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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 024 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 12 mai 2009

[Enregistrement électronique]

(0910)

[Traduction]

    Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude de la contribution fédérale pour diminuer la pauvreté au Canada. Nous en sommes à notre vingt-quatrième réunion, et nous retrouvons ici, à Moncton, pour cette première d'une série de rencontres aujourd'hui.
    Je tiens à souhaiter une chaleureuse bienvenue à nos invités. Merci beaucoup d'avoir pris le temps dans vos horaires chargés pour venir vous entretenir avec nous de cette question très pressante.
    J'aimerais vous donner un petit peu de contexte. Nous avons entamé cette étude à Ottawa et nous déplaçons maintenant dans l'Est du pays. Nous étions à Halifax hier, nous sommes à Moncton aujourd'hui, et nous serons à Montréal demain. Nous avons pensé qu'il était important d'aller dans les localités, sur le terrain, pour entendre ce qui s'y passe, et nous vous sommes donc reconnaissants d'avoir pris le temps de venir nous expliquer ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas et ce qui pourrait être mieux fait.
    Nous allons commencer avec Johanne Perron.
    Merci beaucoup d'être des nôtres. Si votre déclaration ne traite pas de ce que fait votre organisation, pourriez-vous nous en dire quelques mots? Vous couvrirez peut-être cela dans votre exposé. Ce serait formidable si nous pouvions avoir une petite idée de ce que vous faites.
    Vous disposez tous de cinq minutes. Suite à vos exposés, il y aura deux tours de questions, l'un avec des interventions de sept minutes et l'autre des interventions de cinq minutes. Voilà comment les choses vont se dérouler ici dans le cadre de cette séance.
    Nous allons donc commencer avec vous, Johanne. Merci encore d'être ici. Je sais que vous représentez la Coalition pour l'équité salariale du Nouveau-Brunswick. Vous avez la parole. Vous disposez de cinq minutes; si vous dépassez légèrement le temps prévu, nous vous laisserons aller jusqu'au bout de votre pensée. Ne vous inquiétez pas; nous ne vous couperons pas la parole, mais dès que le chronomètre aura sonné, il vous faudrait boucler.
    La Coalition pour l'équité salariale du Nouveau-Brunswick est une organisation à but non lucratif. Nous faisons la promotion de législation en matière d'équité pour les secteurs public et privé. Nous travaillons principalement au niveau provincial, mais nous sommes membres du Réseau de l'équité salariale, qui est une organisation nationale. Nous représentons plus de 600 particuliers et 74 organismes néo-brunswickois.
    J'aimerais tout d'abord vous remercier de l'occasion qui m'est ici donnée de vous livrer notre perspective sur la question de la pauvreté. Dans le cadre de cette déclaration, nous souhaitons faire le lien entre la réduction de la pauvreté et l'introduction de solides lois en matière d'équité salariale pour les secteurs public et privé, lois qui soient proactives et fondées sur des droits.
    Des solutions à long terme à la pauvreté requièrent une analyse sexospécifique et l'élimination des obstacles systémiques à l'égalité des femmes. Les lois en matière d'équité salariale visent un obstacle systémique, et c'est de cela que je vais vous entretenir. L'équité salariale est le versement d'un salaire égal pour un travail de valeur égale, et cela repose sur la reconnaissance de la valeur du travail effectué majoritairement par des femmes.
    Une analyse sexospécifique de la pauvreté révélerait que les femmes sont plus susceptibles d'être pauvres. Si elles élèvent seule une famille, leur risque de vivre dans la pauvreté augmente encore. D'autres groupes de femmes risquent de manière disproportionnée à vivre dans la pauvreté — les femmes seules âgées de moins de 65 ans, les femmes handicapées et les femmes racialisées et autochtones. En 2008, les femmes canadiennes gagnaient 83,8 p. 100 du salaire horaire des hommes. Pour chaque dollar gagné par une femme autochtone, un homme non autochtone gagne environ 2,34 $. L'une des principales raisons pour lesquelles les femmes sont plus susceptibles de vivre dans la pauvreté est qu'elles sont surreprésentées dans les secteurs à bas salaire qui ont traditionnellement été considérés comme correspondant à du travail de femme.
    L'Institut canadien de recherches sur les femmes, ou ICREF, estime que 70 p. 100 des femmes ayant un emploi rémunéré sont concentrées dans un petit nombre de secteurs à majorité féminine, notamment les soins de santé, l'enseignement, le travail de bureau, la vente au détail et les services. L'équité salariale permettrait une évaluation du travail majoritairement féminin sur les plans compétences, responsabilités, conditions de travail et effort. Cela permettrait un processus juste et objectif de comparaison avec des professions traditionnellement masculines, en vue d'un rajustement équitable des taux de rémunération.
    Des études ont montré que l'équité salariale a tendance à avoir sa plus forte incidence sur le travail peu rémunéré. En tant que telle, c'est une initiative politique qui joue un rôle important non seulement en éliminant la discrimination mais en réduisant la pauvreté, car si vous mettez de l'argent dans la poche des travailleurs à faible revenu, ils le dépenseront sur leurs familles.
    Plusieurs chercheurs ont fait ressortir que le passage de l'aide au revenu au travail rémunéré ne sort souvent pas les femmes de la pauvreté du fait des bas salaires correspondant aux emplois à prédominance féminine, qui sont ceux-là mêmes qu'elles obtiennent typiquement. L'équité salariale ferait office d'aimant pour attirer les mères seules et d'autres femmes bénéficiaires d'aide au revenu désireuses d'intégrer ou de réintégrer la population active.
     Il est clair que l'équité salariale contribue à la réduction de la pauvreté. Mais d'aucuns s'interrogent peut-être quant au coût de la mise en oeuvre de l'équité salariale.
    Il a, dans une étude de 2004, été estimé que la suppression de la composante discrimination dans la disparité salariale entre les sexes au Nouveau-Brunswick résulterait en une augmentation de 11 p. 100 des impôts des particuliers qui seraient perçus, ce qui représenterait 609 millions de dollars pour cette seule province. Fait important, en 2004, le groupe de travail fédéral sur l'équité salariale, s'appuyant sur les données disponibles en provenance de l'Ontario et du Québec, qui ont des lois en matière d'équité salariale, a conclu que la plupart des employeurs considèrent les effets de l'équité salariale comme étant positifs, leur offrant l'occasion de renforcer leurs systèmes de rémunération tout en améliorant en même temps leurs relations de travail.
    Le Canada est l'un des pays signataires de la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, mais nous avons récemment été sévèrement critiqués. Alors que le Canada se classait au 14e rang dans le monde pour l'équité entre les sexes en 2004, le Forum économique mondial nous a fait chuter jusqu'à la 31e place dans son classement de 2007 de 130 pays.
(0915)
    Nous exhortons donc maintenant le gouvernement fédéral de lever l'une des principales barrières systémiques à la réduction de la pauvreté: la discrimination salariale.
    Cela fait cinq minutes, n'est-ce pas? Bien.
    Une législation fédérale en matière d'équité salariale favoriserait la suppression de cette barrière systémique. Nous appuyons pleinement le groupe de travail qui a déposé un rapport sur l'équité salariale en 2004. Ce rapport contenait plusieurs recommandations que j'aimerais souligner rapidement.
    Il nous faut adopter une nouvelle loi en matière d'équité salariale qui englobe les Autochtones, les personnes handicapées et les membres des minorités visibles. Il nous faut protéger tous les employés, intégrer les employés dans des régimes d'équité salariale, élaborer des méthodes d'évaluation non sexistes, veiller à ce que l'équité salariale ne soit pas négociable, appuyer l'équité salariale et créer une commission sur l'équité salariale ainsi qu'un tribunal.
