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Bonjour et merci de nous recevoir. Je m'appelle Lina Aristeo et je suis directrice de UNITE HERE au Québec. UNITED HERE est un syndicat qui représente traditionnellement des travailleurs de l'industrie du vêtement et du textile non seulement au Canada, mais également partout en Amérique du Nord. Depuis notre fusion avec l'Union internationale des employés d'hôtels et de restaurants, nous représentons également des employés du secteur des services, mais si je suis ici aujourd'hui, c'est pour vous parler de nos préoccupations concernant l'industrie du vêtement et les pertes d'emplois dans ce secteur.
Je crois que Wynne Hartviksen a comparu ici la semaine dernière, alors je vais tenter de ne pas répéter ses propos. Cependant, j'ai eu très peu de temps pour lire ses notes.
Je suis également vice-présidente internationale de UNITE HERE et vice-présidente de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Aujourd'hui, je suis accompagnée — et je pense que cela vaut la peine de prendre le temps de vous les présenter, bien qu'ils soient seulement ici à titre d'observateurs —de gens importants: Claudio Corsetti, qui est originaire d'Italie, travaille pour Peter Stone Fashion et oeuvre dans l'industrie du vêtement depuis 28 ans; Marie-Sylvina Jean, qui occupe un emploi dans ce secteur depuis 21 ans, soit depuis son arrivée d'Haïti, et Franscesca Uccello, qui a commencé à travailler dans l'industrie il y a 11 ans, après avoir élevé ses enfants. C'est le seul métier que tous aient jamais connu. Restent Solange Jean-Pierre, arrivée d'Haïti en 1978, qui travaille dans le secteur depuis 27 ans, et enfin, Chantal Corriveau et Éric Lavoie, qui sont dans l'industrie depuis 28 et 23 ans respectivement.
J'ai donc pris une petite partie des huit minutes qui me sont allouées pour vous présenter ces personnes. Wynne a fait valoir la nécessité de mettre en place des mesures de sauvegarde, et il est clair que je souhaite aussi qu'une telle chose se réalise.
La motion présentée par M. Julian et adoptée visait à limiter les importations en provenance de Chine. Mais beaucoup trop souvent, nous oublions de réfléchir à la signification de ces mots. Ce qu'ils veulent dire, c'est qu'il y a deux ou trois semaines, on a avisé ces gens que je viens de vous présenter que leur usine fermerait en mars.
Depuis que nous avons lancé cette campagne en avril 2005, rien ne s'est produit, hormis le fait que des gens comme eux ont perdu leur emploi. J'aimerais que le gouvernement canadien réagisse, notamment en mettant en place des mesures de sauvegarde.
Je suis également accompagnée de Amarkai Laryea et de Luis Millard, qui travaillent pour UNITE HERE et appuient cette campagne depuis le début.
Alors, qu'a-t-on fait depuis 2005? Le problème s'est aggravé. Il y a eu toujours plus de pertes d'emplois. Elles ont même augmenté dangereusement depuis 2002, et cela continue. En fait, depuis cette année-là, dans l'industrie du vêtement, 50 000 emplois ont été perdus au Canada, dont 25 000 au Québec.
Pourquoi cette précision au sujet du Québec? Parce que c'est réellement un problème qui touche cette province. Même si ce dossier relève du fédéral et que nous nous adressons à lui, la majorité des emplois de l'industrie du vêtement se trouvent dans une province, et principalement dans une ville, Montréal. Celle-ci est la deuxième grande ville manufacturière en importance en Amérique du Nord. Cela en fait une plaque tournante, et je pense que nous devrions sauver tout ce que nous pouvons de cette industrie.
Je pense que les T-shirts, chaussettes ou encore sous-vêtements fabriqués à l'étranger peuvent très bien être fabriqués ici, au Canada, mais nous avons atteint un point où il nous faut déterminer à quoi ressemblera notre industrie du vêtement. Quels seront nos créneaux? Montréal continue de fabriquer des complets qui se classent parmi les meilleurs au monde. Je pense que nous devrions faire tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger l'industrie. Limiter l'augmentation des importations en provenance de Chine est un pas dans la bonne direction.
