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Bonjour à tous. Il est plaisant d’être de retour après la pause d’une journée que nous avons prise en raison du congrès à la direction du Parti libéral.
Monsieur LeBlanc, je sais que vous avez agi à titre de maître de cérémonie du congrès. Vous n’avez pas gagné, bien sûr, puisque vous ne vous étiez pas présenté, donc c’est bien. On dit que vous avez fait du très bon travail comme maître de cérémonie.
Passons tout de suite aux témoins. Après que chacun d’entre vous — chaque groupe — aura eu environ huit minutes, nous passerons à la période de questions. C’est la façon de faire habituelle.
Aujourd’hui, conformément à l’article 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude sur la politique commerciale du Canada.
Les témoins interviendront selon l’ordre indiqué à l’ordre du jour, en commençant par la Fédération canadienne de l’agriculture. Je ne sais pas qui, de Marvin Shauf, second vice-président, ou de Clinton Monchuk, analyste des politiques agricoles, prendra la parole, alors allez-y comme vous le souhaitez.
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Merci, monsieur le président, et merci de nous avoir donné l’occasion de venir témoigner aujourd’hui. M. Clinton Monchuk, analyste des politiques commerciales de la Fédération canadienne de l’agriculture, m’accompagne à titre de conseiller technique.
La FCA est le premier organisme agricole en importance au Canada. Elle représente des organismes agricoles provinciaux et des groupements nationaux de producteurs spécialisés. La FCA, qui participe activement aux négociations commerciales, vient tout juste de superviser, dans le cadre du forum public de l’OMC, une séance d’un après-midi intitulée « Le Cycle de Doha : prochaines étapes et conséquences pour l'agriculture ».
Selon la FCA, l’accord commercial multilatéral conclu par la voie de l’OMC est la meilleure façon d’atteindre les objectifs de commerce loyal et équitable. Ces dernières années, nous avons constaté qu’il s’agit d’un long processus et qu’il est parfois impossible d’en arriver à un consensus dans le cadre des négociations. Par conséquent, nombre de nos concurrents, comme les États-Unis, l’Australie et le Mexique, ont axé leurs efforts sur des accords commerciaux bilatéraux et régionaux qui permettront à leur industrie de jouir d’un meilleur avantage concurrentiel par rapport au Canada. Les accords bilatéraux n’abordent pas les questions de soutien interne, qui sont au cœur de la plupart des problèmes commerciaux observés dans le monde.
L’OMC, soit l’approche qu’a adoptée le gouvernement du Canada pour sa politique commerciale, est sur la bonne voie. La Fédération continue de soutenir la stratégie d’équilibre des échanges et continuera de louer cette position sur la scène internationale, en tant que membre de la Fédération internationale des producteurs agricoles et du Groupe de Cairns, et en tant que chef de file nord-américain et européen dans le domaine de l’agriculture.
Particulièrement, dans le cadre des négociations de l’OMC relatives à la concurrence à l’exportation, nous souhaitons que les pays éliminent toutes les subventions aux exportations tout en maintenant le droit d’avoir des ECE axées sur les producteurs et n’ayant pas d’effet de distorsion du commerce. Par ailleurs, nous demandons une réduction équitable du soutien interne, selon laquelle les grands dépensiers auraient à réduire leur soutien dans une plus large mesure que les petits dépensiers. Des propositions soumises par des pays prévoient des plafonds spécifiques à certains produits, ce qui est source de problèmes. En effet, ces dispositions permettent aux pays en question de continuer de dépenser d’importantes sommes d’une façon non équitable.
Par exemple, lors de la dernière notification à l’OMC, en 2001, les États-Unis ont offert un soutien spécifique de 1,06 milliard de dollars pour le sucre, ce qui représentait 52,2 p. 100 de la valeur de leur production. Le Canada n’a offert aucun soutien spécifique à ses producteurs de betteraves à sucre au cours de cette période. En se fondant sur les dépenses historiques pour fixer le plafond associé à certains produits en particulier, on institutionnalise l’important soutien versé aux producteurs des États-Unis et on restreint la capacité d’autres pays qui, comme le Canada, n’ont pas offert ce type de soutien par le passé.
En ce qui concerne l’accès aux marchés, nous avons besoin de réelles améliorations pour rentabiliser l’accès à d’autres marchés tout en protégeant les produits canadiens sensibles. La liste des produits sensibles devrait être utilisée aux fins prévues, de sorte qu’on puisse appliquer vigoureusement les réductions tarifaires aux autres produits et ainsi améliorer l’accès aux marchés. Nous devons également reconnaître que des barrières commerciales d’origine non tarifaire ont restreint notre accès à des marchés du monde entier.
Le texte du Cadre de juillet 2004 et le texte ministériel pour Hong Kong permettent toujours au Canada de participer au Cycle de Doha sans que cela affecte sa capacité de gestion de l’offre. Les deux cadres de travail permettraient une hausse considérable de l’accès aux marchés, ce qui serait profitable pour nos exportateurs et permettrait de maintenir l’existence des entreprises commerciales d’État.
En ce qui concerne les accords bilatéraux et régionaux de libre-échange, en raison de la difficulté de parvenir à une entente commerciale multilatérale convenant à 150 pays, de nombreux pays ont décidé d’améliorer leur accès aux marchés en concluant des accords commerciaux bilatéraux et régionaux. Le Canada s’est fait distancer par certains de ses principaux concurrents sur le plan des accords bilatéraux et régionaux de libre-échange. Si nous n’intensifions pas nos efforts pour clore les négociations en cours et pour trouver de nouveaux partenaires, nos exportateurs perdront de plus en plus de terrain sur des marchés où ils ont déjà établi une présence et auront de plus en plus de difficulté à pénétrer de nouveaux marchés.
La FCA appuie la stratégie actuelle du gouvernement dans la négociation d’ALE et espère que le ministère du Commerce international poursuivra ses efforts sur d’autres marchés clés. Des négociations sont actuellement en cours en vue de la conclusion d’ALE avec la République dominicaine, le Groupe des quatre de l’Amérique centrale, l’Association européenne de libre-échange, Singapour et, plus récemment, la Corée du Sud. Ces négociations sont essentielles pour obtenir un accès aux marchés et le maintenir. La FCA, conjointement avec d’autres organismes tournés vers l’avenir, a présenté une liste d’éventuels partenaires commerciaux sur lesquels le gouvernement devrait axer ses efforts. Parmi ces pays ou régions figurent la Chine, le Japon, la Communauté andine, y compris l’Équateur, la Colombie, le Pérou, la Bolivie et le Venezuela, l’Inde, et le Maroc.
Nous sommes conscients des obstacles à surmonter pour conclure des accords avec ces pays ou régions. Cela dit, les ressources actuellement consacrées aux accords bilatéraux de libre-échange ne sont pas suffisantes. Afin que le Canada demeure un exportateur de produits agricoles de premier plan, des ressources supplémentaires devront être consacrées à l’accès à de nouveaux marchés et au renforcement de notre présence sur des marchés où d’autres pays constituent une menace pour nos produits.
Je vous remercie à nouveau d’avoir permis à la FCA de faire une présentation aujourd’hui.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je ferai ma présentation en partie en anglais, en partie en français.
J’aimerais tout d’abord présenter brièvement notre organisme. Nous représentons tous les producteurs laitiers du Canada, soit un peu plus de 15 000 fermes laitières. Les produits sont commercialisés conformément à un système de gestion de l’offre qui nous a été profitable sur tous les plans.
À titre d’information, lorsqu’on fait référence au marché canadien des produits laitiers, de nombreux autres pays sont très jaloux — si je puis me permettre ce terme — des rendements obtenus par les producteurs laitiers compte tenu des prix de détail. De nombreuses raisons permettent d’expliquer cette situation. Chaque année, les producteurs investissent environ 90 millions de dollars dans les activités de commercialisation et de promotion. Voilà ce qui nous a permis de maintenir la viabilité du marché pour toutes les parties prenantes de l’industrie, y compris les détaillants et les entreprises de transformation. Depuis 40 ans, nous consacrons énormément de temps aux activités de développement sur ce marché, particulièrement dans le segment du fromage. C’est un marché très rentable pour nous, et nous voulons qu’il en reste ainsi.
