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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 15 mai 2001

• 0905

[Traduction]

Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.)): Mesdames et messieurs, la séance est ouverte.

Il nous manque quelques témoins, mais comme Mme Dawson est présente, je vais lui demander de commencer.

Madame Dawson, étant donné qu'il s'agit d'une présentation en Power Point, je vous demanderais de bien vouloir adapter votre témoignage à ce logiciel.

Mme Laura Ritchie Dawson (recherchiste associée, Centre des politiques commerciales et des lois): Avec plaisir.

Le président: Il semble que cela ait été organisé à notre insu; si quelque chose apparaît à l'écran, je vous demanderais d'en parler pour que l'on puisse donner l'impression de savoir ce que l'on fait.

Mme Laura Ritchie Dawson: Pas de problème.

Le président: Merci beaucoup. Nous sommes heureux de vous accueillir et vous cédons maintenant la parole.

Mme Laura Ritchie Dawson: Bonjour et merci pour l'invitation. Je m'appelle Laura Ritchie Dawson et je suis recherchiste associée au Centre des politiques commerciales et des lois à l'Université Carleton. Nous sommes une organisation conjointe de recherche de l'Université Carleton et de l'Université d'Ottawa.

Depuis quelques années, je travaille sur les questions de politique relative aux eaux. Je n'exerce pas le droit commercial, m'intéressant davantage aux questions de politique commerciale et je suis un peu consternée de voir le rôle que joue celle-ci dans le contexte de la politique canadienne relative aux eaux.

Ce qui me préoccupe particulièrement, c'est la façon dont certains décrivent les engagements commerciaux internationaux du Canada en vertu de l'OMC et de l'ALENA comme un problème qu'il faut régler afin de résoudre la question des eaux du Canada. À mon sens, il s'agit d'une approche très étroite en ce qui concerne les mesures qui s'imposent au plan politique.

Il me semble que le gouvernement canadien a en ce moment même l'occasion unique—c'est d'ailleurs un défi extraordinaire—d'aborder toute une série de questions relatives à l'eau, questions qui sont imbriquées les unes les autres, dans le contexte des échanges, de la protection des zones environnementales, de l'offre et de la demande. Je ne pense pas que l'on puisse régler les énormes problèmes auxquels on est confronté en examinant un microcosme de questions commerciales.

Dans mon court exposé d'aujourd'hui, je veux réfuter certains des mythes de politique commerciale relatifs aux exportations et aux prélèvements d'eau. Je vois que nous avons un avocat dans notre groupe qui analysera beaucoup mieux que moi les détails juridiques, mais je souhaite aborder ces points dans une perspective politique plus vaste.

Premier mythe dont je veux débattre: la seule façon de protéger les eaux canadiennes passe par une interdiction des exportations massives d'eau. J'ai été très heureuse de voir que dans la stratégie qu'il a adoptée, le gouvernement définit le problème en termes de prélèvements massifs d'eau et ne se concentre pas sur les exportations massives d'eau. Une fois cela réglé, nous mettrons l'accent sur l'intégrité de l'écosystème au lieu de faire de cette question une question commerciale susceptible d'être réglée à l'extérieur de nos frontières, par les groupes spéciaux de règlement des différends de l'OMC et de l'ALENA.

Je suis pour les échanges, et plus ceux-ci sont libres mieux c'est. Je défends également la souveraineté du Canada en ce qui concerne les décisions relatives aux eaux qu'il ne faut pas abandonner aux caprices des organismes de règlement des différends commerciaux. Si le gouvernement avait pris la voie de la réglementation du droit commercial, je crois qu'il aurait pour la première fois imposé des règlements sur l'eau dans son état naturel. Je suis sûre que vous avez déjà discuté de la question et considéré qu'il s'agissait de quelque chose de très risqué. En effet, l'eau sous toutes ses formes—eaux stagnantes, nappe phréatique—et les questions de la souveraineté du Canada sur les eaux de son territoire pourraient faire l'objet de contestation en vertu du droit commercial.

Deuxième mythe que je veux aborder brièvement: le Canada doit sacrifier ses eaux au nom d'accords commerciaux. C'est quelque chose dont nous entendons beaucoup parler dans les médias. Il me semble que les opposants au commerce utilisent les exportations d'eau douce pour mener leur campagne contre la mondialisation. Ce n'est pas seulement malveillant, je crois que c'est dangereux. Cela masque et banalise les véritables questions de protection des eaux, les cachant derrière les menus détails techniques des accords commerciaux.

Nos accords commerciaux sont bénéfiques pour l'économie canadienne, mais aucun gouvernement responsable ne sacrifierait l'intégrité des eaux douces du Canada pour obtenir un accès aux marchés des télécommunications, de l'automobile ou de l'agriculture. Je trouve choquant que l'on puisse penser que le public et le gouvernement canadiens puissent le permettre.

Comme vous le savez, dans le cadre des accords commerciaux nous acceptons certaines contraintes afin d'obtenir certains avantages dans le domaine de la politique commerciale intérieure. La raison pour laquelle nous continuons de respecter ces accords, c'est que les avantages l'emportent sur les coûts. Toutefois, si à un moment donné les coûts commençaient à l'emporter sur les avantages, rien au monde ne pourrait nous empêcher de renoncer à nos accords commerciaux, de rouvrir les négociations ou de prendre les mesures nécessaires pour protéger nos valeurs nationales.

• 0910

Troisième mythe: les problèmes de protection de l'eau sont essentiellement des problèmes de politique commerciale. Je crois avoir abordé cette question sous plusieurs angles. Certains avocats ont très bien montré que les eaux canadiennes risquent de ne pas être protégées comme il le faudrait en vertu de l'ALENA. En fait, si l'ALENA était la seule chose que nous avions en matière de politique relative aux eaux douces, nous serions dans une très mauvaise situation. Toutefois, ce serait une interprétation stricte et à la lettre de la loi, or une telle interprétation risque en général de déformer l'intention initiale de l'accord.

Nous pouvons le mieux défendre et assurer la conservation des eaux, ainsi que promouvoir la protection des eaux douces, en adoptant une politique nationale solide, un cadre à partir duquel nous prendrions nos autres engagements politiques. Notre politique commerciale doit s'appuyer sur un cadre national plus large et non l'inverse.

Il existe toutes sortes d'exemples où le Canada a mis l'accent sur des valeurs particulières dans le domaine du commerce. Nous protégeons la culture canadienne et on ne peut pas aller dans une librairie américaine au Canada. Nous estimons nos producteurs laitiers, si bien que nous payons beaucoup plus notre lait que nos voisins du sud. Nous avons prévu des exceptions à nos engagements commerciaux et nous pouvons continuer de le faire tant que nous bénéficions d'un consensus clair et que nous instaurons un dialogue fructueux avec les gens, dialogue nous permettant de dire qu'effectivement nous estimons nos ressources en eau douce et que nous sommes prêts à prendre les mesures qui s'imposent pour en assurer la conservation.

Les accords commerciaux ne sont pas des prisons. Ce sont des expressions dynamiques d'intérêts communs entre pays, qui évoluent et qui doivent être traitées comme telles.

Quatrième mythe que je veux dissiper: nous devons vendre nos ressources en eau douce, nous sommes en quelque sorte otages de ces accords et des foules vont se précipiter aux frontières pour assécher le Canada. Nos partenaires commerciaux ne peuvent pas forcer le Canada à extraire des minéraux du sol, ne peuvent pas le forcer à abattre des arbres dans les forêts et ne peuvent pas le forcer à pomper l'eau des lacs.

Ceux qui s'opposent au commerce prétendent que si un gouvernement provincial permet l'extraction et la transformation de certaines ressources en eau—qui seraient alors assimilées à une marchandise—toutes les provinces seraient tenues de faire la même chose. Ce n'est pas le cas. En vertu du droit commercial actuel, toute province peut interdire l'exportation d'eau. La seule contrainte, c'est qu'elle ne doit pas interdire le droit d'exporter en fonction de la nationalité du demandeur.

En vertu du système GATT-OMC, les restrictions à l'exportation sont habituellement interdites, sauf lorsqu'elles sont nécessaires pour la protection de la vie humaine, végétale ou animale ou pour la conservation d'une ressource naturelle non renouvelable. On peut invoquer les dispositions du GATT pour la protection des eaux et on peut probablement le faire sans problème. La seule exigence, c'est que ces restrictions autorisées ne peuvent pas être invoquées arbitrairement ou apparaître comme des restrictions cachées au commerce.

J'ai entendu dire par plusieurs que le système de règlement des différends de l'OMC a un parti pris contre la protection de l'environnement. C'est un autre des mythes. Les groupes spéciaux de règlement des différends qui examinent les exceptions GATT ont affirmé que les intérêts commerciaux devront peut-être céder la place à des préoccupations légitimes en matière d'environnement. Il est également vrai que ces mêmes groupes se demandent si les mesures prises habituellement pour des raisons environnementales ne sont pas une forme cachée de protectionnisme.

Le Comité du commerce et de l'environnement de l'OMC procède actuellement à un examen complet pour s'assurer de la compatibilité entre les règles commerciales internationales et les accords multilatéraux en matière d'environnement. Parmi les prises de position avancées jusqu'à présent, il a déclaré que les accords multilatéraux en matière d'environnement l'emporteront toujours sur les engagements commerciaux. Par conséquent, dans le cadre de notre politique nationale relative à la protection des eaux, nous pourrions envisager de coopérer avec plusieurs autres pays ayant des intérêts similaires et souhaitant aboutir à des accords multilatéraux sur la protection des eaux douces.

Au plan national, la meilleure façon de réfuter les arguments de ceux qui prétendent que les mesures environnementales sont une protection arbitraire ou déguisée consiste à situer ces mesures dans un cadre politique en matière de protection des eaux, cadre plus vaste, cohérent et transparent.

• 0915

Plusieurs options politiques s'offrent à vous qui êtes responsables de l'élaboration des politiques. S'il n'y a qu'un seul message que je peux vous transmettre, c'est le suivant: la politique commerciale n'est qu'une pièce du puzzle que représente la protection des eaux au Canada.

Le problème auquel nous sommes confrontés, c'est que, en raison de la nature des eaux, une crise prend beaucoup de temps à survenir, 20 ans ou peut-être plus. Il faut également beaucoup de temps pour y réagir. En général, les horizons politiques auxquels nous sommes habitués s'étalent sur quelques mois ou quelques années. Les genres de solutions dont nous pourrions avoir besoin pour la protection des eaux douces risquent de prendre 20 ou 50 ans. C'est un incroyable défi que vous devez relever.

Je suis convaincue que la fixation des prix de l'eau par le marché est une première étape importante. Ce concept suscite beaucoup de controverse. Personne ne veut entendre dire que l'eau du Canada, cette ressource sans prix, est réduite au rang de marchandise. C'est une richesse naturelle sans prix. Le fait qu'on ne lui ait pas accordé de valeur monétaire a encouragé les Canadiens à gaspiller l'eau et à ne pas la traiter avec le respect qu'elle mérite.

Lorsque je dis que la fixation des prix de l'eau par le marché est importante, je ne veux pas dire que le consommateur moyen devrait payer l'eau du robinet plus cher. Je dis simplement qu'étant donné que l'eau est fortement subventionnée au Canada, il faudrait la subventionner pour les utilisations les plus précieuses que l'on en fait, la santé, la sécurité et l'hygiène et que dans le cas des utilisations moins précieuses, y compris les utilisations commerciales et non récupérables, il faudrait imposer un prix plus élevé.

Je ne suis pas la seule à défendre le principe de fixation des prix par le marché. Je suis sûre que vous en avez déjà entendu parler. La Banque mondiale adopte actuellement cette approche pour régler la crise mondiale que représente la pénurie d'eau douce. On estime que d'ici 20 ans, 75 p. 100 de la population mondiale ne bénéficiera pas d'un approvisionnement en eau douce adéquat. En tant que protecteurs de 20 p. 100 des ressources en eau douce de la planète, nous devons être prêts à régler les crises des années à venir et sérieusement envisager la politique que nous allons élaborer.

Pour finir, je recommanderais que l'on s'efforce d'éliminer les niveaux multiples et chevauchants de la réglementation et de faire de la cohérence de la politique relative aux eaux une priorité plus élevée. Étant donné que la réglementation se fait à autant de niveaux et que des questions d'approvisionnement se posent, comme des questions de demande, au niveau des municipalités, etc., c'est une entreprise de taille.

Il faut s'efforcer de rétablir la capacité de tous les paliers de gouvernement de surveiller et de protéger les ressources en eau douce. Le gouvernement a perdu une grande part de sa capacité technique. On pourrait peut-être envisager un certain degré de privatisation, mais nous avons besoin des compétences techniques pour assurer la surveillance nécessaire en cas de privatisation des services en eau à quelque niveau que ce soit.

Nous devons reconnaître le lien intrinsèque entre les eaux de surface dont nous parlons dans les Grands Lacs, les eaux stagnantes et la nappe phréatique. Nous ne discutons pas véritablement de la nappe phréatique comme il le faudrait, alors que tout est lié.

Je vais juste terminer en vous rappelant que la pénurie d'eau douce est une crise mondiale et que, en tant que Canadiens, nous devrions travailler avec nos partenaires internationaux pour assurer et améliorer l'accès de tous à un approvisionnement sûr et adéquat en eau potable.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Dawson, pour cet exposé fort utile.

Nous passons maintenant à M. Dunn et ensuite, à M. Johnson. Merci d'être venus. Désolé d'avoir commencé sans vous, mais nous ne sommes ici que jusqu'à 11 heures si bien qu'il a bien fallu mettre les choses en branle.

M. Jamie Dunn (militant, Protection des eaux potables, Conseil des Canadiens): Veuillez m'excuser de mon léger retard.

Le président: Je suis désolé que vous ayez manqué l'exposé de Mme Dawson, car je crois que vous ne partagez vraiment pas le même point de vue.

