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Merci, madame la présidente. J'ai une déclaration écrite que je vais vous lire. Ce n'est généralement pas mon style. J'ai l'habitude d'improviser mes discours, mais pour mémoire et au nom du Ralliement national des Métis, je vais lire quelques passages concernant des enjeux qui pourraient éclairer le comité et, en même temps, faire comprendre nos priorités.
Merci de nous avoir invités à témoigner au sujet du rôle que le gouvernement fédéral devrait jouer pour combattre la pauvreté au Canada. Le Parlement et le gouvernement canadien ont des responsabilités directes, précises et importantes à assumer pour améliorer la situation socioéconomique des peuples autochtones, y compris les Métis — et j'insiste sur les mots « y compris les Métis ».
Ces responsabilités découlent de diverses sources, et pas seulement du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867. Il y a aussi la responsabilité d'assurer le meilleur fonctionnement possible de l'union économique canadienne. Une économie prospère repose sur la contribution de citoyens métis productifs. Les Canadiens ne peuvent pas se permettre financièrement, que ce soit au niveau national, régional ou local, de laisser les Métis à la traîne. Comme nous payons des impôts aux deux niveaux de gouvernement, nous envisageons pour le gouvernement fédéral un rôle énergique qui ne se limite pas à accorder des crédits d'impôt ou à réduire les impôts pour les travailleurs canadiens métis.
Même si elles ont des effets très positifs pour certains, ces mesures ne vont pas assez loin pour les Métis et pour répondre aux besoins du grand nombre de Métis qui vivent en dessous du seuil de la pauvreté. Un grand nombre de ces Métis sont des jeunes familles ou des familles de plus de trois enfants. Nous venons de célébrer le 20e anniversaire de la résolution que tous les partis de la Chambre des communes ont adoptée à l'unanimité pour mettre fin à la pauvreté infantile d'ici l'an 2000. Pourtant, d'après le recensement de 2006, 32 p. 100 des enfants métis âgés de moins de six ans vivaient dans des familles à faible revenu contre 18 p. 100 des enfants non autochtones. Selon le recensement de 2006, 32 p. 100 des jeunes enfants métis vivaient dans des familles de trois enfants ou plus contre 25 p. 100 des enfants non autochtones. Un plus grand pourcentage d'enfants métis des régions rurales que d'enfants métis des régions urbaines vivaient dans des familles de trois enfants ou plus, soit 39 p. 100 contre 30 p. 100. Néanmoins, le pourcentage d'enfants métis vivant dans des familles à faible revenu était plus élevé dans les régions urbaines que dans les régions rurales soit 36 p. 100 contre 20 p. 100.
En 2005, le revenu médian des Métis du Canada était plus bas que celui de la population non autochtone. En fait, il était inférieur d'environ 5 000 $ au revenu médian de la population non autochtone, qui était de 25 955 $.
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Je vais ralentir, madame la présidente.
Pour l'ensemble du pays, c'est en Alberta et dans les territoires que la différence entre le revenu médian des Métis et celui de la population non autochtone a été la plus importante. En Alberta, le revenu médian des Métis s'élevait à 22 839 $, soit environ 6 600 $ de moins que celui de la population non autochtone, qui était de 29 501 $.
Nous croyons que le gouvernement fédéral doit agir sur deux fronts. Premièrement, il doit continuer d'élargir l'aide au développement des compétences et à l'enseignement postsecondaire pour les Métis. Deuxièmement, il doit élargir son soutien aux familles métisses pour les services de garde d'enfants et l'aide précoce à l'apprentissage, par exemple sous la forme de programmes d'aide préscolaire pour les Métis.
Depuis dix ans, les gouvernements métis mettent à la disposition des Métis des programmes d'acquisition de nouvelles compétences et de soutien en éducation. Au fil des ans, nous avons travaillé avec un grand nombre d'organismes dont le Conseil canadien sur l'apprentissage. Nous sommes d'accord avec eux pour dire que l'éducation et l'apprentissage rendent les citoyens et les collectivités beaucoup plus résilients et mieux équipés pour s'adapter aux fluctuations de l'économie et je vais citer une déclaration qui a été faite à ce sujet:
Il a été démontré que l'enseignement supérieur et l'acquisition continue de nouvelles compétences peuvent offrir une certaine protection en période d'instabilité économique comme celle que nous traversons présentement et devenir un avantage concurrentiel en période de relative stabilité… Au contraire, les Canadiens peu scolarisés ont de moins bonnes perspectives d'emploi. Ils reçoivent moins de formation en milieu de travail, ont un revenu moins élevé et peu ou pas d'économies. Ils courent plus de risques de perdre leur emploi et de demeurer sans emploi pendant de plus longues périodes.
En conséquence, nous croyons que le gouvernement fédéral devrait continuer d'aider les gouvernements métis à répondre aux besoins des Métis sur le plan de l'acquisition des compétences et de l'éducation. Cela devrait comprendre des mesures de soutien plus importantes pour les Métis handicapés et les personnes qui ont des difficultés multiples à obtenir un emploi.
Les gouvernements métis devraient recevoir une aide supplémentaire pour faciliter l'accès des Métis à l'éducation postsecondaire. Pour le moment, le gouvernement fédéral ne couvre pas le coût de leurs études postsecondaires. Les étudiants métis n'ont pas accès aux fonds fédéraux pour l'éducation des Autochtones. Le gouvernement métis peut seulement financer leur dernière année d'université au moyen de son budget de formation.
Il est question ici — pour que l'on comprenne bien — du programme de développement des ressources humaines autochtones. Il y a maintenant un nouveau programme, le PCEA, qui a été approuvé par le gouvernement actuel. Ce programme prévoit que si nous atteignons tous nos objectifs et réalisons toutes nos interventions, les fonds excédentaires peuvent servir à financer la dernière année d'études postsecondaires.
Nous perdons trop d'étudiants qui ne peuvent pas poursuivre leurs études jusqu'au bout à cause d'un manque d'argent. Nous recommandons au Parlement de compléter les bourses et les dotations actuelles et d'attribuer des fonds afin que chaque Métis du pays qui a la capacité de poursuivre des études postsecondaires obtienne le soutien dont il a besoin.
