CIMM Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 6 novembre 2003
¿ | 0905 |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ)) |
M. Jean-Guy Fleury (président, Commission de l'immigration et du statut de réfugié) |
¿ | 0910 |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Alliance canadienne) |
M. Jean-Guy Fleury |
¿ | 0915 |
M. Art Hanger |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Krista Daley (avocate générale, Commission de l'immigration et du statut de réfugié) |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.) |
¿ | 0920 |
M. Jean-Guy Fleury |
¿ | 0925 |
Mme Krista Daley |
Mme Raymonde Folco |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Raymonde Folco |
¿ | 0930 |
M. Jean-Guy Fleury |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne) |
M. Jean-Guy Fleury |
M. Grant McNally |
Mme Krista Daley |
M. Grant McNally |
Mme Krista Daley |
M. Grant McNally |
M. Jean-Guy Fleury |
M. Grant McNally |
Mme Krista Daley |
¿ | 0935 |
M. Grant McNally |
Mme Krista Daley |
M. Grant McNally |
Mme Krista Daley |
M. Grant McNally |
Mme Krista Daley |
M. Grant McNally |
M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.) |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Marilyn Stuart-Major (secrétaire générale, Commission de l'immigration et du statut de réfugié) |
M. Yvon Charbonneau |
Mme Marilyn Stuart-Major |
¿ | 0940 |
M. Jean-Guy Fleury |
M. Yvon Charbonneau |
M. Jean-Guy Fleury |
M. Yvon Charbonneau |
¿ | 0945 |
M. Jean-Guy Fleury |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Jean-Guy Fleury |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Krista Daley |
¿ | 0950 |
M. Jean-Guy Fleury |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Jean-Guy Fleury |
¿ | 0955 |
Mme Krista Daley |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.) |
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.) |
À | 1000 |
M. Massimo Pacetti |
M. Jean-Guy Fleury |
M. Massimo Pacetti |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Krista Daley |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Art Hanger |
M. Jean-Guy Fleury |
M. Art Hanger |
M. Jean-Guy Fleury |
M. Art Hanger |
M. Jean-Guy Fleury |
M. Art Hanger |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
À | 1005 |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
M. Jean-Guy Fleury |
M. Art Hanger |
M. Jean-Guy Fleury |
M. Art Hanger |
M. Jean-Guy Fleury |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
À | 1010 |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Sarkis Assadourian |
M. Jean-Guy Fleury |
À | 1015 |
Mme Krista Daley |
M. Sarkis Assadourian |
Mme Krista Daley |
M. Sarkis Assadourian |
Mme Krista Daley |
M. Sarkis Assadourian |
Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.) |
À | 1020 |
M. Jean-Guy Fleury |
À | 1025 |
Mme Krista Daley |
Mme Sophia Leung |
Mme Krista Daley |
Mme Sophia Leung |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Art Hanger |
M. Jean-Guy Fleury |
M. Art Hanger |
À | 1030 |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
Mme Raymonde Folco |
À | 1035 |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Raymonde Folco |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Krista Daley |
Mme Raymonde Folco |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Raymonde Folco |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Raymonde Folco |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Krista Daley |
À | 1040 |
Mme Raymonde Folco |
Mme Krista Daley |
Mme Raymonde Folco |
Mme Krista Daley |
Mme Raymonde Folco |
Mme Krista Daley |
Mme Raymonde Folco |
Mme Krista Daley |
Mme Raymonde Folco |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Sarkis Assadourian |
Mme Krista Daley |
M. Sarkis Assadourian |
Mme Krista Daley |
M. Sarkis Assadourian |
Mme Krista Daley |
M. Sarkis Assadourian |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Krista Daley |
M. Sarkis Assadourian |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Art Hanger |
À | 1045 |
M. Jean-Guy Fleury |
Mme Krista Daley |
M. Art Hanger |
Mme Krista Daley |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
M. Yvon Charbonneau |
À | 1050 |
M. Jean-Guy Fleury |
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral) |
CANADA
Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 6 novembre 2003
[Enregistrement électronique]
¿ (0905)
[Français]
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ)): Bonjour tout le monde. Bonjour, monsieur Fleury, madame Daley et madame Stewart-Major. Je présume que vous travaillez avec M. Fleury.
D'entrée de jeu, permettez-moi, monsieur Fleury, de vous féliciter, au nom de mes collègues du comité et en mon nom propre, de votre nomination. Après avoir lu votre biographie, on peut dire, je crois, que vous êtes bien préparé à faire face à des responsabilités qui, sans contredit, ne sont ni simples ni faciles. En outre, ces dernières demandent, en plus d'un bon jugement, une grande rigueur et une bonne écoute. Je vous souhaite toute la chance possible. La séance d'aujourd'hui nous permettra de vous poser plusieurs questions.
Je vous signale d'office que je porterai deux chapeaux. En fait, je suis gémeau, ce qui me prédispose à cela. Je vais tenter de présider du mieux possible, tout en posant des questions au nom du Bloc québécois.
Alors, bonjour et bienvenue. Nous attendons votre présentation, monsieur Fleury.
[Traduction]
M. Jean-Guy Fleury (président, Commission de l'immigration et du statut de réfugié): Merci.
Madame la présidente, membres du comité, merci de nous avoir invités ici aujourd'hui pour vous parler du Rapport sur le rendement de la Commission.
J'aimerais vous présenter Marilyn Stuart-Major, secrétaire générale de la Commission, et Krista Daley, avocate générale. Toutes deux m'aideront à répondre à vos questions aujourd'hui.
[Français]
Ma présence ici aujourd'hui arrive à point puisque le 27 novembre marque le premier anniversaire de mon entrée en fonction à la tête de la commission.
J'aimerais profiter de cette occasion pour vous faire part de l'évolution de la situation à la commission depuis le 31 mars 2003, de mes impressions à l'égard de la dernière année et de l'orientation que j'aimerais donner à cette grande institution.
Je crois que vous avez reçu la version écrite de mon allocution, qui donne des renseignements plus détaillés sur la commission. Pour ne pas perdre trop de temps, je ne répéterai pas ces renseignements. Si vous le voulez bien, je vais d'abord vous parler des préoccupations et des priorités de la commission.
Lors de mon entrée en fonction comme président, la section de la protection des réfugiés était déjà aux prises avec un arriéré record de plus de 52 000 demandes d'asile. L'arriéré n'était pas le résultat d'un mauvais rendement, mais plutôt attribuable à un ensemble de facteurs intérieurs et internationaux.
Depuis 1999, le nombre de nouvelles demandes d'asile reçues chaque année a connu une forte hausse. En 2001 et 2002, les 40 000 nouvelles demandes d'asile reçues représentaient un sommet jamais atteint depuis la mise sur pied de la commission. C'était un nombre presque deux fois plus élevé que le nombre de demandes reçues quatre ans plus tôt.
En outre, le niveau de financement de la commission a été établi dans les années 1990, alors que le nombre de demandeurs d'asile se situait régulièrement entre 25 000 et 27 000. La commission a mis en oeuvre des mesures visant à réduire l'arriéré. Toutefois, malgré les efforts déployés pour améliorer l'efficience, l'arriéré a continué de croître et les délais de traitement se sont allongés.
Comme nos deux autres tribunaux étaient pour leur part aux prises avec de lourdes charges de travail, nous avions peu de latitude pour réaffecter les ressources à l'interne.
[Traduction]
Quand je suis entré en fonction à titre de président, l'arriéré de la Section de la protection des réfugiés était manifestement au premier plan des préoccupations du gouvernement, des Canadiens et de nos intervenants. Il était alors évident à mes yeux que nous devions trouver des moyens d'améliorer ensemble la situation. C'est toujours ma priorité aujourd'hui.
Le tribunal est une entité dynamique—bon nombre de personnes disent que ce qui importe est le nombre de décisions que rend la Commission. C'est certes vrai, mais la « manière » de rendre des décisions est tout aussi vraie. En ce sens, la CISR s'occupe également de l'administration de la justice au Canada. Les tribunaux administratifs ont été constitués pour rendre justice plus simplement et plus rapidement que les tribunaux judiciaires.
Les tribunaux administratifs comme la Commission doivent rendre leurs décisions en toute indépendance, mais doivent rendre compte de leur rendement au gouvernement; le dépôt de notre Rapport sur le rendement et ma comparution devant le comité aujourd'hui le démontrent.
L'énoncé de vision de la Commission indique que les trois tribunaux de la CISR viseront l'excellence dans toutes leurs activités et traiteront chacun simplement, rapidement et équitablement. En faisant preuve d'innovation, ils formeront ainsi un tribunal administratif d'avant-garde et contribueront, avec leurs partenaires, à tracer l'avenir du système canadien d'immigration et de protection des réfugiés.
Malgré toutes les améliorations que nous avons apportées au cours des années à la Commission, nous ne mettions pas pleinement à profit notre énoncé de vision et devions adopter de nouvelles mesures pour régler un plus grand nombre de demandes d'asile sans compromettre l'équité du processus. Il s'agit d'un débat constant. J'étais d'avis qu'il nous fallait exploiter plus pleinement la marge de manoeuvre accordée aux tribunaux administratifs. Il nous fallait devenir un tribunal plus dynamique, capable de réagir rapidement aux nouveaux défis et aux nouvelles réalités.
[Français]
Peu après mon entrée en fonction, j'ai décidé que les trois tribunaux de la commission devraient élaborer des plans d'action en vue d'éliminer le chevauchement des tâches et d'améliorer l'efficacité et la qualité du processus décisionnel. Mes remarques, aujourd'hui, porteront plus spécifiquement sur le plan d'action de la section de la protection des réfugiés.
La première étape a été de revoir entièrement nos activités pour trouver des moyens de simplifier et de normaliser nos méthodes de travail. Le résultat de cet exercice, le plan d'action, n'est pas simplement une série d'initiatives. Il s'agit plutôt d'un projet de trois ans, soit une transformation profonde à long terme de notre façon de faire qui constitue le renouvellement de notre engagement envers notre énoncé initial de mission et de vision.
[Traduction]
Autrement dit, nous revenons à l'essentiel.
[Français]
Il ne se limite pas au processus, il inclut une dimension humaine en tout temps, chaque jour.
Cela étant dit, le plan d'action comporte plus d'une douzaine d'initiatives précises qui sont regroupées sous les trois thèmes suivants: normalisation et simplification des processus, meilleure orientation donnée par la direction aux décideurs, amélioration de l'efficacité des audiences.
Divers éléments du plan d'action ont été mis en oeuvre au cours des six derniers mois. Nous avons déjà obtenu de très bons résultats. Les nouvelles mesures alliées au financement temporaire nous ont largement aidés à accroître le nombre de cas finalisés d'environ 30 p. 100 au cours de la dernière année.
Je suis fier de ce que nous avons accompli en si peu de temps. Le défi sera de maintenir ce niveau. Nous prévoyons maintenant qu'à la fin de l'exercice 2003-2004, l'arriéré sera passé de plus de 52 000 demandes d'asile à quelque 41 000. Nous parlons ici d'environ 11 000 personnes de moins en attente de décision. C'est tout un exploit.
¿ (0910)
[Traduction]
Lorsque mon prédécesseur s'est présenté devant ce comité la dernière fois, vous lui avez demandé de préciser le niveau de ressources qu'il fallait à la Commission pour éliminer l'arriéré. La CISR a reçu un financement temporaire en 2002-2003 et en 2003-2004. Malheureusement, ce financement de l'ordre d'environ 16 millions de dollars par année cessera le 1er avril 2004. Nous discutons actuellement de cette situation avec le Secrétariat du Conseil du Trésor car nous aurons besoin de ce financement au cours des trois prochaines années pour être en mesure de poursuivre les efforts visant l'élimination de l'arriéré et de remédier aux insuffisances de notre infrastructure.
Notre analyse de rentabilisation montre clairement que la réduction rapide de notre arriéré entraînera des économies importantes pour les contribuables canadiens et permettra de rendre justice à ceux qui comparaissent devant nous. En termes simples, l'arriéré aura été éliminé et le délai de traitement s'établira finalement à l'objectif de six mois. Si nous ne continuons pas de recevoir le financement nécessaire, nous prévoyons que l'arriéré continuera de croître progressivement au rythme d'environ 4 000 demandes d'asile par année et que, même si cela ne relève pas de notre champ de compétence, les coûts sociaux augmenteront également.
Les ressources limitées allouées à la Commission ont été utilisées à bon escient et nous commençons à en récolter les fruits. L'arriéré diminue régulièrement tous les mois grâce aux gains d'efficacité découlant du plan d'action et du financement temporaire. Nous avons maintenant en place les éléments nécessaires pour nous attaquer à la charge de travail accrue, mais nous ne pouvons continuer sur notre lancée sans le maintien du financement.
