:
Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs les députés, bonjour. Au nom de Kirstine Stewart et de Sylvain Lafrance, je vous remercie de votre invitation à venir discuter de l'évolution des plateformes de visionnement, ainsi que de la position, dans ce contexte, du radiodiffuseur public.
J'aimerais traiter d'abord des nouvelles plateformes. Les nouvelles plateformes sont pour CBC/Radio-Canada une occasion unique. Grâce à elles, nous pouvons aujourd'hui communiquer avec davantage de Canadiens et établir avec eux un dialogue encore meilleur qu'auparavant.
Comme nous l'avons dit dans le mémoire que nous avons présenté dans le cadre de la consultation sur l'économie numérique menée en juillet 2010 par le gouvernement, CBC/Radio-Canada devient un catalyseur tant dans la création que dans la consommation de contenus numériques canadiens.
Aujourd'hui, je pourrais vous donner des chiffres importants. Par exemple, la chaîne de CBC/Radio-Canada sur le site de YouTube a généré 20 millions de pages vues, et nos plateformes numériques attirent chaque mois sept millions de visiteurs uniques. Cependant, les chiffres n'expliquent pas vraiment la transformation qui s'opère actuellement au sein de CBC/Radio-Canada.
De simple radiodiffuseur, la société se transforme en lieu de rencontre. Chaque jour, nos contenus numériques rassemblent les Canadiens. Ils tissent de nouveaux liens entre le radiodiffuseur public et la population qu'il sert.
Par exemple, le mois dernier, les Canadiens ont regardé le documentaire Pour ne pas oublier nos militaires morts au combat, un hommage aux soldats canadiens tombés en Afghanistan, que nous avons diffusé le jour du Souvenir sur nos réseaux de télévision français et anglais. Les Canadiens poursuivent leur expérience en visitant la page Web de chaque soldat disparu conçue par sa famille et ses amis et en y inscrivant leurs réflexions sur ce que représente le sacrifice consenti par ce militaire.
Lorsque nous avons appris que l'espérance de vie des Canadiens diminuait, nous avons décidé d'agir. CBC lancera en janvier une initiative multiplateforme intitulée « Live Right Now ». D'une durée de six mois, cette initiative vise à aider les Canadiens à adopter un mode de vie plus sain. Réalisée en collaboration avec huit organismes à but non lucratif, comme Breakfast for Learning, ParticipAction et l'Association canadienne du diabète, elle s'articule autour d'un nouveau réseau social en ligne grâce auquel les Canadiens peuvent trouver des conseils pour atteindre leurs objectifs et s'inspirer des autres.
Dans le cadre du Défi du million de livres, les Canadiens pourront s'engager à perdre collectivement un million de livres d'ici la fête du Canada.
« Run Run Revolution » suivra les élèves d'écoles secondaires dans leur entraînement en vue d'une course de fond.
En janvier, « Village on a Diet » suivra les habitants de Taylor, en Colombie-Britannique, qui, avec l'aide de nutritionnistes et de professionnels de la santé, se motiveront les uns les autres à vivre plus sainement.
Voilà comment nous mettons actuellement à profit l'environnement multiplateforme pour communiquer avec les Canadiens. Notre réussite est cependant conditionnelle à l'accessibilité de nos contenus. C'est sur ce plan, à notre avis, que l'intégration verticale amène des défis.
[Français]
CBC/Radio-Canada est maintenant le seul télédiffuseur national à ne pas appartenir à une entreprise de distribution par câble ou par satellite. Nous sommes préoccupés par la mainmise que ces sociétés intégrées peuvent avoir sur le contenu et sur sa distribution. Dans ce nouvel environnement, comment donc garantir l'égalité d'accès des habitants de toutes les régions du pays à un contenu canadien diversifié?
C'est l'une des raisons qui nous ont poussés, à Radio-Canada, à créer TOU.TV en janvier dernier. Ce service de vidéo sur demande sur le Web est en quelque sorte le guichet unique où les Canadiens peuvent trouver une variété extraordinaire de contenus, qui vont des séries dramatiques aux documentaires, en passant par les émissions d'animation et les séries Web, et qui sont l'oeuvre de radiodiffuseurs francophones du monde entier. TOU.TV est le nouveau lieu de rencontre.
D'ailleurs, cette initiative a reçu un accueil exceptionnel: elle a été choisie par la critique comme le meilleur site Web de l'année et a obtenu certainement la faveur des Canadiens, qui ont regardé plus de 18 millions d'émissions en 11 mois.
Pensez-y maintenant un instant. Sauf pour l'écoute de la radio, presque tous les Canadiens doivent aujourd'hui s'en remettre à un distributeur par câble ou par satellite, à une compagnie de téléphone ou à un fournisseur de services Internet pour s'informer, être éclairés et se divertir.
Et étrangement, c'est le cas pour nous aussi. CBC/Radio-Canada dépend de ces entreprises pour rejoindre les Canadiens. Certes, nous avons conclu des ententes avec certains de nos distributeurs, comme Rogers, Quebecor et Bell, mais nous avons encore de la difficulté à rendre notre programmation locale accessible aux Canadiens.
C'est par ces stations locales que nous sommes souvent enracinés le plus profondément au sein des communautés. Nous pensons qu'il s'agit là d'un élément essentiel de notre mandat de radiodiffuseur public. Et pourtant, les abonnés de télévision par satellite à l'Île-du-Prince-Édouard ne peuvent regarder la programmation de la station locale de CBC à Charlottetown parce que Bell Télé Satellite ou Shaw Direct ne la distribuent pas. Au Québec, Radio-Canada compte six stations de télévision locales; Bell Télé Satellite en distribue seulement trois, et Shaw, seulement une.
Drôle de situation: d'une part, le CRTC a mis sur pied le Fonds pour l'amélioration de la programmation locale pour augmenter la quantité de contenus locaux et, d'autre part, les abonnés n'ont pas accès aux contenus ainsi créés. C'est un système totalement inefficace.
Nous savons que le CRTC examine présentement la question. Nous estimons que la distribution des stations locales par les entreprises de distribution par satellite devrait être garantie.
Même la réussite de TOU.TV dépend des fournisseurs de services Internet. Qu'arriverait-il si un fournisseur de services par Internet jugeait que les services vidéo en ligne requièrent une trop grande capacité de la bande passante, et qu'il se mettait à ralentir la vitesse de l'accès au contenu? Comment alors assurer que les entreprises intégrées verticalement n'accordent pas un traitement préférentiel aux sociétés ou aux produits qui lui appartiennent?
D'après nous, l'adoption d'un cadre réglementaire efficace qui garantit aux Canadiens un accès à des contenus canadiens, peu importe à qui appartient le réseau de distribution, est la seule solution.
