CIMM Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 10 décembre 2002
¿ | 0905 |
Le président (M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.)) |
Mme Joan Atkinson (sous-ministre adjointe, Développement des politiques et programmes, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration) |
¿ | 0910 |
Mme Rosaline Frith (directrice générale, Intégration, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration) |
Le président |
Mme Rosaline Frith |
Le président |
Mme Rosaline Frith |
Mme Joan Atkinson |
Mme Rosaline Frith |
¿ | 0915 |
¿ | 0920 |
Le président |
Mme Rosaline Frith |
Le président |
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne) |
Mme Rosaline Frith |
Mme Diane Ablonczy |
¿ | 0925 |
Mme Joan Atkinson |
Mme Diane Ablonczy |
Le président |
Mme Diane Ablonczy |
¿ | 0930 |
Le président |
Mme Rosaline Frith |
Mme Patricia Birkett (greffière de la Citoyenneté, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration) |
¿ | 0935 |
Le président |
M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.) |
Mme Joan Atkinson |
¿ | 0940 |
M. Jerry Pickard |
Mme Rosaline Frith |
Le président |
Mme Rosaline Frith |
M. Daniel Poulin (conseiller juridique, Section des crimes de guerre, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration) |
Le président |
M. Daniel Poulin |
Le président |
M. Daniel Poulin |
¿ | 0945 |
Le président |
M. Daniel Poulin |
Le président |
M. Daniel Poulin |
Le président |
M. Daniel Poulin |
Le président |
M. Daniel Poulin |
Le président |
M. Daniel Poulin |
Le président |
Mme Joan Atkinson |
Mme Rosaline Frith |
Le président |
Mme Joan Atkinson |
Le président |
M. Paul Yurack (conseiller juridique, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration) |
Le président |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ) |
¿ | 0950 |
Mme Rosaline Frith |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
Mme Rosaline Frith |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
Mme Joan Atkinson |
¿ | 0955 |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
Mme Joan Atkinson |
À | 1000 |
Le président |
Mme Joan Atkinson |
Le président |
Mme Joan Atkinson |
Le président |
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.) |
Mme Rosaline Frith |
M. Paul Yurack |
M. John Bryden |
Mme Rosaline Frith |
M. Paul Yurack |
M. Daniel Poulin |
M. John Bryden |
M. Daniel Poulin |
À | 1005 |
M. John Bryden |
Mme Rosaline Frith |
M. John Bryden |
Mme Rosaline Frith |
M. John Bryden |
M. Paul Yurack |
M. John Bryden |
M. Paul Yurack |
Le président |
M. John Bryden |
À | 1010 |
Mme Rosaline Frith |
M. John Bryden |
Mme Rosaline Frith |
M. John Bryden |
Le président |
Mr. John Bryden |
Le président |
Mme Diane Ablonczy |
Le président |
Mme Diane Ablonczy |
À | 1015 |
Mme Rosaline Frith |
Mme Diane Ablonczy |
Mme Rosaline Frith |
Mme Patricia Birkett |
À | 1020 |
M. Paul Yurack |
Mme Diane Ablonczy |
Mme Patricia Birkett |
Le président |
Mme Patricia Birkett |
Le président |
Mme Patricia Birkett |
Le président |
Mme Patricia Birkett |
Le président |
Mme Patricia Birkett |
À | 1025 |
Le président |
Mme Rosaline Frith |
Le président |
M. Paul Yurack |
Le président |
M. John Bryden |
À | 1030 |
M. Paul Yurack |
M. John Bryden |
Mme Rosaline Frith |
M. John Bryden |
Le président |
CANADA
Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration |
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l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 10 décembre 2002
[Enregistrement électronique]
¿ (0905)
[Traduction]
Le président (M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.)): Bonjour, chers collègues.
Nous reprenons la séance de présentation du ministère. Je vous rappelle que nous nous étions arrêtés à la révocation de la citoyenneté.
J'aimerais toutefois faire deux ou trois commentaires avant de poursuivre. Je tiens tout d'abord à remercier Joan et Rosaline pour le nouveau tableau qu'elles nous ont présenté au sujet des allégations et des éléments déclencheurs ainsi que des articles pertinents de la loi et de la procédure d'appel. Ben nous a préparé un document sur le paragraphe 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale concernant l'annulation. Je pense que vous en avez reçu une copie. Ben nous a également remis un tableau sur le refus, l'annulation et la révocation de la citoyenneté—une image vaut mille mots. Je ne sais pas si les représentants du ministère en ont pris connaissance, mais si ce n'est pas le cas, nous leur en remettrons un exemplaire.
Aujourd'hui est un jour mémorable car c'est la dernière fois que Joan participe à une séance de notre comité. Je sais que vous partez travailler pour les Affaires indiennes, Joan, mais que vous espérez retourner plus tard au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Je tiens à vous remercier, au nom des membres du présent comité et des comités précédents, pour vos magnifiques réalisations et votre dévouement indéfectible à votre travail et à votre ministère. Il existe quantités d'initiatives examinées par ce comité et réalisées par le gouvernement actuel dans lesquelles vous avez joué un rôle important. Je vous remercie, au nom de chacun de nous, pour le travail admirable que vous avez accompli et aussi pour avoir toujours été disponible, franche, honnête et ouverte avec nous. C'est le type d'échanges fructueux dont nous avons besoin pour faire adopter les meilleures lois possibles pour les Canadiens. Je vous remercie donc encore une fois, au nom de Citoyenneté et Immigration Canada, pour votre excellent travail.
Si vous le voulez bien, nous poursuivrons nos travaux sur la révocation de la citoyenneté. Je vous cède donc la parole, Joan.
Mme Joan Atkinson (sous-ministre adjointe, Développement des politiques et programmes, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Merci beaucoup, monsieur le président, pour toutes ces paroles très élogieuses.
Pour nous replacer dans le contexte, je vous informe que la procédure de révocation appliquée en vertu du projet de loi C-18 comporte trois nouveaux éléments. Tout d'abord, il existe un mécanisme entièrement judiciaire, comme vous le savez, par lequel la Section de première instance de la Cour fédérale détermine si une personne a acquis la citoyenneté au moyen d'une fausse déclaration et émet, le cas échéant, un arrêté de révocation. Le ministre ou la personne intéressée peut interjeter appel auprès de la Cour fédérale puis auprès de la Cour suprême, si celle-ci y consent. Ainsi, la première différence, c'est que le gouverneur en conseil n'intervient plus dans le processus.
Le deuxième élément nouveau vise les personnes accusées de terrorisme, de crimes de guerre ou d'appartenance au crime organisé. Dans ces cas, il ne s'agit pas simplement de se prononcer sur les fausses déclarations, mais de lancer une procédure de renvoi accéléré, comme le prévoit la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. L'arrêté de révocation devient alors un ordre de renvoi.
Le troisième nouvel élément concerne l'utilisation de renseignements protégés, le dépôt d'un certificat. C'est un élément que nous avons emprunté à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés pour les cas où nous aurions affaire à des terroristes, des membres du crime organisé ou des personnes accusées d'autres activités délictueuses, lorsqu'il s'agit de renseignements sensibles et protégés fournis par des tiers et lorsque nous devons protéger ces renseignements pour présenter la preuve au juge de la Cour fédérale qui prendra une décision et tiendra les délibérations.
Voilà donc les trois nouveaux éléments de la procédure de révocation que contient le projet de loi C-18. Je cède maintenant la parole à Ros, qui commentera en détail le nouveau tableau, vous indiquera comment se présentent ces nouveaux éléments et expliquera les différentes procédures à suivre.
¿ (0910)
Mme Rosaline Frith (directrice générale, Intégration, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Bonjour à tous.
Dans le premier cas de figure, il s'agit essentiellement d'un cas simple pour lequel nous ne croyons pas que l'intéressé est interdit de territoire pour crimes de guerre, terrorisme ou appartenance au crime organisé. Dans un cas simple, la personne a acquis la citoyenneté canadienne par fraude, au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels. On obtient des renseignements indiquant une possibilité de fraude, renseignements qui sont analysés et confirmés. On signifie alors une déclaration à la personne intéressée, et les règles judiciaires habituelles en matière d'observations s'appliquent.
Le ministre intente des poursuites civiles devant la Cour fédérale. La Cour conclut qu'il y a eu ou non fausse déclaration. Dans l'affirmative, on prend des mesures de révocation de la citoyenneté. En pareil cas, l'une ou l'autre des parties peut interjeter appel de la décision auprès de la Cour d'appel fédérale puis s'adresser à la Cour suprême du Canada, si celle-ci consent à entendre la cause. Si le juge conclut que l'intéressé n'a pas acquis la citoyenneté par la fraude, ce dernier demeure citoyen canadien. Si une personne a fait une fausse déclaration dans sa demande de résidence permanente, elle perd son statut de résident permanent ainsi que sa citoyenneté. La procédure de révocation actuelle fonctionne de la même façon. Si la fausse déclaration n'a été faite qu' au cours du processus d'acquisition de la citoyenneté, la personne redevient résidente permanente.
Le président: La distinction entre révocation et annulation tient-elle au délai de cinq années? L'annulation de la citoyenneté découlant de fausses déclarations doit se faire dans un délai de cinq années. Est-ce à dire que si, pour quelque raison que ce soit, la limite de cinq ans est dépassée, vous invoquez la révocation?