Notre deuxième recommandation importante au sujet du rôle que doit jouer le gouvernement fédéral pour combattre la pauvreté porte sur la nécessité d'élargir son soutien aux services de garde d'enfants et à l'aide précoce à l'apprentissage. Tout le monde reconnaît maintenant que les programmes d'aide précoce à l'apprentissage, comme le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones, améliorent énormément les résultats ultérieurs sur le plan de l'éducation.
Autrement dit, cela donne aux enfants de meilleures chances de réaliser leur plein potentiel. Le gouvernement fédéral l'a reconnu en 1990 en établissant le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones à l'extérieur de la réserve. Même si ce programme a été très bien accueilli et nous devons féliciter les centres d'amitié, il n'a pas su répondre aux besoins de la majorité des enfants vivant en territoire métis.
Les architectes de ce programme n'ont pas chargé les gouvernements métis de sa mise en œuvre, la confiant principalement aux centres d'amitiés, qui ne desservent qu'une minorité de la population métisse vu qu'ils sont surtout situés dans les centres urbains. De plus, les ressources sont trop limitées pour répondre aux besoins de l'ensemble de la population métisse. Moins de 50 p. 100 des enfants métis âgés de moins de six ans ont bénéficié d'un apprentissage préscolaire.
De plus, les Métis n'ont pas accès aux services de garde d'enfants dans le cadre des programmes actuels de développement des ressources humaines autochtones. Il s'agit, encore une fois, du nouveau programme PCEA. Ce partenariat prévoit le financement de services de garde d'enfants à l'intention des Inuits et des premières nations. Nous n'obtenons pas un sou. Nous devons nous débrouiller seuls.
Les Métis, qui ont le même genre de cellules familiales que les premières nations, c'est-à-dire des familles jeunes et nombreuses, ne reçoivent pas d'aide pour les services de garde d'enfants, ce qui limite notre capacité de répondre aux besoins de ces jeunes familles.
Dans ces deux domaines, les gouvernements provinciaux ne répondent pas à nos besoins. En conséquence, nous recommandons que le gouvernement fédéral aide les gouvernements métis à répondre aux besoins des Métis sur le plan des services de garde d'enfants et de l'aide précoce à l'apprentissage.
Le Ralliement national des Métis reconnaît depuis longtemps l'importance des programmes de perfectionnement de la main-d'œuvre autochtone qui respectent les structures de gouvernance de la nation métisse. Nous sommes fiers de nos succès et nous avons récemment fait faire un examen indépendant de nos résultats et des répercussions économiques du travail que nous faisons.
Nous déposons ici le rapport du Centre for the Study of Living Standards qui ne vous a pas encore été remis, je crois. Je vous invite à lire cette étude. Je sais que c'est assez long, mais pour décrire seulement une partie de ce rapport… il cite un petit investissement que je vais prendre comme exemple — je m'éloigne un peu de mon texte, car j'ai presque terminé.
Si les Métis atteignaient aujourd'hui le niveau d'éducation qui était celui des Canadiens non autochtones en 2001, d'ici 2026, nous apporterions à l'économie 81,5 milliards de dollars. Il suffirait pour cela d'investir dans nos enfants en les envoyant à l'école et en leur faisant faire des études postsecondaires. Cela se traduirait par une augmentation moyenne des recettes fiscales de 3 milliards de dollars, ce qui hausserait le PIB de 7,5 milliards de dollars; et d'ici 2026, la croissance du PIB canadien atteindrait 81 milliards de dollars.
J'espère donc que cette étude vous éclairera au sujet de certains des résultats positifs que le gouvernement obtiendrait en adoptant une stratégie pour les Métis et en commençant à investir pour répondre à nos besoins.
Je désire également déposer Métis Works dont j'ai apporté des exemplaires pour chacun de vous. C'est un des documents que nous publions pour le Canada dans le cadre du programme EDRHA. Quand vous lirez ce document — vous pouvez le feuilleter — vous remarquerez les différents domaines dans lesquels nous donnons une formation et nous créons des emplois, que ce soit dans la police, le secteur de l'équipement lourd et de la construction ou même la profession juridique. Notre investissement dans les gens et le succès avec lequel nous avons obtenu et conservé des emplois à plein temps ont un profond impact, en ce sens que cet argent est réinjecté dans l'économie canadienne.
En lisant ce document, vous verrez quels ont été nos investissements. Nous avons commencé à investir dans le cadre de ce programme, en partenariat avec les universités, surtout au Manitoba, par exemple. Comme je l'ai déjà dit, ce programme prévoit que si nous atteignons tous nos objectifs et réalisons toutes nos interventions, les fonds excédentaires peuvent être consacrés à l'enseignement postsecondaire. Nous avons commencé cet investissement il y a huit ans au Manitoba. Aujourd'hui, nos dotations s'élèvent à 9 millions de dollars. L'université a fourni la contrepartie de chaque dollar que j'ai pu lever. Nous avons maintenant reversé 1,5 million de dollars à nos enfants qui vont à l'université. Par conséquent, cette petite intervention, ce petit investissement a suffi à provoquer un changement remarquable. Ce n'est que 9 millions de dollars. Si c'était vraiment bien planifié et mis au point, vous pouvez imaginer quels en seraient les effets positifs.
Je vais m'arrêter là. Je sais que mes dix minutes sont terminées.
J'ai l'habitude de parler sans texte. Je déteste lire des discours. Mais je suis tout à fait prêt à répondre à vos questions et j'essaierai de vous donner la meilleure idée possible de la situation du peuple métis au Canada.
Ce qui améliorerait beaucoup la situation, c'est certainement un investissement dans des services de garde d'enfants pour les Métis. Ce serait ma première et principale recommandation pour consolider la famille. Il faut que ce soit métis. J'ai précisé « pour les Métis ». N'employez pas le mot « autochtone », car nous n'en bénéficierons sans doute jamais, mais si vous utilisez les mots « services de garde d'enfants pour les Métis » directement, je pense que cela changera beaucoup les choses. Cela améliorera la situation des femmes métisses du pays, tout en apportant une certaine stabilité dans les familles.
