur le président, les membres du comité sont bien au courant de l'important rôle que le Parlement joue en permanence dans l'élaboration de la politique commerciale du Canada. Bref, le programme que je vous présente aujourd'hui a déjà fait ses preuves. Nos objectifs visent à mieux servir les intérêts des Canadiens comme citoyens de notre pays, mais également comme citoyens du monde.
[Traduction]
Je n'entrerai pas dans les détails parce que j'ai apporté une déclaration écrite plus complète qui sera distribuée aux membres du comité. Comme vous le savez, depuis Seattle, nous avons amorcé des négociations sur l'agriculture et les services, mais nous pouvons et devons en faire beaucoup plus.
Par conséquent, le Canada appuie des négociations sur une vaste gamme de sujets, comprenant ce qui suit: les tarifs non agricoles, afin d'assurer un accès plus large et plus sûr à nos exportations industrielles ainsi qu'aux produits de la pêche et des forêts; la facilitation du commerce, afin de rendre les procédures frontalières plus simples et plus transparentes, ce qui intéresse particulièrement nos petits et moyens exportateurs; la transparence dans les achats gouvernementaux, afin de permettre aux fournisseurs canadiens d'évaluer d'une façon réaliste leurs chances de décrocher des marchés publics d'approvisionnement à l'étranger; l'élaboration de règles pour clarifier et renforcer les disciplines relatives aux mesures antidumping et aux subventions, et pour limiter les restrictions inutilement imposées sur le commerce et les subventions légitimes, tout en améliorant notre capacité d'affronter les pratiques commerciales déloyales; et l'amélioration des mécanismes de règlement des différends, afin d'en augmenter l'efficacité et de préciser certains aspects ambigus des procédures.
Je crois que c'est là un programme de négociation réaliste, qui renforcerait les progrès réalisés dans les négociations d'une importance vitale qui se déroulent actuellement dans les domaines de l'agriculture et des services.
• 1540
Même si nous sommes les tenants du moyen terme dans ce débat,
il y a beaucoup d'autres propositions qui permettraient d'élargir
encore plus le programme. En ce qui concerne la politique de
concurrence, le Canada est disposé à participer à des négociations
excluant la définition d'obligations assujetties au règlement des
différends. Même si les pratiques anticoncurrentielles peuvent
nuire aux intérêts canadiens, notre intention est de créer des
capacités à cet égard dans le monde entier. Nous devons en outre
nous montrer sensibles aux contraintes qu'affrontent nos
partenaires en développement.
Au chapitre de l'investissement, le Canada est favorable à l'inscription de cette question au programme de négociation de l'OMC, afin de rechercher une plus grande transparence dans la réglementation des investissements et un traitement non discriminatoire des investisseurs canadiens à l'étranger. À l'instar de toutes nos autres initiatives internationales en matière d'investissement, un accord de l'OMC sur l'investissement serait acceptable pour le Canada tant qu'il respecte notre droit d'adopter des règlements dans l'intérêt public.
Vous trouverez également dans la déclaration écrite un aperçu de la façon dont nous nous proposons d'aborder différents sujets qui s'écartent du programme commercial ordinaire, mais qui s'y rattachent clairement, comme les questions environnementales. À cet égard, l'évaluation environnementale à laquelle sera soumise toute nouvelle négociation nous permettra de tenir compte de ses répercussions sur notre environnement et d'inclure des solutions appropriées dans notre approche globale.
Pour revenir à ce qui pourrait être négociable, j'ai dit que ce programme est réaliste. Mais est-il vraisemblable? Beaucoup se demandent si la prochaine conférence ministérielle va permettre de lancer une négociation plus vaste, ou si elle est promise au même sort que la rencontre de Seattle. Pour ma part, je suis maintenant assez optimiste. D'après mes discussions avec les ministres du commerce du monde, j'ai l'impression que le lancement d'une nouvelle négociation bénéficie d'appuis croissants. Il est clair cependant qu'il y a des divergences très réelles entre certains membres sur l'étendue et la portée du programme de négociation. Les grands pays commerçants développés, comme le Canada, sont en train de réduire l'écart entre leurs points de vue. De plus, personne ne peut douter de notre attachement commun à des négociations plus vastes. Toutefois, beaucoup de pays en développement ne sont pas encore convaincus des avantages d'une telle entreprise.
[Français]
Plusieurs raisons expliquent l'appui grandissant pour un cycle de croissance et de développement. Premièrement, il y a l'impératif moral d'en faire plus pour éliminer la pauvreté et la marginalisation. Deuxièmement, la conjoncture économique l'exige. Les grandes économies avaient déjà commencé à ralentir avant les événements atroces du 11 septembre, qui ont aggravé cette situation partout dans le monde.
Mais les impératifs moraux et économiques ne sont pas les seules raisons pour lesquelles le prochain cycle doit avoir pour thème la croissance et le développement. Pour dire les choses crûment, les réalités politiques de la situation l'exigent aussi. Les pays en développement constituent la majorité des pays membres de l'OMC et ils n'accepteront pas le lancement d'un nouveau cycle à moins d'être persuadés qu'on tiendra compte de leurs préoccupations. D'importants pays en développement, comme la Chine, qui doit bientôt accéder à l'OMC, sont convaincus de l'utilité d'un nouveau cycle. D'autres pays en développement ont des vues particulières sur la mise en oeuvre des résultats de la dernière négociation élargie, le Cycle d'Uruguay, et ont posé des conditions préalables pour entreprendre une nouvelle négociation.
La mise en oeuvre, par contre, soulève beaucoup de questions aussi délicates que difficiles. De quelle façon les règles de l'OMC servent-elles les intérêts des pays en matière de développement? Leurs gouvernements sont-ils en mesure d'entreprendre des travaux complexes? Leur économie a-t-elle la capacité de tirer parti des perspectives qui s'offrent? Le Canada appuie la recherche de moyens permettant de répondre aux préoccupations légitimes de mise en oeuvre. Il n'est tout simplement pas réaliste de s'attendre à des changements aussi étendus que certains l'exigent, c'est-à-dire à une refonte générale des règles et des engagements, hors du contexte de négociations élargies.
• 1545
Par ailleurs, il est parfaitement raisonnable de tirer
des enseignements du passé et de donner aux pays
pauvres les moyens d'accepter les règles et les
engagements de l'OMC et même d'en profiter. En termes
concrets, l'appui du Canada pour un cycle de croissance
et de développement signifie que nous sommes disposés à
offrir une aide technique reliée au commerce et aux
administrations et à soutenir la création de capacités
dans les économies et les sociétés en développement.
Il implique aussi une
adaptation à la réalité d'un processus de décision plus
inclusif au sein de l'Organisation mondiale du commerce.
Il signifie en outre que de nouvelles négociations
devraient viser des améliorations générales du système
de l'OMC, conçues pour assurer directement aux pays en
développement un meilleur accès aux marchés, surtout
dans le domaine agricole. On nous demandera
vraisemblablement de nombreuses concessions financières
et commerciales. Je doute que nous puissions les
accorder toutes et je ne crois pas que ce soit
nécessaire, mais je suis sûr qu'avec nos partenaires de
l'OMC, nous pourrons trouver un moyen de progresser qui
serve au mieux nos intérêts collectifs.
Voilà pourquoi je crois qu'avec un esprit de compromis et de pragmatisme de la part de tous les membres, tant développés qu'en développement, nous pouvons réaliser d'autres progrès au chapitre de la mise en oeuvre. En me basant sur mes contacts, je dirais qu'un nombre croissant de membres admettent maintenant que le lancement d'un nouveau cycle constitue le seul moyen pratique de régler les préoccupations suscitées par les résultats de la dernière négociation.
Nous entreprendrons un périple à Doha. Ce sera, bien sûr, un voyage de découverte. Nous savons ce que nous espérons trouver, mais nous ne pouvons contrôler pour le moment que le cap que nous mettrons. Voilà pourquoi il est important de partir avec un bon programme et de bonnes approches de négociation. C'est aussi la raison pour laquelle il sera capital, à notre avis, de mener la négociation de la bonne façon, c'est-à-dire avec le plus de transparence et d'inclusivité, pour que tous les membres soient des participants efficaces et que tous les citoyens, pas seulement les Canadiens, voient le déroulement du processus de négociation et puissent contribuer à leur position nationale. C'est le point de vue que je continuerai à mettre de l'avant au cours de toutes mes réunions avec mes homologues ministres du Commerce.
[Traduction]
Je voudrais maintenant prendre quelques minutes pour vous parler du projet de loi C-31. Comme vous le savez, la loi qui régit actuellement la SEE m'impose de procéder, en consultation avec le ministre des Finances, à un examen de la Loi sur l'expansion des exportations après cinq ans et d'en présenter les conclusions au Parlement. Ce processus d'examen, entrepris en 1998, comprenait une étude approfondie des opérations de la SEE, des besoins de financement des exportations du Canada et de l'environnement commercial international. Il comportait également des consultations avec les intervenants, ainsi que des études et des recherches détaillées.
Votre comité a produit un important rapport sur la SEE dont le gouvernement a, dans l'ensemble, approuvé les conclusions. Nous avons convenu que la Société devait démontrer publiquement sa responsabilité en tenant compte dans ses activités de toute la gamme des préoccupations de la politique publique et prendre des mesures appropriées pour assurer la transparence de ses opérations.
Je crois en outre qu'il est nécessaire d'en arriver à un certain équilibre entre les besoins concurrentiels des exportateurs canadiens et la volonté d'amener la SEE à faire preuve de leadership en matière de responsabilité sociale.
Je suis persuadé que le gouvernement est parvenu à un équilibre approprié dans sa réponse à l'examen de la Loi sur l'expansion des exportations. J'ai annoncé en juin dernier des mesures visant à actualiser le mandat de la SEE et à lui donner une certaine orientation stratégique en matière d'évaluation environnementale. J'ai également annoncé que j'avais l'intention de déposer un projet de loi, dans le cadre d'un ensemble plus large de modifications des politiques et des pratiques de la Société.
Le projet de loi dont le comité est saisi comprend des modifications qui donneront à la Société la raison sociale d'Exportation et Développement Canada, ainsi que des mesures destinées à actualiser ses pratiques de gestion et d'administration. Le principal changement, cependant, est que la Société aura l'obligation de faire une évaluation environnementale des projets pour lesquels son appui est sollicité.
En effet, le projet de loi permettra au Canada de se positionner à l'avant-garde des organismes de crédit à l'exportation du monde en matière de politique gouvernementale.
Par suite de l'attention accrue portée aux questions environnementales, il est généralement reconnu que la SEE a besoin d'un processus officiel d'évaluation environnementale. Ce point de vue est partagé par la Société elle-même, ses entreprises clientes, les groupes de citoyens et d'autres intervenants.
• 1550
Le rapport Gowlings présenté au comité recommandait à la SEE
d'adopter un cadre législatif et une approche comparables à ceux de
l'Export-Import Bank des États-Unis, qui a elle-même modelé ses
pratiques environnementales sur celles de la Banque mondiale. Votre
comité a ensuite abouti à des conclusions semblables et a
recommandé, en outre, que le vérificateur général supervise ce
cadre.
La SEE a été l'un des premiers organismes de crédit à l'exportation à adopter un cadre d'examen environnemental, plaçant le Canada et la Société dans le peloton de tête sur le plan des pratiques d'évaluation environnementale des projets d'exportation. En donnant force de loi à l'exigence d'évaluation environnementale des projets de la SEE, le gouvernement du Canada montre avec quel sérieux il aborde cette question, comme il l'a fait pour la protection des droits de la personne et la transparence des opérations de la SEE.
Permettez-moi, en conclusion, de revenir aux objectifs que nous poursuivrons à la quatrième conférence ministérielle de l'OMC. Nous avons toujours été conscients du fait qu'un nouveau cycle de négociations élargies était nécessaire dans l'intérêt du Canada. Nous préconisions donc depuis un certain temps l'adoption d'un programme équilibré et réaliste.
Mais nous savons aussi que nous ne parlons plus simplement de commerce. Pour réussir à lancer un nouveau cycle de négociation, nous aurons besoin à la fois de prendre l'engagement politique de tenir compte du développement et de montrer de quelle façon nous avons l'intention d'honorer cet engagement. Pour mener les négociations à bon terme, il faudra que le Canada et les autres pays étendent leur action au-delà de l'OMC et recourent à toute la panoplie de la coopération internationale pour répondre aux grandes aspirations sociales, environnementales et économiques de leurs peuples.
L'objectif fondamental de l'OMC devrait donc consister à gérer le régime commercial multilatéral de façon à l'adapter constamment à l'évolution de l'économie mondiale et à offrir le maximum de perspectives et d'avantages à tous les membres, aussi bien développés qu'en développement. Notre prochaine conférence ministérielle nous permettra de choisir la voie collective pouvant nous mener à cet objectif.
Monsieur le président, avant de passer aux questions, je voudrais vous présenter notre nouveau sous-ministre du Commerce international. J'aurais dû le faire au début, mais j'ai oublié. J'ai eu une mauvais grippe, et j'ai du mal à m'en remettre. J'aimerais vous présenter M. Len Edwards, qui est devenu sous- ministre en juin. Il occupait le poste d'ambassadeur du Canada à Tokyo. Il a été remplacé par M. Rob Wright. Donc, Len Edwards est le nouveau sous-ministre du Commerce international. J'aimerais que les membres du comité le saluent. Vous allez vous rendre compte que c'est un homme de talent.
Merci beaucoup.
Le président: Merci, monsieur le ministre. Si votre grippe vous empêche de répondre aux questions pendant la réunion, M. Edwards le fera à votre place.
Bienvenue au comité, monsieur Edwards. Tout ce que je sais dire en japonais, c'est sayonara, mais je pense que cela veut dire au revoir et non pas bonjour.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Nous pouvons dire sayonara à M. Wright, qui est allé à Tokyo, mais à vous, on vous dit bonjour. Bienvenue au comité.
Chers collègues, nous avons une heure cinq minutes pour discuter avec le ministre. Si tous les membres du comité utilisent, pendant le premier tour de table, les dix minutes auxquelles ils ont droit, il n'y en a pas beaucoup qui pourront poser des questions. Vous serez plus nombreux à intervenir si vous vous limitez à huit minutes. Nous pourrions peut-être surveiller cela de près.
Monsieur Duncan.
M. John Duncan: Est-ce que tout le monde alors aura la possibilité d'intervenir une fois?
Le président: D'après la règle, vous avez d'abord droit à dix minutes, et ensuite à cinq. Mais comme nous disposons de 60 minutes et qu'il y a beaucoup de personnes... nous allons voir ce que nous pouvons faire pour réduire le temps de parole.
M. John Duncan: Vous avez beaucoup parlé de l'OMC. Le Canada a tout intérêt à promouvoir le système commercial fondé sur les règles, puisque notre économie est fortement tributaire des exportations et que nous sommes un pays à population faible.
Le ministre compte prendre part, le mois prochain, aux discussions de l'OMC. Il sera accompagné d'une délégation canadienne.
Ce qui m'inquiète, c'est que vous êtes en train de vous marginaliser. Nous nous trouvons, en subventionnant Bombardier, à miner l'influence de l'OMC.
Quand nous avons annoncé, en juillet, le versement d'une subvention à Northwest Airlines, nous sommes allés à l'encontre d'un jugement de l'OMC. Nous pourrions appliquer des tarifs. Nous nous sommes battus pendant trois ou quatre ans pour obtenir ce jugement. J'ai dit à l'époque que ce geste minait l'influence de l'OMC.
• 1555
Nous avons maintenant un jugement de l'OMC qui dit que cette
décision était effectivement mauvaise. Or, le ministre de
l'Industrie persiste à dire que nous allons continuer de
subventionner la compagnie. Pourquoi le gouvernement, le cabinet,
autorise-t-il une telle chose? Nous semblons miner les efforts de
l'OMC alors que nous devrions les appuyer.
M. Pierre Pettigrew: D'abord, j'aimerais savoir si vous avez vu la décision de l'OMC.
M. John Duncan: Je n'ai pas vu les détails.
M. Pierre Pettigrew: Alors, ne tirez pas des conclusions hâtives en vous fondant sur ce que disent les journaux. Un rapport provisoire a été déposé, mais je ne peux vous en parler par respect pour l'OMC.
Ensuite, nous n'avons jamais subventionné Bombardier, Air Wisconsin ou Northwest Airlines. Nous avons accordé des garanties d'emprunt à des clients comme Air Wisconsin et Northwest Airlines. Comme aucune subvention n'a été versée, nous ne devrions même pas aborder le sujet.
Les règles de l'OCDE permettent à un pays, comme le Canada, d'égaler l'aide financière offerte par d'autres pays. Nous avons analysé les règles de l'OCDE de façon approfondie. Le Brésil a demandé qu'un comité d'experts se penche sur la transaction de janvier visant Air Wisconsin, mais pas celle de juillet visant Northwest Airlines.
Il m'est impossible de commenter la décision qui a été rendue. Vous allez constater, quand nous serons en mesure de le faire, que la décision est plus équilibrée. Nous avons déjà dit ce que nous en pensons. Nous sommes en train de préparer notre réponse à l'OMC. Bon nombre des arguments que nous avons invoqués auprès de l'OMC seront confirmés par cette décision.
L'OMC a rendu quatre jugements qui dénonçaient l'aide et les subventions accordées par le gouvernement brésilien à la compagnie Embraer. En janvier, nous avons décidé d'égaler l'offre du Brésil au moyen de garanties d'emprunt. Nous verrons ce que dit l'OMC. Évitons de tirer des conclusions hâtives.
Il est important, à ce stade-ci, de retourner à la table de négociation et d'établir, de concert avec le Brésil, des conditions qui offrent des chances égales à Bombardier et à Embraer. Il y a de la place pour les deux entreprises dans ce marché, et nous devons absolument nous entendre sur ce point.
