HUMA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 30 novembre 2009
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons l'étude de la contribution fédérale à la réduction de la pauvreté au Canada.
Je tiens à remercier les témoins qui, malgré leur emploi du temps chargé, ont pris la peine de comparaître devant nous aujourd'hui. Peut-être ne savez-vous pas encore que nous menons cette étude partout au pays. L'année dernière, avant la pause de l'été, nous sommes allés sur la côte Est. Nous sommes heureux de nous trouver maintenant dans l'Ouest et de parler aux gens d'ici pour pouvoir ensuite faire des recommandations au gouvernement. Je vous remercie encore une fois de votre présence aujourd'hui.
Lorsque Mme Small arrivera, nous lui donnerons l'occasion de nous lire certains de ses commentaires.
Monsieur Stewart, je commencerai par vous. Chaque témoin a sept minutes pour présenter sa déclaration, après quoi tous pourront poser des questions.
Si vous avez des mémoires qui ne sont pas traduits, nous nous assurerons de les transmettre aux membres en temps voulu. J'en resterai là.
Nous aurons probablement le temps d'effectuer une série de questions. S'il reste du temps, nous continuerons jusqu'à 10 heures.
Monsieur Stewart, je vous remercie encore une fois de votre présence. Vous êtes membre de l'Aboriginal Homelessness Steering Committee. La parole est à vous. Vous avez sept minutes.
Bonjour à tous et merci de votre invitation.
Je tiens tout d'abord à saluer les nations Squamish, Musqueam et Tsleil-Waututh sur le territoire traditionnel desquelles cette réunion a lieu.
En nisga'a, je m'appelle Luugiyoo, du clan de Daxaan, village de Gingolx. Je suis le président de l'Aboriginal Homeless Steering Committee de la région métropolitaine de Vancouver, et président de la National Aboriginal Housing Association.
Au nom de l'AHSC et de la NAHA, je tiens à remercier les membres du comité de prendre le temps d'écouter les Canadiens autochtones parler des défis auxquels ils doivent faire face partout au pays pour réduire la pauvreté, dans le but ultime de l'éliminer.
Cependant, le temps est venu de passer à l'action. Ce sujet a été étudié en long et en large pendant des décennies. Vous-mêmes avez écouté des spécialistes et des membres des collectivités témoigner pendant des centaines d'heures cette année et l'année dernière, et vous avez compulsé des dizaines —voire des centaines — d'études sur la pauvreté. Il est donc temps d'agir. Votre tâche est immense. Nous comptons sur chacun de vous pour plaider en faveur d'une loi visant à éliminer la pauvreté au pays, surtout parmi les collectivités autochtones, où l'on estime que la pauvreté infantile s'élève à 50 p. 100.
La pauvreté, tout comme le problème des sans-abri, est une création de l'homme. C'est donc à l'homme d'y apporter une solution. Tous les ordres de gouvernement doivent travailler de concert avec la société civile pour faire de cette question une priorité et veiller à ce que la classe politique soit déterminée à éradiquer la pauvreté.
Je voudrais pouvoir dire des choses utiles, mais dans le fond, je me méfie du gouvernement en place, compte tenu de son bilan, et surtout du fait qu'il a voté contre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones le jeudi 13 septembre 2007. En votant contre cette déclaration, le gouvernement a voté contre les Autochtones du pays. Alors, que dois-je en penser?
Je suis sûr que vous avez entendu dire que plus de 150 000 enfants vivent dans la pauvreté en Colombie-Britannique. Il s'agit de 13 p. 100, le pourcentage le plus élevé de toutes les provinces. Et, pour la sixième année consécutive, ce pourcentage est plus élevé que la moyenne nationale, qui se situe à 9,5 p. 100. On compte presque 700 000 enfants qui vivent actuellement dans la pauvreté, ici même, au Canada. Les enfants âgés de moins de 18 ans représentent 37 p. 100 des utilisateurs des banques alimentaires. Le quart des enfants des premières nations vivent dans la pauvreté. Près de la moitié des enfants des premières nations hors réserve âgés de moins de six ans vivent dans des familles à faible revenu, comparativement à 18 p. 100 des enfants qui ne sont pas des Autochtones.
En tant qu'architecte, j'éprouve de la frustration à travailler dans les collectivités des premières nations où il arrive parfois que 70 p. 100 des gens vivent de l'aide sociale. Et le gouvernement fédéral veut faire progresser l'accès à la propriété individuelle dans ces collectivités, qui manquent de ressources. Je suis aussi défenseur du droit au logement. À ce titre, que dois-je dire à un père qui vit avec trois enfants dans un abri pour lui annoncer qu'il n'y a pas d'appartement disponible à la fin de son séjour de 30 jours?
Il n'y a pas assez de logements abordables qui sont construits. Comment se fait-il que dans ce pays, cette province et cette ville, le seul refuge temporaire pour les Autochtones adultes sans abri soit rempli à pleine capacité nuit après nuit, et qu'il faille renvoyer des dizaines de personnes dans la rue? Les Autochtones n'ont pas accès aux mêmes ressources en capital que les autres. Pourtant, l'année dernière, dans le cadre des programmes de service, les membres de l'AHSC ont fourni 50 000 nuitées et plus de 40 000 repas, ils ont servi 2 000 familles dans les banques alimentaires et ils ont donné à plus de 9 000 personnes des services qui leur ont permis de délaisser la rue.
Je ne me porterai pas à la défense des organisations internationales, qui ont placé le Canada parmi les meilleurs pays du monde dans l'Indice de développement humain des Nations Unies — le Canada est d'ailleurs passé du sixième au quatrième rang cette année. Malgré ce classement, on compte 450 banques alimentaires au pays, et le nombre d'Autochtones sans abri ne cesse d'augmenter. Par exemple, il y a eu une augmentation de 34 p. 100 de 2005 à 2008, année du dernier dénombrement dans la région métropolitaine de Vancouver. Cette hausse est attribuable à la croissance du chômage, au manque de logements abordables, à l'absence d'un salaire minimal vital et aux politiques d'aide sociale inadéquates dans cette province.
Vous voulez savoir quoi faire avec la pauvreté. Vous voulez vraiment le savoir? La réponse est la suivante: faites votre travail. Agissez comme devrait le faire le gouvernement fédéral. Gérez les affaires comme le ferait un pays qui s'occupe de ses citoyens. Donnez suite aux excuses que le premier ministre a présentées aux survivants des pensionnats. Promulguez une loi en faveur d'une stratégie de réduction de la pauvreté chez les Autochtones.
Il y a au pays plus de 150 000 organismes à but non lucratif qui font le travail du gouvernement. Pourquoi? Cessez de repasser vos responsabilités aux provinces et aux territoires. Sinon, tout ce que nous ferons, c'est léguer à nos petits-enfants des problèmes créés par les politiques fédérales et le manque d'investissement de la part du gouvernement fédéral.
Dans la collectivité autochtone, par exemple, il y a de nombreux cas d'emprisonnement des adultes: on en compte 79 p. 100 en Saskatchewan et 71 p. 100 au Manitoba. Du côté des femmes incarcérées, c'est 87 p. 100 en Saskatchewan et 83 p. 100 au Manitoba et au Yukon. Voici d'autres chiffres pour les Autochtones: 31 p. 100 des jeunes se trouvent en garde en milieu fermé, on recense 35 p. 100 de sans-abri en Colombie-Britannique, 33 p. 100 de cas de violence familiale; 43 p. 100 des Autochtones n'ont pas suivi d'enseignement secondaire, 6 p. 100 seulement des Autochtones ont un diplôme universitaire, comparativement à 26 p. 100 des autres personnes, 40 p. 100 des enfants en familles d'accueil sont des enfants autochtones — au Manitoba, ce chiffre grimpe à 68 p. 100. On observe des statistiques du même ordre dans les collectivités autochtones de tout le pays, qu'il s'agisse de dépendances, du chômage, de l'analphabétisme ou du VIH-sida.
Toute stratégie visant à réduire la pauvreté chez les Autochtones doit être globale. Il faut également qu'elle tienne compte de la réalité et qu'elle englobe des services et de l'appui dans les réserves et hors réserves. Il faut aussi que les Autochtones participent à la conception, à la structure et au fonctionnement de cette stratégie nationale. Il faut qu'elle prévoie des logements abordables et adéquats conçus de manière à respecter les différentes cultures. Il faut qu'elle vise la sécurité du revenu, les transferts financiers, c'est-à-dire un salaire minimum vital et de l'appui pour les travailleurs. En 2004, seulement 38 p. 100 des Canadiens au chômage avaient accès à l'assurance-emploi, ce qui veut dire que 62 p. 100 n'y avaient pas droit.
Il faut aussi régler la question de l'enseignement et de la formation, auxquels les collectivités autochtones ont difficilement accès.
Il faut penser à la prise en charge des enfants et financer d'autres places.
Il ne faut pas oublier les occasions d'emploi. Il faut remettre les transferts financiers directement aux collectivités en respectant les priorités de chacune d'elles; il faut nommer un ministre qui sera chargé de réduire la pauvreté chez les Autochtones partout au pays et ne pas laisser cette question entre les mains du ministère des Affaires indiennes, qui n'a pas les moyens de régler tous les aspects qui touchent les Autochtones. Enfin, il faut faire en sorte que les provinces et les territoires aient leur propre stratégie de réduction de la pauvreté chez les Autochtones, adaptée à leur champ de compétence.
La Colombie-Britannique doit mettre en oeuvre un plan législatif de réduction de la pauvreté comprenant la nomination d'un ministre chargé de réduire la pauvreté dans la province. La stratégie de réduction de la pauvreté chez les Autochtones devrait comprendre une cible de réduction du nombre d'enfants vivant dans la pauvreté — je sais que vous connaissez ce chiffre — de 25 p. 100 en cinq ans, renouvelable tous les cinq ans pendant 20 ans.
Pour terminer, je voudrais vous lire une citation de Robert Rainer, directeur exécutif de Canada sans pauvreté:
La Déclaration universelle des droits de l'homme et la Charte canadienne des droits et libertés garantissent toutes deux le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité des personnes. Mais en général, les pauvres vivent moins longtemps et ont moins de liberté et de sécurité que les riches. Il est donc clair que si nous prévenons la pauvreté, des millions de Canadiens seront en meilleure santé et vivront plus longtemps. Leur droit à la vie, et donc à la liberté et à la sécurité, sera mieux respecté. De plus, en traitant la pauvreté comme une question de droits de la personne et en la combattant efficacement, les gouvernements, de concert avec la société civile, contribueront à réduire les coûts liés au système de santé. C'est entre autres en plaçant la pauvreté au coeur des politiques publiques que l'on pourra transformer la société canadienne.
[Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.]
Merci.
Merci beaucoup, monsieur Stewart.
Nous passons maintenant à M. Lawson, du First Nations Environmental Network of Canada. Monsieur Lawson, la parole est à vous. Vous avez sept minutes.
Je viens vous parler aujourd'hui à titre de coordonnateur national du First Nations Environmental Network of Canada. Mon mandat est de défendre les intérêts des gens et de leur territoire. Ma famille vient de Shoal Lake, près du lac des Bois, en territoire Nishnawbe. D'ailleurs, je sais que nous sommes ici sur le territoire des Musqueam. Je suis très heureux d'être parmi vous.
J'ai moi-même vécu la pauvreté, et je peux vous dire que c'est une expérience extrêmement difficile. Mais ce que j'ai vu au cours de mes voyages partout au pays dans les dernières années témoigne d'une pauvreté beaucoup plus profonde. Les gens que je rencontre chaque jour ont des conditions de vie... Lorsqu'on n'a pas accès à de l'eau saine, lorsque l'eau transporte des produits chimiques et des substances cancérigènes et lorsque notre famille se meurt — les aînés autant que les enfants —, il n'y a aucun bien matériel qui puisse compenser; rien ne peut compenser le fait que le sol et l'air sont pollués. Les habitants des collectivités auxquelles je fais référence sont comme des canaris dans une mine de charbon. Ils vivent à deux pas des entreprises d'exploitation des ressources. Nous en subirons tous les conséquences un jour, comme peuple et comme êtres humains, mais il semble que ce soient toujours les mêmes qui sont touchés les premiers, et aussi les plus durement.
C'est malheureux, et comme je le disais plus tôt, aucune richesse matérielle ne peut compenser. Lorsqu'on songe à ce qui fait vraiment de nous des êtres humains, ce qui est le plus important, c'est nos émotions et nos sentiments. Nous sommes tous d'accord là-dessus, et quand nous arrivons à la fin de notre vie, nous songeons à notre passé et nous réalisons ce qui compte vraiment.
Ce qu'on observe à l'échelle du pays, c'est que le gouvernement et l'industrie, et malheureusement, on peut maintenant inclure aussi les groupes environnementaux, ont pour objectif de faciliter l'exploitation des ressources. Lorsqu'on a le choix entre la pauvreté et un emploi très payant, il est tentant d'accepter l'emploi et de prendre l'argent, même si l'on sait que le territoire sera dévasté et qu'il y aura des conséquences néfastes pour l'avenir de nos descendants. Mais c'est un choix très difficile à faire. Pas plus tard qu'hier, je parlais justement à un jeune homme qui a travaillé pendant 10 ans comme camionneur dans une entreprise d'exploitation de sables bitumineux, à un très bon salaire. Il fait maintenant tout ce qu'il peut pour déloger cette industrie de son territoire, parce qu'il voit les décès et les cancers qui en découlent. Un médecin de sa collectivité a fait l'objet de fausses accusations, sous huit chefs d'accusation différents. Il a finalement été déclaré innocent, après plusieurs années. Le dernier chef d'accusation vient tout juste d'être retiré le mois dernier. Mais il a tout de même dû quitter la collectivité. C'est l'industrie qui a porté des accusations contre lui parce qu'il avait révélé que les gens étaient atteints de formes rares du cancer et en mouraient. J'ai rencontré certains de ces jeunes gens, qui sont au début de la vingtaine et qui souffrent de cancers rares. Leur collectivité est située en aval des entreprises d'exploitation.
La pauvreté n'est pas seulement un manque de moyens financiers, et comme je le disais plus tôt, on l'observe partout au pays. Toutefois, je suis heureux de voir qu'il y a des gens dans les collectivités, autant des aînés que des jeunes, qui parlent haut et fort. Ils en subissent toutefois les conséquences, puisque ce sont des élus. Tous les processus qui ont été instaurés par le gouvernement pour les aider leur nuisent à présent. Même les gens de leur propre collectivité se retournent contre eux. Presque partout, les gens sont divisés. Cette position est appuyée par le gouvernement et par l'industrie, et aussi par de grandes fondations qui investissent d'importantes sommes et qui se présentent comme des organisations environnementales. Il y a beaucoup d'argent qui circule, mais tout cela entraîne une pauvreté à long terme que nous aurons bien du mal à éliminer, puisqu'il faut beaucoup de temps pour dépolluer les milieux touchés et se relever des tragédies qui ont eu lieu.
C'est la préoccupation que je voulais soulever, car c'est ce que j'observe constamment. C'est très difficile. Le gouvernement doit réfléchir sérieusement à sa position et à ses agissements. Si j'ai réussi par mon intervention à attirer l'attention sur cette question, je vous remercie de l'occasion que vous m'avez donnée. C'est tout ce que je peux faire, mais j'espère que vous prendrez mon message au sérieux et que vous y réfléchirez personnellement, car nous serons tous touchés un jour ou l'autre de toute façon.
Merci beaucoup de votre attention.
Merci, monsieur Lawson. J'ai apprécié votre exposé.
Passons maintenant à Mme Small, de la Vancouver Aboriginal Friendship Centre Society.
Madame Small, je vous souhaite la bienvenue. Vous disposez aussi de sept minutes pour faire votre déclaration. Vous pouvez commencer quand vous serez prête. Merci.
Je vous remercie. Bonjour.
Je m'appelle Sherry Small. Mon nom Nisga'a est Anslutiksgah, qui signifie la force morale et spirituelle.
Vous aurez compris que je suis d'origine Nisga'a. Je suis née et j'ai grandi dans cette collectivité. Mais j'ai choisi de vivre en ville. Je suis mariée à un homme noir qui vient des États-Unis, alors je sais très bien ce qu'est l'unité. C'est une valeur avec laquelle j'ai grandi et que j'applique dans ma vie de tous les jours.
J'aimerais tout d'abord vous remercier pour l'invitation, que j'ai reçue vendredi après-midi. Je suis donc venue à court préavis, et vous constaterez que je n'ai apporté avec moi que quelques notes.
J'aimerais présenter certaines réflexions à propos du Vancouver Aboriginal Friendship Centre. Tout d'abord, pourquoi existe-t-il une communauté autochtone en milieu urbain? C'est en raison de la colonisation. Quelles sont les conséquences de la colonisation? La pauvreté chez les Autochtones. Comment ce problème a-t-il pris naissance? Il découle de la ségrégation des familles, comme l'ont mentionné d'autres témoins. La pauvreté ne se limite pas à l'aspect financier. De plus, à cause de la Loi sur les Indiens, nous sommes séparés de notre famille, et nombreux sont ceux au centre autochtone en milieu urbain de Vancouver qui ne sont pas là par choix. Ils y sont à cause des diverses mesures qui les ont dépossédés de leurs droits. S'ils retournaient chez eux, s'ils avaient le droit de le faire, ils ne pourraient pas s'adapter, parce que la ségrégation dure depuis trop longtemps. D'une part, les gens ne les connaissent pas autant qu'ils le devraient, et d'autre part, le territoire est trop restreint. Il y a d'autres aspects à considérer: par exemple, on nous a appris durant notre enfance à vivre en harmonie avec la terre, une terre qui pouvait nous offrir toutes les ressources naturelles nécessaires à notre subsistance. Nous n'étions pas destinés à profiter des ressources de la terre à outrance sans vivre en harmonie avec elle. Nos ressources sont donc très limitées.
Au Aboriginal Friendship Centre, nous offrons des services de garde et des activités sportives, récréatives et culturelles. Par exemple, nous organisons des soirées de chant, de danse et de percussion typiques des régions de l'Est ou de l'Ouest, selon le cas. Il y a également les Alcooliques Anonymes et les Narcotiques Anonymes. Des intervenants en santé mentale montrent aussi aux gens comment prendre soin d'eux-mêmes. Il y a également un représentant des Autochtones en milieu urbain, qui fait ce qu'il peut dans les circonstances, étant donné que le poste est prévu par la loi dans la province afin de fournir des services à l'enfance et aux familles. Il faut comprendre que lorsqu'on est d'origine autochtone mais qu'on ne satisfait pas aux exigences de la Loi sur les Indiens — c'est-à-dire lorsqu'on ne répond pas à la définition d'Indien qui y figure — et qu'on ne fait donc pas partie d'une bande, on n'existe nulle part. Les représentants des Autochtones en milieu urbain sont donc autochtones par les liens du sang, mais n'ont aucun territoire et ont des enfants dont ils doivent s'occuper, avec tout ce que ça comporte.
Nous avons également un refuge pour les Autochtones en milieu urbain, qui fonctionne de façon très différente. Nous sommes d'ailleurs très chanceux d'avoir reçu une prolongation du financement pour le refuge. Nous ne le considérons pas comme un refuge pour sans-abri. Nous aidons nos travailleurs à se préparer pour accueillir les gens. Tous nos services sont offerts dans la dignité et le respect. Au cours des trois dernières années, le refuge a fonctionné à merveille, à part pour ce qui est du financement. Nous cherchons à économiser par tous les moyens possibles. Sur ce plan, nous pouvons donc dire que nous souffrons de pauvreté.
La population autochtone en milieu urbain tente de participer à l'économie de plus en plus, mais il reste du chemin à faire — vous le constaterez dans les statistiques —, notamment sur le plan de l'éducation, de l'emploi, du logement, de la garde d'enfants et des soins de santé, particulièrement en santé mentale. Petit à petit, nous voyons des améliorations, mais si nous obtenons trop de succès, le financement nous est retiré et nous n'avons plus d'argent pour fonctionner de la façon dont nous voudrions le faire. C'est ce qui fait en sorte que nos programmes et nos services sont uniques. C'est parce qu'ils sont fondés d'abord et avant tout sur les principes et les valeurs des Autochtones.
Sur ce, je vous remercie beaucoup de votre temps et de votre écoute. J'espère que j'ai pu vous faire voir une définition différente de la pauvreté.
Merci, madame Small. Votre intervention a tout juste dépassé cinq minutes, alors nous sommes dans les temps.
Ne soyez pas désolée. Merci beaucoup.
Nous allons maintenant donner la parole au dernier témoin du groupe. Ce matin, nous accueillons Mme Elsie Dean, de Women Elders in Action.
