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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 009 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 22 avril 2010

[Enregistrement électronique]

(1310)

[Traduction]

[Français]

    Nous sommes le Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Aujourd'hui, le 22 avril, nous tenons notre séance numéro 9 et nous commençons notre étude des droits de la personne au Venezuela.

[Traduction]

    J'ignorais jusqu'ici que le Venezuela porte exactement le même nom en français et en anglais et c'est une chose qu'il faudrait, à mon avis, généraliser pour tous les noms de pays, au niveau international.
    Quoi qu'il en soit, nous sommes tous ici et nous allons commencer l'audition de nos témoins dans un instant. Comme vous pouvez le voir, j'essaie de procéder rapidement, car je veux être certain de leur laisser suffisamment de temps et de nous permettre de leur poser des questions.
    Je désire informer les membres du sous-comité de ce qui s'est passé depuis notre dernière séance. Ce matin, j'ai rencontré les membres du comité directeur de notre comité principal, le Comité des affaires étrangères à qui j'ai dit qu'ils devaient s'attendre à recevoir notre rapport sur l'Iran au cours des sept prochains jours. C'est, je crois, ce qui est prévu.
    Pourrons-nous remettre ce rapport d'ici là?
    Très bien.
    J'ai informé le comité directeur que ce rapport serait accompagné d'un rapport minoritaire du Bloc québécois. Je pense que le délai est expiré, mais je vois qu'un rapport minoritaire a été soumis.

[Français]

    Est-ce que c'est le rapport minoritaire?
    Non, ça ne l'est pas.
    Le président: Non?
    M. Jean Dorion: Ça ne l'est pas.
    Non? D'accord, je comprends.

[Traduction]

    Quoi qu'il en soit, j'ai dit qu'il y en aurait sans doute un et j'étais donc dans l'erreur. C'est tout ce qui s'est passé. Les membres du comité directeur ont posé quelques questions au sujet de nos travaux futurs afin qu'ils puissent planifier leurs activités. Je les ai informés de cette étude sur le Venezuela, de même que de notre étude sur l'examen périodique universel.
    Maintenant que nous avons un vaste sujet d'étude et un grand nombre de petites questions à examiner, je vais sans doute devoir faire rapport au comité directeur à peu près une fois par mois. Nous allons prendre l'habitude de nous concerter, la greffière et moi, ce que nous n'avons pas fait par le passé, car les deux comités avaient la même greffière.
    Cela dit, nous recevons aujourd'hui trois témoins. J'ai le plaisir de dire que vous êtes nos premiers témoins pour notre étude concernant le Venezuela. Nos témoins d'aujourd'hui, qui sont tous du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, sont Alexandra Bugailiskis, sous-ministre adjointe pour l'Amérique latine et les Antilles; Jeffrey Marder, directeur pour l'Amérique du Sud et les Relations interaméricaines et Kirk Duguid, chargé de dossier pour le Venezuela.
    Normalement, nous accordons 10 minutes aux témoins. Si cela semble utile et si vous voulez tous prendre brièvement la parole, nous pouvons vous accorder un peu plus de temps. Cela veut dire simplement que nous devrons ajuster nos questions. Je vais vous laisser décider.
    Sur ce, veuillez commencer.
    Merci beaucoup, monsieur le président. J'allais vous demander de bien vouloir m'excuser si je dépassais un peu cette limite de 10 minutes. Je promets d'être plus brève la prochaine fois, mais comme c'est la première occasion que nous avons de vous parler, nous voudrions vous brosser un tableau le plus complet possible de la situation.

[Français]

    Je remercie le sous-comité de m'avoir donné la possibilité de comparaître devant lui pour aborder la question de la situation des droits de la personne dans la République bolivarienne du Venezuela. Sur le plan de la politique étrangère, le renforcement de nos relations avec l'Amérique latine et les Caraïbes est une priorité pour le gouvernement canadien. La stratégie d'engagement dans les Amériques mise sur notre longue tradition des échanges commerciaux, d'investissements, de développement, d'immigration et de liens personnels avec la région.
(1315)

[Traduction]

    Les intérêts et les relations du Canada dans la région s'orientent vers trois thèmes interdépendants et complémentaires: la gouvernance démocratique, la prospérité et la sécurité.
    En appuyant la gouvernance démocratique, le Canada s'est bâti une réputation de partenaire fiable dont la voix et l'influence comptent. La promotion et la protection des droits de la personne font partie intégrante de son action.
    Le Canada se porte à la défense des droits de la personne et défend des principes permettant aux peuples du monde entier de jouir de la liberté, de la démocratie, des droits de la personne et de la primauté du droit, des valeurs qui définissent notre pays.
    Le Canada est profondément convaincu de la valeur des principes, processus et institutions démocratiques. L'une·des priorités clés du Canada dans la région est de faire en sorte que les régimes démocratiques y soient plus efficaces, responsables et inclusifs. Le Canada est résolu à travailler avec ses partenaires dans les Amériques à I'édification d'institutions démocratiques solides, efficaces et responsables qui correspondent aux besoins et aux intérêts des citoyens et soutiennent Ie développement économique.

[Français]

    Le Canada appuie ouvertement la démocratie dans la région en offrant leadership et soutien à l'Organisation des États américains, l'OEA. La charte démocratique interaméricaine de l'OEA fait du respect des principes démocratiques fondamentaux une condition de la participation active à l'organisation.
    La charte représente un jalon important pour la région et, depuis plusieurs années, le Canada dépose devant l'Assemblée générale de l'OEA une résolution visant à appuyer la charte et son application.
    Nous croyons que l'OEA est en mesure de contribuer activement à la protection des institutions démocratiques naissantes et fragiles de cette partie du monde et de prendre des mesures préventives lorsque la démocratie est menacée.

