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Bonjour à tous. Nous poursuivons aujourd'hui notre étude de la politique commerciale du Canada.
Nos invités spéciaux sont des membres d'une délégation de l'Association européenne de libre-échange.
Je vous souhaite d'abord la bienvenue. Nous sommes très heureux d'avoir pu prendre les dispositions voulues pour pouvoir vous accueillir. Merci beaucoup de votre obligeance. Nous vous sommes reconnaissants et nous abordons la séance avec enthousiasme.
J'invite le chef de la délégation, M. Gudlaugur Thordarson, à présenter les délégués.
S'il veut bien commencer par nous dire comment prononcer son nom, cela nous sera utile à tous.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Pourriez-vous présenter les membres de votre délégation d'abord, et je vais ensuite poursuivre.
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Merci à tous. Vous êtes les bienvenus.
Je sais que d'autres membres de votre délégation ne prennent pas place à la table. Bienvenue à tous. Nous discuterons avec vous, si vous le voulez bien, pendant la brève pause qui suivra.
Ce n'est pas dans nos habitudes, mais je voudrais inviter les membres du comité à se présenter.
Je vais expliquer brièvement que le comité compte des députés des quatre partis représentés à la Chambre. Il y a les députés ministériels et, dans ce cas-ci, un président du parti ministériel, et les députés de l'opposition, qui font partie de l'opposition officielle ou des deux autres partis d'opposition.
Auriez-vous l'obligeance de vous présenter? Pas la peine d'expliquer que votre circonscription est très belle. Nous savons qu'elles sont toutes les plus belles de tout le Canada. Donnez simplement votre nom, votre poste et la région d'où vous venez.
Je vais expliquer le rôle du comité et son mode de fonctionnement. Le comité se réunit habituellement deux fois la semaine et il y a parfois également une réunion du sous-comité du programme. D'autres comités ont des sous-comités qui sont à l'oeuvre, mais celui-ci n'en a pas pour l'instant.
Le comité fait des études dont il fait rapport à la Chambre sur tous les sujets que les membres, d'un commun accord, décident d'étudier. L'étude est suivie d'un rapport à la Chambre qui est présenté comme une recommandation au gouvernement. Bien sûr, notre comité se limite aux questions qui se rapportent au commerce international.
Le comité est en train d'étudier la politique commerciale du Canada. Nous nous adressons à des représentants d'autres pays pour qu'ils nous aident, par l'expérience de leur propre pays, à trouver des moyens d'améliorer les échanges commerciaux. Nous recevrons volontiers tout conseil que vous voudriez nous donner dans vos échanges avec nous, dans vos réponses aux questions et dans votre exposé.
Comme vous le savez, le comité se compose de députés de tous les partis dans des proportions qui correspondent en gros au pourcentage de sièges détenus par chaque parti aux Communes.
Je vous présente le personnel du comité. Voici Michael Holden et Peter Berg. Elizabeth est aujourd'hui absente. Norm Radford est le greffier du comité. C'est lui qui a pris les dispositions avec vous pour que vous puissiez comparaître aujourd'hui. Les attachés de recherche nous donnent des conseils spécialisés, et nous leur en sommes très reconnaissants.
Il s'agit d'une séance ordinaire du comité. Nous ferons une brève pause d'une dizaine de minutes peu après midi pour aller prendre des sandwichs. Vous pouvez les rapporter à la table, et nous poursuivrons la réunion. Nous n'avons qu'une heure et trois quarts, en gros, et nous tenons à tirer le meilleur parti possible du temps que nous avons.
Cela dit, nous allons passer tout de suite à votre exposé. Je crois savoir qu'un seul membre de la délégation fera l'exposé. Si vous voulez bien vous donner la peine. Nous avons hâte de vous entendre.
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Merci, monsieur le président, et merci aux membres du comité.
Je vais également présenter notre personnel. Le secrétaire de la délégation est M. Andri Luthersson, et il est assisté par Céline Nerny et Stigur Stefansson.
J'ai oublié de dire que ma circonscription est celle de Reykjavik, capitale de l'Islande. Je suis membre du Parti de l'indépendance, parti conservateur libertarien. Cela peut sembler étrange, mais c'est une conception plutôt européenne.
Permettez-moi d'abord de vous remercier de votre chaleureux accueil à Ottawa. Mon comité a hâte depuis longtemps de venir au Canada pour discuter avec les députés du Parlement canadien. Depuis qu'ont débuté les négociations sur le libre-échange entre l'AELE et le Canada, en 1998, le comité parlementaire de l'Association cherche à venir à Ottawa et à favoriser ainsi l'heureuse conclusion des négociations.
Pendant de longues années, comme vous le savez peut-être, les négociations sont restées stériles. Dans les faits, elles étaient bloquées. L'an dernier, toutefois, le dossier a évolué rapidement dans le bon sens et, sans être au fait de l'état actuel des négociations, j'espère que le Canada et l'AELE pourront conclure sous peu un accord de libre-échange. Bien sûr, les membres du comité parlementaire de l'AELE aiment à penser que les négociations se sont accélérées lorsqu'on a entendu dire que cette visite se préparait. Que ce soit le cas ou non, je suis sûr que tous ceux qui prennent place à cette table conviennent qu'un accord de libre-échange entre l'AELE et le Canada serait un progrès prodigieux dont toutes les parties en cause profiteraient.