    En conclusion, les femmes canadiennes représentent environ la moitié de la main-d'oeuvre rémunérée et reçoivent 38 p. 100 du revenu national. Le gouvernement fédéral pourrait contribuer à la réduction de la pauvreté en recourant à des analyses sexospécifiques et en réduisant les barrières systémiques à l'égalité des femmes. Un moyen d'y parvenir serait d'adopter une loi proactive en matière d'équité salariale.
    En conclusion, je tiens à dire merci à deux de nos bénévoles qui ont préparé ces notes pour la coalition, Gail Taylor et Lee Chalmers. Elles auraient voulu être ici, mais elles avaient d'autres engagements. Elles habitent à l'extérieur de Moncton, mais je tenais à souligner leur contribution.
    Merci, madame Perron.
    Nous allons maintenant passer à Auréa Cormier, du Front commun pour la justice sociale du Nouveau-Brunswick.
    Bienvenue. Vous disposez de cinq minutes. Allez-y, je vous prie.
    Le Front commun pour la justice sociale du Nouveau-Brunswick est une coalition d'environ 30 organisations et compte plus de 200 membres.
    Je vais faire ma déclaration en français.

[Français]

    Nous applaudissons la démarche de votre comité puisqu'un rôle important d'un gouvernement est de veiller au bien-être de sa population. Durant la dernière décennie, le Canada a connu la plus forte augmentation de pauvreté de tous les pays développés. En 1996, lorsque le gouvernement fédéral coupa près de 3 milliards de dollars dans les transferts aux provinces pour la santé et le domaine social, le Nouveau-Brunswick perdit 115 millions de dollars annuellement. Le gouvernement fédéral devrait restaurer le Régime d'assistance publique du Canada. Le Nouveau-Brunswick recevrait ainsi 50 p. 100 de ses coûts sociaux du fédéral.
    Environ 14 p. 100 de la population néo-brunswickoise vit en-dessous du seuil de la pauvreté. En mai 2009, nous avions 33 274 bénéficiaires d'assistance sociale. Nos taux provinciaux sont les plus bas au pays. De plus, beaucoup de nos travailleuses et de nos travailleurs sont pauvres. Environ 12 p. 100 gagnent moins de 8 $ l'heure.
    Nous voulons vous présenter six recommandations.
    1) Salaire minimum. Le travailleur à temps plein ne devrait pas vivre sous le seuil de la pauvreté. Nous recommandons que le gouvernement fédéral fixe, pour toute jurisprudence fédérale, un salaire qui permet de vivre et qui soit indexé au coût de la vie.
    2) Assurance-emploi. Des milliers de gens d'ici ont perdu leur emploi. Nous recommandons: que le gouvernement fédéral modifie le Programme d'assurance-emploi pour que tous les travailleurs reçoivent les prestations régulières avec 360 heures de travail; que les prestations soient augmentées à 60 p. 100 et soient basées sur les 12 meilleures semaines; que la période pour toucher l'assurance-emploi soit de 50 semaines; que l'attente de deux semaines soit abolie; et qu'une partie des surplus de l'assurance-emploi servent à améliorer les programmes de formation et d'adaptation pour les travailleurs.
    3) Services de garde à la petite enfance. En 2007, nos garderies agréées n'aurait pu accueillir que 14 p. 100 des enfants de 12 ans ou moins. Pour un parent seul qui souhaite retourner au travail, il est quasi impossible de payer les frais de garde. Nous recommandons que le gouvernement fédéral investisse des fonds pour créer et maintenir un système d'éducation et de garde pour la petite enfance qui soit universellement accessible et de qualité.
    4) Soutien aux aînés. Environ 7 p. 100 des aînés vivent pauvrement. Ce chiffre est plus élevé pour les femmes seules. Le Régime de pensions du Canada ne suffit pas. Il fut conçu pour remplacer 25 p. 100 du salaire industriel moyen. Aujourd'hui, il devrait en représenter 50 p. 100. On doit hausser graduellement les contributions au RPC. La pension de la Sécurité de la vieillesse devrait être augmentée de 15 p. 100 afin de hisser les aînés au-dessus du seuil de faible revenu. Nous recommandons que le Régime de pensions du Canada soit graduellement augmenté jusqu'à ce qu'il atteigne 50 p. 100 du salaire industriel moyen. Nous recommandons que la pension de la Sécurité de la vieillesse soit augmentée de 15 p. 100.
    5) Logement. En 2008, 4 200 personnes étaient sur la liste d'attente provinciale pour un logement subventionné. Pour combler le fossé entre la demande et l'offre, le fédéral doit investir davantage dans le logement. Nous recommandons que le gouvernement fédéral verse aux provinces les fonds nécessaires pour combler le manque de logements abordables et adéquats.
    6) Équité salariale. En 2008 au Nouveau-Brunswick, l'écart salarial entre hommes et femmes était de 2,70 $ l'heure, ce qui féminise la pauvreté. Nous recommandons l'adoption d'une loi sur l'équité salariale touchant tout ce qui est de jurisprudence fédérale.
    En conclusion, j'aimerais citer l'économiste Armine Yalnizyan, qui a dit que lorsque des politiques publiques échouent dans l'instauration d'un équilibre entre les besoins des gens sans pouvoir et l'appétit de ceux détenant le pouvoir, les bases de la démocratie sont ébranlées. L'idéal, celui d'un gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple, voilà qui commence à ressembler à un gouvernement de l'élite, par l'élite et pour l'élite. Un tel système peut durer pour un temps, mais ses jours sont comptés.
(0920)

[Traduction]

    Vous terminez pile -- c'est parfait
    Je donne la parole à Steve Bérubé.
    Vous appartenez à l'Église Unie du Canada. Vous avez la parole, monsieur.
    Lisant vos biographies en ligne, j'ai constaté que vous êtes très représentatifs, du point de vue de tout ce que vous avez fait dans vos collectivités. Évidemment, c'est pourquoi vous avez été élus par des gens comme moi pour servir notre nation.
    En tant que ministre du culte de l'Église Unie, je devrais probablement commencer par demander une minute de silence pour les Canucks de Vancouver, mais je ne vais pas insister.
    Beaucoup de gens, notamment des personnes comme Auréa et Johanne, ont beaucoup plus de connaissances que moi, tout comme ceux qui peuplent la colline du Parlement, sur le sujet de la pauvreté, et je vais davantage traiter des questions générales auxquelles vous êtes confrontés.
    Martin Luther King a dit un jour: « Nos vies commencent à décliner le jour où nous devenons silencieux sur les choses qui comptent ». Qu'est-ce qui compte le plus dans ce pays que ceux qui vivent dans le dénuement? À mes yeux, l'un des problèmes fondamentaux auxquels votre comité est confronté est que l'élimination ou la réduction de la pauvreté au Canada ne se fera que si — et seulement si — il existe la volonté politique d'y parvenir.
    L'une des choses que nous semblons avoir perdu de vue est que les budgets sont des documents moraux. Dans le budget, on peut réellement voir quelles sont les priorités du gouvernement. Les politiques ne peuvent être efficaces que si elles sont dotées de fonds suffisants à court et moyen terme; si des crédits suffisants ne sont pas affectés, il est évident que le programme ne représente pas une véritable priorité.
    Si l'on veut réduire ou éliminer la pauvreté au Canada, il faut pour cela une vision sociale claire, se traduisant par une série de programmes s'attaquant aux diverses causes de la pauvreté.
