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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 034 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 25 novembre 2010

[Enregistrement électronique]

(1310)

[Français]

    Aujourd'hui, le 25 novembre, c'est la 34e séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons l'étude du traitement des minorités sexuelles en Ouganda.
    Nous accueillons Chantal Desloges, avocate de l'immigration de Toronto, qui comparaît par vidéoconférence. Nous poserons des questions après l'exposé.
    Permettez-moi tout d'abord de vous saluer, Chantal. Je la connais, car nous nous sommes rencontrés à une conférence tenue à Jérusalem, l'an dernier. Je suis heureux de vous revoir.
    Bienvenue au comité. Vous pouvez commencer l'exposé.
    Pour situer le contexte, je suis avocate en droit de l'immigration et des réfugiés depuis près de 14 ans et je suis agréée au Barreau du Haut-Canada. Ces huit dernières années, je me suis occupée du parrainage de bien des réfugiés. J'ai donc beaucoup d'expérience dans la réglementation que vous examinez depuis la dernière séance.
    Vous étudiez le traitement des minorités sexuelles en Ouganda. J'ai lu les témoignages de la dernière séance et je sais que vous vous penchez sur les problèmes de logistique auxquels ces personnes se butent pour obtenir le statut de réfugié dans d'autres pays, mais surtout au Canada et que c'est la raison pour laquelle je suis ici. Je peux en effet vous parler des procédures et de certaines préoccupations, et je peux vous faire des recommandations.
    Pour connaître les recommandations possibles, vous devez bien sûr avoir une idée des lois et des règlements. C'est ce dont je m'apprête à vous parler.
    Il y a deux façons de demander le statut de réfugié au Canada. Les personnes peuvent présenter une demande sur place, si elles sont au pays, ou si elles sont à l'étranger, elle peuvent présenter une demande à titre de réfugié au sens de la convention.
    C'est évident que pour faire une demande au Canada, il faut être déjà entré au pays. Cela dit, je suis d'accord avec le témoin précédent, le système fait que le visa n'est pas accordé à ceux qui ont l'intention de présenter une demande.
    Les visas sont destinés aux touristes, pas à ceux qui viennent ici pour de bon. À vrai dire, la seule façon pour un demandeur de statut de réfugié d'obtenir un visa, c'est de mentir, et certains l'ont compris. À cet égard, le droit international interdit les sanctions contre les réfugiés qui n'ont pas d'autre choix que de mentir pour survivre.
    Au fond, c'est une impasse dès le début. On traitera votre demande si vous parvenez à être admis au pays, mais là encore, on prendra tous les recours pour que cela n'arrive pas. C'est bien sûr pourquoi les gens sont à la merci des passeurs. Ensuite, nous sommes très en colère lorsque nous interceptons des immigrants illégaux, comme pour les Tamouls qui venaient par bateau à Vancouver.
    C'est pourquoi il me paraît plutôt ridicule de dire que ces gens n'attendent pas leur tour, parce que pour eux, il n'y a pas de façon adéquate de venir à titre de réfugiés, sauf dans des circonstances très exceptionnelles, dont je suis sur le point de parler.
    Selon le programme pour les réfugiés, les gens peuvent venir en tant que réfugiés seulement s'ils se trouvent à l'extérieur de leur pays, où ils sont persécutés. Même si leur vie est vraiment menacée ou s'ils sont persécutés, ceux qui se trouvent dans leur pays ne répondent pas à la définition de réfugié. Il est essentiel d'être à l'extérieur de son pays. En gros, si on habite dans son pays, on n'a aucun recours.
    Il y a aussi la catégorie des personnes de pays source, qui peuvent présenter une demande dans leur pays. Toutefois, seuls la Colombie, le Salvador, le Guatemala, le Congo, la Sierra Leone et le Soudan sont concernés. Par ailleurs, le Salvador et le Guatemala ne devraient plus figurer dans la liste, car ces États ne sont plus en crise. De façon assez étonnante, des pays comme l'Afghanistan ou l'Irak ne sont pas visés, même si on sait que les droits de la personne y sont violés de façon importante.
    Même si les réfugiés ne vivent pas dans leur pays et qu'ils satisfont à la définition, ils ne peuvent soumettre une demande que dans trois situations très particulières. Le réfugié peut être parrainé par une église ou une organisation qui a signé une entente avec le ministère ou par cinq citoyens qui sont prêts à lui offrir un soutien financier pendant sa première année au Canada. Il s'agit du programme de parrainage de réfugiés par le secteur privé, le PRSP.
    Le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés peut aussi soumettre un cas au Canada, qui accepte que la personne s'installe ici. On parle alors d'un réfugié parrainé par le gouvernement, un RPG.
(1315)
    Enfin, il y a le réfugié qui a les moyens de venir au Canada, sans recevoir d'aide. On pourrait parler d'un réfugié autosuffisant. Je n'ai jamais traité de tel cas, mais la loi prévoit une catégorie de ce genre.
    Vous pouvez comprendre que la loi empêche de nombreux réfugiés légitimes de présenter une demande pour venir au Canada. En effet, il faut admettre que la plupart des réfugiés ne connaissent personne ici qui peut les soutenir financièrement eux et leur famille, à leur arrivée. De plus, la majorité des réfugiés ne sont pas assez riches pour venir de manière indépendante.
    Grosso mode, les réfugiés sont à la merci du système d'examen du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, qui est très complexe et dont les responsables peuvent prendre des années avant de trancher. Le Canada accepte très peu de réfugiés par année et, sans exagérer, les gens restent parfois des dizaines d'années dans les camps de réfugiés. C'est ainsi que les choses se passent.
