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FISH Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FISHERIES AND OCEANS

COMITÉ PERMANENT DES PÊCHES ET DES OCÉANS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 15 avril 1999

• 0917

[Traduction]

Le président (M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.)): Conformément au paragraphe 108(2), nous poursuivons nos travaux et nos discussions sur la chasse aux phoques.

Ce matin, nous aimerions souhaiter la bienvenue aux représentants de Focus Technologies, M. Winters et M. Lomax.

Étant donné que certains d'entre vous étaient déjà ici hier, vous connaissez déjà notre façon de procéder. Nous commençons par un court exposé suivi d'une période de discussion et de questions par les membres du comité.

Monsieur Winters, je suppose que vous avez votre mémoire. Nous aimerions maintenant vous entendre nous parler de l'industrie de la chasse aux phoques.

M. George Winters (conseiller principal en matière de pêches, Focus Technologies Inc.): Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs.

J'aimerais d'abord me présenter. Comme l'a dit le président, je m'appelle George Winters, je suis conseiller principal en matière de pêche auprès de Focus Technologies. Je suis un ancien chercheur scientifique et directeur de recherche du ministère des Pêches et des Océans. J'ai effectué dans le passé des analyses poussées de la dynamique des populations de phoques du Groenland et ces recherches remontent aussi loin que le milieu des années 70. Je suis aussi un ancien président du Sous-comité des mammifères marins. J'ai présidé des organismes d'évaluation à l'échelle internationale qui ont effectué des évaluations des populations de phoques du Groenland et de phoques à capuchon.

Dans mon exposé de ce matin, je vous présenterai les résultats de deux communications scientifiques que nous avons produites dans le cadre d'un contrat pour le ministère provincial des Pêches et de l'Aquaculture. Ces communications ont été examinées par des pairs du Sous-comité des mammifères marins en février, et ils ont fait l'objet de très peu de critiques.

Dans le premier document, nous avons simulé au moyen d'un exercice de modélisation la réaction d'une population de phoques du Groenland à un éventail d'autres stratégies de récolte.

• 0920

Peut-être que vous pourriez vous tourner vers l'écran. Je suppose que la plupart des membres du comité, sinon tous, ont reçu un exemplaire de nos communications scientifiques.

En faisant les analyses des taux de récolte pour les stratégies de rechange, nous avons tout d'abord examiné le modèle d'évaluation des phoques du MPO et nous avons suggéré plusieurs améliorations à ce modèle sur le plan de l'analyse, et ces suggestions ont entraîné certains changements dans la situation de la population, et d'importantes augmentations dans la production de remplacement. L'exposé que vous a présenté M. Lavigne mardi faisait état des estimations non corrigées.

La première diapositive illustre le changement subi par la population de phoques du Groenland depuis le début des années 50. On estime actuellement que la population se situe autour de 5,4 millions de phoques. La population a donc triplé par rapport à 1,5 million de phoques en 1971, à l'époque où les quotas ont été introduits pour la première fois. Cette population représente également une augmentation de 50 p. 100 par rapport à la population estimée au début des années 50. À l'époque, on considérait que cette population avait entièrement récupéré après l'arrêt de la chasse aux phoques au cours de la Deuxième Guerre mondiale et la diminution de la chasse pendant la Dépression alors qu'il y avait une très faible demande pour les produits du phoque.

Dans notre conclusion, nous affirmons que la population actuelle de phoques du Groenland est vraisemblablement plus importante qu'à tout autre moment depuis que la chasse a commencé.

Nous avons également examiné les systèmes de gestion actuels et historiques de la population de phoques du Groenland. Lorsque j'ai commencé à participer aux travaux sur les phoques du Groenland dans les années 70, le gouvernement fédéral avait une politique qui permettait à la population d'augmenter lentement jusqu'à ce qu'elle atteigne la production maximale équilibrée que l'on avait estimée pour la population. Il s'agit de la population qui permet à la chasse d'extraire la production maximale pendant la plus longue période sans pour autant diminuer la population.

La politique actuelle est fondée sur une mise à jour périodique de la production de remplacement. Telle que je la comprends, et telle qu'elle a été expliquée par M. Stenson, il s'agit de la production qui peut être tirée d'une population sans que celle-ci diminue. Il s'agit d'une politique de production à court terme. Toutefois, normalement, l'on utilise la production de remplacement uniquement dans une situation où l'on aurait atteint la population cible. Cette politique n'est pas appropriée dans une situation où l'on a pas d'objectif défini.

Dans notre analyse, nous avons étudié ce qu'il est convenu d'appeler les effets «relatifs à la densité». Il s'agit de changements que les populations effectuent naturellement dans leur propre abondance. Au fur et à mesure que la population augmente, les disponibilités alimentaires par individu diminuent et, par conséquent, il y a des effets sur la vitesse avec laquelle les phoques arrivent à maturité et sur leur capacité à se reproduire.

La diapo suivante montre le taux de grossesse qui est la proportion dans laquelle les femelles adultes donnent naissance à des petits. Le point de données le plus récent date de 1992. Il montre que le taux de grossesse diminue régulièrement jusqu'à atteindre 70 p. 100, alors que la norme se situait aux environs de 95 p. 100 au début et à la fin des années 70 avec une population relativement faible.

Autrement dit, alors que la population a augmenté, le taux de grossesse a chuté radicalement et il se situe actuellement au plus faible niveau jamais observé.

La diapo suivante montre l'âge moyen auquel les individus atteignent la maturité physiologique en fonction de la taille de la population. La réaction qui devrait normalement se produire est la suivante: au fur et à mesure que la population augmente l'âge moyen de maturité physiologique devrait aussi augmenter—c'est-à-dire que les phoques devraient atteindre la maturité physiologique à un âge de plus en plus avancé.

Cette situation se vérifie pour cette population. La seule exception est celle qui correspond au point de données de 1992, qui se situe bien au-dessous de la ligne. Cette situation peut s'expliquer par le fait que la population de phoques du Groenland peut se trouver temporairement au-dessous de sa capacité de peuplement ou encore il se peut que l'erreur d'échantillonnage soit importante et que le point ait été sous-estimé. À tout événement, comme pour le taux de grossesse, l'âge moyen à maturité indique une réaction liée à la densité.

• 0925

Ce que le graphique ne montre pas c'est une référence tirée de la documentation dans laquelle la croissance des jeunes femelles phoques a été analysée. On a trouvé qu'actuellement leur croissance est beaucoup plus lente, à la fois sur le plan de la longueur et de la masse corporelle, que ce qu'elle était au cours des années 70 à l'époque où les populations étaient faibles. En d'autres mots, la population actuelle qui a atteint des sommets probablement jamais égalés indique que cette population est perturbée sur le plan de la reproduction et qu'elle montre une croissance moins qu'optimale.

Voici nos conclusions les plus importantes. Je vous le répète, la population est extrêmement élevée à l'heure actuelle ce qui entraîne une perturbation au niveau de la reproduction et une croissance qui est moins qu'optimale. Nos estimations sont que la production de remplacement pour 1999 était de 402 000 individus, et je pense que nous sommes assez près des estimations réalisées par le MPO.

Nous avons également estimé que la production maximale équilibrée serait pour cette population de 280 000 phoques. Cette production maximale équilibrée serait atteinte pour une population dont la taille se situerait entre 3,5 millions et 4 millions de phoques si la réaction liée à la densité dans notre modèle décrivait de façon appropriée la façon dont la population réagira dans le futur.

Nous avons par ailleurs examiné un éventail de stratégies de récolte de rechange. Nous en énumérons quelques-unes ici. Une récolte de 400 000 phoques par année permettrait de réduire la population à ce qu'il est convenu d'appeler le niveau «PME» de production maximale équilibrée sur une période de plusieurs années. De toute évidence, si vous aviez une récolte soutenue plus élevée, la population atteindrait la PME au cours d'une période beaucoup plus courte. Notre examen de la documentation et des estimations des niveaux maximums atteints par la population indique que la population actuelle a déjà éclipsé la plupart de ces estimations.

Nous recommandons que les autorités responsables de la gestion reconsidèrent la réglementation de la population des phoques du Groenland au niveau de la PME. Cette politique était déjà en place à la fin des années 70 et elle a été abrogée lorsque la chasse a été réduite en 1983 ce qui a permis une explosion démographique.

Une population ayant atteint la PME possède un éventail d'avantages sur le plan biologique et de la conservation. Nous les avons énumérés dans le présent document. Ces avantages permettront d'atteindre des taux de croissance et de reproduction des phoques plus optimaux. Ils leur permettront aussi d'améliorer le rendement global de l'écosystème.

Nous donnons dans notre rapport un exemple de la consommation alimentaire en fonction de la biomasse pour la population actuelle de phoques du Groenland et cette consommation est à environ 450 tonnes. Les phoques consomment 7 millions de tonnes de poissons, soit 16 fois leur propre masse et pourtant leur production excédentaire—c'est-à-dire, leur addition marginale à l'écosystème—est à peine de 15 000 tonnes. La biomasse équivalente de morues consommerait entre 3 à 4 fois sa propre masse—autrement dit, peut-être 1,5 million à 2 millions de tonnes—et entraînerait une production d'environ 100 000 tonnes.

De plus, il y a une probabilité accrue que les stocks appauvris de morues puissent se rétablir. On ne dispose d'aucune certitude selon laquelle il y avait un rapport de cause à effet, mais s'il en existe un, dans ce cas, il est certain qu'il se pourrait qu'en réduisant la population de phoques on puisse améliorer la probabilité d'un rétablissement.

Le niveau de production maximal équilibré s'inscrit dans la ligne de pensée de la loi américaine sur la protection des mammifères marins dans laquelle on exige, pour toutes les importations de produits du phoque, que ces populations se situent à un niveau de production optimal. La PME est un niveau de production optimal.

Nous avons également un deuxième document dans lequel nous avons examiné le risque de conservation lié à ce qu'il est convenu d'appeler la «perte par coulage». La «perte par coulage» ou encore les phoques abattus et perdus, comme je pense que M. Lavigne les a définis il y a quelques jours, c'est-à-dire les bêtes qui sont atteintes et qui ensuite coulent à pic, et que l'on ne peut récupérer. Ces bêtes ne figurent dans aucune statistique officielle.

La «perte par coulage» est un facteur assez simple de ce que nous appelons la «flottabilité neutre». Les phoques n'ont pas suffisamment de graisse pour leur permettre de flotter. Le niveau d'huile des mammifères marins varie sur une base saisonnière.

• 0930

Dans notre analyse, nous avons modélisé le changement saisonnier dans l'épaisseur de la graisse de phoque et nous avons calculé quelle serait la perte par coulage en fonction de la distribution saisonnière des prises.

Dans notre modèle de perte par coulage, trois facteurs ont une incidence sur la perte par coulage—la proportion de phoques qui sont atteints dans l'eau; parmi les phoques qui sont atteints dans l'eau, la proportion de ceux qui ont une flottabilité neutre; et parmi ceux qui sont atteints dans l'eau et qui ont une flottabilité neutre, la proportion de ceux que les chasseurs peuvent récupérer en raison de leurs aptitudes et de leur expérience.

Nous avons contacté des observateurs expérimentés du MPO et nous avons obtenu des renseignements sur un éventail de ces facteurs. Les estimations que nous avons modélisées ont permis d'obtenir une meilleure estimation de 8 p. 100 de la perte par coulage. Ce chiffre se compare aux estimations de M. Lavigne qui situe le minimum à 19 p. 100 et le maximum à 87 p. 100, il me semble.

Les données recueillies par le MPO et que nous avons analysées indiquent que leurs estimations empiriques de 8 p. 100 sont identiques aux estimations que nous avons obtenues à l'aide de notre modèle. Nos estimations, tout comme celles du MPO, ne tiennent pas compte des estimations pour le Groenland occidental. Le Groenland occidental ne dispose d'aucune donnée relative à la perte par coulage.

Les scientifiques du Groenland occidental qui participaient à la réunion sur les mammifères marins du mois de février ont déclaré que la chasse était effectuée à 5 p. 100 par des chasseurs professionnels, et que ces taux de perte par coulage seraient équivalents au nombre de chasseurs professionnels. Quant à l'autre moitié, qui est le produit d'une chasse de subsistance, les chercheurs n'avaient aucune idée du nombre en cause.

Pour ce qui est des répercussions du taux de perte par coulage de 8 p. 100, il entraînerait la perte de 32 000 autres individus qui ne figureraient pas dans les statistiques déclarées d'un nombre prévu de 360 000 bêtes en 1999. Environ la moitié des prises non déclarées serait incluse dans les estimations courantes du taux de mortalité naturelle. Si vous ajustez votre production de remplacement en fonction des bêtes abattues non déclarées, vous vous trouvez encore bien en deçà des limites de conservation.

À titre de conclusion finale, il serait souhaitable d'obtenir des renseignements additionnels concernant les pertes par coulage. Il s'agit d'un facteur important. Toutefois, s'il est nécessaire pour cela de déplacer d'autres projets de recherche ayant une priorité plus élevée, je ne vous le conseillerais pas.

Si vous me permettez pour 13 secondes, j'aimerais répondre à une question que le comité a posée à M. Lavigne il y a deux jours et à laquelle il a donné une réponse incomplète. Je pense que la question était la suivante: Quels sont les prédateurs de la morue adulte? Il se trouve que j'ai avec moi un document qui a été présenté au Sous-comité des mammifères marins en février et qui passe en revue les prédateurs de la morue dans l'Atlantique Nord-Ouest.

Je vais vous lire leurs conclusions: «Les seuls prédateurs connus de la morue adulte sont le phoque du Groenland et le phoque à capuchon».

Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Winters.

Je dois vous dire que je suis impressionné. J'ai passé moi-même une grande partie de mon existence à jongler avec les sciences et les mathématiques et, à mon avis, vous avez bien choisi votre vocation. Je suis très heureux de voir quelqu'un qui est prêt à venir présenter à ce comité les faits bruts, les chiffres tels qu'ils sont de même que des conclusions définitives.

Gary, vous disposez de dix minutes.

M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Réf.): Merci, monsieur le président.

Il se trouve que je suis justement en train de lire quelque chose sur le problème de la chasse aux phoques. Il semble que nous ayons fait les manchettes des journaux depuis quelques jours avec cette question ici, à Ottawa.

George, nous avons déjà discuté de cette question, vous et moi, à bien des reprises, et en diverses occasions. Je suis très impressionné, comme notre président vient de le mentionner, par vos recherches et par les chiffres que vous avancez. Je pense qu'ils sont très complets. Mais je voudrais essayer de simplifier les choses et de résumer certaines questions que le grand public pourra mieux comprendre.

Comme vous le savez, le ministre des Pêches est originaire de Terre-Neuve. De toute évidence il est en faveur de mesures qui contribueraient à réduire la population de phoques d'une manière importante. Des chasseurs de phoques se sont présentés devant nous et se sont dits très heureux avec les quotas actuels qui se situent à 275 000. Par contre, d'autres personnes semblent tout à fait opposées à toute forme de chasse aux phoques.

• 0935

Vous êtes un scientifique, et j'aimerais savoir ce que vous pensez de tout cela. Certains avancent que la population de phoques dans l'Atlantique aujourd'hui se situe autour de 6 millions d'individus. Ce chiffre semble en progression. Le MPO donne une population de 5 à 6 millions de phoques. D'autres pensent que ce chiffre pourrait plutôt se situer entre 6 et 8 millions, mais disons, pour ce qui est des chiffres que nous comptons 6 millions de phoques.

Les chercheurs du MPO et les principaux conseillers en matière de phoques nous déclarent que cette année, les petits qui naîtront sur la banquise atteindront une population d'environ 800 000. Certaines personnes suggèrent que cette population pourrait atteindre 1 million, mais supposons qu'il s'agit de 800 000 bébés phoques.

Je sais que vous avez parlé de cette production maximale équilibrée, qui est le nombre maximal de phoques que l'industrie peut récolter sans nuire à la population. Si vous faites abstraction des marchés pour le moment, j'aimerais seulement savoir si vous considérez qu'il s'agit d'une solution à ce problème des phoques. Que pensez-vous que nous devions faire et quels devraient être les quotas?

Je pense que finalement, c'est le noeud de la question qui consiste à déterminer si nous devons conserver ce chiffre de 275 000 phoques. Les marchés représentent un autre problème, complètement distinct du côté scientifique. J'aimerais vraiment savoir quel serait selon vous le plan à adopter pour quatre ou disons cinq ans. De façon très précise, si vous deviez conseiller le ministre des Pêches et des Océans aujourd'hui... et je pense que le ministre est avec nous aujourd'hui. Il déclare qu'il veut disposer d'un plan de gestion solide. Nous entendons ce même genre de discours de la part du ministre.

Je pense que nous voulons tous la même chose, et qu'il y a beaucoup de chiffres sur la table. Donc sans attendre le dernier dénombrement de phoques et en partant de l'hypothèse qui a été suggérée, cette population devrait se situer autour de 6 millions de phoques et de 800 000 bébés phoques. J'aimerais que vous nous disiez quels conseils vous donneriez au ministre pour les quatre ou cinq prochaines années en ce qui concerne le total des prises autorisées, et que vous nous donniez des chiffres. Ensuite, nous pourrions passer aux marchés et discuter du fait qu'ils peuvent ou non vivre avec ces chiffres.

Donc j'aimerais entendre quelles sont vos propositions pour le ministre Anderson.

Merci.

M. George Winters: En tant que scientifiques, nous ne rédigeons pas de politiques. Notre rôle est de fournir les estimations des incidences une fois que les objectifs de la politique ont été établis. C'est ce que nous pouvons faire.

Si l'on désire réduire à 2 millions le nombre total de prises admissibles ou à 1 million ou encore à 3,5 ou même à 4 millions, dans ce cas en tant que scientifiques nous pourrions donner des avis concernant les incidences sur la population et la pérennité de même que sur la production durable.

En tant que scientifiques, habituellement nous nous tenons loin des questions politiques.

M. Gary Lunn: Oh, oh! Vous feriez un excellent politicien. Vous n'avez pas répondu à ma question.

M. George Winters: Je manquerais à l'éthique si je répondais à votre question.

M. Gary Lunn: Il me semble que cela signifie que c'est un manque d'éthique pour nous de répondre à toute question.

Laissez-moi m'y prendre autrement.

Est-ce que vous êtes d'accord avec la limite actuelle qui fixe à 275 000 le nombre total de prises admissibles? Est-ce que vous êtes d'accord avec le quota fixé actuellement par le MPO, avec les données qui sont actuellement disponibles? De toute évidence, ce sont les chiffres dont dispose le ministre actuellement.

Alors qu'en pensez-vous?

M. George Winters: Le quota actuel de 275 000 bêtes est pour la zone canadienne. Il y a un nombre additionnel prévu de captures d'environ 75 000 à 80 000 individus dans le Groenland occidental, pour un nombre total de prises d'environ 350 000 à 360 000 bêtes. La production de remplacement se situe quelque part entre 400 000 et 420 000 bêtes. Donc il s'agit d'un quota qui est sûr sur le plan biologique c'est-à-dire que, si les estimations des paramètres sont exactes, cela permettrait à la population de continuer à augmenter de façon marginale.

M. Gary Lunn: Si j'ai bien compris, vous dites que le nombre total de prises, aujourd'hui y compris les captures au Groenland, se situe autour de 360 000 individus et qu'il y a des preuves scientifiques que ces prises pourraient atteindre 400 000 ou 420 000 individus. Ce n'est pas très loin de la marque qui a été fixée dans ce cas. Êtes-vous d'accord avec moi?

M. George Winters: Oui. Les captures prévues pour 1999 devraient être assez proches de la production de remplacement.

M. Gary Lunn: D'accord.

• 0940

En tant que scientifique, pensez-vous que la taille du cheptel dans l'Atlantique est hors de contrôle ou trop élevée?

M. George Winters: Lorsque vous voyez des signes de perturbation liés à la reproduction au sein d'une population, comme ceux que nous voyons ici dans les populations de phoques du Groenland, et des taux de grossesse les plus faibles jamais observés, un âge de maturité physiologique plus élevé et une croissance sous-optimale, il est clair que la population a atteint un niveau qui devrait probablement être réduit.

Vous pouvez facilement prouver maintenant que l'environnement qui longe la côte est de Terre-Neuve est très favorable pour les phoques du Groenland. Les ressources en poissons de fond sont très appauvries, donc il y a très peu de concurrence pour une proie commune. Des espèces-proies comme le capelan et la morue polaire, que les phoques du Groenland choisissent comme proies, sont présentes en grande abondance. Si l'environnement devait changer ou encore si les populations de poissons de fond devaient opérer un rétablissement plus fort que prévu, les disponibilités alimentaires pour les phoques du Groenland seraient inférieures à ce qu'elles sont actuellement et l'on pourrait assister à un renversement soudain de la situation—une augmentation, par exemple, des taux de mortalité pour les bébés phoques ou encore des taux de grossesse qui chuteraient de 40 p. 100 ou 50 p. 100.

Donc actuellement, et à mon avis, l'environnement là-bas est très favorable aux phoques du Groenland, mais la situation pourrait changer.

M. Gary Lunn: Je sais que c'est difficile de donner un chiffre. Ce que j'ai réussi à obtenir de vous, jusqu'à maintenant, c'est que le TPA actuel se situe à environ 360 000 et qu'il pourrait probablement atteindre un niveau aussi élevé que 400 000. Nous parlons d'une augmentation possible de 10 p. 100.

Si nous essayons d'atteindre un certain objectif en ce qui concerne la dimension du cheptel dans le Canada atlantique—actuellement, ce cheptel se chiffre à environ 5 ou 6 millions d'individus—dans ce cas que pensez-vous de disons 4 millions? Je sais que ce chiffre a été avancé déjà.

Pensez-vous que ce chiffre pourrait représenter une base à long terme pour le MPO dans le cadre d'un plan de gestion? Est-ce que c'est un chiffre envisageable?

M. George Winters: La stratégie de gestion que nous avons adoptée dans les années 70 visait à permettre à la population d'augmenter lentement jusqu'à ce qu'elle atteigne ce que nous avions alors estimé comme étant le niveau de production maximal équilibré. C'est un niveau qui se défend sur le plan scientifique. C'est aussi un niveau sûr. Ce niveau permet de maximiser le rendement à long terme à partir de la ressource et c'est également un niveau qui permettra à la population d'atteindre elle-même les limites de capacité de peuplement durable.

M. Gary Lunn: De quel niveau s'agit-il?

M. George Winters: L'estimation que nous faisons dans notre communication se situe entre 3,5 millions et 4 millions.

M. Gary Lunn: Merci.

J'ai une dernière question à poser avant de céder la parole à un de mes collègues afin de lui laisser un peu plus de temps.

L'année dernière, le comité des pêches s'est déplacé jusque dans le Canada atlantique. En fait, cette question est revenue encore et encore dans 15 à 20 collectivités surtout dans la région du Canada atlantique, dans les cinq provinces. Nous avons rédigé un rapport de la côte Est. Ce comité était présidé par George Baker.

Nous en sommes arrivés à une recommandation à l'intention du ministre des Pêches selon laquelle il fallait faire quelque chose. Même si aucun des membres du comité n'avait de formation scientifique et si nous ne prétendions certainement pas être des scientifiques, nous avions eu l'impression à l'époque que nous devions amener l'industrie et les scientifiques de même que les collectivités à se réunir au cours d'un symposium ou d'un forum de quelque nature afin que toute cette information puisse être véhiculée et échangée et nous avons invité toutes les parties, y compris les associations de chasseurs de phoques à venir présenter un modèle afin que nous puissions faire des recommandations au gouvernement. Nous pensions que c'était la bonne façon de procéder.