[Traduction]

    Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international encourage les citoyens canadiens à exprimer leurs opinions en toute franchise.
    Dans le cadre du Programme Glyn Berry pour la paix et la sécurité, un million de dollars est consacré à la promotion de la démocratie locale dans les Amériques. Les projets financés visent à contribuer au renforcement de la société civile et à donner à ses membres la capacité de protéger et de promouvoir les principes de la Charte démocratique dans leurs pays respectifs.
    Le Ministère intensifie son appui à la démocratie en s'efforçant d'augmenter sa présence sur le terrain et en recueillant des pratiques exemplaires pour ensuite les appliquer. Dans le cadre de cet exercice, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international a récemment mis sur pied, à l'ambassade du Canada à Lima, une unité de travail sur la démocratie chargée d'élaborer et de promouvoir des politiques et des programmes d'aide à la démocratie dans un contexte régional. Cette unité offrira du soutien à nos missions de la sous-région des Andes pour ce qui est de recenser et de signaler les tendances et les enjeux régionaux. Elle permettra également de répondre plus efficacement aux besoins en renforcement des capacités par l'application conjointe de pratiques exemplaires dans l'ensemble de la région.
    Je vais maintenant parler plus particulièrement du Venezuela.

[Français]

    La situation des droits de la personne au Venezuela continue de susciter de l'inquiétude au sein des organisations internationales de défense des droits de la personne telles que la Commission interaméricaine des droits de l'homme, la CIDH.
    Le 24 février dernier, celle-ci a d'ailleurs publié un rapport faisant état d'une série de problèmes qui font obstacle à la pleine jouissance des droits de la personne et mettant en évidence l'absence de séparation réelle et d'indépendance entre les diverses branches du pouvoir public.
    Le gouvernement du Venezuela a vigoureusement dénoncé ce rapport ainsi que les déclarations formulées par la commission au sujet de la situation dans le pays dans son rapport annuel publié en avril.
    En plus de critiquer les membres de la commission, le président Chavez a menacé de se retirer de la CIDH, une menace qu'il a déjà faite à la suite des précédents rapports annuels.

[Traduction]

    Malgré le rejet des conclusions du rapport par le Venezuela, il est indéniable que plusieurs problèmes existent au chapitre des droits de la personne. La CIDH et le Bureau du Rapporteur spécial pour la liberté d'expression de l'OEA ont sans cesse réitéré leurs inquiétudes quant à la liberté d'expression au Venezuela. Tout récemment, à la fin du mois de mars, la CIDH a publié une déclaration dans laquelle elle questionne les mesures punitives auxquelles l'État a eu recours et qui visaient à criminaliser les défenseurs des droits de la personne et les manifestants pacifiques pour des causes sociales, soulignant que l'État vénézuélien utilise également le régime juridique pour persécuter ses opposants politiques.
    Les organisations de défense des droits de la personne au Venezuela ont rapporté, entre autres, les violations suivantes: homicides illégaux; conditions de détention difficiles; arrestations et détentions arbitraires; système judiciaire inefficace et politisé, caractérisé par des retards dans la tenue des procès, l'impunité et des violations à l'application régulière de la loi; l'intimidation et les attaques exercées par le gouvernement à l'endroit des médias indépendants et les fermetures et suspensions visant les médias; et les restrictions imposées au droit d'association des travailleurs.
(1320)

[Français]

    Il importe toutefois de signaler aussi certaines améliorations sociales au Venezuela. Selon le rapport de la CIDH, des améliorations ont été remarquées aux plans de l'accès à l'éducation de base et de la sécurité alimentaire. De même, des avancements législatifs ont été constatés en matière de protection des autochtones et des minorités.
    Cependant, le secteur des soins de santé s'est détérioré. Le chômage est en hausse. Le prix des aliments a connu une forte augmentation et les pannes d'électricité se multiplient. En raison de cette situation, les manifestations se sont intensifiées de même que la répression et les détentions des manifestants par les forces de l'ordre, alors que les lois visant à protéger les groupes marginalisés et à leur donner une voix ne sont pas appliquées.

[Traduction]

    La plupart des observateurs s'entendent pour dire que, depuis qu'il a accédé à la présidence il y a onze ans, Hugo Chávez a consolidé sa position à l'échelle nationale grâce à une série de mesures qui ont concentré les pouvoirs dans les mains de l'Exécutif. Cela a eu une incidence sur l'indépendance d'un certain nombre d'institutions et de secteurs importants, dont la magistrature. En décembre, les Nations Unies se sont dites préoccupées par l'arrestation de la juge Maria Lourdes Afiuni Mora, affirmant que l'incident était révélateur du climat de peur qui régnait au sein de la communauté juridique au Venezuela et compromettait la primauté du droit.
    Le Canada est préoccupé par les récentes tendances observées au Venezuela en matière de droits de la personne et de gouvernance démocratique, en particulier par les actions initiées par l'État contre ses opposants et son ingérence dans les affaires d'institutions indépendantes, tel que la magistrature, les médias et le secteur de l'éducation.

[Français]

    Le Canada continue de tenter d'engager un dialogue avec le gouvernement du Venezuela ainsi qu'avec la société civile sur certaines questions relatives aux droits de la personne, à la démocratie et à la primauté du droit. Le Canada appuie les efforts d'un certain nombre d'ONG vénézuéliennes. Grâce au Fonds canadien d'initiatives locales, notre ambassade offre un appui financier aux ONG travaillant sur des enjeux prioritaires comme les droits de la personne, la démocratie, la transparence et les pratiques de saine gestion publique.
    Les ONG du Venezuela ont également pu profiter du programme Glyn Berry pour leurs activités en lien avec l'efficacité et la transparence de l'administration publique, la formation pour et sur les médias et la participation électorale. L'an dernier, pour la première fois, nous avons remis le prix de l'Ambassade du Canada pour les droits de la personne à un citoyen de la République bolivarienne du Venezuela. Le récipiendaire, le défenseur des droits de la personne et des droits des prisonniers Humberto Prado, a été choisi par un groupe de Vénézuéliens bien en vue appartenant à la communauté oeuvrant dans le domaine des droits de la personne.