    En plus des restrictions imposées par la loi, les gens sont aux prises avec des difficultés de procédure. Dans la documentation — j'espère que vous l'avez reçue —, il y a une copie de ce qui est affiché sur le site Internet d'Immigration Canada. Il s'agit des délais de traitement pour les demandes de réfugiés. L'information est en anglais et en français.
    Le document montre tous les bureaux canadiens des visas et les délais de traitement pour les réfugiés parrainés par le gouvernement. Par exemple, les Ougandais doivent présenter une demande au Haut-commissariat du Canada à Nairobi. Si vous regardez les données, vous constaterez que les délais de traitement de Nairobi sont vraiment extrêmement longs. Les réfugiés parrainés par le secteur privé attendent 50 mois avant que leur demande soit envoyée au Canada. C'est 35 mois pour les réfugiés pris en charge par le gouvernement. On parle donc d'une attente de trois à quatre ans dans des conditions généralement dangereuses.
    Également, les ambassades sont aux prises avec des problèmes de fonctionnement. Par exemple, le gouvernement impose des quotas. Il y a très peu d'agents formés pour interviewer les gens. En outre, le demandeur qui est au Kenya et qui ne peut pas se rendre à l'ambassade pour l'entrevue doit attendre qu'un agent des visas vienne à lui, ce qui peut être long.
    Il faut sympathiser avec les membres du personnel des ambassades; ils n'ont pas la tâche facile. Ils essaient de répondre à beaucoup de demandes avec très peu de ressources et ils doivent organiser des entrevues et se rendre dans des pays dangereux.
    Malheureusement, il importe de remarquer que les agents des visas ont souvent du mal à déterminer le statut de réfugié; le droit des réfugiés est très complexe. La jurisprudence y est très importante, et les décisions ne sont pas à la portée de tout le monde. On ne peut pas comparer la formation des agents des visas à celle des commissaires, au Canada.
    Un agent des visas doit prendre toutes sortes de décisions. Par exemple, il peut être appelé à examiner un permis de travail, une demande de parrainage pour un mariage, puis une demande de réfugié. À Nairobi près de la moitié des demandes de réfugiés sont refusées, car on en accepte environ 60 p. 100. Le taux de refus est très élevé.
    Comprenez-moi bien, je ne dis pas que les agents des visas sont incompétents, loin de là. Ces personnes font de leur mieux compte tenu des ressources, qui ne sont pas énormes.
    Je vous ai également remis une copie en anglais et en français de la trousse de demande de réfugié. Vous pouvez constater que c'est très complexe, car la trousse contient bon nombre de directives et de données et la documentation à l'appui est importante. Néanmoins, tout ce qui est demandé dans les formulaires et la liste de contrôle des documents est pertinent. Le gouvernement a besoin d'obtenir tous les renseignements pour prendre la décision et déterminer si la personne présente une menace à la sécurité. Je vois mal comment on pourrait simplifier la trousse.
(1320)
    Enfin, c'est l'article 10 du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés qui définit en quoi consiste une demande parfaite ou complète. En résumé, il y est écrit que si l'on envoie une demande dans laquelle il manque des renseignements ou des documents, elle ne sera même pas acceptée et elle sera renvoyée au demandeur par la poste. Vous pouvez donc comprendre que pour une personne peu instruite, un réfugié qui présente une demande au Canada et qui ne connaît rien de notre système, le potentiel d'erreur est grandiose, et le cas échéant, la demande lui est renvoyée. La personne doit la renvoyer sans cesse jusqu'à ce qu'elle soit complète.
    J'ai entendu dire qu'à Nairobi, il y avait un bureau privé qui vérifiait les demandes et qui facturait les gens pour cela, mais les réfugiés n'ont pas à payer de frais pour remplir des formulaires et s'assurer que tous les documents voulus sont fournis. Je n'en sais pas beaucoup plus sur ce bureau, mais je sais qu'il existe.
    Si vous voulez des recommandations sur ce qu'on peut faire pour aider les minorités sexuelles en Ouganda, je vous dirai que le système actuel ne permet tout simplement pas de traiter les demandes en accéléré pour faire entrer sans délai au Canada les réfugiés qui sont menacés. Il n'y a pas de mécanisme prévu pour cela. Le seul moyen serait probablement de créer un programme spécial en collaboration avec le ministre. Ce serait une mesure spéciale.
    Il y a des précédents dans l'histoire à ce titre. Par exemple, vous vous rappelez peut-être que le gouvernement avait fait venir des groupes de réfugiés kosovars du Kosovo au Canada dans le cadre d'un programme spécial. Il a d'ailleurs fait quelque chose de semblable pour des réfugiés birmans il y a quelques années, pour les minorités religieuses qui étaient coincées dans un camp de réfugiés de la Thaïlande. Ce n'est donc pas du jamais vu, mais ce serait une exception à la règle, c'est bien clair.
    Il peut être difficile de justifier pourquoi on devrait prendre des mesures spéciales pour tel ou tel groupe compte tenu qu'il y a tellement de groupes dans le monde qui subissent au moins autant de persécution et parfois même plus que d'autres.
    Les autres recommandations que j'ai à vous faire portent davantage sur la façon dont on pourrait améliorer le système lui-même. Je ne sais pas si vous avez envie de les entendre, parce qu'elles ne toucheraient pas exclusivement le groupe qui vous occupe en ce moment.
    Je crois que je vais simplement vous laisser me poser des questions, et vous pourrez me dire ce qui vous intéresse.
    C'est une bonne idée. Je pense que toutes les solutions qui s'appliquent à la situation à l'étude, soit celle des minorités sexuelles en Ouganda, sont très bienvenues, mais comme vous le dites, nous pourrions peut-être aussi recueillir d'autres renseignements par nos questions.
    Il nous reste 35 minutes, ce qui signifie que nous allons donner sept minutes à chaque intervenant.
