:
Bonjour. Je tiens à remercier le président et les membres du comité.
Je m'appelle Peter Bissonnette et je suis président de Shaw Communications inc. Je suis accompagné de Ken Stein, premier vice-président, Affaires de gestion et de réglementation chez Shaw Communications inc.; de Charlotte Bell, vice-présidente, Affaires réglementaires chez Shaw Media; et de Michael Ferras, vice-président, Affaires réglementaires chez Shaw Communications inc.
[Traduction]
Nous tenons tout d'abord à remercier les députés, y compris les membres de ce comité, qui ont fortement appuyé notre acquisition des actifs de radiodiffusion de Canwest, maintenant connu sous le nom de Shaw Media. Nous tenons aussi à remercier le CRTC et le Bureau de la concurrence pour leurs examens minutieux et les approbations accélérées de notre demande.
Nous soulignons par ailleurs les commentaires du président du CRTC, selon qui notre acquisition « ... sera très avantageuse pour le système canadien de radiodiffusion. Shaw fournira aux propriétés de télédiffusion qui sont touchées par la transaction un contexte stable pendant qu'elles émergent d'une période d'incertitude. »
Au cours de l'audience publique, nous avons reçu près de 140 interventions d'appui de la part de radiodiffuseurs indépendants, de producteurs, de réalisateurs, d'artistes, de syndicats et de représentants élus. Nous sommes heureux de constater qu'ils conviennent presque à l'unanimité que la possession par Shaw de Global Television et des services spécialisés de Shaw Media constitue le meilleur résultat possible pour le système de radiodiffusion, pour l'économie et pour les téléspectateurs canadiens.
Grâce à notre acquisition, le deuxième plus gros radiodiffuseur du Canada a pu émerger de la protection de la loi contre les faillites en tant qu'entreprise intégrée et canadienne. Nous pouvons maintenant protéger les emplois, stabiliser les rapports avec les fournisseurs et les clients, faire des investissements pour l'avenir et développer un contenu multi-plateforme innovateur. Enfin, nous pouvons dépenser 180 millions de dollars sur des avantages appuyant les producteurs indépendants, les nouvelles locales et la transition numérique.
Charlotte.
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En ce qui concerne l'intégration verticale, certains intervenants l'ont décrite, à tort, comme étant une menace pour le système. Pourtant, c'est bien le contraire qui s'applique.
Pour faire concurrence dans l'univers numérique, il nous faut une industrie dont la structure nous permet de demeurer à la fine pointe de l'innovation. Notre acquisition de Shaw Media crée une entité robuste capable de faire concurrence pour les droits sur le contenu multi-plateforme et d'en optimiser la valeur.
Qui plus est, le CRTC a déjà introduit un cadre exhaustif pour protéger les radiodiffuseurs non affiliés ainsi qu'appuyer les producteurs indépendants. Les protections existantes du CRTC comprennent notamment les règles touchant la préférence indue ainsi que de nombreux règlements sur la distribution et l'accès. À cause des règlements du conseil, nous avons déjà rajouté plusieurs services de programmation indépendants et non affiliés, tant sur Shaw Direct que sur Shaw Cable, et nous allons devoir en ajouter d'autres.
Dans un avenir numérique incertain, les entreprises canadiennes réglementées devront jouir d'une souplesse maximale pour pouvoir servir leurs clients. Il nous faudrait envisager des mesures permettant de renforcer davantage le système en réduisant notre fardeau financier et réglementaire, plutôt qu'en l'accroissant. Il faut rejeter toute demande de nouveaux règlements et de nouvelles taxes, telles qu'une taxe imposée aux FSI.
Nous nous faisons concurrence dans un milieu dynamique. Nous répondons aux demandes de nos clients en matière de choix, de qualité et de valeur. Pour demeurer concurrentielle, l'industrie canadienne de la radiodiffusion a besoin d'entreprises robustes et intégrées qui doivent investir des milliards de dollars et mettre le cap sur l'offre de nouveaux services.
Les radiodiffuseurs et distributeurs canadiens investissent des sommes considérables dans le système, appuient et diffusent des émissions canadiennes uniques et créent des milliers de bons emplois au Canada. Ces contributions ont été soutenues par un cadre réglementaire détaillé qui atteint les objectifs de la Loi sur la radiodiffusion et protège la santé du système canadien de radiodiffusion. Cependant, l'atteinte des objectifs visés par la loi et la préservation de la robustesse du système sont maintenant menacées par l'arrivée de radiodiffuseurs de nouveaux médias qui nous font concurrence pour le contenu et pour les consommateurs. Ces entités ne sont pas canadiennes.