[Traduction]

    En janvier, le ministre d'État aux Affaires étrangères, Peter Kent, s'est rendu au Venezuela, mais aucun de ses homologues vénézuéliens n'a été en mesure de le rencontrer. Après sa visite, le ministre Kent a fait des déclarations publiques au sujet des inquiétudes dont lui avaient fait part des groupes de la société civile vénézuélienne concernant la dégradation de l'espace démocratique au Venezuela.
    Le gouvernement canadien a également publié des communiqués dans lesquels il se disait préoccupé par la suspension de six stations de radiodiffusion par câble ou satellite pour ce qui semble être des motifs d'ordre politique. Devant l'Organisation des États américains, nous avons encouragé et soutenu un débat sur la liberté d'expression dans les Amériques et en cette occasion, nous avons dénoncé haut et fort la nature restrictive des plus récentes mesures administratives adoptées par le Venezuela pour réduire le nombre des médias et restreindre la liberté de presse. En outre, dans une déclaration publiée le 25 mars, le ministre Kent a exprimé son inquiétude face à l'arrestation de l'ancien gouverneur d'État Oswaldo Álvarez Paz pour des commentaires qu'il aurait fait durant une émission d'interview-variétés diffusée à la télévision vénézuélienne.

[Français]

    Nous croyons à l'importance du soutien du Canada et de la communauté internationale pour un gouvernement démocratique et le respect intégral des droits de la personne au Venezuela. Conformément aux priorités que nous nous sommes fixées dans le cadre de notre stratégie dans les Amériques, nous continuerons d'encourager le gouvernement du Venezuela à renforcer sa protection des droits de la personne et à adopter des pratiques exemplaires en matière de gouvernance démocratique.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Vous pouvez également poser des questions aux experts qui m'accompagnent, M. Jeffrey Marder et M. Kirk Duguid.
    Merci.
    Est-ce le seul exposé que vous comptiez faire aujourd'hui? Ces personnes sont-elles là pour répondre aux questions, mais sans faire leur propre exposé?
    Il nous reste 36 minutes, ce qui n'est pas suffisant pour deux tours. Cela nous laisse le temps de faire un tour de questions de neuf minutes par parti et c'est donc ce que je suggérerais.
    J'ai ici une note indiquant que les libéraux voudraient commencer en partagent leur temps entre M. Silva et M. Cotler.
(1325)
    Nous allons avoir deux tours. Chaque tour sera d'environ 10 minutes.
    En fait, ce devra être neuf minutes pour rester dans les temps. Commençons par vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Excusez-moi, mais je vais devoir être très bref. M. Cotler et moi-même voulons tous les deux poser des questions.
    Bien entendu, une des raisons pour lesquelles nous tenons cette audience au sujet du Venezuela est que la situation nous préoccupe vivement. Les Vénézuéliens que j'ai rencontrés au Canada ou à l'étranger m'ont fait part de leurs préoccupations et de leur indignation quant à la façon dont ils ont été traités, surtout en ce qui concerne le traitement des dissidents politiques, des gens qui ne sont pas d'accord avec le gouvernement.
    Vous avez mentionné que la dégradation de l'espace démocratique au Venezuela est inquiétante. Comme vous le savez, les communautés minoritaires, particulièrement la communauté juive, ont également rétréci depuis un certain nombre d'années. Chávez et ses partisans ont tenu des discours très antisémites. Ils collaborent aussi avec l'Iran, un pays hostile qui a menacé de rayer Israël de la carte. C'est pour nous un grave sujet de préoccupation que je crois nécessaire d'aborder de façon beaucoup plus sérieuse.
    Par l'entremise de ses animateurs et de ses porte-parole à la télévision, Chávez… En fait, un de ses principaux alliés, qui a sa propre émission de télévision très populaire, porte malheureusement le même nom que moi. Ce personnage est ouvertement antisémite et blâme les Juifs pour tous les malheurs du monde. Même si cela ne sort pas de la bouche de Chávez, son entourage et ses porte-parole officiels ont tenu des propos extrêmement antisémites. Ils se sont également montrés hostiles envers la communauté juive dont les membres craignent pour leur vie. C'est une des raisons pour lesquelles un grand nombre d'entre eux sont partis ou essaient de quitter le Venezuela.
    Je désire savoir quel genre d'aide nous apportons, sur le plan de l'immigration, pour aider ceux qui viennent ici. Également, rencontrons-nous les dirigeants de l'opposition? Si nous ne pouvons pas rencontrer les ministres et les représentants du gouvernement, ce que je trouve absolument scandaleux, faisons-nous des efforts pour rencontrer les dirigeants de l'opposition à l'intérieur du pays?
    Je vais faire une ou deux observations après quoi je céderai la parole à mon collègue, M. Marder.
    Comme vous le savez, depuis la dégradation des relations entre le gouvernement vénézuélien et le gouvernement d'Israël, l'ambassade a été fermée et le Canada assure des services consulaires pour les membres de la communauté juive au Venezuela. Je dois dire que la coopération entre l'ambassade du Canada et le gouvernement vénézuélien a été excellente. Notre sécurité a été assurée chaque fois qu'il y a eu un problème et le gouvernement a certainement respecté le fait que nous puissions desservir la communauté juive pendant cette période.
    BIen entendu, nous partageons vos préoccupations. Nous continuons à surveiller la situation. L'ambassade rencontre régulièrement des membres de la communauté juive et au cours de sa visite au Venezuela, le ministre Kent a également eu l'occasion de les rencontrer.
    Nous partageons ces préoccupations et nous surveillons la situation, mais comme je l'ai dit, la coopération du gouvernement vénézuélien a été bonne jusqu'ici.
    J'ajouterais que j'ai eu le plaisir d'accompagner le ministre Kent au Venezuela en janvier. Il a rencontré un grand nombre de représentants de la communauté juive. Nous avons d'ailleurs eu une réunion dans la synagogue Maripérez qui avait été vandalisée l'année dernière.
