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Bienvenue à toutes et à tous à la 28
e réunion du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées du mercredi le 13 mai 2009, de 9 heures à 10 h 30.
Aujourd'hui, le comité en est à l'étape montréalaise d'une tournée dans tout le Canada qu'il effectue au sujet de la pauvreté et qui vient tout juste de commencer. Dans les provinces de l'Atlantique, nous sommes allés à Halifax et à Moncton. Aujourd'hui, nous sommes à Montréal et, dans quelques jours, nous serons à Toronto. À l'automne, nous irons dans l'Ouest canadien et dans le Grand Nord. C'est donc la début de notre tournée.
Le but est d'entendre les citoyens et citoyennes, surtout les gens qui sont sur le terrain, au sujet de la pauvreté. Évidemment, il est important de connaître les problèmes, et vous êtes les personnes qui les connaissez le mieux, mais nous aimerions plutôt entendre vos recommandations quant au rôle que le gouvernement du Canada pourrait jouer pour régler ce problème. Il s'agit d'un élément important pour nous.
L'analyste du comité, M. Kerr, prend des notes. Le but ultime de cette rencontre et de bien d'autres qui ont eu lieu à Ottawa est de préparer un rapport qui sera accepté par tous les membres du comité. Une fois ce rapport préparé, il sera déposé à la Chambre des communes et communiqué au ministre des Ressources humaines qui, dans un délai prévu, va devoir y répondre.
Plusieurs groupes sont devant nous. Autour de la table, tous les partis de la Chambre des communes sont représentés: pour le gouvernement, MM. Lobb et Komarnicki; pour l'opposition officielle, Mme Maria Minna; pour le Bloc québécois, Mme Beaudin; et pour le NPD, M. Mulcair. On me dit que M. Lessard sera présent un peu plus tard. Comme vice-présidente du comité, je suis membre du Parti libéral du Canada.
La première partie de la séance se terminera à 10 h 30. Voici la façon dont on va procéder. Je vais appeler un groupe à la fois, Vous disposerez de cinq minutes chacun pour lire votre mémoire. Si vous êtes deux à lire le mémoire, vous allez devoir partager vos cinq minutes. Une fois qu'on aura fait le tour, chacun des partis politiques aura droit à sept minutes pour poser des questions et entendre les réponses. Quand on aura fait le tour, on recommencera un autre tour de cinq minutes.
Sont venus s'ajouter à la liste: M. Ghislain Picard, de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador; Mme Mélanie Gauvin, du groupe Au bas de l'échelle; M. Lafrenière et Mme de Sève, de la Centrale des syndicats du Québec; Mme McLeod et Mme St-Martin, d'AGAPE; MM. Claude Piché et Normand Pépin, de la Centrale des syndicats démocratiques.
Nous allons commencer, ainsi que l'indique ma liste, par M. Picard, de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador. Bienvenue à notre réunion, encore une fois.
[Le témoin s'exprime dans sa langue.]
Madame la vice-présidente, mesdames et messieurs membres du comité, bonjour.
On vous a transmis une copie du mémoire de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador. Je n'en ferai pas la lecture, car je voudrais peut-être davantage parler du contexte dans lequel nous faisons notre représentation ce matin auprès de votre comité.
Je voudrais d'abord vous faire part d'un certain désarroi. Vous comprendrez que ce n'est pas la première fois que, à titre de représentant des premières nations du Québec et du Labrador, je fais des représentations devant différents comités permanents. Je me permets d'inclure également les commissions qui ont cours au sein de l'Assemblée nationale du Québec. On devient de plus en plus las à force de faire des représentations devant les forums appropriés et qu'en conclusion, très peu de choses sont faites pour changer la situation des communautés que nous représentons.
C'est un peu pour cette raison que, l'automne dernier, les chefs que je représente ont adopté une position assez sévère, mais qui reflète en même temps le désarroi dont je parlais un peu plus tôt. Finalement, on tend à agir plutôt qu'à réagir, chose qu'on a sans doute fait un peu trop souvent dans le passé. Les chefs ont clairement indiqué qu'on a le mandat d'essayer de presser le pas, et surtout, de mettre autant le gouvernement fédéral que provincial devant une situation qui pourrait les forcer tous deux à répondre aux doléances dont nous faisons part depuis trop longtemps.
D'ailleurs, ce que je dis est appuyé par différents rapports qui ont été rédigés et mis à jour plus d'une fois. Je me permets de citer la vérificatrice générale, Mme Sheila Fraser, qui qualifiait la situation du logement dans nos communautés en ces termes:
Néanmoins, de nombreuses Premières nations font face à une crise du logement. À moins de mesures rapides, les conditions de logement qui sont déjà inacceptables ne vont qu'empirer, d'autant plus que la croissance de la population sur les réserves est deux fois plus élevée que la moyenne canadienne.
C'est un exemple parmi beaucoup d'autres qui nous font dire que l'heure presse pour les communautés que nous représentons. Je me permets, bien sûr, de parler au nom des premières nations du Québec et du Labrador, mais on comprend très bien que la situation est semblable partout au pays.
L’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador est représentée par une quarantaine de chefs pour ces deux régions. De plus, différentes commissions soutiennent notre démarche. La Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador et la Commission de développement des ressources humaines des Premières Nations du Québec sont sans doute les deux commissions qui sont le plus directement interpellées par les questions qui nous intéressent.
En octobre 2006, nous avons organisé, avec le concours de la société civile québécoise ainsi que celui du gouvernement du Québec et du gouvernement du Canada, un forum socioéconomique qui avait pour objectif premier de mettre en évidence les questions liées à la condition sociale et économique de nos communautés, que ce soit à propos du logement, de l'éducation, de la santé et de beaucoup d'autres secteurs d'activités dans nos communautés.
On a réuni plus de 500 participants à une rencontre de trois jours qui avait pour but d'interpeller directement les gouvernements ainsi que la société civile québécoise afin de trouver des façons de redresser la situation dont fait état le mémoire qui vous a été soumis.
Évidemment, deux ans plus tard, malgré les tentatives de bilan que nous faisons périodiquement depuis, on se doit de constater que l'on est encore très loin des objectifs que nous poursuivions. L'un des messages lancés lors du forum socioéconomique est que, pour trouver une façon de redresser la situation des peuples et des communautés que nous représentons, il fallait au cours d'une période de 10 ans relever les perspectives pour les communautés que nous représentons. Cela voulait dire créer 10 000 emplois, construire 10 000 nouveaux logements et diplômer au moins 10 000 nouveaux étudiants dans nos communautés.
Les données démographiques indiquent que notre population est beaucoup plus jeune que l'ensemble de la population canadienne. Les moins de 25 ans représentent environ 40 p. 100 de notre population, alors que, du côté québécois particulièrement, cette moyenne est plutôt de 30 u 31 p. 100.
