CIMM Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 30 janvier 2003
Á | 1110 |
Le président (M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.)) |
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.) |
Le président |
M. Art Hagopian (président, Conseil ethnoculturel du Canada) |
Á | 1115 |
M. Emilio Binavince (Honorary Legal Counsel, Conseil Ethnoculturel du Canada) |
Á | 1120 |
Á | 1125 |
Le président |
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.) |
M. Emilio Binavince |
Á | 1130 |
M. Sarkis Assadourian |
M. Emilio Binavince |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD) |
Á | 1135 |
M. Art Hagopian |
M. Emilio Binavince |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Emilio Binavince |
Á | 1140 |
Le président |
M. Emilio Binavince |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Emilio Binavince |
Le président |
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.) |
M. Emilio Binavince |
Á | 1145 |
M. John Bryden |
M. Art Hagopian |
M. John Bryden |
M. Art Hagopian |
M. John Bryden |
Le président |
M. John Bryden |
M. Emilio Binavince |
M. John Bryden |
Á | 1150 |
M. Emilio Binavince |
M. Art Hagopian |
Le président |
M. John Bryden |
Le président |
M. John Bryden |
Le président |
M. John Bryden |
Le président |
M. Art Hagopian |
Le président |
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, Alliance canadienne) |
M. Emilio Binavince |
Á | 1155 |
Le président |
M. David Price (Compton—Stanstead, Lib.) |
M. Emilio Binavince |
M. David Price |
M. Emilio Binavince |
M. David Price |
M. Emilio Binavince |
M. Art Hagopian |
 | 1200 |
Le président |
M. Emilio Binavince |
 | 1205 |
Le président |
M. Emilio Binavince |
Le président |
M. Art Hagopian |
Le président |
 | 1210 |
Le greffier du comité |
Le président |
Le greffier |
Le président |
Le greffier |
Le président |
M. Hassan Yussuff (secrétaire-trésorier, Congrès du travail du Canada) |
 | 1215 |
 | 1220 |
Le président |
Mme Lynne Yelich |
M. Hassan Yussuff |
Le président |
M. John Bryden |
 | 1225 |
M. Hassan Yussuff |
M. John Bryden |
M. Hassan Yussuff |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Hassan Yussuff |
 | 1230 |
Le président |
 | 1235 |
M. Hassan Yussuff |
Le président |
M. Sarkis Assadourian |
M. Hassan Yussuff |
 | 1240 |
M. Sarkis Assadourian |
M. Hassan Yussuff |
M. Sarkis Assadourian |
M. Hassan Yussuff |
M. Sarkis Assadourian |
M. Hassan Yussuff |
M. Sarkis Assadourian |
M. Hassan Yussuff |
M. Sarkis Assadourian |
M. John Bryden |
M. Hassan Yussuff |
M. John Bryden |
 | 1245 |
M. Hassan Yussuff |
Le président |
M. Hassan Yussuff |
Le président |
M. Hassan Yussuff |
Le président |
 | 1250 |
M. Hassan Yussuff |
Le président |
M. Sarkis Assadourian |
Le président |
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC) |
Le président |
 | 1255 |
M. Rick Borotsik |
M. Sarkis Assadourian |
M. Rick Borotsik |
Le président |
M. Rick Borotsik |
Le président |
CANADA
Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration |
|
l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 30 janvier 2003
[Enregistrement électronique]
Á (1110)
[Traduction]
Le président (M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.)): Collègues, nous pourrions commencer puisque nous avons le quorum nécessaire pour entendre des témoins.
Si je comprends bien, Lynn va nous rejoindre bientôt. Malheureusement, d'autres, comme Inky, sont toujours malades et j'espère qu'ils vont aller mieux. Madeleine et Diane ne peuvent pas être ici, mais nous allons commencer de toute façon. Je vois que les libéraux sont pratiquement tous présents.
Oui, Sarkis.
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le président, on m'a demandé mardi de présenter au comité une réponse. Lorsque je pourrai le faire, dites-le moi.
Le président: Oui, vous pourrez le faire à 13 heures. Merci beaucoup d'accélérer le processus au sujet de la question posée au comité sur le paragraphe 39(5).
J'ai l'honneur d'accueillir de nouveau au comité le Conseil ethnoculturel du Canada représenté par Art Hagopian, Emilio Binavince et Helen Lanctôt.
Bienvenue. Je suis toujours heureux de recevoir le Conseil ethnoculturel, puisque vous nous donnez de multiples conseils et ce, depuis longtemps. C'est toujours un plaisir que de vous voir. Si je ne me trompe, vous avez un mémoire; vous pouvez passer les sept ou dix prochaines minutes à le résumer. Je suis sûr que nous aurons des questions à vous poser par la suite.
Merci de nouveau et bienvenue.
M. Art Hagopian (président, Conseil ethnoculturel du Canada): C'est formidable.
Bonjour, monsieur le président. Au nom du Conseil ethnoculturel du Canada, nous souhaitons remercier le Comité de la citoyenneté et de l'immigration de nous donner la possibilité de comparaître devant lui aujourd'hui'hui.
Je m'appelle Art Hagopian et je suis président du Conseil ethnoculturel du Canada. Je suis accompagné par les conseillers juridiques du CEC, Emilio Binavince et Helen Lanctôt.
Avant de commencer, au nom de l'exécutif et des membres du CEC, j'aimerais féliciter M. Sarkis Assadourian pour sa récente nomination au poste de secrétaire parlementaire du ministre. C'est toujours avec plaisir que l'on assiste à la nomination d'un membre de la communauté ethnoculturelle dans de tels postes. C'est encore plus important pour moi personnellement, car il fait partie de la communauté arménienne, qui est la mienne. C'est un double honneur pour moi d'être ici aujourd'hui et de participer à ces discussions.
M. Sarkis Assadourian: Puis-je vous inviter à déjeuner?
Des voix: Oh, oh!
M. Art Hagopian: Pas vraiment aujourd'hui, mais plus tard, sans problème.
Avant de commencer, j'aimerais vous donner quelques renseignements sur le CEC, puis, avec mon conseiller juridique, nous vous donnerons les détails de notre exposé.
Le CEC est une coalition nationale qui regroupe un éventail de 32 organisations ethnoculturelles nationales, représentant à leur tour quelque 2 000 groupes locaux et provinciaux au Canada. Créé en 1980, le CEC se veut une coalition d'organisations qui représentent des communautés culturelles bien distinctes mais qui s'efforcent ensemble de promouvoir la compréhension et l'acceptation de la réalité multiculturelle canadienne. Le CEC vise également l'intégration des groupes ethnoculturels en favorisant l'égalité des chances et en luttant contre le racisme et autres formes de discrimination.
Notre comparution devant le Comité mixte spécial sur la constitution en 1981 est sans doute le fait saillant de nos activités; nous avons à cette occasion préconisé l'inclusion du multiculturalisme dans la Charte des droits et libertés, ce qui a été fait en vertu de la Constitution, comme en témoigne l'article 27 de la Charte. Par la suite, la Loi sur le multiculturalisme canadien a été adoptée. Aujourd'hui, le multiculturalisme est considéré comme une caractéristique fondamentale du Canada. Il s'agit également de la première loi du genre.
[Français]
Depuis des années, le multiculturalisme fait l'objet de plusieurs débats et discussions au Canada, mais en dernière analyse, on ne peut nier que nous vivons et continuerons de vivre dans une société multiculturelle. Nous devons donc créer une culture d'égalité des personnes et de respect mutuel, et créer des conditions propres à ce qu'il y ait une cohésion sociale dans une société de plus en plus diversifiée.
Nous pensons que les Canadiens et les Canadiennes en sont venus à estimer le multiculturalisme comme un élément de la définition même de notre identité en tant que peuple, au même titre que l'autre caractéristique fondamentale du Canada qu'est la dualité linguistique.
Au cours de la dernière décennie, de nombreux sondages d'opinion ont témoigné de cet appui au multiculturalisme.
Le sondage le plus récent mené par Environics et commandité par l'Association des études canadiennes vient une fois de plus confirmer que les Canadiens réagissent favorablement au multiculturalisme. Le résultat du sondage indique que l'immense majorité de la population rejette les nombreux arguments mis de l'avant pour suggérer que le multiculturalisme vient contredire d'autres objectifs importants de la société canadienne.
[Traduction]
D'après le sondage Environics, les jeunes sont en général plus en faveur du multiculturalisme que le reste de la population; 90 p. 100 des jeunes âgés de 18 à 29 ans acceptent que le gouvernement appuie le patrimoine multiculturel du Canada et considèrent que la Loi sur le multiculturalisme canadien est utile et permet d'assurer le respect de la diversité culturelle et raciale par les institutions canadiennes.
J'en viens maintenant à notre mémoire.
La loi qui détermine la citoyenneté canadienne est l'une des plus importantes du Canada. En vertu de certaines lois fédérales et provinciales, la jouissance de certains droits et privilèges est conférée aux citoyens, ce qui n'est pas le cas pour ceux qui ne sont pas encore citoyens, mais qui sont des immigrants dans notre pays.
Bien qu'il puisse y avoir un débat sur la discrimination quant aux préférences en matière de sélection des candidats, en vertu de la loi, il n'en demeure pas moins que de telles lois abondent. Pensons, par exemple, à celles se rapportant à la propriété des médias, aux terres dans certaines provinces ou, de manière plus répandue, aux lois nationalistes comme la Loi sur l'examen de l'investissement étranger, maintenant abrogée.
La Constitution canadienne, elle-même, établit une préférence quant au choix des citoyens. En vertu de l'article 3 de la Charte des droits et libertés, seuls les citoyens canadiens ont le droit de vote et le droit de se faire élire au Parlement et au sein de l'assemblée législative d'une province. Le paragraphe 6(1) de la Charte accorde aux citoyens le droit d'entrer au Canada, d'y rester et de quitter le pays. En vertu de l'article 23 de la Charte, seuls les citoyens canadiens jouissent de certains droits à l'instruction dans la langue de la minorité.
Sur le plan international, les citoyens canadiens jouissent de la protection du gouvernement du Canada contre les actions préjudiciables de gouvernements étrangers, ou encore de son aide, en cas de besoin.
Par ailleurs, le Canada a été, en 1946, le premier pays du Commonwealth à adopter une loi en matière de citoyenneté. En 1976, le Parlement a adopté la Loi révisée sur la citoyenneté, laquelle redéfinit le sens de la citoyenneté canadienne et la manière d'y accéder. Cette loi a été modifiée en 1985.
Au cours des 50 dernières années, le Canada et le monde ont beaucoup changé. Le Canada devrait revoir la Loi sur la citoyenneté afin de refléter l'évolution du monde et de notre société.
Sur le plan interne, le facteur le plus important est sans aucun doute la diversité sans cesse croissante de notre pays. Nos valeurs culturelles, politiques et sociales ont également changé, tout comme la représentation raciale du Canada. Sur le plan international, la mobilité des personnes et la mondialisation de l'économie sont des facteurs dont il faut tenir compte dans le processus de modification de la loi.
Emilio, voulez-vous prendre la parole?
Á (1115)
M. Emilio Binavince (Honorary Legal Counsel, Conseil Ethnoculturel du Canada): Je m'appelle Emilio Binavince et j'aimerais poursuivre l'exposé, vu qu'il va devenir maintenant un peu plus juridique; je tiens toutefois à assurer les membres du comité que, tout en étant avocat, je suis convaincu que les membres de ma profession ne détiennent pas le monopole de la sagesse.
Cela me fait penser à l'histoire d'un pilote de montgolfière qui s'était perdu en Belgique. Sa montgolfière descendait peu à peu et le pilote a demandé à quelqu'un qui se trouvait au sol: «Pouvez-vous me dire où je me trouve?» Cette personne lui a répondu: «Oui, vous êtes dans une montgolfière.» Le pilote a alors rétorqué: «Êtes-vous avocat?» et il a répondu «Oui, c'est effectivement le cas.» L'homme qui se trouvait dans la montgolfière a alors dit: «Je l'ai tout de suite deviné, car l'information que vous me donnez est non seulement parfaitement précise, mais aussi parfaitement inutile.»
J'espère vous donner aujourd'hui une information qui ne sera pas inutile. Nous allons simplement discuter avec vous de certaines suppositions et questions politiques. Je sais que vous représentez une institution fort vénérable et que nous sommes ici uniquement pour vous aider à prendre des décisions pour l'ensemble du pays. Nous ne sommes pas là pour vous demander d'être d'accord avec nous sur tout, mais nous espérons que vous pourrez être d'accord avec nous sur certains points. Après tout, c'est bien ainsi que se fait le travail législatif.
Le problème fondamental que nous pose la loi ne se situe pas au niveau de sa rédaction; la loi est parfaitement rédigée et répond, je crois, à tous les critères linguistiques possibles. Elle exprime également comme il le faut certaines des pensées communes à tous les Canadiens. Nous pensons toutefois qu'il reste encore place à l'amélioration et nous allons aujourd'hui vous donner une idée des améliorations possibles auxquelles nous pensons.
La première, c'est que les valeurs canadiennes qui sont les nôtres doivent se refléter, non pas uniquement ici, mais dans le monde entier. La Loi sur la citoyenneté invite non seulement les étrangers à venir ici, mais elle permet aussi de dire au reste du monde qui nous sommes. Lorsque nous invitons des immigrants, nous leur disons: «Le Canada est un pays formidable, n'hésitez pas à venir.» Lorsque nous leur accordons la citoyenneté, nous leur disons: «Vous avez répondu aux critères, vous êtes maintenant Canadiens.»
Par conséquent, ces deux lois sont complémentaires. Selon moi, nous devons évoluer, à l'instar du monde et du Canada. Comme l'a dit Art Hagopian, les changements les plus importants visent la diversité sans cesse croissante de notre pays.
