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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 007 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 26 novembre 2020

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

     Je déclare la séance ouverte.
    Bienvenue à la septième séance du Comité permanent des finances de la Chambre des communes.
    Conformément à la motion adoptée par le Comité le jeudi 19 novembre, le Comité se réunit pour étudier le rapport de la Banque du Canada sur la politique monétaire. La séance d’aujourd’hui se déroule de façon hybride, conformément à l’ordre adopté par la Chambre le 23 septembre. Les délibérations seront disponibles sur le site Web de la Chambre des communes.
    Je vous rappelle que l'écran de la webémission montre toujours la personne qui parle, plutôt que l'ensemble du Comité.
    Pour assurer le bon déroulement de la réunion, j’aimerais rappeler quelques-unes des règles. Comme nous avons des témoins aujourd'hui, je vais les répéter. Les députés et les témoins peuvent s’exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d’interprétation sont disponibles pour cette réunion. Au bas de votre écran, vous avez le choix entre l’audio en français ou en anglais. Pour les membres qui participent en personne, procédez comme vous le faites habituellement lorsque le comité plénier se réunit en personne dans cette salle. Nous sommes quatre ici. Avant de parler, veuillez attendre que je vous donne la parole. Si vous êtes en vidéoconférence, veuillez cliquer sur l’icône du microphone pour l'allumer. Je vous rappelle que tous les commentaires des députés et des témoins doivent être adressés à la présidence. Lorsque vous ne parlez pas, votre microphone doit être en sourdine.
    Les membres du Comité m’ont envoyé l’ordre des intervenants, alors nous allons le suivre.
    J’aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins. Nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui le gouverneur de la Banque du Canada, M. Tiff Macklem.
    Permettez-moi, monsieur Macklem, de vous féliciter de votre nomination au poste de gouverneur de la Banque du Canada et de vous souhaiter la bienvenue au Comité. Je sais que vous avez déjà comparu devant le Comité, et je suppose que vous l’avez fait avant que la plupart d'entre nous ne siègent ici, mais je vous souhaite encore une fois la bienvenue.
    Le gouverneur est accompagné de la première sous-gouverneure de la Banque du Canada, Carolyn Wilkins.
    Madame Wilkins, vous avez comparu à maintes reprises devant les membres du Comité. Je sais que vous allez bientôt vous lancer dans d’autres entreprises. Tous nos vœux de succès vous accompagnent. Je tiens à vous remercier sincèrement du travail que vous avez accompli à la Banque du Canada au cours des dernières années et de vos comparutions devant le Comité. Je pense qu’aucun député ne peut nier que vous nous avez toujours informés de façon directe et utile. Je vous remercie donc pour vos comparutions devant le Comité et votre travail au sein de la Banque du Canada. Nous vous souhaitons bonne chance dans vos nouvelles entreprises.
     Je vous cède la parole, monsieur Macklem. La parole est à vous. Vous avez plusieurs remarques à faire, après quoi nous passerons aux questions.
    Je crois que Mme Jansen sera la première à poser des questions, suivie de M. Fraser.
    Je vais partager mon temps avec M. Falk.
    D’accord, c’est parfait. Merci.
    Monsieur Macklem, allez-y.
    Merci, monsieur le président, de vos aimables paroles à notre intention. La première sous-gouverneure Wilkins et moi-même sommes très heureux d’être de retour pour discuter de notre rapport sur la politique monétaire avec vous et le Comité, ainsi que des perspectives de l’économie canadienne.
    Le principal message à retenir est que nous allons nous sortir de cette pandémie, mais ça ne sera pas facile, et la Banque du Canada sera là pour la population à chaque étape.
    Permettez-moi de résumer brièvement nos perspectives économiques.

[Français]

     Notre projection repose fortement sur nos hypothèses à propos du virus.
     Nous avons postulé que les autorités n'auront pas à réimposer des mesures de confinement aussi vastes et généralisées qu'au printemps. Toutefois, on peut s'attendre à ce que des restrictions localisées soient imposées pour contrer les vagues successives du virus. Nous avons aussi postulé que des vaccins seront offerts à la population générale d'ici le milieu de l'année 2022. Depuis la publication du « Rapport sur la politique monétaire », ou RPM, il y a quatre semaines, les nouvelles concernant les vaccins sont prometteuses. Cependant, il y a de plus en plus de cas et les mesures de confinement ont été resserrées.
    Depuis juin, l'économie canadienne a nettement rebondi avec la réouverture de nombreux commerces. Elle a regagné près de 80 % des emplois perdus depuis le début de la pandémie, mais plus de 600 000 emplois n'ont toujours pas été retrouvés. Les pertes d'emploi actuelles sont concentrées dans le secteur des services. Il s'agit surtout d'emplois moins bien payés. C'est pourquoi les mesures de soutien au revenu mises en place ont été si importantes pour la reprise.
    Nous jugeons que la croissance très rapide observée pendant la phase de réouverture est maintenant terminée et que l'économie est entrée dans la phase de récupération, où la croissance sera plus lente. Nous nous attendons à ce que, sur l'ensemble de 2020, l'économie se soit contractée d'environ 5,5 %. D'après nos calculs, la croissance annuelle devrait atteindre près de 4 % en moyenne, en 2021 et en 2022. Toutefois, cette croissance sera inégale et évoluera en dents de scie. Certains secteurs de l'économie ne pourront pas rouvrir complètement avant qu'un vaccin soit accessible à la population générale. Les difficultés seront plus grandes pour certaines régions du pays qui étaient plus faibles avant la pandémie, surtout dans le secteur de l'énergie. Tout compte fait, l'économie devrait continuer de tourner en deçà de son potentiel jusque dans le courant de l'année 2023.
    L'inflation est aussi anormalement faible et elle devrait se maintenir sous notre fourchette cible de 1 à 3 % jusqu'au début de l'année prochaine. Nous prévoyons qu'elle augmentera ensuite graduellement. Cependant, compte tenu de l'économie qui continue de tourner en deçà de son potentiel, l'inflation devrait rester sous les 2 % jusque dans le courant de l'année 2023.
(1540)

[Traduction]

     Étant donné ces perspectives et la nature historique du choc causé par la COVID-19, des mesures de politique monétaire exceptionnelles devront continuer de soutenir l’économie pendant la phase de récupération. J’aimerais parler brièvement des mesures que nous avons prises.
    Nous avons abaissé notre taux directeur à 0,25 %, ce que nous jugeons être sa valeur plancher. Nous nous sommes engagés à maintenir le taux directeur à sa valeur plancher jusqu’à ce que les capacités excédentaires se résorbent, de sorte que la cible d’inflation de 2 % soit atteinte de manière durable. Selon nos perspectives actuelles, cela se produira au cours de 2023.
    Notre programme d’assouplissement quantitatif s’ajoute à nos indications prospectives et vient les renforcer. Permettez-moi de prendre quelques minutes pour expliquer comment fonctionne l’assouplissement quantitatif et en quoi consistent les modifications que nous avons annoncées le mois dernier.
    Normalement, lorsqu’il nous faut accroître la détente monétaire pour atteindre notre cible d’inflation, nous abaissons le taux cible du financement à un jour. Cette mesure a pour effet de réduire les taux d’intérêt à plus long terme, c’est-à-dire à l’horizon que privilégient habituellement les ménages et les entreprises pour leurs emprunts.
    Quand le taux directeur est à sa valeur plancher, l’assouplissement quantitatif offre un moyen supplémentaire de réduire les taux d’intérêt qui comptent pour les ménages et les entreprises. En augmentant la demande d’obligations d’État, l’assouplissement quantitatif a pour effet de réduire les taux de ces titres. Cela réduit les coûts d’emprunt des ménages et des entreprises nécessaires pour créer des emplois et favoriser le retour de l’économie à sa capacité, de sorte que nous puissions atteindre notre cible d’inflation. Nous achetons ces obligations sur le marché secondaire auprès d’institutions financières. Nous payons les obligations en créant des soldes de règlement, c’est-à-dire des réserves de banque centrale. Cette capacité très particulière de créer des réserves en est une que seules les banques centrales possèdent. C’est pourquoi il est important que les banques centrales soient indépendantes du gouvernement.
    Au début de la pandémie en mars et en avril, les principaux marchés du crédit ont été paralysés alors que l’activité économique chutait et que l’incertitude montait en flèche. Si les marchés de financement essentiels ne fonctionnent pas, l’économie elle non plus ne tourne pas, et nous ne pouvons pas mettre en œuvre la politique monétaire. C’est la raison pour laquelle la Banque a mis sur pied plusieurs programmes visant à restaurer le fonctionnement des marchés, dont le Programme d’achat d’obligations du gouvernement du Canada. Celui-ci a été lancé au rythme de 5 milliards de dollars par semaine. Nous avons acheté surtout des obligations à plus court terme, dont les volumes d’émissions étaient plus importants.
    Ces achats ont fait augmenter substantiellement la taille de notre bilan. Si nous avons pu intervenir vigoureusement, c’est parce qu’avant la pandémie, le bilan de la Banque était petit comparativement à celui d’autres banques centrales. Le graphique suivant, tiré du RPM, montre que la valeur des actifs que nous détenons par rapport à la taille de l’économie canadienne reste relativement basse comparativement à nos pairs.
    Par ailleurs, les autres banques centrales ont pris des mesures similaires, et les conditions financières mondiales se sont stabilisées. Ces mesures, conjuguées aux nôtres, ont permis de rétablir le fonctionnement des marchés au Canada. Depuis juillet, nous avons donc réduit l’ampleur de bon nombre des programmes que nous avions instaurés pour aider les marchés à bien fonctionner, ou avons cessé d’y recourir activement. Nous avons notamment mis fin à nos achats d’acceptations bancaires, d’Obligations hypothécaires du Canada et de titres provinciaux sur les marchés monétaires, et notre Programme d’achat d’obligations de sociétés a été très peu utilisé depuis juillet. De plus, nous avons pris une série de mesures pour réduire nos achats de bons du Trésor du gouvernement du Canada sur le marché primaire. Au plus fort de la crise, nous achetions jusqu’à 40 % des bons du Trésor à chaque adjudication. À compter du 24 novembre, nos achats se situeront entre 0 et 10 %. L’objectif premier de nos achats d’obligations est désormais de fournir la détente monétaire nécessaire pour soutenir la reprise et ramener l’inflation à la cible. Comme vous pouvez le constater dans ce deuxième graphique, notre bilan est resté relativement stable depuis juillet.
    Cela m’amène à aujourd'hui. Les marchés continuent de bien fonctionner. Nous fournissons des indications prospectives exceptionnelles, auxquelles nos achats d’obligations s’ajoutent tout en les renforçant. Nos indications prospectives ont ancré les taux d’intérêt dans le segment à court terme de la courbe de rendement. Nous n’avons ainsi plus besoin d’acheter autant d’obligations d’État à court terme qu’au début de la pandémie.
