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TRGO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON TRANSPORT AND GOVERNMENT OPERATIONS

LE COMITÉ PERMANENT DES TRANSPORTS ET DES OPÉRATIONS GOUVERNEMENTALES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 29 mai 2001

• 1032

[Traduction]

Le président (M. Ovid Jackson (Bruce—Grey—Owen Sound, Lib.)): La séance est ouverte.

Nous avons à l'ordre du jour le projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi de 1987 sur les transports routiers et d'autres lois en conséquence.

Nos témoins d'aujourd'hui sont William Elliott, sous-ministre adjoint, Derek Sweet, directeur général par intérim, sécurité routière et réglementation automobile, et Elizabeth MacNab, conseillère juridique, services juridiques.

[Français]

M. William J.S. Elliott (sous-ministre adjoint, Groupe de la sécurité et sûreté, ministère des Transports): Bonjour tout le monde. Monsieur le président, merci de l'occasion qui m'est fournie de présenter des commentaires sur les activités de Transports Canada liées au projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi de 1987 sur les transports routiers et d'autres lois en conséquence.

J'aimerais présenter un bref historique, décrire les efforts que nous faisons actuellement et expliquer ce que nous prévoyons faire avec la loi modifiée. Il nous fera ensuite plaisir de répondre aux questions.

La Loi sur les transports routiers a vu le jour en 1954 pour permettre aux gouvernements provinciaux de réglementer les transporteurs routiers extra-provinciaux au même titre, c'est-à-dire de la même manière qu'ils réglementaient les transporteurs locaux, ceux qui exerçaient leurs activités uniquement à l'intérieur de leur province de résidence.

Une décision du Conseil privé avait bien fait comprendre que sans la loi, les provinces n'avaient pas les pouvoirs constitutionnels leur permettant de réglementer les transporteurs extra-provinciaux. La législation fédérale était nécessaire en vue de maintenir le statu quo avec les provinces en ce qui avait trait à tous les transporteurs routiers exerçant leurs activités dans leur administration.

[Traduction]

Trente ans plus tard, en 1987, le Parlement a modifié la Loi sur les transports routiers pour tenir compte de la déréglementation économique de l'industrie du camionnage. L'aptitude en matière de sécurité est devenue le seul critère pour l'obtention d'un permis d'exploitation de camions. Les dispositions réglementant les autocars demeuraient les mêmes.

• 1035

Le règlement sur la délivrance des licences de camionnage extraprovincial pris en vertu de la loi fournissait aux provinces des lignes directrices en vue de déterminer l'aptitude en matière de sécurité des exploitants de camions.

En parallèle, monsieur le président, les gouvernements fédéral et provinciaux ont signé en 1987 un protocole d'entente visant à établir et à mettre en oeuvre un code canadien de sécurité pour les transporteurs routiers, applicable à la fois aux exploitants de camions et d'autocars. L'actuel Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé (CCATM), un organisme fédéral-provincial-territorial, a entrepris d'assumer la coordination du Code canadien de sécurité, et des comités ont été mis sur pied pour établir et maintenir les normes de sécurité qui forment le code. Transports Canada a joué un rôle important au sein de ces comités. La mise en oeuvre et l'application des normes du Code canadien de sécurité sont cependant, comme par le passé, entièrement du ressort des gouvernements provinciaux.

Il existe 15 normes du Code canadien de sécurité qui sont mises en oeuvre à divers degrés dans toutes les provinces. Les gouvernements provinciaux détiennent tous les pouvoirs constitutionnels pour réglementer leurs propres transporteurs routiers et ils ont la responsabilité de l'exploitation sécuritaire de tous les véhicules automobiles qui circulent sur leurs routes.

Les autorités provinciales exercent un pouvoir discrétionnaire au niveau de la mise en oeuvre des normes du Code canadien de sécurité en vertu de leur propre législation et réglementation et, en conséquence, la mise en oeuvre n'est pas identique dans toutes les parties du pays. C'est une préoccupation pour les défenseurs de la sécurité, qui voient une différence possible au niveau de l'application des normes de sécurité, et l'industrie du transport routier national et international se préoccupe également du fait qu'elle doit se conformer à un ensemble de règlements disparates et qu'il y ait des différences dans les pratiques d'application.

Transports Canada a travaillé au cours des années par l'entremise du CCATM à promouvoir l'application uniforme de toutes les normes à l'échelle nationale.

Le gouvernement fédéral accorde aussi un financement direct aux gouvernements provinciaux à l'égard de la mise en oeuvre du code. Un total de 51 millions de dollars a été versé à ce jour et le financement se poursuit actuellement au rythme d'environ 5 millions de dollars par an.

Au milieu des années 90, un système efficace de cotes de sécurité à l'intention des transporteurs routiers semblait être possible, compte tenu des progrès de la technologie dans le domaine des communications. Le CCATM a alors mis sur pied un groupe de projet chargé d'élaborer la norme no 14 sur les cotes de sécurité. Transports Canada préside le groupe de projet sur les cotes de sécurité et une norme a été approuvée par le Conseil du CCMTA en novembre 1999. Le groupe de projet comprend des représentants de l'ensemble des provinces et des territoires du Canada, de l'industrie du camionnage, de l'industrie du transport maritime, des groupes d'intérêts publics et du gouvernement américain.

Les objectifs du système de cotes de sécurité, tel que décrit dans la norme no 14, sont les suivants: améliorer la sécurité entourant l'exploitation des services de transport commerciaux; encourager la concurrence économique des transporteurs routiers sécuritaires et encourager la sensibilisation des transporteurs routiers en matière de sécurité et susciter une amélioration constante.

En outre, l'instauration de la norme débute par l'énoncé suivant: «la responsabilité de la sécurité des transports routiers incombe d'abord et avant tout aux dirigeants des entreprises de transport routier». C'est très important. Avec les milliers de véhicules qui circulent dans tous les coins du pays, aux États-Unis et au Mexique, aucun gouvernement ne peut assumer la responsabilité de tous les aspects de la sécurité des véhicules utilitaires. L'entière collaboration de chaque transporteur routier est un élément essentiel d'un transport routier sécuritaire.

Les cotes de sécurité assurent un environnement réglementaire qui encourage la gestion sécuritaire et signale les mauvaises pratiques, de sorte que les forces de l'ordre puissent prendre des mesures contre les transporteurs routiers contrevenants.

[Français]

Cette approche est appuyée par les gouvernements en vue de trouver des moyens efficaces de retirer les transporteurs non sécuritaires de la route et par les principales industries qui vivent de l'exploitation efficace des véhicules utilitaires ou qui en dépendent.

En vertu de la norme n° 14, les gouvernements provinciaux attribuent une cote de sécurité à chaque transporteur routier immatriculé dans leur province. Le cadre de travail décrit la méthodologie d'attribution des cotes de manière à ce qu'un rendement semblable d'un transporteur routier se traduise par une cote de sécurité semblable peu importe le lieu d'immatriculation du transporteur. Cela est très important.

• 1040

La norme précise que les renseignements doivent être conservés dans un «profil du conducteur». Il s'agit du rendement réel de chaque transporteur routier sur la route fondé sur les collisions réelles, les infractions au Code de la route, la conformité lors d'inspections sur la route et les résultats des vérifications des installations.

Le profil du conducteur est tenu à jour par la province où le transporteur routier immatricule ses véhicules. Les renseignements qui entrent dans le profil proviennent cependant de toutes les administrations où le transporteur routier exerce ses activités.

Ce système, lorsqu'il sera pleinement fonctionnel, fournira un indicateur d'exploitation sécuritaire et un indicateur opportun des mauvaises pratiques.

[Traduction]

J'aimerais souligner, monsieur le président, qu'il s'agit d'un système réglementaire de portée générale visant à améliorer la gestion de la sécurité par les entreprises qui exploitent des véhicules utilitaires. Les présentes activités courantes d'application, y compris les services de police, les inspections routières et les vérifications des installations des entreprises, font partie intégrante du système. Un véhicule utilitaire ou un conducteur de véhicule utilitaire qui est déclaré non sécuritaire peut être mis hors service en tout temps, en tout lieu, et peu importe la cote de sécurité du transporteur.

La norme no 14 décrit la manière dont les gouvernements attribuent les cotes de sécurité aux transporteurs routiers. L'ensemble des provinces et des territoires du Canada étaient représentés lors de son élaboration et toutes les parties se sont entendues sur ces principes.

Parce que les gouvernements provinciaux n'ont pas les pouvoirs constitutionnels leur permettant de réglementer les entreprises de transport routier extraprovinciales, une législation fédérale est essentielle à la mise en oeuvre nationale des cotes de sécurité. La Loi sur les transports routiers, monsieur le président, est cette législation et le projet de loi S-3 adapte la loi de 1987 pour permettre aux provinces d'attribuer des cotes de sécurité aux exploitants fédéraux d'autocars et de camions.

Le projet de loi S-3 a des objectifs fermes: axer la réglementation de la sécurité des transporteurs routiers sur le Code canadien de sécurité et appliquer des normes d'exploitation de manière uniforme à la grandeur du Canada. Le projet de loi assure un pouvoir de réglementation spécifique permettant d'établir des normes pour la délivrance de certificats d'aptitude en matière de sécurité aux transporteurs routiers extraprovinciaux.

Le règlement prévu adoptera par renvoi la norme no 14 du Code canadien de sécurité. La situation actuelle est telle que toutes les provinces sont d'accord en principe sur la norme no 14 et que toutes les administrations mettent présentement en oeuvre la norme. Les provinces de plus grande taille ont déjà en place la législation, la réglementation et les mesures d'application et certaines provinces plus petites en sont également à ce stade.

Il demeure des différences, plusieurs fondées sur la longue tradition de chaque province exerçant ses pouvoirs constitutionnels ou délégués en fonction de son propre cadre d'exploitation et des besoins perçus.

[Français]

Transports Canada respecte ces différences régionales tout en croyant que l'application uniforme des normes de sécurité est vitale, surtout pour s'assurer que les véhicules utilitaires sont exploités de manière aussi sécuritaire que possible, mais aussi pour fournir un environnement réglementaire efficace et crédible pour toutes nos industries stratégiques de transport par autocar et par camion.

Il reste beaucoup de travail à faire. Chaque province doit avoir en place sa propre législation et ses propres règlements. Les systèmes d'information essentiels au système de cotation ont besoin d'être perfectionnés pour enregistrer, transmettre et compiler les renseignements spécifiés pour obtenir des résultats cohérents dans toutes les administrations.

[Traduction]

Il est important de déterminer ce qui doit être harmonisé afin que la réglementation sur la sécurité soit efficace et efficiente, et ce qui pourrait être modifié sans que l'on perturbe tout le régime de réglementation. La norme canadienne sur les cotes de sécurité a soulevé certaines questions et Transports Canada préside un groupe de travail du CCATM mis sur pied pour étudier la question de l'uniformité.

En conclusion, monsieur le président, le projet de loi S-3 reflète l'évolution de la réglementation en matière de sécurité des transports routiers et fournit des pouvoirs essentiels pour mettre en place un régime national de cotes de sécurité. Ce régime ne vise pas le détail des normes de sécurité mais il établit un environnement de gestion sécuritaire pour encourager l'amélioration constante par les transporteurs routiers, tout en prévenant les gouvernements des mauvaises pratiques pour leur permettre de fixer les priorités du travail d'application des règles de sécurité.

• 1045

Transports Canada continuera à travailler étroitement avec les gouvernements provinciaux par l'entremise du CCATM pour assurer la sécurité des activités des transporteurs routiers nationaux et internationaux.

Merci, monsieur le président.

Le président: Je vous en prie.

Monsieur Laframboise, vous avez 10 minutes.

[Français]

M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Merci, monsieur le président.

Ma première question va être toute simple. Compte tenu que vous déclarez, et je vous cite:

    La situation actuelle est que toutes les provinces sont d'accord en principe sur la norme n° 14 et que toutes les administrations mettent présentement en oeuvre la norme. Les provinces les plus vastes ont déjà en place la législation, la réglementation et les mesures d'application et certaines plus petites en sont également à ce stade,

pourquoi ne pas avoir attendu que les provinces s'harmonisent avant de déposer ce projet de loi-là? À ce que je sache, ce n'est pas la province de Québec qui vous a demandé des modifications à la Loi de 1987 sur les transports routiers au moment où on se parle.

Pourquoi déposer cela tout de suite quand vous savez très bien qu'elle ne peut pas s'appliquer à la grandeur du Canada au moment où on se parle? Pourquoi?

[Traduction]

M. William Elliott: Comme j'ai essayé de l'expliquer dans ma déclaration préliminaire, les provinces... Enfin, je crois que pour l'essentiel la question touche à la compétence constitutionnelle relative des provinces par rapport à celle du gouvernement fédéral.

Le fédéral détient l'autorité constitutionnelle dans le cas du camionnage interprovincial et les provinces la détiennent pour les activités à l'intérieur de leurs frontières, mais notre objectif c'est un système appliqué à l'ensemble du pays. Pour que les provinces puissent appliquer la norme qui a été approuvée pour les activités interprovinciales, il faut une base adéquate et cette base c'est une loi fédérale.

[Français]

M. Mario Laframboise: Je ne comprends toujours pas plus, monsieur le président. On présente une loi par laquelle on garantit aux citoyens canadiens—parce que c'est ce que fait le projet de loi S-3—qu'on veut donner aux Canadiens un régime sécuritaire et pratiquement leur garantir qu'une fois que ce projet de loi-là aura été adopté, Transports Canada pourra garantir la sécurité sur les routes de façon uniforme dans tout le Canada, alors que vous savez très bien qu'au moment où on se parle, c'est impossible.

On n'a pas encore réussi, pour toutes sortes de raisons, à harmoniser cela dans l'ensemble des provinces, et ce n'est pas parce que les provinces ne travaillent pas entre elles. Vous savez qu'elles travaillent. Vous avez mis sur pied des tables de travail. Le travail n'est pas terminé et le projet de loi arrive. Je n'en reviens tout simplement pas, et je pense que dans votre première réponse, vous avez sûrement dit que c'est le fédéral qui veut démontrer son pouvoir, qui veut, encore une fois, démontrer à tout le monde qu'il a un champ de compétence. Personne ne conteste cela, même pas les provinces. La seule chose qu'elles vous disent, c'est qu'elles sont à discuter, qu'elles n'ont pas fini d'harmoniser. Encore une fois, je reviens toujours à ma question: pourquoi avoir déposé ce projet de loi au moment où on se parle, alors que les provinces n'ont pas encore réussi à s'harmoniser?

M. William Elliott: C'est la manière d'établir l'harmonisation entre les provinces et le gouvernement fédéral et les règlements. La loi donne la base législative pour des règlements fédéral et provinciaux.

[Traduction]

Je suppose que vous voulez parler de l'ordre dans lequel ces choses devraient se faire. Je n'en disconviens pas, c'est sûr, quand vous dites que nous n'avons pas terminé notre travail sur cette question particulière ou sur la question plus générale de l'harmonisation. Mais cette harmonisation ne sera réalisée que si on commence par établir une norme et à la faire appliquer par des règlements qui se fondent à la fois sur les lois provinciales et la loi fédérale. Il faut donc commencer par se mettre d'accord sur la norme puis sur la loi fédérale et les lois provinciales, et finir par la réglementation fédérale et la réglementation provinciale.

• 1050

J'ai un autre petit commentaire. Vous avez dit tout à l'heure que notre but était de garantir la sécurité. Ce n'est pas nous qui garantissons la sécurité. Comme je l'ai indiqué dans mes remarques préliminaires, la sécurité routière est une responsabilité partagée. Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour faciliter la mise en place d'un cadre qui permettra aux provinces, par le biais des règlements et des lois qui leur sont propres, mais aussi aux transporteurs eux-mêmes, de prendre des mesures pour améliorer la sécurité routière. Bien que comme je l'ai rappelé et comme vous le rappelez vous-même il reste encore beaucoup à faire au niveau de l'harmonisation et de la sécurité, nous estimons qu'il y a déjà eu beaucoup de progrès réalisés. Il suffit de considérer les normes approuvées et la diminution du nombre d'accidents et d'incidents pour voir que nous sommes sur la bonne voie.

[Français]

M. Mario Laframboise: Vous me permettrez, en terminant, de dire que je ne suis pas d'accord sur votre énoncé. Je crois qu'on aurait pu attendre parce que les provinces et les organisations sur les territoires sont à bonifier cela et parce que d'autres normes devront s'appliquer. Les heures de travail dans le milieu du camionnage, entre autres, auraient pu faire partie d'un même projet de loi pour bonifier la sécurité ou le volet sécurité qu'on veut donner à ce projet de loi. Ce n'est pas vrai que ce n'est pas un projet sur la sécurité. Ce n'est pas l'objectif que nous donne l'article 3 de votre projet de loi. On nous dit bien:

    a) à axer le régime de réglementation de ces entreprises sur le rendement en matière de sécurité...

    b) à appliquer à celles-ci uniformément, à l'échelle du Canada...

Donc, pour celui qui le lit, on a l'impression qu'une fois que le projet de loi aura été adopté, on sera très rapidement capable de garantir une meilleure sécurité sur les routes de façon uniforme, partout au Canada. Et ce n'est pas le cas. C'est pourquoi je maintiens que ce projet de loi est déposé trop tôt, qu'il aurait dû être bonifié, entre autres par l'intégration des heures de travail et de tout le contexte et du concept de sécurité du transport routier partout au Canada. Merci.

[Traduction]

M. William Elliott: Je conviens avec vous que dans un monde parfait il serait préférable de tout faire en même temps. Mais nous croyons que cette loi et l'introduction du système de cotes de sécurité qui, comme je l'ai indiqué, est soutenu, à notre connaissance, par toutes les provinces, permettront en fait aux provinces de mieux partager les renseignements disponibles pour les aider à faire respecter la loi et à diffuser auprès du public les informations qui auront une incidence positive sur la sécurité routière. Certes, il y a d'autres problèmes, y compris les heures de travail au volant, qui doivent être résolus et que nous sommes—encore une fois, en coopération avec les provinces—en train de résoudre.

[Français]

M. Mario Laframboise: Je voudrais juste, monsieur le président, vous mentionner que la province de Québec n'a pas donné son accord pour le dépôt d'un projet de loi à ce moment-ci. Quand vous dites que vous avez eu l'accord des provinces, que les provinces se sont entendues sur la norme n° 14, qu'elles cherchent à harmoniser entre elles et qu'elles ont compris, en tout cas, la province de Québec a compris qu'il est trop tôt pour demander au gouvernement fédéral de faire des modifications législatives. Ce n'est pas le gouvernement du Québec qui vous a demandé de déposer un projet de loi à ce moment-ci. Je peux vous faire parvenir une lettre du ministre dans les minutes qui vont suivre.

Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Très bien. Merci, Mario.

• 1055

M. Elliott ou M. Sweet, je trouve très bonne la question de Mario. Est-ce que cette loi est un des éléments du système nécessaire pour la mise en place de la réglementation? La loi ne dit pas aux provinces quoi faire mais est un des éléments du système sur lequel vous vous êtes mis d'accord—et que de toute évidence vous souhaitez—pour garantir la sécurité de la population. Mais vous examinez également les problèmes liés au commerce interprovincial, la suppression des barrières, toutes les formes d'obstacles, pour aboutir à une harmonisation. Il est évident que les provinces ont des points de vue différents et je sais que celui du Québec est probablement différent.

Mais n'est-ce pas un peu l'histoire de l'oeuf et de la poule? Est-ce que la loi doit être adoptée avant les règlements ou la loi est-elle un des instruments nécessaires pour collaborer avec les provinces à l'amélioration et à l'harmonisation de la sécurité routière?