[Traduction]
Nous comprenons ce qui motive ces entreprises à s'intégrer. Elles s'efforcent d'évoluer pour se tailler une place dans l'environnement numérique, tout comme nous. Cependant, nous avons aussi une responsabilité légale d'offrir une programmation variée qui informe, éclaire et divertit les Canadiens. Tel est le mandat que nous avons reçu à titre de radiodiffuseur public, et il dicte le moindre de nos gestes, la moindre de nos décisions.
Nous vous avons déjà décrit les obstacles financiers auxquels nous avons fait face et que nous avons surmontés. Je ne m'étendrai pas sur cette question aujourd'hui. Nous devons regarder en avant. Nous devons investir une plus grande partie de nos ressources dans la création de contenus pour toutes les plateformes médiatiques, afin de pouvoir mettre en place et développer cet espace public qui suscitera les échanges entre les Canadiens. Pour y parvenir, nous avons dû nous doter d'une nouvelle stratégie pour guider notre cheminement dans l'environnement numérique. Nous communiquerons notre stratégie aux Canadiens au cours de la prochaine année.
Pour le moment, je vous dirai simplement que trois principes encadrent notre réflexion: premièrement, nous créerons et diffuserons encore plus de contenus canadiens de qualité; deuxièmement, nous renforcerons notre présence dans toutes les régions du Canada; et troisièmement, nous ferons une plus grande utilisation des plateformes en ligne pour communiquer avec les Canadiens.
Voici donc la situation: nous sommes bien placés pour être un catalyseur puissant dans la création et la consommation de contenus numériques canadiens. Pour y parvenir, nous aimerions obtenir votre soutien à trois égards. D'abord, il nous faut un financement stable, et je pense particulièrement au complément de 60 millions de dollars qui contribue au succès de nos contenus canadiens. Ensuite, nous aimerions obtenir une distribution garantie de nos signaux locaux et nationaux de télévision, de manière à ce que les abonnés à la distribution par satellite aient accès à notre programmation locale. Finalement, nous avons besoin d'un cadre réglementaire efficace pour que les plateformes numériques soient synonymes de plus de choix et de diversité pour les Canadiens, et non le contraire.
Je vous remercie de votre attention.
[Français]
C'est avec plaisir que je répondrai maintenant à vos questions.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Bienvenue, messieurs Lacroix et Lafrance, madame Stewart. Ça me fait plaisir de vous revoir ici, à ce comité, pour parler essentiellement de la convergence.
Dans votre document de présentation, monsieur Lacroix, on peut lire ceci: « Nous sommes préoccupés par l'impact que ces sociétés intégrées peuvent avoir sur le contenu et sur sa distribution. Dans ce nouvel environnement [...] » Quand vous dites être préoccupés, je sens que c'est un euphémisme. Habituellement, quand on se dit préoccupé, nos préoccupations sont claires et ce sont des inquiétudes.
Par ailleurs, il est difficile de ne pas vous parler de Quebecor, qui est le symbole de la convergence au Québec. Cette entreprise existe depuis bien plus longtemps que n'importe quelle entreprise de télédiffusion ou de radiodiffusion au Canada, même. En effet, la convergence de Quebecor a commencé au début des années 2000, alors que le reste du Canada s'est mis à la convergence il y a quelques années seulement.
Quebecor est donc présent au Québec, du moins en tant que câblodistributeur, où 60 p. 100 des foyers sont branchés à Vidéotron, ce qui est beaucoup. Ça ne laisse pas beaucoup de place aux autres, ce qui lui confère un pouvoir réel, dont certains organismes sont venus nous parler ici.
Quebecor possède, comme on le sait, le réseau TVA et le poste de radio qui est votre principal concurrent, en plus des magazines et des journaux, et de l'entreprise de câblodistribution dont je viens de parler, et oeuvre maintenant dans le domaine des sans-fil. On sent que cette entreprise s'étend dans pratiquement toutes les sphères des communications et des télécommunications.
J'aimerais que vous nous parliez des problèmes que vous vivez. Car, comme je vous l'ai dit tantôt, quand j'ai vu le mot « préoccupés », je me suis dit qu'il y avait bien davantage derrière ce mot. J'aimerais que vous nous parliez non seulement des problèmes, mais aussi des solutions qui ont déjà été envisagées au Québec ou que le Comité permanent du patrimoine canadien pourrait envisager.
:
Merci, monsieur le président.
Merci d'être présents cet après-midi.
C'est une étude très intéressante. D'entrée de jeu, je dois dire que je crois que CBC/Radio-Canada a certainement été un chef de file dans bien des domaines en ce qui concerne les nouvelles plateformes, comme les premières applications pour le iPOD. Peu importe le programme que nous voulons écouter, nous pouvons le faire sur différentes plateformes. À mon avis, nous constatons que tous les diffuseurs privés explorent de plus en plus les nouvelles plateformes.
Ce qui nous importe, en ce qui concerne les vastes empires très intégrés qui contrôlent soudainement les plateformes et le contenu, c'est leur nature anticoncurrentielle et les problèmes potentiels.
Je me rappellerai toujours une des premières vraies expériences de CBC/Radio-Canada lorsque vous avez fait les manchettes nationales et internationales quand vous vouliez diffuser « Canada's Next Great Prime Minister » par l'entremise de BitTorrent. Ce qui explique, en partie, que vous ayez fait les manchettes internationales, c'est que le programme a totalement été ralenti par les fournisseurs de services Internet, parce qu'elles le voyaient comme... Elles ne savaient peut-être même pas ce que c'était, mais l'expérience n'a pas été un succès.
À l'heure actuelle, êtes-vous préoccupés par le fait que bon nombre de vos concurrents principaux, parfois très hostiles, qui contrôlent les bandes passantes pourraient décider de lisser un peu plus le trafic si vous essayez d'utiliser de nouvelles avenues comme BitTorrent?
J'aimerais vous poser une question au sujet de Quebecor. Mes collègues en ont parlé. Nous savons qu'il s'agit en quelque sorte d'une querelle sanglante. Vous vous battez férocement pour vous imposer sur le marché québécois, mais c'est ça, la concurrence. Je pense que c'est excellent.
Je n'ai pas vraiment... Vous savez, Quebecor dirige presque tous les journaux du pays actuellement. Comme l'a dit A. J. Liebling: « La liberté de presse appartient à ceux qui sont assez riches pour en posséder une ». M. Péladeau est assurément assez riche pour posséder autant de journaux qu'il le souhaite.