    Si l'on se place dans une perspective historique, nous voyons l'énorme impact produit par FDR durant la grande dépression avec son New Deal. Nous connaissons le pouvoir du symbolisme et de la vision, par l'exemple de Churchill qui a guidé le monde pendant la Seconde Guerre mondiale. Dwight Eisenhower était probablement le politicien le plus lucide dont j'aie lu les écrits, grâce à son expérience comme commandant suprême des forces alliées en Europe et comme président.
    La concurrence pour les ressources est une réalité avec laquelle vous autres vous débattez chaque jour. Eisenhower a déclaré: « Chaque canon jamais fabriqué, chaque navire de guerre lancé, chaque roquette mise à feu représente, au bout du compte, un vol au détriment de ceux qui ont faim et ne sont pas nourris, de ceux qui ont froid et ne sont pas vêtus ». Lyndon Baines Johnson, bien entendu, a introduit l'idée de la « Grande Société ». Avec ce programme — et il en subsiste maints éléments — les Américains ont pu surmonter la pauvreté extrême ainsi que l'injustice raciale.
    Mais les paroles par elles-mêmes n'ont pas de sens si elles ne s'appuient pas sur des programmes gouvernementaux solides. Pour constater ce qui se passe en l'absence de programmes, il suffit de voir notre défaillance à remplir les Objectifs du Millénaire pour le développement et les objectifs de réduction de la pauvreté des enfants chez nous.
    La raison tient en partie, à mon sens, à l'économie de l'offre. Dans les années 1980, l'élection de Ronald Reagan a marqué un changement de cap spectaculaire. Il croyait que si les riches devenaient plus riches, les avantages en filtreraient jusqu'aux pauvres et que tout le monde se porterait mieux.
    Si nous considérons la situation au Canada, au cours des 30 dernières années, nous avons créé une situation où aujourd'hui les 20 p. 100 des ménages canadiens les mieux nantis possèdent plus de 70 p. 100 de la richesse nationale. Parallèlement, les 20 p. 100 les plus pauvres possèdent 2 p. 100. Le fossé entre les riches et les pauvres s'est dramatiquement creusé au cours des 30 dernières années. L'économie de l'offre a également conduit à cette réalité qui fait que 17 p. 100 des enfants canadiens vivent dans la pauvreté, ce taux canadien étant pire que celui de 18 autres pays de l'OCDE.
    À mes yeux, le problème de l'économie de l'offre tient à son fondement. Son fondement, c'est la cupidité. La déréglementation du secteur financier, les baisses d'impôt et les taxes forfaitaires sont réellement fondées sur ce qui est reconnu être l'un des sept péchés capitaux: la cupidité.
(0925)
    En dépit de ce que prétendent les chefs d'entreprise et un nombre décroissant d'économistes, la cupidité n'est pas une force positive dans la société. En fin de compte, elle est immorale et ne devrait jamais être le moteur de notre économie. « J'aime payer des impôts », a déclaré un jour Oliver Wendell Holmes. « Avec eux, j'achète la civilisation ».
    Cela met en jeu la question la plus pressante à poser aux Canadiens et à leurs politiciens: Est-ce que les politiciens canadiens ont la force morale de regarder les plus riches des Canadiens dans les yeux et dire qu'ils croient en une distribution plus juste et plus équitable de la richesse de notre pays? Est-ce que les politiciens canadiens ont le courage de regarder les patrons d'entreprise et de leur dire qu'ils ont le devoir moral d'assumer leur juste part du fardeau fiscal de la nation? Si la réponse est non, alors les banques alimentaires et les foyers pour les sans-abri, les signes les plus visibles de l'économie de l'offre, continueront d'être nos industries connaissant le plus grand essor.
    En conclusion, il ne faut pas juger les pays selon la taille de leur PIB ou le nombre de millionnaires qui y vivent, ni en fonction de leur puissance militaire. Que notre nation, comme toute autre, soit jugée en fonction de la manière dont nous traitons les plus petits et les plus faibles, les sans-pouvoir et les sans-voix, les sans-abri et les pauvres.
    Merci beaucoup, Steve.
    Nous allons commencer maintenant le premier tour, avec sept minutes pour les questions et les réponses. Nous allons commencer avec mon collègue, M. Savage.
    Vous avez la parole, monsieur.
    Merci à vous tous d'être venus nous rencontrer, ainsi que de vos exposés. Ils étaient très bons.
    Je suis Mike Savage. Je suis député libéral de la région de Halifax, en Nouvelle-Écosse, et je suis ravi d'être avec mes collègues en votre compagnie ici, à Moncton.
    Je voudrais revenir sur ce que disait Steve. Il emploie à juste titre des termes comme courage moral morale, volonté politique, courage, vision et intérêts concurrents, et c'est réellement l'essence du problème. Le Canada, à bien des égards, a abdiqué sa responsabilité morale d'aider ceux dans le besoin ici, au Canada, mais aussi ailleurs dans le monde. Vous avez mentionné les OMD; j'entends par-là que nous pourrions faire beaucoup plus.
    Au bout du compte, nous pouvons faire beaucoup de ces choses.
    Auréa, vous avez mentionné vos recommandations. Elles sont toutes très raisonnables. Je peux approuver chacune d'entre elles. Le problème pour nous est de savoir ce que nous faisons si nous sommes au pouvoir. Imaginez que vous soyez le gouvernement. À quoi donnez-vous la priorité? Que faites-vous? Entreprenez-vous tout à la fois?
    Le Canada pourrait faire toutes ces choses. Je ne sais pas combien il en coûterait d'avoir un salaire vital minimal, mais sur votre recommandation trois, « investir des fonds pour créer et maintenir un système d'éducation et de garde pour la petite enfance qui soit universellement accessible et de qualité », je peux très bien envisager un tel système. Je vois ici Jody Dallaire, qui a été l'une des championnes des services de garde, non seulement ici mais dans tout le Canada, et qui est maintenant conseillère municipale à Dieppe.
    Nous pouvons faire ces choses.
    Du côté de l'AE, passer à 360 heures de travail est raisonnable. Cela coûterait probablement plus de 500 millions de dollars, comme le dit le CCPA. Je crois que Caledon dit 700 millions de dollars. TD dit 1 milliard de dollars. Passer à 60 p. 100, selon les chiffres récents de RHDCC, et selon Mme Yalnizyan, que vous avez cités, coûterait 1,8 milliard de dollars et ce chiffre irait en augmentant chaque année.
    Pour ce qui est du passage à 50 semaines, je n'en connais pas le coût. Pour le délai de carence de deux semaines, on estime le coût à environ 700 millions de dollars, et donc au total il faut compter entre 3 milliards et 4 milliards de dollars. Cela dit, ne perdons pas de vue que cela proviendrait du fonds AE, qui a affiché des excédents pendant toutes ces dernières années.
    Je veux en venir à ceci: le Canada est-il prêt, à votre avis, à réformer radicalement l'infrastructure sociale du pays? Il y a quelques semaines, ou il y a un mois, l'un de nos dirigeants politiques a mentionné dans une tribune que nous pourrions devoir majorer nos impôts à l'avenir, et le tollé a été immédiat et universel.
    Il ne fait aucun doute que nous avons les moyens de payer ces choses. Je vous le demande. Pensez-vous qu'il existe la volonté politique dans ce pays de les faire, sachant ce que cela suppose en toute probabilité, à savoir une majoration des impôts?
(0930)
    Je tends à me ranger du côté d'Oliver Wendell Holmes. Je veux bien payer des impôts car avec eux « j'achète la civilisation ».
    Le problème est que nous sommes passés dans une culture où l'on ne songe plus qu'à baisser les impôts et éliminer les services publics. À moins que les dirigeants politiques commencent à utiliser un autre langage et à faire résonner d'autres voix, des voix autres que celles qui professent radicalement que l'économie de l'offre sera notre salut à tous, non, il n'y a pas d'espoir, si les politiciens ne font pas cela.