M. John Duncan: L'autre ministre dit que la décision de l'OMC lui importe peu, qu'il va continuer d'appuyer Bombardier. C'est tout le contraire de ce que vous dites. Cette attitude nuit à la position canadienne et mine...
M. Pierre Pettigrew: Je ne crois pas que mon collègue accorde peu d'importance aux décisions de l'OMC.
M. John Duncan: C'est ce qu'il dit.
M. Pierre Pettigrew: Non. Ces rumeurs ont entraîné, la semaine dernière, une baisse de l'indice boursier parce que les gens disaient que le gouvernement du Canada ne serait pas en mesure de respecter ses obligations envers Air Wisconsin. C'était absolument faux.
Je me suis rendu en Asie et à Shanghai, et mon collègue a dit très clairement que nous avions un engagement à respecter. La preuve, c'est que l'OMC a jugé que le gouvernement brésilien avait fourni une aide déloyale à Embraer à quatre reprises, et qu'il n'avait rien fait pour corriger la situation. Donc, nous avons dit que nous respecterions l'engagement que nous avons pris en vue de protéger les actionnaires. Le Canada, à mon avis, a adopté une attitude très responsable dans ce dossier.
M. John Duncan: J'aimerais parler du bois d'oeuvre, comme vous nous avez invités à le faire.
Vous avez dit à maintes reprises que nous pouvons, sur le fond, obtenir gain de cause dans ce dossier, mais que nous allons, par prudence, privilégier la deuxième voie plutôt que d'intenter des poursuites judiciaires, et qu'il est important de faire bonne figure.
• 1600
J'aimerais vous poser quelques questions à ce sujet. Pourquoi
acceptez-vous que le Canada fasse toutes les concessions, les
propositions et les démarches dans le cadre de ces discussions,
alors que les États-Unis, eux, ne font rien?
Quand allez-vous convoquer les actionnaires à une assemblée nationale? Le moment le plus indiqué serait sûrement après les réunions de Vancouver et de Montréal.
M. Pierre Pettigrew: Le feriez-vous avant ou après que les États-Unis annoncent leur décision sur les droits antidumping? Nous nous attendons à ce qu'ils rendent une décision vers le 30 octobre.
M. John Duncan: Vous savez bien que je demandais à ce que vous le fassiez avant la tenue de ces réunions. Maintenant que celles-ci ont lieu, il faudrait agir le plus tôt possible. Je ne sais pas si on peut demander que la décision soit reportée. Nous l'avons fait dans un autre cas, à la suite des événements du 11 septembre. Mais je ne sais pas s'ils comptent toujours annoncer leur décision le 30 octobre.
Il faudra que tout le monde soit d'accord quand la décision sera rendue. Il faudra que la réunion des actionnaires soit annoncée cette semaine et qu'elle ait lieu avant mercredi prochain.
M. Pierre Pettigrew: D'accord. Merci pour le conseil.
Sur le fond, nous allons de l'avant avec les poursuites. J'ai dit à maintes et maintes reprises que notre dossier était solide et je n'ai absolument pas changé d'avis. La position des producteurs américains est beaucoup plus faible que ce que je pensais. J'ai eu l'occasion d'en prendre connaissance quand ils l'ont déposée, et j'ai été très étonné et même abasourdi d'apprendre que le département du commerce entendait imposer un droit compensateur de 19,3 p. 100. J'avais l'impression que cette décision était dictée par des considérations surtout politiques.
Je maintiens résolument ma position. Je crois qu'il est absolument nécessaire de mener à bien cette poursuite. Nous comparaissons devant l'OMC sous six chefs d'accusations déposés par les États-Unis. Je suis convaincu que nous gagnerons.
Comme vous le savez, il faut du temps pour gagner un procès, en raison de tous les recours et autres procédures. Nous avons consulté abondamment les représentants de l'industrie du pays—en Colombie-Britannique, au Québec, en Alberta et en Ontario—et tous les gouvernements provinciaux ayant des intérêts dans ce dossier. Nous avons maintenant un plan de discussion.
D'abord, j'estime important de rappeler au député que c'est le ministre du Commerce international qui dirige toutes les négociations. Pendant que j'étais en Asie, j'ai eu vent de certaines déclarations à la presse, où vous disiez, à ma grande surprise, que les provinces négociaient individuellement. C'est complètement faux.
C'est le ministre du Commerce international qui a la responsabilité de diriger les négociations, d'y participer et de les coordonner. Évidemment, nous travaillons de pair avec les provinces, parce que 90 p. 100 des allégations des Américains portent sur des programmes provinciaux. Il va de soi que nous devons collaborer avec les provinces. Nous pensons que c'est la bonne chose à faire. Il n'y a pas eu de concession de la part de qui que ce soit jusqu'à maintenant.
Il y a à peine quelques mois, votre propre province, la Colombie-Britannique, élisait un nouveau gouvernement avec M. Campbell à sa tête et M. de Jong au poste de ministre des Forêts. Ces messieurs ont été élus sur la promesse de changer leurs pratiques forestières au profit de leur industrie, et non des États-Unis.
Ils discutent actuellement de l'évolution de l'industrie et des pratiques de gestion des forêts, sur la base de quoi ils tentent d'établir un terrain d'entente entre les États-Unis et le Canada. J'estime cette façon de faire très responsable. Je suis très fier de l'équipe canadienne que nous avons constituée sur la question. Je suis très fier aussi que les provinces et l'industrie y participent de façon constructive.
M. John Duncan: Je voulais seulement...
Le président: Je suis désolé, monsieur Duncan, je ne peux vous laisser continuer. Vous avez déjà eu 12 minutes. Désolé.
M. John Duncan: Je voulais seulement dire que vous avez parlé de négociations pour la première fois dans votre brève réponse.
M. Pierre Pettigrew: Désolé, je ne m'en suis pas rendu compte.
Le président: Ce sera tout sur le sujet.
[Français]
Madame Lalonde, s'il vous plaît.
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Merci. Je vais partager mon temps avec M. Paquette.
Voici ma première question. Je lis dans Le Monde d'aujourd'hui qu'on dit à Genève:
-
Le 14 novembre
commence le ramadan, et l'émir nous a fait savoir qu'il
ne voulait plus aucun chrétien sur son territoire
à cette date-là.
Alors, d'après ce qu'on sait, Doha se tiendra-t-il à Doha?
Deuxièmement, dans votre discours, vous nous rappelez qu'il n'est pas question de mettre sur la table nos systèmes de santé et d'enseignement publics et nos services sociaux, et que nous conserverons la flexibilité nécessaire pour poursuivre nos objectifs en matière de politique culturelle.
Est-ce l'émir qui vous inquiète?
M. Pierre Pettigrew: Non, je veux...
Mme Francine Lalonde: Je peux vous en donner une copie. J'en ai ici.
Quand vous parlez des systèmes de santé et d'enseignement publics, cela peut être inquiétant. Vous savez qu'au Québec, le système d'enseignement privé aux niveaux secondaire et collégial est financé à 80 ou 100 p. 100 par l'État. Est-ce que ce sont les services d'enseignement financés par l'État qui sont assurés d'être maintenus? Vous parlez des systèmes de santé et d'enseignement publics, alors qu'en réalité, et je le répète, ces systèmes sont souvent partiellement privés ou complètement privés, mais financés de façon publique et accessibles à tous.
M. Pierre Pettigrew: Le système public d'éducation, chez nous, ne sera pas sur la table de négociation. Il n'y a pas de doute là-dessus. Maintenant, il y a des écoles privées, des cours privés qui peuvent déjà être donnés. Il y a déjà des écoles américaines qui donnent des cours particuliers au Québec, par exemple en informatique. À l'intérieur des entreprises, il y a des formations qui ont été montées avec des programmes qui sont parfois internationaux. Mais les systèmes publics d'enseignement et de santé du Canada ne sont pas mis sur la table.
La raison pour laquelle nous ne voulons pas exclure cela de la table de négociation, comme certaines personnes nous l'ont parfois demandé, est qu'il y a beaucoup d'intérêts, notamment au Québec. Je me souviens d'avoir dirigé un jour, quand j'étais ministre du Développement des ressources humaines, une délégation au Maroc avec neuf collèges québécois, l'Université Laval et certains cégeps qui faisaient du développement.
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Comme le Collège de Joliette.
M. Pierre Pettigrew: Comme le Collège de Joliette. Donc, nous voulons participer au développement des règles dans le domaine des services de l'éducation au plan international pour nous assurer que ça serve les intérêts de nos entreprises qui veulent exporter, mais dans notre cas à nous, il n'est pas question que nous les négociions.
Mme Francine Lalonde: Est-ce qu'on voit poindre le chapitre 11 dans ce document que vous nous avez donné, où vous dites qu'on consulte les 142 pays qui seront à Doha, ou peut-être ailleurs? Vous allez me répondre là-dessus. Est-ce qu'on le voit poindre dans le point 18 et dans le point 26? Dans le point 18, on dit qu'il y aura une négociation sur l'investissement et que cela va inclure le règlement de disputes entre gouvernements. Est-ce que ce sera la seule façon de les régler? Vous savez que je fais allusion au chapitre 11 de l'ALENA. Est-ce qu'on en voit poindre le bout des oreilles au point 18 ou au point 26?
M. Pierre Pettigrew: Sur le chapitre 11, permettez-moi d'abord de dire aux membres du comité à quel point je suis heureux des améliorations que nous avons été capables d'apporter à la commission trilatérale qui a siégé le 1er août à Washington. Donc, quant à l'engagement que j'avais pris devant vous d'apporter des éléments d'amélioration à ce chapitre 11 de l'ALENA, il y a des progrès. Je peux vous assurer que mes collègues américains et mexicains et moi avons l'intention d'apporter d'autres améliorations et modifications de ce côté-là. Il y a un travail actif qui est fait.
• 1610
Je dis ici que le Canada serait prêt à négocier
l'investissement si tous les pays de l'OMC étaient
d'accord sur cela et dans la mesure où ils ne nous
empêcheraient pas de légiférer dans l'intérêt du public au
pays. Ça, c'est clair, et je peux vous assurer que si
l'ordre du jour de
toute négociation éventuelle
intégrait l'investissement, nous tiendrions
compte de ce que nous avons appris de l'expérience
nord-américaine de l'ALENA. Il faudrait
donc qu'il y ait les clarifications
nécessaires, notamment en ce qui a trait à
l'expropriation. On va être plus prudents.
Mme Francine Lalonde: Donc, la réponse n'est pas non. Je m'arrête là, monsieur le président.
Le président: Monsieur Paquette.
M. Pierre Paquette: Je ne suis pas sûr d'avoir compris le fond de votre réponse à la question de Mme Lalonde.
Est-ce que, oui ou non, tout en ouvrant le chapitre sur les investissements... Là-dessus, on est clairement en faveur de la protection des investissements, mais non d'une protection du type de celle qu'on retrouve dans le chapitre 11. D'ailleurs, vous avez pu voir hier que le tribunal d'arbitrage de l'ALENA avait refusé d'entendre le syndicat des postiers dans le cas de la cause UPS contre Postes Canada, ce qui nous semble inadmissible. Donc, il y a des améliorations à faire, et les modifications que vous avez présentées cet été me semblent insuffisantes.
Est-ce qu'on pourrait retrouver, de la part du Canada, dans les négociations concernant l'investissement à l'OMC, quelque chose qui pourrait s'apparenter au chapitre 11, ce que vous avez dit ne pas vouloir avoir dans le cas de la négociation de la Zone de libre-échange des Amériques? C'est une question à laquelle je voudrais que vous répondiez clairement.
Voici maintenant deux questions rapides. Est-ce que la culture est à l'ordre du jour? On nous avait dit que non, d'autant plus que le Sommet de la Francophonie avait été annulé et qu'on n'avait donc pas pu s'entendre sur une position commune.
Pour l'agriculture, dans les textes concernant la Zone de libre-échange des Amériques qui ont été rendus publics, on n'a pas retrouvé quelque chose qui avait trait à la défense de la gestion de l'offre. Cela nous a inquiétés et nous inquiète toujours. Quelle sera la position du gouvernement canadien concernant la gestion de l'offre, particulièrement avec la décision intérimaire qu'on a connue dans le cas du lait?
M. Pierre Pettigrew: Évidemment, cela portait sur le lait d'exportation. Vous connaissez bien la différence qu'il y a entre les deux prix. Nous contestons nous-mêmes cette décision, mais je peux vous assurer que notre appui au système de la gestion de l'offre chez nous est total et que nous le maintenons.
Dans le domaine du commerce de l'agriculture, nous en sommes aux subventions à l'exportation et à certaines subventions internes, y inclus sur les marchés internationaux, mais notre appui au système de gestion de l'offre est maintenu d'une manière très claire. Je vais regarder les textes plus précis si vous le voulez. On peut les préciser, mais il n'y a pas de problèmes de ce côté-là.
Sur la culture, notre position est exactement celle que nous avons... Je parlais à Mme Louise Beaudoin hier et nous...
M. Pierre Paquette: Ce sera à l'ordre du jour?
M. Pierre Pettigrew: Nous ne voulons pas discuter à Doha de l'exportation des produits culturels. Nous voulons maintenir le droit des gouvernements de réglementer dans le domaine culturel sans que soient pénalisés les produits à l'exportation en fonction des règles traditionnelles que nous avons dans le domaine de l'offre. Nous trouvons que les règles de commerce qui s'appliquent là ne doivent pas s'appliquer aux produits culturels. Donc, les gouvernements doivent pouvoir créer des espaces par la réglementation ou des appuis à leurs institutions culturelles.
Nous sommes vigilants dans ce dossier et nous apprécions toute aide qui nous vient de la Coalition pour la diversité culturelle partout où on peut aller, parce que c'est un combat difficile, en ce sens qu'il n'y a pas beaucoup de pays qui ont la même sensibilité que nous à cet égard. Alors, quand vous rencontrez des gens à l'extérieur, c'est très bien.
Sur la question du chapitre 11, il y a d'autres améliorations à venir. Par exemple, une des choses qui ont été bloquées lors de ma dernière demande, c'était l'introduction de contributions amicus devant les panels. Je n'ai pas obtenu cette chose la dernière fois. Le Canada continue de la demander, et j'espère être capable d'obtenir la présentation de brefs amicus à ces panels, ce qui améliorerait la situation, comme vous l'avez dit hier.
Maintenant, il n'est pas certain que les investissements feront partie de la négociation. Je ne le sais pas encore. Les Européens y tiennent mordicus et d'autres tiennent à ce que ce ne soit pas là. Je vous donne la position canadienne. Je ne bloquerai pas une négociation de 142 pays sur cela. Je vous donne les balises à l'intérieur desquelles je travaillerai. Pour le moment, il n'y a aucune proposition de quelque pays que ce soit visant l'introduction d'une disposition sur ce qu'on appelle les investor states, ou les États investisseurs, comme celle qu'il y a dans le chapitre 11. Personne ne parle de ça dans cette négociation.
Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre.
[Traduction]
Madame Augustine.
Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Monsieur le ministre, nous apprenons tous avec l'expérience. Ainsi, je suis certaine qu'en étudiant l'Accord de libre-échange, vous avez appris beaucoup sur la transparence en général et les petits accords.
Par exemple, nous venons tout juste d'étudier l'accord avec le Costa Rica. Quel enseignement utile en avons-nous tiré, qui nous servira à Doha? Quelles leçons retenons-nous sur la transparence que nous pourrons appliquer à Doha après nos pourparlers sur l'Accord de libre-échange? Dans cette optique, comment aborderons- nous ces questions à la conférence?
Ma deuxième question, encore une fois, porte sur les pays en développement et sur leur insatisfaction. Ces pays se sont sentis laissés pour compte dans la dernière ronde de négociations. Comment entrevoyez-vous la participation des pays en développement à la prochaine séance de négociations, et quelle est la position du Canada sur ce point? J'ai bien entendu ce que vous avez dit dans votre préliminaire, mais pourriez-vous être un peu plus précis quant à l'appui que ces pays pourraient espérer obtenir du Canada en cours de négociation?
Enfin, sur une note beaucoup plus personnelle, nous étions tous très inquiets pour vous à Seattle, lorsque nous vous avons vu passer par-dessus une clôture ou sauter pour atteindre un lieu sûr... Quelles sont les conditions et les mesures prises à Doha, selon vos renseignements, pour assurer la sécurité pendant la conférence?
M. Pierre Pettigrew: Je vous remercie de soulever ce point. Je pourrai justement répondre à la question de Mme Lalonde sur Doha, à laquelle je n'ai pas eu le temps de répondre.
Le gouvernement qatarien a déployé des efforts remarquables pour préparer la conférence de Doha et en assurer la sécurité. Il a travaillé très fort et très bien. Une équipe de Genève lui a justement rendu visite récemment.
Nous poursuivons donc nos préparatifs. Nous avons tenu des pré-réunions ministérielles au Mexique et à Singapour. Nous tenons absolument à maintenir les dates prévues du 9 au 13 novembre, parce que nous ne voulons pas briser l'élan. Nous voulons passer à l'action. Cette séance sera axée d'abord et avant tout sur les besoins des pays en développement. Ils sont là, et nous voulons en profiter.
Nous nous tenons informés de la situation et tenons compte des renseignements que nous a transmis Mme Lalonde sur le ramadan. La conférence se tiendra du 9 au 13 novembre, ce qui nous donne quelques heures. Nous continuons de suivre la situation de très près sur le plan de la sécurité et nous prendrons la bonne décision, mais il y aura une quatrième conférence ministérielle du 9 au 13 novembre.
Le président: À Seattle, vous avez dû sauter un muret. Pensez- vous apprendre à monter à dos de chameau pour parer à toute éventualité?