L'annonce de la semaine dernière du gouvernement concernant un allègement tarifaire de 4,5 millions de dollars sur les tissus importés constitue un progrès, mais à mon avis, ce n'est qu'une goutte d'eau dans l'océan. La première chose que j'ai demandée à notre attaché de recherche, c'est s'il s'agissait d'un montant par entreprise ou pour l'industrie entière, car 4,5 millions ne sauveront pas les emplois menacés, pas même ceux des huit personnes ici présentes, et à plus forte raison ceux des 30 000 Canadiens oeuvrant dans le secteur.
Nous avons rencontré plusieurs ministres, surtout ceux du Québec, dont le ministre Bernier. En Beauce, des membres de notre syndicat qui fabriquent des jeans — il y a très peu d'endroits où on continue à en produire au Canada — ont rencontré le ministre Bernier et ont discuté avec lui; même si celui-ci s'est montré réceptif, il n'a encore pris aucune mesure.
Nous avons commencé à informer nos membres de la situation. Le 20 octobre, nous avons organisé un grand rassemblement où 2 500 d'entre eux sont venus, et lorsqu'on gagne huit dollars de l'heure, perdre quatre heures de salaire, c'est beaucoup.
M. Julian était aussi présent. Le parti de M. Cardin avait envoyé des représentants, et le Bloc et le NPD étaient là pour nous appuyer. Il y avait 2 500 travailleurs qui disaient: « Quelqu'un doit se battre pour nous, car nous faisons ce que nous pouvons, mais quelqu'un doit agir. Nous pouvons lancer la balle, mais on doit nous la renvoyer ». Mais le plus important, c'est que des employeurs marchaient aux côtés du syndicat.
Elle est révolue, l'époque où l'on s'assoyait à la table des négociations en réclamant d'importantes hausses salariales et en se battant contre le patron. Maintenant, plus que jamais, les syndicats et les entreprises doivent se serrer les coudes pour que l'industrie survive. Ce n'est là qu'un des exemples qui montrent que les employeurs de nos membres approuvent notre campagne. Bien que de nombreuses grandes entreprises aient les moyens financiers de venir ici pour faire du lobbying et communiquer leur point de vue, la plupart des gens passent le plus clair de leur temps à essayer de sauver leur entreprise et à chercher de nouveaux produits et de nouveaux marchés.
Lorsque, par exemple, nous avons demandé à Samuelsohn d'envoyer des représentants pour témoigner devant vous aujourd'hui; j'aurais vraiment apprécié qu'elle le fasse, et nous avons tenté... Les gens de l'entreprise n'ont pas le temps de venir à Ottawa car ils mènent une lutte quotidienne. Ils appuient néanmoins cette campagne et souhaitent autant que moi que l'on instaure des mesures de sauvegarde. Mais eux, entre effectuer leur production de la journée et venir vous rencontrer, ils préfèrent malheureusement rester travailler. Telle est la situation dans l'industrie.
Si, par mes propos, je peux parfois vous sembler excédée, c'est que l'industrie elle-même est au bout du rouleau. Lorsque je dis « industrie », à l'exception des employeurs avec lesquels je discute, je veux parler des travailleurs. Ils ne savent plus quoi faire. Je répète qu'ils ont perdu une journée de travail pour venir ici, afin que vous puissiez au moins voir leurs visages. En mars, ils perdront tous leur emploi. Que feront-ils? Et ne leur parlez pas de recyclage professionnel. J'ai fait ma petite enquête: à une exception près, ils sont tous âgés d'au moins 50 ans. Même s'ils sont très compétents, je ne les vois tout simplement pas travailler dans un centre d'appels de Sears, s'il y en a encore au Canada.
C'est important pour nous, et les mesures de sauvegarde sont une solution envisageable. Selon les accords de l'OMC, un pays qui estime que son économie a connu des perturbations — je n'emploie pas les mots exacts — peut mettre en place des mesures de sauvegarde et limiter l'accroissement des importations de vêtements.
Les États-Unis et l'Union européenne l'ont fait. Ils ont négocié avec la Chine. Les pays d'Amérique latine aussi, de même que l'Afrique du Sud. La question que nous vous posons est celle-ci: pourquoi le Canada n'agit-il pas? Rien ne justifie qu'on s'abstienne de mettre en oeuvre des mesures que nos concurrents appliquent.
Je m'arrête là, mais je vais répondre à vos questions, le cas échéant.