Vous avez reçu des recommandations précises par rapport à certains secteurs d'activité, que ce soit sur le plan de la santé ou de l'emploi et de la formation. Je ne prendrai pas le temps de faire la liste des recommandations. Je pourrais très certainement répondre aux questions que vous pourriez avoir relativement à notre position. On a pris la peine, dans ce mémoire, de citer certains passages de rapports provenant autant du gouvernement canadien que du gouvernement du Québec et qui confirment que les premières nations que nous représentons se situent parmi les plus pauvres des plus pauvres. Je terminerais sur cette question car on ne le dira jamais assez souvent, l'index du développement humain situe nos communautés au 70e rang, alors que le Canada, dans l'ensemble, se situe au 8e rang. Il y a donc ici une différence considérable entre la qualité de vie de la société canadienne en général et celle des communautés que nous représentons.
Bonjour. D'abord, merci de nous avoir invités, et je dois dire que, malheureusement, nous n'avons pas déposé de mémoire. Nous avons été invités, seulement vers la fin de la semaine dernière, à participer aux consultations. Le cas échéant, si besoin il y a, on pourra vous faire parvenir un document sans problème.
Au bas de l'échelle est un organisme de défense des droits des travailleuses et des travailleurs non syndiqués. On a deux principaux champs d'action, soit d'abord l'information aux personnes qui ont des problèmes au travail. On offre divers services d'information téléphonique. On présente aussi des sessions d'information sur la Loi sur les normes du travail et on présente des sessions d'information à l'intention des personnes qui ont porté plainte en matière de harcèlement psychologique. On donne aussi des informations aux personnes qui sont en processus de médiation. On a également un autre volet qui est de mener des actions politiques et de participer aux consultations publiques. On a publié divers documents d'analyse juridique et aussi des documents de vulgarisation sur les lois du travail.
Dans le cadre de ces consultations, on aimerait porter à votre attention deux éléments importants pouvant être des facteurs de pauvreté, soit le travail atypique et les taux du salaire minimum. Je parlerai tout d'abord de la précarisation du travail comme cause de pauvreté. Quand on parle de la précarisation du travail, on parle de la multiplication des formes et des statuts d'emploi, donc des personnes qui travaillent à temps partiel, sur appel, qui occupent des emplois contractuels, temporaires, à domicile ou qui travaillent pour une agence de placement temporaire, donc tout ce qui ne constitue pas un emploi stable, habituellement à temps plein, et qu'on occupe pour une durée indéterminée.
En 2008, 37 p. 00 des emplois étaient atypiques au Québec, de même qu'au Canada. Pourquoi qualifie-t-on ces emplois d'atypiques? D'abord, ils offrent généralement des salaires plus bas. Ensuite, ils offrent également moins de stabilité et de protection en emploi, ils donnent des accès limités ou inexistants aux avantages sociaux et à la formation, et ils complexifient dans une certaine mesure, l'exercice du droit d'association et de négociation collective. On parle alors d'une disparité de traitement entre les employés réguliers permanents d'une entreprise et les autres, qui sont embauchés à statut précaire.
Je mentionne rapidement quelques chiffres pour vous donner des exemples. Chez les personnes non syndiquées, le salaire horaire d'un emploi permanent est en moyenne de 17.51 $ alors que celui d'un emploi temporaire est de 13.32 $. Il y a donc un écart de 24 p. 100. Également dans le secteur du commerce, on parle d'un écart salarial de 40 p. 100 entre les personnes embauchées à temps plein et à temps partiel. Dans le secteur de l'administration publique, on parle d'un écart de 35 p. 100 et dans celui du secteur manufacturier, d'un écart de 33 p. 100. Dans le cas des personnes embauchées par les agences de placement temporaire, l'écart est encore plus important, et les personnes qui sont embauchées par l'intermédiaire des agences gagnent 40 p. 100 de moins que les personnes qui sont employées permanentes des entreprises. C'est pourquoi nous demandons, afin de restreindre le développement du travail précaire et aussi pour limiter les avantages qu'en retirent des entreprises, d'apporter des modifications nécessaires à la Loi sur les normes du travail pour assurer une égalité de traitement.
Nous avons également soumis cette revendication dans le cadre des consultations, en octobre 2005, sur la réforme de la Partie III du Code canadien du travail, et on s'apprête également à déposer sous peu des commentaires en ce sens dans le document de discussion sur l'examen des normes du travail du Code canadien du travail.
Pour arriver à l'égalité de traitement, la Loi sur les normes du travail et le Code canadien du travail devraient établir qu'un employeur ne peut accorder à une personne salariée des conditions de travail inférieures à celles consenties aux autres qui accomplissent un travail comparable pour la même entreprise, pour les motifs suivants: que cette personne travaille habituellement moins d'heures par semaine; qu'elle travaille à une mesure ou dans un programme d'employabilité couvert par la loi; qu'elle travaille sur une base temporaire, occasionnelle ou sur appel; qu'elle a été embauchée par l'entremise d'une agence de placement ou que le travail est réalisé en dehors de l'établissement. Nous demandons également que soit versée une indemnité salariale proportionnelle au nombre d'heures travaillées pour compenser la perte des avantages sociaux auxquels ont droit les autres personnes salariées de l'entreprise.
On vient de voir qu'au Québec — c'est aussi une situation commune à l'ensemble des provinces canadiennes —, certaines pratiques des employeurs pour réduire leurs coûts et accroître la flexibilité viennent créer des iniquités sur la base de la forme ou du statut d'emploi, ce qui vient freiner l'accessibilité à un travail décent et explique une partie de la pauvreté chez les personnes salariées.
Un autre élément important pour l'accès à un travail décent est la rémunération minimale à laquelle un salarié devrait avoir droit en échange du travail accompli. Vous comprendrez que je vais vous parler du salaire minimum.
Actuellement, le salaire minimum...
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Merci, madame la vice-présidente.
Mes salutations à tous les membres du comité.
Je ferai d'abord une brève introduction portant sur qui nous sommes. La Centrale des syndicats du Québec est une organisation syndicale. C'est la troisième grande centrale syndicale au Québec. Elle représente plus de 100 000 personnes dans le domaine de l'éducation, de la santé et des services sociaux, de la culture, du milieu communautaire et de la petite enfance.
Outre nos revendications au chapitre des négociations des conventions collectives, la centrale milite activement depuis toujours comme agent de transformation sociale au Québec, mais aussi au Canada, afin que des législations soient adoptées pour améliorer les revenus des Canadiennes et des Canadiens, des Québécoises et des Québécois, et les conditions de vie qui leur permettent d'exercer pleinement leur citoyenneté.
Nous profitons de l'occasion aujourd'hui pour nous inscrire toujours dans cette mission que nous avons au sein de notre organisation et vous faire quelques recommandations. En fait, nous en aurons trois à vous présenter aujourd'hui.
Nous allons orienter notre déclaration préliminaire sur la situation des peuples autochtones. La CSQ représente le personnel qui travaille dans les commissions scolaires crie et Kativik. Nous représentons plus de 2 000 membres dans ces communautés. Je pourrais reprendre beaucoup de détails que M. Picard a soulevés plus tôt, mais je vais m'en tenir à certains d'entre eux. Il s'est dit plusieurs choses. Dans le domaine de l'éducation, notamment, il y a beaucoup de chemin à faire. Vous allez constater que nos recommandations iront en ce sens.