Avant de céder la parole à mes collègues, je dirai que les pays membres de l'AELE et le Canada sont des joueurs importants dans le commerce international et ont intérêt à ce que le cycle de Doha aboutisse. Les pays de l'AELE sont déterminés à obtenir ce résultat et ont affirmé que c'était leur premier objectif et le plus important. Par ailleurs, on ne peut négliger la très forte tendance actuelle, dans tous les coins du monde, à conclure des accords de libre-échange bilatéraux. Elle s'explique par les difficultés évidentes auxquelles se heurte le cycle de Doha. Cette tendance, que bien des gens qualifient de course mondiale aux accords de libre-échange, comporte un risque croissant de discrimination pour les agents économiques. Pour sa part, l'AELE estime que les accords commerciaux bilatéraux sont complémentaires du système commercial multilatéral, et ne sauraient s'y substituer.
Par les temps qui courent, une vive concurrence caractérise le domaine du libre-échange. Le grand concurrent de l'AELE sur la scène commerciale est l'Union européenne, dont aucun pays de l'AELE n'est membre. Depuis le début des années 1990, l'AELE cherche à accéder aux mêmes marchés que l'UE et elle a en gros les mêmes objectifs qu'elle. Elle a tissé un vaste réseau de relations de libre-échange en Europe centrale et en Europe de l'Est — dont la plupart des pays font maintenant partie de l'EEE — et dans la région de la Méditerranée.
Des accords de libre-échange avec le Mexique et le Chili, Singapour et la Corée, et l'Union douanière d'Afrique australe prolongent le réseau outre-Atlantique, en Asie et en Afrique. Pour l'instant, le réseau de l'AELE s'appuie sur 15 accords de libre-échange et neuf déclarations et coopérations. Récemment, toutefois, l'AELE a adopté une attitude plus dynamique et, dans bien des cas, a devancé les efforts de l'UE. Elle a récemment conclu des accords de libre-échange avec l'Égypte, l'Union douanière d'Afrique australe et la Corée et plusieurs autres accords sont actuellement en négociation ou en préparation.
Le comité parlementaire appuie à fond la politique de l'AELE à l'égard des pays tiers et a tout fait pour inciter le Conseil de l'Association à se lancer dans une ambitieuse stratégie commerciale qui s'étendrait aux joueurs montants, comme l'Inde, la Russie et la Chine, sans oublier le Japon. Ces efforts semblent avoir porté fruit, car l'AELE et l'Inde ont amorcé récemment une étude commune de faisabilité qui pourrait déboucher bientôt sur un vaste accord économique. Quant aux autres pays que j'ai énumérés, l'AELE ou des pays qui en sont membres cherchent actuellement les moyens de renforcer les relations commerciales existantes.
J'ai parlé tout à l'heure de l'Union européenne. Il ne faut pas oublier qu'il s'agit de notre marché le plus important et que trois des quatre pays membres de l'AELE participent au marché interne en étant membre de l'Espace économique européen, l'EEE. Le quatrième pays, la Suisse, mène ses relations commerciales avec l'UE au moyen d'accords bilatéraux. Si je souligne ce fait, c'est pour vous faire remarquer que, même si l'UE est notre principal concurrent en commerce international, comme je l'ai déjà expliqué, elle est aussi pour nous un marché d'une importance énorme, un marché interne dont nous sommes membres à part entière. Et bien sûr, l'UE est l'un de nos amis les plus proches.
Monsieur le président et honorables députés, notre visite vise à appuyer la conclusion d'un accord de libre-échange entre l'AELE et le Canada, mais ce n'est pas tout. Nous tenons aussi à connaître vos opinions sur tout ce qui se rapporte au commerce international.
Il serait extrêmement important que nous, parlementaires de l'AELE, prenions connaissance de l'opinion de votre comité sur le cycle de Doha en général. Nous souhaitons vivement aussi savoir ce que vous pensez de l'état actuel de l'ALENA et des perspectives à venir.
Enfin, il nous serait très utile de connaître la stratégie du Canada en matière de commerce international et les opinions du comité sur l'état actuel de ce commerce.
Merci, monsieur le président.
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Merci beaucoup de votre exposé. Nous allons passer aux questions.
Vous remarquerez parmi nous des divergences d'opinion sur l'ALENA, selon que vous parlez à des députés ministériels, aux membres de l'opposition officielle ou au député néo-démocrate. C'est une constatation que nous avons faite par le passé, mais vous pourrez observer vous-mêmes.
Nous allons passer directement aux questions.
M. Bains, de l'opposition officielle, interviendra d'abord. Il a sept minutes,
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie également les parlementaires, les ambassadeurs, ainsi que les présidents qui ont fait des exposés. Bienvenue au Canada. J'espère que vous vous plaisez dans notre beau pays.
Comme vous le savez, le Canada est un pays commerçant. D'après le dernier recensement, notre population est de 34 millions d'habitants. Nous exportons, et nous sommes à la recherche de marchés pour échanger nos produits et services. La très grande majorité de nos emplois sont liés directement ou indirectement au commerce, qui est un élément crucial de notre politique et de notre stratégie étrangères. Surtout depuis quelques années, il semble que nous soyons au point mort, pour ce qui est de la signature d'accords de libre-échange. Nous n'en avons pas signé qui aient une certaine importance avec les pays avec qui nous négocions.
Notre comité a discuté notamment de l'importance à accorder aux marchés émergents. J'ai fait des lectures à ce sujet, car je viens d'être nommé au comité. Nous avons opté pour une nette orientation vers les marchés émergents comme la Chine, l'Inde et le Brésil, mais je crois qu'il y a des occasions à saisir sur les marchés développés, notamment en Europe. C'est donc un plaisir de vous accueillir aujourd'hui.