Merci.
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Merci, monsieur le président, de nous donner l'occasion de comparaître. Je suis heureux de pouvoir vous exposer notre point de vue sur ces questions ainsi que sur la motion que vous étudiez.
Je m'appelle Elliot Lifson et je suis président de la Fédération canadienne du vêtement ainsi que vice-président de Peerless Clothing, premier manufacturier de vêtements en importance au Canada, qui exploite la plus grande usine de complets pour hommes en Amérique du Nord. Notre manufacture de Montréal emploie plus de 2 500 personnes issues de 60 communautés culturelles. Je préside également le Bureau du commerce de Montréal, et je m'intéresse donc beaucoup à notre industrie du vêtement parce qu'elle est concentrée à Montréal. Avec Henri Massé, président de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, j'assume également la coprésidence de PROMIS, un organisme qui favorise l'intégration des nouveaux arrivants dans notre communauté.
Je suis accompagné de Bob Kirke, directeur général de la Fédération canadienne du vêtement.
Pour commencer, j'aimerais parler brièvement de notre industrie et vous dire pourquoi nous ne croyons pas que des mesures de sauvegarde seraient d'une grande aide. Ensuite, je vous parlerai des politiques susceptibles d'être utiles pour l'industrie.
La Fédération canadienne du vêtement représente plus de 600 entreprises oeuvrant dans l'industrie canadienne du vêtement, laquelle produit une vaste gamme de vêtements pour femmes, hommes et enfants. Début 2006, notre industrie employait directement 60 000 personnes environ et produisait plus de 5 milliards de dollars de vêtements, dont près de deux milliards étaient destinés à l'exportation, à 90 p. 100 vers les États-Unis.
L'industrie du vêtement utilise un large éventail de compétences, allant des emplois à faible niveau de compétences et à faible intensité technologique aux dessinateurs de mode hautement créatifs, en passant par l'ingénierie de pointe et le développement de logiciels.
Comme vous le savez tous, l'industrie du vêtement fait face à des difficultés particulières, dont les effets de la libéralisation des marchés, l'appréciation du dollar canadien et d'autres problèmes commerciaux. C'est d'ailleurs pour cela que vous examinez cette motion, et nous nous réjouissons de l'intérêt que vous portez à notre industrie.
La semaine dernière, Statistique Canada a publié une étude intitulée La libéralisation des échanges et le marché canadien du vêtement. Je recommande fortement aux membres du comité de la lire. Statistique Canada y fait une excellente description des changements qui se sont produits dans l'industrie canadienne du vêtement au cours des 15 dernières années. On y montre combien les importations en provenance des États-Unis ont diminué, et comment les différents pays en développement ont graduellement grugé une part de plus en plus importante de notre marché.
Enfin, l'étude donne des informations sur la part de marché qu'occupe maintenant la Chine, et on y explique que dans une large mesure, les importations provenant de Chine remplacent les importations en provenance d'autres pays, qui ont connu une baisse marquée. Elle met bien en perspective la discussion que vous avez tenue à propos des mesures de sauvegarde. Je la cite:
L'attention portée au commerce de vêtements se concentre surtout sur la croissance récente des importations en provenance de la Chine, mais cela amène à croire de façon erronée que les changements survenus dans la composition du marché canadien du vêtement sont des phénomènes récents, selon une nouvelle étude qui paraît aujourd'hui dans L'observateur économique canadien.
En réalité, le fait que le Canada se soit tourné vers la Chine, ce qui a promu ce pays au rang de source la plus importante d'importations de vêtements pour le Canada en 2005, les importations de Chine s'étant chiffrées à 3 milliards de dollars, n'est que le dernier d'une série de changements qui ont touché le commerce de vêtements au Canada au cours des deux dernières décennies.
Pour la période allant de janvier à septembre 2006, l'importation de vêtements était de 15 p. 100 supérieure à celle de 2005. Dans la pratique et en matière de planification d'entreprise, les manufacturiers de vêtements ont vu les effets de la fin des quotas depuis 1995. Ils ont dû s'ajuster. Certaines ont réussi, d'autres pas, alors même si la motion parle d'un « temps d'adaptation », les entreprises qui se sont ajustées et ont survécu continueront sur leur lancée — c'est une question qui relève de la gestion, et malheureusement pas des travailleurs, malgré tout le respect que j'ai pour eux.
