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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 020 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 11 mai 2009

[Enregistrement électronique]

(0905)

[Traduction]

    Bienvenue à tous. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude de la contribution fédérale pour diminuer la pauvreté au Canada.
    Nous tenons ici à Halifax notre première séance sur la route. Je tiens à remercier tous les témoins d'être venus aujourd'hui. Nous avons hâte d'entendre ce que vous avez à dire. Je tiens également à souhaiter la bienvenue à Megan Leslie, qui n'a pas besoin d'être présentée à Halifax, et aux autres collègues qui sont ici aujourd'hui et qui se sont joints au comité.
    Nous allons commencer. Je crois que vous allez tous faire une déclaration d'ouverture de cinq minutes et ensuite nous donnerons la parole aux autres. Nous disposons d'une heure et demie, de sorte que nous avons grandement le temps de poser des questions. Si votre déclaration d'ouverture dure un peu plus de cinq minutes, je crois que cela pourra aller.
    Nous allons commencer par Andrew Waugh, qui représente ici le Bureau d'aide juridique de la Nouvelle-Écosse.
    Bienvenue et vous avez la parole.
    Bonjour, honorables membres du comité.
    J'aimerais prendre cette occasion pour vous parler de la pauvreté considérée comme une violation des droits de la personne et des mesures concrètes que le gouvernement fédéral peut prendre pour s'assurer que le Canada respecte ses obligations internationales en matière de droits de la personne et cesse de violer les droits de certains de ses citoyens les plus vulnérables et marginalisés.
    Comme vous le savez sans doute, le Canada est partie au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Ce pacte impose au Canada des obligations juridiques fondamentales, notamment l'obligation de veiller à ce que tous les citoyens bénéficient du droit à la sécurité sociale, ce qui comprend le droit à une aide sociale adéquate et à un niveau de vie suffisant. À l'heure actuelle, le Canada viole ces deux obligations.
    Pendant des années, le gouvernement fédéral a affirmé dans les rapports qu'il remettait aux Nations Unies que les conditions prévues par le Régime d'assistance publique du Canada étaient la pierre de touche de la mise en oeuvre par le Canada de ses obligations que lui imposait le pacte, à savoir veiller à ce que la population vivant dans la pauvreté ait un niveau de vie suffisant. Cependant, depuis l'abrogation du Régime d'assistance publique du Canada en 1996 et son remplacement par le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, les Nations Unies ont fortement critiqué le fait que le gouvernement fédéral n'impose aucune condition aux transferts relatifs aux programmes sociaux destinés aux provinces.
    Le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux impose une seule condition aux provinces en matière d'aide sociale: elles ne peuvent exiger une période de résidence minimale pour accorder une aide sociale. Pour le reste, les provinces ont toute liberté de mettre sur pied le régime d'aide sociale qu'elles désirent, même si ces régimes violent les droits reconnus par le pacte. Cette situation est très différente de celle qui découle de la Loi canadienne sur la santé aux termes de laquelle le gouvernement fédéral impose aux provinces des conditions relatives aux transferts en matière de santé.
    En 1998, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies a critiqué le gouvernement parce qu'il adoptait une attitude hypocrite dans la mesure où il donnait effet aux droits de la personne fondamentaux en fixant des normes pour les soins de santé, tout en réduisant les droits fondamentaux en matière d'aide sociale. À l'époque, le comité avait écrit que le Canada
conserve toutefois les normes relatives à la santé, refusant aux provinces, en cette matière, une latitude qu'il tient pourtant à leur concéder dans d'autres domaines. La délégation n'a fourni aucune explication sur cette incohérence. Le Comité déplore que, en accordant un pouvoir discrétionnaire quasiment illimité aux gouvernements provinciaux en matière de droits sociaux, le gouvernement canadien ait créé une situation de nature à remettre en cause les normes fixées dans le Pacte et à amoindrir radicalement l'obligation de rendre compte de leur application.
    En 1998, le comité a également expressément recommandé que le Canada examine la possibilité de remettre sur pied un programme national, prévoyant des transferts de fonds devant être affectés à l'aide sociale et aux services sociaux, et qui comprendraient des droits universels et des normes nationales.
    Dans le dernier examen du respect par le Canada des obligations découlant du pacte effectué en 2006, le comité a encore une fois exprimé des préoccupations découlant du fait que les transferts fédéraux destinés à l'aide sociale et aux services sociaux accordés aux provinces et aux territoires ne comprennent pas de normes concernant certains droits reconnus par le pacte, y compris le droit à la sécurité sociale. Le comité invitait également les États parties à fixer l'aide sociale à des niveaux qui permettent d'assurer à tous les citoyens un niveau de vie suffisant.
    Les mesures que le Canada doit prendre pour respecter les obligations juridiques que lui impose le pacte sont claires. Il doit adopter des normes reliées au pacte pour ce qui est des transferts sociaux aux provinces.
    Le paragraphe 36(1) de la Loi constitutionnelle de 1982 imposait conjointement aux provinces et au gouvernement du Canada l'obligation de fournir, notamment, à tous les Canadiens, à un niveau de qualité acceptable, les services publics essentiels. Il est donc possible de considérer que le paragraphe 36(1) est à la fois une source et un mécanisme constitutionnels obligeant le gouvernement à établir des normes conformes au pacte pour ce qui est de ses transferts sociaux aux provinces.
    Enfin, il est important de ne pas oublier que les normes dont il s'agit ne seraient pas des normes nationales imposées par Ottawa mais des normes internationales contenues dans le pacte qui a été ratifié par 160 pays. Les normes refléteraient des valeurs reconnues internationalement plutôt que celles qui ont leur origine d'Ottawa.
    Dans un pays comme le Canada, qui s'enorgueillit de respecter les droits de la personne, tant sur le plan interne qu'international, il est inexcusable que le gouvernement fédéral ne fasse rien pour mettre un terme aux violations de ces droits. Avec la situation économique difficile actuelle, de plus en plus de Canadiens vont être obligés de vivre de l'aide sociale. Ils vont connaître d'autres indignités à cause des montants insuffisants d'aide sociale qu'ils peuvent obtenir dans les différentes régions du Canada.
    Le prochain examen des obligations que le pacte impose au Canada auquel procédera le comité des Nations Unies est prévu pour juin 2010. J'espère sincèrement qu'à ce moment-là, le Canada pourra dire au comité qu'il a réussi à respecter les obligations que lui impose le pacte et dont tous les Canadiens doivent bénéficier.
    Merci.
    Merci, monsieur Waugh.
    Nous allons poursuivre immédiatement. Mme Ross, vous avez cinq minutes.
    La Community Coalition to End Poverty in Nova Scotia a été officiellement constituée en 2007 et s'est donné pour objectif d'établir pour la Nouvelle-Écosse une stratégie de diminution de la pauvreté qui serait globale, efficace et axée sur la collaboration, qui atténuerait les effets de la pauvreté sur tous les habitants de la Nouvelle-Écosse en prévoyant des mesures favorisant un changement durable à court, moyen et long termes. La coalition comprend des organismes non gouvernementaux et des personnes qui veulent travailler pour mettre fin à la pauvreté et créer l'égalité. Le 17 octobre 2007, le jour international de lutte contre la pauvreté, la CCEP Nova Scotia — comme on nous appelle maintenant — a lancé son cadre stratégique de diminution de la pauvreté pour la Nouvelle-Écosse.
    Nous pensons que vous allez rencontrer constamment ce thème au cours de vos voyages et de vos travaux sur la pauvreté. Les témoins vont vous parler de l'écart qui se creuse de plus en plus entre les riches et les pauvres, le choix que certains doivent faire entre se chauffer et manger et des difficultés que connaissent nos régions rurales par rapport à celles qui touchent les résidents des zones urbaines. Ils vont vous parler de malnutrition, de propriétaires absents, de toxicomanie, de la crainte d'avoir un enfant, de pertes d'emploi, du manque de logements abordables, et de la mère qui ne peut aller travailler parce qu'elle n'a pas accès à une garderie. On vous parlera de pauvreté.
    Le gouvernement fédéral ne devrait pas adopter un rôle passif s'il veut contribuer à diminuer la pauvreté. Nous devons plutôt tous accepter que le gouvernement fédéral doit jouer un rôle essentiel dans la lutte contre la pauvreté à laquelle nous devons tous participer. Il est temps que les gouvernements fédéral et provinciaux arrêtent de se rejeter la responsabilité alors que ces deux paliers ont un rôle tout à fait essentiel à jouer dans ce domaine.
    Les montants d'aide sociale accordés actuellement en Nouvelle-Écosse obligent les bénéficiaires et leurs familles à vivre bien en dessous du seuil de la pauvreté. Les montants d'aide sociale accordés au Canada sont vraiment terribles. Les habitants de la Nouvelle-Écosse ont du mal à payer leurs factures d'électricité. Ils ont du mal à nourrir leurs enfants comme il le faudrait. Ils ont du mal à chauffer suffisamment leur maison pour qu'elle soit vivable. Ils ont du mal à demeurer en santé parce que la pauvreté s'accompagne de stress émotif, psychologique et physique. En Nouvelle-Écosse, des dizaines de milliers de personnes ont du mal à survivre de nos jours, au Canada, en 2009. Nous savons tous qu'il y a un bon nombre de résidents de cette province qui sont plus vulnérables à la pauvreté en raison de facteurs comme le sexe, l'âge, la race, la couleur de la peau, les capacités, l'orientation sexuelle, le casier judiciaire, la classe socioéconomique et le lieu où ils vivent dans la province, ainsi que le statut, qu'il s'agisse d'immigrants, de personnes autochtones ou de réfugiés. Les facteurs qui expliquent qu'il y ait davantage de femmes que d'hommes qui vivent sous le seuil de la pauvreté sont reliés au sexisme et à la discrimination exercée contre les femmes. C'est ce que montre le fait qu'elles ont besoin de l'aide sociale, les responsabilités qu'elles assument à l'égard de la famille et des enfants, et l'écart entre les gains des femmes, pour ne nommer que quelques facteurs.
    Pour les mères célibataires, leur principale responsabilité, qui est d'élever leurs enfants, leur pose des défis importants si elles veulent poursuivre leurs études ou se procurer un travail intéressant. Nous ne devons pas oublier que la pauvreté découle des politiques gouvernementales, s'explique par le fait qu'à notre époque les pauvres sont critiqués, ainsi que par la marginalisation et la discrimination. Les gens qui vivent dans la pauvreté ont le sentiment que la société leur reproche d'être pauvres. On dit qu'ils sont paresseux, immoraux et incompétents et on les soupçonne constamment de fraude et d'activités criminelles. Les gens pensent qu'il suffirait qu'ils cherchent du travail, que cela réglerait tous leurs problèmes, que cela est facile et que ceux qui ne le font pas manquent tout simplement d'énergie et de motivation.
    Des politiques comme celles qui obligent les bénéficiaires de l'aide sociale à chercher un travail et qui sont associées à une surveillance constante à la fois renforcent et sont renforcées par ces perceptions. Il est triste de constater que dans notre province, notre travail qui consiste à faire connaître les causes et la conséquence de la pauvreté devient plus facile parce que des gens qui n'auraient jamais pensé faire face à des défis insurmontables vont bientôt se trouver dans cette situation.
    Honorables membres du comité, un groupe comme la CCEP ne peut faire semblant de ne pas voir l'éléphant qui se trouve dans cette salle aujourd'hui. Notre groupe a été fondé dans l'intention d'élaborer une stratégie de réduction de la pauvreté dans la province et on pourrait dire que ce travail est terminé. Après avoir pendant des années fait du lobbying, organisé des manifestations, assisté à des réunions ministérielles, organisé des ateliers communautaires et attendu ensuite pendant neuf mois sans aucun suivi de la part du gouvernement pour savoir ce qu'il en était de la stratégie de la réduction de la pauvreté, voilà que quelques semaines avant le déclenchement d'une élection anticipée, le gouvernement provincial nous a dit qu'il avait adopté une stratégie de réduction de la pauvreté.
    Nous, les défenseurs de cette stratégie, essayons maintenant de savoir d'où vont venir les fonds fédéraux, quels sont les fonds qui étaient déjà prévus et quels sont les fonds nouveaux. Cette stratégie propose quelques cibles mais pas de points de repère. Nous essayons de préciser le rôle que pourrait jouer le gouvernement canadien dans ce domaine. Va-t-il vouloir faire quelque chose? Je dois vous dire qu'il n'est pas facile de critiquer quelque chose que nous demandons depuis aussi longtemps. C'est comme si vous demandiez un morceau de gâteau et qu'on vous passait de la farine. C'est un début mais il manque des ingrédients et vous ne savez pas si vous allez les obtenir; vous ne voulez pas non plus rendre la farine parce que vous ne savez pas si on vous l'offrira à nouveau ni quand on le fera.
    Honorables membres du comité, voici quelles sont les recommandations de la CCEP, un organisme qui travaille avec les gens qui vivent dans la pauvreté et qui les représente. Voilà ce que nous vous demandons de faire. Nous aimerions également que vous examiniez nos recommandations de façon plus détaillée à partir du cadre que nous a remis le greffier.
(0910)
    Nous voulons un accès universel et une meilleure coordination des politiques, des programmes et des services.
    Nous aimerions que vous élaboriez des politiques et des programmes sociaux qui permettraient aux familles et aux individus de subvenir à leurs besoins essentiels et de devenir des membres actifs de la société.
    Nous voulons que tous les résidents disposent d'un revenu qui leur permette de vivre, de conditions de travail décentes et d'avantages sociaux.
    Mettez un terme à la promesse non tenue que constitue la pauvreté des enfants. Élaborez une stratégie de développement de la petite enfance qui soit globale, accessible et coordonnée.
    Aidez-nous à devenir une population mieux instruite. Aidez-nous, les défenseurs des pauvres, les organisations de première ligne qui travaillent sur le terrain de la pauvreté et de la collectivité à faire connaître les véritables causes et conséquences de la pauvreté.
    Je voudrais vous dire pour terminer que nous avons trouvé très difficile de préparer cet exposé, un mémoire de cinq minutes, pour la simple raison que nous savons que vous avez déjà entendu tout ce que nous avons à dire. Nous savons que vous avez entendu toutes sortes d'histoires. Nous savons que dans votre rôle de membre du comité vous comprenez ce qui se passe vraiment. Malheureusement, toutes ces histoires et tous ces cas concrets ne suffisent pas à inciter les gouvernements provinciaux ou fédéral à intervenir; nous aimerions que vous fassiez quelque chose.
    Je vous remercie de votre attention.
(0915)
    Merci, madame Ross.
    Je me demande, pour l'information des membres du comité qui ne viennent pas d'Halifax, si vous pouviez nous dire quelques mots de la Stepping Stone Association et de ce que vous faites.
    Stepping Stone est un organisme sans but lucratif qui offre des services de soutien aux prostituées de rue à Halifax. Nous existons depuis près de 20 ans.
    Nous travaillons à partir d'un modèle de réduction du préjudice et nous sommes le seul organisme de ce genre dans le Canada atlantique. Nous travaillons tous les mois avec près de 115 femmes qui se prostituent ou qui se sont prostituées, et cet organisme a été créé à la suite du meurtre de trois travailleuses du sexe il y a 22 ans. Leurs meurtres n'ont toujours pas été résolus.
    Merci pour tout le travail que vous accomplissez.
    Je ne veux pas vous contredire, mais je crois pouvoir affirmer que tous les députés ne connaissent pas cette question aussi bien que vous l'espéreriez sans doute. C'est évidemment une question qui a fait l'objet de nombreuses discussions au cours des années mais je crois qu'un article de Maclean's mentionnait que près de deux tiers des députés exerçaient leurs fonctions depuis moins de cinq ans. Je comprends très bien que vous soyez sans doute un peu frustrée d'avoir à transmettre ce message mais je peux vous dire que c'est un message qu'il est important de continuer à transmettre et que vous devez continuer vos efforts pour sensibiliser les gens à ce sujet.