En conclusion, je souligne que l'apport de la Commission est essentiel au bon fonctionnement et à la sécurité de l'ensemble du processus canadien d'immigration et de protection des réfugiés. Notre mission se résume à une chose : rendre des décisions simplement, rapidement et équitablement. Je veillerai à ce que cet objectif demeure la priorité afin que le système de justice administratif de la Commission soit efficace, et qu'il serve à la fois les intérêts des personnes qui comparaissent devant la CISR et ceux des Canadiens.
Je vous remercie de m'avoir donné la possibilité de vous parler aujourd'hui. Mes collègues et moi répondrons avec plaisir à vos questions.
Merci.
[Français]
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Merci, monsieur Fleury. Je suis sûre qu'un certain nombre de questions vous seront posées. Vos réponses et nos questions susciteront sans doute autant d'intérêt les unes que les autres.
Monsieur Hanger.
[Traduction]
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Alliance canadienne): J'ai en effet quelques questions. Merci, madame la présidente.
Monsieur Fleury et mesdames, je sais qu'il y a un certain temps que nous n'avons pas été en contact, du moins pour ma part. Me revoici au Comité de l'immigration et j'ai toujours trouvé que c'était l'un des plus fascinants, sachant que l'immigration est terriblement importante pour notre pays. Non seulement cela pose aussi des problèmes—et je vois que vous essayez d'en régler certains—mais il y a également des tas de gens qui surveillent ce qui se passe dans ce ministère.
Je suppose que chacun a un avis personnel. Même dans le fin fond de la Saskatchewan. Cela ne veut pas dire que tout le monde vient du fin fond de la Saskatchewan mais bien qu'il y a des tas d'avis différents sur l'immigration.
J'ai toujours été intrigué par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Je vois que les chiffres ont sensiblement augmenté, comme vous l'indiquez dans votre exposé, par rapport aux années 90. Il semble que la grosse poussée se soit produite il y a deux ans. Comment l'expliquez-vous, pourquoi y a-t-il eu soudain une augmentation énorme du nombre de demandes?
M. Jean-Guy Fleury: La même chose s'est produite aux États-Unis et en Europe au cours de cette période. D'ailleurs, proportionnellement, je dirais que cela a été encore plus fort en Europe qu'ici et c'est directement lié à la situation internationale d'alors. Il y a en gros 40 millions de personnes dans le monde en situation de migration. Il y a donc eu une forte poussée en Europe, aux États-Unis et ici à peu près au même moment et presque dans les mêmes proportions.
Nous constatons un léger déclin partout ailleurs, en Angleterre et aux États-Unis.
¿ (0915)
M. Art Hanger: Il y a probablement beaucoup plus à dire à ce sujet. Il y a toute la question de la préparation.
J'ai eu le privilège de participer ici il n'y a pas si longtemps à une conférence sur l'usurpation d'identité. C'est l'activité liée au crime organisé qui se développe le plus vite dans le monde entier. Je sais que c'est un problème auquel doit faire face la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
Des cartes d'adhésion vierges, de la papeterie vierge et des documents de scolarité vierges sont des documents que trouvent souvent les agents d'immigration qui traitent avec les demandeurs de statut. Ces documents sont souvent envoyés à ces demandeurs. Il semble qu'il y ait là quelque chose qui ne fonctionne pas. Il arrive souvent que ces informations ne soient pas communiquées ou présentées à d'autres audiences. On sait qu'il est facile de falsifier ces documents. Pourquoi en va-t-il ainsi?
M. Jean-Guy Fleury: Il y a évidemment un problème international que nous reconnaissons tous. Pour nous, membres de la Commission et décisionnaires, la question de la crédibilité et de l'identité est très importante. C'est même fondamental.
Comme vous le savez, les questions de sécurité sont examinées dès le début par les organismes d'application de la loi avant que les cas ne soient renvoyés. Beaucoup de travail est fait à ce stade-là. Nous disposons aussi des services de la GRC pour vérifier les documents. Nous essayons, dans toute la mesure du possible, de travailler de cette façon.
Je vais demander à Mme Daley de compléter ma réponse.
Mme Krista Daley (avocate générale, Commission de l'immigration et du statut de réfugié): La seule chose que j'aimerais ajouter c'est que la nouvelle loi qui est entrée en vigueur le 28 juin dernier, la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, pour la première fois, en fait, contient une disposition concernant les demandeurs de statut de réfugié devant la Commission. Elle stipule que notre section doit tenir compte de la question de l'identité et que si l'intéressé n'a pas de papiers d'identité, nous devons examiner s'il y a une explication raisonnable au fait qu'ils n'existent pas ou qu'ils ne puissent être présentés au moment voulu.
Nous avons constaté que c'est devenu, du fait de cette nouvelle disposition, un élément intrinsèque de toute audience que nous avons à la Commission.
M. Art Hanger: Il semble qu'il y ait tout de même un maillon qui manque si un tribunal apprend que les documents sont falsifiés ou même que des documents ont été saisis, mais que ce renseignement n'est pas transmis aux autres audiences. On ne se pose même plus la question dans le processus décisionnel. Ce sont des informations qui ne sont pas transmises comme elles le devraient.
Mme Krista Daley: Monsieur Fleury, je devrais peut-être ajouter quelque chose.
M. Jean-Guy Fleury: Certainement.
Mme Krista Daley: Si le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration qui a saisi ces documents a des informations à présenter au tribunal, il ou elle peut le faire et le fait. Je ne sais pas quels sont les pourcentages, mais il est certain que le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration peut communiquer ces informations à la Commission.
M. Art Hanger: Si j'entends parler d'un ou plusieurs cas, à qui dois-je m'adresser pour lui dire que certains éléments ne sont pas présentés devant une commission ou un tribunal?
Mme Krista Daley: Au ministère.
M. Art Hanger: Merci.
[Français]
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Madame Folco.
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Merci, madame la présidente.
Tout d'abord, je voudrais redire bonjour à M. Jean-Guy Fleury, le président, et à toutes les personnes qui sont ici pour représenter la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Je suis une ancienne de cette commission et j'en garde des souvenirs mitigés.
J'aurais des commentaires, mais aussi des questions. Tout d'abord, en ce qui a trait à la question de l'arriéré, à mon avis, monsieur Fleury, le nombre de personnes qui vont demander le statut de réfugié, que ce soit au Canada, en Europe ou aux États-Unis, va continuer à grimper. D'après ce que je vois--et je me suis tenue au courant depuis mon départ de la commission, évidemment--, le phénomène grandissant des mouvements des peuples, qui a toujours existé mais qui n'a peut-être jamais causé les problèmes qu'il cause aujourd'hui, est un phénomène qui nous a touchés un peu, mais qui, à mon avis, va nous toucher beaucoup plus dans les années à venir.
Donc, ce que je souhaiterais, c'est que la commission--et peut-être que vous pourriez faire un commentaire là-dessus--planifie à long terme, c'est-à-dire pour les 20 ou 25 prochaines années, non seulement la possibilité, que je crois irréalisable, de réduire l'arriéré à zéro, mais surtout celle de pouvoir répondre avec célérité au nombre grandissant de revendicateurs qui vont nous arriver à travers le Canada. C'est un commentaire, mais c'est aussi une question.
Sur ce, je me souviens qu'il y a quelques années, j'avais un autre problème, qui vient se présenter à la commission. Ce n'est pas un problème de la commission, mais plutôt du lien entre la commission et le ministère. À partir du moment où un revendicateur a été refusé, il a d'autres possibilités. Il peut aller en appel, il peut demander de ne pas être obligé à rentrer dans son pays à cause des risques qui pourraient se présenter à lui, et il peut aussi demander de rester au pays, c'est-à-dire au Canada, pour des motifs humanitaires.
Ces motifs ont comme résultat un séjour extrêmement prolongé dans le pays, qui ne devrait pas se produire si cette personne-là n'est pas vraiment un réfugié. J'avais justement proposé, il y a quelques années, que les audiences sur la revendication du statut puissent être suivies, au cas où la réponse à la revendication serait négative, d'une audience sur le risque. Elles pourraient être suivies presque immédiatement après par une audience sur les motifs humanitaires. Cela aurait permis un processus continu grâce auquel nous aurions eu un contrôle sur la présence ou la non-présence du revendicateur. Cela nous aurait permis de pouvoir le renvoyer assez rapidement, si jamais la réponse ultime était négative.
Je n'ai eu aucune nouvelle là-dessus et j'aimerais bien entendre votre avis sur une forme de processus continu comme celui que je viens de présenter.
Mon troisième point est peut-être plutôt une minianalyse sur la performance des commissaires. Maintenant, les commissaires travaillent presque toujours seuls. Il y a évidemment de très bons côtés à cela, mais aussi de moins bons côtés. Ce que j'entends, c'est que le temps de préparation des dossiers qui est alloué aux commissaires a été réduit énormément, ce qui fait que les commissaires, souvent, ne prennent connaissance des dossiers qu'une heure ou deux avant d'entrer en salle. D'autre part, ils ont de moins en moins l'aide de l'ACR, comme on dit dans le jargon.
Là encore, j'aimerais bien que vous puissiez réagir à mes commentaires.
¿ (0920)
M. Jean-Guy Fleury: Merci.
Vous avez raison sur la question internationale. J'ai profité de la première année où j'occupais mon poste pour aller visiter, par affaires, cinq pays en huit jours, pendant lesquels j'ai pris le temps de m'asseoir et d'observer comment les entrevues se faisaient. J'ai observé comment les juges procédaient au chapitre des appels. Ils subissent d'énormes pressions. La communauté européenne a des défis énormes à relever--vous avez raison--relativement à la situation internationale.
J'ai constaté, au cours de mes voyages d'affaires dans ces cinq pays, qu'ils ont les mêmes défis que nous à relever quant au processus, au temps et au manque de documentation. Nous sommes confrontés aux mêmes problèmes. Évidemment, les systèmes sont différents puisqu'ils doivent refléter la culture du pays. Cependant, la communauté européenne travaille fort pour trouver des solutions, essentiellement.
Cela dit, vous parliez de notre commission. Vous vouliez savoir comment on peut s'assurer de ne pas être confrontés à une question de ressources chaque année et d'envisager cela à long terme. Je suis, bien sûr, favorable au fait d'envisager cela à long terme. Heureusement, le processus permet de se réajuster à chaque année et d'obtenir d'autres fonds du Conseil du Trésor. Cela est échelonné sur une période d'un an. Notre plan d'action porte sur une période de trois ans. Nous aimerions bien être capables d'avoir des ressources allouées pour une plus longue période. Nous en discutons avec le Conseil du Trésor, mais vous avez raison, chaque fois que nos ressources ont été allouées sur une base d'un an, on n'a pas pu gagner la bataille. En effet, on ne peut pas gagner la bataille pour une période d'un an.
Une fois qu'on a rendu une décision, d'autres facteurs pourraient-ils être pris en considération et pourrait-il y avoir un processus continu au sein de la commission? Je n'y étais pas lorsque le changement législatif a été fait. Mme Daley pourrait peut-être ajouter quelque chose à cet égard, nous dire si cela a été considéré à ce stade ou non. Je sais qu'on a ajouté des motifs relativement à la torture et à d'autres considérations. On considère non seulement la convention, mais aussi d'autres conventions sur la question des réfugiés.
¿ (0925)
[Traduction]
Mme Krista Daley: J'aimerais clarifier le nouveau cadre législatif.
Comme vous l'avez indiqué, avant cette nouvelle loi, la Commission devait simplement juger s'il s'agissait d'un réfugié au sens de la Convention. Une fois notre décision rendue, si elle était négative, il y avait la demande CH et ce que l'on appelait une demande réservée à la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada, qui déclarait essentiellement qu'il y avait un risque pour leur vie.
La nouvelle loi a regroupé certains de ces éléments de décisions pour les confier à la Commission si bien que nous examinons maintenant trois choses différentes. D'une part, le droit au statut de réfugié, le motif traditionnel. Nous examinons le motif de torture, si la personne risque d'être torturée si elle retourne dans son pays. Et le troisième motif est celui que l'on appelle le risque pour la vie, une punition ou un traitement cruel et inhabituel. On a donc en quelque sorte regroupé un peu les choses à la Commission si bien que lorsque nous avons une audience et que nous entendons les arguments concernant le sort qui est réservé à cette personne, nous sommes en mesure d'évaluer la situation.
Toutefois, après nous, il y a toujours la possibilité d'une demande CH, plus une autre division... En fait, ce n'est pas une division de la Commission, c'est ce que nous appelons maintenant au ministère la section de l'examen des risques avant renvoi, qui examine exactement les trois mêmes motifs que nous. C'est donc essentiellement un réexamen des trois motifs que nous avons considérés.