M. Jamie Dunn: Oui, je l'ai remarqué, même si je suis arrivé en retard.

Permettez-moi de commencer en me présentant. Je m'appelle Jamie Dunn et je suis militant pour la protection des eaux potables au Conseil des Canadiens. J'ai distribué un livret traitant de plusieurs questions, y compris une feuille de télécopie en anglais et en français sur les points dont je vais parler. Par la suite, je distribuerai un exposé de quatre pages dont nous attendons la traduction. Au lieu de simplement vous remettre l'anglais, j'ai préféré attendre afin de pouvoir vous distribuer les deux versions en même temps.

• 0920

J'aimerais vous dire quelques mots au sujet du Conseil des Canadiens. Il s'agit d'un groupe de défense de l'intérêt public au Canada qui compte plus de 100 000 adhérents et 65 sections à l'échelle du pays. Nous ne recevons ni n'acceptons de financement du gouvernement et nous ne recevons ni n'acceptons de financement de sociétés afin de conserver notre indépendance en matière de questions politiques et d'intérêt public.

Nous nous occupons des questions relatives aux eaux depuis 12 ans, depuis les premières négociations de l'Accord de libre-échange en 1988.

Permettez-moi de présenter Steve Staples, coordonnateur de la campagne du Conseil des Canadiens.

Nous sommes très préoccupés de voir que les clauses de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis assujettissent les régimes de réglementation du Canada à cet accord commercial et que nous perdions en fait la maîtrise de nos ressources en eau douce. Il y a eu un tollé général à ce sujet et le gouvernement de l'époque a décidé d'adopter certains règlements relatifs à cette ressource qui sont cependant tombés à l'eau au moment des élections de 1980.

Depuis, avec la mise en vigueur de l'ALENA et d'autres accords commerciaux, nous sommes les premiers à dire que le Canada ne devrait pas perdre la maîtrise de ses ressources en eau douce.

Depuis 40 ans—il est important de le savoir—on a tenté de dériver et d'exporter l'eau du Canada, notamment à destination du sud-ouest des États-Unis. Il suffit de rappeler le plan du canal Grand, qui consistait à fermer la baie James et à en faire dériver l'eau à destination des États-Unis, ainsi que le projet NAWAPA qui consistait à inonder un dixième de la C.-B. pour amener de l'eau aux États-Unis.

Cette question revient périodiquement à la surface, cinq licences ayant été émises en Colombie-Britannique à la fin des années 80, pour ensuite être annulées à cause de pressions politiques; il faut aussi parler de la licence Nova Group qui est la raison pour laquelle nous sommes tous ici aujourd'hui, ainsi que des tentatives subséquentes d'exporter de l'eau, comme les 58 milliards de litres du lac Gisborne à Terre-Neuve, problème qui nous semblait avoir disparu, mais qui fait mine de réapparaître. Il est donc important de parler de cette question.

Le Canada fait l'objet d'énormes pressions. Certains nous appellent la future OPEP de l'eau et je crois que dans ce cas-là il est important de commencer à examiner les réalités du contexte dans lequel nous fonctionnons et également de s'interroger sur les mesures à prendre pour faire en sorte que les eaux du Canada sont protégées pour les Canadiens ainsi que pour l'environnement dans lequel ils vivent.

Venons-en au projet de loi C-6. Lorsque le Nova Group à Sault Ste. Marie a obtenu une licence de la province de l'Ontario lui permettant d'exporter 600 millions de litres d'eau du lac Supérieur, le public a protesté haut et fort. En fait, à un moment donné, Madeleine Albright, secrétaire d'État aux États-Unis, est intervenue à cause des droits qui lui étaient conférés en vertu de la Loi du traité des eaux limitrophes internationales. Le député de Winnipeg—Transcona, Bill Blaikie, a déposé une motion aux Communes. La Chambre a adopté à l'unanimité une motion visant à inciter le gouvernement fédéral à interdire les exportations massives d'eau. Au lieu de cela, le gouvernement fédéral a présenté une stratégie à trois volets qui, selon lui, empêcherait les exportations massives d'eau dans le contexte des accords commerciaux, car il ne souhaitait pas abroger ni mettre en péril ses engagements pris en vertu des accords commerciaux.

Si les accords commerciaux influent sur la capacité du gouvernement canadien de conserver la maîtrise de ses ressources en eau, il faudrait s'y intéresser au premier chef, au lieu de chercher à savoir ce que nous pouvons faire pour les contourner et si d'ailleurs cette solution est possible ou non.

Le gouvernement a reconnu lui-même qu'il faisait face à certains obstacles: les pressions du public pour qu'il fasse quelque chose; les inquiétudes des provinces à propos de leur compétence en ce qui concerne la maîtrise des ressources en eau; les intérêts commerciaux qui veulent exporter de l'eau pour régler la crise croissante à l'échelle de la planète, ainsi que les obligations que le gouvernement a clairement reconnu avoir en vertu des accords commerciaux, qu'il s'agisse de l'ALENA ou des accords de l'OMC.

Le gouvernement a donc annoncé qu'il allait adopter une approche environnementale. Comme l'a indiqué mon amie, l'article XX du GATT permet apparemment de protéger les ressources naturelles non renouvelables. Il est important de dire que cette approche n'a jamais réussi. Mais si elle a été mise à l'épreuve à l'OMC à plusieurs reprises, elle n'a jamais donné de résultats positifs. C'est un point important.

Le Conseil des Canadiens a fait des recherches intensives à ce sujet. Nous avons publié le seul avis juridique qui existe en la matière au Canada. Il est important de le savoir. Nous finançons ce que nous déclarons être important pour nous et nous avons publiquement fait part de notre point de vue. Vous pouvez d'ailleurs consulter notre site Web à cet égard.

Le président: Désolé, je sais que vous n'avez pas terminé, mais s'agit-il de l'avis dont il est fait état dans vos documents?

M. Jamie Dunn: C'est un résumé de cet avis qui se trouve dans vos documents. L'avis de 29 pages se trouve sur notre site Web. Il s'agit ici d'un résumé de 14 pages fait par Steven Shrybman qui, à l'époque, était directeur exécutif de la West Coast Environmental Law Association.

• 0925

Le président: Merci, désolé de vous avoir interrompu.

M. Jamie Dunn: Pas de problème.

Alors que l'article XX du GATT est incorporé dans l'ALENA, il est important de reconnaître qu'il n'a jamais permis de protéger l'environnement lorsqu'il y a eu contestation dans le contexte d'accords commerciaux.

Il est important de dire que c'est la raison pour laquelle le gouvernement fédéral a jugé qu'une approche environnementale réussirait, si bien que je pense qu'il faut examiner le projet de loi C-6 non seulement par rapport aux deux autres volets de la stratégie du gouvernement, mais aussi pour savoir s'il s'agit véritablement d'une approche environnementale ou non.

C'est pour cela que nous avons plusieurs points de préoccupation au sujet du projet de loi C-6, dont l'objet déclaré est d'empêcher les exportations massives d'eau. Tout d'abord, nous nous inquiétons de ce que le projet de loi C-6 crée en fait un régime d'attribution de licences pour l'exportation de l'eau. C'est extrêmement problématique. Le fait que cette mesure soit censée empêcher les exportations et qu'elle instaure un régime d'attribution de licences, émises par le ministre des Affaires étrangères, et non par le ministre de l'Environnement, permet de douter, premièrement de son efficacité; on est également en droit de se demander si cette mesure peut effectivement se présenter comme étant une mesure environnementale.

Deuxième point de préoccupation, le projet de loi C-6 s'appliquerait aux eaux limitrophes seulement et ne ferait rien en ce qui concerne la protection des eaux intérieures et côtières. Les cinq licences émises à la fin des années 80 en C.B. visaient la diversion côtière des eaux et ne seraient nullement touchées par des modifications apportées au Traité des eaux limitrophes.

Il est également important de savoir qu'à l'heure actuelle les provinces atlantiques, d'après ce que nous avons lu hier dans les journaux, sont en faveur des exportations massives d'eau. À Terre-Neuve, il est proposé d'exporter 58 milliards de litres d'eau du lac Gisborne, eau qui sinon serait, paraît-il, gaspillée. Le premier ministre de Terre-Neuve déclare que cette eau est gaspillée vu qu'elle se perd dans l'océan.

Une approche environnementale laisse entendre que l'eau sous toutes ses formes joue un rôle dans l'environnement. Il n'y a rien de tel que de l'eau gaspillée.

En ce qui concerne les eaux côtières et intérieures, il est également important d'examiner les plans qui existent déjà. Pour les 40 dernières années, seul le plan du canal Grand aurait été touché par cette mesure législative. Nous pensons qu'il est également important de reconnaître...

Le président: Pardon, de quel canal parlez-vous?

M. Jamie Dunn: Je veux parler du canal Grand et du plan de l'ingénieur Eric Kierans, de Terre-Neuve. Il aurait fermé la baie James, collecté l'eau douce pour la dériver par une série de canaux passant par les Grands Lacs pour arriver jusqu'au sud-ouest des États-Unis. Cela remonte à 1958, je crois.

Il est également important lorsque l'on examine ces questions de comprendre que le projet de loi C-6 semble empiéter sur la compétence des provinces. Il ne s'agit pas seulement d'une question technique, mais d'une question extrêmement importante du point de vue de la politique du gouvernement et des intentions de ce dernier. Si le gouvernement fédéral du Canada déclare ne pas pouvoir agir à cause de la compétence des provinces, il faut alors examiner ce que prévoit le projet de loi C-6, qui retirerait soi-disant, à l'Ontario le droit d'émettre des licences et de les annuler, comme elle l'a fait pour le Nova Group—il s'agissait en effet d'une licence émise par l'Ontario.

Maintenant, c'est le ministre fédéral des Affaires étrangères qui émettrait cette licence. Qu'est-ce que l'Ontario pourra dire à ce sujet? L'Ontario se mettrait-elle à émettre des licences pour le prélèvement de l'eau des Grands Lacs? Qu'est-ce qu'un «bassin hydrographique»? Quelles seraient les limites géographiques?

Aucune réponse n'a encore été apportée à ces questions. Je crois qu'elles sont considérablement importantes, non seulement du point de vue de notre politique, mais aussi pour savoir si une perspective environnementale est défendable auprès de l'Organisation mondiale du commerce, en supposant que cette option porte véritablement fruit. Comme je l'ai dit plus tôt, tout prouve le contraire.

Le projet de loi C-6 s'appuie sur le concept des bassins hydrographiques. Comme je l'ai dit plus tôt, le gouvernement fédéral a adopté trois approches: premièrement, une demande à la Commission mixte internationale, créée en vertu du Traité des eaux limitrophes; deuxièmement, l'Accord pancanadien sur l'eau dont je vais un peu plus parler dans quelques instants; troisièmement, des modifications à la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales.

L'Accord pancanadien sur l'eau divise le pays en cinq bassins hydrographiques à partir desquels on ne peut pas dériver d'eau. Il s'agit de l'océan Atlantique, de l'océan Pacifique, de l'océan Arctique, de la baie d'Hudson et du golfe du Mexique, les bassins hydrographiques canadiens. Pourtant, ce projet de loi parle de bassins hydrographiques. La confusion entre les deux stratégies au niveau fédéral ne permettra pas de défendre cette stratégie comme une approche environnementale.

La définition des bassins est également vague et d'autres critiques ont été formulées à ce sujet. Il me semble qu'on les présente comme un concept d'ingénierie: dans quel sens l'eau coule-t-elle sur le continent? En même temps, cela semble laisser entendre que l'écosystème est le même à Vancouver qu'à San Diego, car ces deux villes se trouvent dans le bassin hydrographique du Pacifique.

• 0930

On pourrait également en théorie et en fait, explicitement, être autorisé à expédier de l'eau de Vancouver jusqu'à San Diego, ou de Gaspé jusqu'à Miami ou n'importe où le long de ces corridors continentaux. Ce n'est pas cela qui va empêcher les exportations massives d'eau, peu importe l'intention visée, et il est important de commencer à souligner les problèmes reliés à cette stratégie globale.

Je dirais également que le Conseil des Canadiens s'est mobilisé à deux reprises au moment où les provinces devaient signer l'Accord pancanadien sur l'eau, soulignant les problèmes qu'il posait. Nos adhérents dans tout le pays se sont considérablement démenés, appelant les ministres de l'Environnement et les députés locaux pour leur dire qu'il ne s'agissait pas d'une bonne stratégie, d'après eux. Autant dire que nous bénéficions d'un appui considérable.

J'espérais faire quelque chose ce matin, mais je n'ai pas eu la capacité personnelle de le faire. J'ai 11 boîtes de pétitions avec plus de 100 000 signatures de Canadiens de tout le pays. J'aurais véritablement voulu les empiler derrière moi pour donner l'impression que tous ces signataires étaient ici présents et appuient ce que je vous dis aujourd'hui. La demande est claire et nette: interdire les exportations massives d'eau. C'est ce que souhaitent les Canadiens. Je crois que la stratégie adoptée par le gouvernement fédéral suscite beaucoup de doute et de réticence.

Je vais revenir au projet de loi C-6. Il importe également de comprendre que le Traité des eaux limitrophes a été annulé et remplacé par l'ALENA, ainsi que par le GATT et qu'il sera annulé et remplacé par l'Accord sur la zone de libre-échange des Amériques, s'il est signé en 2005. D'après la Convention de Vienne sur les traités internationaux, c'est le traité le plus récent qui l'emporte en cas de différend en matière de compétence.

Il est également important de comprendre que l'article 103.2 de l'ALENA stipule qu'il l'emporte sur tous les autres traités internationaux à moins que cela ne soit prévu ou accepté par l'ALENA. Le Traité des eaux limitrophes ne figure pas sur la liste des traités exemptés de l'ALENA. Le Traité des eaux limitrophes a été annulé et remplacé par l'ALENA; c'est ce qui est écrit à l'article 103.2 de l'ALENA.

Cela nous amène à douter de l'efficacité de la stratégie du gouvernement fédéral. Comme je l'ai dit, nous avons publié un avis juridique important, le seul qui soit mis à la disposition du public canadien. Il est également important de commencer à examiner les façons dont le gouvernement fédéral envisage la question du commerce et de l'eau. L'eau est une marchandise en vertu de l'ALENA. Il y a eu beaucoup de débats pour savoir si cela importait et le gouvernement fédéral a déclaré: «Eh bien, pas dans son état naturel.» D'après notre avis juridique, il n'est pas vrai que toutes les parties ont convenu que dans son état naturel, l'eau n'est pas une marchandise. Il est évidemment fort probable que les États-Unis seront à l'origine d'un différend à ce sujet.

