Mon nom est Alain Beaudoin. Il me fait plaisir d'être ici aujourd'hui afin de discuter du Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité, le PSP.
Je suis le directeur général des partenariats en innovation à Industrie Canada. Parmi mes responsabilités, j'ai celle de coordonner le volet prospérité pour le gouvernement du Canada. Je crois comprendre que j'ai peu de temps à consacrer à ce volet ce matin. Tout d'abord, j'aimerais préciser un peu le contexte.
Le Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité a été inauguré en mars 2005 comme mécanisme trilatéral pour renforcer la compétitivité nord-américaine et pour rehausser la sécurité et la qualité de vie des citoyens des États-Unis, du Canada et du Mexique, grâce à une plus grande coopération et au partage de l'information.
Au Canada, le ministre des Affaires étrangères a le mandat de gérer les relations nord-américaines, dont le PSP est un élément. Le ministre de la Sécurité publique est chargé du volet sécurité, alors que le ministre de l'Industrie est chargé du volet prospérité.
Tout en respectant la souveraineté, le patrimoine unique, la culture et les lois de chaque pays, le volet prospérité du PSP vise à améliorer la position concurrentielle des industries nord-américaines sur le marché mondial. Il vise aussi à offrir plus de débouchés économiques, tout en maintenant des normes élevées de santé et de sécurité. C'est à cette fin que les États-Unis, le Mexique et le Canada travaillent ensemble, avec les intervenants, à renforcer la compétitivité, réduire le coût du commerce et rehausser la qualité de vie.
[Traduction]
De par sa nature trilatérale, le PSP est un mécanisme complexe. Il est mis en oeuvre grâce aux activités de groupes de travail trilatéraux qui sont chargés de rayonner auprès de divers intervenants à l'intérieur de chaque pays.
Le volet prospérité comprend neuf groupes de travail trilatéraux chargés des principaux secteurs d'activité économique. Il s'agit du commerce électronique et des technologies de l'information et des communications, de l'énergie, de l'environnement, des services financiers, des aliments et de l'agriculture, de la santé, des produits manufacturés et de la compétitivité sectorielle et régionale, de la circulation des biens et des transports.
Avec la contribution des intervenants, les groupes de travail ont accepté de travailler à un certain nombre d'initiatives bilatérales et trilatérales pour faire avancer la mise en oeuvre du volet prospérité. Toutes ces initiatives ont été rendues publiques. Si vous ne l'avez pas déjà fait, je vous invite à consulter le site Web du PSP, au www.spp-psp.gc.ca. Il contient des plans de travail détaillés et documente les progrès réalisés jusqu'à présent dans la mise en oeuvre de ces initiatives.
En bref, voilà comment fonctionne le PSP. Il s'agit maintenant de déterminer ce que le Canada peut en retirer.
Comme vous le savez, des facteurs clés ont radicalement changé la manière de fonctionner des entreprises mondiales et notamment celle des entreprises canadiennes. Le faible coût des systèmes de télécommunication et de transport, ainsi que l'abondance de travailleurs qualifiés à bas salaire dans d'autres régions du monde continuent à transformer profondément les activités des entreprises en chaînes d'approvisionnement mondiales.
Cette transformation a des avantages. Même les petites et moyennes entreprises qui intègrent leur chaîne d'approvisionnement et la technologie peuvent s'attendre à d'importantes réductions du coût de la qualité et du temps de commercialisation. Mais d'intenses pressions s'exercent sur les entreprises nord-américaines pour qu'elles restent compétitives.
Même si le Canada est l'un des pays les plus prospères au monde, notre prospérité dépend largement de notre capacité d'accéder à des marchés internationaux. Pour rester prospères, les entreprises canadiennes doivent absolument s'adapter et surmonter les problèmes de gestion de la chaîne d'approvisionnement, comme celui de la logistique intégrée. Pour le Canada, ces difficultés sont particulièrement aiguës à la frontière avec les États-Unis.
Tout le monde sait que les échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis atteignent chaque jour presque 2 milliards de dollars. Nos économies sont très intégrées et fonctionnent de manière de moins en moins divisée. Par exemple, 34 p. 100 des échanges commerciaux bilatéraux se font à l'intérieur d'une même entreprise et plus de 77 p. 100, au sein d'un même secteur. Il en a résulté l'émergence de plateformes commerciales intégrées et compétitives sur la scène mondiale, fondamentalement enracinées en Amérique du Nord.
C'est à ce niveau que le PSP peut être utile. Le PSP vise à favoriser les échanges commerciaux soutenus et fructueux entre les pays d'Amérique du Nord, tout en assurant la sécurité.
