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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 058 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 26 avril 2007

[Enregistrement électronique]

(1110)

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes entreprend aujourd’hui une étude des perspectives et des défis des entreprises canadiennes dans le cadre des relations entre le Canada et les États-Unis.
    Le comité s’intéresse en particulier à la détermination et à l’élimination des obstacles qui s’opposent au resserrement de nos liens économiques avec les États-Unis et cherchera à répondre à la question de savoir ce que le gouvernement du Canada peut faire pour aider les entreprises canadiennes à mieux saisir les occasions qui s’offrent dans le domaine du commerce et de l’investissement.
    Avant de présenter nos témoins d’aujourd’hui, je voudrais mentionner rapidement quelques questions dont le comité doit s’occuper. Il y a d’abord la question de nos déplacements. Il se trouve que les dates données par le greffier ne sont pas celles dont les membres du comité et moi avons discuté. J’avais parlé de partir le jeudi de la première semaine de juin, c’est-à-dire le 7 juin. Je suis sûr que c’est la date dont nous avons discuté au comité. Par conséquent, je dirais, pour votre gouverne, que nous serons probablement partis entre le 7 et le 19 juin. Ce sont encore des dates approximatives.
    Une motion sera peut-être proposée à la fin de la réunion. Nous nous en occuperons à ce moment si l’auteur le souhaite. Je veillerai à donner l’avis nécessaire.
    Monsieur Julian, avez-vous une question ou un commentaire au sujet des déplacements?
    Non, je propose simplement de renvoyer la question des déplacements au comité directeur.
    Je ne comprends pas ce que vous dites.
    Une motion doit être proposée plus tard au cours de la séance. Plutôt que de retarder les témoins, je propose de la renvoyer au comité directeur.
    Je ne sais pas s’il y a un problème. S’il y en a un, nous pouvons sûrement en parler plus tard. Je voulais simplement donner des précisions au sujet de cette date.
    Eh bien, monsieur le président, nous allons devoir discuter de cette question et tenir un vote à ce sujet. Je propose donc de la renvoyer au comité directeur.
    Nous devrions peut-être en parler plus tard, monsieur Julian.
    Je vais présenter les témoins, puis je les inviterai à faire un exposé préliminaire dans l’ordre des présentations.
    Nous avons aujourd’hui, de la Chambre de commerce du Canada, Clifford Sosnow, associé, Blakes, Cassels & Graydon, et Brian Zeiler-Kligman, analyste de politiques, secteur international; du Conseil canadien des chefs d’entreprise, David Stewart-Patterson, vice-président exécutif; et du Centre canadien de politiques alternatives, Bruce Campbell, directeur exécutif.
    Je voudrais vous remercier tous d’être venus aujourd’hui. Nous sommes très heureux d’entendre vos exposés. Le greffier vous a parlé du temps prévu pour la présentation des exposés. Je vous prie d’en tenir compte.
    Nous allons commencer par la Chambre de commerce du Canada. Clifford Sosnow, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président et membres du comité.
    Compte tenu du temps de parole prévu, je vais passer directement à nos observations. Je crois savoir que ce texte vous a été fourni dans les deux langues officielles. Je m’y tiendrai pour l’essentiel.
    Je m’appelle Cliff Sosnow. Je suis coprésident du Comité des affaires internationales de la Chambre de commerce du Canada et associé au cabinet Blakes, Cassels and Graydon. Je suis accompagné de Brian Zeiler-Kligman, analyste de politiques. Bien sûr, après que j’aurai fini de présenter mon exposé, Brian et moi serons heureux de répondre à vos questions.
    Nous sommes enchantés de vous présenter quelques observations sur la question vitale des relations canado-américaines. Nos relations avec les États-Unis sont extrêmement complexes et, à n’importe quel moment, des milliers d’accords, de consultations et d’entretiens sont en cours. Comme vous le savez, dans notre nouvel environnement de sécurité, toutes les questions sont assujetties à la nécessité d’équilibrer la sécurité et la compétitivité de l’Amérique du Nord. Or notre capacité de les réaliser toutes deux est fortement tempérée par le ton et la solidité de notre relation globale. À notre avis, il est extrêmement important de faire progresser les relations entre nos deux pays.
    Nous devons garder à l’esprit le degré de notre intégration. Notre interaction n’est plus simplement fondée sur la vente de biens. Nous sommes plus que deux entités distinctes uniquement liées par le commerce. En réalité, nous fabriquons des biens ensemble.
    Il y a un exemple classique: chaque véhicule fabriqué en Amérique du Nord traverse la frontière environ sept fois durant le cycle de production. Par conséquent, le fonctionnement efficace de la frontière canado-américaine est un point d’ancrage de la solidité et de la progression de ces relations. Encore une fois, il ne s’agit pas d’« eux » et de « nous », mais bien des deux ensemble.
    Équilibrer la sécurité et la compétitivité, élaborer un plan d’urgence à la frontière, améliorer l’infrastructure frontalière et renforcer la coopération en matière de réglementation: ce sont les stratégies interdépendantes qui renforceront les relations canado-américaines. Ces stratégies peuvent améliorer à la fois la position du Canada aux États-Unis et la position de l’ensemble de l’Amérique du Nord face aux forces économiques établies et émergentes. Nous présentons ce point de vue en étant conscients du fait que c’est l’une des questions clés que vous examinez: comment gérer ces relations, compte tenu des menaces venant de la Chine, de l’Inde et du Brésil et compte tenu du fait que ce sont aussi de précieux partenaires commerciaux.
    Je voudrais maintenant consacrer quelques instants au plan d’urgence à la frontière. Une pandémie, une catastrophe naturelle ou un acte terroriste pourrait mener à la fermeture totale ou partielle de la frontière. Or l’importance de cette dernière signifie qu’il faut absolument mettre en œuvre un plan d’urgence solide pour pouvoir faire face à ce genre de situation. Nous n’avons pas encore un tel plan. L’Agence des services frontaliers du Canada, grâce au travail impressionnant de ses fonctionnaires – qui sont souvent vertement critiqués, mais que la Chambre de commerce du Canada juge exemplaires par leur travail – ainsi que le Customs and Border Protection des États-Unis élaborent actuellement un plan d’urgence à la frontière en consultation avec le secteur privé des deux pays. Nous nous félicitons de cette initiative et applaudissons les autorités pour leur décision d’ajouter 24 millions de dollars au budget de l’élaboration de ce plan.
    Vous savez sans doute qu’au début du mois, la Chambre de commerce du Canada a participé à un exercice de simulation d’une urgence à la frontière organisé par l’ASFC et le CBP. En un certain sens, l’exercice a été un succès parce qu’il a mis en évidence les lacunes du système actuel. Il est clair qu'il reste encore du travail à faire. Par exemple, il est évident que les deux gouvernements doivent travailler de concert avec des groupes de gens d’affaires, comme la Chambre de commerce, à l’élaboration d’un plan de communication, afin que les entreprises des deux côtés de la frontière sachent quelles marchandises et quelles personnes seront autorisées à traverser la frontière en cas d’urgence et durant la reprise des activités.
(1115)
    Par conséquent, il reste encore du travail à faire pour établir un cadre permettant de déterminer les marchandises et les personnes qui auront droit à un statut prioritaire. Nous espérons que cette affaire pourra se régler rapidement.
    Nous devons également nous efforcer d’accroître la capacité de l’infrastructure à la frontière canado-américaine. Cet énoncé peut sembler banal, mais il revêt une importance critique. Depuis 2001, on estime que le temps de traitement des expéditions a triplé, ce qui coûte au moins 14 milliards de dollars US par an aux deux économies, simplement à cause du manque de capacité de l’infrastructure frontalière.
    Le nombre croissant de formalités à remplir à la frontière indique clairement qu’il faut accroître la capacité de la frontière, notamment, en augmentant le nombre et la longueur des voies rapides et en prolongeant les heures de service complet aux principaux postes frontaliers.
    Je rappelle au comité que 2 milliards de dollars de biens sont échangés tous les jours entre le Canada et les États-Unis. À l’heure actuelle, 40 p. 100 de ce commerce passe par Windsor-Detroit. À notre avis, nous avons besoin d’urgence d’un autre poste frontalier dans cette région.
    Le budget 2007 prévoit le financement de la composante fédérale de cet investissement, mais des pourparlers sont encore en cours. Nous exhortons donc la Chambre à agir rapidement dans ce dossier. En même temps, il faut veiller à ce que le nouveau passage international projeté soit structuré de façon à ne pas compromette l’investissement dans l’infrastructure actuelle. Nous ne voudrions pas que le nouveau pont se substitue simplement au passage actuel.
    Des investissements visant à régler les problèmes de capacité et d’efficacité doivent également être faits à d’autres postes frontaliers, notamment dans la région de Richelieu, au Québec, et en particulier à la porte d’entrée Lacolle-Champlain. La Chambre de commerce croit en effet que ce poste a besoin d’urgence de rénovations.
    De plus, le Canada ne possède qu’un emplacement de prédédouanement maritime situé à Victoria, en Colombie-Britannique. Or, étant donné que le terminal ne possède pas l’infrastructure requise pour respecter les règles de transit des passagers et de sécurité des navires, cet emplacement risque de perdre son statut de centre de prédédouanement auprès des États-Unis. Nous exhortons donc le comité à presser la Chambre de faire les investissements nécessaires dans ce terminal.
    C’est en Ontario, en Colombie-Britannique et au Québec que se trouvent quelques-uns des postes frontaliers qui ont le plus besoin de changements d’infrastructure.
    Je me rends compte que le temps passe. Je vais donc essayer d’accélérer.
    L’Initiative relative aux voyages dans l’hémisphère occidental est sans doute la question frontalière la plus controversée dans les relations canado-américaines. Comme vous le savez, il s’agit de l’initiative qui impose la présentation d’un passeport pour entrer aux États-Unis.
    Nous nous félicitons des progrès réalisés jusqu’à présent et appuyons les efforts du gouvernement et de la Chambre en vue d’encourager les États-Unis à reporter la prochaine étape de mise en œuvre, en attendant la réalisation d’un projet pilote et l’analyse de ses résultats.
    Par ailleurs, sachant que la mise en œuvre de l’IVHO, particulièrement aux postes frontaliers terrestres, est inévitable, nous incitons le gouvernement fédéral à faire le nécessaire, au niveau des fonctionnaires, pour accélérer le traitement des innombrables demandes de passeport qu’on peut prévoir. Nous l’avons bien vu lorsque l’initiative a été appliquée dans le cas des passagers aériens. Il est également nécessaire de réaliser rapidement un plan de communication pour informer les voyageurs de la nature des documents exigés et du calendrier de mise en œuvre des nouvelles initiatives.
    Enfin, nous préconisons l’expansion et la promotion des programmes NEXUS et EXPRES afin d’accélérer la circulation des voyageurs réguliers à faible risque. Ces mesures minimiseront certainement les effets de l’IVHO.
    Je voudrais aborder deux autres points. La coopération en matière de réglementation facilitera la circulation transfrontalière des biens et des personnes. Je parle ici de ce qu’on appelle « la tyrannie des petites différences » entre nos régimes de réglementation, qui impose des frais importants aux fabricants, exportateurs et transporteurs canadiens ainsi qu’aux clients canadiens et étrangers, annulant ainsi les avantages des réductions tarifaires durement acquises grâce à vos négociations.
    Il y a également d’autres différences touchant les normes régissant la santé et la sécurité, la technologie, l’environnement ainsi que l’emballage et l’étiquetage des produits. Encore une fois, nous préconisons une plus grande coopération dans la réglementation de ces domaines.
    D’autres domaines ont également un besoin urgent – et ce n’est pas là une figure de style – de coopération, comme les secteurs de l’automobile et de l’alimentation, de même que le secteur de la défense en ce qui a trait à la réglementation américaine sur le trafic international d’armes. Nous pouvons répondre à vos questions si vous souhaitez avoir plus de détails à ce sujet.
(1120)
    Je voudrais parler enfin du régime de protection de la propriété intellectuelle. Au Canada, la propriété intellectuelle n’est pas suffisamment protégée et ne fait pas l’objet de mesures d’exécution adéquates. Cette situation nuit à toutes les industries canadiennes et menace la santé et la sécurité des consommateurs et de la société. Le mois dernier, la Chambre de commerce du Canada a comparu devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes pour réclamer des changements aux lois et aux mesures d’exécution dans ce domaine, dans l’intérêt non seulement des gens d’affaires, mais de tous les Canadiens.
    L’insuffisance de la protection de la propriété intellectuelle au Canada nuit aussi à nos relations avec les États-Unis. Ces dernières semaines, des membres démocrates de la Chambre des représentants ont envoyé une lettre au président, demandant que les États-Unis déposent une plainte auprès de l’OMC à cause de la faiblesse de nos lois sur le droit d’auteur. Dans notre propre intérêt et pour sauvegarder notre plus importante relation, le gouvernement canadien devrait accorder la priorité à l’amélioration de notre régime de propriété intellectuelle et veiller à ce qu’il respecte les normes de nos partenaires commerciaux, et en particuliers des États-Unis.
    Monsieur le président et membres du comité, nous reconnaissons tous l’importance vitale des relations canado-américaines et les nombreux secteurs susceptibles d’améliorations. Nous vous avons présenté aujourd’hui quelques domaines que nous vous exhortons de recommander à l’attention de la Chambre et du gouvernement: améliorer nos relations afin de faciliter la circulation à la frontière, augmenter la coopération en matière de réglementation et renforcer la protection de la propriété intellectuelle.