Il importe également de comprendre qu'en vertu de l'ALENA, l'eau est aussi un service et un investissement. L'ALENA ne prévoit pas d'exemption environnementale pour les services et les investissements. L'article XX du GATT ne s'applique qu'aux articles 3 à 9 de l'ALENA. Ces exemptions dont nous avons entendu parler ne s'appliquent qu'aux articles 3 à 9 de l'ALENA. Les services et investissements représentent les articles 12 et 11 respectivement. Depuis que l'une des licences émises à la fin des années 80 en Colombie-Britannique a été annulée, Sun Belt Water Inc., qui était intéressée par une de ces licences, poursuit actuellement le gouvernement fédéral pour 10,5 milliards américains en vertu du chapitre 11.

Ce sont des possibilités qui s'offrent même aux plus petites sociétés, car je ne veux pas laisser entendre que Sun Belt Water de Santa Barbara, en Californie, est une société de grande importance. On m'a dit que ses bureaux sont situés au-dessus d'un salon de coiffure, quelque part à Santa Barbara.

De même, Nova Group, le...

Le président: Elle veut déménager, c'est pourquoi elle...

M. Jamie Dunn: Peut-être. Pareillement, Nova Group est une petite société d'investissement qui a dépensé 50 $ pour obtenir une licence en vue d'exporter 600 millions de litres d'eau. Elle a déclaré que jamais 50 $ de fonds publics n'avaient été aussi bien dépensés au Canada.

Pour répondre à ces questions relatives aux accords commerciaux et à ce qui nous attend en règle générale, j'aimerais conclure en disant qu'il est important de dire que la stratégie globale du gouvernement sur l'eau est imparfaite. Dans le cadre de cette stratégie, il faut examiner de plus près le projet de loi C-6.

Alors qu'il est peu probable que la disposition relative à l'état naturel sur laquelle s'appuie le gouvernement fédéral pour assurer la protection des eaux du Canada résisterait à une contestation en vertu d'accords commerciaux, il est essentiel de comprendre que l'eau apparaît à beaucoup de niveaux dans divers accords commerciaux, au sujet desquels le Canada pourrait faire l'objet de contestation, notre pays se trouvant alors contraint d'autoriser l'exploitation de ses eaux. Deuxièmement, comme je l'ai dit, l'article 2101 n'indique pas que les exceptions prévues à l'article XX du GATT s'appliquent aux services et aux investissements.

J'aimerais être moins théorique et plus réaliste à ce sujet. À l'heure actuelle, le Conseil des Canadiens est partie appelante devant un tribunal de l'Ontario saisi d'une question environnementale au sujet d'une licence de prélèvement d'eau émise pour la rivière Tay, près de Perth, en Ontario, qui vise 1,6 milliard de litres d'eau par an.

• 0935

L'importance de l'ALENA est très réelle étant donné que la façon dont la licence a été émise, sans information environnementale importante sur la rivière Tay et dans une approche attentiste, va fixer une norme relative à l'accès aux eaux en Ontario. Si cette licence est émise, n'importe quelle société américaine ou mexicaine, et une fois que la ZLEA interviendra, n'importe quel pays de l'hémisphère occidental, pourra en conclure qu'il s'agit de la norme fixée pour obtenir l'eau de l'Ontario, sans information environnementale importante, dans une approche attentiste; par ailleurs, comme le processus d'appel en Ontario est à l'avant-plan, une fois la licence délivrée, le public ne pourra pas se prononcer sur la façon dont l'environnement est protégé.

Mon amie a indiqué que ce n'est pas parce qu'une seule province prendra telle ou telle mesure que les autres seront liées; les avocats ne sont pas d'accord à ce sujet. Selon l'Accord pancanadien qui fixe une norme commune dans tout le pays, toutes les provinces seront liées une fois que l'une des parties à cet accord commencera à exporter de l'eau, puisqu'elles auront toutes accepté cette norme. Les provinces atlantiques ont signé l'accord. Terre-Neuve a signé l'accord. À partir du moment où une province commence à exporter de l'eau, n'importe qui peut prétendre devant un groupe commercial que toutes les autres, signataires de l'accord, sont assujetties à la même norme et doivent réserver le même droit d'accès aux sociétés étrangères.

Je n'allais pas aborder la question de la fixation des prix, mais mon amie l'a fait. C'est une question vitale. Personne ne dit que n'importe quelle société devrait pouvoir exploiter la nature comme elle le souhaite, mais le fait est que dans le monde entier, le recouvrement intégral des coûts et la fixation du prix de l'eau tuent les gens. Actuellement, en Afrique du Sud, 400 personnes sont mortes d'une épidémie de choléra, car les gens ne peuvent pas payer l'eau du robinet, si bien qu'ils vont s'approvisionner à la rivière. Dans le monde entier, cette crise a provoqué des émeutes. Nous étions dans le Cochabamba, en Bolivie, en décembre dernier, et nous avons été témoins d'émeutes et de soulèvements. Les gens se sont emparés de la ville et ont renvoyé Bechtel, qui distribuait de l'eau, à cause du coût de l'eau.

J'ai grandi dans une petite ville à l'extérieur d'Ottawa, une petite localité rurale. Jusqu'en 1986, date à laquelle j'ai déménagé, les gens qui habitaient en face de chez moi allaient chercher chaque matin leur eau au robinet de la ville. Qu'arrive-t-il à ces gens au Canada? Les Canadiens n'appartiennent pas tous à la classe moyenne. Beaucoup vivent en marge de la société et il ne faut pas non plus oublier les groupes culturels distincts qui ne sont pas aussi avantagés que les autres. La fixation du prix de l'eau ne peut pas être vue comme une panacée ni comme une solution miracle aux questions de conservation. Que va-t-il arriver à Dofasco et GM, qui obtiennent leur eau directement du lac Ontario et qui ne font pas partie d'un réseau municipal de distribution muni de compteurs, alors que des gens dans un réseau municipal doivent faire attention à chaque litre d'eau qu'ils utilisent?

Ce sont les questions qui se posent. C'est la raison pour laquelle le Conseil des Canadiens organise une conférence de la société civile internationale sur l'eau à Vancouver, en juillet prochain, avec une interprétation simultanée en trois langues. Je vous invite tous à venir—les inscriptions peuvent se faire d'ici le 1er juin: 50 $ pour une conférence de trois jours à l'UBC. Telles sont les questions accablantes que pose la crise à l'échelle de la planète. La Banque mondiale et d'autres organismes très puissants—et les NU de plus en plus—adoptent cette devise «Fixez tout simplement le prix de l'eau». C'est ce qui menace de porter le plus atteinte aux droits de la personne actuellement.

C'est ainsi que je termine mon exposé. Merci beaucoup de m'avoir écouté et je suis prêt à répondre à toutes vos questions.

Le président: Merci, monsieur Dunn, pour votre exposé très utile.

J'imagine que M. Staples vous accompagne si bien que nous allons passer à M. Johnson.

M. Jon Johnson (à titre individuel): Puis-je avoir un verre d'eau?

Le président: Avant son intervention, donnez à M. Johnson le dernier verre d'eau gratuit peut-être.

M. Jon Johnson: Je ne pense pas le boire, mais plutôt le vendre.

Le président: Prenez-en deux, mais cela risque de devenir un prélèvement massif et vous ne serez pas autorisé à le faire.

M. Jon Johnson: Merci, monsieur le président. Je m'appelle Jon Johnson et je suis avocat en droit commercial. Je vais vous donner les grandes lignes de mes antécédents dans le domaine du droit commercial.

J'ai exercé le droit commercial pour la première fois au Bureau des négociations commerciales en 1987, lorsque je participais à la rédaction et à la mise au point de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis. J'ai fait du travail sur les règles d'origine pour le Bureau des négociations commerciales trilatérales en rapport avec l'ALENA en 1992-1993. Le président me demandait de parler des règles d'origine dans ses cours, car il les jugeait trop ennuyeuses et incompréhensibles, ce qui, à mon avis, était une décision très sage de sa part.

• 0940

Par la suite, j'ai participé à quatre affaires dont a été saisie l'OMC au nom de clients du secteur privé, mais comme conseiller du gouvernement. J'ai participé également à plusieurs affaires relatives au chapitre 11. J'ai écrit plusieurs livres sur le droit commercial. Je ne prétends pas avoir de connaissances spécialisées sur l'eau, vu que j'ai participé sporadiquement au débat sur l'eau.

J'ai d'abord participé à un symposium sur l'eau organisé par l'Académie Rawson des sciences de l'eau en 1988, 11 jours avant les élections, alors que les conservateurs avaient enregistré une baisse de 11 points dans les sondages. Je me suis aperçu que j'étais le seul à défendre la position du gouvernement sur l'eau, ce qui était assez effrayant. Plusieurs articles ont été publiés à ce sujet—j'en ai écris plusieurs—et ils étaient un peu exagérés, des deux côtés de la médaille. J'ai rassemblé mes points de vue sur le sujet dans une publication parue quelques année plus tard, que je vais vous laisser. Ce livre a le titre—quelque peu effrayant— suivant Continental Water Marketing. J'ai écrit un article intitulé Canadian Water and free trade, dans lequel je me suis efforcé de dire comment, en fait, ces accords commerciaux traitent du sujet de l'eau ou n'en traitent pas, ce qui est probablement plus proche de la réalité. L'article est un peu dépassé. Il ne traite pas véritablement de l'OMC, puisque cette organisation n'existait pas encore. De toute façon, je vais vous le laisser.

Comme je le disais plus tôt, je n'ai pas de connaissances spécialisées sur l'eau. J'ai des antécédents en matière de droit commercial et je pense que dans le temps qui me reste, le plus utile serait de décrire brièvement ce que visent les accords commerciaux et, plus important, ce qu'ils ne visent pas, d'après moi.

Laura a fait une déclaration, Jamie l'a réfutée. Je suis d'accord avec Laura: les accords commerciaux ne visent pas l'eau dans son état naturel. Rien dans les accords commerciaux, que ce soit l'ALENA ou les accords OMC, n'exige qu'un pays membre autorise l'exploitation d'une ressource. Si un pays membre choisit d'interdire l'exploitation d'une ressource particulière, il a parfaitement le droit de le faire. Cela dépasse le cadre des accords OMC et de l'ALENA, à mon avis. Par contre, tout change lorsque la ressource naturelle devient un produit.

Quand l'eau devient-elle un produit? Je crois que dans la plupart des cas, c'est assez évident. L'eau en bouteille est un produit, l'eau placée dans des conteneurs à des fins d'expédition et de vente est un produit. Il peut y avoir quelques zones grises comme par exemple l'eau qui passe par un générateur pour produire de l'hydroélectricité. J'imagine que l'eau, dans ce cas-là, n'est pas un produit. En effet, le propriétaire de l'eau, par exemple une province, autorise l'utilisation temporaire de l'eau, le mouvement de l'eau, pour produire de l'énergie. Le générateur hydroélectrique ne possède pas l'eau toutefois, l'eau retourne simplement dans le réseau hydrographique. Je crois qu'en pareil cas, elle ne serait pas considérée comme un produit.

Quand Jamie a dit que l'approche environnementale n'était pas efficace, c'était en rapport avec le projet de loi C-6. Comme ce projet de loi porte presque uniquement sur l'eau à l'état naturel, les accords commerciaux comme l'ALENA et l'OMC sont sans pertinence. Ils ont rapport au projet de loi C-6 dans la mesure où ce dernier prévoit des exceptions, des permis et ainsi de suite.

• 0945

Parlons brièvement de ce que les accords de l'OMC et de l'ALENA prévoient en ce qui concerne l'eau.

Jamie a parlé d'une interdiction des exportations. Je suppose que c'est ce que prône le Conseil des Canadiens. Le problème, que plusieurs d'entre vous ont probablement mentionné, y compris Laura et Jamie, est simplement l'article XI du GATT. En vigueur depuis 1948, il interdit d'imposer des restrictions à l'importation et à l'exportation. Par conséquent, si l'eau était un produit et que son exportation en tant que tel était interdite, elle tomberait sous le coup de l'article XI, à moins que l'interdiction ne corresponde à plusieurs exceptions décrites dans le GATT. Ces exceptions sont reprises dans l'accord de mise en oeuvre de l'OMC car elles représentent ce qu'on appelle le GATT 1994, essentiellement l'ancien GATT légèrement retouché.

Laura a mentionné l'exception prévue pour protéger la vie ou la santé des personnes, des animaux et des plantes. C'est une exception. Elle a aussi mentionné celle qui est prévue pour la conservation de ressources naturelles nonrenouvelables. Il y en a quelques autres. La seule autre qui a probablement un rapport est celle des pénuries névralgiques. Ces exceptions pourraient s'appliquer à une interdiction des exportations, mais on aurait de la difficulté selon moi à imposer une interdiction générale des exportations sans établir de lien avec une situation particulière. L'exception prévue pour les pénuries névralgiques est de toute évidence, de par sa nature même, une mesure temporaire visant à régler un problème courant. Ce n'est pas le genre d'exception sur lequel s'appuierait une politique à long terme.

Ainsi, pour ce qui est de l'exception prévue pour la protection de la santé des personnes, des animaux ou des plantes, il faudrait d'abord établir un lien avec une situation environnementale, probablement une situation particulière. De plus, l'exception est qualifiée d'essentielle, ce que la jurisprudence relative au GATT a interprété comme signifiant la moins restrictive sur le plan commercial. Donc, s'il existait un moyen moins restrictif sur le plan commercial de régler un problème environnemental particulier prévu à la disposition XX(b), l'interdiction générale pourrait alors poser problème.

L'exception prévue pour les ressources naturelles non renouvelables est certes une possibilité, également. Manifestement, elle s'applique à des articles comme l'eau. Je le dis parce que, dans le cas de l'essence nouvelle, on a décidé que l'exception incluait l'air pur. Donc, si elle inclut l'air pur, elle devrait inclure l'eau pure ou l'eau tout court. Cependant, à nouveau, il faudrait au départ établir un lien entre l'interdiction et cette exception particulière.