Le PSP constitue un aspect de la relation positive et productive du Canada avec les gouvernements des États-Unis et du Mexique. Le PSP est un partenariat non contraignant. Il sert à trouver des solutions pratiques à des problèmes concrets. C'est un moyen d'entretenir une solide relation avec nos partenaires de l'ALENA, mais qui ne se superposent pas sur des mécanismes existants. Le PSP ne vise donc ni à remplacer l'ALENA ni à servir d'option parmi des mécanismes de négociation commerciale existants.
À leur dernière réunion, en mars 2006, les trois chefs du Canada, des États-Unis et du Mexique ont convenu de se concentrer sur cinq priorités pour faire avancer la mise en oeuvre du PSP et pour obtenir des résultats tangibles. Ces priorités sont les suivantes : renforcement de la compétitivité, coordination de la gestion des situations d'urgence, coopération dans la planification de la lutte contre les pandémies de grippe aviaire et humaine, sécurité énergétique et aménagement de frontières intelligentes et sûres.
[Français]
Cette focalisation renouvelée a confirmé l'engagement des dirigeants à l'égard de la mise en oeuvre d'un agenda positif pour l'Amérique du Nord.
L'alignement de la réglementation à l'échelle de l'Amérique du Nord est l'une des plus importantes contributions au renforcement de la compétitivité. Grâce à une coopération accrue dans le cadre du PSP, le Canada, les États-Unis et le Mexique souhaitent rendre leurs réglementations plus compatibles afin de réduire les coûts, en éliminant les répétitions inutiles et les redondances, et en éliminant les obstacles qui s'opposent au commerce, tout en garantissant des normes élevées pour la santé et la sécurité et en protégeant notre environnement.
Les chefs ont aussi convenu de créer le Conseil nord-américain de la compétitivité, le CNAC, qui est chargé de présenter aux gouvernements des avis et des recommandations sur la manière d'améliorer la compétitivité.
Pour continuer sur cette voie, le 23 février, les ministres Bernier, Day et MacKay ont rencontré leurs homologues des États-Unis et du Mexique. Ils ont passé en revue les progrès réalisés en rapport avec les cinq priorités en prévision du sommet des chefs cette année, actuellement prévu pour le mois d'août.
Les ministres ont aussi reçu le rapport du Conseil nord-américain de la compétitivité, qui a été rendu public. M. David Stewart-Patterson est venu vous rencontrer ici dernièrement et vous a aussi transmis une copie du rapport dans les deux langues officielles. Ce rapport contenait 51 recommandations portant sur trois aspects : facilitation de la circulation transfrontalière; coopération en matière de normes et de réglementation; et intégration de l'énergie.
En conclusion, le PSP a été conçu comme une approche pratique, systématique, permettant aux gouvernements de mieux travailler ensemble pour améliorer la compétitivité, assurer notre sécurité et notre qualité de vie. Il faut du temps et un engagement soutenu pour y parvenir.
Merci beaucoup.
Je vous remercie de votre excellent exposé.
Permettez-moi de souligner certaines des choses que vous avez dites, car elles expliquent vraiment ce qu'est le PSP.
Je veux revenir sur le fait, comme vous l'avez dit, que le Canada est l'un des pays les plus prospères au monde, mais que notre prospérité dépend en grande partie de notre accès aux marchés internationaux. Le commerce international est donc un atout pour le Canada.
Vous avez fait remarquer que les échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis s'élèvent chaque jour à quelque 2 milliards de dollars. Il faut également le noter. Cela contribue aussi à la prospérité du Canada.
Vous avez fait ressortir, et c'est important, que le PSP ne vise pas à remplacer l'ALENA; ce n'est pas un mécanisme de rechange dans les négociations commerciales. J'ai entendu certains dire que le PSP est un traité — ce n'en est pas un — ou le définir avec des termes très particuliers qui ne s'appliquent pas du tout dans son cas. Je vous remercie d'avoir remis les pendules à l'heure.
Bon nombre de témoins nous ont dit que des discussions se déroulaient en secret, que l'information n'était pas publique, que le PSP avait des intentions cachées. Je me demande ce que vous répondez à cela.
Je suis encouragé de voir qu'il s'agit d'une initiative très positive pour favoriser le commerce, ce qui est dans l'intérêt du Canada. C'est bon pour nos citoyens, pour nos entreprises, pour notre industrie et pour notre prospérité. Mais toutes sortes de rumeurs circulent — nous en avons discuté à notre dernière réunion — et, comme je l'ai dit, les gens ont l'impression qu'il y a des choses cachées, mal connues ou secrètes. Comment réagissez-vous à cela?
