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TRGO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent des transports et des opérations gouvernementales


Témoignages du comité

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 26 février 2002




Á 1145
V         Le président suppléant (M. John Cannis, (Scarborough-Centre, Lib.))
V         M. Bob Evans (directeur général, Canadiennes et Canadiens pour la sécurité routière (CRASH))

Á 1150

Á 1155
V         Le président
V         Mme Alison M. Smiley (témoignage à titre personnel)

 1200

 1205
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Darrel Stinson (Okanagan--Shuswap, Alliance canadienne)
V         Mme Alison Smiley
V         M. Darrel Stinson

 1210
V         Mme Alison Smiley
V         M. Darrel Stinson
V         Mme Alison Smiley
V         M. Darrel Stinson
V         Mme Alison Smiley
V         M. Darrel Stinson
V         Mme Alison Smiley
V         M. Darrel Stinson
V         Mme Alison Smiley
V         M. Darrel Stinson
V         Mme Alison Smiley
V         M. Darrel Stinson
V         Mme Alison Smiley
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.)
V         M. Bob Evans
V         M. Paul Szabo

 1215
V         M. Bob Evans
V         Mme Alison Smiley
V         M. Paul Szabo
V         M. Bob Evans
V         M. Paul Szabo
V         M. Bob Evans
V         M. Paul Szabo
V         M. Bob Evans
V         M. Paul Szabo
V         M. Bob Evans
V         M. Paul Szabo
V         M. Bob Evans
V         M. Paul Szabo
V         M. Bob Evans
V         M. Paul Szabo
V         M. Bob Evans
V         Mr. Szabo
V         Bob Evans
V         M. Paul Szabo

 1220
V         M. Bob Evans
V         M. Paul Szabo
V         M. Bob Evans
V         M. Paul Szabo
V         M. Bob Evans
V         M. Paul Szabo
V         M. Bob Evans
V         Mme Alison Smiley
V         M. Paul Szabo
V         Mme Alison Smiley
V         M. Paul Szabo
V         Mme Alison Smiley
V         M. Bob Evans
V         M. Paul Szabo
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Mario Laframboise (Argenteuil--Papineau--Mirabel, BQ)
V         M. Bob Evans

 1225
V         M. Mario Laframboise
V         Mme Alison Smiley

 1230
V         M. Mario Laframboise
V         Mme Alison Smiley
V         M. Mario Laframboise
V         Mme Alison Smiley
V         M. Mario Laframboise
V         Mme Alison Smiley
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Alex Shepherd (Durham, Lib.)
V         Mme Alison Smiley
V         M. Alex Shepherd
V         Mme Alison Smiley
V         M. Alex Shepherd
V         Mme Alison Smiley
V         M. Alex Shepherd
V         Mme Alison Smiley

 1235
V         M. Alex Shepherd
V         Mme Alison Smiley
V         M. Alex Shepherd
V         Mme Alison Smiley
V         
V         M. Alex Shepherd
V         Mme Alison Smiley
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD)
V         Mme Alison Smiley
V         Mme Bev Desjarlais
V         Mme Alison Smiley
V         Mme Bev Desjarlais
V         Mme Alison Smiley
V         Mme Bev Desjarlais
V         Mme Alison Smiley
V         Mme Bev Desjarlais
V         Mme Alison Smiley
V         Mme Bev Desjarlais
V         Mme Alison Smiley
V         Mme Bev Desjarlais

 1240
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Pankiw
V         Mme Bev Desjarlais
V         M. Darrel Stinson
V         M. Pankiw
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Bob Evans
V         M. Pankiw
V         M. Bob Evans
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Pankiw
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Pankiw

 1245
V         M. Pankiw
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Jim Pankiw
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Bob Evans
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         Mme Alison Smiley
V         M. Pankiw
V         Mme Alison Smiley
V         M. Pankiw
V         Mme Alison Smiley
V         M. Pankiw
V         Mme Alison Smiley
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Mario Laframboise

 1250
V         Mme Alison Smiley
V         M. Laframboise
V         M. Bob Evans
V         
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         Mme Bev Desjarlais
V         Mme Alison M. Smiley
V         Mme Bev Desjarlais
V         Mme Alison Smiley
V         Mme Bev Desjarlais

 1255
V         Mme Alison Smiley
V         Mme Bev Desjarlais
V         Le président
V         M. André Harvey (Chicoutimi--Le Fjord, Lib.)
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Pankiw
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Bob Evans
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         Mme Alison Smiley
V         Le président suppléant (M. John Cannis)

· 1300
V         Mme Alison Smiley
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Bob Evans
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         M. Bob Evans
V         Le président suppléant (M. John Cannis)
V         Mr. Pankiw
V         Mr. Cannis










CANADA

Comité permanent des transports et des opérations gouvernementales


NUMÉRO 052 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

Témoignages du comité

Le mardi 26 février 2002

[Enregistrement électronique]

Á  +(1145)  

[Traduction]

+

    Le président suppléant (M. John Cannis, (Scarborough-Centre, Lib.)): La séance est ouverte.

    Toutes nos excuses à nos témoins pour ce retard, les Canadiens et les Canadiennes pour la sécurité routière, et Mme Smiley. Nous sommes désolés. Une affaire inattendue nous a retenus à la Chambre, mais nous sommes prêts à vous écouter.

    Permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue à notre comité. Vous pouvez prendre tous les deux entre cinq et dix minutes pour votre exposé. Après quoi les députés vous poseront des questions.

    Monsieur Evans, nous allons commencer avec vous.

+-

    M. Bob Evans (directeur général, Canadiennes et Canadiens pour la sécurité routière (CRASH)): Merci beaucoup. Bonjour à tous, même si nous sommes proches de midi.

    Chaque année, de 500 à 600 Canadiens trouvent la mort dans des accidents mettant en cause des camions lourds. Dans le mémoire présenté au comité il y a quelque temps, CRASH a recommandé d'harmoniser les propositions canadiennes avec la réglementation américaine sur les heures de service des conducteurs, davantage axée sur la sécurité. Notre point de vue n'a pas changé.

    Je voudrais cependant profiter du temps qui m'est accordé aujourd'hui pour soumettre au comité une solution de rechange minimale qu'il devrait étudier attentivement. Si votre comité n'est pas disposé à accepter intégralement les suggestions du CCATM, il devrait au moins retenir les trois modestes recommandations dont je vais maintenant faire état. Il s'agit de mesures qui permettront de régler certains problèmes évidents de sécurité reliés aux propositions canadiennes. Ces changements tiennent compte des résultats des études en matière de fatigue et améliorent le processus sur le plan de la transparence et de la responsabilisation.

    On a demandé au comité de modifier la proposition sur les heures de conduite pour réduire la limite quotidienne à 13 heures. Cette modification ne devrait pas être apportée sans au moins s'accompagner des améliorations que je vais vous proposer. Comme je l'ai dit, il y en a trois.

    Premièrement, il faut faire passer la période de repos minimale de 36 à 48 heures. Permettez-moi de vous rappeler que la période de repos correspond à ce qu'un camionneur peut espérer de mieux en fait de week-end. Le camionneur prend une pause après avoir passé 70 heures au volant sur une période de cinq jours consécutifs. La période de repos actuellement proposée est de 36 heures, et je dis pour ma part qu'elle devrait être de 48 heures, alors que dans un week-end normal, la plupart des gens ont 64 heures de repos. La plupart des gens ont des week-ends de 64 heures; les camionneurs ont 36 heures.

    La période de 36 heures pose un vrai problème car elle ne permet au conducteur de nuit de ne disposer que d'une nuit de sommeil par semaine. Les experts en matière de fatigue estiment qu'une seule nuit de sommeil au terme des cinq nuits consécutives de conduite actuellement permises ne permet pas au camionneur de se remettre du manque de sommeil accumulé. Selon les experts canadiens en la matière, les conducteurs de nuit doivent pouvoir compter sur au moins deux nuits de sommeil par semaine. Aux États-Unis, les nouvelles recommandations sur le nombre d'heures maximum au volant sont assorties de deux nuits de sommeil obligatoires par semaine. Le fait d'augmenter la période minimale de repos de 36 à 48 heures constituera un geste d'une grande importance. En effet, nous nous assurerons que les conducteurs de nuit obtiennent les deux nuits de sommeil consécutives hebdomadaires que les scientifiques jugent nécessaires.

    L'Alliance canadienne du camionnage soutient que la période de 36 heures suffit puisqu'elle permet aux conducteurs de nuit de disposer de ce qu'on appelle deux périodes principales de sommeil. Ce concept de période principale de sommeil—vraisemblablement durant la journée—ne tient pas compte de l'avis des experts qui recommandent au moins deux nuits de sommeil par semaine. L'étude du rythme circadien a révélé que le corps humain a besoin de nuits de sommeil et non de soi-disant périodes principales.

    Le fait d'ajouter 12 heures à la période de repos proposée, pour qu'elle passe de 36 à 48 heures, permettra aux camionneurs de bénéficier de deux nuits de sommeil consécutives que les experts jugent essentielles. Les conducteurs seront plus reposés et des vies seront ainsi sauvées.

    Ledeuxième changement que je voudrais proposer est que le comité recommande que la nouvelle réglementation canadienne sur les heures de service rende obligatoire l'installation progressive d'enregistreurs électroniques embarqués.

Á  +-(1150)  

    Il faut installer des enregistreurs électroniques afin d'enrayer la pratique répandue qui consiste à traficoter le nombre d'heures travaillées en se servant du honteux système actuel de carnet de bord. Dans le milieu du camionnage, tout le monde sait que l'on parle souvent de bandes dessinées ou de livres de menteries pour désigner ces carnets de bord. Un sondage réalisé par le prestigieux U.S. Insurance Institute for Highway Safety a révélé que les trois quarts des camionneurs transgressent la réglementation relative au nombre d'heures maximum de conduite.