    Nous avons pu avoir des bonnes discussions et nous avons eu l'impression que les dirigeants de la communauté juive au Venezuela apprécient vivement le soutien qu'ils ont reçu du Canada. En même temps, comme l'a souligné Alexandra Bugailiskis, nous représentons les intérêts d'Israël au Venezuela en vertu de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques et nous communiquons régulièrement avec l'ambassade d'Israël, ici, à Ottawa.
    Vous avez posé une question au sujet de nos contacts avec les membres de l'opposition. La mission de l'ambassade du Canada au Venezuela, comme celle de nos autres ambassades dans le monde, consiste notamment à rencontrer un vaste échantillon des dirigeants du pays et à communiquer régulièrement tant avec les membres de la société civile qu'avec l'opposition politique. Nous avons une ambassade très active à Caracas qui rencontre les représentants de l'opposition ainsi que les représentants du gouvernement, quand c'est possible, de façon à défendre les intérêts canadiens.
    Nous sommes également très actifs en ce qui concerne nos contacts avec la société civile vénézuélienne. Nous rencontrons régulièrement un vaste éventail d'organismes de la société civile. Cela fait partie du travail habituel de l'ambassade du Canada à Caracas.
(1330)
    Je vais faire suite aux questions de mon collègue, Mario Silva.
    J'ai assisté récemment au deuxième Sommet annuel pour les droits de l'homme, la tolérance et la démocratie, à Genève, où nous avons entendu les témoignages de défenseurs vénézuéliens des droits de la personne, d'avocats qui ont défendu des prisonniers politiques. Tant l'année dernière que cette année, leurs témoignages faisaient état d'intimidation, de répression et de la criminalisation de la dissidence au Venezuela. Les témoins ont parlé des poursuites intentées contre des défenseurs des droits de la personne et des persécutions dont ils sont victimes. Ils ont dit que les forces de sécurité se faisaient les complices de ces violations des droits de la personne qui sont favorisées par une culture de l'impunité, qu'il y a un antisémitisme sanctionné par l'État sans rapport avec les liens avec l'Iran et qu'il y a une répression contre les médias ainsi que les secteurs de la justice, de l'éducation et de la culture, entre autres.
    Vous avez mentionné la surveillance à laquelle le gouvernement canadien se livre par l'entremise de son ambassade et par d'autres moyens. Ma question porte sur l'usage que nous faisons des mécanismes régionaux et internationaux de protection des droits de la personne non seulement pour nous faire entendre, mais également pour exiger des comptes des autorités vénézuéliennes. Je voudrais surtout savoir comment nous leur faisons connaître non seulement nos préoccupations, mais notre réprobation à l'égard de cette répression de plus en plus forte. Nous contentons-nous de surveiller la situation sans prendre d'initiatives ou sans faire de démarches pour manifester notre désapprobation?
    Merci beaucoup.
    Dans ma déclaration préliminaire, j'ai dit que nous avions demandé la tenue d'une réunion spéciale de l'Organisation des États américains sur la liberté d'expression. À l'occasion de cette réunion, nous avons fait part, très énergiquement, de nos préoccupations à l'égard de la situation au Venezuela et de la dégradation de la liberté d'expression.
    Par ailleurs, nous soutenons vigoureusement la Commission interaméricaine des droits de l'homme. Nous finançons cet organisme et nous soutenons largement ses activités. Nous prenons très au sérieux les critiques et les recommandations qu'il a formulées sur la situation au Venezuela. Nous avons également profité d'autres occasions pour soulever ces questions aux Nations Unies. Je vais laisser mon collègue vous citer d'autres exemples.
    Nous sommes extrêmement actifs, je crois, surtout dans la région. Nous croyons important de pouvoir discuter de nos préoccupations dans la région étant donné qu'en tant que voisins, nous devons nous soucier du respect des principes et des pratiques démocratiques dans les institutions de notre hémisphère.
    Pourrais-je ajouter une ou deux choses? La Commission interaméricaine des droits de l'homme a souligné dans son rapport qu'elle n'a pas été invitée au Venezuela. Comme l'a dit Alexandra, le Canada est un ardent défenseur de la Commission interaméricaine des droits de l'homme et des autres mécanismes du Système interaméricain des droits de la personne, comme le Rapporteur spécial sur la liberté d'expression, par exemple, et nous invitons vivement le Venezuela à accepter les visites de la Commission et des autres mécanismes qui désirent visiter le pays.
    Dans sa déclaration préliminaire, Alexandra a également mentionné notre appui à la société civile, surtout par l'entremise de notre fonds Glyn Berry, qui est administré par le ministère des Affaires étrangères. Ce fonds favorise l'engagement des citoyens dans le processus démocratique. Depuis deux ans, il a consacré à cette région environ 1 million de dollars par année, dont plus de la moitié a servi à financer des organismes de la société civile vénézuélienne.
    Alexandra a également mentionné que, l'année dernière, notre ambassade à Caracas a remis, pour la première fois, le prix de l'ambassade du Canada pour les droits de la personne. Ce prix a été décerné par une commission indépendante dirigée par une des principales universités de Caracas. Le lauréat était Humberto Prado qui dirige un groupe de défense des droits des détenus. Ce prix lui a certainement valu beaucoup de publicité. Il a été reçu par les médias et a donné de nombreuses interviews à la radio et à la télévision vénézuéliennes. Il a pu venir au Canada où il a eu plusieurs réunions avec les autorités et a visité diverses prisons. Il est retourné au Venezuela pour faire une tournée des régions du pays et attirer l'attention sur la question des droits des détenus au Venezuela, en plus de parler de ce qu'il a appris au Canada.
    Ce prix démontre certainement que le Canada a fait des efforts pour renforcer l'importance des droits de la personne au Venezuela. Cela a donné, je crois, d'assez bons résultats.
(1335)
    Cela met fin au premier tour de questions.
    Nous passons maintenant à M. Dorion, s'il vous plaît.