Puis nous avons produit un rapport qui a obtenu l'appui de 16 députés de cinq formations politiques. Bien entendu, le rapport n'a pas été mis en oeuvre.

J'aimerais obtenir vos commentaires concernant cette recommandation, si elle aurait été valable et si elle aurait pu jouer un rôle dans la situation ou le problème qui nous occupe aujourd'hui.

M. George Winters: Ce problème n'est pas unique à la région de Terre-Neuve. La région Scotia-Fundy connaît également un problème important avec le phoque gris. Cette population se situe aujourd'hui à un niveau sans précédent. Les phoques se répandent jusque dans des endroits de la côte sud de Terre-Neuve, au sud du golfe du Saint-Laurent et ainsi de suite.

C'est probablement une bonne idée que de réunir ensemble les chasseurs, les personnes qui subiront les répercussions, les scientifiques et les décideurs autour d'une même table pour leur permettre de discuter de cette question.

M. Gary Lunn: Est-ce que vous appuieriez cette recommandation?

M. George Winters: Bien entendu.

M. Gary Lunn: Merci beaucoup, monsieur le président.

Le président: Merci, Gary, vos six minutes sont écoulées.

Monsieur Bernier.

• 0945

[Français]

M. Yvan Bernier (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, BQ): Merci, monsieur le président. J'aimerais d'abord remercier les témoins d'être venus nous rencontrer ce matin, puis exprimer l'ambiguïté dans laquelle je me trouve ce ce matin.

J'ai été informé de la réputation de M. Winters et j'ai lu le mémoire qu'il nous a remis. Je suis heureux de le voir ici ce matin, bien que j'éprouve un petit problème puisque je suis un profane de la gestion de la chasse au phoque. Monsieur le président, il s'avérera peut-être nécessaire de convoquer à nouveau M. Winters ainsi que d'autres témoins.

J'essaie de trouver où est la vérité et sur quels arguments je puis m'appuyer pour prendre une bonne décision. Lors de son exposé, M. Winters nous a parlé de la courbe d'exploitation maximale du phoque et indiqué au point 6(4)(c) de son sommaire, si j'ai bien compris, que si on tuait 2 millions de bêtes, le cheptel restant se reproduirait assez pour qu'on puisse continuer à abattre 275 000 bêtes par année par la suite. J'ai un peu de difficulté à comprendre cela. Bien des chasseurs de chez nous applaudiraient cette affirmation. Je veux donner une chance à tout le monde d'exprimer clairement son point de vue et être juste envers tous.

Monsieur Winters, qui est un scientifique, pourrait peut-être m'aider à monter ma méthodologie de réflexion. Hier, nous avons entendu les déclarations des représentants du Fonds international pour la protection des animaux qui nous recommandaient, selon la méthode de calcul de M. Lavigne, d'établir le maximum à 100 000 bêtes. Il me semble y avoir tout un monde de différence entre vos deux points de vue. Si je considérais que les témoins que nous avons entendus hier adoptaient une position extrême, la vôtre, monsieur Winters, m'apparaît être à l'autre extrême. Il me semble que la vérité doit être entre les deux. Il est possible que vous ayez tout à fait raison, mais je devrai peut-être consulter un troisième scientifique pour bien comprendre la situation. Mais je ne veux pas magasiner ce matin comme on le fait lorsqu'on veut acheter une voiture.

Imaginez-vous les Canadiens et Canadiennes ou les Québécois et Québécoises qui sont assis dans leur salon, qui n'ont jamais mis les pieds sur la banquise et qui se demandent comment nous allons gérer la chasse au phoque. J'aurais tendance à agir par réflexe familial et songer avant tout à nourrir et à habiller ma famille. Mais comment ces personnes sauront-elles comprendre que je prends cette décision-là par instinct, alors qu'il faut arriver à une base de calcul et une méthodologie qui seront acceptées par tout le monde? Il faut pouvoir déterminer le chiffre qui conviendra et faire comprendre à ceux qui s'opposent à notre évaluation que notre calcul est basé sur telle ou telle chose.

J'aimerais qu'on puisse sortir l'émotion de ce débat-là, cette émotion à laquelle ont eu recours les groupes pour la protection des animaux lorsqu'ils ont utilisé l'image du blanchon et nous ont fait perdre nos moyens de subsister. Comment puis-je sortir l'émotion de ce débat et établir le chiffre correct? Vous voyez un peu la problématique à laquelle je fais face.

[Traduction]

M. George Winters: Je suis heureux de voir que vous avez posé cette question, parce qu'il existe une analyse de la production à court terme, qui est une production de remplacement et une analyse de la production à long terme qui est celle à laquelle je faisais référence avec la PME.

Afin de répondre à votre deuxième point en premier, dans l'analyse de M. Lavigne, comme je l'ai souligné au tout début, celui-ci avait utilisé les estimations non corrigées de la production de remplacement fournies dans une publication du MPO. Dans notre analyse, nous avons examiné le modèle du MPO, et nous avons indiqué au ministère qu'il pourrait améliorer ses procédures d'analyse, ce qui a été fait. La production de remplacement est passée d'environ 286 000 à entre 400 000 et 405 000. Donc, les estimations de M. Lavigne sont inférieures d'environ 125 000 individus.

• 0950

M. Lavigne a également utilisé dans son mémoire des estimations de la perte par coulage qui, d'après les estimations obtenues à l'aide du modèle que nous avons présenté et les données empiriques fournies par les observateurs du MPO, sont très largement surestimées. Cela pourrait expliquer le chiffre avancé par M. Lavigne de 100 000 ou 110 000. C'est une erreur et cela ne concorde pas avec la production de remplacement actuelle ou encore avec les estimations des pertes par coulage.

Pour en revenir à votre première question, pour chaque population il existe une production équilibrée. Il s'agit de la production à long terme que vous pouvez tirer d'une population et que vous pouvez maintenir, à long terme à un niveau stable. Ensuite il y a la production à court terme, qui correspond à la production de remplacement. Il se peut qu'une population se situe au-dessus de sa capacité de peuplement en raison de conditions de survie très favorables ou encore à cause de la disponibilité alimentaire plus abondante que la normale et il se peut très bien que ce soit le cas pour la population présente de phoques du Groenland. Donc vous obtenez une production de remplacement qui est de beaucoup supérieure à la production équilibrée pour la même population.

Est-ce que cela explique la dichotomie entre les deux estimations?

[Français]

M. Yvan Bernier: Je commence à comprendre un peu la différence entre les deux évaluations. Je vais répéter votre réponse pour m'assurer que j'ai bien compris. Vous dites que M. Lavigne n'aurait pas tenu compte des bons chiffres et a tort de dire que si on tuait 275 000 bêtes par année, le stock serait en déclin. Vous dites pour votre part qu'au contraire, si on ne tue que 275 000 bêtes, le troupeau va augmenter. Il faut connaître la mécanique.

Deuxièmement, si j'ai bien compris, vous estimez que le troupeau est trop nombreux et qu'il ne se reproduit pas assez en ce moment, et que si on veut faire une chasse optimale, c'est-à-dire avoir un troupeau durable, il faudra faire une ponction en tuant 1 ou 2 millions de bêtes afin de retrouver l'équilibre. Mais vous nous avez prévenus que nous avions une décision à prendre sur le nombre de bêtes qu'on voudra exploiter à l'avenir. À partir de ce chiffre, vous pourrez nous dire quel nombre de bêtes il faudrait tuer pour avoir un rendement constant. Ai-je bien compris?

[Traduction]

M. George Winters: Oui.

Le président: Merci, monsieur Bernier.

Monsieur Easter.

M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Merci, monsieur le président.

Bienvenue, monsieur Winters et merci de votre exposé.

J'ai sensiblement le même problème que M. Bernier—c'est-à-dire que les opinions scientifiques que nous avons entendues auparavant étaient différentes, aussi différentes que le jour et la nuit. J'ai suivi l'exposé de M. Lavigne il y a deux jours, et il y a une grande divergence d'opinion scientifique.

Est-ce que vous pouvez revenir en arrière à votre troisième ou quatrième diapositive, celle qui s'intitule «Current and History»? Je la vois ici dans votre documentation.

M. Terry Lomax (président, Focus Technologies Inc.): C'est la figure 1 dans la documentation.

M. Wayne Easter: D'accord, mais le commentaire ne l'accompagne pas et c'est du commentaire que j'ai besoin.

Ce que vous dites finalement c'est que le cheptel compte actuellement 50 p. 100 de plus d'individus qu'au début des années 80 alors que le cheptel était considéré comme ayant atteint un rétablissement complet.

M. George Winters: Les années 50.

M. Wayne Easter: Oui, c'est exact, les années 50. Je pense que je vais devoir changer mes lunettes.

Pouvez-vous nous donner un peu plus d'explications?

M. George Winters: Par le passé, disons il y a environ 20 ans, alors que nous analysions cette population et la trajectoire qu'elle a suivie à travers le temps, on considérait au début des années 50 que cette population avait entièrement récupéré après 150 ans de chasse non réglementée.

Cette situation était fondée sur le fait que les estimations de population au début des années 50 se situaient dans une fourchette de 3 millions à 3,5 millions de phoques. Durant la Seconde Guerre mondiale, il n'y a pratiquement pas eu de chasse aux phoques du Groenland, et avant cela, durant la Dépression, le niveau de captures de phoques du Groenland était passablement faible étant donné que les marchés étaient déprimés. La combinaison de ces deux facteurs aurait entraîné un renouvellement important et un rétablissement de la population. C'est ce que l'on croyait à l'époque. En raison de ces deux facteurs, la population aurait atteint un renouvellement et un rétablissement important, et au début des années 50, la population aurait été près des niveaux maximums ou des niveaux que nous appelons «d'origine».

• 0955

La population est maintenant de 50 p. 100 plus élevée. Si nous revenons en arrière et si nous examinons les estimations de l'époque—et elles sont assez rudimentaires, si on revient jusqu'au XIXe siècle—ces estimations suggèrent qu'initialement la taille de la population se situait autour de 4,1 millions de phoques au tout début de la chasse, vers la fin du XVIIIe siècle.

Aujourd'hui, selon les chiffres fournis par le MPO, la population tournerait plutôt autour de 5,4 millions de phoques. C'est le chiffre sur lequel nous nous appuyons dans nos conclusions pour affirmer que cette population a atteint probablement son niveau maximal et même qu'elle l'a peut-être dépassé.

M. Wayne Easter: D'accord.

Ce à quoi je veux en arriver—et peut-être que vous ne serez pas en mesure de répondre à cette question, ni à une couple d'autres aussi je suppose—c'est ceci: À quel niveau le cheptel devrait-il se situer pour offrir le meilleur équilibre en ce qui concerne les pêches dans leur ensemble?

Nous avons commencé avec la réglementation au niveau de la pêche aux phoques—ou plutôt appelons-la la «récolte» de phoques—pour ce qui est de maintenir le cheptel à un certain niveau. Mais est-ce que ce niveau n'est pas trop élevé ou trop bas pour ce qui est de garantir la viabilité de la morue de l'Atlantique, de la morue du Nord ou encore de la chaîne alimentaire des poissons, etc.?

Finalement, nous devons aussi tenir compte de cet équilibre. Il ne s'agit pas que de fixer un chiffre, mais aussi de maintenir le cheptel de phoques ici. Nous devons le maintenir dans une certaine mesure, oui, pour ce qui est de la viabilité du cheptel de phoques, mais nous devons aussi le maintenir pour ce qui est de la viabilité de la chaîne alimentaire des poissons, toute la chaîne en partant du capelan et en remontant pour faire référence au tableau que nous a présenté M. Lavigne l'autre jour, et pour ce qui est également du rétablissement de la population de morues. De quel niveau parlons-nous alors?

M. George Winters: C'est une question très compliquée—vraiment très compliquée.

M. Wayne Easter: Et c'est vraiment ce à quoi nous devons en arriver.

M. George Winters: Pour y répondre, n'importe quel scientifique devrait se lancer dans des spéculations assez poussées.

Ce que nous pouvons affirmer toutefois c'est qu'en ce qui concerne la population de morues hauturières migratrices qui se situe au large de la côte est de Terre-Neuve, très peu de ces morues atteignent l'âge adulte. Les seuls prédateurs connus sont les phoques du Groenland et les phoques à capuchon. Il est donc très facile de faire le raisonnement qu'en réduisant ces populations, on améliorerait le taux de survie.

Nous savons, par exemple, que la population actuelle de phoques du Groenland est très perturbée. Par conséquent, en la réduisant à un niveau proche de la PME, ce qui est défendable sur le plan biologique, on augmenterait certainement la probabilité de rétablissement de nos stocks de morues et on pourrait réduire, en même temps, la population de phoques du Groenland à un niveau qui serait peut-être plus en équilibre avec son environnement.

Les autres options à envisager seraient, à mon avis, de la très haute spéculation.

M. Wayne Easter: Dernière question, monsieur le président.

Vous aviez déjà mentionné, et vous l'avez fait encore une fois aujourd'hui, le fait que la fertilité est très faible. Avez-vous des raisons pour expliquer cette situation? Vous avez parlé de la perturbation occasionnée par la taille du cheptel et d'autres facteurs de perturbation liés à la densité. L'autre point que vous avez avancé était que le taux de croissance est lent.

Alors, tout particulièrement en ce qui concerne le taux de croissance, nous entendons dire de la part des non-scientifiques—les Inuits, la population du Labrador et les pêcheurs eux-mêmes—que les phoques, et en particulier les phoques du Groenland, se retrouvent dans des baies qui s'enfoncent de plus en plus profondément dans les terres—et même jusque dans la rivière Miramichi, M. Hubbard—plus loin qu'ils n'ont jamais été auparavant.

Pouvez-vous nous donner une raison pour expliquer cette situation? Est-ce en raison d'une diminution des disponibilités alimentaires?

M. George S. Baker (Gander—Grand Falls, Lib.): Il y a trop de phoques.

M. Wayne Easter: Quelle est la situation là-bas?

M. George Winters: Pour la plupart des populations fauniques, il existe un rapport très étroit entre la taille de la population et la superficie où elle se répartit. Au fur et à mesure que la population augmente, la superficie de l'habitat s'élargit et s'élargit sans cesse parce que cette population épuise la densité locale de disponibilité alimentaire. C'est un phénomène qui est bien décrit dans la documentation.

Par exemple, il est tout à fait évident que lorsque la morue du Nord s'est effondrée, elle s'est retrouvée dans une zone de plus en plus réduite. Ce que vous constatez actuellement pour les phoques est vraisemblablement l'inverse de cette situation. Au fur et à mesure que la population croît, vous pouvez maintenant constater un nombre important de phoques du Groenland, par exemple, qui se retrouvent aussi bas que dans la région du cap Hatteras.

• 1000

Donc ils sont à la recherche de nourriture. Ils sont opportunistes. Ils mangeront n'importe quoi.

M. Wayne Easter: Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Easter.

Monsieur Stoffer, vous avez cinq minutes.

M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président.

Merci encore aux témoins de s'être présentés aujourd'hui.

Vous dites que le rapport que vous avez transmis au gouvernement de Terre-Neuve a été présenté devant le Sous-comité des mammifères marins—pour examen, je suppose.

M. George Winters: Oui.

M. Peter Stoffer: Pouvez-vous très rapidement expliquer la différence qui existe entre leur transmettre votre rapport en vue d'un examen par les pairs, comme je le conçois, ou encore le transmettre à une revue scientifique normale pour le même examen par les pairs?

M. George Winters: Il y a très peu de différence, mais il y a par contre un peu moins de ce que j'appelle des éléments «pro forma». Devant un sous-comité, il y a davantage de concessions mutuelles, tandis que lors d'une présentation d'un document primaire, on procède à une distribution en bonne et due forme de votre communication aux rapporteurs.

Vous obtenez leur réponse. Vous étudiez cette réponse. Vous pouvez soit l'accepter et modifier votre rapport en conséquence ou encore la rejeter, en fournissant une raison pour laquelle vous la rejetez. Dans certains cas, il se peut que votre analyse comporte des vices cachés et qu'elle soit complètement inacceptable.

M. Peter Stoffer: D'accord.

Je ne me considère en aucune façon comme un scientifique, mais vous avez mentionné M. Lavigne notamment en ce qui concerne les renseignements statistiques qu'il a fournis et les erreurs qu'il a faites et pourtant, comme vous le faites vous-même, il présente ses communications à ses pairs pour examen et ensuite il les fait publier. Donc, de toute évidence, vous ne remettez pas seulement en question le fait que ces chiffres sont erronés, mais aussi le fait que les gens qui ont effectué cet examen étaient dans l'erreur. Mais ça c'est une tout autre histoire.

Seulement pour revenir à la charge, quel est le nombre total de phoques abattus actuellement dans le cadre de la réglementation des prises qui existe au Canada et au Groenland? Vous avez fixé ce chiffre autour de 360 000, n'est-ce pas?

M. George Winters: C'est exact.

M. Peter Stoffer: Les prises accidentelles se situent autour de 8 p. 100 ou 9 p. 100. Dans vos chiffres, vous parlez de 8 p. 100, mais ici on parle plutôt de 9 p. 100, donc autour de 32 000, pour un total de 392 000. Combien de phoques, après leur naissance, meurent de causes naturelles—par exemple de mouvements des glaces, disons ou encore est-ce qu'ils peuvent tout simplement tomber de la banquise et se noyer? Sur un total de 5,4 millions de phoques, combien selon vous mourront?

L'autre jour, on nous a mentionné qu'environ 700 000 blanchons seraient nés en une seule fois. Combien parmi ces petits mourront immédiatement de causes naturelles? Donnez-moi votre meilleure estimation.

M. George Winters: La production de remplacement correspond en fait aux pertes dues à la mortalité naturelle, parce que...

M. Peter Stoffer: Je suis désolé, mais vous allez devoir simplifier un peu, combien de blanchons vont mourir, quelques secondes ou quelques heures après la naissance, parmi tous les nouveau-nés? Pouvez-vous nous donner un chiffre?

M. George Winters: Moins de 1 p. 100 mourront immédiatement après la naissance. Sur une période d'un an, vous allez obtenir un chiffre de 8 p. 100.

M. Peter Stoffer: Dans ce cas, c'est environ 30 000 à 40 000 phoques additionnels. Donc nous obtenons un chiffre qui se situe quelque part entre 430 000 et 440 000 bêtes qui décèdent, soit de mort naturelle soit après avoir été abattus par un chasseur professionnel ou encore qui sont prises accidentellement.

Corrigez-moi si j'ai tort, mais vous dites que la mortalité naturelle, si on la soustrait, donnerait un chiffre d'environ 440 000 phoques, est-ce bien cela?

M. George Winters: De population.

M. Peter Stoffer: Oui. Donc c'est ce que nous faisons actuellement, c'est ce qui se passe en ce moment.

M. George Winters: Sur les 32 000 dont j'ai parlé ici, la moitié sont inclus dans le taux de mortalité naturelle du modèle courant. Donc il s'agit de 16 000. S'ils prennent 360 000 bêtes, leurs prises nettes seront de 376 000.

M. Peter Stoffer: Très bien. D'accord.

Pour ma dernière question, monsieur, peut-être pourriez-vous enlever votre chapeau de scientifique pendant un petit moment. Nous sommes tous égaux dans cette situation, nous sommes tous des êtres humains.

En ce qui concerne la question de M. Bernier, si vous recommandez une réduction—et je ne prononcerai pas le mot «triage»—d'environ 1 million ou 2 millions de phoques, en adoptant l'approche la plus humaine, et non l'approche scientifique, que va-t-il arriver à ces phoques? Comment comptez-vous réduire leur population?

Que devrions-nous faire avec eux, monsieur?

M. George Winters: Je suis désolé, mais je ne peux répondre à cette question. Je suis un scientifique et cela n'entre pas dans mes compétences.

M. Peter Stoffer: Je pense que je m'attendais à cette réponse.

Merci.

Le président: Merci, Peter.

Charlie, êtes-vous prêt à poser quelques questions?

M. Charlie Power (St. John's-Ouest, PC): Oui d'accord.

Moi aussi, je penche pour le côté humain de cette question plutôt que le côté scientifique parfois, et je pense que c'est mon rôle dans ce monde.

Tout d'abord, laissez-moi vous remercier de nous fournir toute cette information. C'est extraordinaire aussi de compter sur la présence du ministre Efford de même que sur celle des membres du comité de la Chambre des communes qui proviennent de tous les partis politiques et qui sont réunis ici. Cela montre bien à quel point toute cette question est importante pour Terre-Neuve.

• 1005

J'ai cette petite fiche technique produite par le ministère des Pêches et des Océans concernant la nourriture que consomment les phoques. Les espèces principales consommées par les phoques du Groenland sont les capelans, 1,1 million de tonnes; la morue de l'Arctique, 600 000 tonnes; et le poisson plat qui compte pour 340 000 tonnes. On estime que les phoques du Groenland ont consommé près de 150 000 tonnes métriques de morues de l'Atlantique et que les phoques gris en ont consommé 60 000 tonnes. Donc entre les phoques gris et les phoques du Groenland, vous pouvez calculer 210 000 tonnes de morues de l'Atlantique.

Lorsque l'on analyse la région de Terre-Neuve que je représente sur la côte Sud, Placentia Bay et St. Mary's Bay, nous parlons d'une pêche de 20 000 tonnes cette année pour faire vivre un nombre important de familles. Nous espérons obtenir un quota de 5 000 tonnes sur la côte Sud de cette région, et cela dépend beaucoup de la morue.

Donc, ces deux espèces de phoques prennent 210 000 tonnes de morues à eux seuls et 1,1 million de tonnes de capelans, la principale source d'alimentation de la morue.

Tous vos modèles portent sur la production maximale équilibrée pour les phoques. Est-ce que vous avez envisagé des modèles d'une production minimale équilibrée pour les phoques? Peut-être que l'on obtiendrait ainsi une production maximale équilibrée pour la morue et pour les autres espèces dont nous avons besoin pour donner du travail aux gens de Terre-Neuve et du Labrador.

Est-ce que vous pouvez parler d'une production minimale qui pourrait vous satisfaire?

M. George Winters: La population de phoques, comme toute autre population à l'état sauvage, peut adopter un large éventail de production équilibrée. Vous pouvez avoir une population élevée et une production faible et vous pouvez aussi avoir une population faible et tout de même avoir une production équilibrée importante. Il y a des limites en dessous desquelles vous ne pourriez pas exploiter une population.

En ce qui concerne les phoques du Groenland, si l'on descend en dessous de 1 million, vous ne voudriez pas les exploiter, mais à tout niveau supérieur à cela, la population aurait une production équilibrée définissable. Vous pourriez soit excéder cette production et entraîner une diminution de la population ou encore vous pourriez vous situer en deçà de ce chiffre, si vous le désiriez, et permettre à la population d'augmenter.

Donc vous disposez d'un certain nombre de possibilités. Cela dépend des objectifs que vous visez.

M. Charlie Power: Avec les populations actuelles de phoques de Terre-Neuve, nous sommes très loin de voir les phoques sur une liste des espèces menacées d'extraction. Sommes-nous vraiment très loin de cela?