    Je vous remercie de nous avoir donné l’occasion de présenter le point de vue de la Chambre de commerce du Canada.
    Nous serons bien sûr heureux de répondre à vos questions au moment opportun.
    Je remercie M. Sosnow, de la Chambre de commerce du Canada.
    Nous écouterons maintenant M. Stewart-Patterson, du Conseil canadien des chefs d’entreprise. Merci beaucoup. Vous pouvez présenter votre exposé.
    La parole est à vous.
    Je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de comparaître devant vous pour parler des relations entre le Canada et les États-Unis. Comme beaucoup d’entre vous le savent sans doute, le Conseil canadien des chefs d’entreprise appuie fortement, depuis des décennies, les efforts visant à réduire l’obstacle présenté par la frontière canado-américaine à la libre circulation des personnes et des biens.
    Dans les années 1980, avant la signature du premier Accord de libre-échange entre les deux pays, notre principal objectif était de donner aux Canadiens un meilleur accès à l’immense marché qui s’étendait au sud de leur frontière. Aujourd’hui, pour les entreprises canadiennes, la circulation efficace des biens et des services entre nos deux pays fait plus que donner accès aux États-Unis. Elle permet aux entreprises des deux côtés de la frontière de travailler ensemble, comme l’a dit mon collègue de la Chambre de commerce, pour faire une concurrence plus efficace aux nouvelles puissances économiques émergentes, comme la Chine et l’Inde, qui transforment les courants du commerce et de l’investissement à l’échelle mondiale.
    Les attentats terroristes du 11 septembre ont instauré en Amérique du Nord une nouvelle ère dans laquelle la sécurité est devenue la priorité centrale de la politique publique américaine. En même temps, les décideurs de nos deux pays ont reconnu que la sécurité matérielle et la sécurité économique vont de pair. Cela entraîné bien sûr la conclusion de l’accord sur la frontière intelligente entre le Canada et les États-Unis et d’un autre accord semblable entre les États-Unis et le Mexique.
    À mesure que nous avons progressé, nous avons dû nous rendre compte dans les cinq dernières années, comme mon collègue l’a signalé, que même si les marchandises importées en Amérique du Nord n’affrontent qu’une inspection douanière, les biens produits sur le continent franchissent souvent la frontière plusieurs fois, passant de l’état de matières premières à celui de produits intermédiaires, pour devenir ensuite des produits finis. Par conséquent, chaque mesure qui ajoute au coût ou au temps nécessaire pour franchir la frontière en Amérique du Nord représente l’équivalent d’une taxe imposée aux entreprises, aux emplois et aux investissements des deux pays.
    Une compréhension claire de cette réalité a mené au lancement du Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité au Sommet des dirigeants nord-américains tenu au Texas en 2005. Je crois que c’est remarquable parce que le PSP a deux aspects. C’est un accord qui est d’une part visionnaire et pratique et, de l’autre, éminemment pratique.
    Sur le plan stratégique, le PSP reconnaît que la croissance des trois économies nécessite une coopération beaucoup plus intense pour permettre aux sociétés de continuer à investir, à créer des emplois et à bâtir des entreprises mondiales à partir de bases situées dans les collectivités de nos pays. Sur le plan pratique, le Partenariat reconnaît en même temps que, même s’il n’est pas temps de songer à une nouvelle entente commerciale de grande envergure, de petites améliorations peuvent assurer de grands progrès.
    L’accent mis par le PSP sur les questions pouvant être réglées sans traités ni lois a amené certains critiques à le présenter comme une grande entente déguisée. Toutefois, l’objet sous-jacent du PSP est simplement d’encourager l’adoption d’une approche fondée sur le bon sens pour régler d’une façon concrète les questions pratiques pouvant contribuer à un meilleur fonctionnement de l’économie des trois pays.
    Le programme initial du PSP comportait quelque 300 points différents. Beaucoup d’entre eux représentent de petites mesures qui, individuellement, n’auraient pas de grandes incidences, mais qui, prises ensemble, si mineures soient-elles, lui confèrent le caractère d’un pas de géant pour l’Amérique du Nord, sans pour autant nécessiter l’adoption d’un grand accord.
    Lorsque les dirigeants des trois pays se sont retrouvés l’année dernière à Cancun pour le premier anniversaire du PSP, ils ont reconnu que des conseils plus directs du secteur privé contribueraient à l’adoption des mesures les plus efficaces et les plus susceptibles de permettre aux sociétés nord-américaines d’attirer des investissements et de créer des emplois. Cela a entraîné la création du Conseil nord-américain de la compétitivité, ou CNAC, groupe consultatif tripartite composé de chefs d’entreprise des trois pays.
    Les dirigeants ont décidé que le CNAC fonctionnerait en toute indépendance par rapport aux gouvernements. Ils ont donc demandé à ses membres de recourir à des services de secrétariat extérieurs au gouvernement. Cela s’est fait dans les trois pays. Le Conseil canadien des chefs d’entreprise est heureux d’agir en qualité de secrétariat canadien du CNAC.
    Une fois constitué, le CNAC a agi sans tarder. Dès août de l’année dernière, les membres avaient convenu de se concentrer dans leur première année sur trois priorités stratégiques: la facilitation de la circulation à la frontière, la coopération en matière de réglementation et l’intégration énergétique. Dans les quatre mois qui ont suivi, les secrétariats ont beaucoup consulté les milieux d’affaires de leurs pays respectifs. Dès le début décembre, un projet de rapport adressé aux ministres était rédigé, et le rapport final traduisant un fort consensus des milieux d’affaires des trois pays était approuvé en janvier 2007.
    Le rapport formule un vaste éventail de recommandations, plus de 50 en tout. La partie traitant de la facilitation de la circulation frontalière comporte des recommandations sur quatre points: gestion des urgences, expansion de l’infrastructure frontalière, circulation des marchandises et circulations des personnes.
(1125)
    Au chapitre de la réglementation, le rapport appuie l’objectif de la conclusion d’un accord-cadre nord-américain cette année et préconise l’adoption de mesures portant sur les produits alimentaires et l’agriculture, les services financiers, les transports et la propriété intellectuelle. Dans la partie traitant de l’énergie, le rapport recommande des mesures tripartites liées aux réseaux de distribution transfrontaliers, au développement des ressources humaines et aux technologies énergétiques propres et suggère des moyens permettant aux Mexicains de travailler dans leur propre pays pour accélérer la mise en valeur de leurs ressources considérables.
    Dans les trois domaines, le CNAC incite aussi les gouvernements à ne pas faire marche arrière en permettant un resserrement plutôt qu’un assouplissement des formalités frontalières nécessaires au passage des biens et des personnes. Le rapport souligne deux points précis: l’incidence de l’Initiative relative aux voyages dans l’hémisphère occidental des États-Unis sur la circulation des personnes – et les longues files d’attente qu’elle a provoquées aux bureaux des passeports – ainsi que les nouveaux droits et inspections imposés par l’Animal and Plant Inspection Service des États-Unis.
    Le CNAC a présenté son rapport aux ministres responsables des trois pays à une réunion tenue ici, à Ottawa, en février. Il s’agit d’un rapport public qu’on peut consulter sur plusieurs sites Web. J’en ai apporté des exemplaires pour tous les membres du comité, pour le cas où vous ne l’auriez pas encore vu. Je tiens à répéter qu’il a été rendu public depuis plusieurs mois. J’aimerais beaucoup savoir si vous avez des observations à formuler à cet égard.
    Je dois dire que les gouvernements ont déjà commencé à donner suite à ces recommandations. Le budget fédéral 2007 s’est intéressé directement à deux d’entre elles: l’élimination des retenues d’impôt sur les paiements d’intérêts transfrontaliers, dans le cadre de la convention fiscale Canada-États-Unis, et l’augmentation de l’investissement dans les nouvelles infrastructures du poste frontalier Detroit-Windsor. Mon collègue en a déjà parlé.
    Nous assistons aussi à des progrès sur d’autres fronts, bien qu’il y ait parfois de l’incertitude à cet égard. Le projet pilote de prédédouanement des expéditions terrestres est l'un des plus critiques. C’est un projet qui est envisagé depuis la signature de l’accord initial sur la frontière intelligente. Le dédouanement des expéditions commerciales à une certaine distance de la frontière s’impose pour réduire l’encombrement aux grands postes frontaliers. Je crois savoir qu’au début de cette semaine, une multitude de questions controversées ont été réglées. Les négociations ne portent plus que sur un seul point, mais en sont à un stade critique qui pourrait aboutir à l’impasse. J’attends en ce moment même des renseignements à ce sujet. J’espère vraiment qu’il y aura une entente.
    Monsieur le président, je voudrais juste signaler que mon collègue de la Chambre de commerce a abordé plusieurs sujets: gestion des urgences, infrastructure frontalière, Initiative relative aux voyages dans l’hémisphère occidental, coopération en matière de réglementation, propriété intellectuelle. Ces questions ne sont pas seulement importantes pour les entreprises canadiennes.
    Je crois que la contribution la plus importante du CNAC, c’est qu’avec la publication de son premier rapport, nous en sommes arrivés à un consensus officiel et public des milieux d’affaires des trois pays. Autrement dit, les gens d’affaires du Canada, du Mexique et des États-Unis ont déterminé les points sur lesquels ils peuvent s’entendre et parler d’une seule voix à leurs gouvernements respectifs. Nous espérons que cela aura des effets positifs en permettant à nos trois pays de travailler ensemble plus efficacement au niveau gouvernemental pour atteindre les objectifs fixés par leurs dirigeants.
    Les membres du CNAC présenteront officiellement leur rapport aux dirigeants avant le prochain Sommet nord-américain, que le Canada doit accueillir cet été. Au moment d’entamer la seconde année de leur mandat, les membres envisagent d’autres moyens pratiques d’aider les entreprises et les collectivités nord-américaines à mieux soutenir la concurrence dans l’économie mondiale.
    Monsieur le président, je suis maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions. Je vous remercie.
(1130)
    Je remercie M. Stewart-Patterson, du Conseil canadien des chefs d’entreprise.
    Notre dernier témoin est M. Bruce Campbell, du Centre canadien de politiques alternatives.
    Monsieur Campbell, la parole est à vous.
    Je remercie le comité d'avoir au moins commencé à examiner le Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité. Comme vous le savez, c’est une entente cadre qui recouvre un vaste éventail d’initiatives économiques et de sécurité entreprises pour mieux intégrer le marché nord-américain. Le partenariat prolonge l’ALENA et constitue une initiative d’intégration profonde. Comme David l’a dit, ce n’est pas une grande entente basée sur des négociations ardues, comme l’ALENA. C’est plutôt une initiative complémentaire convenue entre les deux gouvernements. Elle n’entraînera pas de modifications législatives, du moins pas directement. Toutefois, malgré le caractère complémentaire du PSP, ses effets cumulatifs peuvent, avec le temps, devenir tellement considérables qu’il pourrait même revêtir plus d’importance que l’ALENA, selon la portée qu’il aura et le rythme des progrès réalisés. C’est la raison pour laquelle je crois qu’il est important pour vous de l’étudier à fond.
    Comme beaucoup d’autres, que vous entendrez probablement dans les prochains jours, je m’inquiète du processus. Je suis préoccupé par le manque de transparence et le manque de consultation du public. Je suis également préoccupé par l’accès privilégié accordé aux grandes entreprises dans le cadre du nouvel organisme, le CNAC, constitué aux termes du PSP. Nous disposons de renseignements superficiels sur cette initiative, mais nous ne savons pas vraiment ce qui se passe.
    Je suis sûr que du travail utile et important se fait actuellement, mais je crains que, sous le couvert de ce grand projet, d’autres mesures ne soient prises, qui ne sont pas aussi avantageuses et qui font peut-être passer des intérêts privés avant l’intérêt public. De toute façon, ni le Parlement ni les Canadiens ne peuvent en discuter avant d’avoir une meilleure idée de ce qui se passe.
    Je m’inquiète aussi du fond de l’affaire, c’est-à-dire du modèle d’intégration axé sur le marché libre qui est appliqué. Tous les beaux discours entourant le PSP soulignent la nécessité d’une intégration de plus en plus étendue pour renforcer la compétitivité. Il s’agit d’intégrer les marchés de l’énergie et de réduire le fardeau réglementaire. La réglementation est toujours qualifiée de fardeau. Tout cela a pour objet d’augmenter la liberté des entreprises. Je n’ai jamais entendu parler de mesures destinées à favoriser une harmonisation ascendante des normes de travail ou des normes environnementales, de mesures visant à encourager une répartition équitable des gains de productivité parmi les travailleurs, de mesures fiscales qui empêcheraient les sociétés d’établir des prix de cession interne ou de placer leurs bénéfices dans des paradis fiscaux. Ce genre de coopération ne figure pas au programme du PSP. Dès lors, il faut se demander: Pour qui la prospérité doit-elle être réalisée?
    Je m’inquiète enfin de la restriction de l’autonomie canadienne qu’impose le PSP en matière d’élaboration de politiques. Le PSP est un processus de convergence ou d’harmonisation des politiques et des régimes de réglementation destiné à réduire les obstacles pour les entreprises. Compte tenu de l’énorme écart qui existe entre la puissance économique du Canada et des États-Unis, je ne peux pas m’empêcher de penser que l’harmonisation signifie, dans la plupart des cas, que le Canada doit réduire sa réglementation ou simplement adopter la réglementation fédérale américaine. Je me pose donc la question suivante: À quel point le resserrement de la marge de manœuvre du Canada risque-t-il de compromettre d’une façon fondamentale la responsabilité démocratique dans notre régime politique?