Mme Rosaline Frith: Oui, exactement. On invoquerait également la révocation si le cas était un peu plus compliqué que prévu ou différent du petit nombre de cas visés par l'annulation. L'annulation ne s'applique qu'aux gens ayant obtenu leur citoyenneté sous le couvert d'une fausse identité ou ayant été frappés d'un ordre d'interdiction. Elle ne s'applique pas aux résidents permanents ayant fait de fausses déclarations sur le temps passé au Canada, par exemple. Dans ce cas, nous invoquerions la révocation, pas l'annulation, et la personne intéressée pourrait exposer sa version des faits devant les tribunaux. Ainsi, l'annulation se limite strictement aux cas où les preuves documentaires présentées sont fausses, et elle ne vise pas les cas exigeant une instruction approfondie et une évaluation des éléments de preuve. Il s'agit de cas simples présentés devant la Cour fédérale.
Le président: Ainsi, dans les cas simples de fausses déclarations, les personnes perdent leur citoyenneté, mais par leur résidence permanente, contrairement aux personnes ayant donné une fausse identité, qui voient leur citoyenneté annulée.
Mme Rosaline Frith: C'est exact.
Mme Joan Atkinson: À condition que cette fausse déclaration ait été faite au cours du processus d'acquisition de la citoyenneté. Mais s'il existe des preuves que les intéressés ont fourni de fausses déclarations pour obtenir le statut de résident permanent, il y aurait à la fois révocation du statut de résident permanent et de citoyen.
Mme Rosaline Frith: Il s'agirait d'un simple cas de révocation de la citoyenneté. Toutefois, s'il convenait d'intenter d'autres poursuites en vertu de la Loi sur l'immigration, c'est le ministère de l'Immigration qui s'en chargerait.
Le deuxième niveau de complexité serait un cas de révocation combiné à une procédure de renvoi. Là encore, la personne aurait acquis la citoyenneté par fraude, au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimilation intentionnelle de faits essentiels. Cette personne serait aussi interdite de territoire au Canada en raison de sa participation à des crimes de guerre, de son appartenance au crime organisé ou de ses liens avec le terrorisme. Des renseignements sur la possibilité de fraude seraient analysés et confirmés. Il en serait de même pour les renseignements sur les activités potentielles liées aux crimes de guerre, au crime organisé ou au terrorisme. C'est sur la base de ces informations que le ministre déciderait d'aller de l'avant. On signifierait une déclaration à la personne intéressée et, dans le cas des procédures de révocation, ce seraient les règles habituelles en matière d'observations qui s'appliqueraient.
Pour ce qui est des procédures relatives à l'interdiction de territoire, on applique les mêmes règles de présentation de la preuve qui celles utilisées par le tribunal quasi judiciaire en vertu de la législation sur l'immigration. Les procédures en révocation de la citoyenneté se déroulent comme dans un cas simple: Le ministre lance la procédure et la Cour émet un jugement. Au cours de la deuxième partie du procès, le juge détermine si la personne est interdite de territoire en raison de crimes de guerre, pour ses liens avec le crime organisé ou pour terrorisme. Le juge qui a instruit le procès sur les fausses déclarations pourrait utiliser les éléments de la preuve déjà établis s'ils sont pertinents, ce qui lui éviterait une deuxième présentation des éléments de la preuve. Un jugement rendu selon lequel cette deuxième allégation est bien fondée servirait également de mesure de renvoi. À ce stade-ci, l'une ou l'autre des parties pourrait interjeter appel de la décision à la Cour d'appel fédérale puis à la Cour suprême du Canada, si celle-ci y consentait.
Quiconque est reconnu par un arbitre comme étant interdit de territoire pour crimes de guerre, terrorisme ou appartenance au crime organisé n'a pas le droit de faire entendre sa demande d'asile par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Toutefois, l'intéressé pourrait soumettre une demande d'asile au ministre ou demander un examen des considérations humanitaires ou des risques avant renvoi en vertu de la LIPR.
Si le juge décide que l'intéressé n'a pas acquis la citoyenneté par la fraude, celui-ci demeure citoyen canadien. L'affaire est close. Si le juge décide que l'intéressé a effectivement acquis la citoyenneté par la fraude, la citoyenneté est alors révoquée. Si l'intéressé est lié à des crimes de guerre, au terrorisme ou au crime organisé, la Cour le déclare interdit de territoire. Cette décision est réputée être une mesure de renvoi et le gouvernement procédera au renvoi de l'intéressé.
La troisième approche utilisée s'appliquerait aux différents cas de figure indiqués précédemment, mais pour lesquels nous savons que la divulgation de certains renseignements porterait atteinte à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui. Ceci ne vise que les crimes de guerre, le crime organisé ou le terrorisme. Dans ces cas, le juge fournirait à la personne intéressée un résumé du cas pour qu'elle soit suffisamment informée des circonstances ayant donné lieu au certificat, mais ce résumé ne comporterait aucun renseignement devant être protégé selon le juge. La personne nommée au certificat aurait la possibilité de se faire entendre sur toute question importante pour la prise de décision.
¿ (0915)
Un certificat est déposé quand on croit que, en raison de la nature des éléments de la preuve, les allégations ne peuvent être prouvées sans l'utilisation de renseignements protégés. Le certificat est déposé par le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration du Canada et par le Solliciteur général du Canada, pourvu que les deux ministres soient d'avis qu'une personne a acquis la citoyenneté au moyen de fausses déclarations. De plus, si cette personne n'était pas citoyenne, elle serait interdite de territoire en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés pour des motifs de sécurité ou de violation des droits de la personne, des droits internationaux ou encore pour ses liens avec le crime organisé. Dans ce cas, le certificat émis est présenté à un juge de la Cour fédérale.
Le juge de la Cour fédérale examine tous les éléments de la preuve et détermine si les renseignements visés par le certificat devraient être protégés. Le juge décide si la personne a fait de fausses déclarations et, le cas échéant, du caractère raisonnable du certificat en ce qui a trait aux autres allégations. Tout comme le prévoient d'autres lois relatives aux éléments de preuve protégés, la conclusion en cette matière est finale et ne peut faire l'objet d'un appel ou d'un contrôle judiciaire. Toute mesure de renvoi entrerait immédiatement en vigueur. Toutefois, l'intéressé pourrait demander un examen des considérations humanitaires ou un examen des risques avant renvoi en vertu de la LIPR. Si le juge décide que l'intéressé n'a pas acquis la citoyenneté par la fraude, le certificat est annulé et l'intéressé demeure citoyen canadien. Si le juge décide que l'intéressé a effectivement acquis la citoyenneté par la fraude, la citoyenneté est alors révoquée. Et si le juge détermine que l'intéressé est interdit de territoire, le certificat est réputé être une mesure de renvoi.
¿ (0920)
Le président: Très bien, nous en avons terminé. Je suis sûr que nous aurons quelques questions à vous poser.
Tout comme vous nous l'avez indiqué pour le refus et l'annulation, pourriez-vous nous dire combien de cas de révocation nous avons examiné ou nous sommes en train d'étudier, même en vertu de la loi actuelle?
Mme Rosaline Frith: Au cours des 25 dernières années, nous avons étudié 50 cas de révocation au total. De ce nombre, six concernaient des criminels de la Deuxième Guerre mondiale, 21 de fausses déclarations au sujet de la résidence, du temps passé au Canada, et 11 de fausses déclarations aux services d'immigration pour obtenir le statut de résident. En plus des fausses déclarations liées à des crimes et à l'identité, et il y a eu environ 12 cas ayant sans doute donné lieu à une procédure d'annulation.
Le président: Cela nous donne une bonne idée de la situation et je suis sûr que nous aurons d'autres questions à ce sujet.
Diane.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): J'aimerais en revenir aux craintes exprimées un peu plus tôt quant au fait que l'annulation ou le refus pourrait reposer davantage sur des croyances que sur la conduite réelle des individus mis en cause. Ce que l'on voudrait éviter, bien sûr, c'est que le type de sanctions ou de renvois que déclencherait ce projet de loi repose sur l'intime conviction de certaines personnes, particulièrement s'il n'y a pas de processus judiciaire. L'article 18 traite-t-il également de la révocation ou simplement de l'annulation?
Mme Rosaline Frith: Simplement de l'annulation. L'annulation se fonde sur des preuves documentaires et pas seulement sur les convictions d'une personne. L'annulation ne s'applique qu'aux individus ayant déclaré une fausse identité ou étant sous le coup d'une interdiction. Si une personne était frappée d'interdiction, nous aurions des preuves documentaires démontrant qu'elle était effectivement sur le coup d'une interdiction au moment où elle a demandé la citoyenneté canadienne.
Mme Diane Ablonczy: Le problème c'est que si nous disons qu'on peut refuser ou annuler la citoyenneté sur la base d'intimes convictions et non sur des faits observés de manière objective, en examinant les articles concernant le renvoi, l'annulation ou la révocation, même si ce n'est pas dit en ces termes, on voit qu'il y a certainement ce que nous pourrions appeler une importation logique du libellé et du texte de l'article 21 dans la procédure de révocation. Si c'était le cas, je pense que cela préoccuperait grandement les membres du comité. Si vous pouvez refuser ou annuler la citoyenneté en ne vous fondant que sur des croyances honnêtes, on peut se demander, en lisant tous ces articles, qu'est-ce qui empêcherait que la procédure ne soit pas la même que la procédure de révocation?