M. Pierre Pettigrew: En ce qui concerne les questions les plus pertinentes qui m'ont été posées sur les leçons acquises de nos négociations avec des pays comme le Costa Rica, je répondrai aux deux questions, qui sont très connexes, en même temps.
Comme vous le savez, le GATT a été créé en 1947 par 23 pays développés. Il a fallu beaucoup de temps avant que les pays en développement ne se joignent au GATT ou à l'OMC, qui l'a remplacé. L'OMC compte désormais 142 membres, dont beaucoup de pays en développement. La dynamique a complètement changé.
Bon nombre des règles que nous avons adoptées, croient-ils, conviennent davantage aux économies plus développées qu'aux leurs, ce pourquoi ils souhaitent en revoir une bonne partie, ce que je comprends très bien. C'est ce qu'on appelle des mesures d'application.
Nous pouvons beaucoup mieux comprendre la chose depuis deux événements. À Seattle, j'ai personnellement présidé le groupe de travail sur l'application. Ce travail m'a énormément sensibilisé aux préoccupations des pays en développement. Je crois que nous retirons beaucoup de cette expérience. En négociant avec un petit pays en développement comme le Costa Rica, nous avons pu constater encore mieux les défis auxquels ils sont confrontés.
Pendant les négociations sur l'ALE à Buenos Aires, à la table de l'OMC, partout dans le monde, des ministres comme Tony Hilton de la Jamaïque vous diront très clairement que le Canada est un pays bienveillant à l'égard des pays en développement et des économies de petite taille.
• 1620
Notre souci se concrétise par les activités comme celles de
l'ACDI et du G-20, que dirige notre collègue Paul Martin, ministre
des Finances. Nous faisons de notre mieux pour aider les économies
de petite taille ou en développement à hausser leur capacité pour
pouvoir participer à l'OMC et en tirer pleinement parti. Ils en
sont déjà membres, mais ils n'en profitent pas toujours
entièrement.
Je vous donne un exemple. Ces pays ont parfois des doléances bien fondées, mais ils ne peuvent les présenter à l'OMC parce qu'ils n'ont pas les moyens de se payer les avocats. Nous avons donc créé un fonds juridique, que ces pays peuvent maintenant utiliser pour charger les meilleurs avocats de défendre leurs causes.
Des progrès sont réalisés dans plusieurs dossiers. Je veux notamment souligner le travail de mon sous-ministre Leonard Edwards, qui participe aux travaux de la QUAD, dont font partie l'Union européenne, les États-Unis, le Japon et le Canada.
Les ministres ont demandé aux sous-ministres de faire tout en leur pouvoir pour aider les pays en développement et favoriser les mesures d'application. Ils ont donc dressé une liste de 93 mesures, dont 50 ont été soigneusement étudiées et intégrées. En ce qui concerne les 43 qui restent, nous tiendrons une autre séance, au cours de laquelle nous verrons comment nous pouvons en tenir compte.
Ainsi, il n'y aura pas de nouvelle ronde de négociations, si ce n'est que pour nous pencher sur les besoins des économies en développement, qui constituent la majorité à l'OMC. Ces pays ont des griefs précis. Ils sont bien organisés. Cela paraissait déjà aux pré-rencontres ministérielles au Mexique et à Singapour.
Le président: Je vous remercie, monsieur le ministre, et vous aussi, madame Augustine.
Monsieur Robinson.
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Je me joins aux autres pour souhaiter la bienvenue au ministre. Je voudrais poursuivre dans la foulée des questions de ma collègue, Mme Augustine, quant aux préoccupations des pays les moins développés pour la prochaine ronde de négociations.
J'ai en main une déclaration faite il y a quelques semaines par l'ambassadeur Mchumo de la Tanzanie qui a commenté l'ébauche de la déclaration ministérielle au nom des pays les moins développés. M. Mchumo s'est dit vivement préoccupé par l'ébauche de déclaration ministérielle, qu'il jugeait bien loin d'être acceptable et qui ne lui semblait pas tenir dûment compte des intérêts et des opinions exprimés par les ministres des pays les moins développés à Zanzibar.
Ainsi, lorsque je compare les propos du ministre—il nous a fait part de ses intentions pour l'OMC—aux préoccupations des pays les moins développés, je constate de grandes différences entre les deux à plusieurs chapitres, notamment en agriculture.
Je m'interroge tout particulièrement au sujet de l'Accord sur les ADPIC. Comme le ministre le sait sans doute très bien, les pays les plus pauvres sont très insatisfaits des dispositions de l'OMC sur les ADPIC. Les pays en développement, à la tête desquels on trouve le Brésil, l'Inde et le groupe des pays africains membres de l'OMC, souhaiteraient un énoncé beaucoup plus clair qui faciliterait l'achat par les pays en développement de médicaments essentiels à un prix abordable sans crainte de représailles.
Le Canada semble irréfutablement du nombre des quelques récalcitrants, aux côtés des États-Unis et de la Suisse, qui refusent de bouger dans ce dossier.
Que voulez-vous de plus pour démontrer les pouvoirs et les abus de pouvoirs des sociétés pharmaceutiques? On en a justement eu la preuve ici, au Canada, ces derniers jours avec Bayer.
Je veux poser une question précise au ministre. Quelle est la position du Canada quant aux inquiétudes des pays les plus pauvres par rapport à l'Accord sur les ADPIC?
M. Pierre Pettigrew: Voilà une excellente question, qui a d'ailleurs fait l'objet de discussions aux pré-réunions ministérielles au Mexique et à Singapour.
Je n'ai pas lu la déclaration de l'ambassadeur de Tanzanie.
J'ai par contre rencontré le ministre Simba de Tanzanie, qui est à la tête du groupe des pays les moins développés. Je l'ai vu à Singapour, où il a effectivement affirmé que l'ébauche de la déclaration de Stuart Harbinson était loin d'être à la hauteur de leurs attentes. C'est exactement là où nous en sommes maintenant. Nous travaillons depuis à la question et sommes en attente d'une nouvelle version. On tente de voir ce qu'on peut faire de plus... Bien sûr, on ne peut pas s'attendre à un appui extraordinaire au stade des négociations. C'est comme avec les syndicats, vous savez. Il est très rare que les syndicats ne qualifient pas une offre de tout à fait ridicule avant de l'accepter. Je peux vous assurer, selon les propos de M. Maran, de l'Inde, et du ministre Simba, de la Tanzanie, qu'ils apprécient l'effort que nous déployons. Cela ne signifie pas qu'ils sont satisfaits. J'insiste sur ce point. Ils ne sont pas encore satisfaits du texte. Ils continuent d'affirmer qu'ils ne peuvent accepter cet accord tel qu'il est maintenant. Je peux comparer cette situation à la nôtre il y a quelques semaines, du moins avant Seattle.
• 1625
La position du Canada? Nous faisons notre gros possible en
matière d'agriculture. Vous savez, l'Union européenne et le Japon
sont beaucoup plus protectionnistes que nous. Sur ce front, nous
travaillons avec les pays développés à tenter d'ouvrir certains
marchés aux pays en développement. Les ADPIC sont le reflet d'un
réel effort dans ce dossier.
Les discussions que nous avons tenues à Genève et à ces réunions montrent clairement que l'Accord sur les ADPIC offre une grande souplesse que beaucoup de pays en développement n'avaient pas vue. Nous avançons très prudemment, mais efficacement, pour déterminer exactement ce que nous pouvons changer à l'accord actuel, qui offre une souplesse que beaucoup de pays en développement, voire de pays développés, avaient sous-estimée. Nous estimons que l'Accord sur les ADPIC est probablement acceptable, et même bon, dans sa forme actuelle. En fait, les souplesses inhérentes à cet accord nous permettront de trouver des moyens de l'adapter aux besoins des pays en développement.
M. Svend Robinson: Monsieur le président, ce n'est pas la position des pays en voie de développement. En fait, l'ambassadeur a déclaré très précisément, dans le passage traitant de l'accord sur les ADPIC, qu'ils sont extrêmement déçus.
Je ferai remarquer au ministre qu'en fait, un passage qui figurait dans le texte ministériel qui a précédé le Sommet de Seattle ne se trouve plus dans le projet de déclaration, par exemple les dispositions du groupe ACRI et d'autres pays en vue de préciser qu'on ne peut breveter tous les organismes vivants et les bioprocédés. De plus, les politiques sui generis relatives aux obtentions végétales nationales qui protègent le droit qu'ont les collectivités locales de conserver leurs pratiques traditionnelles qui consistent à sauver et à échanger des semences ont été reconnues dans le texte qui a précédé le Sommet de Seattle. Elles ne se trouvent plus dans le texte que voici.
Je suis très déçu d'entendre le ministre dire que l'accord sur les ADPIC, dans sa forme actuelle, est acceptable. C'est là certes une gifle assenée aux pays en développement.
J'aimerais demander au ministre...
M. Pierre Pettigrew: Nous laisserons les pays en voie de développement parler.
M. Svend Robinson: Ils l'ont déjà fait.
M. Pierre Pettigrew: Je ne crois pas qu'ils voient cela comme une gifle. Ce n'est pas tout à fait le ton des discussions que nous avons avec eux. Je ne parlerais pas de gifle.
Nous sommes en train d'essayer, dans la déclaration de Doha, de leur donner l'assurance que l'accord actuel leur permet d'obtenir les médicaments dont ils ont besoin dans des situations d'urgence, et déjà ils acceptent le fait.
M. Svend Robinson: Les pays en voie de développement connaissent fort bien l'actuel accord et ils affirment qu'il est inacceptable.
Ma dernière question concerne la loi relative à la SEE, en rapport avec une recommandation faite à l'unanimité par notre comité. Il a en effet recommandé que l'article 10 de la Loi sur l'expansion des exportations soit modifié de manière à y inclure explicitement les obligations internationales du Canada de manière à ce que nous respections ces obligations internationales. Nous avons entendu des témoins nous dire que c'est déjà en fait la position adoptée par la SEE, qu'elle a déjà pour mandat de respecter ces engagements.
Je tiens à souligner également, monsieur le président, que la loi australienne visant l'EFIC, c'est-à-dire l'organisme australien de crédit à l'exportation et le pendant de la SEE, exige explicitement que la société tienne compte des obligations contractées par l'Australie en vertu d'accords internationaux. Je tiens à demander au ministre s'il est disposé à accepter une modification qui mettrait en oeuvre la recommandation unanime du comité et qui reprendrait les dispositions de la loi australienne de manière à tenir compte des obligations internationales du Canada.
M. Pierre Pettigrew: Le Canada est signataire d'un grand nombre de traités et il a beaucoup d'autres obligations internationales. La grande majorité de ces textes sont de nature déclarative ou le Canada a souscrit à une série de principes. Ce genre d'engagement n'est pas assorti d'un cadre commun pour en évaluer le respect, ni de critères ou de définitions acceptés par tous. Il est très difficile d'imposer des engagements ayant force obligatoire dans beaucoup de ces dossiers, de sorte que nous ne pouvons pas les formuler et les préserver ainsi.
M. Svend Robinson: Les Australiens réussissent pourtant à le faire en utilisant justement ce libellé.
M. Pierre Pettigrew: Nous allons voir ce qu'ils font. Par contre, ce n'est pas parce qu'un autre pays le fait... Il faudrait que je voie le libellé exact qu'ils ont utilisé ou ce qu'ils vont en faire. Quand nous inscrivons quelque chose dans une loi au Canada, nous aimons être en mesure de l'appliquer.
Le président: Monsieur le ministre, je vous remercie.
C'est maintenant au tour de M. Keyes.
M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'être venu nous tenir au courant et je vais donner suite à votre suggestion de vous interroger au sujet d'autres questions pressantes.
Ma question concerne l'acier et, naturellement, plus précisément les préoccupations que cause au Canada le commerce de l'acier.
Monsieur le ministre, cette question est d'une grande importance chez moi, à Hamilton, en Ontario, où se trouvent les sièges sociaux de Stelco, de Dofasco, d'autres producteurs d'acier et, bien sûr, des centres d'acier. Je vais commencer par dire que je suis réconforté d'entendre que le gouvernement et l'Association canadienne des producteurs d'acier travaillent de concert à faire face aux pressions que subit cette importante industrie.
Toutefois, monsieur le ministre, il est urgent—et je dis bien urgent—d'agir sur deux fronts. D'une part, les instances commerciales canadiennes ont décidé récemment de rejeter les deux plaintes déposées au Canada pour dumping de tôles en acier laminées à froid et à chaud. D'autre part, la Commission du commerce international des États-Unis a rendu une décision hier selon laquelle les importations de la plupart des principaux produits d'acier sont une source de préjudice grave et important—en vertu de l'article 201.
Maintenant, pour l'amour du ciel, expliquez-moi comment—et je l'ai bien entendu dire une douzaine de fois aujourd'hui—deux tribunaux commerciaux peuvent arriver à des conclusions tout à fait opposées! Pour être honnête, je me range du côté de la décision des Américains et de la manière dont ils ont protégé leurs frontières. J'ai lu dans le journal d'aujourd'hui, plus particulièrement dans le Globe and Mail, une citation de Sandy Adam, d'Algoma Steel. Il dit:
-
Nous avons tendance à devoir prouver le bien-fondé de notre cause,
alors que les pays qui font du dumping n'ont même pas à comparaître
pour assurer leur défense. Aux États-Unis, de toute évidence, il y
a présomption de culpabilité en cas de dumping et il faut que les
gens prouvent qu'ils n'ont pas subi de préjudice.
Ils n'en ont pas subi. À vrai dire, étant donné la situation sur les deux fronts, il semble que le Canada est en vérité celui qui subit le préjudice—deux fois plutôt qu'une.
Voici ma question. Il faut assurément que le gouvernement du Canada agisse avec promptitude et efficacité. Donc, qu'allez-vous faire, monsieur le ministre, pour protéger nos frontières, notre industrie nationale de l'acier et les centaines de milliers littéralement d'emplois canadiens rémunérateurs qu'alimente cette industrie?
M. Pierre Pettigrew: Vous avez tout à fait raison de dire que la situation dans l'industrie de l'acier, qui déjà était très difficile au cours des dernières années, est devenue extrêmement tendue depuis la prise de ces mesures aux États-Unis.
J'ai rencontré les chefs de l'industrie de l'acier, hier soir. Nous avons eu un échange franc quant à ce qu'ils veulent qu'on fasse, et ce fut une conversation fort utile. Il s'agissait d'une séance de travail, en présence de plusieurs de mes collègues. Jim Peterson, secrétaire d'État au ministère des Finances, y était, de même que M. Tobin, ministre de l'Industrie. Nous travaillons extrêmement fort à ce dossier, de concert avec l'industrie.
Hier, je me suis également entretenu avec Don Evans, Secrétaire au commerce des États-Unis, et j'ai été très direct. Je lui ai dit qu'il ne me semblait pas correct que le Canada, en tant que partenaire dans le cadre de l'ALENA, soit inclus—et par «correct», j'entends «légal». Je ne crois pas que les Américains peuvent légalement recourir à l'article 201 comme ils l'ont fait dans le cas de l'acier pour frapper les produits canadiens de droits spéciaux. Nous ne changeons pas notre fusil d'épaule. Je leur ai dit que ce genre d'attitude nous conduit tout droit vers le tribunal. À l'étape du recours, le dialogue et les discussions se poursuivent. C'est ce qui va se passer.
• 1635
Il y a aussi l'autre angle. L'industrie croit que si nous
prenons les mesures de sauvegarde qu'elle préconise, cela lui
facilitera la vie. Elle travaille en très étroite collaboration
avec notre industrie. Ce marché est un problème mondial. Le
problème n'est pas tant entre nous nord-Américains que par rapport
au reste du monde.
M. Stan Keyes: Oui. On en arriverait presque à souhaiter un périmètre de sécurité nord-américain pour empêcher les autres d'inonder d'acier bon marché nos pays, plutôt que notre seul pays. Comme le Canada et les États-Unis sont les seuls pays du monde qui importent de l'acier, il est peut-être temps de se porter à la défense de notre industrie. S'il faut mettre en oeuvre la proposition concernant des mesures de sauvegarde, alors nous allons le faire pour nous protéger.
Simultanément, il faut collaborer avec les États-Unis pour faire en sorte qu'ils comprennent que nous ne devrions pas être visés par les mesures prévues à l'article 201. Nous essayons de lutter contre ceux qui voudraient nous inonder d'acier bon marché. Nous faisons un commerce loyal, selon moi, depuis de nombreuses années. Nous pouvons continuer de le faire. Si ce sont des contingents tarifaires qu'il faut, alors agissons sans plus tarder.
Monsieur le ministre, étant donné les circonstances, je crois comprendre que le président Bush ne disposera que de sept ou de huit semaines. Il rendra une décision sur cette question. Nous devons être là. Nous devons veiller à ce que notre industrie soit protégée. Monsieur le ministre, je crois que nous pouvons nous en occuper. Vous pouvez aller rencontrer le ministre là-bas comme l'a fait l'ancien ministre des transports avec M. Pena. Dites-lui ce qu'il en est et commencez à protéger notre industrie.
M. Pierre Pettigrew: Je vous entends très bien. Je peux vous dire que je m'accommode des lois américaines en ce qui a trait au bois d'oeuvre. Vous savez que le Canada se plaint des lois commerciales américaines depuis un bon moment.
Je continuerai à défendre ardemment la cause et à la promouvoir. Nous accordons une très grande priorité à cette question à l'heure actuelle. Les décisions en ce qui a trait aux sauvegardes doivent être prises par le ministère des Finances, en consultation avec le ministère du Commerce international et des Affaires étrangères ainsi que celui de l'Industrie. Nous tenons sans cesse des réunions pour évaluer la situation. Je peux vous garantir que nous nous engageons pleinement à maintenir notre collaboration avec l'industrie.
Le président: Merci.
M. Stan Keyes: Merci, monsieur Graham.
Le président: Monsieur Lunn.