    Voilà quelques-unes de mes préoccupations générales. Dans les quelques minutes qui me restent – d’autres vous parleront sûrement de toute une gamme de questions, allant de l’eau à l’énergie –, je voudrais concentrer mon attention sur la coopération en matière de réglementation qui, comme je l’ai dit, se traduit en fait par une harmonisation des règlements. Celle-ci se déroule sur deux plans. D’une part, il y a le plan général dont nous avons déjà parlé. De l’autre, nous avons un certain nombre d’initiatives sectorielles dans des domaines tels que l’infrastructure énergétique, les antiparasitaires, la biotechnologie et les produits pharmaceutiques. J’espère vraiment que vous demanderez des séances d’information sur l’état d’avancement de ces différentes initiatives.
    Je voudrais mentionner quelques préoccupations particulières. Tant la déclaration faite par les dirigeants en 2005 au sujet de la coopération en matière de réglementation dans le cadre du PSP que les déclarations qui ont suivi établissent clairement que le coût et la compétitivité constituent les principales considérations. Les considérations de protection – je m’intéresse ici à la réglementation d’intérêt public – sont reléguées au second plan, de sorte que ce sont les industries réglementées, et non les organismes de réglementation, qui occupent une place privilégiée à la table du CNAC. Je trouve cela inquiétant.
(1135)
    C’est une autre manifestation du virage survenu il y a quatre ans dans le cadre de l’initiative de réglementation intelligente, qui n’est en fait qu’une initiative de déréglementation. Elle consacre un changement du principe de base de la réglementation, ce qu’on appelle le principe de précaution, auquel on substitue l’approche de gestion du risque, qui accorde un poids égal aux considérations de coût. Le principe de précaution a été sérieusement affaibli. Cela s’est produit malgré les objections de nombreux groupes de défense de l’environnement et de la santé. Le nouveau principe est maintenant inscrit dans la nouvelle politique de réglementation que le gouvernement a annoncée il y a quelques semaines dans la Directive du Cabinet sur la rationalisation de la réglementation. Par conséquent, les structures sont maintenant en place, et je crains fort qu’elles ne favorisent un processus d’harmonisation conforme au programme résolument axé sur la déréglementation du gouvernement Bush, ce qui compromettra encore plus le principe de précaution et accélérera la déréglementation au Canada.
    J’ai un autre sujet de préoccupation dont je voudrais vous parler. C’est l’exportation de fonctions réglementaires vers les États-Unis. En 2004, le Comité consultatif externe sur la réglementation intelligente a recommandé de profiter de ce qu’il a appelé les capacités scientifiques et réglementaires supérieures de la Food and Drug Administration des États-Unis pour être en mesure de concentrer ses maigres ressources sur les priorités stratégiques.
    Le rapport trinational sur l’intégration nord-américaine de 2005 préconisait l’adoption immédiate d’une politique d’homologation des produits biotechnologiques et pharmaceutiques ayant subi des essais dans un seul des trois pays. Autrement dit, un produit accepté dans un pays serait automatiquement déclaré conforme aux normes des deux autres.
    Je me demande donc si le PSP mènera à l’adoption d’une telle politique à l’égard des produits pharmaceutiques et biotechnologiques. Faudra-t-il réduire nos propres capacités d’essais et de recherche et accepter celles de la FDA américaine? Est-il vraiment sage de confier une responsabilité aussi importante de notre gouvernement à un organisme américain dont les antécédents de sécurité ont été sévèrement critiqués et qui, pour beaucoup, cède aux pressions du lobby pharmaceutique des États-Unis? Pour moi, cela reviendrait à importer la déréglementation américaine.
    Je vous remercie.
(1140)
    Merci beaucoup de votre exposé, monsieur Campbell.
    Nous passons directement aux questions.
    Du Parti libéral, l’opposition officielle, M. Bains, pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie aussi tous les témoins qui sont venus au comité. Je suis heureux de constater qu’il y a aujourd’hui un certain équilibre dans les points de vue présentés, ce qui est très important.
    Je dois dire, dans le contexte des observations présentées par M. Campbell, que nous avons eu des discussions avec des responsables du ministère et que j’ai mentionné certaines des préoccupations dont il a fait état au sujet de la transparence, de la responsabilité et du processus. Ces préoccupations concernant le Partenariat pour la sécurité et la prospérité ont été évoquées non seulement au Canada, mais aussi aux États-Unis et au Mexique. Il y a de l’inquiétude à ce sujet parmi les législateurs, dans le public et dans les organisations de la société civile.
    Je crois que la principale inquiétude porte sur le fait que la discussion de ces ententes et partenariats est exclusivement ou presque exclusivement limitée à des cadres d'entreprise. À votre avis, monsieur Sosnow et monsieur Patterson, ces préoccupations sont-elles fondées? Si oui, j’aimerais savoir de quelle façon il serait possible d’améliorer le processus pour y associer d’autres intervenants clés à l’avenir?
    Si vous le permettez, je dirais que les dirigeants ont établi le processus en 2005. C’est un processus très public. Il était clair, dès le départ, que l’intention était d’avancer, comme l’a dit M. Campbell, non à pas de géant, mais en prenant de petites mesures très pratiques. L’année dernière, lors de la création du Conseil nord-américain de la compétitivité, les dirigeants ont essentiellement reconnu que des domaines tels que la réglementation et la gestion de la frontière sont hautement complexes et, compte tenu de la multiplicité des mesures possibles, qu’ils bénéficieraient des conseils de ceux qui seraient directement touchés par ces mesures.
    Autrement dit, si un gouvernement ne peut consacrer qu’un temps limité à un très vaste sujet, il a intérêt à examiner les mesures à prendre et les moyens d’utiliser au mieux le temps et les ressources disponibles. C’est sur cette base que les gouvernements ont décidé des conseils qui leur seraient le plus utiles. Quand il faut s’occuper de questions de la nature de celles que recouvre le PSP, il est normal que les dirigeants s’en remettent aux conseils des experts les plus compétents. C’est un choix qu'ils sont habilités à faire en tout temps.
    Je vous remercie.
    Monsieur Sosnow.
    Merci, monsieur.
    Mon collègue, Brian Zeiler-Kligman, répondra votre question.
    Allez-y, monsieur Zeiler-Kligman.
    Il n’y a pas de doute que la Chambre de commerce du Canada préconise toujours la tenue de consultations sur les aspects importants de la politique publique. Nous invitons toujours le gouvernement à consulter le monde des affaires et d’autres intervenants importants sur ces aspects.
    En ce qui concerne particulièrement le PSP, la Chambre de commerce a été approchée, dans les six dernières semaines, par Industrie Canada et l’Agence des services frontaliers du Canada, qui souhaitaient la consulter sur le processus du PSP, en précisant que les ministères considéraient le CNAC comme une tribune de consultation, mais qu’ils seraient heureux de connaître d’autres points de vue. Nous avons cru comprendre, d’après ces discussions, que le gouvernement a déjà entrepris des consultations plus vastes. Nous croyons donc que c’est déjà en marche.
    Je comprends cela. Je voulais simplement savoir si, à votre avis, d’autres intervenants exclus du processus ne devraient pas être invités à y participer. Je sais qu’il appartient au gouvernement de prendre l’initiative à ce sujet, mais je voulais avoir votre avis sur la question.
    Comme mon temps de parole est limité, je vais passer à mes autres questions, qui portent sur un sujet que vous avez abordé.
    Monsieur Sosnow, vous n’en avez pas parlé dans votre exposé, mais je crois que M. Stewart-Patterson a mentionné, au sujet de nos ressources naturelles, la question particulière de la distribution de l’eau.
    J’ai accompagné le ministre aux discussions du groupe de Cairns. J’ai eu l’occasion de discuter avec les représentants d’autres pays, et surtout le Pakistan et l’Inde. Je leur ai demandé ce qu’ils pensaient du Canada et de notre avantage compétitif. Or, dans toutes les discussions que j’ai eues, on m’a toujours répondu que le Canada était un pays de ressources naturelles, et rien d’autre. Les efforts que nous avons déployés pour changer notre image de marque à l’extérieur de l’Amérique du Nord n’ont pas eu de résultats sensibles. Même en Amérique du Nord, j’ai bien l’impression que beaucoup de gens et beaucoup de législateurs américains n’ont pas l’impression que nous soyons autre chose qu’un pays de ressources naturelles. Nous devons être très conscients de ce fait.
    Des préoccupations ont été exprimées – c’était dans les journaux aujourd’hui – au sujet de l’approvisionnement en eau, de sa consommation, de son transfert et de sa distribution. Quelles assurances pouvez-vous nous donner que c’est là un avantage concurrentiel du Canada? Il s’agit d’un bien public qui est important pour notre prospérité future et celle des générations à venir. Quelles assurances pouvez-vous donner au comité que ce précieux bien sera protégé au maximum au cours de ces discussions qui, je crois, doivent commencer demain?
    À mon avis, si la Chine et l’Inde ne voient que nos ressources naturelles, il est presque certain que c’est également le cas des États-Unis et du Mexique. J’aimerais connaître votre avis.
(1145)
    À vous, monsieur Stewart-Patterson.
    Si vous le permettez, je parlerai très franchement de la question de l’eau. L’eau n’a jamais figuré à l’ordre du jour du CNAC. Elle n’a fait l’objet ni de discussions ni de recommandations.
    Le CNAC a préféré concentrer son attention sur l’énergie, en particulier. En toute franchise, la majorité des discussions concernant l’énergie portaient sur le Mexique. Les membres du CNAC étaient très conscients du fait qu’il appartenait aux Mexicains de décider pour eux-mêmes d’une affaire relevant de leur compétence exclusive.
    Le Canada n’a été mentionné dans ces discussions que dans le contexte de questions très pratiques, comme la pénurie de main-d’œuvre spécialisée de notre secteur hautement dynamique de l’énergie. À cause des restrictions qu’il a lui-même imposées sur la mise en valeur de ses propres ressources, le Mexique a un excédent de travailleurs qualifiés. Pouvons-nous faciliter le déplacement temporaire de ces travailleurs, de façon à remédier à notre pénurie actuelle de main-d’œuvre tout en aidant les Mexicains à se perfectionner et à augmenter le plus possible leur niveau de compétence pour qu’ils soient prêts à travailler plus efficacement au Mexique le moment venu?
    Sur un plan plus général, je voudrais parler de votre autre point, à part la question de l’eau... De quoi s’agissait-il encore?
    Je voulais savoir quelles assurances vous pouvez nous donner. Je sais que des discussions doivent avoir lieu. Des groupes de réflexion américains ont parlé de l’eau que nous avons dans le nord du pays. Ils voudraient la détourner pour l’envoyer partout aux États-Unis. Je sais qu’ils ont formulé de nombreuses recommandations à ce sujet dans le passé et qu’elles sont en discussion.
    Je voudrais connaître votre avis et celui de M. Campbell. Le Canada a-t-il bien défini sa position? La question a-t-elle déjà été discutée? Je sais qu’elle doit être abordée dans des réunions futures. Je voudrais donc connaître votre point de vue.
    Les médias ont parlé ce matin d’une réunion qui n’a rien à voir avec le Conseil nord-américain de la compétitivité, ni avec mon Conseil d’ailleurs. Je ne sais donc pas quelles questions figurent à l’ordre du jour, ni qui y participe. Cette réunion ne fait pas partie du processus officiel.
    Permettez-moi d’ajouter cependant que les membres du CNAC sont très conscients de leurs responsabilités, non seulement à titre de participants à un processus tripartite, mais à titre de Canadiens. Les membres canadiens du CNAC ont eu des entretiens avec des ministres et des fonctionnaires canadiens pour discuter des priorités du Canada dans le processus tripartite.
    Je peux vous assurer que les membres canadiens du CNAC n’oublieront pas qu’ils ont deux rôles à jouer. Ils chercheront les domaines dans lesquels les trois pays peuvent travailler ensemble d’une façon plus efficace, mais ils tiendront compte en même temps des intérêts du Canada.
    Merci, monsieur Bains. Vous avez déjà dépassé d’une minute votre temps de parole.
    Monsieur Cardin, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, messieurs.
    On peut voir que les témoins sont diversifiés aujourd'hui. Il y a des représentants du Conseil canadien des chefs d'entreprise, de la Chambre de commerce du Canada ainsi que du Centre canadien de politiques alternatives. Il est certain que vous ne vous entendez pas sur certaines questions ou points de vue. Il reste qu'en 2005, les objectifs du Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité étaient d'établir une approche fondée sur la coopération, d'élaborer une stratégie commune en matière de sécurité et de favoriser la croissance économique, la compétitivité et la qualité de vie.
    Pour ce qui est de favoriser la croissance économique et la compétitivité, on a parlé de mesures importantes, par exemple accroître la productivité, réduire les coûts du commerce, améliorer l'intendance conjointe en matière d'environnement et faciliter le commerce en agriculture. Sur ce dernier point, il faut souligner que les pays avaient convenu de consulter les intervenants, dont les milieux d'affaires, les gouvernements d'État, les municipalités et les organisations non gouvernementales.
    Je veux savoir où en est le processus de consultation, qui y participe réellement et, s'il n'est pas encore commencé, quand il va l'être.
(1150)