Peter.
:
Les concurrents étrangers tels que Netflix, Google TV, Apple TV et Hulu possèdent des marques de renommée internationale, des technologies sophistiquées, de l'expertise en marketing et des ressources financières impressionnantes. Ces fournisseurs de contenu étrangers demeurent à l'abri de la réglementation en vertu de la nouvelle ordonnance d'exemption relative aux entreprises de radiodiffusion des nouveaux médias du CRTC. Ce statut d'exemption doit être réexaminé pour les raisons suivantes.
Premièrement, le marché canadien des droits de radiodiffusion est en danger. Les fournisseurs étrangers soit détiennent, soit peuvent acquérir, les droits sur le contenu le plus populaire au monde.
De plus, les entités non canadiennes n'ont aucun contenu canadien ni d'exigences relatives à la diffusion. Elles ne contribuent aucunement à l'industrie de production canadienne sur le plan financier. Le fait que les recettes soient soutirées des services réglementés au profit des services exempts non canadiens nuit aux producteurs canadiens.
En consommant de la capacité précieuse, les fournisseurs chevauchants menacent d'affaiblir nos investissements considérables dans les réseaux et de nuire à la qualité du service offert aux clients de nos FSI.
Enfin, ce sont les consommateurs qui finiront par souffrir d'une pénurie de choix canadiens.
Les entreprises privées réagissent en investissant, en diversifiant et en innovant. Le gouvernement et le CRTC doivent également réagir en se demandant s'ils souhaitent conserver un système canadien de radiodiffusion. Si la réponse est oui, il faut alors mettre en place les règles appropriées.
Jusqu'à récemment, les règlements interdisant l'attribution de licences aux entités non canadiennes assuraient que les Canadiens soient bien desservis par leur système de radiodiffusion. Compte tenu de la capacité des nouvelles technologies de franchir les frontières et de chevaucher les réseaux canadiens de télécommunications, les règles régissant la propriété étrangère préservent de moins en moins l'inviolabilité de notre système de radiodiffusion et les avantages qu'il offre aux Canadiens. Il nous faut une nouvelle approche qui assure tout au moins que les fournisseurs non canadiens soient assujettis aux mêmes règlements et obligations financières. Le gouvernement et le CRTC doivent tout simplement nous assurer un terrain de jeu équitable.
Nous sommes prêts à faire concurrence et nous croyons en l'avenir du système canadien de radiodiffusion. La consolidation représente un aspect essentiel et incontournable de cet avenir. La politique gouvernementale et réglementaire doit appuyer la robustesse des concurrents canadiens intégrés ainsi qu'éliminer tout avantage offert aux fournisseurs chevauchants qui ne sont pas canadiens.
Monsieur le président, merci. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Tout à l'heure, je vous ai parlé de réglementer le Net. Vous n'êtes en effet pas les premiers à venir le suggérer. Il faudrait donc examiner cette question très attentivement.
Je vais vous parler d'un problème plus concret. Il y a actuellement 39 000 personnes au Lac-Saint-Jean—Saguenay — je parle de cette région, mais il en va de même partout au Québec — qui reçoivent des signaux par satellite. Elles n'ont pas d'autre choix que de recevoir ces signaux par satellites, car elles résident dans des municipalités qui ne sont pas desservies par le câble. Elles n'ont pas d'autre choix que de recevoir vos services, par exemple, et celui de votre concurrent Bell. Dans ces communautés éloignées, les satellitaires comme vous ne leur envoient pas de signaux de télévision locale.
Le Québec présente cette particularité: il y a cinq stations de télévision de Radio-Canada d'un bout à l'autre du Québec, dans cinq régions du Québec. Dans les autres provinces, normalement, il y en a une ou deux, mais rarement cinq. Et il y a autant de postes de télévision locale de TVA , qui est Quebecor, son concurrent, comme vous le savez. Donc, cela fait en sorte que 39 000 personnes assises devant leur poste de télévision doivent regarder les émissions de Radio-Canada de Montréal ou celles de TVA de Montréal parce que vous ne leur fournissez pas les services liés à la station de télévision locale.