Voilà pourquoi, dans le cadre des négociations commerciales à l’OMC, nous soulignons vigoureusement le fait que le Canada a des intérêts de nature offensive, mais aussi de nature défensive. Sur le plan défensif, notre objectif — étant donné que nous sommes un secteur sensible et compte tenu des sommes que nous investissons — est de protéger le plus possible le marché intérieur.
Nous savons que les négociations à l’OMC demanderont des efforts soutenus au cours des prochains mois, et la survie du système de gestion de l’offre est une préoccupation clé pour nous à ce chapitre. Le 22 novembre 2005, lorsque tous les partis politiques ont appuyé la motion de la Chambre voulant que soit gardé intact le système de gestion de l’offre et ses trois piliers, c’était quelque chose... Lorsque nous allons à l’étranger, que nous parlons à d’autres organismes agricoles du monde entier, ils en concluent que le système doit vraiment être profitable pour toutes les parties prenantes, étant donné que tous les partis appuient la même politique agricole. Cette situation ne se rencontre nulle part ailleurs dans le monde. Je crois que nous devrions miser sur cet aspect le plus possible pour montrer à quel point nous avons réussi à assurer le succès des produits laitiers sans verser de subventions, comme nous avons dû le faire pour d’autres produits de base.
Nous devons également nous assurer que nos affaires sont en ordre à la Chambre avant d’entamer les négociations commerciales, car lorsqu’il existe des intérêts de nature défensive et d’autres de nature offensive, on doit toujours chercher à maintenir un équilibre. Au sujet de cet équilibre, nous aimerions souligner que la majeure partie des revenus tirés des activités agricoles et agroalimentaires réalisées au Canada, plus de 70 p. 100, proviennent du marché intérieur. Nous exportons énormément, mais lorsqu’on se penche sur les revenus — une annexe le montre ici —, nous devons garder ce pourcentage à l’esprit, car il est très élevé.
L’appui gouvernemental dont jouit le système de gestion de l’offre doit se refléter dans la politique agricole canadienne. Nous sommes conscients que des discussions sont en cours concernant le CSA, le nouveau CSA. Étant donné que tout tourne autour du revenu agricole et des façons d’accroître la rentabilité du secteur dans le circuit alimentaire, il devrait être clairement établi qu’un des éléments à envisager serait peut-être l’adoption d’un système de gestion de l’offre pour d’autres produits de base. À cet effet, on doit fondamentalement avoir un bon système de fixation des prix par les producteurs, de solides contrôles à l’importation et une discipline de production. Il est de plus en plus clair que l’amélioration du rendement passe par des techniques de gestion des stocks ou de gestion de la production pour éviter les excédents. Comme le dit le vieil adage : un surplus de produits mal organisé de 5 p. 100 réduit le prix de 50 p. 100. Voilà où intervient la gestion de l’offre pour maintenir un équilibre entre les entreprises de transformation et les autres entreprises du circuit alimentaire.
[Français]
Nous devons renforcer nos mesures de contrôle des importations. C'est absolument nécessaire dans un système de gestion de l'offre. À cet effet, nous souhaitons que le gouvernement canadien prenne certains moyens.
Je vais lire ces mesures, car elles sont très spécifiques :
- concrétiser le droit du Canada d'utiliser les mesures spéciales de sauvegarde, comme l'autorise l'Accord sur l'OMC. Jusqu'à présent, il est incompréhensible que le Canada n'ait pas encore concrétisé ces mesures, tandis que les États-Unis et l'Union européenne ont commencé à les appliquer dès la mise en oeuvre de l'Accord sur l'OMC;
- exercer nos droits comme celui de l'article XXVIII du GATT, tout comme l'Union européenne l'a fait récemment dans le cas du poulet salé, par exemple;
- faire preuve de retenue lorsqu'il s'agit de déterminer s'il y a lieu de délivrer d'autres permis d'importation. Bien souvent, lorsqu'il émet des permis d'importation supplémentaires, le gouvernement le fait souvent au détriment des agriculteurs;
- examiner les pratiques du Tribunal canadien du commerce extérieur et de l'Agence des services frontaliers du Canada pour assurer une meilleure transparence et veiller à ce que les producteurs de produits bruts puissent se défendre dans le contexte du régime de recours commerciaux au Canada. Par exemple, en ce qui a trait à l'accroissement des importations de l'huile de beurre et des concentrés protéiques du lait, les producteurs laitiers, au Canada, n'ont pas la qualification pour agir sur ces dossiers qui leur permettraient de porter plainte pour demander des droits antidumping ou compensateurs. La raison que nous invoquons surtout, c'est que nous produisons du lait, mais pas nécessairement de l'huile de beurre ou des concentrés protéiques du lait. Par contre, nous savons qu'il faut du lait pour produire ces ingrédients. Les producteurs laitiers subissent donc un impact direct, mais ils ne peuvent pas avoir de recours antidumping et compensateurs ou des mesures de sauvegarde, puisqu'ils ne peuvent se qualifier à cette fin.
En faisant siennes ces mesures, le Canada rehausserait sa crédibilité à l'échelle internationale. Permettez-moi de vous donner un exemple: à l'heure actuelle, le Canada ne peut pas être pris au sérieux lorsqu'il exige que soient maintenus des mécanismes de sauvegarde spéciale, alors qu'il ne les a pas définis. Il en parle, mais il n'agit pas. Prenons l'exemple des mesures de sauvegarde pour l'huile de beurre. Les producteurs ont perdu environ 50 p. 100 de leur marché de crème glacée. Quand on s'arrête au produit et à l'impact sur les producteurs laitiers, on voit qu'il y a là des raisons suffisantes pour mettre sur pied des mesures de sauvegarde.
La pause dans les négociations à l'OMC indique que les propositions sur la table doivent être révisées. Malgré la multiplication des efforts pour relancer officiellement les pourparlers à Genève, la probabilité d'un autre échec reste assez élevée. À l'heure actuelle, des discussions se tiennent un peu partout, mais il y a peu de progrès. Nous croyons qu'à ce rythme, nous serons encore dans une impasse pendant deux ou trois ans, sans aucune entente, si ces pourparlers échouent de nouveau en mars.
Nous avons notre opinion là-dessus : les pays développés ont offert des mesures de soutien à leurs agriculteurs pendant des décennies, et cette situation n'est pas près de changer. Compte tenu des programmes verts et des programmes de soutien découplé que l'Union européenne et les États-Unis, spécialement, paient à leurs agriculteurs, nous ne croyons pas que cela disparaîtra à court terme. Nous ne les voyons que changer de lieu et de nom. Les États-Unis ont des programmes semi-verts, semi-bleus. Ils ont une multitude de choses. Compte tenu des diverses impasses dans lesquelles se trouvent les négociations, nous ne voyons pas vraiment d'accommodement pour l'agriculture au Canada, sauf si on donne des accès aux marchés propres, comme Marvin vient de le mentionner.
En raison de cela, on doit être très conscient des enjeux et s'assurer que l'intérêt canadien global est pris en compte.
Dans le cas où le report de l'entente s'étendrait après le mois de mars, nous devrions déterminer comment notre système pourrait être moins en péril dans la perspective de l'OMC. Les producteurs de lait du Canada ne croient pas dans un marché déréglementé. La libéralisation des échanges n'améliorera pas le bien-être économique général de l'industrie laitière ou des producteurs laitiers. Nous disposons d'études qui ont été faites par des organismes aux États-Unis — elles sont attachées à une autre annexe — et qui montrent ces résultats.
La concentration de la négociation consiste davantage à savoir comment on élimine les exportations subventionnées, comment les boîtes vertes seront réglementées, comment les boîtes bleus et les paiements seront découplés. Aussi longtemps que la négociation évoluera en ce sens, l'intérêt des agriculteurs en général autour du globe ne sera vraiment pas abordé, parce que le revenu est trop faible ou parce qu'il n'y a pas de revenu du tout. Voilà le problème. Il faut que ce soit abordé dans ce contexte.