¿ (0925)
Mme Joan Atkinson: Je pense qu'il y a trois articles très distincts dans la loi. Il y a l'article 16 sur la révocation qui, comme vous l'a décrit Rosaline, concerne les cas de fraudes et de fausses déclarations. S'il y a des zones grises, ce sera au juge de la Cour fédérale de les élucider et de déterminer si la personne mise en cause peut être entendue et présenter sa preuve.
Dans le cas d'une annulation, comme l'a dit Rosaline, c'est l'article 18 qui s'applique. On peut avoir la preuve factuelle que l'intéressé a présenté de faux documents et, par conséquent, qu'il a déclaré une fausse identité, ou disposer de preuves concrètes qu'il était sous le coup d'une interdiction et qu'il n'aurait pas dû obtenir la citoyenneté. Tout ceci se fonde sur des faits et sur des preuves tangibles.
Enfin, il y a l'article 21, qui ne se fonde pas simplement sur l'intime conviction des personnes, mais selon lequel on sait que l'intéressé a fait preuve d'un grave mépris à l'égard de nos principes et le ministre est convaincu qu'il existe des motifs raisonnables de le croire. Tout ceci doit se fonder sur des preuves factuelles. Il ne s'agit pas de savoir ce que l'on croit—les gens peuvent croire toutes sortes de choses—, mais quelles mesures prendre en pareilles circonstances. L'article 21 fait référence à des cas pour lesquels il existe des motifs raisonnables de croire qu'une personne a fait preuve d'un grave mépris à l'égard des principes et des valeurs sur lesquels se fonde une société libre et démocratique, et les croyances n'ont rien à voir là-dedans.
Mme Diane Ablonczy: Malgré ce que vous dites, je maintiens que l'article 18 ne renferme aucun des mots rassurants que vous prononcez devant ce comité. Il ne parle pas de preuves tangibles ni de documents; tout ce qu'il dit, c'est que le ministre doit être convaincu. On ne dit pas pour quels motifs le ministre doit être convaincu ni quelles preuves doivent être présentées; il n'y a rien de tout cela. Non seulement le ministre doit être satisfait, mais en plus la personne intéressée ne peut faire aucune observation, sauf par écrit, et la décision du ministre n'est sujette à aucun processus judiciaire.
Le président: Je sais que nous avons abordé ce problème la semaine dernière, mais j'aimerais vraiment que nous nous en tenions à la question de la révocation. Il est normal d'établir une comparaison entre annulation et révocation, et je partage quelques-unes de vos interrogations à ce sujet. Je sais que vous essayez de comparer annulation et révocation, mais je voudrais que nous nous limitions strictement à la question de la révocation.
Mme Diane Ablonczy: Dans ce cas, permettez-moi de dire ceci, monsieur le président. Je pense qu'il est important d'insister sur ce point. L'alinéa 28I) de la loi est intégré à l'article 18 et concerne les personnes ayant fait l'objet du décret prévu à l'article 22. Si vous examinez l'article 22, il dit que le décret du ministre, en vertu de l'article 18, fait foi de son contenu. Il me semble donc que nous incorporons des éléments de cette phrase sur la violation dans d'autres articles, si vous les lisez tous ensemble. Ce qui me dérange et qui en inquiète certainement d'autres, c'est que la formulation du projet de loi soit si imprécise quant aux motifs de révocation de la citoyenneté. Certains d'entre nous sont avocats, mais nous n'avons pas l'expérience en rédaction de lois qu'ont nos témoins. Quelle assurance pouvez-vous nous donner que la révocation ne se fondera pas sur d'intimes convictions?
¿ (0930)
Le président: Peut-être pourriez-vous nous aider, Joan, à répondre à la question très pertinente que vient de poser Diane. La révocation fait au moins partie du système judiciaire; il faut donc apporter certaines preuves et il existe une procédure permettant de la contester, le cas échéant. Les articles 16 et 17 traitent de la révocation, mais ils conduisent vers d'autres articles, comme les articles 22, 28 ou 23. Le tableau est beaucoup plus explicite. Pourriez-vous nous dire, en vous aidant des articles pertinents, comment il se fait que les articles 16 et 17 se rapportent aux autres articles cités par Diane. Je crois que cela nous aiderait à y voir plus clair.
Mme Rosaline Frith: Je vais demander à Patricia de vous expliquer plus particulièrement comment s'imbriquent ces différents articles car, à dire vrai, lorsque nous avons abordé la question avec nos rédacteurs, il n'y avait aucun lien entre l'article 21, qui traite du refus de la citoyenneté, et les autres articles, qui sont d'autres parties des interdictions applicables dans les cas d'annulation ou de révocation. Je vous laisse le soin de répondre à cette question, Patricia.
Mme Patricia Birkett (greffière de la Citoyenneté, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): D'accord.
Je comprends la question que vous posez et je pourquoi les gens font ce lien. Le refus dont traite l'article 21 est l'aboutissement d'un acte de procédure. Le ministre doit d'abord le recommander, puis c'est le gouverneur en conseil qui prend la décision. On ne peut refuser ou interdire d'attribuer la citoyenneté à une personne tant que le gouverneur en conseil n'en a pas décidé ainsi. De fait, il sera impossible de dire ultérieurement à la personne qu'elle était sous le coup d'une interdiction au moment où on lui a attribué la citoyenneté, parce que le gouverneur en conseil a pris décret. Je suppose qu'il reste une petite possibilité que la personne qui a attribué la citoyenneté ne sache pas que le gouverneur en conseil a pris un décret, mais cela me semble difficile à imaginer, ce serait un cas exceptionnel. Lorsqu'on envisage de refuser la citoyenneté en vertu de l'article 21, l'information est centralisée. Ce sont des pouvoirs très importants, qui sont limités au ministre, qui doit lui-même s'adresser au gouverneur en conseil. Ce n'est pas un cas d'accident. C'est un cas de longue enquête, dans lequel le ministre doit être convaincu qu'il y a lieu de s'adresser au gouverneur en conseil. La personne n'est seulement frappée d'interdiction et refusée après que le gouverneur en conseil en a pris décret.
Pour ce qui est de l'annulation prévue à l'article 18, il porte sur des cas ne nécessitant pas un décideur indépendant, comme un tribunal, pour soupeser des preuves contradictoires et prendre une décision à savoir s'il y a ouï-dire ou preuve de source contestable ou crédible. Les tribunaux s'occupent de la révocation. L'annulation, qui est un pouvoir conféré au ministre, signifie toujours que le ministre doit être convaincu, ce qui a une signification juridique. Le ministre ne peut simplement avoir des doutes, il doit être convaincu par des motifs raisonnables. S'il est convaincu, sa position se fonde sur des preuves documentaires, parce que les interdictions visées à l'article 28 sont factuelles. L'interdiction de l'article 28 qui porte sur une personne dont la situation est décrite à l'article 21 ne vaut que lorsque le gouverneur en conseil en a fait la constatation. Il n'existe aucun examen rétrospectif en vertu de l'article 18. Je comprends qu'on puisse le croire en raison du système de numération, mais c'est impossible, parce qu'il faut suivre toute la procédure jusqu'au gouverneur en conseil pour établir qu'une personne a fait preuve d'un grave mépris. Ce n'est qu'alors que la personne est frappée d'interdiction.
L'annulation s'applique à une personne qui s'est faufilée dans le système, parce que le jour précis où on lui a attribué la citoyenneté, on lui a demandé si elle avait eu des problèmes juridiques depuis qu'elle a fait une demande de citoyenneté. Elle a répondu non. On découvre après coup que des accusations ont été portées contre elle, qu'il y a condamnation. C'est là où on pourrait procéder à une annulation, parce qu'un document démontre que la personne était sous le coup d'une interdiction lorsqu'on lui a attribué la citoyenneté. Une personne ne peut être frappée d'interdiction en vertu de l'article 22 par qui que ce soit d'autre que le gouverneur en conseil. J'ai du mal à imaginer qu'on ne le saurait pas.
¿ (0935)
Le président: D'accord, retenez votre idée un instant, Diane, et nous allons revenir à vous.
Jerry.
M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.): Merci, monsieur le président.
J'aimerais d'abord dire combien j'apprécie tout le travail qui a été fait pour expliquer très clairement ces différences.
Ce que j'ai du mal à comprendre, comme la plupart des gens, c'est pourquoi, en général, nous décidons d'établir des règlements spéciaux pour traiter de cas qui ne sont survenus qu'une fois en plusieurs années, que deux fois en plusieurs années, vous avez parlé de 50 cas en 25 ans. Avec les premiers que j'ai mentionnés, on parle de trois ou quatre cas en dix ou douze ans, environ, et tout le monde ici semble préoccupé que vous retiriez ces affaires des mains des tribunaux. Il semble que si le système restait tel quel, vous pourriez toujours parvenir à vos fins devant les tribunaux. De toute façon, vous nous donnez tellement peu d'exemples. Pourquoi faites-vous cela? Pourquoi tenter de retirer une, deux ou trois affaires des mains des tribunaux en dix ans lorsqu'elles sont si claires? Pourquoi compliquer la compréhension de la marche à suivre pour la rendre plus difficile? Encore une fois, des gens devront se spécialiser dans certains domaines pour comprendre ce qui se passe. Il ne s'agit pas de la simple adoption d'un projet de loi. Nous siégeons ici depuis trois ou quatre jours à essayer de comprendre ce qui se passe. Les acteurs du système doivent faire la même chose, et c'est en train de rendre tout le monde complètement fou, à mon avis. Ainsi, je me demande s'il est utile de nous pencher sur ces quelques cas ou si nous sommes en train de créer un système encore plus complexe pour le Canadien moyen.