[Français]

    Madame Bugailiskis, vous avez parlé de la situation récente des droits de la personne au Venezuela. On sait que le problème des droits de la personne dans ce pays n'est pas récent. Le Venezuela a connu, dans un passé pas très lointain, des régimes extrêmement autoritaires.
    D'après ce que vous en savez, est-ce que le Canada, à cette époque, réagissait contre les abus de pouvoir au Venezuela? Je remarque que, pour la première fois, on crée un prix des droits de la personne. L'ambassade a un prix des droits de la personne pour le Venezuela. Comment expliquez-vous qu'il n'y ait pas eu une telle initiative à l'époque où il y avait certainement des abus des droits de la personne très considérables au Venezuela?
    Ma deuxième question porte sur un autre sujet. Est-ce que d'après vous il y a un lien entre l'attitude du Canada, sa sensibilité nouvelle à la question des droits de la personne au Venezuela, et l'évolution générale des relations diplomatiques et des relations économiques entre le Venezuela et le Canada? Est-ce qu'on estime que les intérêts canadiens dans ce pays sont menacés par le régime actuel? Quelle évaluation fait-on de la situation des intérêts canadiens au Venezuela dans votre ministère?
    Je vous remercie de votre question.
    Je n'ai pas toute l'histoire des relations diplomatiques entre le Canada et le Venezuela avec moi, mais depuis longtemps, les droits humains font partie des sujets traités par notre diplomatie.

[Traduction]

    Je ne pense pas que les choses aient changé sur ce plan.
    Bien entendu, je pense qu'au fil des années notre approche s'est améliorée et nous a mieux permis de communiquer d'un bout à l'autre de la région, de recueillir des renseignements et de réagir par l'intermédiaire des organismes régionaux et internationaux. Je ne pense pas que cela ait changé, mais bien entendu notre politique s'est adaptée compte tenu de l'évolution des relations diplomatiques.
    Pour répondre à votre deuxième question concernant les réactions sur le plan économique, nous espérions vivement qu'il n'y en aura pas. On craint toujours ces réactions lorsqu'on soulève des préoccupations à l'égard des droits de la personne. J'ai moi-même passé plusieurs années comme ambassadeur à Cuba où nous avons des relations économiques très dynamiques ainsi qu'un dialogue très franc au sujet des droits de la personne. Nous avons réussi à faire en sorte que ce dialogue ne ternisse pas nos relations commerciales. Je ne peux pas dire que nos relations économiques aient été directement touchées jusqu'ici, au Venezuela. Cela dit, il n'est pas toujours facile de faire des affaires au Venezuela étant donné la nature de l'administration.
    Je m'arrêterai là.

[Français]

    J'aimerais ajouter une chose.

[Traduction]

    Je pense qu'Alex est peut-être un peu trop modeste. Elle a dirigé le ministère vers un engagement plus ciblé dans les Amériques ces dernières années.
    Dans le cadre des processus internes du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, nous avons décidé d'examiner les enjeux de façon plus thématique et nous avons donc dû procéder à une petite réorganisation et réorientation dans le secteur des Amériques. Cela a été fait sous la direction d'Alex et nous a permis d'insister davantage sur la démocratie et la question des droits de la personne dans l'hémisphère. Nous voyons certainement la possibilité de faire ce genre de travail au Venezuela.
    Dans sa déclaration préliminaire, Alex a mentionné notre unité andine sur la gouvernance démocratique qui est entrée en service l'automne dernier à notre ambassade de Lima, au Pérou. Je pense que, ces dernières années, nous avons essayé de créer un ministère des Affaires étrangères plus souple et plus moderne. Cela consiste notamment à centrer notre attention sur différents thèmes et la démocratie et les droits de la personne occupent une place essentielle dans notre engagement sur la scène mondiale et certainement dans les Amériques. Cela nous a ouvert de nouvelles possibilités de focaliser de différentes façons notre engagement au Venezuela et dans d'autres pays de l'hémisphère.
(1340)

[Français]

    Je vous remercie.
    Vous disposez d'encore quelques minutes.
    La relation privilégiée qu'entretiennent Cuba et le Venezuela fait-elle partie des préoccupations du ministère des Affaires étrangères? Cela explique-t-il en partie l'attitude critique que vous observez envers le régime du Venezuela?
    C'est une question vraiment intéressante parce que nous sommes en train de célébrer 65 années de relations avec Cuba. Comme je l'ai dit, nous avons une assez bonne relation avec Cuba, et ce, depuis longtemps. C'est vrai, il y a des différences de point de vue. Nous n'acceptons pas la situation des droits humains à Cuba, mais en même temps, nous reconnaissons qu'il y a eu des améliorations sur le plan de l'éducation et de la santé à Cuba.

[Traduction]

    Il faut reconnaître les progrès réels que Cuba a fait dans ces domaines. Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, nous constatons certainement des améliorations sur le plan social, au Venezuela. Nous aimerions qu'il y ait des bonnes relations entre tous les pays de la région et c'est pourquoi nous sommes membres de l'Organisation des États américains. Nous aimerions que Cuba se joigne à l'OEA et fasse partie de la famille. Nous nous engageons très activement chaque fois qu'il y a des conflits dans la région et c'est le cas en ce qui concerne les relations entre la Colombie et l'Équateur. Nous finançons les bons offices de l'OEA.

[Français]