Vous avez dit plus tôt que votre acquisition constituait « le meilleur résultat possible pour le système de radiodiffusion, [...] et pour les téléspectateurs canadiens ». Il y en a au moins 39 000... Je n'ai pas nommé toutes les régions du Québec; je n'en ai pris qu'une en exemple. Vous avez dit également que vous pourriez « dépenser 180 millions de dollars sur des avantages appuyant [...] les nouvelles locales ».
Qu'y a-t-il dans ces 180 millions de dollars pour les 39 000 personnes du Lac-Saint-Jean—Saguenay qui n'ont pas accès à leurs nouvelles locales, aux déclarations de leurs maires et de leurs politiciens, et aux prévisions météorologiques? Ils ne savent pas si, le lendemain, ils pourront aller jouer au golf ou aller au cinéma, mais ce n'est pas grave parce que, de toute façon, ils ne savent même pas ce qui est projeté dans leurs salles de cinéma locales.
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L'intégration verticale n'a pas causé ces problèmes, mais elle peut nous permettre de les régler en partie parce que les entreprises de production et de distribution fusionnent et en partie parce que ces fusions comportent des avantages pour la radiodiffusion au Canada.
Vous savez sans doute que le CRTC exige que les changements de propriété comportent des avantages. Les tableaux 3 et 4 montrent que depuis 2000, ces avantages ont permis d'aller chercher 878 millions de dollars pour la nouvelle programmation et la R-D, mais que moins de 1 p. 100 de cette somme a été consacré à des initiatives liées à l'accessibilité. Cela est dû au fait que la Loi sur la radiodiffusion donne l'impression que l'accessibilité est optionnelle. Elle dit que la radiodiffusion doit être accessible, mais seulement si les ressources voulues sont disponibles.
Toutefois, l'accessibilité est un droit légal pour la Coalition Accès 2020 et pour les tribunaux. Nous formulons donc cinq recommandations. La première concerne les normes. La convergence permet le partage du contenu entre plates-formes de distribution, mais l'accessibilité nécessite des normes techniques harmonisées pour l'ensemble des plates-formes. Le CRTC a demandé aux radiodiffuseurs d'adopter de nouvelles normes pour le sous-titrage et la description des listes d'émissions, mais il n'a pas demandé qu'ils adoptent des normes pour la production de vidéo description ou la présentation. Il a refusé d'inviter le seul groupe qui s'intéresse à ces normes et qui a été créé, soit dit en passant, par des bénévoles de la collectivité de l'accessibilité. L'approche du CRTC a contribué à la création de silos alors que le Canada a besoin de convergence et a répercuté le coût de l'élaboration des normes de vidéo description à la collectivité des personnes handicapées. C'est comme si on demandait aux personnes en fauteuil roulant de payer les frais de conception d'immeubles accessibles aux fauteuils roulants.
La Coalition Accès 2020 recommande donc que vous donniez instructions au CRTC d'habiliter notre coalition afin qu'elle élabore des normes numériques, harmonisées et bilingues de concert avec les producteurs, les ingénieurs de la radiodiffusion, les chercheurs et les distributeurs.
Deuxièmement, les radiodiffuseurs ont besoin de cibles qui encadrent leurs activités et qui leur permettent de réduire leurs coûts. Comme le montre le tableau 5, quand le CRTC a enfin exigé en 2007 que tout soit sous-titré, ses coûts ont diminué. Le CRTC réexaminera la plupart des licences des radiodiffuseurs l'an prochain. Accès 2020 vous demande de donner instructions au CRTC de fixer l'accessibilité complète comme cible claire pour le renouvellement des licences l'an prochain en exigeant que la totalité du contenu télévisuel soit sous-titré et décrit, avec de faibles taux d'erreur, d'ici 10 ans.
Troisièmement, nous devons pouvoir mesurer les progrès. À l'heure actuelle, le CRTC attend de recevoir des plaintes pour déceler les problèmes d'accessibilité, mais cela transfère aux Canadiens aveugles et sourds la responsabilité en matière d'exécution tandis que notre véritable objectif doit être des progrès mesurables vers l'accessibilité complète. Accès 2020 vous demande de recommander dans votre étude que le CRTC effectue chaque année une surveillance systématique de la quantité et de la qualité du contenu télévisuel accessible.