Je pense qu'ainsi le cadre législatif a été un peu simplifié et c'est là un des changements qui a été apporté à la loi.
[Français]
Mme Raymonde Folco: Je voudrais poser une question, madame la présidente.
[Traduction]
Combien de temps s'écoule habituellement entre le moment où la demande de statut de réfugié est refusée et le moment où les motifs d'ordre humanitaire sont rejetés? C'est là le problème. Dans les cas extrêmes, cela peut prendre des années.
M. Jean-Guy Fleury: Nous n'avons pas en fait ce chiffre. Peut-être pourrions-nous poser la question au ministère.
[Français]
Mme Raymonde Folco: Et la troisième question?
¿ (0930)
M. Jean-Guy Fleury: Pour ce qui est de la troisième question, je m'y attendais: je ne vous blâme pas. Vous avez un certain vécu au sein de notre commission.
Je vais tout d'abord en profiter pour vous saluer et pour dire que ce travail, comme vous pouvez peut-être l'attester, est en effet très complexe et très exigeant sur le plan psychologique.
Pour ce qui est du plan d'action, l'objectif est de trois à quatre semaines. À Toronto, présentement, on travaille en équipe. Il s'agit d'une équipe qui intègre les fonctionnaires et le coordonnateur. Or, malgré tout le fardeau de la tâche, on se rapproche de l'objectif de trois semaines.
Le plan d'action fait état de trois ou quatre outils additionnels qu'on veut offrir aux décideurs indépendants. D'abord, il y a les décisions types, qui pourraient donner un lead. Comme vous le savez, en vertu de la loi, le décideur est toujours indépendant. On respecte cela.
Cela dit, il y a des façons de travailler qui peuvent aider. Nous émettons des décisions persuasives. À ce sujet, nous avons des modèles. Récemment, nous avons émis, pour le Costa Rica, les guides jurisprudentiels du président. Ces derniers aident beaucoup les décideurs dans leur travail. C'était un pays pour lequel le taux d'acceptation n'était que de 2 p. 100 quand nous nous sommes lancés dans cette entreprise. Présentement, nous sommes en train de développer des guides destinés aux membres, pour la Colombie.
Tout cela pour vous dire que nous sommes entièrement conscients du fait que, compte tenu de la pression du décideur, de l'occasion d'étudier le dossier et d'obtenir de meilleurs renseignements, l'audition est directement en fonction de la préparation.
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Merci, monsieur Fleury.
Monsieur McNally.
[Traduction]
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente.
Merci de tout ce que vous faites. Je sais que c'est une tâche énorme.
J'aurais quelques questions à vous poser. Existe-t-il un processus qui permet à ceux qui travaillent directement avec les intéressés ou à vous-mêmes d'offrir au ministre des solutions aux problèmes que vous constatez? Existe-t-il un processus officiel, la possibilité de faire des suggestions au ministre?
M. Jean-Guy Fleury: Puis-je répondre? Nous sommes un tribunal administratif indépendant et les gens qui rendent les décisions sont indépendants et doivent l'être. Toutefois, j'ai un directeur général qui travaille avec le ministère en ce qui concerne les problèmes, les problèmes d'échanges d'information, par exemple, d'échanges d'information qui nous appartiennent. Nous discutons des effectifs nécessaires pour des appels. Le ministère intervient quant aux appels concernant l'immigration et nous devons nous assurer que nous avons des effectifs équivalents. Nous devons donc nous tenir au courant et discuter ensemble; sinon, cela ne marche pas.
Il y a donc un dialogue de ce point de vue entre fonctionnaires dans les régions et, dans le contexte national, j'ai une rencontre avec le sous-ministre et ses SMA, sous-ministres adjoints, et mon équipe. Nous venons de recommencer cela. Nous en avions autrefois. Nous nous réunissons tous les trois ou quatre mois environ pour faire le point sur certains des gros problèmes. Et, là encore, nous nous assurons de maintenir notre indépendance mais nous sommes codépendants. Ils nous apportent le travail, nous émettons des décisions fondées sur les causes que nous entendons et nous leur communiquons ces décisions. Il faut collaborer tout en conservant son indépendance.
M. Grant McNally: Je suis heureux d'entendre cela.
J'aimerais vous poser quelques questions sur les chiffres que vous nous avez donnés. Pour les 36 p. 100 qui ont été refusés l'année dernière, qu'est-ce qui leur arrive? Où sont-ils lorsqu'ils sont refusés? Certains d'entre eux sont-ils détenus?
Mme Krista Daley: Je vais vous donner les règles générales. Lorsqu'une demande est rejetée par la CISR, comme on le disait tout à l'heure, il y a trois autres possibilités. Ils peuvent demander un contrôle judiciaire à la Cour fédérale.
M. Grant McNally: Donc ces 36 p. 100, c'est tout le monde. Une fois la demande rejetée, ils peuvent essayer ces autres possibilités. D'accord.
Mme Krista Daley: Je tiens toutefois à préciser que nous ne savons pas ce qui se passe après nous, car cela ne nous regarde plus.
M. Grant McNally: Est-ce que le ministère suit ce qui se passe, alors? Ou est-ce que quelqu'un le suit?
M. Jean-Guy Fleury: Nous informons le ministère de notre décision quant à telle ou telle personne si bien que ce n'est pas que...
M. Grant McNally: La mise en application de votre décision revient alors au ministère. Lorsque votre décision est prise, c'est le ministère qui doit s'en charger.
Vous avez parlé des papiers d'identité, des changements, madame Daley. S'il n'y a pas de papiers d'identité, la nouvelle loi stipule maintenant la façon d'aller se renseigner sur lesdits papiers. Cela veut-il dire que ceux qui n'ont pas de papiers d'identité ou à propos desquels vous vous posez des questions, sont obligatoirement détenus? Qu'est-ce que ça signifie?
Mme Krista Daley: Non, dans le contexte de la Commission, cela signifie deux choses.
Si le ministère s'inquiète de l'identité de l'individu—donc avant que nous soyons saisis de l'affaire—il y a un mécanisme qui lui permet de détenir l'intéressé pour enquête sur son identité. C'est un pouvoir qui revient au ministère. Ensuite, une de nos sections à la Commission, la Section de l'immigration, réexamine régulièrement la situation.
Pour ce qui est du processus de détermination du statut de réfugié, la loi prévoit que si quelqu'un n'a pas les papiers voulus, il nous faut tenir compte des raisons pour lesquelles il ne les a pas et des mesures qu'il a prises pour essayer de les obtenir.
¿ (0935)
M. Grant McNally: Permettez-moi de vous arrêter une seconde. Si j'arrive au Canada et que je n'ai pas les papiers d'identité voulus, rien ne garantit qu'on ne me laissera pas aller en me disant de revenir pour l'étape suivante. Si je me présente et que vous doutez de mes papiers d'identité, et que vous n'êtes pas sûrs, que je vous donne des explications—tout est évidemment très subjectif lorsqu'il s'agit de juger de la véracité de ce que je vous dis—mais je pourrais être libre de m'en aller, me faire dire de revenir ultérieurement pour la prochaine étape du processus.
Mme Krista Daley: La loi prévoit que le ministère décide s'il y a lieu de détenir la personne.
M. Grant McNally: Il n'y a aucune garantie qu'on me mettrait en détention. Je pourrais tout simplement partir et revenir pour...
Mme Krista Daley: Oui, à moins que le ministère...
M. Grant McNally: Si je pose ces questions, c'est que je suis très préoccupé par l'aspect du respect volontaire du système. Évidemment, vous n'êtes pas en mesure d'apporter des changements. C'est à nous, législateurs, de le faire. Souvent, les cas difficiles sont ceux où les demandeurs abusent du système, ce qui non seulement donne mauvaise presse aux réfugiés légitimes, mais également vous crée des difficultés. Il me semble que comme législateurs, nous sommes en mesure de régler ce problème, mais nous avons hésité—du moins le gouvernement a hésité à le faire. Cela me préoccupe, compte tenu de l'importance accrue que l'on accorde aux questions de sécurité, en Amérique du Nord, ces dernières années.
Il n'y a aucune disposition qui prévoit la détention obligatoire, même dans la nouvelle loi, n'est-ce pas?
Mme Krista Daley: Non.
M. Grant McNally: Très bien.
[Français]
M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Madame la présidente, je voudrais joindre ma voix à celle de ceux et celles qui ont adressé leurs bons voeux à M. Fleury et à son équipe pour l'exercice de leur mandat. J'aimerais poser deux questions.
La première concerne les données financières. On constate que votre commission a utilisé 116 millions de dollars en 2002-2003, alors qu'elle était autorisée à en utiliser 137,9 millions. Il y a là une différence substantielle. Par ailleurs, vous dites manquer de ressources pour faire face à vos responsabilités, mais vous affirmez également être en négociation avec le Conseil du Trésor pour obtenir plus d'argent. N'ayant pas dépensé au complet l'argent de l'année passée, n'êtes-vous pas en quelque sorte en position de faiblesse?
Ensuite, vous avez fait allusion au processus de nomination des décideurs. Il semble qu'on n'aurait pas comblé le nombre prévu de postes de décideurs. Pouvez-vous émettre des commentaires à ce sujet? Il s'agit là d'un problème passablement important. Vous demandez de l'argent alors que vous en avez en surplus.
M. Jean-Guy Fleury: Je vais demander à Mme Stuart-Major, qui est secrétaire générale, de répondre à la question portant sur l'écart financier. En ce qui a trait aux membres de la commission, je vais émettre mes commentaires.
[Traduction]
Mme Marilyn Stuart-Major (secrétaire générale, Commission de l'immigration et du statut de réfugié): Comme l'indique le rapport sur le rendement du ministère, 137,9 millions de dollars ont été autorisés, dont une partie dans le budget supplémentaire au cours de l'année. Nous avons reçu 5 millions de dollars pour le volume de travail et 3,8 millions de dollars au titre des conventions collectives. Cette somme inclut un million de dollars pour mettre en oeuvre notre nouveau système intégré de gestion des cas.
Nous n'avons pas dépensé tout l'argent au cours de l'année parce que, comme on peut le lire dans le rapport, il y a eu moins de décideurs que prévu à la Commission cette année-là.
Un autre montant de 18,4 millions de dollars pour la traduction des décisions n'a pas été dépensé. Cette somme est réservée et découle d'une décision du tribunal dans l'affaire Devinat.
Pour les années à venir, le financement temporarisé disparaîtra de notre budget comme l'a indiqué M. Fleury dans son exposé. Nous sommes en pourparlers avec le Conseil du Trésor afin de nous assurer que ces sommes demeurent au budget pour trois ans encore. Si c'était le cas, nous pensons pouvoir atteindre un équilibre d'ici 2007.
[Français]
M. Yvon Charbonneau: À la condition que vous le dépensiez.
[Traduction]
Mme Marilyn Stuart-Major: Oui, oui, oui. Je peux vous dire qu'au cours de l'examen en cours d'année, lorsque nous examinons notre budget, nous dépensons certainement l'argent. Les décideurs sont en place, le personnel a été embauché. Et certainement, nous pensons que l'année sera très serrée. Je pense qu'il y a très peu d'argent qui ne sera pas utilisé cette année.
¿ (0940)
[Français]
M. Jean-Guy Fleury: En ce qui concerne la question des commissaires, je vais mentionner des faits qui se sont passés avec mon prédécesseur, qui tentait, dans la mesure du possible, de les obtenir plus vite. Il y a deux facteurs qui jouent.
Premièrement, le fardeau de la tâche était à peu près équivalent à Toronto et à Montréal pendant des années. Maintenant, Toronto a 68 p. 100 du fardeau de la tâche. Alors, c'est à Toronto où on avait besoin d'un changement assez radical.
Deuxièmement, en ce qui concerne la question du nombre de décideurs, avant qu'un décideur soit en place, il y a une formation de quatre semaines à temps plein; il y a une formation du genre mentoring. Le décideur travaille sur un panel. Alors, on peut dire qu'un décideur est vraiment autonome après six ou sept mois, parfois plus rapidement. Alors, compte tenu du temps qu'il a fallu pour obtenir le feu vert et le nombre nécessaire, on n'a pas tout dépensé l'argent pour les décideurs.
M. Yvon Charbonneau: J'aurais une autre question, madame la présidente, au sujet d'une catégorie particulière de réfugiés dont on entend parler régulièrement dans les journaux, soit les réfugiés d'origine palestinienne. Je vois dans vos notes, à la page 6, dans le cadre de votre plan d'action--pour lequel je veux vous féliciter--, qu'il y a plusieurs initiatives dont une série d'initiatives sous le titre « meilleure orientation donnée par la direction aux décideurs ».