    Pour nous, les relations entre Cuba et le Venezuela ne constituent pas un problème.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Allez-y, monsieur Marston, s'il vous plaît.
    Merci infiniment d'être venus ici aujourd'hui. Il est très important pour nous que vous nous aidiez à entreprendre cette étude en nous donnant un aperçu général comme vous l'avez fait, car il y a toujours différents mythes et points de vue à l'égard du Venezuela ou de M. Chávez.
    J'ai un certain nombre de questions. Premièrement, il semble y avoir eu une transition évidente par rapport au travail en Afrique. Les priorités semblent être redirigées vers l'Amérique du Sud. Est-ce une réalité ou le fruit de l'imagination de certaines personnes?
    Ensuite, vous avez dit qu'il était assez problématique de faire des affaires avec l'administration de ce pays. La situation s'est-elle aggravée depuis l'arrivée de M. Chávez par rapport à ce qu'elle était avant?
    Je serais également curieux de savoir ce que vous pensez de la situation des droits de la personne au Venezuela depuis 30 ans. Nous avons entendu parler de la communauté juive; je voudrais savoir quelle est l'importance de cette communauté et comment le gouvernement traite ses autres citoyens par rapport à ce groupe. Cette communauté est-elle marginalisée à tel point que sa sécurité est en danger?
    Je vais m'arrêter là. Cela englobe divers sujets.
    Je pourrais peut-être répondre à la première partie, monsieur Marston, et laisser les autres pour mes collègues.
    Pour ce qui est des priorités dans les Amériques, c'est en 2007, je crois, que le premier ministre, Stephen Harper, a décidé qu'une des principales priorités de sa politique étrangère serait le renouvellement et le renforcement de nos relations avec les Amériques. J'ai eu la chance de participer à cet effort. C'est nouveau, je pense, en ce sens que notre approche dans les Amériques repose, comme nous l'avons mentionné tout à l'heure, sur les trois piliers ou priorités que sont la démocratie, la sécurité et la prospérité.
    Comme un de mes premiers postes était en Afrique, je ne suis pas d'accord avec les gens qui s'imaginent que ce travail s'est fait aux dépens de l'Afrique. Il n'en est rien. Si vous examinez les résultats, les engagements que le gouvernement actuel a pris à l'égard du G8 et du financement de l'Afrique ont été maintenus.
    En fait, pour ce qui est de notre engagement dans les Amériques, ils ne représentent pas un très gros montant d'argent. J'en suis d'ailleurs fière, car nous avons surtout essayé d'établir des liens durables. Ces liens, qui sont noués grâce à des accords de libre-échange, une coopération dans le domaine de l'aviation ou la mobilité de la jeunesse ne coûtent pas cher, mais établissent des relations durables à très long terme entre le Canada et la région. Bien entendu, un financement a été assuré par l'entremise de l'ACDI et nous avons certainement accru notre présence en Haïti avec l'aide au développement que nous apportons à Haïti et aux Caraïbes. Toutefois, ces fonds supplémentaires provenaient en grande partie de l'augmentation de l'enveloppe de l'aide publique au développement et non pas aux dépens de l'Afrique.
    Je vais céder la parole à M. Marder pour répondre à la deuxième partie de la question de M. Marston.
(1345)
    Il y avait une question concernant l'évolution de nos relations et qui reprenait une question antérieure. Je ne sais pas si je suis en mesure de parler de l'évolution des relations du Canada avec le Venezuela depuis 30 ans ou même depuis l'arrivée d'Hugo Chávez, qui est président depuis plus de 10 ans. Comme cela correspond à peu près à mon entrée aux Affaires étrangères canadiennes, je ne suis pas bien placé pour donner une perspective historique aussi vaste.
    Pour revenir à la question de l'antisémitisme et du traitement de la communauté juive, cette dernière n'est pas très nombreuse. Je n'ai pas les chiffres sous la main, mais je dirais qu'il s'agit d'environ 20 000 personnes. Nous pourrons essayer de trouver ces chiffres pour vous. Ce n'est pas une des communautés les plus importantes d'Amérique latine et elle est constituée, à peu près à parts égales, de la communauté ashkenaze et de la communauté sépharade.
    Il y a eu récemment un certain nombre d'attaques antisémites. Celle dont on a le plus parlé était le vandalisme antisémite contre la synagogue Maripérez, l'année dernière. Le gouvernement n'a pas réagi immédiatement, mais quelques jours après l'incident, le ministre des Affaires étrangères est venu à la synagogue rencontrer les membres de la communauté juive. Il y a peut-être eu certaines accusations selon lesquelles le gouvernement aurait orchestré cette attaque, mais je n'en ai vu aucune preuve et je crois que le gouvernement a entrepris une enquête et qu'une ou plusieurs personnes ont été arrêtées.
    Comme je l'ai dit, nous continuons de surveiller la situation et nous restons en contact très étroit avec la communauté juive à Caracas.
    Cela m'amène à une autre question. J'en conclus que le problème ne se pose peut-être pas au niveau gouvernemental, mais davantage au niveau individuel au lieu d'être systémique.
    Le fait que le gouvernement ait rompu ses relations diplomatiques avec Israël suite à l'incursion israélienne à Gaza nous donne une bonne idée, je crois, de sa position géopolitique. En même temps, je dirais que depuis un an environ, le gouvernement a fait des efforts pour montrer que ses opinions vis-à-vis d'Israël ou des agissements de l'État d'Israël n'ont rien à voir avec ses opinions à l'égard de la communauté juive du Venezuela qu'il considère comme faisant partie intégrante de la République du Venezuela.
    Encore une fois, j'en déduis que c'est positif. Pendant un an, nous avons étudié la situation en Iran et le genre de discours qui émane du gouvernement par opposition à ce qu'il advient des personnes sur le terrain. Ce que vous nous dites me rassure un peu. Je pense que nous devons nous montrer prudents, car étant donné tous les discours qui émanent de ces deux gouvernements à l'égard d'Israël, nous avons tendance à voir les choses uniquement dans cette optique lorsqu'on examine un pays.
    Une autre partie de ma question portait sur la situation des citoyens ordinaires par rapport à celle de la communauté juive sur le plan des droits de la personne. D'après ce que j'ai entendu, j'ai l'impression qu'elle est à peu près la même.
    Désolée, pourriez-vous répéter la dernière partie de la question?