Quatrièmement, il faut des mesures quand les radiodiffuseurs ne respectent pas leurs obligations en matière d'accessibilité, le CRTC compatit avec eux, et c'est à peu près tout. La coalition recommande donc que vous donniez instructions au CRTC de faire respecter les exigences en matière d'accessibilité en prenant des règlements plutôt que des conditions de licence trop facilement modifiées.
Notre dernière recommandation explique comment financer la réalisation de ces objectifs. Accès 2020 demande au comité de recommander au CRTC qu'il affecte 1 p. 100 de la valeur des transactions liées à la propriété des chaînes de télévision pour les cinq prochaines années à des initiatives touchant l'ensemble des systèmes sous la direction de la Coalition 2020, en agissant de concert avec les radiodiffuseurs: 1 p. 100 de la valeur des transactions pour réaliser d'ici 2020 l'accessibilité complète.
En guise de conclusion, si vous l'encadrez, l'intégration verticale peut être avantageuse pour les Canadiens en rendant la télévision complètement accessible, et le CRTC peut travailler avec et non pas contre les organisations qui représentent des millions de Canadiens handicapés.
Notre coalition vous remercie de cette importante étude que vous avez entreprise et de vos questions.
:
MétéoMédia et The Weather Network sont parmi les réseaux les plus largement distribués au pays, rejoignant 98 p. 100 des foyers abonnés au câble et au satellite par l'intermédiaire de l'un de ces deux réseaux. Cette vaste distribution, essentielle à notre succès, est due en partie aux règlements du CRTC lors de notre lancement qui requéraient notre distribution au service de base. Mais nous devons aussi mériter notre succès. Chaque semaine, plus de 9 millions de Canadiens regardent nos émissions. À chaque minute de la journée, plus de 30 000 Canadiens regardent l'un ou l'autre de nos deux services.
[Traduction]
Grâce à une technologie que nous avons mis au point et fait breveter, Pelmorex est en mesure d'assurer une programmation et une diffusion sur plus d'un millier de canaux simultanément. De cette façon, nous fournissons le même niveau de service à Alma, à Orangeville, à Lakefield et à Nellie Lake, en Ontario, à Milford Station, en Nouvelle-Écosse, à Bonaventure et à Saint-Hyacinthe, au Québec, tout comme à Canmore et à Sundre, en Alberta.
Il est également utile de comprendre que The Weather Network et MétéoMédia offrent bien plus que des services télévisés. Notre site Web est l'un des plus fréquentés au Canada. Nos applications destinées au téléphone intelligent se trouvent dans des millions de BlackBerry, d'iPhones, d'Androids et de téléphones cellulaires dotés de la technologie Microsoft Windows à l'échelle du pays.
D'après nous, il ne faut pas forcément être un énorme conglomérat à intégration verticale pour réussir dans le secteur des médias au Canada. Nous estimons que la réussite de Pelmorex s'explique par le fait que nous mettons l'accent sur notre domaine d'expertise, c'est-à-dire produire des émissions et des renseignements axés sur la météo et en assurer la diffusion sur tous les canaux de distribution possibles au Canada.
[Français]
Nous produisons davantage de prévisions météo pour davantage de communautés dans le pays qu'Environnement Canada. Nous sommes fiers que notre programmation soit offerte en français et en anglais d'un bout à l'autre du Canada non seulement à la télévision, mais sur le Web et via mobile. Mais tout cela est menacé si l'intégration verticale dans le domaine des médias et de la distribution est autorisée à aller de l'avant sans aucune mesure réglementaire.
Paul.
:
Voici pourquoi: c'est la même poignée de tableaux distributeurs et de diffuseurs par satellite qui contrôlent également l'accès à Internet et aux appareils mobiles. Ces sociétés ont la mainmise sur les canaux de distribution. Par conséquent, vous ne pouvez pas avoir accès aux consommateurs sans d'abord passer par ces dernières. Cette même petite poignée de distributeurs a accru considérablement son contenu et sa programmation. Tout cela, grâce à une intégration verticale. Le principal avantage présenté par l'intégration verticale, c'est de favoriser ses propres produits et services. En s'avantageant elles-mêmes, les entreprises, par inadvertance ou délibérément, mettent les services de programmation indépendants et non affiliés dans une position désavantageuse. Il y a toujours un gagnant et un perdant.