Bienvenue, madame Dean. La parole est à vous et vous disposez de sept minutes pour votre intervention.
Mon nom est Elsie Dean et je suis membre de Women Elders in Action. Je vous remercie de nous avoir invités à vous rencontrer aujourd'hui et à vous faire part de nos observations et recommandations pour diminuer la pauvreté au Canada.
Women Elders in Action est une organisation de femmes âgées bénévoles de la Colombie-Britannique qui a pour but de donner une voix aux femmes âgées afin qu'elles fassent connaître les problèmes socioéconomiques et d'injustice auxquels elles sont confrontées et de sensibiliser la population à l'amélioration de leur situation. Dans le cadre de notre travail, nous sommes à même de constater l'augmentation d'une certaine dépendance vis-à-vis des banques alimentaires, la multiplication des sans-abri et l'augmentation du nombre de personnes mal logées qui vivent dans la rue. Nous sommes également au courant de la situation précaire de nombreuses femmes âgées qui doivent consacrer une trop grande partie de leur revenu au loyer. En fait, nous concentrons nos efforts sur les femmes célibataires âgées de 50 ans et plus parce qu'elles sont beaucoup trop nombreuses dans ce groupe d'âge à être sans emploi ou à occuper un emploi peu rémunéré, ce qui les mène tout droit à une situation de pauvreté au cours de leurs dernières années de travail, une situation qui perdure dans leurs années de retraite.
Nous constatons une tendance bien marquée, attestée par de nombreux documents sur le sujet, à savoir que le taux de pauvreté des femmes est supérieur à celui des hommes. En effet, les femmes qui se situent dans cette tranche d'âge souffrent de pauvreté, résultat de toute une vie d'iniquité. Alors nous recommandons au gouvernement de renouveler son engagement vis-à-vis de l'égalité et d'appliquer les constatations d'une analyse sexospécifique comparative à toutes ses politiques macro-économiques et ses budgets, et d'affecter des ressources aux programmes qui peuvent faire une vraie différence.
Les femmes sont frappées de façon disproportionnée par la pauvreté et la dépendance vis-à-vis des programmes sociaux, y compris l'aide sociale et les services sociaux, et de nombreux documents le prouvent. La législation et les transferts qui servent à mettre sur pied des programmes sociaux et à déterminer le niveau de financement à y affecter sont des véhicules concrets indispensables pour améliorer les droits des femmes. Nous recommandons donc la revitalisation de l'union sociale canadienne et un nouvel engagement de la part des gouvernements à oeuvrer à la mise sur pied et au maintien de programmes et de services sociaux pour permettre au Canada de respecter ses engagements en matière de droits de la personne vis-à-vis de tous et toutes. D'ailleurs, il faudrait accorder, à ce moment même, une attention particulière au besoin de fournir des maisons à des prix abordables ainsi que des services publics adéquats. Nous constatons que des groupes précis de femmes sont aux prises avec des situations encore plus difficiles. Nous reconnaissons d'ailleurs que les femmes autochtones sont les plus pauvres de tous les pauvres au Canada. Nous recommandons au gouvernement de veiller particulièrement à ce que les droits de la personne des peuples autochtones soient pris en compte et respectés, plus précisément les besoins des femmes, notamment en augmentant le nombre des programmes d'aide sociale, de logement et de santé ainsi que le financement et la prestation d'aide aux nations autochtones pour qu'elles puissent promouvoir leurs propres sources de richesse et de prospérité.
Nous exhortons le gouvernement à aller de l'avant relativement au règlement des revendications territoriales visant les terres en litige. À noter qu'il y a également un autre groupe visé par la pauvreté, les femmes immigrantes. Les femmes venant de certains pays doivent vivre au Canada pendant 10 ans, entre l'âge de 18 et de 65 ans, avant d'accumuler le un quarantième de leur pension de vieillesse. Cette règle fait en sorte qu'un grand nombre d'entre elles ne sont pas admissibles à la pension, même si elles ont la citoyenneté canadienne ou le statut d'immigrant reçu, et elles doivent vivre dans la misère et continuer à travailler bien qu'elles aient atteint un âge avancé, ce qui nuit à leur santé.
Nous estimons que cette politique contrevient à la Charte des droits et libertés et nous recommandons que l'accès à la pension de vieillesse soit accordé à toutes les personnes vivant au Canada depuis trois ans et qui ont la citoyenneté canadienne ou le statut d'immigrant reçu. Nous croyons que le gouvernement a la capacité économique et la responsabilité sociale d'éliminer la pauvreté et d'assurer une juste part de la richesse du Canada à toutes les personnes qui y vivent. Pour y parvenir, il suffit de mettre en oeuvre une politique d'imposition progressive qui, à notre avis, s'est effritée au cours des 20 dernières années, et de concevoir des transferts de fonds sociaux adéquats. Nous savons que le système dans lequel nous évoluons n'est pas parfait au niveau de la répartition de la richesse, mais il revient au gouvernement d'y voir.
Merci beaucoup.
Merci, madame Dean.
Nous commencerons maintenant, comme nous le faisons toujours, par une série de questions d'une durée de sept minutes. S'il nous reste du temps, nous passerons à une deuxième série. Je demanderais à mes collègues assis à ma gauche, c'est-à-dire au Parti libéral et à M. Savage, de lancer cette première série de questions et réponses, après quoi nous passerons à M. Martin, puis à Mme Cadman.
Monsieur Savage, la parole est à vous.
Merci beaucoup.
Je remercie tous les témoins de s'être déplacés ici et de nous avoir présenté ces exposés passionnés.
Comme l'a dit le président, nous travaillons à ce dossier depuis longtemps. Les choses fonctionnent comme suit au Parlement: les comités siègent pendant les sessions parlementaires, et cette étude a débuté avant la dernière élection. Nous nous sommes rendus dans l'Est du Canada un peu plus tôt cette année et nous avons presque dû changer une fois de plus notre horaire en raison de ce qui se passait à Ottawa. Voilà pourquoi nous sommes un peu moins nombreux ce matin, mais nous devons consigner tout ceci au compte rendu et produire un rapport.
Monsieur Stewart, vous avez dit que la question de la pauvreté avait beaucoup été étudiée au Canada. C'est vrai. J'ai toutes sortes de rapports ici qui renferment différentes recommandations, le tout pour en arriver à mieux circonscrire les mesures qui s'imposent. Il faut une volonté politique. Vous avez parlé de la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, que le Canada n'a pas signée. Le Canada a également rejeté une recommandation formulée par les Nations Unies à l'issue d'un examen périodique, voulant que le Canada se dote d'une stratégie pour enrayer la pauvreté. Cette recommandation a été rejetée alors que ce comité tient justement des audiences sur cette question. Nous espérons donc que les bonnes intentions et les pouvoirs de persuasion des membres conservateurs de ce comité, qui travaillent assidûment à ce dossier, feront en sorte que le gouvernement fédéral décide de se doter d'une stratégie anti-pauvreté, comme l'ont fait six provinces déjà. La Colombie-Britannique n'a pas à ce jour de stratégie pour enrayer la pauvreté.
La Colombie-Britannique cherche-t-elle à se doter d'une quelconque stratégie pour enrayer la pauvreté? Le savez-vous?
Vous êtes nombreux à avoir parlé du recours aux banques alimentaires. Comme vous le savez, Banques alimentaires Canada a publié récemment son bilan annuel. En voici un extrait:
Pour l’année la plus récente, les personnes s’identifiant comme membres des premières nations, Métis ou Inuits ont représenté 12 p. 100 des personnes aidées par des banques alimentaires. Les données provinciales varient énormément, avec les Autochtones qui représentent 91 p. 100 des clients des banques alimentaires dans les territoires et 35 p. 100 dans les quatre provinces de l’Ouest.
En Colombie-Britannique, les Autochtones représentent environ 20 p. 100 de la clientèle des banques alimentaires, et je crois même que les données publiées il y a quelques semaines indiquent que le pourcentage des personnes aidées par les banques alimentaires s'est accru de 15 p. 100 en Colombie-Britannique.
Nous cherchons donc à déterminer les stratégies optimales à inclure dans un rapport visant à réduire la pauvreté; dans notre version préliminaire du rapport, publiée en juin, quelques idées ciblaient précisément les Autochtones. En voici quelques-unes pour vous, que je traduis à partir du document anglais:
Dans la foulée des engagements pris à l'origine dans l'Accord de Kelowna, fournir des ressources adéquates afin d'améliorer les conditions de vie et l'infrastructure dans les collectivités autochtones, offrir un meilleur appui aux établissements d'enseignement autochtones, améliorer l'accès aux études postsecondaires, réduire les écarts entre le niveau de bien-être des enfants autochtones et celui des autres enfants non autochtones et, à cette fin, verser un financement supplémentaire aux programmes sociaux comme le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones, le Programme canadien de nutrition prénatale et le Programme d'action communautaire pour les enfants, ainsi qu'aux organismes voués au bien-être de l'enfance.
Puis il y a la question du logement. Il ne suffit pas d'avoir la bonne stratégie en matière de logement, il faut aussi pouvoir dépenser l'argent. Si vous lisez le Globe and Mail ce matin, vous y verrez un article dans lequel on dit que seulement 1 p. 100 de l'argent affecté aux logements sociaux a été dépensé, et ce depuis l'an dernier.
Je demanderais à chacun de vous de m'indiquer deux mesures particulières souhaitées dans les politiques — je dis « particulières », mais celles-ci peuvent cibler plus d'une chose; j'aimerais que vous me parliez d'une ou de deux choses que vous jugez prioritaires du point de vue des enjeux auxquels vous devez faire face chaque jour.
J'estime qu'il devrait y avoir un programme consacré au logement en ce moment. Il faut sortir les gens de la rue. C'est disgracieux. Ensuite, j'estime que nos soins de santé sont en train de se détériorer. Actuellement, bien entendu, il y a une affaire devant les tribunaux où les cliniques privées à but lucratif contestent la Loi canadienne sur la santé et celle de la Colombie-Britannique, je crois. Ceci en inquiète plusieurs, parce que de tous les programmes qui importent pour les hommes et les femmes qui prennent de l'âge, les soins de santé et les logements adéquats figurent en tête de liste.
Merci pour cette question.
Il est très difficile d'accorder un ordre de priorité à ces choses quand vous vous placez du point de vue autochtone.
Puis-je vous faire part de quelques commentaires sur chacun de ces éléments très rapidement, en commençant par les banques alimentaires? Je vois ce qui fonctionne au centre d'accueil de Vancouver. Nous ne faisons pas que nous fier sur les banques alimentaires. Nous réapprenons actuellement à nos aînés comment mettre en conserve le saumon ainsi que divers autres aliments — les fruits et les légumes — parce que les choses se faisaient ainsi avant. Où obtenons-nous l'argent pour acquérir le saumon, les fruits et les légumes? Grâce aux dons. Toutefois, si nous avions les ressources adéquates, nous pourrions aider beaucoup de gens, pas juste nos aînés.
Maintenant, pour ce qui est de l'éducation, au centre d'accueil autochtone de Vancouver, nous sommes dégoûtés du manque de compréhension de l'histoire véritable des Autochtones, dépourvue de menaces, que nous observons chez les gens très éduqués tout autant que chez d'autres qui se promènent dans la rue. Au centre d'accueil, nous invitons au partage des expériences culturelles. Nous apprenons aux gens ce que signifie la colonisation, comment comprendre les enjeux actuels à la lumière de cette situation et comment cheminer en partenariat vers l'avenir. L'éducation pourrait donc adopter un angle quelque peu différent.
Enfin, pour parler du logement, à notre refuge, nous redonnons aux gens leur dignité. Ils sont des invités plutôt que des gens issus de la rue. Nous développons leurs aptitudes à la vie quotidienne, car voilà ce qu'ils recherchent ardemment. Ces personnes se demandent comment elles feront pour survivre si jamais elles obtenaient un logement. Nous avons placé dans des foyers plus de 100 personnes qui n'avaient aucune aptitude à la vie quotidienne, qui ne savaient pas comment entretenir un ménage. Puis, bien entendu, nous leur faisons profiter de possibilités d'éducation et d'emploi.
Permettez-moi de vous dire que les centres d'accueil autochtones font du merveilleux travail partout au pays, en respectant l'approche holistique de leurs clients.
Si vous souhaitez prendre 10 ou 15 minutes pour visiter nos installations, je serais heureuse de vous servir de guide; ainsi, vous pourrez voir de vos propres yeux ce dont il est question ici.
Merci.
Merci, monsieur Savage.
C'est tout le temps que nous avons. Au cours des dernières semaines, j'ai eu l'occasion de visiter le centre d'accueil que nous avons dans la région de Niagara, en Ontario, et je réitère les propos de Mike: le travail que vous faites est fantastique.
Monsieur Martin, la parole est à vous pour sept minutes.
Merci beaucoup.
Tout d'abord, je vous transmets les excuses de Libby Davies, qui a eu un empêchement. Elle aurait beaucoup aimé participer à cette séance. Elle a tout fait pour réorganiser son horaire, mais comme l'a dit plus tôt M. Savage, il se passe aujourd'hui des choses à Ottawa et bon nombre de parlementaires ont dû rebrousser chemin. Je tiens à vous dire que nous sommes à l'écoute de vos propos, que nous prenons bonne note de ce que nous entendons et que nous allons travailler ensemble pour essayer de mettre au point une stratégie ou un plan national qui honorera et respectera votre expérience et vos contributions.
Plus vous descendez dans la chaîne, plus les choses se compliquent. J'aimerais savoir s'il y a quelque chose que nous pourrions faire au niveau fédéral, grâce à une stratégie ou à une initiative à court terme, pour aider toutes ces personnes dont vous parlez si éloquemment, pour les extirper de ces situations difficiles et leur permettre de vivre en toute dignité. Vous avez parlé d'une stratégie nationale anti-pauvreté destinée aux Autochtones, de logement, d'éducation et de soins de santé. Y a-t-il quelque chose de particulier, une mesure que nous pourrions adopter pour agir, pour faire une différence? Puisque Elsie et Sherry se sont toutes deux exprimées il y a quelques minutes à peine, nous allons donner à Patrick et à Steve l'occasion de faire entendre leurs idées.
Je pense à une chose. Je vais m'arrêter à ce seul exemple. Dans le secteur où j'habite dans l'île de Vancouver — j'y habite depuis plus de 50 ans —, on trouve cinq des six rivières qu'on pourrait qualifier de sauvages, où il n'y a ni exploitation forestière ni exploitation minière, où le cadre naturel demeure inaltéré. Dans ce secteur, il y a une très forte concentration de piscicultures. Le saumon est en voie de disparition dans ce secteur. La situation s'apparente à celle du saumon du Fraser. Il a été prouvé scientifiquement, à l'issue d'études revues par des pairs, c'est-à-dire par des scientifiques de renom dans le domaine des pêches venant d'un peu partout dans le monde, que cette détérioration est due en très grande partie à la prolifération des poux du poisson issus des piscicultures. On ne peut pas continuer de permettre à ces piscicultures de poursuivre leurs activités dans ce secteur, elles qui produisent des milliards et des milliards de poux du poisson qui s'attaquent ensuite aux jeunes saumons qui descendent des rivières. Ces piscicultures doivent être retirées de l'océan si on veut que les gens, les ours, les loups, les aigles et toutes les créatures sauvages qui nous entourent puissent continuer de se nourrir. Lorsqu'il est question de pauvreté, voilà une réalité imminente.
Le fait qu'une commission ait été mandatée pour étudier cette question au cours des deux prochaines années — je ne sais trop combien de temps il faut compter pour la rédaction d'un nouveau rapport — retarde d'un autre cycle l'adoption de ces mesures. Il faut agir sans plus attendre.
C'est donc un exemple des enjeux auxquels je dois faire face; ce problème pourrait être réglé en peu de temps. Dès que ces pratiques cesseront, la situation se rétablira.
D'accord.
Pour ma part, ce dossier est celui qui doit primer. Il faut une stratégie nationale en matière de logement. J'ai lu le texte et je sais qu'il parle des collectivités autochtones, mais je crains que sa description ne soit limitée et qu'on finisse par appliquer la loi seulement dans les réserves. Les Autochtones qui vivent en milieu urbain ne sont pas visés par le libellé du projet de loi. C'est un problème qui me préoccupe. Il faut des solutions au problème du logement. Dans la région métropolitaine de Vancouver, nous avons trois sociétés sans but lucratif qui viennent en aide aux Autochtones vivant en milieu urbain. En additionnant les listes d'attente, on constate que plus de 5 000 personnes attendent un logement et qu'aucune indemnité ne leur est versée. Le gouvernement fédéral ne verse pas d'argent pour le logement. Au moment où on se parle, la province non plus. Tout le monde cherche à se réapproprier son argent et c'est inacceptable. Le logement doit se trouver à la base de la démarche.
Compte tenu de ce que vous avez dit plus tôt, je cherchais un plan qui permettrait d'éliminer la pauvreté partout, si possible, un peu comme quand nous avons instauré le Régime de pensions du Canada. Nous avons rehaussé le niveau de vie de tous les aînés. Maintenant, bon nombre d'entre eux éprouvent des difficultés. Toutefois, comme gouvernement, nous avons aidé ces personnes à se sortir de situations parfois assez désespérées.
Ce matin, j'entends dire qu'il faut peut-être élaborer un plan particulier pour enrayer la pauvreté chez les Autochtones. Êtes-vous en train de dire qu'il faut un plan distinct pour enrayer la pauvreté chez les Autochtones?
Vous avez employé le mot « Autochtones ». Je préférerais parler des « Autochtones en milieu urbain », parce que ce sont ces personnes que je représente. Le gouvernement fédéral subvient assez bien aux besoins des premières nations, parce qu'il a une obligation de fiduciaire envers elles.
Quel est le nom de votre conseil exécutif, le Vancouver Urban...?
Le Vancouver Aboriginal Executive Council. Ils ont adopté là-bas une stratégie qu'il conviendrait vraiment d'examiner parce qu'elle englobe tous les différents éléments: le logement, les services de santé et tout. Le conseil est formé des directeurs exécutifs de diverses sociétés vouées aux Autochtones en milieu urbain, qui se réunissent pour trouver des façons de coordonner leurs efforts.
Une des choses que nous avons faites a été de dire: « Réunifions les collectivités. Travaillons tous ensemble à l'unisson. Qui parmi nous fait quoi le mieux? » La Lu'ma Native Housing Society offre de très bons logements, des logements de qualité, aux Autochtones qui vivent en milieu urbain. C'est à un groupe comme celui-là que nous ferions appel pour ce genre de chose. Le centre d'accueil, pour sa part, s'acquitte de fonctions très particulières. Puis dans le domaine de l'éducation, nous avons un centre qui voit à l'éducation des Autochtones. Alors toutes ces personnes se réunissent pour parler de ces questions. Voilà le groupe, selon moi, vers qui vous voudriez vous tourner à Vancouver pour parler de la pauvreté chez les Autochtones et des solutions possibles. En ce sens, vous auriez des buts et des objectifs très précis à atteindre à l'égard de différents volets — et non une solution unique — pour sortir ces gens de la pauvreté.
Merci, Tony, c'est tout le temps que nous avons.
Nous passons maintenant à Mme Cadman pour les dernières questions et les sept dernières minutes.
Pouvez-vous nous dire un peu comment se compare la vie dans les réserves à celle où vous vivez actuellement?
Pour ma part, c'est là où on m'a inculqué ma philosophie et mes valeurs, qui me sont très utiles là où je me trouve aujourd'hui. Malheureusement, lorsque nous étions assujettis à la Loi sur les Indiens, celle-ci acceptait que l'on vive dans la pauvreté. Maintenant que nous avons conclu un traité — en mai, cela fera 10 ans —, il est très difficile de nous défaire des mauvaises habitudes. Le ministère des Affaires indiennes nous avait appris à faire les choses selon un mode hiérarchique du haut vers le bas, alors que nos traditions partent plutôt du principe inverse, de la base vers le haut. Il est donc très difficile de faire cette transition. Voilà en gros à quoi ressemble mon expérience personnelle.
C'est épineux. Il y a eu des histoires comme quoi des chefs prenaient l'argent des gouvernements et le gardaient pour eux ou leurs familles, privant du coup les personnes qui en avaient vraiment besoin. Est-ce vrai?
Je pense que c'est une question très personnelle à adresser aux divers organismes. L'information doit s'appuyer sur des faits. Personnellement, je n'aurais rien à répondre aux ouï-dires.