Jamie a effectivement mentionné que l'approche environnementale n'avait jamais été efficace sous le régime de l'OMC. À nouveau, on suppose au départ une mesure environnementale qui vise un produit, parce que dans le cas contraire—c'est-à-dire que si l'eau est une ressource naturelle inexploitée—les accords commerciaux sont sans rapport.

Je conteste cette affirmation. Tout d'abord, il y a eu très peu de ce qu'on appellerait des causes environnementales ou mesures environnementales mises à l'épreuve dans la jurisprudence de l'OMC. L'affaire de la crevette et de la tortue mettait en jeu une interdiction des produits de crevette par les États-Unis lorsque la crevette était capturée d'une manière qui menaçait les tortues de mer, une espèce en danger de disparition. En réalité, l'organe d'appel dans ce cas-là a jugé que les mesures tombaient certes sous le coup de l'exception prévue pour la conservation de ressources naturelles non renouvelables. Il a contesté non pas la mesure comme telle, mais la manière dont les États-Unis la mettaient en oeuvre, car ils étaient quelque peu arbitraires dans leur façon de décider si les méthodes de capture de crevettes d'un pays particulier mettaient en danger les tortues.

L'affaire de l'essence nouvelle mettait en cause l'exception prévue pour l'air pur et, à nouveau, l'organe d'appel n'a pas contesté l'exception autorisant la mesure particulière prise. Il a plutôt contesté la nature arbitraire de l'application de la mesure. Donc, dans les deux cas, il y avait moyen de corriger la situation.

• 0950

Dans l'affaire de l'amiante, qui a récemment été rendue publique, je ne sais pas si j'irais jusqu'à dire qu'il s'agissait d'une mesure environnementale, mais il s'agissait certes d'une mesure de santé et l'organe d'appel n'a pas hésité à trancher. Il a confirmé la mesure sans difficulté.

Quant à l'ALENA, il a ceci de bon qu'il ne va pas beaucoup plus loin que ce que je viens de décrire. En fait, il incorpore plusieurs de ces dispositions par renvoi. Il incorpore l'article XI, qui est l'interdiction. Il incorpore toutes les exceptions. Donc, essentiellement, si, par exemple, les États-Unis ou le Mexique déposaient une plainte contre le Canada en invoquant l'article XI du GATT ou si une des exceptions s'appliquait, ils pourraient le faire sous le régime de l'ALENA grâce au processus de règlement des différends qui est prévu, et le Canada aurait droit aux mêmes recours pour se défendre. La seule différence dans l'ALENA, c'est qu'il modifie l'utilisation de plusieurs des exceptions en imposant une exigence de proportionnalité. L'exception vraiment pertinente est celle des ressources naturelles non renouvelables.

Donc, si vous restreignez les exportations parce que vous souhaitez ménager des ressources naturelles non renouvelables—vous allez donc interdire l'exportation de certains produits, en vous rappelant que l'ALENA ne s'applique qu'aux produits, non pas aux ressources—il faut alors réduire les expéditions intérieures en conséquence. Toute la formule gravite autour des expéditions. Elle n'est probablement pas très pertinente en ce qui concerne l'eau, certainement pas actuellement. Toutefois, à l'époque, bien sûr, il s'agissait de restreindre les exportations de pétrole et de gaz naturel qui se faisaient par expéditions. Dans ce cas-là, la formule était donc sensée. C'était l'axe central autour duquel gravitait la disposition, en réalité. Quand les négociateurs ont rédigé cette disposition, je suis pas mal convaincu que ce n'tait pas de l'eau qu'ils avaient à l'esprit.

Dernier point avant de répondre à vos questions, j'aimerais faire quelques observations au sujet du chapitre XI de l'ALENA.

La façon dont on avait prévu que s'appliquerait le chapitre XI et la façon dont je crois qu'il s'applique, bien que je suppose qu'on n'en ait pas vraiment décidé encore, c'est... Il y a plusieurs notions ici, et je n'en aborderai que deux, les deux plus importantes, qui concernent le traitement national. Vous êtes censés accorder aux investisseurs américains et mexicains, par exemple, et à leurs investissements au Canada un traitement non moins favorable que celui que vous accordez aux investissements canadiens. Cela est censé signifier essentiellement que nous pouvons avoir la politique que nous voulons à condition de ne pas faire de discrimination en fonction de la nationalité. Vous êtes donc entièrement libres d'avoir une politique restrictive ou laxiste concernant l'exploitation d'une ressource comme l'eau. Tant qu'elle est appliquée de manière uniforme, le traitement national ne devrait pas vous causer de difficulté.

Quant aux différentes règles s'appliquant dans différentes régions du pays, par exemple l'autorisation donnée par une province d'exporter de l'eau et son interdiction par une autre, cet enjeu a fait surface vraiment dans l'affaire Popes & Talbot, lorsque certaines provinces exigeaient des droits d'exportation et d'autres, plus particulièrement les provinces atlantiques ainsi que le Manitoba et la Saskatchewan, ne le faisaient pas. Dans cette affaire, l'investisseur a soutenu que son placement en Colombie-Britannique devrait recevoir le même traitement que celui qui est accordé au Nouveau-Brunswick parce qu'il avait droit au meilleur traitement au Canada.

Le tribunal a rejeté sa plainte. Il a dit essentiellement que s'il existe une différence de traitement découlant d'une politique gouvernementale raisonnable et qu'il n'y a pas de discrimination en fonction de la nationalité, alors il n'y a pas matière à contestation. Ce n'est peut-être pas la dernière fois qu'on entendra parler de cette affaire, mais il me semble à nouveau que cela concorde avec la manière dont le traitement national au moins du chapitre XI est censé s'appliquer.

À nouveau, cela s'appliquerait à une situation où, après avoir décidé d'autoriser certaines exportations d'eau, vous vous ravisez parce que l'idée ne vous semble pas bonne. Vous n'allez plus permettre l'exportation d'eau. Tant que votre décision de retirer le permis ne vise pas à tuer une entreprise américaine qui est sur le point de demander son permis d'exportation d'eau, le chapitre XI ne devrait pas vous causer de problème.

• 0955

La dernière disposition du chapitre XI que je vais mentionner est la disposition concernant l'expropriation. On ne sait pas au juste ce que cela signifie pour l'instant, mais nul ne conteste qu'il faudrait que l'investisseur américain ou mexicain détienne un intérêt commercial et qu'il faudrait que l'on nuise considérablement à cet intérêt ou qu'on l'élimine.

Metalclad est un exemple de holding qui a été exproprié en vertu de l'article 1110. Ainsi, une société de gestion des déchets a essentiellement été autorisée par le gouvernement fédéral du Mexique à construire une installation de traitement des déchets. Elle y a investi beaucoup d'argent, puis la municipalité s'est ravisée et a décidé qu'elle n'en voulait plus sur son territoire. Résultat, après avoir dépensé l'argent, l'investisseur a été incapable de profiter de son placement.

Dans le contexte de l'eau, l'expropriation pourrait certes être une possibilité si un gouvernement promettait à une entreprise qu'elle pouvait extraire tant d'eau pendant dix ans, à raison de tant de litres par année, et ainsi de suite, puis qu'il revenait sur sa promesse. Toutefois, la question ne porte pas tant sur l'eau que sur le contrat, et on pourrait alors invoquer l'article 1110. Si l'investissement était canadien, il pourrait aussi y avoir des poursuites contre le gouvernement en cause simplement sur un point de droit contractuel, à moins que le gouvernement n'ait expressément refusé d'indemniser, ce que les gouvernements ont rarement fait au Canada.

J'ai une dernière observation à faire au sujet de Sun Belt, puis je crois que je mettrai fin à mon exposé. Dans l'affaire Sun Belt, il y a effectivement matière à contestation. Eh oui, une plainte a été déposée! Le problème, dans les poursuites, c'est qu'on ne peut pas empêcher quelqu'un de déposer une plainte, mais cela ne signifie pas pour autant que la plainte est fondée. Je crois à nouveau que l'affaire Sun Belt a plus rapport avec les obligations contractuelles en général qu'avec l'eau en particulier. C'est tout simplement une coïncidence que l'eau soit l'objet du contrat contesté.

Voilà qui met fin à mon exposé. Je répondrai maintenant avec plaisir à vos questions.

Le président: Monsieur Johnson, je vous remercie énormément. Votre exposé est très utile.

Nous avons entendu des opinions très différentes quant à l'interprétation des accords commerciaux et d'autres textes, de sorte qu'il est utile d'entendre votre groupe de témoins à ce moment-ci.

Chers collègues, nous n'avons que jusqu'à 11 heures. Je vais donc demander à tous de respecter le temps qui leur est alloué. Mais avant de passer aux questions, je constate qu'il y a quorum. J'en profite donc pour vous demander d'approuver le budget qui est devant vous. Nous demandons 38 000 $ en frais de témoins. C'est un budget standard. Il ne prévoit pas de voyages. Ce sont simplement des dépenses permettant d'accueillir des témoins pour achever diverses études, particulièrement la présente étude et celle des caucus.

M. Keyes en a fait la proposition. Y a-t-il de l'opposition?

(La motion est adoptée)

Le président: Chers collègues, je vous remercie beaucoup.

Mon deuxième point consiste à annoncer que M. Gennady Seleznev, président de la Douma russe, sera en visite au Canada durant la semaine du 28 mai. Certains d'entre vous le savent peut-être déjà. Il sera accompagné d'une importante délégation de députés de la Douma. Avec votre permission, j'aimerais prendre des dispositions pour qu'ils puissent rencontrer le comité le lundi 28 mai, entre 16 h 30 et 18 heures. Nous pourrions alors discuter avec eux des relations entre le Canada et la Russie et, avec un peu de chance, nous pourrons aussi les rencontrer dans le cadre d'une réunion mondaine. M. Seleznev, en tant que président de la Douma, est probablement le troisième homme le plus puissant en Russie. Il s'agit donc d'une délégation très importante et d'un dignitaire de marque.

Cela ne pose pas de problème? Parfait. Merci beaucoup.

Nous allons maintenant passer aux questions.

Monsieur Casson.

M. Rick Casson (Lethbridge, AC): Merci, monsieur le président, et je remercie les témoins d'avoir accepté notre invitation. Je suis d'accord avec vous que nous avons ici un groupe aux opinions très variées.

Notre étude est censée porter sur le projet de loi C-6, qui concerne les eaux limitrophes internationales. Voilà que nous nous retrouvons en plein débat sur l'eau. Je suppose qu'il s'agit là de la deuxième phase d'un plan du gouvernement en vue de régler toute cette question.

Il est toutefois intéressant d'entendre différentes opinions au sujet de différentes provinces, de vous entendre dire qu'une province peut faire quelque chose qui, selon certains d'entre vous, n'affecterait en rien les autres provinces et que le gouvernement fédéral a l'obligation de protéger nos eaux et d'en conserver la maîtrise, mais que ces eaux relèvent de la compétence provinciale.

• 1000

Je suppose qu'il faudra que j'entende l'opinion de chacun d'entre vous, car elle sera différente de celle des autres, mais une province peut-elle en fait conclure un marché en vue d'exporter de l'eau sans nuire à la situation nationale?

Laura, aimeriez-vous être la première à répondre?

Mme Laura Ritchie Dawson: Vous posez en fait deux questions. Une province peut-elle conclure un marché et une province devrait-elle conclure un marché?

Que je sache, nous ne parlons que d'eaux limitrophes. Il existe donc beaucoup de restrictions, non seulement dans le projet de loi C-6 mais dans les précédents établis par la Commission mixte internationale quant au genre de marchés qui peut être conclu au sujet des eaux limitrophes.

Je remarque avec intérêt dans les études dont je dispose que, bien que les Canadiens tiennent avec véhémence à protéger leur eau, surtout dans le bassin des Grands Lacs, nul n'est plus féroce que les États de la région des Grands Lacs. Ils sont déterminés à ce que pas une seule goutte de l'eau des Grands Lacs n'atteigne le Sud-Ouest américain. Je trouve cela fort intéressant. Donc, en termes d'eaux limitrophes, beaucoup de contraintes limitent la capacité des provinces de conclure des marchés.

Par contre, pour ce qui est des eaux intérieures, je ne sais pas. Je m'en remets aux experts juridiques.

Les provinces devraient-elles conclure de pareils marchés? Il me semble qu'elles devront le faire très bientôt. Le projet de loi C-6 me plaît, mais je ne suis pas sûre qu'il sera utile encore longtemps. Tôt ou tard, il y aura des transfuges. Hier, le journal faisait état de Terre-Neuve, et cela semble un débat très actuel.

Le président: Monsieur Dunn, pourriez-vous faire vos observations, après quoi nous reviendrons à M. Johnson.

M. Jamie Dunn: Certainement.

Le président: Monsieur Casson, je ne crois pas que votre question était forcément limitée à la portée du projet de loi à l'étude et aux eaux limitrophes. Elle faisait plus suite à l'énoncé de M. Dunn qui a dit que si une province commence à le faire, cet accord général pourrait alors fixer les normes qui s'appliqueront partout au pays.

Donc, monsieur Dunn, en réponse à ma question, vous n'êtes pas limité au simple Traité des eaux limitrophes.

M. Jamie Dunn: Je vous remercie. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, la province a la nette obligation d'accorder le meilleur traitement provincial à la société étrangère qui cherche à obtenir de l'eau. Il faut aussi se rendre à l'évidence que cet accord pancanadien pourrait bien avoir fixé une norme commune pour les cinq provinces qui l'ont signé.

La meilleure façon de décrire la situation est de dire que toutes les provinces, sauf celles de l'Ouest et le Québec qui n'ont pas signé, sont liées par une norme commune, ce qui signifie que si une province exporte de l'eau—et de toute évidence, l'accord pancanadien le permet puisqu'elle peut l'exporter n'importe où le long de la côte Est, dans le cas des provinces atlantiques, et n'oubliez pas que ce ne sont que des conjectures, parce que rien de cela n'a été tranché par un tribunal commercial—cela pourrait créer une obligation pour les autres signataires de l'accord de traiter les sociétés de la même manière. Voilà donc ce que j'avais à dire à ce sujet.