Ma deuxième recommandation est certainement de créer un fonds d'éducation. J'ai donné l'exemple du fonds de dotation que nous avons réussi à créer grâce au financement de contrepartie des universités. Nous avons réinvesti 1,5 million de revenu dans l'éducation postsecondaire de nos jeunes.
Nous savons que selon les données de Statistique Canada, les Métis sont le peuple autochtone qui connaît la plus forte croissance démographique dans l'ouest du pays. Cette croissance est considérable et repose sur l'autodéclaration. Mais surtout, si le Canada investissait par exemple 300 millions de dollars dans un fonds de dotation, nos étudiants métis pourraient y puiser par l'entremise de nos gouvernements. Le gouvernement pourrait faire là une contribution ponctuelle. C'est une aide sur laquelle les enfants métis et leurs familles sauraient qu'ils peuvent toujours compter pour poursuivre des études.
Nous constatons, par exemple, que nos enfants vont à l'école et qu'ils sont plus nombreux qu'avant à obtenir leur diplôme d'études secondaires, mais qu'ils s'arrêtent là. Ce n'est pas ce dont le pays a besoin. Ce qui provoque ce phénomène et que nous avons pu établir — même si les statistiques ne nous permettent pas de le démontrer — d'après nos discussions avec nos communautés et les familles, c'est que nos enfants ne passent pas à la phase suivante parce que nos économies traditionnelles se sont effondrées. À cause de cela, les parents n'ont pas d'argent pour aider leurs enfants à aller à l'université. C'est un autre signe que cela cause beaucoup de tort.
Par conséquent, l'investissement dans l'éducation serait un changement important qui nous aiderait parce que nous pourrions concurrencer n'importe qui sur un pied d'égalité. Si nous sommes à égalité, nous concurrencerons n'importe qui; donnez-nous une chance. Nous n'avons simplement pas les outils nécessaires pour permettre à nos enfants de terminer leurs études.
D'autres exemples de ce que nous faisons au Manitoba, et de changements possibles, se situent dans le domaine de la passation des marchés publics. Vous avez une stratégie de passation de marchés publics au Canada, mais vous ne l'utilisez pas vraiment de façon à lancer et développer les moteurs économiques. Au Manitoba, nous insistons beaucoup pour obtenir des marchés réservés, non pas des marchés, pour lesquels le processus doit être automatique, mais des marchés réservés qui sont un élément différent. Je dis cela parce que s'il y avait un marché réservé pour les premières nations, les Métis et les Inuits nous permettant de nous concurrencer les uns les autres… que ce soit dans le secteur de la construction ou ailleurs, nous arrivons à le faire extrêmement bien. Le problème est que les gouvernements ne veulent pas tous suivre cette voie même si c'est un grand succès.
Je vous inciterais donc à promouvoir cette façon novatrice de voir les choses grâce à laquelle les gouvernements créent des possibilités en développant des marchés réservés.
Nous avons notre propre stratégie de passation de marchés…
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Ce sont d'excellentes initiatives, mais elles sont rares.
Nous constatons que certaines de nos entreprises qui commencent à connaître le succès se font absorber par des entreprises plus grandes. Voilà pourquoi elles disparaîtront comme les dinosaures s'il n'y a pas de marchés réservés.
Par exemple, une petite entreprise métisse du Manitoba a débuté avec un seul camion, mais son propriétaire peut maintenant obtenir un cautionnement de 30 ou 35 millions de dollars pour des projets hydroélectriques ou de construction. Il se fait damer le pion par des grandes entreprises comme Valard qui offrent des prix 5 à 7 millions de dollars plus bas que les siens et cela, de toute évidence, dans le but de se débarrasser de lui. À propos d'un projet hydroélectrique, il est venu nous dire que si cela lui arrivait une ou deux fois de plus, il devrait fermer ses portes. Ces petites entreprises vont toutes disparaître et quand Valard sera le seul joueur en ville, les prix augmenteront de nouveau. C'est comme les produits d'appels dans le commerce.
Nous croyons que les marchés réservés assurent une protection et nous incitons les compagnies d'électricité et les autres institutions de ce genre à envisager cette solution.
Au Manitoba, mon propre gouvernement a adopté sa propre stratégie d'approvisionnement. J'ai exercé des pressions dans ce sens il y a trois ans. Conformément à cette stratégie, les entreprises métisses ou des premières nations doivent bénéficier de 70 p. 100 de mon pouvoir d'achat. J'ai planté les semences. Je peux maintenant les voir germer un peu partout.
Nous dépensons des millions en fournitures et pourtant, nous allons chez Grand & Toy ou Bureau en gros, même s'ils ne rapportent rien à ma communauté. Notre gouvernement métis a donc adopté cette stratégie d'approvisionnement. Nous sommes en train de lancer notre propre entreprise de papeterie, notre « Bureau en gros » métis, si vous voulez, et nous lançons nos propres entreprises, qui commencent à prendre de l'expansion. Nous cherchons à intégrer ce genre de stratégie dans nos propres moteurs économiques et même si nous n'en avons pas beaucoup, nous constatons des changements spectaculaires.
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Je fais de la politique depuis longtemps. Il se pourrait que, dans certains cas, il y ait déjà suffisamment d'argent pour apporter d'importants changements. Le problème est dû au fait que cet argent n'est pas dirigé dans la bonne direction. Il est dispersé à gauche et à droite sans que nous sachions si cela a donné des résultats.
Par exemple, prenez le programme s'adressant aux Métis dont j'ai parlé, le programme EDRHA. C'est un des meilleurs programmes qu'il y ait jamais eu au Canada pour les Métis. Il nous fournit des ressources pour financer et choisir le type de formation que nous voulons offrir, ainsi que son emplacement, et faire en sorte que nos étudiants soient dirigés dans la bonne voie.