    En conséquence, nous avons rééquilibré notre programme d’assouplissement quantitatif. Pour en augmenter l’efficacité, nous achetons moins d’obligations à court terme et plus d’obligations à long terme. Ce changement fait augmenter l’effet expansionniste de chaque dollar investi dans le cadre de ce programme. Essentiellement, en nous concentrant sur l’achat d'obligations à plus long terme, nous pouvons avoir une plus grande incidence sur les taux d’intérêt...
(1545)
    J’invoque le Règlement, monsieur le président.
    Monsieur Macklem, attendez un instant.
    Oui, monsieur Falk.
    Monsieur le président, l'interprétation semble avoir fait défaut pendant la dernière minute.
    Pouvons-nous vérifier l'interprétation?
    Je pense qu’il y a eu une courte interruption. Le problème semble être réglé.
    D’accord, veuillez m’interrompre de nouveau, monsieur Falk, si l'interprétation fait encore défaut. Merci, monsieur Falk.
    Allez-y, monsieur Macklem.
    Voulez-vous que je revienne en arrière?
    Veuillez revenir en arrière d’une phrase ou deux, si vous le pouvez.
     Ce changement fait augmenter l’effet expansionniste de chaque dollar investi dans le cadre de ce programme. Essentiellement, en nous concentrant sur l’achat d'obligations à plus long terme, nous pouvons avoir une plus grande incidence sur les taux d’intérêt qui sont les plus importants pour les ménages et les entreprises. Cela nous permet de ramener le montant total minimum de nos achats hebdomadaires à 4 milliards de dollars, tout en fournissant une détente monétaire au moins aussi forte qu’avant.
    Notre programme d’assouplissement quantitatif va se poursuivre jusqu’à ce que la reprise soit bien amorcée.
    J’espère que cela explique bien les prévisions de la Banque et les mesures qu'elle a prises.
    Nous travaillons pour les Canadiens et les Canadiennes, et il est essentiel que nous leur rendions compte de nos actes. Nos témoignages devant les parlementaires jouent un rôle important à cet égard. Mais au-delà de cela, la politique monétaire est plus efficace quand elle est bien comprise. Dans le contexte de la pandémie et des mesures exceptionnelles que nous prenons pour y faire face, il est d’autant plus important pour nous de parler clairement aux Canadiens et de les écouter attentivement.
    Soyons très clairs: les Canadiens peuvent avoir l’assurance que les coûts d’emprunt vont rester très bas pendant longtemps. Nos indications prospectives, combinées à notre programme d’assouplissement quantitatif, réduisent l’une des sources d’incertitude. Et ces efforts aideront à soutenir les dépenses et les investissements dont l’économie a besoin pour retrouver les emplois perdus et atteindre notre cible d’inflation.
    En terminant, monsieur le président et distingués membres du Comité, au risque de mettre ma collègue mal à l’aise, j’espère que vous m’accorderez quelques instants pour rendre hommage à la première sous-gouverneure, Carolyn Wilkins.
    Comme vous le savez, Mme Wilkins a décidé de ne pas solliciter de second mandat à titre de première sous-gouverneure, et elle a indiqué qu’elle quittera la Banque en décembre, après l’annonce de notre prochaine décision de politique monétaire. Mme Wilkins s’est consacrée au service de la population canadienne durant toute sa carrière, dont les 20 dernières années à la Banque du Canada. En tant que première sous-gouverneure, elle a exercé un leadership exceptionnel au chapitre des politiques publiques. En particulier, son expérience a joué un rôle déterminant dans la conception des interventions de la Banque face à la pandémie. Elle a fait la promotion de la recherche et de la diversité à la Banque, et a dirigé les travaux qui sous-tendront le prochain renouvellement de notre entente sur le ciblage de l’inflation. Grâce à elle, la Banque est devenue un chef de file mondial dans les domaines des technologies financières et des monnaies numériques. Mme Wilkins a servi le Canada avec distinction en tant que représentante de la Banque auprès du G7, du G20 et du Conseil de stabilité financière.
    Et, sur une note plus personnelle, je peux vous dire que sa fine compréhension de l’économie canadienne et ses connaissances dans la formulation des politiques seront très difficiles à remplacer. Son dévouement à l’égard des Canadiens, son leadership intellectuel et son jugement sûr sont inégalés. Au nom de tous les Canadiens, je tiens à la remercier pour les services qu’elle a rendus et je lui souhaite tout le succès possible dans l’avenir.
    Merci, monsieur le président. Sur ce, la première sous-gouverneure Wilkins et moi serons heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur le gouverneur. Ce sont des compliments bien mérités, et je vois Mme Wilkins sur mon écran. Elle n’a même pas rougi. Si vous étiez ici, madame Wilkins, et si nous étions réunis, comme normalement, autour de la table, nous vous applaudirions. Pour revenir aux propos du gouverneur, ce n’est certainement pas une époque normale.
    Sur ce, nous allons passer à la première série de questions de six minutes. Nous entendrons Mme Jansen pour les trois premières, suivie de M. Falk pour environ trois minutes, puis de M. Fraser.
    Madame Jansen, vous avez la parole.
    Merci.
    Monsieur Macklem, vous nous avez dit, dans votre exposé, que: « le Conseil de direction a convenu que des mesures de politique monétaire exceptionnelles devront continuer de soutenir l’économie. » Je me demande si je vous ai bien compris. Êtes-vous en train de dire que vous devez continuer d’acheter des titres de créance du gouvernement, essentiellement imprimer de l’argent, pour que le Canada demeure solvable?
(1550)
    Non, ce n’est pas du tout ce que nous disons. Ce que nous disons, c’est que l’inflation est bien inférieure à la cible. L’économie canadienne est faible. Il y a encore plus de 600 000 Canadiens qui ont perdu leur emploi et qui ne l'ont pas retrouvé. Cela exerce une pression à la baisse sur l’inflation. Dans ce contexte, nous avons besoin de beaucoup de stimulants monétaires, des stimulants extraordinaires, pour soutenir la reprise et ramener les Canadiens au travail et l’inflation à la cible.
     Ce que vous dites, c’est que vous n’aurez pas à poursuivre cette stratégie. Nous pourrons demeurer solvables sans cela. Est-ce bien ce que vous dites?
    C’est ce que je dis. Nous ne finançons pas le gouvernement. En réduisant les taux d’intérêt et en achetant des obligations d’État, nous réduisons le coût du financement du gouvernement. En fait, cela réduit le coût d’emprunt pour tout le monde.
     J’ai une autre question.
    Nous ne finançons pas le gouvernement.
    Le niveau d’agressivité de la Banque du Canada face aux difficultés économiques futures sera l’événement économique le plus important de la prochaine décennie. Pouvez-vous vous engager à cesser d’acheter de la dette publique une fois que le taux d’inflation aura atteint votre cible de 2 %, oui ou non?
    En fait, si vous examinez les lignes directrices que nous avons fournies, vous constaterez que nous nous sommes engagés à cesser d’acheter des obligations d’État une fois que la reprise sera bien amorcée.
    Est-ce que cela correspond à la cible de 2 %?
    Cela se produira probablement avant que nous atteignions la cible de 2 %.
    D’accord. Je vais maintenant céder mon temps de parole à mon collègue. Merci.
    Monsieur Falk, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
     Merci, monsieur Macklem et madame Wilkins, pour votre exposé.
    Je me demande quelle proportion de la dette fédérale la Banque du Canada détient.
    Nous en détenons environ 30 %.
    Quel montant est-ce?
    Vous voulez dire le chiffre réel? Il s’agissait de 343 905 000 000 de dollars il y a environ une semaine.
    Sur ce montant quelle somme s'est ajoutée depuis mars?
    La principale source d’ajouts est le programme d’achat d’obligations du gouvernement, qui a coûté 162 979 000 000 de dollars. Il y a aussi d'autres ajouts tels que certains bons du Trésor. Il s’agit de dettes à très court terme, et qui ne restent pas longtemps au bilan.
    Le gouvernement actuel s’est-il adressé à la Banque du Canada pour demander une limite de crédit?
    Non.
    Avez-vous fourni des conseils sur la limite de crédit?
    Non. Permettez-moi de souligner...
    Donc, c’est...
    ... nous ne finançons pas le gouvernement. Le gouvernement émet sa dette sur les marchés; les participants au marché achètent cette dette, puis nous l’achetons sur le marché auprès de ces participants. Lorsque cette dette arrivera à échéance, qu'elle figure dans notre bilan ou dans celui de n’importe qui d’autre, le gouvernement devra la rembourser.
    Quel niveau la Banque du Canada juge-t-elle acceptable?
    Parlez-vous du niveau des achats?
    Quel niveau d’achat d’obligations du gouvernement fédéral la banque estime-t-elle acceptable?
    À l’heure actuelle, nous en sommes à environ 30 %. D’autres banques centrales ont émis des directives selon lesquelles si la banque centrale détient plus de 50 à 70 % de ces titres, cela pourrait commencer à nuire au fonctionnement du marché. La Réserve fédérale a indiqué que pour elle, ce serait environ 60 %. Nous en sommes à 30 %, et n’oubliez pas qu’avant la crise, nous en étions à environ 15 %. Nous en détenons régulièrement dans notre bilan, mais nous avons beaucoup de marge de manœuvre. Un pourcentage de cet ordre pourrait devenir inconfortable.
    Quelle proportion de la dette actuelle...
    Nous en sommes encore très loin.
    C’est exact. Quel pourcentage de la dette que vous détenez actuellement a une échéance à court terme ou inférieure à 10 ans?
    Je peux...
    Je connais la durée moyenne jusqu’à l’échéance des...
    J’ai ces chiffres, si vous voulez attendre un instant. Quand vous arrivez à...
(1555)
    Je sais que vous avez mentionné...
    Ils changent chaque semaine.
    Pendant que vous cherchez, vous avez mentionné que vous aviez davantage opté pour des achats à long terme. Pour quelle raison?
    Au début de la crise, en mars et en avril, l’accent était mis sur le rétablissement du fonctionnement du marché. Tout le système financier était engorgé. Les marchés du crédit étaient très tendus. Nous sommes intervenus et nous avons surtout acheté des titres à très brève échéance, ce qui était essentiel pour rétablir le fonctionnement du marché.