Mme Joan Atkinson: Comme toujours, nous cherchons l'équilibre entre l'équité et l'efficacité. Nous essayons de faire en sorte que lorsque nous refusons la citoyenneté à quelqu'un ou que nous la lui retirons, nous suivons les mécanismes de vérification appropriés, de sorte que la personne ait droit à des recours justes, mais que le processus reste efficace. C'est l'une des principales raisons pour laquelle nous faisons la distinction dans cette loi entre l'annulation et la révocation.
La révocation, qui est un modèle entièrement judiciaire aux termes de cette loi, est également très onéreuse. Lorsque nous portons quelqu'un devant la Cour fédérale pour lui retirer sa citoyenneté, il nous faut collaborer avec le ministère de la Justice. Nous devons faire beaucoup de recherches avec le ministère pour rassembler toutes les preuves et monter un dossier. C'est un processus coûteux. Ce doit l'être, parce que nous retirons sa citoyenneté à quelqu'un. Dans certains cas, les preuves sont très claires. Une personne était interdite de territoire au moment où elle est devenue citoyenne, elle n'aurait donc pas dû le devenir, mais c'est ce qui est arrivé. Nous disposons de documents clairs, la personne a présenté de faux documents, il n'y a aucune zone grise, tout est écrit noir sur blanc. Nous avons pris cette décision pour pouvoir annuler plus efficacement la citoyenneté d'une personne. Ce mécanisme diffère de la révocation, parce que lorsqu'on annule la citoyenneté de quelqu'un, on le place dans une certaine situation pour cinq ans, on lui dit qu'il n'aurait pas dû devenir citoyen au départ, qu'on va lui redonner son statut de résident permanent pour cinq ans, puis qu'il pourra présenter une nouvelle demande dans cinq ans. La personne peut toujours s'adresser à la Cour fédérale, mais lorsque la décision n'est pas contestée, l'annulation est une voie plus efficace qui demeure équitable.
Le refus de la citoyenneté dont il est question à l'article 21 ne s'applique que rarement, c'est vrai, mais nous croyons fermement que la citoyenneté est un privilège, et l'un de nos objectifs dans ce projet de loi, c'est d'accroître la valeur de la citoyenneté canadienne, de souligner l'importance de la citoyenneté canadienne et ce qu'elle signifie, non seulement pour les nouveaux arrivants au pays, mais pour tous les Canadiens. Nous avions l'impression qu'il nous manquait un outil très important pour pouvoir dire, en de rares occasions, à une personne qui répond à tous les autres critères qu'elle mène des activités qui minent la valeur de la citoyenneté canadienne. Nous n'avons aucune façon de refuser la citoyenneté à cette personne, mais elle fait preuve d'un tel grave mépris à l'égard des valeurs qui sont chères aux Canadiens. Nous voulions cet outil pour pouvoir dire, non, nous n'allons pas attribuer la citoyenneté à cette personne.
¿ (0940)
M. Jerry Pickard: Je comprends très bien votre objectif, et il me semble tout à fait admirable. Ce sont les démarches nécessaires qui me posent problème, pas l'intention. Les démarches que vous proposez pour éliminer deux ou trois cas du système judiciaire me semblent faire tiquer la plupart des personnes assises autour de cette table. C'est peut-être bon, peut-être pas. Je crois que nous sommes tous d'accord avec votre objectif, mais la démarche elle-même pose problème, puisqu'elle ne permet de retirer que quelques cas du système judiciaire. Je crois que les gens devraient toujours pouvoir s'adresser aux tribunaux de toute façon dans un système équilibré. Si c'était le cas, je crois que cela répondrait à bon nombre des questions que nous nous posons autour de cette table.
Mme Rosaline Frith: En fait, ces cas d'annulation pourraient être soumis aux tribunaux. L'idée que vous exposez me semble très intéressante, parce que nous sommes arrivés à cette position à force de travailler à ces dossiers, bien qu'ils soient très peu nombreux. Nous nous sommes demandé quel était le moyen le plus efficace de traiter ces cas tout en demeurant complètement équitables pour la personne. C'est pourquoi, lorsque nous avons conçu cette mesure, nous en avons exclu les cas de résidence, parce qu'il y a un juste équilibre, quelqu'un porte un jugement, tout n'est pas noir et blanc, la question doit faire l'objet d'une démarche entièrement judiciaire. Nous avons pris cette décision en toute conscience. Nous croyions opter pour une grande simplicité en prescrivant un mécanisme d'annulation simple que nous ne pourrions utiliser que lorsque nous disposons de preuves documentaires, et l'annulation se limiterait à cinq ans. Cela pourrait être fait autrement. Nous cherchions le moyen le plus efficace et le plus économique possible de le faire dans le respect des droits de la personne.
Le président: Si je peux me permettre d'ajouter quelque chose, je crois que vous avez indiqué qu'il y a eu 50 cas de révocation. Pouvez-vous nous dire combien ont été menés à bien? De plus, maintenant que la vérificatrice générale s'attend à ce que nous posions les grandes questions, Joan a mentionné que c'était un processus très onéreux, pouvez-vous nous dire combien nous avons dépensé pour suivre le processus de révocation? Peut-être Daniel le sait-il. J'ai entendu parler de 100 millions de dollars.
Mme Rosaline Frith: Daniel peut nous parler des cas de crimes de guerre, qui sont les plus onéreux. Je crains de ne pas avoir de chiffres pour tous les autres cas.
M. Daniel Poulin (conseiller juridique, Section des crimes de guerre, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Je ne peux m'exprimer que sur ce qu'on appelle les cas de crimes de guerre, les quelques-uns dont nos tribunaux ont été saisis.
Le président: Il y en a six?
M. Daniel Poulin: Oui, trois jugements ont été prononcés en faveur du ministre et trois en sa défaveur.
Le président: C'est donc 50/50.
M. Daniel Poulin: En fait, il y a d'autres cas. Certains ont été contestés et d'autres ont pris une autre direction.
Votre question porte sur les coûts. Ceux-ci sont multiples. Il y a les coûts engagés avant le procès, le coût des enquêtes, le coût d'envoi de personnel en Europe de l'Est, par exemple, pour examiner des archives, ceux de l'analyse des preuves documentaires, ceux engagés pour rencontrer des témoins. Les sommes d'argent dépensées peuvent varier. Il peut y avoir trois ou quatre voyages dans chaque cas, et chacun coûte entre 10 000 et 20 000 $.
¿ (0945)
Le président: Je ne vais pas vous demander le montant des indemnités journalières et tout le reste. Au total, de quelle somme s'agirait-il?
M. Daniel Poulin: Au total, de 3 à 4 millions de dollars.
Le président: Par affaire?
M. Daniel Poulin: Non, pas par affaire.
Le président: Au total?
M. Daniel Poulin: Oui.
Le président: D'accord. C'est ce que nous avons dépensé jusqu'à maintenant pour étudier les cas des crimes de guerre?
M. Daniel Poulin: C'est ce qui a été dépensé pour les affaires portées devant la Cour fédérale, les six cas de révocation.
Le président: D'accord.
M. Daniel Poulin: Si vous voulez, je peux expliquer certains de ces coûts.
Le président: Peut-être. En fait, vous pourriez nous fournir l'information. Cela dépend si nous voulons un système rapide ou un système pouvant devenir très onéreux, cela pourrait aider beaucoup le comité.
Mme Joan Atkinson: Nous avons aussi d'autres statistiques, monsieur le président, qui pourraient vous intéresser.
Mme Rosaline Frith: Je n'aime pas prétendre que quelque chose va arriver avant le temps, mais nous estimons le nombre de cas de révocation actuellement à l'étude qui pourraient plutôt faire l'objet d'une annulation à 30 p. 100. Ils sont tous très clairs. Nous disposons de preuves documentaires. Nous pourrions simplement procéder à une annulation, ce qui fait que nous n'aurions pas à enclencher toute la procédure judiciaire. Je pense à environ 45 cas sur 151. Ce sont des procès à venir. C'est ça à quoi nous avons pensé en favorisant un processus d'annulation séparé.
Le président: Cela nous aide à comprendre la position de Jerry, je crois.
Joan, avez-vous quelque chose à dire?
Mme Joan Atkinson: Paul, voulez-vous ajouter quelque chose?
Le président: D'accord, Paul.
M. Paul Yurack (conseiller juridique, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Il semble y avoir quelque peu de confusion, que je pourrais éclairer. L'article 21 ne s'applique qu'aux résidents permanents, il ne s'applique donc pas aux citoyens. Les articles 16, 17 et 18 se limitent aux personnes ayant le statut de citoyen au Canada.
Monsieur Pickard, vous avez donné une raison importante pour laquelle nous opterions pour l'annulation, et j'aimerais ajouter deux choses. C'est une condition préalable à l'attribution de la citoyenneté, donc si le fonctionnaire responsable avait eu l'information, le demandeur n'aurait jamais obtenu la citoyenneté au départ. C'est une décision plutôt simple à prendre, il y aurait donc lieu de simplifier nos méthodes. Encore une fois, nous cherchons à réaliser des économies judiciaires et à éviter de devoir intenter des poursuites devant les tribunaux lorsque ce n'est pas nécessaire, nous voulons trouver l'équilibre entre l'équité et les droits de l'État et favoriser l'efficacité.