Je pose la question à M. Beaudoin.
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Merci beaucoup, monsieur le président, je vous en remercie.
Revenons à la question de la prospérité, car vous avez dit — et d'autres représentants du gouvernement ont dit la même chose — que c'est la raison d'être de ce partenariat. Est-ce exact? D'après les études de Statistique Canada, 80 p. 100 des familles canadiennes ont connu une diminution de leur revenu réel depuis 1989, depuis que l'Accord de libre-échange Canada-États-Unis a été signé.
D'après une autre étude publiée cette semaine, pour le compte de l'Ontario — et j'espère que les députés de l'Ontario en prendront bonne note — 90 p.100 des familles de l'Ontario qui ont des enfants de moins de 18 ans ont connu une diminution de leur revenu réel depuis 1989; je dis bien 90 p. 100 des familles. Elle est évaluée entre 5 000 $ et 9 000 $ en dollars constants, selon le niveau de revenu. Alors quand les gens disent que l'Accord de libre-échange Canada-États-Unis et que l'ALENA ont bénéficié aux 10 p. 100 ou aux 20 p. 100 de la tranche supérieure et que les PDG et les avocats des entreprises sont plus riches que jamais, c'est bien ce que démontrent les études, les unes après les autres.
Les conservateurs brandiront des calculs qu'ils improvisent sur des bouts de papier mais, dans les faits, la plupart des familles canadiennes se sont appauvries depuis 1989.
J'ai deux questions à vous poser. Pourquoi ne tentez-vous pas de corriger ce fossé croissant dans la prospérité au Canada dans le cadre de la stratégie générale concernant le commerce et l'industrie? Deuxièmement, si l'Accord de libre-échange Canada-États-Unis et l'ALENA ont entraîné de toute évidence, l'appauvrissement de la plupart des familles canadiennes, comment pouvez-vous croire que le même genre de mesure pourra nous mener à la prospérité?
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Je vous remercie de cette réponse.
Il a effectivement reconnu — ce qui est sans précédent de la part du gouvernement — que les familles canadiennes ayant les revenus les plus faibles sont en train de s'appauvrir. Certes, il a aussi affirmé que le problème se résoudra de lui-même. Toutefois, ce qui me préoccupe à cet égard, et ce sera ma dernière remarque à ce sujet, c'est que l'administration répétée du même remède ne mène pas nécessairement à une plus grande prospérité, mais qu'au contraire, elle creuse encore davantage le fossé séparant les riches et les pauvres, au fur et à mesure que s'effritera notre capacité manufacturière.
J'aimerais maintenant parler des pesticides; M. Bains a abordé le sujet plus tôt. Le gouvernement a décidé d'autoriser des résidus plus élevés de pesticides dans les aliments au Canada. Il s'agit d'une question de salubrité alimentaire. Certaines études ont déjà porté là-dessus, dont une parue en 2006, Annals of Neurology. Selon cette dernière, même une très faible exposition aux produits antiparasitaires augmente de 70 p. 100 le risque de contracter la maladie de Parkinson. Par conséquent, ce que fait le gouvernement, de façon très claire et sans vergogne, quand il affirme vouloir harmoniser les règles ou éliminer la pomme de discorde que constituent des règlements plus sévères en matière de sécurité alimentaire, c'est compromettre la santé des Canadiens.
Les États-Unis ont les règlements sur les pesticides les plus permissifs du monde industrialisé. Pourquoi serait-il dans l'intérêt du Canada d'assouplir ses règlements sur les pesticides au risque de nuire à la santé des Canadiens, afin d'harmoniser nos règlements avec des normes américaines moins strictes?
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Si vous le permettez, j'aimerais essayer de répondre assez brièvement. À mon avis, la déclaration faite en 1993 par les trois parties signataires de l'ALENA est très claire et sérieuse. De plus, nous avons ensuite amendé la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales afin de tenir compte de cette question même en interdisant le prélèvement d'eau en grandes quantités.
Par ailleurs, j'aimerais brièvement revenir à la question posée par M. Menzies afin de préciser que, depuis 2001, année où j'ai commencé à m'occuper de cette question, il n'y a eu aucune proposition ou projet de prélèvement massif d'eau ou d'action de ce genre. En fait, depuis lors, les mesures de protection se sont amplifiées. Ainsi par exemple, l'Ontario et le Québec se sont entendus avec les huit États riverains des Grands Lacs de manière à modifier l'annexe à la Charte des Grands Lacs, encore une fois, afin de protéger l'eau de ce bassin. Par conséquent, le gouvernement fédéral n'a pas été le seul à agir, car il y a aussi eu les provinces et les États américains, tout cela afin de protéger l'eau du bassin des Grands Lacs.