Nous sommes fiers de nos traditions, des deux peuples fondateurs en particulier, les Anglais et les Français, et nous devons préserver nos valeurs. Nous n'allons pas les abandonner. Par contre, nous devons être plus englobants. À notre avis, c'est à vous qu' il revient de prendre une décision à propos du degré de l'inclusivité à réaliser et de la préservation de notre culture canadienne française et anglaise. Après tout, ce sont les Canadiens qui voteront pour ou contre vous, en fonction du genre de décision que vous allez prendre.
Tout d'abord, ce que nous voudrions, c'est que vous repreniez le modèle -- parfait -- de la Loi sur l'immigration et les réfugiés et que vous inscriviez les objectifs de cette loi dans la Loi sur la citoyenneté. En vertu de la Loi sur l'immigration, ceux qui possèdent les mêmes valeurs que nous, énumérées dans cette loi, peuvent venir dans notre pays. Lorsque nous leur accordons la citoyenneté, nous devons dire: «Vous avez réussi; vous allez maintenant recevoir la carte certifiant que vous êtes citoyen canadien.» Nous allons faire passer un examen aux immigrants pour vérifier qu'ils ont effectivement les mêmes valeurs que nous. Par conséquent, d'après nous, l'article 3 de ce projet de loi n'indique pas comme il le faudrait les attentes en matière de valeurs auxquelles doit répondre l'immigrant, si bien qu'il faudrait modifier quelque peu cet article.
Une question très controversée se pose. Il faut comprendre, je pense, que le concept de société libre et démocratique est un concept essentiellement occidental. Il nous vient d'Angleterre, et nous ne pouvons pas le réfuter; qui plus est, nous devons déclarer que nous tirons fierté de cette tradition. La question dont nous devons débattre aujourd'hui est la suivante: Faut-il conserver la référence à la Reine dans le serment d'allégeance? Je suis fier de notre tradition anglo-américaine, mais reste à savoir jusqu'à quel point il faut proclamer cette allégeance? Il faut, je pense, s'en tenir à la réalité. Nous pouvons être fiers, mais nous ne pouvons pas, en même temps susciter de la rancoeur chez les autres.
Á (1120)
Par conséquent, ce que nous proclamons quant à l'héritage de la tradition anglaise ne doit pas nécessairement susciter de rancoeur. Le moment est maintenant venu de dire qu'on peut le dire sans pour autant l'exiger. Nous pouvons proclamer que nous avons une tradition anglaise, mais nous n'avons pas besoin de prêter un serment d'allégeance à la Reine, puisqu'il faut rester pratiques. Si vous dénigrez la Reine, vous êtes théoriquement coupable de trahison et pouvez faire l'objet de poursuites. Toutefois, sommes-nous coupables de trahison et peut-on accuser M. Manley d'une telle chose lorsqu'il déclare: «Abolissons la monarchie»? Je ne le pense pas. Nous croyons tous ici que la monarchie est utile, mais le fait de dire que le moment est venu de l'abolir pour privilégier nos propres institutions n'équivaut pas à une désobéissance politique. Nous aimerions donc dire qu'il est inutile de faire mention de la Reine, tout en gardant à l'esprit que la monarchie est un élément important de notre tradition.
L'autre point, beaucoup plus important à nos yeux, vise la présence effective. Depuis 1985, on pense que la présence effective au Canada est importante et on le justifie en disant qu'une telle présence reflète la valeur attachée à la citoyenneté canadienne.
Nous ne sommes pas d'accord. Ce n'est pas parce que l'on est effectivement présent au Canada que l'on attache de la valeur à la citoyenneté canadienne. Pour paraphraser John Milton, c'est peut-être utile pour ceux qui ont la patience d'attendre, mais cela ne veut pas dire qu'ils partagent nécessairement nos valeurs.
À mon avis, nous sommes trop durs à l'égard de personnalités qui contribuent à la réputation de notre pays. Si vous retenez le critère de la présence effective, vous allez rejeter John Galbraith, l'un des meilleurs économistes au monde, vu qu'il ne vit pas au Canada depuis quelque temps. Vous allez rejeter Shania Twain, qui vit maintenant en Suisse; vous allez également rejeter Céline Dion, Peter Jennings, Alex Trebek.
Il est clair que nous sommes connus aujourd'hui grâce, en partie, à ces personnalités qui ont contribué à la culture mondiale. N'insistons pas trop sur la présence effective au Canada. De telles absences peuvent se justifier et nous devons faire preuve d'indulgence à l'égard de ces Canadiens et ne pas les pénaliser, vu qu'ils donnent une image positive de notre pays au reste du monde.
Nous sommes donc contre deux articles au moins de cette loi: le retrait ou la perte automatique de la citoyenneté et son acquisition par le biais d'une demande faite en vertu de l'article 7.
Nous voudrions également que l'on souligne la valeur du système juridique. Ne politisons pas trop l'acquisition de la citoyenneté. Je conviens qu'il puisse arriver que le ministre et le gouverneur en conseil doivent exercer des pouvoirs extraordinaires, mais il faudrait se fier davantage au processus judiciaire, puisque le retrait de la citoyenneté équivaut au retrait d'un droit constitutionnel et aussi de certaines garanties juridiques généralement reconnues.
Ce projet de loi ne doit pas uniquement servir à préciser le statut. Comme c'est une loi qui confère des droits constitutionnels et juridiques, il faut faire preuve de beaucoup de prudence. Posez-vous la question suivante: Allez-vous vous en remettre au ministre et au gouverneur en conseil pour des points aussi décisifs? Je vous dirais qu'il vaudrait mieux en saisir des institutions neutres, comme les tribunaux.
Nous convenons qu'à l'occasion le ministre doive agir très rapidement, mais vous pouvez le faire,comme c'est le cas actuellement dans le contexte de la Loi de l'impôt sur le revenu. Vous pouvez demander un jugement sommaire, l'obtenir en l'espace de 24 heures et renvoyer la personne en cause. Il est inutile de confier cette responsabilité au ministre et au gouverneur en conseil. Nous vous recommandons donc d'examiner les dispositions, notamment celles prévues aux articles 21 et 22 de ce projet de loi, pour voir si elles sont absolument nécessaires. À mon avis, nous devrions nous fier au processus judiciaire, un point c'est tout.
Cela m'amène au point suivant. C'est à vous de décider qui peut devenir citoyen canadien. C'est à l'administration, par exemple au ministre, de décider si les exigences en matière de citoyenneté sont respectées. Les tribunaux, quant à eux, doivent décider si cette citoyenneté est perdue. Nous parlons ici de démocratie, de primauté du droit et, dans notre mémoire, nous disons que c'est ce qu'il faut affirmer. L'élaboration des lois reflète le processus démocratique et c'est à vous, en tant que parlementaires, de décider.
Á (1125)
L'acquisition de la citoyenneté est un processus administratif et c'est au ministre de décider. Par contre, si on commence à retirer des droits, c'est le processus judiciaire qu'il faut faire intervenir, car cela relève de la justice fondamentale. Selon nous, le contrôle judiciaire est un processus important.
C'est la même chose pour la perte de la citoyenneté.
Arrêtons-nous un instant sur deux choses qui se sont produites au Canada: la diversification croissante de nos valeurs ainsi que la réputation d'excellence de notre pays, comme en témoigne la mobilité des personnes. Ne soyons pas trop craintifs et n'insistons pas pour que les Canadiens restent au Canada; nous ne voudrions pas que notre pays donne l'image d'une prison. Nous avons le droit d'aller et venir et la réputation d'excellence de notre pays n'en sera que renforcée si nous donnons la possibilité à ceux qui deviennent célèbres de témoigner des valeurs qui nous sont chères à l'échelle de la planète.
Ainsi se termine notre exposé. Merci beaucoup.
Le président: Merci, Emilio et Art, pour votre perspicacité et votre attachement, surtout lorsque vous parlez des valeurs de notre pays ainsi que de l'inclusion et de la contribution des communautés ethnoculturelles.
Nous avons quelques questions à poser et c'est Sarkis qui va commencer.
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Merci beaucoup.
J'aimerais remercier M. Art Hagopian des félicitations qu'il m'a adressées au début de son exposé, mais je suis sûr que le comité...
Le président: Ne nous demandez pas de nous prononcer là-dessus.
M. Sarkis Assadourian: Je vais le faire ce soir.
J'ai une question à poser sur la présence effective de trois ans. Vous avez dit qu'il ne faudrait pas exiger des futurs citoyens une durée de résidence d'au moins trois ans sur une période de cinq et six ans. Que proposeriez-vous? Un mois?
Je connais des gens qui passent une semaine ici, obtiennent leurs papiers puis retournent dans leur pays pour revenir trois ans plus tard avec des explications. Ils se présentent à mon bureau pour me dire: «Je devais partir»; «Ma mère ou mon père était malade»; «Les affaires n'étaient pas bonnes»; «Je ne pouvais pas venir ici», ou autre chose. Pourtant, la loi stipule que, si vous quittez le pays pour plus de tant de jours, vous devez en informer l'ambassade, et cela sera pris en considération. Si vous ne le signalez pas à l'ambassade, vous perdez votre statut d'immigrant.
Je vous demanderais de comparer notre obligation de trois années de présence effective à ce qui est exigé aux États-Unis, en Australie, en Nouvelle-Zélande et dans les autres pays qui ont des politiques d'immigration semblables aux nôtres.
Pour moi, la citoyenneté ne s'accorde pas gratuitement. Il faut la gagner. La citoyenneté canadienne est un bien précieux qu'il faut chérir et protéger. Si on réduit le seuil de trois ans à trois mois, ce ne serait pas juste pour tous les Canadiens qui ont passé par là.
J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
M. Emilio Binavince: Nous ne parlons pas d'une durée absolue de trois mois ou de trois ans. Nous vous demandons de songer, en cas de motifs raisonnables, à accepter une durée de résidence de moins de trois ans. Très souvent, il y a un motif raisonnable. On ne peut pas juger cela dans l'absolu.
Le projet de loi a le défaut de vouloir faire de la réflexion et de l'intervention du fonctionnaire un travail machinal. Le fonctionnaire doit faire preuve de jugement. On ne peut pas lui simplifier les choses en établissant un genre de liste de contrôle qui indique que les points A, B, C ou D ont été vérifiés.
Il faut plutôt dire: «Votre demande semble indiquer que vous vous êtes absenté du pays pendant les trois ans. Y a-t-il une explication valable?» Puis convenir que «oui, c'est un motif valable». C'est à vous de décider si les motifs sont valables.
Je suis moi-même intervenu dans le cas d'une femme de Hong Kong mariée, qui avait un enfant ici et qui a fait venir sa mère, son père et son mari avant de se retrouver sans emploi. C'est très difficile parce qu'elle est médecin. Elle ne peut pas immédiatement être autorisée à exercer la médecine dans notre pays.
Que fait-elle? Elle a maintenant quatre personnes à faire vivre. Elle pratique la médecine à Hong Kong et essaie d'obtenir la citoyenneté canadienne. Le ministère lui répond qu'elle ne remplit pas la condition de présence de trois ans. Elle a un motif raisonnable pour expliquer son absence. Son absence ne signifie pas le rejet des valeurs canadiennes. C'est une nécessité plausible.
On ne peut pas établir la loi seulement en fonction de ceux qui l'enfreignent et qui partent après un mois. Il y en a qui peuvent se faire prendre, et nous devons les arrêter. Par contre, ce n'est pas un travail machinal et on ne peut pas faire l'économie de la décision à prendre.
Ce n'est pas une question de trois ans, deux ans ou six mois. Je trouve personnellement que trois ans, c'est trop long. Je dirais que deux ans est suffisant. Il faut au moins donner à ceux qui ne respectent pas systématiquement le critère de la présence effective la possibilité de s'expliquer. Ces personnes ne devraient pas être rejetées.
Á (1130)
M. Sarkis Assadourian: Comme je l'ai dit, monsieur le président, la personne doit, quand elle est à l'étranger, faire savoir à l'ambassade si elle sera à l'extérieur du Canada pour tant de semaines, de mois ou autres pour les raisons A, B, C ou D. Cela sera pris en considération.
Nous ne devrions pas réduire le seuil de trois à deux ans pour ceux qui abusent du système. Avec cinq ans, on a exigé trois ans. Maintenant, vous nous demandez de réduire cela à deux ans. La prochaine fois, dans 10 ans peut-être, vous allez demander que ce soit six mois.
Nous devons maintenir le seuil. Si vous partez, vous devez d'abord nous dire pourquoi et pour combien de temps. Vous ne m'informez pas moi, ni le service d'immigration, mais l'ambassade où vous vous trouvez. C'est pour vérifier que vous respectez nos règles et règlements, quels qu'ils soient.
Si vous ne suivez pas les règles, ne venez pas à mon bureau me dire que votre mère était malade. Si votre mère est malade, la loi dit que vous devez le signaler à l'ambassade. Si vous avez une entreprise, vous devez signaler à l'ambassade que vous serez à l'extérieur du pays pour tant d'années, pour que nous puissions en tenir compte. C'est ce que je dis.
M. Emilio Binavince: Je comprends. Je pense que nous respectons cela. Il ne faut pas agir avec les citoyens canadiens de façon paternaliste et très sévère. Ce sont des adultes. Pourquoi exiger qu'ils déclarent ces informations? Cela ne respecte pas la personne.
L'autre problème à ce sujet, c'est qu'on présume qu'il y a toujours un endroit où les Canadiens peuvent se présenter. Ce n'est pas vrai. Nous n'avons pas des ambassades partout dans le monde. C'est faux. Même en présumant que c'est vrai, cela en vaut-il vraiment la peine?
Combien avez-vous rencontré de gens aujourd'hui qui veulent devenir Canadiens et trichent à ce sujet? Cela crée tellement de contraintes administratives. C'est inutile, tout à fait inutile.