Le président: Madeleine.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir au tout début du projet de loi, à l'article 3, où on parle un peu des valeurs qui sous-tendent la loi actuelle. Je voudrais qu'on regarde ensemble les dispositions 3d) et 3g). Dans 3d), on dit:
3. La présente loi a pour objet: |
d) de réaffirmer que tous les citoyens jouissent du même statut, sans égard à la façon dont ils sont devenus citoyens; |
Je suis d'accord là-dessus, bien sûr. À la fin, dans 3g), on dit:
3. La présente loi a pour objet: |
g) de promouvoir le respect des principes et des valeurs sur lesquels repose une société libre et démocratique. |
Je suis citoyenne canadienne de naissance. Si j'étais accusée de terrorisme--même avec mon air angélique, je peux être une terroriste--, est-ce qu'on pourrait m'enlever ma citoyenneté? Je ne le pense pas. Si on ne peut pas m'enlever ma citoyenneté et que je suis vraiment une terroriste dangereuse condamnée pour terrorisme, je reste toujours citoyenne canadienne.
Une voix: Oui.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Comment conciliez-vous la disposition 3d), qui dit que tous les citoyens sont égaux, peu importe la façon dont ils sont devenus citoyens, et la disposition 3g), qui parle des valeurs d'une société libre et démocratique? Moi, terroriste née au Québec en 1938, il y a très longtemps, je pourrai aller jusque devant la Cour suprême, alors qu'un autre, qui a demandé la citoyenneté et dont on découvre qu'il est terroriste, n'a pas ce qui fait peut-être la fierté de notre système ici. J'ai un peu de difficulté face à cela. Je veux bien que ça coûte cher, mais avec ce qu'on entend ces temps-ci, pour le respect de la démocratie et de la justice, les quelques millions de dollars ne me donneraient pas de cauchemars. Il y a d'autres choses qui me donnent des cauchemars, mais pas cela.
C'est ma première question. J'en poserai une autre ensuite.
¿ (0950)
Mme Rosaline Frith: Si une personne a choisi de devenir citoyenne canadienne et qu'elle a passé par les étapes du système honnêtement, elle est devenue citoyenne canadienne et elle est l'égale d'une personne qui est née citoyenne canadienne. Elle a les mêmes droits et elle sera traitée de la même façon. Si une citoyenne naturalisée devient terroriste après être devenue citoyenne canadienne, elle sera traitée exactement de la même façon que vous, madame.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: On partagera la cellule.
Mme Rosaline Frith: Exactement. Ça sera fait au Canada en vertu des lois du Canada; il n'y a aucune différence. Dans le cas où une personne a obtenu sa citoyenneté ou sa résidence permanente de façon illégale, frauduleuse, on révoque premièrement sa citoyenneté et on la traite ensuite de la même façon qu'un terroriste qui essaierait d'entrer au Canada. Les mêmes règles s'appliquent, mais la personne n'est plus un citoyen canadien. C'est très important, parce qu'il n'y a aucune différence entre les individus qui sont citoyens canadiens de naissance et ceux qui deviennent des citoyens légitimement.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Je vous comprends bien, mais ça ne veut pas dire que je suis d'accord avec vous.
En ce qui a trait à l'alinéa 17(4)j), j'aimerais que vous me donniez des exemples. On dit que tout le monde est égal, qu'il y a des choses qui sont admissibles en guise de preuve devant la justice et qu'il y en a d'autres qui ne sont pas admissibles. J'imagine qu'avant de révoquer la citoyenneté, on ne devrait admettre que des choses admissibles en justice, mais on a là une disposition qui dit que le juge «peut recevoir et admettre en preuve tout élément qu'il estime utile--même inadmissible en justice--et peut fonder sa décision sur celui-ci.»
J'aimerais avoir des exemples et j'aimerais que vous me justifiiez de façon incontournable l'équilibre qu'il y a entre cette disposition, d'une part, et une société juste, libre, démocratique et l'équité entre les citoyens, d'autre part. J'avoue que ça me perturbe un peu. Heureusement que Noël s'en vient; je vais peut-être pouvoir m'en remettre.
[Traduction]
Mme Joan Atkinson: Peut-être puis-je commencer. On parle ici du dépôt de certificat, au même titre que dans d'autres lois comme la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, au sujet de personnes formellement interdites de territoire dans des situations où bien souvent, les preuves et les renseignements sensibles nous proviennent d'un tiers, des services de renseignements d'un autre pays. Nous devons donc traiter l'information avec une extrême prudence pour protéger la sécurité nationale du Canada.
Je reviens à l'argument de Rosaline. Si une personne s'est livrée à ces activités après être devenue citoyenne, elle sera traitée de la même façon qu'une personne née ici, au Canada. Toutefois, si nous apprenons ultérieurement qu'une personne s'est livrée à certaines activités avant de devenir citoyenne, nous pourrions conclure que nous n'aurions pas dû lui attribuer la citoyenneté au départ, de la même manière que nous chercherions à refuser l'entrée au Canada à un terroriste.
Nous avons besoin de cet outil pour les cas où l'information que nous détenons est tellement sensible que nous devons la protéger avec grande prudence. En même temps, nous devons veiller à ce qu'un tiers parti impartial, soit le juge de la Cour fédérale, étudie les preuves et détermine s'il faut les protéger ou s'il est dangereux pour la sécurité nationale de les diffuser et de les rendre publiques. C'est la façon de procéder dans le contexte de l'immigration, comme je l'ai dit, et dans celui d'autres lois du système judiciaire canadien. Elle suit une structure bien connue, et les juges de la Cour fédérale en ont l'expérience. Certains juges de la Cour fédérale ont déjà examiné ce genre de certificat de sécurité dans d'autres contextes et savent comment soupeser toutes les preuves. C'est un outil nécessaire pour nous permettre de traiter les cas touchant la sécurité nationale.
¿ (0955)
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Mais vous ne m'avez pas donné d'exemples concrets de ce qui est inadmissible en justice et qui serait admissible dans le cas de ce certificat. Il doit bien y avoir des exemples concrets.
[Traduction]
Mme Joan Atkinson: Le meilleur exemple que je puisse vous donner, c'est celui d'une personne qui a participé à des activités terroristes avant son arrivée au Canada ou, peut-être même, pendant qu'elle vivait au Canada à titre de résident permanent, mais avant qu'elle présente une demande de citoyenneté, cette information n'étant pas accessible à ce moment-là. L'information ne devient accessible qu'après le fait. Comment cette information nous parvient-elle? Elle peut nous parvenir de différentes manières. Il peut y avoir des comptes rendus publiés des activités de cette personne au sein d'organismes terroristes. Il peut s'agir d'informations provenant des services de renseignements de notre pays ou d'un autre pays, et que la nature de cette information soit telle que nous jugeons qu'il est nécessaire de la protéger.
Si nous jugeons que l'information doit être protégée—et lorsque je dis «nous», je parle de CIC et de nos partenaires actifs dans les domaines de l'application de la loi ainsi que du renseignement et de la sécurité—, nous la communiquons aux deux ministres responsables, c'est-à-dire le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et le solliciteur général. Nous présentons l'information et les éléments de preuve dont nous disposons à ces deux ministres et recommandons qu'ils délivrent le certificat.
Si une personne venait nous dire qu'elle a de l'information, nous chercherions à obtenir de cette personne une déclaration solennelle, sous serment, de manière à disposer d'une déclaration sous serment que la personne en question a effectivement pris part à de telles activités. Ce ne serait cependant pas les seuls éléments de preuve dont nous tiendrions compte. Si une personne nous arrivait avec ce genre d'information, nous prendrions d'autres mesures d'enquête pour vérifier cette information par d'autres sources.
Une fois toute cette information réunie, nous ferions, en collaboration avec nos partenaires dans le domaine de l'application de la loi, de la sécurité et du renseignement, une évaluation pour déterminer si cette information est suffisante pour refuser la citoyenneté à cette personne pour motif de participation à des actes de terrorisme, de crime de guerre, de crime contre l'humanité ou de crime organisé. Comme je l'ai dit, cette information serait transmise aux deux ministres à qui on demanderait de délivrer un certificat de sécurité. Ensuite, cette même information, accompagnée du certificat de sécurité, serait présentée à un juge de la Cour fédérale pour qu'il détermine si les éléments de preuve que nous avons rassemblés dans le cadre de notre enquête sont raisonnables et si leur protection par le biais de ce processus de certificat de sécurité est justifiée. Si le juge détermine que les éléments de preuve ne sont pas valables ou que, même s'ils le sont, il n'est pas justifié de les protéger ainsi, il retourne cette information aux deux ministres et n'accepte pas le certificat. Les ministres doivent alors décider s'ils poursuivent les procédures de révocation sachant que les éléments de preuve dont ils disposent pour justifier la révocation seront rendus publics et accessibles parce que, de toute évidence, la personne contestera cette information et toute l'histoire deviendra publique.
À (1000)
Le président: Joan, je pense que vous avez indiqué votre intention de quitter à 10 heures, et je sais que Rosaline et les autres seront à notre disposition jusqu'à 10 h 30; je veux respecter votre désir.
Mais avant que vous partiez, comme dernier geste à titre de SMA pour l'immigration ici, je me demande si vous ne pourriez pas informer les gens que vous allez rencontrer un peu plus tard aujourd'hui du fait que le comité aimerait qu'on lui donne de l'information sur les installations de détention proposées. De plus, lorsque nous avons parlé de nos ententes de tiers pays sûrs, nous avions besoin de chiffres à jour sur la détention, ainsi que sur le nombre total de places dans l'ensemble du système pour la détention. Si vous pouviez transmettre cette information à ces gens pour nous, nous vous en serions reconnaissants.