Ce qui me préoccupe, c'est que lorsque je lis mon petit journal local, dans lequel nous avions auparavant des éditorialistes et beaucoup de contenu local, je constate que tout cela a disparu. Nous avons les trois mêmes voix, soit Peter Worthington qui discourt sur la menace posée par le Moyen-Orient, et deux autres vieux dinosaures. Je ne voudrais pas offenser M. Worthington, mais je le lis tous les jours dans tous les mêmes journaux.
Or, je lis maintenant dans ces petits journaux que ce que nous pouvons faire de mieux est de nous débarrasser de CBC/Radio-Canada et je me demande pourquoi on écrit dans l'éditorial d'un journal local qu'il faut se débarrasser de CBC/Radio-Canada. Les gens ne regardent-ils pas ce réseau? Ne s'intéressent-ils pas à son contenu?
Cela m'inquiète que Quebecor soit aussi hostile à l'égard de CBC/Radio-Canada. M. Péladeau l'a dit clairement à maintes reprises et pourtant, maintenant, il a les journaux. Quebecor contrôle les voies de transmission. L'entreprise veut s'emparer de votre marché.
Devons-nous établir des règles claires afin de pouvoir faire passer l'intérêt public avant les intérêts personnels et politiques, et nous assurer que les gens comme moi, à la maison, pourront regarder leurs émissions ou lire leur journal en sachant que les points de vue exprimés ne sont pas dictés d'en haut?
:
La responsabilité commence par nous et le Parlement dans les rapports annuels. Elle passe par les plans d'entreprises, par nous devant les comités, devant le CRTC. Elle passe par un nouveau site Web où nous publierons dorénavant toutes les informations disponibles qui peuvent intéresser les Canadiens.
Comme je l'ai dit, nous avons été bombardés par un nombre démesuré de demandes d'accès à l'information, soit environ 400, qui provenaient du même groupe travaillant dans la même organisation, durant les premiers mois où nous avons été assujettis à la Loi sur l'accès à l'information. Nous en avons tellement reçu que nous avons dû discuter avec le commissaire de la meilleure façon de procéder, parce que le problème ne touchait pas seulement CBC/Radio-Canada, mais aussi le commissaire — maintenant « la » commissaire — et le commissariat, qui étaient submergés et ne savaient pas ce que nous allions faire.
En date d'aujourd'hui, le 26 novembre 2010, des 1 262 demandes reçues, nous en avons traité 1 202. Depuis avril, nous n'avons reçu aucune plainte en ce qui concerne le délai dans le traitement des demandes reçues. Nous nous sommes améliorés. Nous n'avons pas toujours eu de bons résultats, mais nous nous améliorons et nous tirons des leçons de cette expérience.
J'aimerais vous rappeler qu'environ 1 000 demandes — c'est l'information qu'on a rendue publique — proviennent d'une seule source et de deux personnes. David Statham s'est encore adressé à la Cour fédérale et a perdu sa cause. En fait, les cours de première et de deuxième instances ont rejeté la demande de M. Statham visant à blâmer notre conduite dans ce dossier. En outre, la cour d'appel a approuvé les conclusions du juge de première instance et a déclaré — et je cite — que la conduite de M. Statham était loin d'être exemplaire.
En mettant tout cela en perspective, je dirais, monsieur Armstrong, que nous croyons en la reddition de compte. Nous nous améliorons, et je suis très fier du travail que nous avons accompli pour traiter le nombre considérable de demandes reçues.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les témoins de comparaître aujourd'hui devant nous.
Monsieur Lacroix, avec tout mon respect, au sujet des réponses que vous avez données à mon collègue sur les demandes d'accès à l'information, je m'attends, comme tous les membres de ce comité le comprendront sûrement, à ce que vous nous fassiez part de toute préoccupation que vous puissiez avoir sur...
Nous sommes tous là pour servir le public, comme les employés de Radio-Canada. Nous sommes payés par les contribuables. Je pense que si Radio-Canada voulait examiner nos dépenses, les dépenses du gouvernement, nous nous attendrions tous à ce qu'elle le fasse avec la détermination absolue de trouver des réponses pour les Canadiens, parce qu'elle considérerait que c'est sa responsabilité envers les Canadiens. Les Canadiens méritent des réponses.
Je crois que tous les parlementaires travaillent avec acharnement à augmenter la quantité d'information que nous fournissons, au point où c'est franchement embarrassant pour certaines personnes. Si nous ne sommes pas fiers de notre façon de dépenser, nous devons être prêts à en répondre à nos contribuables.
Le public de Radio-Canada s'étend dans tout le Canada. Je pense que c'est de très mauvais augure que Radio-Canada diffuse des demandes d'accès à l'information trouées ça et là et qui ne fournissent pas les réponses escomptées.
Je pense que Radio-Canada devrait être comme un livre ouvert. Elle devrait être totalement transparente. Vous servez le public. Vous appartenez au public. Quand le public entend des reportages, qui peuvent être totalement faux, sur des dépenses faramineuses que les autres réseaux ne font pas, pour payer le transport aller-retour de certaines personnes entre un lac isolé et la ville dans des hydravions aux frais des contribuables...
C'est le genre d'histoires dont a entendu parler le public. Nous devrions être en mesure de nous défendre contre ce type de rumeur plutôt que de nous battre devant les tribunaux; je pense que vous ne faites que jeter de l'huile sur le feu.
Voyez-vous que vous alimentez l'attaque contre vous en portant la question devant les tribunaux plutôt que de simplement répondre à la question?
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Merci à vous, monsieur le président ainsi qu'aux membres du comité.
Je m'appelle Ferne Downey. Je suis actrice professionnelle et présidente nationale de l'ACTRA. Je suis accompagnée aujourd'hui par Joanne Deer, notre directrice de la politique et des communications.
Je tiens à vous remercier de nous donner la possibilité de parler au nom de 21 000 artistes professionnels des industries du cinéma, de la télévision, de l'enregistrement, de la radio et des médias numériques qui vivent et travaillent dans différentes régions de notre pays.
La technologie numérique ouvre aux artistes canadiens un monde nouveau de possibilités incroyables. Il suffit désormais d'un clic de souris pour avoir accès dans toute la planète à notre diversité culturelle, à nos artistes de talent et aux voix uniques qu'offre le Canada. Ces nouvelles possibilités sont toutefois assorties d'un nouveau défi et, en l'absence de mécanismes de soutien adéquat, les artistes canadiens risquent de se noyer dans une mer de contenu alimentée par les créateurs du reste du monde.
Les caractéristiques fondamentales de la radiodiffusion au Canada ont changé presque du jour au lendemain. Il y avait autrefois toute une armée de diffuseurs; nous n'en avons pas plus qu'une poignée. L'intégration verticale n'est pas qu'un terme à la mode; c'est notre nouvelle réalité.