Pensez-vous vraiment que Céline Dion, ou quelqu'un d'autre, va se présenter à l'une de nos ambassades chaque année, par exemple, à votre demande? Non, ce qui ne veut pas nécessairement dire qu'ils déprécient la citoyenneté canadienne.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): J'aimerais remercier le Conseil ethnoculturel du Canada d'être venu nous rencontrer aujourd'hui. Merci à ses deux représentants—et j'espère bien prononcer vos noms—M. Hagopian et M. Binavince. Est-ce correct? Maintenant, vous devez dire «Wasylycia-Leis».
J'ai plusieurs questions à poser. D'abord, je suis bien contente que vous ayez dit qu'il fallait nous assurer que le projet de loi met en évidence les valeurs canadiennes dans le cas de la diversité et que la notion de présence du monde dans un pays est clairement exprimée dans le préambule du projet de loi. Vous avez fait des suggestions. Je me demande si vous avez réfléchi à ce que le préambule devrait contenir et si vous avez un texte à nous proposer ou, si ce n'est pas nécessaire, si vous avez, par exemple, pris connaissance du tout nouveau préambule que le Congrès juif canadien, que nous avons entendu il y a deux jours à peine, nous a présenté et dans lequel il est question de la diversité du Canada, de Nelson Mandela, de nos droits et traditions, du respect et de la nécessité d'insister sur le fait que le pays ne doit tolérer aucune forme de racisme, de haine ou d'intolérance.
C'est ma première question. Je vais peut-être commencer par celle-là et je verrai plus tard si le président me permet d'en poser deux autres.
Á (1135)
M. Art Hagopian: Emilio peut répondre à votre question. C'est une question de nature plus générale, pas tellement juridique.
Je dois d'abord signaler que le CEC qui présente un mémoire avec deux avocats ne dispose pas nécessairement d'un budget important. Je veux exprimer notre reconnaissance aux deux avocats, Emilio et Helen, qui travaillent bénévolement pour nous. Nous les en remercions beaucoup chaque fois que nous en avons l'occasion.
Je ne veux pas entrer dans les détails. L'an dernier, dans le même genre de contexte—je pense que c'était dans l'autre grand édifice—nous avons témoigné devant le Comité permanent des finances. À ce moment-là, nous avons expliqué beaucoup plus en détail la situation financière des organismes multiculturels, en particulier le Conseil ethnoculturel canadien et chacune de ses organisations membres. Elles ont un besoin criant d'argent pour poursuivre leurs activités. Comme vous le savez, le financement de base a été éliminé et ces organisations auront du mal à survivre.
Le Canada sert d'exemple au monde entier pour ce qui est de ses politiques et lois en matière de multiculturalisme. J'ai été interviewé par des journaux allemands et néerlandais sur les progrès du multiculturalisme canadien. Par contre, depuis cinq ou six ans, le Canada accuse du retard. Je tenais à le dire.
Pour répondre à votre question, nous n'avons pas eu beaucoup de temps pour nous préparer. Quand nous avons commencé à nous intéresser à cette étude, nous avons recueilli les points de vue des différentes organisations et nous les avons transmis à Emilio pour qu'il puisse rédiger un mémoire d'un point de vue juridique.
Mais votre question est bien claire. Si nous avons le temps, nous allons essayer de modifier le préambule ou d'en rédiger un nouveau, pour indiquer ce qu'il devrait énoncer, parce que les valeurs canadiennes dont nous parlons ici ont tellement changé.
Selon les dernières statistiques, 55 p. 100 de la population de Toronto aujourd'hui appartient à un groupe ethnoculturel; 44 p. 100 de ses habitants sont nés à l'extérieur du pays et la plupart d'entre eux appartiennent à un groupe ethnoculturel. En ajoutant ceux qui sont nés au Canada, la représentation des groupes ethnoculturels est de 55 p. 100. C'est pour la région du grand Toronto.
Dans deux villes, Markham, en Ontario, et Richmond, en Colombie-Britannique, la représentation des minorités visibles est d'environ 58 ou 59 p. 100. Je pense qu'elle est de 56 p. 100 à Markham et de 59 p. 100 à Richmond. Voilà le pays dans lequel nous vivons. Cela doit être reconnu.
Oui, nous sommes prêts à nous pencher là-dessus. Je suis sûr qu'Emilio va se mettre au travail et produire un préambule en fonction de ce que nous pensons.
Voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Emilio Binavince: Non, je pense que vous avez répondu à la question, sauf que je voudrais simplement dire...
Je suis très heureux qu'il reconnaisse que je suis simplement un porte-parole ici, exprimant ce que le conseil juge bon.
Il ne faut pas me reprocher les erreurs. Vous savez qui est coupable. L'aspect légal est votre domaine.
Mme Judy Wasylycia-Leis: J'aimerais bien discuter du financement du conseil et des réductions budgétaires dont vous avez parlé, mais le président va me rappeler à l'ordre. Nous pourrons y revenir une autre fois, devant un autre comité ou en privé.
J'ai deux questions à poser sur les recommandations que vous formulez au sujet de l'article 7 du projet de loi, les conditions de résidence. On nous a déjà parlé de cette question, et il a été proposé—je pense que c'est par l'Association du Barreau canadien—que le projet de loi soit plus souple à ce propos pour tenir compte, comme vous le dites, des circonstances particulières dans lesquelles se trouvent les citoyens canadiens à l'étranger ainsi que de leurs obligations internationales, et qu'il faudrait reconnaître ceux qui travaillent pour un employeur canadien et ceux dont les activités professionnelles les amènent à s'absenter du pays pour de longues périodes. Donc, on nous a demandé une plus grande souplesse.
Avez-vous d'autres mesures plus précises à nous proposer à ce sujet?
M. Emilio Binavince: En fait, j'ai préparé quelque chose, mais je pensais qu'il serait question surtout de politique aujourd'hui, et pas de cela.
Si le comité le désire, nous pourrions vous donner une idée de la façon dont nous aimerions que certaines dispositions soient énoncées. C'est avec plaisir que nous le ferions.
Á (1140)
Le président: C'est notre comité qui est chargé d'amender le projet de loi, et pas un autre. Il n'y a que nous qui nous en occupons. Donc, si vous avez des idées précises—comme Judy vous l'a demandé—sur les amendements à apporter, c'est le moment de nous les soumettre.
Nous n'allons pas les examiner tout de suite parce que nous allons faire une tournée du pays dans quelques semaines; nous devrions donc entreprendre l'étude article par article du projet de loi d'ici deux, trois ou quatre semaines. Nous serons heureux de recevoir les amendements que vous voudrez bien nous envoyer.
M. Emilio Binavince: Merci beaucoup, monsieur le président.
Mme Judy Wasylycia-Leis: La dernière question que je voulais poser a trait au refus d'accorder la citoyenneté dont il est question aux articles 21 et 22 du projet de loi. D'autres nous ont recommandé de supprimer complètement ces deux articles et d'en reprendre l'esprit dans une nouvelle disposition ou dans l'article 28. On a parlé de l'article 28. J'aimerais savoir si vous seriez favorables à ce qu'on supprime les articles 21 et 22 pour en reprendre l'essentiel autrement dans une autre disposition.
M. Emilio Binavince: Nous approuvons vraiment la judiciarisation dans le cas de ceux à qui on enlève la citoyenneté. Mais certains témoins vous ont dit vouloir recourir au système pénal comme le prévoient les articles 28 et suivants pour protéger certains droits.
Je crois que le système pénal est trop dur. Il ne faut pas nécessairement incarcérer quelqu'un qui a menti. Il y a d'autres dispositions criminelles dans ce cas. La production de faux documents est prévue dans le Code criminel, et il est possible de faire appliquer la loi.
Je pense que la Loi sur la citoyenneté au Canada que vous proposez doit mettre l'accent sur les vrais objectifs. Ne prévoyez pas trop de mesures criminelles, parce qu'il ne s'agit pas tellement ici de déterminer des peines et des crimes. Utilisez la loi autrement.
Je m'oppose totalement au recours au système pénal à ce sujet dans bien des cas. Je pense qu'on criminalise déjà assez.
Vous savez ce qui se passe aujourd'hui? Il n'y a plus une seule loi adoptée maintenant par le Parlement qui ne prévoit pas de mesures criminelles, et l'abondance des causes criminelles entraîne beaucoup de gens dans un piège. Sans compter que les poursuites se multiplient.
Évitons cela. Adoptons une loi efficace. Donc, le recours aux articles 28 et suivants sur l'admissibilité, le pouvoir d'annulation du ministre et la révocation—ou peu importe—d'un certificat, est exagéré. Je propose de faire preuve de retenue dans le recours à des mesures criminelles. Il ne faut pas abuser de ce pouvoir.
Le président: John Bryden.
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Je vais poursuivre tout de suite sur le même sujet, étant donné que l'article 21 me préoccupe moi aussi énormément.
En fait, le ministre a le pouvoir absolu de refuser la citoyenneté. Nous ne parlons pas de révocation, mais de refuser d'accorder la citoyenneté au demandeur qui, selon le libellé proposé «a fait preuve d'un grave mépris à l'égard des principes et des valeurs sur lesquels se fonde une société libre et démocratique».
Pour moi, les sociétés libres et démocratiques n'ont pas toutes les mêmes principes dans le monde, et il y en a qui ferment les yeux sur des gestes qui pourraient être considérés comme des crimes en droit international. Les exécutions sommaires en sont un exemple. Elles sont pratiquées par plusieurs—pas seulement une, mais plusieurs—sociétés libres et démocratiques. Je constate également que cette pratique se répand dans les sociétés libres et démocratiques, surtout avec la menace de terrorisme.
Pourriez-vous me dire, en tant qu'avocat, s'il ne vaudrait pas mieux, si nous accordons ce pouvoir au ministre, remplacer les mots vagues que sont «des principes et des valeurs sur lesquels se fonde une société libre et démocratique» par une référence précise à la loi canadienne—pas au Code criminel, mais à la Charte des droits et libertés? Cela ne conférerait-il pas plus de poids et de validité à l'article 21 s'il était question de la Charte des droits et libertés?
M. Emilio Binavince: Je suis content que M. Bryden pose cette question, parce que l'expression « société libre et démocratique », comme vous le dites, est très vague. Sa définition diffère d'un pays à l'autre. Nous ne pouvons pas faire de généralisation.
Les seules choses pour lesquelles nous avons consensus sont exactement celles que vous nommez, soit la Charte des droits et libertés et la Loi constitutionnelle de 1867. Pourquoi ne précisons-nous pas ce que nous voulons dire plutôt que de parler d'une société « libre et démocratique » en général, ce qui signifie qu'on laisse entre les mains du ministre tout le pouvoir de définir en quoi cela consiste? Ce genre de définition ou de pouvoir risque de restreindre la portée de la Charte, ou de l'élargir tellement qu'on pourrait la transgresser.
Je crois que d'un point de vue historique et constitutionnel, nous disposons d'assez d'institutions dans cette société libre et démocratique, et je suis totalement en accord avec vous, c'est la façon dont l'article devrait être formulé.
Á (1145)
M. John Bryden: Monsieur Hagopian, les chartes des droits de la personne sont-elles typiques de toutes les sociétés libres et démocratiques? Ces sociétés ont-elles des chartes équivalentes à la notre?
M. Art Hagopian: Vous parlez de chartes dans quel contexte? De l'article 27 ou...
M. John Bryden: Non, je pense à une charte des droits et libertés définissant ou interdisant la discrimination et prescrivant une certaine norme de comportement, le respect de la primauté du droit, ce genre de choses.
M. Art Hagopian: Je sais qu'il y en a quelques-unes. Je sais que l'Australie a la sienne, parce que j'ai eu l'occasion de travailler avec mon homologue australien lorsque j'ai participé à la Conférence mondiale des Nations Unies contre le racisme en Afrique du Sud. Je sais que l'Australie en a une. En fait, si je peux me permettre d'ajouter cela, ce pays a également un système d'appui culturel beaucoup plus fort que le nôtre, même s'il a appris de nous.
Pour ce qui est des autres, je sais qu'Israël en a une... Ce n'est pas une question que je veux aborder ici aujourd'hui, c'est un autre débat, mais je sais qu'Israël a la sienne. Les Pays-Bas y travaillent, et la Suède en a une. Voilà ce que je sais. Pour les autres pays, nous n'avons pas eu beaucoup de contacts, donc je ne serais pas en mesure de vous fournir une réponse générale, mais je sais que quatre ou cinq pays en ont une.
Le seul pays doté d'une charte s'inscrivant dans le contexte de notre propre environnement et de notre multiculturalisme est l'Australie. Les autres pays n'ont pas de charte s'inscrivant dans le même contexte qu'ici, un contexte favorable à la diversité comme ici. Ils n'en ont pas.
M. John Bryden: Voilà le problème, monsieur le président. Beaucoup de pays n'en ont pas, alors que les autres ont conçu la leur en fonction de leur vision de leur société. La nôtre se fonde sur une vision multiculturelle de la société et sur l'égalité au regard de la loi.
Le président: En passant, le ministre de la Citoyenneté et du multiculturalisme de l'Australie comparaîtra devant nous le 23 février.
M. John Bryden: Oui, merci, monsieur le président.
Ai-je le temps de poser une autre question, monsieur le président?
Le président: Bien sûr.
M. John Bryden: J'aimerais revenir à votre mémoire écrit, à un paragraphe en particulier. Je tiens à vous féliciter pour votre exposé oral, mais dans l'un des paragraphes de votre mémoire, vous dites:
En relation avec le Serment d'allégeance, le CEC croit que le Canada a bel et bien compris que la référence à «Sa Majesté la Reine Elizabeth Deux, Reine du Canada» dans le Serment d'allégeance doit maintenant être abolie. Bien qu'il s'agisse ici de suppositions, il existe fort probablement plus de rancoeur et de dommages causés aux sentiments des différentes composantes de la société canadienne que de valeur rattachée à cette phrase dans l'accès à la Citoyenneté canadienne. Il est donc souhaitable de faire en sorte que le nouveau citoyen respecte et protège la Constitution canadienne. |
J'aimerais approfondir deux idées ici. Lorsque vous parlez de « Constitution » dans ce contexte, parlez-vous du serment aux termes de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique en général, ou de la Charte des droits et libertés en général?