    Nous allons commencer par M. Cotler, qui représente les libéraux.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais bien entendre les recommandations dont vous venez de nous parler, parce qu'elles me sembleraient très pertinentes après avoir entendu votre exposé; je pense qu'il nous serait utile de savoir comment vous pensez que nous pouvons améliorer le système. Je présume que ces mesures ne toucheraient pas seulement le Kenya, mais bien d'autres pays.
    De même, j'aimerais bien connaître vos impressions sur le projet de loi C-49, parce que bien qu'on le qualifie de projet de loi contre le passage de clandestins, il va nécessairement avoir une incidence sur les réfugiés et les personnes qui fuient des situations dangereuses dans leur pays. On peut lire une remarque assez intéressante dans le journal The Province, soit qu'Albert Einstein aurait été refusé en vertu de cette loi. Je me demande si vous pouvez réagir à cela aussi et aborder les deux questions dans votre réponse, s'il vous plaît.
    Bien sûr.
    Ma première recommandation pour améliorer le système serait d'élargir la catégorie des personnes qui peuvent demander la protection de réfugiés pendant qu'elles vivent dans leur pays. Comme je l'ai déjà dit, on ne peut pas être considéré comme un réfugié si l'on vit toujours dans son propre pays. La seule autre solution, c'est d'appartenir à la catégorie des personnes de pays source, qui ne comprend que six pays, dont l'Ouganda ne fait pas partie. Il faut allonger la liste des pays inclus. Pour cela, on pourrait soit modifier la définition de la catégorie des réfugiés au sens de la Convention outre-frontières dans la loi, soit allonger la liste des pays source. Vous pourriez donc ajouter des pays à cette liste, par exemple. Voilà pour la première recommandation.
    Ensuite, vous pourriez augmenter le nombre maximal de réfugiés parrainés par le gouvernement, ou RPG. En ce moment, je crois que le maximum pour Nairobi est d'environ 1 000 personnes par année. Quand on pense à tous les réfugiés qui se trouvent au Kenya, ce n'est qu'une goutte d'eau dans l'océan. Le fait de hausser les plafonds aiderait beaucoup.
    Vous pourriez également augmenter le nombre maximal de réfugiés parrainés de manière privée, afin de permettre aux gens qui auraient des parrains au Canada... S'il y avait plus de personnes parrainées ainsi, les choses avanceraient beaucoup plus vite. C'est très logique quand on y pense. Des réfugiés sont parrainés par des organismes ou des personnes au Canada, qui se portent financièrement garants d'eux. Il n'y a donc de risques pour personne. On sauve la vie de quelqu'un sans que cela ne coûte un sou au Trésor public.
    Il faut accroître les ressources octroyées à la mission à Nairobi. C'est l'une des missions canadiennes les plus occupées au monde, peut-être même la plus occupée. Son personnel essaie de faire beaucoup de choses différentes, de traiter beaucoup de demandes différentes sans appui logistique supplémentaire. Je pense que ce serait essentiel. Il faudrait d'ailleurs aussi prévoir de former les employés sur la loi concernant les réfugiés.
    Enfin, il y aurait lieu de simplifier le processus de demande. Quand une personne d'une catégorie de réfugié envoie une demande incomplète pour une raison ou une autre, plutôt que de lui renvoyer sa demande et d'attendre indéfiniment, nous pourrions peut-être simplement lui demander la documentation manquante pour qu'elle ne perde pas son ordre de priorité. Nul ne peut surestimer la difficulté que les gens ont et le temps qu'ils perdent à envoyer et renvoyer des documents.
    Par ailleurs, vous me demandez ce que je pense du projet de loi C-49. Je suis contente que vous me demandiez mon avis, parce que j'adore dire ce que j'en pense. Ce que vous avez dit est juste, le projet de loi C-49 a été présenté au public comme un outil pour empêcher le passage de clandestins. Présentées comme cela, les choses semblent merveilleusement belles. Qui ne veut pas empêcher le passage de clandestins? Ce sont les rebuts du genre humain, c'est le crime organisé, etc.
    Le problème, c'est que ce projet de loi comporte beaucoup de dispositions qui punissent les demandeurs du statut de réfugié. Je ne parle pas de demandeurs bidons, je parle de demandeurs totalement légitimes. Par exemple, selon l'une des dispositions du projet de loi, si une personne est considérée comme membre d'un groupe de clandestins, un jugement totalement arbitraire, d'ailleurs... Quelle différence cela fait-il qu'un réfugié soit arrivé par bateau avec d'autres personnes ou seul par avion? C'est arbitraire. Si l'on détermine qu'une personne fait partie de ce groupe particulier, même si elle est acceptée comme réfugié, qu'on la juge totalement crédible et que tout ce qu'elle dit est vrai, qu'elle est en danger, elle ne pourra pas faire venir les membres de sa famille au Canada pendant cinq ans.
    Je ne vois pas très bien en quoi cela punit les passeurs de clandestins. Cela punit les réfugiés, et ce n'est pas juste. Je pense aussi que bon nombre de ces dispositions ne résisteraient pas à une contestation fondée sur la Loi constitutionnelle.
(1325)
    À ce titre, croyez-vous aussi qu'elles contreviennent à nos obligations internationales et peut-être même à la Charte?
    Absolument. Il y a plusieurs conventions internationales. Je pourrais vous trouver les citations pertinentes, si vous le voulez.
    Pour vous donner un petit exemple, le droit international dicte que dès qu'une personne est désignée réfugiée, on devrait déployer tous les efforts possibles pour l'intégrer dans sa société d'accueil, pour qu'elle ne reste pas une personne déplacée et perdue pendant longtemps.
    Historiquement, le Canada est l'un des rares pays qui se défend très bien à cet égard. Nous permettons aux réfugiés d'obtenir la résidence permanente. Nous leur permettons de demander la citoyenneté. Ce serait un énorme pas en arrière.
    Merci.
    Très bien.
    Madame Deschamps, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je m'adresse à vous en français, madame Desloges. J'espère que vous avez les services de la traduction. M'entendez-vous bien?