Quatre grandes entreprises privées de télécommunications (Bell, Shaw, Rogers et Quebecor) se partagent maintenant la majorité des services canadiens de câblodiffusion, de transmission par satellite, d'Internet et de communications sans fil. Il en résulte que le contenu canadien est désormais contrôlé par des joueurs de moins en moins nombreux. Je sais que les représentants de ces entreprises ont déjà comparu devant vous pour vous dire à quel point il était difficile pour eux de faire des affaires dans ce contexte. Comme il fallait s'y attendre, ils se sont plaints de la réglementation, mais les règles sont nécessaires pour que les Canadiens puissent avoir accès à des voix diversifiées et indépendantes et, surtout, à des voix canadiennes.
Nous vous suggérons humblement quatre mesures fondamentales à prendre pour veiller à ce que le contenu canadien ne disparaisse pas. Premièrement, il faut adopter une réglementation efficace et pratique de la radiodiffusion, tant sur les plateformes conventionnelles que numériques. Deuxièmement, il faut maintenir le contrôle canadien sur nos entreprises de télécommunications. Troisièmement, il convient d'accroître les investissements publics et privés dans la production de nouveau contenu canadien. Quatrièmement, il faut offrir le soutien nécessaire aux voix locales et indépendantes.
Nous espérons que l'entrée en vigueur au printemps de la nouvelle politique télévisuelle du CRTC saura ramener du contenu canadien sur nos écrans, et surtout des émissions dramatiques et des comédies, des genres sous-représentés. C'est une étape indispensable, mais ce n'est assurément pas la dernière.
De plus en plus, les Canadiens se tournent vers leurs ordinateurs et leurs appareils mobiles pour avoir accès au contenu. Le CRTC a commis une erreur de jugement en choisissant de ne pas se mêler de la diffusion via les nouveaux médias, surtout si l'on considère la vitesse à laquelle ces nouvelles plateformes numériques se hissent au niveau de leurs équivalents classiques. Le réseau de télévision conventionnelle de CTV doit réserver de la place au contenu canadien, alors pourquoi n'en serait-il pas de même de son service en ligne? Nous sommes conscients que les enjeux ne sont pas les mêmes, mais il demeure logique de croire que des sites Web comme CTV.ca ou GlobalTV.ca devraient offrir à leurs clients des possibilités d'accès au contenu canadien.
Cette règle devrait également s'appliquer aux nouveaux services chevauchants comme Netflix, Apple TV et tous ceux qui pourront émerger de la jungle numérique. Il semblerait d'ailleurs que Shaw soit maintenant d'accord avec nous à ce sujet. Les diffuseurs en ligne devraient être réglementés.
Il est temps que les fournisseurs de services Internet et sans fil apportent leur contribution au système. Ces entreprises font beaucoup d'argent en diffusant du contenu sur leurs réseaux. Tout comme leurs homologues des services conventionnels de radiodiffusion, ces fournisseurs doivent faire leur part et contribuer à la création de ce contenu en versant un pourcentage de leurs revenus à un fonds de production.
Les gens du Fonds des médias du Canada ont indiqué que les revenus des entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) sont à la baisse et continueront probablement dans la même veine, car les Canadiens sont plus nombreux à accéder au contenu en ligne. Il est essentiel que le gouvernement fédéral continue d'appuyer le Fonds des médias du Canada. Les fournisseurs de service Internet doivent toutefois faire aussi leur part pour combler ce manque à gagner.
Nous craignons que l'intégration verticale, combinée à la faiblesse ou à l'incohérence des règles applicables à la propriété étrangère, crée toutes les conditions favorables pour que des entreprises étrangères viennent au Canada afin de rafler toute notre industrie des télécommunications. Si cela devait arriver, les principaux moyens de production, de promotion et de diffusion de la culture canadienne se retrouveraient entre des mains étrangères.
Certains croient qu'on peut vendre des entreprises de télécommunications sans affecter la radiodiffusion. C'est peut-être possible dans certains pays, mais pas au Canada. Ici, les entreprises de téléphonie possèdent des actifs de câblodistribution, de radiodiffusion et de transmission par satellite alors que les entreprises de câblodistribution possèdent des actifs de télécommunications, de transmission par satellite et de radiodiffusion.
Une ouverture à la propriété étrangère dans le secteur des télécommunications serait désastreuse. Elle porterait atteinte à la souveraineté culturelle du Canada et mettrait en péril notre réglementation en matière de contenu. Notre culture ne pourra certes pas survivre, et encore moins s'épanouir, si les décisions au sujet de notre programmation télé aux heures de grande écoute et de notre contenu en ligne sont prises par les cadres de NBC Universal à Los Angeles.
Je vais maintenant laisser la parole à Joanne Deer.
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Merci, monsieur le président.
Je m'appelle Peter Murdoch. Je suis vice-président du SCEP. Je suis accompagné aujourd'hui de Monica Auer, notre conseillère juridique pour ces questions.
Le SCEP est le plus grand syndicat du secteur des médias au Canada. Des milliers de nos membres travaillent dans l'industrie des télécommunications et de la radiodiffusion. Des centaines d'entre eux couvrent et présentent l'actualité dans les différentes régions du Canada et sont très intéressés par votre étude.
Nous partons de la constatation que l'intégration verticale n'est pas un fait nouveau. Comme l'indique le tableau 1 de notre document, voilà plus de 30 ans déjà que le CRTC permet à des entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) de prendre le contrôle de stations de radio et de télévision. L'intégration verticale est importante parce qu'elle influe sur la diversité des nouvelles et parce qu'une concurrence saine entre des sources fiables à ce chapitre est primordiale, tant pour les Canadiens que pour notre démocratie. Le CRTC a dit que les avantages de ces structures de propriété étaient significatifs et sans équivoque.
Est-ce que l'intégration verticale a été bénéfique pour les Canadiens et pour la qualité des nouvelles? Jusqu'à maintenant, l'emploi dans la programmation, les dépenses pour la programmation locale et les heures de diffusion locale ont tous diminué au gré de la concentration de la propriété. Je vous invite à consulter les graphiques inclus dans notre mémoire. Je crois que vous les trouverez intéressants.
Est-ce que l'intégration verticale pourrait renforcer notre système? Après tout, les EDR s'accaparent maintenant de la majorité des revenus de radiodiffusion, pendant que les diffuseurs télé dont ils sont propriétaires paient pour la plus grande partie du contenu canadien. Mais comme les EDR sont habituées à des profits faramineux, elles s'opposeront à toute suggestion visant un soutien accru à la programmation canadienne. Vous avez déjà entendu les gens de Bell déclarer que CTV doit être capable de fonctionner indépendamment. On ne croit plus qu'une concentration accrue de la propriété permettrait de diriger davantage de ressources vers la programmation canadienne.