La MMF, par exemple, a été en tête des principaux soumissionnaires. Il y a 80 EDRHA au Canada. Les premières nations, les Inuits et les Métis ont des EDRHA. Les Métis en ont cinq dans cinq provinces. Les bandes sont organisées d'une façon totalement différente de la nôtre.
Dans l'ensemble, la MMF, par exemple, s'est classée dans les 10 premiers au cours des 10 dernières années. Nous sommes très fiers de notre succès. Nous avons également employé 35 000 Métis au cours des 10 dernières années. Cela nous apporte énormément en ce sens que nous avons maintenant les moyens d'établir un partenariat avec le secteur privé.
Nous constatons que nos succès en territoire métis sont surtout dans le secteur de la petite et moyenne entreprise. Oui, nous avons des débouchés dans les grandes entreprises, que ce soit Ledcor ou d'autres, mais j'appellerais cela un simple accident de parcours. C'est comme notre dollar canadien qui monte et qui descend. Nous constatons toutefois que notre succès dépend, en fait, des choix que nous pouvons faire.
Le programme EDRHA sur lequel je vais insister ici est actuellement renégocié, dans un certain sens. Il s'appelle maintenant le PCEA. Ce qui m'inquiète le plus c'est que la bureaucratie essaie de le microgérer. Selon moi, si tout marche bien et si nos résultats sont positifs, pourquoi changer les choses? Nous essayons très fort de convaincre le ministre — avec qui nous venons d'avoir un bon entretien — de s'orienter dans cette direction.
Vous pouvez mesurer les résultats de cet encadrement métis. Sachez que l'argent des contribuables canadiens, y compris les contribuables métis, que nous obtenons sert les intérêts non seulement des Métis, mais de tout le pays, car il y a des objectifs et des façons de mesurer notre succès.
C'est certainement la voie à suivre et nous devrions utiliser ce modèle. Cela changerait largement la façon dont nous procédons. Si nous prenons la totalité du financement autochtone que nous avons au Canada et si nous le divisons entre les Métis, les premières nations et les Inuits en fixant des objectifs et en mesurant les résultats, je pense que vous constaterez un énorme changement. Il se pourrait qu'il ne soit même pas nécessaire d'investir des fonds supplémentaires.
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Le problème présente deux aspects. Premièrement, les maisons qu'AINC construit ne sont pas pour nous, mais pour les premières nations. Comme je l'ai dit, aucune maison n'a été construite dans nos communautés depuis plus d'une décennie.
Nous n'avons aucun foyer pour personnes âgées. Quelques-uns ont été construits à une certaine époque, à la fin des années 80 ou au début des années 90, mais c'est tout. Dans l'ensemble, nos aînés vivent avec leurs familles et tout le monde est entassé dans la maison.
Le problème auquel le gouvernement fédéral est confronté pour le moment — je le dis ouvertement — est que lorsque vous transférez des fonds, par exemple dans le cadre du TCPS, le Transfert canadien en matière de programmes sociaux, vous les donnez à la province, mais sans fixer d'objectifs. Vous n'exigez aucune reddition de comptes de la province. Vous ne fixez aucun objectif mesurable quant à la façon dont la province dépense l'argent que vous lui donnez pour vous assurer que mon peuple en bénéficie. Il n'y a aucune exigence. Par conséquent, lorsque la province prend cet argent et l'utilise dans son budget, cela a des répercussions négatives pour nous.
J'ai notamment fait valoir que si je rends des comptes, le gouvernement provincial devrait en rendre aussi. Selon moi, si le gouvernement fédéral veut transférer de l'argent à la province pour le logement, il devrait fixer clairement les objectifs à atteindre pour les Métis. C'est l'argent de mes impôts que vous utilisez également.
Donc, comme je l'ai dit, j'aimerais beaucoup que la reddition de comptes se fasse des deux côtés. À notre avis, cela changerait beaucoup les choses. Pour ce qui est du logement social, la province va-t-elle en construire dans nos communautés? J'espère que oui. Le premier ministre dit qu'on en construira dans certaines de mes communautés, mais je ne sais pas combien d'entre elles auront cette chance.
Je voudrais remercier le comité de nous avoir invités à venir parler de la question très importante de la pauvreté au Canada et de ce que l'intervention du gouvernement fédéral pourrait et même, devrait être. Comme cela fait partie du travail que nous accomplissons chaque jour, c'est un grand honneur pour nous de venir partager certains de nos points de vue à ce sujet.
Je voudrais d'abord reconnaître que nous sommes réunis ici aujourd'hui sur le territoire des Algonquins que je remercie de nous autoriser à nous réunir sur leur territoire. Je suis un Ojibway de la première nation Curve Lake, dans le centre de l'Ontario, mais je suis aussi le directeur général de l'Association nationale des centres d'amitié. Je suis accompagné de notre directeur de la politique, Conrad Saulis, qui va m'aider à répondre à toutes vos questions difficiles quand elles seront posées.
L'Association nationale des centres d'amitié est l'organisme national qui défend les intérêts de 120 centres d'amitié locaux répartis dans l'ensemble du pays. Nous sommes le bureau national et nous offrons des programmes à ces centres locaux par l'entremise de notre bureau en plus de soutenir le travail qu'ils accomplissent sur le terrain.
Je crois avoir dit aujourd'hui qu'il y a 120 centres d'amitié répartis aux quatre coins du pays et que, l'année dernière, ils ont offert directement sur le terrain, aux Autochtones des villes, des programmes et services d'une valeur de 114 millions de dollars. Les centres d'amitié participent depuis longtemps aux efforts visant à diminuer la pauvreté, et certains diront même que notre objectif initial était la diminution de la pauvreté.
Notre bureau provincial de l'Ontario a réalisé, en 2000, une étude de la pauvreté chez les enfants autochtones des villes de la province et a fait des constatations qui n'étonneront sans doute pas le comité. Par exemple, la pauvreté des enfants et des familles du Canada est due à la fragmentation culturelle et aux effets multigénérationnels de facteurs comme les pensionnats autochtones, la tutelle des services d'aide à l'enfance et la marginalisation socioéconomique. Selon des études récentes, les Autochtones risquent quatre fois plus de souffrir de la faim que tout autre groupe au Canada.