Nous avons des échanges d'une valeur d'environ 11 milliards de dollars, et il y a chez nous des investissements étrangers directs de près de 15 milliards. Il est réconfortant de constater qu'il y a eu une réunion le mois dernier, que le dossier de l'accord commercial avec l'AELE avance et que la conclusion n'est pas loin.
Mon groupe parlementaire de l'Atlantique et des députés qui représentent d'importants constructeurs navals m'ont fait part de préoccupations importantes. Ce qui inquiète, dans cet accord de libre-échange, ce sont les subventions accordées par les divers pays. L'exemple qui m'a été présenté par mes collègues du Canada atlantique est celui des subventions aux entreprises de construction navale. Nous voudrions savoir ce que vous pensez des subventions directes complexes qui sont consenties aux constructeurs navals. Y a-t-il eu ou y aura-t-il des changements à cet égard en fonction des négociations qui se déroulent en ce moment?
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Merci, monsieur le président.
Messieurs, mesdames, bonjour. Il nous fait plaisir de vous recevoir aujourd'hui, et nous espérons que ce sera dans l'intérêt des deux parties, évidemment.
Les négociations ont débuté depuis un bon moment déjà et elles ont achoppé principalement au niveau de la construction navale. Vous avez dit plus tôt, si j'ai bien compris, n'accorder aucune subvention de quelque forme que ce soit à l'industrie navale. Selon votre analyse, le Canada pourrait, directement ou indirectement, en octroyer.
Je vais vous parler d'un cas bien concret. Au Québec, en octobre ou novembre dernier, la compagnie norvégienne Teco Management a voulu acquérir le chantier naval Davie. Pour conclure la transaction, cette compagnie avait besoin d'un appui financier. Le gouvernement du Québec lui a accordé une garantie de prêt de 50 p. 100 sur 15,5 millions de dollars, tout en réduisant une créance de 16,4 millions de dollars. Cette intervention gouvernementale a donc servi à venir en aide à une entreprise norvégienne de l'industrie navale.
Dans le cadre d'un accord de libre-échange, des règles sont établies, ce qui n'empêche pas nécessairement les entreprises du secteur privé de faire des affaires dans divers domaines, dont l'industrie navale.
Selon votre analyse, quels éléments devraient être éliminés ou atténués au niveau de l'industrie navale, au Québec et au Canada?
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Monsieur le président et membres du comité, ce n'est pas le rôle du comité parlementaire d'entrer dans ces détails. Nous avons des gens qui sont chargés des négociations. Nous ne nous sommes pas occupés de ces choses. Comme groupe parlementaire, nous avons établi des limites pour chaque secteur. Ce n'est pas notre façon de travailler.
Lorsque vous m'interrogez sur ces détails, je peux dire très honnêtement qu'il n'en a pas été question. Nous nous en tenons à une perspective plus stratégique de l'orientation de l'AELE. Bien sûr, lorsqu'il s'agit de mettre la dernière main aux négociations, chaque Parlement doit donner son approbation, par exemple.
J'ignore si mes collègues norvégiens veulent ajouter un mot, mais il faut dire que notre comité ne discute pas de ces détails, ni dans ce secteur ni dans aucun autre.
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Seulement quelques mots.
L'adhésion à l'Union européenne est une question très controversée dans tous nos pays. Nous sommes nombreux, moi le premier, à souhaiter notre entrée dans l'Union européenne, mais ce n'est pas ce que souhaite la majorité de la population. Nous avons donc un élément commun: nos quatre pays n'ont pas une majorité favorable à l'entrée dans l'Union européenne, mais ils ont tout de même comme objectif d'entretenir avec elle des relations très étroites, surtout en matière économique. Trois pays, la Suisse faisant exception, appartiennent à l'Espace économique européen, et nous avons de nombreux accords bilatéraux. Nous en avons 18, et nous avons aussi des accords de libre-échange avec l'Union européenne, car nous devons nous associer à cet énorme marché. Au moins les deux tiers de nos exportations et même plus, 80 p. 100, sont destinées à l'Union européenne, et environ 60 p. 100 de nos importations en proviennent. Nous avons en commun l'idée qu'il faut avoir un accord de libre-échange avec l'Union européenne, sans quoi nous ne survivrions pas.
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Merci, monsieur le président.
Merci encore. Comme je l'ai dit tout à l'heure, j'ai eu l'occasion de rencontrer, trop brièvement, toute la délégation ce matin. La discussion a été captivante, et j'ai hâte de vous rencontrer un petit moment ce soir, à votre dîner. Je suis pris pendant une bonne partie de la soirée, mais je voudrais me joindre à vous pour prendre un petit verre d'aquavit après, s'il y en a.
Je voudrais dissiper ce qui est peut-être un malentendu. Le gouvernement du Canada a eu des discussions constantes avec notre industrie de la construction navale pour prendre connaissance de ses inquiétudes et s'en occuper. Ce n'est guère différent de ce que vous feriez, comme députés de vos Parlements.
Nous ne voulons pas vous laisser cette idée fausse que, au Canada, nous ne représenterions pas nos industries. Nous voulons que vous reteniez le grand principe voulant qu'un accord de libre-échange avec l'AELE soit à l'avantage de vos pays et du nôtre. C'est le plus important. Comme je l'ai dit ce matin, il s'agirait de notre premier accord de libre-échange transatlantique. Ce serait capital. Il me semble qu'il nous incombe à tous de faire tout ce que nous pouvons pour le favoriser.