Bien que le Canada puisse bénéficier des avantages de l'intégration verticale, le CRTC vous a dit que sa position par défaut est de ne pas réglementer. Il a dit que les Canadiens devraient démontrer la nécessité de la réglementation. Mais comme le Parlement a créé le CRTC pour qu'il réglemente au nom des Canadiens, pourquoi ceux-ci devraient-ils maintenant persuader le CRTC de défendre leurs intérêts?
Nous avons appris que le CRTC a dépensé 2,7 millions de dollars pour des experts-conseils et des recherches depuis janvier 2007. Pourtant, comme l'indique notre tableau, il n'a pas effectué ni commandé de recherches sur l'impact de la concentration de la propriété, de la propriété mixte des médias, ou de la propriété des services de programmation par les EDR. On n'a pas non plus mené de recherches sur l'impact de l'intégration verticale sur les investissements dans la programmation; on ignore combien il existe de bureaux de nouvelles et combien de journalistes y travaillent. Le CRTC n'a pas non plus évalué la diversité des nouvelles ou l'impact de sa politique sur la diversité des voix. Alors, comment le CRTC ou les Canadiens peuvent-ils comprendre l'effet de l'intégration verticale? Le CRTC ne publie même pas les données brutes nécessaires pour établir si la réglementation fonctionne ou à quel moment elle donne des résultats. Cette lacune s'explique en partie du fait que c'est devenu impossible de le faire. En effet, le CRTC a récemment détruit la plupart de ses propres données des années 1968 à 1990. Depuis 2007, le CRTC s'est opposé aux demandes d'accès à l'information qu'il lui reste.
En ce qui concerne d'autres questions, comme la propriété étrangère, le CRTC n'effectue pas le suivi du pourcentage d'actions avec droit de vote ni du niveau de dettes que détiennent des non-Canadiens dans notre système de radiodiffusion. En l'absence de recherches sur l'impact d'une propriété étrangère accrue dans les secteurs de la radiodiffusion et des télécommunications, qu'est-ce qui a convaincu le CRTC de formuler une recommandation en ce sens le printemps dernier? Après l'avoir entendu dire aux Canadiens qu'il leur faudrait désormais démontrer la nécessité de la réglementation, nous constatons que le conseil n' a jamais évalué ni l'effet de la déréglementation, ni sa propre décision de cesser de réglementer la publicité à la télévision conventionnelle.
Pourquoi le CRTC ne se penche-t-il pas sur ces questions? C'est peut-être parce que la Loi sur la radiodiffusion place les politiques et les règlements établis par le CRTC entièrement à l'abri des contestations judiciaires. Et les Canadiens doivent donc se contenter d'un processus réglementaire fondé sur des hypothèses, alors qu'ils pourraient s'attendre à une approche professionnelle et moderne de la politique des communications. Nous savons que ce n'est pas l'approche souhaitée par les gouvernements ou les parlementaires. Dans les règles établies en 2007, que nous avons jointes ici, on insiste sur la nécessité de compter sur des preuves empiriques lorsque des agences procèdent à une déréglementation. Des preuves semblables sont requises aux fins de la déréglementation, et pas seulement de la réglementation.
C'est pour cette raison que nous appuyons vivement votre étude en cours. Le CRTC devrait être tenu d'adopter cette approche basée sur les preuves. Par conséquent, au lieu de demander un démantèlement ou une interruption de l'intégration verticale, nous préconisons que le Canada commande des recherches expliquant la dynamique de la propriété et du contenu des médias. Nous proposons pour ce faire la création d'un institut national indépendant qui aurait pour mandat de mener des recherches quantitatives impartiales sur la réglementation et les politiques régissant les médias électroniques.
Notre proposition n'entraînerait aucun déboursé pour les contribuables. Pour financer cet institut, il suffirait de prélever un dixième de 1 p. 100 des milliards de dollars qui seront tirés de la vente aux enchères du spectre l'an prochain. Par ailleurs, les travaux de recherche pourraient être financés à même un prélèvement au titre des transactions entraînant un changement de propriété. Vous pourriez ainsi recommander que le CRTC octroie à cet institut 1 p. 100 des bénéfices tirés de la transaction Bell-CTV.
Cette recherche devrait commencer sans tarder. Le SCEP serait très heureux de soumettre une proposition formelle en vue d'une initiative qui donnerait à la réglementation des communications une base solide fondée sur des preuves. Votre comité pourrait alors reprendre l'étude dans deux ans pour examiner les lois canadiennes en matière de communications et les possibilités d'amalgamation à ce chapitre. M. Del Mastro est intervenu plusieurs fois en ce sens et nous appuyons ses démarches.
En conclusion, l'intégration verticale n'a procuré jusqu'à maintenant aux Canadiens qu'un très faible rendement sur leurs investissements dans le spectre de la radiodiffusion. À notre avis, l'équilibre réglementaire s'est manifestement rompu au détriment des intérêts de notre pays, et ce, sans le consentement éclairé du Parlement et sans que vous ayez eu votre mot à dire.
Pour l'évaluation de l'intégration verticale, le rôle du CRTC doit être de déterminer les faits, de soupeser les intérêts concurrentiels et, surtout, de faire passer les Canadiens en premier. Si l'on parvient à rétablir l'équilibre grâce à une réglementation efficace, efficiente et basée sur des preuves, ce sont les Canadiens, notre intérêt national et les entrepreneurs qui en bénéficieront.
Je suis prêt à répondre à vos questions. Merci.
:
Bonjour, monsieur le président. Merci de cette invitation.
Je m'appelle Marc-Philippe Laurin. Je suis président de la Sous-section CBC/Radio-Canada de la Guilde canadienne des médias.
Notre syndicat représente 6 000 travailleurs partout au Canada, y compris les employés de CBC/Radio-Canada à l'extérieur du Québec.
[Traduction]
Nous représentons également des travailleurs de TVOntario, TFO, l'Aboriginal Peoples Television Network, Shaw Media et ZoomerMedia.
Nos membres ont à coeur l'avenir des services publics de radiodiffusion et nous sommes ici aujourd'hui pour exhorter le gouvernement et le Parlement à intervenir activement pour veiller à ce que les Canadiens puissent continuer à bénéficier d'une saine diversité des voix médiatiques au fil de l'évolution incessante de notre industrie.
La GCM aimerait saisir l'occasion qu'offre cette importante étude pour présenter certaines propositions relativement à ce que le Parlement et le gouvernement pourraient faire en vue d'assurer un équilibre entre les divers intérêts présents dans le monde canadien des médias au moment où les entreprises du secteur privé poursuivent leur consolidation.
[Français]
Je vous présente Karen Wirsig, coordonnatrice des communications de la Guilde canadienne des médias.