Mme Joan Atkinson: Je serai heureuse de le faire.
Le président: Merci beaucoup.
Mme Joan Atkinson: Je vous laisse entre les mains très compétentes de Rosaline et de l'équipe, monsieur le président.
Le président: John.
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Premièrement, laissez-moi dire que je pense que vous avez parcouru un long chemin depuis le projet de loi antérieur sur la citoyenneté, particulièrement dans le domaine de la révocation et de l'annulation.
Ce qui me préoccupe dans le cas de l'article 17, c'est qu'il n'y a pas de délai concernant la délivrance d'un certificat. Au Canada et dans de nombreux autres pays, les services de renseignement, les services de sécurité, ont le droit, ou le privilège si vous voulez, de garder des secrets indéfiniment. Étant donné qu'il n'y a pas de délai fixé pour le processus de délivrance du certificat, y a-t-il des chances de voir une personne faire face à une révocation pour un crime de guerre commis il y a une cinquantaine d'années et de voir un certificat être délivré à partir de renseignements fournis, disons, par exemple, par l'ex-Union soviétique ou par l'un ou l'autre des autres pays qui pourraient encore considérer ce genre de renseignement comme protégé?
Mme Rosaline Frith: Avant de transmettre la question aux spécialistes, je dirais qu'il est très peu probable que quelque chose qui s'est produit il y a 50 ans constitue encore un danger pour la sécurité nationale ou la sécurité d'autrui.
Paul.
M. Paul Yurack: Je veux me faire l'écho de Rosaline. Dans votre hypothèse, vous parlez d'environ 50 ans. Le type d'information que nous protégeons, c'est de l'information pertinente, à jour, provenant de sources liées à la sécurité, de l'information que ces gens voudront protéger. Il s'agit d'information très récente sur des événements survenant dans le monde, plutôt que d'information de nature plutôt historique, pour laquelle nous aurions normalement recours au système régulier de cours de justice.
M. John Bryden: La Roumanie, où l'animosité dans les services secrets remonte à de nombreuses années, serait un exemple. Je n'irai pas plus loin sur le sujet, mais je veux juste vous prévenir du fait qu'il est très dangereux, à mon avis, d'implanter un processus de délivrance d'un certificat qui ne comporte pas de délai. Je serais beaucoup plus à l'aise s'il y avait un délai, disons 50 ans. Même si je suis d'accord pour dire que les cas risquent d'être très rares, on trouve tellement de ressentiment dans certains pays et les services de sécurité de ces derniers ont une telle main de fer, que la prudence à cet égard est justifiée.
Par ailleurs, pourrais-je obtenir votre opinion sur un autre point? Est-ce que vous considérez que l'homicide extrajudiciaire, sanctionné par un État, serait une violation des droits de la personne? Est-ce qu'un assassinat extrajudiciaire sanctionné par un État serait une violation des droits de la personne, à votre avis?
Mme Rosaline Frith: Je ne peux répondre à votre question dans une perspective juridique.
Paul, pouvez-vous répondre?
M. Paul Yurack: C'est Daniel qui possède l'expertise en ce qui concerne la Loi sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre. Daniel, savez-vous si cela a été défini?
M. Daniel Poulin: Il est difficile de répondre à cette question sans un contexte.
M. John Bryden: Il s'agit de tuer quelqu'un sans lui offrir l'application régulière de la loi.
M. Daniel Poulin: Les questions hypothétiques dans le domaine du droit international relatifs aux droits de la personne sont difficiles à répondre. Ultimement, tout dépend du contexte, mais généralement, les exécutions sommaires sont considérées comme une violation des droits de la personne. Il y a des circonstances dans lesquelles cette notion peut varier de manière assez spectaculaire.
À (1005)
M. John Bryden: Qu'arrive-t-il lorsque l'homicide extrajudiciaire est sanctionné par une société libre et démocratique?
Mme Rosaline Frith: Nous parlons de notre société lorsque nous parlons de société libre et démocratique, par rapport au refus de citoyenneté. Je pense que nous sommes très clairs qu'il s'agit là de nos valeurs comme Canadiens, de ce que nous croyons en tant que Canadiens. Les Canadiens ne croient pas à l'exécution des gens qui ont commis un meurtre. Il y a des choses que nous ne croyons pas. Et j'aurais tendance à ajouter que nous ne devrions pas commenter les croyances d'un autre pays.
M. John Bryden: Alors, j'ai un problème, parce qu'une personne qui tombe sous le coup de l'article 21 vient d'un autre pays. Et ce pays peut être une dictature, comme l'Irak, ou une société libre et démocratique, comme Israël. Ces deux pays ont recours de temps à autre à l'homicide extrajudiciaire. N'est-ce pas une pratique jugée différemment selon la société particulière qui la pratique? En d'autres mots, lorsque vous dites «un grave mépris à l'égard des principes et des valeurs sur lesquels se fonde une société libre et démocratique», je vous ferai remarquer que quelqu'un qui travaille pour les forces militaires israéliennes, qui pourrait se livrer à ce genre d'activité, qui pourrait, en fait, être tenu de le faire par l'État, pourrait dire qu'il agissait au nom d'une société libre et démocratique. Alors, à quoi sert l'article 21 dans sa forme actuelle?
Mme Rosaline Frith: Comme je l'ai dit auparavant, ce serait un jugement porté par des Canadiens. Il s'agirait de la décision de notre gouverneur en conseil de dire si nous estimons ou non qu'une personne a fait preuve d'un grave mépris à l'égard des principes et des valeurs sur lesquels se fonde une société libre et démocratique, les principes étant ceux du Canada. Et je ne crois pas, qu'en ce moment, au Canada, nous croyons dans le meurtre, sous quelque forme que ce soit.
M. John Bryden: Qu'arriverait-il si un futur gouvernement du Canada décidait qu'il s'agissait d'une chose appropriée? Diriez-vous encore qu'il s'agit d'un principe d'une société libre et démocratique, comme on le décrit dans la disposition 3g)? Il ne s'agit pas uniquement de l'article 21.
M. Paul Yurack: Mais je dirais qu'ils n'invoqueraient pas l'article 21, alors c'est une question qui ne se poserait jamais. Si je comprends bien ce que vous dites, c'est que s'ils croient dans cet homicide extrajudiciaire, ils ne l'invoqueront pas contre la personne.
M. John Bryden: C'est absolument exact. Si le gouvernement canadien changeait et décidait de s'engager dans l'homicide extrajudiciaire, cela ne constituerait pas un obstacle à la venue de ces gens au pays.
M. Paul Yurack: Je pense que cela nous ramène au point de vue de M. Pickard, qu'il s'agit d'un pouvoir de discrétion limité. Nous avons prévu un pouvoir discrétionnaire limité en matière de décision que nous avons remis entre les mains du gouverneur en conseil pour qu'il l'exerce de manière judicieuse. C'est pourquoi ce pouvoir n'est pas sujet à un examen par les tribunaux, parce qu'il n'est tout simplement pas approprié de permettre qu'un pouvoir discrétionnaire soit examiné.
Le président: Je pense que le débat porte sur l'idée de savoir si «principes sur lesquels se fonde une société libre et démocratique» est une définition trop étendue ou trop étroite. Je pense que votre point de vue, c'est qu'elle est trop étroite. Beaucoup de gens autour de cette table ont pensé qu'elle était trop étendue et trop vaste. Et John pose une très bonne question. D'après ce que je comprends, une société libre et démocratique au Canada ne croit pas dans le meurtre ou l'exécution commandé par l'État. Je l'espère. Mais je ne sais pas si les gouvernements futurs trouveront cette pratique acceptable et compatible avec les principes d'une société libre et démocratique.
M. John Bryden: Le point que je veux faire valoir, c'est que dans l'article 21, en donnant au ministre un pouvoir discrétionnaire énorme fondé sur son interprétation de ce que doit être une «société libre et démocratique», vous ouvrez complètement la porte aux gouvernements futurs. Nous pourrions avoir un problème dans ce pays. Nous pourrions avoir un gouvernement qui met un terme aux droits de la personne. Si nous décidons d'avoir un article 21, ne serions-nous pas mieux de définir ce qu'on entend par société libre et démocratique? Je vous ferais remarquer qu'il est certainement question de la Charte des droits et libertés.
À (1010)
Mme Rosaline Frith: Je pense que la terminologie que nous avons utilisée a été définie, dans une certaine mesure, par la Cour suprême du Canada. C'est la référence que nous utiliserions en tout temps. Ce n'est pas uniquement le ministre qui déciderait. Le ministre ne ferait que présenter le cas et une décision serait prise par décret du gouverneur en conseil, par de nombreux ministres. Dans les faits, les ministres refléteraient l'opinion du peuple canadien qui les a élus. Alors, ce n'est pas une seule personne qui prend cette décision, c'est le reflet de notre forme de gouvernement.
M. John Bryden: Ne croyez-vous qu'il appartient au Parlement, et non aux cours de justice, de définir la société libre et démocratique? Il est certain que c'est la législation qui détermine ce qu'est une société libre et démocratique, n'est-ce pas? La Charte vient avant la Cour suprême, n'est-ce pas?