S'il est une chose que vous retiendrez de mon exposé d'aujourd'hui, je l'espère, c'est que la population autochtone du Canada vit en milieu urbain.
Selon les données du recensement de 2006, 54 p. 100 de tous les Autochtones vivaient dans des villes. Cela représente un énorme défi sur le plan politique et quand on demande ce que le gouvernement fédéral devrait faire pour diminuer la pauvreté — dans ce cas, la pauvreté chez les Autochtones — je pense qu'il faut examiner ce qui se passe dans les villes où vivent ces personnes.
Le nombre d'Autochtones vivant dans les régions urbaines a augmenté depuis 1996 passant de 47 p. 100 à 54 p. 100 dix ans plus tard, en 2006. L'autre facteur important est que la moitié de notre population est âgée de moins de 25 ans. Cela veut dire que nous représentons une population très jeune et urbaine qui s'efforce de subsister dans les différentes villes du pays.
Nous avons d'énormes défis à relever. Notre population n'obtient pas son diplôme d'études secondaires dans la même proportion que le reste de la société canadienne. Je me demande souvent à quoi ressemblerait le concert de protestations si la moitié des étudiants de Rosedale, à Toronto ou du Glebe, ici à Ottawa ou de Westmount à Montréal n'obtenaient pas leur diplôme d'études secondaires. Quelle étude mènerait-on? Quelle commission royale d'enquête serait mise en place…? Quelles provinces protesteraient? Quels partis politiques se feraient les champions de ces enjeux?
C'est exactement le problème qui existe dans la communauté autochtone où la moitié de nos jeunes n'obtiennent pas leur diplôme d'études secondaires et je doit dire que c'est une honte nationale. La situation est toutefois assez ironique. Même si la population autochtone n'obtient pas son diplôme d'études secondaires, elle participe aux activités du marché du travail à un taux plus important que l'ensemble de la société canadienne. Dans les collectivités urbaines de tout le pays, 68 p. 100 des Autochtones font partie de la population active. Pour les non-Autochtones, le taux est de 67 p. 100. Malgré les obstacles sur le plan de l'éducation et de la réintégration culturelle dans la société, les Autochtones essaient de jouer un rôle dans l'économie; ils essaient de travailler. Ils sont toutefois de plus en plus désenchantés, car ils n'arrivent pas à réussir.
Notre taux de chômage est deux fois plus élevé que celui de nos frères et soeurs non autochtones qui vivent dans les mêmes quartiers. Nos revenus sont nettement inférieurs. En fait, 29 p. 100 des familles autochtones des villes de tout le pays vivent dans la pauvreté, c'est-à-dire en dessous du seuil de bas revenu, contre 13 p. 100 pour leurs voisins. C'est une énorme disparité. Pour ce qui est des célibataires, 53 p. 100 des Autochtones qui sont célibataires dans les villes du pays vivent dans la pauvreté, en dessous du seuil de bas revenu, contre 38 p. 100 pour la population non autochtone. Si vous prenez les groupes plus marginalisés, vous pouvez voir une stratification plus marquée sur le plan de la pauvreté.
Le Conseil national du bien-être social a déclaré en 2007 qu'il y avait au Canada 637 000 enfants âgés de moins de 18 ans qui vivaient dans la pauvreté et c'était alors le chiffre le plus faible jamais atteint. Si nous analysons les données, 28 p. 100 des enfants autochtones vivant dans les régions urbaines grandissent dans la pauvreté contre 13 p. 100 pour le reste de la société.
Bien souvent, les gens disent qu'il n'y a aucun débouché dans les communautés des premières nations ou, comme vous l'a dit le témoin précédent, dans les hameaux métis et que la ville offre donc une meilleure qualité de vie et de meilleures possibilités. En fait, ce n'est pas ce que constatent les Autochtones. Ils y trouvent les mêmes obstacles et les mêmes difficultés alors que la prospérité règne autour d'eux.
En partie à cause du manque d'information et de l'absence de véritables données sur les Autochtones vivant en milieu urbain, nous avons fait faire notre propre étude sur les résultats du recensement de 2006 et de 2001. Nous avons examiné chaque collectivité du pays où il y avait plus de 400 Autochtones et qui n'était pas une réserve. Nous voulions réunir toute une série de statistiques sociodémographiques pour établir ce qui se passait dans les villes de tout le pays. Si vous demandez à Statistique Canada les derniers rapports sur les peuples autochtones, vous les obtiendrez pour 13 RMR, au maximum, si vous avez de la chance. Vous n'en obtiendrez sans doute que six. Vous ne saurez pas ce qui se passe dans le Nord. Vous ne saurez pas ce qui se passe dans les localités rurales de l'arrière-pays. Nous voulions savoir ce qui se passait dans l'ensemble du Canada.
En fait, si cela vous intéresse, il y, dans l'ensemble du pays, 304 collectivités qui comptent plus de 400 Autochtones et qui ne sont pas des réserves.
Nous avons une foule de données. Une des choses vraiment intéressantes que nous avons faites a été d'utiliser l'indice du bien-être des collectivités établi par Affaires indiennes et du Nord Canada, pour comprendre ce qui se passait dans les réserves et quel était leur niveau de développement. Cela remplace l'indicateur du développement humain. Malheureusement, au Canada, nos données n'incluent pas l'espérance de vie des peuples autochtones, si bien que nous ne pouvons pas vraiment appliquer aux peuples autochtones du Canada la mesure de l'indicateur de développement humain qui est utilisée au niveau international.
Statistique Canada a appliqué cette nouvelle mesure, l'indice de bien-être des collectivités, aux villes de tout le pays. Plus de la moitié de tous les Autochtones de ces villes vivaient avec un niveau de bien-être des collectivités très faible ou faible. Aucune collectivité non autochtone — aucune — n'avait un faible ou très faible niveau de bien-être. De plus, aucune collectivité autochtone des villes du pays n'avait un niveau de bien-être très élevé.