[Traduction]
Elle est également notre directrice responsable de la défense des droits et elle poursuivra notre exposé en vous expliquant les sept recommandations que nous vous soumettons aujourd'hui.
Nous n'avons pas beaucoup de temps, mais je crois qu'il vaut la peine de vous exposer très brièvement nos sept recommandations.
Elles portent sur trois enjeux distincts. Il y a d'abord la réglementation requise pour composer avec l'intégration verticale. Nous n'avons aucune proposition détaillée à ce sujet, mais nous appuyons les mesures mises de l'avant pour faire en sorte que les nouvelles entreprises émergentes ne puissent pas bloquer l'accès des Canadiens au contenu ni expulser des ondes ou d'Internet des diffuseurs publics ou indépendants de plus petite taille. Nous préconisons une séparation des structures afin que le contenu demeure dans un silo distinct au sein de ces nouvelles entreprises intégrées.
CBC/Radio Canada est le deuxième enjeu important. Nous croyons que CBC/Radio Canada devrait recevoir davantage de financement pour le contenu local sur toutes les plateformes.
Troisième enjeu clé, nous estimons que la stratégie numérique du Canada doit renfermer un volet visant le contenu local, et nous sommes vraiment préoccupés par le peu de place que semble occuper le contenu dans le processus de réflexion gouvernementale à cet égard.
Voyons maintenant nos recommandations. Comme je l'indiquais, la première vise à mettre en place une règle imposant une séparation des opérations et de la gestion entre la distribution du contenu et la programmation au sein d'une même société, de même que des mesures qui permettent au CRTC d'intervenir lorsque cette règle est enfreinte.
Notre deuxième recommandation concerne l'octroi de fonds supplémentaires à CBC/Radio-Canada pour la production de nouvelles émissions locales sur toutes les plateformes dans les collectivités mal ou non desservies. En toute franchise, nous ne croyons pas que le financement fixe soit suffisant.
Troisièmement, nous recommandons d'accorder la priorité au soutien des émissions locales indépendantes sur toutes les plateformes dans la politique culturelle et la politique de radiodiffusion. Quatrièmement, nous préconisons que l'on donne instruction au CRTC de mettre en oeuvre une stratégie pour la radio, la télévision et les émissions numériques dans les collectivités de plus petite taille en misant sur l'efficacité du Fonds pour l'amélioration de la programmation locale (FAPL) et sur des initiatives ciblant les médias communautaires. Pour le moment, le FAPL est uniquement accessible aux diffuseurs publics et privés. Nous sommes d'avis que la participation et le soutien des communautés locales sont essentiels à la croissance des médias locaux au sein des collectivités de petite taille. Il ne semble pas à ce moment-ci que les grandes organisations médiatiques professionnelles vont beaucoup investir dans les petites localités canadiennes. Toutes les fois qu'il y a regroupement d'entreprises — ce n'est pas un phénomène nouveau, mais l'intégration verticale en est la manifestation la plus récente — nous constatons que les grandes entreprises médiatiques perdent de leur intérêt et réduisent les investissements, surtout dans les petites collectivités, mais aussi dans la programmation locale en général. Nous devons renverser cette tendance. Il nous faut une stratégie à cet effet et je crois que le comité du patrimoine est un bon point de départ pour lancer une stratégie concernant le contenu au bénéfice de nos petites localités.
En cinquième lieu, nous exhortons le comité du patrimoine à recommander que soit réservée une partie du spectre qui sera mis aux enchères pour la radiodiffusion et les utilisations publiques et communautaires.
Notre sixième recommandation vise l'intégration d'une stratégie privilégiant les initiatives des médias locaux dans la stratégie numérique du Canada. Le financement de ces initiatives pourrait provenir en partie d'un modeste prélèvement sur le produit des futures enchères du spectre.
Comme septième et dernière recommandation, nous proposons la mise en oeuvre d'une campagne d'éducation nationale coordonnée sur la transition vers la télévision numérique qui, entre autres, ciblerait les collectivités locales qui seront privées de leurs signaux hertziens pour les renseigner sur la façon dont elles pourraient remplacer ce service pour leurs résidants.
Merci.
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Bonjour à tous les membres du Comité du patrimoine.
Je m'appelle Maureen Parker, et je suis directrice générale de la Writers Guild of Canada. Je suis accompagnée de ma collègue Kelly Lynne Ashton, notre directrice de la politique. Merci de nous avoir invitées.
La Writers Guild of Canada est une association nationale représentant plus de 2 000 scénaristes professionnels travaillant dans le secteur de la production cinématographique, télévisuelle, radiophonique et numérique de langue anglaise au Canada. Nous sommes ici pour parler de l'évolution de l'infrastructure du système canadien de radiodiffusion et des répercussions qui s'ensuivent sur la création de contenu canadien.
Le système canadien de radiodiffusion change rapidement. Les fusions intervenues entre diffuseurs au cours des dernières années ont été à l'origine d'une concentration importante des médias et certaines acquisitions ont mené à une intégration verticale, notamment lorsque des câblodistributeurs et des fournisseurs de services via satellite comme Shaw et Bell ont acheté des entreprises de radiodiffusion. Plus récemment, nous avons assisté à l'entrée en scène de services chevauchants comme Netflix et Apple TV. Bien qu'ils soient en concurrence directe avec certaines composantes du système canadien de radiodiffusion, ces services ne relèvent pas de la compétence du CRTC, parce qu'ils ne sont pas canadiens et parce que la définition juridique du système canadien de radiodiffusion est trop étroite pour les inclure.
Les entreprises soumises à la réglementation, comme Rogers, Shaw, et Bell, sont également actives dans l'espace non réglementé. Les câblodistributeurs et les diffuseurs par satellite ont créé leurs propres services de diffusion en ligne où ils offrent sans frais à leurs abonnés des films et des émissions de télévision. En outre, la plupart des diffuseurs comme CTV et Shaw Media permettent de consulter en ligne un catalogue de leur programmation disponible. Cependant, étant donné que tous ces services ne sont pas soumis à la réglementation, ils ne sont aucunement tenus d'offrir du contenu canadien ou d'en faire la promotion, même s'ils sont la propriété d'entreprises réglementées.