M. George Winters: Oh, je pense que c'est ridicule de les mettre sur une liste d'espèces menacées d'extinction.

M. Charlie Power: J'ai juste une dernière question et puis j'ai terminé, monsieur le président.

Ce qui me semble étrange dans tout cela, c'est que lorsque Mère nature était responsable de la gestion, les choses semblaient aller beaucoup mieux. Ce que je veux dire, c'est que vous aviez les phoques, vous aviez les morues et vous aviez les pêcheurs. Il y avait un certain équilibre. Lorsque les être humains ont commencé à se mêler de la gestion des ressources, les choses ont commencé à se gâter.

Une voix: Bravo, bravo.

M. Charlie Power: Je pense que les quotas maximums de morues à Terre-Neuve étaient de 266 000 tonnes métriques si on revient en arrière au milieu des années 60. Nous avons réussi à fixer la zone de 200 milles grâce aux efforts du gouvernement du Canada. Malheureusement, l'autre côté de la médaille c'est que nous avons dû aussi vivre avec la gestion effectuée par le gouvernement du Canada. Par conséquent, en 1992 il n'y avait plus de morue à pêcher.

Qu'est-ce qui s'est produit? Comment est-ce que l'homme a pu réussir à gâcher les choses de manière aussi ridicule, et comment Mère nature pourrait-elle régler ce problème pour nous? Combien de temps faudra-t-il attendre encore pour que la population de phoques, tout simplement par manque de nourriture...? Il n'y aura plus de morue. Il n'y aura plus de pêche au saumon. Il n'y aura plus de pourvoirie au Québec. Il n'y aura plus de camp de pêche au saumon au Nouveau-Brunswick.

Combien de temps encore faudra-t-il attendre pour que les phoques mangent tout ce qu'il y a à manger, que la population s'effondre, et que les choses reviennent à l'état initial? Combien de temps faudra-t-il à la nature pour arriver à ce résultat?

M. George Winters: C'est impossible à prévoir. Tout ce que je peux dire c'est qu'une grande partie de la productivité de ce système, et les variations dans cette productivité sont causées par des variations dans l'environnement. Il ne faudrait pas sous-estimer cet élément.

Par ailleurs, si l'environnement devait devenir défavorable, on pourrait constater une détérioration très rapide de la population de phoques. C'est impossible à prévoir, mais il existe un facteur important non seulement dans la productivité du phoque du Groenland, mais aussi dans la population de morues, la population de plies et dans toutes les autres populations. L'environnement est le facteur décisif.

M. Charlie Power: Seulement pour en finir avec ce point, avec ces énormes quantités de nourriture que les phoques consomment et toutes ces espèces différentes, combien de temps encore faudra-t-il attendre pour que, si la population de phoques atteint 7 ou 8 millions, il n'y ait plus rien à manger, et que cet effondrement de la population des phoques se produise? Combien de temps faudra-t-il attendre? Est-ce qu'il y a un moyen scientifique de prédire cela?

M. George Winters: Pas vraiment. Nous avons bien estimé que si la chasse était interdite et s'il n'y en avait plus du tout, la population atteindrait 7,1 millions de phoques et cela stabiliserait la productivité nette. Cela prendrait—je ne m'en rappelle pas exactement—probablement une décennie ou deux. À ce point, on atteindra tout simplement une sorte d'équilibre. Vous pourriez voir une augmentation de la mortalité des nouveau-nés, ou encore une diminution encore plus poussée des taux de grossesse ou vous verriez s'élever l'âge de la maturité physiologique. Il pourrait y avoir également un effondrement de la mortalité à court terme. Ce sont des éléments qui ont été observés au sein d'autres populations de mammifères marins.

• 1010

M. Charlie Power: Votre documentation indique également que vous avez estimé que cela pourrait atteindre 7,1 millions, mais c'est beaucoup plus élevé que ce que vous aviez pensé auparavant. Vous aviez pensé en réalité que le nombre maximum de phoques que l'environnement pouvait contenir serait de l'ordre de 4 millions.

M. George Winters: Exact.

M. Charlie Power: Maintenant vous dites que ce pourrait être 7 millions. Ce n'est qu'une estimation n'est-ce pas? Cela pourrait être encore plus élevé.

M. George Winters: Oui. Les estimations que j'ai mentionnées auparavant remontaient à il y a environ 20 ans. Maintenant, nous avons les données sur les 20 années supplémentaires. Je suppose que notre procédure d'estimation pourrait être améliorée. Je ne peux pas vraiment dire qu'elle l'est, mais elle pourrait être améliorée. Par contre, nous semblons avoir un environnement très différent de ce que nous avions il y a 20 ou 30 ans.

M. Charlie Power: Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Power.

Est-ce qu'on aurait d'autres questions?

M. Wayne Easter: J'en ai une, si je peux me permettre.

Le président: Et ensuite j'ai quelques points à souligner.

Vous avez la parole, monsieur Easter.

M. Wayne Easter: Je me demandais, monsieur le président, si soit M. Winters, soit les recherchistes pouvaient nous donner une copie de ces diapositives avec annotation quant à leur avis sur ce que représentent les divers graphiques. J'aimerais avoir ces observations pour notre examen interne, si c'est possible.

M. George Winters: Il n'y a aucun problème.

Le président: Merci.

J'aimerais apporter des précisions sur un point avec lequel j'ai eu un peu de difficulté. Nous avons des examens par les pairs, mais nous avons des opinions très différentes. Hier, tel que je l'ai compris, M. Lavigne venait de l'Université de Guelph, qui est passablement loin des phoques.

Pour ce qui est de votre groupe, où se trouve votre industrie sur le plan géographique? Avez-vous vécu à Terre-Neuve? Voyez-vous des phoques, et font-ils partie de vos expériences hebdomadaires ou mensuelles?

M. George Winters: Oui, je viens de Terre-Neuve. Je viens d'une collectivité où l'on chasse le phoque. Sur le plan professionnel, mes antécédents m'ont amené à étudier de façon exhaustive les phoques. J'ai géré le programme de recherche du phoque du Groenland pendant environ 20 ans, de sorte que ce n'est pas un nouveau domaine pour moi. Actuellement, je suis un expert-conseil du secteur privé, et je ne représente donc pas nécessairement un groupe particulier.

Le président: Pour ce qui est du groupe de M. Lavigne, lorsqu'il a présenté des preuves, on nous a portés à croire qu'il avait l'appui de l'International Fund for Animal Welfare et que c'est ce groupe qui appuyait financièrement et autrement ses efforts.

Quant à votre organisation, monsieur Lomax, qui sont vos clients? Y a-t-il une façon qui nous permettrait d'en venir à la conclusion que vous avez des raisons de présenter les renseignements que vous nous avez donnés ce matin?

M. Terry Lomax: Pas vraiment. Nos clients sont variés. L'une des ententes que nous avons avec nos clients est que nous examinons les données, et nous assurons le suivi de ces données. Si les résultats que nous obtenons ne sont pas favorables aux clients, ils demeurent tout de même nos résultats. Ils peuvent soit les publier, soit ne pas les publier, mais nos conclusions ne seront pas compromises.

Le président: Je constate que cela a amené quelque...

Peter, nous n'avons qu'une minute ou deux pour votre question, puis nous demanderons à M. Winters et à M. Lomax de nous donner un bref résumé.

M. Peter Stoffer: Je pose cette question tant en mon nom qu'en celui de M. Power, mon collègue de Terre-Neuve.

Il est beaucoup question de nos jours dans les journaux d'un mécanisme possible de contraception pour les phoques. Dans vos études ou lors de vos discussions, a-t-il été question de préoccupations ou de problèmes quant à une autre façon d'un soi-disant contrôle des populations de phoques à cet égard? Je trouve plutôt surprenant qu'ils essaieraient cela, mais j'aimerais connaître l'approche scientifique à ce sujet.

M. George Winters: Lorsque j'étais président du comité des mammifères marins, je me rappelle que c'était l'une des solutions proposées pour contrôler la population des phoques gris de l'île de Sable; il restait tout simplement à trouver des personnes suffisamment braves pour se rendre jusqu'aux phoques et à les injecter.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Merci, Peter. Je me demandais à quel moment est-ce que vous avez commencé cela.

Nous avons une nouvelle industrie au Canada qui porte sur ce Viagra...

Des voix: Oh, oh!

Le président: ...et lorsque vous avez parlé du faible taux de fécondité, j'ai pensé que Peter suggérait peut-être que son parti pourrait investir dans cette nouvelle activité que nous avons.

• 1015

Monsieur Winters, aimeriez-vous conclure?

M. George Winters: En ce qui concerne la population de phoques du Groenland, l'actuelle stratégie de gestion n'a aucun objectif. D'un point de vue de la conservation, je pense qu'il faut avoir un objectif pour l'atteindre. Plus vite ils en auront un, mieux ce sera.

Le président: Merci tous les deux d'être venus nous rencontrer ce matin. C'était très intéressant.

Nous aimerions prendre maintenant environ cinq minutes.

• 1016




• 1027

Le président: Nous reprenons les travaux maintenant.

Je vous souhaite la bienvenue. Je crois comprendre que vous êtes une délégation de tous les partis de la grande province de Terre-Neuve et du Labrador, sous la direction de l'honorable John Efford, ministre des Pêcheries.

Uniquement pour montrer à nos membres que tous les partis à Terre-Neuve sont très préoccupés par cette question, John, si c'est acceptable pour vous, j'aimerais vous dire quelques mots, probablement, suivis par M. Fitzgerald du Parti conservateur et par M. Harris du Parti néo-démocrate de Terre-Neuve. Je crois comprendre que vous avez une vidéo, que quelques personnes ont déjà visionnée auparavant.

Vous êtes les bienvenus à notre comité. Si cela vous convient, nous commencerons par vos quelques brèves remarques, et nous enchaînerons avec monsieur Fitzgerald, puis avec monsieur Harris, et enfin nous entendrons votre exposé général.

L'hon. John Efford (ministre des Pêches et de l'Aquaculture, gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador): Merci, monsieur le président. Si je peux me permettre, avant de faire quelques observations, j'aimerais vous présenter rapidement toutes les personnes qui m'accompagnent, faire quelques remarques puis faire la projection de la vidéo. Alors, chacun de mes collègues du comité de tous les partis aimerait avoir la possibilité de présenter un bref exposé. Je pense que ce serait ce qu'il y a de plus bénéfique, et que c'est de cette façon que nous l'avons fait jusqu'à maintenant. Est-ce acceptable?

Le président: Vous avez la parole.

M. John Efford: Monsieur le président, je vous remercie beaucoup de donner la possibilité au comité de tous les partis venant de Terre-Neuve et du Labrador de comparaître devant votre comité.

En ma qualité de ministre des Pêcheries et de l'Aquaculture, j'aurais aimé que ce soit dans des circonstances plus agréables. J'aimerais que la situation soit plus rose et j'aimerais que nous ayons beaucoup plus confiance en notre avenir à Terre-Neuve et au Labrador, mais les circonstances qui ont mené à la création de ce comité de tous les partis à Terre-Neuve font que nous sommes très inquiets et que l'avenir de Terre-Neuve et du Labrador soit perturbé.

Je ferai d'autres observations à ce sujet plus tard. Je présenterai les personnes qui m'accompagnent en ma qualité de ministre des Pêcheries. Nous allons projeter la vidéo puis nous allons faire un bref exposé. Je pense que vous aurez une meilleure compréhension de la perspective effroyable qui attend les gens de Terre-Neuve et du Labrador.

Parmi les gens qui m'accompagnent, il y a M. Lloyd Oldford. Lloyd est ici parce qu'il représente les pêcheurs de Terre-Neuve et du Labrador. Il est la personne qui a porté à mon attention l'incidence de la destruction de la morue par les phoques dans sa région. Nous en discuterons un peu plus tard.

• 1030

Il y a ensuite Roger Fitzgerald. Roger est le député conservateur de Bonavista South. Il est également mon critique à la Chambre d'assemblée. À ses côtés, se trouve Paul Shelley, député conservateur de Baie Verte. Paul représente une très grande région où se pratique la chasse aux phoques, dont les habitants sont des intervenants dans l'industrie de la chasse aux phoques et dans l'industrie de la pêche. Ensuite, il y a Jack Harris, le chef du NPD de Terre-Neuve et du Labrador. À ses côtés on voit monsieur Gerry Reid, le député libéral de Twillingate et Fogo, circonscription où l'on compte un nombre assez élevé de chasseurs de phoques et de pêcheurs—pas uniquement des chasseurs de phoques, mais des chasseurs de phoques et des pêcheurs. À ses côtés, il y a le député libéral nouvellement élu de Burgeo et LaPoile, Kelvin Parsons. Encore une fois, sa circonscription dépend énormément de la vie marine.

Ces présentations terminées, je demanderais maintenant que l'on projette la vidéo. Comme je l'ai dit, une image vaut mille mots.

• 1031

[Présentation d'une vidéo]

• 1042

M. John Efford: Monsieur le président, c'est ainsi. On m'a qualifié comme étant l'un des plus partisans de Terre-Neuve et du Labrador—je pense que quelques-uns de mes amis ici autour de la table, notamment Charlie Power et les représentants du Parti conservateur, et probablement George Baker, m'ont donné cette étiquette—mais cette question va au-delà de la politique partisane. Cette question, que nous essayons de faire reconnaître par le gouvernement du Canada, a trait aux habitants de Terre-Neuve et du Labrador, des habitants du Canada atlantique.

Cette question n'a rien à voir avec une augmentation du TPA pour 1999. Étant donné que nous sommes venus à Ottawa, et lors de mes rencontres avec les ministres au Québec et avec l'honorable David Anderson, je n'ai pas demandé qu'il y ait une augmentation du TPA pour 1999. La seule chose que j'ai faite au Québec, a été de projeter cette vidéo afin que tous les ministres de partout au Canada puissent voir ce qui se passe dans notre province, afin qu'ils puissent présenter ces renseignements dans leurs circonscriptions et chercher un appui, un appui de l'opinion publique en notre faveur au Canada atlantique. Je n'ai pas demandé une augmentation du TPA.

Je devais d'ailleurs tenir des discussions le lendemain lors de la réunion des ministres de l'Atlantique, mais je deviens effectivement émotif et je me choque, parce que je constate la destruction d'un écosystème, la destruction de dizaine de milliers de personnes au Canada atlantique qui ont et devraient avoir le droit de vivre dans leurs propres collectivités et de gagner leur vie dans cette région.

Lorsque Jean Cabot a découvert Terre-Neuve et le Labrador, cette ressource était tellement en abondance qu'il a tout simplement lancé un saut par-dessus bord et a remonté de la morue. Aujourd'hui, dans la circonscription de Charlie Powers, dans ma circonscription, nous ne pouvons même pas pêcher une seule morue de l'océan pour manger, et tous nos pêcheurs dans ces petites embarcations restent au quai, jetant un regard sur l'océan et se demandant d'où viendra leur prochain repas. Ça ne devrait pas être ainsi.

• 1045

Avec une telle ressource que nous avions et avec la mauvaise gestion, la cause du déclin étant la soif de profits des grandes entreprises et des navires étrangers, les personnes qui sont laissées derrière et qui souffrent sont les personnes qui vivent dans ces petites localités. Nous voulons que l'industrie de la chasse aux phoques continue de prospérer et nous voulons que l'industrie du poisson de fond continue de prospérer également. La cause de l'effondrement de l'industrie du poisson de fond était qu'elle était mal gérée. Elle était gérée de façon inappropriée. Autrement, l'effondrement ne se serait pas produit.

Mais ce qu'il y a d'effrayant dans tout cela, c'est que six ans après l'effondrement, après la fermeture de l'industrie du poisson de fond à Terre-Neuve et au Labrador, alors qu'environ 40 000 personnes au Canada atlantique ont été directement déplacées, la biomasse de la morue du Nord est pire en 1998 qu'elle l'était avant 1992, selon le FRCC, le comité consultatif du ministre. Je vous pose la question: où est le plan de gestion approprié pour l'industrie de la chasse aux phoques et pour l'industrie de la pêche, pour les gens qui habitent dans nos collectivités du Canada atlantique?

Permettez-moi également de vous dire ceci. Pendant que des gens débattent avec moi en raison de mon tempérament ou de mes émotions et en raison de certaines déclarations que j'ai faites, pendant que les gens débattent avec moi et disent qu'il n'y a aucun renseignement scientifique, le milieu scientifique de la NAFO, en 1997, indiquait clairement que les phoques consommaient 108 000 tonnes de jeunes morues du Nord—les morues qui mesurent moins de 40 cm—ce qui représente 300 millions de poissons.

Si ces 300 millions de poissons avaient eu une chance de survivre, peu importe ce qu'est le pourcentage de survie dans la nature, et s'ils avaient pu grossir et atteindre une taille que l'on peut récolter commercialement, combien de personnes à Terre-Neuve et au Labrador seraient retournées au travail pour nourrir leurs familles? Ils n'ont pas d'argent. L'indemnité provenant du gouvernement fédéral a cessé. Pourquoi? On nous a donné l'impression que les stocks revenaient, de sorte qu'ils ont mis fin à l'indemnité.

Il ne faut surtout pas oublier que ces personnes n'ont pas causé l'effondrement. Ces personnes ont assisté impuissantes à la pêche faite par les chalutiers—les gros navires. Les chalutiers sont maintenant passés dans d'autres régions du monde, mais les personnes derrière ont le problème, vivent avec le problème et ne semblent avoir aucun avenir, les personnes qui souffrent sont les pêcheurs qui ont de petites embarcations à Terre-Neuve et au Labrador ainsi qu'au Canada atlantique.

Monsieur le président, cela n'a rien à voir avec la carrière politique de John Efford ou la carrière politique de Jack Harris. Il ne s'agit même pas d'une question gouvernementale. Cela n'a rien à voir avec ce que nous allons faire aujourd'hui. Il s'agit d'une question portant sur des gens qui souffrent; dans cette vidéo, vous avez vu des personnes qui vivent dans leurs localités. Il ne s'agit pas d'un différend entre les organisations de défense des droits des animaux et nous; elles ont leurs objectifs. Notre objectif concerne les gens, et ce qui est le plus troublant pour moi—c'est mon dernier commentaire et je laisserai la parole à mes collègues, parce que je veux que vous les entendiez—c'est que maintenant, sept ans après la fermeture de l'industrie de la pêche de fond, nous avons le MPO, qui gère notre ressource, et nous nous demandons où se trouve son plan de gestion. Il n'y a aucun plan de gestion.

Je ne connais aucune autre ressource dans le monde, qu'elle soit terrestre ou marine, pour laquelle il n'y a aucun plan de gestion, mais nous ne pouvons pas obtenir un plan de gestion.

Voici tout ce que nous demandons. Si les ressources scientifiques ne sont pas au ministère des Pêches et des Océans du Canada, il incombe alors au ministre de nommer un comité formé des gens compétents, qu'il s'agisse d'intervenants au sein de l'industrie ou de scientifiques ou d'un mélange de l'un ou des deux ou de tous, pour le conseiller très clairement sur les mesures appropriées à prendre à long terme—pas pour 1999, ni pour l'an 2000, mais au-delà de ces dates. Nous voulons que nos ressources soient gérées de façon à ce que l'économie de Terre-Neuve et du Labrador, l'industrie de la pêche, et l'industrie de la chasse aux phoques aient un plan à long terme pour l'avenir. Merci.

Le président: Merci, monsieur Efford.

Monsieur Harris.

• 1050

M. Jack Harris (député, Chambre d'assemblée de Terre-Neuve et du Labrador): Je voudrais seulement ajouter quelques observations à ce que M. Efford a dit. Je pense que le simple fait que nous soyons ici, au sein d'un comité de tous les partis est révélateur qu'aux fins du présent exposé et pour faire valoir les préoccupations que nous partageons dans cette province, nous sommes ici en tant que groupe non partisan. Nous sommes ici en raison d'une résolution unanime de la Chambre d'assemblée de Terre-Neuve, en fait, suite à une motion qui a été présentée par M. Fitzgerald, un député conservateur, et qui a été appuyée par le ministre et par le NPD.

Nous sommes ici pour mettre en évidence la préoccupation que le gouvernement central du Canada, qui a une responsabilité évidemment pour l'ensemble du pays, n'accorde pas, à notre avis, suffisamment d'attention aux problèmes que nous voyons à la suite de la non-reprise de la morue du Nord.

Je ferai seulement quelques observations, une première portant sur le fait que le ministère des Pêches et des Océans a reconnu que le stock de morues 2J3KL, ce que l'on appelle la morue du Nord, a été et demeure—potentiellement—l'un des plus importants dans le monde. Pourtant, ce que nous avons vu depuis 1992 est un manque pratiquement total de récupération de ce stock. En fait, il y a eu une légère diminution de la biomasse.

La difficulté que nous avons, c'est que lorsque nous constatons la prédation qui semble être différente—et Lloyd Oldford abordera cette question—que les comportements tant de la population de morues que de la population de phoques ont changé, probablement à la suite de... Eh bien, je suppose que nous ne savons pas exactement pourquoi. Mais lorsque nous constatons que la biomasse n'augmente pas, et lorsque nous voyons plusieurs estimations... Il y a le CCRH, le Conseil pour la conservation des ressources halieutiques, qui estime que les phoques du Groenland peuvent consommer jusqu'à 140 000 tonnes de morues du Nord chaque année. NAFO, pour une année donnée, l'estime à 108 000 tonnes.

Mais le nombre incroyable est celui que M. Efford a mentionné: les 300 millions de morues par année. Cela doit nécessairement contribuer à l'incapacité des stocks de morues de récupérer.

De toute évidence, nous ne sommes pas devant des solutions simples ici, nous avons devant les yeux, nous pensons, un échec de la part du ministère des Pêches et des Océans de régler de façon adéquate la question, de mettre en place un plan de gestion, un objectif de gestion, et de jouer le rôle qu'il pourrait jouer dans le cadre d'un effort de commercialisation internationale plus agressive, une campagne éducative plus agressive pour contrecarrer la campagne très dispendieuse en vertu de laquelle on s'oppose, quelles que soient les circonstances et tel que nous l'avons entendu hier, à une chasse commerciale aux phoques. N'importe quelle récolte qui est suivie du mot «commerciale» se butera à une opposition pour toujours par certains groupes—avec leur argent. Nous nous attendons à ce que le gouvernement du Canada joue un rôle pour contrer cela.

En outre, je crois que les habitants du Canada et le gouvernement du Canada ont une responsabilité morale et politique envers la communauté internationale de reconstruire cette source de nourriture, ce plus grand stock de morues au monde. Je crois que le Canada a une obligation morale envers le monde de reconstruire et de trouver les moyens de le faire.

Nous ne croyons pas qu'il y ait suffisamment de jeu qui soit accordé à l'incidence des phoques sur la population de poissons. Il y a eu des critiques des méthodes du MPO. Par exemple, une méthode qu'utilise apparemment le MPO pour estimer la prédation de la morue est de compter effectivement le nombre d'osselets de l'oreille que l'on retrouve dans l'estomac des phoques. Comme vous avez pu le voir dans la vidéo, si les phoques ne mangent pas effectivement la tête du poisson, on ne trouvera pas d'osselets de l'oreille dans l'estomac, de sorte que vos estimations ne seront pas terriblement exactes. Nous voyons plusieurs problèmes, mais nous voyons aussi qu'il y a une urgence fondée sur les divers comportements qui ont changé, comme nous avons pu le constater.