    Il est ridicule de croire que le faible nombre de condamnations enregistrées au Canada à ce chapitre indique qu'il n'y a pas de problèmes de traficotage de carnets de bord au pays. Tous les camionneurs savent que le faible taux de condamnations prouve à quel point il est facile de gommer les chiffres dans les carnets de bord sans se faire prendre.

    Ce genre de pratique signifie que le nombre d'heures que les camionneurs passent au volant dépasse la limite déjà très généreuse prévue par la réglementation. Les conducteurs qui modifient les chiffres mettent de la pression sur les nombreux conducteurs qui jugent que la limite imposée est suffisante.

    Lorsque nous proposons d'utiliser des enregistreurs électroniques pour obtenir un registre inviolable des heures de conduite, nous ne parlons pas ici d'une technologie spatiale. Les enregistreurs électroniques équipent les locomotives depuis 50 ans. Le gouvernement canadien juge qu'il est essentiel de doter les avions commerciaux et les locomotives de boîtes noires. Pourtant, les collisions mettant en cause des poids lourds font un nombre beaucoup plus élevé de victimes.

    J'ai appris que les industries ferroviaire et aérienne se sont plaintes à l'époque de l'obligation d'installer des enregistreurs électroniques en invoquant des coûts élevés, l'atteinte à la vie privée, etc. Toutefois, elles se sont fait clairement indiquer que la décision était sans appel. Nous savons que l'installation d'enregistreurs dans les camions fait présentement l'objet d'une étude. Nous savons tous ce que cela signifie: la paralysie par l'analyse.

    Canadiennes et Canadiens pour la sécurité routière craint que le refus du gouvernement d'utiliser la technologie de l'information pour surveiller le nombre d'heures de conduite des camionneurs ne serve les intérêts de certaines personnes qui profitent du fait que les conducteurs peuvent excéder les limites prévues par la réglementation sans se faire prendre. Cette situation met les camionneurs et la population en danger. Il est évident que l'on dispose des outils pour remédier à cette situation. Ce qu'il manque, par contre, c'est la volonté politique de le faire.

    Enfin, j'aimerais proposer un troisième changement. Le comité doit insister pour reformuler l'article 12 de la réglementation canadienne proposée sur les heures de service. Je ne suis pas sûr si article est le mot juste. Pardonnez-moi si j'emploie le mot article incorrectement. Dans sa forme actuelle, l'article 12 donne aux fonctionnaires de Transports Canada carte blanche pour exempter certaines entreprises de camionnage des dispositions relatives aux heures maximales et à la production de rapports. Il est vrai que ce pouvoir ne doit vraisemblablement servir qu'à des fins de recherches, mais il reste que le gouvernement ne doit pas perdre de vue que ce sont des gens, et non des cobayes, qui empruntent les routes.

    Les études scientifiques révèlent que les effets du manque de sommeil chez les camionneurs sont très semblables aux effets de l'alcool. Il est donc essentiel de faire respecter les limites réglementaires en matière d'heures de conduite. Le manque de sommeil a des effets sur le niveau d'attention, la coordination et le jugement. Fait important, les études ont souvent démontré que de nombreux conducteurs fatigués ne se rendent pas compte que leurs facultés sont affaiblies.

    Prenons le texte de l'article 12 et modifions-le pour l'adapter au contexte de la conduite avec facultés affaiblies. Croyez-vous que la population canadienne accepterait ceci: «12.(1) Un directeur fédéral peut, dans le cadre de recherches ou de projets pilotes, accorder un permis spécial à certaines personnes pour les exempter de se soumettre à l'alcootest?» Les Canadiens, à juste titre, monteraient aux barricades. Et nous pouvons garantir au comité que nos recherches en matière d'opinion publique indiquent que la population canadienne sera furieuse lorsqu'elle prendra connaissance de la stratégie désinvolte proposée pour la protéger contre les effets tout aussi dévastateurs des camionneurs aux facultés affaiblies par le manque de sommeil.

    Lors de la dernière réunion du groupe de travail du CCATM sur les heures de service, mon association a proposé une refonte de l'article 12 pour imposer certaines limites aux tests de dépistage de la fatigue effectués par Transports Canada sur les voies publiques et les améliorer sur le plan de la transparence et de la reddition de comptes.

Á  +-(1155)  

    Je crois comprendre que votre comité a reçu un résumé de la proposition de CRASH. J'encourage les membres du comité à conclure que ces changements manifestement raisonnables reliés aux tests de dépistage de la fatigue devraient remplacer la version actuelle de l'article 12.

    Voilà donc la proposition raisonnable de Canadiennes et Canadiens pour la sécurité routière. Ce que nous affirmons, c'est que la réglementation actuellement proposée pour le nombre d'heures maximum au volant comporte des lacunes importantes à trois égards. Il s'agit ici de lacunes qui font courir des dangers inacceptables aux automobilistes et aux camionneurs.

    Nous croyons qu'il est est préférable que le comité recommande d'harmoniser la réglementation canadienne avec la réglementation américaine, laquelle est beaucoup plus axée sur la sécurité. Mais nous vous demandons à tout le moins d'envisager de recommander l'adoption des trois mesures correctives que je viens de proposer.

    Ces modifications tiennent compte de l'avis des scientifiques. Elles produiront peu d'effets, voire aucun, sur les objectifs commerciaux légitimes. Ces modifications seront accueillies favorablement par la population canadienne—et je peux vous assurer que nous possédons des données qui le prouvent. Ces modifications amélioreront les échanges commerciaux et la circulation transfrontalière avec les États-Unis. Elles sont équitables pour les entreprises, les camionneurs et tous les automobilistes. Surtout, elles permettront de sauver des vies.

    Il vous appartient de faire des recommandations qui permettront d'offrir aux Canadiens le niveau de sécurité routière auquel ils s'attendent.

    Il faut mettre en place une période de repos de 48 heures pour permettre aux conducteurs de nuit de récupérer. Il faut recourir à l'utilisation de la technologie de pointe—mais rien de très sorcier—pour éliminer le traficotage dangereux du nombre d'heures passées au volant, et il faut une réglementation prévoyant un mécanisme de recherche assorti des limites et de la transparence qui assureront la sécurité du public... C'est ce qu'il faut faire. Des vies sont en jeu.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Evans.

    Nous allons entendre maintenant Mme Smiley.

+-

    Mme Alison M. Smiley (témoignage à titre personnel): C'est un privilège que de pouvoir vous adresser la parole ce matin. Je suis ergonome de profession, et je m'intéresse donc au rendement humain, aux manières de l'améliorer et de réduire les accidents en respectant les limites humaines. Dans ce cas particulier, la limite humaine dont je me préoccupe tient au fait que nous ne sommes pas des machines et que nous avons tous besoin d'un certain nombre d'heures de sommeil. De plus, nous sommes dotés d'une horloge biologique qui dicte que c'est la nuit qu'on dort le mieux et non le jour.

    Je vais d'abord passer brièvement en revue les preuves scientifiques qui ont été étudiées par les groupes d'experts américains et canadiens. J'étais membre de ces deux groupes. Tout d'abord, la fatigue pose-t-elle un problème, de manière générale? Ensuite, quels sont les facteurs qui jouent un rôle déterminant? Enfin, les règlements qu'on propose tiennent-ils compte de ces facteurs?

    Je vais d'abord vous donner un portrait d'ensemble. Il est difficile de connaître le nombre d'accidents qui sont attribuables à la fatigue parce que nous ne pouvons pas mesurer la fatigue comme on mesure l'alcoolémie avec un alcootest. Pour déterminer cela, il faut poser plus de questions et faire plus ample enquête. Nous devons donc nous en remettre à des études spécialisées.

    D'après les estimations les plus exactes de ces études spécialisées, la fatigue serait associée à environ 5 à 10 p. 100 de tous les accidents, qui sont surtout des accidents où il y a dommage à des biens; cette proportion grimpe à 20 à 30 p. 100 pour les accidents où il y a blessures, et pour les accidents mortels, elle est de 25 à 35 p. 100. On a à peu près les mêmes proportions qu'avec l'alcool, dans la mesure où plus les accidents sont graves, plus la fatigue est présente.

    Le facteur qui joue le plus grand rôle est le nombre d'heures au volant. Nous savons depuis longtemps que les longues journées au volant sont préoccupantes. Jusqu'à présent, c'est le nombre d'heures que l'on a réglementées. D'après une étude qui a été faite il y a une vingtaine d'années, comme l'étude canado-américaine, nous savons que l'attention des gens commence à se relâcher après huit ou neuf heures de conduite en temps normal—c'est-à-dire le jour—et après quatre à cinq heures la nuit, dans un horaire irrégulier. Les heures où l'on travaille le jour ne sont pas les mêmes que les heures où l'on travaille la nuit. Les facultés des gens s'affaiblissent plus vite lorsqu'ils conduisent pendant longtemps la nuit.

    D'après une estimation, le risque d'accident double après huit heures. Il s'agit d'ailleurs d'une étude remarquable. Vous allez peut-être vous demander dans quelle mesure c'est grave. Lorsque vous atteignez le taux d'alcoolémie de 0,08 p. 100, vous risquez deux fois plus d'avoir un accident qu'un conducteur qui est à jeun. Cela vous donne une idée du niveau de danger.

    Le second facteur est le moment de la journée. Nous sommes tous dotés de cette horloge biologique qui fait que notre corps se sert de ses forces pour agir le jour, puis il ralentit pour récupérer et dormir la nuit. On voit comment fonctionne cette horloge biologique dans l'étude où 500 camionneurs ont révélé avec quelle fréquence ils s'endormaient au volant.

  +-(1200)  

    On constate deux périodes d'affaiblissement—ce qu'on appelle la baisse de régime après le déjeuner—et quiconque a pris part à un grand nombre de séances de comité sait fort bien ce qu'est cette baisse de régime après le déjeuner, on a de la difficulté à se concentrer après le déjeuner. Il y a une période qui est bien pire et qui est le matin, lorsque les gens ont du mal à rester éveillés.