Nous voulons rappeler que la Charte canadienne des droits et libertés adoptée en 1982 énonce, à l'article 25, que sur la partie des droits et libertés issus des traités, la partie II de la Constitution canadienne confirme les droits existants ancestraux issus des traités des peuples autochtones du Canada. Dorénavant, on ne peut plus éteindre unilatéralement ces droits. Pour être reconnus, ces droits devraient être soit négociés soit reconnus par une cour. On a déjà dit que pour que les droits existent, il faut être en mesure de les exercer. On s'inscrit dans cette ligne de pensée également.
En 1996, rappelons-nous, la Commission royale sur les peuples autochtones a émis plusieurs recommandations, notamment celles enjoignant les parties à régler les revendications territoriales, à accroître l'assise territoriale des communautés autochtones et à améliorer les conditions de vie de ces communautés.
La même année, la Cour suprême du Canada, par le jugement Van der Peet, a défini le droit ancestral protégé par la Constitution canadienne. Même le gouvernement canadien tarde à appliquer les résolutions issues de la commission ou refuse de ratifier la convention internationale sur les droits des peuples autochtones.
En conséquence, le premier geste politique que doit accomplir le gouvernement, selon nous, est de signer la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Cela constitue notre première revendication.
Notre deuxième proposition à l'égard du gouvernement canadien est d'accorder les sommes nécessaires afin d'améliorer les conditions de vie et de logement dans les communautés autochtones, et d'améliorer le financement des infrastructures dans ces communautés. En ce sens, j'appuie très fortement ce qui a été dit par le chef Picard plus tôt.
Est-il besoin de se rappeler qu'il y a encore des communautés autochtones qui n'ont pas accès à l'eau courante ni à l'électricité? Dans la majorité des communautés, les familles sont entassées dans des maisons devenues exiguës à cause de la taille des familles et de la pénurie de logements.
Faut-il se rappeler que les Autochtones ont un taux d'analphabétisme fonctionnel quatre fois plus élevé que le taux québécois, une mortalité infantile trois fois et demie plus grande, un taux de suicide six fois plus élevé pour les moins de 20 ans et des revenus inférieurs de 33 p. 100? Aujourd'hui, la situation n'a malheureusement pas vraiment changé. Dans certaines communautés, le taux de suicide chez les adolescentes, les adolescents et les jeunes adultes est 20 fois plus élevé que celui des autres Canadiennes et Canadiens.
De nombreuses études et, bien souvent, des drames, ont démontré que les jeunes Autochtones sont plus souvent exposés à des problèmes comme la toxicomanie et l'alcoolisme. Ces problèmes, combinés à une pauvreté généralisée, à un racisme persistant et aux séquelles du colonialisme, ont enfermé les Autochtones dans un cercle vicieux qui se perpétue d'une génération à l'autre. Je viens de citer un extrait du rapport de M. Roy Romanow. Dans un tel contexte, l'éducation des jeunes Autochtones devient un défi de taille.
Au Québec, il existe deux types de communautés: les communautés conventionnées, autrement dit les signataires de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, qui ont leurs propres commissions scolaires, et les communautés non conventionnées, qui sont financées par le gouvernement fédéral et gérées par les conseils de bande. À cet égard, nous demandons dans notre troisième recommandation que le gouvernement canadien accorde aux écoles non conventionnées un financement et des services comparables à ceux des écoles conventionnées. Actuellement, les écoles de bande sont soumises à une formule de financement désuète qui ignore les coûts.
Je vous présente quelques statistiques intéressantes. J'invite d'ailleurs le recherchiste du comité à les prendre en note. Dans nos écoles, il y a zéro dollar pour l'intégration de la technologie, zéro dollar pour les bibliothèques scolaires, zéro dollar pour la formation professionnelle au secondaire, zéro dollar pour des activités parascolaires de sport et de loisir, zéro dollar pour s'adapter aux réformes de l'éducation mises en oeuvre au Québec et zéro dollar pour offrir aux jeunes un programme d'études diversifié. Chez les jeunes des premières nations, le taux de chômage est de 32 p. 100, soit le triple de ce qu'on observe chez les Allochtones au Québec, et 49 p. 100 d'entre eux n'ont pas de diplôme d'études secondaires.
Nous jugeons que l'heure n'est plus aux tergiversations. Le gouvernement canadien peut investir dans les infrastructures pour faire face à la crise économique, mais il peut et doit de toute urgence investir dans les communautés autochtones pour faire face à la crise humanitaire qui y sévit. C'est tout près de nous. Ce n'est pas dans un autre pays; c'est dans le nôtre.
Merci.
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Je représente l'organisme à but non lucratif AGAPE, qui oeuvre auprès des communautés d'expression anglaise et multiculturelles de Laval.
[Traduction]
AGAPE est l'unique organisation anglophone qui répond à tous les besoins de la collectivité.
À Laval, la situation s'est considérablement détériorée au cours des 20 ou 25 dernières années. Laval est considérée comme l'une des villes les plus riches du Québec. L'itinérance a malheureusement beaucoup augmenté depuis quelques années et un grand nombre de nos sans-abri, surtout les jeunes, se sont réfugiés à Laval, dans l'espoir d'y trouver un peu de sécurité par rapport aux grandes villes comme Québec et Montréal.
Nous rencontrons régulièrement des sans-abri. Certains d'entre eux viennent d'aussi loin que Halifax, Moncton et Toronto, car ils pensent être plus en sécurité ici, ce qui ne contribue certainement pas à améliorer la situation à Laval. En raison de la recrudescence de l'itinérance, les taux de criminalité sont à la hausse et les besoins matériels aussi; on n'a pas suffisamment de nourriture, etc. et, dans tous ces cas-là, mon organisation passe son temps à éteindre de petits feux.
Nous avons demandé récemment une subvention pour ouvrir un centre afin d'accueillir ces sans-abri et modifier leur mode de vie; cela représentera une tâche considérable pour nous, mais nous sommes prêts à relever le défi. Nous sommes toutefois confrontés à un grave problème lié aux immigrants récents et aux réfugiés en attente. Ces personnes viennent à Montréal et décident de venir à Laval parce qu'elles estiment, elles aussi, que c'est une région où l'on est plus en sécurité qu'ailleurs. Ces réfugiés en attente se font repousser par les propriétaires parce qu'ils ne représentent pas un loyer assuré. Ils sont rejetés par la société parce qu'ils viennent d'un autre pays. Quand nous parlons de racisme, nous savons de quoi nous parlons. Un grand nombre de ces personnes doivent vivre dans la rue, car elles ne peuvent pas trouver un endroit où s'installer. C'est également à ce niveau-là que nous intervenons.