M. William Elliott: Merci, monsieur le président.

Je crois qu'il y a certaines questions de calendrier et de choix de l'ordre dans lequel faire les choses, mais il reste qu'il faut adopter la loi avant de pouvoir appliquer les règlements relatifs à cette loi.

Ne pas fournir de base à la réglementation des activités extraprovinciales en coopération avec les provinces revient à créer une situation où les règles pour les transporteurs intraprovinciaux sont différentes des règles pour les transporteurs interprovinciaux. Les provinces sont d'accord avec nous pour reconnaître qu'une telle situation n'est pas idéale. Je crois que les transporteurs veulent avoir un régime que tous interprètent et appliquent d'une manière uniforme, et c'est l'objectif que nous nous sommes tous fixé.

Il est vrai que nous n'avons pas un système parfaitement harmonisé. Comme je l'ai fait remarquer, un des objectifs est de déterminer ce qui ne doit se prêter à aucune variation et ce qui peut se prêter à des variations régionales sans pour autant mettre en danger l'intégrité du système global.

Le président: Merci.

Monsieur Bagnell du Parti libéral pour dix minutes.

M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): À ce même sujet, je sais que ce n'est pas le rôle des provinces lorsque nous proposons une loi, mais y a-t-il des réunions qui ont encore lieu en ce moment avec les provinces, y compris le Québec, d'où pourraient sortir des décisions dignes de figurer dans ce projet de loi?

M. Derek Sweet (directeur général par intérim, Direction de la sécurité routière et de la réglementation automobile, ministère des Transports): Merci, monsieur le président.

Je préfacerai ma réponse en faisant simplement remarquer que le système de cotes de sécurité décrit par M. Elliott dans ses remarques préliminaires est une entreprise en vérité très complexe. Elle implique, par exemple, la compilation des données de sécurité routière dans tous les territoires où circulent un véhicule à moteur, le renvoi de ces données à sa province d'origine—si vous voulez, la province d'immatriculation—pour permettre à cette dernière d'établir la cote de sécurité.

Il y a donc un nombre assez important d'activités qui se déroulent en même temps. Il y a un certain nombre d'activités qui se déroulent parallèlement et ce, d'ailleurs, monsieur le président, depuis un certain temps. C'est aujourd'hui que nous sommes saisis de ce projet de loi mais cela fait déjà un certain temps que nous travaillons sur la question.

M. Elliott a parlé de la réglementation. Cela fait maintenant six ou neuf mois que nous collaborons activement avec les provinces à l'élaboration de la réglementation qui permettra d'appliquer le système de cotes de sécurité. Depuis trois ou quatre ans, nous collaborons avec les provinces à l'élaboration d'une norme de cotes de sécurité. Je dirais que toutes les provinces depuis deux ans consacrent des efforts considérables à la mise en place de systèmes relativement complexes et compliqués de manipulation de données nécessaires pour compiler et évaluer les données que j'ai mentionnées tout à l'heure. Tout ceci dans un contexte de collaboration entre les provinces et le gouvernement fédéral.

M. Elliot a mentionné le CCATM, le Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé. C'est le groupe qui a une fonction de contrôle administratif, si l'on veut, en matière de sécurité des transporteurs routiers au Canada. Toute cette activité est assurée conjointement sous l'égide du CCATM.

M. Larry Bagnell: Merci.

Les camions sont impliqués dans 500 accidents chaque année. Environ un accident sur six au Canada retient largement l'attention des Canadiens. Pouvez-vous me dire quelles sont les priorités du ministère en matière de sécurité du camionnage?

• 1100

M. William Elliott: La sécurité du transport est l'un des principaux objectifs du ministère. Les données montrent que les camions sont impliqués dans un nombre élevé d'accidents de la route causant des décès et des blessures, et c'est pourquoi les camions sont particulièrement visés par les mesures de sécurité, tant en ce qui nous concerne qu'en ce qui concerne les provinces. Le projet de loi S-3 est une mesure législative qui porte sur la sécurité des transports routiers. À notre avis, c'est une initiative importante pour traiter de la question des poids lourds.

J'aimerais souligner, monsieur le président, que pour prévenir les accidents des poids lourds commerciaux, il faut tenir compte de nombreux facteurs, car la sécurité est vraiment une question de responsabilité partagée. Le fédéral a un rôle à jouer tout comme les provinces, sans oublier le rôle important des exploitants mêmes. Nous nous sommes donné une vision en matière de sécurité routière qui comporte différents objectifs, et encore là, cette vision et ces objectifs ont été élaborés en collaboration avec toutes les parties prenantes. La sécurité des poids lourds est un important sujet de préoccupation, et on l'examine sous différents angles.

M. Larry Bagnell: Merci.

Le président: Vous disposez de beaucoup de temps.

M. Larry Bagnell: La question des heures de service des véhicules commerciaux est très controversée, je parle du temps que les véhicules passent sur la route. Le comité a entendu les hauts fonctionnaires de Transports Canada s'exprimer sur cette question de même que les propositions visant à modifier la réglementation, et qu'on examine à l'échelle du pays. Selon le ministère, ce projet de loi modifiera-t-il la façon dont sont réglementées les heures de service?

M. William Elliot: En un mot, non. Le projet de loi traite du code canadien de sécurité, et la norme spécifique est la norme 14. Il est aussi question des heures de service dans le code canadien de sécurité, mais c'est un chiffre différent, le no 9. Il y a un certain lien entre la cote de sécurité et la norme 9, tout comme il existe un lien entre les cotes de sécurité et toutes les normes et tous les règlements. Comme nous l'avons indiqué, la cote est vraiment d'ordre général.

L'information qui sera utilisée pour établir une cote inclura le rendement du transporteur sur la route et le dossier des infractions aux règles. Par exemple, si vous avez un transporteur qui a enfreint le Code de la route, une mention est inscrite au dossier de la cote de sécurité de ce transporteur. De la même façon, si vous avez un transporteur qui a violé la réglementation concernant les heures de service, cette information est portée à la banque de données.

Le présent projet de loi ne modifie en rien la norme ni la réglementation en ce qui concerne les heures de service. C'est une autre norme, qui est certainement bien spécifique et assez controversée, et je sais que le ministre a demandé, monsieur le président, que le comité examine la question des heures de service.

M. Larry Bagnell: Je n'ai rien à ajouter, monsieur le président.

Le président: Très bien.

Je vais donner la parole à Bev Desjarlais du NPD, pendant que Brian s'organise.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur Elliot, bien que la loi, comme vous l'avez indiqué, ne traite pas nécessairement des heures de service, il est certainement du ressort du comité de faire inscrire les heures de service dans la loi. Est-ce quelque chose dont on pourrait traiter dans la loi?

M. William Elliot: Voilà une question intéressante. Si j'hésite à répondre, c'est que la portée du projet de loi ne s'étend pas aux heures de service, qui relèvent d'une autre norme. La question de savoir si le comité a la possibilité ou non de les inclure ou de voir s'il doit en être question dans la loi, est une question d'ordre technique. Vraiment, je suis mal placé pour répondre à cette question.

• 1105

Mme Bev Desjarlais: Mais le projet de loi traite de sécurité. Si nous examinons les heures de service en vertu du code, de la sécurité, le projet de loi pourrait avoir un effet de réglementation, mais à l'intérieur du projet de loi plutôt qu'en vertu d'une réglementation. On pourrait inclure les heures de service.

M. Derek Sweet: Si vous le permettez, monsieur le président, l'objectif du projet de loi est de créer un cadre de sécurité flexible au moyen de la réglementation par renvoi. L'objectif, par exemple en ce qui concerne la norme no 14, est de faire en sorte que la réglementation soit assez concise et fasse mention de la norme 14. C'est-à-dire que la réglementation ne répéterait pas la norme même. Nous y voyons un important avantage, soit que la norme qui serait mentionnée est une norme élaborée de concert avec les provinces. L'élaboration de ces normes concerne donc le fédéral, les provinces et les territoires. Ces normes changent de temps à autre. Elles évoluent.

Alors, monsieur le président, si l'on fait en sorte que la réglementation fasse simplement, si je peux dire, référence à la norme, chaque fois que la norme change, la réglementation change aussi. On assure ainsi automatiquement, en quelque sorte, une mise à jour du cadre législatif en vigueur. C'est ainsi que nous entendons faire avec la norme 14.

Le député a mentionné les heures de service, qui relèvent actuellement d'une norme fédérale en vertu de la Loi sur le transport par véhicule à moteur. La réglementation actuelle est très détaillée et reprend la norme 9 du code national de sécurité. Ce que nous aurions l'intention de faire, par l'autre moyen qu'a mentionné M. Elliott, soit le renvoi à votre comité de l'examen du régime des heures de service, c'est de modifier la norme du code national de sécurité, puis de modifier la réglementation fédérale afin, encore là, de simplement mentionner cette norme, si bien que nous aurions une composante du régime de sécurité qui serait constamment mise à jour et actualisée.

N'empêche que l'objectif était certainement—si vous le permettez, monsieur le président—que l'examen des heures de service, qui est mené indépendamment par le CCATM, se fasse séparément. Une fois la norme adoptée, après les consultations appropriées, l'examen par le présent comité et ainsi de suite, alors nous ferions simplement mention de cette norme à titre de règlement, et nous aurions la nouvelle réglementation fédérale.

Mme Bev Desjarlais: Le processus de certification reflétera-t- il le code de sécurité, ou la norme de sécurité, pour ce qui est de certains critères du code de sécurité?

M. Derek Sweet: Oui. Vous faites référence à la certification. Comme les membres du comité le savent peut-être, le régime des cotes de sécurité sera mis en vigueur, si l'on peut dire, au moyen d'un certificat d'aptitude en matière de sécurité. Tout transporteur provincial, en vertu de la norme 14, sera tenu d'avoir une cote de sécurité. Si cette cote de sécurité est acceptable, le transporteur obtiendra de la province concernée un certificat d'aptitude en matière de sécurité. Ce sera la permission dont disposera le transporteur pour mener ses affaires partout au Canada.

Mme Bev Desjarlais: De quels critères d'aptitude en matière de sécurité se sert-on quand les camions viennent du Mexique ou pour les camions au Mexique? Je suppose que le Mexique a un ensemble de mesures de sécurité déjà en place et qu'il y a là aussi un processus de certification. Quel type de système a-t-on là-bas?

M. Derek Sweet: Monsieur le président, le projet de loi contient une disposition qui nous permet de conclure des ententes avec d'autres pays concernant les cotes de sécurité ou la documentation relative à ces cotes. Le projet de loi nous permet, par exemple—je vais parler des États-Unis un instant, et je parlerai aussi du Mexique—à titre de gouvernement fédéral, de conclure une entente avec les États-Unis pour reconnaître leur régime de cotes de sécurité. Les régimes ne sont pas identiques, mais les objectifs en sont similaires.

• 1110

L'intention, c'est que nous et les gouvernements provinciaux autorisions à mener leurs activités au Canada les transporteurs qui ont obtenu leur cote de sécurité aux États-Unis et que de la même façon les autorités américaines acceptent les cotes de sécurité attribuées par les provinces.

Le Mexique fait de grands progrès en matière de sécurité du transport routier, à notre avis. Pour être bien franc, je pense que nous reconnaissons tous que ce pays accusait un certain retard.

Nous avons traité de cette question de la surveillance du transport routier, comme nous l'appelons, qui inclut les cotes de sécurité, dans le contexte nord-américain, sous l'angle de l'Accord de libre-échange nord-américain. Un comité existe depuis plusieurs années déjà, qui traite d'harmonisation des normes de sécurité du transport par camion en Amérique du Nord, et il est composé de représentants du Canada, des États-Unis et du Mexique.

Nous discutons donc de la question de l'harmonisation des cotes de sécurité dans le contexte de l'ALENA. Comme les députés le savent, des efforts sont déployés pour rouvrir la frontière sud des États-Unis pour permettre un trafic plus important entre les États-Unis et le Mexique. Les deux pays déploient beaucoup d'efforts en ce sens. Nous participons à ces discussions bien que vous comprendrez que ce sera de façon indirecte. Quand le trafic se sera accru entre le Mexique et les États-Unis, les transporteurs mexicains devront se conformer aux exigences américaines en matière de sécurité. Pour se rendre au Mexique, il faut évidemment passer par les États-Unis. Les régimes canadiens et américains sont très semblables et nous avons bon espoir qu'avec le temps le régime de sécurité en Amérique du Nord sera à peu près le même partout.

Mme Bev Desjarlais: Ma question fait suite à celle de M. Laframboise. Ce projet de loi permet essentiellement à ce processus d'aller de l'avant sans que nous soyons nécessairement d'accord avec les normes en vigueur.

Si je comprends bien, en vertu de l'article 9, si les États-Unis acceptent la norme mexicaine ou si la norme mexicaine correspond aux lignes directrices américaines, l'accord du Canada sera automatique même si nous avons des réserves au sujet de ces normes. C'est l'accord de libre-échange qui l'exige. Le camionnage interprovincial y serait également assujetti.

M. Derek Sweet: Sauf le respect que je lui dois, et je ne suis pas d'accord avec la députée sur cette question. Nous ne serions pas liés par cette entente. Le projet de loi crée un cadre. Il s'agit d'un projet de loi habilitant. Le cadre devra s'accompagner de règlements et de normes qui seront établis en collaboration avec les provinces. Nous ne proposerons pas de normes ou de règlements qui léseraient le Canada ou avec lesquels les provinces ne seraient pas d'accord.

Mme Bev Desjarlais: Sauf le respect que je vous dois, le comité de l'industrie étudie actuellement une modification à la loi sur les brevets qui s'impose aux termes d'un accord commercial auquel nous avons souscrit.

Le président: Il vous reste une minute. Avez-vous terminé?

Mme Bev Desjarlais: J'ai terminé.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

J'accorde la parole à M. Fitzpatrick de l'Alliance canadienne. Vous avez dix minutes.

M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne): Je vous remercie, monsieur le président.

La sécurité dans les transports aériens dépend de la sécurité des aéroports. La sécurité des transports maritimes dépend de la sécurité des ports. La sécurité des transports ferroviaires dépend de la sécurité des chemins de fer.

À mon avis, l'infrastructure routière du pays est en très mauvais état. Je crois que l'état des routes qu'empruntent les autocars et les camions interprovinciaux devrait vraiment nous préoccuper. Pourquoi ce projet de loi ne s'attaque-t-il pas à ce problème?

M. William Elliott: Le projet de loi ne porte pas sur les routes ou le financement de l'infrastructure routière.

• 1115

M. Brian Fitzpatrick: Pourquoi pas? Si le projet de loi porte sur la sécurité, pourquoi ne s'applique-t-il pas dans le domaine routier?

M. William Elliott: Comme j'ai dit plus tôt, dans un monde idéal, on ferait tout en même temps. Dans le monde dans lequel nous vivons, nous devons cependant procéder par étapes. À notre avis, ce projet de loi constitue une mesure positive favorisant la sécurité routière, mais nous ne soutenons certainement pas qu'il règle tous les problèmes qui se posent en matière de sécurité.

M. Brian Fitzpatrick: Lorsque vous préparez un projet de loi ou des modifications législatives, je suppose que vous sollicitez le concours des intervenants clés du secteur. Il s'agirait de l'industrie des autocars et de l'industrie du camionnage en l'occurrence.

Je serais curieux de savoir s'il y a eu des réactions de la part des représentants de l'industrie quant à l'état des routes. Ont-ils exprimé des inquiétudes concernant la sécurité de l'infrastructure routière du pays?

M. Derek Sweet: Le député soulève la question de la consultation. Au ministère, nous estimons avoir tenu de vastes consultations avant l'élaboration de ce projet de loi. Ainsi, nous avons produit successivement deux documents d'orientation, il y a trois ou quatre ans, que nous avons fait circuler et dont nous avons discuté avec les principales parties concernées par la sécurité des transports routiers.

Étant donné que tout cela s'est produit il y a trois ou quatre ans, j'essaie désespérément de me rappeler si la question du financement des routes a été soulevée. Je pense que je ne m'aventurerais pas trop en vous disant que non, ou en tout cas, si elle l'a été, elle l'a été d'une manière très...

M. Brian Fitzpatrick: La question ne portait pas sur le financement des routes, mais sur l'état des routes au Canada.

M. Derek Sweet: Disons que je fais l'équivalence entre les deux. Je ne crois pas que cela ait déjà retenu l'attention, puisque le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui est en réalité une mise à jour de la Loi sur le transport par véhicule à moteur, qui existe déjà. Cette loi concerne exclusivement la sécurité des transports routiers et n'aborde pas du tout l'état de l'infrastructure routière, comme l'a signalé M. Elliott.

M. William Elliott: De toute évidence, le ministre et les responsables ministériels ont entendu les représentants de l'industrie et d'autres exprimer des inquiétudes concernant l'infrastructure et le financement de l'infrastructure routière, de son entretien et de sa réfection, mais pas dans le contexte de ce projet de loi.

Le président: On s'éloigne un petit peu du sujet, mais je suppose que lorsqu'on parle de sécurité, c'est du conducteur du véhicule qu'il s'agit, ainsi que du véhicule comme tel et la manière dont le conducteur l'utilise et, dans une certaine mesure, du réseau routier: Est-ce qu'il y a rétrécissement de la chaussée? Est-ce que la route est bien construite?

La réglementation du réseau routier relève du pouvoir des provinces, et je présume que le gouvernement fédéral s'occupe des raccordements. Cela dit, je pense que nous nous écartons un peu du sujet, car, après tout, ce sont les ingénieurs qui décident de la structure des routes et ce sont eux qui déterminent si elles sont sûres. Qu'importe les champs de compétence et qu'importe que la route soit fédérale ou provinciale, pourvu que les camionneurs puissent conduire en toute sécurité.

Monsieur Fitzpatrick, est-ce là le sens de votre propos?

M. Brian Fitzpatrick: Je voulais simplement dire que quand il s'agit de la sécurité des routes, les choses ne sont pas si étanches. On ne peut les dissocier. Si la sécurité des aéroports laisse à désirer, qu'importe la sécurité des avions ou la prudence des pilotes, on aura quand même des problèmes. C'est le bon sens même.

Tout cela pour dire que je ne pense pas que nous devrions aborder la question de la sécurité sous un angle restrictif. Je doute fort qu'une province refuse le financement fédéral pour la réfection de ses routes. La route transcanadienne et les routes interprovinciales constituent un réseau qui s'étend de l'est à l'ouest du pays, et si nous voulons que notre économie soit pancanadienne, nous devrions peut-être investir dans une infrastructure reliant l'est et l'ouest du pays.

• 1120

Je voulais soulever une autre question à ce sujet. Si le camionnage prend de plus en plus de place, c'est qu'à mon avis, nous ne réussissons pas à moderniser notre réseau ferroviaire. Il y a trois ans, le juge Estey produisait un rapport assez exhaustif sur la modernisation de notre réseau ferroviaire, mais je puis vous dire qu'en Saskatchewan, on délaisse de plus en plus le transport ferroviaire au profit du camionnage. Tout le monde s'en mord les doigts, car cela nous coûte du point de vue environnemental, énergétique et de tous les points de vue. Nous n'avons pas opté pour le camionnage par choix, mais bien parce que notre réseau ferroviaire n'est pas en bon état.

À bien des égards, je souhaiterais que l'on puisse examiner notre réseau de transport dans son ensemble, de manière plus étanche. Devrait-on vraiment délaisser le transport ferroviaire au profit du camionnage au Canada? Je ne suis pas certain que ce soit une bonne idée. Je ne sais pas non plus si c'est un mode de transport qui est plus sûr. Cela dit, c'est une question que je voulais soulever car elle me préoccupe et, surtout, parce que je vois que nous négligeons le transport ferroviaire.