    C'est un problème qui se pose particulièrement pour les camionneurs. C'est un problème tel que le risque d'accident, et il s'agit généralement d'accident où un seul véhicule est en cause, augmente beaucoup. Une étude suédoise démontre qu'entre 3 et 5 heures du matin, le risque d'accident pour un camionneur par kilomètre est quatre fois plus élevé que le jour. Donc, le moment de la journée joue un grand rôle pour ce qui est de la vigilance, de la promptitude des réflexes et du risque d'accident.

    Tout cela est lié au nombre insuffisant d'heures de sommeil parce que ce nombre est fonction du moment de la journée où l'on va dormir. Si vous vous endormez à midi et que vous essayez d'obtenir à ce moment-là votre sommeil pour la journée, vous allez peut-être réussir à dormir quatre heures. Si vous vous endormez à 22 heures, il vous sera alors possible de dormir entre huit et neuf heures.

    Ce qui veut dire que les travailleurs de nuit, ou les camionneurs qui conduisent la nuit, ne dorment pas autant le jour qu'ils dormiraient la nuit. Une étude qui remonte à il y a longtemps nous apprend qu'ils perdent environ une heure et demie de sommeil par jour, et qu'ils accumulent un déficit de sommeil. Lorsqu'ils ont deux jours de congé, ils vont dormir entre 10 et 12 heures, et plus longtemps le deuxième jour. C'est cette étude qui fonde notre conviction selon laquelle une seule nuit de congé n'est pas assez pour récupérer. Ces personnes sont des travailleurs de quarts professionnels. Il ne s'agit pas d'une bande d'étudiants du niveau universitaire.

    Nous savons que les camionneurs sont fatigués. Un camionneur sur cinq avoue s'être endormi au volant au cours du dernier mois, un conducteur de semi-remorque sur cinq. J'y pense lorsque je le les dépasse sur l'autoroute.

    Une étude du National Transportation Safety Board des États-Unis nous a appris que lorsque les gens ont des accidents la nuit, c'est à cause de la fatigue, ces gens ont tendance à dormir moins que les autres personnes qui sont impliquées dans d'autres types d'accidents la nuit. Donc lorsqu'il y a un accident, et qu'on voit qu'il est attribuable à la fatigue, le genre d'accident où un camion traverse trois lignes brusquement pour échouer dans le fossé, le nombre moyen d'heures de sommeil dans ce genre de cas, selon cette étude, est de cinq heures et demie comparativement aux autres conducteurs qui ont huit heures de sommeil et qui ont des types d'accidents différents.

    Chose intéressante, 80 p. 100 des gens qui ont eu des accidents où la fatigue était en cause estimaient qu'ils avaient bien ou très bien dormi la nuit d'avant. Donc les gens ne savent pas reconnaître leur propre niveau de fatigue.

    Les règlements tiennent compte dans une certaine mesure des propositions du groupe d'experts. Nous sommes passés à une période de 24 heures, et j'en suis heureuse. Nous considérons désormais que les heures de service commandé et le temps de conduite sont équivalents, et l'on réduit le temps de travail le jour. Nous nous opposons vivement à une augmentation du nombre d'heures hebdomadaires, et ce nombre d'heures est effectivement augmenté si l'on autorise une période de repos de 36 heures.

    Nous avons fait plusieurs suggestions—et elles comptaient parmi les suggestions essentielles du groupe d'experts canadiens et rejoignaient l'une des suggestions essentielles du groupe d'experts américains—à savoir, qu'il faut traiter la conduite de nuit différemment de la conduite de jour à cause du rythme circadien, à cause de cette horloge biologique. Nous avons fait diverses propositions: moins de temps si les gens conduisent la nuit, une période de repos s'ils conduisent la nuit, et un repos de 48 heures, ou deux nuits de congé après quatre nuits en service commandé. Nous savons que les gens ont besoin de dormir pour récupérer.

    Enfin, au niveau du contrôle du respect des lois, nous n'avons pas au Canada d'étude comme celle-là. Celle-ci est des États-Unis, et elle nous apprend que trois quarts des conducteurs de semi-remorque contreviennent au règlement américain sur les heures de service, et qu'un quart d'entre eux conduisent plus de 100 heures par semaine. Il faut donc un mécanisme pour assurer le respect des lois.

  +-(1205)  

    Je suis d'avis que le règlement qui est proposé continue de traiter sur le même pied le jour et la nuit, comme si nous n'étions pas plus fatigués lorsque nous travaillons la nuit et que nous essayons de reprendre notre sommeil le jour. Et ce règlement ne haussera en rien la sécurité routière.

    Merci.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Merci, madame Smiley.

    Nous allons passer aux questions. Monsieur Stinson.

+-

    M. Darrel Stinson (Okanagan--Shuswap, Alliance canadienne): Je trouve tout cela très intéressant. J'imagine que je ne suis pas du tout dans la norme de votre étude. Je dors en fait trois heures par nuit.

+-

    Mme Alison Smiley: Oui, il y a des gens comme ça... vous représentez un petit pourcentage de la population.

+-

    M. Darrel Stinson: Considérons que les camionneurs sont des camionneurs indépendants qui ont le même problème que moi. Je vais être très franc avec vous, j'ai beaucoup de mal à dormir la nuit.

    Prenez l'Alliance canadienne du camionnage, très souvent les camionneurs eux-mêmes, quand on leur parle, vous disent qu'ils préfèrent en fait conduire la nuit pour éviter les embouteillages. Quand on y réfléchit bien, et c'est mon avis, cela réduit le nombre d'accidents pour ces camionneurs qui conduisent la nuit au lieu de traverser Ottawa ou Toronto aux heures de pointe.

    Avez-vous bien dit que le fait de conduire pendant huit heures, c'est comme avoir 0,08 p. 100 d'alcool dans le sang?

  +-(1210)  

+-

    Mme Alison Smiley: C'est le risque d'accident qui y est associé, oui. C'est l'équivalent.

+-

    M. Darrel Stinson: Mais le fait d'associer les deux, de comparer cela avec l'alcool, c'est causer un grand tort à l'industrie. Je crois qu'on dédramatise aussi beaucoup de la sorte le fait de boire et de conduire.

    Il y a une chose qui me dérange, c'est lorsque vous dites que vous avez fait une étude en Suède et que vous en comparez les résultats avec ce qui se fait ici au Canada. Je vais donc vous poser la question suivante. Combien de personnes ont pris part à cette étude, et est-ce qu'on a pris en compte dans ce rapport les différences dans l'état et l'entretien des routes?

+-

    Mme Alison Smiley: Vous faites allusion à l'étude où il est dit que le risque d'accident est quatre fois plus élevé?

+-

    M. Darrel Stinson: Oui.

+-

    Mme Alison Smiley: En fait, cette étude portait sur cinq pays.

+-

    M. Darrel Stinson: Où l'on prenait en compte l'état des routes...?

+-

    Mme Alison Smiley: Oui. Cinq pays où l'état des routes est différent—Israël, la Grande-Bretagne, l'Australie, la Suède, et je ne peux pas me souvenir du cinquième—dans tous ces pays, on constatait un risque d'accident beaucoup plus élevé pendant cette période.

+-

    M. Darrel Stinson: Oui, ça se peut. Voici à quoi je veux en venir. Est-ce qu'il y a plus d'embouteillages sur les routes des ces pays qu'au Canada pendant la même période de conduite?

+-

    Mme Alison Smiley: Dans certains cas oui, et dans d'autres non.

+-

    M. Darrel Stinson: Les routes sont-elles de la même largeur? Est-ce qu'on parle des mêmes normes pour les camions? Je sais, et vous le savez aussi, que le système routier canadien est très différent de celui de la Grande-Bretagne.

+-

    Mme Alison Smiley: Il est assez semblable à celui des États-Unis, cependant. Ce dont il est surtout question, c'est de la physiologie commune. Les habitants d'Israël, de Suède, de Grande-Bretagne, d'Australie et des États-Unis ont la même physiologie que les Canadiens, dans la mesure où ils sont plus fatigués, et tout leur rythme physiologique est tel qu'ils sont moins vigilants la nuit que le jour. Donc, de ce côté, ce n'est pas différent.

+-

    M. Darrel Stinson: Et c'est essentiellement sur quoi repose l'étude.

+-

    Mme Alison Smiley: Oui. C'est basé sur les statistiques relatives aux accidents dans ces cinq pays. Cette étude en particulier, qui concerne le camionnage, est basée sur les statistiques relatives aux accidents et sur une base au kilomètre.

    Je tiens à préciser que je ne suis pas contre la conduite de nuit. Je ne manque pas de sens pratique à ce point. Je dis simplement que lorsque l'on conduit la nuit, il faut penser qu'il faut plus de temps pour récupérer si l'on veut revenir à un état où le rendement est satisfaisant.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Monsieur Szabo.

+-

    M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur Evans, je sais que vous vous êtes également penché sur l'industrie ferroviaire. Quel est en ce moment le nombre d'heures de travail maximal par jour pour les employés des chemins de fer?

+-

    M. Bob Evans: Je ne connais pas la réponse, désolé. Je n'ai pas du tout utilisé la question du nombre d'heures de travail dans les chemins de fer.

    Je peux vous dire cependant que près de 99 p. 100 des mécaniciens et conducteurs de locomotive sont syndiqués. Ils travaillent en vertu de conventions collectives qui déterminent le nombre de milles qu'ils peuvent faire tous les mois. Ces limites ont tendance à constituer en moyenne environ 40 heures de travail par semaine. Elles peuvent être irrégulières ou plus concentrées...mais les conventions collectives qui ont été négociées leur imposent des limites très précises.

+-

    M. Paul Szabo: D'accord, ça va.

    Pour ce qui est de la tricherie, je trouve intéressant de voir que n'importe qui peut tricher. J'imagine que l'essentiel consiste à établir un cadre réglementaire réaliste, et peut-être des exigences relatives au contrôle de la consignation ou de l'enregistrement des heures? Et si l'on constate qu'il y a tricherie considérable ou à répétition, qu'il ne s'agit pas d'inattention ou de simples cas isolés, quelles conséquences devrait-il y avoir?