Je voudrais revenir sur un échange que nous avons eu ce matin. Il m'a semblé fascinant, et je voudrais apporter plus de précisions. Vous semblez avoir une réflexion semblable à la nôtre sur les avantages du libre-échange. En fait, il serait difficile de trouver bien des points de désaccord sur les retombées du libre-échange, sur l'aide qu'il peut apporter à vos économies et à la nôtre.
Pourtant, je considère les partis que vous représentez — sociaux-démocrates, radicaux-démocrates, travaillistes —, et cela me fascine. Nous avons au Canada un Nouveau Parti démocratique qui réprouve le libre-échange. Les néo-démocrates veulent sans doute vivre dans un monde à part. Je ne sais pas au juste. Je ne comprends pas leur façon de penser. Cela m'échappe.
Je voudrais que vous expliquiez comment vous en arrivez à cette conclusion. Je suis entièrement d'accord, mais expliquez-moi. J'ai dû mal à comprendre, dans le contexte canadien.
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Oui, merci. Et merci de cette agréable rencontre de ce matin. Elle a été excellente. Un très bon début de séjour.
Je suis islandais. Notre population est faible. Il me semble étrange que vous parliez du Canada comme d'un petit pays ou d'un pays de taille moyenne. Vous avez 32 millions d'habitants, et nous en avons 300 000. Un bon ami à moi, l'ancien premier ministre, m'a dit que, lorsqu'un étranger demande combien d'habitants il y a en Islande, il faut toujours répondre moins d'un million. Autrement, il y a des difficultés.
Des voix: Oh, oh!
M. Gudlaugur Thordarson: C'est très simple. Sans libre-échange, nous ne pourrions pas survivre. Ce n'est pas plus compliqué. Dans notre histoire, les années les plus dures ont été celles où nous n'avions pas le libre-échange. L'Islande était alors le pays le plus pauvre d'Europe. Sa situation était celle de l'Albanie maintenant. Aujourd'hui, elle est l'un des plus riches, et l'une des grandes raisons, c'est que nous faisons partie de zones de libre-échange et pratiquons le libre-échange.
Autre élément important, car il n'y a pas que le commerce, nous avons toujours considéré les Canadiens comme nos amis. Entre 1874 et 1914, le cinquième de la population islandaise a déménagé au Canada. Nous avons toujours eu avec le Canada des liens solides, et nous souhaitons qu'ils soient plus solides encore.
Cela ne fait pas de doute: plus il y a de libre-échange et de coopération entre ces pays, entre l'AELE et le Canada, mieux c'est, à notre avis. Il ne s'agit pas que de rendre notre population et la vôtre plus riches. Il s'agit aussi d'établir de bonnes relations entre des pays amis.
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Dans le cas de l'Islande, nous nous sommes beaucoup améliorés au cours des 15 dernières années. Nous avons pris quelques mesures.
Nous avons privatisé beaucoup d'entreprises, notamment dans les secteurs financier, bancaire, etc. Il n'y a pas si longtemps, elles étaient subventionnées. Aujourd'hui, elles sont au moins des entités de taille moyenne qui affrontent la concurrence internationale. En ce moment même, deux banques islandaises investissent au Canada et y ouvrent des succursales.
Nous avons aussi allégé l'impôt des sociétés et des particuliers.
Bien sûr, nous insistons beaucoup sur le libre-échange, dans le cadre de l'AELE.
Nous investissons dans l'éducation et le secteur de la santé. Sans enfreindre aucune règle, nous avons permis la concurrence dans le système d'éducation.
Nous payons la plupart des factures du gouvernement, car il nous semble très important que chacun ait la chance de bien s'établir dans notre pays.
Voilà en somme comment nous nous y sommes pris.
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Merci, monsieur le président.
Nous vous savons gré d'avoir tous accepté de comparaître. Je me réjouis plus particulièrement de la présence de M. Hansen, car il représente la région d'où ma famille est partie pour venir s'installer au Canada.
Je suis tenté de réfuter les propos de M. Menzies, mais il vous a félicité de la façon dont vous avez élaboré votre programme en matière de commerce. Vous protégez très solidement votre agriculture et vous avez intégré des normes sociales, environnementales et de travail au commerce, à vos processus, à votre orientation en matière de commerce. Vous protégez également très bien le consommateur. Si M. Menzies admire votre approche, peut-être est-il en train de devenir un social-démocrate, qui sait?
Je voudrais commencer par poser des questions sur les consultations. Dans chacun de vos pays, en Suisse, en Norvège, en Islande et au Liechtenstein, comment tenez-vous les législateurs au courant des négociations? Comment faites-vous en sorte que les industries fragiles et le grand public restent dans le coup? Comme MM. Bains et Cardin l'ont dit, ces négociations suscitent de vraies inquiétudes en ce qui concerne l'industrie navale et les produits marins industriels.
On ne nous consulte pas au sujet de la préparation de cet accord commercial. Je voudrais savoir comment, dans chacun de vos quatre pays on met dans le coup les législateurs, les industries vulnérables et le grand public.
Je ne peux parler que du Liechtenstein. Je crois que tous les pays de l'AELE ont leurs petites différences. Nous, politiques, ne nous occupons pas des négociations. Tout est pris en charge par le gouvernement et les négociateurs, non seulement pour l'accord de libre-échange avec le Canada, mais aussi pour tous les accords. La plupart ou la totalité des concessions dans les négociations se font sans que nous sachions dans quel sens le dossier évolue. Le Parlement est informé des résultats au terme des négociations, lorsque l'accord de libre-échange en est à sa version définitive. Puis, nous pouvons intervenir, donner notre point de vue. Jusque-là, tout se passe plus ou moins derrière des portes closes.