• 1055

Nous examinons l'obligation du ministère des Pêches et des Océans de produire un plan de gestion et un objectif de gestion. S'il n'y a pas de capacité politique au niveau du ministère ou à celui du gouvernement, il nous faut peut-être un comité de personnes éminentes pour faire rapport sur la question dans un délai passablement court.

À mon avis, il doit se passer quelque chose, d'un bout à l'autre du pays, pour comprendre que l'industrie du phoque, la récolte, est une ressource renouvelable comme toutes les autres, qui doit être gérée pour le bien de la ressource elle-même ainsi que pour le bien des gens qui en dépendent. Si elle a une incidence destructrice pour une autre espèce qu'elle pourrait éventuellement éliminer, on doit également en tenir compte.

Nous sommes ici pour demander à l'unisson au gouvernement du Canada de faire cela et pour demander à votre comité de nous aider à le convaincre de faire effectivement cela.

M. John Efford: Merci, Jack.

Je vais demander à Roger d'être le porte-parole de son groupe, puis nous entendrons les propos de M. Orford, qui fera un bref exposé. Nous passerons ensuite aux questions.

M. Roger Fitzgerald (député, Chambre d'assemblé de Terre-Neuve et du Labrador): Merci, monsieur le ministre.

Monsieur le président, tel que le disait le ministre plus tôt, nous sommes devant vous en tant que comité représentant tous les partis. Je suis dans un endroit où je me sens très à l'aise, étant donné que c'est la troisième fois que je comparais devant votre comité, deux fois à Terre-Neuve et maintenant ici aujourd'hui.

Monsieur le président, lorsque nous nous rallions à une question commune avec le ministre, qui est un des députés les plus partisans de notre Chambre d'assemblée, je peux vous assurer que nous avons un problème grave. Aujourd'hui, ensemble, nos voix ne font qu'une et c'est parce que nous avons un problème grave et parce qu'il faut le régler immédiatement.

J'aimerais faire référence au film que nous avons visionné et vous dire que, monsieur, ce film ne contenait aucun animal en peluche. Ce film, monsieur le président, était réel. On ne l'a pas envoyé aux États-Unis pour qu'il soit édité par une entreprise vidéo à grand budget. En fait, la plus grande partie de ce film a été tournée par des pêcheurs photographes amateurs, dont l'un d'eux est ici même aujourd'hui. Je peux vous assurer que ce film est bien réel.

Le ministre vous a donné certains faits et certaines données au sujet du cheptel de phoques du Groenland et de la nécessité d'y voir immédiatement. Je ne vais qu'effleurer pendant quelques instants le côté humain de cette question. Monsieur le président, je vais y mettre un visage humain parce que c'est de cela qu'il s'agit. Il s'agit de personnes, de familles, de collectivités et de la survie du milieu rural de Terre-Neuve et du Labrador.

Monsieur le président, votre comité s'est rendu à Torse Cove la première fois qu'il est venu à Terre-Neuve et vous avez vu un monsieur se présenter—c'était probablement la première fois de sa vie qu'il parlait en public—et littéralement pleurer parce qu'il a dû refuser à sa fille la chance de faire des études du fait que la pêche était fermée. Vous l'avez vu, monsieur le président, décerner le blâme. Ce sont là les vrais visages et les vraies personnes dont nous parlons aujourd'hui.

Lorsque votre comité s'est rendu à Catalina, vous avez vu un pêcheur venir sur la tribune et montrer à M. Baker, le président à l'époque, une copie de deux carnets de banque, un qu'il avait lorsqu'il était un fier pêcheur et un autre qu'il avait en tant que personne qui a dû supplier Ottawa pour de l'argent.

Monsieur le président, ce sont là les visages, les personnes dont il est question aujourd'hui, et c'est pour cette raison que notre comité se déplace à Ottawa: pour vous supplier, en tant que comité, d'unir vos voix aux nôtres et de demander aux décideurs de s'occuper de ce problème.

Les chasseurs de phoques dont nous parlons sont des pêcheurs. Ce n'est pas qu'ils sont des chasseurs de phoques ici et des pêcheurs là-bas; ce sont des gens qui font partie de la même industrie. Les chasseurs de phoques eux-mêmes sont les personnes qui disent que nous avons un véritable problème ici, parce qu'ils le voient se produire dans une autre partie de ce secteur qui est censé leur fournir un gagne-pain.

Nous ne demandons pas une augmentation du total des prises autorisées. Nous savons que le marché joue un rôle important dans tout cela. Chez moi, dans mon district, nous avons une nouvelle industrie du phoque qui vient tout juste d'ouvrir l'année dernière, et je vous dirais qu'il y a probablement à l'instant même plus de cent personnes qui y travaillent, à faire des choses qui n'ont jamais été faites auparavant à Terre-Neuve. Nous ne sommes pas des gens irresponsables qui disent que nous devons maintenant éliminer le cheptel de phoques du Groenland et priver des industries comme celle-là—où ce sont des intérêts privés qui ont investi—du droit de faire travailler des personnes. Ce n'est pas pour cette raison que nous sommes ici.

Mais nous voyons un problème important. On nous rappelle constamment ce qui est survenu en 1992 lorsque des pêcheurs, les vrais experts, se sont présentés devant le gouvernement et lui ont demandé de les écouter et qu'on ne l'a pas fait—et nous en avons vu les résultats.

• 1100

Monsieur le président, il faut faire quelque chose. Nous avons besoin de décisions maintenant, et nous ne devons pas attendre jusqu'en l'an 2000 pour obtenir un dénombrement afin de décider du total des prises autorisées ou encore pour connaître le nombre d'animaux qu'il y a dans le cheptel de phoques du Groenland. Il faut le faire plus rapidement que cela—beaucoup plus rapidement. Je pense que la façon de le faire est celle que le ministre des Pêches et de l'Aquaculture vous a expliquée il y a quelques minutes à peine. C'est la position de notre comité. Les renseignements que vous entendez d'autres personnes ne sont pas aussi exacts que ceux que vous entendez en ce moment de notre groupe et de notre parti, qui fait l'unanimité.

Merci.

M. John Efford: Monsieur Oldford est un pêcheur et un chasseur de phoques. Il gagne sa vie dans ces deux industries.

Monsieur Oldford.

M. Lloyd Oldford (témoignage à titre personnel): Bonjour.

Au nom des pêcheurs et des chasseurs de phoques de Terre-Neuve et du Labrador et du long de la côte, je tiens à vous dire que nous ne sommes pas ici en tant que barbares, qui tuons parce que nous aimons tuer. Nous ne tuons pas à moins de nous en servir comme nourriture ou d'avoir un marché pour cela. C'est ce que nous faisons.

Maintenant, monsieur, la nature à une façon de s'occuper d'elle-même. Tout est censé s'équilibrer. Mais lorsque quelqu'un ou quelque chose s'en mêle pour la contrecarrer, pour y enlever quelque chose, nous, qui sommes censés être les créatures ou les animaux les plus intelligents—ou peu importe ce que nous sommes—sur la face de la Terre, alors nous devons intervenir et faire tout ce que nous pouvons pour recréer cet équilibre.

À l'heure actuelle, il y a une différence terrible entre le nombre de phoques et le nombre de morues dans nos eaux. Il n'y a plus de morues à l'extérieur de la zone où il y en a traditionnellement; ce qu'il reste est uniquement dans les baies. Il n'y a pas de petits poissons. Ce sont tous de gros poissons.

J'examine la morue dans les baies depuis le mois de janvier. Il y a quelques minutes, je parlais au téléphone avec ma femme et elle a dit qu'à Bonavista Bay, les phoques sont maintenant nombreux. Les poissons montent sur les roches et les phoques sortent et viennent les prendre. Ce n'est rien d'autre qu'une grande bouffe. C'est tout ce qu'il nous reste, et je suis presque prêt à dire que je l'avais prévu. C'est trop tard maintenant. C'est hier qu'on aurait dû le faire. Je suis prêt à dire cela. S'il nous faut encore attendre une année ou deux, vous allez vous trouver dans une situation très désastreuse, monsieur, même pour essayer de ramener l'industrie de la morue ou le quota, le nombre de morues, à un niveau ou nous pouvons l'exploiter de nouveau.

Je ne suis pas d'accord, monsieur, d'aller tuer les phoques et de les jeter. Nous—vous—devons avoir quelque chose à la place. C'est pourquoi je suis ici avec ces personnes: pour vous parler ainsi qu'à ces hommes présents, pour vous dire, en notre nom, même si nous devons vous supplier, que vous devez faire quelque chose. Vous devez le faire savoir. Je suis un pêcheur depuis 30 ans. Lorsque j'ai commencé à partir en bateau, il y a de nombreuses années, si vous attrapiez un phoque, vous reveniez et comme vous étiez un homme fier. «Quel bonheur!», disaient les gens, «c'est tout un exploit d'avoir un phoque, vous et moi allons faire le tour de port...» Maintenant, lorsque vous sortez en bateau, vous pouvez le remplir de phoques—si on vous autorise à les prendre. Chaque année, il y en a plus.

La vidéo vous l'a démontré. Avez-vous vu ces phoques sur la glace regardant en l'air au moment où nous les survolions en avion? Il y en a eu pour des miles et des miles. Chaque morceau de glace était couvert de phoques. Est-ce que ce n'est pas suffisant pour montrer aux gens, pour laisser les gens s'en imprégner, qu'il y en a trop?

Nous devons faire quelque chose. Nous devons contrôler ce phénomène, monsieur. Je deviens émotif à en parler, c'est vrai, parce que vous détruisez une façon de vivre à Terre-Neuve qui est là depuis plus de 500 ans.

Ils se fichent bien de nous. C'est mon avis. Il n'y a personne qui se préoccupe, un tant soit peu, de nous à Terre-Neuve. Des programmes de «création d'emplois»? Qu'est-ce que c'est, un compromis? Je ne sais pas ce que c'est.

Merci monsieur.

• 1105

M. John Efford: Merci, monsieur Oldford.

Merci, monsieur le président. Je pense que les expressions de chacune des personnes qui paraît dans la vidéo en dit long sur la gravité de la situation.

Le président: Est-ce que monsieur Shelley ou monsieur Reid ou monsieur Parsons aimerait prendre la parole pour une minute environ chacun? Je viens d'une communauté irlandaise et je sais qu'il est difficile parfois de se limiter à une minute ou deux, mais...

Monsieur Shelley.

M. Paul Shelley (député, Chambre d'assemblée de Terre-Neuve et du Labrador): Oui, j'aimerais certainement dire quelques mots. Depuis les derniers jours, je suis assis et j'écoute ce qui se dit devant votre comité et j'ai parlé à des pêcheurs.

Comme l'a mentionné M. Efford, je suis dans le milieu d'une zone où on voit défiler les glaces et la chasse aux phoques est prédominante. Il y a u grand nombre de chasseurs de phoques dans ma région—ma famille, des amis, des pêcheurs à qui je parle jour après jour.

J'aimerais uniquement signaler une chose sur la vidéo dont j'ai également parlé hier soir lors de l'une de nos réunions. J'ai 39 ans, je vis dans cette région et je n'ai jamais vu un phénomène comme celui que vous avez vu aujourd'hui dans la vidéo: des morues sur la rive. On n'a jamais vu cela auparavant, comme vous le dira ce pêcheur et comme tous les pêcheurs de Terre-Neuve et du Labrador vous le diront. Ce que vous avez vu dans cette vidéo—et c'est la première fois que je la voyais—c'était des morues sur la rive. Ce n'est pas du capelan. On n'a jamais vu cela auparavant. Vous, vous ne comprenez pas. Vous partez dans un bateau et vous allez en eau profonde pour vous pêcher à la turlutte.

J'ai toujours cru que si vous mêlez la logique et le bon sens à la science, vous obtiendrez la bonne réponse. Et bien, j'ai demandé à des scientifiques, qui ont refusé de venir et d'analyser ce phénomène lorsqu'on m'en a fait part. À la place, M. Oldford, évidemment, a eu la courtoisie de nous en faire une vidéo. Il n'y a pas un seul scientifique qui est venu voir cela, pour en parler, pour parler de la façon dont vous devez mêler la logique et le bon sens aux faits scientifiques et que peut-être alors nous aurions la vérité.

M. Oldford a également dit quelque chose que j'ai dit hier soir, et c'était, je crois—et je n'ai pas toute l'expertise scientifique pour cela—que c'est peut-être trop tard pour que les stocks de poissons s'en remettent. C'est juste une idée que je me fais, mais lorsque vous voyez des poissons sur les roches, lorsque vous voyez des phoques qui remontent une rivière à saumon, lorsque vous voyez, comme l'an dernier, je pense que c'était l'an dernier, dans le district de M. Efford, où l'un de ses commettants a entendu un aboiement alors qu'il faisait une promenade le soir et qu'il a pensé qu'il s'agissait d'un chien mais que c'était un phoque dans la rue de sa localité...

Des voix: Oh, oh!

M. Paul Shelley: ...monsieur le président, vous vous demandez combien il y a de phoques autour de nous.

Pour rajouter encore un peu de piquant à ce que nous avons mentionné plus tôt au sujet des gens que je connais personnellement dans l'industrie du phoque, qui répondront bientôt à des accusations devant les tribunaux, j'ai parlé à certains d'entre aux pas plus tard qu'hier, monsieur le président. En ce qui concerne le blanchon dont a parlé M. Baker, je vous demanderais d'examiner la vidéo de très près. Vous remarquerez qu'il y a un ruban rouge autour de ce bébé phoque que vous voyez dans la vidéo. J'ai parlé à ces gens hier même; ils vivent dans ma région. Ces gens qui sont venus avec leurs caméras—qui ont finalement abouti en Utah pour faire leur édition—leur ont demandé s'ils auraient des objections à amener leur bébé phoque en peluche aux quais pour qu'ils puissent prendre des photos.

Monsieur le président, vous vous posez alors des questions au sujet de cette situation et de cette guerre de propagande qui se déroule devant nous. Nous allons retourner demain et je parlerai de nouveau à des pêcheurs dans mon district—et les autres personnes ici en feront de même—pour ramener la réalité une fois de plus. Nous sommes très préoccupés lorsque nous constatons qu'il y a un demi-million de personnes qui vivent à Terre-Neuve et au Labrador et qu'il y a six millions de phoques.

Un de mes amis, un scientifique de France, qui était de passage dans ma région l'an dernier, a dit que notre problème pourrait être notre solution, que nous sommes entourés par notre solution et que nous sommes entourés par notre problème. Il est temps que nous agissions très rapidement, et lorsque vous entendez les différents rapports de scientifiques présentés ici, il est temps qu'ils s'unissent. Je pense qu'on a suggéré plus tôt ce matin que tous les groupes s'unissent, mais je ne pense pas que nous puissions attendre 2 ou 3 ou 4 ou même 5 ans.

C'est donc le côté humain de cette situation, mais c'est aussi la science qui se mêle à la logique et au bon sens pour agir à ce sujet et agir rapidement, sinon nous allons être de retour dans une autre année ou dans deux années pour dire que le cheptel a augmenté et s'élève à 10 millions et que les phoques se détruisent eux-mêmes. Qui sera responsable alors?

Le président: Merci Paul.

Gerry.

M. Gerry Reid (député, Chambre d'assemblée de Terre-Neuve et du Labrador): Je cède mon tour, monsieur le président, j'aimerais plutôt répondre à des questions. Je pourrais dire quelque chose en conclusion.

Le président: Monsieur Parsons.

M. Kelvin Parsons (député, Chambre d'assemblée de Terre-Neuve et du Labrador): Merci, monsieur le président.

Je ne suis pas un scientifique et j'ai entendu de nombreuses preuves scientifiques présentées au cours des derniers jours, mais je pense que vous n'avez pas à passer un après-midi dans le four pour savoir de quelle façon une dinde rôtit non plus. Je pense qu'il est passablement évident ici qu'il y a une relation entre la population des phoques et le déclin des stocks de morues.

• 1110

Le district d'où je viens est dans la pointe sud-ouest de Terre-Neuve. Ce n'est pas un district pour la chasse aux phoques, mais c'est un district pour la pêche. Comme l'a mentionné Mme Karetak-Lindell hier, c'est l'élément humain qui vous frappe. Dans les 14 localités de mon district, vous avez beaucoup de difficultés maintenant à trouver des jeunes dans ces localités, la raison étant, évidemment, que la seule chose qui pourrait les retenir serait une forme d'emploi. Ils n'ont pas cela, ils ne l'ont pas depuis 1992, et il est peu vraisemblable qu'ils soient sur le point de l'avoir à l'avenir.

Il y a de nombreuses choses que nous aimerions exporter au Canada continental, mais les gens—notre intelligence et nos cerveaux—n'en font pas partie. Nous préférerions les garder chez nous. J'inviterais encore instamment le comité à faire tout ce qui est nécessaire pour obtenir les renseignements scientifiques appropriés et nécessaires et à élaborer un plan pertinent de gestion du cheptel de phoques et de l'industrie de la morue.

Merci.

Le président: Merci, monsieur Parsons.

John, peut-être que vous pourriez coordonner les personnes qui devraient répondre aux questions des députés. Il nous reste environ 50 minutes.

M. John Efford: Monsieur le président, si je peux me le permettre, je ferai cette coordination parce que les questions peuvent être dans un domaine particulier à chaque personne. Chacun aura la possibilité de répondre à des questions. Je ne veux pas répondre à toutes.

Le président: Très bien. Selon notre système, monsieur Lunn aura 10 minutes pour poser des questions, et sera suivi du Bloc et de M. Bernier, pendant 5 minutes. Puis, nous passerons du côté des libéraux pendant 10 minutes et nous reviendrons au... vous passez au premier tour, monsieur Lunn?

M. Gary Lunn: Pour donner plus de temps aux autres députés je prendrai les dix premières minutes, mais je passerai à la deuxième période de cinq minutes.

Le président: Merci, monsieur Lunn. Vous avez donc dix minutes.

M. Gary Lunn: Tout d'abord, j'aimerais simplement prendre quelques instants. Il me fait grand plaisir de voir Tina Fagan de la Canadian Sealers Association, qui comparaît à midi aujourd'hui. Malheureusement, je ne pourrai y être. Il s'agit d'une motion que j'ai présentée hier. Je tiens à lui souhaiter la bienvenue et, une fois de plus, je tiens à l'assurer que je lirai son mémoire ainsi que le procès verbal. Il y a de nombreux députés compétents qui lui poseront des questions, et nous nous en servirons au moment de rédiger le rapport.

C'est notre troisième journée d'audience où nous entendons divers groupes. Je tiens à remercier votre délégation, le comité de tous les partis, d'être venue ici. Votre vidéo commence par les mots, «c'est au sujet de la vérité». Je veux essayer de rapprocher cela parce que, comme mon cher ami et collègue, le secrétaire parlementaire, l'a dit, nous entendons des points de vue divergents, des points de vue diamétralement opposés, que les preuves scientifiques ne... j'ai entendu M. Oldford dire ce matin que vous ne voulez pas tuer des phoques à moins qu'il y ait des marchés pour eux. Je suis reconnaissant pour ces commentaires.

Par le passé, j'ai entendu le ministre—et il le sait—parler de les brûler et de les détruire, et de les mettre au rebut. Je sais que c'est émotif et que ces émotions ressortent dans des discussions probablement animées, au cours desquelles il devient frustré. Nous sommes tous passés par là.

Mais on cite le ministre Anderson qui dit dans le journal qu'il est heureux et enchanté du TPA. Il a dit ce matin qu'il ne vise probablement pas une augmentation du TPA, tandis que la vidéo laissait entendre que c'est précisément ce que vous voulez, que la population de phoques est hors de contrôle. C'est l'image que nous retenons de tout le monde.

Donc d'une part nous disons que nous voulons ce plan de gestion, et cela fait 10 ou 15 ans qu'on le demande. J'essaie vraiment de reconnaître cela. Ils essaient de faire ce qui est politiquement correct et d'avoir la bonne image là-bas. Ils ne veulent blesser personne, mais en même temps... Je me demande seulement si nous sommes vraiment honnêtes. Ce qui n'a nullement été mentionné ici ce matin, par aucun des participants, c'est ce que je vois comme la solution ultime... Même M. George Winters, qui a fait un exposé ce matin—vous l'avez entendu—m'a laissé entendre lorsque j'essayais de le coincer sur les nombres qu'en ce qui a trait au TPA, si vous incluez les 360 000 du Groenland et si nous devions aller jusqu'à 400 000, nous parlons d'une augmentation d'environ 10 p. 100. C'est une augmentation modeste, c'est le moins que l'on puisse dire, de peut-être seulement 40 000 ou 60 000. Ce n'est pas une quantité considérable de phoques, tandis que l'image que l'on retient des trois derniers jours, c'est d'une population de phoques qui a littéralement explosé et qui est hors de contrôle.

Je pense que nous ne sommes pas tout à fait francs avec nous-mêmes au sujet de ce que nous voulons. Maintenant, je vous dirais—et je veux connaître vos commentaires—que nous nous sommes engagés dans la mauvaise direction. Nous devons déplacer un aiguillage et changer de voie. Nous pourrions concentrer toute cette énergie, notre comité fédéral et votre comité se rendant aux États-Unis, nous en prendre aux États-Unis au sujet de la Marine Mammals Protection Act, et nous en prendre aux nouveaux marchés et aux nouveaux produits afin qu'il y ait un véritable marché là-bas. Nous aurions alors une raison de vraiment chercher ceci, d'augmenter le TPA, pour qu'il y ait des marchés. C'est à cela que nous devrions consacrer nos énergies.

• 1115

Oui, ces mots reviennent de temps en temps, mais je ne sais pas si nous sommes vraiment francs envers nous-mêmes. Qu'est-ce que nous demandons? Je vais le demander directement au ministre: Êtes-vous vraiment favorable à un triage? Je sais que cela ne faisait pas partie de vos propos des deux ou trois derniers jours; ce n'est nulle part mentionné. Si vous n'appuyez pas une triage—parce qu'il ne fait aucun doute, il semblerait que les marchés ne sont tout simplement pas là. Un triage, c'est tuer plus que ce dont le marché a besoin, je vous dirais.

Si vous n'êtes pas favorable à un triage, alors nous ferions mieux de changer de voie et de passer à la promotion de l'industrie du phoque et à la création de marchés pour que des pêcheurs tels M. Oldford et ceux qui se trouvent dans les diverses collectivités, il y aura autant d'emplois créés au sein de l'industrie comme, par exemple, attirer des tanneries à Terre-Neuve de façon à créer plus d'emplois.

C'est la perception que j'ai de ce qui se passe ici. Nous ne sommes pas vraiment francs—du moins, c'est ainsi que je le vois. J'aimerais savoir ce que vous en pensez, monsieur Efford.

M. John Efford: Merci, monsieur Lunn.

Tout d'abord, permettez-moi de parler de la déclaration que j'ai faite à la Chambre d'assemblée. Dans le vif du débat, quiconque a été dans l'arène politique a fait des déclarations et tenu des propos qu'il souhaiterait pour tout l'or au monde n'avoir jamais tenus. Je me suis excusé...

M. Gary Lunn: Non. J'accepte que...

M. John Efford: ...pour cette satanée erreur si souvent, j'en suis malade de m'excuser.

M. Gary Lunn: ...et je pense que je l'ai fait remarquer. Je comprends cela.

M. John Efford: Mais le problème avec ce dossier monsieur Lunn, c'est que nous avons un groupe de personnes qui dispose de 60 à 80 millions de dollars comparativement à de pauvres petits pêcheurs âgés de Terre-Neuve qui vivent dans leur localité et qui n'ont aucun moyen de gagner leur vie...