[Traduction]

    Oui, je comprends le français, mais je préférerais utiliser les services de l'interprète.

[Français]

    Je m'en doutais un peu parce qu'il y a des Desloges dans ma famille, et ils sont français.
    Je dois admettre que tout ce qui touche l'immigration ou les lois qui régissent l'immigration n'est pas mon dada.
    Quand on a commencé l'étude de la question de la violence et de la discrimination à l'égard des minorités sexuelles, le comité a reçu, entre autres, un témoin. Il nous a parlé des difficultés des gens dans sa situation, et de la façon dont ils étaient menacés dans leur pays d'origine. Je trouve tout le système actuel très complexe, sa structure est très lourde.
     Évidemment, je pense qu'on est en train quelque peu de fermer la porte à un très grand nombre de gens provenant de pays africains qui sollicitent un statut de réfugié au Canada. En raison de la diminution du nombre de fonctionnaires à l'étranger et des fermetures d'ambassades — d'autres fermeront bientôt —, on diminue l'accessibilité à ces citoyens qui réclament de l'aide.
    D'après ce que j'ai entendu, les fonctionnaires dans les ambassades sont mal formés ou comprennent mal la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés du Canada. Souvent, par crainte de faire une erreur, ils vont refuser la demande pour probablement éviter des réprimandes. C'est un problème.
    Pourriez-vous m'indiquer de mémoire si, aux États-Unis, on a assoupli la loi par certaines mesures pour faciliter l'entrée au pays de ce type de demandeurs?
(1330)

[Traduction]

    Je ne connais pas très bien la loi américaine sur les réfugiés. Je sais que les États-Unis ont mis en place des mesures très souples pour les Iraquiens, mais à part cela, je ne sais pas vraiment ce qui se fait aux États-Unis.

[Français]

    Pouvez-vous commenter un peu ce que j'ai dit en préambule, au sujet des services consulaires offerts, particulièrement en Afrique?

[Traduction]

    Avec plaisir.
    Comme je l'ai dit d'entrée de jeu, je ne veux absolument pas casser du sucre sur le dos des agents des visas. Ils font un travail très difficile et le font avec bien peu de moyens, mais je pense qu'ils bénéficieraient d'un peu plus de formation. J'ai de la sympathie pour eux. Je me concentre sur le droit des réfugiés à temps plein, j'en mange, j'en respire et j'y pense même quand je dors depuis presque 14 ans et j'apprends encore de nouvelles choses chaque jour. C'est un domaine du droit très complexe. Il y a des administrateurs au Canada dont c'est le travail à temps plein, chaque jour, de se pencher là-dessus. Je crois donc que toute la formation supplémentaire qui pourrait être offerte aux agents des visas serait très utile.
    Je pense qu'un autre problème vient du fait qu'une grande partie du travail préalable à la décision est abattu par des employés embauchés localement. Il s'agit d'employés de l'ambassade, mais ce ne sont pas des Canadiens. Ils font l'examen préalable des demandes, s'occupent de la paperasse, font parfois même des entrevues, même si ce n'est peut-être pas tellement dans le contexte des demandes du statut de réfugié.
    Je ne suis pas du tout d'accord avec l'idée de confier des cas aussi délicats à des employés locaux. Vous devez savoir que les gens qui travaillent au Haut-Commissariat de Nairobi sont des Africains, et nous connaissons les tendances homophobes prévalant dans beaucoup de pays africains. Il est donc à tout le moi5ns extrêmement stressant pour un gai ou une lesbienne de s'adresser au Haut-Commissariat du Canada à Nairobi et de devoir faire affaire avec un autre Africain pour la paperasse qui entoure la demande du statut de réfugié. Je crains d'ailleurs aussi que les préjugés de l'employé transparaissent dans le processus décisionnel.

[Français]

    Vous avez parlé de la mise en place d'un programme spécial. Y a-t-il actuellement dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés un espace traitant des minorités sexuelles?
(1335)

[Traduction]

    Tout à fait. Il existe deux solutions. La première serait de lancer un projet ponctuel. Il ne découlerait d'aucune modification réglementaire ou législative, ce serait un projet spécial de l'administration centrale pour faire sortir mettons 200 personnes de l'Ouganda pendant une période donnée. S'il y a une volonté en ce sens, les dirigeants n'ont qu'à dire oui, et le projet sera lancé; ils n'auraient qu'à accélérer le processus déjà en place.
    Ils pourraient également donner des visas temporaires spéciaux à ces personnes. Il ne s'agirait pas de visas de visiteur, mais de ce qu'on appelle un permis de séjour temporaire. Ces permis ne sont habituellement accordés que dans des circonstances très exceptionnelles. La loi le permet, il ne faut que la volonté politique de le faire.

[Français]

    En tenant compte de votre expertise, est-il déjà arrivé que le gouvernement vous ait consulté lors d'une révision de sa loi ?

[Traduction]

    On me demande mon avis de temps en temps sur les questions concernant les réfugiés. Par exemple, j'ai fait partie d'un groupe de lobbying il y a quelques années au nom de la communauté irakienne (des minorités religieuses d'Irak), qui a fait passablement de pressions. J'ai produit un rapport à l'époque sur les problèmes que ces personnes vivaient, et j'ai formulé quelques recommandations.
    Grâce aux efforts de ce groupe, le ministre a fini par augmenter le nombre de visas que le bureau de Damascus pouvait accorder afin d'augmenter le nombre de réfugiés irakiens que le Canada pouvait accueillir s'ils étaient parrainés.

[Français]

    Le temps qui vous est alloué est écoulé.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame Desloges.