Pour ma part, j'estime que c'est une bonne façon de procéder, en général. Si l'information est trop libre, les discussions politiques débutent très tôt dans le processus. Je suis sûr que bien des accords de libre-échange n'auraient jamais été conclus si l'information avait été communiquée trop tôt.
Le Liechtenstein a découvert que, avec les accords de libre-échange, certaines industries ne s'en tirent pas très bien, parce qu'il faut chercher à s'emparer du marché, tenir compte de l'ampleur du marché et de la concurrence. Même si nous avons perdu des emplois, nous en avons en général créé davantage grâce aux accords de libre-échange. Nous en avons créé plus que nous n'en avons perdu. Ce peut être dur dans certains secteurs et plus facile dans d'autres.
En général, les politiques ne s'occupent pas des accords de libre-échange. Ce n'est qu'à la toute fin qu'ils peuvent dire ce qui leur plaît ou leur déplaît, à moins que tout l'accord ne leur déplaise.
Monsieur Julian, votre temps de parole est terminé.
Nous allons faire une pause de 10 minutes. Le déjeuner est au fond de la salle.
Auparavant, messieurs, il y a une formalité que, malheureusement, il faut régler ici et tout de suite. Je vais donner lecture d'une motion et, si vous l'appuyez, tout se passera rapidement: « Que le Comité anime un dîner de travail pour la délégation et que les coûts proviennent du budget d'hospitalité du Comité et ne surpassent pas 700 $. »
Il est désagréable de parler du coût d'un repas avant de passer à table, mais nous n'avons pas réglé cette formalité à l'avance. Il faut donc le faire maintenant. Est-ce d'accord?
(La motion est adoptée.)
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En Suisse, nous n'avons pas de problème de pêche. Nous ne pêchons pas beaucoup. En agriculture, il y en a un. Nous avons beaucoup de subventions.
Notre gouvernement partage l'opinion de nombre d'entre nous: nous devrions commencer à négocier un accord européen de libre-échange sur l'agriculture. Je suis persuadé que, d'ici un ou deux ans, nous amorcerons la négociation de cet accord, surtout si le cycle de Doha se poursuit en agriculture.
Si le cycle de Doha est fructueux, nous devrons supprimer beaucoup de subventions. La meilleure solution pour nos agriculteurs serait de négocier avec l'Union européenne. Dans notre Parlement, à l'heure actuelle, je crois que la majorité est favorable à des négociations sur l'agriculture avec l'Union européenne.
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Le député a posé une question sur la position des États membres en ce qui concerne les pêches et l'agriculture. Est-ce que ce serait acceptable? En Islande, nous ne sommes jamais allés jusque-là dans les négociations avec l'UE sur notre adhésion. Il serait très difficile pour un politique islandais de persuader la population que le poisson, les stocks de poisson seraient mieux gérés par l'Union européenne que par les Islandais. Nous aimons à croire que nous avons fait une excellente gestion durable de cette ressource.
En agriculture, nous allons dans la bonne direction, même si les progrès n'ont pas été considérables. Pour la première fois, il y libre-échange total en agriculture entre l'Islande et les îles Féroé, et l'agriculture est de moins en moins importante dans l'économie islandaise.
C'est simplement une question de temps avant que nous n'ouvrions nos marchés plus que nous ne l'avons fait jusqu'ici aux produits agricoles d'autres pays. Il est peut-être plus sensé d'agir lentement au lieu de se précipiter, mais les choses ont beaucoup changé au cours des dernières années.
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Bonjour à tous. Je suis très heureux de me retrouver parmi vous aujourd'hui.
En ce qui concerne la souveraineté, je veux mentionner qu'au Québec, on parle beaucoup de pays comme la Norvège, l'Islande, etc. parce que ce sont de petits pays, beaucoup plus petits que le Québec, en termes de population, mis à part la Suisse, qui a une population à peu près équivalente. Ces pays ont pris leur place sur les marchés internationaux, dans le cadre des différents accords. Le niveau de vie et l'indice du développement humain, le IDH, de ces pays sont très élevés et même beaucoup plus élevés, par exemple en Norvège, en Islande et dans les autres pays voisins. Alors, je pense qu'il est profitable d'être souverain et en mesure de négocier ses propres traités internationaux. C'est dans cette direction que le Québec s'engage actuellement.
M. Thordarson nous a demandé comment le Québec se comportait par rapport au Cycle de Doha, à l'Organisation mondiale du commerce, à l'ALENA et à différents autres accords.
Les questions que je veux vous poser concernent l'ensemble des pays de votre territoire. Même si le Québec — le Québec n'est pas encore un pays, mais tout de même— et le Canada exportent beaucoup, il reste que l'Accord de libre-échange et les accords de l'OMC ont un impact sur certains secteurs d'activités et contribuent à appauvrir une partie importante de notre population.
Au Québec, nous vivons présentement une crise en agriculture et nos agriculteurs sont surendettés. Nos petites fermes traditionnelles, familiales, sont de plus en plus menacées de disparition au profit des mégafermes, plus productives, plus compétitives. Donc, cela touche un peu toutes nos régions rurales. Personnellement, je demeure en milieu rural. Nous avons des problèmes sur le plan de la relève agricole et sur celui de l'endettement. Nous avons des secteurs fragiles en agriculture. Vous connaissez un peu le mécanisme de la gestion de l'offre, un modèle agricole au Canada considéré comme fragile. Le Québec compte 50 p. 100 des producteurs laitiers de l'ensemble du Canada. Donc, ce sont des secteurs fragiles de l'agriculture que nous voulons protéger.