À franchement parler, monsieur le président, ce qui menace le plus nos eaux à l'heure actuelle, ce n'est pas le prélèvement, mais le problème de la qualité de l'eau et les espèces envahissantes. Vous avez d'ailleurs peut-être entendu parler cette semaine d'une fièvre hémorragique qui affecte présentement toutes les espèces de poisson des Grands Lacs. Ça n'est pas la première fois. En fait, il y a quelque 180 espèces envahissantes dans les Grands Lacs et le Saint-Laurent qui représentent des risques beaucoup plus graves pour nos ressources hydriques et pour les écosystèmes et les collectivités qui en dépendent.
La qualité de l'eau demeure aussi une question extrêmement préoccupante. Nous sommes en train de réviser l'Accord de 1972 relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs. Eh bien, la menace la plus grave à laquelle nous faisons face par rapport à la qualité de l'eau, et cela n'étonnera personne, est l'épuration insuffisante des eaux usées par les municipalités. Cela affecte la qualité de l'eau.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je tiens d'abord à remercier mon collègue, M. Julian, d'avoir souligné le fait que l'Ontario est encore en train de se remettre de ce qu'a fait le gouvernement du NPD au début des années 1990, et que ces études ont commencé à la fin de 1989 puis se sont poursuivies. Nous accusions alors un tel retard que nous en sommes quasiment devenus une province défavorisée. Je peux rappeler que M. Harris est arrivé en 1995, et qu'il a essayé de corriger la situation, de trouver une solution et, qu'à la même époque, les transferts du gouvernement fédéral avaient été réduits de 25 milliards de dollars. Par conséquent, tout bien considéré —
Lorsqu'on étudie les chiffres et qu'on essaie de les présenter de manière avantageuse, on doit reconnaître que les familles s'efforcent encore de se remettre des années 1990. C'est bien ce gouvernement NPD alors au pouvoir qui a failli anéantir l'Ontario à jamais. Je tenais à ce que cela soit dit et consigné au compte rendu.
Certains groupes entendus ici nous ont dit que nous ne devrions pas avoir d'échanges commerciaux avec les États-Unis. Ce qui me préoccupe là-dedans, c'est que personne ne propose de solution de rechange ou un autre — Je ne sais pas si, d'après eux, il serait possible de nous contenter de commercer avec le Chili ou avec d'autres pays, parce que ces propos sont toujours le fait d'opposants irréductibles, etc.
J'aimerais maintenant revenir sur deux questions. Par rapport à l'harmonisation des pesticides, je suppose que l'une des raisons invoquées pour justifier que nous nous penchions là-dessus est le fait que nos agriculteurs, tout au moins ceux de ma région et probablement aussi ceux de la région de M. Maloney, se préoccupent du fait qu'ils ne peuvent faire librement concurrence aux autres, qu'ils détiennent un avantage injuste. J'estime donc qu'une des raisons pour lesquelles nous envisageons l'éventualité d'une harmonisation est le souci de parvenir à une plus grande compétitivité. Avez-vous pensé vous aussi que c'était pour cela que nous étudions la question des pesticides? Est-ce parce que certaines parties prenantes, comme les agriculteurs et d'autres encore doivent tenir compte de ces réalités?
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Je vous remercie de votre invitation.
Le Parkland Institute est un réseau de recherche rayonnant dans l'ensemble de l'Alberta et dont le siège est situé à l'Université de l'Alberta, à Edmonton. Nous recevons l'appui de plus de 600 personnes et de douzaines d'organismes progressistes. L'Institut effectue des recherches et s'occupe d'éducation dans l'intérêt du public. Mes remarques porteront sur les répercussions du PSP sur l'énergie et les changement climatiques.
Je ne comprends pas pourquoi, au Canada, on discute à savoir si nous allons favoriser la sécurité énergétique américaine, quand le Canada lui-même ne s'est doté d'aucune politique énergétique et n'a ni projet, ni oléoduc conçu pour transporter le pétrole vers l'est de notre pays dans l'éventualité d'une crise internationale de l'approvisionnement. Le Canada est le membre le plus vulnérable de l'Agence internationale de l'énergie, l'AIE, et, en dépit de cela, il exporte imprudemment une part de plus en plus importante de ses hydrocarbures vers les États-Unis. Cela oblige ensuite le Canada à fournir une proportion de plus en plus élevée de ses hydrocarbures, cela en vertu d'une disposition de l'ALENA relative à la proportionnalité. Plutôt que de protéger la sécurité énergétique américaine, pourquoi ne nous dotons-nous pas d'un PSP canadien, d'un plan pour la sécurité pétrolière au Canada?