J'aimerais parler un peu de la pauvreté chez les personnes âgées. Le Canada a été applaudi pour avoir réduit en quelques années la pauvreté chez les aînés; de 29 p. 100 il y a 30 ans, elle était passée à 5,4 p. 100 en 2006. Le Canada a connu de belles réussites dans ce domaine. Toutefois, comme vous l'avez souligné, nous sommes encore aux prises avec de réels problèmes et je fais ici référence à un rapport du Caledon Institute, qui fait un excellent travail dans ce domaine. Dans ce rapport, il est indiqué que 16,1 p. 100 des femmes célibataires d'un certain âge vivent sous le seuil de la pauvreté et qu'elles sont également nombreuses à vivre tout juste au-dessus de ce seuil.
De plus, pour ce qui est des efforts déployés afin d'enrayer la pauvreté au Canada, je crois que quelqu'un a dit que le taux de pauvreté chez les enfants était de 9,5 p. 100. Je crois qu'il s'agit d'une donnée de Statistique Canada faisant état du pourcentage d'enfants qui vivaient dans la pauvreté en 2007; ce pourcentage était également en deça de ce qu'il avait déjà été, mais je présume que ces deux pourcentages se sont accrus au cours de la dernière année en raison de la situation économique. Du point de vue de la réduction de la pauvreté chez les aînés, le succès est souvent attribué à l'augmentation des pensions, et tout particulièrement au supplément de revenu garanti, qui est versé aux personnes âgées à plus faible revenu.
Je me demande, madame Dean, est-ce un mécanisme qu'il conviendrait de renforcer en priorité, de manière à injecter sans plus attendre des fonds dans le régime destiné aux personnes âgées à faible revenu?
Il devient très difficile de regarder ces statistiques, parce que tout dépend de la méthode adoptée pour mesurer la pauvreté. Si vous y pensez bien, le revenu le plus important qu'une personne peut gagner si elle dépend du SRG est inférieur à 15 000 $. Ce revenu est celui d'une seule personne. Si cette personne ne reçoit pas de rémunération, elle touche tout au plus à 1 200 $ par mois ou même un peu moins. Toutefois, dans nos livres, nous tenons compte du seuil de faible revenu, qui part du principe qu'une personne doit gagner un revenu net de quelque 1 700 $ ou environ pour vivre dignement dans la collectivité. Nous considérons qu'une personne qui reçoit moins de 1 200 $ par mois vit dans la pauvreté, parce qu'elle touche un revenu inférieur de plusieurs milliers de dollars à celui que nous estimons nécessaire pour vivre confortablement.
Depuis quelques années, nous constatons que de nombreuses personnes âgées avec qui nous travaillons consacrent de 50 à 70 p. 100 de leur revenu au loyer. Il y a très peu de logements à loyer modique disponibles à Vancouver. Les personnes âgées sont nombreuses à vouloir mettre la main sur ces logements, dont les loyers sont peut-être de 700 ou 800 $ par mois. Je connais plusieurs personnes qui doivent débourser ces sommes pour se loger, alors qu'elles reçoivent moins de 1 200 $ par mois.
J'imagine que tout dépend du point de vue où on se place. Par exemple, une femme handicapée que je connais reçoit 947 $ par mois. Elle doit consacrer un peu moins de la moitié de cette somme à son loyer, ce qui fait qu'elle reçoit un peu moins de 400 $ pour payer son loyer. Comment peut-elle vivre avec si peu d'argent? Ne vit-elle pas dans la pauvreté? Bien entendu. Donc tout dépend, vous voyez.
Tous ces rapports sèment la confusion dans mon esprit. Je viens tout juste de lire l'étude la plus récente pour 2009. Elle a été réalisée par le Conseil national des aînés, un organisme fédéral. Il n'y a rien à comprendre, parce que le rapport ne précise pas le type de mesure sur lequel se fonde sa démarche. Nous nous attardons à ce qui se passe véritablement sur le terrain. Nous communiquons avec des femmes partout dans la province et nous parlons des problèmes auxquels elles doivent faire face. Voilà notre angle d'attaque.
Nous estimons que le seuil de faible revenu est une mesure adéquate. Nous savons très bien qu'il existe d'autres mesures, mais elles mènent à peu près toutes au même constat. Oui, nous avons observé la situation et nous nous rendons compte que la pauvreté gagne du terrain. Par exemple, lorsque nous mesurons la situation des femmes célibataires à la lumière du seuil de faible revenu, nous constatons que de 40 à 45 p. 100 d'entre elles touchent de très faibles revenus, sinon qu'elles vivent carrément dans la pauvreté. Ces pourcentages divergent grandement des autres données disponibles.
Donc si vous comparez la situation des personnes âgées à celle de l'ensemble de la population canadienne, vous pourriez dire qu'elles s'en tirent assez bien. Le taux de chômage n'est pas élevé. Toutefois, selon nous, il faut tenir compte de chaque personne. Si vous prenez un groupe et qu'au moins 40 p. 100 des personnes qui en font partie touchent un revenu inadéquat, celles-ci vivent dans la pauvreté et il faut voir à régler cette situation.
Je suis d'accord avec tout ce que vous avez dit, et vous êtes très bien placée pour nous parler de ces choses. Pour pouvoir élaborer une stratégie, il faut des données précises. Il me semble — et j'ai l'impression que vous en conviendrez également — que nous avons intérêt à cibler précisément les personnes qui ont les besoins les plus criants. Le fait de réduire la TPS permet à tout le monde d'économiser un sou sur leur café, mais ne rend pas vraiment la vie plus facile aux aînés à faible revenu. Cet argent pourrait servir. Je ne suis pas ici aujourd'hui pour promouvoir les politiques fiscales, mais le SRG est une mesure qui cible précisément les aînés à faible revenu. L'augmentation importante de ces prestations ferait en sorte d'alléger le fardeau des personnes qui en ont le plus besoin.
C'est le gouvernement fédéral. C'est un programme fédéral. Cela ferait une énorme différence.
L'an prochain, nous devrons composer avec une nouvelle forme de taxation. Nous avons mené des recherches sur cette nouvelle taxe et les aînés vont vraiment en subir les contrecoups. Il faut examiner le panier de produits qu'utilisent les aînés.
Il y autre chose également quand on regarde les statistiques. Nous voyons le seuil de faible revenu et nous nous demandons s'il coûte à ce point moins cher de vivre dans les petites municipalités. Nous constatons que ce n'est pas le cas aujourd'hui. Les aliments coûtent plus cher. Les loyers sont à peu près comparables. Toutefois, le gouvernement continue de dire qu'il coûte moins cher de vivre dans de plus petites villes. Nous ne sommes pas d'accord. Nous recommandons d'ailleurs au gouvernement de se pencher également sur cette question.
Merci.
J'aimerais remercier de nouveau les témoins d'avoir trouvé du temps dans leurs horaires pour être ici aujourd'hui. Nous allons continuer d'entendre des témoins tout au long de la journée. Tout ce que nous consignons au compte rendu est très utile, et je vous en remercie.
Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui. Nous entamons notre deuxième segment de la matinée. J'aimerais dire rapidement que nous nous sommes attardés à ce dossier tout au long de l'année. Nous sommes allés dans l'Est et nous nous trouvons aujourd'hui dans l'Ouest, et nous tenons à vous remercier d'avoir trouvé du temps dans vos horaires chargés pour être ici aujourd'hui.
Nous allons lancer le bal avec Mme Swanson, puis nous irons ensuite à tour de rôle. Vous avez sept minutes pour présenter votre déclaration préliminaire. Nous allons tenter d'entendre autant de questions et réponses que possible au cours de cette série de sept minutes, après quoi nous passerons peut-être à une deuxième série de questions si le temps le permet.
Madame Swanson, je vous souhaite la bienvenue. Si je ne m'abuse, vous représentez le Carnegie Community Action Project. Nous avons hâte d'entendre vos observations ce matin.
Je m'appelle Jean Swanson, et voici April Smith, une de nos bénévoles du Carnegie Community Action Project.
Je voudrais d'abord souligner que nous nous trouvons en territoire non cédé des Salish de la côte et que je remercie le peuple salish de la côte de nous permettre de nous réunir ici.
Nous désignons notre groupe par le sigle CCAP. Nous sommes comptables aux quelque 5 000 membres de la Carnegie Community Centre Association. Nous oeuvrons à l'amélioration et à l'augmentation du nombre des logements dans le Downtown Eastside, le quartier le plus pauvre sous ce code postal. Il se trouve à environ sept pâtés de maison à l'est de l'endroit où nous nous trouvons. Nous oeuvrons également à l'augmentation du revenu des gens à faible revenu et luttons pour mettre un terme à l'embourgeoisement.
Tous les vendredis, un groupe d'une vingtaine de bénévoles du CCAP se réunit à l'heure du midi pour discuter de ces questions. Les bénévoles sont des sans-abri. Ils habitent dans les logements les plus sordides du Canada — des maisons de chambres sans salle de bain ni cuisine et infestées de coquerelles et de punaises — ainsi que dans des logements sociaux. À la fin de chaque réunion, nous observons un moment de silence à la mémoire d'une personne décédée; je reviendrai là-dessus plus tard.
Je viens de jeter un coup d'oeil à l'étude sur la richesse réalisée en 2005 par Statistique Canada. On y trouve des données absolument stupéfiantes. Au cours de la période de six années allant de 1999 à 2005, la valeur nette totale des Canadiens a augmenté de près de 42 p. 100, mais le cinquième le plus pauvre s'est en fait appauvri de 70 p. 100 au cours de la même période. Pendant ce temps, le cinquième le plus riche enregistrait une augmentation de 43 p. 100 de sa richesse nette. J'ai fait une photocopie de la page du document de Statistique Canada où on peut lire ces données. Si la tendance se maintient, combien les pauvres auront-ils perdu d'ici 2011? Combien les riches auront-ils gagné? Et en 2017? Quel monde cauchemardesque notre société deviendra-t-elle si ces inégalités persistent et s'amplifient?
Mais l'étude sur la richesse a révélé une autre réalité stupéfiante: le cinquième le plus pauvre — c'est-à-dire, entre autres, nous, les membres de notre groupe CCAP — affiche une valeur nette moyenne de moins 2 400 $. Loin d'être riches, nous sommes endettés. Le cinquième le plus riche a une valeur nette moyenne d'environ 1,3 million de dollars.
Je voudrais décrire notre communauté, le Downtown Eastside. Soixante-dix pour cent des résidents de ce quartier sont à faible revenu et font partie du cinquième le plus pauvre de la population canadienne. Le CCAP vient d'achever un processus de consultation de deux ans auprès de 1 200 personnes à faible revenu dans le Downtown Eastside. Notre étude a révélé que ce quartier forme une communauté solide dotée de nombreux atouts surprenants. Nous sommes très enclins à accepter l'autre sans porter de jugement. Nous éprouvons beaucoup d'empathie pour ceux qui souffrent. Nous possédons un authentique patrimoine culturel. Nous consacrons bénévolement des centaines de milliers d'heures à l'édification de notre communauté. Nous recyclons et nous avons certains excellents services, que nous avons nous-mêmes mis sur pied dans bien des cas, et nous travaillons à l'avènement de la justice sociale. Nous avons lutté pour notre parc, pour notre centre d'injection légale, pour notre centre communautaire et pour les femmes portées disparues. Pourtant, 700 d'entre nous sont des sans-abri et 3 500 vivent dans des maisons de chambres, et certains ont des problèmes de santé et de toxicomanie.
Faisons un peu d'histoire. Nous avons toujours été pauvres, mais jamais aussi désespérés qu'aujourd'hui. Il y a trente ans, tout le monde avait un toit, si rudimentaire soit-il, et le pouvoir d'achat que procurait l'aide sociale était supérieur d'environ 250 $ par mois à ce qu'il est aujourd'hui. Le salaire minimum s'établissait à 122 p. 100 du seuil de pauvreté. Il se situe actuellement à quelque 80 p. 100, et à environ 60 p. 100 dans le cas du soi-disant salaire de stagiaire inexcusablement fixé à 6 $ l'heure.
Dans les années 80, un programme fédéral-provincial d'habitation a permis la construction à Vancouver de quelque 700 unités de logement social neuves et de bonne qualité par année. Actuellement, il n'y a pas de programme fédéral d'habitation et les nouveaux logements sociaux qui sont offerts représentent une goutte dans l'océan par comparaison avec nos besoins.
Comme dans toute communauté, certains membres de la nôtre, dont des bénévoles du CCAP, consomment des drogues qui sont maintenant illégales. Ces êtres humains ont de la valeur à nos yeux et nous souhaitons voir l'adoption de politiques et de programmes qui permettront de sauver des vies et d'aider les gens à revenir à la santé. Nous pensons que la réduction des méfaits est un processus qui marche.
Un nouveau rapport de Statistique Canada révèle que la pauvreté cause deux fois plus de problèmes de santé et de décès prématurés que le cancer. On y affirme que la pauvreté — et, dirions-nous, les politiques gouvernementales qui causent la pauvreté — prive les pauvres d'une dizaine d'années de vie. J'ai joint un article à ce sujet. La vie telle que nous la connaissons dans le Downtown Eastside constitue une illustration de cette statistique. Voilà pourquoi nous observons une minute de silence à chacune de nos réunions. Les gens du Downtown Eastside meurent en grand nombre.
Notre société ne sait pas comment enrayer le cancer, mais nous savons bel et bien comment enrayer la pauvreté.
Nous avons besoin de nos programmes sociaux. Nous avons besoin d'une stratégie nationale du logement telle qu'on en trouve dans tous les autres pays développés. Nous avons besoin d'un salaire minimum décent d'au moins 11 $ l'heure. Nous avons besoin que le gouvernement impose les 10 ou 20 p. 100 les plus riches pour financer ces programmes et nous devons substituer à l'actuel marché de la drogue illégale un marché légal et réglementé fondé sur les impératifs de santé publique et les droits humains.
Nous aimerions aider le gouvernement fédéral de notre pays à accomplir ces choses.
Merci.
Merci, madame Swanson.
Nous allons maintenant entendre Mme Manning, du Ray-Cam Co-operative Community Centre. Madame Manning, merci de votre présence ici. Vous avez la parole pour sept minutes.
Merci. Au nom du conseil d'administration, du personnel et des membres du Ray-Cam Co-operative Community Centre, j'aimerais remercier le comité de nous donner l'occasion et la possibilité d'exprimer nos préoccupations.
Je commencerai par un historique du Ray-Cam Centre et un aperçu de la communauté qu'il dessert.
Le Ray-Cam Co-operative Community Centre est situé à l'angle de la rue East Hastings et de l'avenue Raymur dans le secteur Strathcona du Downtown Eastside, à Vancouver. Fondé en 1979 par les locataires du Raymur Housing Project, cet endroit a accédé au statut de centre communautaire en bonne et due forme avec l'aide de deux associations communautaires dévouées. Des nouveaux immigrants, des réfugiés venant de partout dans le monde et une communauté multi-ethnique composée de gens de tous âges se voient offrir une vaste gamme de programmes et d'activités de loisirs et des services tels qu'une garderie et un service de garde préscolaire, un local pour les jeunes, des programmes de soutien à domicile, une salle équipée d'ordinateurs, une salle de musculation, une chambre noire et un gymnase pleine grandeur. Le centre se flatte également de réunir une équipe diversifiée d'employés et de bénévoles, et d'être doté d'un solide comité de travail composé de résidents du quartier.
Le quartier Downtown Eastside de Vancouver a une population d'environ 18 000 résidents. Quelque 70 p. 100 d'entre eux vivent dans les sous-secteurs de Strathcona et Oppenheimer, à deux pas du Ray-Cam Centre. En 2006, un peu plus de 64 p. 100 des résidents du Downtown Eastside étaient considérés à faible revenu selon la définition de Statistique Canada. L'immense majorité des résidents qui font appel aux services du Ray-Cam peuvent être considérés comme pauvres. Il s'agit dans nombre de cas de néo-Canadiens et beaucoup de familles sont monoparentales.
Le Ray-Cam Centre est voisin du Stamps Place, l'ancien Raymur Housing Project, qui appartient au ministère du Logement de la Colombie-Britannique et est géré par lui. Il se trouve dans la même rue que le complexe d'habitations pour personnes âgées de MacLean Park. Quelque 5 000 résidents du Downtown Eastside vivent dans des logements sociaux. Le quartier est notoirement connu comme refuge pour les toxicomanes et les personnes atteintes de maladie mentale ainsi que pour le désordre qui règne dans les rues de la communauté. L'immense majorité des centres et organismes de services de Vancouver y sont concentrés et la majeure partie des sommes consacrées à la santé et aux services sociaux dans le quartier est affectée précisément à ces problèmes.
Les enfants, les personnes âgées et les familles du secteur sont constamment à court de ressources et leur vulnérabilité leur fait grossir les rangs des victimes des prédateurs attirés par la communauté. Les enfants du quartier ont particulièrement besoin d'aide. Des statistiques récentes compilées par l'organisation First Call de la Colombie-Britannique révèlent que, pour une sixième année d'affilée, la Colombie-Britannique accuse le taux de pauvreté infantile le plus élevé au Canada. Le taux de pauvreté infantile dans le quartier du Ray-Cam est de beaucoup supérieur à la moyenne pour la Colombie-Britannique. Des études révèlent que les enfants issus de milieux défavorisés arrivent à la maternelle mal préparés et qu'il y a un écart considérable au niveau de la capacité d'apprendre entre les enfants des milieux à faible revenu et ceux des milieux à revenu élevé, déjà avant la maternelle.
D'autres études révèlent que les enfants dépourvus des habiletés et du soutien nécessaires au succès dans les études sont beaucoup plus susceptibles d'adopter un mode de vie à risque lorsqu'ils arrivent à l'adolescence. D'après l'étude sur les enfants d'âge préscolaire en Californie réalisée par la RAND Corporation, les enfants de moins de quatre ans des familles pauvres ont été en contact en moyenne avec 32 millions de mots parlés de moins que les enfants dont les parents sont des professionnels. Les enfants qui pourraient retirer le plus d'avantages d'une expérience d'apprentissage de grande qualité sont les moins susceptibles de prendre part à des programmes préscolaires en établissement axés sur le développement des habiletés d'expression verbale et de raisonnement de niveau supérieur propres à les préparer à fréquenter l'école.
La même étude a révélé que, sur 50 enfants qui ont des problèmes de lecture en première année, 44 ont toujours des habiletés de lecture inadéquates en quatrième année. Au cours des neuf dernières années, le Human Early Learning Partnership de l'Université de la Colombie-Britannique a mesuré l'état de préparation à fréquenter l'école des enfants de la Colombie-Britannique. Le projet, placé sous la direction de M. Clyde Hertzman, révèle clairement que les enfants de Strathcona forment le groupe le plus vulnérable de la province à tous les égards.
Pire encore, chaque vague de données révélait un accroissement de la vulnérabilité chez les enfants de ce quartier. Ils se situent maintenant au niveau de risque d'échec scolaire le plus élevé chez les groupes étudiés dans tous les centres urbains de la province.
Pour ajouter encore au problème, il y a eu récemment un mouvement à la hausse de la population d'enfants de zéro à six ans vulnérables vivant dans le secteur Strathcona. Les problèmes avec lesquels sont aux prises les enfants du Downtown Eastside et du secteur Strathcona font ressortir clairement le besoin d'une intervention du gouvernement fédéral en matière de pauvreté infantile et de développement de la petite enfance.
Mais si difficile que soient les problèmes que connaît notre communauté, cette dernière n'est pas unique au Canada. Le Ray-Cam trouve encourageant l'objectif du Comité sur les ressources humaines et le développement social, objectif qui a fait l'objet la semaine dernière d'une résolution à la Chambre des communes, d'élaborer immédiatement un plan d'action pour éliminer la pauvreté au Canada.
Dans le secteur du Ray-Cam, il faudra, dans cette perspective, mettre en place davantage de mécanismes de soutien gouvernemental direct. La réduction des taux d'imposition n'a guère d'incidence sur les familles à faible revenu et aucune sur celles qui sont bénéficiaires de l'aide sociale. L'actuel programme de subventions pour enfants sert essentiellement à nourrir des enfants qui, sans lui, auraient faim.
Le Ray-Cam comprend les défis d'ordre financier que représente la mise en place de programmes universels axés sur les problèmes de la petite enfance. Si l'universalité reste l'objectif à long terme, nous croyons que le gouvernement devrait dans l'immédiat envisager sérieusement d'élaborer des programmes et des politiques axés sur les communautés les plus vulnérables du Canada afin d'offrir des chances équitables de développement aux enfants de familles qui sont dépourvues des ressources permettant de répondre aux besoins à cet égard.