    Je sais que certains membres du comité en connaissent beaucoup plus. Notre excellent ami, M. Martin, qui nous a incité à effectuer cette étude, se bat contre la pauvreté depuis des années et c'est à son instigation que nous avons décidé de travailler dans ce domaine.
    J'apprécie votre patience et votre travail mais je dirais qu'il demeure encore beaucoup à faire pour informer et sensibiliser les gens à ces questions. J'apprécie que vous soyez ici pour fournir davantage d'information à ceux d'entre nous qui en ont besoin. Je vous remercie donc, Mme Ross, d'être ici. Nous avons hâte de passer aux questions et réponses.
    Merci. J'aimerais également exprimer notre reconnaissance à Tony qui nous a aidé à préparer cet exposé.
    Nous espérons que cet effort d'éducation va inciter les groupes sans but lucratif, les agences communautaires et les fonctionnaires à collaborer davantage, parce que nous avons tous le devoir de faire connaître aux Canadiens les causes et les conséquences de la pauvreté.
    Merci, madame Ross.
    Nous allons maintenant passer à Claudia Jahn. Vous êtes de Community Action on Homelessness. Si vous pouviez dire quelques mots de votre organisation avant de présenter votre exposé, je l'apprécierais.
    Très bien. Je vais d'abord me faire l'écho du commentaire de Rene en vous remerciant d'être ici. Il arrive qu'on critique beaucoup le fait qu'on ait écrit tant de rapports au sujet de la pauvreté et qu'ils n'aient pas donné grand-chose. J'aime beaucoup voir des comités permanents venir à Halifax, parce qu'il est parfois important de revenir encore une fois sur une question et je crois que nous avons fait quelques progrès. La pauvreté est tout d'un coup un sujet à l'ordre du jour. Si vous regardez ce qui se passe aux États-Unis, vous voyez que d'un seul coup les maires et les politiciens sont élus en fonction de leur position sur la pauvreté et les sans-abri. C'est un grand succès. J'aimerais remercier chacun d'entre vous d'être venu ici.
    Je m'appelle Claudia Jahn. Je suis la directrice de programme Community Action on Homelessness, ici à Halifax. Nous administrons un modèle de prestation de services, la stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance, en collaboration avec Service Canada.
    Vous êtes ici pour examiner la contribution fédérale à la pauvreté dans ce pays. Je peux vous parler de mon domaine de spécialisation, qui est l'itinérance et la stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance, qui en fait donne d'excellents résultats. Je dois dire que nous avons reçu beaucoup de compliments au sujet de ce programme. Depuis dix ans, c'est non seulement le seul programme canadien qui s'occupe directement de l'itinérance mais il est mis en oeuvre en consultation avec la collectivité et ce modèle innovateur a été très apprécié.
    Derrière toute réussite, il y a des gens. Il y a des gens à Ottawa et ici au niveau local, tous des représentants de Service Canada, qui déploient beaucoup d'efforts pour que ce programme continue à fonctionner. Tout le monde sait que la rapidité est un élément essentiel de sa réussite. Tout le monde sait que des individus sont touchés par ce programme. C'est la raison pour laquelle tout le monde est très motivé et travaille beaucoup pour qu'il fonctionne.
    Le programme a fait l'objet de certaines critiques. L'une d'entre elles est qu'il ne vise que le court terme, ce qui rend impossible toute planification stratégique. Ici, à Halifax, nous ne pouvons pas planifier les deux prochaines années. Étant donné que la province ne travaille pas avec nous sur le problème de l'itinérance, il est impossible pour un organisme sans but lucratif de faire des projets d'avenir.
    L'entente bilatérale provinciale actuelle en matière de logements abordables n'a pas une portée suffisamment vaste pour vraiment répondre aux besoins de la population la plus vulnérable, les gens qui dépendent de l'aide sociale ou qui ont de faibles revenus. Le programme provincial a pour but de louer des logements au prix du marché, ce que ne peut se permettre la population dont nous parlons. Il est essentiel pour nous que le gouvernement fédéral continue à travailler dans ce domaine et joue un rôle de leader sur la question de l'itinérance.
    J'espère que le gouvernement fédéral pourra diriger les négociations avec la province et inciter tous les acteurs à chercher à régler ce problème en partenariat. De plus, notre organisme examine les besoins des personnes qui vivent dans des foyers, ce que nous avons fait en faisant passer des entrevues à 158 personnes qui ont été prises en charge par le système de foyers et de services. Nous avons constaté que les besoins de ces personnes étaient tellement nombreux que l'on peut dire qu'elles ont des besoins complexes et que d'autres ministères doivent intervenir. Il n'y a pas que le ministère des Services communautaires qui doit prendre des mesures dans ce domaine mais également le ministère de la Santé, celui de la Justice et d'autres encore.
    Comme Rene l'a déjà mentionné, ce sont les politiques et les programmes qui créent et maintiennent la pauvreté. Nous constatons qu'elle touche différents secteurs. Un revenu suffisant, un logement adéquat, un soutien suffisant: ce sont là pour nous les solutions qui permettraient de réduire l'itinéraire au palier national. Pour mon secteur, pour la Community Action on Homelessness, il est donc important de créer des logements convenables pour tous ceux qui en ont besoin dans cette ville, et de mettre sur pied des réseaux de soutien.
(0920)
    Près de 85 p. 100 des personnes qui vivent dans le système des foyers souffrent de problèmes de santé mentale. Elles ont donc un grand besoin de services de soutien de différentes natures.
    Pour en revenir à la stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance, j'aimerais ajouter, comme je l'ai déjà mentionné, qu'il faudrait revoir l'aspect court terme de ce programme. Les fonds attribués sont évidemment insuffisants. Nous avons obtenu un peu plus de 3 millions de dollars sur trois ans. Cela fait 10 ans que nous recevons le même montant. De plus, le fardeau administratif imposé aux organismes sans but lucratif pour demander des subventions et faire rapport au sujet de ce programme est vraiment trop lourd.
    Je vous remercie.
    Merci.
    Avant de poursuivre, Andrew, je rappelle que j'avais demandé à tous les autres d'expliquer ce qu'ils faisaient et je crois comprendre ce que fait l'aide juridique mais pourquoi ne pas nous dire quelques mots de vos activités.
    Je pratique dans le domaine du droit de la pauvreté, qui est parfois difficile à décrire. Je vais tout simplement vous parler des secteurs dans lesquels je travaille généralement. Je représente les gens dans le domaine de l'aide sociale, du logement, des appels en matière de Régime de pensions du Canada, des plaintes en matière de droits de la personne; j'interviens essentiellement dans toutes les situations qui amènent les gens qui vivent dans la pauvreté à entrer en contact avec le système de justice et je représente ceux qui ne peuvent bénéficier des services d'aide juridique habituels dans le domaine du droit de la famille et du droit pénal.
(0925)
    Merci.
    Nous allons maintenant faire quelques tours de questions. Le premier tour sera de sept minutes.
    Nous allons commencer par M. Savage. Apparemment, votre circonscription n'est pas très loin d'ici ou vous êtes de la région.
    J'aimerais d'abord souhaiter aux membres du comité la bienvenue à Halifax, qui est une des principales banlieues de Dartmouth ici en Nouvelle-Écosse.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Michael Savage: La belle ville d'Halifax, Megan.
    C'est la première fois que le comité se déplace, je vous le mentionne pour vous donner le contexte. Nous avons commencé cette étude il y a un an et nous avons passé quelque temps à définir la pauvreté, à examiner les mesures basées sur le panier de consommation et le SFR; nous avons également regardé ce que faisaient d'autres pays. Certains ont obtenu de bons résultats. Nous avons également étudié les provinces qui ont adopté il y a quelque temps déjà des stratégies de lutte contre la pauvreté, principalement le Québec, Terre-Neuve-et-Labrador, et maintenant l'Ontario, et tout récemment, bien sûr, la Nouvelle-Écosse, qui vient d'adopter une stratégie de lutte contre la pauvreté, comme je crois Rene l'a mentionné. Voilà donc ce que nous avons fait.
    Nous n'avons pas tenu de séances de juin à février environ, à cause des élections et de tout ce qui s'est passé au Parlement après les élections et juste avant Noël. Nous avons repris notre étude et décidé de nous déplacer. C'est la première séance que nous tenons ici à Halifax.
    Je suis heureux que vous soyez tous venus. Je sais que vous avez déjà pris la parole devant le comité. Je sais que Claudia a parlé à un comité sénatorial de lutte contre la pauvreté. Elle a comparu également devant un autre comité sénatorial avec Catherine Callbeck, je crois. Je vous ai entendu toutes les deux parler de cette question devant de nombreuses instances. Je comprends donc qu'il y ait chez les gens qui s'occupent de cette question depuis longtemps un certain sentiment d'usure.
    Mais j'ai été très heureux, Claudia, de vous entendre dire qu'il était bon de parler de ces choses. Je le crois aussi. Je crois pouvoir dire au nom du comité que nous tenons beaucoup à produire un rapport dont nous serons fiers et qui expliquera les mesures que le Canada pourra prendre au cours des prochaines années pour réduire la pauvreté — ensuite, bien sûr, cela dépendra de la volonté politique. Mais il est important de commencer quelque part et c'est ce que nous essayons de faire.
    J'ai fait référence à la stratégie de lutte contre la pauvreté qui a été dévoilée par le gouvernement provincial il n'y a pas très longtemps. Je me demande si quelqu'un d'entre vous a eu le temps de l'étudier. Bien évidemment, les effets de cette stratégie n'ont pas pu se faire sentir mais je me demande si l'un d'entre vous pouvait me dire si elle représente un pas dans la bonne direction et si c'est le cas, quels sont ses points forts, et si ce n'est pas le cas, quels sont ses points faibles.
    J'aimerais parler du volet logement abordable. Je suis également membre de la Affordable Housing Association of Nova Scotia.
    Nous avons examiné la stratégie de réduction de la pauvreté de la Nouvelle-Écosse pour ce qui est du logement abordable et je peux vous dire que cette stratégie ne va pas très loin. Elle revient pour l'essentiel à présenter à nouveau les programmes existants et comme nous le savons tous, les programmes existants ne donnent pas de bons résultats, il suffit de regarder les chiffres pour s'en convaincre. Nous avons préparé le bulletin de notes communautaire de Community Action and Homelessness pour ce qui est des sans-abri et nous avons donc le nombre des unités de logements abordables qui existent dans la province, le nombre de celles qui ont été créées au cours des 10 dernières années, et tout cela montre qu'il n'y en a pas suffisamment.
    La stratégie de réduction de la pauvreté n'est pas, à mon avis, une stratégie. Elle ne contient aucune cible. Elle n'est pas appuyée par un financement. Même de la part des autres provinces... Elle a déjà été très critiquée au cours des discussions auxquelles je participe.
    C'est un plan décennal. Nous ne devons pas oublier que cela touche des gens et la vie de toutes ces personnes et qu'elles ne peuvent attendre dix ans pour ce que problème soit réglé. J'ai assisté à une conférence à Calgary et un intervenant a dit quelque chose qui m'a fait beaucoup réfléchir. Nous faisons tout ce travail; nous sommes très heureux d'avoir une stratégie mais il faut tout de même s'arrêter un peu. Faisons-nous ce qu'il faut faire ou nous contentons-nous de suivre un modèle américain, qui semblait si intéressant — la disparition des sans-abri d'ici dix ans, la fin de la pauvreté d'ici dix ans? Il y a des choses qui ressemblent à l'esclavage. Il a déclaré qu'on n'avait pas supprimé l'esclavage en disant: « Très bien, 25 p. 100 d'entre vous vont rester esclaves pendant un moment encore, 10 p. 100 seront libérés cette année et dans cinq ans nous en libérerons 25 p. 100 de plus et tout sera fini. » Nous devons prendre nous-même cette décision. Voulons-nous mettre fin à la pauvreté? Si c'est oui, alors il faut y mettre fin maintenant, pas dans dix ans; elle doit disparaître maintenant.
    C'est la critique que je fais en général à un plan décennal. Notre stratégie de réduction de la pauvreté pour la Nouvelle-Écosse semble avoir été élaborée en faisant du couper-coller à partir des programmes existants. Il n'y a rien d'autre; ce n'est donc en fait qu'un bout de papier. Tant qu'il n'y a pas de véritable volonté, ni de fonds pour appuyer cette stratégie, elle n'aura aucun effet.
    Cela me touche beaucoup. Il faut bien sûr de l'argent pour faire quoi que ce soit mais ici à Halifax, par exemple, nous nous occupons de plus de 200 sans-abri, et l'année dernière, 1 200 personnes ont utilisé notre système d'abris. Disons qu'il y a 240 personnes qui vivent dans le système d'abris. Ne pourrions-nous pas résoudre ce problème en créant 200 unités de logements abordables et adaptés? Nous avons les moyens de le faire. Avec une bonne stratégie nationale en matière de logement accompagnée de fonds suffisants, nous pourrions résoudre ce problème en deux ans.
    Nous n'avons pas besoin de dix ans et nous n'avons pas besoin d'une stratégie de réduction de la pauvreté. Nous devrions être plus concret. C'est ce que je pense.
(0930)
    Tout d'abord, je veux mentionner que Merlin Watt vient d'arriver. Il a organisé hier soir une petite réunion informelle à laquelle Tony et moi avons pu assister. Il y avait des gens qui vivaient dans la pauvreté. Il y avait des gens qui travaillent dans ce domaine. Cela a été très utile; je vous remercie donc d'avoir organisé cette rencontre hier soir.
    J'aimerais parler encore de logement puisque nous abordons cette question qui a été mise de l'avant par toutes les personnes que nous avons rencontré. Mike Kirby de la Commission de la santé mentale a déclaré qu'il s'agissait là de la priorité numéro un. Au deuxième rang viendrait le fait qu'au Canada l'infrastructure sociale n'est pas adaptée aux personnes qui ont des problèmes de santé mentale, des maladies de genre épisodique. L'Association canadienne pour l'intégration communautaire et l'Association canadienne des paraplégiques nous ont dit que le logement était la grande priorité.
    Vous connaissez tous assez bien cette question. Je sais qu'il ne me reste pas beaucoup de temps et nous allons sûrement y revenir plus tard mais permettez-moi de vous poser une question précise: si nous voulons faire quelque chose pour le logement, quel pourrait être le rôle du gouvernement fédéral?
    Il faut qu'il appuie financièrement le logement et le gouvernement a affecté 1 milliard de dollars pour le logement social mais il a pris soin de préciser que ce n'était pas une stratégie à long terme mais à court terme. Le logement est bien évidemment un besoin à long terme. Faut-il construire des logements pour des gens qui ont des problèmes particuliers, que ce soit des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie? J'aillais poser une question au sujet du rôle des subventions destinées à faciliter l'accès aux logements existants mais plutôt que de dépasser maintenant mon temps de parole, je reviendrai peut-être plus tard sur ce sujet, monsieur le président, et quelqu'un d'autre pourra également en parler.
    Merci.
    Madame Beaudin, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci beaucoup et merci d'être là aujourd'hui.
    Madame Ross, vous avez beaucoup parlé d'organismes à but non lucratif et d'initiatives locales très importantes pour contribuer à la lutte contre la pauvreté. De quelle façon le gouvernement fédéral pourrait-il aider les organismes sans but lucratif qui travaillent sur le terrain? Je viens du Québec. Vous savez peut-être qu'il existe déjà au Québec une loi-cadre sur la lutte contre la pauvreté.
    Au fond, j'ai deux questions. Cette loi-cadre constituait une énorme mobilisation de la société civile; il s'agissait d'un partenariat. J'ai une question sur l'aide que le fédéral pourrait apporter aux organismes sans but lucratif sur le terrain, mais aussi sur tout le dossier de votre stratégie de lutte contre la pauvreté. Avez-vous participé, comme partenaire local, à cette stratégie? Vous a-t-on approchée? Souhaitez-vous y participer pour définir, comme vous le disiez, des cibles plus précises? La société civile a-t-elle été impliquée dès le départ afin d'établir la stratégie?