Tandis que les exportations croissantes de pétrole canadien aident les États-Unis à moins dépendre du pétrole du Moyen-Orient, le Canada se dérobe à ses responsabilités vis-à-vis de ses propres citoyens. La hausse des exportations canadiennes mène aussi à une augmentation paradoxale des importations du Moyen-Orient au Canada. Ainsi, nous importons quelque 40 p. 100 de notre pétrole — au rythme de 850 000 barils par jour — pour répondre à 90 p. 100 des besoins de la région de l'Atlantique et du Québec, et à 40 p. 100 de ceux de l'Ontario. Or, ces importations proviennent dans une proportion de plus en plus élevée de pays de l'OPEP et de plus en plus faible de la mer du Nord. Nous recevons donc davantage de pétrole en provenance de l'Algérie, de l'Arabie saoudite et de l'Irak. Est-ce sécuritaire?
De nombreux habitants de l'est du Canada se chauffent au pétrole. En dépit de cela, nous ne nous sommes pas dotés de plans qui permettraient de leur acheminer du pétrole canadien. Pourquoi pas? Dans quel autre pays signataire de l'ALENA est-ce que les citoyens risquent le plus de se retrouver sans chauffage et sans éclairage?
L'Office national de l'énergie s'est donné pour mandat de favoriser la sûreté et la sécurité des approvisionnements dans l'intérêt de la population canadienne. Pourtant, il m'a fait parvenir une lettre en date du 12 avril, où il est dit ceci, et je cite : « Malheureusement, l'ONE n'a entrepris aucune étude sur la sécurité des approvisionnements ». C'est scandaleux. J'ai demandé à l'ONE si le Canada envisage de se constituer des réserves stratégiques de pétrole, compte tenu de sa participation à l'AIE. L'ONE m'a répondu que : « Le Canada est nommément exempté de cela, du fait qu'il est un exportateur net, contrairement aux autres membres, qui sont des importateurs nets ».
Vous vous souviendrez peut-être que l 'AIE a été mise sur pied en 1974 par des pays industrialisés afin de faire contrepoids à la possibilité de boycottage de la part des pays de l'OPEP. Ses 24 membres sont tenus d'avoir à leur disposition des réserves d'urgence de pétrole correspondant à 90 jours d'importations nettes. Les exportateurs nets sont les seuls à en être exemptés. Le Canada a cette caractéristique en commun avec trois autres membres. Le Royaume-Uni et le Danemark sont des exportateurs nets eux aussi, mais ils ont quand même constitué des réserves en raison de leur appartenance à l'Union européenne. Cela laisse le Canada et la Norvège. La Norvège n'a pas besoin de réserve.
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Le Canada n'a pas de réserve stratégique d'hydrocarbures. La Norvège non plus, mais ce pays n'en a pas besoin parce qu'il fournit à ses citoyens ce dont ils ont besoin avant d'exporter les excédents.
L'ouest du Canada ne peut pas répondre à tous les besoins de l'est du Canada parce qu'aux termes de l'ALENA, le pétrole canadien doit être utilisé pour la sécurité de l'approvisionnement des Américains. Le Canada exporte actuellement 63 p. 100 de son pétrole et 56 p. 100 de son gaz naturel. Ces parts sont garanties par la disposition sur la proportionnalité de l'ALENA, qui stipule que nous ne devons pas réduire la quantité que nous exportons vers les États-Unis. Le Mexique a refusé cette disposition sur la proportionnalité. Elle ne s'applique qu'au Canada.
De plus, nous n'avons pas de pipeline est-ouest qui puisse vraiment répondre aux besoins de l'est. Cependant nous prévoyons construire cinq pipelines pour acheminer nos produits vers l'étranger.
Même si nous avons suffisamment de pétrole pour répondre aux besoins des Canadiens, le Canada est le pays membre de l'AIE qui est le plus exposé. Entre-temps, les États-Unis doublent leurs réserves d'hydrocarbures.
De plus, le Canada n'a pas de plan pour le gaz naturel. Lors des réunions des pays membres du G-8 l'été dernier, le Canada a entamé des négociations pour acheminer du gaz de Russie vers le Québec. C'est très dangereux. La Russie a récemment cessé d'exporter du gaz vers l'Ukraine et la Bélarus pour des raisons politiques.