J'expliquerai en quelques mots que la période d'attente pour un réfugié qui voudrait obtenir un permis de travail temporaire est trop longue. Nous aimerions recommander que l'on active les dossiers pour mettre ces personnes sur le marché de l'emploi. Il y a de nombreuses façons de trouver un emploi à Laval. Ces personnes sont disposées à travailler pour le salaire minimum du moment que ça leur permet de survivre. Elles ne veulent pas passer entre les mailles du filet et se retrouver sur l'assistance sociale, mais actuellement, elles sont prises au piège de l'assistance sociale, avec un revenu minimum. Certaines d'entre elles viennent nous trouver avec leurs sacs, car elles cherchent un endroit où rester.
Il est très important d'activer leurs dossiers: est-ce qu'on les gardera ou non? Il faut parfois quatre ou cinq ans. Au cours de cette période de quatre ou cinq ans, ces personnes manquent de tout ce qui est essentiel pour répondre à leurs besoins.
Je m'excuse. J'ai préparé ces notes en venant ce matin, et je sais que j'oublie la moitié de ce que je voulais dire. Je pourrais parler toute la journée d'AGAPE. Des personnes comme Mme Folco et Tom savent très bien de quoi je parle.
L'examen des dossiers prend parfois de quatre à six ans. Les besoins augmentent et les problèmes aussi. Les propriétaires ne veulent pas traiter avec des personnes qui sont sans le sou. Comme vous le savez, les propriétaires ne veulent pas traiter avec des pauvres.
En ce qui concerne l'autre situation, celle des jeunes enfants, des jeunes sans-abri, nous devons trouver des possibilités de les faire sortir de là. Voici ce que je recommanderais. Je sais que ça ne se réalisera pas, mais j'aimerais beaucoup que des députés chevronnés viennent passer deux ou trois jours — à Laval, dans mon cas, et également avec les membres des premières nations — et vivent ce que nous vivons chaque jour, voient les situations dans lesquelles nous nous trouvons et rencontrent les sans-abri que nous rencontrons. Ils pourraient leur demander pourquoi ils vivent dans la rue. Certains d'entre eux ont une très bonne raison.
En plus d'activer ces dossiers, un problème se pose en ce qui concerne les minorités visibles, car vous savez que le racisme existe et qu'à Laval, il est à la hausse; on a par conséquent de la difficulté à trouver un meilleur mode de vie pour ces personnes. Je ne sais pas ce qu'on peut faire à ce chapitre, mais je vous soumets le problème.
Je lance la balle dans votre camp, madame Folco, et nous en discuterons.
Laval a reçu 919 000 $ de 2007 à 2009 pour les projets concernant les sans-abri, ce qui est beaucoup trop peu pour répondre à nos besoins.
Je vous remercie.
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Je ferai la présentation générale, et mon collègue pourra répondre aux questions, le cas échéant.
La CSD est une centrale de syndicats située au Québec. Nous représentons 70 000 travailleuses et travailleurs. Outre le réseau de la santé et des services sociaux, ainsi que le secteur municipal, nous sommes impliqués principalement dans le secteur privé. La CSD est également membre du Collectif pour un Québec sans pauvreté. À ce titre, nous appuyons totalement les propositions qui ont été faites par nos prédécesseurs.
Outre ces moyens, on pense qu'il y a différentes façons de lutter contre la pauvreté et d'empêcher que des personnes se trouvent dans un état de pauvreté, alors qu'elles ne le sont pas nécessairement au moment où l'on se parle. À titre d'exemple, le régime d'assurance-emploi pourrait être bonifié de façon à permettre à des gens de vivre un peu mieux, un peu plus dignement. On pense aux conditions d'admissibilité qui sont inégales, car elles dépendent du taux de chômage régional. Quant à nous, elles devraient être uniformisées et il faudrait qu'un total de 360 heures de travail donne accès à l'assurance-emploi. D'autres mesures devraient être corrigées, comme la durée des prestations, qui devraient être en permanence à 50 semaines, et le taux de prestations qui devrait être en permanence de 60 p. 100. On pourrait aussi, comme l'a proposé un parti politique, éliminer le délai de carence.
Bref, ce train de mesures de modification du régime d'assurance-emploi ferait en sorte que, dans les conditions actuelles de la crise financière, un grand nombre de personnes sans emploi puissent avoir un revenu le moindrement décent. Un autre moyen qui, celui-là, fait aussi partie d'une plateforme intercentrale à laquelle ont adhéré les quatre centrales syndicales du Québec, serait de créer un programme de soutien du revenu pour les travailleurs âgés.
Vous savez très bien que, actuellement, les secteurs forestier et manufacturier sont durement touchés et qu'il y a de nombreuses fermetures d'entreprises et de nombreuses mises à pied, de nombreux licenciements collectifs. Quand on est jeune, qu'on a une formation adéquate et des compétences adaptées au marché du travail, ça va bien, on peut toujours tenter de se trouver un emploi dès qu'il y en aura un disponible près de chez soi. Cependant, quand on atteint un certain âge — nous avons établi cet âge à 55 ans et plus, c'est plus difficile de se trouver de l'emploi.
En effet, concrètement il y a une certaine discrimination non avouée dans le cas de l'embauche des personnes qui sont plus âgées. De plus, la société étant ce qu'elle est, les personnes ayant un certain âge aujourd'hui ont très souvent quitté l'école en bas âge et ont souvent été confinées à travailler dans une seule entreprise à n'exécuter qu'une tâche bien précise. Ces personnes n'ont pas aujourd'hui les compétences nécessaires qui leur permettraient de se trouver un emploi raisonnable et rémunérateur dans leur région. Pour ces personnes, c'est un drame. Elles doivent faire le deuil que représente la perte d'un emploi qu'elles ont occupé depuis fort longtemps et qu'elles appréciaient, alors qu'elles ont contribué à l'avancement de la société par leurs impôts et leur travail. C'est aussi un deuil parce qu'elles se sentent totalement démunies n'ayant pas les compétences nécessaires pour pouvoir trouver rapidement un emploi raisonnable dans leur région. Qu'advient-il de ces personnes? Elles sont complètement désabusées du système et, une fois l'étape de l'assurance-emploi passée, devant quoi se trouvent-elles? S'adresse-t-on à l'assistance sociale pour avoir des mesures de dernier recours? C'est une possibilité.
D'autre part, certaines personnes ont quand même gagné de bons salaires en travaillant dans les secteurs manufacturier et forestier. Si au fil du temps, ils ont réussi à mettre de côté un peu d'argent, ce qui leur a permis d'acquérir un certain nombre de biens, une petite maison, une automobile, peut-être même un chalet, qui sait, quand vient le temps de s'adresser à l'assistance sociale, ils sont obligés de se départir de leurs biens, comme si c'était un péché d'avoir accumulé un certain nombre de biens. Ils subissent pourtant un licenciement collectif parce que les entreprises sont fermées, ce dont ils ne sont absolument pas responsables.