Il y a un autre aspect de ce projet de loi qui me préoccupe, et peut-être pourriez-vous apaiser mon inquiétude. Je sais que certaines provinces ont des régimes complexes en place visant à protéger les intérêts des transports par autocar et par camion et ainsi de suite. Elles se sont dotées d'appareils administratifs et de formalités complexes et restrictives en matière de délivrance de permis qui limitent l'accès des concurrents à leur réseau. Il est donc très difficile pour un nouvel acteur de pénétrer le réseau. Ce qui me dérange, c'est que nous nous sommes lancés dans la libéralisation des échanges avec les États-Unis pour nous doter d'une économie compétitive et être en mesure de concurrencer les Américains et autres grands de ce monde. Le but était de favoriser la croissance de notre économie, pourtant, en 2001, les relations est-ouest au sein même de notre pays font défaut.

Ce projet de loi fait-il quoi que ce soit pour libérer l'emprise que les régimes provinciaux semblent avoir sur l'industrie du transport par autocar et par camion?

M. William Elliott: En un mot, monsieur le président, la réponse est non. Le député soulève de nombreuses questions très importantes, notamment l'investissement dans l'infrastructure et le transport multimodal. Je vous signalerai, monsieur le président, que ces questions préoccupent le ministre des Transports et le ministère dans son ensemble. En effet, le ministre a récemment annoncé qu'il entamait une série de discussions dont le but est d'établir un plan d'action pour l'avenir pour le secteur des transports, discussions qui aborderont des questions générales ou holistiques.

Monsieur le président, je ne voudrais surtout pas donner l'impression au comité que le ministre ou le ministère ne s'intéresse pas à toutes ces questions. Il se trouve simplement que la plupart des questions que le député a soulevées débordent le cadre de ce projet de loi et mes responsabilités de sous-ministre adjoint chargé de la sécurité routière. Certes, ce sont des questions importantes. Le ministre a indiqué qu'il avait l'intention d'engager tous les Canadiens dans un débat. Cela dit, je ne suis pas en mesure de vous en parler davantage.

M. Brian Fitzpatrick: J'aurais une autre question. Tous, nous consommons de l'eau, et je crois comprendre que la seule province canadienne qui soit dotée d'une véritable politique pour assurer la qualité de son eau potable, c'est la province de l'Alberta. L'Alberta a fait quelque chose de très simple: elle a adopté la politique américaine qui consiste à établir une norme très élevée pour la qualité de l'eau potable. Au Canada, nous avons tendance à mettre sur pied des commissions royales pour étudier ce genre de problèmes, alors que la solution est parfois tellement simple.

Je soulève la question parce que M. Sweet a indiqué que nos politiques ressemblent beaucoup à celles des Américains, et je me suis dit que pour simplifier notre monde, d'autant plus que nos politiques semblaient être identiques à celles de nos voisins, pourquoi ne pas simplement adopter le régime réglementaire américain et simplifier la vie de tous, y compris notre économie?

• 1125

Je suis sûr que cela non plus ne relève pas de votre pouvoir, mais je voulais le soulever quand même.

Le président: Nous passons maintenant au côté libéral. Le prochain intervenant est M. Shepherd. Allez-y.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Ce débat serait interminable si nous devions nous lancer dedans.

J'aimerais vous entretenir de quelque chose qui m'est arrivé il y a quelques années. Comme vous le savez, je représente le comté de Durham, où General Motors est un grand producteur de châssis de camion. Dans ma région, on construit également des carrosseries de camion. Certains utilisateurs secondaires achetaient alors les châssis de camion, puis fabriquaient la carrosserie eux-mêmes.

Nous parlons bel et bien de la sécurité des véhicules automobiles, et je ne pense pas que vous me direz que cela déborde le cadre de ce projet de loi.

Pour revenir à mon exemple, les utilisateurs secondaires ont allongé la carrosserie du camion en créant une plate-forme plus longue à l'arrière du camion. Mais le problème, c'est que le système d'indicateurs de feux de freinage était conçu en fonction du châssis original, système qui se trouvait sous la nouvelle plate-forme d'acier. Cela a été la cause de nombreux accidents, dont certains très graves, puisque la nuit, on ne pouvait voir les feux de freinage. En d'autres mots, il n'y a pas d'indicateurs de feux de freinage à l'arrière du camion. Il y a eu de nombreux incidents où des conducteurs ont essayé de doubler ces véhicules la nuit et se sont retrouvés sous le camion; certains conducteurs ont été même décapités.

Quand j'ai pris connaissance de ce dossier, j'ai découvert qu'il n'y avait pas de cadre réglementaire suffisant pour régir les carrosseries de camion modifiées. Pourriez-vous réagir à cela? Ce projet de loi règle-t-il ce problème?

M. Derek Sweet: Monsieur le président, je m'excuse de décevoir le député, mais la réponse est non. Cependant, les normes de sécurité pour les nouveaux véhicules sont une responsabilité fédérale. Cette responsabilité incombe à ma direction et à celle de M. Elliott en vertu de la Loi sur la sécurité des véhicules automobiles et non de la Loi sur le transport par véhicule à moteur. La Loi sur la sécurité des véhicules automobiles investit le gouvernement fédéral du pouvoir d'établir des normes de sécurité pour les nouveaux véhicules.

La question soulevée par le député est compliquée, puisqu'il s'agit, si j'ai bien compris, du cas où un utilisateur secondaire achète le châssis d'un fabricant d'équipement original, le modifie puis conduit le véhicule sur la route. C'est quelque peu compliqué, car notre pouvoir s'applique exclusivement à la vente de la pièce originale du fabricant. Nous nous en remettons aux autorités provinciales pour l'application des lois régissant le marché secondaire, comme vous l'avez bien indiqué. À partir du moment où l'on modifie un véhicule, une fois celui-ci vendu, la responsabilité n'est plus fédérale, mais plutôt provinciale.

Peut-être seriez-vous rassuré d'apprendre que toutes ces questions font l'objet de discussions avec le Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé (CCATM). Monsieur le président, si vous le souhaitez, nous pourrions entreprendre des recherches pour savoir où en sont les discussions à l'heure actuelle sur ce sujet.

M. Alex Shepherd: Je vous poserai une autre question qui déborde peut-être encore une fois le cadre de ce projet de loi. Je vois bien des camions sur la route qui ont été modifiés, mais il y a aussi le cas des gros camions à ordures qui transportent des grosses bennes à ordures, et je vois qu'à l'arrière de ces camions, il y a une sorte de saillie en acier qui n'est pas éclairé. C'est le même type de problème.

Je pense que si nous parlons de sécurité des véhicules automobiles, nous devons manifestement... Vous dites que cela relève d'un autre texte législatif, la loi complémentaire, mais si nous nous préoccupons de la sécurité des véhicules automobiles, nous devons, de toute évidence, nous inquiéter de cette question aussi.

• 1130

Il y a de plus en plus de transformations de véhicules. Je pense que bon nombre des châssis de camion fabriqués sont vendus à des transformateurs, qui reconstruisent le camion en quelque sorte.

M. Derek Sweet: Monsieur le président, le député trouverait peut-être intéressant d'apprendre que la Loi sur la sécurité des véhicules automobiles, que je viens d'évoquer, fait actuellement l'objet d'un examen interne en collaboration avec quelques-unes des principales parties concernées. Nous réaliserons d'importants projets dans ce dossier cette année. J'ajouterai que cela ne déborderait pas le cadre de notre examen et que nous pourrions étudier cette question en particulier. Nous ferons de notre mieux pour inclure cette question dans notre examen de la Loi sur la sécurité des véhicules automobiles.

M. Alex Shepherd: Je présume qu'en préparant ce projet de loi, vous avez examiné une sorte de bilan historique des infractions commises par les conducteurs, notamment les transporteurs—j'imagine que vous avez considéré ce genre de choses.

M. Derek Sweet: Oui, dans le cadre du projet de loi S-3, c'est-à-dire la Loi modifiant la Loi sur les transports routiers, comme l'a indiqué M. Elliott. En établissant des cotes de sécurité, on prend en considération de nombreux facteurs, notamment le dossier du conducteur et le registre d'inspection du véhicule.

M. Alex Shepherd: Est-ce que vous le faites par transporteur? Supposons que je suis le propriétaire d'une société de transport XYZ, est-ce que vous examineriez mon dossier?

M. Derek Sweet: C'est bien cela.

M. Alex Shepherd: Que se passe-t-il alors si la société de transport XYZ décide de se réinventer en devenant Camionnage Algoma? Est-ce que le dossier suit la société ou est-ce qu'on ouvre un nouveau dossier?

M. Derek Sweet: Non, en fait, la norme 14 renferme des dispositions concernant la transition ou la métamorphose d'une société en une autre. On y dispose notamment que les dossiers d'une société l'accompagnent à la création d'une nouvelle entité. Autrement dit, la province est tout à fait au courant des antécédents de la société en matière de sécurité routière.

Le président: Monsieur Laframboise, avez-vous d'autres questions à poser au nom du Bloc Québécois.

[Français]

M. Mario Laframboise: Toutes les provinces ont accepté la norme n° 14. Est-ce qu'on se comprend bien? Est-ce que vous êtes d'accord avec moi?

M. Derek Sweet: Oui, c'est ça.

M. Mario Laframboise: Actuellement, les provinces travaillent fort avec votre ministère en vue de l'harmonisation. Est-ce vrai? Vous avez dit, monsieur Sweet, que vous discutiez depuis six à neuf mois et que les discussions n'étaient pas encore terminées. J'ai l'impression qu'il va y avoir encore beaucoup de discussions avant qu'on réussisse à s'harmoniser. Est-ce que je comprends bien?

M. Derek Sweet: Oui. Il ne reste que quelques détails à résoudre, et les discussions vont très bien, je crois.

M. Mario Laframboise: Là on va différer, vous et moi. Vous dites qu'il reste quelques détails à régler. Tout est basé sur l'établissement de la cote de sécurité. Le grand principe est que partout au Canada, on soit capable de suivre une entreprise ou un camionneur, d'établir le bilan de ses infractions et d'obtenir sous forme informatique, comme on le souhaite tous, l'état de son dossier. Est-ce que c'est ça?

M. Derek Sweet: Oui, c'est ça.

M. Mario Laframboise: Théoriquement, le projet de loi devrait faire l'affaire des provinces. Elles auraient dû le demander parce que, finalement, ce n'est pas le gouvernement fédéral qui applique ces normes. Ce sont les territoires qui les appliquent. Ce n'est pas vous. Vous n'avez aucun inspecteur sur les routes. Vous n'avez personne qui assure la sécurité. Ce n'est pas vous qui vous chargez d'appliquer les normes; ce sont chacun des territoires et chacune des provinces. Est-ce vrai?

M. Derek Sweet: En effet.

M. Mario Laframboise: Je vous répète que la province de Québec, au moment où on se parle, ne vous a pas demandé d'adopter ce projet de loi pour la simple et bonne raison que les négociations ne sont pas encore assez avancées. C'est ce que j'ai de la difficulté à comprendre. Pourquoi le déposer à ce moment-ci, alors que les provinces doivent s'entendre entre elles sur des normes? J'écoutais votre discours. C'est vrai qu'il y a des articles sur l'intégration des cotes et des normes canadiennes et américaines, mais il va falloir commencer par intégrer nos propres cotes à l'intérieur des provinces canadiennes.

• 1135

Je reviens à ma question du début. Pourquoi déposer à ce moment-ci ce projet de loi basé sur la norme n° 14, qui est acceptée par toutes les provinces pour lesquelles on a un problème d'harmonisation?

Je m'adresse maintenant à mes collègues. Le transport à travers le Canada n'est pas facile. On est un pays de ressources naturelles. On n'a qu'à penser aux poids permis à l'intérieur de chacune des provinces. Ce n'est pas pour rien qu'il y a des provinces qui tolèrent des poids plus lourds sur leur territoire. Tout dépend des matériaux qu'on transporte et du type d'industrie qu'on a à l'intérieur de chacune des provinces. Donc, ce n'est pas simple.

Au moment où on se parle, les provinces travaillent très fort en vue de s'harmoniser, et je vous répète que vous déposez trop tôt votre projet de loi. Je n'en reviens pas encore. Les provinces, du moins la province de Québec, ne sont pas prêtes, tout simplement parce qu'elles n'ont pas eu le temps de compléter leurs analyses et leurs harmonisations. Arrêtez de nous dire que la province de Québec est d'accord sur le dépôt du projet de loi au moment où l'on se parle. Ce n'est pas le cas. Je n'en reviens tout simplement pas. Pourquoi déposer ce projet de loi maintenant, alors qu'il y a encore beaucoup de travail à effectuer entre les territoires et les provinces pour arriver au même objectif? Ils sont tous d'accord sur la norme n° 14. Tout ce qu'ils veulent, c'est d'être capables de l'appliquer et de pouvoir dire à la population de leur province et du Canada qu'on peut maintenant suivre une entreprise d'un bout à l'autre du Canada. Je n'en reviens pas. Le délai nous aurait peut-être permis d'intégrer à ce projet de loi les recommandations de Mme Desjarlais sur les heures de travail.

Vous me dites qu'il faut commencer quelque part. Moi, je vous dis que vous partez trop tôt. Si on l'avait fait au moment où on aurait dû le faire, peut-être aurait-on pu faire un projet un petit plus consistant qui aurait inclus les heures de travail. Je reviens toujours à ma même question: pourquoi à ce moment-ci?

M. William Elliott: Merci, monsieur le président. Nous sommes absolument d'accord avec l'honorable député que ce n'est pas facile, mais nous sommes aussi d'accord avec les provinces.

[Traduction]

Comme le député l'a mentionné, nous avons conclu une entente avec les provinces au sujet de la norme numéro 14. Nous nous sommes mis d'accord pour mettre cette norme en oeuvre en adoptant des lois et des règlements au niveau fédéral et provincial. Et comme je l'ait dit, certaines provinces sont déjà légiférées. Il reste encore quelques détails à mettre au point pour la mise en oeuvre. Encore une fois, il s'agit de voir quelles sont les mesures à prendre.

Le ministre et d'autres intéressés ont émis des préoccupations quant à l'uniformité de l'application d'un code canadien de sécurité. Nous ne pensons pas souhaitable d'attendre que tout le monde soit d'accord sur chaque détail pour faire avancer ce projet là où il est possible de réaliser des progrès. Si les événements s'étaient déroulés autrement, nous aurions pu peut-être proposer des changements à une autre norme. On pourrait se demander pourquoi nous ne nous occupons pas de toutes les normes en même temps. Mais comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, monsieur le président, il y a 15 normes. Les difficultés que nous avons éprouvées pour atteindre notre objectif commun, l'harmonisation, ne seraient pas surmontées plus rapidement, selon nous, si nous attendions de résoudre chaque problème avant d'aller plus loin.

[Français]

M. Mario Laframboise: Monsieur le président, il reste une chose. Ce n'est pas le gouvernement fédéral qui applique les normes. Vous me reprendrez si j'ai tort, mais vous n'avez même pas les moyens de les faire appliquer. Donc, vous vous devez de vous entendre avec les provinces. Je ne comprends toujours pas.

• 1140

Vous êtes en train de me dire que s'il n'y a pas unanimité, s'il y a des dossiers sur lesquels on ne s'entend pas... Qu'est-ce que vous allez faire à la province qui va décider de le refuser parce qu'elle n'est pas encore prête? Vous allez le lui imposer? Quelle structure avez-vous mise en place pour la forcer? Vous n'en avez même pas dans votre projet de loi. Vous n'avez pas de structure pour les y forcer.

Vous devez vous entendre. Vous déposez un projet de loi dans lequel, au moment où on se parle, il n'y a pas d'entente. Je ne comprends pas. Je vous répète que je ne comprends pas. Quant à moi, selon la structure telle qu'elle est là, vous devez avoir un consensus des provinces, et je pense que c'est le message qu'elles vous livrent. Si vous êtes en train de nous dire que vous n'avez plus besoin de consensus, dites-moi comment vous allez le faire respecter. Est-ce que vous avez mis en place des moyens de forcer les provinces à le respecter? Avez-vous mis vos propres réseaux d'inspection et de vérification dans les provinces qui ne l'appliqueront pas? Vous n'êtes pas prêts à cela. Vous avez besoin du consensus.

Si vous me dites que vous n'avez plus besoin du consensus, comme vous l'avez dit plus tôt, on a un problème, parce que tout ce projet de loi est basé sur un consensus avec les provinces, cela pour une simple et bonne raison: ce sont elles qui le mettent en application sur le terrain. Vous n'avez aucun moyen de le mettre en application, à moins que vous me disiez aujourd'hui que vous allez lancer toute une opération de mise en application et que vous allez engager vos propres vérificateurs. Si c'est le cas, il faudrait le savoir.

[Traduction]

M. William Elliott: Merci, monsieur le président.

Je suis d'accord avec le député pour dire que nous avons besoin d'un consensus. Je reconnais également que nous n'accompagnons pas les policiers sur les routes et les chemins du Canada. Nous comptons sur les provinces pour faire appliquer la loi.

Ce que je ne comprends pas très bien c'est l'idée selon laquelle nous serions prêts à agir unilatéralement ou sans consensus. Ce n'est pas du tout le cas. Nous procédons à la mise en oeuvre d'une norme sur laquelle tout le monde est d'accord. Ce projet de loi résulte de l'entente que nous avons conclue avec les provinces, selon laquelle les deux niveaux de gouvernement vont adopter des lois et des règlements.

Nous devrons nous mettre d'accord sur plusieurs choses, y compris la date de mise en oeuvre. Une fois les lois et règlements en vigueur, nous veillerons à ce qu'ils soient appliqués de concert avec les provinces. Le député a parfaitement raison de dire que nous comptons sur les provinces pour faire appliquer la loi. Ce sont elles qui attribueront les cotes de sécurité que prévoit le projet de loi. Ce sont elles qui recueilleront et partageront les données dont il est question dans cette mesure. Nous sommes entièrement d'accord avec presque tout ce que le député a dit.

Toutefois, on semble croire que nous comptons agir unilatéralement. Ce n'est pas du tout notre intention.

[Français]

M. Mario Laframboise: Monsieur le président, j'aimerais faire une dernière petite intervention pour dire au témoin que la province de Québec n'a pas donné son accord. Arrêtez de dire que le Québec est d'accord sur votre projet de loi. Arrêtez cela. Au moment où on se parle, le Québec n'est pas d'accord. C'est simple. Je ne voudrais pas qu'on revienne là-dessus. Ça fait trois interventions que vous faites en disant que toutes les provinces sont d'accord. La province de Québec n'est pas d'accord sur le dépôt de ce projet de loi en ce moment, et j'espère que mes collègues vont vérifier dans chacune de leurs provinces respectives.

[Traduction]

Le président: Très bien. Merci, Mario.

Monsieur St. Denis, à vous.

M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie d'être venus. J'aurais deux brèves observations à formuler avant de vous poser trois courtes questions pendant mes cinq minutes.

Premièrement, pour ce qui est des questions qu'a soulevées mon collègue M. Laframboise, je crois qu'il est important que le gouvernement fédéral adopte une loi à un moment donné. Qu'il soit le premier ou le dernier à le faire, il faut qu'il le fasse. Selon moi, mieux vaut le faire plus tôt que plus tard afin d'inviter les autres gouvernements à nous emboîter le pas.

• 1145

Peut-on dire que si nous adoptons ce projet de loi maintenant ou bientôt, nous ne compromettrons en rien le programme législatif des provinces? Nous n'allons pas mettre de bâtons dans les roues des provinces ou des territoires en adoptant cette mesure maintenant, si j'ai bien compris.