La concurrence internationale et la mondialisation font en sorte que notre secteur manufacturier est plus vulnérable. Dans certains secteurs manufacturiers, comme celui du textile, par exemple, nous avons perdu, dans l'ensemble du Canada, environ 50 000 emplois. Dans le secteur du meuble au Québec, on parle de 5 000 emplois perdus en trois ou quatre ans. Donc, nous avons des secteurs qui sont en difficulté. Il y a aussi le secteur de l'aéronautique qui devra prendre davantage d'expansion.
La question que je vais vous poser a trait à vos échanges avec le Québec. Mais d'abord, j'aimerais vous demander comment se porte la ruralité dans les pays de votre territoire, même avec un indice économique très élevé. Est-ce qu'il y a des secteurs d'activités que vous êtes en train de perdre? Comment réagissez-vous? Comment réussissez-vous à combler ces pertes par rapport aux gains que vous réalisez grâce à vos différents accords de libre-échange? Quelles sont les perspectives d'échanges avec le Québec, de possibilités de développement, etc.?
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Je n'ai pas une connaissance très précise du Québec, mais je crois qu'il a un extraordinaire potentiel. Je sais que sa population est fière et travailleuse.
Prenons l'exemple de l'Islande. Je représente une circonscription de Reykjavik, mais j'ai grandi à la campagne, que je connais fort bien. Cela illustre bien l'évolution des choses. L'agriculture islandaise, je vous le garantis, est bien moins concurrentielle que l'agriculture québécoise ou canadienne, mais elle perd graduellement de l'importance depuis dix ou vingt ans.
La petite localité où j'ai grandi vivait essentiellement d'agriculture et de services à l'agriculture. L'agriculture y compte aujourd'hui bien moins, mais la localité demeure prospère parce qu'elle s'est tournée vers d'autres activités, par exemple le tourisme et bien d'autres choses.
Aussi étrange que cela puisse sembler, ce qu'on peut qualifier de crise fait souvent apparaître de nouvelles possibilités, et c'est ce qui s'est passé en Islande.
Vous avez parlé de quelques secteurs. Ils ne sont vraiment pas très importants en Islande. Ils l'étaient, il y a une ou deux décennies, mais ils ont changé; la haute technologie est apparue, la main-d'oeuvre est plus instruite, il y a du tourisme, on insiste davantage sur l'éducation et d'autres possibilités. Nous avons eu beaucoup de chance de nous engager dans cette voie.
Vous avez dit que le Québec pourrait probablement être un pays indépendant. Même si nous sommes indépendants et ne souhaitons pas qu'il en aille autrement, nous n'arriverions à rien si nous ne faisions pas partie d'un marché plus important. Notre prospérité tient à notre participation au marché interne de l'EEE, de l'UE et de l'AELE. Si nous avions protégé notre marché et imposé des droits tarifaires comme nous le faisions par le passé, notre économie n'aurait pas progressé comme elle l'a fait ces dix ou vingt dernières années.
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Oui, j'aurais quelques mots à dire, si vous le permettez.
L'économie norvégienne s'est transformée elle aussi depuis 20 ou 30 ans. L'industrie des textiles n'existe plus, celle de la chaussure non plus, etc. Nous importons de plus en plus ce dont nous avons besoin dans la vie courante. Nous évoluons vers la haute technologie, les services et ainsi de suite. Cela fait partie de la mondialisation, et, jusqu'à maintenant, nous avons bien réussi.
L'une des raisons, c'est que nous avons réussi à attirer plus de femmes dans la population active. Un très fort pourcentage d'entre elles travaillent. C'est la même chose en Islande, en Suède, etc.
Dans le cas du Québec, il est très risqué pour un étranger d'exprimer une opinion. Si je peux me permettre cette franchise, je crois qu'il faut relever la plupart des défis qui surgissent dans le monde d'aujourd'hui au moyen d'une plus grande coopération entre les pays, par exemple en matière d'environnement, de changements climatiques, etc. De l'extérieur, je dois avouer que j'ai beaucoup de mal à voir quels genres de problèmes vous résoudrez mieux en étant un pays indépendant, étant donné votre situation géographique, avec les voisins que vous voulez avoir. Vous avez peut-être de bonnes réponses à ce propos, mais il s'agit ici de souveraineté alors que, me semble-t-il, l'interdépendance prend de plus en plus de place dans le monde moderne.
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Monsieur le président, mesdames, messieurs, pour répondre un petit peu à votre question par rapport à la Suisse, je dirai qu'il est vrai que le problème agricole est extrêmement important. Aujourd'hui, c'est un de nos gros soucis, car c'est plutôt l'entretien du paysage qui prime, cela à cause du tourisme et de la taille de notre pays, qui est très petit. C'est vrai que le pays offre du soutien par le biais de subventions plutôt écologiques, dirais-je, qui tiennent compte des surfaces cultivées, du nombre de têtes de bétail, mais pas du produit lui-même.
Le produit agricole sera de plus en plus abandonné par le soutien étatique au profit des surfaces, au profit du paysage. Alors, il est vrai que c'est assez différent puisqu'il y a des zones de plaines, à plat, et des zones de moyenne et de haute montagne. Ces zones sont soutenues selon leur situation géographique. En situation de montagne, il ne se fabrique pas beaucoup d'autres choses que les produits laitiers tandis que plus bas, il y a la culture qui peut faire une différence.