Pourquoi la situation nous inquiète-t-elle? C'est parce que les Canadiens, comme en témoignent leurs comportements, ont élargi leur perception traditionnelle du système canadien de radiodiffusion pour inclure ces nouvelles plateformes. Les Canadiens n'ont pas renoncé au monde de la télévision, mais ils optent de plus en plus pour l'aspect pratique et portable du visionnement en ligne pour compléter leur consommation télévisuelle. Selon le plus récent Rapport de surveillance des communications du CRTC, les Canadiens regardent en moyenne 26 heures de télévision par semaine, un chiffre resté relativement stable. En moyenne, les Canadiens de langue anglaise sont en ligne 14,5 heures par semaine et deux de ces heures sont consacrées à la télévision en ligne. Ils peuvent ainsi regarder du contenu télévisuel à l'endroit et au moment qui leur convient. Cependant, le cadre réglementaire établi par la Loi sur la radiodiffusion n'a pas tenu compte de l'évolution du comportement des consommateurs.
Le CRTC a établi des exigences en matière de dépenses et de diffusion pour veiller à ce que les radiodiffuseurs canadiens appuient la programmation canadienne. En l'absence du cadre réglementaire du CRTC, les auditoires canadiens ne pourraient bénéficier d'émissions à succès canadiennes comme Flashpoint, Murdoch Mysteries et Heartland. Il nous faut un cadre réglementaire semblable pour les plateformes numériques qui font désormais partie intégrante de notre système de radiodiffusion.
Le CRTC représente l'intérêt public dans les limites de son champ d'intervention. Au moment du renouvellement de leur licence en avril 2011, les trois radiodiffuseurs privés se verront imposer une nouvelle politique télévisuelle comportant des exigences précises en matière de dépenses de programmation pour les dramatiques et les documentaires, notamment. Nous avons bon espoir que le rétablissement d'une exigence de dépenses se traduira par un plus grand nombre de dramatiques canadiennes à la télévision conventionnelle. Rien ne garantit toutefois que ces émissions supplémentaires seront également disponibles ou facilement accessibles en ligne.
Kelly Lynne.
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Nous ne savons pas non plus s'il y aura suffisamment d'argent dans le Fonds des médias du Canada pour financer adéquatement les nouveaux programmes en vertu de la nouvelle politique de télévision. Pour chacun des programmes du FMC, la demande excède les fonds disponibles.
Les gens du FMC vous ont dit que les revenus des entreprises de câblodistribution et de diffusion par satellite connaissaient une croissance annuelle considérable, mais qu'on note un ralentissement à ce chapitre avec un taux de croissance attendu de seulement 2 p. 100 par rapport au revenu de l'an dernier. On prévoit que cette stagnation sera de plus en marquée, car davantage de gens vont renoncer aux services du câble ou se contenter de forfaits de base pour tirer parti des possibilités offertes pour la visualisation du contenu en ligne.
Le FMC a reçu le mandat de financer le contenu, tant pour les médias numériques pour la télévision parce que le gouvernement a été à même de constater que les Canadiens étaient présents sur les deux plateformes et devaient avoir accès au contenu canadien par le moyen de leur choix. Les deux plateformes, télévision conventionnelle et médias numériques, devraient donc contribuer au financement du contenu canadien.
Est-il logique de traiter un service sur nouveau média comme celui de Rogers sur demande en ligne (RODO) différemment des services Vidéo sur demande (VSD) existants? Les deux services offrent aux Canadiens la possibilité de regarder des films et des émissions de télévision au moment qui leur convient. La seule différence est le support utilisé: pour l'un, c'est l'appareil de télévision; pour l'autre, l'ordinateur.
Les services VSD sont tenus de rendre disponible la programmation canadienne et de contribuer au financement de sa production. Par exemple, le service VSD de Rogers doit s'assurer qu'au moins 5 p. 100 des longs métrages disponibles en langue anglaise sont canadiens et qu'au moins 20 p. 100 des émissions de télévision offertes le sont également. Il n'y a pas d'obligation semblable dans le cas de RODO. Le service VSD de Rogers doit verser 5 p. 100 de ses revenus bruts à un fonds canadien de production de contenu comme le FMC, alors que cela n'est exigé ni de RODO ni de Rogers, à titre de fournisseurs de service Internet.
La situation est la même pour toutes les grandes entreprises de câblodistribution et de diffusion par satellite qui offrent à la fois des services en ligne et VSD. Et n'oublions pas que si Rogers, Bell et Shaw se sont dits préoccupés quant à la menace concurrentielle d'entités non réglementées comme Netflix ou Apple TV, ces entreprises bénéficient elles-mêmes, en tant que fournisseurs des services Internet, de l'utilisation accrue de bande passante par les consommateurs recourant à ces services en plus de ceux qu'elles offrent directement.
En outre, même si Rogers, Shaw et Bell font la promotion de leurs services en ligne en faisant valoir qu'ils sont gratuits pour les abonnés, ceux-ci devront en fait payer pour ces services s'ils dépassent leur limite de bande passante. Il suffit de visionner quelques émissions de télévision par mois pour excéder cette limite. Les Canadiens sont ainsi encouragés à utiliser d'importantes quantités de bande passante pour visionner des émissions de télévision dont certaines sont financées par le FMC. Bien que leurs revenus de fournisseurs de service Internet s'en trouvent accrus, ces entreprises ne contribuent aucunement à la création du contenu.
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Puisqu'il un est ainsi, je vais partager mon temps avec Mme Crombie.
Il semble y avoir un thème commun qui se dégage, ou tout au moins une tendance.
Lorsqu'il est question de réglementation, le président du CRTC a fait allusion au fait qu'il y avait aussi une question de compétence, une décision juridique qui entrait en jeu. S'agit-il d'une décision définitive? Bon nombre d'entre vous avez exprimé des inquiétudes quant à la réglementation, c'est le moins qu'on puisse dire.
Les gens de l'ACTRA nous ont parlé de l'imposition d'amendes et de souveraineté par rapport au contenu culturel. Ce sont des arguments valables.
Du côté du SCEP, il a été question de la réglementation des médias électroniques pour ce qui est de... Et je crois que vous êtes même allés un peu plus loin dans votre recommandation en proposant un comité indépendant à cette fin.
Il y a aussi les enjeux liés au contenu et à la stratégie numérique, un thème qui revient souvent.
La Writers Guild a cité quelques exemples de réussite au sein du cadre conventionnel.
Voici donc quelques questions auxquelles je vous invite tous à répondre. Vous avez indiqué que cette réglementation est nécessaire en cette ère du numérique... au même titre qu'elle l'était auparavant. Est-ce bien ce que vous croyez?
Pensez-vous que cela est réalisable, compte tenu de la prolifération des technologies accessibles et des moyens à la disposition de la nouvelle génération pour accéder au contenu?
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Je ne lui en voudrais pas, parce que c'est bien de l'entendre parler en français. Je suis prête à investir de mon temps pour que notre président parle davantage en français.
Une voix: Il a bien fait ça.
Mme Carole Lavallée: Effectivement.
Alors, revenons à nos moutons.