M. William Elliott: C'est exact, monsieur le président. Cette norme et ce projet de loi ont été approuvés par le CCATM qui comprend des représentants du gouvernement fédéral, des diverses parties prenantes ainsi que de la totalité des provinces et des territoires.

M. Brent St. Denis: Deuxièmement, il y a la question que Mme Desjarlais a soulevée dans le même contexte, celle des heures de service dont Larry Bagnell a parlé également. C'est un peu comme lorsque des architectes et des constructeurs conçoivent et construisent un hôpital pour tenir compte à la fois des besoins de la salle d'urgence et des salles d'opération, mais également des changements qui pourraient se produire à l'avenir. La norme permet donc de tenir compte des heures de service actuelles de même que des changements qui pourraient être apportés ultérieurement à cet égard. Même s'il existe peut-être un lien, il n'y a pas de lien organique entre le projet de loi et les détails concernant les heures de service. Ai-je bien décrit la situation?

M. William Elliott: C'est exact, monsieur le président. Si l'on décide d'apporter des changements à la norme concernant les heures de service, il ne devrait pas être nécessaire d'apporter des modifications à ce projet de loi ou à la loi.

M. Brent St. Denis: Très bien.

J'ai une ou deux très brèves questions à vous poser. En ce qui concerne les cotes de sécurité, s'il existe quelque part une entreprise de camionnage ABC—j'espère que non—un consommateur ou un sous-traitant pourra-t-il vérifier sa cote de sécurité dans le site Web d'une province?

M. Derek Sweet: En effet, monsieur le président. Je crois qu'en Ontario on peut déjà s'informer sur la cote de sécurité d'une entreprise dans un site Web, dont je ne connais pas l'adresse. Toutes les cotes de sécurité seront mises à la disposition du public.

M. Brent St. Denis: Le Sénat nous a renvoyé le projet de loi avec un amendement concernant les rapports annuels au Parlement. Pourriez-vous nous expliquer ce que propose cet amendement. Je voudrais en effet informer mes collègues que nous allons proposer un amendement qui annulera celui du Sénat. Pourriez-vous nous expliquer quel était le rapport prévu avant l'amendement et ce que l'amendement du Sénat cherche à faire. Je crois nécessaire d'en avertir mes collègues.

M. Derek Sweet: La Loi sur les transports routiers contient une disposition prévoyant un rapport annuel qui est expirée depuis plusieurs années. Autrement dit, cette loi contenait une disposition d'abrogation à l'égard des rapports annuels. Lorsque ce rapport était exigé, il comprenait deux volets. Le ministère devait faire un rapport sur la sécurité de l'industrie des transports routiers. Il fallait ensuite produire un rapport sur la mise en oeuvre du Code canadien de sécurité.

Nous avons travaillé très fort à la préparation de ces rapports et je crois qu'il y a eu en tout cinq rapports annuels. Néanmoins, monsieur le président, cela posait de grandes difficultés. Nous avions généralement du mal à obtenir des données sur la sécurité. Nous obtenons toutes nos données des provinces et le problème n'est pas dû à un manque de coopération de leur part, mais simplement à la difficulté de saisir toutes ces données. Elles sont parfois périmées. Nos dernières statistiques sur les collisions, par exemple, datent de deux ans.

En ce qui concerne l'application des normes du Code canadien de sécurité, comme vous le savez, elles sont très détaillées. Il est difficile de savoir exactement où en est la mise en oeuvre de normes aussi détaillées dans chaque province. Par conséquent, monsieur le président, les rapports qui ont été présentés... Je peux certainement dire qu'ils étaient périmés dès leur publication. Je ne suis donc pas vraiment certain de l'utilité des renseignements fournis. J'ajouterais que, si j'ai bien compris, l'amendement du Sénat propose le même genre de rapport.

• 1150

Cela dit, j'ajouterais que le ministère établit plusieurs autres rapports statistiques et, selon nous, tous les renseignements que le Sénat désirait obtenir figurent déjà dans les rapports que nous fournissons sous une forme ou sous une autre.

Le président: D'accord, votre temps est écoulé.

Nous allons commencer les tours de cinq minutes avec madame Mme Desjarlais du NPD.

Mme Bev Desjarlais: Merci. Puisque je ne dispose que de cinq minutes, je vais les utiliser pour faire quelques remarques et vous poser certaines questions.

À la page 11 de votre classeur—il s'agit de l'article 5 du projet de loi, un nouvel article 7—il est question des certificats d'aptitude en matière de sécurité. Les gens ont beaucoup entendu parler de ces certificats d'aptitude en matière de sécurité et tout le monde pourrait s'imaginer que c'est un peu comme une vérification de voiture, assortie d'un rapport qui vous permet de vous enregistrer. Mais je pense que si on y regarde plus près—et on n'a même pas besoin de faire cela—on explique le paragraphe 7(2) du projet de loi: «La forme du certificat importe peu» en disant ceci:

    Les provinces attribueront une «note d'aptitude à la sécurité» à tous les transporteurs routiers extraprovinciaux de sorte qu'une autorisation d'exploitation délivrée par une province à un transporteur extraprovincial constituera, en soi, un certificat d'aptitude à la sécurité.

Ainsi, l'autorisation d'exploitation délivrée par une province devient automatiquement un certificat d'aptitude à la sécurité. Le transporteur ne pourra pas produire un document distinct indiquant: «J'ai un certificat d'aptitude à la sécurité, si bien que je suis autorisé à exploiter ce véhicule».

Je voulais que ce soit bien clair car on dit à plusieurs endroits qu'un certificat d'aptitude à la sécurité n'est pas exigé. Le transport routier est interprovincial et traverse même d'autres frontières.

Maintenant, à l'article 6, «Exemptions, règlements, transporteurs étrangers et mesures de contrainte», on constate que le paragraphe (2) «permet au ministre de fixer des conditions à cette exemption». Rappelez-vous ce que vous m'avez dit tout à l'heure, que jamais nous ne ferions cela.

    Du fait qu'une exemption peut viser une norme en matière de sécurité, un nouvel alinéa énonce les conditions auxquelles une exemption peut être accordée.

Et ensuite on poursuit, et je voudrais poursuivre dans la même veine que M. Laframboise. Qui va surveiller cela? Il n'y a pas de certificat d'aptitude en matière de sécurité rattaché au véhicule, car on compte sur ce que chaque province délivre pour autoriser l'exploitation d'un camion ou d'un autocar. Qui va surveiller la situation?

Ensuite, on dit que l'on peut tout simplement consulter un site Internet pour savoir quelle est la cote d'aptitude en matière de sécurité de chacun. Monsieur Sweet, vous nous avez dit qu'il était difficile d'obtenir des données sur la sécurité routière. Elles sont difficiles à obtenir, et elles sont un peu périmées. Dites-moi pourquoi je devrais me sentir rassuré à cause de votre loi sur les transports routiers?

M. Derek Sweet: En ce qui concerne les données, je songeais aux données nationales réunies par Transports Canada. Elles nous sont transmises par les provinces. Nous prenons ces données brutes, nous les triturons et nous produisons un rapport national.

Mme Bev Desjarlais: Je m'excuse mais vous venez de dire que les données n'étaient pas fiables. Vous vous fondez sur ces données pour planifier. Les provinces vous donnent ces données. Si elles sont inutiles, à quoi bon les avoir?

M. Derek Sweet: Permettez-moi de terminer, monsieur le président. Les données que les provinces vont obtenir d'un transporteur sécuritaire sont ni plus ni moins vivantes. On y trouvera une description juste et courante du rendement du transporteur routier sur le plan de la sécurité. Au niveau fédéral, nous ne sommes à vrai dire pas intéressés par ce genre de données. Elles doivent servir à ceux qui ont la responsabilité de mettre la loi en application, en l'occurrence les provinces. Elles utiliseront ces données pour préparer les cotes de sécurité. Quant à nous, des agrégats de données nous intéresseraient.

• 1155

La députée a cité deux ou trois autres points. Elle a tout à fait raison: il n'est pas nécessaire qu'un certificat d'aptitude à la sécurité se présente sous une forme particulière. Nous pensons qu'il s'agit simplement d'une modalité moderne, suivant laquelle le transporteur ou le chauffeur n'a pas besoin de porter sur lui une carte ou un certificat d'identification particulier. Le fait qu'un transporteur soit en exploitation est connu de la part de ceux qui font respecter la loi.

L'honorable député a demandé qui surveillerait la situation: ce seront les provinces. Les provinces ont des ressources appréciables consacrées à l'application de ce régime de surveillance. Les provinces peuvent facilement faire enquête au moment où un transporteur passe à la pesée, ou encore quand il fait l'objet d'une inspection sur la route, et elles sont ainsi renseignées sur la cote de sécurité du transporteur. Il suffit de faire une demande de renseignements, par voie électronique, auprès de la province où le véhicule est immatriculé.

Pour ce qui est des exemptions, l'honorable député a fait remarquer que ces exemptions peuvent être assorties de conditions. L'objectif ici est de permettre une certaine souplesse dans des circonstances particulières. Par exemple, il pourrait s'avérer utile que le gouvernement fédéral, les provinces, les transporteurs mêmes, mènent à bien certaines recherches portant sur des aspects de la sécurité du transport routier. À cet égard, nous pourrions, en vertu de modalités qui ne compromettraient pas la sécurité—et il faudrait un accord,—exempter un transporteur de certaines dispositions ou permettre cette recherche dans des conditions précises, dans des limites de temps. Nous voulons ajouter cette souplesse aux dispositions de la loi, mais nous estimons que les garanties nécessaires sont en place.

Mme Bev Desjarlais: C'est tout. Merci.

Le président: D'accord.

Monsieur Fitzpatrick, êtes-vous prêt?

M. Brian Fitzpatrick: Oui.

Pour ma gouverne, si j'étais un camionneur interprovincial au Canada, me déplaçant dans presque toutes les provinces, exigerait-on que je sois certifié dans chacune des provinces en vertu des ententes concernant les assurances et les autorisations, ou pourrais-je éviter une grande partie de ces tracas?

M. Derek Sweet: Vous n'auriez pas à vous faire certifier dans chacune des provinces. La loi tente d'établir un guichet unique, si l'on veut, suivant lequel le transporteur est certifié dans une province seulement, alors que son parc de camions pourra traverser n'importe quelle province du Canada, du fait qu'il détiendra un certificat d'aptitude en matière de sécurité.

M. Brian Fitzpatrick: D'accord. Un camionneur qui viendrait des États-Unis au Canada de temps à autre pourra-t-il profiter du même régime?

M. Derek Sweet: Comme je l'ai indiqué il y a un instant, nous souhaitons conclure une entente de réciprocité avec les États-Unis. Ainsi, les États-Unis s'occuperaient de leurs transporteurs et se prononceraient sur le plan de la sécurité et à d'autres égards. Le cas échéant—si un transporteur se trouve sur la route, on présume qu'il est sécuritaire—les camionneurs auraient l'autorisation d'entrer au Canada en vertu d'une entente réciproque, tout comme nos camionneurs ainsi qualifiés pourraient entrer aux États-Unis.

M. Brian Fitzpatrick: Je voudrais faire une remarque avant de passer à mes autres questions. Ce n'est pas parce que les données viennent d'une province qu'elles ne sont pas fiables. Dans les provinces, il y a des gens compétents qui savent comment faire la collecte des données, tout aussi bien qu'au gouvernement fédéral. On ne devient pas subitement plus brillant parce que l'on déménage à Ottawa. Je tenais à apporter cette précision. Je suis sûr que les données du Manitoba et de la Saskatchewan sont excellentes, à en juger d'après les représentants de ces provinces qui se trouvent ici.

Est-il question dans ce projet de loi des produits dangereux et de leur transport par camion?

M. Derek Sweet: Non. C'est une autre loi, la Loi sur le transport des produits dangereux, qui traite de ces questions.

M. Brian Fitzpatrick: Sans vouloir m'écarter du sujet, nos lois à cet égard sont-elles semblables à celles des Américains?

M. Derek Sweet: Ce n'est pas mon domaine de spécialisation, mais si je ne m'abuse, le transport des produits dangereux est de façon générale géré en vertu de conventions des Nations Unies, et les exigences là-bas sont assez semblables à celles d'ici. M. Elliott a peut-être une réponse plus précise à vous donner.

M. William Elliott: C'est ce que je pense aussi. Je tiens à préciser que nous ne voulons pas laisser entendre que les données des provinces ne sont pas fiables.

• 1200

Je pense que M. Sweet parlait plus particulièrement des données que l'on devait recueillir quand le régime précédent était en vigueur. On l'a dit, si nous voulons avoir des cotes de sécurité pour les transporteurs, il nous faut des données solides, fiables, actuelles.

M. Brian Fitzpatrick: Je ne voulais pas insinuer que vous prétendiez cela mais je voulais préciser les choses.

M. Bev Desjarlais: Qui avait dit cela, selon vous, monsieur Fitzpatrick?

M. Brian Fitzpatrick: Vous avez parlé des données provinciales, n'est-ce pas?

Mme Bev Desjarlais: Non. Je rappelais qu'il avait dit que les données n'étaient pas exactes, et pourtant on les utilisait pour accorder des certificats d'aptitude en matière de sécurité.

Le président: Je vous prie de vous adresser au président, s'il vous plaît.

Brian Fitzpatrick: J'ai une dernière question. Dans le secteur privé, aujourd'hui, les entreprises qui tiennent à la qualité et à la sécurité, comme par exemple le constructeur d'avions Boeing, où la sécurité est très importante, insistent sur les normes ISO. Pour ces entreprises, ces normes jouent un rôle de premier plan pour garantir la qualité, et les dirigeants nous disent qu'elles sont beaucoup plus importantes que les règlements du gouvernement.

Votre ministère a-t-il envisagé d'appliquer le même système s'agissant des règlements concernant la sécurité?

M. William Elliott: Permettez-moi de vous répondre en commençant par parler d'autres moyens de transport.

M. Sweet, comme on l'a signalé au début, est le directeur général suppléant pour la sécurité routière. Quant à moi, j'ai des responsabilités également concernant la sécurité d'autres modes de transport. En fait, système intéresse vivement le ministère, qui y travaille activement. Nous venons d'adopter des règlements concernant les chemins de fer qui exigent la mise en place de systèmes de gestion de la sécurité. Ces systèmes sont d'usage courant dans l'industrie de l'aviation et nous travaillons en étroite collaboration avec cette dernière quand il s'agit d'élaborer de tels systèmes et pour finir, les règlements qui leur sont assortis.

Toute cette notion d'un système ISO appliqué aux systèmes de gestion de la sécurité de façon plus générale, est liée à ce que j'ai dit dans mes remarques préliminaires, à savoir que la sécurité est une responsabilité partagée que tous les intervenants doivent assumer avec le plus grand sérieux. Il faut des systèmes, de la documentation et des processus pour promouvoir une culture de la sécurité et des pratiques sécuritaires.

M. Sweet a peut-être quelque chose à ajouter.

M. Derek Sweet: L'honorable député a posé une question très intéressante sur le code canadien de sécurité. L'Association canadienne des normes, et ce n'est pas l'ISO en soit, même si c'est une institution canadienne très respectée, a adopté la norme no 14 du code canadien de sécurité et l'a bonifiée, jusqu'à un certain point. Elle peut servir désormais à l'établissement des cotes de sécurité. Par conséquent, un transporteur qui se serait mis en contact avec l'Association canadienne des normes, et qui bien sûr aurait répondu aux exigences de la version de CSA de la norme n« 14, obtiendrait l'estampille d'approbation CSA.

Le président: D'accord. Merci, Brian. Votre temps est écoulé.

Monsieur Serge Marcil des libéraux, cinq minutes.

[Français]

M. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.): J'ai été un petit peu en retard et je veux savoir ce qu'est un certificat d'aptitude à la sécurité. Actuellement, il existe une Loi sur les transports au Canada. Actuellement, dans chacune des provinces, pour obtenir un permis de transport, les gens doivent se conformer à des normes, à des normes de sécurité également. Quelle est cette idée d'un certificat d'aptitude à la sécurité? J'aimerais qu'on m'explique ce que cela vient changer aux transports actuels. Je pense que c'est ça, le fond de la question. Qu'est-ce qui vous a amenés à proposer un certificat d'aptitude à la sécurité?

• 1205

[Traduction]

M. Derek Sweet: Monsieur le président, la loi rend—ou rendra—obligatoire le certificat d'aptitude en matière de sécurité. Tout transporteur devra en posséder un pour avoir une autorisation d'exploitation. Ce certificat est délivré à tout transporteur qui obtient une cote de sécurité satisfaisante.

La norme n« 14 établit la façon dont la cote de sécurité est fixée. Si elle est satisfaisante, le transporteur concerné obtiendra son certificat d'aptitude en matière de sécurité et comme nous l'avons dit plus tôt, il pourra se déplacer d'un bout à l'autre du Canada.

[Français]

M. Serge Marcil: Monsieur le président, je demandais au témoin pourquoi on avait amené ce nouveau concept d'un certificat d'aptitude à la sécurité. Il n'en existe pas actuellement. En ce moment, les compagnies de transport interprovincial ne sont pas obligées de se conformer à des règlements sur la sécurité des transports.

Vous me dites que dorénavant, avec l'application de cette loi, les compagnies de transport seront obligées d'être certifiées pour pouvoir circuler sur le territoire canadien. Je comprends ça. Je vous demande pourquoi on exige cela. Est-ce qu'il y a plus de problèmes aujourd'hui qu'il y en avait auparavant?

Évidemment, il doit y avoir un tarif de rattaché à ce certificat d'aptitude. On dirait qu'il y a toujours une façon d'aller chercher indirectement des taxes chez les citoyens. Cela suppose que les compagnies de transport seront obligées de payer pour obtenir leur certificat. Elles seront obligées de payer, comme quand on va chercher des plaques d'immatriculation ou un permis de transport. À cela, on va ajouter un certificat.

Je veux savoir pourquoi on ajoute cela. Y a-t-il une raison urgente ou fondamentale qui, tout à coup, nous oblige, nous, les Canadiens, à dire qu'il y a un gros problème de sécurité au niveau des compagnies de transport et qu'on va maintenant les évaluer? On va les coter. On va leur donner des normes, des standards, et il va falloir qu'elles se conforment à ces standards pour obtenir un certificat d'aptitude à la sécurité. Si elles l'obtiennent, elles vont pouvoir faire du commerce interprovincial. C'est ça, la question: pourquoi est-on arrivé à cela?

M. Derek Sweet: Monsieur le président, on y est arrivés, à mon avis, pour deux raisons primordiales. Tout d'abord,

[Traduction]

et je pense que nous le reconnaissons tous, est très importante. C'est assurément l'objectif premier du ministère comme on l'a dit. Un certificat d'aptitude en matière de sécurité tient compte exclusivement de la sécurité et indique qu'un transporteur est sécuritaire.

Deuxièmement, il y a désormais uniformisation dans tout le pays de la notion de certificat d'aptitude en matière de sécurité.

[Français]

Donc, la deuxième raison est qu'on essaie de mettre en oeuvre un système partout au Canada,

[Traduction]

si bien que tous les transporteurs vont être évalués selon le même régime. Par conséquent, nous aurons la garantie que tous les transporteurs, sur la route, ne posent pas de danger et ont reçu la cote qui convient.

Permettez-moi également d'ajouter, monsieur le président, que ce régime a fait l'objet de discussions avec tous les intervenants, les provinces et, surtout, les entreprises du secteur. Je pense que le secteur vous dirait qu'il est très favorable à ce concept et à l'idée d'obtenir une seule autorisation pour permettre aux entreprises de travailler n'importe où au Canada.