M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, PC/RD): Merci, monsieur le président. Bienvenu, monsieur le ministre.
Si vous le permettez, je pourrais commencer en utilisant les mots prononcés par M. Keyes il y a une minute, à savoir que le Canada subit un préjudice—deux fois plutôt qu'une. Comme vous le savez parfaitement, monsieur le ministre, mardi prochain nous attendons une décision antidumping de la part des États-Unis en ce qui a trait au dossier du bois d'oeuvre. Selon des rumeurs qui circulent aux États-Unis, il est question d'environ 15 p. 100. Si vous ajoutez 15 p. 100 à 19,3 p. 100, la situation de notre industrie affaiblie, où des dizaines de milliers d'emplois ont été perdus, deviendra intenable. Pour reprendre votre propos, il faut du temps pour gagner un procès.
Malheureusement, monsieur le ministre, nous n'avons pas beaucoup de temps dans ce cas-ci. Il se peut que nous gagnions le procès deux ou trois ans plus tard. Je ne dis pas que nous ne devrions pas poursuivre la lutte. Je le répète, je veux établir un parallèle. Nous sommes aux prises avec des pratiques commerciales déloyales de la part des États-Unis. N'ayons pas peur des mots. Les États-Unis portent des accusations injustifiées. Nous nous sommes adressés trois fois à l'OMC, comme vous l'avez dit à plusieurs reprises.
Lorsque vous considérez la transaction Air Wisconsin- Bombardier de janvier dernier, cette entreprise était aux prises avec des pratiques commerciales déloyales du genre de celles dont est l'objet le bois d'oeuvre. Bien sûr, le gouvernement est intervenu et a consenti des garanties de prêts d'une valeur de 2 milliards pour que l'entreprise puisse concurrencer les subventions commerciales déloyales.
Je sais que vous avez rencontré à plusieurs reprises le représentant commercial des États-Unis, M. Zoellick. Notre industrie doit entendre parler de mesures plus concrètes, à savoir exactement quand et comment les choses seront réglées selon vous. La situation devient désespérée.
Je sais que vos hauts fonctionnaires se sont réunis à Vancouver et ont rencontré les administrations locales. Je les en félicite. Il faut absolument que les administrations locales soient parties prenantes à la décision. Si elles peuvent contribuer à trouver une solution, c'est génial. Leurs représentants se réunissent en ce moment à Montréal.
• 1640
Qu'est-ce que vous et votre ministère faites à l'heure
actuelle? Pouvez-vous nous réconforter et nous dire que vous
trouverez une solution dans quelques semaines ou dans quelques
mois, pas seulement l'année prochaine? Je ne sais pas si nous
pouvons survivre.
Quant à ma deuxième question, elle porte sur la décision provisoire de l'OMC en ce qui a trait au dossier d'Air Wisconsin. En janvier vous nous avez dit qu'e vertu des règles de l'OCDE un pays d'appliquer des contre-mesures et que la loi le permet.
Je suis heureux que nous ayons réalisé certains gains dans cette décision provisoire. L'OMC a statué qu'il est interdit de prendre des contre-mesures. C'est contre les règles. De toute évidence, nous n'avons pas suivi les règles. Bien sûr, nous avons continué à le faire avec Northwest Airlines.
Comment envisagez-vous l'avenir avec le gouvernement brésilien en ce qui a trait au dossier Embraer?
M. Pierre Pettigrew: Je crois qu'il nous faut rencontrer de nouveau le gouvernement brésilien afin d'offrir des conditions égales à Embraer et Bombardier.
Je n'accepte que vous disiez que nous avons perdu. Ne croyez pas tout ce que vous lisez dans les journaux. Je peux vous dire que le rapport provisoire contenait beaucoup de conclusions que défend le Canada depuis cinq ans. Des décisions favorables ont été rendues à quatre reprises.
Je ne peux commenter la décision de l'OMC. Je peux vous dire que notre stratégie consiste à travailler sur le dossier de Bombardier et d'Embraer. Je suis convaincu que nous allons reprendre la négociation.
Malheureusement, les Brésiliens nous ont laissé tomber l'an dernier pour conclure la transaction d'Air Wisconsin. C'est alors que nous avons décidé de suivre leur exemple en matière de subsides comme l'autorisait l'OCDE. Nous verrons ce que l'OMC a vraiment dit en temps opportun. Je ne peux commenter sa décision pour l'instant.
En ce qui concerne la question du bois d'oeuvre, qu'est-ce que fait maintenant mon ministère pour aider? Nous faisons beaucoup de choses. Premièrement, nous continuons d'intervenir le plus possible par la voie diplomatique à Washington. Il est plus difficile d'obtenir l'attention des législateurs de Washington ces jours ci depuis les événements extraordinaires du 11 septembre. Ils accomplissent un travail remarquable en travaillant avec nos alliés pour tenter de mieux expliquer la situation.
Nous n'abandonnons pas le litige. En fait, demain ou vendredi je vais amener un autre groupe d'experts devant l'OMC relativement à la plainte des États-Unis. Nous ne baissons pas les bras; je ne laisse rien au hasard. Nous devons poursuivre la procédure judiciaire.
En ce qui concerne l'industrie et les provinces, je les remercie du professionnalisme dont ils font preuve dans le cadre de cet exercice. Nous essayons d'aller au fond des choses afin de bien cerner les revendications des Américains en ce qui a trait à nos façons de faire. La question des droits de coupe dans les cycles d'inactivité revient souvent.
Nous nous limitons au problème exact. Si nous pouvons trouver la solution dans les prochaines semaines, en nous entendant sur ce qui constituerait une concurrence déloyale au marché du travail canadien, ce serait bien. Nous pourrions vraiment essayer de régler le problème.
À l'heure actuelle nous travaillons sur toutes sortes de préjugés et de malentendus aux États-Unis. Ils ont des préjugés contre les terres publiques et les sociétés d'État. Ils ne voient pas toutes les obligations qui en découlent. Nous entretenons un bon dialogue sur le fond plutôt que de nous crier après. Je crois que cela nous permettrait d'éviter un litige jusqu'à la fin et de trouver une solution à long terme.
M. Gary Lunn: Je vous remercie de vos observations. Le problème qui se pose dans l'industrie, comme je l'ai correctement dit, c'est qu'elle est à l'heure actuelle aux prises avec des pratiques commerciales déloyales. Comme vous l'avez dit, le dialogue est amorcé. Malheureusement, cela ne s'est pas produit en 1996 au moment de l'entrée en vigueur de l'entente sur le bois d'ouvre. Vous auriez pu sensibiliser l'administration américaine, les représentants du commerce des États-Unis pour qu'ils comprennent.
Ce n'est que maintenant que cela se fait. Malheureusement, nous avons des dizaines de milliers d'employés d'un bout à l'autre de ce pays, pas seulement en Colombie-Britannique là où on en dénombre une énorme proportion de 45 p. 100. Il s'agit d'emplois partout au pays. Étant donné le ralentissement de notre économie, l'avenir n'est pas très prometteur en ce qui a trait à leurs sources de revenus. Je vous le signale donc.
• 1645
Ils se sont adressés à nous—et je sais que M. Duncan est aux
prises avec les mêmes problèmes dans sa circonscription—et nous
ont dit qu'une solution s'impose dès maintenant. Cela ne veut pas
dire une entente négociée; cela signifie qu'ils savent que nous
nous occupons à l'heure actuelle de cette affaire, que nous avons
gagné et qu'il nous faut donc régler le problème.
Pouvez-vous préciser un délai aux gens de cette industrie et leur dire ce qu'il adviendra selon vous? Comme vous l'avez si bien dit, il faut du temps pour gagner. Si dans ce dossier, le gouvernement opte pour la procédure judiciaire, nous en avons pour des années, des années dont nous ne disposons pas dans ce cas-ci.
M. Pierre Pettigrew: Comme vous le savez, nous avons gagné la dernière fois. Ils sont allés beaucoup plus loin dans les procédures judiciaires en 1992. Ils sont même allés jusqu'au bout du processus. À cette époque, les Américains avaient perçu 800 millions de dollars en droits compensatoires qu'ils ont dû rembourser aux producteurs canadiens.
J'ai très confiance que l'avenir nous donnera raison, mais je ne peux vous préciser une date. Il s'agit d'un dossier complexe où plusieurs programmes sont analysés. Je fais de mon mieux. Le rythme des discussions s'est accéléré dernièrement. Nous allons faire tout notre possible pour trouver une solution hâtive. Mais que puis-je faire?
Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre.
Monsieur Casson.
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, j'aimerais vous poser une question sur l'agriculture et sur les subventions agricoles.
Au cours des dernières années, plusieurs producteurs canadiens se sont tournés vers cette prochaine ronde de négociations de l'OMC avec beaucoup d'espoir, surtout dans les secteurs des céréales et des oléagineux. Les subventions qui altèrent la production continuent à désavantager grandement nos producteurs, particulièrement celles qui sont versées par l'UE et les États- Unis.
L'Union européenne et les États-Unis disent tous deux qu'ils vont continuer à appuyer leurs agriculteurs et qu'ils ne vont pas réduire leurs subventions. Les pays en voie de développement veulent avoir accès à nos marchés—et nous regardons l'accord sur le sucre qui a été signé avec le Costa Rica. Nos producteurs de sucre s'inquiètent quelque peu de la possibilité que cet accord serve de modèle dans d'autres négociations. Quel progrès avons-nous fait dans le dossier des subventions qui altèrent la production?
Vous mentionnez dans ce document-ci que nos producteurs doivent prendre des décisions d'investissement. Comment pouvez-vous les rassurer que certains changements pourront aider à stabiliser leur industrie?
M. Pierre Pettigrew: Merci pour cette question sur l'agriculture. Il s'agit vraiment d'une priorité difficile pour notre gouvernement qui est sur le point de participer à ces nouvelles négociations.
Depuis l'Uruguay Round, des négociations prescrites ont eu lieu en matière de services et d'agriculture. Ces négociations prescrites n'ont pas fait beaucoup de bruit, mais il se fait beaucoup de travail pour mesurer les distorsions du marché causées par des subventions d'ouverture. Nous sommes donc beaucoup mieux préparés techniquement pour nous attaquer à ce problème; pour vraiment faire des progrès. Les Américains sont tout à fait d'accord avec nous pour combattre ces subventions à l'exportation qu'utilisent énormément les Européens.
Je suis d'accord qu'il nous faut faire quelque chose concernant les subventions internes que les Américains peuvent offrir à leurs producteurs du fait qu'ils ont un portefeuille bien garni, mais cela n'est pas acceptable. Mais nous sommes alliés avec plusieurs pays en voie de développement du Groupe de Cairns.
Nous nous rendons compte, par contre, que les négociations prescrites sur l'agriculture ne laissent aucune marge de manoeuvre aux entités protectionnistes comme l'Union européenne et le Japon, s'il n'est pas tenu compte du bon travail technique qui s'est fait pour mieux comprendre l'agriculture. Ils ne disposent pas d'une marge de manoeuvre suffisante pour leur permettre de faire des concessions qui seraient perçues comme acceptables par l'opinion publique dans ces pays.
Pour faire des concessions dans le domaine de l'agriculture et abaisser leurs subventions à l'exportation, ils doivent expliquer à leur population respective quelles sont les retombées dans le domaine des services et des exportations industrielles. C'est ce qu'il faut faire, et c'est pourquoi nous avons besoin d'une autre ronde. Nous avons fait beaucoup de progrès sur le plan technique, mais il n'est pas suffisant de réussir à abaisser ces subventions, précisément parce qu'il n'y a pas suffisamment de marge de manoeuvre pour agir dans d'autres secteurs.
• 1650
Nous préconisons une réforme majeure du commerce agricole
mondial et je crois qu'il n'y aura pas de prochaine ronde sans que
le commerce agricole ne fasse l'objet d'améliorations
substantielles. J'en suis convaincu.
M. Rick Casson: Êtes-vous en train de dire que pour nous doter de leviers de négociation suffisants, il va falloir soulever d'autres questions? Je crains parfois, comme le craignent certainement les producteurs agricoles, qu'ils semblent toujours finir par y perdre au change. C'est toujours le secteur agricole qui souffre des compromis qui sont faits dans d'autres secteurs.
Allons-nous essayer de faire changer les choses? Êtes-vous vraiment en train de dire que l'agriculture est une priorité?
M. Pierre Pettigrew: Je pense que cela est devenu une priorité pour un trop grand nombre de pays maintenant. Vous avez tout à fait raison. Ironiquement, en 1954, les Américains ont proposé une exemption des droits de douanes prévus par le GATT dans le domaine de l'agriculture, et c'est à ce moment-là que nous avons emboîté le pas.
Malheureusement, nous avons eu beaucoup de difficultés à replacer l'agriculture dans le système fondé sur les règles du GATT et de l'OMC. C'est ce que nous essayons de faire maintenant, mais nous avons beaucoup de rattrapage à faire. Vous avez raison de dire que nous n'avons pas vraiment négocié pour le secteur de l'agriculture jusqu'à maintenant.
M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Vous vous débrouillez bien, malgré votre rhume.
Monsieur le ministre, ma question porte aussi sur l'agriculture. Je sais que nous ne devrions pas croire tout ce que nous lisons dans les journaux, mais une histoire nous arrive de Washington aujourd'hui où il est question des mêmes sornettes que nous avons entendues tellement de fois concernant la Commission canadienne du blé. D'après un article de journal, la North Dakota Wheat Commission prétend que les pratiques de détermination des prix de notre Commission canadienne du blé coûtent aux agriculteurs américains 100 millions de dollars par année et ont fait chuter les prix mondiaux de 8 p. 100. Ils demandent à l'administration Bush à Washington d'imposer des droits à l'importation pouvant aller jusqu'à 30 p. 100.
Je pense que ce sont des sottises. Je pense que c'est ridicule. Nous avons tellement entendu répéter ce genre de choses, mais dans le climat actuel, j'imagine qu'on ne peut faire abstraction de ce que nous entendons en provenance de l'autre côté de la frontière.
Face à cette dernière série d'accusations ridicules, j'aimerais donc savoir si vous les prenez au sérieux et s'il y a quelque chose que vous pourriez faire. Je sais que les Américains ciblent encore la Commission canadienne du blé pour une énième fois. Pensez-vous que nous allons pouvoir nous en sortir sans égratignure?
M. Pierre Pettigrew: Vous avez bien raison de soulever ce point. J'ai lu l'article auquel vous faites allusion concernant la Commission canadienne du blé. C'est très frustrant pour moi parce que la Commission canadienne du blé a moins de poids que la Société Cargill à elle seule, pour ce qui est de sa capacité d'influencer les prix et le reste. Cargill Foods Limited, la société américaine, contrôle à elle seule une plus grande part du marché mondial que la Commission canadienne du blé.
Ce qui est frustrant, c'est qu'ils ont poursuivi la Commission canadienne du blé à huit reprises devant des tribunaux, des panels ou d'autres entités. Nous avons gagné à huit reprises. Maintenant, ils veulent en remettre pour une neuvième fois. Voilà pourquoi nous sommes frustrés par les lois commerciales américaines. Elles sont très protectionnistes, et ce sont des outils souvent très arbitraires. À l'échelle internationale, il y a un grand nombre de pays qui veulent que l'on se penche sur les lois relatives au commerce international en matière de dumping et de droits compensatoires, précisément pour que les Américains cessent d'abuser de ces outils.
Pour ce qui est de la Commission canadienne du blé, nous allons défendre notre cause encore une fois et nous allons gagner encore une fois.
Le président: Monsieur le ministre, je me demande si vous pourriez donner suite à la question de M. Harvard.
Comme vous vous en souviendrez, l'amendement Byrd en vigueur à l'heure actuelle aux États-Unis prévoit que celui qui intente une poursuite pour dumping peut lui-même s'approprier les droits compensatoires plutôt que d'avoir à les remettre dans les recettes générales du pays. Pourrait-on raisonnablement s'attendre à ce que les mesures de harcèlement commercial auxquelles ont recours les Américains se multiplient au centuple plutôt que de diminuer dans un avenir rapproché?
• 1655
Dans le cas du bois d'oeuvre, les avocats saisis de l'affaire
ont écrit à tous les producteurs de bois d'oeuvre des États-Unis
pour leur dire, «Joignez-vous à l'action, parce que si nous gagnons
500 millions de dollars, nous allons le partager avec vous.» Si les
avocats se mettent à pourchasser les ambulances pour se faire une
clientèle, si la loi des États-Unis leur permet de partager le
butin et de déterminer leurs honoraires en fonction des résultats,
je n'ai pas l'impression que cette pratique va disparaître.
M. Pierre Pettigrew: Non. L'amendement Byrd est inadmissible, et notre gouvernement la conteste devant l'OMC. Nous n'allons pas accepter cela. Je pense qu'il s'agit là d'une façon tout à fait abusive de... particulièrement en ce qui concerne les droits compensatoires et autres. Nous allons donc nous y opposer fermement.
Comme vous savez, le président Bush a suspendu l'amendement Byrd, tout comme son prédécesseur, le président Clinton. Il n'a donc pas force de loi aux États-Unis. Il existe, mais le président Bush, comme Clinton, s'oppose à son application. Cette modification n'est donc pas en vigueur.
Le président: Suis-je dans l'erreur ou les avocats de l'affaire du bois d'oeuvre encourageaient-ils réellement l'industrie du bois d'oeuvre...?
M. Pierre Pettigrew: C'est très payant pour les avocats, je vous le garantis.
Si je devais recommencer ma carrière, peut-être deviendrais-je avocat spécialisé dans le commerce américain.
Le président: À chacun son métier.
Monsieur Paquette.
[Français]
M. Pierre Paquette: Je voudrais profiter des quelques dernières minutes que nous avons pour parler un peu du projet de loi qui modifie la loi qui régit la Société pour l'expansion des exportations. On parle d'environnement. C'est sûr que cela nous semble insatisfaisant, mais au moins, on en parle.