    Vous voudrez peut-être essayer de répondre tous les deux.

  +-(1215)  

+-

    M. Bob Evans: Je peux peut-être commencer.

    Je vais vous dire ce que l'on propose aux États-Unis. La proposition américaine consiste à imposer des enregistreurs électroniques à bord de tous les grands camions d'ici quatre ans, ou d'ici deux ans pour les grandes entreprises et d'ici quatre ans pour les petites entreprises, et les camionneurs indépendants et les tractionnaires. On veut ainsi créer une masse critique de telle sorte que les coûts pour les tractionnaires seront moindres.

    Avec cette boîte noire, on saura simplement quand le camion roule et quand il est arrêté. Ce sera probablement lié à une carte intelligente quelconque dont disposera le camionneur. Il faut qu'il y ait une carte pour qu'on sache non seulement quand le camion est en activité mais aussi quand le conducteur A, le conducteur B ou le conducteur C conduisent ce camion.

    Quelle est l'approche que l'on propose. Les Américains ont aussi imposé un délai précis pour la réalisation de cette mesure, élément que je n'ai pas incorporé dans ma proposition et que j'aurais dû incorporer. À mon avis, le calendrier américain est une mesure à laquelle on devrait songer ici.

+-

    Mme Alison Smiley: J'ai quelques observations à ce sujet.

    Premièrement, un grand nombre de camions sont déjà équipés de tachygraphes, d'enregistreurs de distance et autres dispositifs, je ne crois donc pas que ce soit bien difficile d'ajouter des enregistreurs électroniques pour mesurer le temps de service.

    Deuxièmement, ce qu'on ne sait pas du tout au Canada, ce sont les heures auxquelles les gens travaillent. Nous n'avons fait aucune étude comme celles qui ont été faites aux États-Unis. L'une des meilleures études, où on a voulu calculer combien de gens contrevenaient aux normes sur les heures de travail, a été faite très simplement. On notait les plaques d'immatriculation à un arrêt pour camions, et on les notait de nouveau à un autre arrêt sur un parcours très achalandé, et on calculait ensuite le nombre d'heures de travail. Cette étude a révélé qu'au moins la moitié des camionneurs contrôlés contrevenaient aux normes en vigueur.

+-

    M. Paul Szabo: Au sujet du repos, monsieur Evans, vous proposez 48 heures au lieu de 36. Pouvez-vous nous dire combien d'heures de repos il faut lorsqu'on passe de huit heures par jour à 13 heures par jour?

+-

    M. Bob Evans: Pardonnez-moi, je ne comprends pas bien votre question.

+-

    M. Paul Szabo: Eh bien, un repos de 12 heures constitue une augmentation de 33 p. 100 du temps de repos.

+-

    M. Bob Evans: Ah, vous additionnez... Je propose que l'on passe de 36 à 48.

+-

    M. Paul Szabo: Oui. Vous proposez une augmentation de 12 heures, donc le tiers de 36.

+-

    M. Bob Evans: Une augmentation de 33 p. 100 de la période hors service, oui. De cette façon, vous avez la deuxième nuit.

+-

    M. Paul Szabo: Mais si vous réduisiez cette période de 13 à 12, combien d'heures de repos auriez-vous?

+-

    M. Bob Evans: Je ferais quand même la même recommandation...

+-

    M. Paul Szabo: Alors où se situe le point critique?

+-

    M. Bob Evans: ...parce qu'il faut faire le calcul quotidiennement et par semaine.

+-

    M. Paul Szabo: Ma question est celle-ci: où se situe le point critique? Est-ce qu'il faut une période de repos après 10 heures?

+-

    M. Bob Evans: Le point critique, en réalité, c'est deux nuits de sommeil, un minimum de deux nuits de sommeil. J'ai été influencé par un certain nombre de sources, dont l'une, et non la moindre, est assise à côté de moi ici. Les besoins d'un chauffeur de camion...

    C'est assez intéressant de constater que le groupe d'experts canadiens a recommandé deux nuits...

+-

    M. Paul Szabo: Je n'ai pas beaucoup de temps. J'essaie de déterminer à partir de quel moment il devient nécessaire de prévoir une période de repos?

+-

    M. Bob Evans: Après 70 heures, il y a ce que l'on appelle une période de repos volontaire, mais c'est plutôt absurde. Le chauffeur peut décider volontairement de se reposer à ce moment-là. Il peut perdre son travail, mais...

+-

    Mr. Paul Szabo: Donc, vous dites qu'il n'y a aucun rapport avec le maximum de 13 heures par jour.

+-

    Bob Evans: Actuellement, vous pouvez travailler 14 heures par jour. Je sais qu'on a proposé de passer de 14 à 13 heures, mais aux termes de la proposition actuelle, vous pouvez conduire 14 heures par jour. Cela fait beaucoup de travail: 14 heures le premier jour; 14 heures le deuxième jour; 14 heures le troisième jour; 14 heures le quatrième jour; 14 heures le cinquième jour. Arrivé à 70 heures, vous devez prendre un repos de 36 heures.

    Cela prend donc tout le reste du cinquième jour, la totalité du sixième jour et ensuite, le septième jour, vous pouvez conduire encore 14 heures et vous repartez pour un autre cycle de cinq jours.

+-

    M. Paul Szabo: Je vais donc reformuler ma question: si vous travaillez 60 heures, combien de repos vous faut-il? Soixante heures en cinq jours.

  +-(1220)  

+-

    M. Bob Evans: Si vous travaillez 60 heures en cinq jours...

+-

    M. Paul Szabo: Dans quelle mesure ce repos est-il nécessaire?

+-

    M. Bob Evans: C'est une bonne question. Parce que dans la proposition américaine, on exige deux nuits après 60 heures. Mais c'est après avoir travaillé plus que tel nombre d'heures, un point c'est tout, peu importe le nombre de jours, après quoi il faut prendre du repos. Vous avez raison.

+-

    M. Paul Szabo: Oui, parce que vous proposez une augmentation considérable du temps de repos et j'essaie de comprendre à partir de quel point on frappe un mur qui déclenche la nécessité du repos. Si vous avez rajusté les heures de service... Il est évident qu'en passant de 14 heures à 13 heures, cela deviendra moins risqué, mais ce n'est pas directement lié au temps de repos. En fait, vous faites tout à fait le contraire.

+-

    M. Bob Evans: En effet, mais d'après ce qu'a dit David Bradley, de l'Alliance canadienne du camionnage, un chauffeur de camion continuera de travailler 14 heures avec la période de 13 heures. C'était dans son témoignage. Même si l'on adopte les 13 heures de conduite, le chauffeur de camion doit encore travailler 14 heures, d'après lui. Cela fait donc encore 14 heures par semaines.

    Cette histoire de 14 heures, vous devrez y réfléchir sérieusement, parce que la plupart des tractionnaires ne sont pas très bien payés. Ils sont payés au mille et ils subissent des pressions pour travailler le plus grand nombre d'heures possible, tout au moins légalement. Il y aura beaucoup de chauffeurs de camion qui conduiront 70 heures en cinq jours avant de prendre une période de repos.

    Mais vous avez soulevé un point intéressant. Même en adoptant une position encore plus extrême que celle que vous suggérez, si quelqu'un travaille seulement 10 heures par jour, il peut y avoir besoin d'un deuxième élément pour déterminer à partir de quand la période de repos est obligatoire. Mais la période de repos devrait toujours permettre deux nuits de sommeil.

+-

    M. Paul Szabo: Même si vous avez travaillé trois jours, pris une journée de congé, et travaillé ensuite trois autres jours?

+-

    M. Bob Evans: Je vais peut-être vous laisser répondre à cela.

+-

    Mme Alison Smiley: La vraie question est de savoir combien de nuits vous avez travaillé. Si vous travaillez de minuit à six heures du matin, quatre nuits de suite, vous avez besoin de temps de repos.

+-

    M. Paul Szabo: Quatre nuits consécutives, ou bien en une semaine?

+-

    Mme Alison Smiley: Oui, quatre nuits consécutives. Si vous travaillez durant le jour, oui, vous pouvez vous accrocher et endurer un tel régime. Vous avez des nuits de sommeil. Je ne pense pas que ce soit plaisant. Mais ce qui me préoccupe vraiment, ce sont les gens qui travaillent la nuit, parce que le règlement actuel leur permet de travailler six nuits d'affilée et d'avoir ensuite une seule nuit de repos.

+-

    M. Paul Szabo: C'est ma dernière question. En théorie, un exploitant peut contourner les règles de façon bien simple. Au lieu de prendre les deux jours de repos consécutifs obligatoires, ils peuvent simplement prendre une journée de repos au milieu du voyage et diminuer ainsi la période hors service. En théorie, on peut travailler six jours par semaine et ne jamais avoir de périodes de repos obligatoires.

+-

    Mme Alison Smiley: Je ne sais pas trop comment...

+-

    M. Bob Evans: Je n'en suis pas absolument certain.

+-

    M. Paul Szabo: Oui, c'est ce que j'ai compris. Merci.

[Français]

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Monsieur Laframboise.

+-

    M. Mario Laframboise (Argenteuil--Papineau--Mirabel, BQ): Merci, monsieur le président.

    Ma première question sera pour M. Evans. Personnellement, je suis profondément convaincu que l'industrie du transport est en crise. Il n'y a pas de relève et une des raisons, c'est que les conditions de travail ne sont plus humainement acceptables pour les jeunes qui voudraient vivre de cette industrie. Est-ce que mon interprétation de la situation est mauvaise, ou si elle est bonne?