Ces gens se retrouvent le bec à l'eau et il faut faire quelque chose pour eux parce qu'ils sont impuissants et qu'ils n'ont pas les moyens. Pour les jeunes d'aujourd'hui, ça va bien car ils peuvent consulter Internet, mais pour des personnes de 55, 60, 62 ans, ce n'est peut-être pas aussi simple. Il faut donc aider ces dernières.
Nous proposons que, lorsqu'une personne atteint l'âge de 55 ans ou plus et qu'elle est victime d'un licenciement collectif, défini selon la Loi sur les normes du travail — 10 salariés mis à pied dans une période de 2 mois dans l'entreprise ou à l'occasion d'une fermeture d'entreprise —, elle pourrait, si elle a travaillé pendant 10 années au cours des 30 dernières années...
Vous me demanderez pourquoi 10 années au cours des 30 dernières. C'est simple. On a connu la précarisation. Les emplois sont devenus de plus en plus précaires au fil du temps, et des personnes ont été contraintes à n'exécuter que des tâches liées à du travail précaire, ainsi que l'a décrit ma collègue. Par conséquent, ces personnes, souvent des femmes, n'ont pas pu travailler tout au long de ces 30 ans dernières années. Nous pensons que, dès qu'elles ont travaillé une dizaine d'années au cours de ces 30 dernières années, elles devraient avoir accès à un programme de soutien du revenu pour travailleurs âgés, si l'écart entre les compétences déjà acquises et celles requises par le marché du travail d'aujourd'hui fait qu'elles ne peuvent pas de se trouver un emploi véritablement rémunérateur.
On ne demande pas au gouvernement fédéral de payer la totalité de la facture. On a déjà approché le gouvernement québécois, et celui-ci consent à mettre sur pied un tel programme et à contribuer pour 30 p. 100 des coûts. Ce serait donc maintenant au gouvernement fédéral d'accepter une telle mesure et de contribuer pour 70 p. 100 de ces coûts.
Ce n'est pas quelque chose sorti de nulle part. Au cours des années 1970, des programmes ont déjà été mis sur pied pour les travailleurs du textile, du vêtement. Par la suite, cela s'est élargi à l'amiante et à des régions aux prises avec des difficultés économiques, mais cela a été aboli en 1997. On pourrait remettre sur pied ce programme dans le cadre d'un nouveau programme de soutien du revenu pour les travailleurs âgés.
Cela leur permettrait de vivre dans la dignité jusqu'à l'âge normal de la retraite, soit 65 ans, sans qu'ils soient obligés de se départir de leur petit pécule et de se sentir « cheap » parce qu'ils n'ont pas les moyens et les connaissances pour pouvoir se trouver un emploi digne de ce nom dans leur région.
Il y a aussi toute la question du logement social. On en a parlé un peu plus tôt. On pourrait traiter de cela.
En conclusion, la Loi canadienne sur la santé est actuellement largement bafouée et on y puise de toutes les manières pour pouvoir faire de la privatisation. Et la privatisation des soins de santé brime l'accès à ces soins de santé. Nous pensons qu'on devrait fermer le robinet à double tour et s'assurer de l'application de la Loi canadienne sur la santé dans son intégralité afin d'éviter que, petit à petit, des gens s'enrichissent au détriment de la maladie.
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Merci, madame la présidente.
Merci de votre présentation ce matin.
Je conviens de presque tout ce que vous avez dit. J'ai quelques questions à poser.
[Traduction]
Si vous me le permettez, je m'adresserai d'abord à M. Picard, puis à M. Lafrenière.
[Français]
Je m'excuse, je vais poser ma question en anglais. C'est plus vite.
[Traduction]
Je n'ai pas vraiment de questions à poser sur l'exposé concernant les besoins. Ça me paraît évident en ce qui concerne les collectivités autochtones.
Bien entendu, monsieur Lafrenière, en ce qui concerne l'exposé que vous avez fait au sujet des secteurs prioritaires, nous les avons déjà examinés à de nombreuses occasions: le logement, la sécurité du revenu, l'éducation, etc.
La question que j'ai à vous poser est de nature différente. Est-ce que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien pose un problème en ce qui concerne l'application du mécanisme et la façon dont nous abordons ces questions au Canada? Je suis curieuse de voir si nous sommes pris dans une ornière en ce qui concerne le mécanisme administratif qu'on utilise pour avoir des interactions avec ces enjeux et avec les collectivités. Y a-t-il une façon différente de procéder qui serait plus efficace?
Je peux tenter de donner une première réponse à la question, si je l'ai bien comprise.
Cette question a certainement été documentée plus d'une fois au cours des 15, des 20, des 25 ou des 30 dernières années. D'ailleurs, elle a sans doute aussi été l'objet de nombreuses analyses dans le cadre des travaux de la Commission royale sur les peuples autochtones.
Le problème réside surtout dans le fait que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a vraiment la mainmise sur toutes les questions qui ont trait à tous les secteurs d'activité de nos communautés. C'est ce qu'il faut changer. C'est malheureusement ce qui fait défaut dans la relation entre le gouvernement fédéral et nos communautés. La relation est unilatérale: elle n'implique activement que celui qui fournit les ressources, ceux qui reçoivent étant, en grande majorité, nos communautés. Même au chapitre des ressources, on est à court.
Encore faut-il bien déterminer si, d'abord, les sommes répondent à la demande. Je vais citer l'exemple assez récent de l'annonce, qui a été faite un peu plus tôt cette année, d'un budget de quelques millions de dollars pour le logement. Pour notre région du Québec, ça représente environ 45 millions de dollars pour les deux prochaines années.
Encore une fois, les critères pour l'attribution de ces sommes sont déterminés par le gouvernement fédéral. Pourtant, nous nous sommes engagés, avec la Société canadienne d'hypothèques et de logement et le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, dans un processus qui vise à nous donner une voix. Cependant, ça ne se traduit pas en mesures concrètes qui répondent à la réalité telle qu'elle est vécue dans nos communautés. Cela me fait donc dire qu'on est toujours un peu en manque par rapport aux mesures annoncées.
La dernière chose que je voudrais dire à ce sujet est que l'intention est bonne, mais malheureusement, elle ne concorde pas avec la réalité du logement. On l'a dit et on l'a documenté: au Québec seulement, il faudrait construire, pour combler les besoins dans le parc immobilier, 8 000 nouveaux logements, demain matin, dans nos communautés. Finalement, les 45 millions de dollars prévus sont très loin des 400 millions de dollars qui seraient nécessaires.
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La réponse sera très claire.
La formule de financement de l'éducation dans les communautés non conventionnées, donc dans les écoles de bandes, a été élaborée en 1998. Elle ne tient pas compte, notamment, du développement des technologies. Ce travail a été fait d'une manière exemplaire par l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador; les chiffres à l'appui le démontrent de façon flagrante. Il y a de nouveaux secteurs de formation professionnelle qui n'existaient pas. La formule n'a donc même pas été indexée.
De plus, les ressources pour supporter les coûts liés aux salaires, aux installations, aux manuels scolaires et à tout l'équipement dont une école a besoin pour donner un enseignement de qualité ne sont pas suffisantes.