Je voudrais savoir si, à l'égard de cette catégorie particulière de réfugiés que constituent des Palestiniens, vous avez fait un effort sérieux pour éclairer vos décideurs au sujet de la situation réelle que vivent ces gens, le milieu où ils ont vécu et les difficultés particulières de ce contexte. Je pourrais vous donner des dossiers avec des noms, mais je sais que vous ne pourriez pas en discuter publiquement. Donc, il est inutile de donner des noms ici, mais j'ai des notes qui montrent qu'il y a des décisions complètement disparates qui ont été prises, d'un commissaire à un autre, face à des situations absolument semblables et pour des gens qui sont originaires du même camp, pour des membres d'une même famille, des gens qui n'ont pas d'autres relations que celles qu'ils ont expliquées devant les commissaires et auxquels l'un dit oui et l'autre dit non. Ça n'a pas de sens pour ces gens-là.
Il me semble que la situation est difficile et complexe. Tous les commissaires n'ont pas nécessairement le même point de vue général sur les questions politiques sous-jacentes à ces situations; on peut comprendre cela. Mais je crois qu'il faudrait un éclairage et un encadrement bien particuliers. Vous avez parlé de guides pour le Costa Rica et pour la Colombie.
Est-ce que vous avez préparé des notes semblables pour faire en sorte que les décisions soient plus cohérentes face aux réfugiés palestiniens qui, eux, n'ont pas de patrie de retour? Il n'y a pas de Costa Rica en arrière ni de Colombie, il n'y a que des camps de réfugiés, point.
M. Jean-Guy Fleury: La question de la cohérence dans les décisions est certainement un défi que nous examinons de près. Vous avez raison de parler des guides. J'ai mentionné tout à l'heure qu'il y avait des décisions persuasives pour aider les décideurs afin qu'il y ait une certaine cohérence. Il reste tout de même qu'ils sont indépendants, qu'ils jugent en fonction du mérite et de l'interprétation qu'ils donnent à la preuve qui est devant eux.
Cela dit, si vous me demandez si nous avons pris le temps récemment de voir s'il y avait un besoin pour un guide dans cette situation-là, je vous dirai que la réflexion ne s'est pas faite jusqu'à présent.
M. Yvon Charbonneau: En conclusion, je souhaite que vous le fassiez parce que c'est un besoin criant; la situation est portée à l'attention publique assez régulièrement. Encore une fois, ces gens-là n'ont pas de patrie de retour, pour le moment. Ils sont dans des camps dans différents pays, mais ce n'est pas un home pour eux, c'est un camp de réfugiés, une situation qui dure depuis des dizaines d'années.
Il faut voir aussi les moyens de préparation des dossiers que peuvent avoir certaines catégories de gens par rapport à d'autres. C'est sûr que la qualité des dossiers, techniquement et juridiquement parlant, peut parfois entraîner certaines difficultés, mais il faut être capable d'aller au-delà de cela, selon moi, et examiner la situation vraiment dans son ensemble.
Pour ma part, je vous inviterais vraiment à préparer un guide, des notes, de manière à ce que vos commissaires soient mieux éclairés sur cette question et qu'ils aient devant eux l'ensemble de la situation que vivent ces gens. Ce ne sont pas des cas ordinaires ni habituels, ce sont des cas spéciaux.
¿ (0945)
M. Jean-Guy Fleury: Me permettez-vous d'ajouter quelque chose?
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Je vous en donne le droit. J'aime ça, moi, vous autoriser à me poser des questions. Ça marche?
M. Jean-Guy Fleury: Évidemment, on examine toutes les façons d'assurer une certaine harmonisation. On a un réseau géographique par pays et par zone, où les gens de Toronto, de Montréal ou de n'importe où au pays se parlent des situations qu'ils ont vécues. On a un département de recherche qui est très bien coté et qui nous permet d'examiner les questions.
Je prends note de votre préoccupation, compte tenu de nos opérations.
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Pas tout à fait à mi-chemin de votre comparution, je me permets de poser des questions. La première concerne la section d'appel des réfugiés, qui a été inscrite dans la loi et qui a permis que cette nouvelle loi soit un peu reconnue comme une bonne loi par la majorité des intervenants. Un des éléments était justement la section d'appel des réfugiés.
À notre grande surprise, quand la loi est entrée en vigueur, le ministre a annoncé que cette section était suspendue. Lorsqu'on lui a demandé pourquoi elle était suspendue, on nous a dit qu'il fallait absolument réduire l'arriéré. Réduire l'arriéré en mettant de côté un droit fondamental de tout citoyen au Canada, c'est-à-dire le droit d'appel--même nos pires criminels ont un droit d'appel--, nous apparaissait, nous de l'opposition, comme un certain déséquilibre. Le fait qu'un seul juge entende les demandeurs nous posait aussi un problème. Là encore, on disait que c'était afin de réduire l'arriéré.
Suite à la question et aux commentaires de M. Charbonneau concernant les Palestiniens, imaginons--j'ai beaucoup d'imagination--qu'il y a 100 demandeurs de statut palestiniens. Je suppose que s'il y a cinq juges qui ont reçu des demandeurs palestiniens, vous, en tant que commissaire, êtes en mesure de savoir comment se répartissent les Palestiniens reconnus comme réfugiés et ceux non reconnus. Il est possible qu'un juge soit beaucoup plus sévère, plus exigeant ou moins attentif. Nous sommes tous des humains, cela peut nous arriver.
Est-ce que ce sont des données dont vous disposez? Si vous n'en disposez pas, comment cela se fait-il? Dans ce cas, j'imagine que ce sont donc des informations qui ne sont pas publiques. C'est ma première question.
M. Jean-Guy Fleury: Pour répondre à la première question concernant l'appel, dès qu'il y a une décision du gouvernement d'agir, on est prêts à mettre l'appel en oeuvre, évidemment. On considère que cela prendrait peut-être un an pour le recrutement, la sélection, la norme professionnelle et ainsi de suite. On a déjà fait une recherche de base parce qu'on était prêts, dans le cheminement de la loi, à commencer le processus. C'est aussi une question de financement, et on a déjà commencé à faire des estimations. On travaille fort sur l'arriéré. Comme je le mentionnais, on tente, dans la mesure du possible, d'augmenter la qualité des décisions.
Je vais demander à Mme Daley de parler de la stratégie qu'on tente sur le plan légal et j'essaierai de répondre à la question concernant l'information recueillie par rapport aux 100 cas dont vous parliez.
[Traduction]
Mme Krista Daley: En ce qui concerne diverses initiatives, essentiellement, nous en avons six qui font partie du plan d'action et qui visent à régler certains problèmes d'uniformité.
Les directives du président représentent un nouveau pouvoir créé en 1993 qui a été confirmé dans la nouvelle loi. Il en est de même en ce qui concerne le guide jurisprudentiel. La prise de décisions collégiale est un autre nouveau pouvoir. Il y a aussi l'utilisation de cas types, une version améliorée du concept voulant qu'un décideur qui doit trancher des cas semblables peut discuter des questions juridiques et de politique qui en découlent. Et enfin, le cas échéant, nous pouvons demander à la Cour fédérale d'intervenir pour lui faire valoir nos opinions en ce qui concerne ces questions.
¿ (0950)
[Français]
M. Jean-Guy Fleury: L'exemple des 100 cas était approprié. Il est certain qu'on étudie l'ensemble des cas pour déterminer s'il existe des tendances et si des questions sont en litige. Est-ce qu'on comprend la profondeur de l'intervention? On ne remet pas en question la décision du décideur individuel. Par contre, vous avez parlé de l'ensemble. Il faut voir, et faire des analyses.
En effet, les questions sont échangées. Comme vous l'avez mentionné, le président a le pouvoir d'émettre des guides. Pourquoi ne pas le faire dans cette situation? Comme je le disais, on va devoir prendre cela en considération. Effectivement, il nous arrive de le faire.
Je dois préciser, à propos de l'écart de décision entre chaque région d'un pays, que dans 12 pays, il se situait à 30 p. 100 et plus. Or, nous avons réduit cela à deux. Compte tenu du travail que nous accomplissons en termes de comparaison des notes, etc., il est fort probable que nous réussissions à réduire cet écart à moins de 30 p. 100. Il ne serait pas possible de trop réduire cette proportion. Cela demeure une décision personnelle. La particularité et le mérite du cas demeurent. Pour ce qui est de la tendance observée dans une situation ou dans un pays donné, il n'y a pas de doute qu'on commence à obtenir de bons résultats en termes de qualité.
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): On avait demandé au ministre d'envisager la possibilité, en attendant que la section d'appel soit mise en oeuvre, que deux juges soient présents à l'audience de chacun des demandeurs, ce qui a été refusé.
Or, je me demande si vous, en tant que commissaire, êtes favorable à la mise sur pied d'une section d'appel. Le Canada prétend à juste titre être un pays dont une des caractéristiques premières est l'état de droit. Or, l'idée que la destinée des gens les plus vulnérables de la société se retrouvent entre les mains d'une seule personne va contre le bon sens. Il ne s'agit pas uniquement de compassion; en fait, je parle ici de logique.
Hier ou avant-hier, le ministre a annoncé un nouveau programme de sélection des réfugiés à l'extérieur du pays, ce qui rendrait beaucoup plus facile une partie de la tâche des commissaires. Or, ne croyez-vous pas que les Palestiniens devraient en effet être sélectionnés dans des camps de Palestiniens, que ce soit au Liban ou ailleurs, et que le Haut-Commissariat devrait participer à cette opération? Tout le monde, autour de cette table aussi bien que dans la population, s'entend pour dire que la situation des Palestiniens est extrêmement difficile.
Il y a quelque chose d'un peu indécent dans le fait de dire à des gens provenant de camps de réfugiés, lorsqu'ils arrivent ici, qu'ils ne sont pas des réfugiés. Pour ma part, je suis incapable d'expliquer cela à mes concitoyens, quels qu'ils soient. Peu importe les efforts que je pourrais faire pour y arriver, je ne peux tout simplement pas.
J'aimerais donc savoir si, d'après vous, cette façon de procéder devrait devenir la règle en ce qui concerne les réfugiés palestiniens. Bien sûr, cela ne réglera pas le cas de ceux qui sont déjà ici. Il n'en demeure pas moins que le conflit n'est pas fini et que ce n'est pas demain matin que les camps vont disparaître.
M. Jean-Guy Fleury: Comme président d'une commission indépendante, il n'est pas de mon ressort d'émettre des politiques. Il serait donc plus pertinent de poser votre question au ministre. En outre, je suis moi-même un décideur et je ne voudrais pas préjuger de quoi que ce soit à l'égard d'une situation donnée.
J'en suis désolé, mais peut-être Mme Daley voudrait-elle ajouter quelque chose.
¿ (0955)
[Traduction]
Mme Krista Daley: Non, à ce sujet, je ne le sais pas. Les deux questions que vous soulevez, celle sur la Section d'appel des réfugiés et celle sur un seul commissaire par opposition à deux, ainsi que la question du choix des commissaires relèvent vraiment du gouvernement.
[Français]
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Les meilleures questions sont celles auxquelles les témoins ne veulent pas répondre. Ils ne peuvent pas et ne veulent pas le faire. C'est très bien.
Monsieur Massimo Pacetti.
[Traduction]
M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.): Merci, madame la présidente.
Bonjour.
Je veux parler des demandeurs du statut de réfugié. Ils sont plutôt nombreux. Nous parlons de pourcentages, de chiffres, mais pour moi, à Montréal, cet été, j'ai vu presque à toutes les semaines, l'expulsion de personnes qui étaient au Canada depuis...
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): À toutes les semaines, ce n'est pas mauvais. Nous, c'est à tous les jours.
À (1000)
M. Massimo Pacetti: Vous êtes bien meilleur que moi, je peux vous dire qu'il y a des gens qui sont au pays depuis six ans et qui attendent une décision. Ce n'est pas raisonnable.
Je veux parler du temps. On peut dire avoir réduit le nombre de 30 p. 100, que nous allons réduire le nombre de demandeurs de 11 000, mais il faut toujours des années et ce n'est pas acceptable. Ces demandeurs du statut de réfugié viennent ici et on leur permet de travailler, de faire des études, d'avoir une famille. Que se passe-t-il lorsque nous retardons la décision pendant tout ce temps, et bien nous les versons dans un autre système parce qu'on va finir par leur permettre de rester pour des raisons humanitaires ou pour autre chose. Nous faisons du surplace.
Il doit y avoir mieux à dire que simplement nous y travaillons, nous avons des initiatives, nous avons un plan. Il faut réduire le temps. Ce n'est pas acceptable, et peut-être est-ce parce que nous acceptons des demandeurs qui ne viennent pas d'endroits producteurs de réfugiés. Ce n'est pas à moi d'en décider, mais lorsque ces gens sont au pays depuis quatre ou cinq ans, ils ont une vie, ils ont un emploi, ils ont des enfants, et si la décision les force à retourner dans un endroit dont ils ne savent vraiment rien—le Canada, c'est l'endroit qu'ils connaissent—c'est un problème énorme. C'est la réalité. Voilà ce qu'il faut régler.