+-

    M. Bob Evans: Je pense que c'est une très bonne interprétation de la réalité. Il y a beaucoup de camionneurs qui ne sont pas très bien payés et cela a été démontré par des statistiques de Statistique Canada. Il y a une expression en anglais, a sweatshop on wheels. C'est souvent ce type de milieu pour les chauffeurs qui travaillent un trop grand nombre d'heures et ne sont pas assez bien payés. Plusieurs autres recherches le démontrent, beaucoup de camionneurs ne sont pas en très bonne santé et n'ont pas un bon moral. Il y a toutes sortes de problèmes qui sévissent dans l'industrie.

    Il est certain qu'on entend dire qu'il est difficile de trouver des camionneurs, mais qui va conduire un camion, travailler 60, 70 ou 80 heures par semaine dans toutes sortes de conditions et être souvent absent de la maison quand il peut avoir un travail de 40 heures par semaine, travailler le jour, etc.? Ce n'est pas une profession attrayante.

  +-(1225)  

+-

    M. Mario Laframboise: À entendre l'association de l'industrie indépendante qui a négocié une entente avec les teamsters, on pourrait croire qu'on a voulu faire une entente parce que c'était un moindre mal. L'industrie est en crise et on veut surtout utiliser au maximum les camionneurs disponibles. Évidemment, comme les chauffeurs ne veulent pas que leur entreprise ferme ses portes, ils collaborent. Finalement, c'est une situation de compromis. Mais il n'y a rien dans cette entente qui résout le grave problème du nombre d'heures de travail.

    Selon moi, c'est le problème le plus grave. Si on réduit le nombre d'heures et qu'il devient acceptable. l'industrie va s'ajuster de même que les salaires. Tout va rentrer dans l'ordre, si on arrive à mieux contrôler. C'est ainsi que je comprends votre intervention.

    Encore une fois, vous parlez des périodes de repos et de tout le reste qu'il faut contrôler par des mécanismes électroniques. Je pense que ça va de soi, car les fameux log books ont tellement été galvaudés que même l'industrie s'en moque, comme tout le monde d'ailleurs. Ils font encore l'affaire, actuellement, parce qu'on peut justifier les heures de travail en les modifiant ou en les ajustant comme on veut et qu'on manque de camionneurs. Mais la dure réalité qui demeure, c'est que les longues heures de travail et la fatigue sont un problème pour l'industrie.

    Ma prochaine question s'adressera à Mme Smiley. Transports Canada est venu nous dire, lors de notre dernière séance, qu'il n'y avait pas d'étude concluante sur la fatigue, ni aux États-Unis, ni au Canada. Je note que vous nous dites et que vous affirmez pratiquement que plus de huit heures de conduite sans sommeil équivaut pratiquement à dépasser un taux d'alcoolémie de .08. Avez-vous une étude qui le prouve? C'est grave ce que vous dites. Quand on dit que dépasser huit heures de conduite au volant d'un véhicule, c'est comme dépasser le taux d'alcoolémie de .08, on a un problème grave. On sévit et il y a des normes graves dans le cas de l'alcool et on ne le ferait pas dans le cas de la fatigue. Est-ce qu'on a des études pour affirmer une chose comme celle-là? Est-ce que vous avez une importante étude derrière vous?

[Traduction]

+-

    Mme Alison Smiley: Il y a beaucoup d'études qui confirment que le risque est le plus grand. Celle que vous avez mentionnée, disant que le risque double après huit heures, est une étude particulièrement bonne portant sur 330 accidents de semi-remorque et le nombre d'heures qu'avaient travaillé les chauffeurs impliqués dans les accidents. Les auteurs de l'étude sont allés à l'endroit de l'accident à la même heure du jour, le même jour de la semaine, ils ont interrogé trois autres chauffeurs de semi-remorque pour savoir combien d'heures ils avaient travaillé. Ceux-là n'avaient pas eu d'accident. De cette manière, ils ont réussi à établir que le risque était doublé. C'est une très bonne étude.

    Ce n'est pas la seule étude, il y a aussi des études de performance. Quand les gens sont fatigués parce qu'ils conduisent en pleine nuit, leur performance est semblable à celle de gens qui ont bu: ils manquent d'attention, leur attention est mal ciblée, ils louvoient plus à l'intérieur de leur voie. Les effets sont très semblables.

  +-(1230)  

[Français]

+-

    M. Mario Laframboise: Quand on a décidé d'adopter le taux de .08 d'alcoolémie, on avait sûrement eu des études semblables qui prouvaient que ceux qui avaient dépassé le taux de .08 étaient plus à risque pour des accidents, et on s'est sûrement basé sur des études d'accidents pour adopter le .08. Pensez-vous que c'est ce qui s'est passé à l'époque?

[Traduction]

+-

    Mme Alison Smiley: Je dirais qu'à l'époque où nous avons adopté la loi du .08, nous avions probablement des études un peu plus concluantes que celle que nous avons dans le domaine de la fatigue, mais nous en avons suffisamment dans le domaine de la fatigue pour prendre des règlements qui correspondent mieux aux limites des gens et à l'augmentation du risque d'accident.

[Français]

+-

    M. Mario Laframboise: Quand Transports Canada nous dit qu'il n'y a pas d'études sur la fatigue, vous n'êtes pas d'accord sur cela?

[Traduction]

+-

    Mme Alison Smiley: Non, absolument pas. Si l'on examine le rapport du groupe d'experts des États-Unis et du Canada, on constate qu'il y a des dizaines et des dizaines de références à des études sur la fatigue. On en connaît un bout sur la question.

[Français]

+-

    M. Mario Laframboise: Je termine avec une dernière question. L'entente qui a eu lieu entre les teamsters et l'industrie indépendante est-elle semblable ou conforme à la recommandation dont vous nous parlez, à l'étude sur la révision proposée des heures de service, au fameux rapport que vous analysez, madame Smiley? Est-ce que c'est semblable, ou si c'est complètement différent?

[Traduction]

+-

    Mme Alison Smiley: Non, c'est différent. Le problème est que l'intérêt de ces deux groupes est d'avoir le plus d'heures possible pour que les associations de camionnage n'aient pas de pénuries de chauffeurs et pour que les chauffeurs puissent gagner leur vie. C'est le problème essentiel. Je suis tout à fait certaine que s'ils pouvaient gagner leur vie en conduisant moins d'heures, ils préféreraient travailler moins d'heures.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Merci Mario.

    Monsieur Shepherd.

+-

    M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Merci.

    Madame Smiley, j'ai trouvé intéressantes certaines de vos observations. Premièrement, je suppose que la plupart des gens font une pause pour manger. Les gens ne peuvent pas vraiment...

    Une voix: Oh, oh!

    M. Alex Shepherd: Il n'y a rien de tel? Ils conduisent sans s'arrêter, c'est bien cela?

    Mme Alison Smiley: C'est cela.

    M. Alex Shepherd: Mais s'ils étaient obligés de s'arrêter physiquement pendant une heure, on peut supposer que cela pourrait compenser en partie le manque de sommeil.

+-

    Mme Alison Smiley: C'est un point très intéressant. Nous avons constaté—et c'est ce qui ressort de nombreuses études—que quand on est vraiment fatigué, les pauses repos ont un effet très limité. En fait, dans une étude de Transports Canada sur la conduite en pleine nuit, on a constaté qu'après la troisième pause, à peu près, on obtient une amélioration de performance d'une durée de 12 minutes, après quoi on revient à la case départ. Quand on a besoin de sommeil, c'est comme quand on a besoin de nourriture: on ne peut pas s'en passer et le remplacer par autre chose; il faut dormir.

+-

    M. Alex Shepherd: Je pose la question parce qu'il y a actuellement bon nombre de camionneurs qui ont des problèmes avec Revenu Canada au sujet de leurs indemnités de repas. Ils ont réduit les montants qu'ils réclament à ce chapitre. Mais vous dites que cela n'a aucun rapport, puisque la pause elle-même n'aide pas, et même si elle était utile, elle ne compenserait pas vraiment le manque de sommeil.

+-

    Mme Alison Smiley: Les deux ou trois premières pauses vont aider, mais après cela, quand vous arrivez au point où vous avez besoin de sommeil, les pauses ont un effet très limité. Vous allez tomber endormis tout aussi vite.

+-

    M. Alex Shepherd: Je reviens à votre théorie sur la conduite de nuit. Je suppose que vous y avez bien réfléchi.

    Dans certaines régions de notre pays, pendant les mois d'hiver, il fait noir la plupart du temps. On pourrait supposer, par extrapolation, qu'il y a dans ces régions un taux d'accident plus élevé que dans le sud du pays. Est-ce vrai?

+-

    Mme Alison Smiley: Je crois que c'est vrai, mais il y a deux éléments en cause. Le premier est le rythme circadien, c'est-à-dire qu'il y a une période aux petites heures du matin où vous n'êtes pas aussi éveillé et vous risquez davantage d'avoir un accident, et c'est le cas peu importe qu'il fasse jour ou qu'il fasse noir à ce moment-là.

    L'autre élément, c'est que la nuit, la visibilité est moins bonne et que l'on a effectivement un taux d'accident beaucoup plus élevé par kilomètre parcouru. Mais il y a évidemment moins de circulation la nuit, de sorte que la différence n'est pas apparente si on s'attarde simplement aux accidents, il faut voir le nombre d'accidents par kilomètre parcouru pour constater cet effet.

+-

    M. Alex Shepherd: Cela dit, il n'y a aucune étude qui donne à entendre que les conducteurs ont un risque plus élevé dans le nord que dans le sud?

+-

    Mme Alison Smiley: En fait, il y en a une, et elle a été faite par Frank Saccomanno, de l'Institut de recherche sur le risque de l'Université de Waterloo. Je ne pourrais pas vous en parler en détail, mais il s'est penché sur les conducteurs du nord de l'Ontario et a constaté un risque plus élevé dans cette région.

  +-(1235)  

+-

    M. Alex Shepherd: Donc, la législation devrait être fondée sur le nombre réel d'heures de clarté, n'est-ce pas?

+-

    Mme Alison Smiley: Non, parce que le principal facteur, c'est le rythme circadien. Le nombre d'heures de clarté change, mais le principal problème, ce qui rend les gens somnolents, c'est surtout le rythme circadien.