Il faut être positif et essayer de terminer la négociation, si possible en prenant en considération nos intérêts. Nous disposons de temps. Enfin, nous espérons que le gouvernement canadien révise un peu l'approche et reconnaisse le tunnel dans lequel nous sommes, de sorte que nous ne nous fassions pas siphonner et que nous ne puissions plus nous en sortir. Nous approchons de cette situation. Le gouvernement canadien doit se repositionner et penser stratégiquement à l'industrie globale canadienne.
Merci beaucoup, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président, merci de donner à la Canadian Canola Growers Association l’occasion de prendre la parole devant le comité aujourd’hui. C’est un réel honneur pour nous d’être ici. Le commerce international est d’un grand intérêt pour nous également.
Nous avons remis nos commentaires au comité, donc je crois que je soulignerai les points importants en résumant la façon dont nous voyons les choses.
Tout d’abord, pour faire une brève présentation, la Canadian Canola Growers Association compte environ 60 000 membres votants, soit environ 95 p. 100 des producteurs de canola du Canada. La CCGA est dirigée par un conseil d’administration formé de représentants élus provenant de nos organismes membres; nous avons pour mission d’exercer une influence sur les questions et politiques nationales et de contribuer à l’accroissement de la rentabilité des producteurs canadiens de canola.
Parmi nos organismes membres figurent la Ontario Canola Growers Association, la Manitoba Canola Growers Association, la Saskatchewan Canola Growers Association, la Saskatchewan Canola Development Commission, la Alberta Canola Producers Commission et les British Columbia Grain Producers.
Le canola est grandement tributaire des échanges. Chaque année, nos 60 000 membres qui cultivent du canola en produisent environ de six à sept millions de tonnes. De fait, en 2005, les agriculteurs canadiens ont produit 9,6 millions de tonnes de canola.
La valeur à la ferme du canola, selon le prix, se situe entre 2 et 2,5 milliards de dollars. Il s’agit de la valeur à la ferme, soit celle reçoivent les agriculteurs. Voilà qui représente entre le tiers et la moitié du revenu annuel brut des agriculteurs. L’industrie dans son ensemble — l’industrie du canola — génère des activités économiques d’une valeur d’environ 11 milliards de dollars chaque année.
Le canola, bien entendu, repose fortement sur les échanges. La moitié de la production canadienne est exportée sous forme de graines vers d’importants marchés comme le Japon, le Mexique et les États-Unis. La moitié du canola produit est trituré au Canada pour en extraire l’huile et la moitié de cette huile est exportée à destination de marchés comme les États-Unis, la Chine, le Japon et la Corée du Sud ainsi que d’autres marchés étrangers. Nous sommes donc fortement tributaires des marchés internationaux.
Cela dit, ce sont les marchés internationaux qui fixent le prix des graines, de l’huile et du tourteau de canola produits au Canada, sauf que les subventions et les droits de douane ont un effet de distorsion sur les marchés internationaux. Les subventions et les droits de douane entraînent quotidiennement des coûts pour nous. Selon les estimations d’Agriculture Canada, les subventions ayant un effet de distorsion du commerce entraînent des coûts d’environ 1,3 milliard de dollars chaque année pour le secteur canadien des céréales et des oléagineux. Ces estimations commencent à dater, car l’étude a été réalisée en 2000 ou 2001, mais ce sont les meilleures que nous avons à ce jour.
Par ailleurs, les droits de douanes et les contingents entraînent des coûts de 1,2 milliard de dollars par année. Ces coûts sont ceux associés au secteur des céréales et des oléagineux du Canada, et cette donnée est tirée de l’étude du George Morris Centre.
Si l’on se penche sur le cas du canola en particulier, 260 millions des 1,3 milliard de dollars que nous coûtent les mesures de soutien interne et les subventions sont associés à ce produit. Voilà qui témoigne de l’ampleur des effets sur le canola, et on parle seulement ici du soutien interne et des subventions à l’exportation.
Chaque année, environ 540 millions des 1,2 milliard de dollars que nous coûtent les droits de douane et les contingents sont associés au canola. Ainsi, les coûts s’élèvent à environ 800 millions de dollars par année pour le canola, et ils découlent de pratiques ayant un effet de distorsion du commerce adoptées par d’autres pays.
Par conséquent, une libéralisation réelle et importante des échanges est nécessaire pour les producteurs canadiens de canola, et ce, pour les trois piliers que sont le soutien interne, la concurrence à l’exportation et l’accès aux marchés dans le cadre des négociations à l’OMC. Je parlerai brièvement de ces trois piliers et vous donnerai une idée de ce à quoi on s’attend pour chacun d’eux.
En ce qui concerne le soutien interne, nous souhaitons à long terme l’élimination de toutes les mesures de soutien interne ayant un effet de distorsion du commerce, et nous appuyons la position du gouvernement du Canada, qui souhaite que les mesures de soutien interne ayant un effet de distorsion de la production et du commerce soient réduites au maximum, voire éliminées. Nous sommes d’accord avec cette position.
Si les pays membres de l’OMC décident de soutenir leurs entreprises agricoles, cela devrait être fait dans le cadre de programmes et de politiques n’ayant pas d’effet de distorsion de la production ou du commerce. Nous devons nous appuyer sur des règles de l’OMC pour encourager les pays membres à recourir à des mesures de soutien n’ayant pas d’effet de distorsion du commerce.
Nous devons réduire considérablement les subventions et nous assurer que celles qui sont les plus élevées seront réduites dans une plus large mesure et de façon progressive, et je crois qu’à cet égard, les négociations sont dans la bonne voie. Par ailleurs, un plafond spécifique aux produits devra être établi en ce qui concerne le soutien interne ayant un effet de distorsion du commerce afin d’améliorer la position concurrentielle des producteurs de canola du Canada.
En ce qui concerne la concurrence à l’exportation, nous avons besoin d’une élimination rapide de toute forme de subventions à l’exportation, y compris les subventions sous forme de crédits à l’exportation, d’aide alimentaire, de promotion des marchés à l’exportation et de taxes à l’exportation, entre autres. Le recours à ces subventions à l’exportation n’est pas systématique, mais il existe. Nous sommes très vulnérables lorsque des pays comme ceux de l’UE lancent leurs programmes. Ils peuvent actuellement le faire conformément aux règles de l’OMC, et nous devons remédier à cette situation.
En ce qui concerne l’accès aux marchés, d’importantes réductions de droits doivent être apportées à chaque échelon de la formule de réduction tarifaire pour permettre à notre industrie de tirer parti des débouchés offerts sur le marché mondial.
Nous devons également aborder la question de la progressivité tarifaire, qui est source de problèmes dans le domaine du canola et qui menace sérieusement notre compétitivité. La progressivité tarifaire devrait figurer parmi les questions prioritaires dans le cadre de ce cycle de négociations.
On parle de progressivité tarifaire lorsque les droits frappant les produits bruts sont moins élevés que ceux frappant les produits à valeur ajoutée, comme l’huile. Cette pratique nuit à notre industrie de la trituration et à nos activités à valeur ajoutée au Canada, et déplace les occasions d’emploi et les activités économiques vers d’autres pays. Le Japon en est un excellent exemple.
Les graines de canola sont en concurrence directe avec des produits comme le soja. La parité tarifaire est essentielle à notre capacité de soutenir la concurrence provenant de ces produits et elle doit aussi figurer parmi les questions prioritaires dans le cadre des négociations. On peut citer plusieurs exemples de cas où le soja jouit d’un traitement tarifaire préférentiel par rapport au canola. C’est injuste. Nous nous livrons une concurrence bec et ongles. Nous avons de la difficulté à soutenir leur concurrence lorsqu’ils jouissent d’un tarif préférentiel, lorsque les droits de douane sont moins élevés pour leurs produits que pour notre canola. La question de la parité doit être réglée.
En ce qui concerne les produits sensibles, les droits sous contingent doivent être réduits, les volumes contingentaires doivent être accrus, et les droits hors contingent doivent être considérablement réduits pour que l’accès soit réel et important dans le cas des marchés du canola qui pourraient être désignés comme étant sensibles.