M. Gary Lunn: Oui.

M. John Efford: ...une population de 550 000 personnes, dont l'économie a été dévastée par l'effondrement de l'industrie du poisson de fond. Certains propos que le ministre des Pêches et de l'Aquaculture de la province a tenus peuvent être utilisés et être pris hors contexte, et les gens en font tout un plat.

Nous essayons de vous faire part d'un problème, le plus grave problème à confronter le Canada atlantique—la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, l'Île-du-Prince-Édouard, les îles de la Madeleine et Terre-Neuve et Labrador—et nous essayons de trouver une solution. Nous ne voulons pas donner de prise aux organisations de défense des droits des animaux, qui ont leurs propres programmes. Qu'il en soit ainsi. Nous n'essaierons pas de les arrêter.

M. Gary Lunn: Non.

M. John Efford: Ils ont leurs propres programmes et chaque fois que je dis un mot, ils sautent dessus à pieds joints.

M. Gary Lunn: Oui.

M. John Efford: Soit dit en passant, il revient au ministère des Pêches et des Océans du Canada de gérer l'industrie de la pêche. Les représentants de ce ministère ne viennent pas me voir et me dire, «Monsieur le ministre, combien de capelans allons-nous attraper l'an prochain»? Ils ne viennent pas me voir et me demander combien de harengs, combien de maquereaux, ou quelle quantité de crabe nous allons attraper. Ces renseignements sont donnés au ministre. Il prend une décision de concert avec l'industrie. Elle se fonde sur des renseignements scientifiques. Nous ne comptons pas tous les crabes un à un, vous ne comptez pas toutes les crevettes une à une, et vous ne devriez pas avoir à compter tous les phoques qui vivent dans l'océan pour mettre en place un plan de gestion. Si j'utilise le mot «triage», tous les médias le sauront ce soir, diront que John Efford ne se contrôle pas et que John Efford exagère et que John Efford est émotif. Je causerai des dégâts.

M. Gary Lunn: Vous faites la première page.

M. John Efford: En passant, nous ne demandons pas une augmentation du TPA cette année. L'Association des chasseurs de phoques, le Seal Industry Development Council de Terre-Neuve et du Labrador, l'industrie du phoque de Terre-Neuve et du Labrador—et les chasseurs de phoques eux-mêmes—se rendent compte que les marchés ne peuvent soutenir 275 000 animaux cette année. J'ai félicité M. Anderson pour avoir maintenu ce nombre parce que je craignais qu'il soit sur le point de ramener le TPA de 275 000 à probablement 200 000, et cela allait créer des difficultés pour les chasseurs de phoques. Donc que faisons-nous?

M. Gary Lunn: Permettez-moi de vous poser une question. Permettez-moi de vous interrompre. Je reconnais votre franchise, parce que l'image que nous avons vue depuis trois jours est que le véritable problème correspond, ce sont les six millions de phoques qui vivent là-bas.

M. John Efford: Oui. C'est un problème.

• 1120

M. Gary Lunn: Je pense que d'augmenter... Je suis d'accord avec cela. Je suis d'accord avec M. Winters que la population peut être de l'ordre de 4 millions—et je ne suis pas un scientifique—et que nous avons besoin d'un plan de gestion de quatre ou de cinq ans à cet effet. J'appuie cette motion, comme vous le savez, et j'ai préconisé que nous augmentions le TPA sur les quatre ou cinq prochaines années jusqu'à ce que le nombre soit ramené à une valeur pour laquelle les deux industries peuvent coexister.

Appuieriez-vous notre comité, le comité fédéral et votre comité pour qu'ils envoient une délégation mixte à Washington et qu'ils s'en prennent de façon agressive à la Marine Mammals Protection Act afin que nous puissions commencer à faire quelque chose de proactif et d'agressif pour créer...? Il y a des marchés considérables aux États-Unis, et je pense que nous devons faire quelque chose à cet effet. Que pensez-vous de cette idée?

M. John Efford: Cette musique serait douce aux oreilles de l'industrie du phoque. Modifier la Marine Mammal Protection Act pour ouvrir les marchés américains serait un bonheur pour chaque habitant de Terre-Neuve et du Labrador qui fait partie de l'industrie. Cela devrait être fait et cela doit être fait, mais si on l'avait fait au moment où il aurait fallu le faire, il y a quatre ou cinq ans... Rappelez-vous à quel point nous avons entendu les pêcheurs de Terre-Neuve et du Labrador se plaindre de la surpêche? C'est seulement lorsque l'effondrement total est survenu qu'on a fait quelque chose. Eh bien, nous nous sommes plaints depuis un grand nombre d'années—depuis 1992—et maintenant M. Oldford et M. Shelley vous ont dit très clairement qu'ils se demandaient s'il était trop tard.

Ma question pour le ministre ou pour ces scientifiques ou pour quiconque a la compétence dans ce domaine: Avons-nous quatre ou cinq ans? Oui, nous devons maintenir l'industrie du phoque lucrative. 25 millions de dollars ou quel que soit le montant qu'elle rapporte au cours d'une année moyenne représente beaucoup pour ces personnes. Nous ne devons pas mettre cela en péril. Nous devons ouvrir de nouveaux marchés. Par ailleurs, il y a la question des chasseurs de phoques, comme vous l'avez dit, la faible biomasse de stocks de morues, la crainte des gens de Terre-Neuve et du Labrador. Il doit y avoir une immédiate... Il y a urgence.

M. Gary Lunn: C'est la question que je vous pose. C'est pour cette raison que je dis que j'essaie de ramener cela à la vérité et à l'honnêteté, parce que le fait d'écouter M. Oldford et ces personnes... Vous dites d'une part que vous avez félicité le ministre et que vous êtes maintenant à 275 000, et j'entends dans la phrase suivante que vous n'avez pas le temps et que nous voyons des graphiques où les phoques mangent la morue et nous devons agir maintenant. Je vous pose donc la question suivante: Êtes-vous honnête avec vous-même lorsque vous dites que vous êtes heureux du TPA? N'êtes-vous pas en désaccord que nous avons besoin de quelque chose pour ramener le tout et ce de façon plus agressive si en fait se sont les phoques qui mangent la morue?

M. John Efford: Gary, je...

M. Gary Lunn: Je ne pense pas que vous soyez tout à fait franc avec nous. Je pense que vous avez peut-être besoin de faire quelque chose dès maintenant—en disant que le TPA est trop faible.

M. John Efford: Gary, c'est probablement à cause de mon accent terre-neuvien. Je ne me fais pas comprendre de vous. Probablement que c'est la façon dont je parle, avec ce dialecte de Port de Grave.

Mais permettez-moi de vous dire ceci: il y a deux problèmes ici. Je suis le ministre des Pêches et de l'Aquiculture pour l'ensemble de la province de Terre-Neuve et du Labrador, non seulement pour l'industrie de la pêche, non seulement pour les petits bateaux, et non seulement pour l'industrie du phoque. Je suis le ministre responsable pour tout, pour tout ce qui englobe l'industrie de la pêche de la province et je dois intenter des poursuites de la meilleure façon possible.

Il y a deux problèmes ici. Le premier est de garder une industrie du phoque lucrative. En ce qui concerne le TPA cette année, les marchés ne peuvent soutenir 300 000 animaux et il serait stupide de ma part d'en prendre 300 000 et d'en jeter 25 000. C'est bien. Mais il y a l'urgence d'un problème immédiat à régler parce qu'il y a une surpopulation de phoques.

Maintenant je vais dire clairement qu'il n'y a aucune raison que je dis cela parce que je ne suis pas un scientifique, et bonté divine, ils ne me posent aucune question sur des renseignements scientifiques au sujet des autres stocks. Donc, après ce que vous avez vu et entendu, pourquoi est-ce que les ressources ne sont pas au ministère des Pêches et Océans, ou pourquoi n'ont-ils pas donné cela? Nous sommes en 1999, au mois d'avril, et nous avons ce problème depuis 1992, parce que nous n'avons pas tenu compte alors de tous les pêcheurs. Pourquoi est-ce ainsi?

M. Gary Lunn: Nous pouvons continuer, mais je vais tout simplement terminer...

Le président: Bien. Vos 10 minutes sont écoulées mais...

M. Gary Lunn: ...avec une question très rapide. Je ne prendrai pas mes autres 5 minutes.

Je suis d'accord avec vous, je ne suis pas favorable à un triage, mais je pense que la réponse est tout d'abord de régler nos barrières internes de commerce intérieur pour les marchés asiatiques, dont nous avons parlé auparavant; le Canada devrait faire quelque chose à ce sujet. Ensuite, nous devons être plus agressifs à l'endroit des États-Unis. Je suis d'accord qu'un triage permet de tuer un plus grand nombre de phoques que ce que les marchés peuvent soutenir, et que les marchés n'en prendront que 275 000. L'autre idée est que nous devons abaisser la population de phoques et que la seule façon d'y parvenir est de créer un marché; c'est à ce moment que nous devons changer de voie et travailler tous ensemble à cet objectif.

M. John Efford: Je vais répondre à cette question, puis je laisserai quelques-uns de mes collègues y répondre également.

Le président: Je suis désolé, monsieur Efford, mais son temps est écoulé.

M. John Efford: Très rapidement?

Le président: Une minute.

M. John Efford: Moins d'une minute.

• 1125

M. John Efford: En Russie, des dizaines de milliers de personnes ont faim. Dans de nombreux pays partout dans le monde, des centaines de milliers de personnes ont faim.

La viande de phoque est celle qui a la plus forte valeur protéique dans le monde, soit 67 p. 100 de protéines. Pourquoi ne pas faire ce qu'un grand nombre de personnes ont dit et en récolter 25 000 ou 30 000 de plus, si nous avions la permission de le faire—ne pas interférer avec l'industrie du phoque, ne pas tuer les bébés phoques en santé qui sont destinés au marché, mais éliminer les phoques adultes si la science nous conseillait de le faire, si c'est approprié? Nous ne le savons pas; la science ne nous le dit pas. Mais c'est une nourriture de très grande qualité.

Le président: Merci.

Monsieur Bernier.

[Français]

M. Yvan Bernier: Je vois que M. Efford, le ministre des Pêches, est à la hauteur de sa réputation aujourd'hui. Il est très, très passionné. S'il croyait que Gary avait de la difficulté à le comprendre à cause de son accent, je peux lui dire que je me compte chanceux qu'une bonne interprète dans la cabine ait réussi à traduire ses propos, parce qu'il parlait vite.

Monsieur Efford, mon comté comprend les Îles-de-la-Madeleine. Je sais que le nombre de bêtes qu'on y chasse est très inférieur à celui qu'on chasse à Terre-Neuve. C'est pour cette raison que nous apprécions tout le travail que vous faites dans votre province et les efforts de ce que je pourrais appeler le parti des pêcheurs, que vous représentez ce matin.

[Traduction]

C'est un parti pour la pêche, ce ne sont ni les libéraux ni les conservateurs.

[Français]

Je voudrais commencer par exprimer mon point de vue et terminer en vous posant des questions. J'espère que le président m'en laissera le temps.

[Traduction]

Le président: Je reconnais que l'on pratique la chasse aux phoques dans votre circonscription, je vais donc vous donner plus que les cinq minutes qui vous sont allouées.

[Français]

M. Yvan Bernier: M. Shelley disait que les scientifiques n'étaient pas allés sur le terrain et n'avaient pas pu constater ce qu'il avait pu voir dans la vidéo de M. Oldford. J'ai beaucoup de respect pour les scientifiques, mais je dois vous dire que pour moi, les vrais scientifiques et les vrais biologistes sont ceux qui sont en contact avec la mer à tous les jours. Lorsque mes pêcheurs me disent qu'ils voient des choses comme celle-là, je pense que le suivi de la nature qu'ils font est le meilleur contact. Lorsqu'on est biologiste, qu'on est payé par Ottawa et que notre bureau principal est à Ottawa, on ne va faire des relevés sur le terrain qu'une ou deux fois par année. Ce n'est peut-être pas notre faute parce que le ministère n'a pas les budgets nécessaires pour faire mieux, mais on n'est peut-être pas situé au bon endroit.

Cela m'amène à être empathique au souhait que vous faites, monsieur Efford, ainsi que tous les membres de la délégation de Terre-Neuve. Vous souhaitez être impliqués dans la gestion. Vous voulez qu'on crée un comité de concert avec Ottawa, de façon à ce qu'on puisse trouver les meilleures solutions, tant pour la reprise de la pêche à morue que pour la gestion d'un stock optimal de phoques. C'est tout à votre honneur.

Vous dites que le ministère des Pêches et des Océans n'a aucun plan de gestion par rapport à la reprise de la pêche à la morue et qu'il adopte l'approche du wait and see. Vous dites qu'il n'a pas non plus de plan de gestion par rapport au phoque, qu'il a fixé un chiffre et qu'il ne le changera pas parce que le marché ne peut pas accepter un plus grand nombre de bêtes abattues. J'aimerais savoir quels efforts de mise en marché ont été faits. Est-ce que Terre-Neuve ou les entreprises qui s'y trouvent font de la prospection dans des pays autres que les États-Unis? Est-ce qu'on a demandé des fonds à Ottawa pour faire de la recherche là-dessus, dont bénéficieraient non seulement les gens de Terre-Neuve, mais tous ceux qui habitent les provinces où l'on pratique la chasse au phoque? Il serait intéressant de savoir si de telles demandes ont déjà été faites et, le cas échéant, quelles ont été les réponses.

L'autre question qui me chicote porte sur les groupes de protection. Étant proche de la mer, je suis prêt à partager avec vous le gros bon sens. À un moment donné, on a à choisir entre le massacre des morues et le massacre—c'est un gros terme, je le reconnais—des phoques. Est-ce qu'on a nous-mêmes brisé l'équilibre en empêchant la chasse aux blanchons? Est-ce que les phoques se paient maintenant de beaux partys, alors qu'on doit retenir notre population sur les côtes et l'empêcher d'aller pêcher?

• 1130

Est-ce qu'on n'est pas victimes de chantage ou même du terrorisme publicitaire de ces gens qui veulent protéger leur religion? Il y a eu de grosses guerres de publicité en Europe et, comme vous l'avez mentionné, on n'a pas les moyens de faire de telles campagnes. Qu'arriverait-il si on décidait de recommander aujourd'hui au ministre des Pêches et des Océans de choisir entre le massacre des phoques et le massacre de la morue? Les groupes de protection continueraient à faire leurs campagnes publicitaires dans les autres pays, ce qui ferait peut-être en sorte que certains autres produits canadiens ne pourraient pas être vendus. Comment peut-on se sortir de ce dilemme?

Il va falloir faire de l'éducation internationale, mais je ne sais pas comment cela pourrait se faire. Je vous lance la question. Excusez-moi d'avoir des trémolos dans la voix lorsque je parle de massacres. Des chasseurs de phoque et des pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine m'avaient demandé de transmettre au gouvernement canadien une proposition selon laquelle les banquises seraient un bon terrain de pratique de l'aviation canadienne. Ce serait tellement beau, disaient-ils, de voir quelques F-18 venir se pratiquer sur les banquises; il y aurait des cibles en masse et ça ferait d'une pierre deux coups. Quelle image!

On a tout un dilemme et il faudra choisir: ou bien on laisse le massacre se poursuivre, ou bien on élimine une partie du troupeau. Mais comment allons-nous faire l'éducation internationale? Je peux comprendre le ministre, qui devra trancher la question. Il devra choisir le secteur à protéger. Je vais vous laisser répondre à ces premières questions.

[Traduction]

M. John Efford: Je vais répondre à seulement une partie de la question et permettre à d'autres collègues d'en faire autant.

Monsieur, je vous remercie pour votre question, et je suis d'accord avec une grande partie de vos observations.

Il y a trois semaines, je prenais la parole à Calgary dans le cadre de la promotion de l'industrie du phoque. On m'a invité à prendre la parole à une grande conférence parce que nous devons sensibiliser les gens partout au Canada, et c'est ce que j'ai fait. Ce jour-là, je me rendais en voiture à Calgary, et j'ai pris le Globe and Mail. En première page du Globe and Mail, on lisait que le ministre fédéral de l'Environnement annonçait une réduction immédiate de 50 p. 100 des oies de l'Arctique, de l'oie blanche. On le faisait immédiatement. Il n'y a aucune organisation qui s'est soulevée, c'était fait, c'était décidé.

Dans tous les autres pays dans le monde où il y a une population de phoques... Il y a à peine quelques jours, le Royaume-Uni, où l'on retrouve le plus grand nombre de militants contre la chasse aux phoques au Canada, a annoncé une réduction de la population de phoques parce que les pêcheurs de ce pays se sont plaints il y a trois semaines. C'était en première page du National Post et du Globe and Mail.

Monsieur, le seul endroit au monde où il y a même... Je vais expliquer une fois de plus. Nous ne sommes pas autorisés à exporter de produits à base de phoque aux États-Unis. En fait, j'ai laissé mon manteau de peau de phoque chez moi lorsque je me suis rendu au Boston Seafood Show, parce que je n'étais pas autorisé à le porter aux États-Unis. Ils procèdent chaque année à une réduction—appelez-la comme vous voulez—du cheptel de phoques des îles Tribylov, en Alaska, en raison de l'incidence sur les stocks de poissons. En Californie, il y a trois semaines, ils demandaient à leur gouvernement de réduire la population des lions de mer en raison de l'incidence sur les stocks de poissons.

Le seul endroit dans le monde où vous ne mentionnez pas le mot, c'est ici au Canada. C'est le seul endroit où nous sommes à la merci des activistes. Nous avons un grave problème, mais nous voulons qu'il soit géré d'une façon appropriée. La seule façon de le faire, c'est par des campagnes de relations publiques plus nombreuses et en travaillant en plus étroite collaboration avec le gouvernement central. Oui, essayez de modifier la Marine Mammal Protection Act pour déréglementer ce qui se produit aux États-Unis et dans de nombreux autres endroits dans le monde.

C'est le dossier le plus volumineux que j'ai eu à traiter dans mes 15 années, et c'est uniquement en raison de relations publiques négatives.

Je vais maintenant céder la parole à Gerry.

M. Gerry Reid: Vous avez posé une question au sujet du plan de gestion et du fait que nous disons qu'il n'y a aucun plan de gestion.

Au cours des deux ou trois dernies jours, plusieurs personnes ont posé des questions à différents groupes et particuliers qui sont venus à cette table—par exemple, les scientifiques du MPO qui étaient ici avant hier, M. Lavigne hier, aux membres de l'IFAWI hier et de nouveau à M. Winters ici ce matin—pour savoir ce qu'ils considéreraient la taille optimale du cheptel. À quel niveau devrait-il se situer avant que l'on fasse quoi que ce soit?

• 1135

Je ne crois pas que nous ayons eu encore une réponse. Je pense que le MPO a contourné la question. M. Lavigne n'y a certainement pas répondu. Nous connaissons la réponse de l'IFAW: vous ne tuez tout simplement aucun phoque du cheptel commercial. Donc la population de phoques continue de grossir, et pourtant le MPO ne s'est pas manifesté et n'a pas dit, «Voici la taille que devrait avoir le cheptel».

Une voix: C'est exact.

M. Gerry Reid: Vous avez également posé une question au sujet de la possibilité de sanctions commerciales à l'endroit du Canada si nous étions pour mentionner le mot «triage» ou si nous étions pour faire autre chose. Je ne suis pas au courant que le MPO ou le gouvernement canadien aient fait quoi que ce soit pour essayer de démentir certaines des faussetés qui circulent partout dans le monde au sujet de la chasse aux phoques sur la côte est du Canada.

Par exemple, je pense que M. Baker a mentionné hier que dans la documentation que l'IFAW a remise hier, on continue de nous décrire comme tuant les bébés phoques pour faire des manteaux. En réalité, c'est illégal au Canada de le faire. Mais nous n'entendons rien de la part de notre gouvernement fédéral pour nier tout cela.

Il me semble qu'il revient aux Terre-neuviens de s'exprimer et de le faire. Avec une population de 500 000 habitants, nous n'avons pas les moyens de nous en prendre à des groupes tels l'IFAW, qui a un budget de 100 000 000 de dollars en devises canadiennes cette année pour faire la promotion d'une campagne contre la chasse aux phoques. Nous ne pouvons le faire seul. C'est là une des raisons pour lesquelles nous sommes devant vous aujourd'hui. Nous avons besoin de l'aide du gouvernement fédéral.

Toutes les personnes présentes ici continuent de nous demander des conseils sur ce que l'on devrait faire au sujet du cheptel de phoques. Eh bien, avant de me lancer en politique, j'ai été adjoint exécutif de deux ministres provinciaux des Pêches. De 1980 à 1992, les pêcheurs et le gouvernement de Terre-neuve et du Labrador ont donné beaucoup de conseils au gouvernement fédéral sur ce qu'il fallait faire au sujet des contingents de poissons en ce qui concerne la morue du Nord à Terre-Neuve et au Labrador. On ne nous a pas écoutés. Personne ne nous a écoutés.

Vous nous demandez donc de vous donner nos conseils aujourd'hui. La responsabilité à l'égard de l'écosystème au large des côtes de Terre-Neuve et du Labrador est uniquement entre les mains du ministère des Pêches et Océans, et non chez nous. Vous pouvez nous demander tous les conseils que vous voulez. Je pense que la raison pour laquelle le gouvernement fédéral veut nos conseils à cet égard est qu'il ne veut pas toucher à cette question. Il aimerait plutôt que le gouvernement de Terre-Neuve et la population terre-neuvienne parlent d'augmentation des contingents et de triage, parce qu'il ne veut pas y être associé.

Essentiellement, ce que je dis, c'est que le gouvernement fédéral veut que nous fassions le sale boulot pour lui de façon à ce qu'il conserve une approche autonome, parce qu'il s'agit d'une question dont il ne veut pas s'occuper.

Comme l'a dit John plus tôt, lorsqu'on établit les contingents pour le crabe et tous les autres contingents pour les poissons que nous pêchons à Terre-Neuve aujourd'hui, nous n'avons pas voix au chapitre pour recommander ce que nous pensons. En fait, on ne nous écoute pas.

Le président: Merci, monsieur Reid.

Vous avez eu environ 14 minutes jusqu'à maintenant, de sorte que je vais devoir céder la parole à monsieur Easter.

M. Wayne Easter: Merci, monsieur le président

Je suis un peu réticent à soulever cette question, mais on a mentionné à plusieurs reprises qu'il n'y avait pas de plan de gestion, et je me sens obligé de la soulever.

Monsieur Efford, vous savez très bien qu'il y a un plan de gestion en place pour cette année. À mon avis, le fait de dire qu'il n'y en a pas, c'est faire preuve d'irresponsabilité. Il y en a un. Nous examinons cette question. Cette année, les relevés scientifiques sont faits de façon à ce que nous puissions prendre des décisions à l'avenir.

Je peux vous assurer qu'on a essayé de le faire comprendre à votre comité, et en fait quelques-uns d'entre nous l'ont fait comprendre au ministre hier soir, que le fait de connaître les nombres quelque part en l'an 2000 ne sert à rien. Nous devons prendre des décisions bien avant cela. Vous pouvez être certain que nous allons aller dans cette direction.