Vous parlez de réduire les chiffres de 30 p. 100. C'est difficile de dire à quelqu'un qui vient vous voir à votre bureau que vous regrettez, mais c'est 30 p. 100.
Les données du dossier changent aussi. Lorsque les demandeurs sont arrivés il y a six ans, il y avait certaines pièces au dossier, et tout à coup, on se souvient d'autre chose. Je ne dis pas qu'il faut les absoudre de tous les faits, simplement qu'il faut améliorer notre système, trouver une solution.
M. Jean-Guy Fleury: Nous en sommes probablement, en date de ce matin, à un temps de traitement de 14 mois, c'est beaucoup. J'ai dit au cours de mon exposé, et je le répète, que c'est inacceptable pour tous, pour le contribuable, pour tous.
Le plan d'action n'est pas frivole, c'est une transformation en profondeur. Nous utilisons le guide jurisprudentiel dans toute la mesure où nous le permet la loi et conformément à la loi. Nous essayons, dans toute la mesure du possible, d'être mieux préparés, plus ciblés dans nos audiences, de mener les enquêtes—il ne s'agit pas uniquement d'un tribunal. Ce changement va donner des résultats. Par contre, je n'essaie pas de vous dire que c'est la solution miracle. Ce n'est pas le cas. En dernière analyse, il va falloir trouver un équilibre entre les ressources et s'assurer que tout est en ordre, que nous faisons de notre mieux. Nous y travaillons.
Je travaille sur ce que nous pouvons contrôler. Je ne peux pas faire grand-chose si je n'ai pas le contrôle, c'est-à-dire que je ne contrôle pas l'arrivée des demandeurs. C'est pourquoi nous tentons de trouver un nouvel équilibre.
Vous avez raison, l'objectif a toujours été six mois, et même cela c'est long pour ceux qui attendent une décision. Toutefois, pour en arriver à six mois, au rythme où nous allons, compte tenu des 16 millions de dollars dont j'ai besoin à long terme, il me faudra trois ans avant de pouvoir dire que nous sommes à six mois. C'est grave. Tout ce que je peux vous dire aujourd'hui, c'est que le plan d'action représente une transformation en profondeur qui pousse notre mandat à sa limite.
Le personnel y croit aussi. C'est pourquoi le nombre de décisions a augmenté de 30 p. 100 en six mois. Toutefois, je ne voudrais pas dire aux membres du comité que dans trois ans, tout sera parfait. Tout ce que je dis, c'est que nous avons un plan pour y parvenir.
La deuxième chose que je tiens à souligner, c'est que dans chaque emploi que j'ai occupé au gouvernement fédéral, j'ai cru aux cadres, j'ai cru aux concepts, mais en dernière analyse, ce qui compte, c'est de montrer aux Canadiens que nous donnons suite à ce que nous disons. Les plans d'action ne sont pas des mirages, ce sont des plans très pragmatiques.
M. Massimo Pacetti: S'ils sont pragmatiques, vous pouvez alors vous engager à ce que d'ici trois ans...?
Mais je vais peut-être trop loin. Vous dites que le problème, c'est le nombre de demandes qui arrivent. Pourrait-on couper court et décider que les citoyens de certains pays ne sont pas admissibles, ou certains types de citoyens, pour réduire le nombre des demandes?
M. Jean-Guy Fleury: Oui, il y a des dispositions pour cela dans la loi. Je vais demander à Mme Daley de vous les expliquer. Nous pouvons avoir recours à certaines dispositions.
Mme Krista Daley: Je vais faire une observation afin que nous comprenions bien notre terminologie. C'est le ministère qui décide qui peut présenter une demande de statut de réfugié. Le ministère le décide au départ, puis les demandes nous sont envoyées. La loi contient en fait une disposition—du moins dans l'ancienne loi, mais elle continue de s'appliquer—pour que nous puissions désigner par règlement certains pays dont les citoyens ne pourraient pas présenter de demande du statut de réfugié. Cela ne relève pas de la compétence de la Commission; cela se fait par règlement, au niveau du ministre.
[Français]
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Monsieur Hanger.
[Traduction]
M. Art Hanger: Merci, madame la présidente.
Je commence à avoir une meilleure idée de votre charge de travail. Je regarde les chiffres qui figurent dans votre rapport, monsieur Fleury. Par exemple, à la Section de l'immigration, vous avez 29 décideurs, comme vous le mentionnez ici. Ces personnes doivent tenir 2 000 enquêtes d'admissibilité et 11 400 audiences ou examens de détention au cours de l'année. Dans chacune de ces procédures, une personne siège et rend une décision, n'est-ce pas?
M. Jean-Guy Fleury: Oui.
M. Art Hanger: Cela signifie donc que chacune de ces personnes doit rendre 450 décisions.
M. Jean-Guy Fleury: Oui, et il n'y a pas d'arriéré dans ce secteur.
M. Art Hanger: Il n'y a pas d'arriéré dans ce secteur, d'accord.
M. Jean-Guy Fleury: Cela est entre autres dû au fait que les examens sont faits dans une période de 48 heures, soit de 7 heures en matière de détention. Nous devons respecter cette obligation. Malgré tout ce qui peut se produire pour nous en empêcher, nous sommes toujours là.
M. Art Hanger: Cela m'amène à ma deuxième question qui porte sur les exigences que la nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés impose à ces décideurs. La Section de l'immigration examine l'admissibilité des personnes qui sont accusées d'avoir participé à des crimes transnationaux, entre autres le trafic de personnes et le blanchiment d'argent. Quelle sorte de formation ces décideurs ont-ils reçue jusqu'à présent sur ces questions, qui donne cette formation et jusqu'où va-t-elle?
M. Jean-Guy Fleury: Tout d'abord, oui, nous les avons formés, ils ont reçu une formation et ont les qualités requises et l'expérience voulue pour rendre les décisions qu'il faut maintenant. Pour ce qui est d'une formation supplémentaire concernant la loi, je n'étais pas là, et je vais donc demander à Mme Daley de répondre.
Mme Krista Daley: Pendant ce temps, toutes les sections de la Commission, y compris la Section de l'immigration, ont reçu une formation de trois à cinq jours sur la nouvelle loi, et qui consistait, naturellement, à examiner les dispositions législatives. Et au fur et à mesure que des questions se sont posées au cours des dix-huit derniers mois, cette section a continué de recevoir une formation à ce sujet. Pour ce qui est de toute nouvelle disposition statutaire, je peux dire que c'est au fil de l'évolution des cas et de l'interprétation que donnera la Cour fédérale de ces dispositions que nous obtiendrons en somme une définition finale de ce qu'est un crime transnational, par exemple. Mais il s'agit là de questions où la Section est au courant des cas et a reçu une formation pertinente et rend des décisions sur ces cas.
M. Art Hanger: Je pense que c'est une question assez importante pour ce qui est de la sécurité internationale. Je suis heureux de voir que c'est inclus dans la loi. Je tiens aussi compte de la formation intensive. Qu'il s'agisse d'un agent de police, d'un tribunal ou d'un juge ou de qui que ce soit, il s'agit de transmettre un grand savoir-faire d'un groupe à un autre. Je dirais qu'on a l'impression que nous sommes peut-être vulnérables à cet égard si nous attendons qu'un juge de la Cour fédérale décide de ce qui est acceptable ou ne l'est pas. Je peux vous dire ce qui est un crime transnational et ce que suppose le trafic de personnes ou le vol d'identité.
À (1005)
Mme Krista Daley: Je pourrais peut-être apporter des précisions. Je ne voulais pas donner l'impression que nous attendons l'avis de la Cour fédérale. Ce que je voulais dire, c'est que nos décideurs sont formés et qu'on effectue une analyse sur une définition de dictionnaire, par exemple, précisant ce qu'est un crime transnational et ce que nous pouvons recueillir à partir de diverses recherches effectuées sur la question. Ils reçoivent une formation à partir de cela, puis en tant que décideurs indépendants, ils s'appuient sur cette information qui leur a été fournie et rendent une décision.
Ce que je disais au sujet de la Cour fédérale, c'était simplement qu'étant donné la façon dont les choses fonctionnent c'est en fin de compte cette cour qui fournira les définitions de tout ce qui se trouve dans la nouvelle loi, de ce qu'est le terrorisme au sens de la loi, un crime transnational, etc., pour toutes ces dispositions. Il ne s'agissait pas du tout de laisser entendre que nous nous contentons d'attendre la Cour fédérale. Ces décisions doivent être prises maintenant, et nous avons vraiment travaillé d'arrache-pied pour nous assurer que toute l'information, par exemple, sur les crimes transnationaux était disponible pour nos décideurs.
M. Art Hanger: Convoquez-vous à nouveau des experts—qu'importe que ce soit la GRC qui fasse enquête sur des crimes comme celui là, ou des procureurs—afin que ceux qui prennent une décision comprennent ce qui se passe? Encore là, je constate qu'on a reconnu que c'était là un élément très important de notre sécurité. Dans les conditions actuelles, je suppose que des procédures très précises sont en place.
Qui assure la formation?
Mme Krista Daley: Je peux peut-être ajouter quelque chose. Je ne peux pas répondre maintenant—peut-être que M. Fleury ou Marilyn le peuvent—pour dire si cela s'est produit ou non dans cette situation.
Pour ce qui est de la légalité de tout cela, le contentieux, mon service, travaille avec la Section sur cette interprétation. Comme nous sommes un tribunal indépendant, des questions se posent quant à la possibilité que nous avons de faire appel à des entités extérieures pour former nos membres sur ces questions. Peut-être pourrions-nous fournir plus tard cette information au comité.
M. Art Hanger: Oui, j'aimerais bien.
M. Jean-Guy Fleury: Puis-je ajouter quelque chose?
M. Art Hanger: Avons-nous encore du temps?
Oui.
M. Jean-Guy Fleury: Puis-je ajouter que je vous ai dit que nous n'avions pas nécessairement de retard dans cette section, mais que nous subissions des pressions. C'est un travail complexe. Il y a de nouveaux développements en matière de détermination. Nous surveillons cela de très près.
M. Art Hanger: Cela représente quand même beaucoup d'audiences.
M. Jean-Guy Fleury: Oui.
M. Art Hanger: Mon autre question a trait à des questions qu'a déjà posées un de mes collègues.
Cette année, on a rendu une décision dans le cas de 35 400 revendications du statut de réfugié; dans 46 de ces cas, les demandeurs ont obtenu le statut de réfugié au sens de la Convention, 36 ont essuyé un refus et les 18 autres revendications ont été soit retirées ou réputées abandonnées. Quand on parle de retraits ou de déclarations d'abandon—autrement dit, je suppose qu'il s'agit d'une révocation d'une revendication du statut de réfugié. Est-ce bien cela?
Mme Krista Daley: Non, cela ne s'appelle pas une révocation d'une revendication du statut de réfugié. La catégorie des revendications abandonnées est une catégorie de revendication où la personne, pour une raison ou pour une autre, n'a pas communiqué avec la Commission. Par exemple, la personne n'a pas comparu à une audience ou ne s'est pas présentée à la date que nous avions fixée. Nous les informons alors qu'ils sont convoqués pour ce que nous appelons une audience de justification. Ce sont les cas où nous parlons d'abandon.
Les cas de retrait sont ceux où la personne, de son propre chef, écrit à la Commission et dit : « Je voudrais retirer ma revendication du statut de réfugié ».
Ce sont là les deux catégories.
M. Art Hanger: Qu'est-ce que la révocation? Est-ce que les 36 p. 100 qui ont fait l'objet d'un rejet constituent des cas de révocation?
Mme Krista Daley: Non, la révocation c'est autre chose.
Il y a le taux d'acceptation, pour les décisions positives, quand on est réputé être un réfugié au sens de la Convention. Il y a le taux négatif, quand on n'est pas réputé en être un. Puis il y a les revendications retirées et abandonnées. Puis il y a en fait un très petit pourcentage—vous employiez le mot « révocation » et c'est le plus juste—qui sont appelées des demandes d'annulation ou des demandes de cessation de la revendication.
À (1010)
M. Art Hanger: Combien de ces décisions a-t-on rendues?
Mme Krista Daley: Je n'ai pas ces statistiques.
M. Jean-Guy Fleury: Nous vous les obtiendrons.
Mme Krista Daley: Je peux déjà vous dire que c'est un tout petit nombre.
M. Art Hanger: Très bien.
Mme Krista Daley: J'ai autre chose à dire à ce sujet, si vous le permettez. Je veux simplement m'assurer que nous nous comprenons bien.