Mentionnons l’Inde, par exemple, qui impose actuellement des droits de douane de 75 p. 100 sur l’huile, 45 p. 100 sous contingent et 75 p. 100 hors contingent, ainsi qu’un droit de 30 p. 100 sur les semences. Nous savons que l’Inde désignera son marché de l’huile végétale comme étant un marché sensible. Nous devons établir des règles adéquates pour avoir accès aux marchés sensibles d’autres pays.
Voilà la situation en bref, monsieur le président.
Merci encore de m’avoir donné l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui. Je serai heureux de répondre à vos questions plus tard.
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Merci, monsieur le président, et merci de nous avoir donné l’occasion de faire une présentation aujourd’hui. C’est un honneur pour moi de m’adresser à un groupe aussi prestigieux. Les hommes et les femmes présents dans cette pièce accomplissent un travail très important et jouent un rôle de premier plan au sein du Parlement du Canada, c’est donc un honneur pour moi d’être ici.
Je suis aussi heureux d’être ici parce que nous avons reçu un demi-millimètre de neige à Toronto la nuit dernière, ce qui a causé plus de 100 accidents, et le retard de mon vol. C’est à se demander ce qui arrivera quand il neigera vraiment.
Quoi qu’il en soit, j’ai trois objectifs aujourd’hui. Je ferai l’historique de l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire et indiquerai quel est son rôle en lien avec l’OMC, compte tenu de la situation actuelle à l’OMC. J’énoncerai ensuite mes demandes. Tout le monde a une demande ici aujourd’hui. Je le dis franchement. Je le répéterai à la fin: nous souhaitons que le Canada agisse pour remettre les discussions sur la bonne voie à l’OMC et qu’il travaille avec d’autres pays à l’accroissement de la convergence. Pour ce qui est de la question la plus épineuse, les produits sensibles, le Canada est isolé du reste du monde, à 149 contre 1. Voilà ce que je demande, et je le répéterai à la fin. Je voulais simplement que vous sachiez quelle serait ma demande.
L’histoire de l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire commence à la fin des années 1990.
Je m’appelle Liam McCreery. Je suis un agriculteur du sud de l’Ontario. Je cultive du soja, du maïs et du blé. À la fin des années 1990, un groupe de personnes aux vues similaires se sont rassemblées à Ottawa pour jeter un regard sur le Cycle d’Uruguay de l’OMC. Nous nous y sommes penchés parce que nous subissions les effets dévastateurs de ce que faisaient les Américains du U.S. Farm Bill, les Européens des droits de douane, les Japonais des droits de douane et des subventions, et nous nous sommes dits que leurs actions n’étaient certainement pas légales puisqu’au milieu des années 1990 notre gouvernement avait conclu un accord de libre-échange à l’OMC, qu’on appelait le Cycle d’Uruguay. Nous avons alors constaté qu’il ne s’agissait pas véritablement d’un accord de libre-échange, mais d’un cadre de travail à partir duquel on travaillerait à la libéralisation du commerce agricole. L’existence du Cycle d’Uruguay était excellente pour nous, mais nous étions toujours aux prises avec la présence d’énormes subventions et droits de douane.
À la fin des années 1990, donc, des organismes aux vues similaires, dont les Ontario Soybean Growers et d’autres organismes de partout au Canada, se sont regroupés pour former l’Alliance canadienne des exportateurs agroalimentaires. Vous ici présents êtes tous du milieu politique. Vous savez ce qui s’est passé à la fin des années 1990. Le Parti réformiste est devenu l’Alliance. Par conséquent, nous avons aussi dû changer de nom, et nous avons pris celui d’ACCAA, qui est le seul organisme de défense des intérêts commerciaux de l’ensemble de la chaîne de valeur agricole du Canada. Nous en sommes très fiers. Les membres de l’ACCAA représentent plus de la moitié des producteurs du secteur et environ 60 p. 100 des recettes totales enregistrées dans le secteur. Nous comptons 14 membres. Vous venez d’entendre un de nos membres très importants, la Canadian Canola Growers Association.
J’attirerai votre attention sur deux groupes en particuliers, soit les Producteurs de grains du Canada, représentant le premier secteur agricole en importance au Canada, ainsi que la Canadian Cattlemen's Association, représentant le deuxième secteur agricole primaire du Canada. Nous avons 12 autres membres. Je le mentionne, car l’ACCAA représente réellement la majorité des intérêts commerciaux des agriculteurs canadiens.
Nous avons remis nos observations à votre excellent greffier. Elles sont en anglais seulement, je m’en excuse. Il m’a dit qu’il vous les remettrait lorsqu’elles seront disponibles dans les deux langues officielles.
Voilà pour la présentation de l’ACCAA.
Parlons maintenant de commerce du point de vue du Canada en général. Tous ici présents savent que les échanges internationaux génèrent plus de 40 p. 100 du produit intérieur brut du Canada. Voilà pourquoi nous sommes ici aujourd’hui, pour parler des échanges. Sur le plan de l’agriculture, prenons l’ensemble du grand secteur agricole canadien. Le Canada est le troisième exportateur mondial de produits agricoles et agroalimentaires — le troisième. Notre économie figure au neuvième rang mondial; et nous sommes les troisièmes exportateurs mondiaux de produits agricoles.
Plus de la moitié de nos produits agricoles franchissent la frontière. Autrement dit, si nous n’avions pas la possibilité de faire le commerce international de produits agricoles, et certains préconiseront cela, plus de la moitié des producteurs canadiens devraient cesser leurs activités. Cela représente plus de 120 000 producteurs. Voilà un aspect clé de l’agriculture : plus de 91 p. 100 d’entre nous sommes tributaires des marchés internationaux, soit en tant que destination des produits, soit comme mécanisme de fixation des prix. C’est la réalité. Que je vende mon soja aux acheteurs asiatiques par l’entremise de mon agent ou que je vende mon maïs ici en Ontario, le prix est fixé à Chicago. Ce prix est sans contredit faussé par les subventions américaines, les subventions européennes et les droits de douane imposés par les pays riches du monde.
Je demande sincèrement aux membres de prendre du temps — je sais combien vous êtes occupés — pour lire les observations que vous remettra le greffier. Elles indiquent clairement quels sont les effets dévastateurs de ces distorsions pour les membres de l’ACCAA.
On parle de milliards de dollars. Vous avez mentionné un chiffre de 1,3 milliard de dollars concernant les subventions, Rick. Vous avez aussi parlé d’un montant de 1,6 milliard concernant les droits de douane. C’est près de 3 milliards de dollars seulement pour le secteur des céréales et des oléagineux. J’en parlerai brièvement.
J’espère que nous sommes bien ici pour parler du Cycle de Doha et du fait que nous nous sommes écartés du droit chemin, que nous avons besoin de remettre le processus sur les rails pour parvenir à une conclusion heureuse. Il est également important de se rappeler que le Cycle de Doha n’est pas seulement important pour nous. Le Canada repose fortement sur le commerce international — cela représente près de la moitié de notre économie —, mais les pays en développement aimeraient eux aussi établir une présence sur les marchés internationaux dans l’espoir d’améliorer leur sort. Il importe de se rappeler qu’on ne parle pas seulement de commerce international, mais aussi d’affaires étrangères.
Si on remonte à 2001 — petit rappel historique —, le Cycle de Doha a révélé un projet très ambitieux. Plus tard, le Cadre de juillet 2004 définissait le projet plus en détail. Le Canada soutenait ces deux initiatives — soit le lancement du Cycle de Doha et le Cadre de juillet 2004.
Rappelons-nous que conformément au Cadre de juillet 2004, on affirmait que tous les droits de douane seraient réduits, et tous les autres pays du monde étaient d’accord. Voilà le point de départ, ce sur quoi nous nous sommes entendus.
Quelles sont les conséquences du fait de ne pas avoir négocié d’accord?
Je constate qu’il me reste une minute, je dois donc me dépêcher.