En ce qui concerne le sujet dont il est question, j'ai des questions pour M. Oldford et M. Shelley. M. Oldford a dit qu'il n'a jamais vu la morue sur la rive comme on peut le voir actuellement, et M. Shelley a mentionné que les scientifiques ne faisaient pas leur travail.

• 1140

Je veux connaître les détails à ce sujet, parce que si vous me dites que vous avez fait des démarches auprès des scientifiques du MPO à ce sujet et qu'ils avaient raisonnablement le temps de se déplacer pour constater la situation, je veux le savoir. Si c'est le cas, vous pouvez être certain que notre comité ou moi-même ou quelqu'un ferons ce message à ces scientifiques et leur demanderons pourquoi ils ne l'ont pas fait.

Donc, quel est le cas? Quels sont les détails?

M. Lloyd Oldford: Lors du dernier tournage que j'ai fait à Summerville, beaucoup de gens des médias—différents postes radiophoniques, et divers autres—m'ont appelé et m'ont demandé ce qui se passait.

Effectivement, un haut fonctionnaire du MPO m'a appelé. Je lui ai dit, «Vous devriez venir voir et constater par vous-même la destruction massive de la morue». Apparemment, une personne, qui circulait en voiture le long de la route près de la baie, a aperçu quelque chose et l'a signalé à un agent des pêches. Deux agents des pêches sont venus en camion et sont restés là pendant deux ou trois heures, mais ce n'était que des agents locaux; ils ne venaient pas d'un élément scientifique du MPO.

Cet automobiliste m'a appelé et m'a dit, «Lloyd, nous savions que les phoques mangeaient la morue». J'ai dit, «Vous le saviez?». «Oh oui», m'a-t-il répondu, «nous le savions». Je lui ai dit, «Eh bien, pourquoi ne nous l'avez-vous pas dit auparavant? Pourquoi devez-vous nous obliger à faire les démarches et à essayer de vous faire comprendre que c'est ce qui se passe? Si vous le saviez, pourquoi ne l'avez-vous pas dit»? Il m'a répondu, «Eh bien, nous ne savons pas combien». J'ai dit, «Venez et jetez un coup d'oeil autour de vous, et vous pouvez voir directement ce qui se passe» C'est la dernière fois que j'ai entendu parler de lui.

M. Wayne Easter: Je ne veux pas insister sur ce point parce qu'il y a d'autres points dont je veux vous faire part.

Monsieur Shelley.

M. Paul Shelley: Ce point nous ramène à une question posée plus tôt au sujet des scientifiques. Je me demande vraiment quel est l'engagement des scientifiques et du MPO. Je veux dire, ils travaillent ensemble.

Si j'étais un scientifique... Évidemment, ils ont étudié les phoques depuis des années. J'ai toujours pensé, d'un point de vue sensé, que si vous pouviez tout simplement fixer une caméra à un phoque et le suivre pendant des mois et des mois, vous connaîtriez son cycle complet de vie, ce qu'il mange, ce qu'il fait, et tout le reste.

J'ai entendu un si grand nombre de questions ici. Il ne savait pas grand chose au sujet des phoques. Mais lorsqu'on a signalé que c'était là dans la baie—qu'ils n'avaient pas besoin de se déplacer sur toute la côte et les suivre jusque dans l'Arctique, parce que ça se passait directement ici dans la baie—vous ne pensez pas qu'un scientifique dirait, «Quelle occasion en or de recueillir beaucoup d'informations». Nous avions des phoques ici dans la baie, à proximité, et ils auraient pu recueillir beaucoup d'informations, mais personne n'est venu.

M. Wayne Easter: Très bien, nous nous occuperons certainement de cette question.

Depuis que George a fait le commentaire hier, il y a eu beaucoup de discussions au sujet du blanchon en peluche. Je voudrais savoir où et quand cela s'est produit, si vous pouvez me donner l'information.

Mais je veux être aussi objectif que possible. Certains d'entre nous ont essayé de parler à des représentants de l'IFAW, en toute équité pour eux. Il y a eu un incident au large de l'Île-du-Prince-Édouard au cours duquel certains photographes n'ont pas été traités de façon aimable. Ils ont été attaqués lorsque des observateurs se trouvaient sur les glaces. Il y a d'ailleurs des accusations qui ont été portées et nous verrons ce que cela donnera devant les tribunaux.

Mais en toute équité, j'ai été invité, et j'ai demandé à M. Stoffer de venir avec moi, à une rencontre avec des représentants de l'IFAW et des parlementaires européens qui accompagnaient ces gens. Nous avons eu une discussion raisonnable. Je crois vraiment que nous avons pu empêcher que ces députés venant d'Europe retournent chez eux et disent que nous n'étions que des barbares par ici. Je féliciterai d'ailleurs l'IFAW à ce sujet pour m'avoir donné la possibilité de dire qu'il y a un plan de gestion en place.

• 1145

Ce qui m'amène à mon point. Vous demandez au gouvernement fédéral de fournir le financement pour monter une campagne agressive contre la campagne de l'IFAW. Je prétends que nous ne gagnerons rien à mener une campagne émotive dans les médias, que ce soit au sujet des blanchons ou de quoi que ce soit d'autre. La seule façon que vous avez de gagner est de produire une bonne et solide argumentation—essayer de raisonner avec l'IFAW et d'autres pour leur faire savoir que nous avons une chasse qui peut être soutenue.

Vous avez parlé dans votre vidéo—et j'apprécie la vidéo; c'était une excellente vidéo—que des décisions devaient être prises en fonction de bons éléments scientifiques, et que nous avons besoin d'une solide gestion de l'écosystème. Je suis tout à fait d'accord avec ces points. Le problème par contre est de savoir de quelle façon nous allons nous y prendre. Je me tourne vers vous pour obtenir des recommandations sur la façon d'y parvenir, en ce qui concerne cette bonne science et cette gestion de l'écosystème, de sorte que nous puissions régler ce problème du point de vue de la raison plutôt que de l'émotion, et je continue de le maintenir, compte tenu de cette lutte, que nous ne pouvons la gagner en nous fondant sur l'émotion.

M. Jack Harris: Puis-je répondre très rapidement?

Je suis enchanté que vous et M. Stoffer, en votre qualité de députés, ayez été en mesure de persuader tout un groupe de personnes venant d'Europe à se rendre sur nos rives, avec probablement une notion préconçue. À quand remonte la dernière fois qu'un député ou une délégation du gouvernement canadien s'est rendu en Europe pour essayer de convaincre l'Union européenne que nous avons une récolte commerciale éthique, viable des phoques? C'est le premier point.

Le deuxième point est le suivant. Malgré l'apparente raisonnabilité de l'IFAW de s'engager dans ce qu'elle appelle un dialogue instructif—et je ne m'oppose pas à cette terminologie—le problème en ce qui concerne l'IFAW, tel qu'on l'a indiqué hier, c'est que peu importe le niveau d'objectif qui est satisfait, on s'oppose toujours en principe à une chasse commerciale et on fera toujours campagne contre une chasse commerciale.

À mon avis, il n'est pas question ici d'une lutte opposant les saints aux pécheurs. Nous ne disons pas que chaque habitant de Terre-Neuve et du Labrador ou que chaque chasseur de phoques dans le monde ou dans notre pays est un saint, et nous ne disons pas non plus que l'IFAW, chaque fois qu'elle fait quelque chose, est un pécheur.

Ce dont nous parlons ici, c'est une raison. Nous demandons au gouvernement du Canada de jouer un rôle important dans ce qui a des répercussions internationales considérables. Nous, en tant que gouvernement et en tant que personnes, et tout particulièrement les chasseurs de phoques en cause, n'avons pas la capacité, sur le plan constitutionnel, financier ou autrement, d'influer sur les événements, et nous sommes victimisés par une campagne. Nous sommes victimisés par un manque d'études scientifiques.

Ce qui a changé au cours des derniers mois—et cela a modifié le débat, ce sont les images visuelles de phoques qui rabattent la morue sur la rive. Ce sont des poissons de fond qui sont sur la berge. Ce ne sont pas des poissons de surface que l'on peut rabattre sur la berge comme le capelan. À mon avis, il s'agit d'un problème dramatique auquel on doit trouver une solution à court terme.

C'est pourquoi nous disons que nous n'examinons pas votre plan actuel de gestion qui dit, «Voici notre contingent pour 1999». Nous demandons, où allons-nous? Quels sont les objectifs de notre plan de gestion, et de quelle façon traite-t-il cette sorte de renseignements.

Le président: Merci, monsieur Harris.

Pour votre gouverne, au sujet de la première petite partie, lorsque vous avez redonné une question, j'étais à Londres, à Westminster, en janvier. J'ai rencontré environ 25 députés des deux Chambres du parlement britannique et j'ai soulevé cette question et essayé de présenter vos meilleurs intérêts.

Je céderai maintenant la parole à Peter Stoffer du NPD.

M. Peter Stoffer: Merci beaucoup, monsieur le président.

Une fois de plus, je remercie les membres de la délégation de Terre-Neuve et du Labrador d'être venus nous rencontrer.

Tel que je l'ai dit hier, l'IFAW et vous, d'une façon paradoxale, apportez cette question très grave à l'attention du gouvernement du Canada.

À l'intention de M. Efford et de tous les autres membres de votre délégation, vous avez tout à fait raison. Il y a à peine 50 ans, Terre-Neuve se joignait à la confédération canadienne, et cela s'est fait avec un programme de gestion du MPO. Pendant 450 ans, vous vous êtes occupés de vous-même, et en 50 petites années, par l'intermédiaire de divers programmes et entreprises, les pêches sont totalement chambardées.

Nous pourrions en faire porter le blâme à divers éléments, mais vous avez mentionné les chalutiers, monsieur Efford. C'est l'un des éléments. Je vais poser quatre questions, et vous pouvez y répondre plus tard. Vous avez parlé des chalutiers et des grandes entreprises et de tout le reste. Évidemment, comme vous le savez, je suis tout à fait contre le système ITQ et les systèmes EA qui sont en place.

• 1150

Je vais vous poser une question hypothétique. Si tous les phoques disparaissaient et si tous les stocks de poissons de fond revenaient à des niveaux que l'on n'a jamais vus auparavant, à votre avis, avec le système actuel d'ITQ et d'EA en place maintenant par le gouvernement fédéral, combien de pêcheurs—dans la collectivité de M. Oldford en particulier—combien de ces gens dans ces petites localités rurales de Terre-Neuve et du Labrador seraient en mesure de revenir au travail? C'est la première question.

Le président: Pater, n'oubliez pas qu'il a 5 minutes.

M. Pater Stoffer: Oui, je sais.

Je tiens à vous remercier personnellement de vous être fait accompagner d'une personne qui, à mon avis, compte parmi les meilleures à Terre-Neuve et au pays, M. Jack Harris. Il est un collègue formidable, et il ajoute de la crédibilité à vos préoccupations.

Il y a une personne très importante qui est absente, cependant. Vous parlez d'une crise dans l'industrie, et M. Reid a parlé du fait que le MPO ne veut pas aborder cette question, de toute évidence pour des motifs politiques. Mais il y a une personne très importante qui n'est pas ici, qui a autant d'influence au sujet de la politique canadienne en matière de pêche que qui que ce soit d'autre au pays, et c'est votre premier ministre.

Je vous l'assure, monsieur Reid, M. Tobin ne veut pas aborder cette question non plus. Je veux dire, il est le premier ministre de votre province. S'il y a quelqu'un qui devrait défendre les pêcheurs de Terre-Neuve, ce ne devrait pas tout simplement être une personne très passionnée tel M. Efford. Ça devrait être votre foutu premier ministre. Voulez-vous bien me dire quelle est sa participation à ce sujet? Je le mets au défi maintenant de venir nous rencontrer.

Le président: Monsieur Stoffer, je vous demanderais une fois de plus de surveiller votre langage.

M. Peter Stoffer: Désolé, monsieur. J'ai mentionné cela hier. Je m'excuse.

Que pense-t-il de cette question? J'aimerais beaucoup connaître ses préoccupations à cet égard.

Ma dernière question s'adresse à monsieur Oldford. Lors de la conférence de presse d'hier, j'ai mentionné le rejet et l'écrémage des poissons par les pêcheurs. Je lui ai remis le présent rapport par la suite; il l'a tout simplement jeté. Je sais que les pêcheurs côtiers, que j'appuie de tout coeur, ne font pas cela, mais l'écrémage et le rejet des poissons se produisent sur les plus grands navires et cela se produit sur les chalutiers d'entreprise.

La FAO a dit il y a quelques années qu'on avait pu rejeter à la mer jusqu'à 27 millions de tonnes. C'est ce que dit la FAO à l'échelle internationale. M. Harris, dans son livre Lament for an Ocean, dit que près de 30 millions de tonnes de poissons sont écrémées et rejetées dans nos océans également.

Vous avez parlé du problème de la prédation en ce qui concerne les phoques. Eh bien , nous avons aussi un très grave problème, tel que vous l'avez mentionné, pour ce qui est de la technologie utilisée par les chalutiers et ces questions également. J'aimerais savoir ce qui vous en pensez, s'il vous plaît.

Je m'excuse d'avoir employé les mots que j'ai utilisés.

J'aimerais vraiment connaître les faits de la bouche des pêcheurs des collectivités côtières, parce que c'est à eux que je pense. Vous remarquerez que je porte une épinglette du Labrador aujourd'hui, parce que M. Matthews n'est pas ici et je dois faire valoir également ses points de vue.

Merci d'être venus.

M. John Efford: Je vais répondre très rapidement, parce que j'aimerais que les autres puissent faire des commentaires et poser d'autres questions.

Nous sommes tout à fait opposés aux ITQ à Terre-Neuve et au Labrador. Tant que je serai ministre, nous pensons qu'il n'y aura aucun ITQ.

Qu'arriverait-il si tous les phoques disparaissaient? Nous ne voulons pas que tous les phoques disparaissent. Nous voulons que l'industrie de la chasse aux phoques continue de prospérer. C'est le deuxième point.

Si les stocks de poissons redevenaient lucratifs, le premier accès à tous ces stocks de poissons irait aux pêcheurs qui ont de petites embarcations et aux travailleurs d'usine habitant dans les régions rurales de Terre-Neuve et du Labrador. C'est là notre politique en tant que gouvernement.

Sur la question du premier ministre Tobin, je dirai tout d'abord qu'il ne s'agit pas d'un programme politique. Il s'agit ici d'un comité de tous les partis venant de la province de Terre-Neuve et du Labrador, sans politique partisane. Comme je vous l'ai dit, si vous voulez qu'un politicien discute avec vous de politique partisane, vous êtes ici, mais ce n'est pas le temps.

Je suis le ministre des Pêches et de l'Aquaculture de la province, et lorsque le premier ministre Brian Tobin m'a nommé en 1996, il a dit «John, vous êtes le ministre. Vous vous occupez des dossiers du ministère». Et sur une base quotidienne, à cet égard, je suis continuellement en contact avec lui.

Il s'agit d'un groupe constitué par la Chambre d'assemblée de Terre-Neuve et du Labrador, et nous avons un problème trop grave pour faire intervenir la politique.

Le président: Merci, monsieur Efford.

Monsieur Stoffer de nouveau a tenu un très long discours et il a utilisé la plus grande partie des 5 minutes allouées.

M. Peter Stoffer: Ce n'est pas souvent que j'ai la chance de parler au grand chef, vous savez.

Le président: Nancy, vous aviez des questions.

Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Vous avez parlé du marché comme étant la réponse à une grande partie de nos problèmes—s'il y a un marché, alors nous devrions n'avoir aucun problème à procéder à la chasse aux phoques. Quels obstacles voyez-vous en ce moment à l'obtention d'un marché?

• 1155

Je vois un cycle. En partie, les campagnes négatives ont une incidence négative. J'essaie de voir l'importance de l'incidence et ce que vous voudriez qui soit réalisé pour améliorer le marché.

La raison pour laquelle je m'y intéresse est, une fois de plus, que je pense qu'un grand nombre de personnes ne reconnaissent même pas les produits à base de phoque lorsqu'ils en voient. Je me suis promenée sur la colline pendant près de deux ans avec un sac à main en cuir de phoque, et il n'y a pas une seule personne qui s'est approchée de moi et m'a dit, «C'est un sac à main en peau de phoque». Personne n'a reconnu ce matériau. J'ai dû dire aux gens ce que c'était. C'est une partie de ce à quoi nous nous heurtons dans le domaine du marché.

M. John Efford: Merci.

Quels sont les obstacles? Certains d'entre eux sont assis directement derrière moi. Notre plus grand obstacle et votre plus grand obstacle pour les marchés, ce sont les organismes de protestation et les sommes d'argent qu'ils investissent dans leur campagne, comme nous l'avons vu hier soir dans le magazine que M. Baker a présenté.

Ensuite, il y a le manque de sensibilisation du public et de promotion par le gouvernement fédéral du Canada. Il s'agit d'une industrie majeure. On y trouve d'excellents produits.

Cette viande a la plus forte teneur protéique dans le monde, et on en parle très peu. Des dizaines de milliers de personnes ne mangent pas à leur faim tous les jours. Un des commentaires que je fais continuellement est que 32 000 enfants meurent de faim chaque jour. Vous avez pu constater dans la vidéo que nous l'avons condensée sous forme de poudre, qui a une très forte valeur protéique. Il ne faut pas perdre une seule once de cette viande de phoque.

Qu'en est-il d'autres marchés? Le Seal Industry Development Council et l'Association canadienne des chasseurs de phoques ont consacré beaucoup d'énergie, de temps et d'argent dans l'ouverture des marchés, en particulier en Chine. Il faut du temps, et ces marchés sont en croissance.

Deux entreprises sont venues me voir depuis Noël. L'une est venue me voir et m'a remis une commande pour 5 000 tonnes d'huile de phoque à mettre en capsules. Ils ont acheté, je pense, 200 tonnes de viande séchée, et je crois qu'il s'agissait aussi de 300 tonnes de viande fraîche. Ils ont également commandé 150 000 nageoires, seulement une entreprise. L'autre est venue me voir il y a à peine quelques jours avant que je quitte la province, et elle voulait acheter 50 000 phoques entiers.

Nous avons pour politique dans la province que tout poisson ou tout animal récolté dans la province et dans l'océan doit être transformé dans la province. Nous tenons donc des discussions avec cette entreprise—je pense qu'elle vient du district de M. Shelley—quant à la façon de parvenir à une entente pour collaborer avec cette entreprise en Chine afin que nous puissions respecter notre politique et en même temps fournir cette entreprise.

Vous devez vous rappeler qu'il y a 1,4 milliard de personnes en Chine. Il y a d'énormes possibilités de marchés. En collaboration avec le Seal Industry Development Council et l'Association canadienne des chasseurs de phoques, ainsi qu'avec le gouvernement provincial et une aide de l'APECA, nous espérons ouvrir ces marchés. Et c'est à long terme, étant donné que nous sommes très intéressés à soutenir notre industrie de la chasse aux phoques.

L'autre question est le problème majeur qui confronte notre industrie aujourd'hui.

Le président: Merci, monsieur Efford.

Nancy, avez-vous d'autres questions?

Mme Nancy Karetak-Lindell: Non.

Le président: Charlie, avez-vous des questions?

M. Charlie Power: Oui, j'aimerais poser quelques questions et faire quelques observations, monsieur le président.

Tout d'abord, sur cette question des phoques et des pêches à Terre-Neuve, l'histoire se répète. Cela se produit parfois du fait que nous avons des souvenirs de courte durée. Les événements actuels ne devraient vraiment pas se répéter.

Ce qui se passe dans l'industrie de la chasse aux phoques et son rapport avec l'industrie de la morue à Terre-Neuve, à l'heure actuelle, est exactement ce qui s'est produit dans les années 80, et je ne parle pas des années 1880; je parle des années 80. Chaque pêcheur à Terre-Neuve pouvait vous dire que les stocks de morues commençaient à diminuer d'une façon très importante. Chaque pêcheur pouvait vous dire que les prises étaient toujours plus petites, que le poisson était plus petit et qu'il était de plus en plus difficile de bien gagner sa vie.

Brian Peckford était le premier ministre à l'époque. J'ai fait partie de son cabinet pendant 10 ans. Les ministres des Pêches d'alors, Jim Morgan et par la suite Tom Rideout, se sont battus et ont transmis le message. Personne écoutait, parce que tout ce que vous pouviez dire, c'est que vous ne pouviez prouver scientifiquement que les stocks de morues diminuaient.

Maintenant, mous savons exactement la même chose. Chaque pêcheur de Terre-Neuve, chaque collectivité dans chaque baie, se demande d'où viennent tous ces phoques. Dans la partie sud de Terre-Neuve où je vis, nous n'avons jamais vu un phoque quand nous étions enfants, et maintenant ils sont littéralement partout.

• 1200

La science n'a pas réussi à prouver qu'il y avait des phoques. C'est étrange, parce que tout le monde sait qu'ils sont là. Dans la baie de Bonavista, où je suis allé voir Lloyd la semaine dernière, juste après l'audience sur les morues et les phoques, tout le monde, tous ces gens auraient pu vous dire qu'ils avaient vu des phoques qui mangeaient des morues, qu'ils les ramenaient sur les rochers. Pourquoi nos scientifiques ne peuvent-ils aller en mer pour constater ces faits?

Nous avons parlé de rassembler tous les scientifiques, monsieur le ministre, et on pourrait y arriver. Mais il m'arrive de penser que les scientifiques, dans notre monde moderne, agissent de plus en plus comme des avocats. Ils diront ce que vous voulez, dépendant de qui paie la note.

Malheureusement, nous avons besoin d'une orientation politique. Hier, quand j'ai demandé au ministre, à la Chambre, de m'expliquer le lien entre les phoques et les morues, il a trouvé toutes les excuses du monde, en sa qualité de ministre de Pêches et Océans, pour expliquer que la pénurie de morues était la faute...

Pourquoi n'y a-t-il toujours pas de morues, après sept années d'interruption de la pêche? Selon les chiffres que lui ont donnés les scientifiques, les phoques ont mangé 800 000 tonnes de poissons de plus par année, parce que leur nombre a augmenté entre 1992 et 1998. Dans les provinces de l'Atlantique, 800 000 tonnes de poissons équivalent à 25 000 ou 30 000 emplois à temps plein. Hibernia offre environ 1 000 postes à temps plein. C'est ça la réalité dans le Canada atlantique.

Nous en revenons toujours au même point. Pourquoi Terre-Neuve est-elle une province mal nantie? Parce que le gouvernement fédéral a décidé qu'il valait aussi bien de laisser les mal nantis dans leur bourbier, pour autant que les politiques canadiennes sont mises en oeuvre ailleurs.

Le ministre fédéral, en gros, a dit qu'il voulait que toute la gestion des pêches s'appuie sur des fondements scientifiques. Il dispose d'assez de données scientifiques pour poser des gestes beaucoup plus significatifs en ce qui a trait à la population de phoques. Derrière ses propos, on comprend que, à cause des impératifs du commerce international, il devra gérer la chasse aux phoques selon des principes politiques bien plus que scientifiques.

J'aimerais entendre les commentaires du ministre à cet égard.

M. John Efford: Charlie, vous avez tout à fait raison quand vous parlez de ce qui est arrivé dans les années 80. Je vis dans un village de pêcheurs—l'un des plus gros sur le territoire de Terre-Neuve et Labrador. Une partie des pêcheurs du territoire ont protesté et sont allés dénoncer la situation devant le gouvernement fédéral. Bien entendu, la débâcle est arrivée, comme l'avaient prédit les gens depuis des décennies.