C'est en fait le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration qui nous soumet ces demandes. Si la personne est reconnue comme un réfugié, le ministre nous soumet ces cas, pour, essentiellement, révoquer ou annuler cette décision.
M. Art Hanger: Fait-on part de cette raison aux autres membres de la Commission, ailleurs dans d'autres régions?
Mme Krista Daley: Excusez-moi, si on leur en fait part?
M. Art Hanger: Quand il y a révocation, il y a des raisons à cette révocation.
Mme Krista Daley: Elles seraient communiquées, oui.
M. Art Hanger: Est-ce que toutes les régions et tous les membres de la Commission auraient accès à cette information?
Mme Krista Daley: Comme vous le savez, les motifs des décisions de la Commission ne sont pas accessibles au grand public, bien sûr.
M. Art Hanger: Non, je ne pensais pas au grand public.
Mme Krista Daley: Oui, je sais.
Au sein de la Commission, certaines décisions circulent entre les commissaires. D'autres sont incorporées aux séances de formation et à diverses autres activités.
Quant à savoir si cela se fait systématiquement, nous allons aussi communiquer avec vous sur ce point.
[Français]
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Monsieur le secrétaire parlementaire.
[Traduction]
M. Sarkis Assadourian: Merci beaucoup.
D'abord, à en juger par la charge de travail dans nos bureaux de circonscription, j'apprécie beaucoup le gros travail que font les membres de votre organisation. Nous recevons beaucoup, beaucoup de cas qui nous paraissent injustes; puis on s'aperçoit que l'on ne connaît que 10 p. 100 des faits. Nous envoyons une lettre ou faisons des démarches auprès du ministre et nous lui demandons : « Eh bien, savez-vous ce qui s'est passé ici? » Puis il nous faut reconnaître que nous ne savions pas que le type était marié à quelqu'un d'autre. Il est venu faire sa demande, mais il a un enfant dans un autre pays. Il est parti puis il est revenu.
C'est très très compliqué et un travail très difficile, et c'est pourquoi je dis que j'apprécie beaucoup le gros travail que vous faites.
Je veux commenter deux questions soulevées par mes collègues libéraux. D'abord, au sujet de la Palestine, j'ai fait l'objet de plusieurs démarches moi aussi. Je crois savoir qu'une ou deux personnes vont être expulsées aujourd'hui ou l'ont peut-être été hier. C'est une question très très grave pour la communauté arabe, les Palestiniens en particulier. Ils sont ici depuis longtemps et ils se sentent pris pour cible—si vous me passez l'expression—ou injustement traités.
Comme mon collègue l'a dit, où vont-ils aller? La personne est née dans un camp de réfugiés, ce qui fait de vous un réfugié. Moi, j'y suis allé, et j'ai vu les conditions. Je ne dis pas que ce sont des réfugiés économiques, mais ils sont dans une situation politique très difficile. Vous n'avez qu'à regarder les actualités et vous voyez ce qui se passe là-bas tous les jours. C'est la première chose.
J'aimerais vous demander s'il y a moyen pour nous de travailler ensemble. Je sais qu'on ne peut pas discuter de ces questions avec les juges, mais j'espère que vous avez plus de liberté qu'un juge et que nous pouvons communiquer. Je pense qu'il faut aborder la question de façon très positive, avec beaucoup de compassion.
L'autre chose dont mon collègue Massimo a parlé est l'attente de six ou sept ans. Comme il l'a dit, en six ou sept ans, le jeune homme ou la jeune femme peut rencontrer quelqu'un, se marier, avoir des enfants, trouver un emploi, acheter une maison, contracter une hypothèque. Tout d'un coup, six ou sept ans plus tard, on lui dit qu'il doit partir. Le type demande où. Depuis qu'il a présenté sa revendication, il y a six ou sept ans, les choses ont changé et la réglementation du ministère aussi.
Ma question est la suivante. Jugez-vous le cas en fonction de la réglementation actuelle ou de celle qui existait à l'époque? C'est ma deuxième question.
Ma troisième question porte sur ce que vous avez dit à propos du nombre de réfugiés à admettre. Vous avez dit qu'il a été abaissé ou que le pourcentage avait été réduit. Il y a quelque temps, nous avons signé un traité avec les États-Unis pour leur donner le statut de tiers pays sûr. Cet élément de l'entente a-t-elle joué pour faire baisser le nombre de revendications du statut de réfugié au pays? Le chiffre que vous avez donné est-il une conséquence de l'entente sur les tiers pays sûrs ou d'autres facteurs?
C'étaient mes trois questions. Merci.
M. Jean-Guy Fleury: Merci.
Tout d'abord, nous appliquons la loi au cas par cas, au fond. En ce qui concerne les renseignements nouveaux, nous avons un centre de documentation qui offre de l'information sur les conditions dans un pays à l'intention de ceux qui rendent une décision. Les gens peuvent donc nous donner de l'information que nous incorporons à la documentation.
En ce qui concerne l'entente sur les tiers pays sûrs, nous avons eu des discussions avec le ministère, qui est évidemment responsable de l'entente. Dans les projections de coûts pour nos besoins futurs que nous vous avons montrées, nous en avons tenu compte. Nous surveillons cela de près. C'est une cible mobile; on ignore si cela va baisser d'autant ou s'il y aura une ruée avant que l'accord entre en vigueur, un afflux de demandes.
Pour répondre à votre question, donc, l'entente aura sûrement des effets sur mes activités. On ignore exactement de quel ordre, mais nous en tenons compte dans nos discussions avec le Conseil du Trésor quand nous discutons de nos projections à long terme.
Vous avez aussi posé une question de droit à laquelle Mme Daley pourra répondre.
À (1015)
Mme Krista Daley: Votre troisième question, je crois, portait sur la réglementation que nous appliquons et à quel moment? Vous avez donné l'exemple d'un délai de six ans.
Ce que je peux dire à propos de notre travail—qui ne couvre pas les six années en entier; cela peut être le nombre d'années total que le cas est dans la filière—c'est que le jour de l'audition d'une revendication du statut de réfugié, nous appliquons la loi qui est en place ce jour-là et les conditions du pays qui existent ce jour-là. Mettons que la personne était déjà au pays depuis deux ans. Le jour où nous nous prononçons sur la revendication, c'est la loi de ce jour-là, plus la situation dans ce pays ce jour-là.
M. Sarkis Assadourian: Sur ce point, madame la présidente, si vous vous souvenez bien, une action a été intentée contre le gouvernement lorsque nous avons changé la réglementation de l'immigration, et le tribunal a statué qu'il faut revenir au moment où la demande a été faite. Vous agissez donc à l'encontre de cette décision du tribunal.
Mme Krista Daley: Non, c'est simplement un contexte différent de cette décision.
M. Sarkis Assadourian: Je sais que c'est différent, mais est-ce que ça ne s'applique pas à vous? C'est la simple justice. Quand je m'adresse à vous et que je vous présente une demande un jour, je vais être jugé en fonction de ce jour-là et pas sur ce qui existe six ans plus tard.
Mme Krista Daley: La demande du statut de réfugié est une filière différente parce que ce que vous étudiez dans le cas d'une personne qui est un réfugié, c'est sa peur pour l'avenir. Imaginons qu'un réfugié arrive au pays le 1er janvier d'une année donnée, puis que nous jugions son cas en septembre de la même année. En septembre, la question que nous nous posons est de savoir s'il craint pour l'avenir s'il rentre dans son pays. Pas s'il craignait en janvier, lorsqu'il est arrivé, mais s'il a des craintes pour l'avenir. Telle est la définition du statut de réfugié, comme le tribunal l'a interprétée pour nous.
C'est donc très logique dans le cas du réfugié; il s'agit de l'avenir, ce qui est une situation différente de la question de la réglementation dont vous avez parlé. J'espère vous avoir répondu.
M. Sarkis Assadourian: Merci.
Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.) Merci, madame la présidente.
Je vous souhaite la bienvenue. Si je suis en retard c'est parce que j'étais à une autre réunion.
J'ai une ou deux questions à vous poser.
Vous avez dit avoir un arriéré de quelque 52 000 cas. J'imagine que les pressions sur vous sont très grandes. Vous avez à faire un travail très difficile. Comment comptez-vous éliminer cet arriéré? Avez-vous une idée des délais pour y arriver? Comme mon collègue l'a dit, c'est injuste pour les gens d'attendre indéfiniment. Vous ne pouvez pas demander aux gens de mettre leur vie en suspens. C'est la première.
La deuxième est la suivante. Je sais que vous avez beaucoup de cas très compliqués. Je viens de la Colombie-Britannique. Il y en a un très connu, celui de Lai Changxing, que certains d'entre vous connaissent peut-être, qui a causé beaucoup d'inquiétude et beaucoup de remous dans la communauté. Aussi, lorsque nous avons une visite officielle en Chine, littéralement, on nous pose des questions à propos de ce cas.
Je ne suis pas très claire. J'hésite à poser la question directement, mais c'est la seule chance que j'ai officiellement. Pourquoi est-ce que ce couple, très clairement...? On ne sait pas, parce qu'on ne peut pas juger tant qu'il n'est pas déclaré coupable. Aussi, sa conduite était en Chine, dans un autre pays.
Le problème c'est qu'une image très défavorable a été présentée. Il a été autorisé à vivre dans un appartement, pas luxueux, mais tout à fait de la classe moyenne, et il a été traité très différemment. Il y a eu beaucoup de malentendus de part et d'autre. Je ne sais pas si la Commission a été mêlée à cette affaire. Je voudrais juste savoir.
Ce couple célèbre vit toujours au Canada. Je sais que cela ne relève plus de vous, mais le processus a été tellement embrouillé. On leur a accordé un traitement spécial, différent, alors qu'il est clair que ce sont des criminels recherchés en Chine. Vous avez causé beaucoup de tension diplomatique.
Je me demandais si vous pourriez répondre à mes deux questions. Merci.
À (1020)
M. Jean-Guy Fleury: Je vais répondre à la première et pour ce qui est du cas particulier, c'est Mme Daley qui va vous répondre.
Le plan d'action... J'aimerais bien employer une autre expression. Il a été conçu par le personnel, les fonctionnaires, les personnes nommées par décret du conseil, des gens qui connaissent leur travail. Mon impression à moi, c'est que faire venir des consultants et de l'aide extérieure n'était pas la solution. Il fallait s'adresser à des gens qui connaissent le travail.
Ils sont venus à Ottawa et y ont passé trois semaines. Nous avons examiné et disséqué chaque mouvement que nous faisons dans le processus de reconnaissance du statut de réfugié, comment nous menons les audiences, comment nous préparons nos dossiers. Parce que chacun venait d'un milieu de travail différent, ils ont eu une vue d'ensemble, et nous avons conçu ce que nous avons jugé être la façon la plus efficace de traiter les demandes.
Mais le plan d'action ne porte pas uniquement sur la méthode; c'est aussi une question de gens. Nous traitons avec des gens. Les gens qui travaillent dans mon organisation sont fiers de leur travail. Ma position, c'est que si vous pouvez faire mieux, eh bien, servez-vous de votre imagination, innovez; nous allons y arriver—parce que nous pouvons faire beaucoup de choses si nous nous concentrons.
Comme je l'ai dit dans ma déclaration, nous avons dit qu'il serait injuste pour les réfugiés qui se présentent devant nous s'ils étaient traités différemment à Toronto qu'à Montréal, parce que nous n'avons pas normalisé la façon dont nous les traitons. C'est donc ce que nous avons fait. Ce n'était pas de la standardisation, c'était de la normalisation. Il s'agissait d'uniformiser nos méthodes.
L'autre chose dont on a parlé, évidemment, ce sont les outils dont le décideur a besoin de moi, comme président, parce que j'ai les pouvoirs de donner des lignes directrices. Quelles sont les choses que nous pouvons faire pour le décideur pour lui donner les bons outils pour rendre une décision solide et fondée?
Avec l'aide du contentieux et de tout le monde, nous avons lancé... Actuellement, au moment où je vous parle, nous sommes en formation. Nous avons fait Vancouver, Toronto et Ottawa. Nous formons notre personnel à la conduite des audiences. Pour ce qui est de la reconnaissance du statut, c'est une enquête que nous menons. Ce n'est pas un tribunal. Nous essayons donc de nous concentrer sur les problèmes lorsque les gens nous arrivent.
Le président et l'agent de protection des réfugiés vont dorénavant poser les questions, plutôt que l'avocat. Avec tout ça, quand vous prenez chaque petit élément, nous avons réussi, aux premières étapes de délivrance des décisions, à faire 30 p. 100 de décisions de plus. Je suis très prudent à propos de ça, parce que je veux garder cet élan. C'est ce que nous avons fait.