    Il suffit de regarder la situation aux États-Unis en ce moment et d'écouter les voix économiques dominantes. Elles ne vantent plus l'économie de l'offre. Cela fait partie de notre réalité. Ce qui nous a mené là où nous sommes, c'est l'effondrement de l'économie de l'offre, qui a conduit à un écroulement du marché qui nous a coûté quelque 3 billions de dollars et nous a ramené de nombreuses années en arrière... Je pense que c'est plus de 10 ans en ce qui concerne l'indice boursier.
    Je suis d'accord avec Steve. Je pense que c'est une question de priorités.
    Je vous en prie, parlez la langue que vous voulez. Ne vous inquiétez pas de nous. Nous avons l'interprétation.
    Ça va, je suis à l'aise dans les deux.
    J'ai écouté des chercheurs qui sont allés dans plus de 20 pays demander aux consommateurs s'ils seraient prêts à payer plus d'impôts. Étonnamment, la majorité a dit oui, à condition d'être assurés que l'argent servira à réduire la pauvreté. Si l'on présente et gère la chose adéquatement, je pense que l'on peut augmenter les impôts et s'en servir pour instaurer une distribution des revenus plus égalitaire.
    Quant à ce que le Centre canadien de politiques alternatives a dit il y a tout juste une semaine environ, je pense que le maintien de l'inégalité des revenus est dangereux. Ce n'est pas viable. Je crois que ceux qui réfléchissent à long terme devraient réellement en avoir conscience.
    Voulez-vous ajouter quelque chose, madame Perron?

[Français]

    Mes collègues l'ont bien expliqué: il s'agit de présenter un message différent. Si on demande aux gens s'ils veulent qu'on réduise leurs impôts, il est certain qu'ils diront oui. Cependant, si on parle des valeurs qui sont importantes pour notre société, par exemple l'égalité et l'élimination de la discrimination, je pense qu'on obtiendra une autre réponse.
(0935)

[Traduction]

    Je ne suis pas sûr que nous en soyons là; je pense certainement qu'il faut faire en sorte que le public se penche sur la pauvreté.
    À mon avis, le public considère le coût de la pauvreté et non pas seulement le coût de la lutte contre la pauvreté et réalise que nous sommes tous dans le même bateau et qu'il faut faire plus.
    La pauvreté comporte un coût économique énorme. Le coût principal concerne la santé. Les pauvres consultent le médecin peut-être 40 p. 100 de plus, ils sont moins productifs et gagnent moins. Par conséquent, ils paient moins d'impôts. Accroître le budget de la santé et ne rien faire pour réduire la pauvreté est une très mauvaise décision économique.
    Le Nouveau-Brunswick mène actuellement des discussions en vue d'une stratégie anti-pauvreté, si j'ai bien compris. Est-ce qu'il y en a parmi vous qui participent à cela?
    Oui, tout à fait.
    Merci.
    Je reviendrai peut-être à cela plus tard.
    Merci, monsieur Savage.
    Nous allons maintenant passer au Bloc, avec Mme Beaudin.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup à vous d'être ici.
    Madame Cormier, dans votre présentation, vous avez parlé de services de garde et d'équité salariale. Dans les dossiers de statistiques de Moncton, par exemple, on constate qu'il y a beaucoup de couples avec deux enfants, mais également beaucoup de parents qui vivent seuls avec un enfant. Les services de garde sont un problème pour vous.
    Êtes-vous en mesure de nous donner plus d'information sur les services de garde à Moncton? Comment un parent ou un couple qui veut bénéficier de ce service ici même vit-il cette situation?
    Ma collègue qui se trouve dans la salle est mieux à même que moi de répondre à votre question.
    Oui, c'est vrai.
    Ce que je peux dire, c'est qu'il y a une pénurie importante de services de garde. Souvent, des mères qui sont en couple me disent que dès qu'elles sont enceintes, elles placent le nom de leur enfant sur la liste d'un service de garde, de peur de ne pas pouvoir obtenir un service de qualité. De plus, le coût est relativement élevé: il se situe aux environs de 35 $ par jour. Les gens qui travaillent à bas salaire sont incapables de payer un tel montant, ce qui peut occasionner du retard dans le développement de l'enfant, dans sa socialisation. Tout ça engendre énormément de pauvreté, à long terme.
    Cela m'amène à ma deuxième question, qui s'adresse probablement davantage à Mme Perron. Comme on souhaite une loi sur l'équité salariale, ne devrait-on pas commencer par créer des places en garderie ou des centres de la petite enfance, ce qui permettrait aux femmes d'aller travailler?
    En réalité, plusieurs femmes sont sur le marché du travail, mais n'ont pas accès à un service de garde formel. C'est souvent la voisine, l'oncle ou la tante qui fournit ce service.
    Je peux parler de mon expérience personnelle quand j'étais aux études. Il n'y avait pratiquement pas de place pour les poupons. Cinq personnes différentes sont venues garder chez moi, parce qu'il y avait toujours quelque chose: elles se trouvaient un meilleur emploi ici, elles s'étaient fait mal au dos. Toutes sortes de problèmes ont rendu cela très difficile.
    Il faut les deux, main dans la main. Les deux sont nécessaires. Il faut l'équité salariale afin que l'emploi soit suffisamment payant pour les femmes et que ça leur permette une véritable autonomie financière. Il faut des services de garde qui répondent vraiment aux besoins des parents et leur permettent d'aller sur le marché du travail sans qu'ils se préoccupent constamment de ce qui peut potentiellement se passer avec les enfants.
    Les employeurs sous-estiment le coût de l'iniquité salariale. Dans des domaines comme les garderies ou les services sociaux, où les auxiliaires familiales offrent des services à la maison aux personnes âgées, par exemple, il y a un turn over assez élevé, comme on dit en anglais. On change de personnel fréquemment, quand les salaires ne sont pas suffisamment élevés. Si les employeurs pensaient un peu plus aux coûts liés à la formation constante d'une nouvelle main-d'oeuvre...
    Il faut aussi assurément une implication des gouvernements qui permette d'offrir des salaires suffisants dans certains domaines et services, comme les garderies.
(0940)
    Vous estimez que, dans notre étude sur la lutte contre la pauvreté, nous devrions traiter prioritairement et parallèlement de l'instauration de places en garderie et de l'équité salariale dans le cadre d'une loi sur l'équité salariale qui soit non négociable.
    Parmi les mesures que vous nous présentez et qui sont des mesures qu'on pourrait traiter de front, quelle serait la mesure prioritaire si on souhaitait briser le cycle de la pauvreté et avoir un impact positif? Vous parlez du logement, des centres de la petite enfance.
    Les six ou sept points qu'on a mentionnés sont tous importants. J'essaie de militer en faveur des gens qui sont les plus pauvres, au plus bas de l'échelle.
    Je considère que la question du salaire minimum est très importante. Le gouvernement fédéral — je sais — n'a pas l'autorité de légiférer sur le plan provincial, mais il peut donner l'exemple. Il peut être un incitatif.
    Si, dans tous les domaines qui sont de compétence fédérale, vous aviez le courage de légiférer quant à un salaire minimum, ça aurait un effet d'entraînement. C'est extrêmement important.
    Ensuite, les gens très mal pris, particulièrement ici au Nouveau-Brunswick, sont prestataires de l'assurance-emploi. On a beaucoup de travail saisonnier et il y a eu beaucoup de congédiements, particulièrement dans le domaine forestier. Vu l'actuelle situation, et si on ne la change pas, ces gens vont vraiment devoir devenir prestataires du régime de l'aide sociale qui est le pire au Canada — 294 $ par mois pour une personne employable. Ce seraient mes priorités.