En ce qui concerne la question de savoir si une province peut ouvrir le robinet, il est plus probable qu'elle le ferait si elle a été signataire de l'accord pancanadien. Des avocats affirment que, parce qu'il s'agit d'un document fédéral et que l'ALENA a été signé par le gouvernement fédéral, l'article 105 de l'ALENA oblige le gouvernement fédéral à faire en sorte que les gouvernements infranationaux se conforment aux modalités de l'ALENA, des provinces jusqu'aux municipalités—et nous avons appris dans la décision rendue dans l'affaire Metalclad récemment que même le zonage municipal est visé par l'ALENA. Le gouvernement fédéral a la responsabilité de voir à ce que tout se fasse en conformité avec l'accord commercial.

Il importe de dire—et je vais probablement le répéter plusieurs fois aujourd'hui—que nous ne parlons pas uniquement d'un produit.

En réalité, mes collègues ici présents ont fait valoir un très bon point à un moment donné. Votre téléphone cellulaire est un produit. C'est quelque chose que vous achetez sur le marché. Toutefois, il ne vous sera pas très utile si vous n'avez pas accès aux services permettant de l'utiliser. Ces services sont visés par le chapitre XII, le droit de fournir un service sans imposer d'exigences de rendement, le droit d'investir. Et ce n'est pas seulement une question de traitement national, parce que si c'était le cas, alors l'entreprise avec laquelle était associée Sun Belt n'aurait pas reçu 300 000 $ environ d'indemnisation pour le retrait par la Colombie-Britannique de son permis de prélèvement d'eau et ne serait pas partie heureuse. Sous le régime de l'ALENA, Sun Belt peut entamer des poursuites en vue de récupérer tous les profits futurs qu'elle a perdus. C'est là la valeur de l'expropriation sous le régime de l'ALENA. Ce n'est pas un traitement égal.

L'enjeu n'est pas uniquement un traitement égal, et je dirai ceci: dans les futurs accords commerciaux, soit le GATT et la ZLEA en train d'être négociés—on projette d'interdire certaines catégories de lois, sans égard au fait qu'elles sont discriminatoires ou pas. Peu importe que vous souhaitiez traiter tout le monde sur un pied d'égalité; les gouvernements ne peuvent tout simplement pas le faire. Vous allez en entendre parler de plus en plus souvent à mesure que progressent les négociations du GATT et de la ZLEA.

• 1005

Il importe de situer l'eau en contexte et de dire que l'eau est très importante pour la santé de l'homme et pour l'environnement et qu'elle fait partie de notre identité et de notre culture nationales. Il faut conserver le droit de la gérer.

Je vais m'arrêter ici, parce que je crois avoir répondu à votre question.

Le président: Je vous remercie.

D'accord. Monsieur Johnson, puis nous devrons passer à la question suivante.

M. Jon Johnson: Jusqu'à un certain point, je suis en réalité d'accord avec M. Dunn.

Une voix: Ouille!

M. Jon Johnson: Désolé.

En ce qui concerne la situation nationale à cet égard, M. Dunn a raison, car l'article 105 de l'ALENA oblige le gouvernement fédéral à faire en sorte que les provinces s'y conforment. Cela signifie essentiellement que, si une mesure provinciale va à l'encontre du chapitre XI, le gouvernement fédéral est alors responsable d'y voir.

Un bon exemple est l'affaire Loewen aux États-Unis, où le gouvernement fédéral des États-Unis sera tenu responsable des actes des tribunaux du Mississipi. Soit dit en passant, ils sont en train d'en faire un film, mais je ne crois pas qu'ils y incluent la partie concernant le chapitre XI. Donc, dans cette mesure, je suis d'accord.

Quant au meilleur traitement dans la province, je suis aussi d'accord parce que c'est ce qui est dit.

Quant à la province, par exemple, qui a une série de règles et l'autre province qui en a une autre, toute la question revient à interpréter une expression de la disposition relative au traitement national, soit «dans des circonstances similaires». Vous êtes censés traiter les investisseurs américains ou leurs placements aussi favorablement que les placements canadiens se trouvant dans des circonstances similaires.

Prenons l'exemple d'un Terre-Neuvien qui est autorisé à prélever de l'eau et à l'Ontarien qui ne l'est pas. La question est de savoir si ces investissements se font dans des circonstances similaires. Jamie a raison d'affirmer que, dans une grande mesure, nous sommes obligés de deviner, mais la boule de cristal... L'affaire Pope a jeté un peu de lumière sur cette question. Je rappelle qu'il s'agissait d'une loi fédérale qui imposait des droits à l'exportation sur le bois d'oeuvre en provenance de certaines provinces, mais pas de toutes. La question était de savoir si l'investissement américain dans une des provinces où de pareils droits existaient rendait l'investisseur admissible au meilleur traitement, soit au traitement accordé par exemple au Nouveau-Brunswick ou en Nouvelle-Écosse où, si l'investisseur s'y était trouvé, il n'aurait pas eu à payer des droits. Le tribunal a décidé que non. S'il existe un précédent permettant un traitement différent, c'est bien celui-là!

Je ne crois pas avoir beaucoup contesté ce que vous avez dit.

Je vais simplement faire une déclaration au sujet du droit de fournir des services. L'ALENA comprend effectivement une disposition relative aux services. Elle concerne la prestation transfrontalière de services. Il existe des cas spéciaux, mais essentiellement, il s'agit d'une obligation absolue d'accorder le traitement national. Si vous autorisez la prestation du service, vous ne pouvez pas permettre à des Canadiens de le faire tout en l'interdisant aux Américains. Toutefois, si vous avez restreint la prestation du service, tous font l'objet de la même restriction. Il n'y a donc pas de problème.

Je crois avoir plus que répondu à votre question. J'ignore si j'ai réfuté tout ce que je souhaitais réfuter dans ce que vous avez dit, mais il fallait bien dire quelque chose parce que nous ne pouvons pas être d'accord sur tout.

[Français]

Le président: Madame Lalonde, s'il vous plaît.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Bonjour. Je vous remercie de vos savants exposés.

Plus je vous écoute et plus je nous écoute, plus il me semble que le projet de loi C-6 constitue un moyen indirect d'appliquer une mesure que le gouvernement du Canada ne peut pas appliquer de façon directe, c'est-à-dire l'interdiction d'exportations commerciales. J'ai retenu de l'intervention de Mme Dawson que tout ce qu'il est possible de faire, c'est d'imposer des restrictions commerciales indirectes.

• 1010

D'autre part, seul le traité de 1909 sur les eaux territoriales constitue une vraie protection contre les prélèvements massifs. Ce traité ne permet pas une utilisation qui aurait des effets négatifs d'un côté ou de l'autre de la frontière, et c'est le seul accord dont l'application dépend de la Commission mixte internationale.

Nous avons donc tout ce qu'il nous faut pour nous défendre, alors que le projet de loi C-6 ne cherche, maladroitement, qu'à empêcher les exportations d'eau qui par la suite affecteraient négativement l'ensemble des eaux au Canada.

Je trouve ce projet de loi C-6 d'autant plus faible que tout le monde est présentement préoccupé par les projets du gouvernement de Terre-Neuve. À ce sujet, les représentants, qu'ils soient d'autres provinces ou du gouvernement fédéral, ne peuvent que chercher à convaincre le premier ministre de Terre-Neuve.

Il me semble que ce projet de loi C-6 ne devrait pas exister parce qu'il ne renforce pas la position du Canada, qui est déjà protégée par le traité et la Commission mixte internationale. J'aimerais bien, d'ailleurs, qu'on m'explique pourquoi la Commission mixte, quand il est question des exportations, affirme que ce qu'il faut faire doit être fait au niveau des États et des provinces, et cela de façon coordonnée, rapide et efficace, alors que ce que le projet de loi C-6 qu'on nous propose n'a rien à voir avec cela.

J'aimerais que chacun nous fasse part de ses commentaires, parce que la question de l'effet des accords commerciaux est présente partout. Il ne me semble pas que le projet de loi C-6 constitue une protection efficace.

[Traduction]

Le président: Qui veut commencer?

Mme Laura Ritchie Dawson: Je suis obligée de souscrire à ce que vous avez dit dans plusieurs domaines. Le traité de 1909 et la Commission mixte internationale sont très efficaces pour la gestion des eaux limitrophes. Le processus choisi, c'est-à-dire le regroupement d'experts des deux pays signataires, est un excellent moyen.

La difficulté tient au fait que la commission est un peu comme la Cour suprême. Elle n'accepte que les renvois. Elle n'énonce pas de politique proactive. Elle ne fait que réagir. Il s'agit d'un organisme extrêmement prudent, et du fait même de cette qualité... C'est là une des clés de son succès. Nous n'obtenons une forte coopération internationale que lorsque nous avons besoin d'un progrès très minime.

Quelle est l'utilité du projet de loi C-6? Son point le plus fort est qu'il permet de focaliser; il sert de point de ralliement pour les Canadiens. Il donne la possibilité de réfléchir à une question et, peut-être, de créer de nouvelles structures. Pouvons-nous créer un organisme interterritorial qui serait aussi efficace que la Commission mixte internationale? Ce serait une politique symbolique, mais le processus d'élaboration comme tel aurait de l'importance et de la validité.

Le président: Quelqu'un a-t-il autre chose à ajouter?

M. Jon Johnson: J'aimerais commenter un seul aspect de ce que vous avez dit. Je n'ai pas d'opinion particulière au sujet du traité comme tel ou du lien entre ce dernier et le projet de loi C-6, mais je ne suis pas d'accord lorsque vous dites que le projet de loi C-6 est simplement un moyen indirect d'interdire des exportations. Je ne crois pas que ce soit le cas dans la mesure où il est avant tout axé sur l'exploitation de la ressource.

• 1015

Comme simple analogie, le gouvernement du Québec autorise l'abattage des arbres et leur transformation en bois d'oeuvre; il autorise l'abattage des arbres à certains emplacements et l'interdit ailleurs. Il met en réserve diverses régions parce qu'il veut des parcs, il veut en faire des espaces verts ou je ne sais trop quoi encore. Le gouvernement de la Colombie-Britannique et celui de l'Ontario font la même chose. La décision de laisser les marchands de bois faire de la coupe, non pas sur la parcelle A, B ou C, mais uniquement sur la parcelle D a beaucoup de points en commun, en réalité, avec ce que fait le projet de loi C-6. En d'autres mots, le projet de loi C-6 est axé sur l'exploitation avant tout de la ressource. Je crois que vous pouvez faire une analogie entre les deux situations.

Le président: Monsieur Dunn.

M. Jamie Dunn: J'aimerais commencer par dire que je suis certes d'accord que c'est en réalité un moyen pour prévenir indirectement les exportations massives d'eau, car c'est ce qu'ont dit à son sujet les ministres à de nombreuses reprises. C'est probablement la plus grande faiblesse de toute la stratégie. Comme le disait M. Johnson, quand vous vous retrouvez devant un tribunal commercial, celui-ci jugera peut-être que vos intentions sont bonnes, mais il se demandera ce qu'est votre objectif réel. Tout gravite autour de barrières dissimulées au commerce et, comme il l'a fait remarquer à bon droit, l'interdiction de l'exportation de quelque chose va à l'encontre de l'article 11 du GATT. Je précise toutefois que le GATT vous permet d'interdire les exportations au moyen de barrières tarifaires et de taxes et qu'il ne limite en rien cette capacité. C'est l'ALENA qui en réalité nous lie les mains sur le plan de l'exportation.

Je dirais qu'en termes de compétence, vous faites valoir un excellent point. Ce que nous avons vu sur la scène internationale, c'est cette idée de gestion intégrée des ressources en eau, principe qui est censé être appliqué à l'échelle régionale. C'est pourquoi le Conseil des Canadiens a lancé ce qu'il appelle le projet Planète bleue, parce que de plus en plus d'enjeux des eaux sont dictés par des forces internationales. Il est certes censé de laisser aux utilisateurs de la région, des eaux inexploitées, le soin de décider.

Mais en réalité—l'article 105 de l'ALENA en est un excellent exemple—les gouvernements nationaux signent des accords commerciaux qui étendent l'application des normes à la juridiction qui tente de conserver la maîtrise de ses eaux.

Nous avons toujours eu pour position que, si l'accord commercial concerne l'eau, ce n'est pas un bon accord commercial. Ce n'est pas que le commerce soit mauvais comme tel. C'est que l'eau n'est pas une marchandise qu'on peut découper en parts. L'Afrique du Sud a débattu de cette question à la rédaction de sa nouvelle constitution et y a inscrit l'eau comme un droit de la personne. Comment le faire tout en reconnaissant qu'elle est utilisée à des fins commerciales? Donc, on la divise dans la Constitution. L'eau est un droit de la personne, elle est essentielle à l'environnement et, bien sûr, c'est aussi un bien commercial. Nous allons donc accorder à tout cela un traitement complètement différent. Pourtant, nous avons un accord commercial qui précise ce qu'est l'eau.

En fait, je m'inscris en faux contre ce qu'a dit M. Johnson, selon lequel tout était une question simplement d'accès, parce que le Traité sur les eaux limitrophes porte justement sur cette question d'accès, sur la façon d'avoir accès à l'eau, surtout à des fins commerciales. Regardez la région autour des Grands Lacs. C'est le coeur industriel des deux pays. Donc, le traité porte en réalité sur l'eau en tant que marchandise. Il s'agit en réalité d'obtenir accès à l'alimentation en eau, et il s'agit en réalité de faire des investissements qui utilisent l'eau.

Je vais mentionner brièvement la rivière Tay. Certains affirment que la société a investi un demi-milliard de dollars dans l'usine et que la dernière chose qu'elle a demandé, c'était un permis d'exportation d'eau. Si le permis lui est refusé, elle peut poursuivre en vue de récupérer son investissement, même si rien dans le contrat n'établissait un lien entre l'investissement et le permis.

Je vais m'arrêter ici. J'estime que le projet de loi a de grandes faiblesses et qu'il ouvre tout grand la porte à des problèmes commerciaux parce qu'il cherche un moyen détourné de faire cesser les exportations.

[Français]

Le président: Vous avez trente secondes.