Les résidents à faible revenu du secteur desservi par la Ray-Cam font face à un autre défi que, croyons-nous, le comité et le gouvernement du Canada devraient examiner. Les actuels programmes d'aide au revenu forment un mélange hétéroclite de différents types d'aide, chacun assorti de sa propre réglementation et de ses propres exigences. Les objectifs des uns sont contrecarrés par les restrictions imposées par d'autres. Certains ne s'adressent qu'aux personnes bénéficiaires de l'aide sociale, ce qui cause souvent une détérioration de la situation des travailleurs pauvres lorsqu'ils trouvent un emploi. Certains problèmes sont complètement laissés de côté et il est malheureusement de plus en plus courant que les familles dans le besoin tombent entre les mailles du filet des programmes bureaucratiques.
Le Ray-Cam sait que nombre de ces programmes sont actuellement administrés par les provinces. Pour le court terme, nous demandons au comité de recommander que le gouvernement adopte des lignes directrices fixant des objectifs qui seraient atteints au moyen d'un transfert de fonds aux gouvernements provinciaux.
Pour le long terme, le Ray-Cam souscrit à l'objectif du gouvernement du Canada d'éliminer la pauvreté. Nous encourageons le comité à examiner la possibilité de concevoir un programme de regroupement et de simplification des systèmes de soutien. Nous proposons également que ce plan encourage les efforts des personnes désireuses d'étudier, de recevoir une formation et de trouver de l'emploi grâce à un programme de réduction progressive de la dépendance à l'aide sociale, un programme qui procure aux familles le soutien et l'encouragement dont elles ont besoin pour intégrer la population active et y rester. La proposition du sénateur Hugh Segal concernant l'adoption d'un régime de revenu annuel garanti constitue une approche qui contribuerait notablement à atteindre cet objectif à long terme.
Au nom du conseil d'administration, des employés et des membres du Ray-Cam Co-operative Community Centre, je voudrais réitérer mes remerciements au comité pour son travail et son engagement. Votre travail contribuera à modifier pour le mieux les conditions de vie des familles de nos communautés.
Merci.
Merci, madame Manning.
Nous entendrons maintenant le chef Fred Sampson, de la Nicola Tribal Association.
Bienvenue, monsieur Sampson. Merci de votre présence. Vous avez sept minutes, monsieur.
Merci, monsieur le président.
[Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.]
C'est un honneur d'être de nouveau ici, sur le territoire côtier, en territoire ami.
J'ai été prévenu très peu longtemps d'avance, alors je n'ai pas beaucoup de notes pour me guider. Naturellement, pour les sujets que je souhaite aborder, il n'existe pas beaucoup de statistiques. Je veux parler de l'économie des premières nations et de la pauvreté reliée aux ressources en saumon en Colombie-Britannique. Je ne parle qu'au nom de ma communauté, la bande indienne de Siska, qui est membre de la Nicola Tribal Association, ce qui fait que je parle au nom des sept autres communautés aussi. Je ne peux pas parler au nom des autres communautés au sujet de leurs rapports avec les ressources en saumon et ce qu'elles en retirent économiquement dans leurs territoires traditionnels, mais je vais parler avec beaucoup de gravité de ma région du canyon du Fraser.
Ces trois dernières années, nous avons eu énormément de difficulté à pêcher le saumon dans notre communauté. Étant pourvoyeur principal de ma communauté, je pêche pour les familles élargies, les mères seules et les aînés. Ma famille à elle seule capture de 600 à 700 saumons qui sont distribués aux membres de la communauté, aux chefs de familles monoparentales et aux aînés. Ces trois dernières années, la tâche a été extrêmement difficile. Cette année seulement, ma famille n'a mangé qu'un saumon rouge, un seul. J'ai reçu des appels d'aînés et de mères seules de la région de Merritt et d'autres bandes parce qu'ils comptaient sur nous pour leur fournir du poisson et ils n'ont rien eu cette année. L'impact a été énorme sur ma communauté, sur l'économie reliée à la pêche, sur le supplément en revenu que les ressources en saumon lui apportent ainsi que sur son économie.
Nous avons travaillé avec l'Université de la Colombie-Britannique à un projet appelé The Creator's Gifts, qui porte sur les dons qu'on pouvait trouver sur la terre que les premières nations fréquentaient. Naturellement, dans notre région, c'est le saumon qui dominait. Avant le contact, notre communauté était riche — très, très riche — en raison de la grande valeur commerciale du saumon séché à l'air libre. Des saumons séchés à l'air libre de la région du Fraser ont été trouvés à l'occasion de fouilles archéologiques effectuées aux États-Unis, en Ontario et au Manitoba; ils faisaient donc l'objet d'un important commerce. Avant le contact, nous étions riches.
Pendant la période de transformation qui a vu le lent retrait des premières nations de cette activité de pêche et de l'économie de la pêche, la pauvreté est arrivée en force. Même dans la situation issue de la décision de la Cour suprême dans des affaires telles que l'affaire Sparrow et le droit des peuples autochtones à pratiquer une pêche de subsistance modérée, il n'y a rien. Voyez les statistiques: il n'y en a aucune sur le rapport entre le saumon et la pauvreté des premières nations.
Pendant le projet The Creator's Gifts, nous avons fait une recherche sur la quantité de saumon qui est effectivement consommée dans notre communauté. Vu le taux de chômage élevé — il y a plus de 90 p. 100 de chômeurs —, soit on travaille au chemin de fer, soit on travaille dans la forêt dans la région de Lytton. Ce sont à peu près les seules possibilités d'emploi à long terme et chacun sait que l'industrie forestière s'est effondrée. Les chemins de fer ont ralenti considérablement leurs activités et des gens ont été mis à pied, si bien que les difficultés économiques de la communauté se sont nettement amplifiées et les ressources halieutiques sont devenues encore plus nécessaires.
Avec l'Université de la Colombie-Britannique, nous avons fait la tournée de tous les ménages de la communauté pour savoir combien de saumons ils consommaient par année. D'après Statistique Canada, la quantité recommandée est de trois ou quatre onces par semaine, je crois. En utilisant cette donnée comme base de calcul, il faudrait que chaque ménage puisse avoir au moins 64 saumons par personne par année. On en est très loin. Les gens qui sont prestataires de l'aide sociale sont incapables de mettre sur leur table cette source de protéines de grande qualité. Ils en sont réduits à aller au magasin, à acheter du steak haché de mauvaise qualité et de la nourriture-tablette, celle de mauvaise qualité. Ils achètent des pâtes alimentaires, du riz, des pommes de terre et de la farine, ils se nourrissent très mal et cela a un impact sur leur économie.
Je trouve assez difficile d'essayer de faire saisir la situation au comité, parce qu'il ne s'est pas fait beaucoup de recherches sur le lien entre le manque de saumon et la pauvreté des communautés de premières nations. Encore une fois, comme je le disais, je parle spécifiquement de ma communauté. Les communautés côtières n'ont pas été autant touchées économiquement que celles de l'intérieur des terres, parce qu'elles ont la chance de mettre la main sur le poisson avant nous.
Ce que je demande au comité permanent, c'est ce qu'il pourrait faire pour aider les premières nations à participer pleinement à la cogestion des ressources en saumon dans le contexte de leur rapport avec la pauvreté des premières nations.
Notre communauté a créé la toute première pêche commerciale communautaire de l'intérieur des terres et nous nous efforçons d'augmenter l'emploi et d'intensifier l'activité économique autour de nos ressources halieutiques, mais nous avons connu un échec lamentable parce qu'il n'y a pas de poisson. Cette année, nous avons essayé de transformer le saumon rose, mais, naturellement, c'était impossible parce que nos installations sont trop petites. Elles ne produisent que 30 000 poissons et nous n'avons pas la capacité de soutenir la concurrence sur les grands marchés où les poissons sont capturés par millions. C'est un de nos plus gros défis.
Serait-il possible que ce comité permanent puisse aider les communautés de premières nations à trouver un substitut à cette source de protéines? Je sais ce qui se fait aux États-Unis. Chaque fois que les rentrées ne sont pas suffisantes, le gouvernement américain intervient et dédommage les premières nations, de sorte qu'elles ont toujours une source de protéines à mettre sur la table. Voilà une pratique que la province ou le gouvernement du Canada pourrait adopter. Quand les ressources en saumon se sont effondrées, ils auraient dû trouver un moyen de procurer aux premières nations des ressources qui leur auraient permis de mettre une source de protéines sur la table, quel que soit le moyen employé. Cela s'est fait ailleurs et j'aimerais bien que le comité encourage cette pratique également.
Voilà essentiellement ce que j'étais venu vous dire aujourd'hui. J'ai été prévenu très peu longtemps d'avance et je ne peux parler directement que de la pauvreté qui afflige ma communauté et du lien entre elle et les ressources en saumon. Le comité peut-il faire quelque chose pour encourager le gouvernement à inviter les premières nations à participer pleinement à la cogestion de la ressource et pour essayer d'encourager le gouvernement à trouver un moyen de fournir un produit de remplacement aux communautés de premières nations quand les ressources en saumon s'effondrent?
Kukstsemc. Merci beaucoup.
Merci, monsieur Sampson. Vous êtes à peu près pile à sept minutes. Merci beaucoup.
Nous allons maintenant entendre la Salsbury Community Society par la voix de M. Tim Dickau, membre du conseil de cette société.
Tom, soyez le bienvenu. Merci de votre présence. Vous avez sept minutes.
Je fais partie de la Salsbury Community Society, organisation issue de la communauté de foi baptiste Grandview Calvary, dans l'est de Vancouver.
Je vais vous raconter l'histoire de Jeff. Jeff est un homme qui a lutté contre la dépression et la toxicomanie pendant la majeure partie de sa vie adulte. Nous avons fait la connaissance de Jeff il y a dix ans, quand il est venu pour la première fois à l'activité Out of the Cold, le repas hebdomadaire et le refuge pour la nuit que nous offrons dans notre église de l'est de Vancouver. Jeff y a passé la nuit et nous avons pu faire connaissance. Il est revenu la semaine suivante.
Environ deux mois plus tard, des gens rattachés au refuge Out of the Cold ont invité Jeff à venir habiter avec eux dans une des maisons communautaires qu'ils avaient ouvertes. Nous avons six de ces maisons dans le quartier; les gens y vivent ensemble et cherchent à accueillir sous leur toit d'autres personnes qui sont pauvres ou vulnérables, comme Jeff. Au fur et à mesure que Jeff s'intégrait à cette communauté de soutien, ses capacités ont commencé à se manifester.
Mais Jeff était affligé de nombreuses particularités qui constituaient des obstacles à l'emploi et il lui a fallu se battre pendant quelques années pour trouver du travail. C'est Jeff, entre autre, qui nous a inspirés quand nous avons mis sur pied Just Work, une organisation qui crée des entreprises sociales, notamment des entreprises de poterie, de jardinage, des services de traiteur et de réparation. Jeff a finalement trouvé du travail et un emploi valorisant dans des services de jardinage et de traiteur, et sa vie a dorénavant pris une toute autre tournure. On pourrait dire que Jeff est venu au monde.
Je pense que l'histoire de Jeff illustre bien ce que nous avons constaté à la Salsbury Community Society. Grâce à une société de soutien offrant aide d'urgence, logement à long terme, emploi et ressources, la vie des gens et la vie du quartier peuvent être transformées.
Grâce à la Salsbury Community Society, organisme cadre qui réunit sept différentes initiatives offrant logement, emploi et soutien communautaire aux pauvres et aux gens vulnérables, nous avons pu constater, au cours des dix dernières années, que lorsque ces ressources sont mises à la disposition des gens, si cette chance leur est donnée, le changement est possible. Doté d'un budget n'atteignant pas tout à fait un million de dollars, dont très peu sont de source gouvernementale, la société Salsbury a pu voir tout ce qui peut être accompli quand les ressources sont disponibles.
Nous avons acquis une double conviction. D'abord, le gouvernement fédéral doit s'impliquer davantage dans la création de foyers et d'emplois pour ceux qui se voient barrer la route vers un emploi valorisant. Nous avons dû nous en remettre à du financement privé pour la plupart de ces initiatives parce que très peu de fonds de source publique sont disponibles. Deuxièmement, il faut investir dans les communautés qui ont démontré leur capacité à accueillir ceux qui sont victimes de discrimination et à développer des ressources génératrices de transformation. Certains de ces groupes se sont déjà fait entendre aujourd'hui. Nous croyons que le gouvernement fédéral est la seule entité au Canada en mesure de proposer une vision globale en matière de réduction de la pauvreté et de l'itinérance au Canada.
Nous avons constaté que la société semble avoir peur du coût de la réintégration des gens dans la famille canadienne. Nous avons peur que, d'une façon ou d'une autre, cette démarche entraîne une trop grande fonction dans nos propres vies. Cette attitude est particulièrement vraie en temps d'incertitude économique. À bien des égards, nous, les Canadiens, avons oublié que les pauvres et les sans-sans abri font partie de notre identité collective. C'est triste à dire, mais c'est ce que l'on constate souvent dans les églises, au gouvernement, dans la société et parfois même dans notre travail.
Étant disciple du Christ, je crois que la justice sociale doit être l'un des objectifs essentiels de tous, y compris le gouvernement, et que la volonté de procurer aux pauvres les ressources et les possibilités dont ils ont besoin soit au coeur de cette vision. Ce qu'il faut pour mettre la personne au centre de nos préoccupations, accueillir des gens de toutes sortes au sein de la société canadienne, sans distinction de statut, revêt d'une importance considérable. Choisir de n'aider que ceux qui « méritent d'être aidés » et abandonner ceux qui sont affligés de travers que nous réprouvons relèvent du préjugé et c'est contraire aux prescriptions de la Bible.
Je viens également ici à titre de représentant de StreetLevel. Salsbury est l'un des 11 membres de StreetLevel, la table ronde nationale sur la pauvreté et l'itinérance. StreetLevel est un partenariat indépendant et autonome qui a été créé en juin 2003. Il se compose de leaders chevronnés d'importants organismes et programmes chrétiens de partout au Canada qui oeuvrent parmi les pauvres et les sans-abri de notre pays. Ils se sont donné la mission de s'attaquer aux lacunes systémiques, sociologiques, économiques, culturelles et spirituelles qui contribuent à la pauvreté et à l'itinérance au Canada.
Nous avons élaboré quatre propositions à l'intention du gouvernement fédéral. J'aimerais m'arrêter pour le peu de temps qu'il me reste à deux d'entre elles.
D'abord, nous croyons que le moment est venu pour le gouvernement du Canada de mettre sur pied une stratégie nationale de réduction de la pauvreté. Nous saluons ce que le présent comité a fait pour que la motion à cet égard soit présentée au Parlement. Nous croyons qu'elle doit être assortie d'un ensemble de mesures, d'objectifs et d'échéances très concrets. J'espère que le comité passera à l'étape suivante et qu'il considérera l'entreprise sociale comme un élément essentiel de cette stratégie nationale de réduction de la pauvreté.
Deuxièmement, nous croyons que le gouvernement du Canada, avec la collaboration des provinces, des territoires et des communautés autochtones, doit mettre en place une stratégie nationale en matière de logement. Cette stratégie doit comporter des objectifs et un échéancier clairs afin de garantir que chaque résident du Canada a la possibilité de vivre dans la dignité dans un logement sécuritaire, sain et réellement abordable. Nous avons vu les effets positifs que peut avoir un logement sur la vie des gens. Sans logement, je ne vois pas comment nous allons réussir à réduire la pauvreté au Canada. Nous nous attendons vraiment à ce que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership dans l'établissement d'une stratégie nationale en matière de logement.
À mon avis, les Canadiens ont besoin de savoir que leurs dirigeants fédéraux ont une vision, et ils veulent le savoir. Nous avons besoin de savoir que le gouvernement fédéral et tous les partis croient unanimement en la création d'un héritage de justice pour tous les Canadiens. Nous voulons que non seulement cet engagement à l'égard de la justice trouve son expression dans les mots, mais que les budgets, les programmes et les politiques en témoignent. Nous voulons que le gouvernement fédéral engendre un sentiment de solidarité dans les autres paliers de gouvernement et dans les autres secteurs de la société, en vue de créer un héritage de justice.
Nous sommes convaincus que le traitement des problèmes de la pauvreté et de l'itinérance doit faire partie des grandes priorités budgétaires et stratégiques actuelles du gouvernement fédéral, et nous espérons que vous y veillerez.
Merci de votre attention.
Merci, monsieur Dickau.
Nous allons maintenant donner la parole aux députés, comme à l'habitude, et commencer notre première série de questions de sept minutes. Monsieur Savage, c'est à vous.
Merci beaucoup, et merci à tous.
Plusieurs d'entre vous avez fait allusion à la résolution prise à la Chambre des communes la semaine dernière pour souligner le vingtième anniversaire de la déclaration d'intention du Parlement visant à éliminer la pauvreté chez les enfants avant l'an 2000. À mon avis, c'est une résolution importante que la Chambre se devait d'adopter, et elle témoigne du travail de notre comité. Si nous voulons produire un rapport digne de ce nom, alors ce doit être un rapport sérieux, fondé sur les nombreux conseils que nous recevons de personnes qui, comme vous, côtoient ces gens et voient ce qui se passe, et sur les nombreux conseils d'autres personnes qui sont spécialistes du domaine. Il ne peut s'agir uniquement d'une déclaration selon laquelle nous devons faire quelque chose. Je pense que nous devons formuler des recommandations précises.
L'une des questions que nous devons régler est celle de l'imposition. J'aimerais vous lire un extrait du discours que le ministre des Finances a prononcé à la Chambre des communes, je pense que c'était dans le cadre du budget d'il y a deux ans:
Chaque dollar économisé grâce à la réduction des paiements d'intérêts sera remis aux Canadiens par le biais des réductions d'impôt sur le revenu des particuliers. Plus d'argent dans les poches des Canadiens et moins d'argent perdu en paiements d'intérêt. Voilà notre Canada.
Monsieur le président, je l'entends dans les arénas, dans les cafés et dans la rue: « Les impôts au Canada sont beaucoup trop élevés. » Est-ce là votre Canada? Êtes-vous de cet avis? Je dois vous dire, nous avons dans une certaine mesure réussi à réduire les impôts au cours des dernières années, toutefois je ne crois pas que cela ait permis d'améliorer beaucoup les conditions de vie des gens qui vivent dans la pauvreté. Alors j'aimerais demander à Stéphanie, ou peut-être à Jean: Croyez-vous que les impôts au Canada sont trop élevés?
À mon avis, la réduction des impôts n'a pas beaucoup d'effets sur les personnes à faible revenu ni sur celles qui n'ont aucun revenu. La réduction des impôts ne les aide vraiment pas. Si, au départ, vous n'avez pas d'argent, le fait de réduire les impôts n'aura aucune incidence sur votre situation, parce qu'il n'y a pas d'argent à imposer.
Je suis d'accord. Mais les gens qui sont pauvres paient eux aussi les impôts fonciers de leur propriétaire; ils paient de la TPS et de la TVP et d'autres taxes de ce genre. Ce n'est pas qu'ils ne paient pas d'impôts. Mais je pense que toute cette idée de toujours vouloir réduire les impôts a un effet vraiment désastreux sur les gens à faible revenu.
L'autre idée que l'on semble appuyer, c'est que si on impose une augmentation d'impôt, on doit l'imposer à tout le monde de façon égale, ce qui est faux. Je pense que nous devons commencer à examiner la situation des gens de la couche supérieure dont la richesse et le revenu augmentent à vue d'oeil par rapport à la situation des gens de la couche inférieure, qui sont perdants, et commencer à nous attaquer à eux.
Je pense à la proposition d'Ed Broadbent selon laquelle les gens qui gagnent plus de 200 000 $ par année devraient être imposés pour des prestations pour enfants. Si on augmentait à peine leurs impôts, on disposerait de près de 4 milliards de dollars qui pourraient être consacrés à une prestation pour enfants. L'idée de penser que nous devons continuer de réduire les impôts est une idée extrêmement dangereuse, parce qu'elle ébranle tout le fondement qui nous permet d'avoir une mesure sociale universelle efficace favorisant la solidarité parmi les Canadiens, et elle mène à la privatisation, qui crée un système où les gens à faible revenu sont toujours désavantagés.
M. Broadbent faisait allusion plus particulièrement à Barack Obama, qui a augmenté les impôts de la couche supérieure pour financer certains programmes, y compris les soins de santé.
Vous avez mentionné plus tôt, madame Swanson, que le revenu moyen des familles les mieux nanties qui ont des enfants a connu une augmentation au moins deux fois plus importante que celui des familles faisant partie du dixième le plus pauvre de la population canadienne. Je voulais simplement le souligner.