Je vais m'en tenir à ça, parce que je pourrais parler pendant des heures. Comme vous le voyez, je suis très passionné par cela. C'était de l'innovation. C'était prendre les ressources que nous avons. Pour l'avenir, comme nous l'avons dit, la question des ressources est importante; comment nous innovons, c'est important et au bout du compte l'important c'est mon personnel et les gens que nous rencontrons. Ce sont des questions humaines, pas seulement la façon de travailler. On essaie donc de doser les trois.
Pour ce qui est de votre deuxième question, Mme Daley va vous répondre.
À (1025)
Mme Krista Daley: Vous avez posé des questions très précises sur la décision dans l'affaire Lai. En fait, la plupart des points que vous avez soulevés ne relèvent pas de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Comme l'institution est indépendante, nous ne pouvons pas vraiment commenter davantage cette décision.
Mme Sophia Leung: Elle les a bien déclarés réfugiés. Vous vous souvenez de l'affaire Lai?
Mme Krista Daley: Oui, je me souviens de l'affaire Lai, mais je ne peux pas commenter un cas particulier, vu le caractère indépendant du tribunal.
Mme Sophia Leung: Oh, je vois.
[Français]
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Avez-vous une question?
[Traduction]
M. Art Hanger: Je veux dire que je comprends la question de Sophia parce que je pense que ces questions se répètent à de multiples reprises partout au pays dans des décisions semblables rendues par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Malheureusement, il semble manquer quelque chose à cette évaluation qui va exclure des gens qui devraient être exclus et en admettre d'autres qui mériteraient d'être admis. Cela m'amène à ma question.
Qui surveille les décisions des commissaires et pourquoi est-ce que des consultants font encore du « magasinage », à la recherche de commissaires ou d'une région où le taux de refus est très bas de manière à faire admettre leurs clients?
C'est une question qui s'est posée il y a des années, et cela continue de se répéter partout au pays, comme si aucune information n'était communiquée aux autres commissaires, ou comme si l'on craignait que s'ils ne rendaient pas une décision positive, ils risqueraient de perdre leur emploi ou de voir leur poste contesté.
J'aimerais entendre des réponses sur la question de savoir pourquoi les commissaires qui refusent peu sont choisis par les consultants. Des consultants me l'ont dit personnellement. Je sais donc que cela se fait toujours.
M. Jean-Guy Fleury: Tout d'abord, permettez-moi de commencer par la prise de décisions. L'indépendance de la personne qui rend la décision, le commissaire, est consacrée dans la loi. Elle est respectée, et il faut être très prudent... Vous avez parlé de surveillance, je crois. Les commissaires ont un service du contentieux qu'ils peuvent consulter pour clarifier certains points. Ils bénéficient de cette assistance, mais au bout du compte, la décision du commissaire relève de lui.
Chaque commissaire, à peu près, a un coordinateur. Cette personne est aussi un commissaire. Ils ont des discussions après que les décisions sont rendues, mais ce n'est pas une surveillance pour voir si le commissaire a donné un avis positif ou négatif. Là n'est pas la question.
De fait, je ne tiens pas de statistiques sur chacun. Il est arrivé que nous ayons eu à en produire pour répondre à des demandes en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, mais pour nous, ça ne change rien. C'est une personne indépendante qui rend une décision en fonction des faits dont elle dispose, fondée sur le droit, fondée sur les décisions des tribunaux qui servent de guide. C'est ainsi que cela fonctionne.
Il est déplorable s'il arrive—et je ne devrais pas dire « si »—que certaines personnes préfèrent comparaître devant un commissaire plutôt qu'un autre. Je pense que c'est déplorable. Nous décidons qui entend l'affaire et nous ne regardons pas les gens en fonction de pourcentage de favorables ou de non-favorables, ou qui disent que les gens sont des réfugiés ou non. C'est donc déplorable si ça se fait, et surtout dans les petites régions où il y a moins de commissaires que dans d'autres.
Je ne sais pas si j'ai répondu à la question. C'est difficile de le faire sans...
M. Art Hanger: C'est difficile. Je me demandais seulement si la Commission allait limiter l'activité des consultants qui vont d'une région à l'autre et quand la Commission allait le faire. Je ne parle même pas d'un commissaire donné par rapport à un autre ou ce genre de choix.
Si vous voulez que je vous donne des raisons ou des cas précis, je pourrais le faire. Si on commence à fouiller cela, nous allons nous y mettre.
À (1030)
Mme Krista Daley: Je suis en train de réfléchir et j'essaie de vous répondre sur ce que pourrait être notre cadre pour limiter les mouvements de l'avocat, et je pense que presque tout de suite vous butez sur le droit du demandeur de choisir l'avocat de son choix.
Ce n'est pas un droit absolu, mais il a le droit de choisir son propre avocat. Si j'ai bien compris ce dont vous parliez, vous dites qu'un avocat conseillera à son client de se rendre dans une autre région pour qu'il ait un autre commissaire...
M. Art Hanger: Dont le taux d'acceptation est plus élevé.
Mme Krista Daley: Alors cela soulève le problème de savoir si l'on peut contrôler le fait qu'un demandeur de statut se rende dans une autre ville et, rendu sur place, s'il peut choisir son avocat.
Il n'y a pas grand-chose que je puisse vous dire. Je me creuse la tête pour essayer de voir quelle sorte de cadre pourrait être employé.
M. Art Hanger: Nous pourrions en discuter davantage. Je sais que mon temps est écoulé.
[Français]
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Madame Folco.
[Traduction]
Mme Raymonde Folco: Il faut que je file; je vous remercie d'être venus.
[Français]
Je voudrais revenir sur le fait que l'audition des revendicateurs se fait par l'entremise de la vidéo. Je comprends le bien-fondé de cette mesure: elle permet de procéder plus rapidement et de ne pas avoir à déplacer des commissaires d'une région à l'autre du pays. Je la comprends, mais en tant que solution administrative.
Cependant, en posant la question suivante, je me mets à la place des revendicateurs. Tout d'abord, ils sont nombreux à venir de pays du Tiers-Monde. Par conséquent, ils ne connaissent pas nécessairement ce genre de technologie, en l'occurrence, la téléconférence. Ensuite--et je parle ici des vrais revendicateurs--, certains d'entre eux ont subi des mauvais traitements ou de la torture. Or, avoir une caméra braquée sur soi alors qu'on arrive dans un pays où on souhaite être accueilli peut rappeler des moments traumatisants.
Enfin, grâce à des recherches en linguistique, entre autres--je suis une ancienne linguiste--, nous savons que lorsqu'un individu parle devant une caméra ou dans un téléphone et que son interlocuteur--comme on dit dans mon jargon--n'est pas présent devant lui mais ne l'est que technologiquement, une importante barrière psychologique peut se créer. Or, dans certains cas, par exemple celui des personnes ayant vécu des expériences traumatisantes dans leur pays d'origine, il peut s'agir d'une barrière majeure.
Compte tenu de ces facteurs, pensez-vous qu'il serait possible de choisir les personnes qui participent à ce genre de téléconférence, ou peut-être même de se débarrasser complètement de ce système?
À (1035)
M. Jean-Guy Fleury: La question de l'utilisation de la vidéo, j'en entends parler à tous les jours, et avec raison, car on a dû accélérer le processus pour répondre aux besoins. Je dois vous dire que ma première cause comme commissaire s'est faite par vidéo dans un panel à Winnipeg. Je n'avais pas travaillé avec ce genre de technologie depuis sept ans et je me suis rendu compte que celle-ci était très avancée par rapport à la clarté et à l'échange d'informations.
Je n'irais pas jusqu'à dire que la vidéo remplacera un jour la présence humaine ou les échanges de vive voix, mais c'est un outil très important qu'il est permis d'utiliser sur le plan légal, et d'autres juridictions le font.
Toutefois, on tente de le faire avec discernement. Prenons le cas de quelqu'un qui n'est pas représenté, un jeune ou quelqu'un qui aurait de sérieuses difficultés sur le plan linguistique--même s'il y a des traducteurs--ou des difficultés sur le plan personnel. Si ce genre de cause peut s'avérer complexe au point de durer une journée, par exemple, on essaie alors d'agir avec discernement, de ne pas examiner ce cas-là dans un tel contexte, et on prend en considération la possibilité d'avoir recours à des représentations. Mais le seul choix qui reste à cet individu est tout de même d'attendre encore 18 mois au lieu de se faire entendre quasiment tout de suite.
Certaines personnes que j'ai rencontrées m'ont dit que, selon elles, cette façon de procéder n'était pas idéale, mais qu'au moins, leur cause serait entendue et qu'ils sauraient à quoi s'en tenir.
Les avocats, les interprètes et les commissaires s'aperçoivent aussi qu'ils apprennent au fur et à mesure. De plus, des conférences ont lieu chaque semaine, au niveau opérationnel, pour voir ce qui se passe.
Il faut aussi tenir compte du fait que sur le plan organisationnel, 68 p. 100 des causes sont à Toronto, et je dispose de ressources à Vancouver et à Montréal que je peux employer mieux.
Mme Raymonde Folco: Sans aucun doute, monsieur.
M. Jean-Guy Fleury: C'est ce que je tente de faire. Cette année, sauf erreur, on s'est fixé l'objectif d'entendre 3 000 revendications au moyen de la vidéo, d'ici mars. À Vancouver, au Mexique et puis... Avant d'accélérer la question de la vidéo, j'ai redéployé des décideurs de Montréal, de Vancouver et de Calgary à Toronto. Mais le coût est très élevé; on l'a fait pendant presque six mois, et cela a coûté très cher. En outre, même si ces personnes aiment bien leur expérience, surtout au début, d'aller voir ce qui se passe ailleurs, après un certain temps et en raison de leurs obligations familiales, ils préfèrent travailler près de chez eux. Il y a donc la question des coûts et celle du redéploiement.
Alors, la décision que j'ai eu à prendre, c'est-à-dire accélérer l'utilisation de la vidéo, est bien la mienne et j'en suis responsable. On fait un monitoring chaque semaine, on a tenté, au niveau de la catégorie, de voir pour quels cas on s'en servirait, et on écoute attentivement des représentations.
Je vais demander à Mme Daley si elle a quelque chose à ajouter sur le plan légal.
Mme Krista Daley: Non, je n'ai rien à ajouter.
Mme Raymonde Folco: Ai-je le temps de poser une autre question très courte, madame la présidente?
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Très brièvement.
M. Jean-Guy Fleury: On pourrait la faire sur vidéo!
Mme Raymonde Folco: Oh! non, je n'aime pas parler à une caméra. J'aime bien parler à la personne parce que le non-verbal me dit énormément de choses aussi.
Sur la question du tiers pays sûr, third safe country, prenons le cas--et je pose ma question à titre d'information personnelle--de quelqu'un qui quitte un pays, qui s'en va dans un deuxième pays et qui y reste sans être reçu formellement par le gouvernement de ce deuxième État, sans recevoir aucun service de ce gouvernement et ainsi de suite. S'il décidait d'aller dans un troisième pays, qui serait le Canada, et qu'il demandait le statut de réfugié, en tenant compte du fait que c'est un vrai réfugié--la question qui me préoccupe ici n'est pas de savoir s'il s'agit d'un réfugié ou non, mais c'est la question du deuxième pays--, serait-il perçu comme un réfugié en arrivant au Canada? S'il n'avait pas été reçu par le HCR dans le deuxième pays, ni par le gouvernement de ce deuxième pays et qu'il n'avait eu droit à aucun service de la part de ce deuxième pays et que, pour ces raisons-là, il venait au Canada et demandait le statut de réfugié, quelle pourrait être la réponse de la commission?
M. Jean-Guy Fleury: Je vais demander à Mme Daley de m'aider. Je dois ajouter qu'en ce qui a trait au principe et au concept, on le comprend bien, mais en ce qui a trait à la spécificité, cela dépend des règlements qui sont émis. Je ne connais pas la spécificité des règlements.
Mme Raymonde Folco: Cela dépend du pays aussi, je suppose.
M. Jean-Guy Fleury: Oui.
[Traduction]
Mme Krista Daley: Je vais m'assurer de vous avoir bien comprise. Vous dites qu'une personne vient d'un premier pays, passe par un deuxième, y séjourne un certain temps, mais dans le deuxième pays elle ne reçoit en fait aucune prestation et n'est qu'en transit, puis vient au Canada?
À (1040)
Mme Raymonde Folco: Oui.
Mme Krista Daley: D'accord.
En ce qui concerne la loi, la seule chose qui me vient à l'esprit ici, c'est l'article 1.E de la Convention, qui prévoit qu'une personne pourrait être exclue si—et c'est un gros si—dans le deuxième pays elle avait presque les droits d'un ressortissant.