Parlons un peu des États-Unis. D’aucuns sont très préoccupés, avec raison, du fait que les Américains ont consacré 15 milliards de dollars à des mesures de soutien ayant un effet de distorsion du commerce cette année, dont 10 milliards de dollars sont allés aux producteurs de maïs. Conformément aux règles actuelles de l’OMC, ce montant pourrait être plus élevé et atteindre 19 milliards de dollars. Je suis un producteur de maïs. J’ai été témoin de ce qui s’est produit sur les marchés l’an dernier lorsque les Américains ont pris des mesures de dumping d’une valeur de plus de 10 milliards de dollars. Selon la proposition actuelle des Américains, les mesures de soutien ayant un effet de distorsion du commerce ne pourraient excéder 7 milliards de dollars. Voilà ce qui est proposé. Voilà ce que nous pourrions perdre si les négociations échouent dans le cadre du Cycle de Doha.
Revenons à ma principale demande. Il est essentiel que le gouvernement du Canada appuie Pascal Lamy dans ses efforts de relance des négociations, et il est essentiel pour le Canada, en tant qu’un des principaux pays commerçants du monde, en tant que chef de file mondial et en tant que pays fortement tributaire du commerce international, de commencer à travailler sérieusement à la convergence.
Encore une fois, je ne le dirai jamais assez. Les produits sensibles constituent l’obstacle le plus difficile à franchir à l’OMC. Nous en sommes pleinement conscients, et le Canada a décidé de ne pas participer aux négociations concernant cette question. Nous sommes isolés, à 149 contre 1. Il n’y a aucun moyen d’embellir les choses et de tenter de dire le contraire. Nous n’avons pas participé.
J’espère qu’au fil des négociations, nous garderons à l’esprit l’engagement que notre pays a pris envers les trois piliers que Rick a si bien décrits dans sa présentation.
Monsieur le président, vous m’avez demandé de m’en tenir à huit minutes. Merci de m’en avoir accordé une de plus. J’en suis très reconnaissant. Une dernière chose: je vous en prie, lisez ce document. Il contient de nombreux renseignements très utiles, et je suis désolé de vous compliquer la tâche, mais le fait est qu’en tant que décideurs, vous êtes les personnes détenant le pouvoir d’améliorer le sort de 91 p. 100 des producteurs canadiens.
Merci.
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Oui, des efforts substantiels sont accomplis par certaines associations de producteurs agricoles au Canada.
Par exemple, l’UPA au Québec et l’UPA-DI, qui est l’agence de développement international de l’organisme, travaillent en très étroite collaboration avec tous les pays francophones d’Afrique et avec des fonctionnaires de très haut niveau. Ils veulent adapter les principes de gestion de l’offre de la politique de développement du secteur alimentaire de façon à atténuer une partie des pertes et à créer une économie intérieure efficace. De nombreuses discussions sont en cours. En ce moment, des efforts considérables sont déployés à cette fin.
En ce qui a trait aux autres pays, nous participons à divers séminaires agricoles. Le revenu agricole à l’échelle mondiale constitue un problème, et de nombreux pays commencent à s’intéresser aux mécanismes de la gestion de l’offre.
À l’heure actuelle, un groupement de producteurs laitiers européens se trouve au Canada pour étudier de plus près la gestion de l’offre. Nous avons envoyé des gens là-bas pour expliquer le fonctionnement du système, les critères à respecter et la discipline de la production à instituer pour obtenir un rendement convenable. L’intérêt manifesté est considérable.
Pour l’instant, la question est de savoir comment ils parviendront à appliquer des politiques de ce genre dans le cadre des négociations de l’OMC, eu égard aux besoins de leur pays, et c’est ce qui est examiné dans de nombreux domaines.
J’estime qu’il s’agit d’un élément clé. Quel que soit votre type de production, le revenu agricole pose un problème. Pour étudier cette question en fonction des mécanismes de marché et non des coffres de l’État, il faut se fonder sur quelque chose de comparable.
Pour que l’exploitation agricole puisse obtenir un rendement raisonnable, il faut qu’il existe un système quelconque de contrôle de la production, qui n’est pas nécessairement axé entièrement sur la gestion de l’approvisionnement, comme au Canada. Sinon, un excédent de 5 p. 100 influe très défavorablement sur le prix qu’obtient le producteur.
Nous avons travaillé sans relâche au cours des dernières années. Je dirais que l’UPA-DI est active en Afrique depuis au moins cinq ou six ans, et tisse des liens en Europe depuis les deux dernières années. Les discussions se poursuivent.
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Selon moi, le Canada peut préserver la réputation de qualité dont jouissent ses produits tant que les producteurs canadiens peuvent gagner suffisamment d’argent à exercer leur métier.
C’est là que le problème se pose. Que nous ayons ou non une Commission canadienne du blé, que nous ayons ou non une Commission canadienne des grains, nous avons de la difficulté à trouver suffisamment d’argent pour les producteurs
La Commission canadienne du blé peut donner aux producteurs un certain pouvoir sur le marché. La Commission canadienne des grains voit au maintien de la qualité des grains, et nous permet de continuer à offrir des produits de qualité à l’échelle internationale.
Sur le plan du commerce, un des véritables défis, selon moi, consiste à faire des affaires sur un marché et à être confronté aux valeurs de ce marché. Lorsqu’il s’agit de soutenir la concurrence sur les marchés internationaux, il importe que nous nous arrêtions à un des désavantages que subit le Canada, qu’il y ait ou non une commission canadienne du blé en place. Ce désavantage tient au fait que les producteurs de grains canadiens, les producteurs de blé canadiens, les producteurs de canola — n’importe lequel de ces groupes — doivent effectivement rivaliser avec des producteurs de l’autre côté de la frontière qui continuent de produire, même si la valeur de leur produit tombe à zéro. C’est ce qui se produit en vertu du U.S. Farm Bill.
Nous avons des outils que nous pouvons utiliser. Nous les avons en ce moment. Différents défis se présenteront à nous si ce système s’écroule. Cependant, notre principal objectif commercial consiste à pouvoir verser suffisamment d’argent aux producteurs et ainsi préserver notre réputation, maintenir la qualité de nos produits et avoir un système commercial fiable à l’échelle mondiale.
Selon moi, il existe des différences substantielles entre les produits agricoles et les autres types de produits sur le plan du commerce international. Lorsque vous commencez par la production d’usine et considérez qu’il s’agit du fondement de l’agriculture du fait qu’elle offre la possibilité d’ajouter de la valeur au produit, on parle d’une matière première qui est à la merci du temps, des politiques gouvernementales et des subventions. Les conditions météorologiques de partout dans le monde peuvent avoir des répercussions sur les producteurs canadiens. Les changements de politiques gouvernementales d’autres pays ont aussi une incidence sur les producteurs canadiens. Donc, la production agricole est vulnérable aux effets de nombreux facteurs fondamentaux qui n’influent pas sur la production d’autres types de produits.
Par exemple, les subventions mises en place par l’Europe et les États-Unis ont pour but de favoriser la surproduction, de sorte que l’offre excède la demande de ces marchés. Ces mesures ont effectivement donné lieu à des déficiences du marché des produits de base, du marché des grains et des oléagineux. En Europe et aux États-Unis, cette surproduction offre de nombreux avantages pour le reste de la chaîne d’approvisionnement. Pour l’industrie canadienne, l’ensemble de notre chaîne de valeur — depuis les producteurs jusqu’aux entreprises d’embouche ou de transformation qui ajoutent de la valeur, qu’il s’agisse d’activités de mouture ou de concassage — est désavantagée par le Farm Bill.
J’estime donc que sur le plan du commerce international, il existe d’énormes différences entre les difficultés qu’affronte le secteur agricole canadien, d’amont en aval, comparativement au secteur de production d’autres biens et services. Je ne crois pas que le secteur agricole devrait être considéré de la même façon. Les différences sont considérables pour les produits agricoles, qu’il s’agisse ou non de produits destinés à la consommation.
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Je vous remercie d’avoir posé cette question.