    À mesure que le marché s'est rétabli, nous avons mis fin à un certain nombre de nos programmes. Nous avons toutefois maintenu notre programme d’achat d’obligations d’État afin d’offrir un assouplissement quantitatif. De plus, nous avons commencé à acheter des obligations à plus long terme. Les ménages et les entreprises empruntent habituellement pendant trois, cinq, dix ou quinze ans. C’est le segment de la courbe de rendement où ils empruntent le plus. Notre programme d’assouplissement quantitatif vise en fait à réduire leur coût d’emprunt, de sorte que nous concentrons notre pouvoir d’achat sur cette partie de la courbe. De cette façon, cela maximise en quelque sorte l’impact de chaque dollar investi.
     Nous allons devoir mettre fin à cette série de questions. Désolé, monsieur Falk.
    Pour que ce soit clair, lorsque vous parlez de 60 % pour la Réserve fédérale, je suppose que vous voulez dire la Réserve fédérale américaine?
    C'est exact.
    Merci.
    Monsieur Fraser.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie nos témoins de leur présence.
    Je vais commencer par une série de questions sur l'intersection entre la politique budgétaire et la politique monétaire dans le cadre des interventions face à la pandémie.
    Monsieur Macklem, vous avez commencé votre intervention en parlant du fait qu'il y a une menace pour la santé publique qui pose un risque grave pour notre économie. Ce n'est pas comme s'il y avait un problème fondamental sous-jacent à l'économie. Il s'agit plutôt d'un choc exogène pour l'économie.
    Vous avez pris, à la Banque, un certain nombre de décisions, que vous avez décrites dans votre déclaration liminaire, comme la réduction de notre taux d'intérêt à sa valeur plancher ainsi que l'assouplissement quantitatif. Cela me dit que vous avez peut-être utilisé les outils qui étaient présents dans la trousse dont vous disposiez, et si j'en cherche d'autres pour continuer à résoudre les effets de la pandémie, que ce soit du point de vue de la santé publique ou de l'économie, celui qui reste est en fait la politique budgétaire.
    Pouvez-vous me dire où, selon vous, le gouvernement fédéral devrait concentrer ses efforts pour lutter le plus efficacement possible contre la pandémie? Plus précisément, devrions-nous cibler des mesures de santé publique qui aideront à éliminer rapidement ce virus et, en deuxième lieu, verser de l'argent aux ménages et aux entreprises qui en ont besoin en prolongeant efficacement les mesures de soutien qui leur sont offertes, afin que nous puissions compter sur eux une fois la pandémie terminée pour aider l'économie à se rétablir lorsque le virus sera derrière nous?
    Je vais laisser ces décisions aux parlementaires. Comme je l'ai souligné dans ma déclaration préliminaire, il est clair que l'évolution de la pandémie a des répercussions très importantes sur l'économie. Les vies et les moyens de subsistance sont très étroitement liés. Les gens doivent se sentir en sécurité. Ils ont besoin de sentir qu'ils peuvent continuer à mener leurs affaires et rester en santé, tout comme leur famille. Leur confiance repose sur cela, et cela sera essentiel à leur capacité de contribuer à l'économie. Je ne pense pas qu'il y ait vraiment un grand compromis à faire ici. Les deux doivent aller de pair.
    En ce qui concerne les mesures fiscales précises, je vais laisser les parlementaires s'en occuper. Je dirai toutefois que nous utilisons considérablement la politique monétaire pour stimuler l'économie. Nous avons indiqué que cela devra se poursuivre pendant un certain temps. Certes, notre marge de manœuvre à ce chapitre est limitée, mais je ne voudrais pas donner l'impression que nous ne pouvons pas faire autre chose. Nous avons la capacité d'en faire plus au besoin.
    Comme je viens de le souligner, nous sommes propriétaires d'environ 30 % de la dette publique. Il y a amplement de possibilités d'accroître notre assouplissement quantitatif si cela était nécessaire. Il y a d'autres types de programmes. D'autres banques centrales ont utilisé des moyens comme le contrôle de la courbe des taux. Nous pourrions éventuellement abaisser la limite inférieure, même sans passer à -25 points de base. Elle pourrait être un peu plus basse.
    Les taux d'intérêt négatifs font partie de notre boîte à outils, mais nous n'en discutons pas activement et nous ne pensons pas que ce serait très utile à ce moment-ci.
    Je ne veux pas donner l'impression que nous ne pouvons rien faire d'autre. Au besoin, il y a des mesures que nous pourrions prendre.
(1600)
    Je comprends cela.
    Vous avez mentionné dans vos réponses à des questions précédentes que la banque ne finance pas le gouvernement, mais qu'elle réduit le coût de financement du gouvernement. Jusqu'à maintenant, avec les mesures fiscales qui ont été mises en place, la dette est certainement beaucoup plus importante qu'elle ne l'était avant la pandémie.
    Pouvez-vous nous dire quel impact cela a eu sur le coût du service de la dette pour les Canadiens et pour le gouvernement fédéral?
    Me demandez-vous quel serait le coût du service de la dette si nous n'avions pas réduit les taux d'intérêt?
    Non, je vous demande en fait si le coût du service de la dette du gouvernement fédéral a changé en raison des mesures que vous avez prises pour réduire le coût d'emprunt du gouvernement fédéral. Le service de la dette coûte-t-il plus cher? Le service de la dette coûte-t-il moins cher?
    Le service de la dette est devenu moins coûteux, certainement par unité de dette.
    Dans l'ensemble, est-ce que le coût réel du service d'une dette beaucoup plus élevée par suite de ces mesures a diminué?
     Oui, les coûts du service de la dette sont maintenant très bas.
    Vers la fin de votre exposé, vous avez dit vous attendre à ce que les taux d'intérêt demeurent bas pendant très longtemps.
    La dernière fois que vous avez comparu devant le Comité, vous avez expliqué que cela venait en partie du fait que le plus grand risque pour l'économie est la déflation, et non l'inflation. Êtes-vous toujours de cet avis aujourd'hui, et sinon, pourquoi croyez-vous que le taux d'intérêt demeurera faible pendant longtemps?
    Oui, nous continuons de croire ce que j'ai dit la dernière fois. En fait, nous avons été un peu plus précis à ce sujet. Dans notre rapport sur la politique monétaire d'octobre, nous avons indiqué que selon nos projections actuelles — et je tiens à souligner qu'il y a beaucoup d'incertitude autour de ces projections et qu'elles dépendent fortement de l'évolution du virus —, nous nous attendons à ce que les capacités excédentaires se résorbent en 2023. Nous avons indiqué que nous maintiendrions le taux d'intérêt à sa valeur plancher jusqu'à ce que cela se produise, ce qui nous amène à un moment donné en 2023.
    Cela établit également les conditions de notre sortie. Vous avez un aperçu de ce qui se produira en fonction de nos projections actuelles.
    Monsieur Fraser, je suis désolé, mais votre temps est également écoulé.
    Nous allons passer à M. Ste-Marie, qui sera suivi de M. Julian.
    Monsieur Ste-Marie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Tout d'abord, je tiens à saluer M. Macklem, le gouverneur, et à le remercier de sa présentation.
    Je tiens aussi à saluer Mme Wilkins, qui est première sous-gouverneure.
    Je veux reprendre les propos que vous a adressés le président de notre comité, M. Wayne Easter, en répétant que nous vous sommes très reconnaissants de chacune de vos comparutions ici, au Comité.
     Je tiens à souligner la clarté de vos propos et leur riche contenu. Il n'y a pas une fois où nous n'avons pas appris quelque chose, quand vous répondiez à nos questions. Je tiens aussi à souligner la qualité de votre français, tout comme celle de M. Macklem.
    Je commencerai en parlant de l'inflation.
     Monsieur Macklem ou madame Wilkins, le fait d'avoir comme premier objectif la maîtrise de l'inflation, qui est le critère de la Banque du Canada depuis quelques décennies, s'est-il révélé pertinent pendant la crise actuelle, jusqu'à maintenant?
    Je vais demander à Mme Wilkins de répondre, puisqu'elle était la dirigeante de notre recherche au sujet de notre cible d'inflation.
    Je vais commencer par vous remercier de vos propos. J'en suis reconnaissante et c'est très gentil de votre part.
    La réponse très courte est que, oui, c'est très pertinent. L'inflation semble loin des problèmes actuels des gens, comme la perte d'emploi et l'incertitude. En même temps, un taux d'inflation bas et stable est très important pour la planification des entreprises et des gens.
    De plus, nos méthodes pour stabiliser l'inflation comprennent aussi le fait de stabiliser l'économie et de la faire reposer sur une fondation assez forte. Ainsi, cela permet aux emplois de revenir, à l'économie de reprendre et aux entreprises de mieux réussir. Même si notre cible est l'inflation, nous tenons compte d'éléments très proches des gens, tels la capacité de production et l'emploi.
    C'est sûr qu'il y a d'autres façons de procéder avec la politique monétaire. Je vous invite à vous rendre sur notre site Web et à consulter toutes nos communications sur des cadres possibles de la politique monétaire autres que ceux dont nous discutons en ce moment.
(1605)
    Je vous remercie.
    L'une de mes inquiétudes est le fait que l'inflation demeure sous la cible pendant la crise actuelle, comme M. le gouverneur l'a rappelé dans son introduction. Dans sa dernière réponse à mon collègue M. Fraser, il a même parlé de vivre davantage un épisode de déflation que d'inflation, actuellement.
    Même si j'ai bien compris que ce n'était que temporaire, je m'inquiète de certaines disparités dans quelques secteurs économiques, particulièrement à propos de certains actifs. Alors que l'inflation demeure en deçà des cibles, je crains que des bulles se forment dans certains secteurs, que ce soit dans le secteur boursier ou dans le secteur immobilier. On peut penser aux résidences principales et secondaires, dans le secteur résidentiel.
    Regardez-vous ces aspects de l'économie et les analysez-vous? Si c'est le cas, quelle lecture faites-vous de ce risque possible de bulles dans ces secteurs?
     Nous regardons de très près les marchés financiers et le prix des actifs dans ces marchés. Nous regardons aussi le marché immobilier. Mon collègue Toni Gravelle a livré un discours cette semaine au sujet des ménages et des entreprises en particulier.
    En ce qui a trait à l'immobilier, nous avons tous remarqué un rebond assez considérable de ce marché cet été. À notre avis, l'activité découlait en grande partie d'une demande refoulée; je parle de ceux qui voulaient acheter une maison, mais qui ne le pouvaient pas. Alors, quand les choses ont commencé à rouvrir, tout le monde s'est précipité pour en acheter une.
    Ce qu'on voit maintenant dans ces marchés ne représente pas exactement ce qu'on a vécu à Vancouver et ailleurs en 2016. Il n'y a pas beaucoup de demandes spéculatives encore, mais cela reste à surveiller. C'est un peu tôt dans la phase de récupération pour vraiment le savoir. Nous allons regarder cela de près.