+-

    M. Alex Shepherd: Mais cela ne s'applique pas seulement au secteur du camionnage. Dans ma circonscription, beaucoup de gens travaillent pour General Motors et font des quarts de nuit. Je suppose que les gens qui travaillent la nuit sont plus susceptibles d'avoir des accidents que ceux qui travaillent le jour. Est-ce exact?

+-

    Mme Alison Smiley: Oui, c'est bien le cas et il y a beaucoup d'études qui démontrent cette corrélation, c'est-à-dire que l'on a plus d'accidents aux petites heures du matin, et un moins bon rendement. C'est connu depuis longtemps. En fait, dans le secteur des compagnies aériennes, les règles sont différentes pour le vol de nuit et le vol de jour. Il y a plus de contraintes pour la nuit.

+-    

+-+-

    M. Alex Shepherd: Mais si c'est vrai pour une compagnie comme General Motors, ce n'est pas un phénomène assez marqué pour influer sur l'efficience ou la productivité.

+-

    Mme Alison Smiley: C'est parce qu'ils n'ont pas examiné la question. En tant qu'ergonome, je peux vous dire qu'il y a bien des choses qui influent sur la productivité et l'efficience des gens que les compagnies ne savent pas et qui ne changent pas. Il leur serait utile de le savoir.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Merci, monsieur Shepherd.

    Madame Desjarlais.

+-

    Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Je vous remercie pour votre exposé.

    Comme je fais partie de ce comité depuis quelques années, j'ai eu l'occasion de passer en revue certaines études qui ont été faites. Je suis curieuse de savoir, madame Smiley, si vous êtes au courant d'études semblables qui auraient été faites dans le secteur des soins de santé, par exemple, sur les quarts des infirmières, quand elles ont passé aux quarts de douze heures, et sur les rapports avec l'industrie du camionnage.

+-

    Mme Alison Smiley: Oui. J'ai abordé cette question pour la première fois lorsque l'industrie nucléaire a adopté les quarts de douze heures. C'est un dossier compliqué. Souvent, les tâches accomplies la nuit sont différentes de celles accomplies le jour, ou bien les circonstances sont différentes. Il faut tenir compte de tout cela quand on examine le taux d'accidents. De plus, dans la plupart des secteurs, le nombre d'heures travaillées est assujetti à des limitations plus sévères que dans le secteur du camionnage. Enfin, le risque, dans beaucoup de secteurs, n'est pas le même que lorsque l'on conduit un véhicule pesant des dizaines de tonnes sur les routes publiques.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Savez-vous si des études ont été faites dans le secteur des infirmières ou des soins de santé?

+-

    Mme Alison Smiley: Oui. L'étude qui me vient immédiatement à l'esprit est celle portant sur les accidents mineurs dans les hôpitaux. On utilise les accidents mineurs parce qu'on en compte un nombre suffisant pour constater une corrélation. On a constaté qu'il y en avait plus aux petites heures du matin.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Les accidents mineurs, les erreurs dans la posologie des médicaments, etc., sont plus nombreux vers la fin du quart et aux mêmes heures?

+-

    Mme Alison Smiley: Oui. C'est la même chose dans le secteur ferroviaire. Une étude a été faite en Allemagne. Quand un signal d'alarme est déclenché, si l'on ne réagit pas à un dispositif d'alerte et de remise à zéro, on constate un taux beaucoup plus élevé aux petites heures du matin et aussi durant la période de ralentissement qui suit le déjeuner.

+-

    Mme Bev Desjarlais: L'étude montre-t-elle s'il y a un effet quand il y a changement de quart? Si quelqu'un a travaillé un certain nombre de nuits, et ensuite un certain nombre de jours, pour revenir ensuite au quart de nuit, cela a-t-il un effet sur les habitudes de conduite?

+-

    Mme Alison Smiley: Je ne suis pas sûre de bien vous comprendre.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Vous avez un chauffeur qui a travaillé un certain nombre de nuits consécutives. Par exemple, il a fait deux quarts de nuit de 14 heures, il a pris un peu de repos, il a encore conduit deux jours, et ensuite il a conduit une autre nuit au cours de cette période. Cela influe-t-il également sur l'équilibre?

+-

    Mme Alison Smiley: Oui. On peut aller aux deux extrêmes pour créer les meilleures conditions possibles pour les gens. La première est de faire le moins de nuits consécutives possible. L'horaire européen des quarts de 12 heures serait quelque chose comme deux jours de suite, deux nuits de suite, et deux jours de congé. L'autre manière de procéder serait de permettre aux gens de se réadapter au travail de nuit, de travailler trois semaines selon le même horaire, et ensuite trois semaines selon un horaire différent.

    Au Canada, nous avons tendance à utiliser le pire horaire possible dans le secteur. C'est une semaine pour chaque quart. À chaque semaine, c'est comme si on prenait l'avion pour aller dans un fuseau horaire différent et qu'on essayait de s'y adapter.

+-

    Mme Bev Desjarlais: À votre avis, quel est le meilleur choix?

+-

    Mme Alison Smiley: Je ne pense pas qu'il y ait suffisamment d'études pour démontrer lequel des systèmes d'alternance des quarts de travail serait le meilleur dans une usine et sur la route. La vraie question, c'est qu'il faut du temps de repos après avoir travaillé 48 heures, à peu près. C'est le véritable problème.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Merci. C'est tout pour l'instant.

  +-(1240)  

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Merci.

    Monsieur Pankiw.

+-

    M. Jim Pankiw (Saskatoon--Humboldt, PC/RD): Merci, monsieur le président.

    Premièrement, je pense qu'il faut dire une chose ici, c'est que lorsque l'on veut faire une étude, on peut la concevoir de manière à obtenir passablement le résultat que l'on veut. C'est le problème de beaucoup d'études. En fait, les articles publiés dans la plupart des revues professionnelles ont eux-mêmes fait l'objet d'études et les études elles-mêmes peuvent être entachées par des partis pris. On peut en conclure, en toute probabilité, qu'il y a seulement environ 3 p. 100 de toutes les études examinées par des pairs et publiées dans des revues professionnelles sont véritablement impartiales et ne sont nullement entachées par un quelconque préjugé ou parti pris susceptible d'en fausser les résultats.

    Cela dit, je ne doute nullement qu'il y ait un certain fondement à ce que vous dites. Le bon sens nous dit que plus on conduit longtemps, plus on a tendance à tomber endormi, à un moment donné.

    Ce qui me préoccupe, c'est que c'est le gagne-pain des camionneurs qui est en cause, et il y a beaucoup de différences d'un cas à l'autre. Je répète que vous pouvez bien aligner une foule d'études, dont beaucoup sont préjugées parce que leurs auteurs tentaient de prouver quelque chose au départ. Quoi qu'il en soit, comment tenez-vous compte de la différence entre les sexes ou bien comment comparez-vous l'âge d'un camionneur par rapport à un autre? Il faut bien tenir compte de tous ces paramètres et facteurs différents.

    Disons qu'on a un camionneur comme M. Stinson, pour qui tout va bien pourvu qu'il ait trois ou quatre heures de sommeil par jour et qui est en fait un très bon conducteur.

+-

    Mme Bev Desjarlais: J'invoque le Règlement. Je tiens à préciser que M. Stinson n'a pas dit que tout allait bien pour lui. Il a dit qu'il avait un grave problème.

+-

    M. Darrel Stinson: Non, je n'ai pas dit que j'avais un grave problème. En fait, tout va très bien pour moi si j'ai trois heures.

+-

    M. Jim Pankiw: Je pense qu'il a bel et bien dit que s'il a trois ou quatre heures de sommeil par nuit, il fonctionne très bien.

    Voici où je veux en venir. Si M. Stinson était chauffeur de camion au lieu d'être politicien, sa capacité de gagner sa vie serait sérieusement limitée par une règle décrétée par le gouvernement et qui ne lui convient pas. Que pourrait-il faire? Il peut travailler un certain nombre d'heures, après quoi il doit resté assis les bras croisés sans pouvoir gagner sa vie à cause d'une loi gouvernementale.

    Quelle que soit la validité des études que vous prétendez avoir, je suis d'avis qu'il serait de loin préférable d'adopter une approche facultative et éducative consistant à dire aux camionneurs: «Écoutez, voici ce que nous avons constaté». Les camionneurs ont beau vouloir gagner leur vie, je suis certain qu'ils sont aussi conscients de la sécurité que n'importe qui d'autre.

    Vraiment, où cela nous mènerait-il? Si c'est vrai pour les camionneurs, c'est également vrai pour les particuliers qui conduisent leurs voitures. Peut-être que l'on devrait commencer à leur imposer des restrictions, à eux aussi. Et peut-être que le gouvernement devrait commencer à réglementer l'heure à laquelle on peut sortir de chez soi et marcher dans la rue. Où cela finirait-il?

    Je trouve qu'une approche beaucoup plus raisonnable serait fondée sur l'éducation, l'information et la conformité volontaire. En terminant, je voudrais dire que si nous ne le faisons pas, les camionneurs vont trouver le moyen de contourner la règle de toute manière. Vous avez déjà dit que 75  p. 100 d'entre eux aux États-Unis, ou quelque chose comme cela, violent les règles de toutes façons. Vous aurez beau inventer n'importe quel dispositif informatisé, les gens sont très ingénieux et plein de ressources et ils finiront bien par trouver une manière de contourner tout cela. Le seul résultat sera de forcer les gens à investir des ressources, du temps et des efforts dans l'évitement des règles. C'est contraire aux résultats recherchés.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Monsieur Evans.

+-

    M. Bob Evans: Je voudrais répondre. Ce que vous dites, en fait, c'est que c'est beaucoup plus important que le chauffeur de camion puisse gagner sa vie que de protéger la vie des autres usagers de la route, les autres Canadiens. Nous avons affaire à...