Dans votre scénario, il ne semble pas que la personne aurait les droits d'un ressortissant. Je pense donc que ce genre de personne pourrait être admise au Canada. Elle ferait sa revendication du statut de réfugié dans le premier pays, son premier pays de nationalité, et selon toute vraisemblance, ce séjour dans le deuxième pays serait contesté. Il y aurait des questions à propos de ce qui s'y passait, ce qui est arrivé, mais pour moi ce ne serait pas une raison pour lui refuser d'office le statut de réfugié.
Mme Raymonde Folco: Si cette personne était reconnue comme réfugiée dans ce deuxième pays par le haut-commissariat, quel serait le statut de cette personne vis-à-vis du Canada?
Mme Krista Daley: Pour ce qui est du Canada... La personne viendrait au Canada et présenterait sa revendication ici, mais le haut-commissariat lui a déjà reconnu ce statut.
Ce qui se passerait ici, ou ce qui pourrait se passer ici, c'est que c'est en fait une question d'admissibilité de nous renvoyer sa revendication à nous, et la loi indique que si une personne a déjà été reconnue comme réfugiée au sens de la Convention par un pays autre que le Canada...
Mme Raymonde Folco: Le haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, ce n'est pas un pays.
Mme Krista Daley: Je pourrai communiquer avec vous si je me trompe, mais je ne vois pas comment cela puisse devenir un problème d'admissibilité.
Mme Raymonde Folco: Un problème de non-admissibilité.
Mme Krista Daley: Oui, de non-admissibilité, et si je me trompe, je vais communiquer avec vous.
Mme Raymonde Folco: Je vous en serais très reconnaissante. Merci.
[Français]
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Monsieur Assadourian.
[Traduction]
M. Sarkis Assadourian: Merci beaucoup.
Comme vous le voyez, monsieur Fleury, c'est une question passionnante pour les députés et pour votre groupe aussi, j'en suis certain.
Comme députés, nous parcourons le monde, et nous avons l'occasion d'observer des interviews dans les ambassades étrangères pour les demandes d'immigration ou de visa, selon le cas.
Quelles sont nos chances si certains d'entre nous voulaient observer une audience de la Commission, si c'est possible, pour savoir de première main comment cela fonctionne? À Brampton, si je voulais observer une audience de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, est-ce que ce serait possible ou votre politique l'interdit-elle?
Mme Krista Daley: Me permettez-vous de clarifier cela?
Ces audiences ne sont pas publiques, c'est donc dire qu'en ce sens il n'y a...
M. Sarkis Assadourian: Eh bien, je vais comme député observer des audiences de demandes de visa dans les ambassades à l'étranger; je n'y vais pas comme John Henry de Brampton.
Mme Krista Daley: Oui, mais la loi précise très clairement qu'il s'agit d'audiences à huis clos, et je pense que nous dirions qu'il faudrait demander le consentement du revendicateur.
M. Sarkis Assadourian: Autrement dit, si le revendicateur du statut de réfugié dit oui, c'est possible.
Mme Krista Daley: Essentiellement, vous seriez un observateur.
M. Sarkis Assadourian: Dans ce cas-là, puis-je vous demander un service? S'il y avait une chance pour moi d'assister à une de ces audiences dans la région de Brampton ou du Grand Toronto, faites-le-moi savoir. Je serais heureux d'y assister, si c'est possible. Je vous en serais reconnaissant.
M. Jean-Guy Fleury: Oui, bien sûr.
Il n'y a pas d'audiences là-bas. C'est à Toronto.
Mme Krista Daley: Au centre-ville.
M. Sarkis Assadourian: Peu importe, n'importe où. Merci.
[Français]
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Monsieur Hanger.
[Traduction]
M. Art Hanger: Merci, madame la présidente.
Pour poursuivre dans cette veine, je sais que lorsque des consultants veulent faire de leur mieux pour leurs clients, contre des honoraires de 5 000 $ ou 10 000 $—je sais que certains demandent encore plus—ils sont prêts à sortir de la région, de leur ville, pour trouver tel ou tel commissaire, à envoyer leur client, par l'intermédiaire de leurs connaissances, dans une autre ville. Pour moi, c'est faire du magasinage. Ce n'est pas enlever au revendicateur son droit de choisir son avocat; c'est une cible précise, aller à la recherche d'un juge donné, autrement dit. Il ne s'agit pas d'un client qui est à la recherche d'un avocat; c'est l'avocat et le client qui sont à la recherche d'un juge.
Cela se fait depuis longtemps déjà. Quels mécanismes existent-ils dans le système pour lutter contre cela?
Pour moi, la seule façon de le faire, c'est d'examiner le genre de décisions prises par les commissaires en question.
Cela m'amène à une autre question, qui recoupe ce que disait Sophia. Quand la décision a été rendue par le commissaire et il est clair, après coup, que cette personne est vraiment un cas problème, quelles sont les suites pour le commissaire en question et la décision qu'il a prise?
On parle ici des conséquences pour la sécurité du pays. Je pense qu'il revient à quelqu'un du ministère ou de la Commission d'examiner ce qui s'est passé. Si cela ne se fait pas, personne n'a de comptes à rendre.
À (1045)
M. Jean-Guy Fleury: Sur le premier point, si vous le permettez, à Toronto et à Montréal, nous avons essayé, dans la mesure du possible... je vous ferai parvenir une note si je me trompe. Les demandeurs ne savent pas qui présidera. Lorsqu'on leur demande de comparaître, ils ne savent pas devant qui ils se présenteront. Donc de ce point de vue...
Évidemment, il est possible que dans les plus petites régions—à Calgary par exemple, je n'aie que sept personnes pour rendre les décisions—si quelqu'un veut contourner l'horaire ou tenter de déjouer nos tentatives d'avoir un décideur indépendant, je suis convaincu que c'est peut-être possible. Par exemple, c'est possible, mais je n'en sais rien. Si on sait qui présidera, si tout à coup quelqu'un tombe malade ou s'absente, ils vont essayer de changer l'horaire. C'est à nous de faire preuve de diligence dans ces cas, de voir s'il y a des raisons à des dispositions de dernière heure.
Tout ce que je peux dire, c'est que dans les grandes régions, c'est beaucoup plus difficile. Nous sommes très diligents.
Dans le cadre du plan d'action, nous avons inclus trois nouvelles initiatives, notamment parce qu'actuellement, 38 p. 100 des cas sont reportés, ce qui est trop élevé. Il y a deux ans, nous étions à environ 40 p. 100. Nous travaillons d'arrache-pied pour nous assurer qu'il sera très difficile de dire qu'il s'est produit quelque chose à la dernière minute. L'audience aurait quand même lieu. Il le faut, parce qu'on a déjà signifié l'avis et tout le reste. Nous tentons donc de nous assurer qu'il n'y a aucune question de forme.
Mais c'est difficile, et nous tentons de faire preuve de toute la prudence voulue. C'est tout ce que je peux vous dire en réponse à votre question sur les consultants qui pourraient peut-être tenter de choisir le commissaire.
Mme Krista Daley: J'aimerais ajouter que je réfléchis à cet aspect depuis que vous avez posé la question la dernière fois, car j'essaie toujours de comprendre comment cela pourrait se produire. Tout ce que je peux vous dire c'est que dans le cas d'une personne qui présente une demande pour déplacer l'audience d'une ville à une autre—excusez-moi, je recommence.
À leur arrivée, les demandeurs sont assignés à un bureau en particulier. Ils vont à Calgary, ils vont à Toronto, ou ils vont à Montréal. S'ils souhaitent changer le lieu, ils doivent nous en faire la demande. Nous examinons divers facteurs. Dans ce cas-ci, si nous avions des soupçons, si nous pensions que les facteurs ne sont pas véritables, que c'est fait à d'autres fins, parce qu'on cherche un commissaire en particulier, nous en tiendrions compte dans notre décision sur la demande.
M. Art Hanger: Combien de fois avez-vous dû procéder ainsi?
Mme Krista Daley: Je n'ai pas ces données.
[Français]
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Monsieur Charbonneau, allez-y.
M. Yvon Charbonneau: Merci, madame la présidente.
Je voudrais revenir sur une question que j'ai soulevée tout à l'heure et que d'autres de mes collègues ont évoquée aussi. Il y a de l'information récente qui vient de m'arriver.
Tout d'abord, j'aimerais parler du caractère disparate des taux d'acceptation des réfugiés d'origine palestinienne qui viennent du Liban. En effet, la Palestine n'est peut-être pas un pays reconnu comme tel, alors vous écrivez « Liban ». Il y a des Palestiniens qui viennent du Liban.
Il y a des juges qui ont un score de 0 p. 100 d'acceptation, et d'autres de 100 p. 100. Il y en a qui ont des scores de 14 p. 100, 72 p. 100, 50 p. 100. Il y en a à peu près dans toutes les dizaines, entre 0 et 100, pour la même présentation de dossiers, la même situation. En ce qui a trait aux Palestiniens qui proviennent des territoires occupés, le score est entre 25 p. 100 et 100 p. 100. Pour ce qui est des Palestiniens qui sont à Montréal, d'après les avocats que j'ai pu consulter et qui ont rassemblé les données, entre juillet 2001 et juillet 2003, 25 dossiers ont été traités, quatre juges impliqués, et les scores allaient de 17 p. 100 à 100 p. 100.
Alors, à mon avis, c'est inexplicable. Ce sont des gens qui ont une formation convenable, qui sont informés des mêmes situations, qui ont à peu près la même expérience de vie et, pourtant, les scores varient entre 17 p. 100 et 100 p.100. Comment peut-on avoir l'impression d'être devant une instance qui administre la justice, alors qu'on a des scores entre 17 p. 100 et 100 p. 100 pour le même dossier? C'est difficile à avaler.
Je comprends que vous avez pris note, tout à l'heure, de ma suggestion quant à un meilleur encadrement, mais comment ne vous êtes-vous pas déjà rendu compte il y a quelques années des problèmes d'une telle disparité? Cela a pour résultat que des personnes sont aujourd'hui déportées ou sur le point de l'être à partir d'arrestations qui se sont faites ce matin. C'est à cause de décisions comme celles que vos commissaires ont prises que le ministre est dans l'embarras aujourd'hui et que ces Palestiniens-là sont menacés ou seront déportés, et ce, pour retourner où? Au camp d'Aïn el-Hiloueh, au Liban, par exemple.
Ces gens-là ont fui des situations. Derrière eux, là-bas, il n'y a pas de pays, pas de mécanisme, pas de cour de justice. Il n'y a rien. Ce sont des camps de réfugiés. Ils sont déjà reconnus comme réfugiés là-bas. Ils arrivent ici, et on ne sait plus s'ils sont des réfugiés ou non. Un juge dit oui dans 17 p. 100 des cas; l'autre dit autre chose.
Quel est donc ce système? Comment pouvez-vous m'expliquer et faire comprendre à la population que vous avez entre les mains un outil qui est un tribunal qui s'occupe de la justice et de l'équité? Comment pouvez-vous m'expliquer cela?
À (1050)
M. Jean-Guy Fleury: Je pense que j'ai été très ouvert avec vous en vous disant que je n'ai pas, moi-même, pris part à des analyses sur cette question. Est-ce qu'il y a eu des analyses avant mon arrivée? Je vais voir. Si, pour une raison ou une autre, il y a des analyses, la seule chose que je peux faire est de prendre note de vos commentaires d'aujourd'hui.
La vice-présidente (Mme Madeleine Dalphond-Guiral): Alors, monsieur le commissaire, mesdames, je pense que vous allez partir d'ici en vous disant que vous avez eu deux heures fort occupées.
Je tiens à remercier tous les collègues qui ont été des participants actifs, parce qu'il n'y a aucune comparution qui soit intéressante si les membres n'ont pas de questions.
Comme il y a au moins une chance sur deux que ce comité, tel qu'il est maintenant, ne se réunisse plus, je vais agir comme une vraie présidente. J'ai bien dit une chance sur deux. Alors, il me fait plaisir de remercier tous les gens qui nous ont aidés à travailler. Je pense, entre autres, à tous les adjoints des parlementaires et particulièrement à mon adjoint, Patrick, qui est là et qui est en train de mourir, exactement. Il y a aussi Bill et Ben, bien sûr, qui sont vraiment des gens très professionnels et qui nous aident beaucoup dans tous les sens du terme, s'il y a un crime à apporter des biscuits quand on siège l'après-midi.
Je voudrais en profiter pour vous remercier de votre présence, bien sûr, et vous offrir, à vous et aux observateurs à l'arrière, nos voeux les meilleurs pour un joyeux Noël. Je peux vous dire qu'en 65 ans d'existence, je n'ai jamais offert des voeux de joyeux Noël et de bonne année si tôt. Peut-être qu'on est en train de changer les règles et qu'on va avoir des années de 10 mois.
Alors, voilà. La séance est levée.