[Traduction]

    Monsieur Marston, allez-y, je vous prie.
    Merci, monsieur le président.
    Il est bon de vous revoir. Il y a une semaine, je crois, que nous nous sommes rencontrés dans mon bureau.
    Je suis ici, à retourner dans ma tête un aspect de cette question — et voilà que je me dis, monsieur le président, que le témoignage que nous avons entendu aujourd'hui mérite d'être envoyé à Citoyenneté et Immigration Canada, ou au comité qui s'occupe de la question. Certains détails dont on nous a fait part pourraient leur être utiles, et ils voudront peut-être assurer un suivi auprès de notre témoin.
    Attendons d'avoir la version officielle du hansard, qui inclura bien entendu les questions et réponses qui n'ont pas encore été échangées; ensuite, nous veillerons à leur transmettre le compte rendu.
    Certainement.
    L'une des choses qui m'intriguent... Vous avez parlé d'un projet ponctuel. Avez-vous connaissance d'un cas où le gouvernement a dit à un nombre de personnes comparable à celui-ci — environ 200 — que si elles arrivaient à quitter leur pays, on leur enverrait un agent pour traiter leurs demandes?
    Le cas que j'ai cité plus tôt est un bon exemple. Des membres d'une minorité religieuse du Myanmar, ou de Birmanie, qu'on appelle des réfugiés karens, avaient traversé la frontière birmane pour s'enfuir en Thaïlande, et vivaient à l'époque dans des camps.
    C'était il y a quelques années à peine. On a créé un projet spécial où l'on s'est dit: « réinstallons tout ce groupe de personnes; tirons-les de là, et faisons-les venir au Canada dans le cadre d'un projet ponctuel spécial ».
    Voilà un exemple qui illustrerait parfaitement ce dont je vous parle.
    Je regarde un rapport que nous avons ici, et on y précise que le ministre peut conclure des protocoles d'entente avec une organisation afin de rechercher et d'identifier des réfugiés au sens de la Convention. Je me demande si cela se rapproche de la situation que vous décrivez.
    On a fait état de la situation dans les médias et les pays de partout dans le monde. Nous sommes très conscients qu'en Ouganda, on a un contexte de nature systémique relativement aux gais et lesbiennes, et nous savons que le gouvernement a adopté cette loi. Ensuite, il y a eu... Je pense que plus de 150 personnes ont été nommées, littéralement ciblées, dans un journal.
    Je sais que, partout dans le monde, il y a des circonstances exceptionnelles et des gens qui se retrouvent dans des situations périlleuses, mais le fait qu'on puisse ainsi être ciblé dans son propre pays mérite selon moi que notre gouvernement envisage de prendre une mesure spéciale.
    Nous avons reçu un témoin qui, si je me rappelle bien, avaitt offert de se rendre dans un pays voisin s'il obtenait ces visas spéciaux de résidence temporaire, ou le formulaire de demande, ou peu importe le genre de document dont il s'agit. Il était en communication avec près de 200 personnes, avec lesquelles il était prêt à travailler.
    Savez-vous si quelque chose de semblable s'est jamais produit? Est-ce totalement contraire à la procédure normale?
(1340)
    Cela s'est déjà vu, mais c'est très rare. Je me souviens en effet qu'il y a de cela quelques années — enfin, peut-être plutôt 10 ans — un organisme se chargeait d'une bonne partie de la présélection des réfugiés en Turquie. Je pense que c'était une organisation catholique appelée Caritas. Normalement, CIC conclut des ententes avec des organismes qui ont fait leurs preuves, et qui ont un haut niveau de crédibilité pour ce qui est de traiter avec les réfugiés.
    Donc, c'est assurément une chose réalisable, mais je doute fort qu'on l'envisagerait pour quelqu'un comme ce témoin, qui a simplement offert de se rendre sur place sans avoir une solide expérience à son actif. Cela ne veut pas dire qu'une autre organisation ne pourrait pas s'en charger.
    Alors que nous écoutions ce témoin, j'étais préoccupé par le fait que, même s'il était très passionné et se sentait fortement concerné par la situation, il semblait vraiment être un profane essayant d'entrer dans un domaine très complexe afin de trouver une solution pour les gens qu'il connaît dans ce pays. Il est bon d'entendre qu'il y a au moins une possibilité de ce côté; ainsi, lorsque notre comité se penchera sur les mesures à proposer ou les recommandations à formuler, il pourra au moins discuter de cette éventualité.
    Si nous avions un groupe spécial sur place, pourriez-vous nous donner une idée du délai qu'il lui faudrait pour mener à terme le processus et faire transférer les intéressés au Canada? Parlons-nous de 35 à 50 mois, ou d'un délai plus court?
    Si la volonté est là, il n'y a aucune raison pour qu'on n'y parvienne pas en moins d'un an.
    Par exemple, une fois qu'on aura sélectionné la personne, qu'on lui aura accolé une étiquette pour dire oui, c'est un réfugié, il y aura ensuite les exigences relatives à la sécurité et aux tests médicaux. On voudra s'assurer que vous ne répandrez pas la tuberculose parce que vous en êtes atteint, que vous n'avez pas été associé à des groupes criminels et que vous n'avez pas de casier judiciaire. Ces vérifications peuvent être faites en quelques mois, selon des intervenants externes comme les médecins ou les agences de sécurité comme le SCRS, et ainsi de suite.
    Lorsqu'on nous a parlé de ces gens qui figurent sur la liste, pour ainsi dire, il m'a semblé qu'un grand nombre de professionnels, de personnes bien nanties, auraient peut-être plus de chances de survivre dans un autre pays pendant jusqu'à un an avant leur venue ici. Leur cas n'est donc pas aussi urgent que s'ils étaient des réfugiés dans un camp et devaient se battre quotidiennement de cette façon.
    Je vous sais gré de votre témoignage. Il est utile. Merci beaucoup.
    Merci.
    J'aimerais seulement ajouter qu'il y a aussi la catégorie des réfugiés autonomes. Si certains des candidats au statut de réfugié ont des moyens financiers importants, ils peuvent présenter une demande de façon autonome, sans être nécessairement parrainés.