Aujourd'hui, notre monde agricole est très inquiet de savoir ce qui va se passer dans le futur, par rapport à une Suisse qui est plutôt dirigée vers l'économie, la machine-outil, l'horlogerie et les produits qui ont une valeur ajoutée relativement importante.
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Merci de vos exposés de ce matin.
Il est sûr que le libre-échange suscite de grandes préoccupations. Il est très favorable, notamment pour les industries qui exportent beaucoup, dans vos pays comme dans le nôtre. Un avantage, c'est que les secteurs industriels qui remarquent des occasions pourront croître, prendre de l'expansion. Il y aura plus d'emplois, plus de commerce. Tout cela est bon. Par contre, il y a des industries qui sont très touchées par les importations. Souvent, il y a alors contraction. Des travailleurs sont mis à pied et doivent se recycler. C'est une difficulté avec laquelle nous sommes aux prises en ce moment, le recyclage des travailleurs âgés.
J'ai une question d'ordre politique à poser aux députés de Norvège et de Suisse. Quels mécanismes vos gouvernements mettent-ils en place? Comment affrontent-ils le problème? Une solution consiste à laisser le marché régler la question. Mais il s'agit souvent d'une question délicate. Je voudrais savoir quelles stratégies vos gouvernements adoptent pour gérer ce genre de problème, lorsque le marché se transforme à cause des accords de libre-échange.
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Merci, monsieur le président.
Merci à nos invités. J'ai pu discuter avec quelques-uns d'entre vous pendant la pause-déjeuner. J'espère que nous pourrons échanger un peu plus ce soir.
J'ai fait quelques recherches et je suis allé sur votre site Web avant votre visite. Vous y présentez une excellente information.
À propos du commerce, nous avons récemment conclu un accord sur le bois d'oeuvre, qui assurera un peu de certitude et de stabilité dans le secteur forestier. Nous avons également l'ALENA. Il encadre un commerce qui, à 99 p. 100, se fait sans aucun différend. Mais pour le 1 p. 100 restant, il nous faut un mécanisme de règlement des différends.
Dans vos négociations passées sur les accords commerciaux, quel genre de mécanisme de règlement avez-vous mis en place? Marche-t-il bien?
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Je crois que le Canada devrait insister sur les accords de libre-échange.
Comme nous l'avons dit, nous avons essayé d'avancer le plus possible et de conclure des accords là où nous le pouvions. Il faut parfois du temps, comme vous le savez tous. Il vaut parfois mieux faire de petits pas que de ne pas avancer du tout.
Je suis persuadé que tous les pays devraient mettre l'accent sur les accords de libre-échange. Ces accords ne sont pas tous identiques. Par exemple, je ne pourrais pas donner de détails, mais je peux imaginer que, si l'AELE signe un accord de libre-échange avec le Canada, cet accord n'ira pas aussi loin que d'autres qui sont déjà en place. Certains existent depuis longtemps. On peut franchir une deuxième étape, puis une troisième.
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Merci, monsieur le président.
Nous avons parlé tout à l'heure des normes sociales, environnementales et en matière de travail que l'AELE a fait insérer dans les accords. Je souligne que nous vous sommes très reconnaissants de l'exemple que vos quatre pays ont donné. Vous avez des normes qui sont parmi les plus élevées au monde, selon l'indice de développement humain de l'ONU. Vous avez donc trouvé l'équilibre entre stratégie économique, stratégie commerciale et politique sociale pour que la population en bénéficie.
Le Canada peut tirer des leçons de cet exemple. Depuis le premier accord de libre-échange, en 1989, la plupart des familles canadiennes gagnent moins, en termes réels, qu'elles ne le faisaient à l'époque. Pour la majeure partie de la population canadienne, le régime de libre-échange, sans autres garanties, sans politique sociale pour faire contrepoids, a eu pour effet que la plupart des familles canadiennes sont en moins bonne posture.
Trois brèves question. La première s'adresse à qui voudra bien répondre. Comment ménagez-vous l'équilibre entre la politique commerciale et économique et la politique sociale pour garantir que toute la population profite de l'accord?
Deuxièmement, vous défendez vigoureusement votre agriculture et vos régions rurales... Le Canada est la cible d'offensives des États-Unis, qui voudraient faire disparaître notre Commission canadienne du blé et nos régimes de gestion de l'offre. Malheureusement, le gouvernement actuel semble enclin à céder sur ces points. Comment assurez-vous une défense très réelle de l'agriculture, pour le plus grand bien de vos collectivités rurales?
Enfin, je m'adresse aux délégués norvégiens. En 1996, le fonds du patrimoine de l'Alberta et celui de la Norvège, constitués par les revenus pétroliers, étaient à peu près au même niveau. Six ans plus tard, celui de la Norvège a dépassé les 100 milliards de dollars alors que celui de l'Alberta a diminué. Comment faites-vous en sorte que les Norvégiens bénéficient des retombées de la prospection et de l'industrie pétrolières?
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Je laisse de côté le pétrole. Nous n'avons pas ce problème chez nous. Nous avons beaucoup d'eau chaude, mais pas de pétrole.
En ce qui concerne le commerce et les affaires sociales, je crois qu'on n'arrive jamais... Même si nous sommes très heureux de ce que nous sommes parvenus à faire, l'Islande n'est pas le paradis. Même si le taux de chômage n'est que de 1,2 p. 100, par exemple, et si le PIB par habitant a augmenté, il y a toujours des choses... Je ne dirais pas que la situation est pénible, mais il y a des choses dont il faut être conscient: comme aider les pauvres, comment leur donner une chance dans la vie?