En ce qui a trait au canola, je suppose que c’est un produit de base, du moins une matière première. À ce titre, il ne devrait pas être traité différemment de la plupart des produits de base de partout au monde. Nous recherchons les marchés ouverts, les marchés libres où il n’y a pas de pratiques qui faussent les prix et déséquilibrent la production.
Si les signaux que nous recevons des marchés libres sont clairs et sans distorsion des autres marchés libres, je suis confiant que nos producteurs survivront. Pour survivre, leurs denrées ne doivent pas être traitées de la même façon que d’autres l’ont été. Avec le canola, plus particulièrement, nous misons beaucoup sur la technologie et la différenciation de notre produit, sur sa salubrité, et nous travaillons à maintenir sa valeur compétitive par rapport aux autres produits sur le marché pour qu’il ne devienne pas une simple matière première.
D’après moi, ces observations pourraient s’appliquer à pratiquement n’importe quel produit de base, mais touchent plus particulièrement le canola. C’est ainsi que nous soutenons la concurrence, ou que nous tentons de le faire, sur les marchés internationaux. Pour ce faire, les signaux qu’envoient les marchés doivent être clairs et non ambigus, de sorte que nous savons quoi produire, quand le produire et en quelles quantités.
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Merci, monsieur le président, et merci messieurs. Il aurait été bon que des femmes représentent certaines de ces organisations. Je sais qu’une femme est maintenant à la tête de l’ACCAA — et Liam, je voudrais te remercier de la remplacer ici, car c’est loin pour elle, qui vient de la Saskatchewan. Nous apprécions vos observations.
Cette fin de semaine, j’ai eu le privilège de visiter M. Lamy, et il semble que l’objet principal de nos discussions aujourd’hui consiste à déterminer si nous allons reprendre ou non les négociations. Il voit le défi qu’il a lancé la semaine dernière comme un appel à un démarrage progressif des négociations, de sorte que je me sens vaguement encouragé, je suppose. Nous avons un bon bout de chemin à faire. Nous savons que nous devons tenir compte de la date d’expiration de la Trade Promotion Authority des États-Unis. Il y a des dates butoirs à considérer, mais il a laissé entendre qu’il tenterait non pas tellement de favoriser la tenue d’une réunion ministérielle, mais surtout de ramener les chefs de file à la table de négociation et d’en parler.
Lors d’une discussion intéressante, il a mentionné que Supachai n’aurait probablement jamais osé soulever la question de l’aide au commerce. La direction envisagée est quelque peu différente et je ne sais pas si vous en avez tous été informés. Il s’agit de renforcer les capacités des pays les moins avancés afin que ceux-ci puissent avoir la chance, comme nous, de prendre part aux échanges commerciaux multilatéraux.
Je suis encouragé par cette orientation, parce qu’elle nous ramène à la raison d’être du Cycle de Doha, soit le développement. Nous semblons tous nous abriter derrière le protectionnisme — le Canada ne fait certainement pas exception à la règle — pour tenter de protéger nos intérêts. Nous avons complètement oublié que nous dépensons 360 milliards de dollars par année pour la protection de nos agriculteurs à l’échelle mondiale, mais que nous ne dépensons que 60 milliards de dollars pour soulager la pauvreté. Comment pouvons-nous sortir de ce mode protectionniste et permettre à d’autres pays de participer aux échanges?
J’aimerais un bref commentaire de chacun de vous.
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Merci, monsieur Menzies.
L’aide au commerce est un concept intéressant, mais je me demande ce qu’il adviendrait si, par exemple, nous mettions en place une infrastructure commerciale dans un pays en développement, mais que les droits de douane de la plupart des pays développés, le G-10, l’Union européenne, les États-Unis, la Corée, le Japon, demeureraient trop lourds pour ce pays.
Si nous les aidons à se mettre en branle, nous devons leur donner la possibilité de maintenir l’impulsion donnée. Cette possibilité peut se concrétiser dans le cadre du mandat de Doha, qui est axé sur la réduction des droits de douane et vise à éliminer les subventions, de sorte que lorsque les producteurs africains exporteront du coton, ils ne seront pas désavantagés par les subventions que les États-Unis accordent à leurs producteurs de coton.
Le programme de Doha vise avant tout à favoriser le développement et il propose à cette fin les moyens nécessaires — l’accès au marché et l’élimination des facteurs de distorsion des échanges — à tous les pays du monde.
Voilà des chiffres renversants. Nous dépensons plus de 350 milliards de dollars en subventions aux agriculteurs et faussons ainsi les marchés. Ce sont les plus riches des pays riches qui agissent ainsi. Puis nous nous tournons vers les pays les plus pauvres des pays pauvres en leur offrant 50 milliards de dollars pour redresser leurs économies dévastées, 50 milliards de dollars pour relever des économies qui ne peuvent pas entrer dans la course parce que vous achetez vos produits frais des producteurs subventionnés par les pays les plus riches des pays riches. Le mandat de Doha consiste essentiellement à donner la chance de participer aux échanges.
Merci.
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J’estime que c’est une excellente question. Plus il y a d’échanges commerciaux entre les pays — si ces échanges sont équilibrés — mieux les pays s’en porteront dans l’ensemble.
Notre but, monsieur Menzies, est de relier tous ces aspects au revenu agricole. Le commerce est une chose et le revenu agricole en est une autre. À l’heure actuelle, le revenu agricole est compensé au moyen de paiements — appelons-les des subventions à l’exportation, et ainsi de suite.
Si on fait un raisonnement absolu, les producteurs de café à l’échelle de la planète seraient millionnaires, alors qu’ils forment un des groupes les plus pauvres — je parle de la production au niveau de la ferme. Et le café se vend... Il y a une théorie à ce sujet et il y a la logique de la situation.
Nous devons réellement voir à ce que cette question soit réglée de façon appropriée et rapide. C’est pourquoi la position du Canada, pour la FCA, favorisait un accès sans entrave aux marchés. Vous souvenez-vous de cela? Travaillons en faveur d’un libre accès aux marchés: éliminons tous les intra-contingents tarifaires.
Nous ne nous opposons pas à l’élimination des intra-contingents tarifaires. Surveillons l’évolution des échanges et nous en tirerons des enseignements. Voyons voir si ces subventions à l’exportation diminuent; nous verrons ce qu’il en est.
Nous devons faire preuve d’une très grande prudence, car le Canada se trouve dans une position très vulnérable lorsqu’il s’agit de ces questions. Il faut procéder avec grand soin et s’assurer que les politiques que nous adoptons sont légitimes.
Je crois que ce qu’il faut retenir que les signaux du marché sont liés aux politiques gouvernementales. Si nous continuons de tenter d’élargir l’accès aux marchés sans régler la question du soutien interne, nous libéralisons l’accès aux marchés à l’échelle mondiale en réduisant les droits, les marchés seront inondés de produits subventionnés venant de pays où le soutien interne est élevé.
En fin de compte, si nous agissons ainsi, ou si nous leur fournissions de l’aide d’une valeur inférieure à sa valeur réelle, ces pays ne pourront jamais s’en sortir. Ce n’est pas du développement, c’est l’inverse du développement.
Il importe que les signaux du marché soient clairs, ce qui signifie qu’il faut abolir le soutien interne, qui fausse les signaux. Une fois que nous aurons... La plupart des pays appliquent des droits parce qu’ils ne peuvent pas fournir de soutien intérieur, et l’imposition de droits est le seul moyen dont ils disposent pour protéger leurs producteurs et faire en sorte que leur marché ne soit pas envahi de produits subventionnés.
Lorsque ces questions seront examinées en termes réels, je crois que les pays parviendront à trouver les moyens de devenir des acheteurs dans un véritable marché.
La cause fondamentale de nombreux problèmes commerciaux est directement reliée au soutien interne, qui favorise la surproduction, laquelle fait baisser la valeur des denrées à l’échelle mondiale. Les producteurs des pays peu développés ne peuvent pas affronter la concurrence dans un tel marché. Les producteurs canadiens eux-mêmes ne peuvent pas tenir tête à cette concurrence. Je suis d’avis qu’il faut régler cette question pour corriger les inégalités commerciales.
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Merci, monsieur le président. J’aime toujours prendre la parole après M. Menzies.