    Viendrait ensuite le logement, car il gruge une partie importante du revenu. On devrait avoir beaucoup plus de programmes fédéraux et provinciaux qui transfèrent des fonds importants pour permettre d'avoir des logements coopératifs, des logements organisés par des groupes à but non lucratif, surtout.
    S'est-il construit des logements au cours des dernières années au Nouveau-Brunswick? De quels types de logements s'agit-il principalement?
    On en a eu plusieurs types, par exemple du logement coopératif. Justement, tout dernièrement, on a ouvert des bâtiments. On a aussi des compagnies privées à but lucratif qui s'y intéressent.
    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Martin.
    Monsieur, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être venus nous rencontrer, merci du travail que vous faites et de nous avoir fait part de vos réflexions. Nous avons certainement entendu ici un certain nombre de très excellentes suggestions quant à la façon de relever les démunis, en commençant avec l'équité salariale et un programme national de garde d'enfants, jusqu'au logement et à l'aide aux personnes âgées. La liste est longue. Tout cela est conforme à ce que nous entendons dans d'autres provinces.
    Cependant, il ne semble simplement pas exister un endroit au Canada, par les temps qui courent, où existe la volonté politique, comme on l'a dit, de prendre ne serait-ce qu'une de ces mesures, et encore moins toutes. Dans le plus récent budget, nous avons même vu que les femmes se voient privées de la possibilité de réclamer l'équité salariale. La suppression de ce recours est une mesure régressive, à mon sens.
    Mais cela vous montre quel est le vent politique qui souffle en ce moment et qu'il va nous falloir contrer d'une façon ou d'une autre. Bien sûr, la réponse que l'on oppose sans cesse est que nous n'avons pas les moyens de faire telle et telle chose. Nous pouvons nous permettre de donner au moins 250 milliards de dollars d'allègements fiscaux aux sociétés et aux particuliers très prospères, mais nous n'avons pas les moyens de consacrer ne serait-ce qu'un pourcentage d'une telle somme pour régler le genre de problèmes que vous nous avez soumis.
    Ce que nous cherchons à faire, entre autres, avec ce comité et certains des travaux connexes, c'est changer la direction du vent et créer une atmosphère politique permettant la prise de certaines de ces mesures. Je sais qu'autour de cette table nous avons quelques très bons politiciens qui, de par leur participation et leur interaction dans les discussions tenues jusqu'à présent, démontrent qu'ils savent au moins écouter et sont désireux de réunir les conditions où une action pourra effectivement être entreprise.
    J'ai apprécié certaines de vos citations, Steve. Je cite souvent Martin Luther King. Lorsqu'il a fait adopter la loi sur les droits civils aux États-Unis, il voulait ensuite donner le droit de vote aux Noirs, mais on lui a dit qu'il avait dépensé tout son capital politique sur la première loi et qu'il lui faudrait attendre longtemps la prochaine. Il a décidé qu'il n'allait pas attendre.
    Il est allé sur la place publique à Washington et a vu beaucoup de gens déambuler avec leur doigt en l'air. C'étaient les politiciens qui voulaient voir d'où venait le vent pour décider comment ils allaient voter sur tel ou tel projet de loi.
    Il a conclu qu'il existe probablement trois catégories de politiciens, même si on ne peut pas nous ranger tous facilement dans l'une d'elles. Il y a les politiciens qui vont toujours faire ce qu'il faut, ensuite les politiciens qui, pourvu qu'on les assoie et leur serve les bons arguments, se laisseront convaincre de faire ce qui est bien. Ensuite, il y a le groupe plus important de politiciens qui se promènent avec leur doigt en l'air. King a décidé que la meilleure chose à faire serait de « changer le vent », car alors on peut tous les mettre de son côté. Il a lancé son mouvement. Nous savons aujourd'hui qu'il a façonné l'histoire.
    Comment faisons-nous cela au Canada? Je suppose que c'est là ma question. Comment changeons-nous le vent?
    Avez-vous des connexions? Les églises à travers le pays, particulièrement l'Église unie, ont fondamentalement une mission de justice sociale, soit d'amener les gens à dépasser leur intérêt égoïste pour regarder le tableau d'ensemble. Il existe des mouvements de lutte contre la pauvreté et des mouvements pour la justice sociale.
    Est-ce que vous êtes en relation avec ces mouvements à travers le pays et les groupements féminins? Je sais que les promoteurs des services de garde entretiennent ces contacts. J'ai été à un merveilleux rassemblement à Winnipeg il y a quelques années où ils se sont tous retrouvés pour conjuguer leur énergie et ils ont presque réussi à arracher un programme national de garderies. Cela ne s'est finalement pas fait, mais c'est resté un événement marquant.
    Comment changeons-nous le vent?
(0945)
    L'une des premières choses est de passer de la question de savoir « qui a le doigt en l'air? » à la réalité que certains de nos amis de l'Ouest ont vu le vent. C'est une chose plutôt nébuleuse, n'est-ce pas?
    Ce qui se passe vraiment, c'est qu'avec des réponses de 17 secondes à des questions, on ne peut pas réellement enclencher une dynamique qui va mener le pays à s'attaquer à ces problèmes. Il faut pour cela une conversation beaucoup plus soutenue et prolongée.
    En outre, la manipulation des médias a réellement tué le discours politique dans ce pays. C'est extrêmement regrettable.
    C'est en partie à nous qu'il incombe de changer la direction du vent, d'amener une visualisation du vent. Ce n'est que lorsqu'on leur présente des arguments moraux forts que les gens vont commencer à changer leur optique, pour ne plus voir seulement leur intérêt propre mais l'intérêt national. Nous l'avons constaté maintes et maintes fois au cours de l'histoire.
    C'est pourquoi j'ai puisé dans les paroles de gens comme FDR, Churchill, Johnson et Kennedy. Même au Canada nous continuons à parler d'une « société juste »; dans l'Est du Canada au moins, nous parlons d'une société juste. Je sais que dans l'Ouest ils parlaient d'un programme énergétique national et c'est le seul souvenir que leur a laissé cet homme.
    Mais je pense que c'est votre responsabilité à vous. Vous êtes les leaders de la nation. Si vous ne changez pas le discours politique... Nous pouvons faire notre possible sur le terrain et en discutant avec les individus et les groupes, mais c'est réellement à vos pieds que réside la responsabilité.
(0950)
    Je pense que les politiciens sont élus pour gérer le bien commun, mais il est triste qu'ils ne le fassent pas toujours. Comme activistes, nous dépensons tellement d'énergie à chercher à convaincre le public, car nous savons qu'ils ne vont bouger que si le public appuie les suggestions que nous faisons.
    En un sens, il n'est pas normal que les citoyens comme nous doivent dépenser toute leur énergie à faire bouger l'opinion publique en faveur de ce qui est réellement le bien commun. Tant que cela ne sera pas fait, je crois que rien ne changera, tant qu'une bonne partie au moins de la population n'appuiera pas ce mouvement vers la réduction de la pauvreté.
    Merci, Tony.
    Nous allons maintenant passer au dernier intervenant du premier tour.
    Monsieur Komarnicki, monsieur, vous disposez de sept minutes.
    Cela ne fait aucun doute: il se brasse beaucoup d'air chaud à Ottawa, c'est sûr, et beaucoup de politiciens soufflent dans le vent, en quelque sorte.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Ed Komarnicki: Mais la réalité est que nous avons tous un intérêt commun, et je crois qu'il est juste de dire que l'objectif est d'aider ceux qui en ont le plus besoin, les plus vulnérables.