On peut alors se poser la question suivante: veut-on maintenir nos jeunes dans l'ignorance? En les maintenant dans l'ignorance, on les maintient dans la pauvreté.
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Je comprends bien. Merci.
[Traduction]
La question suivante s'adresse à Mme Gauvin.
Vous avez fait des commentaires sur le travail à temps partiel, etc., et je comprends très bien le problème. Comme nous le savons tous, les femmes ont tendance à représenter la majorité des travailleurs qui ont un emploi à temps partiel. En outre, d'après les chiffres les plus récents, ceux du dernier mois, la création d'emplois s'est faite dans le secteur du travail autonome où, bien entendu, on ne reçoit pas de pension et on n'a pas droit à l'assurance-emploi ni à d'autres avantages, puisque les travailleurs autonomes ne sont pas encore couverts.
Vos recherches indiquent-elles comment évolue actuellement la situation des femmes, surtout des immigrantes et des membres d'autres minorités, dans ce domaine, en ce qui concerne leur capacité de survivre à la crise économique, étant donné qu'elles ne peuvent pas obtenir des prestations d'assurance-emploi ni être admissibles à d'autres programmes, en raison de leur situation extrêmement précaire? Avez-vous des études qui portent spécifiquement sur les plus vulnérables?
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Merci, madame la présidente. Je suis heureux de vous retrouver à un poste qui m'était familier, il y a six ans. Je vais céder la deuxième portion de mon temps à Mme Beaudin.
Je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie d'être présents parmi nous.
Je vais aborder, en premier lieu, la situation des premières nations. MM. Picard et Lafrenière en ont parlé. Je vais d'abord m'adresser à M. Picard.
Je trouve assez troublant d'avoir non seulement l'impression mais presque la conviction que nous sommes à peu près dans la même situation qu'au début des années 1980 pour ce qui est des conditions de vie des premières nations. J'ai grandi dans le Nord québécois. Au cours de ma vie, j'ai eu beaucoup de rapports avec les nations autochtones, particulièrement avec les Algonquins, mais aussi avec les Cris. J'ai l'impression de réentendre ce qu'on entendait autrefois, particulièrement avant 1990. En 1990, vous avez obtenu ce genre d'engagement, qui était unanime, d'ailleurs, de la part du gouvernement canadien. En effet, les partis se sont entendus pour réduire la pauvreté, et parmi les programmes prévus à cette fin, certains ont été consacrés aux premières nations.
J'ai suivi de près les travaux que vous avez réalisés à Mashteuiatsh en 2006 et, l'année suivante, à Val-d'Or. Je trouvais étonnant que 17 ans plus tard, vous en soyez toujours à soulever la question du manque d'information et autres questions élémentaires de ce genre. Monsieur Picard, vous souhaitiez à ce moment-là qu'on s'engage à créer au sein des nations autochtones 10 000 emplois au cours des 10 premières années. Si je pense à ce qui a été fait avant 1990, je constate que nous en étions là également.
Hier soir, j'ai lu les travaux de la Commission de développement des ressources humaines des Premières Nations du Québec. Je n'avais pas eu l'occasion de le faire avant. Encore une fois, j'ai eu l'impression de revenir aux préoccupations en matière de développement, notamment, qui prévalaient à ce moment-là. Ce que nous souhaitons, dans le cadre de nos travaux — et je pense que tous les parlementaires le souhaitent également —, c'est corriger la situation.
Comment se fait-il qu'on n'avance pas? Pour certaines communautés autochtones, les choses ont même régressé. C'est du moins ce que j'ai constaté. Qu'est-ce qui ne va pas? Ce n'est pas seulement une question de fric.
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Monsieur Lessard, malgré tout le respect que je dois à votre comité, les personnes qui devraient écouter ne sont pas à l'écoute malheureusement. Je trouve cela vraiment déplorable et, à la limite, frustrant et choquant. C'est pourquoi j'ai dit, d'entrée de jeu, que j'étais las de faire des représentations devant les comités permanents et les commissions parlementaires. Nous répétons le même discours chaque fois.
En 1992, on a mis sur pied une commission sans précédent qui a fait plus de 400 recommandations visant à changer la situation dans nos communautés. Une des recommandations importantes était que le budget du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, à l'époque, soit indexé d'environ 1,5 milliard de dollars. Essayez d'étaler cela sur les 20 prochaines années, et nous risquons peut-être de voir des changements dans nos communautés. Il faudrait aussi adopter des mesures concrètes pour régler beaucoup de questions, en partant de la déclaration de l'ONU sur les droits des peuples autochtones jusqu'à la question des revendications territoriales au niveau local.
Ma propre nation est assise à une table de négociation depuis 35 ans maintenant, et il n'y a aucune solution à l'horizon à court terme ou à moyen terme. Nos communautés se trouvent bien malgré elles dans cette situation, et je pense que nous n'avons pas d'autre choix que de respecter le processus politique. En même temps, il faut être conséquent et il faut s'occuper des besoins exprimés par notre communauté, parce qu'autrement elle se dira que le processus politique ne donne pas grand-chose finalement, puisque la situation à la base ne change pas.
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Bien. Le montant qui a été accordé à Laval pour le programme concernant les sans-abri et pour l'organisation était d'environ — je pourrais me tromper — 937 000 $ ou 900 000 $. Je n'ai pas le montant exact sous la main; j'ai ce chiffre à la maison.
Il y a plus de 80 organisations caritatives francophones à Laval. Pour les anglophones, il y en a une seule, AGAPE, qui s'occupe de l'immigration, des réfugiés et des nécessiteux. Ces 900 000 $, répartis entre 80 organisations, ne laissent pas beaucoup d'argent pour tenter d'induire des changements, ni même de proposer quelque chose.
Bien entendu, certaines organisations clés ont tiré parti du programme pour les sans-abri. Nous en sommes une, depuis 15 ans. Laval est devenue une ville très multiculturelle et, dans la zone dans laquelle nous sommes établis, les anglophones représentent 52 p. 100 de la population. Dans l'ensemble de la ville de Laval, 18 p. 100 de la population est anglophone; par conséquent, il existe des besoins bien réels. Par ailleurs, quand nous parlons de « population », nous n'incluons pas les sans-abri, car ils se cachent, et ils sont nombreux. Ce n'est pas parce qu'on est à Laval que les sans-abri sont nécessairement des francophones; certains membres des communautés multiculturelles sont également des sans-abri.
Ce sont des chiffres que je trouve déplorables, compte tenu des sommes d'argent investies pour venir en aide à ces personnes-là. En ce qui concerne uniquement nos besoins, pour le moment, il est essentiel que nous ouvrions ce centre et le budget pour « les immobilisations » — exclusivement pour ça — est de 400 000 $. On n'y inclut pas les rénovations, les réparations ni l'entretien dont nous devrons nous charger nous-mêmes. Nous n'avons pas assez d'argent à notre disposition pour mettre ce programme en route, mais il existe un besoin.