Nous vivons à l'ère de la mondialisation et du libre-échange. Le monde est plat, et nous devons tous apprendre à nous ajuster et à trouver nos créneaux. Beaucoup d'entreprises canadiennes prospères ont adopté la stratégie suivante: elles produisent des vêtements haut de gamme, ou plus sophistiqués que ce qui se fait ailleurs, ce qui nécessite une proximité des marchés, tout en proposant une gamme de vêtements plus simples importés de Chine ou d'ailleurs. Notre grand avantage concurrentiel, c'est la proximité des États-Unis, qui absorbent 90 p. 100 de nos exportations; ce pays est notre principal client. Cette stratégie commerciale permet aux manufacturiers de vêtements d'ici de demeurer compétitifs et de maintenir la production canadienne.
Je vais maintenant aborder la question des mesures de sauvegarde visant la Chine. Certains ont laissé entendre que ces mesures pourraient être une solution aux problèmes de notre industrie. À notre avis, la marge de manoeuvre du Canada est limitée pour ce qui est de la mise en place de telles mesures de protection, qui ne sont pas susceptibles d'apporter des avantages tangibles pour les fabricants canadiens.
Ce constat s'appuie sur les données factuelles présentées dans le rapport de Statistique Canada, que j'ai mentionné, et sur des considérations d'ordre pratique entourant l'établissement de mesures de sauvegarde visant la Chine. Six éléments sont à considérer.
Premièrement, ainsi que des témoins vous l'ont dit la semaine dernière, ces mesures ne peuvent réparer les dommages déjà causés.
Deuxièmement, elles permettront un accroissement de 7,5 p. 100 du volume actuel des importations en provenance de Chine.
Troisièmement, au mieux, elles entreront seulement en vigueur fin 2008.
Quatrièmement, l'imposition de mesures de sauvegarde visant la Chine entraînera seulement une hausse des importations d'autres pays en développement, qui sont plus que capables et désireux de prendre la part de marché de la Chine. On doit se rappeler que la capacité mondiale de production de vêtements est deux fois plus élevée que la demande planétaire. Les manufacturiers de vêtements à faibles coûts de pays comme le Bangladesh — et, soit dit en passant, j'ai été surpris lorsqu'on a mis en place les initiatives en faveur des pays les moins développés et qu'on a pu importer de ce pays des produits hors quotas, mais aussi en franchise de droits. Je peux vous dire qu'à ce sujet-là, le syndicat et moi-même avons dit — n'incluez pas le Bangladesh, mais seulement les pays africains. C'est le Bangladesh qui a enregistré la plus forte croissance, avec un taux de 300 p. 100, et personne ne s'est plaint. L'Inde et l'Indonésie sont toutes disposées à prendre la place de la Chine. Ainsi, toute mesure de sauvegarde visant ce pays entraînerait probablement un détournement des courants commerciaux, sans que cela ait de véritables avantages pour les manufacturiers canadiens.
Cinquièmement, de telles mesures de protection nuiront aux fabricants de vêtements qui allient des vêtements produits ici à des vêtements importés de Chine, et elles auront pour effet de créer des goulots d'étranglement imprévisibles dans la chaîne d'approvisionnement, causant ainsi du tort à de nombreuses entreprises.
Sixièmement, dans la motion, on parle d'une période d'adaptation. Nous vivons cette situation depuis dix ans. À notre avis, nous devons continuer de nous concentrer non pas sur les mesures de sauvegarde, mais sur l'avenir et les réalités du marché. Nous devons comprendre comment faire notre place dans le très concurrentiel marché mondial du vêtement. Au Canada, les grandes manufactures de vêtements axent de plus en plus leurs activités sur la mode, le développement de produits, la mise en marché et la gestion de la chaîne d'approvisionnement pour se démarquer et maintenir leur position sur les marchés canadiens et américains, où la concurrence s'exerce essentiellement au niveau des prix.
Les Canadiens peuvent être compétitifs s'ils se concentrent sur la qualité des produits et sur le service à la clientèle, et s'ils répondent aux besoins des consommateurs partout en Amérique du Nord. Nous ne pouvons produire à faible coût, mais nous pouvons réussir en offrant une valeur ajoutée à nos clients.