Jusqu'à présent, le gouvernement fédéral a invoqué deux raisons pour justifier le fait qu'il ne veut pas de stratégie de lutte contre la pauvreté. La première est le coût, et je vais y revenir. La deuxième raison qu'il a donnée, c'est que cette question relève des provinces et des territoires. Et c'est la raison pour laquelle il a rejeté la recommandation formulée à l'issue de l'examen périodique universel des Nations Unies selon laquelle nous devrions nous doter d'une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté. Mais nous savons qu'il y a des domaines où le gouvernement fédéral peut faire quelque chose. De plus, les provinces qui disposent d'une telle stratégie demandent toutes que le gouvernement fédéral ait sa propre stratégie coordonnée à la leur. À mon avis, nous avons vraiment besoin d'une stratégie de lutte contre la pauvreté, et nous devons étudier la façon dont nous répartissons l'ensemble de nos ressources.
Monsieur Dickau, merci pour votre exposé. Je pense que l'une des choses que nous n'avons pas remarquées au cours des dernières années, c'est le travail formidable que font les groupes confessionnels dans le but de réduire la pauvreté, certains en posant de petits gestes et d'autres en menant des activités d'envergure. Dans ma collectivité, il y a des églises qui organisent des banques alimentaires ou qui distribuent des vêtements. Et ces gens ne se considèrent pas comme des défenseurs de la cause de la réduction de la pauvreté; ils se considèrent simplement comme des gens qui accomplissent la parole de Dieu. À leur avis, ils ne sont pas militants.
J'ai l'impression qu'il y a beaucoup de gens partout au pays qui croient en la réduction de la pauvreté et qui pourraient avoir beaucoup d'influence s'ils se réunissaient et coordonnaient leurs efforts avec ceux des organismes qui luttent contre la pauvreté, des organismes sociaux, du gouvernement, des groupes confessionnels, de la police, des écoles, des hôpitaux, de tout le monde. À mon avis, le rôle que jouent les groupes confessionnels prendra de plus en plus d'importance.
Oui, j'en suis bien conscient.
L'une des préoccupations que nous avons à l'égard de la privatisation de la religion au Canada, c'est qu'on ne parle pas beaucoup de la vision sociale de notre pays, d'une vision fondée sur la justice, d'un droit à des arrangements et à des possibilités pour tout le monde. Et je pense que l'un des rôles que peut jouer le gouvernement fédéral est de faire en sorte que cette vision sociale se concrétise.
Pour revenir à votre question concernant les impôts, les gens se plaignent à cet égard surtout lorsqu'ils ont l'impression que le gouvernement n'a pas de vision sociale, n'exprime pas clairement sa conception de la justice pour tous les Canadiens. À mon avis, lorsque cette conception sera exprimée clairement et que le gouvernement y travaillera intensément, les plaintes à l'égard des impôts vont diminuer, et les gens seront plus disposés à payer leurs impôts sachant que cet argent sera utilisé à bon escient au Canada. Je pense vraiment que c'est le rôle que le gouvernement fédéral doit jouer.
Merci beaucoup.
Une fois de plus, comme je l'ai fait à la dernière série de questions, j'aimerais présenter mes excuses au nom de Libby Davies, qui est absente ce matin. Elle voulait être ici, mais elle est à Ottawa pour régler d'autres affaires urgentes. Elle m'a demandé de vous transmettre ses salutations et ses excuses. Don Davies devait également être ici, mais il a été rappelé lui aussi.
Nous achevons nos travaux en vue de formuler des recommandations au gouvernement fédéral quant au rôle qu'il devrait jouer dans le cadre d'une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, et je pense que nous avons fait de l'excellent boulot. Le seul élément que nous avons laissé de côté et que nous devons approfondir un peu — et on y pense bien sûr après avoir entendu certains des exposés présentés aujourd'hui — c'est le problème de la pauvreté chez les Autochtones et la façon de s'y attaquer. Comme je l'ai mentionné ce matin, c'est le canari dans la mine pour ce qui est de la façon dont nous gérons nos ressources.
J'aimerais préciser que je suis heureux de vous revoir, Jean. J'ai beaucoup aimé votre livre d'il y a quelques années sur la discrimination contre les pauvres, et j'apprécie le travail que vous continuez de faire.
J'aimerais soulever quelques points dont le comité pourrait discuter en vue de la rédaction de son rapport, en tenant compte du fait que nous examinons le rôle du fédéral ici; il s'agit du logement, de la sécurité du revenu et de l'inclusion sociale. Vous avez parlé de Hugh Segal, qui demande la création d'un revenu annuel garanti ou d'un revenu de base. Il se passe beaucoup de choses à l'heure actuelle, non seulement au Canada mais partout dans le monde, sur la base de la valeur inhérente à chaque être humain. Les gens devraient bénéficier d'un revenu de base sur lequel ils peuvent compter à intervalles réguliers.
J'aimerais que vous nous fassiez part de votre point de vue à ce sujet. Je pense que nous savons que nous avons besoin d'une stratégie nationale en matière de logement. Nous en avions une. Nous avions le Régime d'assistance publique du Canada, qui garantissait un certain revenu aux gens, mais il n'existe plus. On remarque l'évolution d'un nouveau secteur de l'entreprise sociale, qui est plus dynamique dans d'autres régions du monde et au Québec que dans le reste du Canada.
Nous pourrions peut-être commencer par vous, Jean.
La stratégie en matière de logement est tout à fait essentielle. Elle doit prévoir la construction de 20 000 à 30 000 unités de logement par année dans l'ensemble du pays. Je pense que les villes peuvent fournir les terrains, mais les gouvernements fédéral et provinciaux doivent faire le reste.
En ce qui a trait à l'inclusion sociale, l'expression nous gène beaucoup dans le Downtown Eastside, parce qu'on l'utilise pour décrire le fait que les gens à faible revenu devraient inclure des gens plus riches et être amenés à sortir de leur collectivité. À mon avis, ce terme est très risqué parce qu'il peut avoir la signification que son utilisateur veut bien lui donner. Mais par inclusion sociale, si vous voulez dire inclure... Je ne sais pas ce que vous voulez dire par inclusion sociale, en fait.
En ce qui concerne le revenu garanti, nous n'en avons pas discuté à la réunion des bénévoles du CCAP, puisque je suis la seule maintenant, mais je suis tout à fait d'accord pour dire que tout le monde devrait avoir un revenu adéquat et que c'est un droit fondamental de la personne. Je n'y vois absolument aucun problème — tout le monde devrait y avoir droit. Mais le revenu garanti peut prendre tellement de formes différentes que le fait de dire que nous le voulons sans en préciser la forme est extrêmement dangereux à mon avis. Par exemple, beaucoup de gens veulent qu'un impôt uniforme soit perçu sur les prestations de revenu garanti. Un impôt uniforme, c'est extrêmement régressif. Beaucoup de gens disent qu'ils veulent un revenu garanti qui permettrait de simplifier toute la gamme des programmes sociaux, comme Stephanie l'a dit, ce qui serait bien. Mais si les gens se fondent là-dessus pour dire que tout le monde reçoit un revenu garanti annuel de 5 000 $ et que le revenu des personnes âgées, qui est actuellement de 16 000 $, va être réduit, ce serait un problème. N'est-ce pas?
Le Centre canadien des politiques alternatives a publié un excellent rapport sur les divers aspects dont il faut tenir compte relativement au revenu garanti.
D'autre part, il faut savoir si le revenu garanti serait utilisé pour forcer les gens à travailler pour un salaire dérisoire parce qu'ils ont le supplément et qu'ils n'ont pas besoin du salaire pour survivre.
Vous devez tenir compte de tous ces facteurs avant de dire que vous voulez un revenu garanti. Vous devez dire que vous voulez un revenu garanti qui est adéquat, qui est financé au moyen de la taxation progressive, qui n'entraîne aucune perte d'argent pour qui que ce soit, et ainsi de suite.
Que voulez-vous dire par inclusion sociale?
Pour en revenir à ce que Tim disait, peut-être pourriez-vous nous expliquer l'idée que vous vous faites de l'économie sociale et de l'inclusion de tous les membres de la communauté grâce à différents moyens?
Ce qui me semble bien, dans la notion d'inclusion sociale, c'est que cela fait en sorte que chacun a accès aux ressources et a la possibilité de jouer un rôle, peu importe son statut et peu importe ses problèmes ou ses difficultés. Dans notre communauté, cela se traduit surtout par un rôle que les personnes souffrant de dépendance aux drogues et les sans-abri jouent, en tant que membres de la collectivité, dans nos entreprises commerciales et dans nos processus décisionnels. Je crois que ce sont des exemples concrets d'inclusion sociale.
On dirait presque que l'inclusion sociale est une notion qui vient des premières nations. J'ai été élevé par ma grand-mère et mon grand-père, et ils m'ont appris qu'un chef était aussi fort que la personne la plus faible de sa communauté. Je crois que c'est le genre d'image qui traduit bien ce qu'est l'inclusion sociale. Dans une communauté, tout le monde doit être respecté et traité de la même façon.
En ce qui concerne la question du logement, notre communauté est actuellement dans l'impossibilité de bâtir d'autres maisons, car nous manquons d'eau. En fait, cela fait un bout de temps que notre approvisionnement en eau est inadéquat. En ce moment, nous avons un système de réservoirs qui fournit 70 000 litres d'eau à notre communauté, mais il faut 80 000 litres simplement pour éteindre un incendie de maison. Nous n'avons pas assez d'eau pour satisfaire aux besoins de base des membres de notre communauté, alors nous ne pouvons pas bâtir de maisons. Notre bande compte 320 membres, et plus de la moitié d'entre eux n'habitent pas la réserve, car nous manquons de logements. Et les logements dont nous disposons ne sont pas adéquats. Nous avons des gens qui vivent tous ensemble, entassés dans une seule maison. Certaines de nos maisons sont extrêmement vieilles, il y a des problèmes de moisissures, des toits qui coulent. Pourtant, les gens se figurent que les peuples des premières nations se font fournir des maisons gratuitement, que les meilleurs maisons se trouvent dans leurs communautés. C'est tout simplement faux.
Aujourd'hui encore, beaucoup de membres de ma communauté aimeraient revenir chez nous, mais nous ne pouvons pas leur construire de maisons parce que nous manquons d'eau. Il est donc incontestable que la question du logement est un problème pour notre communauté.
Je suis membre de l'Association tribale Nicola. Ma communauté est située dans le canyon du Fraser, à neuf kilomètres au sud de l'endroit où la rivière Thompson et le fleuve Fraser se rencontrent, à Lytton. Nous sommes directement sur la route Transcanadienne. Pourtant, c'est comme si nous étions coupés du reste du monde. Nous n'avons pas accès à Internet haute vitesse, même si nous sommes entourés par un réseau à fibres optiques. Le ministère et le gouvernement fédéral nous disent depuis l'an 2000 que nous allons avoir accès à Internet haute vitesse, mais les membres de notre communauté n'y ont toujours pas accès. Nous n'avons pas accès à la télésanté.
Nos enfants ne peuvent pas accéder à Internet haute vitesse, ce qui les prive des vastes horizons qu'il offre en matière d'éducation. À l'école secondaire, nos jeunes utilisent des connexions par ligne commutée. Mon fils m'a dit qu'il fallait 45 minutes pour obtenir la connexion, mais qu'il ne pouvait utiliser l'ordinateur que pendant 15 minutes. Quels sont les incidences sur son éducation? Dans quelle mesure cela empêchera-t-il les enfants autochtones de ma communauté de se sortir de la pauvreté? Ce sont des problèmes très réels pour nous.
Si le gouvernement interdit la pêche au saumon pour un an ou deux afin de permettre au stock de se régénérer, de retrouver sa vigueur, est-ce que les premières nations respecteront cette interdiction et est-ce qu'elles réduiront leur consommation de saumon pour aider le stock à reprendre le dessus?
En fait, les communautés qui font partie de l'Association tribale Nicola ont déjà fait beaucoup de choses pour protéger les stocks visés par les mesures de gestion des pêches du MPO. Si le MPO dit de ne pas toucher la montaison hâtive de la rivière Stuart... Cela fait plus de 10 ans que je n'ai pas mangé du saumon de montaison hâtive. Je n'en ai pas mangé parce que nous n'en pêchons pas. Cette année, nous avons attendu fidèlement, pour protéger la montaison hâtive de saumons quinnats, la montaison hâtive de la Stuart. On nous a dit que sept millions de saumons reviendraient au milieu de l'été, alors j'ai encouragé tous les membres de ma communauté à ne pas pêcher ces saumons, et ils m'ont écouté — ils sont très préoccupés par le stock de saumon — pour constater que la montaison du milieu de l'été était pratiquement anéantie.
Dans le cas des autres stocks, ceux qui s'en sont bien tirés cette année sont ceux qui ne sont pas passés par les centres de pisciculture. On devine aisément pourquoi. C'est limpide. Pourquoi les stocks de saumon qui passent par le Fraser se sont-ils effondrés alors que d'autres stocks s'en sont très bien sortis cette année? C'est parce qu'aucun de ces autres stocks n'avait à passer par les centres de pisciculture. Ce n'est pas compliqué.
Elles ont un impact énorme. Je ne dis pas que ce sont seulement les piscicultures. Le réchauffement climatique a certainement une incidence. Dans quelle mesure la pollution contribue-t-elle au problème? Ce n'est pas clair. Mais il est certain qu'il y a une relation directe et très spécifique entre les piscicultures et les stocks migrateurs de poissons sauvages.
L'effondrement de cette année est directement lié à une étude qui a été faite il y a quatre ans. Des chercheurs avaient utilisé des petits filets pour capturer des saumoneaux qui traversaient les piscicultures. On a trouvé jusqu'à 20 poux du poisson sur chacun de ces saumoneaux. Cela signifie qu'ils allaient mourir. S'il y a plus de quatre poux, c'est la mort. Les chercheurs ont capturé 100 000 saumoneaux, et chacun d'eux était infesté de poux. Le biologiste a dit qu'ils allaient tous mourir. Et c'est ce que nous constatons cette année. On avait annoncé que sept millions de poissons étaient censés revenir, mais ça a été une dévastation complète.
Je crois que le gouvernement fédéral et le gouvernement de la province peuvent faire énormément de choses en ce qui concerne la gestion du poisson. La bande de Siska exploite une pêche commerciale communautaire à l'intérieur des terres. C'est le modèle que nous proposons depuis plus de 30 ans: si on veut augmenter les taux d'échappement ou améliorer les cibles de gestion, il faut commencer à réduire la pêche en haute mer en la remplaçant par des pêches à plus petite échelle, pratiquées à l'intérieur des terres. La ressource peut être gérée, et elle se régénérera.
Merci.
Le problème des maladies mentales est très sérieux. Je suis sûre que cette question vous touche de près, compte tenu de votre profession. Je serais portée à croire que ces problèmes sont plus courants dans les rues que n'importe où ailleurs, étant donné que ces personnes ne prennent pas leurs médicaments ou qu'elles n'ont pas accès aux médicaments dont elles ont besoin et qu'elles sont dans un cycle qu'il est impossible de briser.
Y a-t-il une manière d'aider ces gens? Je sais que Riverview a été fermé il y a des années. Est-ce qu'une institution de ce genre pourrait aider les gens qui souffrent de maladie mentale? Ces personnes devraient-elles être renvoyées dans une institution où on prendrait soin d'elles?
Je ne sais pas... Quelqu'un a-t-il des idées à ce sujet?
Ils ont certainement besoin de logements, mais beaucoup d'entre eux ont des problèmes de santé mentale.
Écoutez. J'ai 66 ans et, dans les années 1970, je travaillais dans le quartier centre-est. Il y avait beaucoup de gens qui souffraient de maladie mentale à l'époque, mais ce n'était pas un aussi gros problème qu'aujourd'hui. Pourquoi? Eh bien, dans les années 1970, il y avait des endroits où ces gens pouvaient aller. Nous ne cherchions pas à régler le problème des sans-abri, parce qu'il n'y en avait pratiquement aucun.
Le problème des sans-abri est énorme. Il y a beaucoup de gens qui souffrent de maladies mentales mais qui ne sont pas pauvres. On ne voit pas ces personnes dans les rues parce qu'elles sont dans leur maison. Il est certain que nous avons besoin de mesures de soutien, que nous avons besoin d'un bon système de santé mentale, et que le nôtre doit être amélioré. C'est entendu. Mais l'essentiel, le point fondamental, c'est qu'il faut avoir des logements.
Il n'est pas nécessaire que les logements soient centralisés dans le centre-ville de Vancouver et dans le quartier centre-est. Un des problèmes que nous rencontrons, actuellement, est que ces endroits sont, en quelque sorte, utilisés comme un point de chute pour toutes les personnes qui ont des problèmes. C'est là qu'on les abandonne. Mais il faudrait qu'ils restent dans leur communauté. On ne devrait pas se contenter de la ghettoïsation du quartier centre-est, mais c'est ce que nous faisons. Il n'y a aucun service en dehors de...
Je ne suis pas d'accord. Il y a une question sur laquelle nous ne nous entendons pas tout à fait. Au CCAP, nous croyons fermement que les résidents actuels du quartier centre-est qui souhaitent continuer d'y vivre devraient pouvoir le faire, qu'ils ne devraient pas être obligés de partir pour des raisons de standing.
Nous avons mené une vaste consultation auprès de la communauté au sujet de l'avenir de ce quartier, et les résidants du quartier auxquels nous avons parlé pendant ce processus y habitaient depuis sept ans en moyenne. Il y a donc beaucoup de gens qui y habitent depuis longtemps.
Stephanie dit qu'elle croit aussi qu'ils devraient y rester.
Le danger, maintenant, c'est que ces gens risquent d'être chassés, car le loyer des chambres d'hôtel devient très élevé, et cela va aggraver le problème de l'itinérance. Cela relève de la province, mais ce que vous pouvez faire, au fédéral, c'est... Nous avons besoin d'un programme national de logement.
Dona, c'est tout le temps que nous avions, mais Tim pourrait peut-être faire un dernier commentaire pour clore la discussion.
Jean, peut-être que vous pourrez m'aider avec la statistique, si vous la connaissez.
Judy Graves, qui défend la cause du droit au logement à Vancouver, a fait référence à une étude sur les personnes qui sont passées de la rue à un logement. J'aimerais me souvenir des chiffres exacts. Sur une période d'un an, le nombre de personnes présentant des symptômes de maladie mentale a diminué considérablement. Le logement est donc un élément clé dans le dossier des maladies mentales. À l'évidence, ce n'est pas le seul facteur, mais c'est un facteur clé. Il va de soi que pour une personne qui vit dans la rue, essayer de fonctionner normalement et de mener une vie saine est pratiquement impossible.
Voilà donc la clé. À mes yeux, c'est le point de départ. C'est pour cela qu'il faut une stratégie nationale du logement.
Merci, Tim.
Je remercie tous les témoins d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui malgré leur horaire chargé.
Je vais suspendre la séance pendant que les témoins vont s'en aller et que d'autres témoins vont s'installer.
Encore une fois, merci beaucoup.
Nous attendons encore une personne, mais la majorité de nos témoins sont là, alors nous allons commencer.
Daryl, je vous souhaite la bienvenue.
Comme vous le savez, notre comité se déplace dans tout le pays. Nous rencontrons des gens avec qui nous discutons pour obtenir des idées sur lesquelles s'appuieront les recommandations que nous ferons au gouvernement. Nous avons recueilli beaucoup d'informations très pertinentes jusqu'à présent, et nous sommes ravis d'être à Vancouver aujourd'hui.
Daryl, je vous remercie beaucoup d'être présent. Je vais vous donner la parole pour sept minutes. Les autres témoins auront ensuite leur tour.
Je vous remercie infiniment de m'avoir invité.
Je m’appelle Daryl Quantz. Je suis membre bénévole du conseil d'administration de la Public Health Association of British Columbia, au sein de laquelle je préside également le comité sur les politiques, la promotion et la recherche. Je collabore avec l'équipe de la santé des populations de la Vancouver Coastal Health Authority. Cet organisme appuie nos équipes chargées de fournir des services ainsi que nos partenaires pour gérer les déterminants sociaux de la santé. Une grande partie de mon travail consiste à mieux faire connaître les problèmes qui affectent la santé de nos populations tels que la pauvreté.
Je vous remercie de tout coeur de me donner l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui.
Je suis ici aujourd'hui au nom d’un groupe qui s'appelle la British Columbia Poverty Reduction Coalition, représentant plus de 200 ONG de domaines tels que la santé, l'action communautaire, la religion, les premières nations, les Autochtones, ainsi que des groupes de la société civile, qui font la promotion de la réduction de la pauvreté en Colombie-Britannique. Notre coalition croit que rien n'est inévitable en matière de pauvreté. Notre objectif est l'élaboration et la mise en oeuvre réussie d'un plan provincial de réduction de la pauvreté qui comprend des cibles et des échéances pour l'élimination de la pauvreté dans notre province similaires à ce qui a déjà été fait ailleurs au pays et dans le monde. Nous avons rédigé et envoyé une lettre ouverte à tous les partis politiques de la Colombie-Britannique dans laquelle nous présentons ces cibles et échéances ainsi que des options stratégiques fondées sur les succès connus ailleurs en matière de réduction de la pauvreté.