[Traduction]

    Monsieur Cardin, votre question est-elle adressée à un témoin particulier?

[Français]

    Je vais l'adresser au représentant du Conseil canadien des chefs d'entreprise.

[Traduction]

    Nous n’avons en fait examiné que la partie du programme relative aux produits alimentaires et à l’agriculture, dans le contexte de la réglementation. Autrement dit, lorsque que les membres du CNAC ont défini leurs priorités de la première année, ils se sont arrêtés aux mesures de facilitation frontalière, à la coopération en matière de réglementation et aux secteurs de l’énergie. Le travail qui s’est fait par la suite était limité à ces domaines.
    Les produits alimentaires et l’agriculture ont été examinés dans le contexte de la réglementation, mais, comme vous pouvez le constater dans le rapport, nous nous sommes limités à des questions très précises comme l’étiquetage des aliments enrichis, l’élimination du double emploi dans la vérification de la salubrité des aliments et les effets sur la santé mentionnés sur les étiquettes. Cela vous donne une idée des questions que nous avons abordées. Nous n’avons pas examiné, dans la première année, les changements des marchés agricoles, par exemple. Nous n’avons en fait étudié aucune question de cet ordre liée au commerce.

[Français]

    J'en comprends qu'il n'y a pas de mécanisme de consultation. En ce qui concerne l'agriculture, vous savez très bien que la population est majoritairement en faveur de l'étiquetage. De plus, on dit que 4 000 substances chimiques utilisées aux États-Unis sont interdites au Canada. Est-ce que pour des questions de prospérité, les États-Unis, compte tenu du poids qu'ils ont dans la balance, pourraient demander que le Canada accepte des produits qui contiennent ces substances chimiques? Est-ce que le Canada devrait refuser de les importer? Dans le cas de ces produits, il ne faut pas se limiter à consulter quelques ministres des États-Unis, du Canada ou du Mexique. Il faut aussi consulter des organismes qui veulent défendre l'harmonisation des conditions de travail, de l'environnement et de la santé.
    Pour en revenir à ma question — et monsieur Campbell, vous pouvez répondre également parce que vous connaissez la situation —, je veux savoir s'il y aura, tel que prévu en 2005, des consultations auprès de personnes autres que celles intéressées à faire de l'argent?
(1155)

[Traduction]