Parmi les moyens employés, citons la fixation de prix artificiellement élevés ou l'établissement de conditions d'accès aux services très coûteuses. Pour eux, il s'agit simplement de transférer de l'argent d'une poche à l'autre, mais pour les fournisseurs de services indépendants, cela se traduit en coûts réels. Citons notamment les coûts plus élevés pour l'insertion d'encarts promotionnels dans les enveloppes de facturation ou pour l'accès aux publicités promotionnelles sur les réseaux spécialisés américains.
L'assemblage et l'établissement du prix demandé aux consommateurs pour les bouquets discrétionnaires est aussi une source de préoccupation. Les nouvelles règles assouplies du CRTC permettent aux distributeurs d'inclure leurs propres services dans le service de base ou d'utiliser toutes leurs ressources de promotion pour vendre des bouquets qui sont entièrement constitués de services leur appartenant, combinés à des canaux américains populaires. Cette méthode s'applique également dans le domaine des nouveaux médias et du sans fil. Un grand distributeur peut préinstaller des applications sur les appareils mobiles alors que nous devons nous battre pour attirer l'attention des consommateurs parmi des centaines de milliers d'autres applications pour téléphones cellulaires.
Il est déjà beaucoup trop tard pour arrêter l'intégration verticale. Le document en pièce jointe indique à quel point il est ahurissant de constater que l'industrie est sur le point de devenir verticalement intégrée. Le fait que le CRTC se fie à un mécanisme de résolution des conflits réactifs ne constitue pas une solution pratique. En effet, comment un petit fournisseur indépendant peut-il constamment se plaindre contre les entreprises avec lesquelles il doit négocier les bouquets et les prix et à qui il doit vendre ses services? Ne serions-nous pas en train de mordre la main qui nous nourrit?
Il est possible d'établir des garanties réglementaires pour atténuer les avantages dont jouissent les grands distributeurs et de permettre d'accroître légèrement l'égalité des chances. En exigeant des sociétés verticalement intégrées qu'elles rendent publics certains renseignements non confidentiels pour qu'elles agissent au grand jour, on donnerait un grand coup de main. Le fait de prévoir des règles d'assemblage et de positionnement de canal préférentiel pour les fournisseurs de services indépendants pourrait également être utile, sans compter un renforcement de la règle du CRTC sur la protection du genre. Néanmoins, ces mesures ne pourront pas être adoptées tant qu'il n'y aura pas de volonté de le faire.
Nous espérons qu'en soulevant ces préoccupations auprès de votre comité, nous aurons contribué à sensibiliser les législateurs au risque que présente l'intégration verticale à l'égard de la diversité des voix et de la propriété dans le domaine de la diffusion.
Nous sommes à votre disposition pour répondre aux questions.
Merci.
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Avant de commencer, j'aimerais vous rappeler qu'on m'a informée du fait que les annexes à mon exposé seront traduites d'ici la semaine prochaine.
Bonjour, je suis Cathy Edwards, porte-parole de la Canadian Association of Community Television Users and Stations ou CACTUS. Notre organisme représente les points de vue des Canadiens ainsi que des chaînes de télévision et des groupes de producteurs communautaires indépendants qui estiment que la participation du Canadien moyen au système de radiodiffusion est essentielle à la démocratie canadienne.
Nous nous étions déjà entretenus avec vous au sujet des nouveaux médias numériques. Nous désirons maintenant vous faire part des résultats de l'examen de la politique en matière de télévision communautaire réalisée par le CRTC et d'une initiative que CACTUS a dirigée dans le contexte de la conversion imminente à la radiotélévision numérique. Ces deux sujets correspondent aux points 2, 4 et 5 de cette étude importante.
Il est stipulé dans la Loi canadienne sur la radiodiffusion que le système est composé de trois éléments: un secteur public, un secteur privé et un secteur communautaire.
Il fut une époque où le Canada se targuait de posséder un secteur de la télévision solide, formé de plus de 300 câblodistributeurs hyperlocaux. Ce réseau constituait un modèle pour le monde entier, mais environ 80 p. 100 des stations d'aboutissement du câble ont été fermées. Le public est maintenant en grande partie tenu à l'écart par les quelques câblodistributeurs qui ont la mainmise sur les canaux des grandes villes et les canaux pseudo-communautaires dans les régions.