    En ce qui concerne les actifs, tels que la bourse ou le marché du revenu fixe, ce n'est pas prudent pour une banquière travaillant à la Banque du Canada de faire des commentaires à ce sujet. Je peux dire que, quand on regarde la situation, c'est normal que ces prix augmentent quand le taux d'intérêt diminue. Cela fait partie de la transmission de la politique monétaire.
    Je ne formule pas ici un commentaire sur les prix et sur le fait qu'ils sont normaux et justes. C'est au marché financier de trancher sur ce sujet.
    Je vous remercie.
    M. le président m'indique que j'ai le temps pour une courte question.
    La crise économique engendrée par la pandémie fait de nombreux perdants. On peut penser aux entreprises, aux commerces de proximité et aux individus qui ont perdu leur emploi. Il y a d'autres acteurs, soit des individus, des ménages et des entreprises, qui ont toujours le même niveau de revenu et un taux d'épargnes très élevé. Je crois qu'on n'a jamais vu, surtout en temps de crise, un tel niveau d'épargnes.
    Avez-vous des préoccupations quant à ce niveau élevé d'épargnes dans l'économie?
    Quelles peuvent en être les répercussions?
    Je vais répondre à cette question.
    Oui, vous avez raison, il y a une forte hausse d'épargnes. Dans nos prévisions, nous avons formulé l'hypothèse que la plupart de ces hausses d'épargnes seront permanentes. Les ménages vont utiliser ces épargnes pour rembourser leurs dettes ou pour investir. À notre avis, ils vont en dépenser une partie, mais pas la plus grande partie.
    Il est aussi possible, surtout quand il y aura un vaccin, que les ménages décident de dépenser davantage que ce que nous avions prévu. Si cela arrive, l'économie va rebondir plus vite. On verra.
    Nous faisons preuve de jugement dans nos prévisions. Nous savons qu'il y a quelques risques à la hausse, mais il y a aussi des risques à la baisse.
(1610)

[Traduction]

     Nous allons passer à M. Julian, pour six minutes, puis à M. Poilievre, pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président, et merci à vous, monsieur le gouverneur Macklem et madame la première sous-gouverneure Wilkins, d'être ici aujourd'hui. Nous apprécions toujours vos visites au Comité des finances.
    Madame la sous-gouverneure Wilkins, nous vous souhaitons une bonne continuation dans vos projets futurs. Nous espérons certainement, pendant cette pandémie, que vos familles et vos proches sont en santé et en sécurité.
    Nous vivons une période traumatisante et tragique de l'histoire du Canada, que bien des gens ont qualifiée de plus grande perturbation depuis la Seconde Guerre mondiale.
    Comme vous vous en souviendrez, pendant la Seconde Guerre mondiale et par la suite, il y a eu un changement de fonction et de mandat pour la Banque du Canada. Cette semaine, plusieurs personnes, dont des dizaines d'économistes dans Le Devoir, ont mentionné d'autres banques centrales, par exemple celle de la Nouvelle-Zélande, dont le mandat a été élargi.
     Depuis une génération, nous nous concentrons sur la maîtrise de l'inflation. Les gens disent, et de nombreux économistes sont d'accord, que le mandat devrait inclure, par exemple, la lutte contre les inégalités massives que nous avons vues au cours de cette pandémie, la gestion et le soutien de la transition que nous devons faire pour faire face à l'urgence climatique, et même le plein emploi.
    J'aimerais savoir ce que vous pensez, monsieur le gouverneur Macklem, de ces voix qui disent qu'il faut élargir le mandat pour que nous puissions nous attaquer aux défis à surmonter pendant la pandémie et après.
     Vous avez intégré beaucoup d'éléments dans cette question, alors prenons-la en deux parties. Je vais demander à Mme Wilkins de commencer. Elle dirige l'examen de notre cadre de ciblage de l'inflation. Je reviendrai sur certains points lorsqu'elle aura terminé.
    Je serai très brève pour vous donner du temps, monsieur le gouverneur. Il s'agit d'une question importante et vaste.
    Vous avez raison. On s'est beaucoup demandé si les banques centrales pouvaient faire mieux qu'un ciblage flexible de l'inflation. Nos propres recherches montrent qu'à certains égards, d'autres cadres peuvent mieux fonctionner. À titre d'exemple, un double mandat qui tient compte à la fois de l'inflation et du plein emploi pourrait contribuer davantage à la stabilisation de l'économie au chapitre du revenu — à la stabilisation des emplois.
    En même temps, il est un peu moins efficace pour stabiliser l'inflation. C'est assez intuitif. Cela se fait au détriment de la simplicité et de l'efficacité des mesures. Cela complique la reddition de comptes, du fait en partie de la présence de deux cibles avec un seul outil, mais aussi de la présence d'une cible qui n'est pas vraiment observable, c'est-à-dire que personne ne sait ce qu'est le plein emploi.
    En ce qui concerne les autres objectifs — les changements climatiques, l'inégalité des revenus —, nous pouvons certainement en tenir compte lorsque nous choisissons un cadre, mais la politique monétaire est un instrument grossier qui ne permet pas de cibler où la croissance se produira.
    Je cède maintenant la parole au gouverneur Macklem.
    Les points que vous soulevez sont extrêmement importants.
    Comme Mme Wilkins l'a souligné, nous procédons à un examen approfondi de notre cadre. Ce que cela montre, selon moi, c'est que dans certaines circonstances, certaines modifications peuvent être plus efficaces, mais aucune n'a d'effet positif systématique.
    Nous n'avons pas terminé cet examen, et il serait prématuré de tirer des conclusions. Nous nous penchons certainement sur ces questions.
    Ce que je dirai, cependant — et je tiens à le souligner —, c'est que nous tenons compte de ces éléments. En vertu de la Loi sur la Banque du Canada, nous devons favoriser la prospérité économique et financière des Canadiens. Le ciblage de l'inflation, en fait, est notre façon d'y parvenir.
    Pour maintenir l'inflation à 2 % de façon durable, nous devons être très conscients de ce qui se passe sur le marché du travail. S'il y a beaucoup de chômage, l'inflation va baisser.
    Nous constatons que cette crise creuse les écarts dans la société, et nous avons parlé des inégalités, qui sont une préoccupation. Si cette reprise a pour effet de laisser des gens pour compte, la capacité de production de notre économie sera réduite. La durabilité de notre reprise sera compromise.
    Ces facteurs sont pris en compte, mais je pense que ce que nous avons appris au fil du temps, c'est que nous devons contrôler l'inflation en même temps que nous faisons ce que nous pouvons pour ces autres facteurs. Si nous perdons de vue l'ancrage des attentes en matière d'inflation, alors rien ne va plus: les résultats empirent au chapitre de l'inflation et de l'emploi.
    Les changements climatiques — je l'ai mentionné la semaine dernière — exerceront des pressions importantes sur l'économie au cours des prochaines décennies. Il est vraiment important que la Banque du Canada comprenne les répercussions des changements climatiques sur l'économie et l'inflation.
    Nous avons aussi un rôle à jouer pour promouvoir l'efficacité et la stabilité du système financier. Nous faisons déjà beaucoup dans ce domaine. Si l'adaptation aux changements climatiques entraîne de grandes perturbations, nous allons assister à une réévaluation importante des actifs et des entreprises. Cela pourrait se répercuter sur notre système financier. Cela pourrait certainement nuire à sa capacité de soutenir l'économie réelle. Cela pourrait même entraîner de l'instabilité dans le système financier.
    Nous avons commencé l'an dernier, dans le cadre de notre examen du système financier, à analyser les risques climatiques et à en discuter, surtout ceux qui touchent ce système. La semaine dernière, nous avons annoncé un projet pilote avec le Bureau du surintendant des institutions financières et six institutions financières pour élaborer une analyse de scénarios.
    Il s'agit effectivement d'un outil. Il y a beaucoup d'incertitude au sujet des changements climatiques et de leurs répercussions, mais l'idée, c'est que cette incertitude ne devrait pas servir d'excuse à l'inaction. Nous allons travailler avec le BSIF et ces six institutions financières pour élaborer des scénarios que ces dernières pourront utiliser pour évaluer leurs propres risques. Nous nous en servirons pour les aider à gérer ces risques et nous travaillerons avec elles à l'élaboration d'une méthodologie et d'une approche pour le faire. Il s'agit de faciliter les choses pour tout le monde.
(1615)
     Nous allons devoir mettre fin à cette série de questions. C'est la première fois que je vois M. Julian poser une seule question en six minutes. C'était certainement une question difficile, mais vous aurez la parole à nouveau au prochain tour.
    Monsieur Poilievre, vous avez cinq minutes, puis Mme Koutrakis.
    Monsieur Poilievre.
    Quelle part de la nouvelle dette qui s'est ajoutée depuis mars est bloquée aux taux actuels pendant 10 ans ou plus?
    Vous devrez poser la question à la ministre des Finances, qui s'occupe de la gestion de la dette. Je suppose que vous recevrez une mise à jour lundi prochain...
    D'accord. Vous ne pouvez donc pas répondre à cette question.
    Non. C'est une question qui s'adresse à la ministre des Finances.
    Je peux vous dire ce qui figure dans notre bilan...
    Je ne parle pas de votre bilan. J'y reviendrai dans un instant.
    Qui vend la dette du gouvernement fédéral sur le marché?
    Nous sommes l'agent du gouvernement. Nous gérons le bureau...
    Vous en êtes donc responsable. Vous devriez savoir quelle part de la nouvelle dette est bloquée pendant 10 ans ou plus.
    Monsieur Poilievre, vous devez laisser au gouverneur le temps de répondre. C'est une question très importante, et je ne veux pas vous priver de ce temps. Je ne veux pas que nous nous limitions à une question de quatre secondes et à une réponse de quatre secondes avec le gouverneur de la Banque du Canada. Nous allons donc devoir lui accorder au moins un minimum de temps.
    Allez-y, monsieur Poilievre.
(1620)
    J'ai terminé. J'ai posé ma question. J'attends toujours une réponse.
    Je n'ai pas sous les yeux la structure des échéances de la dette du gouvernement. Ces chiffres changent régulièrement. Comme vous le savez bien, la dette évolue, la structure des échéances change. Le gouvernement est en train de rembourser la dette...
    D'accord, vous ne le savez pas. Ça va. C'est votre banque qui émet la dette, mais vous ne savez pas quelle est la proportion à long terme et à court terme.
    On ne cesse de nous dire que toute cette dette ne pose pas de risques parce qu'elle sera bloquée à long terme, mais les données sur votre site Web montrent des échéances de moins de 10 ans pour 91 % de cette dette et des hausses de taux d'intérêt probables. De 1978 à 1980, les taux d'intérêt ont augmenté. Ils ont triplé. Ils sont passés de 8 à 22 %. Aucun banquier central n'avait prévu cela, mais cela s'est produit, et l'économie canadienne en a souffert.