Comme vous le savez, Tom, puisque vous êtes comme moi un enfant de Chomedey, les besoins sont exorbitants. Les enfants vivent dans la rue. Il faut faire quelque chose. La situation se détériore et, bien entendu, celle de la Ville de Laval se dégrade en même temps.
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C'est une excellent réponse.
Monsieur Picard, si je peux me permettre, je dirai d'abord que je comprends la lassitude que vous avez exprimée dans votre présentation. Pour avoir été de l'autre côté, tantôt à Québec comme député et ministre, tantôt à Ottawa, je me rends compte que peu importe toutes les études qu'on fait, il y a des choses qui ne changent pas. Récemment, j'ai eu l'occasion d'aller à Kanesatake et de visiter un centre pour personnes âgées. J'ai pu me rendre compte comment les entraves bureaucratiques et le manque d'argent et de ressources peuvent jouer des tours cruels à un service direct à la population.
Je pense que c'est un peu implicite dans la question de M. Lessard. Il me semble qu'il y a un problème évident au gouvernement fédéral, qui n'a aucune compétence ni au sens juridictionnel ni au sens de l'exécution de tâches en matière de santé. Objectivement, le fédéral est responsable de la santé des anciens combattants — catastrophe —, de la santé sur les réserves — catastrophe — et de la santé des les prisons — on passe.
N'y a-t-il pas moyen d'aller chercher ceux qui ont cette compétence et de collaborer plus étroitement, au moins dans le domaine de la santé? Vous avez très bien expliqué les besoins criants en matière de logement, mais je vais tenter de me concentrer sur la question de la santé. Cela pourrait-il faire partie de la solution? Ils ne sont pas bons là-dedans.
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Je parlais un peu plus tôt de la relation entre le gouvernement fédéral, principalement entre le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et nos communautés, relation qui est très certainement déficiente. À mon avis, il en va de même pour Santé Canada, qui est sans doute l'autre ministère fédéral ayant un lien direct avec nos communautés. Je pense qu'on a documenté en long et en large la situation déplorable de nos communautés en matière de santé.
Cela étant dit, j'ai parlé des commissions que nous avons mises sur pied. Je sais que c'est une tendance qui s'exprime à l'échelle du pays. Fort heureusement, il y a des personnes qui sont issues du milieu et qui connaissent le terrain. Ces personnes accordent beaucoup de temps aux questions d'intervention dans nos communautés. Malheureusement, ce qui fait aussi défaut, dans plusieurs cas, c'est la prévention. On parle ici de plusieurs situations problématiques comme le diabète, qui est de trois fois supérieur à ce qui existe ailleurs. Il y a aussi la question du suicide. Notre communauté est continuellement appelée à intervenir, alors qu'elle devrait aussi faire de la prévention. Malheureusement, les crédits alloués à ce chapitre sont très largement déficients.
On ne peut pas parler de santé sans faire un lien avec tous les déterminants qui permettent à nos communautés d'avoir une santé comparable à celle des autres Canadiens. On parle d'éducation, de logement et de tous les autres secteurs d'activité de nos communautés. Si on ne s'attaque pas de front à ces autres déterminants, on devra toujours gagner du terrain par rapport à ce qui existe ailleurs.
J'ai entendu dire que le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord a effectué une visite, il y a deux semaines, dans la communauté algonquine de Kitigan Zibi située à environ 90 minutes d'Ottawa. J'applaudis à cette démarche. Une fois qu'on aura vu ce qui se passe sur le terrain, peut-être qu'éventuellement, une institution comme la Chambre des communes aura une meilleure compréhension de la situation qui prévaut dans nos communautés. Kitigan Zibi est un cas, mais il y en a 600 autres au pays qui méritent l'attention du Parlement canadien.
Je terminerai en disant qu'une étude de l'Université Harvard a conclu que plus les institutions nous ressembleront et seront dirigées par des personnes issues de notre communauté, plus elles auront des chances de réussir là où les gouvernements ont échoué.
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Merci, madame la présidente.
J'ai fort apprécié vos points de vue différents et divergents. Nous en tiendrons compte. Comme l'a signalé Mme McLeod, il est parfois bon d'être sur le terrain pour voir ce qui se passe et, comme l'a si bien fait remarquer M. Picard, pour observer directement la situation.
J'étais heureux d'entendre citer les commentaires de M. Roy Romanow. Il est, bien entendu, originaire de la Saskatchewan et cela pourrait intéresser davantage M. Mulcair que moi, dans une certaine mesure. M. Romanow a été premier ministre de notre province et c'était également un collègue au College of Law en Saskatchewan il y a une quarantaine d'années.
Ma circonscription renferme plusieurs réserves. J'en ai visité beaucoup. Il est indéniable que le logement, l'éducation et l'emploi sont essentiels. Je pense ou j'ai instinctivement le sentiment que ce sont les domaines essentiels dans lesquels il est impératif de régler les problèmes si nous voulons voir de grandes améliorations.
L'éducation joue à mon sens un rôle important. Je sais que certains des chefs de ma région ont construit de nouvelles écoles, ont obtenu des enseignants et font de gros efforts à ce chapitre. J'ai assisté à plusieurs cérémonies de remise des diplômes et j'ai été quelque peu déçu d'apprendre, en discutant avec les étudiants, qu'ils ne comptaient pas tous poursuivre leurs études, mais j'ai été très heureux de constater les progrès réalisés.
Je sais qu'un problème d'argent se pose. En ce qui concerne le logement, par exemple, je vois que, dans notre budget actuel, 4 millions de dollars sur deux ans ont été prévus pour de nouveaux logements sociaux et pour la réfection des logements sociaux existants. Une somme de 200 millions de dollars a été prévue pour soutenir le logement social dans le Nord. Dans le budget 2006, on avait prévu 1,4 milliard de dollars sur une période de trois ans. Une partie de ces fonds a été attribuée aux réserves et une autre à l'extérieur des réserves, pour le logement dans le Nord.
J'aimerais donc demander à M. Picard si c'est uniquement une question d'argent. Je pense que nous avons besoin de plus d'argent et que l'autre aspect du problème réside dans le système d'exécution et dans son fonctionnement. Il me semble qu'on doive souvent passer par l'intermédiaire du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et du gouvernement pour des actions dont le besoin est flagrant pour les membres des bandes. Il faudrait peut-être modifier le système et déléguer davantage de pouvoirs à ce niveau-là. Je voudrais savoir ce que vous pensez de l'octroi de fonds supplémentaires et quel type de mécanisme d'exécution plus efficace ou différent vous auriez à proposer.
Je sais que dans une des réserves de ma région, on fait de l'exploitation des ressources pétrolières et gazières. Cette réserve y participe très activement et cette activité fournit de nombreux emplois. J'ai assisté à la création de partenariats entre des collèges communautaires, des employeurs et les premières nations. Ils prennent les devants et promettent d'assurer la formation et l'éducation, et ensuite un emploi . Ils travaillent en équipe pour que ça se réalise.