Les problèmes ont commencé en 1997, année où une déréglementation partielle des chaînes a eu lieu. Comme on en a beaucoup parlé dans les campagnes de sensibilisation « Local TV Matters » et « Stop the Cable Tax », les câblodistributeurs ont transformé des chaînes communautaires en des concurrents professionnels subventionnés pour les radiodiffuseurs.
Nous désirons en premier lieu vous informer que les chaînes communautaires, qui représentent une catégorie de petits radiodiffuseurs, ont souffert des fusions d'entreprises de distribution de radiodiffusion, soit les EDR. Leur disparition représente une perte pour le système, parce que cette forme de production bénévole génère de six à huit fois plus de dollars de programmation locale pour chaque dollar investi par rapport aux secteurs public et privé.
En deuxième lieu, il n'est pas acceptable que les EDR administrent des chaînes destinées à permettre aux Canadiens de s'exprimer de façon démocratique dans leur propre réseau de radiodiffusion. Les 28 autres pays qui reconnaissent les médias communautaires comme étant le troisième palier s'appuient sur sa nature communautaire et sans but lucratif pour définir ce secteur. Le Canada respecte ce critère pour le secteur de la radio communautaire, or, on ne trouve nulle part ailleurs au monde une situation où les EDR qui contrôlent le marché exercent une mainmise aussi marquée sur la télévision communautaire. Il s'agit d'une mauvaise application de la Loi canadienne sur la radiodiffusion. En effet, aux termes de cette loi, les éléments publics, privés et communautaires se distinguent par la propriété.
Plus la concentration s'accroît en ce qui a trait à la propriété des médias et plus la menace à la diversité des voix et à la démocratie se fait pesante. L'un des deux secteurs qui devrait assurer une certaine sécurité démocratique contre l'hyperconcentration dans le secteur privé ne peut jouer son rôle parce qu'il appartient lui-même à ce secteur privé. Comment est-ce possible?
Le Parlement a reconnu dans la Loi canadienne sur la radiodiffusion de 1991 que le secteur communautaire avait prouvé tant sa valeur que sa viabilité sous la gestion des câblodiffuseurs et qu'ils devaient à cette époque être placés sous un contrôle communautaire. Nous vous demandons, en votre qualité de parlementaires, de corriger cette prise de contrôle à la première occasion.
En troisième lieu, depuis les années 1990, la part de marché de la câblodiffusion est passée d'environ 80 p. 100 à près de 60 p. 100 au profit de la concurrence exercée par la diffusion par satellite. Il était auparavant possible pour un câblodiffuseur d'assumer le rôle d'une assemblée publique télévisuelle pour les collectivités, mais ce n'est plus le cas. Dans notre proposition formulée dans le cadre de l'examen de la politique sur la télévision communautaire et présenté devant le comité cet été, nous offrons un nouveau modèle de média communautaire à plates-formes multiples. Nous proposons que les permis de radiodiffusion soient accordés à des groupes communautaires sans but lucratif, car cette pratique donnerait une priorité à la câblodiffusion. La distribution aux nouvelles plates-formes médiatiques se ferait au fur et à mesure que celles-ci seraient créées, permettant ainsi de joindre tous les Canadiens.
Par conséquent, les radiodiffuseurs communautaires n'arrivent pas à jouer le rôle important qui leur avait été attribué en raison de leur position unique: garantir l'accès démocratique au système de radiodiffusion; générer d'importantes quantités de contenu local sur des plates-formes multiples; acquérir les compétences relatives aux médias numériques dont les Canadiens ont besoin pour être concurrentiels. Ces compétences ont été définies par plusieurs partenaires commerciaux du Canada comme étant un élément clé de leur stratégie numérique.
Par le passé, le milieu de la télévision communautaire canadienne a démystifié les outils de production médiatique de pointe et permis aux Canadiens de tous âges et de tous les groupes sociaux de créer du contenu média. Ce modèle doit être mis à jour pour comprendre le contenu numérique et les nouveaux médias.