[Français]

M. Serge Marcil: Je suis d'accord. Je ne suis pas contre la sécurité. Ce n'est pas ça, mon point de vue. On est d'accord sur ça.

Lorsque j'étais au gouvernement à Québec, on a mis sur pied une sécurité particulière. On a créé une police de la route afin qu'on puisse faire des vérifications en tout temps, 24 heures par jour, 7 jours par semaine. On pouvait arrêter et on arrête encore aujourd'hui des camions sur la route pour faire des vérifications, etc.

Il y a déjà du travail qui doit se faire en Ontario, dans les provinces de l'Est, dans les provinces de l'Ouest au niveau de la sécurité. Je suis entièrement d'accord qu'on ait le top-notch pour la sécurité au niveau des routes et du camionnage. C'est qu'on en ajoute tout le temps.

• 1210

Je veux savoir pourquoi on est arrivé à ça, mais on ne me répond pas. Je n'ai pas tout à fait la réponse.

Voici ma deuxième question. Le Québec n'est pas nécessairement contre le projet de loi, mais il n'est pas prêt à l'appliquer intégralement tout de suite. Si le projet de loi était adopté et qu'une province au Canada n'était pas prête à l'appliquer, qu'arriverait-il à ce moment-là? Est-ce qu'il y a des délais? On parle toujours de consensus. On dit toujours qu'il y a un consensus au niveau des provinces et des territoires quant à l'amélioration de la sécurité sur les routes. On a vécu un problème au niveau des armes à feu et on a donc adopté une loi canadienne. Il y a des provinces qui n'étaient pas prêtes à l'appliquer. Au niveau de cette loi-ci, si une province, que ce soit le Nouveau-Brunswick, l'Île-du-Prince-Édouard, le Québec ou l'Ontario, n'était pas prête à l'appliquer, qu'arriverait-il?

[Traduction]

Le président: Pas de questions, Serge?

M. William Elliot: Merci.

Merci, monsieur le président.

Je devrais peut-être souligner que... Pour ce qui est de la question antérieure de l'honorable député, je voudrais rappeler que les certificats de sécurité sont délivrés par les provinces. Si une province—le Québec, par exemple—émet un certificat de sécurité, il est aussitôt reconnu par toutes les autres administrations du Canada.

Quant à la forme du certificat, comme je l'ai dit dans mes observations liminaires, il est important de préciser ce qui doit être harmonisé pour que la réglementation en matière de sécurité soit efficace et pratique et ce qui peut être différent d'une administration à l'autre sans que cela affecte l'ensemble de la réglementation. Nous n'avons pas jugé nécessaire d'imposer un formulaire normalisé. L'important, c'est que les principes de délivrance d'un certificat utilisés par une province soient les mêmes dans toutes les provinces, et que la cote accordée par une province soit la même que celle qu'aurait donnée toute autre province disposant des mêmes renseignements.

Pour ce qui est de la mise en oeuvre, il est vrai que les lois et la réglementation des diverses administrations—y compris, espérons-le, le gouvernement fédéral—arriveront avec de légers décalages les unes par rapport aux autres, mais l'objectif ultime est de les mettre en oeuvre de façon qu'elles s'harmonisent toutes. Nous ne prévoyons donc pas de situations où nous procéderions à la mise en oeuvre sans l'appui et la coordination de toutes les provinces. Nous mettrons la réglementation en vigueur en même temps que le Québec, le Manitoba et toutes les autres provinces ainsi que les territoires, de sorte que le régime fonctionnera dans tout le Canada.

C'est peut-être pour cela que je ne me suis pas expliqué aussi clairement que j'aurais dû le faire. J'ai éprouvé une certaine confusion causée par des questions portant sur le fait que nous agissons unilatéralement, parce que cela ne correspond pas du tout à nos projets. Nous n'avons nullement l'intention de faire cela et ce n'est pas ce que nous allons faire. La mesure législative que nous allons adopter ou, plus exactement, que nous espérons que vous adopterez, sera éventuellement adoptée à un moment légèrement différent de celui qu'auront choisi les provinces. Comme je l'ai dit dans mes observations liminaires, certaines provinces ont déjà adopté leur loi, mais la mise en oeuvre se fera en concertation et de façon coordonnée.

Le président: Très bien.

Mario, vous aviez d'autres questions?

[Français]

M. Mario Laframboise: Monsieur le président, dans la foulée de l'intervention de mon collègue M. Marcil, je dirai que le Québec n'est pas contre la norme n° 14, et vous le savez pertinemment. Le transport interprovincial est très compétitif. Donc, quand les cotes de sécurité vont s'appliquer, il faudra qu'elles s'appliquent de façon uniforme partout au Canada pour que les entreprises de chacune des provinces soient compétitives. Donc, une province n'a aucun intérêt à pénaliser ses entreprises si la cote n'est pas appliquée partout au Canada. Et c'est là que le bât blesse. Il n'y a pas encore une entente, une harmonisation d'intégration des cotes.

Vous avez répondu à la question de M. St. Denis plus tôt. C'est vrai que si vous adoptez ce projet de loi, ça ne changera rien dans la vie, mais c'est aussi vrai que si vous ne l'adoptez pas, ça ne changera absolument rien. Les négociations entre les provinces vont se poursuivre. Les provinces vont encore se parler et tenter de s'harmoniser, parce qu'elles ont toutes le même souci au moment où on se parle, qui est le même que le vôtre, et c'est de s'entendre. Mais on ne s'entend toujours pas.

• 1215

Je reviens toujours à ma question de départ: pourquoi déposer ce projet de loi tout de suite puisque, de toute façon, vous n'avez aucun moyen d'obliger les provinces à l'appliquer? Ce sont les provinces qui vont l'appliquer. Une province n'aura pas intérêt à pénaliser ses entreprises en appliquant la cote si cette dernière n'est pas uniforme partout au Canada, étant donné qu'il y a de la concurrence interprovinciale. Donc, vous vous devez d'avoir consensus. Je n'en reviens pas encore qu'en tant que fonctionnaires, vous recommandiez, à ce moment-ci, au gouvernement de l'appliquer. Cela aurait pu venir d'une volonté de toutes les provinces et du gouvernement fédéral. Il n'y a rien qui presse. Autant le fait de l'adopter ne pénalise personne, autant le fait de ne pas l'adopter ne changera rien. Les provinces qui appliquent la norme n° 14 vont continuer de l'appliquer, et celles qui ne l'appliquent pas vont continuer à chercher le consensus.

Le message qu'on lance en adoptant cette loi, c'est de dire aux citoyens qu'on a une norme de sécurité, mais que dans les faits, il n'y a pas encore d'harmonisation. Quant à moi, il n'y a aucune urgence à adopter ce projet de loi.

Je suis d'accord avec le gouvernement du Québec. Si on est une province responsable, une fois que le projet de loi sera adopté, il faudra s'y conformer, et je pense que c'est dans l'intérêt de tout le monde. Cependant, il faut s'assurer que nos entreprises ne seront pas pénalisées en termes de concurrence face aux entreprises des autres provinces. Donc, il faut que la norme soit uniforme partout et que tout le monde ait le même souci de sécurité, afin que les meilleures entreprises soient maintenues et que celles qui sont moins bonnes soient pénalisées de la même façon partout au Canada.

[Traduction]

M. William Elliott: Merci, monsieur le président.

L'objectif commun est de mettre en vigueur un système harmonisé. Pour que cela se fasse, il faut que le gouvernement fédéral et chacune des autres administrations canadiennes adoptent une réglementation. Nous devons disposer de systèmes d'encadrement, y compris les systèmes de collecte et de partage de l'information, et nous devons avoir des vues communes et une volonté de collaborer pour ce qui est de la mise en oeuvre.

Je suppose que le gouvernement fédéral pourrait choisir d'attendre que tous les autres aient terminé leurs préparatifs avant de présenter sa propre mesure législative. Il ne nous semble toutefois pas que cela soit la façon de fonctionner qui fasse la preuve d'une volonté de collaboration.

Nous croyons qu'il est dans l'intérêt des Canadiens et des principes de sécurité de faire tout notre possible pour que ce régime entre en vigueur le plus rapidement possible. Attendre que toutes les autres pièces du puzzle tombent en place ne garantit certainement pas que le régime sera en état d'être appliqué plus rapidement. En fait, nous croyons mieux pouvoir assurer l'instauration rapide du régime, en collaboration avec les provinces et les territoires, en agissant rapidement sur les mesures que nous devons prendre pour, dans ce cas-ci, disposer de la base législative pour l'adoption d'une réglementation fédérale.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Elliot.

Je donne la parole à M. Fitzpatrick, pour cinq minutes.

M. Brian Fitzpatrick: Selon moi, ce qui est bien, dans ce projet de loi, c'est le principe de guichet unique, valable pour tout le Canada. Trop souvent, le gouvernement fédéral n'a pas pris au sérieux ses pouvoirs constitutionnels de promotion du commerce est-ouest, et je trouve donc que cette disposition est une bonne chose.

Je me souviens d'une conversation que j'ai eue, il y a un bon nombre d'années, avec un camionneur qui se plaignait de toutes les exigences de réglementation provinciale auxquelles il devait satisfaire pour faire des affaires au Canada. Si ce projet de loi permet d'éliminer cet aspect du problème, c'est un résultat positif.

Lorsque le gouvernement fédéral parle de sécurité, de questions de transport et de choses semblables, il devrait... Il me semble qu'il est facile de présenter une réglementation et un projet de loi. L'instauration d'un régime de ce type nécessite habituellement des mises de fonds et il semble que, trop souvent, on laisse aux provinces le soin de régler cet aspect de la question.

Comme nous le savons, dans notre pays—et on fait beaucoup de beaux discours à ce sujet—le gouvernement fédéral a la possibilité de fournir des normes pour l'ensemble du pays. Il y a des différences considérables entre les ressources dont disposent les diverses provinces au Canada. Parler de la sécurité des transports routiers interprovinciaux au Canada sans s'occuper de l'infrastructure, c'est faire abstraction d'une très grande partie du problème. Je peux comprendre pourquoi le gouvernement fédéral ne veut pas se lancer dans ces questions: cela signifierait qu'il devrait dépenser de l'argent.

• 1220

Depuis que je suis ici, je constate que dès qu'il s'agit de faire des dépenses, le gouvernement fédéral n'est habituellement pas très enthousiaste. Il aime mieux laisser cela aux provinces. C'est essentiellement ce que j'ai à dire. Cela dit, au sujet du projet de loi, je crois qu'il a au moins le mérite de faire place nette dans le gâchis de la réglementation provinciale, ce qui constitue une amélioration par rapport à ce qui existait antérieurement.

Le président: Merci, Brian.

On me dit que je n'ai plus beaucoup de temps. J'avais cru comprendre que nous avions jusqu'à 12 h 30. Si les témoins veulent bien répondre brièvement, ce seront les dernières observations.

M. William Elliott: Merci, monsieur le président. Nous sommes certainement heureux de prendre connaissance des observations de l'honorable député.

Comme le ministre l'a dit, dans son dernier budget, le gouvernement fédéral a fait état de ce que le ministre appellerait un investissement modeste dans l'infrastructure routière. Le ministre n'estime certainement pas que ces dépenses soient à la hauteur de la demande. L'infrastructure routière du Canada a besoin de plus de fonds.

Le président: Très bien.

Mesdames et messieurs, je vous remercie beaucoup de votre comparution. Vos propos ont été utiles, et nous vous savons gré des précisions apportées. Merci d'être venus.

Une voix: Merci, monsieur le président.

Le président: Je ne vais pas continuer à travailler.

Je précise aux membres du comité qu'il nous reste de trois à cinq jours d'activité parlementaire. Or, nous avons un certain nombre de choses à faire. Au bas de la liste, il y a une rubrique qui a été encerclée. Nous commencerons par cela.

Notre attaché de recherche, M. Christopher, m'apprend... Nous avons eu la journée sur les transports aériens. Nous entendons traiter cela ainsi: il vous présentera ce qu'il croit avoir compris que vous voulez dire et ce qu'il croit avoir entendu les témoins dire. Nous allons devoir examiner ce texte et le retravailler pour qu'il soit conforme à notre façon de nous exprimer. Ensuite, l'attaché nous dira comment en disposer, soit en le déposant à la Chambre, soit en l'envoyant au ministre des Transports, accompagné d'une lettre.

Nous demandons que le 5 juin soit consacré à cela. Je saurai gré à l'un d'entre vous de proposer cela.

M. Brent St. Denis: Monsieur le président.

Le président: Oui, monsieur.

M. Brent St. Denis: Me fondant sur une discussion à bâtons rompus autour de la table, lors d'une de nos réunions récentes au sujet du projet de loi S-3, discussion où l'on croyait que deux ou trois réunions seraient suffisantes, je me demande si nous aurons également le temps, le 5 juin, d'entendre quelques derniers témoins, si nécessaire, et de passer à l'étude article par article.

Le président: Donc, vous voulez avoir les deux?

M. Brent St. Denis: Je pense qu'un rapport sur la journée du transport aérien est une bonne chose...

Le président: Bon.

M. Brent St. Denis: ...mais si nous pouvons tout faire le 5 juin... C'est peut-être l'ajournement de la Chambre qui vous préoccupe.

Le président: C'est bien.

M. Brent St. Denis: Si je devais tirer au sort entre le projet de loi S-3 et le rapport sur la journée du transport aérien, je serais obligé de dire que c'est le projet de loi S-3 qui est ma priorité personnelle.

Le président: Certes, mais c'est le travail du comité, et si vous voulez...

M. Brent St. Denis: C'est simplement mon avis.

Le président: Bon. Voulez-vous dans ce cas proposer que le comité s'occupe du projet de loi S-3 et qu'ensuite nous...

M. Brent St. Denis: Oui, si nous avons le temps, nous examinerons le rapport sur la journée du transport aérien.

Le président: Y a-t-il discussion sur cette motion? Oui, madame Desjarlais.

Mme Bev Desjarlais: Où est l'urgence?

Je voudrais respectueusement vous faire remarquer que je suis certaine que tout le monde a des journées très chargées la semaine prochaine avec d'autres choses qui se sont rajoutées. Il y a certainement des projets de loi qu'il est urgent de renvoyer à la Chambre, mais je ne vois absolument pas de raison de précipiter les choses sur le projet de loi S-3. Je ne vois pas pourquoi nous essayons de tout caser le 5 juin.

Le président: Ce ne serait pas de la précipitation; c'est simplement le choix du comité. Il dit simplement que s'il nous reste du temps...

Mme Bev Desjarlais: Nous parlions de l'étude article par article.

Le président: Bon.

Monsieur St. Denis, allez-y.

M. Brent St. Denis: À propos de ce que vient de dire Bev, je ne pense pas qu'il soit approprié de parler d'urgence ou de précipitation.

Je pense que nous aurons entendu un bon éventail de témoins d'ici jeudi, et mardi au besoin. Je ne vois pas pourquoi nous nous en passerions. Comme on nous l'a dit, il serait utile pour toute la cause de la sécurité des transports à l'échelle nationale que nous réglions cette question.

Le rapport sur la situation du transport aérien est aussi très important, mais je ne vois pas pourquoi nous ne passerions pas à l'étude article par article du projet de loi S-3 à la première occasion, c'est-à-dire mardi je l'espère.

• 1225

(La motion est adoptée)

Le président: Les attachés de recherche demandent que le greffier soit autorisé à inviter les intervenants à venir nous présenter des exposés d'ici septembre 2001 sur les heures de travail des camionneurs. Quelqu'un propose-t-il cette motion?

M. Brent St. Denis: Oui, moi.

M. Brian Fitzpatrick: De quelle motion s'agit-il?

Le greffier du Comité: Lors d'une des dernières réunions du comité, on a suggéré que j'envoie une lettre aux intervenants intéressés pour les inviter à présenter des mémoires au comité qui pourra les examiner et choisir les témoins qu'il convoquera.

Nous nous sommes organisés pour que je puisse le faire durant l'été. Quand les députés reviendront à la rentrée, je pourrai leur remettre ces mémoires avec la traduction, et le comité pourra déterminer le nombre de jours qu'il voudra consacrer aux témoins et s'il veut entendre ces témoins ici à Ottawa ou voyager. Il s'agit simplement d'aider les membres du comité à étudier les points de vue des différents témoins avant de choisir ceux qu'ils voudront entendre.

Le président: C'est juste une question de procédure.

Qui est pour cette motion?

Des voix: D'accord.

Le président: Mme Desjarlais est contre. N'oubliez pas, madame Desjarlais, que vous pouvez dire au greffier quels témoins vous souhaiteriez que le comité entende aussi.

Mme Bev Desjarlais: C'est justement ce qui me préoccupe, mais je me disais qu'il était inutile d'insister. Il y a bien des gens qui voudraient peut-être présenter des mémoires mais qui ne pourront pas le faire non plus durant l'été.

Le président: D'accord, merci.

Je vais maintenant demander aux témoins suivants de s'avancer; il s'agit de Canadians for Responsible and Safe Highways. Monsieur Evans, vous êtes prêt? Allez-y. Essayez de vous en tenir à cinq minutes exactement, pour que nous ayons le reste du temps à consacrer aux questions.

M. Bob Evans (directeur général, Canadians for Responsible and Safe Highway): Cela ne devrait pas poser de problème.

Le président: Bon, allez-y.

M. Bob Evans: Merci beaucoup.

Honorables sénateurs, la Canadians for Responsible and Safe Highways, CRASH, est très heureuse d'avoir été invitée à participer aux délibérations sur ce projet de loi S-3. Nous sommes une organisation nationale sans but lucratif qui veille à ce que l'on tienne compte du point de vue et des préoccupations du public lors de l'élaboration et de la mise en application des politiques gouvernementales sur la sécurité du camionnage.

N'oublions pas que la sécurité du camionnage, c'est la sécurité des personnes, pas celle des camions.

Au cours d'une année normale au Canada, près de 600 personnes sont tuées et 12 000 blessées dans des accidents impliquant quelque 40 000 gros camions. Comme le nombre et la taille de ces camions augmente de plus en plus sur les routes, il est important d'en assurer le plus possible la sécurité.

Il est inadmissible que les provinces aient aussi mal appliqué le code national de la sécurité depuis 12 ans alors que c'est la sécurité des Canadiens qui est en jeu. Ce qui inquiète mon association, c'est le fait qu'en prévoyant de continuer à déléguer les responsabilités interprovinciales en matière de sécurité du camionnage, nous allons encore nous heurter à des incohérences pendant des années. C'est notre préoccupation fondamentale.

Le Canada ne sera pas prêt à faire face aux nouvelles structures continentales de ce secteur dans le cadre de l'ALENA, en particulier quand les camions mexicains vont arriver au Canada. Nous craignons que certaines provinces ne soient incapables d'avoir une réglementation garantissant la sécurité des entreprises de transport continental, notamment les entreprises basées au Mexique.

• 1230

Je dois vous dire que le CRASH estime que le projet de loi S-3 ne présentera aucun intérêt tant que le gouvernement fédéral n'assumera pas sa responsabilité constitutionnelle qui est d'assurer au moyen d'une réglementation la sécurité du camionnage international et interprovincial.

Cela dit, notre organisation approuve entièrement deux amendements présentés au Sénat pour améliorer la transparence et la reddition de comptes dans ce projet de loi. Dans un de ces amendements, on demande que les résultats de l'examen statutaire de la nouvelle loi réalisé au bout de quatre ans soient présentés au Parlement et non pas simplement au Conseil des ministres chargés de la sécurité routière et du transport, qui fonctionne en secret. Dans l'autre amendement du Sénat, on demande au ministre de déposer au Parlement les rapports annuels sur la sécurité des camions et des autobus.