[Traduction]

    Merci d'avoir posé cette question. Bienvenue en Nouvelle-Écosse.
    La Community Coalition to End Poverty in Nova Scotia représente en fait un grand nombre de groupes, organisations, conseils de santé, le Dalhousie Legal Aid Service, et des organismes de service de première ligne. La CCEP est un groupe important dont les membres sont répartis sur tout le territoire de la Nouvelle-Écosse.
    Le cadre de notre stratégie de réduction de la pauvreté a été élaboré en collaboration avec tous ces organismes qui travaillent en première ligne avec les gens qui vivent dans la pauvreté. C'est une des choses très importantes que les organisations sans but lucratif font: veiller à ce que la voix et les besoins des personnes qui vivent dans la pauvreté aient la priorité, parce que ce sont ces personnes qui savent le mieux comment améliorer leur vie.
    La collaboration avec les collectivités est un de nos points forts. Nous parlons d'un cadre pour la réduction de la pauvreté aux paliers provincial et fédéral après avoir passé des années à participer à des manifestations, à des défilés et à des ateliers — à des ateliers de trois jours. Certains d'entre nous y ont consacré un nombre incalculable d'heures. Nous avons au moins cinq pages de recommandations à l'intention du gouvernement fédéral auxquelles nous avons réfléchi, dont nous avons débattu et discuté pendant des années.
    Il y a beaucoup de choses que le gouvernement fédéral pourrait faire immédiatement. Il faut que le gouvernement fédéral augmente les fonds affectés au transfert social. C'est une mesure essentielle.
    Nous avons besoin d'une politique du logement dynamique qui favorise la stabilité et aide les gens à conserver leur logement. Les fonds doivent être accordés en priorité à des fournisseurs de logement sans but lucratif. Ce sont là quelques-unes des mesures que le gouvernement fédéral pourrait prendre.
    Comme je l'ai dit, je suis la directrice exécutive d'un organisme sans but lucratif. Nous travaillons tous ensemble. Dans notre organisme, nous voyons de tout: toxicomanie, santé mentale, problèmes familiaux, violence et crimes contre les personnes que nous essayons d'aider. Nous aidons 115 personnes, ce sont les plus marginalisées de la société, avec un personnel restreint et des fonds qui n'ont pas augmenté depuis 15 ans. Notre organisation n'est pas un cas isolé. C'est la même chose pour les centres pour les femmes et les foyers de transition. Nous avons besoin de ce genre de soutien pour mieux faire notre travail. Il faut également que les gouvernements fédéral et provinciaux interviennent et assument une partie de ces responsabilités parce que nous avons le sentiment qu'au cours des années les gouvernements ont dit: « Adressez-vous aux organismes sans but lucratif, trouvez-vous une oeuvre charitable, allez dans les banques alimentaires. » Nous avons dû assumer de nombreuses responsabilités et c'est devenu un fardeau de plus en plus lourd.
    Pour revenir à la stratégie de réduction de la pauvreté, je dirais que les collectivités ont fait leur travail et le font depuis des années; elles ont tenu un nombre incalculable de réunions. Encore une fois, il faut qu'il y ait une véritable volonté politique. Nous avons étudié en détail ce qui se fait au Québec et avons essayé de nous en inspirer. Je dirais qu'il se fait beaucoup de choses au Québec à l'heure actuelle dont nous sommes un peu jaloux. Voilà comment je pourrais dire.
    Merci pour votre question.
(0935)

[Français]

    Avez-vous quelque chose à ajouter, madame Jahn?

[Traduction]