    S'ils devaient présenter une demande de façon autonome, le feraient-ils dans leurs pays? Ne seraient-ils pas confrontés aux gens qu'ils redoutent? Je pense aux Africains qui sont peut-être inquiets de cette situation. Nous avons un contexte où ils doivent quitter le pays, d'après tout ce que nous entendons. Ils n'osent pas traiter avec l'appareil gouvernemental, ce qui complique leur situation, je crois.
    Oui, et dans la mesure où on ne peut être considéré comme un réfugié si on se trouve encore dans son pays, ils seront contraints de partir.
    Merci, monsieur Marston.
    Commençons-nous par M. Sweet, ou par M. Hiebert?
    Merci, monsieur le président. Je vais reprendre là où M. Marston en était rendu dans son échange avec Mme Desloges.
    Il existe aussi un autre moyen: les personnes hautement qualifiées ou qui possèdent les compétences techniques figurant sur la liste des qualifications que nous recherchons pour développer notre économie peuvent présenter une demande et suivre un processus d'immigration accéléré, au lieu d'avoir à passer par le processus de détermination du statut de réfugié pour venir au Canada. C'est une autre possibilité.
    Je me dois de préciser dès le départ, dans un souci de transparence, que je connais très bien Mme Desloges. Je suis un admirateur de son travail formidable, et nous avons eu l'occasion de travailler ensemble. L'une de nos causes communes était l'élargissement du programme de parrainage privé de réfugiés afin de pouvoir accueillir davantage de personnes au Canada.
    En ce sens, c'est l'un des aspects difficiles. J'allais mentionner... Chantal, vous avez parlé de l'Irak et de l'Afghanistan. D'autres pays me viennent à l'esprit, comme le Soudan, le Myanmar et l'Iran — et particulièrement l'Iran en ce qui a trait à la communauté gaie, lesbienne, bisexuelle et transgenre —, où les besoins sont énormes et comparables à ceux dont il est question en ce moment. Notre capacité d'absorber les réfugiés est l'un des défis auxquels nous faisons face. Notre pays accepte beaucoup de réfugiés par habitant.
    Vous avez parlé du bureau des visas, mais dans le cas du parrainage privé, on a également la possibilité de faire en sorte que des familles ou des groupes s'occupent des réfugiés et les installent ici. C'est un défi de taille. Je vous sais gré des idées que vous avez lancées.
    Puisque vous avez fait des remarques concernant d'autres lois, j'aimerais vous interroger au sujet du projet de loi C-11. Ce projet de loi sur les mesures de réforme équitables concernant les réfugiés a été adopté et a reçu la sanction royale, mais il n'est pas encore en vigueur. A-t-il permis certaines améliorations pour ce qui est de faciliter les choses pour les réfugiés de l'intérieur?
(1345)
    Pour les réfugiés de l'intérieur, l'un des effets positifs de cette mesure législative a été de leur accorder un droit d'appel. Cela a fortement réjoui tous les défenseurs des droits des réfugiés.
    Mais d'autres aspects du projet de loi n'ont pas été aussi bien reçus — par exemple, le fait d'obliger quelqu'un à avoir toute son histoire et son dossier fin prêts dans un très bref délai. À notre avis, ça prive les gens de leur droit à l'assistance d'un avocat.
    Je ne dirais pas que les choses sont plus faciles; elles sont différentes. Mais nous pouvons certainement saluer la création de la nouvelle section d'appel des réfugiés.
    Vous avez déjà mentionné qu'il y avait d'autres moyens. Vous avez parlé de donner une formation supplémentaire aux agents des visas, et de leur fournir davantage de précisions quant à la manière de traiter les différents types de cas. Du point de vue de nos efforts pour bâtir une capacité, y a-t-il d'autres aspects à corriger afin d'améliorer l'ensemble du système?
    Enfin — et je vais vous laisser là-dessus —, en vous basant sur votre expérience, pouvez-vous me dire si vous avez eu connaissance d'une recherche ayant apporté une réponse claire quant au nombre de réfugiés que nous pouvons absorber et intégrer avec succès dans notre population chaque année?
    Sur la plan de sa structure, c'est en fait un bon système. La majeure partie du système — le règlement et la loi — fonctionne, mais il est très lent et lourd. Ce n'est vraiment qu'une question de ressources. S'il y avait un peu plus de formation, si l'on injectait davantage de fonds dans le système et si un peu plus de personnel faisait ce genre de travail, cela accélérerait vraiment les choses.
    Je m'occupe d'un grand nombre de dossiers de parrainage de réfugiés à l'étranger, et j'ai remarqué que pour une raison quelconque, les agents semblent croire qu'ils doivent interviewer chacun des demandeurs. Or, je pense que dans bien des cas, on pourrait passer outre à une entrevue lorsque les preuves documentaires sont très convaincantes. Nous le faisons parfois ici, au Canada: si quelqu'un présente un dossier en béton à la Commission du statut de réfugié, on pourra approuver sa demande sans même tenir une audience.
    Donc, s'ils pouvaient davantage utiliser leur pouvoir discrétionnaire pour laisser tomber les entrevues lorsque c'est approprié, ce serait d'une grande utilité.
    Je n'ai pas saisi votre dernière question.
    Je me demandais si, dans le cadre de votre travail, vous aviez eu connaissance d'une recherche d'un groupe de réflexion, d'une recherche de source externe, au sujet de la capacité d'absorption dans la population générale par rapport au nombre de réfugiés que nous accueillons ici.
    Je ne connais aucune étude de ce genre. Mais je pourrais certainement faire une recherche là-dessus et transmettre les résultats au comité, si cela peut être utile.
    D'après ma perception, qui est fondée sur tout le travail que j'ai accompli dans le domaine, en ce qui concerne à tout le moins les réfugiés parrainés par le secteur privé, la capacité d'absorption est sans doute illimitée, parce que ces personnes n'exigent aucune ressource. Elles bénéficient du soutien financier d'organismes externes, au moins pendant la première année de leur présence ici. Donc, il n'y a absolument aucune raison de ne pas augmenter ces quotas.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Hiebert, souhaitez-vous ajouter quelque chose?
    Contre toute attente — cela n'arrive pas très souvent —, il nous reste encore quelques minutes.