Notre coalition croit que la prise de responsabilités est essentielle, et nous l'encourageons en recommandant la nomination d'un ministre ou d'un comité interministériel qui serait responsable de la coordination des cibles et de la stratégie.
Je sais qu'il y a une question que vous avez entendue partout au pays. D'un point de vue de santé publique, pourquoi devons-nous, comme nation, nous préoccuper de la pauvreté, si on fait bien entendu exception de la notion de justice sociale, qui doit être prise en compte?
La pauvreté représente une menace importante à la santé de notre population et à la durabilité de notre système de soins de santé. Les études montrent l'une après l'autre les effets négatifs de la pauvreté sur notre santé. En Colombie-Britannique, un rapport préparé récemment par le Health Officers Council of B.C., qui représente tous les administrateurs de la santé de la province, a montré que les indicateurs de santé de la population étaient beaucoup plus faibles chez les groupes à faible revenu. Par exemple, l'espérance de vie peut varier de 15 ans, selon la région dans laquelle on habite dans notre province. Les taux de maladies chroniques, telles que les maladies cardiaques, le cancer et le diabète, sont constamment plus élevés chez les groupes à faible revenu.
L'an dernier, j'ai été ravi de lire deux rapports nationaux substantiels qui donnaient une meilleure idée des effets de la pauvreté sur notre santé. Dans le rapport intitulé Réduction des écarts en matière de santé: un regard sur le statut socioéconomique en milieu urbain au Canada, les administrateurs de la santé des régions urbaines du Canada ont utilisé des variables socioéconomiques pour faire le point sur les résultats en matière de santé. Une fois de plus, le contenu du rapport a révélé que chez les groupes se situant au bas de l’échelle socioéconomique, l’incidence des maladies et les besoins en soins actifs coûteux sont plus élevés.
Dans son rapport de 2008, l'administrateur en chef de la santé publique du Canada a présenté un rapport sur ces différences sur le plan de la santé et a parlé d'« injustices en matière de santé », un terme dont l'usage grandit partout dans le monde. Dans son rapport, le Dr Butler-Jones a utilisé une variation d'une citation bien connue, disant que la santé générale d'une société se mesure à celle du groupe qui en est le plus dépourvu. Il a insisté sur le besoin de s'attarder aux facteurs sociaux et économiques sous-jacents qui déterminent la santé de nos citoyens.
Depuis des dizaines d'années, le Canada est reconnu comme un leader international en matière de santé des populations. La Charte d'Ottawa pour la promotion de la santé est toujours une référence en la matière dans le monde. Nous avons l'occasion de poursuivre ce leadership en utilisant des mesures concrètes pour combattre la pauvreté dans notre pays.
Notre coalition reconnaît que le gouvernement ne peut tout faire seul. Cependant, il joue un rôle essentiel en orientant les politiques et en mobilisant les intervenants pour résoudre ce problème, un travail auquel nous contribuons aujourd'hui.
J'ai un dernier commentaire. Comme membre de divers partenariats et coalitions qui font de la sensibilisation sur la question de la pauvreté, il est frustrant de voir qu’on détourne parfois la question de ceux qui vivent la pauvreté, de leurs histoires et de leurs problèmes, pour s’attarder à des querelles concernant des mesures exactes. Le seuil de faible revenu et les mesures de la pauvreté fondées sur un panier de consommation ont été élaborés afin de mieux connaître les circonstances entourant les familles à faible revenu au Canada. Comme toute statistique ou mesure, elles ne sont pas parfaites. Que le chiffre réel se situe un peu au-dessus ou en deçà de ce qui est mesuré ne constitue pas une justification pour l'inaction. J'encourage le comité à prendre les devants en s'appuyant sur les informations et les méthodes que nous avons.
Je termine en vous disant que la coalition apprécie les efforts du comité. Comme Canadien, je suis fier de voir que non seulement nous nous lançons dans ce dialogue, mais aussi que nous commençons à agir.
Merci beaucoup.
Merci, monsieur Quantz.
Nous passons maintenant à Mme Montani, de First Call: B.C. Child and Youth Advocacy Coalition.
Bienvenue. Vous avez sept minutes.
Je vous remercie encore de la chance que vous nous avez offerte de présenter notre point de vue et de dialoguer après cet exposé.
J'aimerais commencer en vous remerciant pour la motion que vous avez présentée à la Chambre des communes le 24 novembre dernier. Cette motion demandait au gouvernement fédéral d'élaborer immédiatement un plan d'élimination de la pauvreté au Canada. L’adoption de cette motion à la Chambre confirme que ce plan constituait une première étape essentielle. J'espère que les mesures à venir mèneront à l'établissement de cibles et d'échéances afin que nous puissions évaluer les progrès réalisés. Nous vous remercions pour cet effort.
À l'échelle nationale, First Call fait partie de Campagne 2000. Nous produisons le bulletin annuel de la pauvreté des enfants en Colombie-Britannique. De plus, nous faisons partie de la B.C. Poverty Reduction Coalition, qui est représentée par Daryl aujourd'hui.
Notre coalition s'intéresse particulièrement aux effets à court et à long terme de la pauvreté sur le développement et sur la santé des enfants. Je suis persuadée que vous êtes au courant des nombreuses recherches qui ont montré les effets négatifs de la pauvreté sur les enfants et sur les jeunes — Daryl en a d’ailleurs glissé quelques mots —, et qui indiquent que plus on s’enfonce dans la pauvreté sur une longue période, plus le bien-être des enfants est compromis. La réduction de la pauvreté est donc un problème urgent pour nous tous.
Nous souhaitons recommander au gouvernement fédéral quelques mesures. Vous avez probablement déjà entendu parler d'un grand nombre d'entre elles. J'en fais le survol: il faut favoriser une augmentation importante de l'offre de logements abordables et subventionnés, ce qui n'est pas nouveau pour vous; investir substantiellement dans la création d'un système de garderies accessibles, de haute qualité, et abordables; améliorer l’accessibilité aux études postsecondaires pour les personnes à faible revenu et éviter qu'elles aient un trop lourd fardeau en dettes étudiantes; créer une prestation unifiée combinant la Prestation fiscale canadienne pour enfants et son supplément, ainsi que la Prestation universelle pour la garde d'enfants, et augmenter ces prestations à 5 400 $ par année par enfant; restaurer et améliorer l'admissibilité à l'assurance-emploi et hausser les prestations afin que la plupart des travailleurs soient protégés pendant une perte temporaire de salaire et qu'ils reçoivent des prestations qui leur permettent de vivre le temps de trouver un nouvel emploi; assurer des salaires décents pour les employés directs et indirects du gouvernement, y compris les contractuels. On pourrait commencer en réévaluant les salaires de ceux qui assurent l’entretien ménager des édifices et des bureaux fédéraux, même s’ils sont employés par un sous-traitant ou un gestionnaire de biens immobiliers. C’est encore plus important le cas échéant. Nous devons faire partie de la solution dans tous les aspects du gouvernement et faire preuve de leadership.
Quelles que soient les mesures recommandées par le comité, nous devons nous entendre sur les orientations et établir des paramètres qui nous permettront de savoir si nous progressons.
Nous soutenons la cible provisoire de Campagne 2000, qui vise à réduire la pauvreté de 50 p. 100 pour tous les Canadiens d'ici 2020. Mais si nous voulons être fidèles à la résolution de la Chambre des communes, nous devons fixer une date cible pour l'élimination complète de la pauvreté au Canada.
Notre coalition a proposé une réduction plus ambitieuse à notre gouvernement provincial, c'est-à-dire une réduction de la pauvreté de 75 p. 100 d'ici 10 ans. Elle a proposé deux mesures additionnelles qui pourraient aussi être intégrées à un plan fédéral. La première consiste à éliminer la grande pauvreté en deux ans, afin que personne ne se situe sous la barre des 25 p. 100. Ce niveau pourrait être négociable, mais nous devons éliminer la grande pauvreté, nous assurer plus rapidement que les gens ne se trouvent pas sous un certain pourcentage du seuil de pauvreté. La deuxième mesure consiste à s'assurer que la réduction des taux de pauvreté ait les mêmes avantages pour ceux qui sont surreprésentés dans les statistiques, tels que les Autochtones, les personnes handicapées, les mères monoparentales, et les immigrants arrivés depuis peu. Assurons-nous que ces groupes en profitent de manière équitable au fil de la progression.
En plus des cibles et des calendriers de réduction de pauvreté, le plan doit établir des seuils de revenu clairs qui guideraient des mesures particulières — par exemple, nous utilisons le SFR avant impôts et nous nous demandons quel salaire horaire serait nécessaire pour une personne célibataire qui travaille 40 heures par semaine pour atteindre ce seuil. À Vancouver, ce serait 10,80 $ l'heure. De même, l'aide sociale pourrait être rattachée au SFR après impôts ou au seuil de pauvreté fondé sur un panier de consommation, en tenant compte des impôts fédéraux et des prestations pour enfants, puisque les deux seuils sont des mesures de revenu disponible.
Puisque nous parlons des prestations pour enfants, la somme de 5 400 $ recommandée par Campagne 2000 est fondée sur le revenu additionnel qu'il faudrait à un parent seul avec un enfant, qui travaille à plein temps, toute l'année, à un salaire horaire de 11 $, pour atteindre le seuil de pauvreté.
Par conséquent, nous nous sommes penchés sur certaines de ces questions. Nous pouvons recommander certains critères afin d'au moins amener ces gens au seuil de la pauvreté. Pour ce faire, il est nécessaire de s'entendre sur un de ces critères, chose que nous devrions être en mesure de faire.
Nous devons laisser tomber notre manière saugrenue d'établir les niveaux de prestations et appliquer à la place un ensemble de critères acceptés qui aideront le gouvernement à établir les taux. Deux de nos collègues de First Call ont rédigé des documents sur les problèmes qui surviennent lorsque les prestations commencent à être réduites en fonction de critères différents et habituellement peu exigeants. Ils appellent ce phénomène « l'effet de cumul ». Vous en avez peut-être entendu parler. Le rapport intitulé « Now You See It, Now You Don't » est disponible sur le site Web du Centre canadien de politique alternative. Il montre comment une famille à faible revenu composée de deux parents et de deux enfants se voyait imposer un taux marginal effectif d'imposition de plus de 100 p. 100 en raison de la manière dont étaient récupérées les différentes prestations. Celles-ci comprenaient notamment la Prestation canadienne fiscale pour enfants, la subvention provinciale accordée aux logements locatifs, la subvention pour les services de garde à l'enfance et même les primes subventionnées des régimes de soins médicaux offerts ici. Elles commencent toutes à être récupérées et influencent le revenu gagné à un taux très bas. Quand elles commencent à gagner de l'argent, les familles se retrouvent parfois dans une situation pire que celle qui prévalait lorsqu'elles bénéficiaient de l'aide au revenu.
Il est probable que le revenu garanti proposé par le sénateur Hugh Segal pourrait aider à pallier certains de ces effets de cumul, mais il sera essentiel d'établir un critère qui permettrait de s'assurer qu'une telle garantie est adéquate. Je crois que Elsie Dean en a parlé plus tôt.
Voilà les suggestions que nous souhaitions présenter à ce comité. Je tiens à vous remercier de nouveau pour le travail que vous avez fait en vue de présenter une résolution à la Chambre des communes, et je vous remercie de nous avoir invités à comparaître. Nous avons hâte de pouvoir discuter avec vous.
Merci, madame Montani.
Nous entendrons maintenant Laura Track de la Pivot Legal Society.
Madame Track, vous êtes avocate au sein de cette société. Il nous fera plaisir d'entendre votre présentation. Vous avez sept minutes.
Merci beaucoup de me donner l'occasion de m'exprimer devant vous aujourd'hui. La Pivot Legal Society est une organisation de défense juridique à but non lucratif en activité dans le quartier centre-est de Vancouver, auquel on réfère souvent comme le code postal le plus pauvre du Canada.
Le sans-abrisme et les logements à prix abordable sont d'importantes préoccupations pour la collectivité que nous servons à Pivot, mais ces problèmes s'étendent bien sûr à la grandeur du pays. Je suis ici aujourd'hui pour vous parler d'un sujet qui, je l'espère, a déjà été soulevé à maintes et maintes reprises lors de vos différents voyages au pays: la nécessité d'élaborer une stratégie nationale du logement au Canada. L'adoption du projet de loi qui est actuellement déposé à la Chambre, une loi qui vise à assurer un logement sécuritaire, adéquat, accessible et abordable aux Canadiens, est une première mesure que le gouvernement fédéral doit prendre afin de contrer la crise du sans-abrisme et la pénurie de logements au Canada, et de régler le problème de la pauvreté dans l'ensemble du pays.
À l'heure actuelle, on estime qu'il y a entre 150 000 à 300 000 sans-abri au Canada. En cette période de récession économique mondiale, ces chiffres ne font qu'augmenter. Au début de la récession, 500 000 emplois ont été perdus et plus de 150 000 ménages canadiens ont été évincés de leur résidence parce qu'ils ne pouvaient plus payer leur loyer. Le déficit en approvisionnement du Canada, l'écart entre le nombre de nouveaux ménages et le nombre de nouveaux logements, croît au rythme de 220 000 ménages chaque année. Des millions de Canadiens vivent dans un logement surpeuplé ou qui ne répond pas aux normes. Il est préoccupant de constater que ce sont les femmes seules et les familles monoparentales ayant à leur tête une femme qui sont les plus touchées. Une stratégie nationale du logement est nécessaire pour contrer les répercussions dévastatrices que le sans-abrisme a sur les personnes touchées, pour diminuer les contraintes financières coûteuses que la crise du sans-abrisme au Canada a sur nos services de santé et nos services sociaux, et pour permettre au Canada de respecter ses obligations à l'échelle internationale.
La stratégie nationale du logement précédente du Canada, qui a été supprimée au début des années 1980, fonctionnait. Après les amendements apportés en 1973 à la Loi nationale sur l'habitation, plus de 20 000 unités de logements sociaux ont été construites chaque année jusqu'au début des années 1980. Malheureusement, les compressions au niveau fédéral et le transfert de responsabilités aux provinces qui ont eu lieu depuis ont conduit à la crise du sans-abrisme que nous connaissons aujourd'hui dans l'ensemble du pays.
Les dépenses annuelles pour les logements à prix abordable de tous les paliers gouvernementaux ont constamment diminué depuis le début des années 1990. Une étude menée par Steve Pomeroy, un chercheur principal à l'Université d'Ottawa, montre que même si les provinces ont techniquement respecté les exigences fédérales et réinvesti les économies réalisées au moyen du transfert des subventions fédérales liées aux programmes de logements sociaux, la plupart des gouvernements provinciaux ont tout simplement diminué leurs propres coûts directs et compensé cette réduction avec l'argent provenant du fédéral.
Aujourd'hui, le sans-abrisme atteint un sommet au Canada. Les logements à prix abordable se trouvent également dans une piètre situation avec plus de quatre ménages en location sur 10 et plus de deux ménages propriétaires sur 10 qui consacrent plus de 30 p. 100 de leur revenu pour se loger. Malgré cette crise, les investissements du gouvernement fédéral dans le secteur du logement ont été réduits de 618,5 millions de dollars depuis 1989, après les ajustements tenant compte de la population et de l'inflation.
Le Canada est un des rares pays qui ne possède pas de stratégie nationale du logement. En raison de cette situation, le Canada a été soumis à un examen minutieux très négatif sur la scène internationale. En 2006, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies a dénoncé la crise du sans-abrisme du Canada qu'il a qualifié d'urgence nationale. Il a demandé avec instance au Canada de mettre en oeuvre une stratégie nationale visant à réduire l'ampleur de notre problème de sans-abrisme. En 2009, le rapport du rapporteur spécial des Nations Unies montre que le Canada ne respecte pas ses obligations en matière de logement et recommande qu'il adopte une politique nationale de logement complète et coordonnée fondée sur l'indivisibilité des droits humains et la protection des plus vulnérables.
Bien que les allocations prévues dans le budget fédéral de 2009 qui visaient à stimuler la construction de logements étaient nécessaires et dignes d'éloges, peu d'argent a été dépensé afin d'augmenter le nombre de logements à prix abordable. La construction de nouveaux logements est fondamentalement nécessaire pour héberger les plus de 150 000 personnes qui sont actuellement sans abri au Canada. De plus, sans stratégie nationale, les Canadiens ne savent pas si l'argent du gouvernement fédéral est investi dans les logements à prix abordable de la manière la plus efficace qui soit.
Plus tôt cette année, le vérificateur général de la Colombie-Britannique a fait paraître un examen complet des programmes de sans-abrisme provinciaux. Il a conclu en disant: « Il reste encore à établir des buts et des objectifs clairs pour le sans-abrisme ainsi qu'un cadre de responsabilisation à l'égard des résultats qui soit adéquat. »
Le gouvernement n'a pas encore établi d'indicateurs de réussite appropriés visant à améliorer la reddition de comptes publique à l'égard des résultats. On a constaté qu'une importante activité et beaucoup de ressources sont consacrées aux problèmes du sans-abrisme, mais qu'aucun plan provincial concernant le sans-abrisme ayant des buts et des objectifs clairs n'existe. Lorsqu'il n'y a pas de buts clairs ni d'objectifs de rendement établis, la responsabilité à l'égard des résultats est absente. Comment ferons-nous pour savoir si nous sommes dans la bonne direction si nous n'avons pas d'abord déterminé ce qu'est la réussite?
Il ne fait aucun doute que le sans-abrisme constitue au Canada un problème social qui doit être réglé. La récession économique actuelle est une période optimale pour se pencher sur ce problème. La construction de nouveaux logements à prix abordable dans le cadre d'une stratégie nationale du logement permettra d'injecter directement de l'argent dans le secteur de la construction au Canada. De plus, l'investissement dans des logements supervisés pour les sans-abri permettra d'économiser sur les coûts des services de soutien et, à long terme, d'aider bon nombre de sans-abri à acquérir la stabilité dont ils ont besoin pour se trouver un emploi permanent.
Dans mes documents imprimés, j'ai consulté un certain nombre d'études qui montrent que l'investissement dans des logements à prix abordable permet à long terme de réaliser des économies. L'étude que je connais le mieux provient de la Colombie-Britannique. Elle montre que notre façon d'aborder le problème du sans-abrisme à l'heure actuelle, c'est-à-dire par l'entremise des tribunaux, des prisons, des services policiers, des hôpitaux et des ambulances, coûte environ 55 000 $ par sans-abri chaque année. Offrir à ces gens les logements supervisés dont ils auraient besoin permettrait de réduire ces coûts à environ 37 000 $ par sans-abri chaque année, ce qui représente des économies annuelles pour cette province d'environ 33 millions de dollars. Il est donc évident que nous ne pouvons nous permettre de ne pas investir dans des logements supervisés à prix abordable.
Finalement, une stratégie nationale du logement est nécessaire afin de permettre au Canada de respecter ses obligations en matière de droits humains à l'échelle internationale, particulièrement l'article 11(1) du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui oblige explicitement le Canada à prendre les mesures appropriées pour permettre à chaque personne d'avoir un logement adéquat. Nous avons été critiqué à maintes reprises sur la scène internationale parce que nous ne respectons pas nos obligations en matière de logement. Dans l'étude du rapporteur spécial dont j'ai déjà parlé, celui-ci a soulevé de nombreuses préoccupations concernant les répercussions négatives des compressions financières constantes du gouvernement fédéral depuis les années 1990, et, en particulier, les répercussions de ces compressions sur le peuple autochtone.
Le rapport mentionne que l'incidence pratique de cette situation est que très peu de logements autochtones hors réserve ont été financés au cours des dernières années, même si des études locales menées dans différentes villes, notamment Toronto et Edmonton, montrent qu'un nombre important de sans-abri sont de descendance autochtone. Cette année seulement, le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies a effectué son premier examen périodique universel sur le respect des obligations internationales du Canada, y compris le droit au logement. Dans le cadre de cet examen périodique, un certain nombre de pays ont soulevé des préoccupations précises concernant l'insécurité liée au logement et le sans-abrisme au Canada. Le gouvernement fédéral a d'accepté les recommandations des Nations Unies sur l'hébergement, et a déclaré:
Le Canada reconnaît la présence de défis et le gouvernement du Canada s'engage à continuer d'étudier les moyens d'accroître les efforts pour aborder les problèmes de pauvreté et de logement, de concert avec les provinces et les territoires.