M. Emilio Binavince: Des deux. La loi de 1867, soit la Constitution de 1867, soulève déjà la question de la souveraineté et de la Reine.
M. John Bryden: Je vois.
M. Emilio Binavince: Nul besoin d'être très précis à ce chapitre. La Charte, comme vous le savez, contient des propos légèrement différents dans son préambule, parce qu'elle fonde sur la suprématie de Dieu et la primauté du droit. Ainsi, deux valeurs y sont exprimées, qui ne font partie de la Constitution de 1867. C'est donc vraiment non nécessaire.
Lorsqu'on prête serment, on s'engage à respecter la Constitution du Canada, les institutions qui l'entourent, dont la suprématie de cet édifice, du Parlement. Il n'est pas nécessaire d'être si précis.
M. John Bryden: Monsieur le président, j'ai une autre question, mais je pense que je vais la retenir pour l'instant parce qu'elle nécessiterait probablement une réponse élaborée, à moins que vous n'ayez...
Le président: Non, allez-y.
M. John Bryden: D'accord.
La deuxième chose que j'aimerais approfondir avec vous, et avec quiconque souhaite me répondre, c'est votre affirmation qu'il existe fort probablement plus de rancoeur et de dommages du fait que la Reine soit incluse dans le serment d'allégeance. Pouvez-vous expliquer cela? Je comprends bien qu'il s'agit de suppositions, mais votre organisme a une vue d'ensemble. Pouvez-vous étoffer un peu cette affirmation?
Á (1150)
M. Emilio Binavince: Monsieur le président, si vous voulez entendre nos suppositions, nous nous ferons un plaisir de vous aider à ce chapitre.
Je suis arrivé au pays au début de la période du FLQ. Il y avait beaucoup de violence. Vous savez, encore aujourd'hui, la Reine refuse de se rendre au Québec. Cela réduit quelque peu l'appartenance. Il ne fait aucun doute dans mon esprit, lorsque je fais la lecture de ces événements, que le Québec nourrit de la rancoeur contre la Reine. Pour sa part, le Canada anglais nourrit de la rancoeur contre de Gaulle, qui a dit «Vive le Québec libre!». Si l'on parle de de Gaulle ici, cela provoquera beaucoup plus de rancoeur.
Par ailleurs, je doute vraiment que vous arriviez aujourd'hui à trouver 1 ou 10 p. cent de Canadiens qui sont venus ici et qui ont déjà pensé à la Reine. Lorsque je suis arrivé au pays, je n'ai jamais pensé à la Reine. Je suis venu ici parce qu'il s'agissait du Canada. Ce ne sont toutefois que des suppositions.
Je suis d'avis que si nous devons nous quereller, nous devrions le faire au sujet d'enjeux importants. Ne nous querellons pas au sujet de ces petites choses, parce qu'elles font partie de notre tradition de toute façon; elles sont là. C'est notre point de vue.
Quoi qu'il en soit, nous devons faire preuve de tolérance à l'égard des opinions différentes, mais aussi appuyer certaines idées et essayer de convaincre les gens d'y adhérer. Il y amplement de place pour la tolérance.
M. Art Hagopian: Si je peux me permettre d'ajouter quelque chose...
Le président: Je préférerais que nous ne parlions pas de la Constitution cette fois-ci. S'il s'agit seulement du serment d'allégeance, d'accord... Mais je crains, comme Emilio l'a dit, qu'il y ait des enjeux beaucoup plus importants dans ce projet de loi que celui à savoir si nous devrions le conserver. Jusqu'à maintenant, nous semblons surtout nous être demandé s'il fallait prêter allégeance à Sa Majesté et tout le reste. Pour être honnête, je préférerais que nous nous concentrions sur les enjeux les plus substantifs de ce projet de loi.
M. John Bryden: J'invoque le Règlement, monsieur le président.
Le président: J'ai droit à mon opinion aussi. Je suis désolé.
M. John Bryden: Oui, mais monsieur le président, vous dirigez les témoins. Je ne suis pas d'accord.
Le président: Non, non. Je l'ai laissé parler et je vous ai laissé parler à ce sujet. Je propose maintenant de passer à autre chose.
M. John Bryden: Monsieur le président, je crois que nous devrions donner au témoin l'occasion de s'exprimer sur ce sujet important. Je pense que ce l'est, comme vous l'avez dit vous-même, dans le contexte du serment d'allégeance. La Reine est mentionnée dans le serment d'allégeance actuellement proposé dans le projet de loi, et le témoin devrait avoir le droit nous faire ses commentaires à ce propos.
Le président: Mais notre comité ne peut pas changer la Constitution nationale. C'est tout ce que je veux dire. Soyons pragmatiques. Nous ne pouvons changer la Constitution du pays en ce qui concerne la monarchie. Ce pourrait être une question à examiner par Dieu sait qui Dieu sait quand.
Allez-y, Art, si vous voulez ajouter quelque chose...
M. Art Hagopian: Je vais être très bref, monsieur le président; je ne vais pas prendre beaucoup de temps.
Je voulais dire que dans notre environnement, dans la collectivité ethnoculturelle, les gens viennent de partout dans le monde, de toutes les régions. Ils débarquent dans un pays, soit au Canada en tant que tel. Nous voulons créer chez eux un dévouement et un engagement envers ce pays et tout ce qu'il l'englobe : son environnement, son chef d'État, les règles de son gouvernement et tout le reste.
Le fait de placer ici la reine d'un environnement complètement étranger est un peu étrange, particulièrement pour des nouveaux arrivants. Ils ne comprendront pas ni ne l'accepteront totalement. C'est notre raisonnement.
Le président: Merci.
Le président donne la parole à Lynne.
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, Alliance canadienne): Je vous remercie.
Merci d'être avec nous ce matin.
Je vois que vous vous êtes concentrés sur certaines parties. En ce qui concerne notre nouvelle Loi sur la citoyenneté, y a-t-il quoi que ce soit d'autre que vous auriez voulu, mais que vous n'avez pas pris le temps d'expliquer en détail dans un mémoire? Plus précisément, j'aimerais connaître votre point de vue sur les gens qui deviennent citoyens parce qu'ils sont nés ici ou parce qu'ils ont été adoptés par des parents canadiens. Que pensez-vous des gens qui obtiennent la citoyenneté immédiate parce qu'ils sont nés ici.
M. Emilio Binavince: Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je pense que le projet de loi est très progressiste à cet égard. Nous voyons très bien l'approche privilégiée. Il n'y a qu'un petit problème, dans certains cas. Par exemple, que fait-on d'un enfant né d'une mère citoyenne canadienne et d'un père né à l'extérieur du Canada? Allons-nous lui donner la citoyenneté canadienne ou non? Le problème ne se pose pas quand les deux parents sont citoyens canadiens. Il se pose toutefois lorsqu'il y a citoyenneté multiple. Lorsque la personne naît au Canada, la situation n'est pas trop problématique, parce que les dispositions sur le lieu de naissance s'appliquent. C'est même leur raison d'être. Nous excluons ceux qui viennent d'autres pays. La loi le prescrit. Elle comporte toutefois deux règles contradictoires : celle du sang, donc du lien de filiation, et celle du lieu de naissance. Il faut prendre les deux en considération dans ces cas et parfois, elles entrent en conflit.
Nous sommes d'accord avec le principe du projet de loi selon lequel la citoyenneté canadienne prend de la valeur si nous procédons ainsi, mais il pourrait être trop radical de la révoquer. Nous n'avons pas abordé la question en détails. Il y a des différences, mais ce sont des détails.
Á (1155)
Le président: David.
M. David Price (Compton—Stanstead, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je vous remercie beaucoup, mesdames et messieurs, d'être ici ce matin et de nous consacrer de votre temps.
J'ai quelques petites questions. Pour revenir à ce que disait Sarkis sur la présence physique, les trois ans, j'aimerais savoir si vous avez des suggestions à nous faire sur la forme de traitement à privilégier. De toute évidence, nous ne pouvons pas simplement charger un fonctionnaire de répondre oui ou non à une demande. Il faut être un peu plus précis.
M. Emilio Binavince: Il y a un critère pour l'exercice du pouvoir, par le ministre et le cabinet : ils doivent être convaincus qu'il existe des motifs raisonnables de croire en une faute. On pourrait utiliser ce type de formule dans ces examens, de sorte que les gens n'aient pas à prouver leur présence physique.
M. David Price: Vous proposez donc que chacun des cas soit soumis au cabinet.
M. Emilio Binavince: Pas nécessairement au cabinet, mais à l'administrateur responsable, soit au ministre, selon ce projet de loi, plutôt qu'à la commission ou au juge de la citoyenneté, comme c'était le cas avant. Il devrait avoir l'obligation de les examiner. Je dirais même qu'il devrait y avoir présomption. Ce n'est qu'une formalité visant à fournir une preuve. J'estime donc que nous devrions insister et dire aux demandeurs qu'ils ont l'obligation d'établir la preuve, autrement cette période s'appliquera à eux. Ils feraient mieux de nous donner des motifs raisonnables de croire qu'il y a lieu de leur accorder une dispense. Vous utilisez cette formule dans la loi.
M. David Price: J'aimerais que vous nous disiez ce que vous pensez de cette idée. Lorsqu'un immigrant a passé un certain nombre d'années au pays, croyez-vous qu'il serait bon de l'inviter à devenir citoyen? En ce moment, beaucoup de personnes non citoyennes affirment que ce n'est qu'un souci ou oublient de présenter une demande et ne réclament finalement jamais la citoyenneté.
M. Emilio Binavince: Nous croyons effectivement que vous devriez prendre des mesures en ce sens. En Italie, il y a actuellement une loi recommandant à tout descendant italien vivant au Canada de voter aux élections parlementaires de l'Italie. Cela va très loin. Nous n'en faisons pas autant. Nous ne prenons même pas la peine d'indiquer à une personne que ses trois ans ou ses cinq ans sont écoulés et qu'elle a maintenant le droit de demander la citoyenneté. Les gens oublient. Il faut penser à les réveiller. C'est très important.
On ne peut pas présumer qu'elles ne l'ont pas fait parce qu'elles ne veulent pas la citoyenneté. C'est le problème qui se dégage de ce projet de loi. Il est un peu paranoïaque de dire: « Vous ne vous êtes pas présenté à l'ambassade, donc vous ne voulez pas de la citoyenneté canadienne. » C'est absolument faux. Ce n'est pas parce qu'on ne la demande pas, qu'on ne la veut pas.
La vérité, c'est que comme pour bon nombre des aléas de la vie quotidienne, on prend pour acquis que les choses vont bien et l'on ne fait rien. Pour faire de notre pays un vrai bon pays, il faut leur dire qu'ils ont maintenant le droit de formuler une demande et les inciter à le faire. Il n'y a rien de mal à cela.
M. Art Hagopian: Monsieur Price, si je peux ajouter quelque chose, je pense que c'est un très bon point. Comme je l'ai dit, notre organisme englobe environ 32 groupes nationaux d'un bout à l'autre du pays. Je peux vous assurer d'une chose, c'est qu'à la prochaine réunion du conseil d'administration, je vais moi-même soulever cette question pour que nous puissions en discuter et pour que tous les immigrants qui sont là puissent, en publiant des articles dans leurs bulletins, dans leurs journaux, rappeler aux membres de leur comité que ceux qui n'ont toujours pas demandé la citoyenneté devraient le faire et essayer de prendre cette orientation. Je ne crois pas que nous l'ayons déjà fait. C'est un bon point et je pense que nous allons prendre des mesures en ce sens.
Merci.
 (1200)
Le président: Je vous en remercie, Art. Ce type de partenariat serait vraiment très utile. Vous remarquerez que dans ce projet de loi, le changement du rôle du juge de la citoyenneté ou du commissaire vise à promouvoir et à encourager cela. Mais je crois que votre idée—tout comme celle de David—consiste à se montrer proactif. Si nous pouvions engager des relations de partenariat avec nos communautés ethnoculturelles, ce serait magnifique.
J'aimerais vous poser deux ou trois questions. Je suis un peu perplexe; je vais vous expliquer pourquoi. À propos de l'obligation de résidence, la loi actuelle dit, même si elle ne parle pas de «présence effective»... Notre comité a bien sûr examiné ce problème lorsqu'il était question d'immigration et il s'y penchera de nouveau car j'estime qu'il faut savoir comment fonctionne le monde de nos jours. La définition de la «présence effective» doit tenir compte de certaines obligations relatives à la famille, au travail et aux affaires en général. Je crois que les membres de ce comité y ont déjà réfléchi.
D'après la loi actuelle, un immigrant peut demander la citoyenneté dès lors qu'il a passé 1 095 jours au Canada sur une période de quatre ans. Même si c'est une mesure administrative, elle confère un certain pouvoir discrétionnaire au juge de la citoyenneté en lui accordant un peu de souplesse. Autrement dit, si un demandeur n'a été effectivement présent au Canada que 800 jours, mais qu'il est en mesure d'expliquer que c'était pour prendre soin de sa mère ou pour s'acquitter d'autres obligations à l'étranger, on en tiendra compte.
J'aimerais vous poser quelques questions.
Vous dites que vous souhaitez ramener ce délai de six ans—comme cela a été proposé—à cinq ans, ce qui est plus restrictif. Je ne suis pas sûr que vous compreniez bien la façon dont cela fonctionne. Nous voulons faire passer ce délai de quatre à six ans. Par conséquent, un immigrant qui aura passé trois ans sur six au pays pourra demander la citoyenneté canadienne. Mais vous, vous voulez que ce délai soit ramené de six à cinq ans. Cela n'a aucun sens compte tenu de ce que vous venez de dire. Je ne vois pas pourquoi vous souhaitez réduire cette période à cinq ans, alors que nous avons proposé six ans.