    Oubliez l'augmentation triple. Quel serait le coût pour le gouvernement fédéral d'une augmentation d'un point de pourcentage du taux d'intérêt effectif sur sa dette?
    La dette actuelle est d'environ 1 billion de dollars, si bien qu'on peut multiplier 0,01 par 1 billion. Cela vous donne l'augmentation à l'état stable. En pratique, bien sûr, cette dette a des échéances variables, de sorte que la première année, c'est le montant qui est reporté la première année. La deuxième année, ce sera... Lorsque tout le processus sera terminé, ce sera 0,01 fois un billion. Cela pourrait prendre plusieurs années.
    Quel serait l'effet sur l'économie canadienne d'une augmentation de 1 % du taux d'intérêt?
    Voulez-vous le chiffre du PIB? Que voulez-vous exactement?
    Un montant en dollars.
    Nous augmenterions les taux d'intérêt si l'économie se portait mieux qu'à l'heure actuelle, alors nous ne sommes pas...
    Vous ne pouvez donc pas donner de chiffres à ce sujet.
    Comme nous l'avons indiqué dans nos prévisions, nous n'envisageons pas de hausser les taux d'intérêt pour le moment.
     Comme je l'ai souligné plus tôt, ce ne sont pas toujours les gouverneurs qui sont responsables de l'augmentation des taux d'intérêt, qui se produisent de toute façon en raison des changements dans les conditions du marché et de situations imprévues.
    Passons maintenant au programme d'assouplissement quantitatif, soit l'achat massif de titres de l'État par la banque centrale.
    Vous avez dit tout à l'heure que votre banque vend ces titres sur le marché et qu'elle les rachète directement aux investisseurs à qui elle les a vendus. Qu'est-ce qui empêche un investisseur de profiter de la différence entre le prix d'une obligation de l'État ou d'un bon du Trésor que vous vendez et le prix que vous payez pour les racheter immédiatement?
    Les deux se font dans le cadre d'adjudications concurrentielles, qui sont largement sursouscrites. Il y a beaucoup de soumissionnaires des deux côtés, alors il s'agit d'un processus concurrentiel. Je pense que cela devrait vous donner une certaine assurance que...
    Je n'ai aucun doute que c'est concurrentiel.
    Vous avez dit que le but de l'assouplissement quantitatif est de faire monter le prix des obligations, alors on peut supposer que vous payez une obligation plus cher que vous l'avez vendue après en avoir fait augmenter le prix. La différence correspond au profit de l'investisseur qui vous les a achetées et vous les a revendues. Au bout du compte, ce coût doit être assumé par quelqu'un. Qui paie ce prix?
     Comme je l'ai dit, c'est un processus concurrentiel. Exactement comme vous l'avez indiqué, l'assouplissement quantitatif fonctionne de la façon suivante: en achetant les obligations, cela crée plus de demandes, ce qui fait monter le prix et baisser le rendement. C'est ainsi que nous appliquons la politique monétaire, en réduisant le coût d'emprunt pour les Canadiens. C'est ce qui se produit.
    Oui, mais vous injectez 400 milliards de dollars dans les marchés financiers, vous faites gonfler les actifs financiers et vous enrichissez les gens qui possèdent ces actifs et qui sont en très grande majorité des gens bien nantis. Ce faisant, vous diluez les salaires des travailleurs.
    Le document d'orientation de votre banque montre que les coûts de l'inflation sont assumés de façon disproportionnée par les pauvres et les personnes défavorisées. Vous transférez en fait un énorme morceau de la richesse à ceux qui ont des actifs financiers, tout en diluant les salaires des gens de la classe ouvrière. Ne craignez-vous pas que cela creuse l'écart entre les riches et les pauvres?
(1625)
    Cette question comporte deux ou trois aspects, alors permettez-moi de la décortiquer.
     Tout d'abord, je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire que l'inflation repose de façon disproportionnée sur les épaules des moins riches. Ces personnes ont tendance à utiliser plus d'argent comptant, de sorte qu'elles ont tendance à assumer de façon disproportionnée le coût de l'inflation. C'est exactement la raison pour laquelle — et c'est une raison importante — le mandat de la Banque du Canada est de maintenir une inflation faible, stable et prévisible. C'est quelque chose que nous pouvons faire pour la société.
     À l'heure actuelle, l'inflation est trop faible. Elle est inférieure à notre cible de 2 %. Elle était de 0,7 % en octobre. Comme vous le savez, plus de 600 000 Canadiens sont au chômage. Beaucoup de pressions à la baisse sont exercées sur l'inflation. Ce que nous craignons le plus, c'est qu'elle diminue encore, ce qui peut être nuisible pour d'autres raisons.
    D'accord. Merci.
    Je voudrais simplement souligner que...
    Nous avons largement dépassé le temps prévu, monsieur Poilievre.
    Puis-je poser une question de 10 secondes?
    Non. Nous avons déjà dépassé le temps d'une minute.
     Je ne sais pas si M. Macklem avait terminé sa réponse. Je vais lui donner le temps de finir de répondre à cette question très large.
    Avez-vous terminé, monsieur Macklem?
    Oui, je pense que j'ai terminé.
    D'accord.
     Nous aurons probablement un peu de temps plus tard, monsieur Poilievre, parce que nous disposons d'une heure et demie avec ces témoins.
    Madame Koutrakis.
    Merci.
    Je vous remercie, monsieur le gouverneur et madame la première sous-gouverneure, de comparaître devant notre comité cet après-midi, et je vous suis reconnaissante des services que vous rendez à tous les habitants de ce magnifique pays.
     Je crois que la réponse du gouvernement a été à la hauteur de cette crise sanitaire et financière sans précédent. Nous commençons à voir une reprise qui mènera à de meilleurs résultats en matière de croissance économique et d'emploi, comme presque tous les économistes des secteurs public et privé s'y attendaient au printemps. Je crois aussi que la réponse du gouvernement fédéral était tout à fait conforme à celle de la Banque du Canada.
    Cela dit, j'aimerais poser quelques questions sur le bilan de la Banque du Canada. Pouvez-vous nous expliquer comment la Banque du Canada prévoit gérer les bilans élargis? Que diriez-vous aux Canadiens qui sont préoccupés par l'expansion rapide du bilan de la banque? Y a-t-il un échéancier pour ramener le bilan aux niveaux normaux d'actif et de passif?
     Je vais souligner deux ou trois choses. Tout d'abord, l'utilisation du bilan fait partie de notre trousse d'outils élargie. Cela n'est pas une mesure courante. Ce n'est pas quelque chose que nous avons fait auparavant, mais nous n'avons jamais eu de pandémie auparavant. Nous n'avons jamais connu le genre d'effondrement de l'activité économique auquel nous avons assisté au cours des derniers mois.
    Il y a plus d'incertitude à ce sujet, et je peux certainement comprendre que les Canadiens se posent des questions, mais comme j'ai essayé de l'expliquer dans ma déclaration préliminaire, c'est vraiment une autre façon pour nous de réduire les taux d'intérêt. Normalement, nous réduisons les taux d'intérêt simplement en abaissant le taux directeur, mais maintenant que le taux directeur est à sa valeur plancher, nous ne pouvons plus le faire. Par conséquent, pour abaisser les taux plus loin dans la courbe de taux où se situent les emprunts des ménages et des entreprises, nous achetons des obligations de l'État, ce qui fait baisser les taux. Oui, c'est un outil différent, mais il fonctionne efficacement de la même façon que notre outil traditionnel.
    En ce qui concerne notre bilan, nous avons été très prudents dans nos politiques pour définir les conditions dans lesquelles nous nous retirerions. Pour ce qui est de l'assouplissement quantitatif, nous avons indiqué que nous poursuivrons le programme jusqu'à ce que la reprise soit bien amorcée. Une fois que nous aurons déterminé que la reprise est suffisante, qu'elle est bien amorcée et qu'il n'est plus nécessaire de procéder à un assouplissement quantitatif, d'autres banques centrales l'ont fait, et il y a un certain nombre de mesures qu'il est possible de prendre.
    Il reste du temps, ce qui fait que nous n'avons pas encore pris de décision. Cependant, pour vous donner une idée de ce à quoi cela ressemble, la première chose est d'acheter moins; ensuite, on cesse d'acheter, mais on continue de réinvestir les obligations qui sont émises, pour maintenir le bilan stable. La chose suivante à faire est de cesser de réinvestir, de sorte qu'au fur et à mesure que les choses avancent, votre bilan diminue graduellement. Au besoin, il est même possible de vendre des actifs et de resserrer la politique monétaire plus rapidement. Chose certaine, lorsqu'il y a des craintes que l'inflation se propage, c'est quelque chose qu'il est possible de faire.
    En ce qui concerne les taux d'intérêt, nous avons indiqué que nous maintiendrions le taux directeur à sa valeur plancher jusqu'à ce que les capacités excédentaires soient absorbées. Encore une fois, cela définit les conditions de sortie. Une fois les capacités excédentaires absorbées, je pense qu'on peut s'attendre à ce que les taux d'intérêt augmentent. Encore une fois, ce n'est pas pour demain. Selon nos projections, ce sera en 2023.
(1630)
    Merci.
    C'est une excellente transition vers ma prochaine question, parce que votre plus récent rapport sur la politique monétaire souligne qu'une importante marge de capacités excédentaires dans l'économie freinera probablement l'inflation jusqu'en 2022 ou 2023. De plus, le Rapport sur la viabilité financière du directeur parlementaire du budget publié le 6 novembre indique que la politique financière actuelle du gouvernement fédéral est viable et qu'il est possible d'augmenter les dépenses de façon permanente. Bien que les niveaux de dépenses et d'endettement du gouvernement fédéral soient largement considérés comme viables, on craint que les dépenses de certaines provinces ne le soient pas.
    Que peut faire la Banque du Canada pour assurer la viabilité financière des provinces, et le gouvernement fédéral peut-il jouer un rôle dans la gestion de la dette provinciale?
    Monsieur Macklem, nous allons essayer de vous demander de vous en tenir à une minute, si vous le pouvez.
    D'accord. Je pense pouvoir être assez bref.
    Pour répondre à la première partie de votre question, il incombe aux provinces de gérer leurs affaires financières de façon responsable. En abaissant la courbe de taux de la dette du gouvernement du Canada, cela aide aussi les gouvernements provinciaux. Ils financent à un taux supérieur à celui du gouvernement du Canada, de sorte que lorsqu'on abaisse la courbe du gouvernement du Canada, cela a tendance à abaisser la courbe provinciale également. Indirectement, nous réduisons aussi leurs coûts de financement, mais ce serait à peu près tout.