Il importe de signaler que si le but du Cycle de Doha était effectivement d’aider les pays pauvres, il y aurait peu de démocraties progressistes du tiers monde qui s’opposeraient à l’orientation adoptée par l’OMC.
J’aimerais remercier tous les témoins qui sont ici aujourd’hui, particulièrement ceux qui représentent les Producteurs laitiers du Canada. J’ai été particulièrement intéressé d’apprendre, à la lecture de votre mémoire, que le gros des revenus découlant de la production agricole et agroalimentaire du Canada — plus de 70 p. 100 — vient du marché intérieur, que les Producteurs laitiers du Canada ne sont pas en faveur d’un marché déréglementé et qu’ils estiment que la libéralisation du commerce n’améliorera pas la situation économique générale des producteurs laitiers, et qu’en fait, ce serait plutôt le contraire, d’après les résultats d’une étude financée par le USDA.
Nous avons pu nous rendre compte que l’approche en matière de commerce adoptée par le gouvernement précédent et le gouvernement actuel a donné lieu à de lourdes pertes dans bon nombre des industries manufacturières. Nous avons été témoins de la trahison dans le dossier du bois d’oeuvre, qui a causé la perte de 4 000 emplois ces quelques dernières semaines. Il faut donc veiller à ce que toute mesure adoptée dans le domaine de l’agriculture soit appropriée afin d’éviter que le secteur agricole ne subisse des conséquences dévastatrices, comme ce fut le cas pour les secteurs du bois d’oeuvre, des textiles et de la fabrication à l’échelle du pays.
Il est intéressant de noter qu’en termes réels, la plupart des familles canadiennes ont un revenu moins élevé qu’il y a 15 ans. Il ressort donc que notre façon de promouvoir notre développement économique comporte des lacunes fondamentales.
J’aimerais revenir sur l’exposé des Producteurs laitiers. Vous avez mentionné de façon très précise que le gouvernement devrait appliquer des mesures de sauvegarde spéciales. C’est une question sur laquelle nous nous penchons actuellement pour l’industrie du vêtement. J’aimerais avoir plus de détail sur les mesures de sauvegarde que, selon vous, le gouvernement devrait instaurer pour protéger notre secteur agricole et les familles qui en dépendent.
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Bonjour. Je suis content de vous voir ici, ce matin.
Il me faut, bien sûr, dire quelques mots sur la protection de la gestion de l'offre. Je pense aux négociations dans le cadre du Cycle de Doha. Je crois qu'au cours des prochains mois, il faudra s'employer à protéger la gestion de l'offre. Il faut en effet penser à la souveraineté alimentaire, un facteur très important. Je crois que l'agriculture ne doit pas être monnayable au même titre que d'autres secteurs d'activités. Je pense néanmoins qu'il faudrait ouvrir certaines barrières dans le domaine de la culture du blé et autres grains. On sait que nos producteurs ont de la difficulté dans ce domaine.
Nous devons donc négocier à l'intérieur de ces balises, c'est-à-dire en protégeant certains produits sensibles tout en gardant ouverts d'autres secteurs d'activité. J'aimerais entendre vos commentaires sur la façon dont on pourrait arriver à négocier à l'intérieur de ces balises.
Par ailleurs, au Bloc québécois, nous avons adopté une motion sur les protéines de lait. On dit vouloir protéger la gestion de l'offre, mais on permet l'importation des protéines de lait, ce qui fait perdre des sommes importantes à nos producteurs. Une motion a été adoptée à la Chambre des communes. Le Parti conservateur, qui dit appuyer la gestion de l'offre, s'y est majoritairement opposé.
Comme vous l'avez mentionné, monsieur Laforge, on s'interdit une pratique à laquelle d'autres pays ont recours, par l'entremise de l'article 28 du GATT, par exemple. Pourquoi refuse-t-on de se protéger alors que d'autres pays le font? On peut penser aux mesures prises par l'Europe, dans le cas du Brésil et de la Thaïlande, en matière d'importations avicoles.
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Je peux vous donner mon opinion, mais cela ne veut pas dire qu'elle sera complètement juste.
Le Canada est un pays nettement exportateur et, à ce titre, il fonctionne différemment des États-Unis ou de l'Union européenne. Chaque fois que le Canada veut traiter d'un secteur qui fait l'objet de protectionnisme, ces pays sont toujours sur le qui-vive, car ils se demandent l'effet que cela aura sur leurs autres biens, s'il y aura des représailles ou autres choses du genre. Il est sain d'avoir ces mécanismes, mais lorsque c'est noir et blanc, il faut mettre nos culottes.
Ce n'est pas la communauté internationale qui nous a fait perdre les marchés des concentrés protéiques et de l'huile de beurre, c'est notre propre Tribunal canadien du commerce extérieur. Comme bien d'autres organismes, le Tribunal canadien du commerce extérieur est en cours de révision. Il faut se réveiller et adopter une position par rapport à nos négociations à l'OMC. Défendre la gestion de l'offre à l'OMC n'est sûrement pas un travail facile, car c'est un système unique. Cependant, ce système fonctionne. On ne reçoit pas des pelletées d'argent en subventions, et les consommateurs ne paient pas plus cher — ils paient même moins cher — que ceux des pays européens et des États-Unis.
Allons-nous abandonner ou éroder un mécanisme qui possède tous les éléments de succès? C'est à ce sujet que le Canada doit se questionner. Il doit vraiment prendre position et dire que ce n'est pas négociable. Comment va-t-il s'y prendre? Ça, c'est son boulot.
On sait que, contrairement à l'Europe et aux États-Unis, le gouvernement du Canada n'a pas les fonds nécessaires pour subventionner les industries laitière et de la volaille. S'il commence à le faire, il est évident qu'il y aura moins d'argent pour les autres industries. L'industrie laitière internationale est subventionnée sur une base régulière, car sa production est constante. Elle est retenue en Europe. Les pays européens sont les plus gros pays exportateurs de produits laitiers du monde: ils exportent environ 15 p. 100 de leur production. Donc, ils peuvent supporter ça longtemps.
À notre avis, il appartient aux négociateurs du Canada de trouver des outils. Ils peuvent discuter avec nous afin de les aider à trouver ces outils et les éléments permettant d'éviter l'érosion de nos marchés. Des outils existent, et les négociateurs canadiens doivent simplement faire preuve d'assez d'ouverture pour les explorer. C'est possible de le faire.
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Merci, monsieur le président.
J’aimerais poser trois questions. La première sera adressée à M. White et à M. McCreery, la deuxième, à M. Shauf, et la troisième, à M. Laforge. Je vais poser mes trois questions dès maintenant puis vous laisser répondre.
Le Canada n’a accompli aucun progrès dans le domaine de la libéralisation du commerce depuis 2001. Je n’ai pas à vous le dire et il est évident que le Canada est désavantagé par rapport à de nombreux pays actifs dans le domaine, comme les États-Unis. Ce pays négocie en vue de la conclusion d’accords commerciaux bilatéraux avec d’autres pays et a déjà conclu des accords avec l’Australie, le Maroc et des pays d’Amérique. J’aimerais que vous me parliez de l’incidence de ces accords sur le secteur agricole canadien. Croyez-vous que le Canada devrait conclure des accords avec ces pays, et croyez-vous que le Canada devrait s’installer à la table avec les États-Unis lorsque ce pays négocie en vue de la conclusion de tels accords?
Monsieur Shauf, je crois comprendre que la majorité, soit environ 80 p. 100, de vos produits sont exportés. Vous êtes établi en Saskatchewan. Croyez-vous que la plupart des producteurs de votre province souhaitent la libéralisation du commerce ou un accroissement des restrictions s’appliquant au commerce? En outre, quelle est votre opinion de la Commission canadienne du blé?
Monsieur Laforge, au début de votre exposé, vous avez déclaré que vous représentiez 15 000 producteurs laitiers. Lorsque la gestion de l’offre a été mise en place, 42 000 producteurs y étaient assujettis. Si la gestion de l’offre est si avantageuse, pourquoi le nombre de producteurs qui y participent diminue-t-il autant?