Cette semaine, je suis allé au Québec pour assister à une réunion nationale des ministres. J'ai projeté la vidéo à cette réunion seulement parce que j'ai pensé que l'occasion s'y prêtait. Tous les ministres du Canada qui sont responsables des eaux intérieures et des communautés côtières étaient présents. Je mène cette campagne depuis trois années maintenant, en essayant d'aider le ministre fédéral à contrecarrer le mouvement de négativité qui émane des organismes qui veulent saboter notre campagne.

J'ai discuté de cette question à de nombreuses reprises avec le ministre fédéral. En fait, il m'a dit que l'opinion publique changeait en notre faveur. C'est pourquoi j'ai montré la vidéo à tous les ministres. Il n'y a pas eu de période de discussion parce que la diffusion n'était pas à l'ordre du jour. Le coprésident, le ministre représentant le Québec, m'a accordé du temps pour diffuser la vidéo. C'était suffisant, parce que ce point figurait à l'ordre du jour de la réunion des ministres des provinces Atlantiques, le lendemain.

J'ai pris environ trois minutes pour animer une discussion, parce qu'on m'avait alloué seulement quinze minutes et le film dure douze minutes. À la fin de la vidéo, je n'ai pas demandé que l'on augmente le TPA ni que l'on procède par triage. J'ai rapidement commenté les incidences pour Terre-Neuve et le Labrador, après quoi le coprésident a demandé au ministre fédéral s'il avait des commentaires.

Je ne peux citer ses commentaires mot pour mot, mais je peux en donner l'essence. Il a promené son regard autour de la table, puis il a dit à tous les ministres du Canada: «Vous rendez-vous compte, si nous acquiesçons aux demandes de Terre-Neuve et Labrador, des répercussions sur les relations commerciales internationales pour chacune de vos provinces?»

Deux ou trois minutes après, je me suis levé et j'ai claqué la porte de la réunion. Pourquoi? Parce que je ne voyais pas la nécessité d'une attaque verbale contre le ministre. Je voulais faire savoir cependant que j'étais en colère, parce que Terre-Neuve et le Labrador, une fois de plus, sont traités comme des jetons de poker.

Les habitants de ma province—de notre province... je ne devrais pas dire ma province—sont trop importants pour qu'on les troque à rabais.

M. Roger Fitzgerald: Monsieur Power, si je peux me prononcer sur ce point aussi, vous avez entièrement raison de dire que...

Le président: Veuillez être le plus bref possible, monsieur Fitzgerald.

M. Roger Fitzgerald: Je serai bref.

Je suis d'accord avec vous sur le fait que les vrais scientifiques sont les pêcheurs. Leur problème est qu'ils n'ont pas accès au ministère des Pêches et des Océans. Notre problème vient en partie du fait que le Ministère, qui prend les décisions, est situé à 2 000 milles de la zone névralgique.

Quel autre recours peuvent avoir les pêcheurs qui sont assis à ma gauche? Ils n'ont pas d'autre solution que de m'appeler ou d'appeler le ministre et, par notre entremise, de faire part de leur opinion à des comités tels que celui-ci et aux preneurs de décisions. C'est là tout le problème.

• 1205

J'ai pu le constater de mes propres yeux parce que cela se déroule dans mon district. Vous avez vu la vidéo. Elle a été tournée dans le district que je représente. J'ai reçu un appel l'autre jour. Une personne voulait que j'aille voir le massacre des morues. Cet homme offrait de me transporter à bord de son propre hélicoptère. J'ai demandé à un plongeur de m'accompagner et d'apporter sa caméra sous-marine, sans frais. Les pêcheurs ne sont pas les seuls à s'inquiéter de la situation. Nous avions devant les yeux un champ de bataille, ni plus ni moins. On aurait dit un cimetière de morues. Des tonnes et des tonnes de morues gisaient sur les fonds océaniques.

C'est ce que les pêcheurs nous disent. Le seul accès qu'ils ont aux décideurs est la tribune que nous leur offrons ce matin.

Le président: Merci.

Monsieur Bernier, vous aviez une petite question.

[Français]

M. Yvan Bernier: Oui, un petit commentaire et deux questions qui nous permettront peut-être d'avancer dans notre recherche de solutions.

Sans vouloir faire de politique partisane, j'aimerais dire que lorsque j'écoute les propos des parlementaires de Terre-Neuve, qui célèbrent leur 50e anniversaire d'entrée dans la Confédération, je me dis que si Terre-Neuve était souveraine, ils auraient pris eux-mêmes la décision de faire le nettoyage. Fin du commentaire.

Je voudrais terminer en posant deux questions aux membres de la délégation. La première s'adresse à M. Efford et à ceux qui l'accompagnent. Afin de créer une ambiance ou de construire un forum qui nous permettrait de régler les problèmes de gestion des pêches au Canada, est-ce que ceux d'entre vous qui connaissent l'OPANO nous recommanderaient de songer à un programme qui fonctionnerait de la même façon? Serait-il approprié que le Canada fasse la même chose avec ses partenaires que sont les provinces? Cela semble être un type de gestion différent de que ce que le Canada applique présentement. Les pays participants de l'OPANO connaissent leur quote-part et la façon dont cela sera administré, et ils agissent en toute collégialité.

Messieurs les parlementaires, vous allez peut-être vivre une autre grande catastrophe ce printemps. Je voudrais qu'on m'informe et qu'on informe les parlementaires ici présents du sort des 40 000 travailleurs de l'industrie des pêches qui vont se ramasser sans le sou, puisque le programme LSPA se terminera à la fin mai. Quel sera le sort de cette population? Je m'en inquiète grandement. Non seulement ces gens n'ont plus rien à pêcher et ne peuvent plus aller chasser plus que cela, mais ils ne recevront aucun autre revenu d'Ottawa. Est-ce que votre province a pris des mesures pour les aider? Qu'est-ce qui va se passer? On m'a présenté un tableau sur l'immigration. Les gens sortent de leur milieu, mais ça ne pourra pas continuer bien longtemps comme ça. C'étaient les derniers commentaires que je voulais faire, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Monsieur Bernier, à titre de président, je ne veux pas participer à ce débat.

Une voix: Vous outrepassez la règle.

Le président: J'outrepasse la règle? Peut-être, mais je parle de la chasse aux phoques et, si nous nous mettons à parler du TPA et autres sujets liés, ce pourrait être très long. Nous ne sommes pas vraiment préparés. Je sais que vous avez fait cet énoncé et que la question intéresse toutes les personnes présentes, mais...

M. Charlie Power: Monsieur le président, sur ce point seulement, le TPA et la LSPA avant lui visaient à assurer un certain revenu aux Terre-Neuviens durant la reconstruction des pêcheries. Mais le problème engendré par les phoques a empêché la reconstruction des pêcheries. C'est pourquoi les commentaires de M. Bernier sont tout à fait pertinents.

M. John Efford: Je vais être bref.

Le président: John, je vais dire quelques mots maintenant, puis je vais vous donner trois ou quatre minutes pour clore notre rencontre de ce matin.

M. John Efford: Bien.

Le président: Divers groupes participent à notre audience ce matin. Ensuite, je me rends à Radio-Canada pour participer à un petit débat sur le Kosovo. Je ne peux m'empêcher de penser, quand je vois toute cette animosité entre les groupes présents, toutes ces luttes larvées, en mots ou en actions, qu'elles rendent la vie beaucoup plus difficile.

J'aimerais beaucoup que l'on parvienne à une forme de solution à l'amiable qui conviendrait aux groupes internationaux et à l'industrie de la chasse aux phoques. Les deux groupes auraient intérêt à se rencontrer. Hier, nous avons pu constater un certain degré de compréhension. J'ai été très impressionné par certaines données dont ils nous ont fait part.

• 1210

Je sais que, si nous regardons nos tables ce matin, on peut voir les arbres qui ont permis de les fabriquer. Je suis un grand défenseur des arbres, et j'ai horreur de voir un grand arbre qui est abattu. Des environnementalistes s'opposent à l'abattage de tous les arbres, sans discrimination. Le fait est que, ce matin, nous utilisons du papier qui a coûté la vie à un ou deux arbres au moins.

C'est la même chose pour les phoques. Nous avons tenté de trouver une solution écologique. Je crois que les groupes de défense des animaux s'inquiètent de ce que les phoques n'ont pas suffisamment de nourriture. Il faut considérer le taux de fertilité du cheptel de phoques: il compte six millions de phoques, mais le taux de natalité annuel est très faible. C'est quand même impressionnant!

J'espère donc qu'il arrivera un jour où—et pas seulement pour faire bonne figure dans l'opinion publique et pour obtenir une bonne couverture médiatique—les deux groupes se réuniront pour trouver une solution à ce problème qui a une incidence primordiale sur l'économie de Terre-Neuve et du Canada atlantique, de même que des répercussions énormes pour nous et pour l'ensemble de la communauté internationale.

John, je vous laisse finir.

M. John Efford: Merci, monsieur le président. Je commenterai la dernière partie de vos propos et je passerai ensuite au problème, que je veux énoncer clairement.

Je n'ai aucune réticence à m'asseoir avec qui que ce soit, si c'est dans l'intérêt de Terre-Neuve et du Labrador. Mais nous aurons vraiment de la difficulté à combattre une campagne qui a permis d'amasser quelque 80 millions de dollars par année: c'est très loin de ce qu'on peut s'offrir à Terre-Neuve et au Labrador. Mais si c'est bon pour notre province, je suis prêt à discuter avec n'importe qui, n'importe quand.

Monsieur le président, la lutte dure depuis beaucoup trop longtemps. Je suis d'accord avec les pêcheurs, M. Shelley et d'autres qui nous l'ont fait remarquer ce matin: il ne reste pas beaucoup de temps. C'est la destruction complète d'un écosystème qui est en jeu.

Nous souhaitons la croissance de l'industrie de la chasse aux phoques, mais n'oubliez pas ce que nous avons dit ici ce matin. Nous ne parlons pas juste de phoques. Nous ne parlons pas uniquement de poissons. Nous parlons d'une population. Nous souffrons depuis assez longtemps dans le Canada atlantique. Nous avons assez souffert à Terre-Neuve et au Labrador.

Ce problème ne concerne pas uniquement Terre-Neuve ou le Canada atlantique. C'est un problème qui touche toute la population canadienne. C'est un problème mondial. La ressource qui se trouvait dans notre partie de l'océan représente une partie très importante de la chaîne alimentaire de la planète. La responsabilité nous échoit à tous, à tous les Canadiens et au monde entier.

Nous ne devrions pas nous trouver ici aujourd'hui. Comme l'a expliqué Charlie Power, après tout ce qu'il a enduré quand il était au gouvernement et maintenant, sept années après le moratoire, nous ne devrions pas nous trouver ici aujourd'hui, à plaider et à implorer de l'aide. Cela n'aurait pas dû avoir lieu.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci.

Nous allons suspendre l'audience pour cinq minutes environ, puis nous entendrons les chasseurs de phoques de Terre-Neuve.

M. Jack Harris: Pourrais-je ajouter quelque chose, monsieur le président? Avec tout le respect que je vous dois, je dois préciser que nous ne sommes pas venus ici pour trouver un médiateur entre les chasseurs de phoques et les groupes de la communauté internationale. Nous sommes venus pour demander au gouvernement du Canada de défendre les droits de ses propres citoyens et de ses pêcheries, qui ont grand besoin de secours.

• 1213




• 1222

Le président: J'aimerais accueillir notre prochain témoin, la directrice exécutive de l'Association canadienne des chasseurs de phoques, Tina Fagan.

Merci d'être venue ce matin, Tina. J'espère que vous connaissez les règles de fonctionnement des comités. Je vais quand même les répéter. Vous pouvez faire un exposé de dix à douze minutes, qui sera suivi d'une période de questions et de commentaires—comme le dit si bien Peter, de commentaires surtout—de la part des membres du comité.

J'aimerais rappeler au Comité que nous devons respecter les temps impartis, et que nous ferons tout notre possible pour y arriver.

Bienvenue, donc. Nous sommes à l'écoute.

Mme Tina Fagan (directrice exécutive, Association canadienne des chasseurs de phoques): Merci, monsieur le président.

J'ai été très heureuse de recevoir votre invitation—même si elle m'est parvenue à 18 heures hier, à l'heure de Terre-Neuve—à me joindre à vous ce matin. J'ai eu beaucoup de temps pour préparer une allocution, pour penser à ce que j'allais dire. Finalement, à 3 heures ce matin, quand mon imprimante a manqué d'encre, j'ai dû me rendre à l'évidence: je ne pouvais faire plus. Mon avion décollait à 5 heures ce matin et l'agente de bord m'a dit qu'elle n'avait jamais vu quelqu'un dormir si profondément dans un avion.

La journée a été longue, c'est le moins qu'on puisse dire. Néanmoins, j'apprécie énormément cette chance que j'ai de me prononcer devant vous. Vos délibérations portent, bien entendu, sur notre industrie, et je crois que c'est tout à fait logique que vous entendiez des représentants de l'Association canadienne des chasseurs de phoques et du Seal Industry Development Council.

L'industrie de la chasse aux phoques est unique à plusieurs égards. Depuis presque 30 années, elle a été l'objet d'attaques constantes et répétées. Je ne crois pas qu'aucune autre industrie ait jamais survécu à une telle situation, pendant si longtemps.

Je crois que nous sommes uniques aussi du fait de la détermination et de l'engagement des membres, qui ont travaillé avec acharnement pour survivre.

De plus, les défenseurs des droits des mammifères devraient nous remercier: nous sommes probablement la seule industrie de la planète qui permette d'amasser des millions de dollars juste pour la critiquer.

Nous avons passé au travers d'une très dure bataille. L'industrie commence tout juste à s'en remettre. Elle a besoin de soins. Elle est en guerre depuis nombre d'années, et elle a été un peu subventionnée depuis quinze ans seulement.

L'un des principaux problèmes que je rencontre dans l'industrie est le suivant: durant les premières années, quand nous n'avions pas de produits, ni de programmes de formation ou d'éducation, il y avait beaucoup d'argent. Maintenant que nous avons tous ces éléments, je dois constamment subir des contraintes et lutter sans arrêt pour réaliser des activités.

• 1225

Je serais très tentée de mettre de côté l'allocution que j'ai préparée. Beaucoup de questions et de points ont été soulevés depuis que je suis arrivée, à 10 heures, et j'aimerais répondre à chacun, parler de tout en même temps. Mais je ne crois pas que ce serait juste. De toute façon, ma présentation fournira sûrement des réponses.

L'industrie de la chasse aux phoques s'appuie sur quatre pierres angulaires. La première est son passé. Un passé très difficile, mais dont nous tirons des leçons. Nous nous appuyons sur nos forces. Nous tirons des leçons de ce que nous avons appris.

La pierre angulaire suivante est notre point de vue, le point de vue des chasseurs de phoques par rapport à la conjoncture actuelle. L'autre est le point de vue du secteur, des industries qui font la promotion des produits et qui tentent de développer des marchés.

Bien entendu, la quatrième pierre angulaire est notre avenir.

L'industrie a connu un passé très troublé. Je l'ai déjà dit, nous nous sommes constamment retrouvés sur la ligne de feu. Les difficultés ont été nombreuses et beaucoup de personnes dans notre province ont subi des calomnies. Beaucoup de gens extraordinaires—des citoyens exemplaires, des pratiquants, des enseignants, des chefs—à cause de leur métier de chasseur de phoques, ont été traités de barbares, de sauvages, de meurtriers au début. Des vedettes de cinéma étincelantes, qui étaient des symboles sexuels en leurs jours fastes, sont venues de France pour pavoiser sur les glaces et tenter de détruire le gagne-pain de travailleurs, sans penser plus avant aux conséquences de leurs gestes.

Brian Davies, quand il a été témoin d'une chasse aux phoques pour la première fois, a vu des millions et des millions de dollars danser devant ses yeux, j'en suis sûre. Le mois dernier, nous avons appris qu'il avait effectivement réussi à accumuler ces millions parce qu'il est devenu multimillionnaire, grâce à son organisation qui lui a remis 2,5 millions de dollars.

Peut-être nous sommes-nous tous trompés de domaine? Peut-être pourrions-nous tous nous retirer avec des revenus semblables?

Dans les premières années, on chassait surtout les blanchons. Ce n'est plus le cas. On utilisait en majorité de grands navires. Ce n'est plus le cas. Et c'est probablement très bien ainsi.

L'Association canadienne des chasseurs de phoques a été fondée en 1982 par des chasseurs déterminés à sauver leur industrie et à dire la vérité au monde entier sur celle-ci. C'était un mandat énorme, très ambitieux pour ces habitants de la côte de Terre-Neuve qui avaient rarement été confrontés au vaste monde auparavant.

Comme je l'ai déjà dit, au début, ils avaient de l'argent pour voyager mais, malheureusement, les produits que nous avons aujourd'hui n'existaient pas alors. Nous ne pouvions pas faire de la formation. Ils ne pouvaient pas profiter des merveilles telles que les magnétoscopes et autres, et ils n'avaient pas la capacité de tourner des films vidéo.

Ils ont quand même réalisé un travail immense. Plusieurs noms me viennent à l'esprit—Smalls, Ches Coish, Jack Troake—et bien d'autres, qui avaient tous un grand coeur et des fonctions importantes. Si ce n'était de ces personnes, nous ne serions probablement pas ici aujourd'hui pour discuter, faire des analyses et transmettre de l'information sur l'industrie de la chasse aux phoques. Il n'y aurait pas d'industrie tout court. Ces gens ont permis de la garder en vie.

Ils ont raconté des histoires à faire frémir—ils ont dégraissé des peaux à la main dans les sous-sols; des vedettes de cinéma leur ont donné des gifles devant leurs enfants; ils se sont fait traiter de barbares. C'est le genre d'événements qu'ont dû subir les habitants des régions rurales de Terre-Neuve et du Canada atlantique.

Notre industrie a fait beaucoup de compromis. Le rapport Malouf sur les phoques et sur la chasse aux phoques, commandé voilà quelques années, comportait beaucoup de recommandations, que les chasseurs ont acceptées.

Nous participons à des réunions où nos détracteurs jouissent des mêmes droits de représentation, du même temps de parole. Nous y assistons, malheureux mais fiers de notre industrie, en faisant de notre mieux pour contrebalancer leurs actions.

L'ACCP a maintenant quinze ans et Terre-Neuve est une province où l'on chasse le phoque depuis belle lurette. Que se passera-t-il maintenant? Nous nous trouvons en présence de problèmes, certes, mais aussi d'un immense potentiel. Le potentiel de l'industrie de la chasse aux phoques est énorme.

Le ministre vous a parlé des protéines de la viande. Nous travaillons sur beaucoup d'autres projets. Vous avez sûrement entendu parler des bienfaits des capsules d'huile de phoque. Une merveille. Il se passe beaucoup de choses dans l'industrie. Si nous posons les bons gestes, la province de Terre-Neuve pourra tirer à elle seule 100 millions de dollars par année de l'industrie de la chasse aux phoques. Mais il faut bien faire les choses.

Actuellement, nous avons l'Association canadienne des chasseurs de phoques et le Seal Industry Development Council. Je vais prendre quelques minutes pour vous présenter les deux organismes.

• 1230

L'ACCP a vu le jour voilà quinze ans; elle a tenté d'élaborer son propre mandat. Elle a fait beaucoup de compromis, beaucoup de recherches, s'est débattue avec les difficultés d'ordre réglementaire, et a finalement fait de l'industrie ce qu'elle est aujourd'hui.

Quand j'ai commencé à travailler dans cette industrie voilà six ans, trois entreprises je crois commençaient à s'intéresser aux produits du phoque. Le seul produit que je pouvais vraiment transporter en voyage était un manteau de phoque.

Maintenant, quelque six années plus tard, quinze entreprises sont autorisées à fabriquer des produits du phoque. Nous faisons la promotion d'une très vaste gamme de produits. Beaucoup de gens se sont engagés parce qu'ils ont vu le potentiel de cette industrie dans le secteur privé.

Le Seal Industry Development Council représente le secteur privé. J'ai l'honneur de présider ce groupe. C'est un honneur de travailler avec des personnes qui sont prêtes à relever le défi d'aider à l'essor de leur province et de leur industrie.

Très simplement, les chasseurs de phoques souhaitent qu'on leur donne la possibilité de chasser des phoques de la même façon que les pêcheurs pêchent des poissons dans la mer. Ils veulent vaquer à leurs occupations sans avoir à subir de harcèlement constant. Ils veulent avoir le droit de gagner décemment leur vie en pratiquant le métier de leurs ancêtres, avec de meilleurs résultats. Ils veulent chasser les phoques sans cruauté. Ils veulent que les prix soient corrects et que l'on exploite au maximum toutes les ressources du phoque. Ils veulent des règlements sensés, réalistes, efficaces, qui régissent adéquatement la chasse.

Fondamentalement, les chasseurs veulent que leur industrie soit traitée au même chef que toute autre industrie qui utilise des animaux au profit de l'espèce humaine. Il ne devrait pas y avoir de différence.

Au Canada, nous mangeons 500 millions de poulets par année. Pourtant, je ne vois jamais de photos de petits poussins jaunes, tout duveteux, sur des affiches portant le slogan «Sauvez les poussins». Nous capturons 275 000 phoques dans une population de 4,8 à 6 millions—nous le saurons exactement quand le dénombrement sera terminé cette année. Il ne devrait pas y avoir de différence. Nous sommes une industrie qui tente de survivre.

Les chasseurs de phoques, dans une certaine mesure, s'inquiètent quand ils entendent parler d'augmentations de quotas et de triage. Nous tenons beaucoup de réunions à ces sujets, qui suscitent beaucoup d'inquiétude. Les chasseurs seront les premiers à vous dire qu'ils veulent une augmentation des quotas—aucun problème, augmentez-les, monsieur, bien sûr—mais qu'ils n'ont aucun sens si les marchés sont insuffisants, mous, et que les prix ne permettent aux chasseurs de gagner décemment leur vie, ou aux transformateurs de faire des profits, parce qu'ils en ont besoin, eux aussi. Les décisions doivent s'appuyer sur des faits scientifiques démontrés. Cela ne fait aucun doute.

Si nous adoptons les bonnes méthodes, nous pourrons y arriver. J'en suis fermement convaincue.

Pour ce qui est des tris, les chasseurs de phoques qui sont vraiment professionnels ne veulent pas en entendre parler. Ils ne veulent pas qu'on adopte de telles pratiques. Ils sont très inquiets. Les chasseurs de phoques sont aussi des pêcheurs. Ils doivent être pêcheurs pour obtenir un permis de chasse aux phoques. Ils connaissent les interactions. Ils sont en fait les experts de première ligne sur les liens entre les phoques et les poissons. Si vous daignez leur parler, ils vous diront ce qui se passe réellement.

Malheureusement, l'invitation tardive et le coût du voyage jusqu'ici—j'ai eu un choc quand j'ai vu le prix du billet d'avion—ne m'ont pas permis d'amener un vrai chasseur de phoques.

En passant, je me suis réjouie d'entendre le ministre dire que M. Oldford était un chasseur de phoques. La semaine prochaine, il recevra dans son courrier une facture de frais d'adhésion.