Quant à la question des droits de la personne et du travail, le sujet a été complètement absent, d'autant plus que dans la déclaration qu'on a vue de l'OMC, on commence à parler de référence à la déclaration de l'OIT de 1998, j'imagine. Ne serait-il pas normal que la Société pour l'expansion des exportations fasse une évaluation d'un projet en fonction aussi des droits du travail et des droits de la personne, comme on le demande pour l'environnement? Même si au plan environnemental, ça nous semble insatisfaisant, au moins, on parle du sujet.
Il y a aussi le cas, qui vous avait d'ailleurs été soumis par le chef du NPD à la Chambre, de la mine Bulyanhulu, en Tanzanie. Vous aviez répondu à ce moment-là qu'Amnistie Internationale n'avait pas trouvé de preuves que des mineurs artisans avaient été tués lors de l'éviction. Mais j'ai bien lu le rapport de 2000 d'Amnistie Internationale, où on dit qu'Amnistie Internationale n'a pas été capable de mener l'enquête et demande une enquête indépendante sur ces sujets-là. Il me semble que, dans le contexte de la modification de la Société pour l'expansion des exportations, on aurait dû ouvrir une fenêtre sur les droits de la personne. Cela me semble essentiel.
M. Pierre Pettigrew: Sur la question des droits de la personne et sur ce qui touche d'ailleurs à la politique en général, la Société pour l'expansion des exportations travaille étroitement avec le ministère des Affaires étrangères, respecte les conseils du ministère des Affaires étrangères, respecte notamment tous les embargos ou les boycotts que nous faisons à l'endroit de pays pour des raisons comme celles que vous décrivez. Donc, cette collaboration existe déjà. Ils sont soumis à la politique étrangère canadienne et donc aux embargos, aux boycotts et à toutes les réalités qu'il y a de ce côté-là.
Maintenant, sur cette question de la Tanzanie, quand Mme McDonough m'a posé la question en Chambre, je lui ai effectivement donné une information qu'on m'avait donnée par rapport à Amnistie Internationale. Vérification faite, vous avez raison. Ils n'avaient regardé que les documents qui leur avaient été soumis, mais n'avaient pas pu aller sur le terrain, et ils ont donc eux-mêmes modifié leurs constatations et corrigé leur propre déclaration par rapport à cela.
M. Pierre Paquette: Ça modifie la réponse que vous avez donnée en Chambre.
M. Pierre Pettigrew: Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Ni l'enquête de la police tanzanienne ni l'examen de la CEE et de la Banque mondiale n'ont permis de trouver des fondements aux accusations selon lesquelles des mineurs auraient été assassinés. Qu'est-ce que vous voulez? La CEE, de concert avec la Banque mondiale, continue à suivre l'évolution de ce projet et à consulter les parties afin que les engagements concernant le respect des normes sociales et environnementales soient observés.
M. Pierre Paquette: Ça ne m'étonne pas que la police tanzanienne n'ait rien trouvé, parce qu'on l'accuse d'être aussi complice de l'éviction forcée.
M. Pierre Pettigrew: Oui, mais la Banque mondiale a quand même eu un regard d'assez près.
M. Pierre Paquette: En tout cas, je vous invite à étudier ça.
M. Pierre Pettigrew: Il faut être vigilant. Vous avez raison.
[Traduction]
Le président: Madame Jennings,
[Français]
Est-ce que votre question est assez brève?
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Elle est assez courte, monsieur le président.
Le président: Très bien. On vous invite donc à la poser.
Mme Marlene Jennings: Ma première question concerne ce que mon collègue Keyes a soulevé sur l'acier et le rapport intérimaire, sur les recommandations qui seront faites à l'administration américaine et sur la réponse que vous avez donnée, selon laquelle nous avons gagné jusqu'à maintenant huit fois, et sur ce déclin... Oui, oui, et les Américains reviennent toujours.
N'y aurait-il pas possibilité de négocier l'inclusion, dans la loi, de dispositions qui permettraient aux tribunaux administratifs et aux parties qui, comme le Canada, se font accuser de violations, de faire en sorte que des amendes soient imposées au demandeur comme mesure de découragement, à celui qui prétend avoir été victime une fois, deux fois, trois fois? Ce sont les mêmes faits. Il n'y a pas grand-chose de substantiel qui ait changé dans la plainte, sauf l'année du dépôt de la plainte.
Deuxièmement, pourrait-il y avoir des amendements afin que les pays comme les États-Unis ne puissent pas garder eux-mêmes les taxes ou les tarifs qu'ils imposent en attendant une décision définitive, finale et sans appel? C'est ma première question.
Ma deuxième question a rapport aux négociations à Doha, au Qatar. Étant donné qu'une grande partie de cela va toucher à des sujets qui, comme vous l'avez dit, concernent les pays en voie de développement... On fait beaucoup de travail au niveau de la coopération internationale et du développement international. Je me demande si le ministre ou les ministres de la Coopération internationale des divers pays n'auraient pas un rôle à jouer dans ces négociations.
M. Pierre Pettigrew: Oui, tout à fait. D'ailleurs, j'ai souligné que l'ACDI faisait une contribution magnifique afin de renforcer la capacité des pays du Sud de bien participer à l'OMC, et on apprécie beaucoup tout ce qui est fait par l'ACDI. D'ailleurs, il y a un petit bijou à l'ACDI, qu'on appelle CIDA Inc., qui travaille énormément à aider nos entreprises canadiennes à faire un travail formidable du côté des pays en développement.
Maintenant, pour votre première question, l'idée d'imposer des amendes à ceux qui ont tort va contre tout le système juridique dans lequel on est. Le problème, c'est que les lois ne sont pas faites comme ça. Avant que les Américains acceptent une chose comme celle-là, ça va être extrêmement long, extrêmement difficile. C'est lassant et frustrant mais, que voulez-vous, ça fait partie du droit international ou de leur droit national, car ils nous poursuivent souvent devant leurs propres tribunaux. Mais ça fait quand même partie de ce dont on veut discuter à l'OMC quand on dit qu'il faut voir les lois nationales des pays. Mais
[Traduction]
ne comptez pas trop là-dessus.
Mme Marlene Jennings: Nous n'avons pas fini.
M. Pierre Pettigrew: Non.
Mme Marlene Jennings: Comme toujours, et nous sommes très tenaces.
M. Pierre Pettigrew: C'est très bien.
Le président: Monsieur le ministre, pour terminer, je souhaiterais vous remercier, au nom du comité, d'avoir accepté son invitation. J'espère que vous vous remettrez bien vite de votre rhume.
Certains d'entre nous vous accompagneront à Doha, comme vous le savez. Je tiens à vous remercier, vous et le gouvernement du Canada, pour votre précieux appui à la création d'une assemblée parlementaire à l'OMC. La transparence du processus est très importante pour nous. Nous croyons fermement que la présence d'une assemblée parlementaire améliorera le travail de l'OMC.
Nous comprenons qu'il y a toutefois beaucoup d'embûches sur cette route. Certains pays ne voient pas les choses comme nous. Beaucoup de parlementaires participeront à la conférence de Doha pour discuter de cette initiative. Nous sommes très reconnaissants envers le gouvernement canadien d'avoir donné son aval à la recommandation que lui avait présentée ce comité il y a quelques années.
Je voudrais également vous remercier de la part de la Fédération canadienne des municipalités, à qui je me suis adressé en votre nom dimanche dernier. Je vous rappelle que les municipalités suivent de très près les possibilités qui s'offrent à elles dans le contexte du commerce international. Elles se questionnent également sur leurs pouvoirs. Elles apprécient grandement que vous ayez proposé de les rencontrer pour discuter de ces enjeux importants.
• 1705
Sur ce, monsieur le ministre, merci encore une fois d'avoir
partagé vos réflexions avec nous. Nous serons heureux de vous
entendre à nouveau, ainsi que M. Edwards, qui devrait également
être des nôtres la prochaine fois.
M. Pierre Pettigrew: Je vous remercie. Nous nous reverrons bientôt à Doha.
Le président: Maintenant, mes chers collègues, nous ferons une pause d'à peine 30 secondes avant de nous pencher sur la Loi sur l'expansion des exportations. Je vous remercie de rester avec nous après cette pause. Nous entamerons notre étude du projet de loi modifiant la Loi sur la SEE.
Le président: Chers collègues, nous reprenons nos travaux.
Nous passons maintenant à l'étude du projet de loi modifiant la Loi sur la Société pour l'expansion des exportations. Comme vous le savez, nous en ferons l'étude article par article demain. Nous entendrons donc quelques témoins cet après-midi et quelques-uns demain matin. L'audience de ce soir est prévue de 17 à 18 heures. Nous avons déjà 15 minutes de retard. J'espère que nous pourrons poursuivre après 18 heures.
Nous accueillons aujourd'hui cinq témoins, qui disposeront chacun de 10 minutes. Faites le calcul vous-mêmes. Il ne restera que peu de temps pour les questions. Je présume que chacun d'entre vous a déjà déposé un mémoire auprès du comité. Je vous prierais de donc d'être brefs dans vos exposés, de sorte que nous ayons le temps de poser quelques questions.
Cela étant dit, je prierais M. Allmand de commencer.
M. Warren Allmand (président, Droits et Démocratie): Je serai très bref.
Le président: Mais qu'est-ce que cela veut dire? Ne faites pas comme Mme Jennings. Elle dit toujours cela.
Des voix: Oh, oh!
Mme Marlene Jennings: Monsieur le président, vous savez bien que c'est moi qui ai pris la relève de l'honorable Warren Allmand dans la circonscription.
M. Warren Allmand: Une relève exceptionnelle!
Le président: Je suis heureux de voir que vous êtes du même camp.
Monsieur Allmand.
M. Warren Allmand: Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je voudrais d'abord vous remercier de me permettre de m'exprimer sur le C-31, projet de loi important qui modifie la Loi sur l'expansion des exportations.
Vous savez peut-être que j'ai déjà témoigné devant ce comité sur la même question le 16 novembre 1999, pendant votre étude du rapport Gowlings.
À cette même date comparaissait M. Kimy Pernia, leader du peuple autochtone d'Embera Katio, en Colombie. Il avait témoigné que la Société pour l'expansion des exportations a financé, sur le territoire de son peuple en Colombie, un barrage qui a perturbé le mode de vie et gravement affecté la santé de son peuple. Nous sommes allés en Colombie en juin dernier. Parce que Kimy a défendu les intérêts de son peuple pendant toutes ces années, deux jours après que nous lui ayons rendu visite, il a été kidnappé par des les paramilitaires colombiens et nous n'en avons plus entendu parler depuis. Il est présumé mort aujourd'hui: une autre tragédie en Colombie. Comme je l'ai dit, Kimy faisait partie des témoins qui étaient à mes côtés la dernière fois que je suis venu devant le comité sur ce sujet.
La SEE est une importante société canadienne chargée d'un mandat d'intérêt public en matière d'exportation. Comme elle est soutenue par le Parlement et le gouvernement canadiens, il est essentiel qu'elle leur rende compte de tous ses actes. À titre de société d'État, il est crucial que ses activités et son mandat s'harmonisent aux lois et aux politiques canadiennes, particulièrement en ce qui a trait aux engagements du Canada en vertu de traités internationaux.
• 1715
Monsieur le président, nous croyons que le projet de loi C-31
comporte effectivement des améliorations, notamment dans le domaine
de l'environnement, mais il ne représente pas une véritable
progression sur les plans de la divulgation et des droits humains.
Je n'aborderai pas les questions environnementales. D'autres
organismes sont mieux placés que moi pour le faire.
Je veux toutefois indiquer que l'article 10 de la Loi sur l'expansion des exportations, qui porte sur la mission de la société, devrait, selon nous, être reformulé comme suit:
-
La société a pour mission de soutenir et de développer, directement
ou indirectement, le commerce extérieur du Canada ainsi que la
capacité du pays d'y participer et de profiter des débouchés
offerts sur le marché international dans le respect des obligations
internationales du Canada.
Nous proposons ce nouveau libellé comme modification à la loi.
Dans son rapport de décembre 1999, le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international recommandait un changement semblable. Je dois souligner que nous sommes parfaitement d'accord avec ce rapport daté du 16 décembre 1999. C'est un excellent rapport à mon avis. J'attire notamment votre attention sur les recommandations 21 et 22, où vous dites que dans l'exécution de son mandat et l'exercice de ses pouvoirs, la Société doit tenir compte des avantages que le Canada tire d'accords internationaux et accorder toute l'importance voulue aux engagements et aux obligations pris en vertu de ces accords.
Le ministre Pettigrew a lui-même laissé entendre dans une déclaration faite le 26 juin 2001, que ces changements seront apportés à la loi. Dans la documentation sur l'examen législatif de la Société pour l'expansion des exportations, M. Pettigrew a indiqué qu'un rapport présenté au Parlement en mai 2000 faisait état des mesures prises pour obliger la SEE à tenir compte des avantages des accords internationaux pour le Canada et de ses engagements en vertu de ces accords, notamment en ce qui concerne les droits humains, les principales normes du travail et l'environnement.
Pour ce qui est de la divulgation, monsieur le président, le projet de loi C-31 n'oblige pas la SEE à divulguer des renseignements au public canadien, malgré les recommandations contenues dans le rapport Gowlings, dans le rapport de votre comité et dans celui du Bureau du vérificateur général à cet égard. De plus, la recommandation 28 du rapport Gowlings prescrit que la SEE devrait être tenue de publier régulièrement des renseignements sur les opérations qu'elle finance.
L'examen de la Loi sur l'expansion des exportations effectué par Gowling, Strathy & Henderson en juin 1999 et par votre comité en décembre 1999... Le ministre Pettigrew a recommandé que la SEE soit tenue de communiquer des renseignements relatifs aux transactions. Il est vrai que la SEE a élaboré une politique à cet effet, politique qu'elle a mise en oeuvre le 1er octobre 2001. Toutefois, il s'agit d'une politique interne, plutôt que d'une exigence de la loi. Il est intéressant de noter qu'au milieu des années 80, la SEE a décidé unilatéralement qu'elle cesserait de communiquer des renseignements qu'elle communiquait auparavant. Donc, la société peut abolir ses politiques n'importe quand si elle n'est pas tenue de respecter certaines obligations imposées par le Parlement. Le comité a dit, dans son rapport, qu'il souhaitait l'obliger à communiquer les renseignements. Le ministre l'a également dit, et le rapport Gowling va dans le même sens. Nous vous demandons de modifier la loi à cet égard.
En ce qui concerne les droits de la personne, monsieur le président—et c'est là la fin de mon exposé—, dans votre rapport de 1999, vous avez recommandé que l'article 10 de la loi, dont j'ai déjà parlé, soit modifié de manière à inclure nos obligations en vertu du droit international, particulièrement nos obligations en vertu de la Convention internationale des droits civils et politiques et du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, et que ces obligations soient inscrites dans la loi. Je fais évidemment allusion aux recommandations 21 et 22 de votre excellent rapport. À notre avis, il faudrait apporter des modifications en ce sens.
• 1720
Monsieur le président, en ce qui concerne la communication des
renseignements, je tiens simplement à dire que depuis deux ans,
nous rédigeons un rapport sur les conséquences de la nouvelle
technologie que sont en train de concevoir des sociétés canadiennes
de haute technologie pour surveiller et contrôler les militants des
droits de la personne et de la démocratie en Chine. La semaine
dernière, nous avons publié ce rapport, intitulé Le Bouclier d'or
de la Chine.
Afin d'obtenir de l'information du gouvernement sur le rôle joué par la SEE dans le financement de Nortel et d'autres entreprises qui développent cette technologie pour le compte du régime chinois, très répressif, nous avons déposé 17 demandes d'accès à l'information. Nous avons obtenu en réponse des pages vierges. Nous avons en effet reçu 17 pages vierges parce que la SEE n'est pas assujettie à la Loi sur l'accès à l'information.
À titre d'exemple, la Banque de développement du Canada, une autre société d'État, est assujettie à la Loi sur l'accès à l'information. Les deux organismes de crédit à l'exportation des États-Unis sont assujettis à la loi équivalente des États-Unis, y compris l'Overseas Private Investment Corporation, c'est-à-dire leur régie des investissements privés à l'étranger. Nous estimons donc qu'en conformité avec les recommandations que vous avez faites, vous devriez modifier la loi.
En guise de conclusion, je tiens à dire ceci. Tout d'abord, il faut qu'il y ait cohérence entre cette loi et les autres obligations canadiennes contractées dans le domaine des droits de la personne, des normes du travail, de l'environnement et ainsi de suite. Si la ratification des conventions internationales a un sens, il faut qu'elle ait un impact au Canada. Il faut que cette convention soit lue en regard d'autres lois, et le Parlement du Canada, lorsqu'il adopte des lois, doit faire en sorte qu'il y a cohérence et uniformité entre la mesure législative envisagée et les autres lois et obligations du Canada.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, votre rapport du 16 décembre 1999 était excellent. Nous étions entièrement d'accord avec vos recommandations 20, 21 et 22, mais le projet de loi C-31 ne semble pas y donner suite.
La crédibilité de votre comité est en jeu. Vous avez le pouvoir, en tant que comité, de modifier la loi dans le sens de votre rapport, et c'est exactement ce que je vous demande de faire. Monsieur le président, voilà qui met fin à mon exposé.
Le président: Monsieur Allmand, je vous remercie. J'aimerais toutefois vous rappeler peut-être, puisque vous êtes vous-même un parlementaire aguerri, que le projet de loi à l'étude nous est renvoyé après la deuxième lecture. La Chambre s'est déjà prononcée à son sujet, de sorte que le nombre de modifications... Nous les examinons au fur et à mesure qu'elles sont proposées, mais naturellement, notre pouvoir de modifier la loi après la deuxième lecture est limité, comparativement à ce que nous pouvons faire après la première lecture. Il faudra donc que nous en tenions compte lorsque nous...