L'offre du gouvernement fédéral de collaborer avec les provinces et les territoires relativement à la question du logement à prix abordable peut se concrétiser par l'établissement d'une stratégie nationale du logement semblable à celle proposée dans le projet de loi C-304. Les gouvernements provinciaux et territoriaux ont demandé au gouvernement fédéral de travailler en partenariat avec eux pendant plus de quatre ans dans le cadre d'une stratégie nationale du logement. Lors d'une réunion des ministres provinciaux et territoriaux responsables du logement tenue en 2005, le groupe a déclaré ce qui suit:
Nous assumons tous la responsabilité de bons résultats en matière de logement. Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont pour objectif commun d'assurer aux citoyens canadiens l'accès à un logement décent et sécuritaire et, par le fait même, de leur permettre de s'intégrer et de contribuer à la vie sociale et économique des communautés.
Le gouvernement fédéral a la responsabilité de respecter ses obligations en matière de logement. Le Canada doit allouer suffisamment de ressources dans son budget de 2010 et mettre en oeuvre une stratégie nationale du logement visant à réduire le sans-abrisme tel que l'a demandé le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies de concert avec le rapporteur spécial. Cette stratégie est essentielle aux sans-abri du Canada.
Merci de m'avoir écouté.
Merci, madame Track.
Nous allons maintenant entendre Mme Keeping, directrice générale et fondatrice de Vibrant Communities Surrey.
En fait, j'en suis la fondatrice et je travaille aussi avec la Newton Advocacy Group Society, en plus d'en être l'une des membres fondatrices.
Je suis contente de voir Dona ici — je croyais ne reconnaître personne. Je suis un peu plus détendue.
Je n'ai jamais parlé devant un comité comme ça, alors je vais lire un peu mes notes. Une partie de l'information dans mes notes a déjà été présentée, alors je vais peut-être essayer de mieux décrire Vibrant Surrey et son lien avec Vibrant Communities à l'échelle nationale.
C'est un modèle de collaboration multisectorielle avec différentes administrations — municipale, provinciale et fédérale —, des entreprises, des groupes confessionnels, d'autres organismes de services communautaires, des organismes sans but lucratif et des gens dans la communauté. C'est un modèle unique: nous cherchons des façons innovatrices de régler un problème. Nous sommes conscients que le financement est limité. Nous essayons de faire preuve de créativité. À vrai dire, nous ciblons certains manques et besoins à combler dans la communauté et nous les étudions. Nous en discutons ensemble, et ensuite les gens présentent la contribution qu'ils sont en mesure d'apporter. J'ai une liste ici de toutes les personnes merveilleuses qui appuient Vibrant Surrey, et j'espère que vous la parcourrez plus tard.
L'un des problèmes que j'aimerais souligner et employer comme exemple est la situation de certaines personnes qui travaillent et qui sont sans abri à Surrey. Nous avons fait un dénombrement en 2005. Nous avons recensé plus de 100 personnes — en fait, je crois que c'était 136 — comme journaliers, et ils étaient sans abri. Nous avons lancé une discussion dans la communauté. Nous nous sommes rendu compte qu'il était insensé que des gens aient un emploi et n'aient pas de toit. Alors les pompiers de Surrey, la GRC et tous les autres se sont mis à parler de la contribution qu'ils pourraient apporter. Il y avait aussi VanCity et Coast Capital Savings — c'est un modèle merveilleux... Il y a d'autres exemples dans ma déclaration écrite de ce qu'ils ont fait pour offrir un appui financier. Un financement comparable a été obtenu de la municipalité, de Centraide, et plusieurs projets ont pu être présentés.
Avec le projet Comeback, nous sommes allés voir des sans-abri et nous leur avons demandé ce qu'ils voulaient faire et ce dont ils avaient besoin. Nous leur avons demandé s'ils voulaient être payés pour suivre un programme de formation afin d'obtenir un meilleur emploi. Leur réponse a clairement été non. La seule chose qui leur permet de se sentir encore humains et normaux est le fait de pouvoir travailler. Le fait d'être sans abri, d'avoir perdu leur maison... Il y a de multiples raisons à cet état de choses, mais ils voulaient vraiment continuer de travailler.
Nous avons créé un programme qui offrait des services au-delà de l'horaire normal de 9 heures à 17 heures, du lundi au vendredi. Je sais que Dona a de l'information. Nous lui avons parlé de ce qui se passe au sujet du projet Comeback, et elle appuie sincèrement la Newton Advocacy Group Society. Mais je veux vraiment que ce soit clair: sans le lien avec Vibrant Surrey et le modèle multisectoriel, nous n'aurions pas de succès.
En fin de compte, Service Canada a financé en partie le programme. On réussit toujours à aller chercher environ 40 000 $ par année par le biais de dons de particuliers et de dons en nature, comme des bottes de travail. Les pompiers de Surrey offrent souvent des vêtements de travail, de la nourriture, des services de transport. La participation des groupes confessionnels est tout simplement incroyable — si quelqu'un a besoin d'un dépôt en cas de dommages ou de payer son loyer, ils vont véritablement faire circuler un chapeau le dimanche et recueillir 300 $ à cette fin. Il y a d'autres moyens de financement possibles. Nous y allons au cas par cas.
Jusqu'à maintenant, depuis le lancement de ce projet en 2005, nous avons aidé plus de 200 personnes à trouver un logement, à y rester et à obtenir un meilleur emploi. Ces personnes ne font plus le travail de journalier. Elles ne sont plus dans le cercle vicieux du travail effectué et payé le même jour. Je ne m'éterniserai pas là-dessus, parce que je m'éloigne beaucoup trop de mes notes.
Je ne voulais pas parler seulement du modèle de collaboration et des entreprises, des groupes confessionnels et des partenaires communautaires qui travaillent ensemble pour régler ce problème. Il y a aussi le fait qu'à l'échelle fédérale... Je voulais décrire un peu certaines choses qui se sont produites ou dont j'ai été témoin au cours des 20 dernières années. À l'origine, nous avions une loi régissant l'aide sociale; c'était la Guaranted Available Income For Need Act. Lorsqu'elle a été abolie, le gouvernement de la Colombie-Britannique a créé un programme d'emploi et d'aide — nous sommes passés d'une loi qui visait à réduire la pauvreté, la souffrance et l'abandon à un programme d'emploi et d'aide à court terme.
Il y avait des intentions et des idées intéressantes. Nous voulions que les gens retournent sur le marché du travail et nous voulions briser le cycle de dépendance. J'ai entendu ce genre de choses. Mais nous nous sommes retrouvés avec des agents de l'aide financière qui sont devenus des agents de l'aide à l'emploi. Où est le filet de sécurité sociale pour ces personnes extrêmement marginalisées? Les gens sont laissés pour compte.
Je suis une travailleuse de première ligne. Je me fais avant tout le défenseur du peuple. Je me suis déjà retrouvée dans cette position. J'étais une mère célibataire, je me sortais d'une relation de violence et je bénéficiais de l'aide au revenu. Alors je sais de quoi je parle. En fait, c'est ce qui m'a donné la passion de travailler dans ce type de milieu au cours des vingt dernières années.
Mais la situation est telle que les gens passent entre les mailles du filet. Il y a eu un programme fédéral qui, je crois, s'appelait le RAPC, mais qui a été aboli. Les responsabilités ont été transférées aux provinces. Je mets en garde le gouvernement fédéral lorsqu'il fait des changements. Qui surveille le gouvernement provincial pour s'assurer qu'il n'affaiblit pas davantage le système? Il y a plusieurs années, nous savions déjà tous que nous aurions aujourd'hui un problème lié aux sans-abri. Ce n'est pas une surprise pour moi, et la situation empire. Les gens passent encore et encore entre les mailles du filet.
J'ai un peu d'information ici au sujet de Surrey, mais je ne vais pas ennuyer tout le monde en lisant des statistiques. Je veux vous parler de certaines nouvelles initiatives sur lesquelles travaille Vibrant Surrey.
Par exemple, nous avons parlé du salaire minimum vital. Nous parlons avec la province, parce que c'est d'elle que relèvent la gestion du salaire minimum vital et les changements. Comment le gouvernement fédéral peut-il avoir une influence sur les provinces pour qu'elles s'acquittent de leurs responsabilités? Elles devraient avoir un plan de réduction de la pauvreté et un meilleur plan de logement et elles devraient utiliser les fonds qui leur ont été attribués. Que peut faire le gouvernement fédéral pour orienter les provinces ou créer une loi afin que ces fonds ne soient pas utilisés à d'autres fins?
J'avais un exemple ici au sujet de la prime familiale. Quelqu'un en a déjà parlé. À ma connaissance, la prime familiale était l'argent du gouvernement fédéral qui servait à lutter contre la pauvreté chez les enfants. Lorsque cet argent a été transféré à la Colombie-Britannique, le gouvernement de la province l'a soustrait de l'aide au revenu. Comment une initiative censée faire une différence à l'échelle fédérale peut-elle être confiée à la province? C'est comme si on n'y donnait pas suite.
Nous avons formé un petit groupe — pas les membres de Vibrant Surrey — et nous avons écrit une lettre en demandant à la province ce qu'elle allait faire avec les économies maintenant qu'elle retirait tout l'argent des personnes qui avaient des enfants et qui bénéficiaient de l'aide au revenu. On nous a dit qu'on l'utiliserait pour des programmes de formation. Mais cet argent a tout simplement disparu. Nous ne savons pas ce qui lui est arrivé. Nous sommes toujours sans réponse.
Nous avons d'autres sources de financement. Nous examinons les ententes sur le développement du marché du travail, dans le cadre desquelles le financement pour l'emploi et l'aide est transféré aux provinces. Je me rappelle encore la première réunion à laquelle j'ai assisté. On y retrouvait des dirigeants provinciaux et des dirigeants fédéraux — des bureaucrates, pas des politiciens —, et ils disaient que la Colombie-Britannique avait tout cet argent pour effectuer ce travail. Le représentant fédéral a rapidement signalé que des contrats étaient rattachés à cet argent. Alors c'est un problème sans fin. C'est une réduction constante du peu d'argent que nous avons pour appuyer les gens qui sont sans abri, qui ont un faible revenu.
Nous travaillons sur quelques projets en ce moment. L'un d'eux est le fonds de crédit pour le loyer. Ça provient de la municipalité. Coast Capital Savings, Envision et VanCity participent à ce projet ainsi que quelques organismes sans but lucratif, y compris le Newton Advocacy Group. Ce projet est appuyé à part entière par Vibrant Surrey. Il vise à créer un fonds qui permet aux gens d'obtenir un microprêt qu'ils peuvent rembourser sur deux ans, avant qu'ils n'aient plus de toit et qu'ils n'aient plus accès aux subventions en cas de crises ou de grandes difficultés. C'est tout à fait nouveau. Nous allons commencer à accorder les prêts en janvier.
Je ne suis pas le chercheur; le chercheur a établi que ça avait beaucoup de succès à Toronto. Ce projet est maintenant mis en oeuvre à l'échelle de la province. À Calgary, ils ont un modèle de fonds de crédit pour le loyer Momentum, et je crois que la municipalité assume de plus en plus les responsabilités liées au fonds de crédit pour le loyer. Ils ont aussi des subventions.
Notre modèle vise à mettre à l'essai le modèle de Calgary. Il y en a un dans la vallée, à Abbottsford, qui met à l'essai le modèle de Toronto, et il y a un autre modèle autochtone, à Prince George. Nous sommes très emballés par ces développements.
Je n'ai presque pas suivi mes notes. Pardonnez-moi.
Le point principal est que par l'établissement et l'amélioration de ces partenariats, nous pouvons tous faire une contribution. Que ce soit une paire de bottes de travail, des vêtements de pluie, de l'expérience, des liens, des réseaux, des meubles d'occasion, nous avons tous quelque chose à offrir. Alors que pouvons-nous faire pour travailler de concert avec vous?
Merci beaucoup.
C'est agréable d'entendre autant de choses intéressantes, mais nous sommes malheureusement limités par le temps. Nous sommes heureux que tout le monde fasse de son mieux.
Nous passons maintenant à Susan Anderson Behn. Vous faites partie du Groupe de travail sur le fleuve Fraser et ses abords marins. Vous avez la parole pour sept minutes.
Mon exposé sera assez court.
Je suis ici avec Jeff Thomas. Nous faisons partie du même groupe. Jeff vous parlera du document qui vous a été distribué. Il est membre du conseil de la première nation Snuneymuxw, et je suis la coordinatrice. Au sein de ce groupe, je travaille pour les premières nations de l'île de Vancouver.
J'aimerais d'abord vous donner quelques renseignements sur le groupe. Je dois mentionner que l'accès à du poisson à des fins alimentaires, sociales et rituelles est un enjeu de taille pour les premières nations de la Colombie-Britannique. Tout le monde en Colombie-Britannique sait que le saumon sockeye est beaucoup moins abondant aujourd'hui que dans les années antérieures. Il y aura une enquête judiciaire, mais au niveau de la collectivité, nous avons beaucoup souffert de cette diminution au cours des deux dernières années.
Le saumon a un cycle de quatre ans. Il vient se reproduire dans son lieu d'origine tous les quatre ans. S'il a de la difficulté à revenir une année, la population de poissons sera beaucoup moins importante quatre ans plus tard. Une diminution de la population pendant trois ou quatre années de suite entraîne un problème à long terme pour les premières nations.
La première vraie pénurie de poissons a eu lieu à l'été 2007. En janvier 2008, Pêches et Océans Canada a convoqué les premières nations — toutes les personnes qui consomment du poisson provenant du fleuve Fraser — afin qu'ils discutent de la façon de partager les ressources très limitées de poissons pêchés à des fins de subsistance au cours des années ultérieures. De ce comité est né le Groupe de travail sur le fleuve Fraser et ses abords marins, auquel participent des agents du ministère des Pêches et des Océans. Nous représentons, au sein de ce groupe, les premières nations de l'île de Vancouver. Ce groupe de travail comprend des représentants des premières nations de l'intérieur de la Colombie-Britannique, du Bas-Fraser, de l'île de Vancouver ainsi que des abords marins.
Pour vous donner une idée de la portée du groupe, il y a 203 premières nations en Colombie-Britannique, certaines comptent plus de membres que d'autres — la majorité d'entre elles sont de petite taille. Parmi ces premières nations, 97 sont situées aux abords du fleuve Fraser, de Musqueam, à l'embouchure du fleuve, jusqu'à Uchucklesaht, en amont, et de 50 à 60 se trouvent sur l'île de Vancouver et les abords marins. Cela signifie qu'environ 150 de ces 203 premières nations dépendent en grande partie du poisson pêché dans le fleuve Fraser. C'est donc un enjeu important. Nous représentons uniquement les premières nations de l'île de Vancouver.
J'aimerais simplement présenter deux ou trois points. Autrefois, nous faisions partie des collectivités bien nanties sur la côte. Des activités de pêche commerciale avaient lieu. Ces activités généraient des revenus importants. Elles permettaient aux gens de rester dans leurs lieux traditionnels tout en leur donnant accès à une bonne source de revenus. Nous n'avions pas l'habitude de payer le poisson que nous mangions. C'étaient les membres de notre collectivité et les membres de nos familles qui pratiquaient la pêche. Le poisson était abondant et il était gratuit.
Nous abordons cette question plus en détail dans notre rapport. Nous voulons essentiellement mettre l'accent sur le fait que les rares personnes de nos collectivités qui continuent à pratiquer des activités de pêche commerciale sont celles qui ont réussi à affronter la tempête. Ce sont des entrepreneurs. Ces personnes ont été en mesure de trouver comment pêcher de cinq à six espèces différentes de poisson pour maintenir leurs activités.
Après deux ou trois années difficiles, ces personnes ont de plus en plus de peine à poursuivre leurs activités de pêche. Actuellement, si nous vivons dans une réserve, nous investissons une partie importante de nos revenus dans notre maison, mais celle-ci n'a aucune valeur. Puisque nous sommes obligés de vendre notre maison à un membre de la bande, nous nous trouvons dans une situation inconfortable, car nous n'avons aucun capital si nous décidons de déménager. Nous avons une maison confortable, mais nous sommes coincés.
Nous tentons donc maintenant, par l'entremise du FRAWG, de trouver des façons de coordonner l'achat du poisson pêché à des fins de subsistance afin qu'il soit distribué dans la collectivité. Le principal enjeu, évidemment, c'est que le poisson coûte maintenant de l'argent et qu'aucune somme n'est prévue dans le budget des Affaires indiennes ou ailleurs pour compenser ces coûts.
J'aimerais simplement dire que les premières nations disposent d'un budget très limité. La majeure partie de l'argent dépensé par les premières nations provient de l'aide sociale, et cela représente un problème. Pour vous donner un exemple, dans la collectivité où je travaille, nous avons dépensé 1 500 $ pour distribuer environ 300 poissons pêchés à des fins de subsistance aux membres d'une collectivité de 600 âmes. Il y a cinq ans, nous avons distribué de 4 000 à 6 000 poissons, ce qui était normal. Nous prévoyons qu'un ménage moyen mange du poisson une fois par semaine. Nous espérons distribuer de 50 à 60 poissons par ménage. Cette consommation serait normale.
Cela n'a rien de traditionnel. Historiquement, cette quantité était beaucoup plus importante, mais nous nous y sommes habitués et c'est celle que nous recevons maintenant. Il faut toutefois avoir un certain niveau de revenu pour nous la procurer.
C'est sur ce point que j'aimerais conclure mon exposé. Je céderai ensuite la parole à Jeff qui vous présentera le reste de l'exposé. Nous avons préparé un rapport et nous avons au moins trois questions pour vous. Nous aimerions savoir si nous pouvons obtenir l'aide du comité ou le sensibiliser à notre besoin de fonds, que le ministère de la Santé ou un autre organisme du gouvernement fédéral ou provincial pourrait nous accorder, afin que les collectivités puissent gérer et obtenir du poisson lorsque les stocks sont peu abondants. Il est probable que nous n'ayons pas besoin de cet argent l'an prochain, mais c'est vraiment un problème maintenant.
Il y a aussi des problèmes en ce qui concerne la gestion du poisson lorsqu'on doit rejeter à la mer toutes les espèces de poissons pêchés qui ne font pas partie des espèces ciblées. Étant donné que nous pêchons le saumon sockeye à des fins alimentaires, sociales et rituelles, si nous attrapons du saumon rose par prise accessoire, nous ne pouvons pas le conserver. Nous le rejetons simplement à la mer même s'il est parfaitement comestible. En fait, des membres de notre collectivité ont obtenu des saumons roses cette année, par prise accessoire, auprès d'un pêcheur commercial qui les auraient autrement rejetés à la mer. C'est donc un problème.
Nous avons aussi un problème en ce qui concerne les crédits d'assurance-emploi liés à la pêche saisonnière et les paiements d'assurance-emploi.
Cela met fin à mon exposé.
Bon matin. Je suis Jeff Thomas, de la Première nation Snuneymuxw, qui se trouve à Nanaimo, juste de l'autre côté du Détroit de Georgie à partir d'ici. Je pense que Susan a abordé la plupart des points, mais j'aimerais vous donner mon point de vue en tant qu'indien.
En ma qualité de résident de la côte depuis de nombreuses années et de membre de ce comité, je peux vous dire qu'il est de plus en plus difficile chaque année d'obtenir une quantité adéquate de saumon pour nos membres, comme l'a mentionné plus tôt Susan. Dans mon jeune âge, j'avais l'habitude de travailler sur des bateaux où je pratiquais la pêche à la senne. Au fil des ans, j'ai été obligé de quitter l'industrie en raison de la diminution du nombre de poissons chaque année. Nous sommes nombreux à avoir quitté l'industrie de la pêche et à être retournés sur la plage pour trouver d'autres types d'emploi. Autrefois pêcheur à la senne, je suis devenu un pêcheur insensé après avoir vu, au fil des ans, le déclin de nos stocks de poissons.
C'est non seulement le saumon qui est en déclin, mais aussi le flétan de l'Atlantique, la morue-lingue, le crabe et les huîtres. Je suppose que ce déclin est attribuable à la surpêche, à la pollution, à l'urbanisation et à la contamination de l'eau et des plages par les industries situées à proximité, comme les scieries et les usines de pâte. Ce changement a bouleversé notre façon de vivre.