    Les membres voudraient-ils poser des questions supplémentaires?
    Monsieur McKay, allez-y, je vous prie.
    Merci de votre témoignage. Vous avez soulevé la question des pays sources, à laquelle je songeais justement. Vous avez évoqué la possibilité que l'Ouganda soit du nombre relativement à cette communauté particulière.
    Comment procéderiez-vous pour décider des pays sources? Par exemple, la situation est assez sinistre pour quiconque est chrétien au Pakistan.
(1350)
    Cela vaut pour l'Égypte également.
    L'Égypte est un autre pays qui nous vient à l'esprit.
    Ensuite, je crois que vous avez cité deux pays qui n'avaient en quelque sorte plus leur place sur la liste. Donc, comment vous y prendriez-vous pour rafraîchir cette liste? Quels critères appliqueriez-vous? Comment savoir ce qui pourrait constituer un pays source à un moment ou à un autre?
    Le problème avec la désignation des pays sources, c'est que c'est un outil très peu nuancé. J'entends par là qu'elle ne s'applique pas à une minorité ou à une situation donnée, mais à un pays en entier. Donc, si on veut uniquement ajouter à cette liste des pays où d'importants groupes de gens font l'objet de violations généralisées des droits de la personne, la désignation en tant que pays source n'est peut-être pas la meilleure solution.
    Supposons que nous ajoutions l'Ouganda à cette liste. En dehors des minorités sexuelles, combien y a-t-il d'autres groupes de personnes qui font l'objet de persécutions en Ouganda? On ouvrira la porte à pratiquement n'importe qui dans ce pays qui souhaitera présenter une demande de statut de réfugié et tenter de prouver le bien-fondé de sa cause. Comme je l'ai dit, c'est un instrument qui manque un peu de finesse.
    J'approuverais davantage cette désignation pour des pays comme l'Irak, où il y a en permanence des violations généralisées des droits de la personne, non seulement contre un petit groupe, mais contre toute une série de minorités religieuses, sexuelles ou politiques. Dans un contexte comme celui-là, c'est plus sensé.
    Vous avez dit que le système n'était pas mauvais, mais j'ai l'impression que si vous deviez établir des priorités, la formation et les ressources seraient les deux principales requêtes que vous soumettriez à ce comité.
    Absolument. La priorité suivante serait une forme de programme pour venir en aide aux personnes qui se trouvent encore dans leur pays et qui sont menacées de persécution.
    Vous avez également laissé entendre que le processus de présélection ne vous plaisait pas. Je n'ai pas très bien compris si vous en aviez contre ceux qui s'occupent de la présélection en raison des allégations relatives à l'homophobie chez les Africains, ce qui va à l'encontre d'une présélection neutre. De prime abord, la présélection me paraît sensée, alors j'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.
    Ma position est celle-ci. Oublions l'Afrique pour une minute. Prenez n'importe quel bureau des visas dans le monde. Je ne pense pas que les agents recrutés sur place devraient même toucher les demandes de statut de réfugié. L'information qu'elles contiennent est de nature si privée et délicate que selon moi, seuls les Canadiens devraient traiter ces dossiers. Je ne voudrais même pas qu'un commis embauché localement photocopie mes formulaires de demande si je me trouvais dans cette situation.
    Maintenant, je reconnais que du personnel local peut s'avérer très utile pour d'autres types de demandes — par exemple dans le cas des travailleurs qualifiés, des visas de visiteur, du parrainage d'un époux, et cetera. J'estime tout simplement que les questions relatives aux réfugiés sont bien trop délicates.
    C'est une très bonne explication. J'ai eu l'impression que vous disiez ne vouloir tout simplement aucune présélection, alors que dans les faits, une présélection bien gérée et effectuée seulement par le personnel de l'ambassade du Canada faciliterait et accélérerait probablement le processus.
    C'est juste. Ce n'est pas la présélection qui me pose problème, mais les agents recrutés sur place.
    D'accord. Merci.
    Pour ce qui est des délais dont vous avez parlé, je crois que dans les faits, le délai est de 50 mois au Kenya, à Nairobi. Est-ce exact? Est-ce bien ce que vous avez dit?
    Oui. Si vous êtes un réfugié parrainé par le secteur privé, vous attendrez 50 mois simplement pour obtenir votre visa pour le Canada, et c'est sans compter la quantité de temps passée au bureau de l'immigration en sol canadien, où les parrains devront présenter une demande pour être reconnus comme parrains. Cela ajoute donc — je ne sais pas — deux ou trois mois, peut-être.
    Donc, si mon église décide de parrainer un réfugié ou un groupe de réfugiés X ou Y, il faudra compter un délai avant de pouvoir être admis comme répondant, ce à quoi se rajoutent les 50 mois.
    C'est exact. Vous attendrez plus de quatre ans, point final.
(1355)
    Vraiment? D'accord.
    Merci de ces précisions. Je vous en suis reconnaissant.
    Merci.
    Je vais profiter de ce qu'il nous reste un peu de temps pour poser moi-même quelques questions. Je voudrais parler de la question du recours aux employés locaux, qui sont originaires du pays concerné, pour ensuite aborder la question du délai également.
    En ce qui a trait au recours à du personnel local, nous ne sommes qu'un pays parmi tous les autres qui accueillent des immigrants ou des réfugiés. Je présume que les autres pays ont des pratiques différentes. Pourriez-vous nous citer un autre pays dont les pratiques pourraient constituer un bon exemple à suivre pour le Canada à cet égard?
    Je n'en connais pas.
    Très bien. Nous demanderons peut-être à notre analyste de jeter un coup d'oeil là-dessus.
    En ce qui concerne les 50 mois, je comprends bien la frustration qu'on peut éprouver. Cela paraît un obstacle redoutable pour quelqu'un qui court un danger et dont la sécurité est précaire.
    L'une des pensées qui me viennent à l'esprit à ce sujet, c'est que si nous améliorons notre capacité et réduisons le temps d'attente, je présume que nous deviendrons davantage une destination de choix pour les personnes qui se trouvent en danger dans ces pays particuliers. Le fait même que le processus soit un obstacle important en amène certains à tourner les talons et à abandonner l'idée de venir au Canada.