Mme Francine Lalonde: La faiblesse principale est que la capacité du gouvernement fédéral est limitée alors que pour que cela constitue une mesure environnementale, il faudrait tenir compte de l'ensemble de la problématique de l'eau, y compris celle des eaux souterraines. Dans ce cas-ci, il n'est question que des eaux de surface et non pas des eaux souterraines. Je reviendrai sur ce sujet au deuxième tour.

Le président: Si je comprends bien, vous êtes en faveur de l'élargissement des compétences du gouvernement fédéral.

Mme Francine Lalonde: Monsieur le président, vous comprenez vite et bien.

Le président: Nous sommes là pour cela.

[Traduction]

Nous allons maintenant céder la parole à M. Paradis, puis nous entamerons un autre tour de table. Manifestement, nous en aurons le temps. Il faut quitter la salle à 11 heures. Je vais donc vous demander de respecter les 10 minutes allouées.

• 1020

[Français]

M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Merci, monsieur le président. Je voudrais aussi remercier l'ensemble des intervenants de leur présentation.

Mes remarques vont porter surtout sur la présentation de M. Dunn du Conseil des Canadiens. Je veux d'abord mentionner que lorsqu'on parle de conserver et protéger notre eau, nous sommes tous sur la même longueur d'ondes.

Je veux aussi mentionner, monsieur le président, qu'on nous a remis un texte en français qui n'a pas d'équivalent anglais. Je vais citer des extraits de ce résumé de la situation, que nous a remis le Conseil des Canadiens. Je reviens à ce que je disais plus tôt. Voici un extrait du dépliant du Council of Canadians,

[Traduction]

«L'exportation de l'eau est-elle une bonne chose? Non.»

[Français]

Cela résume la position qu'il faut protéger notre eau. On peut lire aussi:

[Traduction]

«Notre eau n'est pas à vendre.»

[Français]

De même, Maud Barlow mentionne:

[Traduction]

«Le commerce de l'eau est mal, sur le plan environnemental, économique et moral.»

[Français]

Après avoir énoncé quelques principes globaux, examinons maintenant certains détails du projet de loi C-6, tel que perçu. Je fais une distinction, monsieur le président, entre ce qu'est réellement le projet de loi C-6 et ce qu'il est selon le Conseil des Canadiens.

Revenons à la feuille dont le texte est en français et différent. On y peut lire tout d'abord que le projet de loi C-6 comprend un système de permis pour l'exportation de l'eau. Cela est faux. C'est exactement le contraire. Il ne comporte pas de système de permis. Je pense qu'il faut lire attentivement le projet de loi C-6. Il ne comporte pas de système de permis pour l'exportation d'eau.

Le projet de loi, par contre, permet un système de licences pour des barrages pour de gros travaux entre le Canada et les États-Unis. Ce système existait auparavant et il est maintenant régi par un système de licences. Nulle part dans le projet de loi C-6 on ne prévoit de licences ou de permis pour l'exportation d'eau.

Je réponds au premier point que vous avez soulevé. On vient de me remettre la copie anglaise.

[Traduction]

«Crée un système de permis autorisant les exportations d'eau.»

[Français]

Cela est faux. Cela n'est pas inclus dans le projet de loi C-6.

On prétend ensuite que le projet de loi C-6 empiète sur les juridictions provinciales. Cela aussi est faux. Cela n'est pas exact. Comme il a été mentionné au cours de la discussion préalable, les juridictions sont complémentaires. Il doit exister une entente entre le gouvernement fédéral, qui a sa juridiction, et les gouvernements provinciaux, qui ont aussi leur juridiction. Cette complémentarité est prévue par le projet de loi C-6.

Le Conseil des Canadiens estime ensuite que le projet de loi C-6 ne s'applique qu'aux eaux limitrophes. C'est vrai. Le projet de loi ne touche que les eaux limitrophes, parce que là se limite la juridiction du gouvernement fédéral. Le projet de loi C-6 se base sur le concept des bassins d'eau. Il dit qu'il ne faut pas prélever d'eau massivement. Il n'est pas question d'exporter. Il est question d'interdire de prélever massivement de l'eau des bassins.

Étant une législation de nature nationale, le projet de loi C-6 ne modifie ni n'influence le Traité des eaux limitrophes, ni aucun autre traité international. Ce fait n'est peut-être pas pertinent à notre débat.

La dernière affirmation du Conseil des Canadiens est que l'ALENA, et il en sera bientôt de même pour la ZLEA, a préséance sur le Traité des eaux limitrophes internationales. Le projet de loi C-6 ne change en rien l'engagement du Canada à l'échelle internationale en ce qui a trait à ses eaux. Cette affirmation n'est pas exacte.

Il est important de comprendre, monsieur le président, que l'exportation n'est pas visée. Le but de la législation est de défendre le principe qu'on n'a pas le droit de prélever, de façon massive, les eaux de nos bassins canadiens. Pour mieux comprendre, remplaçons le mot «eaux» par «arbres». À l'heure actuelle, la Colombie-Britannique exporte des arbres. Est-ce que cela implique que Terre-Neuve doit aussi couper et exporter des arbres? Absolument pas. Il s'agit d'une ressource naturelle qui appartient à la province, et c'est pourquoi il faut situer le débat au niveau approprié. Le projet de loi affirme que l'eau, dans son état naturel, n'est ni un bien ni une commodité, mais une ressource environnementale. Et on veut empêcher, justement, que ça devienne une commodité, que ça devienne commercial. On ne veut pas que ça se rende là. On dit qu'on doit conserver cette eau, cette ressource environnementale pour nos fins à nous.

• 1025

Ma question porte sur l'opinion juridique qui nous a été remise et qui est dans le dossier de la West Coast Environmental Law: A Legal Opinion Concerning Water Export Controls and Canadian Obligations Under NAFTA and the WTO.

Premièrement, on dit que c'est un résumé de la version intégrale d'une opinion juridique préparée pour le Conseil des Canadiens. Est-ce que le Conseil des Canadiens consentirait à nous fournir l'opinion juridique qu'il a reçue relativement à ça? On parle d'un résumé de cinq ou six pages. On dit que c'est un résumé d'une opinion juridique que vous avez reçue.

Deuxièmement, monsieur Dunn, au troisième paragraphe, on mentionne ceci:

[Traduction]

    Par exemple, en vertu du droit américain et international, l'eau dans son état naturel est considérée comme étant un bien commercial.

[Français]

J'aimerais avoir plus d'explications à cet égard.

Dans le paragraphe suivant, on dit:

[Traduction]

    De plus, en attirant l'attention sur l'eau en tant que produit négociable, le gouvernement fédéral ignore le fait qu'en vertu de l'ALENA, l'eau est à la fois un investissement et un service même si elle n'est pas considérée comme étant un «produit».

[Français]

C'est ce que vous dites dans le deuxième, alors que dans le premier paragraphe, vous dites que, selon le droit international et le droit américain, c'est un bien. J'aimerais avoir les commentaires de M. Dunn. Premièrement, est-ce qu'il peut produire l'opinion juridique et, deuxièmement, nous donner ses commentaires relativement à ces deux points?

[Traduction]

Le président: J'ai cru entendre M. Dunn dire dans son exposé qu'on pouvait prendre connaissance du document sur votre site Web. Ai-je bien entendu?

M. Jamie Dunn: Je fournirai avec plaisir le document intégral à tous les membres du comité.

Le président: Nous vous en serions reconnaissants.

M. Jamie Dunn: Il est effectivement affiché sur notre site Web. À des fins comme celles de la présente réunion, nous distribuons la version abrégée de 14 pages plutôt que celle de 29.

Mais il n'y a pas de problème. Le document est accessible au public depuis deux ans déjà. Nous vous le fournirons volontiers. Je vous remercie d'avoir posé la question.

La deuxième question que vous avez posée concernait, je crois, le fait que l'eau est considérée comme un bien commercial dans le droit américain. Vous avez entièrement raison. Les gouverneurs des États entourant les Grands Lacs ont produit une opinion juridique sur cette question au printemps de 1999. On peut en obtenir copie en en faisant la demande au Great Lakes Protection Fund.

James Lockhead, principal négociateur de l'État du Colorado dans les dossiers inter-États relatifs à l'eau, est le membre américain de l'équipe qui a rédigé l'opinion. En réalité, c'est lui qui dirigeait l'équipe. Il cite plusieurs causes constitutionnelles où l'eau est toujours considérée comme étant un bien commercial, particulièrement lorsqu'il s'agit d'en limiter l'exportation.

C'est important parce que, lorsque le Canada a fait en 1993 sa déclaration selon laquelle l'eau, à l'état naturel, n'est pas un bien commercial, Mickey Kantor, alors chef du bureau des négociations commerciales, a déclaré tout d'abord que la déclaration canadienne ne changeait en rien l'ALENA, puis que, dès que l'eau deviendrait un bien commercial, elle tomberait immédiatement sous le coup de l'accord.

En langage diplomatique et conscient après coup de la réalité juridique de la situation américaine, on peut raisonnablement affirmer que ce que disait M. Kantor, c'était qu'aux yeux des Américains, l'eau est toujours un bien commercial.

Donc, la question de savoir si elle est visée ou pas par l'ALENA dans son état naturel est sans portée pratique aux yeux des Américains—et ce sont eux qui déposeraient des plaintes contre nous et qui négocient à la table avec nous—parce qu'en vertu de leur loi, l'eau est toujours un bien commercial. L'ALENA—et j'insiste là-dessus—ne reconnaît pas explicitement une différence entre l'eau à l'état naturel et l'eau commerciale.

Autre point que vous avez soulevé, vous semblez croire qu'il y a une contradiction dans notre opinion juridique. Comme je l'ai affirmé plusieurs fois, nous nous efforçons de cerner les différentes obligations que nous impose l'ALENA. Ainsi, il impose des obligations à l'égard des biens—de l'eau—soit l'obligation de fournir de l'eau en tant que service et l'obligation d'être capable d'investir dans l'eau.

• 1030

J'aimerais vous donner un exemple de ce que vous allez lire dans la version intégrale de l'opinion juridique—je ne suis pas sûr si la version abrégée en fait état. Il est question... Rappelez-vous que l'avocat que nous avons engagé pour rédiger cette opinion a répété de nombreuses fois qu'il avait été très prudent parce qu'il s'agit là d'un domaine vierge où tous essaient de voir ce que nous réserve l'avenir, comme l'a admis mon ami tout à l'heure. Il faut donc s'en remettre à des causes analogues. Toutefois, voici ce qu'il a dit: parce que la Ville d'Ottawa alimente sa population en eau potable, si ce service était privatisé, l'entreprise qui viendrait s'installer à Ottawa s'attendrait à avoir accès à l'eau de la rivière des Outaouais pour alimenter en eau potable une ville américaine. Par conséquent, elle serait autorisée à faire des exportations en s'appuyant sur les dispositions relatives aux services de l'ALENA.

Voilà ce que cherche à définir ceux que les dispositions de l'ALENA inquiètent ou ceux qui essaient de voir ce que sont nos véritables obligations. C'est pourquoi il n'y a pas vraiment de contradiction; c'est une explication de la façon dont les différentes obligations s'appliquent séparément.

Enfin,...

[Français]

M. Denis Paradis: Permettez-moi d'ouvrir une parenthèse, monsieur Dunn. J'ai dit que le projet de loi C-6 ne créait pas, comme vous le mentionnez, un système de permis pour l'exportation d'eau. À partir du moment où vous affirmez que ça crée un système de permis pour l'exportation d'eau, eh bien, vous continuez dans cette même veine pour expliquer l'ALENA, etc. Vous parlez d'exportation, mais le projet de loi C-6 ne crée pas de système de permis pour l'exportation d'eau. Quels sont vos commentaires là-dessus?

[Traduction]

M. Jamie Dunn: Je crois que l'article du projet de loi que vous avez mentionné fait aussi état de «détournements».

Le détournement des cours d'eau est un des moyens, si vous regardez ce qui se passe dans le projet du canal Grand toujours en cours d'après de nombreux environnementalistes... Un député, Dennis Mills, a publié une brochure—je crois que c'était en 1991 ou en 1992—dans laquelle il disait qu'il faudrait examiner le projet de canal Grand comme un cas où, à nouveau, une licence pourrait être délivrée en vertu de cette loi.

J'aimerais revenir à une autre des questions que vous avez soulevées, celle des arbres. Pourquoi pouvons-nous protéger nos arbres, mais sommes-nous incapables de protéger nos eaux? J'ai déjà entendu cela de nombreuses fois, en ce qui concerne les arbres et le poisson essentiellement. Durant la période allant de 1994, année d'entrée en vigueur de l'ALENA, à 1996, nous avons eu la possibilité d'exempter certains secteurs de l'économie. Ainsi, le poisson et le bois d'oeuvre ont été exemptés de l'ALENA. Il n'y avait pas moyen pour le gouvernement des États-Unis, ou pour le gouvernement du Mexique tant qu'à y être, de contester la façon dont nous gérons le bois d'oeuvre et le poisson dans le cadre de l'exemption. Toutefois, cette exemption est en train d'être graduellement abolie, car il faut aussi abolir graduellement les exemptions. Nous ignorons donc quel sort attend notre bois d'oeuvre et notre poisson quand l'ALENA sera pleinement appliqué.

Je crois qu'il faut être plus clair, parce que les gens disent avec raison que l'ALENA n'a pas affecté notre bois et notre poisson, mais il faut comprendre que la mise en oeuvre de l'ALENA n'est pas encore complète.

[Français]

M. Denis Paradis: J'aimerais apporter une précision, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Vous avez nettement dépassé le temps alloué. Vous avez utilisé 13 minutes. Le problème était dû en partie à l'introduction de la question qui a été un peu longue. Vous aurez peut-être une autre chance, plus tard.

Monsieur Casson.

M. Rick Casson: Merci, monsieur le président.

Dans le même ordre d'idées, j'aimerais demander à M. Johnson de commenter peut-être certaines des observations que vient de faire M. Dunn.

M. Jon Johnson: J'ai quelques commentaires. Je n'ai pas lu l'opinion, mais je peux deviner ce qu'elle dit.

Il est amusant d'entendre des expressions comme «langage diplomatique» utilisées en rapport avec M. Kantor. Cela ne cadre pas du tout avec le souvenir que j'ai gardé de lui.