    Je parlais des discours concernant Israël et le traitement des Juifs par rapport au traitement des autres citoyens du pays en ce qui concerne les droits de la personne. J'ai l'impression que c'est à peu près la même chose. Les Juifs ne sont pas particulièrement maltraités par rapport aux autres citoyens, et les discours du gouvernement sont dirigés vers l'extérieur plutôt que l'intérieur du pays.
    Je suis d'accord. Vous avez toutefois mis en lumière, je crois, la possibilité que les discours contre un gouvernement ou une politique puissent être mal interprétés. Certains d'entre vous autour de cette table l'ont peut-être mal interprété et cela pourrait arriver aussi au Venezuela. Ce genre rhétorique a tendance à être mal interprété et risque d'être appliqué de façon plus directe. Nous essayons de vous faire comprendre qu'à notre avis, ce n'est pas la politique du gouvernement, mais que cela pourrait malheureusement être un des résultats.
(1350)
    C'est ce qui est arrivé à Thomas Becket.
    Pour revenir à la question des droits de la personne, je viens du mouvement syndical canadien. Dans votre discours, vous avez émis des préoccupations au sujet du droit d'association. Vous faisiez allusion, je suppose, à l'impossibilité pour les syndicats de se réunir et de poursuivre leurs activités. Y a-t-il des relations particulièrement négatives entre le gouvernement et les syndicalistes dans ce pays?
    Je vais laisser Jeff faire une recherche à ce sujet.
    Je parlerai de façon un peu plus générale. Je vais laisser Jeff chercher des renseignements plus précis concernant les syndicats.
    Je vais simplement vous demander de le faire rapidement pour que nous restions dans les temps.
    Je vais aborder la question de la restriction des libertés. Nous sommes très inquiets en ce qui concerne les médias et la tendance à cibler les médias de l'opposition. Un sain débat se déroule actuellement au Venezuela. Il y a une certaine liberté de la presse, mais dernièrement, certains éléments des médias qui ont été ciblés ou fermés, surtout par des mesures administratives, semblaient presque exclusivement du côté de l'opposition. Cela nous inquiète vivement.
    Je vais demander à Jeff de répondre au sujet des syndicats.
    Brièvement, j'aurais une ou deux choses à dire. Les entreprises nationalisées du Venezuela n'ont plus de syndicats indépendants et le mouvement syndical s'aligne… c'est l'instrument du Parti socialiste au pouvoir. Il y a des exemples d'agitation ouvrière. Ce n'est peut-être pas au centre de certaines des choses dont Alex Bugailiskis a parlé dans sa déclaration préliminaire, mais la Commission interaméricaine des droits de l'homme a fait mention des problèmes des syndicats au Venezuela dans son rapport annuel de l'année dernière.
    Est-ce M. Hiebert ou M. Sweet?
    Monsieur Hiebert, allez-y, s'il vous plaît.
    Merci et je vous remercie tous les deux pour votre présence ici. J'ai vraiment apprécié le bref aperçu général que vous nous avez donné. Je voudrais seulement approfondir un peu l'historique de certains des problèmes auxquels ce pays est confronté.
    Pourriez-vous nous donner une idée des changements survenus depuis l'arrivée de M. Chávez? Quelle était la situation, peut-être pas il y a 30 ans, mais immédiatement avant lui et ce qu'on appelle, je crois, la révolution bolivienne ou bolivarienne? Quels ont été les effets de ces politiques sur les droits de la personne au cours de la dernière décennie?
    C'est une très bonne question. Je fais une pause parce qu'il pourrait être assez long d'y répondre de façon complète.
    Le président Chávez a été élu il y a près de 11 ans, il a été réélu plusieurs fois et les référendums confirment sa forte popularité. Quand vous avez une telle popularité, vous risquez de concentrer le pouvoir entre vos mains et c'est la principale tendance que nous avons constatée. Nous ne pouvons pas dire, je crois, que la Constitution a été violée, mais il a certainement réussi à élargir la présence de l'Exécutif dans l'ensemble du pays.
    Plusieurs exemples en témoignent et, comme nous l'avons dit, les groupes d'opposition semblent être ciblés. C'est surtout évident en ce qui concerne la fermeture des médias, car ils appartiennent généralement à l'opposition ou expriment des points de vue opposés. Les déboires d'un maire élu de la ville de Caracas en sont en bon exemple. Le maire Ledezma a été élu de façon démocratique. Il s'est alors rendu compte que son budget avait été suspendu et que le président avait créé un nouveau poste qui lui enlevait ses pouvoirs municipaux.
    Ce sont là des mesures plutôt extrêmes, qui restent sans doute constitutionnelles, mais qui commencent à dépasser les bornes. Ces tendances nous inquiètent vivement. Il y a aussi la polarisation de la société.
    Quelle était la situation avant l'élection de M. Chávez en 1998?
(1355)
    Avant son élection, du moins en ce qui concerne les médias publics, il était beaucoup plus facile d'y avoir accès. Cette tendance à cibler les médias n'existait pas. C'est là un changement important depuis l'accession au pouvoir du président Chávez.
    Comme je l'ai mentionné, il y a eu également des changements positifs. Bien entendu, c'est un gouvernement qui met l'accent sur l'égalité sociale et qui a donc pris des mesures pour essayer de réduire les inégalités dans une situation très inégale. Cela ne fait aucun doute.
    Jeffrey, avez-vous quelque chose à ajouter?
    J'ajouterais seulement une chose à ce qu'a dit Alexandra. À mon avis, le président Chávez a fait davantage que les régimes précédents pour assurer la participation des citoyens. Son gouvernement a certainement cherché à travailler avec les secteurs les plus pauvres de la société vénézuélienne, peut-être pour répondre à un besoin auquel les régimes précédents n'avaient pas répondu, selon lui.
    Par conséquent, vous dites qu'il doit sa popularité aux changements qu'il a apportés dans le pays, malgré les violations des droits de la personne.
    Il jouit d'une grande popularité auprès des classes inférieures qui ont obtenu certains avantages matériels depuis son arrivée au pouvoir et nous sommes les premiers à reconnaître ces efforts. Toutefois, nous ne pensons pas que ces changements exigent de supprimer les droits humains et les droits démocratiques fondamentaux. Nous croyons qu'il est possible d'apporter ces changements tout en respectant les droits individuels.
    Je dispose seulement de deux minutes avant de céder la parole à mon collègue.