La majorité des collectivités non autochtones, soit 82,2 p. 100, se trouvaient dans la catégorie supérieure, ce qui veut dire qu'elles avaient un très haut niveau de bien-être. Prenez par exemple Toronto, Sault Ste. Marie et d'autres régions qui ont un excellent niveau de développement. Les Autochtones qui vivent dans ces mêmes collectivités, à côté de toute cette prospérité, ont de faibles niveaux de bien-être des collectivités.
Nous sommes confrontés là à un véritable défi en tant que fournisseur de services de la population autochtone du pays. Comment desservir ces personnes et comment appliquer quotidiennement des stratégies de réduction de la pauvreté?
Le Conseil national du bien-être social a exposé très clairement, dans son récent mémoire prébudgétaire, ce qu'il faut faire pour diminuer la pauvreté au Canada. Il a déclaré que nous devons mettre l'accent sur cinq éléments: les services de garde d'enfants, le logement abordable, l'éducation, les soins de santé et l'emploi. Nous reviendrons peut-être sur certaines de ces interventions si nous en avons l'occasion.
L'accès des Autochtones à ces programmes et services diminue de façon générale. Les services de garde d'enfants en sont un bon exemple. Nous avons certains programmes dans les différentes régions du pays. Toutefois, il y a très peu d'initiatives qui aideront une femme autochtone célibataire du centre-ville de Winnipeg à confier son enfant à une garderie sûre, efficace et abordable afin qu'elle puisse terminer ses études, aller travailler et avoir une meilleure qualité de vie. Cela n'existe pas aujourd'hui et c'est un problème auquel nous sommes confrontés quotidiennement.
En ce qui concerne les programmes de logement abordable, 300 millions de dollars ont été consacrés aux programmes de logement hors réserve il n'y a pas si longtemps. Cet argent a été versé aux provinces. La mise en œuvre de ce programme a ralenti énormément et elle n'a pas d'impact dans les collectivités où le besoin existe.
L'éducation est certainement une responsabilité qui incombe aux provinces, mais le gouvernement fédéral peut guider ces dernières. Il peut le faire au niveau des institutions postsecondaires ou en pilotant des initiatives très intéressantes pour aider les Autochtones à terminer leurs études secondaires, car c'est la principale chose que nous puissions faire pour remédier à la pauvreté chez les personnes qui vivent dans ces collectivités.
Les interventions dans des domaines comme le diabète, le VIH/sida et les anomalies congénitales reliées à l'alcool ainsi que les syndromes connexes sont, pour les Autochtones, des interventions en milieu urbain essentielles qui auront des effets à long terme.
Finalement, l'emploi. Le programme pilote d'emploi des Autochtones du gouvernement fédéral, la Stratégie de développement des ressources humaines autochtones, est très peu implanté dans les régions urbaines. L'objectif de la politique et la majorité des signataires d'ententes cherchent à desservir la communauté des premières nations, métisse ou inuite plutôt que les gens là où ils vivent dans les villes du pays.
Je sais que je suis à court de temps.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie aussi nos invités d'être venus aujourd'hui témoigner au nom de l'Association nationale des centres d'amitié.
Dans le cadre de ces études sur la pauvreté, on constate que plusieurs facteurs influent beaucoup sur les conditions qui créent la pauvreté. Parmi ces facteurs, il y a bien sûr l'emploi — vous avez abordé la question de l'accessibilité à l'emploi et le maintien en poste — et le logement abordable.
En 2007, un reporter officiel de l'Organisation des Nations Unies est venu au Canada pour étudier la question du logement abordable chez les peuples autochtones. Il a constaté, entre autres, le surpeuplement et l'insuffisance des logements et des habitats, et a soulevé la question des services sanitaires et de l'eau. Il a recommandé au gouvernement ceci: « Intensifier les mesures destinées à résorber l'écart, révélé par l'indicateur “développement humain“, entre les Canadiens d'origine autochtone et les autres. »
En matière de logement, il ajoute ceci: « Faire du logement convenable dans beaucoup de collectivités autochtones un objectif prioritaire, et prévoir des crédits, investissements et autres ressources suffisants pour régler ce problème urgent dans le meilleur délai. »
Depuis ces recommandations, avez-vous constaté des changements? Si oui, lesquels?
Présentement, se fait-il des choses significatives et susceptibles d'améliorer les conditions de logement?
Peter, je vous transmets les salutations de Megan et Jean, qui se réjouissent de vous voir témoigner devant le comité aujourd'hui parce qu'elles ont beaucoup de respect, bien entendu, pour le travail que vous accomplissez. C'est certainement mon cas également.
Nous avons un centre d'amitié indien dans notre collectivité, comme vous le savez, à Sault Ste. Marie, et ce centre fait un merveilleux travail avec très peu de moyens en fournissant de son mieux toutes sortes de services allant de la garde d'enfants aux services de santé en passant par le counseling des jeunes toxicomanes, etc. Le centre s'attaque certainement aussi au problème de la pauvreté à Sault Ste. Marie, notamment sur le plan du logement, de la sécurité du revenu et de la sécurité alimentaire.
Vous avez beaucoup parlé de certaines des difficultés auxquelles les Autochtones des villes sont confrontés. Vous savez, je pense, que nous essayons de préparer un rapport pour le gouvernement indiquant très clairement quel rôle le gouvernement fédéral devrait jouer. C'est pour vous l'occasion de nous faire part de vos idées.
Y a-t-il une, deux ou trois priorités particulières auxquelles le gouvernement devrait s'attaquer immédiatement, selon vous, pour diminuer la pauvreté dans votre communauté?
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Le principal obstacle qui nous a empêchés de mettre en place des programmes vraiment efficaces et complets a été le conflit de compétence qui existe au sein de notre fédération entre le rôle des provinces et celui du gouvernement fédéral à l'égard des peuples autochtones.