Quant à savoir si l'eau est un bien commercial à l'état naturel, ce que le droit américain dit ou ne dit pas est probablement sans rapport. Je crois que le mot essentiel est «produit».

L'ALENA définit un bien comme étant un produit intérieur au sens du GATT, et le GATT ne définit pas ce qu'est un «produit»; il se contente simplement d'utiliser le mot. En vertu des règles établies d'interprétation de traité, les mots sont employés dans leur acception courante, de sorte qu'un produit est quelque chose qui est produit.

Je ne vois pas comment on peut sérieusement en arriver à croire que l'eau ou quoi que ce soit à l'état naturel est un produit. La réponse simple est donc que les dispositions de l'ALENA relatives aux biens ne s'appliquent tout simplement pas à des articles qui ne sont pas des produits.

• 1035

J'ignore ce qui s'est dit au sujet de l'eau en tant que service. L'eau n'est pas un service. L'eau, c'est de l'eau. L'alimentation en eau d'une municipalité, par exemple, est peut-être un service ou l'alimentation d'une industrie par une municipalité à quelque fin que ce soit—d'accord, c'est un service.

Il me semble que si vous privatisez le service et que sa prestation est limitée à un secteur particulier ou à un genre d'entreprise, le seul rapport que pourraient avoir les dispositions de l'ALENA avec le service serait que vous ne pourriez pas faire de discrimination en fonction de la nationalité du fournisseur. Autrement, elles seraient absolument sans rapport.

Il s'agit en réalité d'une question d'investissement plutôt que d'une question de service. Cependant, c'est dans le même ordre d'idées. Je ne suis donc pas d'accord.

Dans une observation qu'il a faite tout à l'heure, M. Dunn a mentionné l'interdiction de droits à l'exportation en vertu de l'ALENA comme étant la renonciation à une des exceptions prévues à l'article XI. C'est vrai. L'ALENA interdit effectivement les droits à l'exportation. Toutefois, le Canada ne s'en est jamais beaucoup servi. Ce n'est que très rarement que nous avons imposé des droits à l'exportation. Nous avons interdit les exportations de centaines de produits au fil des ans. La Loi sur les licences d'exportation et d'importation interdit l'exportation de toute une foule de produits.

Cependant, nous avons toujours eu recours à cet instrument; nous n'avons jamais utilisé les droits à l'exportation pour prévenir les exportations. Nous nous en servons habituellement, bien que très rarement, pour préserver des choses comme l'intégrité de systèmes de double prix—par exemple, le régime de double prix du pétrole dans les années 70. Il y a aussi eu ensuite d'autres anomalies, comme les droits à l'exportation du bois d'oeuvre exigés à la suite du règlement d'une affaire de droits compensateurs durant les années 80.

Le seul autre exemple, très ancien, était des droits exigés à l'exportation d'électricité, imposés soit par le gouvernement fédéral soit par le gouvernement de l'Ontario. Cette affaire remonte loin, et nous avons renoncé à quelque chose que nous n'avions jamais utilisé. Mais je m'écarte du sujet.

Le président: Je vous remercie beaucoup. Maintenant que la période de questions est terminée, je crois que je vais raccourcir la durée des interventions.

Je vais céder la parole à Mme Marleau. Nous pourrions avoir une autre chance de poser des questions par après. Ensuite, ce sera le tour de Mme Lalonde.

Madame Marleau.

Mme Diane Marleau (Sudbury, Lib.): Certains commentaires que j'ai entendus aujourd'hui me préoccupent beaucoup. Je me demande—ma question s'adresse à M. Dunn—pourquoi il faudrait croire tout ce que vous dites, car j'ai parfois l'impression que vous exagérez beaucoup.

Je vous donne un exemple: dans votre fiche d'information intitulée «Number One Trade», lorsqu'il est question de l'interdiction des MMT, vous concluez que le gouvernement du Canada a décidé que l'essence additionnée de MMT était nocive pour la santé des Canadiens.

L'interdiction des MMT ne s'appuyait pas sur des données prouvant qu'ils étaient nocifs pour la santé. Ce n'est pas pour cette raison qu'on les a interdits. Cette affirmation est donc fausse. À mon avis, il faudrait d'abord corriger certains de vos textes, si vous tenez vraiment à ce que nous accordions foi à vos affirmations.

Voici ce que j'aimerais demander au groupe de témoins experts. Nous savons que cette mesure législative concerne les eaux limitrophes. Comment, par conséquent, pourrions-nous l'améliorer? Y a-t-il certains amendements que nous devrions envisager? C'est ma question, soit de savoir si vous avez des suggestions. Dans les limites de temps qui nous sont imposées, nous nous efforçons d'améliorer le plus possible la mesure législative.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.): Voulez-vous être le premier ou préférez-vous être le dernier à prendre la parole, cette fois?

M. Jamie Dunn: Sauf votre respect, dans le cas des MMT, je ne suis pas d'accord avec ce que vous avez dit. Notre preuve qui, je crois, fait partie des archives publiques de l'époque, montre qu'on était préoccupé par la présence de manganèse en faible concentration et par son effet sur la santé.

Mme Diane Marleau: Monsieur, j'étais à l'époque ministre de la Santé. J'ai été incapable de donner aux négociateurs la réponse qu'ils souhaitaient, de sorte que je sais pertinemment que ce n'est pas là la raison pour laquelle les MMT ont été interdits.

M. Jamie Dunn: Oui, c'est en réalité la raison pour laquelle nous avons perdu. Avec tout le respect que je vous dois, cela faisait partie des dossiers publics.

Mme Diane Marleau: Ce n'est pas la raison pour laquelle ils ont été interdits.

• 1040

M. Jamie Dunn: Quant à ce qui est d'exagérer, je dirai simplement que nous avons cherché à frapper un juste équilibre entre la documentation, notre documentation générale, que tous les organismes et le gouvernement publient, et la seule opinion juridique accessible au public au Canada.

Nous n'avons pas les ressources du gouvernement du Canada. Nous n'avons pas les ressources du Conseil canadien des chefs d'entreprises, ni les ressources de nombreux organismes qui appuient les positions du gouvernement—avec lesquelles, sauf votre respect, nous ne sommes pas d'accord—et les partisans des exportations massives d'eau. Certains de ces partisans sont de grandes entreprises—je pourrais par exemple nommer Enron Corporation.

Nous avons été les seuls à rendre accessible au public une opinion juridique en la matière. Bien sûr, les opinions juridiques sont ce qu'elles sont: un débat entre avocats. Mais nous avons fait un effort légitime en vue d'informer nos membres et de documenter nos affirmations au moyen d'études théoriques valables et défendables.

Quant à ce qui peut être sauvé, je suis en faveur de la pleine application de la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales. Je suis en faveur de la CMI qui a fort bonne réputation. Avant de m'engager dans ce dossier, je connaissais très peu ce groupe, mais tous les gens avec lesquels nous travaillons—y compris l'Association canadienne du droit de l'environnement et Great Lakes United—ont dit que la CMI avait une excellente réputation pour avoir eu le courage de faire reposer sur des faits scientifiques les décisions politiques. On ne me l'a pas décrite comme étant un organisme conservateur.

Mme Diane Marleau: Êtes-vous en train de dire que le projet de loi à l'étude est bon?

M. Jamie Dunn: Je suis en train de dire que s'il n'y avait que la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales, ce serait une excellente façon de faire. Or, ce n'est pas le cas. Nous traitons des obligations qu'a contractées le gouvernement fédéral—et elles influent sur la question de savoir si c'est un moyen efficace d'aller de l'avant dans ce dossier. Voici ce que nous essayons de dire: interdisez les exportations massives d'eau de sorte à ne pas encourager la création d'autres obligations et de ne pas nous exposer au genre de poursuites donc nous faisons l'objet en ce moment.

Je vous remercie.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Madame Dawson, avez-vous quelque chose à ajouter?

Mme Laura Ritchie Dawson: Je serai très brève. Je sais que j'ai dit qu'il s'agissait d'un projet de loi symbolique, mais je crois aussi que c'est ce que vous pouviez faire de mieux dans les circonstances.

Je suis certaine que vous avez bénéficié de meilleurs conseils juridiques que moi sur vos options politiques. Je ne pense pas que vous pouvez aller plus loin à ce stade-ci sur le plan législatif. Je crois par contre que vous disposez d'une excellente occasion de créer des institutions et des capacités à l'échelle du Canada.

Je recommanderais notamment de dresser un inventaire des ressources d'eau douce du Canada, qui se trouvent tant sous-terre que dans les nappes d'eau, et d'examiner les diverses utilisations de l'eau. Je ne suis pas certaine que de l'eau douce qui coule d'une falaise jusque dans l'océan et devient immédiatement salée... peut-être peut-on l'assainir ou l'utiliser à des fins commerciales. Peut-être que cette eau devrait être traitée différemment. Nous espérons pouvoir acquérir les capacités institutionnelles nous permettant de faire ces choix et ces évaluations.

J'aimerais qu'il existe un meilleur mécanisme régissant la coopération fédérale-provinciale. Je suis extrêmement encouragée par le fait que le ministre des Affaires étrangères et du Commerce international ait centralisé les pouvoirs chargés de cette question. Ce n'est pas toujours une bonne idée de procéder de la sorte, mais dans ce cas-ci, je crois que nous sommes en présence d'une crise et que prendre le taureau par les cornes s'avère une très bonne idée.

Enfin, je recommanderais une ferme gestion de l'eau, des politiques relatives à la prévention de la pollution et des façons pour nous d'intégrer notre approche en matière d'eau à tous les niveaux: l'offre, la demande, les réseaux d'égout et l'eau potable. Cela ne peut s'avérer qu'une bonne chose. Ensuite, peut-être y aura-t-il place à légiférer davantage.

Le président: Pouvez-vous répondre très brièvement? Nous avons presque terminé.

M. Jon Johnson: Oui, je serai bref.

J'ai conseillé le gouvernement fédéral sur le MMT, et mon souvenir correspond tout à fait au vôtre. Par contre, nous n'avons pas perdu; nous en sommes venus à une entente. C'est différent.

Le président: Madame Lalonde.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Merci.

Monsieur Johnson, vous présentez le projet de loi C-6 comme une mesure de gestion de l'eau, alors qu'en réalité, la seule chose que le projet de loi C-6 dit, c'est que nul ne peut l'utiliser sans un permis. Ce qui est interdit, c'est de transférer l'eau à l'extérieur du bassin. Quand je dis qu'une protection environnementale plus complète que celle-là serait souhaitable pour vraiment exprimer la préoccupation environnementale, il me semble que c'est évident.

• 1045

Je voudrais revenir à deux autres aspects que nos témoins ont soulignés ce matin. Mme Dawson disait qu'il fallait éliminer tous les chevauchements. Le projet de loi C-6 ne nous assure pas de ça. M. Dunn posait une question et je vais la reprendre: qu'est-ce qui advient du pouvoir de l'Ontario de donner des permis? Quant à moi, ce pouvoir n'est pas soustrait à l'Ontario, mais le gouvernement fédéral, lui, va devoir se donner les techniciens et l'infrastructure nécessaires pour donner des permis, alors que l'Ontario, suivant son propre plan de gestion, va donner aussi des permis. Encore une fois, je ne vois pas ce que ce projet de loi va faire pour aider de quelque façon la gestion de l'eau. J'ai parlé de l'Ontario, monsieur le président; j'aurais pu aussi bien parler du Québec.

D'autre part, Mme Dawson disait qu'il fallait restaurer la capacité du gouvernement d'intervenir, car nous avons perdu notre capacité technique. Il me semble que la capacité technique existe en ce moment, et elle existe dans les provinces. Est-il utile de bâtir une capacité technique au niveau fédéral et à quel prix? Est-ce qu'il est certain qu'on retirerait des effets positifs en faisant cela plutôt qu'en cherchant à travailler avec les provinces qui, elles, peuvent se donner une vision et une politique générales de l'eau, comme celle dont on est sur le point d'accoucher au Québec?

J'ai beaucoup de questions par rapport à ça. Je répète cette question: s'équiper pour donner des permis, qu'est-ce que cela suppose en termes de nouveaux fonctionnaires, de nouvelles compétences et d'argent? C'est plus qu'un avis; c'est un permis.

[Traduction]

Le président: M. Johnson en premier, et ensuite Mme Dawson.

M. Jon Johnson: Je vais simplement commenter la toute première partie de votre question. Je ne parlais pas vraiment du mérite de cette mesure en tant qu'outil de gestion de l'eau. Je répondais aux commentaires que vous aviez formulés plus tôt, à savoir qu'il s'agit d'une restriction déguisée des exportations. À mon avis, un comité de l'OMC ou de l'ALENA ne considérerait pas cette mesure comme une restriction déguisée des exportations. Il n'existe aucun cas soumis à l'OMC, à ma connaissance,—je n'ai pas lu tous les cas qu'elle a traités, mais j'en ai lus beaucoup—qui concerne, même très peu, des mesures comme celles-ci.

Je vais laisser le soin à mes collègues de répondre à la seconde partie de votre question.

Mme Laura Ritchie Dawson: Je ne sais pas quel niveau de bureaucratie serait nécessaire pour appuyer les nouvelles procédures d'attribution de licences. Pour ce qui est de la capacité technique, je crois qu'il y a suffisamment de défis à relever. Les gouvernements fédéral et provincial auront tous les deux beaucoup de pain sur la planche en ce qui a trait à la capacité de recherche et d'évaluation requise.

Ce qui me préoccupe, c'est d'entreprendre un projet de grande envergure, comme le projet du canal GRAND. J'ai discuté avec des fonctionnaires du ministère qui m'ont avoué qu'ils ne possédaient tout simplement pas la capacité technique nécessaire pour pouvoir effectuer une évaluation convenable des impacts de ce projet sur l'environnement. Si la capacité n'existe pas au sein du gouvernement fédéral, pouvons-nous l'obtenir par l'entremise d'un effort coordonné et cohérent au sein des fonctionnaires provinciaux?

Le président: Avant de redonner la parole à M. Paradis, qui a une autre question, permettez-moi d'en poser une.