    Monsieur Campbell.
    Je vous remercie de votre question, que je trouve très bonne.
    Lorsque le rapport du CNAC qui a été distribué parle de réglementation, il s’agit de normes réglementaires nord-américaines, à utiliser par défaut.
    Dans le cas des produits chimiques, on peut, comme vous l’avez dit, se demander ce qui arrive si des produits alimentaires ou des articles de nettoyage contiennent des substances interdites au Canada, mais autorisées aux États-Unis. Quelle norme appliquer dans ce cas? L’américaine ou la canadienne? Compte tenu de la différence de taille, je crains fort que la balance ne penche toujours du côté des États-Unis.
    Pourrait-il s’agir de la norme la plus stricte? Y aura-t-il un principe régissant le choix à faire? Comme vous le savez, un accord-cadre est actuellement en négociation en vue de l’harmonisation de la réglementation. Les pays participants vont-ils favoriser une harmonisation vers le haut?
    Je crois que ce sont des questions vraiment importantes. Je suis en faveur de la coopération, mais non de la capitulation.
    Merci, monsieur Campbell.
    Merci, monsieur Cardin.
    Monsieur Allison, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais remercier les témoins d’être venus aujourd’hui.
    J’aimerais commencer par formuler quelques observations, après quoi j’aurais une question à poser à M. Stewart-Patterson. Je suis heureux de vous revoir.
    Je voudrais dire très clairement ce que je pense de ce processus. Dans la dernière question, on a demandé si ceux qui ne réalisent pas de bénéfices seront consultés. Ce programme s’adresse aux entreprises qui emploient des Canadiens ayant besoin de gagner leur vie. Dans mon coin de Niagara, il y a des entreprises – M. Maloney pourra le confirmer – qui avaient des problèmes à la frontière sous le gouvernement libéral. Elles devaient expédier de l’autre côté de la frontière des fleurs coupées qui étaient arrêtées à la douane parce que nous n’avions pas alors un système d’inspection ou un programme de prédédouanement. Grâce à M. Maloney et à son gouvernement, grâce aux contacts directs entre gouvernements, il a été possible de mettre en place les mécanismes nécessaires pour faciliter l’expédition de ces fleurs.
    Il y a des gens, je crois, qui ne comprennent pas qu’il s’agit d’un processus de collaboration. Il a pour but de renforcer la sécurité et de favoriser la prospérité et la qualité de vie parce que la petite entreprise – je vous l’annonce, vous autres, puisque vous ne semblez pas vous en rendre compte – crée de l’emploi et permet aux gens de gagner leur vie. Vous pouvez bien vous plaindre du manque de consultations publiques. Les modifications apportées aux règlements et aux lois ne relèvent pas des gens qui participent aux consultations. C’est encore le domaine des parlementaires dans un régime démocratique. Ce programme est un moyen de faciliter le passage des biens et des services à la frontière. Encore une fois, 85 p. 100 de nos marchandises... Ce sont là des chiffres que nous connaissons tous et dont nous devons tenir compte pour juger ce qui se passe. Nous parlons de transparence, alors que toutes sortes d’intervenants sont associés au processus. Monsieur Stewart-Patterson, vous avez déjà parlé du Conseil nord-américain de la compétitivité.
    Les gens ne semblent pas se rendre compte que la petite entreprise a des difficultés si nous ne collaborons pas avec nos voisins. Il n’est pas question de changer les lois. Il est simplement question de faciliter le passage rapide à la frontière des marchandises licites.
    Lorsque j’examine la situation, tout se ramène aux gens. Il y a des familles qui tirent leur gagne-pain des petites entreprises qui essayent d’expédier leurs biens et leurs services de l’autre côté de la frontière. Il ne s’agit pas ici d’une grande conspiration. Certains des membres du comité s’opposent à ce qui s’est fait dans le domaine du bois d’œuvre résineux. Nous devons tenir bon quand il y a des gens qui ne travaillent pas et de l’argent qui est bloqué.
    Je tenais à faire publiquement état de mon point de vue avant de poser ma question, qui vous est adressée, monsieur Stewart-Patterson. En janvier dernier, le ministre de la Sécurité publique a parlé de l’affectation de plus de 400 millions de dollars à un programme de manifeste électronique et à l’amélioration de tout le système d’évaluation du risque et ainsi de suite. L’exemple que j’ai mentionné est excellent. M. Maloney et moi avons dans nos circonscriptions des entreprises qui produisent des fleurs en serre à Niagara. Si les fleurs coupées expédiées aux États-Unis sont retardées à la frontière pendant 48 heures parce qu’elles n’ont pas été prédédouanées, elles vont se faner et perdre toute valeur.
    Je voudrais parler un peu de ce programme de manifeste électronique et de ses avantages pour d’autres entreprises. Je sais moi-même à quel point il peut être précieux pour les producteurs de biens périssables. Pouvez-vous nous parler de ses effets sur l’ensemble de notre commerce?
(1200)
    Je crois que le programme de manifeste électronique constitue un excellent exemple de l’approche très pratique que les membres du CNAC représentant les trois pays favorisent fortement. Si vous examinez les recommandations et les discussions concernant la circulation transfrontalière des biens en Amérique du Nord ainsi que l’importation de biens en Amérique du Nord, vous vous rendrez compte que la transition entre les documents sur papier et les documents électroniques constitue un élément critique.
    J’appuie fortement le travail en cours. Il serait juste de dire que, dans certains cas, les recommandations des membres du CNAC reconnaissaient l’important travail fait par les gouvernements. Nous exprimons ainsi l’appui des gens d’affaires des trois pays à ce processus, en soulignant qu’il est important pour l’avenir des entreprises des trois pays et, partant, pour l’avenir des collectivités des trois pays.
    Je voudrais également répondre à votre commentaire, qui se rattachait à la question que M. Campbell a posée tout à l’heure dans son exposé. Il a demandé: « Pour qui la prospérité doit-elle être réalisée? » Il semblait suggérer ainsi que le PSP, pour une raison ou une autre, ne produirait pas de prospérité pour les Canadiens. Je crois que c’est une séquelle de l’ancien temps où l’on s’inquiétait chez nous de la question de savoir si nous pouvions faire la concurrence à des sociétés basées aux États-Unis. C’est toujours une question que se posent les sociétés canadiennes. C’est un grand marché concurrentiel, qui constitue un défi pour tous les gens d’affaires. Nous reconnaissons aussi que nous avons des concurrents encore plus acharnés ailleurs dans le monde, des concurrents qui sont en train de transformer ce que les Canadiens achètent chaque fois qu’ils vont dans les magasins.
    La vraie question qui se pose est de savoir quels genres d’emplois les collectivités canadiennes rechercheront dans les années et les décennies à venir. Le PSP vise – et c’est aussi l’objectif des membres du CNAC représentant les trois pays – à permettre aux collectivités du Canada, des États-Unis et du Mexique de faire de leur mieux pour créer de meilleurs emplois mieux rémunérés et assurer de meilleures conditions et une meilleure qualité de vie. De notre côté, nous faisons de notre mieux pour travailler ensemble et être ainsi mieux équipés pour affronter le reste du monde.
    Monsieur Allison, il vous reste environ une minute et quart.
    Monsieur Cannan, voulez-vous prendre la relève?
    La parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Je poursuivrai au prochain tour de table mais, dans la minute et demie qui me reste, je voudrais commencer par remercier les témoins pour leurs exposés.
    Vous pourrez commencer à répondre à mes questions, et nous poursuivrons au prochain tour de table. Au cours des quelque trois derniers mois, le comité a entendu de nombreux témoins dire à peu près la même chose. Nous bâtissons une stratégie commerciale pour améliorer le commerce non seulement en Amérique du Nord, mais partout dans le monde. On nous a dit clairement que les normes réglementaires du Canada et des États-Unis occasionnaient des difficultés. Après avoir fait des recherches à ce sujet, je dirais aussi que cela inquiète beaucoup les Américains.
    Pouvez-vous nous dire si les normes canadiennes sont toutes plus strictes que les américaines ou si les normes américaines l’emportent sur les nôtres? Où en sommes-nous à cet égard? J’ai entendu dire que les Américains sont tout aussi préoccupés que nous.
    Monsieur Zeiler-Kligman.
    Je vous remercie.
    Il est évident que les normes canadiennes et américaines ne sont pas les mêmes dans tous les domaines. Beaucoup d’observateurs croient que les normes canadiennes doivent devenir plus strictes dans la plupart des cas pour devenir équivalentes aux normes américaines. Ce n’est donc pas nécessairement une course vers le fond.
    Je tiens également à souligner que nous parlons davantage de coopération que d’harmonisation en matière de réglementation. L’annonce faite en janvier, dont M. Allison a parlé, contenait deux autres initiatives de financement d’une très grande importance du point de vue de cette coopération. Il s’agissait de questions et de programmes importants qui s’inscrivent dans le contexte de cette discussion. L’une des initiatives prévoyait des fonds pour aider l’ASFC du Canada et le CBP des États-Unis à harmoniser leurs systèmes et à coopérer pour l’enregistrement des sociétés qui envoient des expéditions de part et d’autre de la frontière, notamment dans le cadre du programme canadien Partenaires en protection et du programme américain équivalent C-TPAT. Au lieu de maintenir deux programmes qui ont exactement le même but, en imposant à chaque entreprise de s’inscrire et de faire toutes les formalités deux fois, les deux organismes envisagent de fusionner les deux programmes en vue de simplifier les formalités.
    Voilà ce que signifie la coopération en matière de réglementation.
(1205)
    Merci beaucoup. Messieurs Cannan et Allison, votre temps de parole est écoulé.
    Nous passons maintenant au Nouveau parti démocratique. Monsieur Julian, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins d’être venus au comité aujourd’hui. Je remercie en particulier M. Campbell. Vous avez présenté un excellent exposé.
    Nous avons un problème réel dans ce pays. Les représentants du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international l’ont reconnu mardi dernier. Ils ont admis, pour la première fois, ce que nous constatons au Canada depuis 1989: les Canadiens pauvres ne cessent de s’appauvrir. En fait, nous sommes témoins d’une diminution des revenus, en termes réels, qui touche 80 p. 100 des familles canadiennes. En d’autres termes, 80 p. 100 des familles canadiennes gagnent moins aujourd’hui, en termes réels, qu’elles n’en gagnaient en 1989. Nous savons que les heures supplémentaires ont grimpé de 33 p. 100. Cela signifie que les familles ordinaires de travailleurs doivent faire des heures de plus en plus longues de travail et passer d’un emploi temporaire à un autre ou d’un emploi à temps partiel à un autre. Aucune des politiques annoncées par le gouvernement précédent, aucune des politiques annoncées par le gouvernement actuel ne semble s’attaquer à ce problème.
    Monsieur Campbell, je voudrais vous poser une question.
    Nous avons l’impression que la politique commerciale et économique est faite bien plus pour les chefs d’entreprise et les avocats de société que pour la plupart des familles canadiennes. La majorité de ces familles ont aujourd’hui un revenu inférieur à celui qu’elles avaient en 1989. C’est bel et bien un constat d’échec.
    Voyez-vous n’importe quoi dans cette stratégie ou ailleurs qui puisse remédier à cet écart de prospérité grave et sans cesse croissant?
    Je critique depuis longtemps aussi bien l’ALENA que le modèle d’intégration que cet accord implique. Mais ce n’est pas seulement l’ALENA. Il y a aussi d’autres politiques dont l’interaction est partiellement responsable de disparités croissantes au Canada et d’un niveau d’inégalité sans précédent depuis les années 1920.
    Oui, il y a...
    Vous dites que nous avons aujourd’hui un niveau d’inégalité équivalent à celui que nous avons connu avant la Grande Crise?
    C’est ce que suggèrent les faits. Le Canada est un pays riche qui s’est sensiblement enrichi dans les 10 ou 15 dernières années. Pourtant, nos sondages et nos analyses montrent que près de la moitié des Canadiens ont un sentiment d’insécurité et croient qu’ils ne sont qu'un chèque de paie ou deux de la pauvreté.
    La grande majorité des familles doit travailler plus fort pour se maintenir dans la même situation. Il n’y a que la tranche supérieure de 10 p. 100, peut-être même de 5 p. 100 et surtout de 1 p. 100, qui ait réalisé des gains spectaculaires. Les gens éprouvent un sentiment d’insécurité et ont l’impression de courir sur place.
    Je répète donc la question que j’ai posée dans mon exposé: Pour qui la prospérité doit-elle être réalisée? Rien de ce qui se passe ne permet de croire que des mesures sont prises, même dans une perspective d’intégration, pour améliorer le niveau et la qualité de vie de la grande majorité des gens.
    J’ai mentionné quelques mesures qui, à mon avis, pourraient avoir des effets positifs, mais je n’en vois aucune pour le moment dans le cadre du PSP.
(1210)
    Je suis membre des chambres de commerce de New Westminster et de Burnaby.
    Les propriétaires de petites entreprises sont les plus touchés lorsque le revenu des familles de la classe moyenne et de la classe ouvrière diminue. Nous avons donc affaire à une stratégie qui semble profiter davantage aux grandes sociétés – celles qui ont le plus tendance à réduire les emplois au Canada – qu’aux petites entreprises locales qui ont besoin d’une classe moyenne prospère dans leur collectivité pour que leurs affaires aillent bien.
    Passons maintenant à l’intégration énergétique. Je ne sais pas si vous avez vu ce matin l’excellent article de Gordon Laxter dans le Toronto Star concernant l’insécurité énergétique. Il dit essentiellement que le Canada a renoncé à sa capacité de gérer ses propres ressources énergétiques.
    Connaissez-vous un autre pays du monde, à part le Canada, qui accorde à un autre pays un accès préférentiel à ses ressources énergétiques au détriment de ses propres citoyens?
    Je trouve curieux que le Canada soit presque le seul, parmi les pays producteurs et exportateurs de pétrole, qui n’ait pas utilisé cet outil pour exercer des pressions diplomatiques. En fait, le Canada semble avoir plus ou moins renoncé à cette option.
    Nous sommes donc aujourd’hui dans une situation assez curieuse. Nous ne disposons pas d’une réserve stratégique de pétrole au Canada et nous importons encore près de la moitié de notre énergie tout en exportant à nos voisins du Sud des quantités énormes de pétrole, représentant près des deux tiers de notre production.
    Nous n’avons donc pas de sécurité énergétique. Nous n’avons rien mis en place pour renforcer cette sécurité.
    Combien de pays industrialisés n’ont pas une réserve stratégique de pétrole?
    Le Canada est un exportateur net de pétrole, mais cela ne l’empêche pas d’en importer d’énormes quantités. Par conséquent, parmi les pays développés qui en importent aussi de grandes quantités, je crois que nous sommes les seuls.
    Oui, ce qui est vraiment épouvantable...
    Les États-Unis ont d’énormes réserves stratégiques. À l’est de l’Outaouais, 90 p. 100 du pétrole consommé est importé de la mer du Nord. De plus, le pourcentage d’importations du Moyen-Orient, de l’Algérie et de l’Irak est en train d’augmenter.
    Nous n’avons aucun plan d’urgence en cas de perturbation de l’approvisionnement.
    Dans ce cas, à cause des clauses de proportionnalité de l’ALENA, si le Canada a une pénurie de pétrole, les Canadiens gèleraient littéralement pendant que nous continuerions à approvisionner le marché américain.
    Dans le cadre de cette intégration énergétique, qui nous oblige en pratique à céder le contrôle de notre politique de l’énergie à Washington et au gouvernement Bush, les obligations de proportionnalité que nous avons aujourd’hui ne feront qu’empirer.
    Nous avons l’obligation...
    Une très courte réponse, s’il vous plaît.
    Le temps de parole de M. Julian est écoulé.
    Nous avons actuellement l’obligation d’exporter une certaine proportion. C’est presque les deux tiers de notre production de pétrole et 60 p. 100 de notre production de gaz.
    Au terme des clauses de proportionnalité, il est extrêmement difficile de modifier cette situation. Nous avons donc un problème sur le plan de la sécurité énergétique.
    Merci, monsieur Campbell.
    Nous revenons maintenant à l’opposition officielle. Monsieur Maloney, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Stewart-Patterson, vous avez parlé, dans votre exposé, de l’accord sur la frontière intelligente signé en 2001, qui constituait un pas dans la bonne direction pour ce qui est de régler les problèmes à la frontière canado-américaine. Comme vous le savez, cet accord n’a pas encore été mis en œuvre en 2007.
    M. Sosnow et vous avez parlé dans vos exposés de la nécessité de renforcer l’infrastructure frontalière, particulièrement dans la région Windsor-Detroit. Il y a également un plan de renouvellement de l’infrastructure au pont Peace de la Buffalo and Fort Erie Bridge Authority. Le problème, c’est qu’on ne peut pas entreprendre la construction des nouveaux ponts avant de savoir comment concevoir les installations frontalières, selon que l’accord sera ou non mis en œuvre. De plus, après la conception de ces installations, il faut passer par l’étape de l’évaluation environnementale.
    Je suis heureux d’apprendre, monsieur Stewart-Patterson, qu’à votre avis, il ne reste plus qu’une seule question à régler avant la mise en œuvre de l’accord sur la frontière intelligente. Quelle est cette question? De quelle façon les parlementaires peuvent-ils intervenir, s’ils le peuvent, pour favoriser une entente?
    Je dois dire que ma connaissance de ce dossier est assez limitée. Je crois savoir que des négociations sont en cours en ce moment. De toute évidence, je ne sais pas de quoi les négociateurs parlent actuellement.
    Si j’ai bien compris, au début de cette semaine, la question en suspens concernait ce qu’il y avait lieu de faire si des gens se présentent à un agent américain, à un poste de prédédouanement, sont désignés pour un deuxième examen et décident à ce stade de ne pas continuer. Je ne suis pas un expert en questions juridiques et constitutionnelles, mais il semble bien que c’était la seule question en suspens au début de la semaine.
(1215)
    Serait-il possible d’envisager, comme solution, de faire en sorte que le secteur de prédédouanement soit considéré non comme une zone internationale, mais comme...
    C’est toute la question qui se pose en ce qui concerne cette zone de prédédouanement. Sur quel territoire se trouve-t-elle? Quelles sont les exigences constitutionnelles à respecter?
    L’une des premières questions qu’il a fallu régler était celle de savoir si les gardes affectés à la zone de prédédouanement devaient être armés. Cette question est maintenant réglée, mais...
    Monsieur Sosnow, avez-vous des observations à formuler?
    Je vous remercie, monsieur.
    C’est l’une des questions. L’autre, comme vous l’avez dit, est que les évaluations environnementales n’ont pas encore été faites.
    Fait intéressant, les lieux exacts n’ont pas encore été choisis. Ce sont des décisions à la fois fondamentales et très simples qu’il faut prendre avant de discuter du prédédouanement, qui pose, lui, de sérieux problèmes constitutionnels et juridiques. Il faut donc se demander s’il est possible pour le comité de recommander à la Chambre d’exercer des pressions pour qu’on procède avec diligence à la sélection du site et à l’évaluation environnementale et pour qu’on augmente la fréquence des réunions afin de régler les questions constitutionnelles de compétence le plus tôt possible.
    Je crois savoir que le pont Peace de la Buffalo and Fort Erie Bridge Authority et le pont des Milles-Îles ont été désigné comme projets pilotes, mais nous voulons dépasser ce stade pour en arriver à une mise en œuvre universelle lorsqu’il faut passer la frontière.
    Je crois que vous avez raison.
    Le poste frontalier de Buffalo a été désigné comme projet pilote, mais le fait qu’il soit encore en suspens, si longtemps après la signature de l’accord initial sur la frontière intelligente, est très frustrant, non seulement parce que cela retarde les efforts de renforcement de l’infrastructure et de lutte contre l’encombrement, mais aussi parce que nous voulons que les projets pilotes soient réalisés pour qu’il devienne possible d’appliquer le processus de prédédouanement terrestre dans d’autres grands postes frontaliers. C’est donc un petit élément qui retarde des initiatives frontalières très importantes.
    J’exhorte donc les membres du comité, quel que soit le parti qu’ils représentent, à inciter les gouvernements à exercer les plus fortes pressions possibles et à travailler fort avec les États-Unis pour régler ces problèmes et réaliser ce projet sans délai. Vous pouvez certainement compter sur notre appui à cet égard.
    Me reste-t-il du temps, monsieur le président?
    Monsieur Maloney, votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur André, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Bonjour. J'ai écouté avec soin l'ensemble de vos propos et j'ai une question à vous poser.
    À l'heure actuelle, dans le cadre du Partenariat pour la sécurité et la prospérité, y a-t-il des hommes d'affaires qui représentent les trois pays et, le cas échéant, combien sont-ils à avoir des intérêts aussi bien au Canada qu'aux États-Unis ou au Mexique? On sait que la circulation des biens fait en sorte que les industries se déplacent d'un pays à un autre.
    Il y a également toute la question entourant le chapitre 19 de l'ALENA. La crise du bois d'oeuvre a grandement affecté notre industrie dans ce domaine. Vous savez qu'en matière de réglementation, de négociation et de litiges, le chapitre 19 est très important. On se questionne beaucoup présentement sur sa validité. Dans le cadre de l'Accord sur le bois d'oeuvre, cette validité s'est avérée très minime lorsque le temps est venu de conclure une entente. Est-ce que vous vous penchez présentement sur les questions entourant les chapitres 19 et 20 de l'ALENA?
    Par ailleurs, on sait que des pays ainsi que certains États des États-Unis ne veulent pas ratifier le Protocole de Kyoto. Mais pour votre part, vous penchez-vous ensemble sur les moyens que l'industrie devra prendre au cours des prochaines années pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre? Quel genre de discussions tenez-vous à ce sujet?
(1220)