    Donc, je me demande si nous sommes prisonniers d'une sorte de cercle vicieux, c'est-à-dire que si nous améliorons notre capacité, il y aura plus de gens qui présenteront des demandes dans les pays visés. Ce n'est pas nécessairement une mauvaise chose en soi, car cela pourrait vouloir dire que les gens qui le méritent pourront venir au Canada, mais je me demande si, au bout du compte, c'est le bon étalon de mesure à appliquer, si vous me suivez.
    N'est-ce pas comparable à un élargissement de la bande? Si vous accroissez le volume de la bande passante sur Internet, les gens commenceront à télécharger des films plus lourds, avec un taux de pixels plus élevés. Je me demande s'il y a d'autres moyens de mesurer l'efficacité.
    Mais je pourrais aussi inverser la question et simplement demander pourquoi, dans d'autres régions comme Nairobi, d'authentiques pays d'accueil de réfugiés réussissent à avoir un délai de traitement plus rapide dans un environnement où il y a de toute évidence un grand nombre de candidats au statut de réfugiés.
    J'ignore si vous avez songé à convoquer un témoin du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, mais l'organisme aurait de l'information très fiable là-dessus. Je ne connais pas les délais d'exécution des autres pays qui accueillent des réfugiés, et je ne pourrais vraiment pas vous dire s'ils sont plus courts. Mais ce serait uniquement anecdotique. J'ai entendu dire que des endroits comme la Nouvelle-Zélande, par exemple, étaient plus rapides, mais il n'y a là rien de scientifique.
    Mon impression en ce qui a trait à la Nouvelle-Zélande, à moins que les choses aient changé, c'est qu'ils sont probablement rapides pour dire non. En fait, on n'accueille pas grand monde. Rares sont les gens qui arrivent à immigrer là-bas.
    Oui. L'information dont j'ai eu connaissance concernait des familles irakiennes qui s'étaient réinstallées en Nouvelle-Zélande. Par ailleurs, les individus en question avaient de la famille là-bas, alors c'est sans doute un facteur qui a joué. Je ne sais pas exactement ce qu'il en est de la réglementation.
    Mais si c'est l'argument du déferlement de réfugiés qui nous inquiète, le gouvernement impose des quotas. Si on devait simplifier les procédures ou rendre le système plus efficace, on ne serait pas nécessairement obligé d'admettre davantage de réfugiés. On pourrait toujours imposer un plafond, en émettant seulement un certain nombre de visas par année. C'est ce qu'on fait en ce moment.
    Je pense que ce que vous ne voulez pas faire, c'est donner aux gens de faux espoirs et les amener à consacrer du temps et de l'énergie, dans un environnement foncièrement dangereux pour eux, à une entreprise qui suppose un niveau d'échec élevé, et qui les épuisera pendant un bout de temps — sans parler des dépenses. Il semble que ce serait là le résultat le moins optimal. Mais on dirait que nous avons beaucoup de cela, à l'heure actuelle.
    Oui, le taux de refus est assez élevé. Je vais vous dire à quoi j'attribue cela. Ce n'est pas seulement une question de mauvaises décisions, bien que ce soit en partie une explication. Cette situation est également liée au fait que la majorité des gens qui recourent à ce type de catégorie n'ont pas quelqu'un comme moi pour les aider. Il y a des gens qui font cela tout seul. Ce sont des gens d'église bien intentionnés de Winnipeg ou d'ailleurs, mais ce sont des profanes. Ce qu'on leur demande de faire, c'est de présenter au bureau des visas un dossier qui doit respecter certaines exigences législatives très précises. Il y a toute une jurisprudence et toutes sortes de règles sur le sujet que les gens ignorent. Quelqu'un qui n'est pas spécialiste ne les connaîtra pas.
    Les gens appliquent la définition courante de ce qu'est un réfugié, et parfois, ils parrainent des personnes qui n'entrent pas vraiment dans cette catégorie. Dès le départ, elles n'auraient probablement jamais dû entrer dans cette catégorie. Donc, on a toujours un certain taux de refus attribuable à ceux qui se trouvent dans une catégorie où ils ne devraient pas se trouver.
(1400)
    Très bien, merci. C'est vraiment très utile.
    En fait, il ne nous reste plus de temps. Y a-t-il d'autres questions?
    Monsieur Marston. Ce sera la dernière question.
    Ce n'est pas tant une question qu'un commentaire. Je suis réellement heureux de l'information que nous avons reçue aujourd'hui, mais j'aimerais que nous laissions de côté un peu notre discussion sur le processus — que nous abordons plutôt en détail —, pour parler de la question qui nous occupe, à savoir les gais et lesbiennes qui ont été inscrits sur une liste noire dans leur pays. Ce qui m'inquiète, c'est que même s'ils quittent l'Ouganda... On a déjà dit que l'attitude à l'égard des homosexuels partout en Afrique présentait une menace pour eux.
    Aux fins des délibérations de notre comité, y a-t-il une recommandation que nous pourrions adresser à notre gouvernement dans le but d'adopter un processus ou des mécanismes qui permettraient littéralement de leur sauver la vie? Ces gens sont des cibles humaines. Ils ont été identifiés. Même s'ils vont dans d'autres pays, leur statut demeure le même. Cela m'inquiète.
    Mais je tiens à vous remercier de votre témoignage, qui a été d'une grande aide. Comme je l'ai dit, je recommande fortement qu'on transmette ce témoignage aux autres comités, car il pourrait leur être précieux.
    Merci beaucoup.
    Très bien. Je pense que nous devons nous arrêter maintenant. Je vais présenter nos remerciements à notre témoin.
    Merci beaucoup, madame Desloges. Nous vous sommes très reconnaissants de votre présence parmi nous.
    Mme Chantal Desloges: Merci.
    Le président: Chers membres du comité, après que j'aurai levé la séance, la greffière vous distribuera une note de ma part concernant les repas de travail. C'est une question dont nous pourrons discuter en aparté.
    Je le répète, je vous suis très reconnaissant. Nous nous reverrons tous mardi prochain.
    La séance est levée.
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