    Lorsque je vous écoute défendre vos causes, je conviens qu'il y a place pour des améliorations, indépendamment de votre couleur politique, mais la question est de savoir comment s'y prendre? Où faut-il placer nos ressources et nos fonds? On cherche à équilibrer les divers intérêts et ce n'est pas toujours aussi facile qu'il ne paraît.
    Vous pouvez dire que nous pouvons taxer et dépenser, et je sais que mon éminent collègue, M. Savage, penche en ce sens. Son chef a dit qu'il nous faudra majorer les impôts. Je formule des réserves à cet égard, car je pense qu'il faut plutôt ajuster les priorités de dépense. Pour les contribuables, l'idée de payer plus d'impôts n'est guère plaisante.
    Mais il est une chose que nous ne devons pas faire — et c'est ce qui s'est passé sous le gouvernement libéral de Martin — et c'est amputer de 25 milliards de dollars les transferts aux provinces au titre du Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Cela ne fait qu'équilibrer les comptes fédéraux. N'importe qui peut équilibre les comptes en taillant dans les dépenses ou en majorant les impôts, mais il faut être prudent. Lorsqu'on a coupé les transferts aux provinces, je pense que ce sont les plus vulnérables qui ont trinqué, et non les nantis.
    Mon opinion est qu'il faut préserver les augmentations du Transfert canadien en matière de programmes sociaux, et je sais que nous l'avons fait. Par exemple, le transfert va passer de 2,4 à 3,2 milliards de dollars en 2008-2009 et continuer d'augmenter ensuite. La difficulté, lorsqu'on transfère des fonds aux provinces, c'est de savoir ce qu'elles vont en faire. D'aucuns ont dit qu'il faudrait peut-être assortir les transferts de plus de conditions afin de dicter l'utilisation de l'argent. J'aimerais avoir votre avis sur l'opportunité de faire cela.
    Par ailleurs, M. Berubé a déclaré que le budget constitue une déclaration morale. Je pense qu'il y a là une part de vérité, et j'ai donc passé en revue ce que nous avons fait ces derniers temps. Nous avons alloué 2 milliards de dollars aux logements sociaux et à la rénovation des logements sociaux existants. Cette somme comprenait 400 millions de dollars pour les personnes âgées et 75 millions de dollars pour les personnes handicapées. Je trouve que c'est pas mal.
    J'ai regardé notre assurance-emploi. Mon collègue a parlé d'un coût de 400 à 500 millions de dollars, mais ce que nous avons fait sur le plan de l'assurance-chômage — ou assurance-emploi, appelez-la comme vous voudrez — a été d'injecter 4,5 milliards de dollars dans l'économie, a) en n'augmentant pas les cotisations, alors que les prestations augmentaient, et b) en prenant des mesures très précises.
    Par exemple, nous avons augmenté de cinq semaines la durée des prestations AE. Cela coûte 1,1 milliard de dollars. En outre, nous avons un programme de formation pour ceux qui ne sont pas admissibles à l'AE, à hauteur de 500 millions de dollars. Il y a un autre 500 millions de dollars pour les prestataires de longue durée. Il y a aussi un programme de partage du travail de 200 millions de dollars. Si vous totalisez le tout, cela fait quelque 3,4 milliards de dollars.
    Vous pourrez dire: « Eh bien, il faut faire encore plus ». Je peux admettre cela. Mais ce sont des mesures qui, je pense, ciblent les plus vulnérables. Si vous regardez notre programme de dépenses d'ensemble, il va dans cette direction.
    Je sais que vous aimeriez voir supprimer le délai de carence de deux semaines et réduire le nombre d'heures à 360, ce qui signifie qu'il faudrait travailler environ deux mois et quart pour devenir admissible. Mais la question est de savoir si c'est le meilleur usage de notre argent, ou bien faudrait-il plutôt le placer ailleurs? Je regarde ce que nous faisons pour les étudiants, par exemple, en augmentant sensiblement la quantité d'éducation. Je pense que, d'un point de vue moral, nous avons accompli des choses notables dans le budget. Il reste encore du travail à faire, je l'admets.
    Premièrement, j'aimerais avoir vos avis sur le Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Ensuite, en ce qui concerne l'équité salariale, je sais qu'elle est aussi un sujet de vif débat.
    J'aimerais demander à Mme Perron, peut-être, si elle estime qu'il y a un rôle à jouer par les syndicats lorsqu'ils négocient les conventions collectives afin d'assurer l'égalité salariale à ce niveau. L'alternative est de régler cela en cour de justice, mais c'est une méthode procédurière qui prend des années. Deuxièmement, vous avez dit qu'il faudrait peut-être procéder par voie législative. Si c'est vrai, quel en est le coût, et faudrait-il le faire en une seule fois, puisque c'est une question de justice sociale, ou bien progressivement?
(0955)
    Je vous pose ces deux questions.
    Peut-être Steve pourrait-il commencer avec le Transfert canadien en matière de programmes sociaux, et puis Mme Perron pourra répondre à l'autre question.
    Tout d'abord, sachez que je crois aux miracles. Par conséquent, je prie pour l'abandon de l'économie de l'offre. Mais je n'y compte pas.
    C'est utile si vous êtes pasteur.
    N'est-ce pas?
    L'une des questions est celle-ci: Comment mangez-vous un éléphant? La réponse, bien sûr, c'est « une bouchée à la fois ». Vous mentionnez des augmentations sensibles dans divers domaines. Combien a-t-on prélevé sur l'économie, sur les recettes fiscales fédérales, avec la baisse de deux points de la TVH? Je sais que je l'apprécie réellement chaque fois que je vais chez Tim Hortons. Cela fait une énorme différence pour moi: le coût de mon café est passé de 1,75 $ à 1,72 $ à peu près.
    Cela fait partie de la réalité: il faut examiner où nous prélevons des fonds, et pas seulement dans les poches des provinces avec les changements au TCPS, car il faut savoir aussi que nous avons réduit les taxes non seulement au niveau de la TVH, mais aussi au niveau de l'impôt des sociétés, si l'on regarde le tassement des paliers d'imposition...
    Mais ma question portait spécifiquement sur le Transfert canadien en matière de programmes sociaux et si vous pensez qu'il faudrait imposer des conditions à l'utilisation de l'argent. Oui bien faudrait-il simplement virer l'argent comme dans le passé, comme un transfert forfaitaire, sans conditions précises quant à l'utilisation de l'argent?
    Oh, j'avais compris votre question.
    J'attends une réponse.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Ed Komarnicki: Ou du moins...
    C'est réellement un élément à négocier avec les provinces, n'est-ce pas? Ce n'est pas de mon ressort. Ce qui est de mon ressort, c'est de dire en tant que citoyen: « Dans quelle mesure le règlement de ces problèmes est-il une priorité nationale? » Ce n'est pas de me prononcer sur les modalités d'exécution d'un programme par les gouvernements fédéral et provinciaux. Cela dépasse ma compétence.
    Pourrions-nous avoir une réponse rapide de Mme Perron sur l'équité salariale?
    Certainement, mais j'aimerais quand même dire un mot sur les transferts. Personnellement, je pense qu'il faudrait les assortir d'une certaine responsabilité. S'ils sont censés servir à certaines choses, il faudrait des conditions pour assurer qu'il en est bien ainsi. Si des fonds sont transférés pour les services de garde, par exemple, j'aimerais voir des conditions, afin que nous ayons les mêmes normes à travers le pays. Je n'exprime pas là nécessairement le point de vue de la coalition, car nous n'avons pas réellement eu à débattre de ce genre de question, mais personnellement, je trouve cela important.
    Passant à l'équité salariale, je crois que les syndicats ont un rôle à jouer sur le plan de la participation aux programmes d'équité salariale. Ils ne devraient pas avoir l'option de négliger l'équité salariale, celle-ci étant un droit de la personne. En revanche, je pense que la responsabilité ultime incombe aux employeurs.