Comme vous le savez, le paragraphe 91.24 a placé les Indiens et les terres réservées pour les Indiens sous l'autorité du gouvernement du Canada et les programmes sociaux sont de la compétence des provinces. En conséquence, quand un Autochtone déménage en ville, cela suscite un débat. Qui est responsable de cette intervention? Est-ce le gouvernement fédéral? Par crainte de montrer que la responsabilité lui incombe, le gouvernement fédéral ne s'engage pas vraiment dans les programmes qu'il devrait fournir.
Notre programme fait exception à cette règle. Nous existons depuis 1972. Il y en a d'autres.
Si la moitié de tous les Autochtones vivent dans les villes et si nous consacrons le dixième de l'enveloppe totale à la situation des Autochtones vivant en milieu urbain, vous en connaissez la conséquence. L'aide ne rejoint pas les gens là où ils vivent.
Les provinces ne comblent pas ces lacunes. Elles hésitent encore à reconnaître leurs responsabilités à l'égard de ces populations. Pour cette raison, nous continuons à répondre aux besoins de façon très marginale. Nous n'avons pas de stratégie énergique ou efficace pour rejoindre la population autochtone dans l'ensemble du pays.
Je sais qu'il est important pour le comité de parler de réduire la pauvreté. Si vous pensez aux répercussions sur le terrain des efforts déployés par les fournisseurs de services pour coordonner les interventions et avoir accès aux ressources, cela reste toujours difficile. Si le gouvernement est bien disposé en Ontario, nous aurons toutes sortes de programmes dans la province; si le gouvernement n'est pas bien disposé cette année en Saskatchewan, il ne se passera pas grand-chose parce que le gouvernement provincial ne s'engagera pas. Il devient vraiment difficile, dans l'ensemble de la fédération, d'avoir des stratégies concrètes et systémiques visant à réduire la pauvreté.
Je pense que ce serait la priorité. Si je pouvais dresser une liste de souhaits et si j'étais à votre place, ce serait là une énorme contribution. De façon plus concrète et sur le terrain, je pense qu'il faut veiller à ce que les programmes existants rejoignent les gens là où ils vivent. La Stratégie de développement des ressources humaines autochtones, qui s'appelle maintenant le PCEA, ne rejoindra pas la majorité des Autochtones vivant dans les régions urbaines parce que vous continuez à distribuer les fonds uniquement en fonction du modèle d'établissement des premières nations et des Métis. Je ne dis pas qu'il ne faut pas établir des partenariats avec eux. Il faut certainement le faire, mais vous devez veiller à ce que les interventions rejoignent les gens là où ils vivent dans les villes du pays.
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Je trouve intéressant qu'on nous demande parfois combien de temps il faudra pour changer une situation. Il y a plusieurs facteurs à considérer.
Premièrement, un certain nombre d'Indiens inscrits ont terminé leurs études secondaires et ont été acceptés dans les universités, mais ne peuvent pas y entrer à cause du plafonnement du financement de l'enseignement postsecondaire. Une des choses que vous pourriez faire très rapidement pour augmenter le nombre d'Indiens inscrits des premières nations qui terminent leurs études secondaires est de financer ceux qui sont prêts à aller à l'université. Ils sont prêts à le faire, mais il y a des plafonds artificiels. Comme vous le savez, la croissance du financement est limitée à 2 p. 100 et il y a plus d'étudiants prêts à aller à l'université qu'il n'y a d'argent.
De plus, si vous devez cibler un groupe de la communauté autochtone, ce devrait être les femmes autochtones célibataires, car ainsi, vous aiderez leurs enfants et toute la famille à s'en sortir. Toutefois, les hommes autochtones sont ceux qui ont le taux de diplomation le plus bas dans les régions urbaines. Les statistiques indiquent que ce sont ceux qui ont le plus à gagner en terminant leurs études. S'ils obtiennent leur diplôme, ils augmentent leur revenu beaucoup plus que les femmes autochtones qui sont exactement dans la même situation. Je pense donc que les données reflètent une certaine disparité.
Il faudra au moins cinq ans. Si un élève est actuellement en 9e année et si vous voulez qu'il termine ses études secondaires, vous devez mettre en place l'aide dont il a besoin. Lorsqu'ils réussissent à terminer leur 10e année, dans un grand nombre d'écoles des premières nations, selon la proximité des villes, les enfants doivent déménager. En Ontario, un grand nombre d'enfants du Nord déménagent à North Bay et sont placés dans des foyers d'accueil. Ils vont à l'école et finissent par décrocher de la 10e année à cause de problèmes d'intégration et de toutes les difficultés qu'ils ont à quitter la réserve pour venir en ville et ce genre de problèmes.
Vous devez mettre des programmes en place pour aider ces enfants à terminer leur scolarité, à obtenir leur diplôme d'études secondaires et aller plus loin. Il faut compter au minimum cinq ans. Il faut un certain délai pour mettre ces programmes en place et les évaluer et les consolider dans l'ensemble du pays. Par conséquent, il faut envisager une période de cinq à dix ans pour remédier sérieusement aux lacunes actuelles qui existent actuellement sur le plan de l'éducation.
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Aujourd'hui, j'ai eu le privilège de rencontrer le ministre des Affaires indiennes à une réception marquant le 50
e anniversaire des changements apportés à la Loi électorale pour permettre aux Autochtones de voter dans notre pays. Quand on y pense, mon père n'avait pas le droit de vote au Canada lorsqu'il est né.
Nous ne sommes pas si loin de l'époque où le gouvernement canadien parlait, dans ces bâtiments, de la façon de tuer l'Indien dans nos enfants. Nous ne sommes pas si loin des tentatives faites par les pensionnats… Nous ne sommes pas si loin de l'époque où nous ne pouvions pas aller à l'université ou embaucher un avocat pour défendre nos revendications. En toute honnêteté, cela fait environ 50 ans que nous sommes libérés des tentatives directes d'assimilation.