[Traduction]

    Monsieur Campbell, voulez-vous répondre en premier?
    Merci beaucoup.
    Monsieur André, vous avez posé une question très importante au sujet du bois d’œuvre résineux et du chapitre 19. Votre comité a tenu beaucoup d’audiences sur l’accord relatif au bois d’œuvre. Je crois personnellement, comme certains membres du comité, que ce n’est pas un bon accord et ce, pour plusieurs raisons, la première étant qu’il donne en quelque sorte aux États-Unis un droit de veto sur les politiques canadiennes.
    J’ai eu l’occasion de voir une lettre adressée par le cabinet du président au ministre du Commerce international. La lettre demandait des consultations parce que le gouvernement américain croit que les politiques mises en place, par exemple par le gouvernement du Québec, sont contraires à l’accord. Par conséquent, les 436 millions de dollars du programme d'appui au développement régional du Québec, les 75 millions et les 44 millions destinés en particulier aux travailleurs forestiers... Tout cela indique que Washington détient un pouvoir de veto et s’en servira pour influencer nos politiques et limiter le pouvoir de notre gouvernement d’adopter des mesures dans l’intérêt des travailleurs et des entreprises de ce secteur.
    Au sujet de Kyoto – et cela me ramène à ce que je disais tantôt de la réglementation –, si le CNAC recommande l’adoption d’une norme nord-américaine par défaut, nous aurions à y adapter notre réglementation en dépit du fait que nous avons pris des engagements internationaux différents quant à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et aux dispositions du Protocole de Kyoto. Si une telle norme est adoptée, comment pourrons-nous... La réglementation est un élément critique dans le cadre de la mise en œuvre d’un protocole de ce genre. Comment aurons-nous une marge de manœuvre suffisante pour adopter des règlements permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre en présence d’une telle norme nord-américaine? Ce sont des préoccupations très réelles.
    Monsieur André, votre temps de parole est écoulé.
    Nous passons maintenant à M. Cannan pour cinq minutes.
    Merci encore, monsieur le président.
    J’ai quelques observations à formuler au sujet des discussions de tout à l’heure concernant le rapport du Centre canadien de politiques alternatives. Le rapport contient des renseignements intéressants qui établissent, à l’aide de statistiques, que l’économie canadienne a doublé de taille dans les 25 dernières années. Le revenu familial réel moyen est passé de 60 000 $ à 70 000 $ entre la fin des années 1970 et le début des années 2000. En fait, il est manifeste que les pauvres ne sont pas en train de s’appauvrir. Cela ressort clairement des statistiques du rapport. Parmi les familles avec des enfants, les 10 p. 100 les plus pauvres ont vu leur revenu augmenter de 8 p. 100, en termes réels, dans les 25 dernières années. Ces chiffres sont tirés de votre propre rapport.
    Le nombre d’emplois au Canada a enregistré une augmentation nette de plus de 3 millions. Les relations commerciales bilatérales entre le Canada et les États-Unis sont les plus importantes du monde. Près de 80 p. 100 des Canadiens vivent à moins de 160 km de la frontière. Monsieur Sosnow, le rapport confirme que les échanges commerciaux s’élèvent à plus de 2 milliards de dollars par jour... 37 000 camions, 300 000 passagers.
    Je viens de la vallée de l’Okanagan, en Colombie-Britannique, pas trop loin du mouvement des biens et des services à la frontière. Les passeports sont une grande source de préoccupation.
    J’aimerais en savoir un peu plus sur ces questions. Qu’avons-nous appris de tout ce qui s’est passé? Avez-vous des recommandations à formuler au sujet de l’expérience acquise en matière de plans de communication? Vous avez envisagé l’élaboration d’un plan de communication destiné à renseigner les entreprises des deux côtés de la frontière sur les personnes et les biens qui peuvent passer dans une situation d’urgence.
    De toute évidence, la communication est essentielle pour permettre aux entreprises de bien comprendre ce qu’elles ont à faire afin d’éviter que leurs expéditions soient retenues pendant 10 jours à la frontière, ce qui est coûteux. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet? Qu’avons-nous appris, et comment pouvons-nous transmettre cette information à nos électeurs?
(1225)
    À vous, monsieur Sosnow.
    Merci, monsieur le président.
    L’une des grandes faiblesses – si je peux m’exprimer ainsi – de cet exercice particulier se situe au niveau de l’échange de renseignements. Il y a lieu de noter qu’un logiciel a été utilisé à cette fin. Nous parlons ici de petits détails, mais ce logiciel était censé créer des liens donnant accès à des portails pour permettre aux entreprises d’être au courant de ce que les deux gouvernements faisaient pour renforcer la frontière. Le moins qu’on puisse dire, c’est que ce logiciel n’a pas très bien fonctionné.
    Les gouvernements ne se sont tout simplement pas acquittés de la fonction de base qui consiste à diffuser de l’information au plus grand auditoire possible pour donner aux gens un minimum de renseignements sur les mesures officielles prises, les démarches à faire pour expédier des produits de l’autre côté de la frontière et les délais correspondants.
    Comme je l’ai déjà mentionné, nous avons besoin d’être au courant quand la frontière est fermée ou que la sécurité est renforcée. Nous devons savoir quelles personnes passeront en premier, quels types et quelles quantités de marchandises seront autorisés et quels moyens de transport auront la priorité. Ce sont de petits détails, mais, en toute franchise, ils n’ont pas encore été réglés.
    Nous continuerons donc à avoir ces simulations très utiles à mesure que nous nous rapprocherons de la mise en œuvre de ce qui aura été convenu?
    Oui.
    Je voudrais mentionner un autre point avant de céder la parole à mon collègue, M. Wallace. Quelqu’un a dit tout à l’heure qu’il est important de veiller à ce que les Canadiens conservent leur souveraineté. Je sais que M. Day a été cité dans les journaux d’aujourd’hui. Il était question de la circulation au poste frontalier de Buffalo, dans l’État de New York. Les Américains auraient à renoncer à d’importants moyens d’inspection pour respecter la Charte canadienne des droits et libertés. Le ministre Day a dit qu’il était hors de question de permettre des violations de la Charte. C’est un exemple qui montre que les Américains devront, non pas nous entraîner dans une course vers le fond, mais relever leurs normes pour se conformer aux nôtres.
    Je cède maintenant la parole à M. Wallace.
    Monsieur Wallace, vous avez près de 30 secondes.
    Bien sûr, vous pouvez aussi attendre le prochain tour de table. La parole est à vous.
    M. Campbell a donné un exemple de réglementation portant sur l’approbation de médicaments aux États-Unis et sur l’opportunité de... Je vais vous donner un exemple personnel basé sur l’expérience de ma belle-mère. Un médicament avait été approuvé aux États-Unis, après avoir été soumis à des essais, mais n’était pas disponible au Canada en attendant les résultats d’un essai clinique.
    Ce médicament – Dieu soit loué – lui a sauvé la vie, littéralement. C’est exactement le genre de travail que nous devrions faire, à mon avis. Nous devons essayer de trouver des occasions de collaborer avec nos partenaires du Sud. Ainsi, si un médicament n’a été testé qu’une fois, mais que nous soyons sûrs que les tests étaient adéquats, ce genre de collaboration peut plus rapidement protéger la santé des Canadiens. Pour moi, c’est une bonne chose, que nous devrions encourager. Je n’y vois pas d’inconvénients.
    Je vais considérer cela comme un commentaire, monsieur Wallace. Votre temps de parole est écoulé.
    Nous passons maintenant au dernier de la liste, dans ce tour de table à cinq minutes.
    Monsieur Julian, vous avez cinq minutes.
(1230)
    Merci, monsieur le président.
    M. Wallace n’a pas parlé de tous les cas où des produits pharmaceutiques américains traités dans le cadre d’une procédure accélérée se sont révélés nuisibles et ont dû être retirés par la suite. Par conséquent, nous mettrions la santé des Canadiens en danger en éliminant un régime d’essais réfléchi qui échappe aux manipulations de l’industrie pharmaceutique.
    Je voudrais maintenant revenir à M. Campbell et à ses observations concernant le cadre de réglementation. Quelques membres du comité ont mentionné le fameux accord sur le bois d’œuvre résineux, grâce auquel les Canadiens doivent maintenant aller à Washington pour obtenir l’approbation de tout programme destiné à aider les collectivités touchées par le différend sur le bois d’œuvre, même si nous avons perdu 5 000 emplois et continuerons à en perdre par suite de la conclusion de cette très mauvaise entente. Nous avons parlé plus tôt de l’intégration énergétique, qui a les mêmes incidences: les Canadiens doivent encore aller à Washington pour négocier l’accès à leurs propres ressources énergétiques.
    J’aimerais revenir au cadre de réglementation. Les sujets abordés par les autres témoins – règlements sur la santé et la sécurité, sur l’environnement, sur l’étiquetage – tiennent beaucoup à cœur à l’ensemble des Canadiens. Beaucoup s’inquiètent de l’absence d’une réglementation sur l’étiquetage des produits alimentaires génétiquement modifiés leur permettant de connaître les ingrédients des aliments qu’ils consomment.
    Si nous continuons à faire baisser nos normes pour les mettre au niveau des normes américaines, qu’il s’agisse de produits pharmaceutiques, de l’importation de substances dangereuses ou de règles d’étiquetage appuyant le droit de savoir auquel de nombreux Canadiens tiennent beaucoup, n’est-il pas vrai que nous aurons à aller à Washington faire du lobbying auprès du gouvernement Bush pour essayer de protéger des normes importantes pour la santé de nos citoyens?
    Je crois que la question de l’harmonisation de la réglementation est vraiment importante. Appelons-la par son nom. Nous n’avons pas besoin de termes orwelliens comme « coopération » parce que je crois que ce qui arrive va parfois bien au-delà. Si nous parlons de reconnaissance mutuelle des normes, il faudrait examiner les ententes correspondantes. Ces ententes sont incroyablement difficiles à négocier.
    La réglementation est une fonction essentielle des parlementaires. On dit souvent que c’est une forme secondaire ou déléguée de mesure législative.
    Mon inquiétude pour notre souveraineté découle du fait qu’avec le temps, la marge de manœuvre devient de plus en plus étroite et finit par aboutir à une situation dans laquelle nous n’aurons plus la capacité de légiférer ou de réglementer dans l’intérêt du pays, tel qu’il est défini, par exemple, par nos organismes réglementation de la santé ou de l’environnement. C’est une question qui m’inquiète vraiment.
    Elle est doublement préoccupante à cause de l’orientation prise, surtout par l’actuel gouvernement américain, qui s’est lancé dans une véritable course à la déréglementation touchant notamment les normes de sécurité aérienne. Je pourrais passer en revue la longue liste des règlements que les Américains ont affaiblis ou carrément éliminés, des pouvoirs de réglementation qu’ils ont réduits... Je crains beaucoup l’importation de ce programme de déréglementation.
    Ainsi, en un sens, nous sommes en train de démanteler le système de protection que la société canadienne a délibérément mis en place.
    Oui. Revenons aux médicaments. Souhaitez-vous que...
    J’ai entendu un négociateur commercial dire que nous devrions nous débarrasser des quelques 900 employés de Santé Canada et charger peut-être une douzaine de personnes d’examiner ce que font les États-Unis et d’autres pays afin de baser l’approbation des médicaments sur la recherche faite ailleurs.
    Cherchons-nous vraiment à démanteler nos capacités de réglementation? Est-ce bien ce que nous voulons faire?
    Monsieur Campbell, connaissez-vous des cas où la protection a été renforcée?