Vous êtes un grand groupe de témoins et vous avez dit beaucoup de choses. J'ai essayé de synthétiser, de prendre les choses les plus intéressantes, car il est clair qu'il faut s'orienter vers des solutions.
L'un d'entre vous a dit qu'il fallait partager les fonctions de l'entreprise. J'ai trouvé ça intéressant, car c'était la première fois, à ma connaissance, qu'on voyait une telle suggestion.
Un deuxième a dit qu'il fallait réglementer Internet, et après la réponse des libéraux, vous aviez tous l'air de dire que c'était vrai.
Moi, je vous pose la question: le fait de fusionner les deux lois, celle sur la radiodiffusion et celle sur les télécommunications, permettrait-il au CRTC de réglementer Internet? Y aurait-il d'autres façons de réglementer Internet? Je veux vous l'entendre dire.
Je sais que je pose beaucoup de questions, mais c'est bien, parce que vous allez pouvoir en choisir une.
La question du Fonds des médias du Canada est un véritable problème. On a pris de l'argent qui était réservé à la production audiovisuelle chez les radiodiffuseurs généralistes et on l'a partagé avec le domaine numérique sans en ajouter davantage. Vous avez parfaitement raison. Or, existe-t-il d'autres façons d'ajouter de l'argent au Fonds des médias du Canada?
Finalement, faut-il attendre, comme le proposait le syndicat des télécommunications, qu'un institut de recherche fasse toute une grande étude à ce sujet, ou est-il possible de faire certaines choses avant?
Mes questions sont dans le désordre le plus total.
Allez-y, monsieur Murdoch.
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Merci. Tout ceci est très intéressant.
J'aimerais d'abord parler d'accès aux données. J'ai été incroyablement inspiré par mes collègues, et — le Parti conservateur de Sun Media —, par leur ouverture à l'égard du gouvernement et par leur engagement.
Vous savez, je viens seulement d'obtenir une réponse à une demande d'accès à l'information présentée au gouvernement conservateur il y a deux ans. J'ai reçu 150 pages blanches — qu'on m'a fait payer. Maintenant que j'ai des collègues qui vont obtenir qu'on rende des compte aux contribuables, je me sens inspiré.
Je pose la question parce qu'ils ont certainement quelque chose contre la CBC et les comptes que rend la société. En avril dernier, cependant, M. von Finckenstein a comparu devant le comité de l'industrie. Il avait alors énoncé diverses positions et des hypothèses concernant l'augmentation ou la modification du plafond de la propriété étrangère.
J'ai donc fait une demande d'accès à l'information pour voir s'il s'appuyait sur des faits. Un homme d'une telle envergure, qui fait des affirmations aussi marquantes, devait certainement s'appuyer sur une foule de données.
Eh bien non, il n'avait rien. Rien du tout. Alors je me suis demandé « comment peut-il faire de pareilles affirmations sur les politiques sans rien avoir pour les étayer? »
Je constate maintenant, monsieur Murdoch et madame Auer, que dans votre exposé, aujourd'hui...
La dernière fois que M. von Finckenstein a témoigné ici, il a dit qu'il était beaucoup trop tôt pour se prononcer sur l'intégration verticale, que cela restait à voir. Alors je me suis dit que ses fonctionnaires étaient en train de rassembler un tas de données, d'étudier les chiffres.
Et pourtant, vous nous dites qu'ils n'ont réalisé aucune analyse des effets de l'intégration sur les investissements dans les programmes, qu'ils ne savent pas combien de bureaux de nouvelles existent, ni combien de reporters travaillent dans la radiodiffusion, qu'ils n'ont pas mesuré la diversité dans les nouvelles, ni l'incidence de la politique de la diversité des voix.
Je me souviens très bien avoir entendu M. von Finckenstein dire qu'il y a énormément de diversité, et que cette diversité, c'est Internet.
Que devrions-nous attendre d'un organisme de réglementation publique pour ce qui est d'acquérir des données et de se montrer prêt à permettre au public d'accéder à ces données?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie nos témoins. C'est un groupe des plus intéressants.
Je vous remercie, monsieur Murdoch, pour votre appui. Je ne pensais pas qu'on m'écoutait.
Des voix: Oh, oh!
M. Dean Del Mastro: Je me répétais inlassablement, mais personne n'y faisait rien.
Je pense, en réalité, que le moment est venu de revoir ce document. Il est grand temps d'y réfléchir et de déterminer nos objectifs. D'une certaine façon, ce que je pense —et je crois bien que d'autres témoins l'ont fait remarquer —, c'est que nous nous en sommes peut-être un peu éloignés, sinon beaucoup. Nous devrions essayer de définir les résultats que nous souhaitons.
J'ai cru comprendre, d'après mes entretiens avec les représentants du CRTC, qu'il ne leur déplairait pas à eux non plus de recevoir quelques directives supplémentaires du Parlement en matière d'orientation stratégique. Ce pourrait donc être un résultat positif.
Plusieurs d'entre vous avez parlé de participation, et particulièrement de participation dans les sociétés de télécommunications. J'aimerais savoir s'il y a une position précise. Comment, selon vous, les actions devraient-elles être réparties? Est-ce que ces sociétés devraient être à 100 p. 100 canadiennes? Ou est-ce qu'il faudrait une formule de 80-20 p. 100, ou 51-49 p. 100, avec un conseil d'administration entièrement canadien, une garantie de contrôle canadien? Que proposez-vous?
Je vous écoute, Ferne.
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Pour comprendre la position du gouvernement en la matière — et je ne connais pas la vôtre — pour attirer plus de compétiteurs, parce que l'on craint que les prix, au Canada...
Peut-être cette crainte n'est-elle pas fondée, mais elle se manifeste. Je l'entends dans la circonscription. Je suis sûr que vous entendez dire que le service sans fil est coûteux. Les téléphones mobiles sont chers. Les forfaits données sont chers.
Ils pensent qu'une concurrence accrue pourrait peut-être... et il est très difficile d'attirer de nouveaux compétiteurs au Canada, parce qu'il y a de gros joueurs, et ils ont en quelque sorte une chasse gardée, n'est-ce pas? Si on veut empiéter sur leur territoire, ils risquent fort d'opter pour des pratiques prédatoires.
C'est ce que je ferais. Si j'avais une part importante du marché et quelqu'un voulait me l'enlever, je passerais sûrement à l'attaque. Alors on peut les comprendre.
Trouvez-vous que ce soit justifié, que les prix pourraient baisser pour les consommateurs, ou pensez-vous que...?
Êtes-vous d'accord avec les entreprises de télécommunications, qui disent qu'en fait le système au Canada est très compétitif, que sa géographie complique l'offre de services partout au pays et que, tout compte fait, le service fourni est très bon?