Nous devrions préciser que le CRTC a effectivement établi en 2002 une catégorie de permis de radiodiffusion communautaire distincts du câble. Toutefois, ces permis sont limités à la faible puissance, ne comportent pas d'accès garanti au spectre et ne sont pas dotés d'une source de financement viable. Les radiodiffuseurs publics et privés peuvent bénéficier d'une aide financière du gouvernement, par exemple des subventions directes pour la SRC et des crédits d'impôt pour l'industrie privée, ainsi que d'une aide financière de l'industrie, comme le Fonds d'amélioration de la programmation locale, des paiements sur la valeur des signaux ou le Fonds des médias du Canada. On constate que les radiodiffuseurs communautaires sans but lucratif ont été exclus de toutes ces mesures d'aide financière, malgré les recommandations formulées par votre comité, par exemple dans le rapport Lincoln. Des permis ont donc été délivrés seulement pour sept chaînes de ce type à l'échelle du pays.
C'est pour cette raison que dans le cadre de l'examen stratégique du printemps mené par le CRTC, nous avons proposé la création d'un fonds communautaire d'accès aux médias pour permettre l'arrivée d'un plus grand nombre de radiodiffuseurs communautaires à l'aide d'un modèle à plates-formes multiples axé sur les nouveaux médias et en utilisant les fonds déjà recueillis par les EDR auprès des abonnés à des chaînes locales. Jusqu'à présent, cette proposition a été ignorée.
Aujourd'hui, notre première demande au comité consisterait à collaborer avec Patrimoine canadien à la création d'un fonds des médias communautaires et de nous aider à le doter des ressources financières nécessaires. Nous avons calculé qu'il coûterait 113 millions de dollars pour mettre sur pied un centre de production communautaire à plates-formes multiples à la disposition de 90 p. 100 des Canadiens, soit 250 au total. C'est une somme légèrement inférieure à celle que les EDR perçoivent auprès de leurs abonnés pour accéder à du contenu d'expression locale.
Nous sommes découragés du fait que, malgré quelques modifications superficielles à la politique sur la télévision communautaire annoncée le 28 août, le CRTC n'a pris aucune mesure pour régler le problème des fermetures par les EDR des chaînes communautaires, du contrôle par les EDR de ces chaînes ou de l'absence de financement des chaînes communautaires qui échappent au contrôle des EDR.
Étant donné que le secteur communautaire peut engendrer la plus grande diversité de voix à plus faible coût, nous estimons que le CRTC néglige de faire une utilisation optimale de son outil le plus évident.
Enfin, la nouvelle politique sur la télévision communautaire sera mise en application graduellement sur une période quatre ans. Cela signifie qu'au moins quatre autres années s'écouleront avant la tenue d'un autre examen du CRTC. Cet échéancier est tout simplement trop long compte tenu du dynamisme du contexte médiatique actuel qui est au coeur de votre étude. Les Canadiens ont déjà attendu 13 ans. Voilà pourquoi nous avons besoin de votre aide.
Deuxièmement, nous tenions à ce que vous sachiez que CACTUS, avec l'appui d'une vingtaine d'autres associations de l'industrie et organismes civils et universitaires, a écrit une lettre ouverte au premier ministre en septembre. Cette lettre a également été envoyée aux membres de votre comité. Elle avait pour objet de demander une campagne d'information gouvernementale nationale concertée avant la conversion à la radiotélévision numérique prévue pour le 31 août 2011.
En raison d'un nombre sans précédent de fusion d'entreprises de médias, nous estimons qu'il ne faut pas laisser l'industrie mener le bal, car elle a en effet une motivation commerciale claire pour inciter les Canadiens à utiliser des plates-formes satellites lucratives plutôt que le câble, sans qu'un débat public ne soit d'abord tenu sur les solutions de rechange plus rentables qui permettraient de diffuser davantage de contenu local.
Nous craignons que le manque d'information qui prévaut actuellement nuise à la diversité des voix et aux petits radiodiffuseurs pour deux raisons. D'abord, alors que dans d'autres pays, le « dividende numérique » entraînera une augmentation du nombre de chaînes de radiotélévision et de l'espace pour les radiodiffuseurs de petite taille, ici, au Canada, la transition est condamnée à produire l'effet contraire. Chaque radiodiffuseur canadien s'est vu accorder un canal numérique entier de six mégahertz par Industrie Canada, soit la même largeur de bande dont chacun disposait pour la télévision analogique, afin d'offrir une radiodiffusion en haute définition, même si un canal haute définition n'a pas besoin de six mégahertz.