Je ne suis pas un activiste, mais je pense que c'est la conclusion qu'il faut tirer si l'on passe rapidement en revue l'histoire du Canada. C'est seulement après les modifications apportées à la Loi sur les Indiens en 1951 que ces tentatives directes d'assimilation ont cessé, un peu plus tard, dans les années 50. Il a alors eu une forme d'assimilation passive. Ce n'était pas vraiment… Vous n'avez pas essayé de nous aider à réussir, mais vous n'avez pas fait grand-chose non plus pour mettre un terme à ce qui avait eu lieu par le passé. Bien entendu, le dernier pensionnat n'a fermé ses portes que dans les années 1980, je pense, même si les pires torts qu'ils avaient causés étaient alors chose du passé.
C'est seulement dans les années 1980 que la situation a commencé à changer. C'est un débat constitutionnel — on pourrait parler, bien sûr, du Livre blanc de Jean Chrétien entre autres choses — qui a marqué le début d'une nouvelle prise de conscience politique et d'un soutien passif. Le gouvernement ne voulait pas vraiment nous aider, mais la modification constitutionnelle, le paragraphe 35(1) — les droits existants ancestraux ou issus de traité des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés — et le rapport Penner ainsi que la Commission royale sur les peuples autochtones ont soudainement fait bouger les choses. Il y a aussi eu les excuses et même l'acceptation présumée de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
Tout cela représente un changement de cap. Kelowna a marqué un tournant. Kelowna n'aurait pas pu se produire il y a 15 ans. Les mentalités n'étaient pas prêtes. Je crois donc que notre pays est en train de changer de cap. Et c'est un phénomène très récent. Cela fait environ 10 ans que nous bénéficions d'un soutien actif. Cela va prendre plus de temps.
Je ne pense pas que tous les Canadiens soient prêts à soutenir les enjeux et les programmes autochtones. Je crois qu'il y a encore au Canada beaucoup de racisme et un manque de compréhension.
Madame la présidente, ma réponse est trop longue. Veuillez m'en excuser.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie infiniment d'être venus aujourd'hui.
Je vous ai écouté énumérer vos priorités. J'ai un bon nombre d'Autochtones dans ma circonscription même si je ne suis pas au centre-ville. Toutefois, comme vous le savez, Toronto a une population autochtone très importante. Le centre d'amitié est excellent, mais il est dépassé par l'ampleur de la tâche, d'après ce que je peux voir.
Par conséquent, le logement, la garde d'enfants, l'éducation, l'aide à l'emploi font partie d'un tout et je ne pense pas que l'on puisse offrir l'un sans l'autre. Vous venez de dire une chose que je trouve très intéressante: cessons de parler des nations et desservons les personnes qui vivent dans les centres urbains.
Nous passons beaucoup de temps à essayer de résoudre les problèmes de nation à nation, ce qui est une bonne chose. Je m'abstiendrai d'en parler. Je sais qu'il y a des raisons pour lesquelles nous nous ignorons mutuellement. J'ai l'impression que les Autochtones des villes sont laissés pour compte dans la bataille entre le fédéral et les provinces.
Vous avez mentionné tout à l'heure l'accord de Kelowna et je n'en parlerai pas parce que c'est un accord que notre ancien gouvernement a signé, mais avec un accord de cette nature, comment rompre cette ridicule habitude voulant que les provinces veuillent s'occuper des Autochtones des villes et le gouvernement fédéral des autres? Ce débat est artificiel. Nous devrions tous assumer cette responsabilité étant donné que nous avons un très grand nombre de jeunes qui représentent l'avenir de notre pays.
Quels éléments de l'accord de Kelowna nous recommandez-vous d'examiner et de relancer afin que nous puissions progresser? Je voudrais simplement que nous dépassions cet éternel sujet de débat.
J'apprécie votre présence ici aujourd'hui, Peter.
Ma question porte sur certains problèmes concernant les études secondaires et postsecondaires et j'apprécie votre honnêteté. En tant que membres du comité, nous vous avons posé des questions directes.
J'ai deux réserves dans ma circonscription et j'ai des liens avec de nombreuses autres réserves. J'ai aussi siégé pendant un certain temps au Comité des affaires autochtones. J'entends dire de temps en temps — c'est au niveau du secondaire avant que nous n'arrivions au niveau postsecondaire et c'est ce que disent des gens des premières nations — que les étudiants ont eu l'impression, comme vous l'avez dit, qu'ils étaient mal préparés et pas vraiment au niveau voulu pour l'université ou le collège où ils sont allés ensuite.
Cela semble se retourner contre eux, d'après ce que je peux comprendre… ils estimaient que le niveau était plus bas dans les écoles des réserves, ou les écoles qu'ils fréquentaient et cela a pu se passer pour diverses raisons. Cela semble maintenant les préoccuper. Peut-être qu'à l'époque on pensait que c'était une bonne chose comme l'action positive pour l'embauche, etc., mais le problème s'est surtout posé au niveau secondaire.
Je vais parler de l'enseignement postsecondaire. Certains jeunes des premières nations m'ont souvent fait preuve de leurs inquiétudes. Ils vivent maintenant en ville, mais ils restent en contact avec une réserve. Ils n'obtiennent pas de financement pour leurs études postsecondaires.
Certains diront que c'est parce qu'il n'y a pas suffisamment d'argent. Dans d'autres cas, ils me diront que c'est parce que cet argent a servi pour la santé, pour le logement, pour l'infrastructure ou autre chose. Dans certains cas, ils parlent aussi d'autres dépenses inappropriées.
Certains d'entre eux m'ont laissé entendre que s'ils pouvaient obtenir cet argent directement du gouvernement fédéral ou de façon semblable plutôt que par l'entremise de la réserve, il n'y aurait pas d'accusations de favoritisme ou personne ne dirait que la famille du chef ou telle famille qui siège au conseil obtient de l'argent, mais pas les autres.
Telles sont mes deux questions, je suppose: l'abaissement du niveau et le mode de paiement du financement pour s'assurer qu'il est versé aux étudiants, aux bons étudiants qui en ont besoin.