    Dans le secteur des transports, je sais que des pressions s’exercent pour que nous baissions nos normes au niveau des normes américaines. Cela se traduirait par une réduction du nombre d’agents de bord pouvant aider les gens à quitter l’avion en cas d’urgence. Nous verrions aussi les compagnies aériennes prendre en charge la gestion de la sécurité pour en faire ce qu’elles veulent. Voilà le genre de choses dont nous sommes témoins.
(1235)
    Monsieur Julian, votre temps de parole est écoulé.
    Connaissez-vous des domaines quelconques dans lesquels il y a eu des améliorations?
    Nous passons maintenant à M. Temelkovski, représentant de l’opposition officielle libérale. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je vous remercie aussi, messieurs.
    Je voudrais poser quelques questions sur le temps estimatif de traitement des expéditions. Connaissez-vous les chiffres d’avant 2001, ceux de 1995 à 2001, par exemple?
    Ces chiffres se trouvent dans un rapport de la Coalition pour des frontières sécuritaires et efficaces sur le plan commercial, regroupement d’une cinquantaine d’entreprises des deux côtés de la frontière, qui a étudié la question. La coalition a publié son rapport final en 2005 parce qu'elle a décidé de renoncer à l’examen de ce sujet, mais les nombres présentés sont ceux d’avant le 11 septembre 2001. Le temps estimatif de traitement, qui dépend bien sûr de la nature de l’expédition et d’autres facteurs, était en moyenne de 45 secondes. En 2004, dernière année pour laquelle nous disposons de données, ce temps était passé à 2 minutes et 15 secondes.
    Je vous remercie.
    Vous avez mentionné la capacité de l’infrastructure comme motif des retards. Vous avez aussi parlé de l’infrastructure comme élément de solution. Croyez-vous que l’infrastructure fait partie du problème?
    On peut considérer la frontière comme un mur. Nous en avons déjà parlé auparavant. Quand nous parlons d’infrastructure, il s’agit, dans notre analogie, de portes, de points d’accès percés dans ce mur. Si la porte est coincée, vous ne pourrez pas passer. Par ailleurs, plus vous avez de portes, plus il vous est facile d’aller de l’autre côté du mur.
    La réalité, c’est que les Canadiens veulent faire du commerce avec les États-Unis. Nos échanges augmentent invariablement chaque année, et ce ne sont pas seulement les grandes entreprises qui sont en jeu. Quand les camions passent la frontière, ils transportent aussi la production des agriculteurs, des travailleurs et des petites entreprises. Si vous avez du mal à ouvrir les portes ou si vous n’en avez pas assez, vous aurez des goulets d’étranglement, avec toutes les frustrations et les coûts supplémentaires qu’ils occasionnent.
    Par conséquent, vous avez parfaitement raison de dire que l’infrastructure fait partie du problème. Pour nous, elle crée des difficultés parce que a) nous n’avons pas suffisamment de portes, si je peux m’exprimer ainsi, pour gérer les pressions exercées par ceux qui veulent faire du commerce, et b) les portes qui existent sont en train de tomber rapidement en désuétude.
    L’infrastructure va-t-elle résoudre l’essentiel du problème? N’est-ce pas surtout les mesures législatives adoptées qui ont fait passer le temps de traitement de 45 secondes à 2 minutes et 15 secondes? Ensuite, y a-t-il eu une croissance de cet ordre dans la circulation transfrontalière des biens et des personnes ailleurs dans le monde, par exemple en Europe, en Chine, en Inde ou au Brésil? Dans ces pays, les temps de traitement des expéditions ont-ils augmenté autant que chez nous, ou bien sont-ils plus ou moins à l’abri des problèmes que nous connaissons en Amérique du Nord?
    Ce sont de très bonnes questions.
    En vérité, tout le monde essaie de réaliser une plus grande intégration. C’est le cas des Européens. À Beijing, où j’étais la semaine dernière, j’ai pu constater que les pays asiatiques s’efforcent d’intégrer davantage. On dit que les Asiatiques ont un comportement différent de celui des Nord-Américains ou des Européens. Mais les conversations que j’ai entendues portaient sur les moyens d’éliminer les obstacles.
    Comme vous le savez, la Communauté européenne adopte des normes communes en matière de travail, d’environnement, de produits et d’étiquetage. Les Européens s’efforcent d’éliminer les différences, qui prolongent le temps de traitement.
    Est-ce que ces pays connaissent les mêmes problèmes que nous, au Canada? La réponse est à la fois oui et non. Oui, parce que le degré de développement est moindre, surtout en Asie, et que le traitement douanier continue à occasionner des difficultés. Pour eux, il est nécessaire de travailler, de faire plus d’efforts pour réduire ces obstacles.
    En ce qui concerne les États-Unis, vous avez demandé pourquoi le temps de traitement a augmenté. C’est la grande question. Les retards sont en partie attribuables à la sécurité. Les États-Unis éprouvent un sentiment d’insécurité. Depuis 2001, un changement culturel fondamental se manifeste dans leur façon d’envisager leurs partenaires commerciaux. Il y a maintenant plus de paperasse. Il faut aussi consacrer plus de fonds à l’infrastructure. Nous avons en outre le problème de la gestion des complexités dont nous avons parlé dans le contexte du pont de Detroit.
    Il y a donc des problèmes juridiques, des problèmes financiers et des problèmes culturels. Tout cela, mis ensemble, crée un écheveau plutôt complexe.
    Compte tenu de l’importance de l’infrastructure et de la complexité du problème, les retards coûtent, à notre avis, des milliards de dollars à tous les Canadiens.
(1240)
    Merci, monsieur Sosnow. Merci, monsieur Temelkovski.
    Nous passons maintenant au côté gouvernemental. Monsieur Wallace, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Puis-je avoir une réponse assez brève, s’il vous plaît?
    M. Campbell a mentionné des accords de reconnaissance mutuelle. Je conviens avec lui que c’est ce dont nous avons besoin, mais il est impossible d’y parvenir sans dialogue, monsieur le président. Faute d’un dialogue, on ne peut rien obtenir. Nous avons un dialogue qui nous permettra peut-être d’aboutir à des solutions. Je crois que M. Julian a accusé le côté gouvernemental cette semaine de faire peur aux gens. Or c’est lui qui brandit toutes sortes d’épouvantails. Je me demande s’il ne se cache pas sous ses couvertures, la nuit.
    Quoi qu’il en soit, sans dialogue, nous n’aurons rien. Je tiens à le dire.
    Je voudrais poser une question à nos autres témoins.
    Je suis président du caucus de l’acier, où M. Maloney siège aussi, du côté libéral. Dans le cadre de nos travaux... Nous avons une coopérative nord-américaine du commerce de l’acier. Je vais donner un exemple pour permettre à tous ceux qui sont autour de la table de mieux comprendre. L’acier galvanisé produit au Canada est considéré comme un produit nord-américain. Il n’est frappé d’aucun droit de douane et n’est pas considéré comme un produit étranger lorsqu’il est vendu aux États-Unis. Dans le domaine de l’acier, les États-Unis constituent notre plus grand marché. Malheureusement, les importations en provenance de Chine commencent, pour la première fois, à dépasser les expéditions canadiennes sur le marché américain. Nous sommes donc soumis à des pressions. Quoi qu’il en soit, l’acier constitue un produit nord-américain. Des emplois sont créés au Canada parce que nous pouvons le vendre chez nos voisins du Sud à ce titre.
    Je voudrais que les représentants de la Chambre de commerce ou du Conseil des chefs d’entreprise me disent si c’est bien le genre de choses qu’ils aimeraient voir dans d’autres gammes de produits? Ne serait-il pas avantageux de travailler avec nos partenaires sur une base nord-américaine de façon à être compétitifs par rapport aux autres régions du monde qui exportent les mêmes produits?
    J’aimerais que vous répondiez tous deux à la question.
    Monsieur le président, le secteur de l’acier a été l’un des premiers chefs de file de la coopération nord-américaine. Bien avant le PSP, ce secteur était en tête, cherchant des moyens de mettre l’intégration économique au service des Canadiens et des Américains.
    Comme vous le dites, aux premiers stades des négociations canado-américaines sur le libre-échange, on se demandait si les Canadiens sauraient soutenir la concurrence des États-Unis. Aujourd’hui, il est très clair que la concurrence est mondiale et que la meilleure façon pour les Canadiens d’être compétitifs et pour les collectivités canadiennes de prospérer est de collaborer avec nos voisins et de chercher des moyens d’unir nos forces au profit des collectivités des deux côtés de la frontière. Je crois que le secteur de l’acier a beaucoup fait pour montrer que cela est possible.
    Il serait plus difficile d’en faire de même dans d’autres secteurs, mais je pense que le secteur de l’acier a bien montré que c’était faisable. Je le félicite pour son travail.
(1245)
    Très bien.
    Monsieur Sosnow, voulez-vous répondre à la question?
    À notre avis, il y a clairement des produits pour lesquels une norme nord-américaine est avantageuse. Nous avons parlé, par exemple, du passage répété des véhicules à la frontière, au fur et à mesure de leur fabrication. C’est une réalité. Toutefois, les différents éléments répondent à des normes américaines et à des normes canadiennes distinctes. Il faut donc se conformer à deux ensembles de normes. Même si des travailleurs nord-américains, si je peux m’exprimer ainsi, travaillent ensemble pour produire un véhicule nord-américain, il y a toujours le problème des normes différentes qui s’appliquent aux différents produits au Canada et aux États-Unis.
    À ma connaissance, la Chambre de commerce n’a jamais préconisé, ni dans l’exposé préliminaire de son représentant ni dans n’importe quel autre document que j’aie vu, de se lancer dans une course vers le fond en élaborant des normes communes. La Chambre de commerce souhaite que soient définies des normes mutuellement avantageuses pour le Canada et les États-Unis, dans le cadre de négociations et d’accords entre les deux pays.
    Monsieur Wallace, il vous reste assez de temps pour une question très rapide.
    D’accord. Je me limiterai à un bref commentaire.
    Je crois que tout le monde, même M. Campbell, convient que la seule façon de trouver des solutions est de discuter. On peut être d’accord ou non sur le processus suivi, mais je tiens à affirmer que nous avons besoin de discuter. Vous avez pu constater en Asie que les pays de ce continent cherchent à réaliser une plus grande intégration de leurs économies, et nous savons ce que l’Union européenne fait de son côté. Il faut travailler ensemble. Il est important pour nous, en Amérique du Nord, de poursuivre cette collaboration.
    Merci, monsieur Wallace.
    Je reviens maintenant à M. Cardin, en lui présentant mes excuses. Je regrette d’avoir oublié votre tour. Allez-y, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Monsieur le président, s'il avait été 12 h 57, je serais intervenu assez rapidement. Je vous aurais rappelé à l'ordre.
    Je vais revenir sur les principales critiques qui ont été énoncées, entre autres au sujet de l'intégration dite profonde et de la transparence. M. Wallace a d'ailleurs annoncé que j'allais reparler de transparence. La façon dont les choses sont structurées empêche en effet l'évolution législative et le débat public. Les seules personnes présentes sont des gens d'affaires et des chefs d'entreprise. À toutes fins pratiques, il n'y a pas eu de consultation.
    J'adresse ma question à ceux qui représentent les gens d'affaires et les chefs d'entreprise. Vous savez que sur bien des points, ce n'est pas ce que veut la population. Il y a des choses qu'elle ne veut pas et il y en a d'autres qu'elle veut, mais quoi qu'il en soit, elle n'a pas droit de parole. Même les parlementaires n'ont pas le droit de s'impliquer. Je voudrais savoir ce que les gens d'affaires comptent faire pour respecter l'engagement qui a été pris à l'égard de la consultation? J'aimerais ensuite que M. Campbell nous dise ce qui devrait être fait pour que cette consultation ait lieu et qu'on puisse avancer ensemble. Ça progresse beaucoup plus vite à deux que dans la confrontation.