J'aimerais savoir ce que vous pensez de l'aspect financier de la question, du système d'exécution et de l'emploi. Je suis déçu de constater qu'il y a trop de décrochage scolaire. Je le sais, mais on fait des progrès. Je me demande parfois s'il ne suffit pas de poursuivre dans cette voie en me disant qu'avec le temps, nous observerons des progrès.
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Notre pire ennemi est probablement la situation démographique dans nos collectivités, qui joue contre nous. Dans une société normale, ça devrait être un avantage de voir un aussi grand nombre de jeunes, mais dans notre cas, et dans celui de toutes les premières nations du pays, je pense que nous courons à la catastrophe si nous n'arrivons pas à améliorer les perspectives d'avenir pour ce segment de notre population.
Même avec le meilleur système d'exécution possible, s'il ne répond pas aux besoins, il ne sert pas à grand-chose. Je pense que l'on a fait allusion tout à l'heure à la formule de financement dans le secteur de l'éducation, qui a 20 ans. Elle n'a pas été ajustée au niveau où elle devrait être aujourd'hui.
J'ai mentionné l'emploi et la formation. Là encore, en dépit du fait que... Cela a été certainement un avantage pour nous de pouvoir en arriver à une entente avec le gouvernement fédéral et ce, depuis 18 ans, mais si nous devons faire avec les mêmes sommes que celles que nous avions en 1996-1997, sans qu'elles aient été indexées, ça ne sert pas à grand-chose, car nous ne fonctionnons en fait qu'à demi-capacité.
En fait, en ce qui concerne l'augmentation qu'une province comme le Québec devrait obtenir pour ses programmes dans les secteurs de l'emploi et de la formation, par exemple, il faudrait que nous ayons actuellement accès à 80 millions de dollars supplémentaires pour la formation et la main-d'oeuvre dans nos collectivités, ce qui n'est pas le cas. On débute toujours l'année avec un déficit et c'est vrai pour le logement, la santé et pour tous les autres programmes en place dans nos collectivités.
Par conséquent, pour répondre à votre question, je pense que le système d'exécution est un facteur, mais le problème des arriérés dans de nombreux secteurs en est un autre à ne pas négliger.
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Merci, madame la présidente. J'essaierai d'être aussi bref que possible.
Je tiens d'abord à signaler que la question dont nous discutons aujourd'hui n'a rien de nouveau. Je n'aime pas du tout faire ce type de remarque car elle paraît cynique mais, pour moi, ce sujet n'a rien de nouveau. Je participe à ce type d'audiences depuis 1994. La situation a commencé à changer, dans une certaine mesure. Il y a eu la prestation fiscale pour enfants, qui a apporté une certaine amélioration, puis le programme des garderies et l'éducation de la petite enfance. Les problèmes du logement, de l'éducation et de la santé se posent, bien entendu, depuis des années.
Les problèmes en ce qui concerne les collectivités autochtones ne sont pas nouveaux, comme l'a souligné clairement M. Picard. J'accepte l'idée qu'il faille aller de l'avant, sinon, on n'arrivera pas à faire changer les situations dont nous avons déjà discuté et dont nous discutons encore aujourd'hui, situations qui sont actuellement aggravées par la crise économique.
J'aimerais poser quelques questions, mais je sais très bien qu'elles ne couvriront pas tous les commentaires qui ont été faits. Je tenais seulement à le préciser.
Ma première question s'adresse à Mme Gauvin. Il y a une semaine, je discutais avec quelques députés du gouvernement ontarien. Ils m'ont signalé qu'ils avaient commencé à recevoir un grand nombre d'appels téléphoniques de femmes enceintes qui n'arrivent pas à se faire engager ou qui sont licenciées, ou encore de femmes qui sont mises à pied à leur retour de congé de maternité. C'est l'attitude générale envers les femmes dans le milieu du travail et elle est due à la crise économique.
Pensez-vous que cette pratique discriminatoire se propage? L'avez-vous remarqué par l'intermédiaire de votre clientèle et de votre recherche? Est-ce une situation dont il faut être conscient? Un grand nombre de ces femmes sont également chefs de famille monoparentale, ce qui pose un autre problème.
J'aimerais poser rapidement une question à M. Faucher. J'accepte, bien entendu, les changements à l'assurance-emploi à 360 heures et 50 semaines, etc.; je pense que, dans une certaine mesure, la plupart d'entre nous en sont arrivés à la conclusion que c'est extrêmement important.
La question que je voulais poser concerne les travailleurs âgés. Pourriez-vous donner une idée du type de système de soutien du revenu que vous avez évoqué? Il y a déjà la Prestation fiscale pour le revenu du travail, c'est-à-dire le système de soutien du revenu du travail, qui ne s'applique pas aux sans-emploi. Ensuite, il y a, bien entendu, l'option de toucher plus tôt les prestations du Régime de pensions du Canada, mais il faudrait que ce soit en dernier recours, car cette façon de faire pénalise les travailleurs plus tard.
Par conséquent, vous parlez probablement de quelque chose de complètement différent. Je me demande si vous pourriez nous expliquer de quoi il s'agit. Est-ce que ce système permettrait aux personnes de travailler? Je dis cela parce que mon frère est dans la même situation actuellement et il cherche désespérément un emploi. Il ne voudrait pas ne pas avoir de travail du tout. Pourriez-vous répondre rapidement?
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Merci. Je serai très bref.
Monsieur Picard, mon frère est instituteur. Il a enseigné dans des régions pauvres et dans des régions riches du monde, dirais-je; il a enseigné pendant plusieurs années au Koweït, puis est allé dans le nord de la Saskatchewan, près de La Loche. À proprement parler, il a vu les deux facettes du monde.
Jusqu'à présent, nous avons eu 28 ou 29 séances sur cette question et nous avons accueilli des groupes dans probablement 18 ou 19 cas. Nous étions à Moncton. Nous connaissons l'ex-premier ministre McKenna depuis des années. Ce qu'il dit est que « le meilleur programme social qui soit est un emploi ». J'en suis fermement convaincu; ça ne fait aucun doute.
Je suis seulement curieux. Compte tenu de l'investissement massif que l'on fait dans les rénovations et la construction de logements pour les Premières nations, avez-vous pu calculer le nombre d'emplois qui seront ainsi créés pour les membres des Premières nations?
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Alors, c'est la fin de la période...
[Note de la rédaction: difficultés techniques]
... question des populations autochtones au Québec et au Canada. Je pense que c'est une indication pour tous du besoin criant.
Monsieur Picard, cela fait des années que nous nous voyons, d'un côté et de l'autre de la table. Vous voyez que tous les députés à cette table sont très sensibles à la question. On essaiera de faire un rapport qui sera, j'espère, le reflet de ce que vous nous avez dit et de ce que M. Lafrenière et Mme de Sève nous ont dit également.
Je voudrais remercier toutes les personnes venues ici, ce matin, et si vous avez des documents à nous remettre, encore une fois, s'il vous plaît, voyez Mme la greffière.
Je vous remercie.
J'ajourne cette réunion.