Je suis originaire de Nanaimo, et j'ai surveillé la quantité de poissons vivant dans la rivière Nanaimo puisque celle-ci traversait notre réserve. Il y a 40 ou 50 ans, nos stocks de saumon quinnat, de saumon coho, de saumon kéta et de saumon rose dans la rivière étaient tout à fait différents des stocks actuels. Dernièrement, nous en sommes même venus à demander à nos membres d'arrêter de pêcher ces espèces de poissons pour des raisons de conservation. Cela n'a pas été une tâche facile. Je suis membre du conseil de notre réserve et je participe aux travaux du conseil depuis environ 16 ans. J'ai dû prendre ces mesures draconiennes et demander aux membres de notre Première nation d'arrêter de pêcher pour des raisons de conservation, même si la rivière traverse notre réserve.
Nous avons de la difficulté à faire une telle demande à nos membres à Nanaimo puisque nous avons signé les traités Douglas, ce qui signifie que nous pouvons pêcher pour assurer notre subsistance et pour vendre notre poisson comme c'était le cas auparavant, mais nous ne nous prévalons pas de ce droit en raison des faibles quantités de saumon depuis de nombreuses années. Cette situation continue à s'aggraver. L'an passé, nous n'avons pas été en mesure de distribuer du saumon à nos membres. L'année d'avant, nous avions quatre saumons. Un an plus tôt, nous en avions cinq. Ces chiffres parlent d'eux mêmes — je pense que nous avons eu neuf saumons en trois ans.
Traditionnellement, nous aurions embauché un senneur au coût d'environ 50 000 à 70 000 $ par année. Nous l'aurions fait pour nos membres. Nous aurions passé un contrat avec un propriétaire de bateau pour qu'il pêche le poisson et le distribue à nos membres. Toutefois, puisque les stocks sont en déclin, nous n'avons pas été en mesure de le faire dernièrement.
Je ne sais pas comment nous pouvons collaborer avec Pêches et Océans Canada pour trouver des solutions à la pollution sur les plages. Pendant très longtemps, nous avons mangé du poisson, des myes et des huîtres, mais le déclin du flétan de l'Atlantique et de la morue-lingue dans le détroit de Georgie, comme je l'ai déjà dit, a eu un impact important sur notre capacité à fournir à nos membres du poisson à des fins de subsistance.
Les deux intervenants précédents, Fred et Susan, comme je l'ai dit, en ont beaucoup parlé, mais c'est très important pour notre mode de vie. J'ai grandi sur le fleuve, je suis devenu pêcheur à la senne commercial, j'ai commencé sur un bateau de pêche à filets maillants avec mon père quand j'étais jeune, il y a près de 56 ans, jusqu'à ce que nous ayons, même à Nanaimo, ma première nation, 400 petits bateaux de pêche commerciaux, et aujourd'hui nous avons un pêcheur qui s'accroche encore. Je crois que c'est la réalité de Victoria jusqu'à Prince Rupert, où l'industrie a été bonne au fil des ans. Et les pêcheurs commerciaux, qu'ils soient pêcheurs sur senneur, pêcheurs sur bateau de pêche à filets maillants, pêcheurs sur bateau de pêche à la traîne, et tous les autres types, les pêcheurs de hareng, comme je l'ai dit, c'était une industrie très lucrative. Je ne sais pas comment nous arriverons un jour à ramener ces stocks de poissons à des niveaux soutenables, où on peut maintenir des activités de pêche commerciale ainsi que de pêche pour la consommation humaine.
Comme le disait Susan, nous cherchons à obtenir du soutien et à avoir accès à des fonds pendant les périodes creuses pouvant survenir dans tous ces types de pêche.
De plus, les senneurs qui sont sur l'eau et qui pêchent pour notre consommation représentent des frais pour chacune de nos premières nations. Nous avons été très chanceux de nous organiser il y a quelque temps. Nous avons regroupé environ 18 premières nations, alors nous avons été capables de réduire nos coûts. Cela a très bien fonctionné, mais nous ne l'avons pas fait au cours des deux ou trois dernières années, en raison de la faible abondance de saumon. Nous n'avons pas la capacité nécessaire pour mettre sur pied ces organisations au sein de nos propres premières nations afin que la pêche soit plus rentable, parce que, comme je l'ai dit, la nourriture, l'aspect social et les cérémonies au sein de nos communautés ont une grande signification.
De plus, le long de la côte ici, de Nanaimo à Victoria, et de l'autre côté, dans le sud de la Colombie-Britannique continentale, nous avons également notre culture hivernale où beaucoup de nos poissons sont utilisés dans nos sociétés de maisons longues. Comme je l'ai dit, c'est plus difficile pour nous maintenant parce que nous devons aller acheter le poisson au Costco ou Superstore pour nourrir notre peuple, ce que nous faisons traditionnellement depuis, je suppose, les 10 000 ou 20 000 dernières années. Même si on revient à peine 150 ans en arrière, à l'époque où nous avons été découverts, il y avait des maisons longues tout le long de la rive à Nanaimo. Vous pouvez donc imaginer comment nous vivions de ces stocks de poissons très durables. Mais aujourd'hui, c'est un bien triste constat.
Une autre chose qui me fâche beaucoup...
Oui.
Une autre chose qui me fâche, c'est le ministère des Pêches et des Océans. Lorsque nous pratiquons la pêche pour nourrir notre peuple, nous n'avons pas le droit de garder le saumon rose et d'autres types de poisson. Alors, nous les rejetons à l'eau. Nous capturons environ 20 000 poissons à la fois. Bon nombre de ces saumons roses, qui pèsent environ cinq ou six livres, se font écraser par les poissons plus gros, et ensuite nous les rejetons à l'eau. Ils ne sont pas tous écrasés, mais certains le sont, et ensuite nous les rejetons à l'eau. Ces poissons pourraient être utilisés pour nourrir les membres.
Je pourrais parler longtemps de beaucoup d'autres choses. L'assistance sociale, au sein de ma communauté, offre 185 $ par mois à une personne seule. Le logement, une communauté très riche de Nanaimo... Nous avons déjà été propriétaires de beaucoup de terres dans la région de Nanaimo, et nous ne possédons maintenant que 624 acres, dont 200 sont une plaine inondable. Alors vous pouvez constater la crise du logement qui existe au sein de notre première nation également.
Je m'arrête ici. Hay ce:pqa.
Merci, monsieur Thomas.
Chers membres, parce que nous allons un peu dépasser notre temps, je vais diminuer les séries de questions à cinq minutes afin que nous puissions au moins faire une série. Évidemment, je vous remercie de rester un peu plus longtemps.
Je donne la parole à M. Savage, pour cinq minutes.
Merci beaucoup.
Merci à tous. C'était très instructif et j'ai apprécié vos points de vue.
Madame Track, vous avez parlé de l'examen périodique universel et du fait que le Canada a accepté sans enthousiasme deux ou trois recommandations sur le logement. Vous savez sans doute que dans le cadre du même examen, il n'a pas accepté une recommandation selon laquelle nous devrions nous doter d'un plan national pour éliminer la pauvreté, ce qui est un sujet de préoccupation.
La Colombie-Britannique n'a pas de plan anti-pauvreté. La province a des taux élevés de pauvreté infantile, ce qui fait monter en flèche le recours aux banques alimentaires. Je sais que la société civile encourage le gouvernement. Qu'en est-il aujourd'hui? Monsieur Quantz, nous rapprochons-nous?
Je dirais que non. Lorsque le rapport sur la pauvreté infantile a été publié la semaine dernière, la réponse a encore une fois semblé être cet argument concernant les chiffres. Si on ne peut même pas s'entendre sur une mesure, je ne suis pas certain que nous soyons si près de reconnaître que nous devons nous doter d'un programme stratégique.
Il y a des initiatives individuelles à la pièce, et bien sûr elles sont nécessaires, mais encore une fois, nous réclamons l'établissement d'un plan stratégique exhaustif qui nous aiderait à progresser.
Adrienne, voulez-vous intervenir à ce sujet?
Nous croyons que notre gouvernement provincial refuse d'admettre les faits à cet égard, qu'il ergote sur les mesures ou qu'il nous donne des listes de mesures qu'il prend, qui ont toutes du mérite. Les chiffres sont les chiffres. Nous sommes les pires au pays sur le plan de la pauvreté infantile pour la sixième année consécutive, et nous sommes les pires au pays pour ce qui est de la pauvreté en général.
Je vous souhaite bonne chance. J'espère que le jour où la Colombie-Britannique se sera dotée d'un plan anti-pauvreté, ce sera un plan vraiment sérieux et robuste. Comme vous le savez, les plans varient. Une province comme Terre-Neuve-et-Labrador, avec un gouvernement progressiste-conservateur, dispose d'un plan anti-pauvreté sérieux. C'est la deuxième province au pays à s'engager de la sorte. Ce n'est pas une question politique. Partout au pays, des gouvernements libéraux, néo-démocrates et progressistes-conservateurs prennent la question au sérieux, tandis que d'autres ne la prennent pas avec autant de sérieux. Ma propre province de la Nouvelle-Écosse a un plan, mais c'est un plan très faible. J'espère que le nouveau gouvernement de mon ami Darrell Dexter du parti de M. Martin rendra ce plan plus robuste.
Madame Montani, vous avez parlé en particulier... Et je vous remercie de vos recommandations. Nous cherchons à obtenir des recommandations précises. Vous avez parlé d'une prestation fiscale pour enfants, d'une prestation nationale pour enfants, et de la PUGE, la Prestation universelle pour la garde d'enfants. C'est votre idée que la PUGE — et des défenseurs en parlent depuis qu'elle a été mise en place — soit intégrée à un plan plus robuste qui viserait particulièrement les familles dans le besoin.
Ce serait là notre recommandation. La PUGE, comme vous le savez, est peut-être faussement appelée prestation pour la garde d'enfants. Elle ne crée pas de nouveaux espaces ou n'achète pas beaucoup de gardes d'enfants pour les parents. Il n'y a rien de mal à vouloir offrir à toutes les familles une prestation familiale nationale ou quelque chose de ce genre. Nous aimons les programmes universaux, mais celui-là ne fait pas ce qu'il a dit qu'il ferait. Nous croyons qu'il y a lieu de l'améliorer. C'est très complexe pour les gens de continuer d'essayer de rassembler différents morceaux dans le but d'arriver à un revenu qui soit suffisant.
Merci. C'est le genre de recommandation précise que nous cherchons à mettre dans notre rapport.
Madame Track, vous avez parlé du coût que représente l'itinérance. Il y a de plus en plus de discussions sur le coût de la pauvreté en général. Si vous examinez les investissements que nous pourrions faire, qu'il s'agisse de l'itinérance en particulier — et tout le monde parle du besoin de mettre sur pied une stratégie de logement nationale — ou des coûts de la pauvreté par rapport aux coûts engendrés par le fait de ne rien faire au sujet de la pauvreté, qu'il s'agisse des coûts liés à la prison ou des coûts liés à la toxicomanie chez les personnes souffrant de problèmes de santé mentale occasionnant des problèmes qui auraient pu être réglés plus tôt, il me semble qu'un élément sur lequel nous devons tous nous pencher davantage, ce sont les coûts engendrés si on ne fait rien pour contrer la pauvreté, par rapport à l'examen des petits coûts. Tant de choses pourraient être importantes en ce qui concerne l'investissement dans l'infrastructure sociale, mais en réalité, il en coûte plus cher de ne rien faire pour contrer la pauvreté que de faire des investissements.
Je sais que le président me dit que mon temps est écoulé. Si vous avez un bref commentaire à ce sujet, j'aimerais vous entendre.
Je suis tout à fait d'accord. Il faut vraiment s'engager à adopter une démarche à long terme. Vous avez raison de souligner qu'il faut prendre en considération les coûts d'immobilisation à court terme pour s'attaquer à la pauvreté et à l'itinérance ainsi que les économies financières à long terme, et également le potentiel humain perdu si on permet à l'itinérance et à la pauvreté d'exister, et les retombées économiques engendrées si on s'y attaque.
Merci d'être ici ce matin, et merci de votre contribution.
Comme je l'ai fait avec les deux premiers groupes de témoin, je me suis excusé au nom de Libby Davies, qui voulait être ici aujourd'hui pour poser des questions et montrer son appui. Elle est à Ottawa, comme le sont beaucoup d'autres membres du comité qui voyagent habituellement et qui font partie de cet important groupe de travail. Ils participent très activement et de manière constructive pour tenter de trouver quelque chose que nous pourrions tous signer à la fin et présenter au gouvernement, et le mettre au défi d'agir. Nous examinons le rôle du gouvernement fédéral dans le cadre d'une stratégie nationale anti-pauvreté, évidemment en partenariat avec les provinces, les territoires, les municipalités et les premières nations, et dans l'optique de tous les excellents efforts communautaires qui sont déployés.
Nous avons entendu plusieurs choses ici aujourd'hui que nous avions entendues dans l'est au printemps et à Ottawa. Certainement, le logement est une énorme question. La sécurité du revenu est une autre grande question. Afin d'essayer de trouver de quelle façon nous pourrions inciter le gouvernement à prendre des mesures à l'égard de certains de ces éléments, mesures qui seraient importantes, j'aime le commentaire, Darryl, du Dr Butler-Jones que vous avez cité: la santé générale d'une société se mesure à celle du groupe qui en est le plus dépourvu.
Je suis allé en Finlande il y a quelques années, où le concept du bien-être social correspond au bien-être de la société. Si la société va bien, alors tout va mieux pour tout le monde. Je crois que nous devons saisir ce concept et commencer à penser en ce sens.
L'autre chose que nous avons entendue aujourd'hui et qui était différente, selon moi, c'est toute cette question de nos premières nations et des répercussions du déclin de la pêche au saumon sur vos communautés. J'ai entendu Jean et d'autres personnes en parler, dont Peter Julian, mais jamais de la même façon que ce matin. Selon moi, de toute façon, nous en reparlerons et nous allons espérer que nous pouvons prendre des actions immédiates à ce sujet.
Certaines personnes ont laissé entendre que nous pourrions mettre en place un revenu annuel garanti, un revenu de base, ce qui pourrait aider tout le monde. Avez-vous des commentaires à ce sujet?
J'ai lu les arguments du sénateur Segal dans le journal l'autre jour, et il défend cela depuis longtemps. J'ai écouté ce que disait le groupe précédent, et j'ai entendu certaines des dispositions de Jean Swanson, des choses qu'il faut prendre en considération. Alors je crois que beaucoup d'entre nous seraient en faveur d'un revenu annuel garanti, mais ce sont les détails qui posent problème, et il faudrait s'assurer qu'ils sont réglés. Nous aimerions donner notre opinion quant à un seuil raisonnable, qui gagne, qui perd, et comme il est financé. Ce sont là les questions clés.
Ce n'est pas une mauvaise idée, et certainement, remplacer une pléthore de petits programmes que certaines familles obtiennent et que d'autres n'obtiennent pas, et que certaines savent comment obtenir et d'autres non, et certains programmes se contredisent, ou récupèrent l'argent trop tôt... C'est un peu la confusion dans les programmes actuellement, et ils ne conviennent pas, et nous oublions des personnes. L'idée n'est pas mauvaise, mais la communauté doit vraiment apporter son aide pour mettre sur pied le programme.
Un autre concept que je vois au fil de mes lectures, de mes recherches et de mes efforts pour trouver ce que nous pouvons faire et qui serait efficace au Canada, c'est la notion d'inclusion sociale, où tout le monde devrait être en mesure de participer dans leur communauté de la même façon que nous, et que nous tenons souvent pour acquis. Est-ce là quelque chose qui devrait faire partie d'une stratégie nationale anti-pauvreté selon vous?
Susan, vous hochez la tête.
Oui, je suis d'accord. Tout à fait. On parle d'inclusion dans tellement de domaines, des loisirs à la création d'un compte en banque. Je vais reprendre ce qui a déjà été dit: les bonnes idées ne manquent pas, mais il faut que tout le monde participe et travaille ensemble, car on a tous des éléments d'information différents. Il faudrait s'attarder aux détails.
Rapidement, je voudrais faire un commentaire sur les crédits d'impôt. Il est essentiel de se pencher sur cette question. Dans le cas de quelque chose d'aussi simple que l'accès aux loisirs pour les jeunes, le crédit d'impôt actuel ne fonctionne pas, parce qu'il faut déjà avoir l'argent avant d'obtenir le crédit. Les familles à faible revenu ne peuvent tout simplement pas inscrire leurs enfants au soccer ou à une autre activité, alors le crédit d'impôt ne leur apporte rien. De telles solutions n'aident vraiment pas ceux qui en ont véritablement besoin.
Merci, madame Montani. Merci, Tony.
La parole est maintenant à Mme Cadman pour les cinq dernières minutes.
Merci.
Je crois qu'on peut tous s'entendre sur le fait qu'il faut mettre sur pied une stratégie nationale sur le logement. À votre avis, quels éléments essentiels devraient se retrouver dans cette stratégie? Avez-vous des idées?
Je vais commencer.
Je crois que les éléments essentiels d'une stratégie nationale sur le logement devraient contenir, dans le désordre, la collaboration avec les collectivités, les administrations municipales, les gouvernements provinciaux, les communautés autochtones — assurément — et les responsables sur le terrain qui peuvent donner leur avis, et la consultation de ces groupes. La stratégie devrait d'abord et avant tout comprendre la construction de nouveaux logements abordables; c'est peut-être même là l'élément prioritaire. Cette année, le gouvernement fédéral a investi d'importantes ressources dans la rénovation. Ces investissements répondaient à un besoin criant, mais pour nous attaquer à la crise des sans-abris au Canada, il faut construire de nouveaux logements abordables. On parle d'environ 20 000 à 30 000 nouveaux logements sociaux, comme ce qui a été fait dans le cadre de la stratégie nationale sur le logement précédente.
Je me souviens de la question que vous avez posée au dernier groupe de témoins. Dans une stratégie nationale sur le logement, on doit investir dans les services de soutien offerts aux gens qui souffrent de maladies mentales, de toxicomanie ou d'autres afflictions. Une fois que ces personnes ont un logement, elles peuvent se concentrer sur leurs autres problèmes. Il reste cependant qu'il faut absolument leur offrir des services de soins de santé et une aide médicale dans le cadre d'une stratégie sur le logement.
Si vous permettez, j'aimerais faire un commentaire à ce sujet. Je fais partie d'un groupe intégré sur les sans-abri qui regroupent des gens de toute la province, dont différents ministères. Il y a les responsables de la santé de Fraser, des intervenants en santé mentale, BC Housing, des responsables du développement social, deux ou trois églises, et des organisations à but non lucratif. C'est très expérimental, en ce sens que nous essayons de voir ce que nous pouvons faire.
Nous plaçons des gens dans des logements. Il y a actuellement une initiative en cours pour laquelle nous avions un objectif. Nous mettons en place des services de soutien pour que les gens puissent rester dans ces logements. Nous avons constaté que c'est très difficile. Jusqu'ici, des 60 personnes qui ont été placées, dans des logements de BC Housing pour la plupart, seulement 30 réussissent à s'en tirer. Nous tentons toujours de démêler tous les fils, et le problème des gangs vient s'ajouter à l'équation, du fait que les sans-abri sont plus vulnérables et donc plus susceptibles d'être mêlés à des activités criminelles, d'être victimes de ces activités ou de consommer de la drogue. Nous nous retrouvons donc avec un groupe de la rue — un gang, en fait — dans une des unités de logements.
Ce sont là tous les défis que nous devons relever. Ça semble être un projet fantastique que nous voulons appuyer, et nous aurons le concours de plusieurs autres groupes. Plusieurs organismes font leur possible, et on peut aussi compter sur des bénévoles. On travaille très fort. Si seulement la moitié des 60 personnes dont on s'occupe réussissent, dans une certaine mesure, à s'en tirer, on a un problème.
Permettez-moi aussi de répondre. Peu importe la forme que prend la stratégie, il faut s'assurer d'y inclure des logements familiaux. Ce ne doit pas être uniquement pour des personnes seules, car les familles ont aussi d'énormes besoins. Je pense particulièrement aux immigrants et aux réfugiés qui vivent sous le seuil de la pauvreté; bon nombre d'entre eux ont de grandes familles.
Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence aujourd'hui. Partout où l'on va, les gens nous parlent toujours de situations quelque peu uniques, ce qui nous aide dans notre travail. Je sais que j'aime bien entendre les gens dire que tout le monde participe. Je pense que parfois, certaines personnes croient que le problème ne les touche pas ou que le gouvernement s'en chargera, mais je trouve que le milieu des affaires a des responsabilités, et c'est bien de voir que des groupes confessionnels soutiennent de telles initiatives.
Je le répète, ce fut une matinée très fructueuse. Merci à tous d'avoir pris le temps d'y participer.
Je vais lever la séance, et nous reprendrons cet après-midi. Merci encore.
La séance est levée.
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