    Oui. J'aimerais ajouter quelque chose au sujet du logement et des sans-abri. La contribution fédérale nous aide bien sûr mais nous avons besoin d'un investissement plus important. Comme le montrent les immenses succès obtenus grâce à ce genre d'initiatives, mises en oeuvre par des organismes sans but lucratif, je dirais que tout cela est remarquable. Nous allons ouvrir, dans les semaines qui viennent, 20 unités de logement supervisé dans un complexe situé ici à Halifax et les personnes qui vivent actuellement dans le système des foyers vont pouvoir emménager dans ces unités et bénéficieront d'un soutien pendant les années à venir. Si nous avions davantage d'unités de ce genre à offrir, cela réglerait une bonne partie de nos problèmes. Ce serait remarquable.
    Nous allons peut-être réussir à construire des logements de ce genre tous les deux ans. Notre plan communautaire comporte cinq priorités, qui comprennent la construction de nouveaux logements, la rénovation de logements anciens, des fonds pour des programmes et un petit montant pour la recherche. C'est tout ce que nous avons eu pendant deux ans et nous ne savions pas si nous allions obtenir ces fonds, ce qui complique beaucoup les choses.
    Je dirais donc que pour moi la réponse est facile: nous avons besoin de plus d'argent. Le secteur sans but lucratif sait très bien ce qu'il a à faire et il connaît les besoins; il n'est donc plus nécessaire de faire d'autres études. Lorsqu'on travaille dans un foyer pour sans-abri, on connaît les besoins des résidents.
    Merci d'avoir posé cette question.
    Merci. C'est tout le temps dont nous disposons maintenant.
    Nous allons maintenant passer à Mme Leslie.
    Bienvenue encore une fois. Vous avez sept minutes.
    Monsieur le président, merci de m'avoir accueillie si chaleureusement, étant donné que je ne siège pas habituellement à ce comité.
    J'aimerais vous offrir des salutations officielles et vous souhaitez à tous la bienvenue dans le comté d'Halifax.
    Merci au comité d'être venu ici aujourd'hui.
    Bienvenue à Mike, qui vit dans la circonscription qui a la plus belle vue de tout le Canada: une vue d'Halifax.
    Des voix: Oh, oh!
(0940)
    Non, non, ce qu'on voit d'Halifax, c'est Dartmouth.
    Merci aux témoins de comparaître aujourd'hui.
    Pour que le comité sache quelle est ma relation avec les témoins, je vous dirais que j'ai beaucoup travailler avec tous les trois pour lutter contre la pauvreté. Andrew et moi avons travaillé sur une contestation concernant la pauvreté fondée sur la charte et Rene, Claudia et moi avons travaillé pour la Community Coalition to End Poverty et pour d'autres initiatives également.
    Ma première question s'adresse à Andrew. Je pense au Pacte international sur les droits économiques et sociaux et au fait que ce pacte énonce que nous avons droit à un niveau de vie suffisant. Je pense également au fait qu'au Canada, il n'y a pas de seuil de pauvreté, et que c'est une sorte de mythe. Les gens pensent que le seuil de faible revenu est le seuil de pauvreté mais le gouvernement canadien n'a pas accepté qu'il représentait le seuil de pauvreté. Il y a également la mesure basée sur le panier de consommation mais là encore cette mesure n'est pas acceptée, de sorte qu'il n'y a pas de seuil de pauvreté officiel.
    Je me demande comment cela influence le fait qu'il faut définir le mot « suffisant ». Comment pourrions-nous définir le mot « suffisant »?
    C'est une excellente remarque. C'est un aspect que le comité a mentionné à plusieurs reprises, à la fois en 1998 et tout récemment en 2006; et celui-ci a critiqué le Canada pour ne pas avoir défini ce seuil de pauvreté.
    Lorsque vous parlez de comité...?
    Excusez-moi. C'est le Comité des Nations Unies des droits économiques, sociaux et culturels. C'est le comité auquel les parties au pacte font rapport au sujet de la mise en oeuvre des obligations qui découlent du pacte.
    Tout récemment, en 2006, pendant la période correspondant au dernier rapport du Canada, le comité a spécialement critiqué le point que vous avez soulevé, à savoir que le Canada n'avait pas adopté de seuil de pauvreté officiel. Le comité a recommandé encore une fois que le Canada en établisse un.
    Comme vous l'avez fait remarquer, il est très difficile de dire si l'aide sociale est d'un montant suffisant lorsqu'il n'existe pas de repère pour l'évaluer. À l'heure actuelle, je ne sais pas si vous le savez, le Conseil national du bien-être social publie son rapport sur les revenus d'aide sociale et je sais qu'il utilise toujours le SFR pour mesurer le degré de pauvreté dans lequel vivent les personnes qui reçoivent l'aide sociale; c'est en fait l'écart entre le seuil de faible revenu et le montant de l'aide sociale qui est offert.
    Il y a donc des organismes qui essaient de déterminer si l'aide sociale est d'un montant suffisant mais quant à savoir si le gouvernement fédéral est en mesure de le faire, cela demeure un mystère parce que, comme je l'ai dit, il n'a pas adopté de seuil de pauvreté officiel. Si nous voulons donc établir des normes en matière de transferts sociaux et d'aide sociale, je crois que le Canada devrait commencer par adopter un seuil de pauvreté officiel qui permettrait de se prononcer sur le caractère suffisant de l'aide sociale offerte par les provinces.
    Très bien. Merci.
    Je pense qu'une partie de la question que posait Mme Beaudin portait sur la nécessité de proposer des solutions et de se demander quelles étaient les solutions? Je pense que la définition d'un seuil de pauvreté serait une excellente première mesure.
    Pour poursuivre avec les solutions, j'aimerais vous poser une question au sujet de questions de compétence. Lorsque vous avez parlé de financement spécialisé assorti de conditions, inspiré de la Loi canadienne sur la santé, cela m'a beaucoup intéressé parce que c'est en fait la raison pour laquelle j'ai décidé de me lancer en politique fédérale. J'aimerais que vous nous en disiez davantage sur le fait que les transferts fédéraux ne sont pas à l'heure actuelle assortis de conditions alors que cela serait vraiment nécessaire.
    Bien sûr.
    La loi qui a introduit le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux prévoyait que les transferts aux provinces en matière de santé devaient respecter certaines conditions prévues par la Loi canadienne sur la santé. Si ces conditions n'étaient pas respectées, le montant des fonds transférés pouvait être modifié.
    Pour ce qui est des transferts en matière de programmes sociaux, les provinces ne peuvent exiger qu'une personne ait résidé dans la province pendant une période minimale pour avoir droit à l'aide sociale. Cela veut dire que, si une personne déménage en Nouvelle-Écosse demain, elle pourrait avoir immédiatement droit à l'aide sociale si elle répond aux critères d'attribution, même si elle vient d'arriver dans la province. C'est la seule condition exigée actuellement. Il est évident que cela ne touche aucunement la notion d'aide suffisante.
    Vous avez parlé de problème de compétence. Comme vous le savez, les provinces possèdent certaines compétences et le gouvernement fédéral en a d'autres. Les provinces sont responsables de l'aide sociale. Le gouvernement fédéral ne peut commencer à mettre sur pied des programmes d'aide sociale dans toutes les provinces. Mais il peut utiliser son pouvoir de dépenser, ce qu'il a fait avec la Loi canadienne sur la santé et notre programme de soins de santé, pour dire aux provinces, nous voulons que vous respectiez les conditions X, Y et Z lorsque vous mettez sur pied un régime d'aide sociale. C'est ce qui ne se fait pas à l'heure actuelle.
(0945)
    Vous avez déclaré qu'il n'était pas obligatoire à l'heure actuelle de fournir de l'aide sociale.
    Non. En théorie, une province pourrait fort bien décider de ne pas mettre sur pied de programme d'aide sociale. Cela ne durerait sans doute pas très longtemps. Mais d'après la loi, cela pourrait se faire.
    Merci.
    Je m'adresse maintenant à Claudia et à Rene et je veux vous poser une question au sujet du logement. Nous avons connu il y a environ 10 ans un village de toile à Toronto, comme vous le savez probablement. Lorsque les gens ont quitté ce village de toile, la plupart d'entre eux ont reçu un logement parce que c'était la solution prioritaire. Je pense que près de 80 p. 100 de ces personnes ont toujours un logement, ce qui montre bien que ce n'est pas une question de toxicomanie ni de santé mentale. Les gens sont capables de conserver un logement pourvu qu'on leur en procure un. Je sais que c'est un peu radical comme affirmation.
    J'aimerais bien que vous fassiez des commentaires sur le principe de la « priorité au logement » comme initiative fédérale.
    Il semble que nous avons toujours envie de rire lorsque nous parlons de ce sujet. N'est-ce pas étonnant? Nous donnons une maison aux gens qui vivent dans les tentes et ils sont contents. Voyons. Tous ceux qui vivent dans les foyers pourraient être relogés. Personne ne veut vivre dans un foyer. Bien sûr que c'est absolument possible. Il y a environ 25 p. 100 des personnes ici à Halifax qui ont été expulsées de leur logement, ce qui les a surpris et choqués énormément. Ces personnes pourraient être relogées immédiatement. Nous aurions même peut-être pu empêcher les évictions en prenant certaines mesures.
    Pour ce qui est des clients ayant des troubles mentaux, je constate, chaque fois que je parle à l'un d'entre eux pendant une heure ou deux, qu'ils ne devraient pas être ici. S'ils avaient un cancer ou une autre maladie, ils seraient pris en charge. Ils ont besoin d'un lit d'hôpital. Ils ont besoin d'un logement. Ils ne sont pas autonomes. Nous demandons aux personnes qui sont les plus vulnérables de se débrouiller seules. C'est ce que nous faisons à l'heure actuelle. Tous ceux qui vivent dans des abris pourraient être relogés demain.
    J'aimerais ajouter que nous constatons tout cela de façon régulière. Nous avons eu un programme pilote de logement pendant un peu plus d'un an. Les fonds provenaient de Service Canada. Une des plus grandes difficultés auxquelles font face les travailleuses du sexe est le manque de logement. Nous essayons de procurer un logement aux travailleuses du sexe; c'est un élément essentiel. Nous leur procurons un logement, et nous réussissons habituellement à le faire. Je dirais que notre taux de réussite est de 80 p. 100. Lorsque nous n'y parvenons pas, c'est à cause d'antécédents criminels. Tout le monde demande pourquoi il y a tant de travailleuses de rues qui sont sans abri. C'est parce qu'elles ont des antécédents criminels. Elles trouvent un logement et ensuite elles doivent répondre d'une autre accusation et elles sont envoyées en prison parce qu'elles ont fait ce qu'elles doivent faire pour survivre. Lorsqu'elles sortent de prison, elles ne peuvent récupérer leur logement. C'est le seul problème auquel nous faisons face pour ce qui est des taux de conservation du logement pour les personnes avec qui nous travaillons dans le cadre du programme fédéral. Mais là encore, c'est une autre chose que nous demandons.