M. Warren Allmand: Pour vous répondre brièvement, vous avez aussi la possibilité, en tant que parlementaires, si vous ne pouvez apporter les modifications ici, de le faire à l'étape du rapport.
Le président: C'est vrai, mais j'aimerais simplement que vous compreniez bien la situation. Il faut que tous la comprennent bien.
Par ailleurs, j'aimerais faire une annonce. Soit dit en passant, je suis navré de vous interrompre ainsi. Mme Nowlan sera la prochaine. Le ministre m'a demandé de vous dire qu'à la fin, lorsque je l'ai interrogé au sujet de la modification Byrd, il a répondu qu'elle n'était pas en vigueur, mais qu'en fait, elle l'est. Il s'est trompé. Il parlait d'une autre loi qui a été mise en veilleuse—la modification Helms-Burton. En fait, la modification Byrd est actuellement en vigueur aux États-Unis. Je parle de celle qui permet aux plaignants, dans les affaires d'antidumping, de recevoir les droits compensatoires plutôt que de les verser au gouvernement. Le ministre souhaitait cependant que je vous dise que le gouvernement du Canada conteste vivement cette loi devant l'OMC—et il n'est pas le seul, loin de là.
M. John Duncan: Puis-je simplement ajouter une précision? On a fait la même affirmation à la Chambre durant le débat d'urgence, il y a deux semaines, et j'ai essayé d'en avoir confirmation en passant, entre autres, par notre ambassade. Je suis donc heureux d'obtenir cet éclaircissement.
Le président: La modification est en vigueur, et ils s'en servent comme moyen d'inciter d'autres membres de l'industrie à se joindre aux plaignants.
M. John Duncan: Bien sûr. Je vous remercie.
Le président: Je vous en prie, monsieur Duncan.
Madame Nowlan, je crois que c'est votre tour.
Mme Linda Nowlan (directrice exécutive, West Coast Environmental Law Association): Monsieur le président et mesdames et messieurs les députés, je vous remercie. Je vous suis reconnaissante de m'avoir invitée à nouveau à venir vous rencontrer. En effet, j'étais ici il y a deux ans et depuis lors, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts.
J'appuie entièrement ce qu'a dit M. Allmand au sujet de votre rapport d'il y a presque deux ans. Je l'ai jugé excellent, et la réponse du gouvernement laissait entendre qu'il en acceptait la plupart des recommandations.
• 1725
Beaucoup de changements ont été apportés. Demain, vous
entendrez les porte-parole de la SEE, et je suis sûre qu'ils vous
parleront de toutes les améliorations apportées, y compris la
diffusion d'une politique de communication des renseignements, la
diffusion d'un cadre d'examen environnemental et la tenue de
consultations publiques au sujet du cadre d'examen environnemental,
comme vous et le gouvernement l'aviez exhortée à le faire.
Ce sont des politiques. Elles peuvent changer n'importe quand. Une des principales raisons pour lesquelles on a introduit ces changements d'orientation à la SEE est l'examen de ses activités fait par des groupes comme le vôtre.
Une fois le projet de loi à l'étude adopté, le grand public, le gouvernement, n'entendra plus parler de la SEE pendant cinq ans, jusqu'au prochain examen législatif. Je vous exhorte donc—et j'espère que vous avez encore le pouvoir d'étudier des amendements—à faire en sorte que vos recommandations antérieures et les recommandations faites par les groupes de la société civile visant à obliger la SEE à respecter les droits environnementaux et les droits de la personne ainsi que d'autres normes deviennent une loi ayant force exécutoire plutôt qu'une politique. Comme vous le savez, les deux sont très différentes.
J'ai fourni au comité un mémoire qu'en raison des limites de temps, je ne passerai pas en revue point par point avec vous. Cependant, nous sommes vivement préoccupés par les dispositions relatives à l'environnement du projet de loi. Le fait que la SEE soit enfin tenue par la loi de faire un examen environnemental de ses projets et de ses transactions est merveilleux. Il s'agit là d'une obligation législative, ce qui est nettement préférable à une simple politique.
Cependant, je ne suis pas d'accord avec ce qu'a dit le ministre du Commerce international tout à l'heure, soit que le Canada est au premier rang de tous les organismes de crédit à l'exportation. Il ne l'est pas. Il est certes devancé par les États-Unis qui soumettent la U.S. Export-Import Bank à des exigences réglementaires visant les organismes de crédit à l'exportation. L'Australie est aussi un chef de file. Le Canada est peut-être près de la tête du peloton, mais il n'est pas au premier rang. Je vous prie instamment d'en faire un leader en renforçant les exigences sur le plan environnemental.
Les dispositions relatives à l'environnement—l'article 10.1 projeté—telles que formulées actuellement posent comme principal problème qu'il appartient entièrement à la SEE de décider quoi faire au sujet de l'environnement. C'est elle qui décide de la teneur de sa directive. C'est elle qui décide comment l'appliquer. Elle n'est pas obligée de retirer son appui. Si un projet a de graves conséquences environnementales, elle peut quand même aller de l'avant. Elle peut décider que ses effets sont justifiés. Il n'y a pas de limite à son pouvoir discrétionnaire.
À tout le moins, j'exhorterais le comité à envisager la possibilité de modifier cet article du projet de loi pour obliger la SEE à refuser d'appuyer les projets ou les transactions qui représentent un risque important et déraisonnable sur le plan de l'environnement, de la santé ou de la sécurité. La question a suffisamment d'importance pour ne pas être laissée uniquement à la discrétion de la SEE.
Dans son rapport sur l'examen de la SEE, rendu public en mai 2001, le vérificateur général fait ressortir de graves lacunes dans la manière dont la SEE opérationnalise son cadre volontaire d'examen environnemental. Vous avez la possibilité de renforcer le cadre d'examen environnemental dans lequel évolue actuellement la SEE et de limiter son pouvoir discrétionnaire. À tout le moins, obligez-la, quand son examen révèle des risques environnementaux trop élevés, à retirer son appui.
De la même façon, au paragraphe 10.1(2) projeté, ce que la SEE fait au sujet de l'environnement est laissé entièrement à sa discrétion. Il faut qu'elle émette une directive, et la directive «peut» inclure certaines questions, plutôt que de «devoir» le faire. Il n'est même pas nécessaire qu'elle comprenne des définitions. Je sais que le pouvoir discrétionnaire est très à la mode actuellement dans bon nombre de lois et que le mot «peut» plutôt que «doit» est employé, mais voilà un cas où il faudrait limiter le pouvoir discrétionnaire.
Je vous prie instamment de rendre obligatoire le contenu de la directive relative à l'environnement—au sujet de ce qu'est un bon examen environnemental. Je fais quelques suggestions au sujet de ce que cela pourrait signifier dans le mémoire que vous avez reçu.
Plus particulièrement, je fais miennes les questions posées par M. Allmand et des membres du comité au sujet des engagements pris par le Canada dans le cadre de traités. Il faudrait que ce soit une exigence. Il faudrait que la SEE soit obligée de s'assurer, en se fondant sur des motifs raisonnables, que le proposant s'est conformé non seulement à toutes les lois environnementales applicables, mais également aux engagements environnementaux et aux autres engagements internationaux pris par le Canada. Comme l'a fait remarquer M. Robinson, l'Australie prévoit effectivement cette exigence. Il est possible de le prévoir dans une loi. Je vous exhorte à faire une modification en ce sens et à placer le Canada au premier rang.
• 1730
Une autre façon de limiter le pouvoir discrétionnaire de la
SEE dans ce domaine est de faire ce que vous avez recommandé dans
votre rapport et que le gouvernement a appuyé, soit de créer le
poste d'ombudsman indépendant qui verrait à la mise en place du
processus d'examen environnemental. C'est une autre modification
que vous pourriez faire.
Je suis tout à fait d'accord avec ce qui a été dit au sujet de la communication des renseignements. Il s'agit là d'une très grave omission dans le projet de loi. La communication des renseignements a toujours été un gros problème dans la façon dont fonctionne la SEE. Chaque examen qui a été effectué au cours des deux dernières années l'a bien montré. Je crois que les pages vierges qu'on vient tout juste de vous montrer illustrent fort bien la gravité du problème. La communication des renseignements est cruciale pour que la population puisse juger de ce qui se passe. C'est ce qui vous permet de surveiller ses activités. Il n'y actuellement rien dans le projet de loi à l'étude qui exige que les renseignements soient communiqués.
À nouveau, le ministre était très intéressant quand il parlait de la prochaine réunion de l'OMC et qu'il insistait sur la transparence. À mon avis, il n'y a pas de transparence ici, au Canada même. Comment pouvons-nous nous attendre que l'OMC sera transparente quand nous ne pouvons même pas obliger notre propre organisme de crédit à l'exportation à le faire? C'est là selon moi une lacune vraiment grave du projet de loi.
Autre problème, le projet de loi soustrait la SEE à l'application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Comme vous le savez tous, cette question est actuellement devant les tribunaux. En l'absence d'un processus détaillé, légiféré et réglementaire d'examen environnemental, soustraire la SEE à l'application de la Loi sur l'évaluation environnementale revient à lui donner carte blanche.
Si ce que propose le projet de loi était un processus approfondi, du genre de celui de l'ACEE, peut-être l'exemption serait-elle justifiée, mais telle que c'est maintenant, ce que nous avons, c'est un processus entièrement discrétionnaire, autogéré et autosurveillé. Nous soustrayons en outre la SEE à l'unique outil que le public ait à sa disposition, dans des circonstances très limitées, pour s'opposer à l'une de ses décisions.
Il est extrêmement coûteux et chronophage d'intenter des poursuites. Les groupes d'intérêt public n'ont vraiment pas les moyens de le faire, sauf dans des cas tout à fait exceptionnels. Ils n'abuseront pas de ce pouvoir. S'ils le faisaient, les tribunaux les en empêcheraient.
Je vous recommande vivement de supprimer cette exemption de l'ACEE.
Mon dernier commentaire se rapporte à la disposition que renferme l'article 24.2, qui décrète que le mauvais usage du nom de la SEE constitue désormais une infraction. Je soutiens que cette disposition est insultante et devrait être supprimée. Les lois actuelles qui protègent le droit d'auteur et les marques déposées suffisent à protéger le nom de la SEE, son sigle, sa marque, etc. Créer une nouvelle infraction, assortie d'une amende de 10 000 $ pour l'utilisation du nom de la SEE à des «fins commerciales», selon l'expression de la loi, est une insulte et une tentative de museler le débat public. Je connais des groupes qui ont été menacés de poursuites par la SEE pour avoir utilisé son nom.
Qu'est-ce qu'une «fin commerciale»? Tel que le projet de loi est formulé actuellement, il faudrait obtenir une permission par écrit de la SEE avant de pouvoir utiliser son nom. Je soutiens que c'est tout simplement déraisonnable et je vous demande de supprimer cette disposition. Je pense que c'est trop. Nous n'avons pas besoin de mesures de protection additionnelle en plus de celles qui sont déjà prévues pour tous les détenteurs de droits d'auteurs et de marques déposées au Canada.
Je vous recommande donc vivement d'apporter des amendements à ce projet de loi, d'amener le Canada au premier plan. C'est l'aboutissement d'une longue démarche d'examen législatif. Vous avez fait un merveilleux travail au niveau du comité et j'espère que le gouvernement écoutera ce que vous avez à proposer.
Le président: Merci, madame Nowlan.
Nous laissons la parole à M. Keyes, de la Chambre de commerce du Canada. Je vous laisse parole.
M. Robert Keyes (premier vice-président, International, Chambre de commerce du Canada): Merci, monsieur le président. Mesdames et messieurs, membres du comité, je suis heureux d'être ici cet après-midi.
Comme vous le savez, nous représentons un réseau pancanadien de quelque 170 000 entreprises de toutes les tailles, alors nous comprenons l'importance des exploitations pour l'économie canadienne et le rôle d'une institution comme la SEE.
Pour que le commerce et les investissements fonctionnent bien dans une économie mondiale internationalisée, il faut une assurance. Les compagnies doivent avoir accès aux organismes de crédit à l'exportation pour avoir l'appui dont elles ont besoin pour s'imposer sur les marchés étrangers à haut risque et rester des intervenants d'un calibre suffisant sur un marché mondial compétitif.
• 1735
Dans la conjoncture créée par les événements du 11 septembre,
avec toutes les nouvelles incertitudes et les nouveaux risques
qu'affrontent les entreprises, le rôle d'un organisme de crédit à
l'exportation revêt plus d'importance que jamais.
La capacité de la SEE de s'acquitter de ces rôles pour le compte des compagnies canadiennes a été un important atout pour le milieu des affaires du Canada, un rouage vital du mécanisme qui soutient les entreprises canadiennes à l'étranger.
Je suis convaincu que nous voulons tous qu'il continue à en être ainsi.
Pour commencer, nous pensons que les réformes à la loi qui régit la SEE ne compromettent pas sa capacité de fournir ses services aux entreprises canadiennes. Nous comprenons tous et acceptons que la SEE fonctionne dans un monde qui a changé, sur le plan des attentes du public en matière de responsabilisés environnementales et de transparence. Cependant, ce qu'il faut, ce n'est pas imposer à la SEE et ses clients des procédures improductives qui sont peu pratiques, chronophages et potentiellement nuisibles. L'objectif visé devrait être de créer un cadre efficient, opportun et responsable pour la SEE.
Le cadre d'examen environnemental qui est proposé, tel qu'il est envisagé dans ce projet de loi, constitue un niveau de référence approprié et son application fera l'objet d'un suivi régulier. La SEE ne fonctionne pas en vase clos. Le procureur général sera là, à tout observer par-dessus son épaule. Il y aura l'examen public, il y a des mécanismes de consultation, et ce mécanisme d'examen environnemental que prévoit la loi. Ce n'est pas seulement qu'une question de politique.
Le milieu des affaires est prêt à collaborer avec la SEE et avec d'autres pour assurer la réalisation d'un processus viable de conception et d'application du cadre. Je suis d'avis qu'il y a des limites à ce qu'on peut attendre d'un organisme comme la SEE, à ce qu'il peut faire et à ce qu'il devrait demander à ses clients de faire. La SEE n'est pas un «organisme de réglementation» et il y a des limites aux actions discrétionnaires que l'on peut demander à un organisme de crédit à l'exportation d'exiger ou d'appliquer.
De plus, dans le fond, la SEE est différente des autres sociétés d'État. Elle a un rôle commercial à tenir. Le fait que l'on attende de la SEE qu'elle réponde à de nobles attentes sur des questions relatives aux enjeux environnementaux l'éloigne de ce fondement commercial vers la pente glissante des analyses complexes pour lesquelles un cadre rigoureux ou des chiffres et des détails concrets peuvent poser un problème.
Dans la mesure où la SEE a l'expertise interne pour évaluer les risques environnementaux d'un projet et incorporer ses conclusions au financement et assurer les projets par le biais du cadre établi d'évaluations environnementales, cela suffit, et elle le fait déjà. De plus, chaque projet important dans le monde fait l'objet d'une analyse environnementale d'envergure égale des répercussions qu'il peut avoir et des perturbations potentielles qu'il pourrait causer. Cette information, elle aussi, est disponible lorsque les projets sont évalués par la SEE.
Le processus environnemental est assorti de certains impératifs. Il doit être pratique et chrono-efficace. Il doit représenter une valeur ajoutée et contribuer à de meilleurs résultats environnementaux. Nous pensons que le processus qui est proposé répondra effectivement à ces critères.
Le système proposé doit être en harmonie avec les partenaires de l'OCDE au Canada. Les pays de l'OCDE espèrent conclure avant la fin de cette année civile une entente sur les crédits à l'exportation relatifs à l'environnement qui sont officiellement soutenus. Si le cadre environnemental de la SEE devance de beaucoup le consensus de l'OCDE et finit par imposer à la SEE des exigences de propriétaire que les organismes d'autres pays ne sont pas tenus de suivre, ceci pourraient se répercuter sur sa position compétitive et entraîner pour le Canada la perte d'exportations et, par conséquent, d'emplois. Les gens s'adresseront ailleurs.
Le cadre environnemental doit être prévisible, équitable et transparent, et les attentes et les exigences doivent être claires.
Autre chose qui nous préoccupe, c'est l'éventuelle exigence de divulgation. La SEE a une politique de divulgation, qui est actuellement à l'examen, et qu'ils vont mettre en oeuvre.
Bien qu'il ne soit pas directement question de la politique de divulgation dans ce projet de loi, la période proposée de 45 jours pour la diffusion d'informations relatives aux répercussions sociales et environnementales doit encore être mise à l'épreuve pour voir comment elle s'appliquera réellement en pratique. De plus, nous sommes très inquiets du fait que les propositions visant la divulgation préalable pourraient obliger la diffusion de renseignements commercialement confidentiels, ce qui mettrait en péril les offres que voudraient présenter les compagnies canadiennes.
Enfin, la compétitivité de la SEE et de ses clients doit être un principe directeur de tout cadre d'examen environnemental.
Pour terminer, permettez-moi de dire que les enjeux environnementaux doivent être réglés, mais nous devons nous demander quelles tribunes conviennent le mieux à la tâche. Bien que la SEE devrait continuer d'évaluer les risques environnementaux des projets qu'elle finance, comme je l'ai dit plus tôt, elle ne peut devenir un «organe de réglementation». Toute tentative en ce sens ne ferait qu'entraver son efficacité.
• 1740
De plus, puisque la SEE est rarement le seul organisme qui
participe au financement des grands projets—comme nous le savons,
cela se fait sur la base d'un consortium—l'ampleur de l'influence
de la SEE, au bout du compte, sur le mode de fonctionnement d'un
projet est un sujet ouvert au débat. Nous ne voudrions pas d'une
situation où nos processus auront poussé les fournisseurs canadiens
de côté sans que rien n'ait été fait sur le terrain.