    On ne peut réellement prétendre que les employés et les employeurs possèdent le même pouvoir. Étant employé, je trouverais cela excellent, mais la réalité est que l'employeur a le dernier mot en matière de salaires et c'est donc lui qu'il faut rendre responsable de l'équité salariale. C'est d'autant plus important que tout le monde n'est pas syndiqué, et donc si vous recherchez l'équité salariale pour les secteurs tant public que privé, vous devez réellement veiller à ce que les employés non syndiqués aient accès à l'équité salariale.
    Encore une fois, je souligne que l'équité salariale est un droit de la personne. Elle a été reconnue comme telle à l'échelle internationale il y a des décennies de cela.
(1000)
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer au deuxième tour, qui sera de cinq minutes.
    Je vais commencer avec M. Savage.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais résister à l'envie de répondre aux remarques d'Ed concernant le TCPS. Nous avons l'occasion à la Chambre des communes de débattre de ces choses, ce que nous faisons très calmement et rationnellement, à l'occasion.
    Mais je ne mets pas en doute sa motivation à vouloir sérieusement s'attaquer à la pauvreté. Je ne peux pas en dire autant de tous ses collègues, ni de tous les miens, d'ailleurs, mais notre comité cherche des solutions.
    Je suis intrigué, et ravi, par votre mention répétée de l'économie de l'offre. J'ai noté que l'un de ses architectes aux États-Unis, Jack Kemp, est récemment décédé. La loi Kemp-Roth des années 1970 a conduit à Ronald Reagan et à l'économie de l'offre, l'idée en gros étant que l'on écarte l'État du chemin et laisse les riches s'enrichir, et que les effets vont percoler vers le bas. Cela a conduit non seulement à l'effondrement de l'infrastructure sociale mais aussi à d'énormes déficits, ce qui n'était jamais censé arriver.
    De fait, si vous comparez ce modèle à celui de certains pays scandinaves ou de pays plus progressistes qui investissent dans l'infrastructure sociale, ces derniers se portent bien économiquement. Ils gèrent plutôt bien leurs budgets et s'occupent de leurs citoyens d'une manière que nous ferions probablement bien d'émuler.
    En ce qui concerne l'AE, ce graphique du Caledon Institute indique le pourcentage des hommes et des femmes et le pourcentage global moyen de Canadiens bénéficiant de l'assurance-emploi. Ce dernier est tombé d'un sommet de 83 p. 100 en 1990 à 43 p. 100. Maints partis doivent en partager le blâme. Le ministre parle de 82 p. 100, ce qui est techniquement exact, mais c'est un chiffre fabriqué, arrangé, qui ignore le fait que tant de travailleurs sont systématiquement écartés de l'admissibilité aux prestations AE.
    Mon ami Dominic LeBlanc, que certains d'entre vous connaissent, parle souvent de deux ouvriers d'une même usine pouvant être licenciés en même temps. L'un pourra vivre à Moncton et l'autre quelque part sur la côte acadienne. L'un sera admissible aux prestations et l'autre non. Cette inégalité fondamentale doit être réparée, et je pense donc que la norme de 360 heures est très fondée. Ensuite, vous regardez si vous faites les deux semaines ou les cinq semaines ou autre chose.
    J'aimerais vous demander quelque chose. Peut répondre qui veut. Un certain nombre de Canadiens ne participent pas pleinement de la prospérité de la nation. Les deux groupes les plus notables sont les Autochtones et les personnes handicapées.
    La semaine dernière, certains d'entre nous avons eu l'occasion de passer une journée en fauteuil roulant pour l'Association canadienne des paraplégiques. Tony et moi l'avons fait, et peut-être quelques autres ici. C'est une expérience qui vous ouvre les yeux et vous donne un petit aperçu de ce que c'est. Je me demande si l'un ou l'autre d'entre vous a des idées précises sur une infrastructure sociale qui protégerait mieux et améliorerait le sort des Canadiens handicapés et leur ouvrirait les portes.
    J'aimerais traiter la question de l'invalidité selon la perspective du Nouveau-Brunswick. Nous avons beaucoup de personnes gravement handicapées, mais notre province leur refuse cette étiquette. Je ne sais comment changer cela, mais cela fait énormément de tort à des personnes qui sont dans un grand besoin. Je pense qu'il faudrait s'attaquer à cela au niveau provincial. Nous avons essayé, et nous allons pousser pour cela par le biais du plan de réduction de la pauvreté.
    Je ne sais pas si au niveau fédéral vous pourriez établir des critères uniformes d'invalidité. Il faudrait certainement prendre le Nouveau-Brunswick par la main et lui montrer le chemin.
    Voulez-vous dire qu'elles ne sont par définition pas considérées comme des personnes handicapées admissibles à...
    C'est juste. Pour être considéré handicapé au Nouveau-Brunswick, il faut être aveugle, sourd, malade mental ou confiné en fauteuil roulant. Ils sont très, très stricts. C'est un comité de trois personnes et il n'y a pas de recours. Il faut réellement remanier cela.
(1005)
    Je ne sais pas s'il me reste du temps, mais pour ce qui est de la stratégie anti-pauvreté du Nouveau-Brunswick, quelqu'un pourrait-il nous donner une idée de ce sur quoi elle va déboucher?
    La Nouvelle-Écosse a récemment publié la sienne, et pour vous parler franchement, c'était un peu précipité. C'était un peu une idée de dernière minute, mais au moins ils essaient de faire quelque chose. Terre-Neuve-et-Labrador a fait certaines choses merveilleuses. Le Québec a toujours eu une bonne infrastructure sociale. L'Ontario a publié un bon rapport. Je me demande simplement vers quoi se dirige le Nouveau-Brunswick.
    C'est en vigueur depuis le 16 octobre. Nous avons eu des audiences dans 14 régions du Nouveau-Brunswick. Il y a eu beaucoup de participation publique. J'ai quelques questions.
    Ceux qui vont formuler la stratégie sont réellement choisis par les politiciens, ce qui impose certaines limites aux changements qui peuvent être apportés. Ma plus grosse inquiétude est que notre ministre des Finances, avec des réductions d'impôt assez frappantes, a sérieusement diminué les recettes fiscales de la province. Donc, dans les années à venir, avec très peu de rentrées fiscales, je ne sais pas ce que l'on peut faire dans le cadre d'une stratégie de réduction de la pauvreté.
    Merci.
    Nous allons passer à M. Lobb.
    Vous avez cinq minutes, monsieur.
    Merci beaucoup.
    Nous avons entendu énoncer beaucoup d'idées similaires au cours de notre étude, tant hier à Halifax qu'aujourd'hui à Moncton. Ce que j'aimerais faire, si possible, c'est prendre un peu de recul. La plupart des suggestions concernent les plus vulnérables.
    Au printemps dernier, j'étais à Moncton pour affaires. La société pour laquelle je travaillais a un bureau ici. On m'a dit que Moncton a atteint des résultats remarquables en ce qui concerne la création d'emplois dans l'Est du Canada. Je me demande si vous pourriez donner au comité une idée de ce qui s'est déroulé ces 10 dernières années sur le plan de la création d'emplois, particulièrement autour de Moncton. Je le demande sachant bien que nombre de vos suggestions concernent les plus vulnérables.
    Cependant, je me demande si vous pourriez nous éclairer à ce sujet, qui est important si l'on veut passer à l'étape suivante. N'importe lequel d'entre vous peut commencer.