Ici, j'ouvre une parenthèse: j'ai un passe-temps. J'enseigne au programme de Maîtrise en administration des affaires, à l'école de gestion de l'Université McGill, et je suis professeur invité aux HEC dans le cadre du même programme.
Je vais maintenant aborder la question des politiques relatives à l'industrie canadienne du vêtement. Si nous voulons que celle-ci demeure viable et concurrentielle, nous devons veiller à ce que notre stratégie industrielle soit intégrée et coordonnée. Notre association a comparu devant ce comité le 30 novembre 2004, à la veille de l'élimination des quotas imposés par l'OMC qui a pris effet le 1er janvier 2005. Nous avons relevé les conditions auxquelles nous faisions face à l'époque, et qui sont les mêmes aujourd'hui.
Parmi ces conditions, il y a la pression accrue des importations et la compétitivité réduite sur les marchés d'exportation en raison de l'appréciation du dollar canadien. À l'époque, nous réclamions des politiques qui renforceraient notre compétitivité: les mesures de sauvegarde n'en faisaient pas partie, mais nous voulions des réductions des droits de douanes sur les importations de textiles et d'autres politiques industrielles, oui. Cela allait de soi.
Comme nous l'avons mentionné lors de nos précédentes comparutions devant des comités parlementaires, dont le vôtre, ce qui nous importe le plus, c'est qu'on élimine les droits de douanes sur l'importation des matières premières. Nous croyons qu'il faudrait éliminer ces taxes sur tous les tissus importés qui entrent dans la fabrication des vêtements au Canada, et qui ne sont pas produits par l'industrie canadienne du textile.
Le 14 décembre, cela fera exactement deux ans que le gouvernement précédent annonçait son intention d'éliminer les droits sur tous les textiles non fabriqués au Canada. La seconde ronde de réduction des droits faisant suite à cette annonce a eu lieu vendredi dernier, et elle représente 4,5 millions d'économies annuelles en matière de droits de douanes. Là-dessus, je suis d'accord avec Lina: ce ne sont que des miettes. Nous voulons davantage. Mais cela nous permettra au moins de conserver nos emplois ici en fabricant des produits à valeur ajoutée.
Avec celles qui ont été annoncées il y a un an, ces mesures nous placent environ à mi-chemin de l'objectif des 70 millions de dollars. Si nous avons été capables de faire une telle déclaration, c'est que l'honorable Michael Fortier a fait une annonce en ce sens, dans notre usine, vendredi dernier.
Le gouvernement canadien a beaucoup mieux respecté ses engagements, mais il doit faire plus. L'industrie canadienne du vêtement est tenue de payer 35 millions de dollars supplémentaires en droits de douane pour des tissus importés qui ne sont pas fabriqués au Canada; il ne devrait pas en être ainsi. Cela représente notre plus grosse dépense. Dans le secteur de la fabrication de complets pour hommes, ce sont les tissus qui coûtent le plus cher. Cela nous aiderait donc énormément que vous abolissiez ces droits.
Quant aux autres programmes et initiatives, il faut savoir que jusqu'en 2004, les entreprises pouvaient accéder à des ressources d'appui pour des mesures d'ajustement par l'entremise du programme des industries canadiennes du textile et du vêtement, le PICTV. En ce moment, les fabricants de vêtements ne peuvent généralement pas avoir accès à du financement en vertu du Programme des textiles canadiens. Nous serions favorables à des changements allant dans le sens des amendements à la motion que votre comité étudie.
La Fédération canadienne du vêtement travaille en étroite collaboration avec Industrie Canada par l'intermédiaire du PICTV afin d'offrir une gamme de services aux manufacturiers de vêtements. La plus grande partie du financement accordé en vertu de ce programme doit prendre fin en mars 2007. Toute prolongation de cette aide serait la bienvenue.
Enfin, nous collaborons étroitement avec le Conseil des ressources humaines de l'industrie du vêtement. Cependant, ce n'est pas du besoin d'une main-d'oeuvre bien formée et très vaillante dont il s'agit, mais d'un changement de mentalité chez les cadres qui dirigent ces travailleurs. C'est là où DRHC a été d'une grande aide, avec ses rapports stratégiques, particulièrement pour les petites entreprises.