    Nous avons eu un taux de succès extrêmement élevé. Comme Claudia l'a dit, nous sommes en fait surprises parce que cela est très simple. À part les antécédents criminels des gens qui vivent dans la pauvreté, les seules difficultés viennent de la discrimination que pratiquent certains propriétaires — mais pas tous. Il y a aussi la société et les autres résidents. Cela montre qu'il y a encore beaucoup à faire pour sensibiliser la population.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Komarnicki. Vous avez sept minutes.
    Et merci pour votre exposé très éclairant. J'ai beaucoup apprécié ce que vous avez dit.
    Je sais — et Claudia l'a mentionné — que nous connaissons beaucoup de choses au sujet de la pauvreté. C'est en partie une question d'argent et je suis sûr que vous aimeriez avoir davantage de fonds fédéraux. Mais je pense qu'il faut aller plus loin. À l'heure actuelle, comme vous le savez, sous le volet logement, nous obtenons 2 milliards de dollars pour les deux prochaines années, et bien sûr, la stratégie de lutte contre l'itinérance a été prolongée pour une période de cinq ans à un coût de 1,95 milliard de dollars. L'éducation est un aspect important, tout comme le perfectionnement et nous avons prévu dans ce domaine 13,2 milliards de dollars répartis sur deux ans. Bien sûr, pour ce qui est des programmes fédéraux destinés aux familles et aux enfants, on parle de près de 13 milliards de dollars de fonds, de sorte qu'il y a beaucoup d'argent dans le pot. On pourrait toujours en utiliser davantage mais il me semble qu'il faut également essayer d'utiliser le mieux possible les fonds que nous avons et peut-être empêcher les provinces de récupérer certains montants, compte tenu de la multiplicité des organismes concernés. Lorsque le gouvernement fédéral donne de l'argent, les gouvernements provinciaux le récupèrent — pas tous mais certains d'entre eux, car cela dépend de leurs programmes de soutien du revenu. Ce n'est donc pas seulement une question d'argent, même si cet argent est toujours bien accepté. Il faut se demander s'il est possible d'en accorder davantage.
    Je sais que la question des compétences fédérales-provinciales-municipales est très importante et j'aimerais dire quelques mots à ce sujet mais je vais peut-être commencer par reparler à Andrew de la définition. Comment définiriez-vous la pauvreté et comment pourrait-on la mesurer de façon à mieux connaître la situation et à savoir si nous progressons d'une année sur l'autre? Vous pourriez peut-être répondre à cette question et je parlerais ensuite un peu de la question des compétences.
(0950)
    Pour ce qui est de la façon de mesurer la pauvreté, je suis certainement pas...
    Je vous demande de la définir.
    Vous voulez ma définition. Très bien. Je pense qu'est pauvre toute personne qui n'a pas les moyens de combler ses besoins fondamentaux, ses besoins fondamentaux étant un logement suffisant, une nourriture suffisante et bien sûr, des vêtements. J'ajouterais également l'éducation et la capacité de répondre à ses besoins fondamentaux. C'est en tout cas ce que l'ONU a déclaré au sujet du droit à une aide sociale suffisante que reconnaissent les pactes.
    Vous dites « la capacité de répondre à un ensemble de besoins définis » mais lorsque vous dites « la capacité » de quoi parlez-vous exactement?
    Cela veut simplement dire posséder les ressources pour combler ces besoins.
    Vous mettriez donc un chiffre, un nombre de dollars par personne ou par famille?
    Je pense qu'il faudrait effectivement fixer un montant d'argent, en fonction de la méthode de mesure de la pauvreté utilisée, que ce soit le seuil de faible revenu, le panier de consommation, ou la technique que le Canada choisirait. Il faut que les gens aient accès à un certain montant d'argent, en fonction de l'endroit où ils vivent, pour qu'ils puissent subvenir à leurs besoins essentiels.
    Comment mesurez-vous le niveau de ces besoins? Comment le définissez-vous? Comment le mesurez-vous?
    Je ne pense pas vraiment que je puisse parler de mesure. Il faudrait plutôt demander à un économiste ou à un statisticien de le faire; mais on utilise beaucoup le SFR et je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas utiliser le SFR comme seuil national de pauvreté, même si je sais que cette mesure est critiquée. Comme je l'ai dit, je ne suis peut-être pas le mieux placé pour faire des commentaires à ce sujet.
    Je crois qu'il faudrait alors examiner le genre de choses qui concernent la pauvreté. Il y a le logement, qui est une question provinciale. Il peut y avoir la santé, la santé mentale ou la toxicomanie; c'est encore un domaine de compétence provinciale. L'aide au revenu est un domaine de compétence provinciale, et la difficulté est de tenir compte de tous ces aspects tout en livrant un produit final acceptable. Par ailleurs, étant donné que c'est une question de compétence, il y a beaucoup de provinces qui n'aiment pas que le gouvernement fédéral empiète dans les domaines qui relèvent de leur propre compétence. Je sais que le Québec, par exemple, a adopté sa propre méthode pour ce qui est d'intervenir dans ce domaine et de mettre en oeuvre des programmes mais comment pensez-vous que l'on peut faire? À l'heure actuelle, c'est principalement en vertu d'ententes fédérales-provinciales et il y en a des centaines. Nous ne parlons pas de deux ou d'une dizaine d'ententes. Nous parlons de 400 à 500 ententes qui expirent à différentes dates, de sorte que c'est une situation très complexe. Comment la simplifier? Quelle serait votre suggestion? Vous avez un certain nombre de provinces et territoires qui ont chacun des programmes différents. Comment simplifiez tout cela dans notre pays, qui a un système fédéral?
    Il est vrai qu'il y a des questions de compétence. Il me paraît paradoxal que le gouvernement fédéral ait décidé de fixer des conditions pour le transfert en matière de santé. Le gouvernement fédéral ne semble éprouver aucune difficulté à exiger l'accessibilité, la transférabilité, l'universalité, les conditions...
    Si l'on prend la Loi canadienne sur la santé et les cinq principes que vous avez mentionnés, on constate qu'ils sont exprimés en termes très généraux et qu'il n'y a pas beaucoup de contestations judiciaires fédérales-provinciales sur la façon de les mettre en oeuvre. C'est assez souple dans ce sens, n'êtes-vous pas d'accord?
(0955)
    Certainement mais il y a un contraste avec les transferts sociaux qui n'imposent aucune condition, à part celle que j'ai mentionnée, à savoir que la province ne peut imposer une condition de résidence minimale pour fournir une aide sociale.
    C'est pourquoi je pense qu'il y a un manque de volonté de la part du fédéral pour ce qui est de fixer des conditions relatives à l'aide sociale dans le cadre des transferts sociaux. Pour ce qui est de l'idée que les provinces n'aiment pas que le gouvernement fédéral intervienne dans leurs domaines de compétence, il me paraît important de rappeler que les conditions dont je parle ne sont pas des conditions qu'Ottawa a concoctées et ensuite imposées aux provinces. Ce sont des conditions au sujet desquelles 160 pays ont déclaré: « Nous sommes prêts à adhérer à ces droits-là; ce sont des droits dont nous reconnaissons tous l'importance et ce sont là des obligations que nous allons essayer de respecter. » Ce sont des valeurs partagées par tous les pays et je ne pense pas qu'elles aient pris naissance à Ottawa et aient ensuite été déléguées aux provinces.
    Bien entendu, le Canada a son propre cadre législatif et constitutionnel pour ce qui est des relations provinciales-fédérales. Nous parlons du transfert canadien en matière de programmes sociaux. En fait, ce transfert augmente chaque année et il va encore augmenter de façon assez importante mais la question à résoudre est la suivante: comment demandez aux provinces de l'utiliser d'une certaine façon? Jusqu'ici pour le logement par exemple, on a conclu de nombreux accords qui s'appliquent pendant des années et qu'il faut ensuite modifier légèrement en négociant avec les provinces. N'est-ce pas ce qu'il faut faire, collaborer jusque dans les détails?
    Absolument. Vous avez raison de dire que le montant des transferts sociaux augmente mais le gouvernement fédéral ne fournit aucune directive sur la façon dont il aimerait que les provinces utilisent les sommes supplémentaires obtenues pour l'aide sociale. Vous pouvez le constater en observant la grande diversité des régimes d'aide sociale adoptés par les provinces. Je ne peux parler en fait que de celui de la Nouvelle-Écosse mais je peux vous dire que les montants de l'aide sociale accordés ici sont manifestement insuffisants et que le gouvernement fédéral n'a donné à la province aucune directive sur ce qu'elle pourrait faire pour que les montants de l'aide sociale versés ici soient satisfaisants.
    Très bien. Merci.
    Nous allons maintenant passer à un deuxième tour, qui sera de cinq minutes pour les questions et les réponses.
    Monsieur Savage.
    Merci, monsieur le président.
    Lorsque le comité se réunit, nous essayons d'éviter les questions partisanes. Nous y arrivons le plus souvent. Je réserve ce genre de discussion pour des débats de fin de soirée avec M. Komarnicki à la Chambre des communes et je dois dire qu'il est capable d'en prendre et d'en donner.
    J'aimerais dire quelques mots du transfert social. Rene, je crois que vous avez parlé d'augmentation.
    Il y a des organismes qui préconisent depuis longtemps que l'on procède à des investissements importants dans les organisations qui travaillent sur l'infrastructure sociale, comme le CCPA, le Caledon Institute et le CCSD et qui ont fait des commentaires sur le transfert en matière de programmes sociaux. Dans les années 1990, le gouvernement au pouvoir a regroupé les transferts sociaux, les services sociaux et de santé. Nous avons retiré la santé en 2004.
    Je crois qu'il y a dans la salle un représentant du CCPA.
    Je crois que l'autre budget prévoyait d'investir 2 milliards de dollars dans les transferts sociaux — pour la Nouvelle-Écosse, par exemple. Ed a raison lorsqu'il dit que nous avons légèrement augmenté les transferts sociaux mais je ne pense pas que ce soit ce qu'il faut faire. Il faudrait repenser le système et augmenter les sommes. En Nouvelle-Écosse, nous avons eu une augmentation de 4 $ par mois de l'aide sociale. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela ne fait aucune différence. C'est une augmentation de façade.
    L'autre chose que je voulais mentionner est qu'il y a des préférences et je vous laisse y réfléchir. Il y a de grandes inégalités entre les provinces. Certaines provinces font beaucoup mieux dans beaucoup de domaines. Sur le plan de l'aide sociale, la province de Québec a prévu des fonds pour élargir l'accès à l'aide sociale de différentes façons.