Mme Rosaline Frith: Je pense que c'est le Parlement du Canada qui a, avec le temps, défini une société libre et démocratique par l'adoption de notre Charte, par la création de toutes les lois et de tous les systèmes qui sont en place.
M. John Bryden: Par exemple, dans les dispositions 3g) et 21, ne pourrions-nous pas dire «un grave mépris à l'égard des principes qui sous-tendent les droits fondamentaux de la personne». N'est-ce pas ce en quoi nous croyons, que la non-admissibilité d'une personne est fondée sur un non-respect des droits fondamentaux de la personne? Ainsi, si un État étranger a sanctionné un non-respect des droits de la personne dans un cas particulier, nous n'avons plus ce problème. Le Canada a déjà dit au ministre ce qu'il doit prendre en considération: quelqu'un qui a fait preuve d'un grave mépris à l'égard de la primauté du droit. Ce sont des choses que nous pourrions définir dans l'article 21 et je ne comprends pas pourquoi nous ne le faisons pas, parce qu'ils figurent dans la Charte, nous les reconnaissons comme des principes canadiens, nous les reconnaissons au plus profond de notre coeur et nous n'avons pas besoin de la Cour suprême pour nous le dire.
J'estime—et je vais m'arrêter ici, monsieur le président—que de dire simplement «une société libre et démocratique» est une expression passe-partout qui pourra être interprétée par les gouvernements futurs en fonction des pressions du moment. Et nous en trouvons un exemple en ce qui concerne le Québec. S'il arrivait une situation dans laquelle le Québec se séparait et le Canada entrait dans une période très difficile de son histoire, aussi bien les fédéralistes que les souverainistes, ou les séparatistes, voudraient une protection appropriée. C'est-à-dire la définition de nos obligations de soutenir les droits fondamentaux de la personne et la primauté du droit.
Merci, monsieur le président.
Le président: Que d'hypothèses...
Mr. John Bryden: Ce n'est pas une hypothèse, c'est une mesure diablement pratique.
Le président: Étonnant de voir qu'une personne puisse penser à de si nombreuses hypothèses, mais je comprends toutes les questions que vous posez.
Diane.
Mme Diane Ablonczy: Il faut certainement une intelligence supérieure, monsieur le président.
Le président: John est très brillant.
Mme Diane Ablonczy: Nous sommes vraiment très heureux de la présence des témoins ici. Cela me rappelle lorsque j'essayais de faire adopter un énoncé de position ou une position législative par le caucus. Il s'agit d'un processus très semblable où tout le monde pense à toutes les choses qui n'ont pas été faites correctement et est très heureux de le dire.
Mais je demande si vous avez réfléchi au fait que les dispositions dont John parle, et dont j'ai parlé, sont conçues pour faire face à la menace terroriste et pour s'assurer que notre pays ne compte pas de citoyens qui préconisent et appuient le terrorisme. Ne serait-il pas préférable d'utiliser une expression du genre «qui préconisent ouvertement et de manière flagrante le recours au terrorisme et appuient des organismes ou des groupes terroristes», et ajouter ensuite une définition soigneuse de terrorisme, comme on le fait dans le projet de loi C-36, par exemple, de sorte que nous trouvions la précision que certains d'entre nous estiment nécessaire? Nous traitons toujours du problème qui préoccupent le ministère et notre pays dans son ensemble, mais nous n'avons plus ces motifs très étendus, imprécis dans une très large mesure, pour le refus et, peut-être, la révocation.
À (1015)
Mme Rosaline Frith: Le refus d'accorder la citoyenneté n'est pas conçu expressément pour faire face au terrorisme. Nous traitons des gens qui pourraient être des terroristes dans d'autres parties de la loi. Dans le cas des personnes qui font preuve d'un grave mépris à l'égard des principes et des valeurs sur lesquels se fonde une société libre et démocratique, nous recherchons davantage des choses qui ressemblent à de l'incitation à la haine ou certaines autres activités qui ne les empêcheraient aucunement de recevoir la citoyenneté en vertu des autres exigences en matière de citoyenneté. Elles auraient respecté tous les critères pour obtenir la citoyenneté et il n'y aurait aucun empêchement, sur le plan juridique, à ce qu'elles la reçoivent. Mais ces personnes feraient quelque chose que le public canadien et le gouvernement du Canada jugent tellement odieux que nous ne voudrions pas que ces personnes reçoivent la citoyenneté. Et cette mesure est limité dans le temps, parce que ces personnes pourraient changer leur façon d'être. Il se pourrait bien qu'elles ne manifestent plus ce genre de comportement après s'être vu refuser la citoyenneté. Il y a toujours cette possibilité. Et après la période de cinq ans, elles peuvent faire une nouvelle demande de citoyenneté qui sera jugée en fonction des nouvelles circonstances qui prévaudront à ce moment-là.
Mme Diane Ablonczy: Je crois que nous devons être clairs. La population canadienne n'aurait rien à voir avec la décision. Le Cabinet serait le seul concerné et, à en juger par notre expérience, il représente un groupe plutôt fermé. S'il s'agit d'incitation à la haine, disons-le clairement. Le nombre des possibilités est inquiétant. Il ne faudrait pas trop insister sur ce point.
J'aimerais aussi que nous parlions du sous-alinéa 16(6)b)(ii), selon lequel, dans la procédure de révocation, la cour n'est pas liée, à l'égard des éléments de preuve supplémentaires, par les règles juridiques ou techniques de présentation de la preuve. L'article 17 décrit ensuite la procédure. Pouvez-vous nous dire quelles situations on tente d'éviter par ces dispositions, de sorte que nous puissions mieux juger des solutions?
Mme Rosaline Frith: Une fois de plus, la procédure de révocation offrait différentes façons de traiter les cas sans cesse plus complexes. Notamment, lorsque l'article 16 décrit les types d'éléments de preuve, il précise que dans certains cas, il est nécessaire d'utiliser des preuves qui ne sont pas... J'aimerais demander à Patricia de vous donner des explications à ce sujet.
Mme Patricia Birkett: Le sous-alinéa 16(6)b)(i) impose au juge saisi d'une affaire civile de tenir compte de tous les éléments de preuve présentés pendant les deux parties du procès. Ainsi, lorsque le juge doit décider si une personne a fait une fausse déclaration, il pourra prendre en considération tous les éléments de preuve relatifs à l'interdiction de territoire présentés pendant la deuxième partie du procès. Ce n'est qu'une règle très technique.
À (1020)
M. Paul Yurack: Les principes ont une grande importance pour vous, madame Ablonczy, et je crois que c'est une bonne façon de procéder. On cherche ainsi à éviter les dédoublements. S'il n'y avait pas ce mécanisme, il faudrait faire franchir à la personne visée toutes les étapes de la procédure de révocation de la citoyenneté, ensuite la renvoyer à Immigration, où elle serait soumise au même genre de procédure devant la CISR, après quoi elle aurait un droit d'appel. Pour améliorer l'efficacité du système, quand de pareilles allégations sont faites, le juge de la Cour fédérale peut entendre les deux allégations pendant le même procès. Ainsi, il n'y a pas de duplication, et les mêmes ressources ne sont pas utilisées deux fois pour la même affaire.
Mme Diane Ablonczy: Ma question n'était peut être pas claire ou je n'ai peut-être pas bien compris votre réponse. Il me semble plutôt draconien de dire qu'un tribunal n'est pas lié par des règles juridiques ou techniques de présentation de la preuve. L'application régulière de la loi est la raison pour laquelle des affaires sont portées devant les tribunaux. Nous devons avoir des raisons bien précises pour pouvoir éliminer l'application régulière de la loi d'une partie des constatations du tribunal. J'ai besoin de connaître ces raisons.
Mme Patricia Birkett: La deuxième règle de l'article 16 a été établie parce que la seconde partie du procès remplace essentiellement la procédure normale de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada. La règle de preuve prévue au sous-alinéa 16(6)b)(ii) est exactement la même que celle qui est utilisée dans une enquête en matière d'immigration conformément à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. En d'autres termes, il s'agit d'un tribunal quasi judiciaire. En vertu de cette disposition, la cause est entendue autrement et il n'est pas nécessaire de se conformer aux règles de preuve régulières d'un tribunal de plus haut niveau. Donc, la deuxième règle ne fait que préciser qu'il s'agit des mêmes règles de preuve que dans le cas d'une enquête en matière d'immigration.
Le président: Diane, vous auriez dû être ici lorsque nous avons discuté de la possibilité d'aller en appel. Nous avons étudié toutes ces questions, mais vous soulevez là un très bon point. En fait, si je peux me le permettre, j'aurais une autre question à ce sujet.
On prévoit toute une hiérarchie de mesures, allant de l'annulation à la révocation dans un cas simple jusqu'à la révocation et au renvoi. Lorsque la décision de révoquer la citoyenneté est prise, le processus d'interdiction de territoire entre en jeu. La personne a perdu sa citoyenneté et on pense à l'expulser du pays, c'est-à-dire à s'en débarrasser en tant que résident permanent. Elle invoque donc la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Le juge se substitue à la CISR. Ne peuvent-ils procéder de la sorte? On révoque la citoyenneté de la personne et on abaisse son statut à un niveau inférieur. Pourquoi ce processus ne peut-il pas se poursuivre à un autre niveau plutôt que dans le cadre du même procès? Certains éléments de preuve pourraient alors faire surface. Il se peut que la personne perde sa citoyenneté, mais cela ne signifie pas qu'elle doit forcément perdre son statut de résident permanent.