Nous souhaiterions qu'on inclue dans ce dernier rapport une mise à jour annuelle du respect par les provinces du code national de la sécurité. Je pense que c'est très important. Étant donné toutes les inquiétudes que soulèvent les incohérences de la réglementation du camionnage au Canada, nous ne voyons vraiment pas pourquoi le Parlement ne souhaiterait pas avoir des mises à jour régulières sur le respect par les provinces du code national de la sécurité.

Le CRASH appuie le principe d'un système de notation de la sécurité que l'on peut considérer comme l'élément central du projet de loi S-3. Il est bon, et même essentiel de pouvoir identifier les entreprises fautives et les obliger soit à améliorer leur situation, soit à se retirer. Nous n'avons absolument aucune objection au principe de base d'un système de cote de la sécurité.

Nous avons cependant des réserves au sujet du système envisagé ici. Franchement, nous ne sommes toujours pas convaincus que le Canada va mettre en place un dispositif satisfaisant d'évaluation uniforme de la sécurité. En outre, nous sommes très inquiets de constater que la démarche d'évaluation de la sécurité servira en fait à passer de la réglementation prescriptive actuelle à un soi-disant système de réglementation fondé sur le rendement en matière de sécurité.

Je vais vous donner un bref exemple pour vous expliquer la différence.

Quand on fixe une limite de taux d'alcoolimie dans le sang pour les alcootests, on se fonde sur un système prescriptif. On essaie de cerner le problème avant qu'il se présente. Si l'on supprimait cette norme et que l'on se contentait d'identifier et de sanctionner les conducteurs en état d'ivresse après qu'ils aient provoqué des accidents, on aurait un système reposant sur le rendement.

Nous sommes inquiets de l'évolution d'une réglementation censément fondée sur la norme vers une réglementation fondée sur le rendement car cela instaure un régime aléatoire où n'importe qui peut se lancer dans l'industrie du camionnage. Telle est la situation aujourd'hui. Le gouvernement tente après coup de négocier avec ces entreprises, qui tuent ou estropient. Ne serait-ce que pour les 10 000 entreprises de transport pour le compte d'autrui et vu les pressions financières qui incitent à réduire les coûts à tout prix, le système est foncièrement dangereux. Au lieu d'avoir des organismes de réglementation qui assurent de façon dynamique la sécurité de tous les transporteurs routiers, ce sont les victimes qui vont payer pour que l'on puisse détecter les incompétents.

Même s'il est vrai que le régime de cote de sécurité représentera un élément dynamique du fait que des vérifications de sécurité sont prévues, il reste que celles-ci ne sont pas obligatoires.

Ce régime sera à de nombreux égards inefficace puisque la majorité des transporteurs seront classés «satisfaisants, non vérifiés». Ils seront inclus, mais leurs antécédents de sécurité ne seront pas vérifiés. Ils ne seront épinglés que s'ils commettent une faute.

Il est une chose qui intéresse peut-être moins directement le comité mais qui intéresse mon association. En effet, les provinces ont parlé de créer une catégorie «excellent» dans le régime de cote de la sécurité. Les catégories actuelles sont «satisfaisant, non vérifié, conditionnel et j'imagine exclu»; toutefois certaines provinces parlent aussi de la cote «excellent». Nous craignons que cette cote soit utilisée par certaines provinces pour récompenser certains transporteurs moins dangereux et les autoriser à risquer davantage la sécurité publique, par exemple en les autorisant à faire travailler leurs chauffeurs plus longtemps ou à conduire des plus gros camions.

• 1235

Je vais terminer rapidement. Je répète qu'il est inadmissible que des provinces aient aussi mal appliqué le code national de sécurité depuis 12 ans. Le fait de maintenir la délégation de cette responsabilité aux provinces aurait pour conséquence de rendre le Canada impuissant pour affronter les nouvelles structures continentales de ce secteur quand les camions mexicains circulent au Canada. Pour CRASH, le projet de loi S-3 est en grande partie dénué d'intérêt si le gouvernement fédéral n'assume pas sa compétence constitutionnelle qui est de réglementer la sécurité du camionnage international et interprovincial.

Cela dit, nous appuyons vigoureusement les amendements que le Sénat a apportés au projet de loi, qui oblige le ministre des Transports à rendre des comptes directement au Parlement.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Evans.

Nous passerons rapidement à Brian, pour un tour de cinq minutes, parce que nous avons peu de temps.

M. Brian Fitzpatrick: Je vais parler un peu de la question de laisser aux provinces le soin d'appliquer la réglementation.

Les lois du Code criminel sont votées par le gouvernement fédéral. Les corps policiers provinciaux et municipaux les appliquent. Je ne suis pas certain de bien vous comprendre ici. Êtes-vous en train de dire que les provinces sont incapables d'appliquer les normes de sécurité?

M. Bob Evans: Ce qui nous inquiète, c'est le manque d'uniformité. Le code national de sécurité a été créé pour que toutes les provinces rament d'un commun effort dans la même direction. En fait, des années plus tard, il a eu toutes sortes de promesses—oh, oui, elles vont s'unir, nous allons collaborer—il y a encore des cas où la réglementation des heures de travail diffère d'une province à l'autre. Même chose pour la taille et le poids des camions. Il y a toutes sortes de divergence. Ce n'est pas uniforme.

Il y a eu une promesse. Le gouvernement fédéral a délégué beaucoup de ses pouvoirs en matière de sécurité du camionnage aux provinces à la condition que les provinces rament effectivement ensemble. Il y a eu toutes sortes de promesses, toutes sortes d'efforts. Le code national de sécurité est une tentative d'y parvenir, mais cela ne s'est pas réalisé. Il y a une foule d'incohérences.

Je sais que l'industrie du camionnage se fait du souci parce que cela lui coûte cher de faire face à différentes réglementations, différentes limites, etc., d'une province à l'autre. Ce qui nous inquiète, c'est qu'il n'y a rien dans ce projet de loi à notre avis qui va sensiblement changer la situation.

M. Brian Fitzpatrick: Vous dites donc qu'en vertu de ce projet de loi, les provinces peuvent plus ou moins fixer leurs critères de sécurité comme bon leur semble?

M. Bob Evans: Nous disons, regardez le passé; regardez ce qui est arrivé ces dernières années, sans concertation. Nous ne nous sommes pas entendus pour aller dans le même sens, nous n'avons pas avancé au même rythme, et le projet de loi n'est pas assez musclé pour y changer quoi que ce soit.

M. Brian Fitzpatrick: Le projet de loi devrait donc comprendre des lignes directrices claires en matière de sécurité dans le secteur du camionnage.

M. Bob Evans: Nous avons essayé. Nous avons dit, écoutez, il faut tous travailler ensemble, voici des lignes directrices, concertez-vous, mais souvent ils ne le font pas. C'est notre expérience à nous.

M. Brian Fitzpatrick: Quelle est votre position à propos des heures?

M. Bob Evans: Pour être honnête, j'ai promis au greffier de ne pas en parler.

M. Brian Fitzpatrick: D'accord.

M. Bob Evans: Je vais dire une chose, si vous me le permettez. Mon association espère qu'il y aura des audiences complètes, véritables, sérieuses et publiques sur la question, que les Canadiens et toutes les associations qui représentent des citoyens dans ce dossier—et il y en a beaucoup—auront véritablement l'occasion de participer au débat. Nous espérons sincèrement que cela va se faire dans les mois à venir.

M. Brian Fitzpatrick: Votre association voit-elle un rôle pour le gouvernement fédéral en matière d'infrastructure routière ou est-ce un secteur qui devrait être réservé aux provinces?

• 1240

M. Bob Evans: Nous n'avons pas examiné la question en profondeur. S'il est possible pour le gouvernement fédéral de s'occuper de l'infrastructure d'une manière qui favorisera sérieusement la sécurité, nous ne sommes pas contre en principe. C'est certain.

M. Brian Fitzpatrick: Si je vous comprends bien, monsieur Evans, les normes sont en constante évolution. Plus on en sait et plus la technologie s'améliore, plus les normes peuvent évoluer. Ce n'est pas bloqué. On peut toujours apporter des améliorations. Si je vous ai bien compris, au lieu de nous contenter d'adopter le projet de loi en espérant obtenir les résultats voulus, il devrait renfermer des dispositions qui nous permettent de garantir que les choses se font, que l'on surveille la façon dont les choses se fassent et que nous obtenons les résultats que nous sommes censés obtenir.

M. Bob Evans: Il est très important selon nous que vous receviez régulièrement des rapports de situation. Cela nous semble essentiel. Qu'on ne vienne pas nous dire que ces rapports sont difficiles à produire, ce n'est pas une réponse acceptable lorsqu'il s'agit, selon nous, d'un besoin essentiel, savoir vraiment où nous en sommes sur cette question.

Le président: Merci, Brian. Une dernière question, parce qu'il ne vous reste à peu près plus de temps.

M. Brian Fitzpatrick: En ce qui concerne l'organisation que vous représentez, monsieur Evans, qui sont les intéressés et vos bailleurs de fonds?

M. Bob Evans: Nous représentons le grand public. Nous existons depuis environ quatre ans. Nous faisons très attention. Nous faisons des sondages et une des choses...

M. Brian Fitzpatrick: Mais qui finance votre organisation?

M. Bob Evans: Nous sommes financés par nos membres, des syndicats, l'Association des chemins de fer du Canada.

M. Brian Fitzpatrick: D'accord. Vos membres sont...

M. Bob Evans: Des gens du grand public. Notre liste de distribution compte 2 500 destinataires actuellement.

M. Brian Fitzpatrick: Recevez-vous des fonds des pouvoirs publics?

M. Bob Evans: Nous en demandons tout le temps. On nous les refuse. Mais si vous pouvez nous obtenir de l'argent, nous aimerions bien venir vous voir.

M. Brian Fitzpatrick: Ah, nous sommes ici pour réduire les dépenses et non les augmenter.

Le président: Monsieur St. Denis du parti libéral, cinq minutes.

M. Brent St. Denis: Merci, monsieur le président.

Merci d'être ici, monsieur Evans.

Je pense que M. Fitzpatrick a posé une question pertinente parce qu'on sait généralement qui représente les organisations qui viennent témoigner. Par exemple, nous allons entendre après vous l'Alliance canadienne du camionnage. J'imagine que si on lui posait la question, elle répondrait que ses membres sont des compagnies de camionnage, j'imagine. Dans le cas du Conseil des expéditeurs ou de la CTA, c'est assez évident.

Vous dites que vous avez 2 500 membres. Pour me joindre à vous, je n'ai qu'à payer mes dix dollars? Vous dites que l'Association des chemins de fer du Canada en est membre. Elle prend part probablement à vos opérations aussi. Il est sûrement bon de savoir d'où proviennent ces commentaires parce que, de toute évidence, sans vouloir manquer de respect aux chemins de fer, ils ont un point de vue particulier sur les questions relatives au camionnage. Il faut donc être prudent lorsqu'on compare un chef de train à un chauffeur de camion. On compare ici deux secteurs très différents, même s'il s'agit d'emplois importants qui comportent des responsabilités considérables, ce sont deux emplois différents. Je pense qu'il est très important de savoir d'où proviennent ces commentaires, et cela n'enlève rien à leur importance.

Au sujet des amendements du Sénat, et vous nous avez expliqué longuement que vous y étiez favorables, j'ai fait savoir à mes collègues amicalement que le gouvernement ne les appuiera pas. Vous faites un commentaire à la page 3, la mention «qui fonctionne en secret». Je crois savoir que toutes les informations relatives à un amendement du Sénat sont bel et bien là. Étant donné que vous employez cette expression peut-être, voudrez-vous clarifier ou confirmer que c'est bel et bien ce que vous voulez dire—à savoir qu'on a caché des informations au public délibérément en vertu de ce projet de loi étant donné qu'il a été rédigé avant l'amendement du Sénat. Je me demande seulement si vous pourriez éclairer mes collègues à ce sujet. Ensuite je céderai la parole au suivant.

• 1245

M. Bob Evans: Oui, je pense que c'est ce que nous a dit vraiment un membre du comité sénatorial devant lequel nous avons témoigné. On disait qu'il était question de rendre compte au conseil des ministres chargés de la sécurité routière dont les séances sont secrètes. C'est le souvenir que j'en ai.

M. Brent St. Denis: Donc, essentiellement, vous interprétez une remarque qu'a faite un sénateur à une séance du comité? D'accord.

Merci, monsieur le président.

Le président: D'accord.

Monsieur Laframboise du Bloc québécois.

[Français]

M. Mario Laframboise: Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, si le fédéral ne vous subventionne pas, ne lâchez pas. Il va finir par vous subventionner. Ne proposez pas l'abolition des provinces, et c'est tout.

Par contre, il y a une chose sur laquelle je suis d'accord avec vous. Dans ce projet de loi, il n'y a rien qui puisse changer quoi que ce soit, cela pour la simple et bonne raison que c'est un projet basé sur la concertation avec les provinces. À tous les deux ou trois paragraphes, on parle d'une entente avec les provinces et on dit qu'on doit s'entendre avec les provinces. Mais il reste quand même une dure réalité, monsieur: c'est que l'application des normes de sécurité est de juridiction provinciale, à moins que vous n'ayez suggéré carrément que les provinces sortent de cette juridiction et que le fédéral adopte tout un système de surveillance, d'intégration et de respect des normes.

Les provinces travaillent fort pour essayer de s'harmoniser parce qu'elles ont quand même leurs normes de sécurité et que les citoyens des provinces n'acceptent pas, non plus, que la sécurité ne soit pas respectée dans le transport par camion. Il y a cette réalité-là. Il y a le fédéral qui a une norme nationale, mais il y a aussi des normes provinciales qui sont appliquées depuis des décennies dans chacune des provinces. Les citoyens des provinces se plaignent aussi. Tout le monde essaie de trouver une norme qui soit raisonnable.

Je suis d'accord que ce projet de loi ne contient pas grand-chose. Aurait-il été intéressant pour vous qu'on parle aussi des heures de travail dans ce projet de loi? Depuis le tout début, nous disons au gouvernement qu'étant donné qu'il n'y a pas une urgence nationale, puisque l'harmonisation entre les provinces n'est pas encore complétée, il aurait pu profiter de ce projet de loi S-3 pour inclure les heures de travail. Les discussions du comité auraient alors été ouvertes sur tout le dossier de la sécurité du transport routier.

M. Bob Evans: Si ce comité se penchait sur la question des heures de travail en septembre, nous aimerions beaucoup avoir l'occasion de venir présenter ici nos points de vue. Nous avons des points de vue très précis et très étoffés sur cette question et nous espérons avoir l'occasion de bien les présenter.

Le greffier m'a demandé de ne pas parler des heures de travail aujourd'hui. Nous avons trouvé cette demande raisonnable parce qu'il y a quand même d'autres choses. J'espère franchement qu'on se penchera sur les heures de travail à un autre moment. Nous espérons vraiment pourvoir venir ici pour présenter le point de vue de CRASH à ce sujet.

M. Mario Laframboise: Je reviens à ma question. Ne trouvez-vous pas que le gouvernement aurait pu profiter de l'occasion pour inclure les heures de travail dans le projet de loi S-3?

M. Bob Evans: Dans ce projet de loi?

M. Mario Laframboise: Oui.

M. Bob Evans: Il y a une réglementation sur les heures de travail qui est présentement de responsabilité fédérale, pour des raisons que je ne connais pas. Vous me posez une question assez intéressante. Beaucoup d'aspects de la politique de sécurité routière sont la responsabilité des provinces, mais pour une raison quelconque, les heures de travail font l'objet d'une réglementation fédérale.

[Traduction]

Le président: Vous avez terminé, Mario? D'accord.

Mme Desjarlais du NPD, cinq minutes.

• 1250

Mme Bev Desjarlais: Je ne discuterai pas ce que le greffier vous a dit à savoir que vous ne devez pas parler des heures de service. Mais il ne peut pas nous dire à nous qu'on ne peut pas parler des heures de service.

M. Bob Evans: Soit dit en passant, je n'en veux pas au greffier.

Mme Bev Desjarlais: Vous avez dit aussi que vous espériez qu'il y ait des audiences publiques sur cette question étant donné que c'est un sujet très préoccupant. Je tiens à dire que j'ai eu moi aussi cette impression en parlant aux gens, on veut des consultations publiques.

Très franchement, le ministre des Transports a dit qu'il est nécessaire, à son avis, de tenir des consultations publiques. Il doit seulement en convaincre le secrétaire parlementaire.

Cette mention étant faite, vous avez parlé des différences entre les règlements provinciaux, certaines provinces exemptant les camions pesant moins de 11 000 kgs et d'autres... Quels sont les critères aux États-Unis?

M. Bob Evans: Le critère aux États-Unis est 10 000 tonnes, soit l'équivalent de 4, 5 tonnes métriques, qui est le seuil de la plupart des provinces canadiennes—huit sur dix.

Donc la base est la même pour le Canada et les États-Unis, exception faite de l'Alberta et de la Saskatchewan. Il y a d'autres différences mineures ailleurs, mais insignifiantes.

Mme Bev Desjarlais: Y a-t-il des provinces au Canada où le taux d'accidents avec des camions est plus élevé que dans d'autres provinces?

M. Bob Evans: Nous avons dressé un bulletin provincial il y a quelques années de cela, et c'est une chose que mon association aimerait refaire parce que c'est à mon avis un genre d'études très utiles, où nous comparons l'état de la sécurité dans toutes les provinces.

Ce que nous avons découvert, c'est qu'en l'Alberta et en Saskatchewan, le taux de mortalité et de blessures résultant d'accidents est beaucoup plus élevé que la moyenne nationale.

Mme Bev Desjarlais: Aviez-vous des documents indiquant qu'il s'agissait de camions de cette catégorie supérieure?

M. Bob Evans: Il s'agissait de camions de plus de 4,5 tonnes.

Mme Bev Desjarlais: D'accord, 4,5.

C'est dans le projet de loi—j'aurais dû conserver l'article à portée de la main. Mais il y a un article assez long du projet de loi qui dit que si un pays étranger s'adonne à des pratiques injustes, le gouvernement canadien peut retirer le certificat d'aptitude à la sécurité, etc. Comme je l'ai dit, c'est un article assez long—article 7, article proposé 17.

C'est probablement l'article le plus long de tout le projet de loi, d'après ce que j'ai lu jusqu'à maintenant. Il est question des pratiques injustes dans les autres pays. On ne parle pas nécessairement de pratiques en matière de sécurité injustes: on ne parle que de pratiques injustes.

Donc si j'ai bien compris cet article, et j'aurais probablement dû poser la question aux fonctionnaires, c'est qu'il s'agit plus ici de considérations économiques que sécuritaires. Je voulais seulement savoir si vous aviez quelque chose à dire au sujet de cet article.

M. Bob Evans: Non, il n'y a rien ici qui nous ait frappés.

Mme Bev Desjarlais: D'accord. Votre organisation dispose-t- elle de documents au sujet des véhicules transportant des matières dangereuses? Quel genre de réglementation existe dans notre pays?

M. Bob Evans: Nous pensons que la réglementation de véhicules transportant de matières dangereuses est assez uniforme partout au pays. Les règlements sont bien appliqués.

Mme Bev Desjarlais: La loi fédérale est-elle plus sévère concernant le transport des matières dangereuses?

M. Bob Evans: Nous croyons que oui, que c'est une réglementation sévère qui est appliquée uniformément.

Mme Bev Desjarlais: Donc, étant donné que la loi fédérale est sévère, nous avons en place de manière générale de meilleures pratiques de sécurité.