    J'aimerais vous demander — peut-être en commençant avec Rene — de nous parler de l'idée d'augmenter les transferts sociaux. C'est peut-être une question que je ne devrais pas vous poser. Avez-vous une idée du montant qu'il faudrait pour la Nouvelle-Écosse, par exemple? Avez-vous un chiffre précis à l'esprit? Ou d'une façon plus générale, comment pourrions-nous optimiser les transferts sociaux que le gouvernement fédéral verse aux provinces? C'est ce que notre comité essaie de faire, formuler des recommandations pour le gouvernement fédéral.
    Lorsque tout a été divisé et que nous sommes devenus dépendants des transferts sociaux canadiens, tout a changé et les montants de l'aide sociale ont chuté. Avec le recul, je crois que l'on peut dire que la situation a commencé à empirer avec la suppression du transfert pour la santé et du transfert canadien pour les programmes sociaux. Nous savons qu'il faut l'augmenter de façon importante.
    Pour être tout à fait franche, je dois vous avouer que cela fait quelques mois que je n'ai pas regardé les chiffres exacts du TCSPS. Le budget provincial vient d'être rendu public, nous sommes en campagne électorale et nous ne savons pas vraiment ce qui se passe. Il y a beaucoup de mises à jour et de changements dans les ententes conclues entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial.
    J'aimerais revenir à ce Ed disait tout à l'heure au sujet des meures de la pauvreté et de ce que l'on pouvait faire dans les provinces. Je suis également la coauteure du bulletin de notes de la pauvreté chez les enfants en Nouvelle-Écosse. Nous avons passé beaucoup de temps à nous demander quelle méthode de mesures nous devions utiliser. Devrait-elle être le SFR ou le panier de consommation? Devrions-nous uniquement viser la Nouvelle-Écosse ou l'ensemble du Canada?
    Je pense qu'il faut combiner le SFR et le panier de consommation. Le panier de consommation permet de tenir compte de la situation provinciale. La pauvreté n'est pas la même ici qu'au Nunavut; elle est très différente ici de celle qui existe dans ma ville d'origine de Springhill, en Nouvelle-Écosse. Les difficultés ne sont pas les mêmes selon l'endroit où vous vivez. Par exemple, le coût du logement n'est pas très élevé dans ma ville mais si vous tombez malade, vous allez devoir trouver de l'argent pour aller à l'hôpital le plus proche, qui est à Amherst, et qui pourra vous soigner. Ce sont là les défis auxquels font face les gens qui vivent dans la pauvreté.
    Il faut choisir une méthode de mesure qui ne sera pas appliquée de la même façon dans l'ensemble du pays. Nous devons tenir compte des difficultés particulières à chaque province. Lorsque nous parlons de transferts et du TCSPC, nous ne pouvons reprocher au gouvernement fédéral de ne pas faire assez et ensuite reprocher au gouvernement provincial de ne pas faire assez. Comme Ed l'a dit, nous devons vraiment collaborer et cesser d'utiliser les personnes qui vivent dans la pauvreté.
    Il faut augmenter le montant du transfert canadien. Il faut que le gouvernement fédéral verse des transferts qui vont avoir un effet immédiat. Il est important d'amener les deux paliers de gouvernement à la table de négociation, en essayant de ne pas faire de politique, et en collaborant de façon très positive — en ayant à l'esprit les difficultés particulières à chacune des provinces — voilà des éléments essentiels et très importants.
    Je n'ai pas un chiffre exact mais je sais très bien qu'il faudrait modifier considérablement le transfert canadien. C'est une petite partie du revenu dont nous avons besoin pour aider les gens qui vivent dans la pauvreté.
(1000)
    Merci.
    Monsieur Lobb, vous avez cinq minutes.
    Dans pratiquement toutes les séances que nous avons eues depuis que le comité a commencé à étudier la pauvreté, je dirais qu'un thème commun est ressorti de tout cela, celui des logements abordables.
    Claudia, vous avez parlé des personnes les plus vulnérables et des logements que vous leur avez fournis. Vous avez également parlé du logement supervisé. Pour ce qui est du logement que vous fournissez aux plus vulnérables, quel genre de services de soutien offrez-vous? Ces services sont-ils véritablement offerts sur place ou comment est-ce que cela se présente?
    Je voudrais tout d'abord préciser que Community Action on Homelessness ne fournit pas directement de services; nous ne faisons qu'administrer un programme de logement. Nous travaillons avec tous les fournisseurs de services ici dans la ville pour mettre sur pied des programmes appropriés. Il existe ici toute une gamme de services de soutien. Par exemple, le Y d'Halifax a mis sur pied un modèle rentable qui est une grande réussite. Il loue des unités aux femmes. Elles paient le premier mois de loyer et fournissent trois heures de service de soutien par semaine, qui est le soutien minimal. Il y a d'autres modèles, comme celui que j'ai mentionné plus tôt, qui va ouvrir dans quelques semaines. Dans ce modèle, le personnel comprendra un travailleur de soutien à temps plein. Même les responsables des édifices auront certaines connaissances et seront en mesure de fournir un soutien aux locataires s'il y a une urgence la nuit.
    Il y a différents niveaux de soutien. Le soutien nécessaire est parfois de niveau faible et parfois de niveau élevé. Certains clients ont besoin d'un soutien de niveau faible pendant un an. Lorsqu'il s'agit de problèmes de santé mentale, le locataire peut se trouver très rapidement en situation de crise. Des organismes sans but lucratif nous ont fourni des exemples. Par exemple, il arrive qu'un membre de la famille du locataire décède et que celui-ci adopte un comportement maniaque ou suicidaire. Dans ces cas-là, il faut apporter un niveau de soutien élevé. Il y a différents degrés de services de soutien.
(1005)
    Merci.
    Pour poursuivre sur ce sujet, si vous cherchiez à définir ce que serait un modèle de logement idéal, ce que vous venez de décrire serait-il la notion ou le modèle idéal qui permettrait d'aider les gens à ne plus être dans la rue, à s'attaquer à leurs problèmes et à se reprendre en main? Est-ce là le modèle que votre groupe recommanderait?
    Je crois que nous sommes maintenant en mesure de vraiment préciser ce dont nous avons besoin, depuis que nous avons commencé à nous occuper des sans-abri; un ancien itinérant, Wayne MacNaughton, qui est le coprésident de notre comité, a très bien décrit les choses. Il dit que la seule chose que les sans-abri ont en commun est le fait qu'ils n'ont pas de logement. Pour le reste, ce sont des individus qui ont chacun des problèmes différents.
    Il faut donc examiner les chiffres ici. Nous avons examiné le cas de 158 personnes à Halifax et c'est probablement la même chose dans les autres villes. Vingt-cinq pour cent de ces personnes venaient juste d'être expulsées de leur logement. Elles n'avaient pas besoin de services de soutien mais uniquement de mesures permettant d'éviter l'expulsion. Il y en a d'autres. Plus de 60 p. 100 souffrent de problèmes de santé mentale. Un système de soutien de faible niveau pourrait être suffisant pour certains d'entre eux. D'autres ont besoin d'un soutien d'un niveau plus élevé — cela représente peut-être 10 p. 100 de ces personnes. Il faut donc examiner la situation personnelle de tous ces individus.
    Heureusement, le secteur des organismes sans but lucratif connaît les besoins et peut fournir des services adéquats. Il suffit de leur donner les moyens de mettre en oeuvre leurs programmes.
    Madame Ross, vous avez mentionné que vous veniez d'une région rurale de la Nouvelle-Écosse et je viens d'une région assez rurale de l'Ontario. Je me demandais si vous pouviez donner au comité une idée des façons dont vous avez réussi à fournir des logements abordables dans les zones rurales de la Nouvelle-Écosse — les solutions qui ont donné de bons résultats.
    Encore une fois, il faudrait qu'il y ait vraiment davantage de services de soutien dans les zones rurales de la Nouvelle-Écosse. Les difficultés sont tout aussi cruciales et essentielles qu'ailleurs. Le logement, oui bien sûr, est aussi un problème dans les régions rurales de la Nouvelle-Écosse. Tout comme le transport. Il n'y a pas de transport en commun dans la vallée ou dans le comté de Cumberland. Il y a un excellent programme qui commence à offrir un service d'autobus entre diverses villes.
    Avant que je ne commence à travailler pour Stepping Stone, j'ai travaillé dans des centres de femmes pendant un an sur un projet qui m'amenait à me déplacer dans toutes les régions de la province. J'ai rencontré 95 femmes, du Cap-Breton jusqu'à Yarmouth, pour leur parler de soutien du revenu et des façons dont elles voulaient que le système soit transformé, en se fondant sur leur propre situation et sur leurs recommandations.
    J'ai entendu dire beaucoup de choses dans les régions rurales de la Nouvelle-Écosse. On m'a parlé d'une absence totale de programmes de soutien. On m'a parlé de problèmes de transport. On m'a parlé de problèmes de garderie. Cela vaut également pour Halifax mais la situation est encore plus grave à la campagne. On m'a parlé de soins de santé. La pauvreté englobe tout. Comme je l'ai déjà dit, si je me trouvais à Springhill et que j'ai un accident, il faudrait que je trouve le moyen de me faire transporter à l'hôpital lorsque la clinique d'urgence près de chez moi est fermée.
    J'aimerais revenir sur le fait qu'il faut examiner les différents problèmes que pose la géographie de notre province, en gardant à l'esprit la nature des problèmes qui se posent dans les centres urbains et ceux qui se posent dans les régions rurales. Il faut élaborer une stratégie qui va donner des résultats pour tous les habitants de la Nouvelle-Écosse, parce qu'il y a beaucoup de gens qui vivent dans la pauvreté dans les zones rurales de la Nouvelle-Écosse à l'heure actuelle et qui se sentent isolés et éloignés. Je connais des femmes qui sont obligées de travailler sans avoir accès à des services de garderie adéquats, à cause de politiques très strictes en matière de transition de l'aide sociale au monde du travail, et qui passent des heures et des heures en autobus pour se rendre d'une ville à l'autre et qui ne voient pratiquement plus leurs enfants. C'est pourquoi je pense qu'il faut examiner toutes ces questions, en particulier pour les gens qui vivent dans la pauvreté dans les régions rurales de la Nouvelle-Écosse.
(1010)
    Nous allons maintenant revenir à Mme Beaudin pour cinq minutes.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Avant d'être députée, j'ai travaillé pendant six ans pour le Centre 1,2,3 GO! au Québec, qui intervenait sur le terrain auprès de la petite enfance. Pratiquement aucune journée ne se terminait sans que je me dise que si j'avais eu plus de moyens, j'aurais pu en faire beaucoup plus.
    Vous dites-vous souvent la même chose? Si vous aviez plus de ressources, pourriez-vous en faire plus que ce que vous faites en ce moment?