Je vous remercie. Rappelez-vous qu'au Canada, nous avons trois moyens d'être compétitifs, car nous ne produisons pas à faible coût, et ne le ferons jamais. Nous devons premièrement miser sur le rapport qualité/prix, deuxièmement, sur l'innovation et la créativité, et troisièmement, sur le service, et encore le service. Sans oublier notre proximité avec le marché des États-Unis, notre plus grand débouché.
Merci beaucoup.
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Je me permets de répondre.
Je vais commencer par vous parler de ce qui s'est passé aux États-Unis. Un certain nombre d'industries américaines ont présenté des demandes de mesures de sauvegarde, conformément aux procédures établies. Bien que ce ne soit pas tout à fait la même chose, ici, c'est le Tribunal canadien du commerce extérieur qui peut entendre ce type de causes relatives aux mesures de protection.
En somme, il s'est produit un véritable chaos sur le marché, car une fois qu'on enclenche un mécanisme de protection, c'est le branle-bas de combat. Tout va rapidement, et il se crée d'incroyables perturbations. En effet, c'est logique: si l'application d'une mesure de protection fixant un certain plafond est prévue, vous vous dépêcherez d'agir avant qu'elle n'entre en vigueur.
Confrontée à un tel degré de confusion sur le marché, la Chine a accepté — même si elle n'était pas tenue de le faire — de négocier un système de quotas élargi avec les États-Unis. À peu près la même chose s'est produite avec l'Europe. Il y a environ un an et demi, le BusinessWeek, je crois, faisait état en page couverture de la bataille des soutiens-gorge en Europe. Tous les détaillants importaient ces sous-vêtements de Chine et ils avaient atteint le plafond.
Il y a de nombreux points de vue quant à ce qu'il faudrait faire. Mais que le comité n'aille pas s'imaginer qu'on peut régler cela en moins de deux, que nous aviserons les Chinois de la mise en place de mesures de protection, qu'ils nous donneront leur accord et que nous négocierons une entente bilatérale.
Certains taux de croissance relevés en 2005 aux États-Unis atteignaient 700 p. 100 dans certaines catégories, alors que dans d'autres, ils n'étaient que de 20 ou 10 p. 100, le plafond étant fixé à 7,5 p. 100.
Donc, encore une fois, je vous encourage à discuter avec les représentants de Commerce international pour qu'ils vous exposent clairement les scénarios envisageables, car il n'y a là rien de simple. Hormis le fait qu'à notre avis, ces scénarios sont en général inadéquats, si vous avez choisi quand même de les appliquer, ce ne sera pas une mince affaire.
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M. Lifson vous a donné une partie de la réponse.
J'ai trouvé la première partie de votre question assez intéressante. Lorsque M. Lifson vous a dit que la fédération comptait 700 membres, vous avez demandé si ce nombre avait diminué. Puis, il vous a parlé d'une compagnie en Beauce.
Je peux vous nommer des compagnies en Beauce qui ont fermé leurs portes: Cardinal Clothes inc.; Corporation de vêtements S.F.I.; Jeno Neuman et Fils Inc.; J. A. Besner et Fils (Canada) ltée; Les vêtements Chambly 1982 Inc. Il s'agit simplement de celles qui me viennent en tête. Je suis directrice du syndicat depuis deux ans et j'ai une longue liste — deux pages remplies — de noms de compagnies qui ont fermé leurs portes, sans compter celles qui ont dû réduire leur personnel. Beaucoup de compagnies restent ouvertes, comme Algo, où il reste peut-être un travailleur, alors qu'il y en avait auparavant plus de 100.
Lorsqu'on parle de l'industrie du vêtement, il faut garder en tête que la production de vêtements au Canada est complètement différente. Il y a les producteurs et les manufacturiers versus les importateurs. Certes, certaines compagnies font un jumelage des deux. Toutefois, n'oublions pas que ceux qui importent les vêtements ne sont pas ceux qui reflètent la réalité des manufacturiers canadiens qui ne savent plus quoi faire. Il y a plusieurs manufacturiers qui ne savent absolument plus quoi faire: soit ils ferment leurs portes, soit ils continuent, soit ils maintiennent un déficit.