M. Bob Evans: Nous pensons qu'il y a lieu de faire valoir cette thèse si l'on s'en tient à ce qu'on a vu se produire au cours des nombreuses dernières années. Nous avons confié tellement de responsabilités aux provinces, en leur demandant de bien vouloir concerter leurs efforts, puis nous avons constaté qu'elles n'avaient rien fait.

Mme Bev Desjarlais: Votre organisation se plaint-elle du fait que les provinces n'ont pas les ressources financières voulues pour assurer la sécurité du camionnage?

• 1255

M. Bob Evans: Nous soupçonnons certes qu'à bien des égards, les ressources financières jouent un rôle, et que l'exclusion de certains camions du code national de sécurité est peut-être motivée par des considérations financières.

Mme Bev Desjarlais: D'accord.

M. Bob Evans: Oui, je crois qu'il y a plusieurs cas de ce genre. On dirait que... Je crois que les associations de camionnage étaient parfaitement disposées à accepter les vérifications obligatoires dans le cadre du système d'évaluation sécuritaire. L'Ontario voulait des vérifications obligatoires. Mais d'autres provinces s'y sont opposées. Je crois comprendre que cette opposition tenait au fait qu'elles estimaient ne pas avoir les ressources financières voulues.

Mme Bev Desjarlais: D'accord. Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Desjarlais. Votre temps de parole est écoulé.

Bob, j'ai la certitude que nous nous reverrons lorsque nous parlerons des heures de service. Merci.

M. Bob Evans: Je serai heureux de revenir, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup.

Nous allons entendre nos prochains témoins étant donné que les députés doivent aller déjeuner avant d'assister à la période de questions.

De l'Alliance canadienne du camionnage, nous recevons Graham Cooper, premier vice-président, et David Bradley. Merci beaucoup, messieurs. J'imagine que vous êtes prêts à commencer. Nous vous écoutons.

M. David Bradley (directeur général, Alliance canadienne du camionnage): Merci beaucoup, monsieur le président et membres du comité.

L'Alliance canadienne du camionnage est heureuse de comparaître aujourd'hui devant vous pour vous entretenir du projet de loi S-3. Je suis accompagné de Massimo Bergamini, vice-président de l'ACC aux affaires publiques, et de Graham Cooper, premier vice- président de l'ACC.

Manifestement, nous ne pouvons pas nous opposer au projet de loi S-3. Toute mesure qui nous permettra d'assurer une certaine uniformité et d'améliorer la sécurité doit bien sûr recevoir notre aval. Cela dit, ce projet de loi ne suscite pas d'enthousiasme débordant chez nous.

Même si l'industrie a une fiche de sécurité enviable—nous en fournissons des preuves dans le mémoire que nous vous avons remis—nous tenons à ce que notre industrie s'améliore encore de ce côté-là, et le public l'exige. C'est une responsabilité qui incombe à l'industrie du camionnage étant donné que nous partageons notre lieu de travail avec le public. La plupart des gens et les entreprises de camionnage reconnaissent que la sécurité est rentable. Ceux qui ne partagent pas cet avis présentent non seulement un danger pour le public mais ils nuisent également à nos activités. Comme vous le savez, dans un contexte déréglementé, il existe littéralement des dizaines de milliers d'entreprises de camionnage, et c'est un marché extrêmement compétitif.

Ce que nous voulons, ce dont notre industrie a besoin, ainsi que les autorités de réglementation à notre avis, c'est de pouvoir identifier les entreprises sécuritaires et les fautives aussi—distinguer entre les bons et les mauvais éléments de telle sorte que le gouvernement pourra affecter plus efficacement les rares ressources dont il dispose.

Pour se faire, cependant, il faut avoir une base pour établir quelles sont les entreprises inoffensives et les dangereuses, et cela doit se faire avec précision, à cause des répercussions que cela aura sur leur chiffre d'affaires. Il faut être juste envers tous les transporteurs, peu importe leur taille ou leur lieu de travail, et il faut être équitable aussi.

Cela dit, lorsque ce projet de loi a été présenté au Sénat, le ministre David Collenette a déclaré que ces amendements faisaient de la sécurité du transport l'objet premier de la réglementation fédérale et créaient des outils visant à uniformiser la réglementation nationale en matière de sécurité. Comment peut-on s'opposer à cela? Je l'ai dit, il faut absolument soutenir toutes ces mesures.

Mais comme on le mentionne dans notre mémoire, le Code national de sécurité pour les camions, qui était la solution d'origine canadienne ou notre réponse aux préoccupations du public concernant la sécurité dans le contexte de la déréglementation économique de notre industrie, est en lambeaux. Quatorze ans après son entrée en vigueur, aucune des 16 normes du Code de sécurité national n'a été adoptée partout ou appliquée uniformément dans toutes les provinces.

• 1300

Au coeur de ce projet de loi figure la création d'un nouveau système national d'évaluation de la sécurité des transporteurs, qui est nécessaire à notre avis et que l'ACC approuve de tout coeur. Nous avons travaillé inlassablement, en coopération avec le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, pour mettre au point ce système au cours des dernières années.

Mais c'est là que se situe le vrai problème dans le projet de loi S-3, et c'est la raison pour laquelle notre enthousiasme se refroidit quelque peu. Comme je l'ai dit, le Code national de sécurité n'est pas national, et ce n'est pas un code non plus. Le mieux qu'on puisse dire c'est que c'est une mosaïque de bonnes intentions. Le soi-disant système d'évaluation national de la sécurité des transporteurs, sur lequel repose ce projet de loi, n'existe pas.

Dans notre mémoire... et j'ai la conviction que vous avez entendu parler de l'étude indépendante qui a été menée par Transports Canada, et qui est rédigée en fait dans des termes qu'on ne voit pas normalement dans ce genre de rapport, on y souligne le fait qu'il n'y a pas vraiment d'uniformité à l'heure actuelle dans les provinces canadiennes en matière de cotes de sécurité.

De plus, nous ne croyons pas que le mécanisme actuel dont se sert le Canada pour élaborer les normes nationales de réglementation régissant le camionnage extraprovincial aboutira un jour à un régime national de cotes de sécurité. C'est une constatation plutôt accablante, mais c'est notre opinion de la situation actuelle.

On peut la corriger, toutefois, et ce projet de loi pourrait y contribuer de façon importante, mais à quelques conditions.

Premièrement, nous sommes d'avis que le gouvernement fédéral devrait exercer son pouvoir constitutionnel sur le secteur du camionnage extraprovincial. Il jouit de ce pouvoir constitutionnel, mais il a délégué l'exercice de ce pouvoir aux provinces.

Le ministre fédéral des transports doit montrer la voie dans ce domaine—en collaboration avec les provinces, bien sûr—et le gouvernement fédéral devrait financer la mise en place d'un code national de sécurité fondé sur le rendement. Autrement dit, si les provinces ne respectent pas les normes nationales, elles n'obtiennent pas de financement.

Deuxièmement, si l'argent ne suffit pas à garantir la collaboration des provinces, nous estimons que le ministre doit être prêt à agir, aux termes de l'article 9 du projet de loi et à retirer aux provinces le pouvoir de délivrer les certificats d'aptitude à la sécurité.

Vous trouverez dans notre mémoire des propositions d'amendement. Je ne passerai pas en revue le libellé, mais je vous en décrirai l'essentiel.

D'abord, dans notre témoignage devant le comité sénatorial, nous avons réclamé que le ministre soit tenu de faire un rapport au Parlement chaque année. La reddition de comptes nous paraît importante et nous sommes heureux de constater que cette recommandation est incorporée au projet de loi dont vous avez été saisis.

Pour ce qui est des modifications à la loi qui nous apparaissaient nécessaires, nous proposons d'abord que l'article 3 proposé dans le projet de loi reste tel quel. De plus, nous proposons aussi que l'article 36 proposé maintienne le pouvoir du gouvernement fédéral d'adopter un règlement en matière de sécurité aux termes de la loi sur les transports routiers—les parties de l'article 3 actuel—jusqu'à ce que toutes les autres dispositions de la loi entrent en vigueur. J'expliquerai dans un moment pourquoi cela est important.

Eu égard à l'article 9 sur le retrait du pouvoir de délivrer des certificats, il faudrait éliminer le pouvoir discrétionnaire du ministre. Si, après une période donnée, les provinces et les territoires en arrivent à un consensus sur un code national de sécurité, le ministre ne devrait pas avoir le pouvoir discrétionnaire de traiter avec la province ou le groupe de provinces qui décident de ne pas appliquer les normes nationales. Par conséquent, il faudrait modifier le libellé proposé dans le projet de loi.

Le président: Il vous reste environ une minute.

M. David Bradley: J'aurai terminé dans 30 secondes.

Le président: Très bien.

M. David Bradley: Enfin, nous ne voulons pas forcer la main au ministre à cet égard. Les amendements que nous proposons à l'article 13 du projet de loi sur son entrée en vigueur donnerait au ministre la marge de manoeuvre et le temps nécessaires pour harmoniser les normes en collaboration avec les provinces et pour en arriver à une norme cohérente pour le régime national de cote de sécurité des transporteurs, ce qui n'existe pas encore.

Merci beaucoup. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

Le président: Monsieur Fitzpatrick de l'Alliance canadienne, vous avez cinq minutes.

M. Brian Fitzpatrick: Merci.

Monsieur, vous représentez une part importante du secteur du camionnage, n'est-ce pas?

• 1305

M. David Bradley: Oui. Nous représentons les entreprises de camionnage. Notre fédération compte plus de 3 000 membres qui, eux, représentent environ 70 p. 100 des revenus générés par le transport pour compte d'autrui au Canada.

M. Brian Fitzpatrick: Si je vous ai bien compris, vous aimeriez que soit imposé à l'échelle du pays un code national de sécurité et que le gouvernement fédéral se serve de son pouvoir de financement et de délivrance de certificats pour inciter les provinces à respecter ce code. Est-ce exact?

M. David Bradley: Oui, essentiellement. Le retrait du pouvoir de délivrance de certificats ne se ferait qu'en dernier recours. Nous demandons au gouvernement fédéral de faire preuve de leadership dans l'exercice de son pouvoir constitutionnel, d'abord, et dans le financement du code national de sécurité.

M. Brian Fitzpatrick: Que diriez-vous si le gouvernement fédéral se faisait plus combatif dans l'exercice de ses pouvoirs constitutionnels et poursuivait en justice les provinces, aux termes de ces dispositions, amenant ainsi les tribunaux à trancher? Je suis certain...

M. David Bradley: Ça été tenté par le passé, mais je ne crois pas que le gouvernement fédéral ait eu gain de cause jusqu'à présent. Je ne vois pas pourquoi il faudrait s'adresser aux tribunaux dans ce cas où le pouvoir constitutionnel est très clair. En fait, j'estime qu'il s'agit davantage de leadership et de responsabilité que de pouvoir constitutionnel.

M. Brian Fitzpatrick: Voilà précisément où je veux en venir. C'est une question de compétence. Il s'agit d'entamer des discussions avec les provinces qui estiment avoir aussi compétence dans ce domaine.

Si on nÂarrive pas à une solution ainsi, quelqu'un devra trancher. C'est ainsi qu'on procède.

M. David Bradley: En dernière analyse, oui, vous avez raison. Depuis les années 50, on fait appel à la collaboration. C'est grâce à ce modèle qu'on a pu élaborer le code national de sécurité actuel, et tout observateur objectif vous dira que ce fut un échec.

Cela ne signifie pas nécessairement qu'il faille oublier la collaboration. J'ai d'ailleurs l'impression que les provinces s'y opposeraient. Mais si la collaboration ne mène à rien, le gouvernement fédéral doit assumer ses responsabilités, surtout si on dégage un consensus national au sujet d'une norme que les provinces et territoires ne respectent pas dans les mesures qu'ils adoptent.

M. Brian Fitzpatrick: Le camionnage représente une partie importante de l'économie. Le camion transporte des biens. C'est notre principal mode de transport de biens au pays. Puisque nous sommes parties à l'Accord de libre-échange nord-américain, il m'apparaît tout à fait logique de comparer notre régime à celui des États-Unis. Quelle est la situation aux États-Unis? Connaît-on là-bas les mêmes problèmes que nous ou y a-t-il un système uniforme dans tout le pays? Comment cela fonctionne-t-il?

M. David Bradley: Le système américain n'est pas parfait, mais en ce qui a trait à la primauté de la réglementation fédérale, cette question a été réglée grâce à la création d'un fonds de fiducie pour les autoroutes auxquelles les États n'ont accès que s'ils respectent d'autres priorités nationales. Ainsi, si vous voulez des fonds pour l'infrastructure routière, vous devrez vous assurer de respecter les normes nationales en matière de sécurité. Le gouvernement fédéral américain a donc un peu plus à sa disposition, que la simple influence morale qui constitue essentiellement le seul levier dont dispose le gouvernement du Canada à l'heure actuelle.

M. Brian Fitzpatrick: J'aime bien ce mode de financement que vous venez de décrire. On a beaucoup parlé de la taxe sur le carburant que perçoit le gouvernement fédéral. Bien des gens se demandent pourquoi cet argent n'est pas versé dans un fonds qui servirait à des dépenses légitimes liées à l'infrastructure du transport tel que la réfection des routes. Pour mettre en oeuvre vos suggestions, votre association appuierait-elle ce genre d'initiatives?

M. David Bradley: Certainement, car à l'heure actuelle, la taxe fédérale d'accise sur le carburant ne sert à rien de particulier sauf à générer des recettes.

Le président: Merci beaucoup.

Je cède la parole à M. St. Denis du parti libéral. Monsieur St. Denis vous avez cinq minutes.

• 1310

M. Brent St. Denis: Merci, monsieur le président.

Merci, messieurs, d'être des nôtres.

Je ne peux m'empêcher de remarquer que les questions de M. Fitzpatrick sur la collaboration et la soumission des provinces vont à l'encontre du programme de l'Alliance, lequel prévoit davantage de pouvoirs pour les provinces.

M. Brian Fitzpatrick: Pas en matière de commerce interprovincial.

M. Brent St. Denis: Je voulais le mentionner, en passant, Brian, mais au moins, vous êtes logique d'une réunion à l'autre.

J'ai l'impression qu'au sein de votre alliance, l'Alliance canadienne du camionnage, par opposition à l'Alliance réformiste, on ressent beaucoup de frustrations.

M. David Bradley: Nous avions adopté ce nom en premier, soit dit en passant.

M. Brent St. Denis: Oui.

J'ai l'impression, monsieur Bradley, que l'Alliance du camionnage appuie ce projet de loi mais qu'elle aimerait qu'il aille plus loin. Vous voudriez qu'on agisse plus vite; il est frustrant pour vous qu'il n'y ait pas encore de consensus des provinces et des territoires sur un code national de sécurité. Peut-être que vous, ou vos collègues, pourriez nous donner brièvement un ou deux exemples de ce qui passe actuellement, des coûts additionnels associés au régime actuel pour vos membres, de ce qui cause les tracasseries administratives, ce qui pourrait montrer pourquoi il est important que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership en adoptant ce projet de loi maintenant et en recourant à toutes les méthodes indiquées pour amener tous les joueurs à collaborer dans l'intérêt du secteur.

Pourriez-vous me donner des exemples de problèmes que vous connaissez à l'heure actuelle?

M. David Bradley: Oui, bien sûr. Je préciserai d'abord qu'on serait mieux en mesure de réaliser l'objectif du projet de loi si on adoptait les amendements que nous proposons. Je vais demander à M. Cooper de répondre à votre question, plus précisément en ce qui concerne la cote de sécurité des transporteurs afin que vous ayez une bonne idée de la confusion qui règne actuellement.

M. Graham Cooper (premier vice-président, Alliance canadienne du camionnage): L'un des meilleurs exemples que je puisse vous donner des difficultés pratiques que créent ces incohérences, c'est le seuil de poids pour les véhicules prévu par le Code national de sécurité. Sans entrer dans les détails techniques, le Code national de sécurité prévoit un seuil commun de poids pour tous les véhicules assujettis à ce code.

Dans certaines provinces, surtout dans l'Ouest, on ne veut ou ne peut respecter la norme de poids prévue par le code. En conséquence, tout un groupe de véhicules de l'Alberta, par exemple, ne sont pas assujettis à certaines des principales dispositions du Code national de sécurité. Cela nous ramène à ce dont on parlait plus tôt relativement à l'article 9.

Si le ministre et ses homologues provinciaux avaient le temps de s'entendre, et qu'une norme uniforme entrait en vigueur, rien ne justifierait qu'une province ou un territoire qui refuse d'appliquer les dispositions du Code national de sécurité, ne fasse l'objet de mesures punitives.

À notre avis, un incitatif tel que le financement, comme nous l'avons dit un peu plus tôt, serait une solution plus pratique à certains de ces problèmes. Toutefois, certaines choses comme ce seuil de poids, relève de la volonté politique des provinces. Il s'agit de dégager un consensus et, à notre avis, c'est avant tout une question de financement.

M. Brent St. Denis: Merci, monsieur le président. Je m'arrête maintenant afin que d'autres puissent poser leurs questions.

Le président: Nous donnons la parole à M. Labramboise, qui a cinq minutes.

[Français]

M. Mario Laframboise: Merci, monsieur le président. Vous représentez 3 000 transporteurs. À quel pourcentage de l'industrie ce nombre correspond-il?

M. Massimo Bergamini (vice-président, Affaires publiques, Alliance canadienne du camionnage): Ce nombre représente environ 70 p. 100 de l'industrie.

M. Mario Laframboise: J'ai beaucoup de difficulté à comprendre que les provinces n'emboîtent pas le pas quand 70 p. 100 de l'industrie veut établir une norme de sécurité à la grandeur du Canada. Il arrive souvent que le problème auquel ont à faire face les provinces ou ceux qui ont la charge de faire respecter les normes soit d'avoir à s'opposer presque constamment à l'industrie. Ce que vous nous dites aujourd'hui, c'est que les provinces n'accepteront jamais parce qu'elles ne pourront pas ou ne voudront pas faire respecter une norme canadienne que vous accepteriez. J'ai de la difficulté à comprendre cela. Serait-ce parce que les provinces voudraient vous imposer des normes plus sévères? Est-ce pour cela?

• 1315

M. Graham Cooper: Monsieur Laframboise, je vais répondre en anglais, si ça vous va.

[Traduction]

Vous soulevez une excellente question. C'est en partie une question de financement. Comme je l'ai déjà dit, la province peut ou non disposer des ressources nécessaires. En outre, chacun protège ses plates-bandes. La responsabilité fédérale pour le transport routier interprovincial a été déléguée aux provinces avec le temps, de manière que les provinces peuvent penser que c'est là leur responsabilité.

Notre grand problème, aujourd'hui, c'est que nombre de personnes de toutes les provinces, des territoires et du gouvernement fédéral discutent ensemble au sein d'un organisme, le Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé, ou CCATM, que vous connaissez sans aucun doute. Ils finissent par s'entendre et au bout du compte, on ne peut pas fermer la boucle. Autrement dit, personne n'a le pouvoir de dire que l'entente conclue est bonne. Tous les membres se sont entendus sur l'ensemble des normes relatives au Code national de sécurité, mais sans financement et sans le bâton dont nous avons parlé pour le nouvel article 9, rien ne peut obliger les provinces à agir.