En effet, les radiodiffuseurs sont autorisés à conserver leurs fréquences de spectre inutilisées plutôt que de les partager avec les nouveaux arrivants sur le marché. De plus, comme vous le savez sans doute, on a prévu que les chaînes 52 à 69, auparavant prêtes à la télédiffusion, feront l'objet d'une vente aux enchères du spectre et pourront être utilisées à d'autres fins.
Deuxièmement, puisque les radiodiffuseurs sont tenus de convertir les transmetteurs au mode numérique dans seulement 32 des grands centres démographiques du Canada, il pourrait y avoir une mise hors service massive des transmetteurs analogues à l'extérieur de ces centres. De nombreux Canadiens des régions rurales pourraient ainsi perdre le service de radiotélévision gratuit.
Ce que peu de gens savent, c'est que plus de 100 collectivités éloignées qui n'ont jamais bénéficié d'un poste de retransmission des chaînes SRC, Global et CTV ou autres offrent à leurs résidents un service de retransmission par radio à un coût aussi bas que 40 $ par ménage par année, ce qui comprend dans certains cas une chaîne communautaire également. Cela correspond au dixième du prix de la diffusion par satellite. Ce modèle pourrait être étendu à d'autres collectivités qui risquent de perdre la radiotélévision gratuite si l'on n'arrive pas à distribuer une trousse d'information complète à temps. Par ailleurs, nous sommes préoccupés par le fait que des localités rurales, dont certaines dépendent considérablement des services gratuits de télévision par radiodiffusion en direct, ne puissent se permettre la solution de rechange que représente le service satellite. Sans compter que plus de 1 000 transmetteurs locaux qui permettaient aux collectivités de créer leur propre contenu et qui offraient non seulement de la transmission télévisuelle, mais aussi Internet sans fil et des services de téléphone et de vidéo, seront mis hors service.
Par conséquent, aujourd'hui, nous vous demandons également de l'aide pour la promotion d'une campagne d'information complète par le gouvernement avant la conversion au mode numérique, de sorte que ces préoccupations puissent faire l'objet d'un débat public et que des solutions de rechange puissent être mises en place avant que des collectivités ne perdent l'accès au service et que les rares fréquences du spectre ne soient accordées par vente aux enchères au mieux-disant et perdues à jamais par les secteurs publics et communautaires.
Tant le secteur communautaire que le secteur public devraient se voir accorder au moins une chaîne par localité.
Je vous remercie de nous avoir invités, et nous sommes prêts à répondre à vos questions.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais vous poser une question, monsieur Perreault. En fait, j'en ai plusieurs, mais je ne pourrai pas toutes les poser. Je connais votre grande expertise dans le domaine de la radiodiffusion et je voudrais vous poser une foule de questions, entre autres, sur la réglementation d'Internet. Si on passe à travers des propos de votre mémoire, on pourra y revenir.
En attendant, je veux parler de votre mémoire, particulièrement des paragraphes 12, 13 et 14. Je les trouve immensément intéressants parce que, selon moi, grâce à votre expérience, vous cernez avec beaucoup de réalisme les immenses contraintes reliées à l'intégration verticale. Au paragraphe 12, vous demandez, entre autres, comment « un petit indépendant peut constamment se plaindre contre les entreprises avec lesquelles il doit négocier le prix de son service ». Vous avez parfaitement raison.
Il y a quelque chose que personne n'a signalé ici et que je vois là-dedans: les chaînes spécialisées n'ont pas accès à leur clientèle. Vous ne savez pas qui sont vos clients. C'est l'EDR qui sait qui sont vos clients, mais il ne partage pas cette information. Vous ne pouvez jamais les rejoindre directement. Il me semble qu'en matière de marketing, ça doit être un handicap majeur.
Au paragraphe 14, vous dites qu'il y a de sérieux « risques d'intégration verticale sur la diversité des voix » et vous suggérez que l'on élabore des « cadres législatifs ». Je voudrais que vous expliquiez quel genre de cadre législatif devrait être envisagé pour aider les chaînes spécialisées. Vous dites que vous n'avez pas eu de problème, mais vous êtes dans un créneau tellement spécialisé — la météo — et vous faites des choses qui sont technologiquement inimitables que je ne vois pas comment l'EDR aurait pu vous tasser pour mettre son propre service de météo.