Monsieur Dunn, vous êtes celui ici qui s'oppose au projet de loi, si je puis m'exprimer ainsi, bien que je comprenne que vous ne vous opposez pas à la gestion de l'eau. La question est de savoir si le projet de loi constitue la bonne technique, et c'est ce que nous essayons de savoir nous aussi.

• 1050

Vous opposez-vous fondamentalement à l'idée que le gouvernement fédéral devrait faire de son mieux pour régler la question dans le cadre de ces domaines de compétence—dans ce cas-ci, les eaux transfrontalières relèvent clairement de notre compétence, conformément au traité et pour d'autres raisons—et qu'il travaille ensuite sur le plan politique pour faire en sorte que les provinces fassent leur part?

Vous dites que cela empiète sur les domaines de compétence des provinces, et cela me pose un problème. Si je comprends bien, vous affirmez que cette mesure détruira totalement la compétence des provinces, car nous savons tous que les eaux leur appartiennent. Vous voulez par contre qu'on ne laisse pas les provinces faire ce qu'elles veulent avec leurs eaux. Ainsi, d'un côté, vous vous opposez au projet de loi en raison d'un léger empiétement, qui vise à remplacer une licence par ce qui était une lettre de permission—il ne s'agit donc que d'un petit changement, d'après ce qu'on nous a dit l'autre jour—et d'un autre côté, vous affirmez que les eaux n'appartiennent pas aux provinces et que nous n'allons pas leur laisser faire ce qu'elles veulent. Cela ne vous pose pas de problème, mais un léger empiétement sur les domaines de compétence vous en pose un. Je ne comprends pas vraiment cette contradiction.

On nous a dit que le projet de loi ne constitue qu'une seule pièce d'un casse-tête, d'un grand casse-tête. Les compétences des provinces, le droit international et la gestion des eaux en font tous partie. Vous semblez en savoir beaucoup à ce sujet. À l'époque à laquelle j'enseignais le droit international, nous avons largement étudié cette question; nous nous sommes notamment penchés sur le delta du Mekong. La gestion internationale des eaux comporte de grands enjeux. Tous les morceaux du casse-tête doivent s'imbriquer. Cette mesure n'est qu'un petit morceau.

Vous opposez-vous véritablement à ce que le gouvernement aille de l'avant au moins dans les domaines où il peut intervenir et qu'il se concentre sur les autres parties plus tard? C'est là que votre point de vue me pose un problème sur le plan philosophique.

M. Jamie Dunn: Je vais répondre très brièvement, car la réponse est simple. La raison pour laquelle le projet de loi C-6 nous pose un problème et la raison pour laquelle j'ai soulevé la question des domaines de compétence sont les suivantes. Le gouvernement fédéral affirme qu'il a les mains liées, en raison des compétences des provinces. Alors comment peut-il délivrer des licences, comme il l'a fait pour le groupe Nova, pour un projet qui avait été autorisé puis interdit par l'Ontario? Selon moi, c'est dire que d'un côté il existe un problème avec les domaines de compétence des provinces qui nous lie les mains et que d'un autre côté le gouvernement fédéral empiète sur ceux-ci.

J'ai demandé si la difficulté était que le gouvernement fédéral devait choisir quelles compétences provinciales lui posent un problème. Selon le Conseil des Canadiens, les exportations et les importations, à savoir le commerce, relèvent de la compétence du gouvernement fédéral. Il signe des accords commerciaux.

Nous demandons d'interdire l'exportation d'eau. Il s'agit d'une question commerciale, alors nous pensons qu'il appartient entièrement au gouvernement fédéral de défendre l'exportation d'eau. Ce que les provinces font avec l'eau qui se trouve sur leur territoire les regarde. Mais nous demandons que l'exportation d'eau en grande quantité soit proscrite. Nous avons signé des accords commerciaux qui prévoient des obligations claires et une indemnisation financière potentiellement élevée à mesure que les prix mondiaux de l'eau augmentent. Nous ne voulons pas que les Canadiens soient confrontés à une plus grande responsabilité.

Des gens, y compris les gouvernements provinciaux, affirment que cela leur importe peu que le gouvernement fédéral puisse être poursuivi pour la somme de 10,5 milliards de dollars américains. Ce n'est pas leur problème. C'est celui des Canadiens. Ils sont peut-être des Ontariens, mais ils sont aussi des Canadiens, et ils financent les deux gouvernements.

Ce n'est donc pas une contradiction pour nous. Nous disons simplement que si vous examinez la compétence des provinces et décidez vraisemblablement de l'abolir ou de modifier légèrement la zone grise, alors pourquoi ne pas agir définitivement dans le cadre du rôle que vous avez à jouer? Il est vrai que cela contredit les accords commerciaux, mais nous pensons que ce n'aurait pas dû être le cas au départ. C'est votre rôle et vous devez agir en conséquence.

Le président: Vous avez aussi parlé de l'accord pancanadien, sur lequel le comité ne s'est pas beaucoup penché, largement parce que, comme vous le savez, le projet de loi C-6 porte exclusivement sur les eaux transfrontalières. Bien sûr, un grand nombre des discussions que nous tenons à propos du projet de loi ne concernent pas du tout cette mesure législative. Elles portent sur ce que Terre-Neuve compte faire avec ses eaux, ce qui n'a rien à voir avec les eaux transfrontalières. Nous parlons donc constamment d'autres problèmes afin d'essayer de définir et de comprendre la nature du projet de loi. Il s'agit d'une question qui porte à confusion et qui est difficile à comprendre pour le comité et peut-être pour le public, à moins qu'il ne comprenne, comme je l'a dit, qu'il s'agit d'un morceau du casse-tête et non du casse-tête en entier.

Pour revenir à la situation globale, on nous a dit que l'eau est un bien provincial et que les provinces peuvent la vendre dans certaines circonstances. Tant qu'elles ne le font pas d'une façon discriminatoire, elles peuvent vendre certaines ressources d'eau mais pas d'autres, de la même façon que le droit constitutionnel américain stipule clairement que les États qui possèdent des ressources d'eau peuvent en vendre certaines mais pas d'autres. Même en vertu de l'article sur le commerce, les États sont libres de gérer leurs ressources. Cette disposition existe dans tous les systèmes.

• 1055

Pourquoi pensez-vous que, si Terre-Neuve, par exemple, accordait une licence pour un lac donné, que tout à coup toutes les ressources d'eau du Canada seraient à vendre? Vous semblez établir un lien tellement direct, qu'il nous est difficile de comprendre.

M. Jamie Dunn: Nous en apprenons davantage sur la façon dont les accords commerciaux sont appliqués à mesure que les décisions sont rendues et nous nous habituons à ce nouvel environnement qu'est le commerce international qui est régi par des accords commerciaux, une idéologie et une théorie économique.

Je vais revenir au sujet de la rivière Tay, qui est située juste à l'extérieur d'Ottawa. Chaque entreprise canadienne qui voudrait prendre de l'eau de cette rivière devrait se soumettre à une évaluation environnementale, en fonction de laquelle elle serait jugée, et elle pourrait apprendre de ses erreurs et les corriger en vue d'obtenir la nouvelle licence. Mais une société étrangère pourrait faire valoir qu'il s'agit de la norme, car c'est ce qui a été établi en ce qui concerne la délivrance des licences en Ontario. Selon les conseils juridiques que nous avons reçus, il s'agit d'un point de vue gagnable.

L'autre point que je veux...

Le président: Cela est-il fondé sur le cas lié à l'essence dont M. Johnson a parlé, et d'autres cas du genre?

M. Jamie Dunn: Non, cela est fondé sur le traitement national. Une société américaine peut faire valoir que l'entreprise OMYA AG a obtenu 1,6 milliard de litres d'eau sans avoir fourni des données environnementales, et que c'est exactement de cette façon qu'elle veut obtenir sa licence. C'est ça le traitement national. Le Canada doit accorder le même traitement à OMYA AG qu'à n'importe quelle autre société.

Le président: Je crois comprendre que, selon la loi, si une société américaine demande une licence et qu'elle l'obtient, on pourrait alors discuter d'expropriation sous prétexte qu'il y a eu un changement.

Mais tant que personne n'a fait de demande, nous pouvons modifier la loi. Les lois changent tout le temps, et on peut mettre à jour les règlements. C'est ce que nous faisons, à l'instar de toutes les sociétés civilisées. Chacun reconnaît que c'est ce qui se passe. C'est lorsqu'on essaie de retirer un droit acquis que la loi et les accords internationaux nous posent des problèmes. N'est-ce pas le cas?

M. Jamie Dunn: Je devrais dire d'emblée que je ne suis pas un avocat et que ce que j'ai appris provient des décisions qui ont été rendues et des avocats qui nous conseillent, en particulier Steven Shrybman, mais aussi Barry Appleton, qui a très bien réussi à accroître l'application du chapitre 11 ou à l'appliquer d'une nouvelle façon.

Lorsque la décision au sujet de Metalclad a été rendue à la fin de l'été dernier, on a rapporté que le gouvernement du Canada n'avait pas l'intention que le chapitre 11 s'applique ainsi. Lors d'une décision récente rendue par un juge, les trois pays ont déclaré qu'ils n'avaient pas cette intention. Le juge a répondu que cela importait peu; que c'était de cette façon qu'il l'appliquait. C'est ce que le contrat stipule. L'ALENA est un contrat indépendant.

C'est un peu comme un train lancé en avant qui échappe à tout contrôle. Nous pensions que toutes ces belles règles civilisées s'appliqueraient, mais nous sommes tous obnubilés par les décisions qui sont rendues.

Ce n'est qu'une des raisons que j'invoque. Nous disons dès le départ que c'est notre interprétation, en fonction des décisions qui sont prises et du déroulement des choses.

M. Diane Marleau: Monsieur le président, j'aimerais entendre le point de vue de M. Johnson là-dessus.

Le président: Peut-être pourrions-nous donner la parole à M.Johnson.

Il nous reste une minute avant de devoir quitter la salle.

Voulez-vous faire valoir un point, ou bien...

[Français]

Une voix: C'est important, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Monsieur Johnson, peut-être pourriez-vous discuter de la question pendant environ 30 secondes. Ensuite nous terminerons, car l'autre comité attend.

M. Jon Johnson: Premièrement, je ne suis pas d'avis que le traitement national empêche des changements et qu'une fois qu'une norme est établie, elle l'est pour toujours. Dans le cas Pope et Talbot, le gouvernement fédéral a modifié les règles en imposant des frais d'exportation...

Le président: Les Américains sont...

M. Jon Johnson: ... et en vertu du traitement national, ils n'ont rien obtenu.

L'un des aspects choquants de la décision concernant Metalclad, c'est que, selon son interprétation de l'article 1105, le tribunal a invoqué un principe mythique de transparence, que le juge de la Colombie-Britannique a affirmé avec raison qu'il n'existait pas.

En ce qui concerne le juge, je crois que M. Dunn parlait du fait que dans le cas Pope et Talbot les parties ont déclaré qu'elles voulaient dire ceci par cela, et le tribunal en a fait abstraction. Il a aussi fait abstraction de la formulation de la disposition elle-même.

Ces décisions sont indépendantes. Elles n'ont aucune valeur du point de vue de la jurisprudence.

Je répète que je m'oppose le plus fermement à l'idée qu'il soit impossible de changer les règles. Le seul cas où nous ne pouvons pas les changer, c'est lorsque la modification vise expressément à discriminer un investisseur américain.

Le président: Ou à enlever à quelqu'un un bien qu'il possède déjà.

M. Jon Johnson: Oui.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

• 1100

[Français]

M. Denis Paradis: Monsieur le président, j'aimerais revenir sur la question du système de permis pour l'exportation de l'eau. C'est le premier point mentionné par M. Dunn. Je pense que tout le monde est d'accord sur le fait qu'il faut faut conserver notre eau; on s'entend sur les grands principes.

Plus tôt, je posais à M. Dunn une question sur le système de permis pour l'exportation d'eau, et il me donnait l'exemple de la diversion d'eau. Si, aujourd'hui, on était au moins capables de s'entendre sur ce qu'il y a dans le projet de loi C-6, ce serait un pas important. À l'article 13, où il est question de la prohibition générale, on dit:

    13. (1) Malgré l'article 11, nul ne peut utiliser ou dériver des eaux limitrophes...

Donc, le critère général, c'est que nul ne peut sortir ou dériver l'eau des bassins, cela malgré l'article 11, où on parle du système de permis. Donc, malgré le système de permis, qui permet les ouvrages, etc., la prohibition générale s'applique: nul ne peut sortir ou dériver l'eau des bassins. C'est la prohibition générale, sauf pour quelques exceptions comme l'eau de ballast des bateaux, des raisons humanitaires, etc. Je voulais revenir sur ce point pour dire que la prohibition générale est claire et totale, et qu'il n'y a aucune espèce de permis qui puisse être accordé pour sortir de l'eau des bassins. J'aimerais qu'on s'entende sur ce point: il n'y a aucune espèce de licence possible.

[Traduction]

Le président: Soyez très brefs, car notre temps est écoulé. Nous faisons attendre un autre comité.

M. Jamie Dunn: Habituellement, la question tourne autour de la définition d'un bassin hydrographique et du lien potentiel qui existe avec le bassin de drainage mentionné dans l'accord. On pourrait le déplacer à Miami et cela ne poserait pas de problème. C'est là la question liée...

M. Denis Paradis: Aucune licence n'est délivrée. Il est impossible de prendre l'eau en vertu d'une licence.

M. Jamie Dunn: Selon la définition donnée dans l'accord, les limites du bassin hydrographique ou du bassin de drainage pourraient s'étendre jusqu'à Miami.

Le président: Peut-être, mais on nous a dit que les règlements seraient axés là-dessus. Nous poserons cette question aux représentants du gouvernement cet après-midi. Ce pourrait être un point important.

Je vous remercie beaucoup d'être venus. Ce fut une discussion très intéressante, et c'est très bien d'exprimer ces points de vue. Nous apprécions les préoccupations de chacun au sujet de cette question très importante, à la fois pour le public et pour nous.

Merci.

La séance est levée jusqu'à cet après-midi.

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