J'établis un parallèle entre le fait d'imposer à la SEE le fardeau d'attentes peu réalistes avec des incitations semblables à surcharger l'OMC pour en faire, dans le fond, un organisme de négociation mondiale. Cela ne fonctionnera pas. La SEE a fait la preuve de sa compétence et de sa flexibilité. Elle s'est bien acquittée de sa tâche. Elle a un rôle de projection des objectifs et des valeurs environnementales du Canada, mais elle ne peut à elle seule susciter de changement d'envergure. Elle ne peut agir que dans une certaine mesure, et il est essentiel de régler bon nombre des problèmes et des enjeux qui nous préoccupent tous à la source, dans le pays où ils surviennent.
Monsieur le président, nous comprenons les principes qui sous-tendent l'article 10 proposé du projet de loi C-31, et nous convenons que la SEE doit être crédible et responsable. Mais nous ne devons pas perdre de vue le fait que sa raison d'être est d'appuyer les exportateurs canadiens, et si nous voulons qu'elle y parvienne, nous devons nous assurer de ne pas l'entraver indûment.
Je vous remercie.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Keyes.
Notre témoin suivant représente les Manufacturiers et exportateurs du Canada.
Est-ce que M. Myers et M. Blackburn vont tous deux faire un exposé?
M. Jayson Myers (premier vice-président et économiste en chef, Manufacturiers et exportateurs du Canada): Je présenterai le premier exposé.
Le président: Merci.
M. Jayson Myers: Monsieur le président, mesdames et messieurs, merci beaucoup de nous avoir invités ici aujourd'hui.
Je m'appelle Jay Myers. Je suis le premier vice-président et l'économiste en chef des Manufacturiers et exportateurs du Canada. Je suis accompagné de M. Robert Blackburn, qui est le premier vice-président aux institutions publiques et internationales de développement du Groupe SNC-Lavalin International. Je pense que l'expérience de M. Blackburn jettera une lumière quelque peu plus pragmatique sur le sujet dont il est traité ici aujourd'hui.
La SEE offre un service vital de financement et de gestion des risques aux exportateurs canadiens. Comme l'a signalé M. Keyes, étant donné la conjoncture économique internationale très incertaine de nos jours, ces services sont plus importants que jamais. Les Manufacturiers et exportateurs canadiens représentent environ 95 p. 100 de la valeur des exportations du Canada, et nos membres constituent en grande partie la clientèle de la SEE.
Les Manufacturiers et exportateurs du Canada appuient le projet de loi C-31, sous réserve d'une condition qui reflète les inquiétudes des exportateurs canadiens relativement aux dispositions de la loi qui obligeraient la SEE à déterminer si les projets internationaux sont susceptibles d'avoir des effets environnementaux négatifs et, le cas échéant, s'il est justifié que la Société s'engage dans de telles transactions. Les Manufacturiers et exportateurs du Canada reconnaissent l'engagement du gouvernement à prévoir un mandat législatif pour les évaluations environnementales de projets financés par la SEE, et nous pensons que l'examen environnemental de tels projets doit être à la fois crédible et efficace dans l'évaluation des effets environnementaux.
En même temps, le processus d'évaluation environnementale de la SEE doit être pratique et il doit vraiment tenir compte de la sensibilité des entreprises à l'égard de la divulgation de renseignements commerciaux confidentiels. Surtout, le processus de détermination de la SEE doit soutenir la compétitivité des exportateurs canadiens.
Nous avons toujours été favorables à la modification de la Loi sur l'expansion des exportations pour y inclure une disposition qui exigerait de la SEE qu'elle applique un cadre d'évaluation environnemental aux projets internationaux auxquels elle participe. Cependant, nous avons aussi insisté sur la nécessité d'un processus efficace d'évaluation environnementale des projets financés par la SEE qui soit simple, clair et rapide. Il doit éviter d'assujettir les exportateurs ou la SEE à des litiges coûteux et chronophages; il doit assurer la protection des renseignements commerciaux confidentiels relatifs aux projets; il doit éviter d'imposer des exigences réglementaires canadiennes aux clients étrangers de la SEE; il doit établir des règles du jeu équitables pour les exportateurs canadiens en adhérant aux normes de l'OCDE visant les évaluations environnementales que font les organismes de crédit à l'exportation; et il doit éviter de saper le rôle important de la SEE qui consiste à fournir un appui financier aux exportateurs canadiens.
À la lumière de ces considérations, notre association et ses membres croient que le projet de loi C-31 devrait comporter une clause privative pour protéger les pratiques d'évaluation environnementale de la SEE contre les interventions futiles et les contestations judiciaires par des tiers. Mme Nowlan l'a déjà dit, l'U.S. Ex-Im Bank est fréquemment citée en modèle de la manière dont pourrait fonctionner la SEE en vertu d'un processus législatif d'évaluation environnementale. Cependant, la législation américaine reconnaît explicitement que nulle disposition de la loi ne doit être interprétée comme établissant un droit d'action illégale.
• 1745
Cette clause privative a été formulée pour faire en sorte que
la banque puisse rendre en temps opportun des décisions fondées sur
des règles claires et connues, sans la menace de poursuites
abusives, de contestations judiciaires ou de plaintes émanant
d'intervenants désireux de contester l'application de ces règles
et, ce faisant, de bloquer des transactions.
Nous pensons qu'une telle protection ne peut être assurée que par l'intégration d'une clause privative dans la loi, qui entraîne l'évaluation environnementale. L'absence, dans le projet de loi C- 31, de dispositions qui préviendraient les poursuites futiles, non seulement crée des incertitudes en ce qui a trait aux litiges éventuels, mais elle met les exportateurs canadiens en position d'infériorité vis-à-vis leurs concurrents internationaux en soumettant la SEE à des règles plus exigeantes que celles imposées à tout autre organisme de crédit à l'exportation.
Les Manufacturiers et exportateurs du Canada continueront de travailler de près avec la Société pour l'expansion des exportations dans la mise en oeuvre de son cadre d'évaluation environnementale. Nous voulons nous assurer que la politique de divulgation de la SEE, et surtout la partie qui se rapporte à la divulgation de renseignements requis pour l'évaluation des répercussions environnementales et sociales de projets internationaux, est à la fois faisable et compétitive comparativement aux exigences d'autres organismes de crédit à l'exportation.
Si la SEE devance trop les pratiques internationales courantes, ses services de financement commercial ne seront plus compétitifs pour les exportateurs canadiens. Les grandes entreprises auront recours à d'autres sources, plus coûteuses, de financement, y compris aux prêteurs privés, et à d'autres organismes de crédit à l'exportation. Les petits et moyens exportateurs, quant à eux, c'est-à-dire les entreprises qui dépendent le plus du financement de la SEE et le secteur le plus dynamique de l'économie exportatrice du Canada, sont très susceptibles de perdre leur capacité de participer aux projets internationaux.
Pour la SEE, plus de 500 millions de dollars de revenus reliés à des projets seront en péril si des projets d'immobilisation sont exclus à cause de la politique de divulgation de la société. Une telle perte diminuera également le capital de base de la SEE et réprimera ainsi sa capacité de financer d'autres transactions d'exportation.
Mesdames et messieurs, pour terminer, nous souhaitons exprimer notre mécontentement et notre déception à l'égard tant de la conduite que des résultats de l'examen de la Loi sur l'expansion des exportations. Dès le départ, il y a plus de trois ans et demi, les Manufacturiers et exportateurs du Canada ont souligné à plusieurs reprises que cet examen doit être centré sur les besoins en évolution des exportateurs canadiens et de la capacité de la SEE de desservir la communauté exportatrice du Canada. Nous craignons maintenant beaucoup que les résultats de l'examen puissent, en fait, affaiblir la capacité de la SEE de répondre aux besoins de financement des exportateurs canadiens.
Dans la conjoncture économique difficile actuelle, les exportateurs canadiens ont besoin plus que jamais de services de financement et d'assurances solides, adaptés et flexibles. Le gouvernement doit veiller à ce que la SEE continue de répondre aux besoins changeants des entreprises canadiennes qui oeuvre sur les marchés internationaux. Pour cette raison, le projet de loi C-31 doit être modifié pour englober une clause privative.
Je vous remercie beaucoup.
La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci, monsieur Myers.
Le président s'excuse de devoir s'absenter précisément maintenant, mais nous poursuivons avec les questions.
Nous commencerons avec vous, monsieur Duncan. Nous aurons cinq minutes chacun.
M. John Duncan: La première question que j'ai à poser s'adresse à Mme Nowlan. Elle se rapporte à ses préoccupations sur les amendements proposés aux dispositions environnementales. Selon votre perspective, pouvez-vous me dire quelles seraient les répercussions sur la SEE de la perte du procès Three Gorges?
Mme Linda Nowlan: Je ne suis pas sûre d'être celle à qui vous devriez poser cette question.
M. John Duncan: Avez-vous un point de vue?
Mme Linda Nowlan: Il se peut que ce ne soit pas tant la SEE qui soit touchée, que le ministère de la Justice et le gouvernement du Canada, qui s'est battu dans cette affaire. Comme vous le savez probablement, il y a eu fuite d'une note de service du ministère de la Justice qui disait que le dossier Sierra Club était très solide.
J'ai vu le premier ministre Chrétien aux nouvelles l'autre soir, alors qu'il célébrait en Chine l'ouverture d'un réacteur CANDU et poussait le gouvernement chinois à en acheter d'autres.
Il est possible, je suppose, si le Sierra Club gagne son procès, que des documents doivent être divulgués au sujet des prêts et garanties accordés auparavant pour permettre ces achats.
• 1750
Je ne pense pas que cela aurait de répercussions sur les
futures transactions. Il est probable, si cette exemption à l'ACEE
passe, qu'il n'y ait plus jamais d'autres applications de la loi,
alors il n'y aurait plus de litige, ou du moins de ceux qui se
rapportent à ces articles.
Je ne sais pas si cela répond à votre question. Peut-être voudrez-vous la poser aux représentants de la SEE, lorsqu'ils témoigneront devant vous.
M. John Duncan: Dans le même ordre d'idée, est-ce que le fait de rendre obligatoire le cadre d'examen environnemental répondrait à certaines de vos préoccupations?
M. Linda Nowlan: Oui, particulièrement un cadre d'examen environnemental révisé. Ils sont actuellement en train de revoir leur cadre. C'est un examen relativement approfondi, et je serai heureuse de le voir devenir règlement en vertu de la loi.
Je dois aussi dire, au sujet de toute la question des litiges, que les règles des tribunaux de chaque province et du tribunal fédéral renferment des dispositions pour prévenir les procédures futiles et vexatoires. À tout moment, si la partie adverse estime que la poursuite est futile ou vexatoire, elle peut recourir à ces règles. Donc, il n'est pas nécessaire d'introduire des dispositions similaires dans cette loi particulière. Les tribunaux ont déjà ce pouvoir inhérent.
M. John Duncan: Vous parlez des déclarations qui ont été faites sur la clause privative.
Mme Linda Nowlan: Oui.
M. John Duncan: J'aimerais adresser ma prochaine question à M. Keyes, de la Chambre de commerce du Canada.
Vous avez dit dans votre témoignage que la SEE assume un rôle commercial et que vous ne vouliez pas voir un fardeau inopportun faire obstacle à sa capacité de s'acquitter de ce rôle. Selon certaines critiques, la Société assume un rôle commercial, mais elle le fait sur une base non commerciale. Autrement dit, la protection des contribuables lui permet de prendre des décisions qu'une entreprise commerciale ne prendrait jamais et, par conséquent, il faut plus de moyens de vérification et d'équilibre sur ce plan.
Seriez-vous d'accord pour dire que cette logique pourrait pousser certaines personnes à dire qu'il y a certaines parties de la SEE qui se prêteraient bien à la privatisation?
M. Robert Keyes: Eh bien, la notion de privatisation a déjà été envisagée. Je vous répondrais par une autre question. Si la SEE ne fait pas ce qu'elle fait, pouvons-nous compter sur une entreprise commerciale pour le faire? Est-ce que les banques l'appuieraient?
M. John Duncan: C'est la question que je vous pose.
M. Robert Keyes: Je ne pense pas qu'il soit clair que les banques interviendraient dans une quelconque mesure.
Je pourrais demander à Robert Blackburn de nous dire ce qu'il en pense, puisqu'il a examiné cela d'un point de vue très pratique.
M. Robert Blackburn (premier vice-président, SNC-Lavalin Inc.; Manufacturiers et exportateurs du Canada): Ma compagnie fait environ la moitié de ses affaires hors de l'Amérique du Nord, dans une centaine de pays. Comme cela a déjà été mentionné tout à l'heure, l'obtention du financement de ces projets est un élément essentiel de toute transaction internationale, particulièrement pour les grands projets du genre de ceux auxquels nous tendons à participer.
Un organisme de crédit à l'exportation aurait, selon nous, un rôle très important à jouer au Canada, tout comme dans tous les autres pays de l'OCDE. Ce qui nous préoccupe, c'est que la SEE soit en mesure d'offrir un soutien d'une manière qui soit compétitive avec d'autres organismes de crédit à l'exportation. Peut-être puis-je vous donner un ou deux exemples concrets.
Nous venons de terminer une grande raffinerie de pétrole dans le sud du désert de l'Algérie, pour la société Sona Trach, la compagnie pétrolière nationale. Cela a été une opération très complexe de financement, à laquelle la SEE a participé pour environ 20 p. 100. La Banque européenne d'investissement, l'ECA de la Belgique, l'ECA de l'Espagne et l'ECA de l'Italie ont toutes participé à l'affaire. Bien entendu, lorsque vous avez affaire avec un organisme de crédit à l'exportation, il y a des conditions selon lesquelles vous devez utiliser de l'équipement ou des employés belges, espagnols, etc.
Nous aurions voulu utiliser beaucoup plus de fournitures canadiennes sur ce chantier parce que, notamment, les fournisseurs canadiens étaient beaucoup moins chers que les Européens. Mais comme la SEE n'avait qu'une participation de 20 p. 100, nous avons fait appel à 60 petites et moyennes entreprises canadiennes sur ce chantier, à part nous.
Sur un chantier similaire de réseau ferré léger en Malaisie, nous avons pu faire participer une centaine de petites et moyennes entreprises canadiennes de tout le pays, de Sydney, en Nouvelle- Écosse jusqu'à Vancouver.
• 1755
Si la SEE n'est pas disponible et compétitive pour faire ce
genre de travail, cela ne veut pas dire que l'affaire Sona Trach
n'ira pas de l'avant; seulement, il n'y aura pas les 20 p. 100 de
contenu canadien. Donc, les compagnies canadiennes ne travailleront
pas.
Il est essentiel qu'il y ait des organismes de crédit à l'exportation pour faire ce genre de travail parce que ce n'est pas le genre de choses que les banques commerciales, particulièrement au Canada, appuient. Si SNC-Lavalin et certaines autres grandes compagnies ne peuvent traiter avec les organismes de crédit à l'exportation du Canada, puisque nous faisons affaire avec un éventail de ces organismes dans le monde, nous ne pourrons pas utiliser la SEE. Nous le voulons cependant. Il est très important d'avoir la participation du gouvernement canadien. C'est une affaire de crédibilité et d'autres choses. Nous craignons seulement que, si la SEE devient moins compétitive—si elle devance trop les autres dans ce qui est un monde commercial—, elle ne pourra pas participer.
Je pense que nous, et d'autres compagnies comme la nôtre, du milieu de l'ingénierie et des ressources, représentons environ 7 p. 100 des transactions de la SEE. Je crois que c'est cette somme de 500 millions de dollars dont a parlé Jayson Myers. Je suppose que c'est un chiffre interne de la SEE qui représente ce qui, à leur avis, serait perdu en transactions s'ils devaient adopter le cadre environnemental global qu'ils examinent.
Nous sommes donc très inquiets à ce sujet et craignons d'introduire l'incertitude, car, comme vous le savez, les marchés n'aiment pas l'incertitude. Si vous financez un projet, vous n'allez pas dans des endroits incertains, car si vous pouvez aller dans plusieurs endroits qui sont certains, pourquoi aller dans un endroit qui ne l'est pas? C'est ce qui nous inquiète. Nous sommes inquiets au sujet d'une mesure législative qui affaiblit la capacité compétitive de la SEE et notre capacité d'y avoir recours—comme l'a dit Jay, la capacité des petites et moyennes entreprises qui ne peuvent s'adresser à d'autres organismes de crédit à l'exportation et qui vont se retrouver exclues de ces possibilités d'affaires.
La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci, monsieur Blackburn.
Nous passons maintenant à Mme Lalonde.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Merci, madame la présidente.
Merci beaucoup d'être ici. Ces séances de dernière minute sont toujours très importantes parce que c'est une loi qui, dans le fond, est complexe. On est appelés à se prononcer sur des éléments qui sont difficiles à évaluer. D'une part, il y a la question de l'environnement, celle de la divulgation de l'information et celle des droits de la personne. Toutes ces questions sont importantes. De l'autre, vous dites que ça va empêcher la compétitivité.
Comment se fait-il que les organismes de crédit à l'exportation des États-Unis et de l'Australie aient accepté de publier des renseignements sur les projets afin de permettre au public de transmettre ses commentaires avant qu'une décision de financement ne soit prise? Comment se fait-il qu'ils puissent le faire, eux—et on ne peut pas dire qu'ils ne sont pas compétitifs—, alors qu'ici on dit que ça minerait la compétitivité? C'est ma première question.