Mme Patricia Birkett: C'est pourquoi le processus prévu au paragraphe 16(6) est limité à ces trois allégations très graves, c'est-à-dire aux crimes de guerre, au crime organisé et à la sécurité. Ce sont les seuls cas qui pourraient entraîner une interdiction de territoire.
Le président: Donc, lorsque vous tentez d'obtenir une révocation, vous le faites pour des raisons de crime organisé, de terrorisme ou de crimes de guerre.
Mme Patricia Birkett: Non, je suis désolée...
Le président: Ou à la suite d'une fausse déclaration aux fins de la citoyenneté. Ensuite, si d'autres informations reliées au terrorisme, aux crimes de guerre et ainsi de suite font surface et que vous possédez des preuves, vous demandez immédiatement un renvoi.
Mme Patricia Birkett: C'est exact. Il faut souligner que la personne est au courant étant donné la façon dont le système est structuré. Elle sait dès le début que nous allons tenter de prouver qu'elle a fait une fausse déclaration pour obtenir sa citoyenneté et que, si le juge nous donne raison, nous demanderons qu'elle soit interdite de territoire. C'est équitable puisque la personne sait exactement au départ à quoi elle fait face.
Le président: Mais la mesure de renvoi ne peut pas faire l'objet d'un appel devant un tribunal.
Mme Patricia Birkett: C'est exact, puisque la mesure de renvoi, si elle était prise en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, ne pourrait pas faire l'objet d'un appel devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada. Toutefois, il ne faut pas oublier que les cas mettant en cause l'article 16, contrairement à ceux qui sont reliés à l'article 17, peuvent faire l'objet d'un examen judiciaire de la Cour d'appel fédérale. Il n'est pas interdit de recourir à la Cour d'appel fédérale. L'affaire est déjà entre les mains de la Section de première instance. Donc, si l'instance révisionnelle de la Section de première instance est la Cour d'appel fédérale et que la personne y a légitimement accès, elle n'a pas besoin de l'autorisation d'interjeter appel, alors que l'autorisation est incontournable, dans le cas de la Cour suprême.
À (1025)
Le président: Nous discuterons de ce genre de détails à mesure que progressera notre étude.
En ce qui concerne l'article 17 et cette histoire de certificat, je me demande moi aussi s'il faudrait prévoir une limite de temps. C'est très long, cinquante ans. Lorsqu'une décision est prise, conformément au paragraphe 17(9), elle est définitive et ne peut faire l'objet d'aucun appel. La révocation, comme l'ont expliqué John et M. Telegdi, entre autres, représente une nette amélioration par rapport à la version précédente. Un système judiciaire complet est prévu pour la révocation parce que l'on prend très au sérieux ces cas. Toutefois, nous nous contredisons ensuite quelque peu en supprimant le droit d'appel. J'essaie de comprendre comment nous pouvons confier tout cela à un système judiciaire qui est ensuite écarté pour les cas de certificat en alléguant que la décision est définitive et qu'elle ne peut faire l'objet d'aucun appel sauf si une évaluation des risques avant le renvoi est effectuée et ainsi de suite. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi on ne pourrait en appeler de la décision définitive reliée à une mesure de certificat?
Mme Rosaline Frith: Nous avons étudié les différentes lois en vigueur et nous avons repris le même système afin d'assurer l'uniformité avec les tribunaux et avec d'autres décisions qui ont été prises. Nous avons étudié très attentivement le genre de situations dans lesquelles nous pourrions refuser de communiquer de l'information à des fins de sécurité publique et de sécurité nationale et afin de protéger une personne, et nous croyons sincèrement que la personne qui doit se défendre et que les gens que nous tentons de protéger sont traités de manière équitable. D'abord, deux ministres doivent décider conjointement d'utiliser ce système pour qu'une décision soit prise quant à la nécessité du certificat. Ensuite, le juge revoit toute l'information une fois de plus et décide si la mesure est adéquate ou non. La personne est donc clairement protégée avant même que le processus ne soit mis en branle.
Le président: Lorsque la citoyenneté est révoquée en vertu de l'article 16, il y a possibilité d'interjeter appel. Pourquoi le processus devrait-il être différent de celui qui est prévu par la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, en vertu duquel la Section de première instance doit certifier que la question est d'une importance générale avant qu'elle soit transmise à la Cour d'appel fédérale? Dans l'article 16, cette mesure est plutôt claire, mais la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés place la barre plus haut en réalité pour ce qui est du mécanisme d'appel.
M. Paul Yurack: C'est un bon point. Il y a des milliers de litiges en matière d'immigration, et ce modèle de révocation ne s'applique qu'à quelques cas. Il a été question de 30 cas par année environ. On peut donc se permettre d'accorder le droit d'interjeter appel.
Le président: John, vous avez une dernière question.
M. John Bryden: Madame Frith, lorsque vous avez répondu à mes questions tout à l'heure, vous avez expliqué que, par société libre et démocratique, il fallait entendre une société dénifie comme telle par les Canadiens, plutôt qu'un autre modèle. Cette société libre et démocratique n'est-elle pas définie dans notre Constitution, qui comprend la Charte canadienne des droits et libertés? Pourquoi ne pas simplement ajouter à l'alinéa 3g) et à l'article 21 que la loi a pour objet de promouvoir le respect des principes et des valeurs inscrits dans la Charte canadienne des droits et libertés? Pourquoi tergiverser lorsque cela figure déjà dans la loi? Nous savons de quoi il s'agit; il s'agit de la Charte. Monsieur Yurack, je crois qu'en tant que conseiller juridique, vous seriez intéressé par ces questions d'ordre juridique. Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
À (1030)
M. Paul Yurack: Bien sûr. C'est que le Canada, en plus d'avoir une Charte des droits et libertés inscrite dans sa Constitution, est aussi signataire, en tant que gouvernement, de nombreux documents internationaux qui précisent les obligations internationales qu'il s'engage à respecter. Ces documents comprennent aussi le genre de droits et d'instruments que nous avons ratifiés.
M. John Bryden: Je tiens seulement à souligner qu'il s'agit de la loi canadienne en matière de citoyenneté et non pas d'accords internationaux. Je dois donc vous corriger. Notre Constitution et notre Charte priment sur les accords internationaux.
Madame Frith.
Mme Rosaline Frith: Le pays évolue sans cesse. Nous avons la Charte des droits et libertés et nous avons la Constitution. Nous avons notre propre manière de régler nos affaires, mais nous sommes aussi signataires de nombreuses conventions internationales qui reflètent nos points de vue en tant que société. Lorsque nous tenons compte de tous ces facteurs, cela va en quelque sorte au-delà de la Charte des droits et libertés puisque c'est le reflet des valeurs inhérentes à notre Charte.
Je ne tiens pas du tout à en débattre avec vous, monsieur Bryden. Je crois que nous pouvons aborder le libellé de plusieurs manières différentes. Nous avons choisi un libellé qui, selon nous, a une certaine signification au Canada, qui a été clairement interprété par les tribunaux et qui nous donne assez de latitude pour traiter les différents types de cas pouvant se présenter. Je parlais plus tôt d'incitation à la haine, mais d'autres actes commis à l'étranger qui ne sont pas considérés comme étant des actes criminels dans certains pays pourraient être jugés criminels au Canada. C'est aussi un facteur dont nous devons pouvoir tenir compte lorsque nous décidons de refuser la citoyenneté canadienne à quelqu'un.
M. John Bryden: Je tiens seulement à préciser, monsieur le président, que ce que nous faisons au niveau international en matière de droits de la personne—et nous sommes reconnus dans ce domaine—reflète les valeurs véhiculées par la Charte. Et, si je peux me le permettre, j'ajouterai que nous nous sous-estimons beaucoup lorsque, dans le cadre de nos propres lois en matière de citoyenneté, nous craignons de dire fièrement que nous avons été l'un des premiers pays à avoir une charte et que nous avons l'une des meilleures. Ces personnes décident de venir s'établir au Canada, pas ailleurs. Sauf votre respect, je ne comprends pas pourquoi, dans des lois aussi sensibles qui seront étudiées par bien des pays, nous ne déclarons pas fièrement que nous voulons que notre Constitution et la Charte des droits et libertés soient respectées. C'est ce à quoi nous nous attendons des nouveaux arrivants au pays.
Merci.
Le président: Rosaline, Paul, Patricia et Daniel, merci beaucoup. Nous ferons certainement de nouveau appel à vous après avoir entendu les autres témoins, mais je tiens à vous remercier tout de suite de toute l'information que vous nous avez fournie.
Chers collègues, nous poursuivons nos discussions cet après-midi. Un déjeuner de travail a été prévu. Sachez qu'après le congé des Fêtes, nous ne reviendrons pas nécessairement à Ottawa. Vous rentrez tous chez vous, dans ces villes où nous entreprendrons des audiences publiques, non seulement en ce qui concerne la citoyenneté, mais aussi les accords de candidats des provinces. De plus, nous consulterons la population canadienne à propos des cartes d'identité nationales. Nous avons donc beaucoup de travail prévu pendant la dernière semaine de janvier et en février. Avec un peu de chance, chers témoins, nous nous reverrons vers la fin de février. Nous mettrons alors à l'épreuve votre volonté de nous aider en vous soumettant certaines questions difficiles que nous auront posées les témoins. Une fois de plus, nous vous remercions et nous vous souhaitons de joyeuses fêtes.
La séance reprendra à 12 h 30.