    M. Jim Pankiw: Non, je...

    M. Bob Evans: Non, je m'excuse, nous avons affaire à...

    M. Jim Pankiw: Je voudrais apporter une précision.

     M. Bob Evans: Il faut faire la part des choses.

+-

    M. Jim Pankiw: Je n'ai pas dit cela. J'ai dit...

+-

    M. Bob Evans: Non, vous n'avez pas dit cela, mais...

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): À l'ordre, je vous prie.

    Monsieur Pankiw, pourriez-vous le laisser finir?

+-

    M. Jim Pankiw: Il est mal parti. Il a posé une hypothèse de départ, mais je n'ai pas dit cela. Ce n'est pas ce que j'ai laissé entendre et ce n'est pas ce que je voulais dire. Si vous voulez le laisser parler, allez-y, mais il gaspille mon temps de parole.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Non, je ne veux pas le laisser parler, je veux seulement que tout soit clair. Peut-être pourriez-vous reformuler votre question pour la rendre plus claire.

+-

    M. Jim Pankiw: Je dis qu'il y a des différences entre les gens, entre les sexes et entre les âges et qu'il y a une foule de facteurs qui entrent en jeu. La mise en application d'une règle stricte qui, pour une personne en particulier, n'est peut-être absolument pas raisonnable, et qui influera en conséquence sur son gagne-pain, n'est pas équitable envers la personne en question.

  +-(1245)  

+-

     Tout ce que je voulais dire, c'est qu'une approche éducative et facultative consistant à informer les camionneurs sur les risques associés au manque de sommeil et tout le reste permettrait probablement d'obtenir de bien meilleurs résultats que de décréter des règles qui ne seront pas suivies de toutes façons.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Si j'ai bien compris, monsieur Evans, la question qui a été posée est de savoir si tous ces facteurs ont été pris en compte dans ces études.

+-

    M. Jim Pankiw: Eh bien, merci, monsieur le président.

    En fait, si l'on voulait être juste, il faudrait élaborer un test qui permettrait de mettre à l'épreuve tous les camionneurs, individuellement, pour savoir où se situent les limites de chacun et à partir de quel moment, chacun commence à éprouver des problèmes. Ce n'est pas juste d'avoir une série de règles uniformes qui s'appliquent à tout le monde alors que chacun est différent.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Je pense que vous avez posé votre question, monsieur Pankiw.

    Monsieur Evans.

+-

    M. Bob Evans: Je voudrais signaler que nous avons à l'heure actuelle, dans le domaine de la réglementation sur la sécurité routière, une norme tout à fait absolue et rigide, et je vous rappelle que cette règle est très efficace. Je veux parler du taux d'alcoolémie de 0,08.

    Peut-être que des gens en ont fait la susggestion, mais nous n'allons pas dire: «Oh, ma foi, c'est un type costaud, il devrait être capable de boire plus, alors nous allons lui permettre d'avoir un taux de 1,0». Ou encore: «Cette personne ne veut pas boire, alors nous ne prendrons même pas la peine d'exiger qu'elle se plie à une règle sur l'alcoolémie». Nous disons que pour protéger la vie et l'intégrité physique des gens sur nos routes, il faut que nous fassions quelque chose de très claire et de tout à fait absolue et nous avons donc décrété un taux d'alcool dans le sang qui est fixe.

    C'est peu commode pour bien des gens. C'est peut-être même injuste pour un type quelconque qui pèse 350 livres, qui est très costaud, etc., et qui pourrait peut-être prendre trois ou quatre bières de plus sans aucun problème. Mais nous disons qu'il est trop important de protéger la vie et d'éviter des blessures et qu'il faut en conséquence fixer une règle absolue.

    Nous avons un problème avec la fatigue, en ce sens qu'il n'y a pas de dispositif permettant de mesurer la fatigue, semblable à l'alcootest, mais cela ne veut pas dire que le problème est moins grave. En fait, le manque de sommeil a le même...

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): J'ai bien compris et nous allons donc revenir à la question. M. Pankiw a demandé si, dans les études qui ont été faites, on a pris en considération tous ces divers facteurs? Le sexe et...

    M. Bob Evans: Eh bien, je devrais peut-être demander à...

    Le président suppléant (M. John Cannis): Madame Smiley.

+-

    Mme Alison Smiley: Oui, un ou deux commentaires. Je ne porte pas un regard aussi strict que vous sur ce genre d'étude. Je préfère me fier à une étude sur 500 personnes qui se sont endormies au volant plutôt que de me fier à la preuve empirique d'une personne qui s'est endormie au volant parce que notre objectif c'est adopter des règlements qui concernent la majorité.

    Dans l'étude canado-américaine, selon les deux tiers des conducteurs suivis, fermer les yeux provoque un bref état de somnolence. J'en conclus que c'est un phénomène qui affecte la majorité des conducteurs.

+-

    M. Jim Pankiw: Donc la réponse à ma question est non, tous ces différents facteurs n'ont pas été pris en considération?

+-

    Mme Alison Smiley: Non, ils sont pris en considération dans des études différentes. Certaines études s'intéressent par exemple, au comportement le matin ou au comportement le soir, et à quel moment de la journée certaines personnes sont plus enclines à piquer du nez, etc. Il reste que pour la majorité, un certain nombre d'heures est nécessaire et que c'est au petit matin qu'ils sont le plus fatigués.

+-

    M. Jim Pankiw: Oui mais la majorité de quel groupe d'âge—de quel sexe, correspondant à quels autres paramètres?

+-

    Mme Alison Smiley: Probablement hommes et femmes confondus pour les études les plus récentes que je connais et pour des groupes d'âge allant de 16 ans à 80 ans.

+-

    M. Jim Pankiw: Oui mais il reste...

    Le président suppléant (M. John Cannis): Ce sera tout.

    M. Jim Pankiw: Pour être juste—si c'était possible, ce que je ne crois pas—il faudrait dire que telle série de règlements s'applique aux 20-25 ans; telle autre, aux 30-35 ans de sexe féminin. Ce ne serait même pas possible il y aurait toujours des variations d'un individu à l'autre.

    Je conclurais simplement, monsieur le président, en disant à propos de cette proposition analogue au 0,08 de M. Evans que pour commencer, c'est du gagne-pain de ces gens dont nous parlons ici, la comparaison n'est donc pas possible. Deuxièmement, quoi que nous fassions il y aura toujours des abus. C'est pour cela qu'il y a toujours autant de gens inculpés pour cette raison. Le problème resterait entier. C'est la raison pour laquelle j'estime qu'une approche plus raisonnable fondée sur la coopération et l'éducation serait préférable à une série de nouveaux règlements...

    Le président suppléant (M. John Cannis): Madame Smiley.

+-

    Mme Alison Smiley: J'aimerais dire un mot sur l'éducation. C'est une approche qui a été essayée. Une bonne étude a été faite sur un programme visant un changement de comportement et de compréhension des principales causes de fatigue chez les cheminots par l'éducation. Ils ont tous trouvé ce programme merveilleux mais aucun n'a changé ses habitudes. Pourquoi? Parce que leurs circonstances de travail, elles, n'avaient pas changé. Pour que les gens fassent quelque chose volontairement, il faut que cela ne les dérange pas et qu'ils y voient leur intérêt.

    Nous avons essayé l'approche éducative avec les ceintures de sécurité. Les États-Unis ont essayé pendant des années. Onze pour cent des automobilistes mettaient leurs ceintures. C'est si difficile que ça de mettre sa ceinture? Dès qu'ils ont légiféré, le pourcentage est monté en flèche. Croire qu'une approche éducative peut marcher est une illusion. C'est totalement inefficace et nous en avons la preuve.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Merci de cette réponse.

    Monsieur Laframboise.

[Français]

+-

    M. Mario Laframboise: Merci, monsieur le président.

    Si vous me permettez un commentaire, je dirai qu'il faut discipliner l'industrie parce que de la façon dont elle va, elle ne respecte aucune norme. Le meilleur exemple est celui des fameux carnets, des log books. Ce n'est pas respecté; tout le monde le sait. Donc, il faut trouver un moyen de discipliner l'industrie et les salaires vont s'ajuster en conséquence. C'est aussi simple que cela. Tant qu'elle restera indisciplinée, on ne réussira jamais à la contrôler et, évidemment, comme le disait mon collègue tout à l'heure, c'est sûr que tout le monde peut essayer de travailler le plus possible, mais quand on est payé au millage, on essaie de faire le plus de millage possible, et c'est là que ça devient dangereux pour les autres utilisateurs de la route. C'est aussi simple que cela. Donc, à un certain moment, la fatigue devient, comme l'alcool, un problème pour ceux qui ont entre les mains un véhicule qui peut devenir une arme. Telle est la situation.

    Pour ce qui est des études, je vous disais que le ministère des Transports nous avait dit qu'il n'y avait pas d'études encore assez approfondies sur la fatigue; je vous le répète. Vous m'avez dit plus tôt que vous n'étiez pas d'accord avec le ministère.

    Je vous demande pourquoi, selon vous, le ministère peut colporter de telles choses, nous dire qu'il n'y a pas d'études suffisantes sur le sujet?

  +-(1250)  

[Traduction]

+-

    Mme Alison Smiley: Je n'en vois pas vraiment la raison. Je crois que comme chaque fois qu'il y a une recherche scientifique, si on ne veut pas en appliquer les résultats, on peut toujours dire que cette recherche est insuffisante. Je suis certaine que cela s'est déjà fait et je suis certaine que cela s'est passé comme ça quand les règles d'alcoolémie sont sorties et quand le port obligatoire de la ceinture est sorti.

    À mon avis, la documentation scientifique ne manque pas.

[Français]

+-

    M. Mario Laframboise: Face aux comparaisons avec les États-Unis, on nous dit que, compte tenu de la superficie du territoire du Canada, une comparaison avec l'Australie serait peut-être meilleure. Est-ce que vous avez pu analyser la réglementation en Australie, monsieur Evans, et vérifier si c'est plus applicable?