Deuxièmement, je suis d'accord pour que la fonction consistant à accorder la citoyenneté soit administrative. Le fait est qu'actuellement, il existe une fonction administrative quasi judiciaire en vertu de laquelle un juge de la citoyenneté jouit d'un certain pouvoir discrétionnaire—parfois négatif, mais le plus souvent positif. Nous nous apprêtons à supprimer cela et à laisser à une bande de bureaucrates le soin de décider qu'un immigrant qui n'a pas passé 1 095 jours au Canada sur une période de six ans ne peut obtenir ou demander la citoyenneté.
Encore une fois, ce que vous dites me plaît, mais vous avancez une chose et son contraire. Vous pourriez peut-être m'expliquer ce que vous entendez par fonction administrative sans aucun pouvoir discrétionnaire et pourquoi vous voulez ramener la période au terme de laquelle un immigrant peut demander la citoyenneté de six à cinq ans. Je ne comprends pas votre logique.
M. Emilio Binavince: Permettez-moi de répondre en premier à votre question sur la fonction administrative.
On exerce toujours un pouvoir discrétionnaire, même si on n'est que le messager. Les fonctionnaires ne font rien de mécanique. Je réfute totalement la définition selon laquelle les fonctionnaires sont des automates. Ils prennent des décisions. Ils évaluent les preuves. Aujourd'hui, il n'y a pas beaucoup de différences entre un juge de la citoyenneté et un fonctionnaire pour faire le travail. J'ai comparu tellement souvent devant le juge de la citoyenneté que je peux vous dire que c'est à peu près pareil que de traiter avec un fonctionnaire.
L'avantage du changement que vous proposez, c'est que la relation est beaucoup plus détendue. La personne peut parler un peu plus. Elle peut fournir davantage de preuves et il y a beaucoup plus de chances que s'établissent des rapports de confiance. Le problème, avec le processus quasi-judiciaire que nous avons actuellement, c'est que tout semble formel, mais ce n'est qu'une apparence. Cela ne fonctionne pas vraiment. Le juge de la citoyenneté dit: «Je suis neutre, vous feriez bien de vous occuper de ce cas». Il ne fait que son travail, lequel est d'ailleurs très semblable à celui d'un fonctionnaire.
Très franchement, lorsque je traite avec un fonctionnaire, je peux être un peu plus inventif. Au lieu de rester assis à attendre une décision prise en fonction de tout ce que vous lui exposerez, le fonctionnaire a le devoir d'aller chercher l'information. C'est très important. C'est pourquoi je suis vraiment très favorable à ce changement.
Pour ce qui est de réduire le délai de six à cinq ans, ce qui nous dérange, c'est l'obligation de présence effective de trois ans. En fait, je doute même que la présence effective pendant deux ans soit réellement... Mais c'est à vous de décider ce qui convient le mieux. Je pense que trois ans, c'est trop.
En ce qui concerne la durée de présence totale—trois ans ou plus sur une période de six ans—, je considère que vous avez tout à fait raison, il semble y avoir une contradiction. Mais il faut réduire les deux périodes, pas seulement une. D'après moi, si on ramène cette période à cinq ans, on droit aussi limiter la présence effective à deux ans puisque dans les cas où il y a des doutes et pas de preuves, on est prêt à accepter des motifs raisonnables. C'est essentiellement ce que nous disons.
Ne compliquons pas les choses outre mesure car aujourd'hui, que ça nous plaise ou non, les gens ne viennent pas pour acquérir la citoyenneté canadienne; ça leur fait peur. Ils viennent chez nous parce que ce pays est merveilleux. Le petit morceau de papier qui dit qu'ils sont citoyens n'est qu'un certificat attestant leur intégration à ce grand pays. Accélérons le processus car ces immigrants ont beaucoup à nous donner. Ne rendons pas l'attente trop longue. Vouloir accorder plus de valeur à un document de citoyenneté simplement en prolongeant les délais est un non-sens. Il ne gagnera pas plus de valeur pour autant.
 (1205)
Le président: J'aimerais vous poser une autre question au sujet du processus judiciaire à suivre en matière de révocation. Vous dites que dans l'examen judiciaire... Faites-vous référence à tous les aspects du problème après l'acquisition de la citoyenneté; dites-vous que c'est au système judiciaire et à tous ses mécanismes d'appel de se prononcer sur la révocation de la citoyenneté d'un individu?
M. Emilio Binavince: Oui.
Le président: Même si la citoyenneté a été acquise de manière frauduleuse ou fallacieuse? Pensez-vous que nous devrions permettre un examen judiciaire complet en cas de fraude patente ou de fausse déclaration?
M. Emilio Binavince: Dans sa forme actuelle, l'examen judiciaire comporte deux volets. Si vous n'obtenez pas gain de cause, vous pouvez intenter un recours.
Mais si vous êtes déjà Canadien et que je décide de vous retirer votre citoyenneté, le problème est tout autre. La question est de savoir si la décision doit être politique, administrative ou judiciaire. D'après nous, retirer la citoyenneté à quelqu'un est beaucoup plus radical que de ne pas la lui accorder.
Par ailleurs, le processus de demande de citoyenneté est assorti d'un examen judiciaire au bout du compte. Le supprimer reviendrait à en faire une décision politique, ce qui est totalement incohérent. Si vous prenez une décision aussi radicale, vous ne voulez pas d'examen judiciaire. C'est donc absolument incohérent.
Notre proposition vise à rendre le système cohérent et à intégrer l'examen judiciaire à toutes les étapes du processus.
Le président: Il n'y a pas d'autres questions.
Merci encore à vous trois, Art, Emilio et Helen, pour votre présentation. Nous attendons votre préambule avec impatience. Vous pourrez nous le présenter sous forme de poème ou de chanson si cela vous amuse—je crois que cela plaira à John. Merci aussi pour votre étude approfondie et le travail fantastique que vous avez accompli pour ce merveilleux pays. C'est très apprécié.
M. Art Hagopian: Merci beaucoup de nous avoir invités à assister à cette séance du comité.
[Français]
Nous vous remercions de nous avoir donné cette occasion.
[Traduction]
Nous vous souhaitons beaucoup de succès dans vos travaux futurs.
Le président: Merci.
Chers collègues, en attendant de recevoir des copies du mémoire présenté par le Congrès du travail du Canada, nous pourrions régler la question administrative que nous étions censés voir, ou devons-nous donner avis à Rick Borotsik? Oui, il souhaite être présent.
En attendant les copies, nous pourrions peut-être étudier les questions administratives ayant trait aux déplacements que nous effectuerons dans deux semaines. Comme vous le savez, tous les membres du comité ne pourront venir. Par conséquent, nous vous demanderons de faire preuve de coopération, et si vous avez des préférences particulières concernant une ville dans l'ouest ou dans l'est, faites-en part à vos collègues.
Deuxièmement, comme vous le savez, il y a un grand débat entourant les budgets et le financement des voyages et j'encourage ceux qui le peuvent, particulièrement ceux qui passent par Ottawa, à utiliser leur système de points. Ce serait très apprécié dans la mesure où leur système de points de voyage le permet.
Je ne sais pas si tous les membres du comité pourront se libérer.
Bill, vous pourriez peut-être nous dire rapidement qui est censé partir, qui doit faire quoi et où en est la situation au juste.
 (1210)
Le greffier du comité: Pour l'ouest, il y a vous, monsieur le président, Mme Yelich et M. Price ou M. Assadourian.
Le président: Ou les deux.
Le greffier: C'est ce qu'on a demandé. Je pense que Judy pourra participer, mais elle doit décider où aller. Je pense qu'elle peut se rendre à Winnipeg. Il n'y a qu'une seule personne. J'ai appelé au bureau du whip du Parti conservateur pour voir s'ils pouvaient trouver des gens pour M. Mark. Dans l'est, il y a M. Pickard, qui agira à titre de vice-président. Mme Dalphond-Guiral y sera aussi, tout comme M. Charbonneau et Mme Ablonczy. C'est ce que nous avons jusqu'à présent.
Le président: Je pense que John ne voudra assister qu'à certaines rencontres dans l'est. Nous allons arranger cela car les Libéraux sont autorisés à envoyer deux députés pour chaque déplacement alors que chacun des autres partis n'en envoie qu'un. C'est ce que nous avions convenu.
Quoi qu'il en soit, comme vous le savez, cela ne commencera pas la semaine prochaine, mais la semaine suivante. Évidemment, nous aurons plus de travail dans certaines villes que dans d'autres mais nous serons quand même très occupés dans l'ensemble, c'est la raison pour laquelle je vous demande d'être attentifs à toute possibilité visant à étaler la charge de travail ou à aider un collègue représentant une région en particulier.
Le greffier: J'aimerais que les députés m'appellent demain car il nous faudra réserver les billets d'avion et tout le reste. Nous devons aussi savoir si vous utiliserez vos points, auquel cas nous n'aurions pas à nous en occuper. En outre, nous voudrions que vous nous disiez dans quelle ville vous avez l'intention de vous rendre pour savoir si trois députés libéraux vont à trois endroits différents à l'est et à l'ouest.
Le président: Nous emmènerons avec nous tous les députés qui souhaitent assister aux audiences. Mais il nous sera impossible de leur payer les repas et l'hébergement.
Très bien. Revenons à notre liste de témoins.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à Hassan, David et Shelly, du Congrès du travail du Canada. Le Congrès du travail du Canada nous a beaucoup aidés dans l'examen des projets de loi précédents et je tiens à remercier ses représentants de comparaître devant nous aujourd'hui pour nous parler du projet de loi sur la citoyenneté.
Je sais que vous avez préparé un exposé. Comme je le répète à tous nos témoins—et comme j'ai dû vous le dire aussi par le passé—, j'aimerais que vous nous fassiez un bref résumé de votre présentation de façon à ce que nous puissions vous poser des questions. Évidemment, nous en garderons des copies en guide de matériel de référence ou comme lecture de chevet. Je vous demande donc de nous en présenter les grandes lignes et de nous faire vos suggestions. En outre, si vous souhaitez nous proposer des amendements, vous serez les bienvenus.
Hassan.
M. Hassan Yussuff (secrétaire-trésorier, Congrès du travail du Canada): Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier de nous avoir invités à assister aujourd'hui à vos délibérations.
Nous apprécions grandement votre travail. Je trouve important que le comité se déplace un peu partout au pays pour entendre le point de vue des Canadiens. Toute la question de l'accession à la citoyenneté revêt une importance capitale. En outre, nous nous intéressons beaucoup aux dispositions de la loi et aux circonstances dans lesquelles des personnes pourraient perdre leur citoyenneté canadienne.
Nous vous présenterons un mémoire plus approfondi d'ici deux semaines dans lequel nous analyserons certains articles de cette mesure législative. Nous souhaitons néanmoins faire un exposé oral et parler des droits de la personne en général, plutôt que de centrer le débat sur des détails d'ordre juridique. Je suis sûr que vous recevrez de nombreux avocats qui discuteront des termes employés et de la façon dont ce projet de loi a été rédigé.
À titre indicatif, je vous informe que nous représentons deux millions et demi de travailleurs et leur famille partout au pays. Beaucoup sont immigrants, d'autres réfugiés, et ils acquerront un jour ou l'autre la citoyenneté canadienne. Évidemment, notre organisation compte des membres issus de tous les milieux et originaires des quatre coins du monde.
Nous savons que le projet de loi C-18 est une ébauche de la Loi sur la citoyenneté. C'est durant les première et deuxième sessions de la 36e législature que l'on a discuté des amendements aux projets de loi C-63 et C-16 déposés à la Chambre des communes. Nous savons également que le projet de loi C-16 est mort au feuilleton à cause des élections. Nous avons suivi le débat public sur la question de la citoyenneté, même si nous n'avons pas présenté de mémoire officiel en réponse aux projets de loi précédents.
Si les représentants du Congrès du travail du Canada sont venus témoigner aujourd'hui, c'est parce qu'ils considèrent qu'il est plus important que jamais de dénoncer toute tentative visant à créer de fausses classes ou catégories de citoyens.
Les mesures antiterroristes prises récemment par le Canada et d'autres pays, comme les États-Unis, nous préoccupent énormément, particulièrement les actions des Américains qui ont ébranlé nos concitoyens en déportant des Canadiens d'origine arabe vers des pays du Moyen-Orient, au lieu de les renvoyer chez eux, ici au Canada.
Le Congrès du travail du Canada s'inquiète également de certaines dispositions du projet de loi C-18 qui, à son avis, compromettent le principe d'application régulière de la loi que défend si chèrement le mouvement des travailleurs canadiens.
Par respect pour l'ensemble de nos concitoyens, il faut se rappeler que le Canada a été bâti par des immigrants et que cela continuera. Il convient de noter que les dernières statistiques confirment que le Canada change de visage, et toute nouvelle loi canadienne devra tenir compte de cette réalité, dans le fond et dans la forme. Je fais référence aux plus récentes données du recensement au Canada indiquant un changement démographique. Les deux millions d'immigrants qui se sont installés sur notre territoire au cours de la dernière décennie suffisent à nous donner une idée des transformations que connaît notre pays.
L'article 12 du projet de loi confirme le principe d'égalité en stipulant que tous les citoyens ont les mêmes droits et les mêmes devoirs, sans égard à la façon dont ils sont devenus citoyens. Nous considérons qu'il s'agit d'un principe important dans le contexte.
Par contre, d'autres articles n'obéissent pas pleinement à ce principe d'égalité. Certains le contredisent même. Par exemple, il existera des citoyens privés du droit à un traitement équitable ou pour lesquels il n'y aura pas d'application régulière de la loi. D'autres se verront refuser le droit de transmettre leur citoyenneté à leurs enfants.
Avec la mondialisation, de plus en plus de travailleurs voyagent à la recherche de débouchés ou pour rendre visite à leur famille restée à l'étranger. Il ne faudrait pas les pénaliser en dressant des obstacles administratifs, en imposant des conditions de résidence arbitraires et en leur exigeant de prouver qu'ils ont des attaches au Canada.