[Traduction]

    Nous nous parlons tous les jours de toutes les choses que nous pourrions faire. Je crois qu 'il est important dans notre genre de travail de réfléchir à nos succès et à tout ce que nous avons réussi à faire. Je peux vous dire que nous n'aimons pas beaucoup, c'est le moins que je puisse dire, que les gouvernements viennent nous dire que nous devrions mieux équilibrer notre budget. Vraiment? Nous avons 115 clients, un personnel restreint et 150 000 $ par an. Les problèmes s'accumulent — non pas d'une année à l'autre mais d'une semaine à l'autre. Nous savons que, si nous avions davantage de ressources, nous pourrions faire davantage et nous ferions davantage. À l'heure actuelle, nous faisons tout ce que nous pouvons et il est essentiel pour nous d'avoir l'appui du gouvernement fédéral et que celui-ci soit animé par la volonté politique de nous aider à aider d'autres personnes. Nous avons le sentiment que quelqu'un a placé ses mains sur nos épaules et essaie de nous écraser. Le poids est de plus en plus lourd. Nous passons également de plus en plus de temps à remplir des demandes au lieu de mettre en oeuvre les programmes et de fournir le soutien que nous sommes capables d'offrir. Nous nous dépêchons pour présenter des propositions, des bonnes pratiques et des plans d'évaluation. Bien sûr, il faut rendre des comptes et nous rendons des comptes. Nous rendons des comptes aux autres et nous pensons que nous devrions également rendre des comptes aux contribuables canadiens — tout comme nous pensons que les gouvernements fédéral et provinciaux devraient être tenus de rendre des comptes. Mais nous devons cesser d'essayer de faire concurrence à tous les autres, et de remplir des demandes un jour sur deux. Nous passons des heures à préparer des demandes pour obtenir peut-être 3 000 $.
    Pour répondre à votre question, je dirais que nous savons que nous pourrions faire davantage avec plus de ressources.

[Français]

    La Nouvelle-Écosse vient d'établir une stratégie de lutte contre la pauvreté. Il y en une au Québec et une autre à Terre-Neuve-et-Labrador, ce qui amène les provinces à développer des initiatives de partenariat très locales.
    Croyez-vous que le gouvernement fédéral devrait investir dans ces initiatives et les financer de façon récurrente?