    Merci à vous deux.
    Nous allons faire un bref tour de table avec M. Ste-Marie, suivi de M. Julian, pour deux minutes et demie chacun, puis nous passerons à M. Kelly, pour cinq minutes.
    Monsieur Ste-Marie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Au printemps dernier, au début de la crise, plusieurs acteurs avaient des inquiétudes quant à la stabilité du système financier canadien et à la solvabilité de certaines administrations publiques provinciales.
    Maintenant, huit ou neuf mois plus tard, quelle évaluation êtes-vous en mesure de faire sur ces deux niveaux d'acteurs?
    Je vais demander à Mme Wilkins de vous répondre dans un moment, parce qu'elle était ici en mars et en avril.
    En résumé, durant cette période, la Banque du Canada a lancé un programme pour acheter des obligations provinciales. Ce programme était une mesure de soutien pour essayer d'aider à relancer le marché. Cela a réussi. Nous avons mis fin à notre programme pour acheter des fonds monétaires provinciaux.
    L'autre programme est en place jusqu'en avril prochain. Toutefois, la demande est très faible, parce que le marché des obligations provinciales fonctionne très bien en ce moment.
    Madame Wilkins, voulez-vous ajouter quelque chose? Vous étiez là, quand ces programmes ont été créés.
    Oui.
    C'est vrai que, depuis longtemps, nous parlons du niveau de dettes très élevé parmi plusieurs acteurs, que ce soit les entreprises ou les ménages. Cette situation n'existe pas seulement au Canada; elle est internationale. Je ne peux pas parler de la solvabilité des provinces individuellement. Cette question s'adresserait à quelqu'un d'autre.
    Une façon de comprendre le point de vue des marchés financiers sur le risque est de regarder les primes de risques, lorsque les provinces émettent des obligations. Quand nous avons lancé notre programme, il était très petit, mais le but était de trouver une façon d'améliorer la performance des marchés. Ce n'était pas du tout pour financer les provinces, mais cela a fonctionné. Pour l'Ontario et le Québec, la prime de risque est passée à 120 points de base, ce qui est quand même très élevé. Aujourd'hui, c'est la moitié. Les primes de risque ont baissé dans toutes les provinces.
     Puisque le marché fonctionne mieux, nous ne sommes pas obligés de jouer le même rôle qu'au printemps.
(1635)
    Merci.

[Traduction]

     Monsieur Julian, allez-y.
    J'ai trois petites questions. Je vous remercie de la réponse complète que vous avez donnée à ma dernière question.
    Monsieur le gouverneur Macklem, vous êtes en train d'effectuer un examen en vue du renouvellement du mandat de la Banque du Canada l'automne prochain. Avez-vous un échéancier à cet égard, et pourriez-vous en faire part au comité des finances une fois que ce sera terminé?
    L'entente actuelle va jusqu'à la fin de 2021, alors il faudrait la renouveler avant la fin de l'année prochaine. Oui, nous serons très heureux de comparaître devant le comité des finances à ce sujet-là.
    Deuxièmement, dans le témoignage du BSIF plus tôt cette année, nous avons appris qu'environ 750 milliards de dollars ont été offerts en soutien des liquidités du secteur bancaire. La part de la Banque du Canada aurait été d'environ 300 milliards de dollars.
    Pouvez-vous confirmer le montant réel du soutien des liquidités offert aux grandes banques canadiennes?
    Il y a plusieurs programmes, mais le plus important s'appelle le programme des opérations de prise en pension à plus d'un jour. Il s'agit essentiellement d'un programme dans le cadre duquel nous leur prêtons de l'argent. Cet argent est essentiel pour leur permettre de financer des hypothèques, des prêts personnels et des prêts commerciaux.
    Oui, je suis au courant. Je veux avoir un chiffre.
    La situation évolue, mais le 15 juillet, probablement le plus près du sommet, les opérations de prise en pension à plus d'un jour se chiffraient à 195 905 000 000 $.
    Ce serait le soutien total en matière de liquidités offert par la Banque du Canada.
    Il s'agit du programme le plus important. Nous avons créé environ 11 programmes en l'espace de deux semaines. Ces opérations sont le principal outil de financement, mais nous avons acheté toutes sortes d'actifs: des obligations hypothécaires du Canada, des obligations du gouvernement du Canada...
    Est-il possible...
     Il y a toutes sortes de...
    Désolé de vous interrompre.
    Je ne peux pas vous donner un chiffre. Il y a 11 programmes, qui changent chaque semaine.
    Seriez-vous...
    Je me demande, pour simplifier les choses, si nous pourrions obtenir une réponse écrite pour expliquer cela. Ce serait peut-être la meilleure façon de procéder.
    Votre troisième question...
    C'est une bonne suggestion, monsieur le président. Je serai heureux de le faire.
    Merci beaucoup.
    Les milliardaires ont augmenté leur richesse de 53 milliards de dollars. La sous-gouverneure Wilkins a indiqué qu'il fallait modifier les politiques fiscales internationales, afin que les entreprises numériques fassent leur juste part.
    Êtes-vous inquiet — et je vous pose la question à tous les deux — de cette perception selon laquelle certains très gros joueurs ont fait beaucoup d'argent pendant cette pandémie et que les gens ordinaires ont été laissés pour compte?
    Nous craignons que cette pandémie ne creuse les écarts dans la société. Si vous regardez l'emploi en particulier, il ne fait aucun doute que cette pandémie a particulièrement touché les Canadiens à faible revenu. Dans notre rapport sur la politique monétaire, un graphique, que je trouve vraiment stupéfiant, montre que si vous regardez les pertes d'emplois depuis le début de la pandémie, il y a eu une certaine reprise de l'emploi pour les Canadiens à faible revenu, mais les niveaux demeurent d'environ 20 % inférieurs à ceux précédant la pandémie. En moyenne, les autres Canadiens ont retrouvé leur niveau d'emploi d'avant la pandémie. Ce que cela montre, c'est que cette pandémie a particulièrement touché les travailleurs à faible revenu. Bon nombre d'entre eux sont des jeunes, des femmes et des immigrants récents, et nous sommes préoccupés par le fait que, plus longtemps les gens sont au chômage, plus leurs compétences se détériorent et plus il est difficile pour eux de réintégrer le marché du travail, ce qui peut les décourager et les inciter à abandonner la recherche d'un emploi. C'est pourquoi il est vraiment important que nous fassions tout ce que nous pouvons pour aider l'économie à se rétablir et redonner du travail aux Canadiens. C'est vraiment la raison pour laquelle nous offrons cette mesure extraordinaire de stimulation de l'économie par la politique monétaire, afin de remettre les gens au travail et de ramener l'inflation à la cible. C'est la meilleure contribution que nous puissions apporter pour essayer de combler les écarts qui se creusent depuis la pandémie.
(1640)
    D'accord. Merci.
    Nous devons poursuivre.
    Je vous donne la liste des intervenants jusqu'à ce que nous terminions à 17 heures. Nous avons M. Kelly, M. Fragiskatos, M. Poilievre, je crois, et Mme Dzerowicz, et nous essaierons de donner la parole à M. McLeod à la fin pour que tout le monde ait l'occasion de s'exprimer.
    Monsieur Kelly.
    Combien la Banque du Canada risque-t-elle de perdre si les taux d'intérêt augmentent avant les dates d'échéance des titres que vous détenez?
    Les programmes d'achat de la Banque du Canada sont indemnisés par le gouvernement du Canada, de sorte que nous ne serions pas perdants.
    Si les taux augmentent, quel est le risque pour l'économie canadienne et pour les Canadiens?
    Si nous vendions les obligations avant leur échéance, il pourrait y avoir des gains ou des pertes en capital. C'est tout à fait normal. Si nous les conservons jusqu'à leur échéance, bien sûr, cela ne se concrétisera pas. Il est difficile de répondre à cette question. Nous avons indiqué que notre programme d'assouplissement quantitatif se poursuivra jusqu'à ce que la reprise soit bien amorcée...
    Vous avez dit que...
    Je m'attends à ce que nous conservions ces obligations pendant un certain temps.
    Vous avez dit à plusieurs reprises aujourd'hui que... Mme Jansen vous a demandé si vous alliez mettre fin à l'assouplissement quantitatif lorsque l'inflation atteindra 2 %. Vous avez répondu que vous vous attendiez à ce que la reprise soit bien amorcée avant cela. Quand saurons-nous que la reprise est bien amorcée et quand pouvez-vous vous engager à mettre fin à l'assouplissement quantitatif?
    J'aimerais pouvoir mettre une date au calendrier pour tout le monde, mais il y a un degré très élevé d'incertitude au sujet de l'évolution de l'économie, qui est vraiment étroitement lié à l'incertitude au sujet de l'évolution du virus. Malheureusement, c'est ce que nous vivons au moment où nous nous parlons, avec les cas qui augmentent et les nouvelles restrictions qui doivent être imposées à l'économie. Nous avons été très clairs au sujet des conditions dans lesquelles nous procéderions. Nous ne sommes pas en mesure de fixer une date avec un degré élevé de certitude, et je ne voudrais pas vous donner une fausse impression de précision.
     D'accord. Cela semblait moins clair lorsqu'il n'était plus question du seuil d'inflation de 2 %.
    Je n'ai que quelques minutes, alors je vais céder mon temps de parole à M. Poilievre. Je crois qu'il a une question à poser.
    Il aura lui aussi la chance d'intervenir, monsieur Kelly.
    Allez-y, monsieur Poilievre. Vous avez environ trois minutes.
    Monsieur le gouverneur, permettez-moi de vous dire que cela ne me rassure aucunement que vous soyez indemnisés par le gouvernement du Canada. Cela signifie que le contribuable doit assumer les pertes que vous avez subies.
    M. Kelly a posé une bonne question. Vous achetez ces obligations à des prix gonflés, parce que, bien sûr, vous les avez gonflées en injectant 400 milliards de dollars dans les marchés. Au fur et à mesure que les taux d'intérêt reviendront à la normale, le prix de ces obligations diminuera, parce que, bien sûr, le prix des obligations est inversement corrélé aux taux d'intérêt. Autrement dit, vous aurez une perte financière sur ces obligations. Nous parlons ici d'obligations et de bons du Trésor public d'une valeur de près d'un demi-billion de dollars.
    Combien la Banque perdrait-elle si les taux d'intérêt à moyen terme revenaient à la normale?
    Comme je l'ai dit en réponse à la question précédente, si vous les conservez jusqu'à leur échéance, vous ne réaliserez pas cette perte. Je pense qu'il ne faut pas oublier que nous n'appliquons pas la politique monétaire pour maximiser nos revenus. Nous le faisons pour soutenir l'économie canadienne et ramener l'inflation à la cible.