En ce qui concerne la perte de citoyenneté, nous nous inquiétons du fait qu'un enfant né à l'étranger d'un citoyen canadien de la deuxième génération aussi né à l'étranger puisse perdre sa nationalité canadienne. Nous craignons également que des Canadiens nés à l'étranger perdent leur citoyenneté du fait que leurs parents sont aussi nés à l'étranger. Ces dispositions pourraient toucher des Canadiens qui ont vécu dans ce pays la plus grande partie de leur vie.
Imposer une période de présence effective minimale de trois ans n'est pas un bon moyen d'évaluer l'attachement de quelqu'un à notre pays. Nous pourrons vous donner notre point de vue détaillé sur la question si le comité décide de s'y pencher.
Notre première recommandation consiste à inclure une disposition selon laquelle tout individu né à l'étranger de quelqu'un dont la demande de citoyenneté a été acceptée en vertu de l'article 14 soit citoyen canadien.
Pour ce qui est de la révocation de la citoyenneté, je dirais que si le projet de loi C-18 est adopté dans sa forme actuelle, il permettra à un juge de la Cour fédérale de révoquer la citoyenneté d'un ancien immigrant au moyen du dépôt d'un certificat, sans que ce citoyen soit autorisé à prendre connaissance des preuves présentées contre lui. Toute décision de révocation de la citoyenneté prise par un juge ne pourra faire l'objet d'un appel ni d'une révision judiciaire. Selon l'article 17, un juge de la Cour fédérale pourra révoquer la citoyenneté d'un ancien immigrant en émettant un certificat. Les preuves ne seront pas divulguées à l'individu incriminé et il n'y aura aucune possibilité d'appel ou de révision judiciaire.
Ceci est tout à fait contraire au principe d'égalité dont il est question à l'article 12. Avec cet article, certains citoyens se verront refuser le droit fondamental à un traitement juste et équitable et à l'application régulière de la loi.
 (1215)
Au sujet de l'annulation de la citoyenneté, le projet de loi C-18 confère au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration de nouveaux pouvoirs, dont celui d'annuler et de révoquer la citoyenneté. Il pourrait donc arriver que des citoyens canadiens qui ont reçu leur citoyenneté après avoir immigré au Canada la perdent sans bénéficier d'une procédure équitable et sans avoir droit à une audience.
Aux termes de l'article 18, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration disposera de nouveaux pouvoirs l'autorisant à annuler la citoyenneté dans les cinq ans suivant son acquisition par un individu, après son immigration au Canada, s'il l'a obtenue en utilisant une fausse identité. Encore là, cela peut se faire en l'absence d'une procédure équitable et d'une audience. Les personnes visées ne sont pas autorisées à prendre connaissance de la totalité de la preuve, mais uniquement d'un sommaire des motifs pour l'arrêt proposé. Le ministre n'est même pas tenu d'être convaincu au-delà de tout doute raisonnable, mais simplement satisfait de la preuve présentée.
Non seulement cette façon de procéder abaisse-t-elle la barre en matière de justice, mais on viole les droits de l'individu en ne lui permettant pas de se défendre lui-même. Qu'une décision aussi importante se prenne à l'extérieur du processus judiciaire ne garantit aucunement que les droits de l'individu seront protégés contre des accusations fausses et malicieuses.
Notre recommandation quatre est la suivante: amender le projet de loi pour faire en sorte que toute décision d'annulation soit prise de façon indépendante et assortie du droit à une audience et à une procédure équitable, y compris le droit à un avis, à la divulgation et au service d'un avocat.
Pour ce qui est du refus d'accorder la citoyenneté, les articles 21 et 22 confèrent de vastes pouvoirs au Cabinet. Ce dernier est habilité à refuser la citoyenneté au motif qu'une personne aurait fait preuve d'un grave mépris à l'égard des principes et des valeurs sur lesquels se fonde une société libre et démocratique. Les pouvoirs accordés au Cabinet aux termes des articles 21 et 22 du projet de loi C-18 sont problématiques car l'interprétation des principes et des valeurs est subjective. Encore là, on ne prévoit pas de procédure équitable étant donné que les décisions du Cabinet sont prises derrière des portes closes.
Le Congrès du travail du Canada craint que certaines personnes se voient refuser la citoyenneté parce qu'elles ont été condamnées à la suite d'accusations fallacieuses dans un pays étranger. Qui plus est, l'absence d'une procédure équitable prévoyant un recours adéquat, ce qui constitue un principe dans une société libre et démocratique, nous cause beaucoup d'inquiétudes. Notre recommandation cinq est de supprimer les articles 21 et 22.
L'article 28 dresse une longue liste des autres cas de non-admissibilité à la citoyenneté. Les paragraphes 28(c) et 28(d) traitent des inculpations et des condamnations survenues à l'extérieur du Canada. C'est là un sujet de grande inquiétude pour des réfugiés qui fuient la persécution, de fausses mises en accusation et des condamnations injustes. Parfois, le parti au pouvoir dans un pays porte de fausses accusations contre ses opposants politiques et les condamne à tort pour des crimes sérieux. Au Canada, nous accordons protection à ces personnes et nous leur octroyons le statut de réfugié. Par conséquent, il est plutôt contradictoire d'affirmer que ces réfugiés ne devraient pas être admissibles à la citoyenneté en raison d'accusations malicieuses ou trompeuses portées dans leur pays d'origine.
En conclusion, je tiens à remercier les membres du comité permanent de nous avoir donné l'occasion de comparaître aujourd'hui. Nous espérons que vous apporterez les amendements nécessaires au projet de loi C-18 en vue d'appuyer le principe de la procédure équitable et de réitérer l'égalité de tous nos citoyens, indépendamment de leur lieu d'origine.
 (1220)
Le président: Merci beaucoup, Hassan.
Lynne.
Mme Lynne Yelich: Merci d'être venu ce matin.
J'ai une question au sujet du point trois, la perte de citoyenneté. Vous avez certaines inquiétudes au sujet du critère des trois ans de résidence. À votre avis, ce n'est pas une façon équitable de juger de l'attachement de quelqu'un au Canada. Pouvez-vous me donner des explications à ce sujet, je vous prie?
M. Hassan Yussuff: Je sais que dans certains cas, par exemple, des immigrants de la catégorie des gens d'affaires viennent ici et en raison de la somme d'argent exigée pour obtenir la citoyenneté, ils ne font que passer. Il se peut qu'ils ne restent pas ici, et qu'ils plient tout simplement bagage.
Certains individus ont des familles dans d'autres pays, auxquelles ils rendent visite périodiquement. Il se peut qu'ils passent un certain temps à l'extérieur du pays temps pour s'occuper de leur famille si elle ne peut émigrer au Canada.
De nos jours, bien des jeunes, y compris des immigrants de fraîche date qui récemment devenus citoyens canadiens, voyagent par affaires. Ils se rendent aux États-Unis ou dans d'autres pays. Certes, ils passent un certain temps à l'extérieur du pays, mais il ne serait pas juste de leur refuser cette occasion et d'affirmer que pour cette raison ils ne sont pas attachés au Canada. À mon avis, il faut comprendre qu'un grand nombre de Canadiens, qu'ils soient nés ici ou à l'étranger, voyagent dans le contexte de la mondialisation de l'économie de nos jours et, pour ce faire, il leur arrive de passer un certain temps à l'étranger. Par conséquent, j'estime que ce n'est pas juste de faire une telle distinction.
Évidemment, je sais qu'il y a des cas d'abus du système qu'il faut régler. Le simple fait d'exiger une période de résidence continue de trois ans garantit que certaines personnes perdront leur citoyenneté pour des raisons qui n'ont pas été prévues ou envisagées. Il n'est pas possible pour eux d'interjeter appel pour faire valoir qu'ils étaient à l'extérieur du pays parce qu'ils ont accepté un emploi leur permettant de parfaire leurs connaissances et de renforcer l'économie du pays. Il n'y a pas de possibilité de le faire.
Il y a des gens qui abusent du système, je le sais. C'est un fait. Nous avons autorisé un nombre considérable d'immigrants à venir de Hong Kong. Ces immigrants n'avaient aucun attachement au pays. Ils ont obtenu leur statut d'immigrant reçu et, par la suite, ils sont partis.
Il faut trouver un équilibre. Nous devons nous pencher sur cet article en vue de créer un tel équilibre.
Le président: John.
M. John Bryden: Je voudrais faire suite à vos observations au sujet de l'article 21, qui confère au ministre le pouvoir de refuser la citoyenneté en cas de «grave mépris à l'égard des principes et des valeurs sur lesquels se fonde une société libre et démocratique». L'article en question et les pouvoirs y afférant vous paraîtraient-ils plus acceptables si le libellé était plus précis et disait: «à l'égard de la Charte des droits et libertés» qui énonce, dans une perspective canadienne, non seulement toutes les composantes de notre identité mais aussi certains éléments fondamentaux du droit. Si l'on optait pour cette formulation au lieu de dire «à l'égard des principes et des valeurs sur lesquels se fonde une société libre et démocratique», pensez-vous que cela serait utile?
 (1225)
M. Hassan Yussuff: Je pense que ce serait un changement acceptable.
Permettez-moi de dire ceci avant de vous donner une réponse définitive. Peut-être que mon argument n'est-il pas le meilleur, mais c'est certainement un bon scénario. On pourrait prendre l'exemple de Nelson Mandela et de ses antécédents. Comme vous le savez, le gouvernement avait porté contre lui de nombreuses accusations pour lesquelles il a subséquemment été emprisonné. Compte tenu de ce que nous savons aujourd'hui de cet homme, ainsi que des épreuves qu'il a traversées pour instaurer la démocratie dans son pays, si le système préconisé aujourd'hui avait été en place à l'époque, jamais quelqu'un comme Nelson Mandela n'aurait pu devenir citoyen du Canada. Évidemment, il n'a jamais rien fait de répréhensible. Son action consistait à défendre des principes démocratiques fondamentaux ainsi que le respect des droits de l'homme.
Il faut donc qu'il y ait un équilibre à cet égard, particulièrement lorsqu'on recueille la preuve auprès de services de renseignements et de pays étrangers. Cela est plutôt subjectif. Encore une fois, les autorités peuvent décider de se débarrasser de certains groupes qui s'opposent à leurs politiques et aspirations. À mon avis, il est impératif de peser cet aspect à la lumière des enseignements de l' histoire et des difficultés rencontrées pour asseoir la démocratie et le respect des droits de la personne chez nous.
M. John Bryden: Je pense que c'est un argument très intéressant.
Je vous dirai que Nelson Mandela défendait certainement les principes énoncés dans notre Charte des droits et libertés. Nous en sommes ni l'un ni l'autre avocat. Mais je pense que si l'on avait mentionné précisément la Charte des droits et libertés dans cet article, Nelson Mandela aurait été admissible à la citoyenneté canadienne. En effet, l'histoire a montré qu'il défendait assurément les principes mêmes inscrits dans la Charte des droits et libertés.
M. Hassan Yussuff: Je pense que cela serait utile car l'article de la Constitution sur l'égalité met la barre très haut. Nous devons tous convenir que c'est l'objectif que nous voulons atteindre grâce à la législation canadienne. En ce qui concerne cet article en particulier, je demanderais encore une fois à vos collègues de faire preuve de plus de générosité car il y a trop de personnes qui sont victimes du système.
Le fait que le ministre ait le pouvoir de prendre une décision sans que la personne visée puisse interjeter appel ou contester la preuve m'apparaît des plus subjectif et arbitraire. Si le ministre dispose d'une preuve convaincante qui, à son avis, pourrait résister à l'examen des tribunaux,il ne devrait pas hésiter à la leur soumettre.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Je trouve l'exemple de Nelson Mandela très parlant. En l'occurrence, le Canada lui a décerné la citoyenneté honoraire, même s'il est peu probable qu'il ait pu satisfaire aux critères de la présente mesure ou, de façon plus générale, aux dispositions de la nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, S'il avait dû être évalué selon la grille en vigueur aujourd'hui, il n'aurait pas pu être considéré comme citoyen ou comme une personne apportant une contribution légitime à la quête de la liberté, de la paix et de la justice dans le monde.
C'est un bon point de départ. En fait, c'est certainement sous cet angle que nous devons envisager ce projet de loi ainsi que d'autres mesures dont la Chambre est saisie à l'heure actuelle.
Monsieur Yussuf, vous avez évoqué la nécessité de réaliser un équilibre entre la nécessité d'instaurer un système capable de repérer les véritables fraudeurs, les menaces authentiques et les cas de corruption, sans pour autant ratisser tellement large qu'on se trouve à compromettre le sort de bien des gens qui sont simplement en quête de justice et de liberté.
Je pense connaître d'ores et déjà la réponse à ma prochaine question générale, mais j'aimerais quand même l'entendre. À vos yeux, le projet de loi C-18 atteint-il un équilibre en ce qui concerne la question de la citoyenneté? Si vous deviez, comme nous, amender le projet de loi, quels seraient les changements qu'il faudrait absolument apporter pour qu'il soit plus équilibré?
M. Hassan Yussuff: Deux choses sont très importantes. J'en ai d'ailleurs parlé lors de comparutions précédentes devant votre comité sur d'autres aspects de l'immigration, et je n'ai pas d'objection à les répéter. Nous allons faire énormément de tort à notre pays, à la fois maintenant et à l'avenir car, d'après moi, nous créons deux classes de citoyens au pays. Il existe une perception selon laquelle les Canadiens qui ne sont pas nés ici ont une citoyenneté de moindre valeur que celle des citoyens canadiens nés ici.
Compte tenu du fait que nous dépendons énormément de l'immigration pour assurer le développement et la croissance du pays, je pense que nous envoyons des messages contradictoires à la population canadienne en général et aux Néo-Canadiens au sujet de leur valeur. Il faut absolument réitérer que la Charte des droits et libertés constitue le barème ultime et que toute mesure législative adoptée au pays doit s' y conformer. Autrement, les gens vont se demander: «Pourquoi voudrais-je devenir citoyen dans un pays où je pourrais perdre ma citoyenneté pour un rien surtout que si j'y étais né, cela ne risquerait pas d'arriver?»