[Traduction]

    Je dirais oui, très clairement. Notre province ne fait pas preuve de leadership dans sa lutte contre la pauvreté, en particulier pour aider les sans-abri. Les ententes bilatérales arrivent au compte-gouttes, tout comme le nouveau plan de relance de 128 millions de dollars. Cela permettra de combler quelques lacunes et ces fonds seront utilisés pour toutes les choses qui n'ont pas été faites depuis l'abolition de la stratégie nationale en matière de logement dans les années 1990. Nous ferons beaucoup de rénovations. Il y aura un marché pour les logements abordables. Mais il n'y a rien pour les clients dont nous parlons — les bénéficiaires d'aide sociale, les familles à faible revenu, et les gens qui sont déjà dans les foyers. Aucune de ces sommes ne permettra vraiment de résoudre ce problème. Tout ce qui nous reste est une stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance — un peu plus de 3 millions de dollars et une stratégie qui n'a pas été modifiée depuis dix ans.
    Nous invitons le gouvernement fédéral à poursuivre son action, à jouer un rôle de leader, à fixer des conditions et des normes sur la façon d'offrir ces programmes. Il est important de savoir ce qui se passe sur le terrain. Nous sommes confrontés à cette situation sur une base quotidienne et il y a des mères qui nous disent que tout va bien parce qu'elles ont quelques dîners Kraft dans leurs armoires. C'est ce que j'entends et cela me brise le coeur. Suis-je vraiment au Canada? Il ne s'agit pas de faire d'autres rapports et de continuer à parler. Il faut se demander si nous voulons vraiment mettre fin à la pauvreté, si nous voulons être différents.
    En Europe, c'est une philosophie. Le gouvernement prend en charge tous ses citoyens, il veut qu'ils soient en bonne santé, bien nourris et bien logés. C'est là sa priorité. Mais ici nous parlons de technologie, d'emploi et de tous les autres facteurs. Mais si nos citoyens ne sont pas pris en charge, alors il n'y a rien qui fonctionnera.
(1015)
    Étant donné que nous sommes arrivés à la fin de notre séance, je vais vous donner quelques minutes et je donnerai ensuite quelques minutes au NPD. Nous allons dépasser l'horaire mais nous disposons d'une certaine latitude lorsque nous sommes en déplacement et nous pouvons faire ce genre de choses.
    J'aimerais simplement faire quelques remarques.
    Sans faire de politique, je sais que ces dernières années, le transfert canadien en matière de programmes sociaux a été réduit de 25 milliards de dollars. Bien sûr, l'infrastructure en souffre mais ce sont surtout les plus vulnérables qui ressentent le contrecoup d'une telle mesure. Je sais que nous avons parlé de l'augmentation du transfert canadien pour les programmes sociaux — en particulier d'une augmentation de 40 p. 100 pour les études postsecondaires, ce qui est important.
    Cela dit, on me dit souvent que les organismes passent beaucoup de temps à chercher des subventions, à préparer des demandes de subventions. Nous constatons que ceux qui savent bien préparer les demandes de subventions semblent réussir et que ceux qui ne sont pas aussi bons ne les obtiennent pas, du moins pas autant. Nous dépensons beaucoup d'énergie pour chercher des subventions. Une des raisons est que nous voulons être en mesure de rendre des comptes au sujet de l'argent des contribuables. Je pense toutefois que nous avons peut-être été un peu trop loin dans une direction et que nous obligeons des groupes qui sont là depuis des années et des années, qui font du bon travail, et à essayer d'obtenir toutes ces subventions pour survivre. Lorsqu'on regarde les calculs à effectuer et les formulaires de demande, on se dit qu'il faut presque embaucher quelqu'un pour faire ce genre de choses.
    Je vous comprends donc tout à fait sur ce point et je n'aime pas ce que je vois, mais je vous pose la question: que peut-on faire? Comment régler ce problème? Ne parlons pas d'argent. C'est la façon d'utiliser les fonds qui vous ont été accordés et comment vous faites savoir à ces gens qu'ils vont survivre et vont pouvoir fonctionner pendant des années sans avoir à présenter constamment des demandes.
    Est-ce que l'un d'entre vous veut répondre à cette question? Des suggestions? Des propositions concrètes?
    Je n'ai pas réussi à m'arrêter suffisamment longtemps de demander des subventions pour réfléchir à cette question. Tout ce que je peux dire, c'est que j'ai vu que nous étions en récession et que je sais que la situation va empirer parce que les dons que nous recevons des habitants de la Nouvelle-Écosse vont diminuer. Ils ont déjà diminué. Cela a déjà commencé et cela va se poursuivre. Comme je l'ai dit, nous avons cherché de très petites sommes et nous rendons compte de tout l'argent qui nous est remis, parce que nous passons autant de temps à rédiger des propositions et des demandes de subventions qu'à préparer les rapports intérimaires, les rapports finaux, les réunions et ce genre de choses. Comme vous l'avez dit, dans certains cas, il y a d'autres organismes sans but lucratif qui embauchent des gens pour faire ce travail, ou alors il faut s'en remettre à des bénévoles, mais...
    Le système n'est pas parfait. Avez-vous des suggestions à faire sur les façons d'améliorer le système pour l'avenir ou est-ce finalement un mal nécessaire avec lequel il va falloir apprendre à vivre?
(1020)
    C'est dans la nature des organismes sans but lucratif mais jusqu'à un certain point seulement. Encore une fois, je constate que depuis quelques années les gens passent de plus en plus de temps à demander ces subventions parce que notre financement de base a constamment diminué. Cela concerne à la fois le palier provincial et le palier fédéral. Il faut donc consacrer davantage de temps à cette activité, parce que nous ne voulons pas fermer nos portes et que nous voulons continuer à offrir ces programmes de soutien et ces services de première ligne. Sans doute, si notre financement n'était pas au même niveau qu'il était il y a dix ans, notre financement de base de la province, nous ne préparerions pas autant de demandes de subventions. Encore une fois, cela concerne des aspects plus généraux, comme l'augmentation du transfert canadien en matière de programmes sociaux et une collaboration accrue entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Il faut donc agir également sur ces aspects plus généraux.
    Merci.
    Nous allons maintenant terminer.
    Megan, prenez donc quelques minutes pour conclure.
    Merci.
    J'ai quelques brèves questions à poser à Claudia et il suffit de répondre par oui ou non. Je tiens à dissiper l'idée que nous n'avons pas suffisamment d'argent pour financer quelque chose comme une stratégie de réduction de la pauvreté. Je pense qu'il s'agit plutôt de choix politiques. J'ai donc une brève question à vous poser. Nous avons perdu 6 milliards de dollars en réduisant de 1 p. 100 la TPS. Est-ce qu'une somme de 6 milliards de dollars réduirait le problème du logement au Canada?
    Cela le réglerait.
    Et cette réduction d'impôt de 250 milliards de dollars pour les grandes sociétés? Si nous utilisions plutôt cet argent pour mettre en oeuvre la stratégie de réduction de la pauvreté.
    Ce serait...
    Merci.
    Rene, j'aimerais vous poser également une brève question. Vous avez mentionné que certaines solutions passaient par le transport, l'éducation de la petite enfance, etc. Lorsque nous avons travaillé localement ensemble sur la stratégie de réduction de la pauvreté, nous avons beaucoup parlé de la nécessité de briser l'isolement. Il ne s'agit pas du ministère des services communautaires, il ne s'agit pas du comité des ressources humaines.
    En fait, monsieur Lobb, je sais que je ne suis pas en train de témoigner mais j'aimerais vous dire que le taux de pauvreté dans les zones rurales de la Nouvelle-Écosse est très élevé. Vous avez posé une question à ce sujet. En fait, le nombre des familles à faible revenu qui possèdent une maison est très élevé dans les zones rurales de cette province, ce qui est un aspect assez unique.
    Mais si l'on pense à ces secteurs isolés que sont le transport, l'éducation, etc., pensez-vous, Rene, qu'il faudrait regarder le Code criminel et voir comment le Code criminel criminalise les pauvres? Est-ce qu'une stratégie de réduction de la pauvreté ne devrait pas examiner ces textes législatifs?
    Oui, il faut bien sûr le faire. La criminalisation de la pauvreté est une grande source d'inquiétude en Nouvelle-Écosse. Il y a de nouvelles lois et politiques provinciales qui sont très sévères pour ceux qui mendient et qui lavent les vitres des voitures comme cela s'est fait à Vancouver.
    Je prépare des déclarations d'impôt tous les ans pour nos clients de Stepping Stone. Il y a quelques mois, j'ai fait une déclaration d'impôt pour une personne qui n'avait pas fait le commerce du sexe depuis très longtemps — depuis plusieurs années. Elle a obtenu un remboursement. Nous étions tellement contentes. C'était le premier remboursement que je recevais après toutes les déclarations d'impôt que j'avais remplies. Ce montant a été récupéré par la province. Il était de 140 $. Le montant a été récupéré par la province à cause d'une amende de prostitution qui lui avait été imposée dix ans auparavant.
    Je prépare les déclarations d'impôt des travailleuses du sexe, les travailleuses actuelles et anciennes, et leur revenu total pour l'année... J'en ai fait une il y a deux semaines et le revenu total pour l'année était de 948 $. Il y a parfois des gens qui disent: « Mais comment les gens peuvent faire ce genre de choses? » ou « Les choses que les gens font pour survivre. » Je ne peux m'imaginer vivre avec 948 $.
    Nous travaillons avec des gens pour qui dormir dans la rue est devenu tellement insupportable qu'une peine de prison leur paraît agréable. Lorsque j'entends des gens dire: « Très bien, envoyez-moi en prison parce que j'ai besoin de me nettoyer parce qu'il n'y a pas de place dans les cliniques de désintoxication; envoyez-moi en prison parce que j'en ai assez de dormir dans la rue; mettez-moi dans une cellule pendant quelques mois parce que j'ai besoin de faire un break avec ma vie et mon existence » — je trouve que c'est une situation assez triste. C'est la raison pour laquelle les choses sont un peu tranquilles chez nous à Stepping Stone. Nous ne sommes pas aussi occupés que les autres mois, non pas parce que les bénéficiaires du programme s'en sortent bien, mais parce qu'il y en a beaucoup qui sont en prison à l'heure actuelle parce qu'on a criminalisé leurs activités. Mais à cause de la pauvreté, lorsqu'ils vont sortir, le cycle va recommencer.
    Merci d'avoir posé cette question, Megan.
    Encore une fois, je remercie les témoins d'être venus aujourd'hui, non seulement parce qu'ils sont venus ici nous parler mais pour tout le travail qu'ils font sur le terrain. Merci encore.
    Je lève la séance. Nous reprendrons dans environ cinq minutes pour entendre le groupe de témoins suivant.
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