Commençons par vous deux.
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Oui, et vous avez mentionné le nombre de producteurs. L’ACCAA représente environ 172 000 producteurs, si l’on tient compte des éleveurs de porcs de l’Ouest canadien, des éleveurs de bovins de partout au Canada et des producteurs de céréales et d’oléagineux.
Mais parlons de l’incidence des accords. Parlons de ce qui s’est produit lorsque les États-Unis ont conclu un accord avec le Maroc. Je me rappelle que l’ancien sous-ministre avait dit que nous n’allions pas perdre de temps avec le Maroc, et j’ai été consterné par cette remarque, parce que le Maroc constitue la porte d’entrée vers le reste de l’Afrique en ce qui concerne les céréales. Comme nous n’avons pas conclu d’accord avec le Maroc et que les Américains reçoivent un traitement préférentiel, ils profitent d’un avantage sur nous lorsqu’ils exportent des produits céréaliers et oléagineux en Afrique.
La conclusion d’un accord pourrait nuire à nos amis des industries du soja et du canola, car l’existence d’un accord bilatéral entre le Mexique et le Japon permettrait aux produits de transiter par les États-Unis, l’Argentine, le Mexique et le Japon, ce qui permettrait à nos concurrents japonais de profiter d’un avantage.
Il ne s’agit que de deux exemples très brefs. Nous pourrions également parler de la CAFTA et de l’incidence qu’elle a eue sur l’industrie sucrière.
Alors, oui, ces accords ont des effets dévastateurs. J’ai déjà dit que les accords bilatéraux sont une arme à double tranchant. Ceux qui en concluent en tirent des avantages considérables, mais ceux qui ne le font pas en souffrent beaucoup. Mais je crois que la façon de remédier à la situation est de négocier en vue de l’établissement de règles générales strictes avec 150 pays, et non de négocier au cas par cas.
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Je tiens à préciser, et j’espère que M. Laforge sera d’accord avec moi, qu’actuellement, dans le cadre du Cycle de Doha — des négociations de Doha, ou des « négociations conciliatoires », quel que soit le nom qu’ils donnent à ces négociations qui se déroulent actuellement sans vraiment se dérouler — personne ne discute de la gestion de l’offre. Ils discutent de formule de réduction tarifaire.
J’ai eu la chance incroyable de représenter l’ACCAA à Genève et de rencontrer les membres de dizaines de missions. Personne n’a jamais protesté contre l’application, par le Canada, d’une politique intérieure telle que la gestion de l’offre.
J’ai beaucoup travaillé avec M. Bob Stallman, dirigeant du American Farm Bureau, une importante association de producteurs agricoles des États-Unis. Il n’a jamais mentionné nourrir des réserves quant à la gestion de l’offre. Lorsque nous discutons de la question des produits sensibles, ils discutent de réductions tarifaires, à un niveau moins général.
Il est intéressant de constater à quel point on accorde beaucoup d’importance à cette question au Canada. La dernière fois que nous en avons discuté... Monsieur Julian, presque toutes vos questions portaient sur ce sujet, et je souhaitais que vous nous en posiez davantage encore. Mais ailleurs dans le monde, ce n’est pas une considération. Les droits de douane sont une source de préoccupation, mais pas la gestion de l’offre.
Vous parlez de valeur ajoutée et du rôle que le gouvernement peut jouer dans ce domaine. Je sais bien que cela ne correspond pas aux buts et aux valeurs du NPD, mais j’ai toute confiance dans l’esprit d’entreprise des Canadiens. Malgré des subventions totalisant 360 milliards de dollars, malgré des droits de douane extrêmement élevés pouvant atteindre 300 ou 400 p. 100, plus de la moitié d’entre nous soutenons la concurrence sur les marchés internationaux et ajoutons de la valeur à nos produits. Donnez-nous les outils nécessaires, laissez-nous faire et nous fournirons des emplois aux habitants de notre grand pays.
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Thank you Mr. Chairman. Merci beaucoup, messieurs, de vos commentaires fort intéressants, non pas contradictoires, mais qui parfois présentent des opinions différentes sur un sujet aussi important que la production agricole. Je vous remercie de votre honnêteté.
Monsieur Shauf et M. McCreery, entre autres, et M. White, je crois, ont parlé de l'importance d'étudier la possibilité de conclure des ententes de commerce bilatéral avec d'autres pays. Je crois que mon collègue M. Maloney a aussi abordé cette question, de même que le secrétaire parlementaire.
[Traduction]
Peut-être pourrais-je reprendre la question de M. Maloney, qui vous a interrogé à propos des accords bilatéraux. Je suis bien d’accord avec le secrétaire parlementaire: depuis 2001, nous ne sommes pas arrivés à conclure d’accord, et cela devrait nous préoccuper.
Comme vous le savez tous, et ceci est bien connu sur la place publique, le gouvernement précédent a négocié en vue de la conclusion d’accords avec, par exemple, la Corée et les pays d’Amérique centrale, et le gouvernement actuel continue de le faire. Je sais que certaines entreprises du Canada atlantique — McCain Foods entre autres — espèrent que ces marchés offriront des débouchés pour leurs produits.
Je crois que c’est M. Shauf qui a mentionné la Chine et l’Inde, qui sont évidemment deux marchés énormes. Pourriez-vous me donner une idée de vos priorités? Si vous étiez ministre du Commerce international, lequel des accords actuellement en cours de négociation — celui avec l’AELE, celui avec la Corée du Sud, celui avec l’Amérique centrale, celui avec Singapour — lequel de ceux-ci ou lequel de ceux qui sont actuellement à l’étude le gouvernement devrait-il conclure en priorité? Pourriez-vous établir un ordre de priorité, car je suis bien curieux de savoir lequel donnera lieu, selon vous, aux débouchés les plus considérables pour les exportations canadiennes de produits agricoles. De plus, quels conseils offririez-vous au gouvernement et aux membres de ce comité en ce qui a trait aux mesures que nous pourrions prendre pour favoriser la conclusion de cet accord.
Il s’agit d’une excellente question, et je vais vous fournir une réponse à deux volets.
Tout d’abord, on craint toujours que les produits sensibles ne soient pas tenus en compte lors de la négociation d’accords bilatéraux. J’ai eu la chance de faire une présentation sur les produits agricoles devant une délégation japonaise, et ils m’ont dit que tous les produits agricoles étaient sensibles, point final. Je les ai regardés dans les yeux et leur ai expliqué que le Canada considérait peut-être que les voitures étaient des produits sensibles; était-ce vraiment ainsi qu’ils voulaient négocier?
Je vous encourage donc fortement à viser un plus grand accès pour les produits agricoles quand vous négociez des accords bilatéraux. Les marchés diffèrent selon les industries, alors ma remarque a une portée générale et ne s’applique pas seulement à l’industrie que je représente aujourd’hui. Ne nous oubliez surtout pas et oeuvrez pour notre compte lorsque vous négociez ces accords, parce que les Coréens, les Japonais et les Européens ne veulent souvent pas discuter d’agriculture en profondeur. Alors employez-vous à ménager un accès à nos produits lorsque vous négociez ces accords.
Je ne veux pas trop m’étendre sur l’importance que revêtent les accords bilatéraux, qui sont en effet très importants, parce que je ne veux pas vous exonérer de vos responsabilités. Je sais que des décisions très difficiles doivent être prises en ce qui concerne Doha et l’établissement d’un parfait équilibre au sein de notre grand secteur, mais cela dépasse l’agriculture.
L’économie canadienne dans son ensemble dépend de l’OMC, et si nous nous présentions devant vous aujourd’hui en vous disant de miser sur les accords bilatéraux et d’oublier l’OMC parce qu’elle est morte, nous ne vous aiderions pas à assumer vos responsabilités.
Je sais que cela n’est pas facile. Je sais que des pressions provenant de toutes parts s’exercent sur vous, mais il est tellement important pour le Canada que les négociations entreprises dans le cadre de l’OMC soient couronnées de succès.
Merci de m’avoir encore une fois offert une tribune où m’exprimer.