[Traduction]

    À vous, monsieur Campbell.
    C’est une première étape. Je crois qu’il est vraiment important que les parlementaires s’occupent de cette initiative, qui a de multiples ramifications. J’ai l’impression que votre comité est le mieux placé pour en faire un examen complet.
    Nous n’avons pas du tout abordé l’aspect de la sécurité, ses incidences sur les libertés civiles et les effets de l’harmonisation sur la politique d’immigration, la politique des visas et tout le reste. Comme les chefs d’entreprise aiment bien le répéter, les deux aspects sont indissociables.
    Il est donc très important pour vous de maintenir votre surveillance. Consacrer quelques jours d’audiences à cette affaire n’est pas suffisant. Vous devriez convoquer les bureaucrates qui participent aux activités de ces groupes de travail.
    Nous avons un cadre général et des négociations visant à harmoniser la réglementation qui doivent se terminer cette année. Où en sont ces négociations? Quels sont les principaux critères qui s’appliquent? Où s’inscrit, dans ce contexte, le principe de précaution qui devrait constituer la base des règlements destinés à protéger les gens? Comment ce principe est-il lié aux considérations de compétitivité et de coût? J’ai mentionné quelques-uns des problèmes de réglementation qui se posent dans le cas des produits pharmaceutiques et biologiques. Quels en sont les effets sur nos capacités de recherche et d’essais?
    Toutes ces questions sont extrêmement importantes. Il est essentiel que le comité continue à tenir des audiences et à y associer la société civile pour qu’il soit au moins possible de tenir un débat sur les principaux éléments de ce processus.
    Je ne nie pas que le processus comprend beaucoup de choses utiles et importantes, mais il comporte aussi peut-être des aspects moins avantageux qui font passer des intérêts privés avant l’intérêt public. À titre de parlementaires, vous avez la responsabilité de protéger l’intérêt public.
(1250)
    Monsieur Cardin, il vous reste environ 30 secondes.

[Français]

    J'aimerais que les représentants des gens d'affaires me disent ce qu'ils comptent faire relativement à cette consultation, que ce soit auprès de la population ou des parlementaires.

[Traduction]

    Monsieur Stewart-Patterson.
    J’essaierai de répondre brièvement, monsieur le président.
    Tout d’abord, je crois que le processus du PSP a été très ouvert. Il a été public dès le jour où il a été annoncé. À ma connaissance, les gouvernements ont bien accueilli l’apport de tous les secteurs de la société. Le Conseil nord-américain de la compétitivité a été créé, il y a un an, parce que les dirigeants ont pensé qu’il serait avantageux de profiter des conseils de personnes ayant des compétences particulières dans les domaines couverts par le Partenariat pour la sécurité et la prospérité. Nous nous sommes efforcés de répondre à leurs vœux.
    Tandis que nous discutons des moyens d’aider nos deux pays à collaborer en matière de réglementation, de la possibilité de s’entendre sur des normes communes et d’œuvrer en vue d’une reconnaissance mutuelle, nous ne devons pas perdre de vue que toute modification de la réglementation déclenche automatiquement au Canada des mécanismes de consultation du public. Le processus même d’élaboration des règlements comporte obligatoirement, chez nous, des consultations à ce niveau.
    Je vous remercie.
    Monsieur Sosnow, une réponse très brève, s’il vous plaît. Le temps de parole de M. Cardin est écoulé.
    Je m’associe à ces observations. Je crois que certains ont l’impression qu’il n’y a pas eu de consultations, que les discussions se sont tenues en secret et que les grandes sociétés ont été les seules à y participer, à l’exclusion de tous les autres. À notre connaissance, ce n’est vraiment pas le cas.
    À vous, monsieur Julian, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie aussi nos témoins.
    Il est très clair pour moi que tout cela va bien au-delà des frontières intelligentes. Je suis heureux que nous ayons abordé ces questions au cours de la première des séances que le comité consacre au Partenariat pour la sécurité et la prospérité.
    Je voudrais reprendre avec M. Campbell la question de l’eau parce qu’une réunion liée au PSP aura lieu demain à Calgary pour discuter de la consommation d’eau, des transferts et des détournements d’eau douce et d’une utilisation commune optimale de l’eau disponible. J’imagine que tout cela vise à envoyer l’eau canadienne aux États-Unis. J’aimerais connaître votre point de vue à ce sujet. Encore une fois, c’est un exemple qui montre à quel point ce processus va au-delà des frontières intelligentes. Il serait faux de prétendre le contraire.
    Ma dernière question porte sur toute cette affaire de démocratie que vous avez soulevée. Il est très clair que les Canadiens rejettent ce genre de stratégie de droite dont parle le mémoire du Conseil canadien des chefs d’entreprise, selon lequel les gens ne sont pas très portés à appuyer de nouvelles grandes négociations commerciales. Nous savons tous que les Canadiens ont voté contre l’Accord de libre-échange Canada-États-Unis, même si le système électoral ne leur a pas permis de faire valoir leur point de vue. En 1993, les gens ont très clairement exprimé des préoccupations au sujet de l’ALENA, préoccupations que confirme le fait que la plupart des familles canadiennes ont aujourd’hui un revenu inférieur à celui qu’elles avaient avant que tout cela ne commence.
    Que pensez-vous donc de la campagne concernant l’eau du Canada? Et qu’avez-vous à dire de cette confirmation explicite du fait que la plupart des Canadiens rejetteraient cette initiative s’ils avaient la possibilité de le faire?
(1255)
    Sur le plan commercial, l’eau constitue depuis longtemps une question controversée. Cela remonte en fait aux négociations de l’ALE et de l’ALENA. Les exportations d’eau en vrac ne font pas l’objet d’une protection suffisante. Nous n’avons pas de mesures législatives à cet égard. Une fois le robinet ouvert, l’eau deviendra un bien commercial exportable.
    Nous savons que des sociétés des États-Unis, invoquant le chapitre 11 de l’ALENA concernant les relations entre les investisseurs et l’État, ont contesté des mesures provinciales tendant à limiter les exportations d’eau. Quelques affaires sont en cours à ce sujet.
    La question reste importante pour les États-Unis, comme en témoigne la dernière initiative du Center for Strategic and International Studies. Le centre croit qu’il est nécessaire pour la sécurité nationale des États-Unis d’avoir accès à l’eau canadienne, comme au pétrole canadien. Ce groupe de réflexion qui a des liens étroits avec... L’étude a été commandée. D’après ce que j’ai appris, le centre est surtout financé par le Conseil national de sécurité de Washington. Ce sont nos partenaires. Le Conference Board du Canada est un partenaire. Mais l’affaire émane de façon officieuse de la dernière réunion consacrée aux PSP. C’est l’une des questions qui sont actuellement discutées. Je sais qu’au Canada, des politiciens et des membres du public sont extrêmement nerveux, mais il n’y a pas de doute que des pressions sont exercées dans ce domaine.
    Le rapport trinational de 2005 et le dernier rapport du CNAC ne parlent pas de l’eau, mais elle est mentionnée dans le rapport préliminaire ou, du moins, dans le compte rendu des premières réunions. La question a fait l’objet de discussions, mais les participants ont décidé qu’elle était trop controversée pour figurer officiellement à l’ordre du jour. Cela ne veut pas dire qu’elle est écartée. Elle revient souvent sur le tapis.
    Monsieur Julian, il vous reste environ une demi-minute.
    Vous nous avez conseillé de convoquer des membres des groupes consultatifs qui discutent de déréglementation ou d’affaiblissement de la réglementation dans un certain nombre de domaines. Dans quelle mesure croyez-vous que ce programme ira de l’avant sans que les Canadiens aient la possibilité d’en connaître les incidences dans chacun des domaines qui les intéressent?
    Je ne le sais pas. M. Stewart-Patterson est sans doute mieux placé que moi pour répondre à cette question parce qu’il est plus proche de ces discussions.
    J’ai mentionné quelques sujets de préoccupation. J’ai dit que cet accord-cadre avance rapidement et doit aboutir avant la fin de l’année. Je crois qu’il incombe aux parlementaires d’obtenir des renseignements clairs pour savoir où en sont les négociations, quelles questions sont discutées et ce qu’on demande à la partie canadienne de sacrifier.
    Comme je l’ai dit, il est parfait d’essayer de collaborer en matière de réglementation, mais jusqu’où faut-il aller? Voilà la question. Quelles sont les limites de cette coopération? À quel stade peut-elle vraiment compromettre la marge de manœuvre de nos décideurs et leurs responsabilités démocratiques?
    C’est un peu comme la grenouille qu’on jette dans un pot d’eau chaude. Si l’eau est bouillante, la grenouille essaiera immédiatement de prendre la fuite. Si l’eau est froide et qu’on la chauffe progressivement, la grenouille ne sautera pas et finira par mourir lorsque la température de l’eau aura suffisamment monté. C’est ce processus lent et graduel, parfois rapide et parfois insidieux qui m’inquiète et inquiète beaucoup de groupes et de particuliers au Canada.
(1300)
    Merci, monsieur Campbell.
    Merci, monsieur Julian.
    Je remercie tous les témoins d’être venus au comité aujourd’hui et de nous avoir permis de prendre un bon départ dans notre étude du commerce et de l’investissement entre le Canada et les États-Unis.
    Je remercie également les membres du comité pour les questions qu’ils ont posées. Nous poursuivrons cette discussion mardi prochain.
    La séance est levée.