Il est difficile de mesurer ces choses-là. Nous discutons de ce que j'appellerais le Ginimètre. J'ignore si vous savez de quoi il s'agit. En ce moment, par exemple, ce qui est arrivé en Islande, et ce n'est pas la première fois, c'est que, même si tous ont profité de notre politique économique, les 5 p. 100 les plus riches se sont beaucoup enrichis — ce qui n'est pas mauvais pour les autres, mais voilà ce qui s'est passé. Les pauvres ont également beaucoup plus. Tous sont gagnants. Mais il y aura toujours des discussions là-dessus, et tous ne sont pas toujours d'accord.
Selon moi, il est important que tous aient une chance, et nous pouvons aider ceux qui ont le moins, plus particulièrement les enfants. Il ne faut jamais perdre cela de vue, ni jamais relâcher nos efforts à cet égard.
Deuxièmement, vous parlez d'agriculture. Je ne sais pas ce qu'il en est au juste en ce moment, car je n'ai pas vu de sondages, mais je dirais que 70 p. 100 des Islandais sont contre les subventions à l'agriculture. Et il y a beaucoup de pressions de la part des consommateurs — cela a beaucoup changé depuis dix ans — pour obtenir davantage d'importations agricoles meilleur marché.
Il y a eu des discussions à ce sujet. Il se trouve que le secteur agricole devient de moins en moins important, car il n'est pas très compétitif, pour des raisons évidentes. Je crois que nous aurons des changements sous peu dans le sens d'une libéralisation des échanges de produits agricoles, en tout cas en Islande.
Première question. Ma réponse sera très brève. Il y a deux choses: d'abord, une juste répartition; deuxièmement, un secteur public fort.
Deuxième question, sur l'agriculture. En Norvège, nous faisons deux choses. Nous prélevons des droits tarifaires très élevés sur les importations. Nous essayons d'importer très peu. Puis, nous subventionnons lourdement nos agriculteurs. Voilà comment nous protégeons l'agriculture.
En Norvège, l'agriculture ne représente pas un grand secteur de l'économie, mais elle est un élément important du mode de vie. Par rapport à l'Europe, nous sommes un grand pays peu peuplé, mais nous habitons tout le territoire. L'agriculture est un élément important à cet égard.
Dernière question, le fonds pétrolier, ainsi que nous l'appelons. Il y a quelques années, nous avons décidé, le Parlement a décidé presque à l'unanimité, exception faite d'un parti qui est maintenant l'un des plus importants, qu'il faut verser tous les revenus pétroliers dans un fonds, et qu'il ne faut en utiliser qu'environ 4 p. 100 par année, de façon que ce fonds demeure pour les générations à venir. Ces quatre ou cinq dernières années, nous en avons utilisé un peu plus de 4 p. 100. Cette année, nous sommes revenus à 4 p. 100. Grâce à l'augmentation des prix pétroliers, au cours des deux dernières années, je crois que nous n'utiliserons pas autant dans les années à venir. Nous économiserons encore plus, car l'économie est prospère et le taux de chômage est très faible.
Il semble que nous ayons réussi à économiser la majeure partie de cet argent pour les générations à venir. Nous ne l'avons pas laissé détruire notre industrie, car c'est là le grand danger: nous en utilisons tellement que nos industries exportatrices ne peuvent livrer concurrence.
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J'ai trois choses à dire.
D'abord, vous avez demandé comment nous pouvons financer ou gérer la politique sociale. Je crois qu'on peut le faire si l'économie est prospère. Comme social-démocrate, je dirais que notre politique de libre-échange, l'ouverture de nos marchés, notre ouverture au monde sont l'un des piliers de notre prospérité économique. Sans tous ces accords, nous n'aurions pas une économie prospère et nous ne pourrions pas nous offrir une aussi bonne politique sociale.
Deuxièmement, je dois vous contredire un peu. Je crois que le Canada réussit fort bien. Considérez votre budget, par exemple. Vous n'avez pas de déficit budgétaire. Tous nos pays ont d'énormes déficits budgétaires.
Des voix: Non, non.
M. Mario Fehr: Non, d'accord, mais la Suisse a un énorme déficit budgétaire. Le Canada n'en a pas. Il a donc une économie très prospère. J'estime que nos deux économies seraient encore plus prospères si nous avions, surtout en matière économique, de bonnes relations durables et justes.
À mon sens, des relations économiques plus riches aideraient tous nos pays. Comme social-démocrate, j'en suis profondément convaincu.
Nous n'avons plus de temps. Je dirai au nom du comité que nous avons tous apprécié votre présence parmi nous aujourd'hui. Cette rencontre a été très instructive.
Avant de mettre un terme à la séance, il y a quelques détails à régler. Si vous voulez bien rester dans la salle, il ne faudra qu'une minute.
En raison des contraintes de temps, je demande la permission du comité pour examiner la nomination par décret d'Eric Siegel au poste de président-directeur général d’Exportation et développement Canada. Nous avons fort peu de temps pour le faire. Pourrions-nous consacrer trois quarts d'heure à cette question le 13 février?
Pendant le reste de la séance, nous entendrons Stephen Poloz, premier vice-président aux affaires ministérielles et économiste en chef à Exportation et développement Canada. Pourrions-nous également examiner cette nomination par décret?
Des voix: D'accord.