    Dans le mémoire que nous a remis la Bibliothèque du Parlement, j'ai lu que les médias étaient punis s'ils critiquaient les autorités. Il est question d'une peine de six à 30 mois d'emprisonnement pour quiconque insulte le président ou un représentant gouvernemental subalterne. On parle de la corruption policière. Vous avez mentionné, dans votre déclaration préliminaire, qu'il y a des exécutions sommaires. Comment ces faits sont-ils rapportés? Dispose-t-on de ressources suffisantes pour signaler ces abus? Avons-nous une bonne idée de ce qui se passe ou sommes-nous aveuglés par le manque de renseignements complets?
    Notre ambassade est extrêmement active à Caracas. Elle rencontre régulièrement, presque quotidiennement, divers groupes de la société civile. Bien entendu, elle écoute les médias et va voir ce qui se passe dans les rues. Nous sommes bien servis sur le plan de l'information. Un certain nombre de groupes visitent le Venezuela et nous font rapport à leur retour, soit à l'ambassade soit ici. Néanmoins, comme nous l'avons mentionné tout à l'heure, nous nous inquiétons de ce que le gouvernement n'autorise pas la Commission interaméricaine des droits de l'homme à entrer dans le pays.
    Nous pourrions toujours utiliser plus de ressources, sans aucun doute, mais je pense que nous avons une assez bonne compréhension de ce qui se passe à l'intérieur du pays. Les éléments de ma déclaration que vous avez mentionnés proviennent de ces rapports ou de ceux des organismes non gouvernementaux qui sont actifs au Venezuela.
    Je tiens à exprimer la profonde inquiétude de tous les membres du comité à l'égard de la minorité juive du Venezuela. En fait, j'ai reçu des appels, dans mon bureau de circonscription, de personnes qui essaient d'immigrer au Canada.
    Je suis vraiment inquiet quand un ministre de l'intérieur déclare qu'à son avis, la police est responsable de 15 à 20 p. 100 des crimes commis dans le pays et même des plus violents. Dans votre déclaration, vous avez mentionné que le ministre Kent avait parlé d'Oswaldo Álvarez Paz, qui a été mis en détention. Quand on voit que même les élites ne sont pas à l'abri de ce genre de mesures punitives, cela montre qu'une poigne de fer empêche les gens de parler, d'exercer leur liberté d'expression ou de défendre les droits de la personne.
    Vous avez parlé de l'Organisation des États américains et vous avez dit qu'à votre avis l'OEA pourrait et devrait jouer un rôle actif en soutenant les institutions démocratiques naissantes ou fragiles. Comme l'OEA pourrait-elle le faire? De quels instruments dispose-t-elle? Comment s'acquitterait-elle de cette mission?
(1400)
    Merci beaucoup pour cette question.
    Quand nous avons adhéré à l'Organisation des États américains, il y a plus de 20 ans, une des premières mesures que le Canada a prises a été d'établir une unité pour la promotion de la démocratie. Elle porte maintenant un nom différent, mais elle a continué à se développer et à prendre de l'expansion. Jusqu'ici, elle a consacré une bonne partie de son expertise à l'observation des élections. L'OEA a acquis beaucoup d'expérience et de compétence à cet égard. C'est, je pense, un des éléments fondamentaux des bonnes démocraties.
    Depuis toujours, nous faisons valoir que l'Organisation des États américains peut faire plus. À notre avis, le renforcement des capacités est essentiel. Les rapports sont une chose, surtout lorsqu'ils émanent d'autres gouvernements. Toutefois, il est beaucoup plus important de donner à la société civile le pouvoir d'exiger des comptes de son gouvernement à l'égard des violations ou du non-respect des droits de la personne. Nous estimons que l'Organisation des États américains devrait fournir de plus en plus une assistance technique. Nous assurons nous-mêmes un financement sur ce plan-là.
    D'autre part, lorsque la situation atteint un certain seuil critique, cela devrait activer l'OEA. Elle a un conseil permanent et les représentants du pays ainsi que nos ambassadeurs peuvent faire des déclarations aux réunions de ce conseil. Nous l'avons fait à plusieurs reprises, non seulement pour le Venezuela, mais pour d'autres pays.
    Encore une fois, nous pensons que non seulement les pays, mais également les autres branches du pouvoir devraient être en mesure de faire connaître leur opinion. Jusqu'ici, c'est seulement quand le pouvoir exécutif d'un pays soumet à l'OEA une grave menace à la démocratie qu'il est entendu. Nous croyons que ce recours devrait être également ouvert à la magistrature et au pouvoir législatif.
    Un bon exemple serait le cas du Venezuela où nous constatons une tendance à ne pas respecter le droit de la magistrature d'être entièrement indépendante. Comme je l'ai dit, je souhaiterais que les autres branches du gouvernement puissent faire part de leurs préoccupations à l'OEA avant une crise majeure comme celle que nous avons vue au Honduras il y a un an environ.
    Le temps imparti est écoulé.
    Toutefois, si j'ai votre consentement unanime, je voudrais poser moi-même une question. Êtes-vous d'accord, chers collègues?
    Des voix: D'accord.
    Le président: Très bien.
    Melissa, notre analyste, a préparé un certain nombre de questions. L'une d'elles n'a pas été posée et comme cela pourrait nous être utile à tous, je vais simplement la soulever. C'est la question numéro 4 dans votre liste.
    Le gouvernement vénézuélien a récemment menacé de se retirer de la Commission interaméricaine des droits de l'homme et de l'Organisation des États américains. Quels incidents cela aurait-il sur les relations entre le Canada et le Venezuela?
    Je pense que cela affaiblirait ces relations, car nous avons beaucoup d'activités conjointes par l'entremise de l'Organisation des États américains et de la Commission interaméricaine des droits de l'homme. Tous les trois ou quatre ans, un sommet des Amériques est organisé pour permettre aux chefs d'État de discuter ensemble des problèmes de l'heure, comme nous l'avons fait à Trinité-et-Tobago, il y a un an, au sujet de la crise financière et de la difficulté de rebâtir nos économies. Tout ce qui pourrait réduire la possibilité de tenir des réunions à un très haut niveau affaiblirait ces relations.
    Nous espérons que cette menace ne sera pas mise à exécution et que le gouvernement vénézuélien manifeste seulement sa réprobation à l'égard du dernier rapport. Nous l'encourageons à… nous avons été nous-mêmes critiqués par des organisations internationales par le passé. Nous avons ouvert nos portes. Nous leur avons demandé de venir jeter un coup d'oeil. Nous avons essayé de répondre à leurs critiques avec un dialogue constructif et un engagement et nous espérons que c'est ce que fera le gouvernement vénézuélien.
    Merci infiniment et je vous remercie tous de m'avoir laissé poser cette dernière question.
    Merci.
    Nous avons dépassé l'heure prévue et la séance est donc levée.
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