    D'accord. Mais...
    C'est l'objectif de la politique monétaire.
    L'hon. Pierre Poilievre: D'accord.
    M. Tiff Macklem: C'est ce qui nous guide dans nos décisions.
    Vous dites que si vous conservez ces obligations jusqu'à leur échéance, vous n'aurez pas de gain ou de perte en capital. C'est bien sûr vrai, mais vous subirez une perte chaque année, puisque les taux d'intérêt que vous devez payer à vos déposants dans des circonstances normales sont supérieurs au montant que vous percevez du gouvernement du Canada, ce qui signifie que vous subirez une perte annuelle. Comme vous l'avez admis plus tôt, cette perte est assumée par le contribuable canadien. Si vous payez à vos déposants un taux d'intérêt plus élevé, comme ce serait le cas en vertu des taux d'intérêt normaux, alors vous percevez de l'argent du gouvernement du Canada sur les bons du Trésor et les obligations que vous détenez, vous perdez de l'argent chaque année, et les contribuables en assument le coût.
    Expliquez-nous pourquoi nous devrions être rassurés par le fait que vous détenez tout cela alors que les pertes que vous subissez sont toutes refilées aux contribuables.
(1645)
    La Banque du Canada fait normalement de l'argent. En rétrospective, elle a fait de l'argent chaque année. Parce que nous gagnons le seigneuriage sur la monnaie que nous produisons, et que nos dépenses ne représentent qu'une partie de ce seigneuriage, nous remettons un chèque tous les trimestres au gouvernement du Canada.
    Nous sommes...
    Serait-ce le cas si les taux d'intérêt augmentaient?
    Vous savez, il est très difficile de faire des prévisions en fonction de toute une série d'hypothèses.
    Nous allons terminer cette série de questions hypothétiques, pour le moment, et nous y reviendrons, monsieur Poilievre, au prochain tour.
    Nous avons M. Fragiskatos, qui sera suivi de M. Poilievre à nouveau, je crois.
    Monsieur Fragiskatos.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le gouverneur Macklem et madame la première sous-gouverneure Wilkins, d'être ici aujourd'hui.
    Monsieur le gouverneur, tout d'abord, vous avez parlé de la nécessité pour les citoyens de pouvoir faire confiance à leurs institutions et à ceux qui les dirigent. Certains députés de l'opposition ont perpétué une théorie qui s'est développée depuis le début de la pandémie et qui laisse entendre qu'il y a un complot en cours pour imposer une sorte d'ordre mondial socialiste dans l'intérêt de l'élite — l'élite étant dans le secteur financier, les politiciens du monde — qui veut transformer le monde en une sorte de symbole socialiste, si je peux m'exprimer ainsi.
    C'est ce que je comprends de cette théorie du complot appelée la « grande réinitialisation ». Je ne peux pas croire que je pose cette question en comité parlementaire, mais la confiance est le ciment essentiel de la démocratie. Cette idée est-elle fondée?
    Je ne comprends pas exactement quelle est la question...
    Je parie que c’est la première fois qu’on vous pose cette question, monsieur Macklem.
    Oui. En règle générale, les banques centrales ne commentent pas les théories du complot, mais permettez-moi de souligner que...
    C’est le monde dans lequel nous vivons, malheureusement, et les députés de l’opposition perpétuent de telles théories.
    Laissez M. Macklem répondre à la question, monsieur Fragiskatos.
    Je suis tout à fait d’accord pour dire que la confiance est un ingrédient essentiel. À bien des égards, la banque centrale table sur la confiance. Notre travail consiste à faire en sorte que les gens aient confiance dans la valeur de l’argent, dans la stabilité de l’économie et du système financier. Notre système repose vraiment sur cette confiance.
    Comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, ce genre de témoignage devant les parlementaires contribue au maintien de la confiance des Canadiens et à la reddition de comptes que nous leur devons.
     Je comprends cela, et je ne vois aucun complot malveillant derrière les politiques qui visent à lutter contre les changements climatiques, à réduire les inégalités ou à relever d’autres défis au fil du temps.
    Merci à toute votre équipe pour le travail que vous faites.
    Je veux aussi vous demander d’être très clair au sujet de nos finances. La dette et les déficits du Canada sont-ils supportables?
    À l’heure actuelle, les marchés financent assez bien votre dette. Le ratio de la dette au PIB du Canada est le plus faible des pays du G7. Les programmes qui soutiennent l’économie ont certainement été très utiles. Ils ont permis d'éviter des résultats bien pires, et ils seront très importants pour soutenir la reprise.
    Comme je l’ai dit la dernière fois, nous avons tiré quelques leçons des récessions et des épisodes passés. Nous savons qu’en 2008-2009, à l’échelle mondiale, les mesures de relance ont été retirées trop rapidement, ce qui a entraîné une reprise beaucoup plus lente que ce qu’elle aurait pu être si on avait procédé autrement.
    D’un autre côté, nous savons, d’après notre propre expérience au Canada dans les années 1990, qu'un déficit structurel risque de créer un nouveau problème, alors il faut l'éviter aussi.
(1650)
    Merci beaucoup.
    Il me reste une minute pour parler des changements climatiques, qui, je le sais, vous passionnent énormément. Il est juste de dire qu’après la récession de 2008, les gouvernements ont plus ou moins ignoré la question des changements climatiques, non seulement au niveau fédéral dans ce pays, mais aussi dans d’autres démocraties.
    Nous avons maintenant l’occasion de nous attaquer sérieusement à ce problème, et je suis heureux de voir que le gouvernement s’apprête à adopter une vision zéro émission nette. Toutefois, que diriez-vous à ceux qui, au lieu de saisir cette occasion pour se concentrer sur les changements climatiques, proposent d'adopter des approches plus traditionnelles de la croissance économique et de la reprise économique qui suivra la pandémie?
     Monsieur le gouverneur, qu’en pensez-vous? Pouvons-nous toujours nous concentrer sur les changements climatiques tout en faisant ce qu'il faut pour l’économie? Pouvons-nous agir sur les deux fronts?
    La semaine dernière, au Forum des politiques publiques, j’ai fait quelques remarques sur les changements climatiques, en particulier sur ce que fait la Banque du Canada à cet égard.
    Je dirais que les changements climatiques deviennent un problème de compétitivité pour les entreprises canadiennes. De plus en plus, les consommateurs, les investisseurs et les travailleurs se soucient de l’empreinte écologique des produits qu’ils achètent, des entreprises pour lesquelles ils travaillent et de celles dans lesquelles ils investissent, et cela se reflète dans les flux de capitaux. Comme vous l’avez mentionné, et je suis d’accord avec vous, à la fin de 2008-2009, les changements climatiques ont été mis en veilleuse.
    Cette fois-ci, et c’est intéressant, cette crise semble avoir attiré l’attention des gens sur la nécessité de renforcer la résilience et d’éviter les catastrophes; en conséquence, il y a des flux de capitaux très importants dans les investissements environnementaux, sociaux et de gouvernance, ce qu’on appelle les types d’investissements ESG. La rapide montée en puissance de ce genre d'investissement constatée avant la crise n'a pas fléchi depuis.
    Nous allons devoir nous arrêter ici.
    Je suppose, monsieur Poilievre, que vous représenterez l’opposition officielle au prochain tour.
    Nous allons passer à M. Poilievre, puis à Mme Dzerowicz.
    Les trois mesures de l’inflation de base ont déjà presque atteint la cible. Elles sont de l’ordre de 1,6 à 1,8, alors nous approchons de la cible. La seule raison pour laquelle l’IPC est inférieur à cela, c’est la baisse ponctuelle du prix du carburant et certaines particularités des coûts d’hébergement en raison de l’effondrement du secteur hôtelier, mais à part cela, l’inflation est essentiellement au niveau visé.
    Pourquoi continuez-vous d’imprimer de l’argent et d’acheter des obligations d’État alors que l'inflation est au niveau visé?
    Il y a deux ou trois choses. Tout d’abord, comme vous le savez sans doute, la cible est l’inflation mesurée par l’IPC global. C’est ce qui compte pour les Canadiens dans ce qu’ils achètent. Elle était de 0,7 en octobre et, oui, à mesure que le choc des prix du pétrole diminue d’une année à l’autre, nous nous attendons à ce que l’inflation augmente progressivement, mais il y a énormément de capacité excédentaire ou inutilisée dans l’économie.
    Plus de 600 000 Canadiens n’ont pas retrouvé leur emploi, et nous sommes d’avis que la reprise est très lente. Nous avons commencé la phase de réouverture avec un rebond très impressionnant de l’activité économique. Cette phase est maintenant terminée et nous sommes dans une phase de récupération plus lente, plus cahoteuse et plus difficile, où il y a encore beaucoup de chômage. Pour mettre ces 600 000 emplois en perspective, au pire moment de la crise financière de 2008-2009 au Canada, nous avons perdu environ 430 000 emplois. Il nous reste encore beaucoup à faire.
    Cela exerce une forte pression à la baisse sur l’inflation, alors nous nous appuyons sur cela pour essayer d’empêcher une désinflation et, en fait, de revenir à la cible.
    Cela dit, vous avez tout à fait raison de dire que la situation économique est actuellement bien pire qu’en 2008, tant en termes absolus que par rapport à nos concurrents. Nous nous classons au deuxième rang des pays du G7 pour ce qui est du taux de chômage. Ce n’était pas le cas à l’époque.
    Il est possible que l’inflation et le taux chômage élevé coexistent. En fait, il y a eu ce qu’on a appelé la « stagflation » dans les années 1970 et 1980. C'est étonnant que l’inflation de base corresponde presque à la cible, même avec un taux de chômage exceptionnellement élevé. Cela suggère qu’on ne peut pas nécessairement s’attendre à ce que l’inflation reste faible jusqu’à ce que le chômage diminue.
    Pourquoi êtes-vous si certain que nous ne connaîtrons pas le même genre de stagflation qu'à la fin des années 1970 et au début des années 1980, lorsque les gouvernements appliquaient exactement les mêmes politiques qu’aujourd’hui, c’est-à-dire de faire d'importants déficits financés grâce à la planche à billets?
(1655)
    Je suis d’accord avec vous. Il y a d’importants éléments de l’offre et de la demande dans ce choc. Le resserrement de l'offre induit des coûts additionnels qui viendront compenser les pressions à la baisse dues à une demande poussive. C’est ce que nous constatons dans certains secteurs de l’économie où la demande a augmenté, ou encore où l’offre a été soumise à de sérieuses contraintes.