    Ce qui s'est passé dans l'agglomération de Moncton peut se résumer en deux choses, réellement. Une infrastructure de télécommunications a été mise en place qui a réellement permis à cette ville et à cette région de décoller. Il s'agissait principalement d'investissement des sociétés de télécommunications qui avaient plus ou moins un monopole à l'époque. C'était Aliant dans cette région-ci, et cela a aussi été fortement promu par Frank McKenna, que nombre d'entre vous connaissent.
    Je ne suis pas de la région, mais ayant vécu dans diverses régions du pays marquées par une énorme pauvreté, ce qui m'a réellement impressionné à Moncton c'est à quel point la population fait cause commune, à l'échelle individuelle et au niveau communautaire, pour tenter d'amener des changements positifs. C'est visible non seulement dans le climat économique, mais aussi dans une bonne partie de l'infrastructure sociale mise en place. Il y a un réseau solide de gens qui ont travaillé très fort et qui sont réellement résolus à faire avancer cette ville.
    Je pense que Moncton est une histoire de réussite. Vous avez tout à fait raison. Lorsque toute l'activité ferroviaire s'est effritée, avec CN et ainsi de suite, il y a eu un effort concerté, un effort collectif pour rebondir. Cela a réellement fait la différence. Je pense aussi que d'être une ville bilingue et d'avoir une bonne université a beaucoup servi Moncton. C'est réellement quelque chose à considérer.
    Je sais qu'il y a des activités visant à créer des emplois pour les femmes démunies. Tout récemment, par exemple, le groupe appelé Support To Single Parents, le groupe de Nancy Hartling, s'est fait le champion d'un programme. Je crois qu'il est financé par le gouvernement fédéral. Il cherche à insérer dans le marché du travail les femmes de zones économiques déprimées et c'est un projet très bien conçu. Voilà donc quelque chose de positif.
    Je pense que Moncton devrait miser sur ses atouts culturels, car nous avons beaucoup de culture dans cette ville, tant acadienne qu'anglophone. Je pense que nous devrions rechercher des façons de développer cet aspect de l'économie touristique.
(1010)
    J'apprécie vos remarques. D'une certaine façon, je considère Moncton comme un modèle. Encore une fois, je ne veux pas perdre de vue les plus vulnérables ni le besoin de logements et de programmes de soutien pour eux, mais une fois cela fait, de réellement décoller et prospérer dans la population active, comme je l'ai vu ici... Comme vous l'avez mentionné, le bilinguisme est un énorme attrait pour une entreprise. Cela ne fait aucun doute. Mention a également été faite du premier ministre McKenna et de son action pour l'infrastructure informatique, qui est aussi un énorme atout.
    Une chose intéressante, et certaines de vos remarques sur la formation et la main-d'oeuvre me l'ont rappelé, c'est que nous avons eu du mal à combler certains de nos postes de haute technologie. Je pense que cela se prête très bien à certains des programmes que nous avons inscrits dans notre plan d'action économique, qui comporte un volet de recyclage et de perfectionnement professionnel. En outre, pour revenir à la question de l'équité en emploi pour les hommes et les femmes, Moncton est réellement une économie informatique, à mes yeux. C'était là notre domaine d'activité. C'était une société de logiciels où l'équité salariale était assurée. Les programmeurs, gestionnaires de projets et de programmes, qu'ils soient hommes ou femmes, sont payés la même chose; ce n'est pas une main-d'oeuvre ouvrière.
    C'est pourquoi j'ai été ravi de venir à Moncton pour entendre parler de cela, car il se fait beaucoup de bonnes choses. Il existe aussi des problèmes très sérieux, mais à bien des égards on peut considérer le verre comme à demi-plein.
    Merci.
    Merci, monsieur Lobb.
    Nous avons un autre intervenant. Nous allons conclure avec Mme Beaudin.
    Vous disposez de cinq minutes, si vous voulez.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Vous avez dit vouloir développer une stratégie de lutte contre la pauvreté ici, au Nouveau-Brunswick. Par contre, le gouvernement ne semble pas prendre la direction que les acteurs et décideurs intéressés désirent lui voir prendre. Vous disiez même que le comité avait été déterminé un peu à l'avance. Ça me touche parce que je souhaite que vous, les partenaires sur le terrain, soyez présents et conseilliez le gouvernement.
    Au Québec, c'est à la suite d'une mobilisation massive de la société civile, des partenaires et des organismes, qu'une loi cadre a été mise en vigueur par le gouvernement, en 2002, pour lutter contre la pauvreté. Depuis ce temps, nous avons des centres de la petite enfance où les frais sont de 7 $ par jour et des politiques familiales dans plus de 60 municipalités. Dans le cas des politiques familiales, des partenaires se réunissent avec des représentants des municipalités et du gouvernement pour décider de leurs propres politiques au sein de la municipalité ou de la communauté. Nous travaillons à des mesures portant sur la conciliation famille-travail. Le salaire minimum vient d'être augmenté à 9 $ l'heure. Nous avons une loi sur l'équité salariale.
    Nous avons la preuve que ça donne des résultats. En effet, le taux de pauvreté a diminué au Québec. À cet égard, je pense que tout ce dont vous parlez peut avoir des répercussions très concrètes. Par contre, j'ai envie de vous dire, comme nous l'avons dit à votre collègue, qu'il est beaucoup plus facile de botter les fesses de celui qui est plus près de vous. Sans que ça remette en cause la contribution du gouvernement fédéral, je crois qu'il faut insister pour que le gouvernement provincial soit présent. Il faut dire aussi qu'une mobilisation est essentielle. Il faut continuer cette lutte.
    On a parlé d'initiatives qui avaient été une réussite chez vous. Est-ce que certaines d'entre elles, qui pourraient servir d'inspiration, ont permis de lutter contre la pauvreté?
    Au Front commun pour la justice sociale, nous sommes proactifs dans ce domaine. Par exemple, la semaine dernière, nous avons rassemblé entre 12 et 15 organismes à but non lucratif qui croient vraiment que ce plan de réduction de la pauvreté devrait avoir du mordant. Nous attendons la réaction de tous ces gens-là pour produire un document, qui sera substantiel. Par contre, je sais qu'il va falloir déployer énormément d'énergie. Je pense que nous sommes un peu comme celui qui fait rouler une pierre en montant la colline.
(1015)
    Exactement.
    Il y a quelqu'un en haut qui la retient?
    Je dis bravo au Québec, qui a été si fort et exemplaire. Comme vous le disiez, c'était une très vaste mobilisation que le gouvernement n'a pu ignorer. Je crois que le Nouveau-Brunswick a encore beaucoup de chemin à faire avant d'atteindre ce niveau de mobilisation. C'est une tâche énorme.
    En 2005, un sondage réalisé au Québec a révélé que sept personnes sur dix ne souhaitaient pas de baisse d'impôt.
    Une autre chose qu'on peut apprendre du Québec, concernant cette mobilisation, est le fait qu'il reconnaît la participation de la société civile au développement des politiques sociales et économiques. Ce n'est peut-être pas vraiment le cas ici. Le travail du Front commun pour la justice sociale est entièrement bénévole. Le budget est de 5 000 $ par année. Dans le cas des groupes de femmes, c'est un peu la même situation. On a des difficultés présentement parce que le travail de revendication n'est plus financé au niveau fédéral. Quand il l'était, ça nous aidait beaucoup, compte tenu que dans cette province, les organismes de défense des droits n'obtiennent pas de financement. Cette particularité fait que la société civile est relativement affaiblie.
    Merci beaucoup, madame Perron.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Je veux juste prendre un moment pour remercier tous nos témoins d'être venus nous rencontrer aujourd'hui.
    Nous savons que vous oeuvrez tous chaque jour en première ligne. Merci d'avoir pris le temps sur votre calendrier chargé de venir ici et de nous offrir vos suggestions sur ce sujet très important.
    La séance est levée.
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