Permettez-moi d'attirer votre attention sur le cas récent d'un Canadien d'origine syrienne qui a été déporté dans son pays. Soit dit en passant, son pays, c'est le Canada. Il a été déporté vers un pays qui n'est pas le sien et cela n'a guère causé de remous. C'est là un défi fondamental pour la mosaïque canadienne. À mesure qu'elle évolue, notre législation doit affirmer qu'il n'existe pas deux classes de citoyens dans notre pays. Il n'y en a qu'une: vous êtes Canadien, vous êtes Canadien, vous êtes Canadien.
Adopter la citoyenneté est une responsabilité sérieuse; ce n'est pas une bagatelle. Oui, il faut satisfaire à des critères. Mais une fois qu'on a satisfait aux critères, on ne devrait pas être traité comme des citoyens de deuxième classe.
Il y a dans la mesure deux aspects qui minent plus ou moins ce que j'appellerais un principe de citoyenneté unique dans un pays unique. Autrement dit, nous sommes comme tous les Canadiens qui sont ici—grâce à l'immigration, bien sûr—et qui souhaitent retrousser leurs manches pour relever le défi de bâtir une société. Ainsi, les nouveaux venus pourront affirmer: «C'est ma patrie, c'est le pays que je veux m'efforcer de développer et auquel je suis étroitement attaché.» À ce moment-là, ils ne se demanderont même pas s'ils devraient conserver un lien avec un autre pays par crainte de perdre...»
Évidemment, vous ne ressentez peut-être pas cela, mais les Canadiens arabes et musulmans se sentent davantage interpellés dernièrement car la plupart de mesures législatives dont il a été question a eu pour effet de braquer les projecteurs sur eux. Devant cet état de fait, ils se demandent s'il y a lieu de s'inquiéter de la possibilité de perdre leur citoyenneté. Ils se demandent ce qu'ils devraient faire et s'ils ne devraient pas se couvrir?
Je pense que cette perspective plus vaste s'impose au sujet de la législation. Envoyons-nous un tel message? Créons-nous une telle perception parmi nos concitoyens? Si nous ne contestons pas cette perception, si nous n'affirmons pas la véritable valeur de la citoyenneté canadienne, nous allons rester dans le vague et les gens vont essayer de se protéger. Ils vont se demander si le Canada est véritablement l'endroit où ils veulent vraiment s'enraciner. Par conséquent, Judy, je suis d'accord avec vous.
En ce qui concerne les dispositions concernant l'égalité dans la Charte des droits et libertés, elles doivent être considérées fondamentales pour une mesure comme celle-là. Si ce critère n'est pas respecté, alors la mesure ne vaut pas le papier sur lequel elle est rédigée. À mon avis, il faut que la loi se conforme à une norme supérieure et non inférieure.
 (1230)
Le président: Monsieur Yussuf, vous avez fait valoir avec beaucoup d'éloquence que nous ne voulons pas créer une citoyenneté à deux vitesses. Il va de soi que votre avis, et particulièrement la façon dont vous l'avez exprimé, est très important.
Pour ce qui est de l'absence de remous, je peux vous dire que notre ministre des Affaires étrangères, notre secrétaire parlementaire, notre ministre de l'Immigration ainsi que le président du comité ont tenté de faire comprendre aux Américains un certain nombre de choses quant à la valeur de la citoyenneté canadienne et au fait que les citoyens canadiens ne devraient pas s'inquiéter de leur pays d'origine quand ils sont titulaires d'un passeport canadien légitime. Pour nous, cela suffit, et cela devrait suffire aux Américains pour peu qu'ils respectent les règles et le droit international. Chose certaine, nous essayons de régler ce problème du mieux que nous le pouvons.
Avec votre permission, je poursuivrai dans la même veine que Judy et les autres jusqu'à maintenant. Vous avez fait état de trois problèmes liés au refus de la citoyenneté. Si je ne m'abuse, John a signalé - ou en tout cas nous avons entendu quelqu'un affirmer- qu'il était peut-être trop vague de parler de «société libre et démocratique» et que par conséquent, cela pourrait causer de multiples problèmes. On a aussi dit que la Charte des droits et libertés pouvait être un autre critère en vertu duquel nous pourrions...
Deuxièmement, lors de notre premier examen, le gouvernement a fait valoir que la mesure est très précise en matière de propagande haineuse, par exemple; ce sont là des questions extrêmement spécifiques. De nombreux témoins nous ont dit qu'il faudrait rétrécir le champ de la mesure et préciser exactement ce que nous entendons. Par conséquent, nous devrions limiter cela seulement à la propagande haineuse et à deux ou trois autres questions pour que les motifs de refus soient limités d'entrée de jeu.
Vous avez suggéré de supprimer les articles 21 et 22, ce qui voudrait dire, essentiellement, que cela ne serait pas nécessaire. On pourrait peut-être recourir à l'article 28, qui serait la seule disposition traitant d'exceptions. Parmi les quatre options mentionnées, vous avez proposé de supprimer les articles 21 et 22, vous avez affirmé que la formulation «société libre et démocratique» était trop vague et qu'il y aurait lieu de remplacer cela par la Charte des droits et libertés. Préféreriez-vous une définition tellement spécifique qu'elle enlèverait toute subjectivité dans l'équation?
 (1235)
M. Hassan Yussuff: Je pense que c'est notre collègue qui a soulevé ce point en rapport avec la Charte des droits. Tout ceci est encore une fois clairement défini car il s'agit de valeurs canadiennes. Tenter de mettre de l'avant ses préférences ou ses préjugés à l'égard des valeurs canadiennes ne peut que faire du tort à la Charte. Ceux qui ont rédigé la Constitution étaient très clairs et la plupart des Canadiens sont extrêmement fiers de cet article de la Constitution.
Par conséquent, au bout du compte, je préférerais que nous nous en tenions au critère suprême de la Charte plutôt que d'essayer d'évaluer après coup quel pourrait être le critère suivant car, quoi que vous fassiez, ce sera toujours un critère inférieur à celui de la Charte. Vouloir le modifier pour nous le rendre acceptable...il y a des chances que nous ne soyons jamais d'accord. Nous défendrons notre position jusqu'à la saint-glinglin et, si vous faites venir des juristes, il se peut que cela dure encore plus longtemps. Je considère qu'il serait plus propice d'essayer au moins de faire admettre au ministère et à d'autres secteurs de l'administration que les critères établis dans la Charte sont très élevés. Si on n'y arrive pas, on ne peut évidemment pas investir qui que ce soit du pouvoir de déporter des gens ou de leur renier le droit à la citoyenneté.
Je pense qu'il vaut mieux s'en tenir à la Charte plutôt que de chercher des définitions plus étroites sur lesquelles tout le monde s'entendrait étant donné que nous en avons déjà convenu dans notre Constitution. La Charte des droits et libertés est vraiment très explicite et il n'y a aucune raison de se comporter différemment envers les gens à qui nous voulons retirer la citoyenneté canadienne.
Le président: Je cède la parole à Sarkis, puis à John
M. Sarkis Assadourian: Merci beaucoup.
Yussuff, vous avez dit que la déportation du Canadien d'origine syrienne n'avait causé aucun remous... Mais mon collègue nous a expliqué que l'affaire avait au contraire suscité beaucoup de controverse.
Je vous informe que je suis le seul député canadien à qui on relève les empreintes digitales aux douanes américaines; tout ça parce que je suis né en Syrie. Je ne suis pas comme les autres. Je suis différent. Je suis distinct.
D'ailleurs, il ne se passe pas un jour sans que je communique avec le ministre des Affaires étrangères ou le solliciteur général—j'ai même parlé de ce problème à Yussuff lorsqu'il est venu à mon bureau en novembre dernier. Mais il y a plusieurs autres cas et on est en train d'examiner la situation.
Ce n'est pas parce que l'on n'en parle pas publiquement que cela ne préoccupe personne. Toute critique suscite des remous, d'où qu'elle vienne.
À la page 3 du document, vous dites que l'exigence relative à la présence effective de trois ans n'est pas un moyen juste d'évaluer l'attachement de quelqu'un au Canada. J'aimerais bien que vous me disiez pourquoi cela ne le serait pas et ce que vous proposez en échange pour prouver l'attachement de quelqu'un au Canada.
M. Hassan Yussuff: Tout d'abord, je crois que tous ceux qui obtiennent ou qui tentent d'obtenir la citoyenneté canadienne doivent démontrer leur attachement à ce pays. Il devrait exister une façon d'évaluer cet attachement. Mais je dis cela sans perdre de vue les véritables difficultés auxquelles font face ces gens.
Notre société compte aujourd'hui de nombreux jeunes qui, pour des raisons professionnelles, doivent voyager et parfois s'absenter du pays pendant de longues périodes. Cela ne veut pas dire qu'ils ne sont pas attachés au Canada, mais qu'ils doivent aller à l'étranger pour vendre leurs compétences sur le marché mondial dont ils font partie. Ils reviennent chez nous, avec tous leurs talents, leurs richesses et leur énergie, pour contribuer au développement de ce pays. Je pense qu'il s'agit d'un équilibre délicat.
Je reconnais que certaines personnes ont abusé des dispositions de cet article de la Loi sur la citoyenneté. Je sais notamment que des gens originaires d'Asie du Sud-Est, de Hong Kong et d'ailleurs, que nous avons accueilli en grand nombre et à qui nous avons donné le statut d'immigrant reçu, n'ont jamais eu aucun attachement pour ce pays car personne ne le leur a demandé. Mais il faut trouver un équilibre. Il y a aussi beaucoup de gens qui ne peuvent faire venir leur famille en raison des règles d'immigration. Ils doivent parfois retourner dans leur pays d'origine pour résoudre ces problèmes.
Je le répète, il faut trouver un équilibre. Je ne sais pas quel serait l'équilibre parfait, mais il faut en trouver un, au lieu de se limiter à dire que si les gens ne se conforment pas à ces critères, ils perdront automatiquement toute possibilité d'obtenir ou de garder la citoyenneté canadienne.
Je crois qu'il faudrait trouver un moyen de faire prouver aux gens leur attachement à ce pays. Après tout, la citoyenneté est une affaire sérieuse. Mais il y a énormément de monde, dans notre économie, qui doit voyager et rester à l'étranger pendant de longues périodes.
 (1240)
M. Sarkis Assadourian: Et comment pourrais-je prouver, en tant que nouvel immigrant, mon attachement au Canada si je n'y suis pas? Quel autre moyen voyez-vous pour évaluer mon attachement à ce pays, mon désir d'en être citoyen?
M. Hassan Yussuff: Eh bien, il y a d'autres façons de prouver son attachement...
M. Sarkis Assadourian: Lesquelles?
M. Hassan Yussuff: ...comme le maintien de la résidence et le contact avec la famille. Il se peut que des gens soient à l'extérieur du pays pendant longtemps, mais ils finissent par revenir en visite; leur absence n'est pas continue. Toute la question est de savoir comment vous le définissez.
Une voix: Et que faites-vous des impôts?
M. Hassan Yussuff: Si vous êtes inscrit, mais que vous vous absentez pendant un certain temps, vous devrez évidemment payer des impôts. Il y a des façons de mesurer l'attachement des gens à la société autres que de calculer la durée de leur présence effective au pays. Je dis cela car je pense que le Canada risque de perdre beaucoup d'éléments extrêmement compétents si vous décidez qu'ils ne peuvent obtenir ou conserver leur citoyenneté parce qu'il s'avère qu'ils doivent s'absenter pour des raisons professionnelles.
M. Sarkis Assadourian: Lorsque je suis arrivé, en 1970, il fallait avoir résidé au Canada pendant cinq ans pour obtenir la citoyenneté. En 1975, j'ai présenté une demande et je suis devenu citoyen. Aujourd'hui, ce délai a été ramené de cinq à trois ans; ce n'est plus six, mais trois ans. Voulez-vous le réduire davantage?
M. Hassan Yussuff: Ce que je dis, c'est que la loi doit renfermer des dispositions pour que ce chiffre ne devienne pas arbitraire. Je considère qu'il faut appliquer d'autres critères.
M. Sarkis Assadourian: Que proposez-vous?
M. Hassan Yussuff: Ce pourrait être un critère physique. La personne pourrait garder sa résidence. Elle continuerait de payer des impôts, même si elle ne vit pas en permanence au pays . Il faut trouver un équilibre, sinon vous perdrez beaucoup de gens talentueux et capables d'apporter énormément à notre économie.
M. Sarkis Assadourian: Croyez-vous que la citoyenneté se mérite ou bien qu'il faut l'accorder sans contrepartie?
M. Hassan Yussuff: Je pense qu'elle se mérite, tout comme le statut d'immigrant. On ne vous donne pas simplement le droit d'immigrer au Canada, vous devez gagner ce droit. Vous devez prouver que vous avez les capacités de répondre aux besoins de la demande sur le marché canadien de l'emploi. Elle s'est toujours méritée, n'est-ce pas? Si vous commettez des crimes, vous êtes déporté avant d'acquérir la citoyenneté. J'estime donc qu'il faut la gagner. Elle a toujours représenté un signe de reconnaissance. Si c'était un droit, nous n'aurions jamais entamé cette discussion. Tout ce qu'il faut, c'est obéir aux critères essentiels.
M. Sarkis Assadourian: Merci.
M. John Bryden: Je m'intéresse beaucoup à la situation de ce citoyen déporté vers la Syrie par les États-Unis. La solution serait-elle de...? J'imagine que cette personne avait la double nationalité: syrienne et canadienne. Pour éviter ce type de problème, que pensez-vous d'ajouter au projet de loi une disposition offrant la possibilité à tout candidat à la citoyenneté canadienne de révoquer son autre nationalité pour devenir volontairement et uniquement citoyen canadien?