Les provinces ne diront pas nécessairement que leurs règlements sont plus sévères, mais qu'elles y ont investi beaucoup d'argent et qu'ils sont un peu différents, puisqu'ils sont tous différents, d'un bout à l'autre du pays. Mais à l'exception de la bonne volonté de ceux qui sont à la table, il n'y a pas moyen d'en référer à leur sous-ministre ou leur ministre, pour mettre tout le monde d'accord. Il n'y a pas moyen de s'assurer que les accords conclus au CCATM et au Conseil des sous-ministres, peut-être, se traduisent par des règles cohérentes à l'échelle provinciale. C'est là notre grand problème.

M. David Bradley: J'aimerais juste formuler un commentaire à ce sujet. On sait que l'Alliance canadienne du camionnage a beaucoup fait dans ses relations avec le gouvernement pour promouvoir la sécurité et les normes plus sévères que nous souhaitons. Il ne manque pas de concurrence dans notre secteur et toute brebis galeuse qui nuit à tout le monde et devrait être écartée du secteur.

Si vous examinez les données relatives à notre cote de sécurité, dans notre mémoire, des données recueillies par Transports Canada, vous verrez qu'on peut se demander si au niveau supérieur des ministères des Transports de l'ensemble du pays, la sécurité du camionnage est une priorité, ou s'ils ont d'autres chats à fouetter.

Dès que quelque chose ne va pas, ça devient une question politique. Il y a tout à coup un remue-ménage, tout bouge, mais dès que les choses se calment et que les caméras s'éloignent, on constate qu'il n'y avait pas un engagement réel. Je me suis toujours demandé s'il y avait vraiment un engagement en l'occurrence. Je pense que c'est le cas de tous les gouvernements, pas seulement fédéral ou provincial.

[Français]

M. Mario Laframboise: Si vous me permettez, je voudrais seulement signaler que, si je comprends bien, un problème de financement se poserait si tout le monde en venait à s'entendre. Vous nous dites carrément qu'il y a un problème de financement. Pourtant, je ne vois pas, parmi les modifications que vous proposez, une demande de contribution fédérale.

Vous donnez le pouvoir au fédéral d'arrêter et retirer les pouvoirs à une province, mais jamais vous n'avez proposé d'amendement dans lequel vous demandez au fédéral de contribuer. Si appliquer la norme dans tout le Canada pose un problème de financement, parce que certains territoires, communautés ou provinces sont en difficulté, pourquoi ne demandez-vous pas au fédéral de faire sa part? Il passe son temps à faire des cadeaux ici et là; il pourrait peut-être vous en faire à vous aussi.

M. Massimo Bergamini: Monsieur Laframboise, il y a ici des conseillers du comité qui pourront me corriger si je suis dans l'erreur, mais je ne pense pas qu'il soit dans les attributions du comité de proposer des mesures de dépenses, spending measures, dans un projet de loi de ce genre. Je ne suis pas certain que le comité ait le pouvoir de le faire.

Cela étant dit, nous faisons état, dans notre proposition, des besoins de financement. Je pense que c'est un sine qua non pour arriver à une solution et que c'est clair dans le texte comme c'était clair dans notre présentation orale d'aujourd'hui. C'est un des éléments, une des faiblesses du régime actuel, l'insuffisance de mesures fiscales ou financières qui inciteraient les provinces à adopter un régime national.

• 1320

M. Mario Laframboise: Bien, vous me corrigerez, mais vous étiez en droit de proposer des modifications. Vous auriez pu demander des modifications législatives ou des amendements incluant un fonds ou autre chose. Vous auriez pu le faire.

[Traduction]

Le président: Je donne la parole au libéral Larry Bagnell, pour cinq minutes.

M. Larry Bagnell: Le Québec n'a pas plus son mot à dire que toute autre province, mais je me demande si vos membres québécois, ou une majorité d'entre eux, sont en faveur des changements constitutionnels que vous avez proposés au début de votre exposé.

M. David Bradley: Absolument. L'ACC ne prend pas position sans d'abord consulter ses membres, et l'Association du camionnage du Québec et les délégués du Québec à l'ACC étaient tout à fait en faveur de cette mesure. Eux aussi doivent traverser les frontières et le système hétéroclite actuel est inadéquat.

Les problèmes constitutionnels mis à part, il ne s'agit pas d'une attaque contre le Québec. Pour bien des questions, le Québec a été un chef de file qui nous a menés à un consensus. Le problème a été décrit par M. Cooper. Quand on arrive à un consensus, et ce n'est pas toujours le cas, aucun mécanisme n'existe pour qu'on l'applique de manière uniforme.

M. Larry Bagnell: Voici ma seule autre question: Les lois changent constamment et quand on les modifie, on ne règle jamais complètement le problème et on ne contente jamais tout le monde; si cette loi était adoptée sans les amendements que vous proposez, serait-ce une bonne ou une mauvaise chose?

M. David Bradley: Il nous est très difficile de vous répondre. Certaines provinces pourraient penser que le simple risque de perdre leur capacité de délivrer des certificats d'aptitude à la sécurité pourrait en pousser certaines à se joindre au consensus national, mais c'est un effet de courte durée. Je ne me fierais pas là-dessus, et bien sincèrement, je ne m'attendrais pas à de grands changements. Voilà pourquoi j'ai dit d'emblée qu'il était difficile pour nous de nous prononcer contre ce projet de loi et de vous dire de ne pas l'adopter. Nous ne voudrions pas être accusés de faire fi de la sécurité, par exemple, mais en même temps, le projet de loi n'a pas suffisamment de muscle à notre goût, dans les circonstances.

M. Graham Cooper: Si vous permettez que j'ajoute quelque chose: Comme vous l'avez vu dans notre mémoire, les articles du projet de loi dont nous proposons la mise en oeuvre immédiate sont ceux qui encourageraient le ministre et ses homologues provinciaux à vouloir d'atteindre l'insaisissable objectif de cohérence. En adoptant maintenant l'ensemble du projet de loi, sans les amendements que nous avons proposés, il faut se demander ce qui changerait, par rapport à ce qui existe déjà depuis 16 ans dans le but de mettre en vigueur le Code de sécurité national. Nous croyons que ces amendements, en empêchant le ministre fédéral de prendre des règlements à sa guise, l'inciteront à vouloir arriver à un consensus. Et quand lui et ses collègues provinciaux croiront avoir atteint une cohérence suffisante pour prendre des règlements, à notre avis, le processus qui pose problème depuis tant d'années sera enfin motivé.

Le président: Merci, monsieur Cooper.

Nous passons maintenant à Bev Desjarlais, du NPD, pour cinq minutes, puis nous donnerons la parole à Serge et, enfin, à Brian.

Mme Bev Desjarlais: Toutes mes excuses, j'ai manqué le tout début de votre exposé. Si vous constatez que je répète ce qui a déjà été dit, je m'en excuse à l'avance.

Monsieur St. Denis a affirmé qu'il est important d'adopter rapidement ce projet de loi, puisque sans lui, les coûts seront plus élevés, il y aura plus de lourdeurs administratives. A-t-on déjà parlé de la question des coûts, au sujet de ce projet de loi, du fait que le processus actuel est trop coûteux, trop lourd?

M. David Bradley: Je ne dirai pas qu'il est trop lourd, de crainte d'être accusé de vouloir affaiblir la réglementation, alors que nous ne sommes pas contre des règlements sévères.

• 1325

Les coûts proviennent du fait qu'on ne peut conduire un camion de Terre-Neuve à la Colombie-Britannique, en appliquant les mêmes règles dans chaque province. Il est plus facile d'envoyer un camion de Toronto à la frontière mexicaine que de lui faire traverser le pays, car on sait quelles règles et quel régime sont applicables. Cela suffit à nuire à l'efficacité et à la productivité.

Pour ce qui est de la concurrence, l'existence d'une réglementation différente avantage naturellement certains transporteurs par rapport à d'autres. En effet, ceux qui ne veulent pas investir dans la sécurité et dans l'entretien de leur véhicule peuvent exploiter cette mosaïque de règles pour éviter ces dépenses. Ce n'est pas simplement une question de coût d'exploitation, mais de pouvoir fixer des prix pour leurs services afin d'être compétitifs par rapport aux transporteurs qui eux ont fait cet investissement, qui ont dépensé cet argent. Je considère qu'il s'agit plutôt d'un investissement que d'un coût, mais des coûts y sont tout de même associés.

Cela faisait partie de l'accord sur le commerce intérieur, qu'on a bien entendu annoncé avec grand tapage. Au Canada, il était entendu que l'on appliquerait encore une fois le Code national de sécurité de 1987 d'ici le 1er janvier 1992 ou 1993, je ne me souviens pas de l'année. Encore une fois, nous avons échoué. Il n'y a qu'au Canada semble-t-il où un tel échec puisse être considéré comme un succès, soit d'appliquer en 1993 une entente conclue en 1987—et nous ne l'avons pas fait.

Mme Bev Desjarlais: Les modifications ont donc été apportées en 1987 puis on a délégué leur application à la province. À l'époque, le ministre a dit que la sécurité ne serait pas compromise et qu'on tiendrait des consultations. Donc à partir de 1985, on a travaillé en collaboration avec les provinces et tenu des consultations pour s'entendre sur une norme nationale convenant à tout le monde. Cela ne fait que 15 ou 16 ans, donc si nous adoptons ce projet de loi, la question devrait être résolue d'ici six mois. Toutes les discussions se sont déjà déroulées donc la question sera tranchée tout de suite si l'on adopte la mesure législative, sans veiller à ce que les normes nationales soient acceptées auparavant.

Le texte se poursuit en disant ce qui suit:

    [...] le gouvernement fédéral devait jouer un rôle primordial de bâilleur de fonds des provinces pour qu'elles mettent en oeuvre les normes du code.

Cela me semble être le coeur du problème. Chacun des témoins que nous avons entendus a dit que le financement est un problème. Les provinces elles aussi l'ont dit. La concurrence devient un sujet litigieux, car les provinces tiennent à attirer les entreprises, mais si les normes sont trop élevées, les provinces en question seront désavantagées sur le plan de la concurrence. Enfin, on a appris que le financement pourrait provenir des taxes sur l'essence. Heureusement que Brian l'a mentionné, car il a tout à fait raison.

Ma question est donc la suivante: estimez-vous que les provinces réussiront à s'entendre sous peu sur les normes nationales de sécurité, sinon au cours des cinq prochaines années en matière de normes de sécurité nationales, ou estimez-vous que le gouvernement fédéral doit adopter les normes en question et veiller à leur mise en oeuvre, après quoi les provinces s'y conformeront?

M. David Bradley: Si l'on n'apporte pas les amendements que nous proposons au projet de loi, comme nous le disons dans notre mémoire, je doute fort que la situation actuelle change et il faudra alors attendre encore 16 ans. C'est dommage, parce que, je le répète, c'était la solution d'origine canadienne à la déréglementation économique. Le Code national de sécurité allait procurer un filet de sécurité tant au public qu'aux camionneurs prudents. C'est ce qui nous distinguait des Américains, mais cela ne s'est tout simplement pas concrétisé.

Mme Bev Desjarlais: Merci.

Le président: Serge Marcil des libéraux, vous avez cinq minutes.

[Français]

M. Serge Marcil: Monsieur le président, si je comprends bien, en fait tout le monde s'accorde pour que soit établi un système uniforme, dans l'ensemble du pays, pour permettre à tous les transporteurs d'avoir un même cadre d'intervention, ce qui aurait pour effet d'éliminer les plus faibles ou bien... En tout cas, disons que tout le monde est d'accord.

Les provinces semblent aussi être toutes d'accord sur un projet de loi semblable, donc sur l'établissement d'une norme n° 14 et d'un règlement uniforme. Le problème causé en serait donc un de mise en application.

• 1330

Il semble donc qu'on ait transféré aux provinces le pouvoir de gérer cela, selon leurs capacités, et qu'il existe un déséquilibre entre elles quant aux moyens à leur disposition pour la mise en application. Par conséquent, la solution serait de tout centraliser à Ottawa et que le gouvernement fédéral prenne en charge la mise en oeuvre de ce projet-là.

On retire donc aux provinces le pouvoir de réglementer. On établit un règlement général, national, que le gouvernement d'Ottawa applique avec ses moyens, ce qui pourrait coûter très cher ou encore, on augmente le financement, l'aide financière accordée à chacune des provinces afin qu'elles puissent assumer la mise en oeuvre de façon uniforme coast to coast.

En fait, les limites financières ou l'incapacité financière des provinces semblent être le problème majeur, si j'ai bien compris les interventions de tout le monde et particulièrement les vôtres. Si une aide financière était accordée aux provinces, il leur serait plus facile de mettre en oeuvre un système uniforme.

[Traduction]

M. David Bradley: En partie, oui. Mais nous disons aussi que lorsque le financement ne donne pas les résultats voulus, le ministre exercera—et non pourra exercer—son autorité de manière interdire à la province, ou à un groupe de provinces, de délivrer des certificats d'aptitude à la sécurité.

M. Graham Cooper: J'aimerais ajouter une chose pour préciser peut-être un malentendu au sujet des éléments dont s'inspire le projet de loi S-3. Il n'a jamais été question dès le début d'imposer à toutes les provinces un système identique de cote de sécurité.

Le projet de loi S-3 se fonde sur la norme 14 du Code national de sécurité, qui est une sorte de cadre général qui établit des paramètres de portée générale dont certains critères fondamentaux doivent être respectés. Cependant, le test décisif c'est qu'une entreprise de transport routier de Terre-Neuve, par exemple, et une autre semblable en Colombie-Britannique doivent toutes les deux obtenir la même cote. Il n'est question que de quatre cotes, cela donne donc des fourchettes de rendement assez vastes.

Il n'a jamais été question de demander aux provinces de réglementer leurs entreprises de façon tout à fait identique, mais il doit y avoir une harmonie suffisante entre elles pour qu'elles adoptent des cotes équivalentes. C'est un point que je voulais préciser.

J'aimerais aussi parler du financement, et à cet égard, vous avez tout à fait raison, de l'avis général, le financement fait problème. Je ne suis pas au courant de tous les détails là-dessus, mais je crois savoir que Transports Canada a déjà fourni 7 millions de dollars aux provinces pour qu'elles mettent sur pied leurs systèmes, c'est-à-dire les logiciels et le reste qui sont nécessaires pour donner corps au processus de cotes de sécurité.

Les provinces ont fort apprécié cette aide à mon avis. J'ai siégé comme observateur lorsqu'on a discuté de ce genre de choses, et j'ai pu voir que les provinces appréciaient qu'on finance les systèmes.

Cela dit, l'autre grosse dépense cependant est le financement continu dont les provinces semblent avoir besoin pour mettre en oeuvre le système, faire exécuter les lois et les règlements et le reste. À mon avis, cela représente quelque 20 millions de dollars répartis sur cinq ans ou quatre ans, qu'on me reprenne si je me trompe sur la durée, mais il s'agit bien de 20 millions de dollars. Cela signifie donc qu'il faut partager 5 millions de dollars par an entre 10 provinces et trois territoires, ce qui ne représente pas beaucoup d'argent, compte tenu de l'effort que nécessite la création d'un système efficace.

Le président: Merci, Serge. C'est tout.

À propos des heures de service, il se peut que nous entendions le témoignage des ministres provinciaux, vous pourrez donc leur poser des questions là-dessus lorsqu'ils comparaîtront devant le comité.

Brian, à vous le dernier mot.

M. Brian Fitzpatrick: Je tenais simplement à tirer au clair une remarque faite par Brent, que vous illustrez très bien. Si nos transporteurs routiers se rendent au Mexique, et traversent donc bon nombre d'États, nous aurons probablement moins de difficulté à les faire circuler du nord au sud que d'est en ouest.

Notre parti estime que le commerce relève du gouvernement fédéral, et que nous devrions abolir les entraves au commerce intérieur d'est en ouest afin d'unir notre pays. Or le gouvernement fédéral n'a vraiment pas utilisé ses pouvoirs à cette fin ni fait preuve de leadership dans ce dossier.

• 1335

C'est le seul point que je soulève à ce sujet. Dans d'autres secteurs, qui n'ont rien à voir aux transports, nous sommes d'avis que le gouvernement fédéral devrait se retirer et s'en tenir à ses strictes responsabilités, mais c'est là un autre débat.

Par ailleurs, il a été question aussi de certains seuils en Alberta et en Saskatchewan, et quelqu'un d'autre a même parlé de taux plus élevés d'accidents et le reste. Je ne vais pas me lancer dans un débat là-dessus sans savoir auparavant quelle méthode on a utilisé pour faire ce genre de calcul, mais je me demande cependant...

Je sais que la Saskatchewan a vécu une espèce de révolution dans les milieux ruraux, à la suite de l'abandon de certaines lignes ferroviaires et de changements profonds dans les transports. Cela a forcé des gens à adopter des moyens de transport différents, veut, veut pas, comme le camion et le reste. Je pense que l'Alberta se trouve dans la même situation. Cependant, ces deux provinces ont un réseau d'autoroutes beaucoup plus important que bien d'autres provinces. Qu'on me prenne si je me trompe, mais à mon avis, la Saskatchewan compte autant de kilomètres d'autoroute que l'Ontario.

Est-ce que ce serait la nature plutôt agricole de ces deux provinces qui expliquerait pourquoi elles ne tiennent pas à se conformer aux seuils, et pourquoi elles ont peut-être un taux plus élevé d'accidents que les autres provinces?

M. David Bradley: Je ne veux pas rien dire sur les taux d'accidents, car je n'ai pas en main les renseignements pertinents, et j'ignore donc dans quelle mesure la situation est différente là- bas. Quoi qu'il en soit, dans ces deux provinces, depuis 1985, en vertu de la norme du Code national de sécurité et du seuil de poids, tout camion de plus de 4 500 kilogrammes devait relever du code. Il devait donc en respecter toutes les exigences.

La Saskatchewan et l'Alberta ont adopté un seuil différent. En Alberta, il est fixé à 18 000 kilogrammes à l'heure actuelle, et en Saskatchewan, je crois qu'on vient de le porter à 11 000 kilogrammes. Cela s'applique donc aux camions beaucoup plus lourds. Si j'ai bien compris, la raison en est que... En fait, je crois qu'il y a plusieurs raisons. D'abord, on craint d'imposer aux producteurs agricoles ou encore à l'exploitant du champ de pétrole le fardeau réglementaire qu'on impose au transporteur commercial. C'est davantage une décision économique.

Notre objection c'est que, selon les données, les véhicules légers risquent tout autant, sinon plus, d'être impliqués dans un accident que les véhicules lourds. Mais du point de vue de la sécurité, un camion reste un camion. Aussi, nous ne pouvons permettre que, dans certaines provinces, les camions soient régis par les règles, et dans d'autres, pas, puisque ces véhicules traversent aussi les frontières.

Je crois que ça pose problème, et j'imagine aussi que quelqu'un doit tenir compte, explicitement ou implicitement, du nombre d'accidents impliquant des camions, d'une part, par rapport à d'autres véhicules, d'autre part. Les autorités doivent ensuite mesurer le résultat de ces comparaisons en fonction des autres pressions que subit le gouvernement, avant de décider s'il est acceptable ou non de faire des exclusions plus larges que celles qui existent dans d'autres provinces. Il faudrait poser la question aux intéressés, mais je crois que c'est l'une des raisons.

M. Brian Fitzpatrick: Avez-vous dit que les ministres provinciaux viendraient comparaître?

Le président: J'aimerais qu'ils soient présents lorsqu'il sera question des heures de service.

M. Brian Fitzpatrick: Nous pourrions leur poser la question et en avoir le coeur net.

Le président: Ce serait le moment opportun pour le faire.

Sur ce mot de la fin, je vous remercie, David, et je remercie également votre équipe de leur présence ici.

Merci, membres du comité, de votre patience, et merci également au personnel.

La séance est levée. Nous reprendrons jeudi à 11 heures.

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