    Cependant, d’après ce que nous avons vu jusqu’à maintenant et ce que nous prévoyons continuer de faire, nous pensons que le renforcement des tendances désinflationnistes a plus de poids sur les coûts que cette tension entre l'offre et la demande, si bien que, selon nous, les effets s'annulent.
    Puis-je poser une dernière question, monsieur le président?
    Nous n’avons peut-être pas tout à fait raison. C’est l’un des avantages d’une cible en matière d’inflation. Nous visons la cible, ce qui nous permet de garder le cap. C’est ce sur quoi nous mettons l’accent. S’il s’avère que nous avons tort et qu’il y a plus de pressions inflationnistes que prévu, nous nous adapterons. Nous avons les outils pour ce faire.
    Pouvez-vous promettre au Comité que vous n’abandonnerez pas la cible actuelle en matière d’inflation? C’est oui ou non.
    Oui.
    Merci.
    Merci à vous deux.
    Nous allons passer à Mme Dzerowicz, puis à M. McLeod pour quelques minutes.
    Madame Dzerowicz.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens tout d’abord à vous remercier, monsieur le gouverneur, ainsi que la sous-gouverneure, pour votre leadership exceptionnel pendant cette pandémie et pour l'excellente façon dont vous servez notre pays.
    Je vais commencer par vous, monsieur le gouverneur. J’ai trois séries de questions, alors je vais essayer de les poser très rapidement.
    Vous avez dit que le Canada avait le ratio de la dette au PIB le plus bas. Vous avez également mentionné que les programmes de soutien d’urgence que nous avons mis en œuvre ont été très utiles pour notre économie et ont empêché que la situation empire.
    Pouvez-vous nous dire comment le Canada se compare à ses alliés du G7?
    En fonction de quelle dimension?
    Il s’agit de savoir si nous nous en sortons bien avec notre ratio de la dette au PIB et nos programmes. Vous avez entendu M. Poilievre mentionner que nous avons un très fort taux de chômage par rapport aux autres pays du G7, même si 76 % de tous les emplois perdus pendant la pandémie ont été retrouvés.
     Comment le Canada s’en sort-il sur le plan économique, au moment où nous traversons cette pandémie, comparativement aux autres pays du G7?
    En bref, tous les pays du G7 ont été énormément touchés par cette pandémie. Elle n’a épargné aucun pays au monde.
    Le Canada et les pays du G7 en général ont la chance d’être assez riches et d’avoir la capacité financière d’aider les plus vulnérables. Ils ont des antécédents d’inflation crédible, faible et stable et ont donc la capacité de mettre en œuvre des politiques monétaires extraordinaires.
    Malheureusement, beaucoup d’autres pays dans le monde n’ont pas cette chance, et leurs résultats sont bien pires.
     Merci.
    Vous avez passé pas mal de temps aujourd’hui à expliquer que la pandémie a creusé les écarts dans notre pays et à dire que la situation pourrait empirer si nous n’apportons pas la bonne réponse. Vous avez également indiqué, un peu plus tôt dans votre témoignage, que nos mesures de soutien du revenu ont été très utiles.
    Nous sommes reconnus pour notre grande générosité en ce qui concerne notre soutien d’urgence. Nous avons créé un régime d’assurance-emploi très souple, nous avons la Prestation canadienne de la relance économique, nous avons investi énormément dans la formation et le recyclage. On s’attend à ce que nous fournissions — je ne sais pas quand cela se produira — du soutien aux secteurs qui ont été touchés de façon disproportionnée.
    Que pourrions-nous faire de plus? Tout de suite après son élection en 2015, le gouvernement a augmenté les impôts du 1 % des plus riches ou réduit ceux de la classe moyenne, puis instauré l’Allocation canadienne pour enfants. Il s’est montré extrêmement préoccupé par l’inégalité des revenus depuis le début. Toutes nos mesures montrent notre préoccupation à cet égard. Y a-t-il quelque chose que nous ne faisons pas et que nous devrions faire?
(1700)
     Je vais laisser les parlementaires débattre de ces questions et tirer des conclusions. Permettez-moi de souligner quelques points, cependant, que vous devez garder à l’esprit.
    Il ne faut pas oublier que ce qu’il faut vraiment éviter, c’est le chômage à long terme, car c’est vraiment ce qui entraîne des coûts permanents pour la société. Pour vous donner une statistique simple, quelqu’un qui est mis à pied de façon permanente prend deux fois plus de temps à retrouver son emploi que quelqu’un qui est mis à pied temporairement.
    Monsieur Macklem, je suis désolée, mais j’ai une autre question à vous poser. Je m’excuse, mais j’aimerais poser une autre question, si vous n’y voyez pas d’inconvénient.
    D’accord.
    Ensuite, si vous avez le temps à la fin, vous pourrez peut-être terminer ce que vous disiez, si cela vous convient.
    C’est parce qu’il y a tellement de désinformation qui est véhiculée et qui ressort lors des réunions de ce comité. Mon collègue, M. Fragiskatos, a essayé de remédier à cette situation. C'est la conviction qu'il existe un mouvement secret par lequel les riches et l'élite de notre société tentent d'utiliser cette pandémie pour s'enrichir au détriment des classes moyennes et des travailleurs.
    J’aimerais vous poser deux questions très précises.
    L'objectif des mesures prises par la Banque du Canada — l’achat d’obligations et l’assouplissement quantitatif — est-il précisément d'avoir un effet négatif sur les Canadiens de la classe moyenne et des classes inférieures?
    Évidemment pas.
    D’accord.
    Les mesures et les actions prises par la Banque du Canada visent-elles à avoir un effet positif sur les riches au Canada?
    Non.
    Permettez-moi de dire que toute politique aura des effets différents sur la répartition des revenus. Nous faisons certainement tout ce que nous pouvons pour les réduire au minimum.
    Nous mettons beaucoup l’accent sur l’utilisation de nos outils pour soutenir l’économie, remettre les gens au travail et ramener l’inflation au taux ciblé. Nous modifions les taux d’intérêt. Évidemment, c’est néfaste pour les épargnants: ils obtiennent un rendement inférieur; les emprunteurs obtiennent un meilleur taux d’emprunt.
    Il y a des effets inévitables sur la répartition des revenus, mais l’objectif est vraiment de redonner du travail aux Canadiens et de ramener l’inflation au taux ciblé, et c’est un avantage général pour la société.
    Merci.
    Merci à vous deux.
    Je veux que tous nos membres puissent poser une question. Monsieur McLeod, vous allez devoir conclure. Si vous pouviez poser une question et une question complémentaire, ce serait parfait.
    Merci, monsieur le président. Je serai bref.
    Si possible, je vais laisser la première sous-gouverneure Wilkins répondre à la dernière question et lui donner ainsi l’occasion d'avoir le dernier mot.
    D’accord, si vous voulez bien rester un peu plus longtemps, nous ferons cela. Nous passerons ensuite à M. McLeod.
    Eh bien, pourquoi ne laissez-vous pas M. McLeod poser sa question? Nous passerons ensuite à la sous-gouverneure.
    D’accord. Nous allons régler cela; il n’y a pas de problème.
    Monsieur McLeod, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    J’aimerais poser une question au sujet du coût d’emprunt dans le cas où le taux d’intérêt augmentait de 1 %. Je veux connaître les conditions à respecter avant d’envisager une augmentation de 1 % des taux d’intérêt.
    Vous avez dit tout à l’heure que la Banque ne finance pas les gouvernements, mais qu’elle influe sur le coût d’emprunt, et j’aimerais donc vous poser cette question.
     Je pense que c’est une dernière question parfaite.
     La première sous-gouverneure, Mme Wilkins, pourra nous donner un dernier conseil stratégique.
(1705)
    Nous avons dit publiquement que nous nous engageons à maintenir les taux d’intérêt à leur niveau actuel, qui est bas, jusqu’à ce que les écarts de production s'amenuisent et que l’économie roule à plein régime. Selon nos prévisions, ce n’est pas pour bientôt; c’est quelque part en 2023. L'augmentation de 1 % ou plus est fonction de la vigueur de l’économie.
    Si la situation nous permet de ramener les taux d’intérêt à un niveau plus neutre, qui est maintenant d’environ 2,25 %, c’est une très bonne nouvelle pour les Canadiens, pour les entreprises et les ménages. C’est le premier point.
    Pour ce qui est de ces coûts, lorsque vous parlez de hausser les taux d’intérêt, nous augmentons le taux d’intérêt à court terme, mais les marchés décident de ce que seront les taux à long terme. Cela comprend les taux auxquels sont soumis les entreprises, les ménages et les gouvernements. L’impact final sur les emprunteurs dépend de ce qu'il advient de cette courbe de taux d’intérêt. Vous pouvez faire des calculs, mais ils seront tous hypothétiques jusqu’à ce que cela se produise.
    Nous n’essayons pas d'esquiver la question en ne donnant pas de chiffres précis; nous essayons d’être réalistes quant à ce que nous pouvons savoir avec certitude.
    Pour revenir à votre question, lorsque les taux d’intérêt commenceront à augmenter, ce sera parce que l’économie canadienne reposera sur des bases solides.
    J’aimerais dire un dernier mot.
    Cela a été un honneur pour moi de travailler comme première sous-gouverneure au cours des six dernières années et demie. Vous manifestez beaucoup de respect pour la Banque du Canada et beaucoup de confiance envers moi. Je vous en remercie. Je suis vraiment fière de ce que la Banque a accompli avec l’équipe, et je sais qu’elle est entre d’excellentes mains avec Tiff Macklem et toute l’équipe.
    Merci à vous deux.
    Merci.
    Merci.
    Madame Wilkins, vous nous avez donné beaucoup de raisons de vous faire confiance. Voilà l’essentiel.
    Je tiens à vous remercier tous les deux d’être venus aujourd’hui.
    J’invoque le Règlement, monsieur le président.
    Quel est votre rappel au Règlement?
    Vous constaterez qu’il y a consentement unanime pour que le Comité remercie la première sous-gouverneure de ses nombreuses années de service au Canada et de son travail assidu.
    Nous lui souhaitons bonne chance dans tous ses projets.
    Je ne vois aucune objection à ce rappel au Règlement.
    Pas de vous, monsieur Ste-Marie?
    M. Ste-Marie a dit qu’il voulait simplement dire la même chose en français.
    Je pense que c’est un bon mot de la fin.
    Merci à vous deux de votre présence.
    Je sais qu’à la Banque du Canada, en tout cas au début de cette pandémie, tous les employés ont travaillé de longues heures pour trouver des solutions.
    Veuillez également leur transmettre nos remerciements.
    Encore une fois, merci beaucoup de votre présence.
    Chers collègues du Comité directeur, nous reprendrons dans quelques instants. Vous devrez vous déconnecter, puis vous reconnecter.
    La séance est levée.
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