M. Hassan Yussuff: Si l'idée consiste simplement à vouloir éviter tout problème aux Américains lorsqu'ils traitent nos ressortissants à la frontière ou ailleurs, je ne suis pas sûr que cela réponde à leurs critères. Pour commencer, je ne connais pas leurs critères, alors je ne vois pas comment je pourrais m'y conformer.
Nous devons affirmer notre souveraineté et exiger que les services d'immigration américains respectent les droits de nos concitoyens, à moins qu'ils aient des motifs de croire qu'une personne n'est pas canadienne, auquel cas ils doivent communiquer avec nous. Ils n'ont pas à décider la déportation de cette personne vers un autre pays.
Je sais que des gens décident de prendre la citoyenneté canadienne et de renoncer à leur ancienne nationalité. Ces personnes agissent le plus souvent de leur plein gré. Et même si nous ajoutions cette disposition à la loi, je ne suis pas sûr que cela mettrait fin aux problèmes que connaissent aux frontières les Canadiens d'origine arabe et les Canadiens musulmans.
M. John Bryden: Je crois bien que les États-Unis, même en vertu du droit américain, ne peuvent déporter quiconque vers un pays dont il n'est pas citoyen. Ils ont renvoyé cet homme en Syrie parce qu'ils savaient qu'il avait la nationalité syrienne. Je pense que tout le monde sait que ceux qui ont une double nationalité peuvent être traités comme ressortissants d'un pays ou d'un autre lorsqu'ils ont des problèmes avec les autorités d'un pays tiers.
Je vais formuler ma question différemment. Que pensez-vous d'exiger la nationalité unique? Ce serait faire comme dans le temps. Par le passé, lorsque vous deveniez citoyen d'un nouveau pays, vous deviez automatiquement renoncer à votre citoyenneté d'origine. Qu'en pensez-vous?
 (1245)
M. Hassan Yussuff: Je pense que nous devons être honnêtes, tous autant que nous sommes autour de cette table, envers notre héritage personnel et notre passé. Si la condition est de renoncer à son ancienne nationalité, beaucoup de gens essayerons de protéger leurs arrières. J'ai parlé à des Canadiens... J'ai un frère, beaucoup plus âgé que moi, et chaque fois que je lui parle, il me lance: «je rentre chez moi»—même s'il ne me l'a pas redit depuis quelque temps déjà. Je le regarde et lui rétorque: «De quoi parles-tu?». Il ne retournera jamais dans le pays où il est né, mais il continuera de le dire. Cet attachement est parfois très singulier en raison de l'expérience, de l'histoire et du lieu de naissance de chacun.
Je ne crois pas que nous voulions faire subir ce sort aux nouveaux immigrants que nous encourageons à devenir citoyens ou que nous voulions instaurer une hiérarchie en imposant de telles conditions.
Ce que nous voulons, c'est que ces gens soient attachés à notre pays, qu'ils s'engagent à bâtir notre société et, plus important encore, qu'ils partagent les valeurs canadiennes. Appliquer une recommandation artificielle qui obligerait les gens à renoncer à leur nationalité d'origine pour obtenir la citoyenneté canadienne pourrait entraîner une diminution du nombre de candidats à la citoyenneté, alors que nous visons précisément le contraire.
Encore une fois, je dis cela par égard à tous ceux qui sont autour de cette table, car je sais que les gens conservent des liens avec leur pays d'origine pour toutes sortes de raisons, parfois familiales, parfois historiques ou culturelles ou tout simplement parce qu'ils veulent savoir qu'il existe une terre où ils pourront retourner un jour s'ils en ont envie; ce qu'ils ne font pratiquement jamais d'ailleurs.
Selon moi, imposer une telle condition aurait davantage pour effet de décourager que d'inciter de nouveaux immigrants à devenir Canadiens.
Le président: Heureusement, le Canada n'est pas l'un de ces pays qui exige à ses futurs citoyens de renoncer à leur ancienne nationalité. De moins en moins de pays l'exigent, et j'espère que ceux qui le font encore se raviseront—comme les États-Unis, qui demandent aux gens de choisir.
L'article 18 confère au ministre le pouvoir d'annuler la citoyenneté dans un délai de cinq ans en cas de fausse déclaration d'identité ou de présentation de faux documents, entre autres. Je pense que l'une de vos recommandations consiste à modifier le projet de loi pour que les décisions relatives à l'annulation de la citoyenneté soient prises par une instance décisionnelle indépendante, avec le droit à une audience complète.
Qu'entendez-vous par instance décisionnelle indépendante, voulez-vous parler du système judiciaire, des juges? Par ailleurs, j'aimerais que vous nous expliquiez plus en détail pourquoi cela vous préoccupe. Est-ce parce que le ministre est le seul habilité à prendre une telle décision, est-ce à cause de la période de cinq ans ou bien est-ce la nature de l'accusation qui vous pose problème? Il y a trois composantes différentes à cet article. Laquelle vous dérange, la première, la seconde ou les trois?
M. Hassan Yussuff: Je pense que c'est le fait que le système ne se fonde pas sur l'application régulière de la loi. Pour annuler la citoyenneté de quelqu'un, il faut avoir des preuves solides et je pense que c'est au système judiciaire de décider. Quoi qu'il en soit, si les preuves sont flagrantes et convaincantes pour les tribunaux, nous aurons atteint nos objectifs.
Le président: Que pensez-vous de la période de cinq ans? Certains prétendent que c'est trop long, d'autres que c'est trop court.
M. Hassan Yussuff: Je pense que lorsque nous décidons d'accorder la citoyenneté à quelqu'un, c'est parce qu'il satisfait à toute une série de critères. C'est ce qui justifie en soi toute l'importance d'accorder la citoyenneté, et je pense que lorsque tous les critères ont été respectés, il ne devrait pas y avoir de disposition permettant de retirer la citoyenneté à quelqu'un, à moins de preuves irréfutables, auquel cas il faudrait saisir les tribunaux.
Le président: Vous êtes donc favorable à la révocation de la citoyenneté s'il existe des preuves manifestes qu'en intentant une action devant un tribunal il est possible de prouver que la citoyenneté a été obtenue d'une manière frauduleuse. Est-ce qu'il devrait en être ainsi à jamais? Qu'arrive-t-il si dans 20 ans nous découvrons qu'une personne, en raison de sa situation, a menti sur son formulaire de demande—par exemple, au lieu de s'être absenté pendant une semaine, elle l'a fait pendant cinq semaines et n'aurait pas respecté les 1 095 jours? Quelqu'un pourrait très bien alléguer n'importe quoi et vous perdriez votre citoyenneté, qui j'en conviens est probablement la chose la plus importante que l'on peut obtenir d'un pays. Et vous devez la gagner.
Par conséquent en est-il ainsi à jamais et après la période de cinq ans, vous ne pouvez le faire en vertu de cette disposition, il vous faudrait peut-être le faire en vertu d'autre chose? J'essaie simplement de vous faire préciser votre pensée, si c'est possible.
 (1250)
M. Hassan Yussuff: Eh bien, je crois que c'est important. Nous ne voulons pas créer des apatrides dans une société. En effet, si ces personnes ne sont pas citoyens de ce pays, de quel pays le sont-ils? Cela dépend, je le répète, de la période. Je crois que a disposition prévoyant trois ans pour obtenir la citoyenneté devrait être un critère. Tout ce qui déborde de ce cadre, peu importe ce que nous disons ici, est susceptible d'appel devant les tribunaux de toute manière.
Je crois que nous devrions reconnaître que si nous répudions la citoyenneté d'une personne, cela donne lieu à des anomalies. Par exemple, vous pourriez avoir une personne qui réside au Canada depuis son enfance. Si nous découvrons que quelque chose s'est passé, la renverrions-nous dans son pays d'origine? Cette personne n'a pas grandi là-bas, elle n'a pas les valeurs de ce pays.
Je crois qu'il revient au Canada de juger la personne et de la traiter en conséquence, mais il faut fixer un délai d'exécution. Je comprends les cinq années. Nous ne disons pas à la personne qu'elle ne peut l'avoir mais que les preuves doivent être soumises à des tribunaux. Vous pourriez maintenir cela comme une limite et, après cela, je crois vous traiteriez les gens en conséquence et intenteriez des poursuites en conséquence.
Le président: Comme nous le faisons habituellement, nous remercions le Congrès canadien du travail de son excellent exposé.
Vous nous avez dit qu'un exposé plus détaillé nous parviendra dans deux semaines; nous vous en remercions. Continuez votre bon travail.
Chers collègues, j'aimerais souhaiter la bienvenue à Rick Borotsik, pas en tant que membre permanent du comité, je l'espère. Blague à part, j'ai travaillé avec Rick auparavant; c'est un grand parlementaire.
Ça fait plaisir de vous avoir ici, Rick.
Chers collègues, comme vous le savez, conformément au paragraphe 39(5) du Règlement, nous avons reçu un ordre de la Chambre concernant la question 72 de notre collègue Inky Mark qui, nous l'espérons, va très bien et pourra se joindre à nous bientôt. Je sais qu'une question a été posée au secrétaire parlementaire l'autre jour au sujet de ce qui s'est passé relativement à cette question et dont la réponse devait être donnée à M. Mark dans les 45 jours.
Je me demande, Rick, si je peux demander au secrétaire parlementaire de répondre. On nous dit que la réponse sera déposée à la Chambre des communes demain, mais il existe une explication relativement au dépassement du délai de 45 jours.
Sarkis.
M. Sarkis Assadourian: Monsieur le président, étant donné que c'est ma première expérience en tant que secrétaire parlementaire, je veux m'assurer que le travail est bien fait.
Premièrement, la question a été posée le 21 novembre et la réponse devait être donnée le 5 janvier. Comme vous le savez, le 5 janvier, la Chambre ne siégeait pas. Le ministre était ici lundi, après un voyage d'une semaine en Algérie et en Égypte. Il a signé le document lundi. Le document a été traduit et tout est prêt pour le dépôt demain à la Chambre. La réponse sera transmise au BCP pour y mettre la dernière main. Tout a été fait.
Mais comme je l'ai dit, le ministre était en déplacement. Le retard n'était pas intentionnel. C'est la première fois, je crois, que l'échéancier de 45 jours n'est pas respecté. La prochaine fois que cela arrivera, faites-le moi savoir le 44e jour pour que nous nous assurions que tout se fasse le 45e jour.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Le président: Merci, Sarkis.
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le président, je vous remercie de l'introduction et de votre discours de bienvenue. Je peux vous dire que je n'assisterai pas régulièrement aux séances de votre comité. M. Mark prend très au sérieux ses responsabilités au sein de ce comité et accomplit, j'en suis certain, un travail extraordinaire.
En ce qui concerne la question inscrite au Feuilleton, je sais qu'il tenait absolument à ce qu'on y réponde. Je vous remercie de la réponse que vous m'avez donnée et je vais la lui transmettre.
Soit dit en passant, à titre d'information seulement, j'ai essayé de joindre Inky aujourd'hui. Il est en convalescence à la maison. Il sera probablement absent encore six semaines de la Chambre. Je sais que chacun d'entre vous lui souhaite la meilleure des chances et je le lui dirai.
Il ne s'agit que d'une des questions inscrites au Feuilleton sur laquelle je me suis interrogé; en fait, il y en a 10 autres. Je suis convaincu que le secrétaire parlementaire du leader de la Chambre me donnera également des nouvelles en ce qui concerne les autres.
Je vous remercie, en votre qualité de nouveau secrétaire parlementaire. Je vous félicite, tout d'abord—je devrais peut-être vous offrir mes condoléances, je ne sais pas trop. J'espère simplement que les autres secrétaires parlementaires réagissent à la même vitesse que vous l'avez fait, monsieur Assadourian.
Je vous remercie ainsi que le président.
Le président: Comme vous le savez, le comité a un certain nombre de pouvoirs. J'ai siégé à vos côtés au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, au sujet de la modernisation des comités et une étude d'ensemble, et il se peut très bien qu'il s'agisse d'une circonstance exceptionnelle.
Il me semble que lorsque ces questions sont posées et que soudainement le Parlement ne siège pas, il ne soit pas facile d'obtenir les réponses avant l'échéance des 45 jours. Je crois comprendre que vous êtes satisfait de la réponse du secrétaire parlementaire et que le comité n'a pas besoin de faire autre chose.
 (1255)
M. Rick Borotsik: Non, je suis satisfait. Je vais laisser M. Mark s'occuper de cela. En fait, s'il n'est pas satisfait de la réponse, il peut de toute évidence déposer une nouvelle motion au comité, demander la comparution de témoins et recourir à tous les autres moyens dont il dispose. Mais pour l'instant, monsieur le président, je vous remercie. Je serai plus qu'heureux de faire rapport à M. Mark.
Le président: Merci beaucoup.
M. Sarkis Assadourian: J'aimerais profiter de l'occasion pour vous demander de transmettre en mon nom et en celui du ministre tous mes voeux à M. Mark parce qu'il faut qu'il nous revienne en bonne santé.
M. Rick Borotsik: Eh bien, je le souhaite encore plus que vous. C'est un député très précieux à la Chambre et je suis convaincu qu'il l'est aussi pour chaque comité sur lequel je m'assure de le faire siéger. En tant que whip, je suis tenu de le remplacer maintenant. Je n'aime pas trop le faire, de sorte qu'il reviendra tôt ou tard, je vous l'assure.
Des voix: Oh, oh!
M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
Nous nous reverrons mardi et jeudi. Jeudi, comme nous recevrons le ministre je suis convaincu que vous voudrez vous joindre à nous, Rick, pour ce grand événement.
M. Rick Borotsik: Le ministre sera ici?
Le président: Oui, jeudi prochain.
M. Rick Borotsik: Nous enverrons quelqu'un, monsieur le président.
Le président: Très bien. Merci beaucoup.
La séance est levée.