+-

    M. Bob Evans: Oui. J'ai étudié la question de l'Australie, qui est assez intéressante. C'est comme si on avait cherché un pays quelque part dans le monde où il y avait des heures de travail par jour, par semaine, semblables à ce que nous avons au Canada. On ne l'a pas trouvé en Europe, on ne l'a pas trouvé aux États-Unis. Voilà, on l'a trouvé en Australie.

    Mais il y a une couple d'observations sur cela. Premièrement, les Austaliens ont des hivers difficiles, beaucoup de glace, beaucoup de neige, beaucoup de problèmes reliés au climat froid, n'est-ce pas? Je ne le pense pas.

    Mais il y a plus important que cela. Il y a une étude très, très récente: Report of Inquiry into Safety in the Long Haul Trucking Industry, faite par le professeur Michael Quinlan, University of New South Wales. C'était une étude pour l'État de New South Wales, qui avait des inquiétudes concernant la sécurité dans le camionnage. J'aimerais lire quelque chose qu'il avait à dire. Veuillez m'excuser, mais pour ne pas me tromper, je vais le lire en anglais.

    Un des pays, c'est les États-Unis, et les statistiques par habitant aux États-Unis sont à peu près les mêmes qu'ici.

[Traduction]

+-

     M. Bob Evans: Si on fait la comparaison avec les États-Unis, le Royaume-Uni et la Finlande, les données disponibles montrent que les Australiens ont pratiquement deux fois plus de chances de mourir sur la route dans un accident avec un poids lourd.

[Français]

    Si on veut augmenter le nombre de décès et les accidents impliquant de gros camions, le message est qu'il faut faire comme ils font en Australie.

    Merci.

[Traduction]

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Bev Desjarlais.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Madame Smiley, j'ai en main Options for changes to hours-of-service for commercial drivers rédigée en septembre 1998 par Vespa, Rhodes, Heslegrave, Smiley et Baranski. C'est une étude à laquelle vous avez participé. Elle avait été réalisée pour le Groupe des programmes de sécurité routière du Centre de développement des transports, de sûreté et de sécurité de Transports Canada. Les recommandations contenues dans ce rapport à l'intention de Transports Canada étaient unanimes?

+-

    Mme Alison M. Smiley: Oui, pas de recommandation minoritaire.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Pour l'essentiel, les recommandations que vous faites aujourd'hui découlent...

+-

    Mme Alison Smiley: Oui, elles en découlent directement.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Je suppose que les personnes ayant participé à ce rapport représentaient des groupes différents qui étaient partie prenante...

  +-(1255)  

+-

    Mme Alison Smiley: Non, c'était tous des scientifiques.

+-

    Mme Bev Desjarlais: C'était tous des scientifiques, très bien.

    Sur ce sujet, malgré tout le respect dû au commentaire de M. Pankiw sur les rapports, les revues scientifiques, les articles et les examens critiques, son collègue critique au comité de l'industrie serait extrêmement déçu d'entendre son manque d'estime pour ces scientifiques et ces chercheurs qui participent à la rédaction de ces documents pour l'industrie.

    Nous avons fait une étude approfondie sur l'examen critique par les pairs et sur le respect pour les scientifiques et les participants à ces études, et je tiens donc à vous remercier pour tous les rapports que vous avez rédigés dans le passé pour le ministère des Transports. Il est à espérer que nous prêterons une certaine attention aux recommandations faites par tous les scientifiques. Merci.

    Mme Alison M. Smiley: Merci.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Harvey.

+-

    M. André Harvey (Chicoutimi--Le Fjord, Lib.): Monsieur le président, vous savez que je me méfie toujours un peu des déclarations de mes amis bloquistes, n'est-ce pas? Ils ont tendance à déformer la réalité. Les exemples pleuvent tous les jours.

    M. Laframboise a déclaré que le ministère des Transports avait affirmé qu'il y avait un manque d'études scientifiques, etc. J'aimerais que le comité puisse vérifier si effectivement le ministère a déclaré cela. Intuitivement, je ne suis pas ici depuis une éternité, mais je ne me souviens pas que le ministère ait déclaré qu'il y avait une grosse carence sur le plan des études. C'est mon point de vue. J'aimerais qu'on puisse vérifier cela, ne serait-ce que pour que le comité puisse avoir une information objective.

    Je me méfie naturellement et tout le temps des déclarations des bloquistes, monsieur le président. C'est un instinct assez naturel chez moi. J'aimerais, toutefois, qu'on fasse ressortir le caractère objectif de l'affirmation de mon collègue M. Laframboise pour qui, d'ailleurs, j'ai beaucoup de respect, malgré tout.

[Traduction]

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Monsieur Harvey, si je peux me permettre, d'après ce que j'ai pu comprendre le ministère a parlé d'absence de nouvelles études et non pas d'absence d'études tout court.

    Y a-t-il d'autres questions? Aimeriez-vous ajouter le mot de la fin, monsieur Evans, madame Smiley?

+-

    M. Jim Pankiw: Monsieur le président, j'aimerais ajouter un commentaire. Si certains pensent que toutes ces études sont impartiales et imperméables à tout motif personnel ou intérêt bien pensé des chercheurs, ils font preuve de beaucoup de naïveté. Je tenais à le signaler.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Les études sont faites pour être étudiées. Il est évident qu'elles adoptent des angles d'approche différents. Elles peuvent être interprétées de toutes sortes de manières. J'estime personnellement qu'une étude a pour but de fournir des informations qui doivent être évaluées et appréciées dans la plus grande transparence possible.

    Vous pouvez résumer votre pensée, si vous voulez, monsieur Evans.

+-

    M. Bob Evans: J'aimerais revenir sur un de mes propos de tout à l'heure.

    au sujet de la période de repos de 36 heures et de la suggestion d'un passage à 48 heures, je me souviens maintenant que les Américains proposent une période de repos de 48 heures—en fait, ils proposent plus, ils proposent en réalité 58 heures. Selon eux, une période de repos comportant deux nuits de sommeil est un strict minimum.

    Et ce, chaque semaine. Donc même si le camionneur ne travaille que six heures par jour cinq jours de suite il faut qu'il ait quand même un week-end de repos. Bien entendu, c'est un week-end qui n'est qu'une fraction du genre de week-end dont nous jouissons pratiquement tous.

    La seule autre chose que j'aimerais répéter est que notre association, CRASH, est favorable à une harmonisation de nos règles avec les règles des Américains plus axées sur la sécurité . Si ce n'est pas possible, nous vous prions au minimum d'envisager très sérieusement trois recommandations: que les camionneurs dorment au moins deux nuits par semaine, que les tricheurs soient punis et que les moyens modernes de la technologie soient utilisés pour les détecter.

    Nous n'en avons pas discuté, mais je crois que cet article 12 demeure très important. Il faut absolument faire en sorte qu'aucune compagnie de camionnage et qu'aucun camionneur ne puissent contourner impunément la réglementation.

    Merci.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Madame Smiley, vous pouvez dire un dernier petit mot si vous voulez.

+-

    Mme Alison Smiley: Oui, j'aimerais encourager votre comité à profiter de ce changement de la réglementation des heures de service pour prendre en compte les recherches poussées qui démontrent que la conduite de nuit est différente de la conduite de jour. Cette conduite est plus fatigante et présente de plus grands risques.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Merci.

    Avec votre permission, j'ai le privilège de pouvoir poser au moins une question et il se trouve qu'en réalité j'en ai deux.

    Vous avez parlé d'études faites en Suède, en Israël, en Grande-Bretagne, en Australie et vous avez mentionné un cinquième pays, et des comparaisons qui peuvent être faites. Si on veut faire une comparaison et si on considère la géographie de notre pays par rapport à celle de ces deux autres pays.... Il y en d'autres qui en ont aussi parlé. Je crois que M. Stinson en a aussi parlé tout à l'heure si on veut comparer avec Israël, par exemple, ou avec la Suède, si on tient compte de l'infrastructure des distances, etc., peut-on vraiment comparer le Canada avec Israël ou la Suède? Si vous deviez faire la comparaison avec un environnement parallèle, quel pays recommanderiez-vous?

·  -(1300)  

+-

    Mme Alison Smiley: Je crois que probablement les États-Unis et l'Australie sont les plus comparables, mais une grande partie de la Suède ressemble beaucoup au nord de l'Ontario. Le Canada est très divers également au niveau de son infrastructure routière.

    À mes yeux, la physiologie est la même. Nous avons deux yeux et nous avons tous sommeil le soir. C'est une réalité fondamentale.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Monsieur Evans, qui a commandité l'étude sur les moyens électroniques, les boîtes de contrôle électroniques?

+-

    M. Bob Evans: J'ai cité la proposition américaine. C'est la Federal Motor Carrier Safety Administration des États-Unis.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Vous avez dit qu'il y avait une étude sur les boîtes électroniques en cours.

+-

    M. Bob Evans: Je m'excuse. On me dit que c'est le CCATM qui a commandé une étude sur les boîtes noires. Le Québec participe à cette étude mais elle est dirigée, d'après ce que je crois comprendre, par le CCATM.

+-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Merci beaucoup.

+-

    Mr. Jim Pankiw: Monsieur le président, j'aimerais que mes collègues ne se méprennent pas. Je ne nie ni la validité de certaines études ni l'utilité d'entendre des témoins comme ceux d'aujourd'hui, mais il faut considérer tout cela avec un grain de sel. Un lobbyiste peut faire des études et parvenir à des conclusions très définitives qui en vérité, en toute objectivité, ne sont pas du tout aussi évidentes qu'elles le paraissent.

-

    Le président suppléant (M. John Cannis): Monsieur Pankiw, c'est la raison pour laquelle il est utile à la population qu'il y ait des gens comme vous pour évaluer ces études de manière intelligente, d'un oeil critique pour que tout compte fait nous prenions, c'est à espérer, la bonne décision.

    M. Jim Pankiw: Très bien.

    Le président suppléant (M. John Cannis): Merci.

    La séance est levée.