En Beauce, il existe une compagnie qui reste ouverte uniquement à cause d'un contrat fourni par le syndicat. Si le syndicat n'existait pas, cette compagnie n'aurait pas ce contrat. Le propriétaire dit que ce contrat l'aide. Il s'agit d'un autre exemple d'une mesure de replâtrage, comme les mesures de sauvegarde. Ce n'est pas ce qui va sauver cette compagnie. Au cours de la période où le syndicat a aidé la compagnie à obtenir ce contrat, celle-ci a percé les marchés américains et elle essaie d'élargir sa clientèle. Le propriétaire achète du temps. C'est ce que feraient les mesures de sauvegarde pour les compagnies qui sont à la veille de fermer leurs portes.
Malgré le fait qu'elles ne menacent peut-être pas Vêtements Peerless Inc., les importations de la Chine sont une menace importante pour beaucoup d'autres manufacturiers locaux.
Il faut souligner que c'est Teamsters Canada qui représente les employés chez Peerless, et non Vêtements Peerless Inc.
M. Julian a cité les propos de M. Menzies. Ce dernier n'a jamais dit qu'il était en faveur des mesures de sauvegarde. Je ne crois pas que M. Julian devrait parler en son nom. Il n'est pas ici. Il ne faut pas lui faire dire des choses qu'il n'a pas dites. Il n'est nullement question de mesures de sauvegarde dans cette citation, monsieur Julian. Il y a beaucoup de façons d'intervenir pour permettre au Canada de demeurer concurrentiel sans qu'il soit nécessaire d'imposer des mesures de sauvegarde.
Je tiens à souligner que par le passé, le Parti libéral n'était pas favorable à ces mesures, et j'ai bien l'impression que s'il était au pouvoir aujourd'hui, il ne le serait pas plus. Nous assistons à des manoeuvres politiques et je trouve cela un peu honteux.
De plus, j'ai remarqué que le comité fait totalement abstraction de la procédure à suivre. Ce n'est pas étonnant, car cela a toujours été ainsi. Nous avons beau être un nouveau comité, nous devons quand même respecter la procédure en ce qui concerne les rapports de recherche. Nos attachés de recherche, qui sont extrêmement compétents, n'ont pas été en mesure de faire quoi que ce soit pour nous. C'est leur travail d'examiner le point de vue des témoins et de rédiger un rapport que le comité étudie ensuite ligne par ligne, peaufine et modifie légèrement. Et c'est ce que vous remettez après au gouvernement avec vos recommandations. Le fait de proposer une motion tendancieuse qui ne tient nullement compte des différentes opinions est tout à fait irresponsable. Je tenais à vous le dire.
Pourquoi ne laisserions-nous pas les attachés de recherche accomplir leur travail et préparer un rapport adéquat que nous pourrions présenter? Cela ne vous empêche en rien d'y mettre ce que vous voulez. Le rapport ne ferait que démontrer que nous avons entendu d'autres témoins — ce qui est le cas — qui n'appuyaient pas votre position.
J'ai également pensé qu'il serait bien de savoir comment les industries pourraient s'adapter au nouvel environnement commercial, de prendre en considération certaines de leurs recommandations et de les transmettre au gouvernement, et de ne pas simplement conclure qu'une seule option s'offre à nous. Parce que nous savons qu'il y en a beaucoup d'autres, et nous en avons entendu parler à cette table. Je pense que ce serait utile. À mon avis, nous serions injustes envers l'industrie dans son ensemble si nous ne tenions pas compte des autres options, des autres recommandations et de tout le travail réalisé par ailleurs. Ce serait vraiment très dommage.
Évidemment, nous savons que depuis 2002, cela représente 120 millions de dollars. J'en félicite d'ailleurs le gouvernement précédent. Toutefois, je pense que le gouvernement actuel est en train de commettre une grave erreur. Cela n'intéresse peut-être pas grand monde, et le fait que vous fassiez volte-face et soyez irresponsables ne fera pas la manchette, mais je peux vous assurer qu'on vous le reprochera un jour ou l'autre.
Nous voterons contre la motion parce que nous avons confiance dans le travail de nos attachés de recherche. C'est une procédure qui est suivie depuis des années au sein du gouvernement. Nous aimerions avoir un rapport en bonne et due forme, parce que c'est la façon dont nous devons procéder.