J'en ai une deuxième. Comment peut-on accepter que la question des droits de la personne soit complètement absente? Vous venez juste de dire, monsieur Blackburn, que les entreprises craignent l'instabilité. C'est certainement le cas d'un certain nombre d'entreprises, mais ce n'est pas celui d'autres entreprises qui s'enrichissent dans l'instabilité. Je n'ai pas besoin de vous citer des cas. Je suis certaine que vous pouvez en identifier vous-même.
Je veux aussi soulever un troisième point. Cette société de crédit à l'exportation est une société publique. On a beau dire que l'investissement initial a été fait une fois pour toutes, mais quand on pose des questions aux gens qui administrent et qu'on leur demande si la société pourrait fonctionner avec les mêmes taux si elle était privatisée, ils disent que ce ne serait sûrement pas le cas. Avec les risques encourus et les taux, ça ne serait pas repris à ce niveau-là par une société privée. Donc, c'est une société publique et elle a une responsabilité publique relativement à l'éthique des entreprises. Les sociétés américaines et australiennes sont compétitives.
Voilà, je vous offre mes questions et j'attends des réponses.
M. Robert Blackburn: D'accord, je vais tenter d'y répondre, madame.
• 1800
Pour ce qui est de l'Ex-Im Bank,
elle a un système de divulgation
préalable qui comprend beaucoup d'éléments qui
empêchent les informations commerciales de sortir.
C'est aussi protégé par un système. Mme Nowlan dit
qu'il n'est pas essentiel d'avoir a privative
clause. Les Américains ont décidé que cette clause
était essentielle afin de protéger les renseignements qui
sortent au sujet d'un projet et afin d'éviter de donner
lieu à des
incertitudes juridiques qui pourraient en découler.
Il ne s'agit pas nécessairement de prouver qu'un
projet nuirait à l'environnement ou aux droits de
la personne. Il s'agit seulement de ralentir le projet,
d'injecter des doutes. Dès qu'il y a
des problèmes comme ça, on va chercher le financement
ailleurs.
Nous travaillons beaucoup avec l'Ex-Im Bank. Le système qu'elle utilise protège beaucoup les renseignements commerciaux et comprend cette clause privative ainsi qu'un système de divulgation. Ce n'est pas du tout comme ce qui est proposé par la SEE. Par exemple, ils ne demandent pas aux sponsors d'un projet de publier les renseignements 45 jours à l'avance. Si on examine leur site web de près, par exemple, on peut trouver le nom d'un certain projet. On va ensuite à l'Ex-Im Bank et on voit qu'on en discute un peu. Ils vous donnent quelques renseignements. Il n'est pas du tout question que tous les documents commerciaux pertinents soient mis à votre disposition.
Par exemple, le gouvernement de l'Algérie publie, pour tout le monde, tout ce qu'il a fait au niveau de l'environnement. Sona Trach est une agence du gouvernement de l'Algérie. Si on lui demandait de tout publier sur Internet 45 jours avant une décision éventuelle, elle ne le ferait pas. Cela n'arriverait jamais à l'Ex-Im Bank.
En Australie, on ne finance pas beaucoup de projets, surtout des grands projets. Si je ne me trompe pas, et selon les renseignements qu'on m'a donnés, leur loi sur la divulgation a été utilisée une seule fois. Je ne peux pas le dire avec certitude, mais c'est ce que l'on m'a dit. Ce n'est donc pas quelque chose qui est utilisé très souvent. Par contre, le système proposé par le SEE s'appliquerait à tous nos projets. Il n'y a presque pas de projets qui ne seraient pas soumis à cette loi de divulgation proposée par la SEE. Nous trouvons donc qu'il serait effectivement impossible de travailler avec la SEE dans de pareilles conditions.
La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci, monsieur Blackburn.
Mme Francine Lalonde: J'imagine qu'il y en a d'autres qui veulent réagir à cela.
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Très brièvement, s'il vous plaît.
M. Robert Keyes: Très brièvement, je voudrais simplement indiquer que dans la définition des effets environnementaux, les impacts sociaux sont prévus et il est fait mention de la réinstallation des établissements humains. Par conséquent, dire que les questions des droits de la personne sont complètement mises de côté n'est pas exact. Cela figure dans l'ébauche. Les questions sociales y sont présentes et elles sont prises en compte par les organismes internationaux. Je le répète, nous ne fonctionnons pas en vase clos.
[Français]
Mme Linda Nowlan: Je vous remercie de vos questions. Je regrette de ne pas pouvoir vous répondre en français.
[Traduction]
La politique de divulgation n'est pas inscrite dans la loi. Le projet de loi C-31 ne prévoit aucune obligation en matière de droits de la personne ou de divulgation.
Pour répondre à votre excellente question au sujet de la divulgation de l'information, je crois que M. Blackburn a déclaré que la U.S. Export-Import Bank ne divulguait pas de l'information commercialement sensible et, bien sûr, aucune ONG ne souhaiterait divulguer une telle information. Ce n'est pas ce que nous demandons.
Nous demandons d'avoir la possibilité de savoir ce que notre gouvernement appuie et de savoir si cela cadre avec nos objectifs en matière de politique générale.
• 1805
Désolée, j'ai omis la réponse la plus évidente à votre
question, M. Duncan, qui cadre avec ceci. Si la SEE et le
gouvernement du Canada perdent ce procès, les Canadiens et les
Chinois seront en mesure de dire si en fait les réacteurs CANDU
sont une technologie qu'ils recherchent, vu qu'une évaluation
environnementale complète sera exigée. Ce sera le résultat du
procès et, à mon avis, c'est certainement un bon résultat. Je suis
donc heureuse que vous posiez cette question.
Je devrais également signaler que M. Blackburn possède l'expérience commerciale que je n'ai pas, mais je sais que sa société a recours à la Export-Import Bank, à tout le moins c'est ce que je pense, si bien qu'évidemment ce n'est pas une entrave au commerce pour SNC-Lavallin. À mon avis, ce ne serait pas non plus un obstacle pour d'autres sociétés canadiennes si nous avions au Canada une politique législative similaire.
Nous avons déjà débattu de ce point. Au cas où vous ne le sauriez pas, nous avions formé un sous-comité fort intéressant du Comité consultatif de la réglementation relatif à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale où les débats à ce sujet étaient fort animés et prolongés. Nous ne sommes pas d'accord, mais nous respectons le droit de chacun d'entre nous de faire part de ses positions.
La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Monsieur Allmand.
M. Warren Allmand: Très brièvement, la Société d'expansion des exportations est en mesure de financer ces projets, car elle a l'appui du gouvernement canadien et des Canadiens. Par conséquent, je crois que les Canadiens ont le droit de savoir comment l'appui du gouvernement est utilisé, surtout s'il est utilisé pour transgresser des conventions internationales relatives à l'environnement, aux droits de la personne et aux droits du travail. Comment sinon les Canadiens peuvent-ils évaluer la situation si la divulgation de l'information n'est pas prévue?
Il s'agit d'une société qui ne peut fonctionner que parce qu'elle bénéficie de l'appui et de la cote de solvabilité du gouvernement du Canada, c'est-à-dire des Canadiens. Par conséquent, en principe, je crois que les gens ont le droit de savoir comment cet appui, ce pouvoir et ce soutien sont utilisés.
Je ne peux pas comprendre la position prise par certains de mes amis autour de la table. Soit, ils n'appuient pas la Convention internationale sur les droits de l'homme, sur les droits civils et politiques ou sur les droits économiques, sociaux et culturels, et sont d'avis que le Canada devrait l'abroger, ou sinon, comment le Canada devrait-il s'assurer que les obligations qu'il a prises sur la scène internationale sont respectées? Il doit bien y avoir une façon de s'assurer que la main droite ne fait pas exactement le contraire de ce que fait la main gauche.
La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci.
Nous passons maintenant à M. Robinson.
M. Svend Robinson: Merci beaucoup.
En fait, j'aimerais poser cette question directement à M. Myers et à M. Keyes, car je crois que c'est une excellente question. Avant de le faire, j'aimerais avoir quelques éclaircissements. Je crois que M. Blackburn—ou M. Myers—a indiqué que la banque américaine était en mesure de protéger l'information commercialement sensible en vertu du cadre législatif américain, n'est-ce pas?
M. Robert Blackburn: Oui, elle a recours à tout un processus qui protège de très près l'information concurrentielle.
M. Svend Robinson: N'est-on pas assujetti à une loi sur l'accès à l'information aux États-Unis?
M. Robert Blackburn: Je ne le sais pas, je pense que l'on a laissé entendre un peu plus tôt que c'était le cas.
M. Svend Robinson: C'est effectivement le cas. Ce que je veux dire donc, c'est qu'il me semble que la SEE au Canada pourrait être assujettie à la Loi sur l'accès à l'information et que, en même temps, l'information commercialement sensible pourrait être protégée. Cela se fait aux États-Unis et cela pourrait se faire ici également.
M. Robert Blackburn: C'est possible, je ne suis pas spécialiste en la matière.
M. Svend Robinson: D'accord.
J'aimerais en venir aux propos de M. Allmand et demander une réponse à ce sujet. Je vais poser deux questions.
L'une porte sur les actions frivoles et la clause privative. Mme Nowlan a indiqué, à juste titre, qu'il est prévu dans le cas de procès civils, un pouvoir discrétionnaire accordé au tribunal qui peut rejeter des actions frivoles et vexatoires. Je peux me souvenir de l'époque lointaine où j'étais avocat et où j'ai présenté moi-même une ou deux requêtes de cette nature, si bien que franchement il est complètement inutile d'avoir une clause privative si tel est son objet, puisque les tribunaux ont déjà ce pouvoir discrétionnaire.
Je veux poser deux questions précises. Premièrement, vous dites que l'exigence prévue dans l'ébauche de politique de divulgation impose un fardeau déraisonnable s'il faut divulguer les aspects environnementaux et sociaux de tout le projet et non seulement de la partie visée par le financement SEE. Franchement, c'est un argument qui me paraît assez bizarre. Si la SEE, par exemple, finance une partie d'un projet—par exemple, le contrat des turbines d'un barrage, le barrage Urra, par exemple—mais pas tout le projet, pourquoi diable ne devrait-on pas être mis au courant de l'impact global de ce projet?
• 1810
Si je vous comprends bien, vous dites que nous ne finançons
qu'une partie de ce projet, nous ne finançons que la turbine. Même
si cela a des conséquences désastreuses sur l'environnement, le
travail ou les droits de la personne, nous ne devrions pas nous en
inquiéter, car nous ne finançons qu'une partie de ce projet. En
fait, c'est ce que j'ai effectivement entendu dire à propos du
projet du barrage Urra en Colombie: «Nous n'avons qu'une petite
part de ce projet, si bien qu'il est inutile de s'inquiéter de ses
conséquences».
J'aimerais savoir ce que vous en pensez. J'ai aussi une question sur la mesure législative en particulier, et c'est véritablement une question essentielle, une question dont M. Allmand a fait mention.
Monsieur Myers, vous dites dans le mémoire présenté au nom de l'Alliance des manufacturiers et exportateurs du Canada que vous appuyez la modification à la Loi sur l'expansion des exportations qui vise à inclure une disposition exigeant que la SEE applique un cadre d'évaluation environnementale aux projets internationaux auxquels elle participe. En fait, dans son témoignage, M. Neals, qui parlait au nom de l'organisation devant notre comité, a déclaré qu'il est tout à fait pertinent que la SEE soit tenue de respecter des normes internationales, y compris les normes relatives aux droits de l'homme. Je pourrais lire tout le paragraphe, mais je suis sûr que vous vous en souvenez.
S'il est pertinent et acceptable pour notre comité de prévoir—et pour le gouvernement aussi—une modification relative au cadre d'évaluation environnementale, pourquoi ne devrions-nous pas non plus prévoir des dispositions semblables à propos des normes fondamentales du travail et des conventions internationales sur les droits de l'homme?
M. Jayson Myers: Je pourrais commencer. Ne vous méprenez pas, nous ne disons pas que nous sommes opposés à l'inclusion du cadre d'examen environnemental dans cette loi. Ce n'est pas le cas, et je crois qu'une bonne évaluation environnementale est un élément très important de toute évaluation du risque de n'importe quel projet international, tout comme l'est l'évaluation de l'impact sur le déplacement social et sur les droits de la personne. C'est à mon avis une bonne analyse du risque et cela représente une bonne partie du rôle que joue la SEE, si bien que nous ne sommes certainement pas opposés à ce genre d'évaluation.
Ce qui nous préoccupe, je crois—si je reprends notamment l'exemple d'un projet financé en partie seulement par la SEE—c'est que cela doit se faire de manière pratique pour faire en sorte que la SEE soit dans le coup, dès le début. En prévoyant des mesures qui exigent que la SEE demande au promoteur d'un projet de procéder à une évaluation environnementale, d'en divulguer publiquement les résultats, de divulguer ce qui pourrait être de l'information commercialement sensible à ce moment-là, il me semble, premièrement, que les participants canadiens à ce projet ne seraient tout simplement pas dans le coup dès le départ et, deuxièmement, qu'aucune société canadienne ne s'adresserait à la SEE dans ces conditions.
Il s'agit donc vraiment de savoir comment l'évaluation du risque doit se faire et quel genre d'information doit être divulgué.
M. Svend Robinson: Si je comprends bien, vous convenez donc qu'il est pertinent de faire une évaluation environnementale, qui est tout aussi importante qu'une évaluation du respect des normes internationales des droits de l'homme et des normes fondamentales du travail?
M. Jayson Myers: Je pense que l'évaluation du risque devrait faire partie de l'évaluation continue du risque faite par la SEE, et, si je comprends bien les pratiques de gestion de la SEE, cela s'inscrit dans le cadre de l'évaluation du projet et du risque.
M. Svend Robinson: Vous n'auriez donc aucune objection—en tant que porte-parole de votre organisation—à prévoir une modification visant à élargir les renvois aux obligations internationales, comme notre comité l'a initialement recommandé.
M. Jayson Myers: À mon avis, non seulement les évaluations environnementales ont-elles été examinées, mais aussi les évaluations sociales. J'aurais pensé que cela en faisait partie intégrante.
M. Svend Robinson: Exactement, et je suis heureux de vous l'entendre confirmer, car la mesure législative elle-même ne renvoie d'aucune façon au respect des obligations internationales en matière des droits de l'homme ou des normes fondamentales du travail. Je crois que M. Keyes a fait mention de la politique, du cadre d'examen environnemental, qui renvoie, je crois, à l'impact social, mais...
M. Robert Keyes: Il est également indiqué qu'aucun projet ne peut se justifier lorsqu'il va à l'encontre des conventions internationales pertinentes.
M. Svend Robinson: Exactement, mais il s'agit d'une politique entièrement discrétionnaire, qui pourrait être changée du jour au lendemain. Nous parlons ici de droit, d'une mesure législative et je suis heureux d'entendre—du moins c'est ce que je crois entendre—que M. Myers est également d'avis que la mesure législative devrait refléter ces mêmes normes.
M. Jayson Myers: Bien sûr, avant de pousser trop loin l'interprétation de ce que je viens juste de dire...
M. Svend Robinson: Je suis heureux d'accepter l'assurance que vous donnez, monsieur Myers.
M. Jayson Myers: ... les préoccupations que nous avons à propos de la façon dont le processus d'évaluation environnementale et les impacts environnementaux et sociaux sont traités dans ce projet de loi sont... À notre avis, les évaluations de l'impact social devraient examiner des points qui peuvent varier d'un projet à l'autre. Cela, je le répète, fait partie d'une bonne gestion de projet de la part de la SEE, mais, monsieur Robinson, j'aimerais demander à M. Blackburn de répondre à votre question au sujet des actions frivoles et vexatoires.
La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Très brièvement, monsieur Blackburn.
M. Robert Blackburn: En fait, nous ne parlons pas uniquement d'actions frivoles et vexatoires. Il pourrait s'agir de divergences d'opinion. Ce que nous voulons, c'est avoir la certitude que si la SEE décide de financer un projet, celui-ci résistera et personne ne pourra dire: je ne suis pas d'accord; vous pouvez penser que les questions relatives à l'environnement ou à tout autre aspect du projet ont été réglées comme il le fallait, mais je ne suis pas d'accord.
M. Svend Robinson: «Frivole» est le mot que vous avez utilisé.
M. Robert Blackburn: Non, pas du tout.
M. Svend Robinson: De toute évidence, vous êtes d'accord avec M. Myers.
M. Robert Blackburn: J'en conviens, mais ce que je dis—et je pense que vous le savez bien—c'est que ce n'est pas seulement cela qui... En fait, la clause privative américaine, que nous avons utilisée comme modèle étant donné que la Ex-Im Bank semble être le modèle retenu par tout le monde, ne visait certainement pas les actions frivoles et vexatoires uniquement. Elle visait à assurer une certitude juridique une fois une décision prise, plutôt que de laisser la porte ouverte à une contestation judiciaire du processus de prise de décision.
M. Svend Robinson: Que se passerait-il si en fait on pouvait soutenir qu'il y a erreur de droit dans la façon dont la SEE a pris la décision? Vous dites en fait qu'il suffit de fermer la porte et d'empêcher toute possibilité d'examen.
M. Robert Blackburn: D'après ce que je comprends—vous êtes avocat, contrairement à moi—une clause privative constituerait un argument contre des contestations sur le fond, mais, comme dans n'importe quelle décision, vous avez le droit d'interjeter appel sous prétexte de déni de justice naturelle ou de poursuite abusive, plutôt que pour contester le fond de la décision. Peut-être ai-je tort, mais c'est ce que je...
La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci beaucoup, M. Robinson.
Je me rends compte de l'heure et je sais que le comité a dépassé le temps dont il disposait pour cette séance. Je vous remercie d'avoir fait preuve de patience et de tolérance et d'avoir attendu le début de cette partie de la séance; je vous remercie également pour vos observations. Merci beaucoup.
La séance est levée.