Nous savons qu'il faudra agir avec beaucoup de prudence pour l'industrie. Je l'ai déjà dit, c'est une industrie unique qui a subi des attaques depuis les 30 dernières années. Elle a aussi permis à ses détracteurs d'accumuler en douce des millions de dollars. Nous ne voulons surtout pas les voir accumuler encore plus d'argent sur notre dos, et nous voulons mettre fin aux attaques. Nous voulons poser des gestes qui rendront notre industrie plus acceptable et plus réaliste aux yeux du monde.

Les chasseurs de phoques veulent travailler en paix en sachant que ceux qui contrôlent la chasse aux phoques prendront des décisions qui vont dans le meilleur intérêt des chasseurs et de l'industrie et, par ricochet, de l'industrie de la pêche. Personne ne doute du fait—quiconque affirmerait le contraire se trompe—que les phoques sont beaucoup trop nombreux au large de la côte est du Canada.

Nous avons beaucoup parlé des phoques du Groenland mais, si on compte les autres espèces, on peut facilement ajouter de 2 à 3 millions de phoques. Ils sont beaucoup trop nombreux.

• 1235

Les poissons de fond posent un autre problème, auquel il faudra s'atteler. Pour l'industrie de la chasse aux phoques et pour certaines personnes de l'industrie de la pêche, peu importe les mesures envisagées, elles devront convenir à toutes les parties en cause. De cette façon, nous éviterons de favoriser des espèces de poisson, au détriment des phoques, que l'on ne pourra plus vendre après un certain temps en raison de boycotts ou d'une autre mesure du même genre.

Il faut donc réfléchir à cette situation. Tous reconnaissent que le problème existe vraiment.

Les membres du Seal Industry Development Council, qui font aussi partie de l'industrie de la pêche, sont aussi préoccupés. Nous avons tenté d'investir de nouveaux marchés et de faire augmenter les prix.

Quand j'ai quitté hier, nous étions au coeur d'une mini-crise, qui se sera résorbée aujourd'hui j'espère. Elle tournait autour de la vente des phoques cette année. Du point de vue des entreprises, il n'est pas question de dépasser les niveaux de phoques que le marché peut absorber. Cela ne tient pas debout. Si on les vend à bon marché, ou si on met trop de phoques en circulation, les acheteurs diront qu'il y a deux fois trop de phoques par rapport aux besoins, et ils offriront la moitié du prix.

Cela créé un problème. Nous devons trouver un moyen pour que la situation soit juste et équitable pour tous.

Beaucoup de questions émergent en ce qui a trait au triage des phoques. Je ne me souviens pas d'avoir entendu quiconque parler en faveur d'une telle mesure, mais les médias ont mentionné ce mot assez fréquemment au cours des deux ou trois derniers jours. J'ai reçu beaucoup d'appels de la part de chasseurs de phoques, de transformateurs et aussi de certaines entreprises de pêche, qui m'ont rappelé certains faits.

Si jamais quelqu'un croit que le triage est une bonne idée, c'est qu'il n'aura pas tenu compte de tous les tenants et aboutissants de la question.

Premièrement, que faire avec les phoques qui sont rejetés? Est-il logique ou raisonnable d'imaginer que l'on tuerait 1 ou 2 millions de phoques que l'on rejetterait au fond de l'océan? C'est inconcevable selon moi. Les répercussions seraient nombreuses.

Peut-être ces mesures n'auront-elles aucune incidence sur les prix ni sur les produits de la chasse l'année prochaine. Va pour les prix. Mais que dire au chapitre des relations publiques? À quel prix, sur le plan financier, pourrions-nous faire du triage? Les coûts seraient faramineux pour l'industrie. J'ai déjà de la difficulté à trouver de l'argent pour réaliser des activités nécessaires. Il faudrait des millions de dollars pour effectuer un triage de façon adéquate. Cela ne fait aucun doute.

Quel prix, du point de vue des relations publiques, sommes-nous prêts à payer pour effectuer un triage? C'est une question très sérieuse que se posent beaucoup de gens.

Comment pourrait-on contrôler cette activité, par quelles mesures d'exécution? Combien faudrait-il y consacrer d'argent? Comment s'assurer qu'il n'y a pas de cruauté? Comment nous assurer que le triage laisse suffisamment d'animaux reproducteurs pour garder le cheptel en santé?

Il faut tenir compte de tellement de problèmes, avant même d'envisager d'aller dans cette direction.

Il faut aussi nous pencher sur d'autres problèmes et conséquences liés aux quotas. Ils existent, c'est sûr. Mais je crois que l'avenir de l'industrie est très prometteur. Elle pourrait, je l'ai déjà mentionné, injecter 100 millions de dollars dans l'économie de Terre-Neuve, et Dieu sait si nous en avons besoin! Nous en avons vraiment besoin. L'industrie pourrait embaucher beaucoup de chasseurs et de transformateurs—des membres de la communauté. Les petites communautés en bénéficieraient beaucoup parce qu'elles pourraient endiguer l'exode, dont nous avons parlé auparavant.

Que faut-il faire pour faire briller l'avenir? Notre industrie est responsable; elle respecte l'environnement et les animaux qu'elle capture; elle peut se renouveler. Nous avons pris beaucoup de mesures pour démontrer notre intention de responsabiliser l'industrie.

En tenant compte du point de vue des chasseurs de phoques, nous avons revu le programme de formation à leur intention, pour le rendre plus conforme à la réalité actuelle de l'industrie. Nous avons demandé au ministre Anderson de le rendre obligatoire, sans reconnaissance des droits acquis.

Nous avons travaillé très dur pour concevoir un bon programme d'éducation de la population. J'ai remis quelques documents au greffier du comité.

• 1240

Nous avons travaillé très fort, grâce à la recherche, aux sommes investies et à la coopération, à développer des produits. J'ai parlé des capsules d'huile de phoque. Dans la même veine, les capsules de protéines devraient probablement arriver sur le marché d'ici 18 mois à deux ans. Elles seront destinées au marché des athlètes et au marché des produits gériatriques ou pourront servir d'aliment fonctionnel à l'intention des personnes ayant une déficience en protéines ou souffrant d'un problème d'absorption des protéines.

Qui plus est, ce produit pourrait aussi servir à nourrir les populations affamées de la planète et à leur fournir des protéines. Je ne crois pas que nous pourrions mettre en boîte de la viande de phoque pour la leur faire parvenir, mais nous pourrions sûrement leur envoyer ce produit. Ces capsules contiendraient des protéines pures à 98 p. 100. Que pourrions-nous faire de mieux pour les enfants qui ont faim que de leur fournir quelques protéines?

Nous avons déjà, par l'entremise d'une entreprise du secteur privé, tenu une réunion à ce sujet avec l'ACDI. Nous leur ferons parvenir d'autres renseignements et, avec un peu de chance, ce produit devrait voir le jour. Si nous pouvons y arriver, chaque livre de viande de phoque qu'on pourra ramener à terre pourra être utilisée, et très bien utilisée. C'est donc quelque chose qu'il nous faut examiner.

Nous avons encouragé nos chasseurs de phoques à traiter les phoques de façon plus humaine. Personne ne croit à la cruauté dans notre industrie. Nous avons demandé que nos produits soient manutentionnés et entreposés de manière qu'ils puissent convenir à l'alimentation humaine.

L'industrie que je représente ici aujourd'hui félicite l'honorable John Efford pour ses efforts en vue de sensibiliser la population au problème qui existe là-bas. Nos chasseurs de phoques sont des pêcheurs. Ils savent que le problème existe. Leur seul souhait, c'est que lorsque nous nous assoirons pour régler le problème, nous le réglions de la bonne façon, en nous assurant de protéger à la fois la chasse au phoque et la pêche.

Il y a eu quelques questions aujourd'hui concernant la nécessité de diffuser notre information partout dans le monde. Il y a eu des questions au sujet de financement. Il y a eu des questions au sujet de ce qui doit être fait.

Bien, laissez-moi vous dire brièvement qu'en ce qui concerne le financement, c'est la dernière année où l'Association canadienne des chasseurs de phoques reçoit une subvention de base de la part du gouvernement du Canada. Nous recevrons cette année 25 000 $. Je ne pourrai pas acheter beaucoup de billets d'avion pour venir jusqu'ici avec une telle somme. C'est une très petite somme. En fait, cela ne couvre même pas le salaire d'une personne.

Actuellement, les chasseurs de phoques apportent leur contribution à l'organisation. Nous aurons peut-être un autre 50 000 $ grâce notamment aux redevances sur les fourrures et aux cotisations versées par nos chasseurs de phoques. Mais même avec cet argent, les fonds ne seront pas suffisamment pour faire tout ce qui devrait être fait.

Le Seal Industry Development Council nous verse 100 000 $ par année, pour deux ans, comme financement de base, pour payer les dépenses de bureau, le téléphone, les salaires, etc.

Nous avons également réussi à obtenir, par l'intermédiaire de l'APÉCA, du financement pour élaborer le type de programme d'éducation dont on a parlé ici un peu plus tôt.

Quelqu'un a dit qu'il fallait que nous fassions connaître toutes ces bonnes choses au monde. En fait, nous effectuerons en juin une visite de quatre pays européens; nous allons rencontrer des gens du gouvernement, des gens du secteur privé et les médias. Nous allons présenter à ces gens une nouvelle vidéo sur les réalités de la modernisation des produits du phoque. Nous allons leur expliquer qu'il s'agit simplement d'une autre industrie. Nous allons répondre à leurs questions avec franchise et honnêteté.

C'est la première étape. Un peu plus tard dans l'année, nous effectuerons un voyage semblable en Asie, où comme l'a dit lui-même le ministre, il existe un marché fabuleux.

Du côté du financement, les choses sont difficiles pour l'industrie. L'argent rentre, mais il n'y en a jamais assez pour faire tout le travail qui devrait être fait. Les choses en sont à un point où la plupart du temps je dois faire une pause pour me demander si j'ai absolument besoin de téléphoner à telle ou telle personne. Ai-je vraiment, vraiment, besoin de l'appeler ou pourrais-je plutôt envoyer un courrier électronique? Souvent, on est moins efficace parce qu'il faut ménager et gratter.

Des commentaires ont été faits un peu plus tôt ici, certainement de la part des gens de mon propre gouvernement, concernant le travail à faire. Aussi, avant de nous quitter, M. Lunn nous a demandé si nous étions sur la bonne voie ou sur la mauvaise voie.

Du point de vue des chasseurs de phoques et des entreprises du secteur privé, la bonne voie consiste à prendre toute cette énergie, tous ces projets, et tous les dollars que nous pourrons amasser, et à les utiliser pour développer le marché, développer des produits et sensibiliser les gens, pour que le monde puisse vraiment savoir en quoi consiste notre industrie.

• 1245

Je sais qu'il y a un problème à Terre-Neuve, et il faut y voir, mais je crois que nous pourrions faire certaines choses si nous travaillions tous ensemble.

Une personne des médias m'a appelé hier et elle m'a dit qu'elle avait entendu que j'allais à Ottawa. Elle savait avant que je parte. Je n'avais pas encore reçu ma convocation. Elle m'a demandé si j'allais à Ottawa pour m'en prendre à John Efford, pour avoir un tête-à-tête avec lui.

Hey, nous n'avons pas besoin de ce genre de choses. Ce que nous avons besoin, c'est de travailler tous ensemble.

Le ministre Efford est une des personnes les plus engagées que je connaisse en ce qui concerne l'industrie du phoque. Nous avons eu de nombreuses conversations, et il a appuyé notre travail dans nombre de cas.

Nous avons deux points de vue différents. Je suis payée pour promouvoir et développer l'industrie de la chasse au phoque. Le ministre doit s'occuper de l'ensemble de l'industrie de la pêche à Terre-Neuve, tout comme David Anderson doit s'occuper de l'industrie de la pêche pour tout le Canada. Nous avons donc trois points de vue différents ici, mais nous ne sommes pas, je crois, si éloignés l'un de l'autre quant au résultat final visé et rien ne nous empêche de travailler ensemble et de faire ce qui doit être fait.

À mon idée, ce qui doit être fait doit l'être à l'intérieur d'un an. Si nous faisons cela, ou si nous tentons de faire quelque chose de semblable, nous ne pouvons laisser les choses tomber dans le piège du conte de fées bureaucratique. Nous aurons besoin d'un comité dont les membres auront été choisis très soigneusement, un comité qui comprendra des représentants du ministère des Pêches et des Océans, du ministère des Pêches et de l'Aquaculture de Terre-Neuve, de l'industrie de la chasse au phoque, tant les chasseurs que les entreprises du secteur privé, et de l'industrie de la pêche, parce que ce que nous faisons a des répercussions sur eux. Nous pourrions aussi inclure des gens du Centre canadien pour l'innovation dans le domaine des pêches, des gens qui ont un long historique en matière de connaissances et de travail accompli.

Ce comité devrait être chargé de rassembler toutes les données que nous possédons relativement aux phoques, à la relation proie-prédateur et à l'industrie de la pêche. Il faudrait faire participer les scientifiques, et ceux qui sont des spécialistes. Je n'essaie en rien de m'immiscer dans un tel comité, parce que je ne suis pas une scientifique. Beaucoup de choses m'échappent. Je crois que ce comité devrait être un comité spécialisé.

Et, oui, il faudra aussi tenir compte des points de vue de l'industrie et des chasseurs de phoques, parce qu'ils constituent les experts de première ligne sur la question.

Je pense que les membres de ce comité devront rapidement mettre en commun leur travail, sans oublier toutefois de répondre à un besoin et d'examiner ce qui devra être fait.

Il faudra qu'il y ait aussi un comité parallèle. Je crois que ce comité devrait en fait être dirigé par le Seal Industry Development Council, et il faudrait que des représentants de toutes ces organisations y participent. Ce comité devra établir un plan quinquennal et une stratégie pour l'industrie de la chasse au phoque et pour, par extension, l'industrie de la pêche. Je ne pense pas que ce comité devrait nécessairement être chargé d'élaborer un plan pour les autres secteurs de l'industrie de la pêche, mais il faudrait qu'il examine les conséquences pour ces secteurs et les problèmes et préoccupations de ces secteurs.

Un des problèmes que nous connaissons actuellement, c'est que trois ou quatre ou cinq d'entre nous travaillons tous sur la même question, mais nous travaillons ici, ici et ici. Même si nous ne visons pas délibérément un travail à contre-courant, c'est le résultat que nous obtenons en bout de ligne. Il faut rassembler nos efforts, parce que nous disposons d'un bassin extraordinaire de talents, de renseignements et de compétences, que nous pourrions réunir pour mettre au point un plan quinquennal.

Les deux groupes doivent se réunir. Les renseignements doivent être mis en commun de manière très substantielle pour que ce plan puisse voir le jour. Je crois qu'il faut procéder d'ici un an. Je ne crois pas que nous puissions laisser traîner les choses. Les problèmes sont trop sérieux et trop importants pour laisser les choses traîner.

Je pense que chacun de nous—le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial, nous-mêmes et les autres—doit prendre sa part de responsabilités pour le travail à faire dans cette industrie. Les gens du secteur de la Côte-Nord au Québec doivent travailler avec nous sur cette question, parce qu'ils ont aussi de gros intérêts dans la chasse au phoque.

Je pense qu'avant la fin de cet exercice, et avant que les comptes pour l'an 2000 soient annoncés, il nous faudra être en mesure d'arriver à cet objectif ensemble. Il faut que ce soit le meilleur travail jamais fait dans l'industrie de la chasse au phoque. Je pense que si nous faisons cela, nous pourrons connaître le succès.

Monsieur le président, nous avons un avenir brillant devant nous, un avenir qui peut rapporter de bons bénéfices économiques à la région de l'Atlantique, aux peuples autochtones, qui ont été anéantis par les activités pour la défense des animaux et qui veulent revenir à la chasse au phoque, à nos collègues de la région Laurentienne, de la Côte-Nord québécoise, des Îles-de-la-Madeleine, ainsi qu'à nos collègues de la Nouvelle-Écosse, et même de l'Île-du-Prince-Édouard, où on recommence lentement à faire la chasse au phoque.

• 1250

Je pense que nous devons tous travailler ensemble à cette question, parce qu'ensemble nous pourrons faire de cette industrie une industrie extrêmement importante, une industrie de laquelle nous serons fiers.

Merci encore de m'avoir donné cette opportunité d'être ici. J'ai décidé de me tenir loin des chiffres, parce que je crois que vous en avez été sûrement suffisamment inondés. Je pense qu'il était plus important de faire connaître le point de vue très simple des gens qui se préoccupent de leur industrie.

Merci.

Le président: Merci, Tina. Le sujet a été très bien traité. Je suis certain qu'il y aura des questions.

Yvan, nous commencerons par vous.

[Français]

M. Yvan Bernier: Merci, monsieur le président. Je voudrais remercier le témoin de sa présentation. Après les deux ou trois jours de réunions qu'on vient de passer, je trouve rafraîchissant de terminer sur une note que je qualifierais de sage. Les différentes personnes qui comparaissent devant nous et même nous, députés, partons parfois dans des envolées. On est peut-être un peu trop passionnés, et la présentation que vous venez de nous faire ce matin nous invite à examiner la question sous tous ses angles et à bien soupeser chacun des propos. C'est tout à votre honneur d'avoir réussi cela ce matin.

Cela fait prendre conscience à l'ensemble des députés présents et à ceux qui auront la chance de nous écouter à la télévision que c'est un problème complexe. Il y a deux groupes qui regardent le problème de façons différentes et, comme parlementaires, nous aurons à présenter une recommandation qui tentera de ne pas envenimer les choses, mais plutôt de trouver une solution tournée vers l'avenir. Je vais relire votre document encore une fois, mais lorsqu'on tiendra nos délibérations, on se penchera sur la question du comité que vous proposez. Pour ma part, j'applaudis cette idée.

Je n'ai pas d'autres questions, si ce n'est de m'interroger sur la façon dont votre association pourra réaliser toutes ces choses et participer au développement de l'industrie si elle ne reçoit plus de subventions. Certains de vos détracteurs disent que vous n'êtes pas viables; on doit faire la démonstration que vous l'êtes, mais c'est un cercle vicieux. S'il n'y a pas l'élément d'aide au début, il sera difficile d'arriver à construire cette industrie.

Je ne sais pas comment vous envisagez la chose. Avez-vous encore fait des demandes d'aide financière au gouvernement pour vous aider à passer à travers le plan d'action que vous vous souhaitez? C'est une chose à faire. Y aurait-il des organisations philanthropiques, des gens prêts à donner de l'argent pour vous aider à vous développer, de façon à poursuivre l'éducation du public et aussi des chasseurs qui, comme vous l'avez mentionné, se sont donné un code d'éthique pour la pratique? Je pense qu'il y aurait des choses à mentionner en ce sens.

J'aurai d'autres questions à poser aux groupes de protection, qui veulent interdire la chasse commerciale. Il faudrait approfondir ce qu'ils reprochent exactement et l'aide qu'ils sont prêts à nous donner pour qu'on en arrive à faire, selon leurs propos, une chasse acceptable. Je ne connais pas l'état des relations entre ces derniers et votre groupe, mais la démonstration faite ici ce matin est un pas dans la bonne direction. En tout cas, on a entendu les deux côtés de la médaille. Maintenant, que Dieu nous vienne en aide pour que nous soyons capables de coucher sur papier des recommandations.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Bernier.

Monsieur Easter, avez-vous des questions?

M. Wayne Easter: Oui, monsieur le président.

Bienvenue, et merci pour votre excellent exposé très exhaustif, compte tenu des difficultés que vous avez eues à le préparer.

Le secteur auquel je veux m'attarder a trait à votre première recommandation, que l'on trouve à la page 11 de votre document.

• 1255

Tout au long des audiences, je pense que nous sommes allés en direction de la nécessité—et c'est absolument essentiel—de disposer de données scientifiques solides. Il est absolument essentiel, pour pouvoir répondre aux autres, aux stars du cinéma, à l'IFAW, ou aux personnes concernées par cette campagne, qu'à la fin de la journée nous ayons la documentation qui nous permette de faire appel à la raison plutôt qu'à l'émotion, et que nous adoptions une démarche qui tienne compte de l'ensemble de l'écosystème.

Je considère votre recommandation comme essentielle, mais comment envisagez-vous sa mise sur pied? Pouvez-vous élaborer un peu sur le sujet?

Mme Tina Fagan: Rappelez-vous, j'ai fait cela à 2 heures du matin, et il m'était très difficile de penser à tous les points. Je voulais vraiment ajouter quelque chose à ce sujet, mais il vient un moment où vous devez dire assez c'est assez.

Dans l'ensemble, je pense que vous avez assez raison. Moi je vois les membres de ce comité spécial comme les experts, les experts scientifiques, les personnes qui devront rassembler le plus de données et de renseignements possible. Nous devons être en mesure d'examiner toutes les études qui ont été faites et de les évaluer. Je sais qu'il y a eu certains examens par les pairs et ainsi de suite. Nous devrons être en mesure de les étudier.

Vous savez, je ne suis pas une grande fanatique des réunions. Veuillez m'excuser, mais vous comprenez ce que je veux dire. Je ne vois pas un comité qui voyagerait d'une côte à l'autre. Je vois plutôt un comité qui réunirait six ou huit personnes ayant une expertise dans les différents secteurs dont nous traitons, et ce comité constituerait notre groupe de base.

Je veux dire, de temps en temps ils pourraient inviter d'autres personnes qui auraient une expertise différente, mais si on s'en tenait à un petit groupe de base, le travail aurait tendance à être fait plus rapidement. Je pense qu'il est essentiel que ce comité voie rapidement le jour.

Il pourrait inclure certains scientifiques du MPO, certains scientifiques de notre province, peut-être M. Winter, et peut-être quelques scientifiques indépendants qui n'ont aucun lien avec l'un ou l'autre des groupes concernés et qui pourrait étudier la question d'un point de vue rationnel.

Comme je l'ai dit, je voudrais être certaine que vous demanderez aussi l'avis de l'industrie de la chasse au phoque. Les chasseurs de phoques sont sur place, et ils sont en mesure de vous dire directement ce qu'ils voient et ce qu'ils vivent. Ils sont en fait nos experts de première ligne. Aussi, certains autres aspects de la science pourraient aussi être traités en collaboration avec l'industrie.

Donc à mon avis, votre comité, ou le ministre de votre comité, ou peu importe, en collaboration avec le ministre Efford, pourrait mettre ce groupe d'experts sur pied et établir des échéances raisonnables quant au travail à faire. Je dirais quelque chose comme neuf mois.

M. Wayne Easter: Très bien, mais une fois cela fait, quelle est la stratégie—et je n'aime pas l'expression—une fois que le travail scientifique aura été fait? Connaissant les tactiques de l'IFAW et des autres, quand irez-vous là-bas, une fois le plan en place, pour faire savoir au reste du monde que tout cela a du sens?

Mme Tina Fagan: Il y a certaines choses que j'aimerais dire, monsieur Easter, à ce sujet. En gros, si ce comité voit le jour et si nous travaillons à la question, nous pourrons faire savoir que nous travaillons à la question.

De mon point de vue, chaque fois que je voyage, je fais allusion au fait que nous faisons ces choses et ainsi de suite. Je pense que nous devons garder la sensiblerie loin de tout ça et tenir les médias à distance. Nous n'avons pas besoin de donner des entrevues à chaque semaine sur ce que nous faisons. Lorsque nous parlerons à des groupes, toutefois, nous devrons les informer que nous travaillons à un projet de ce genre.

Je sais ce que vous pensez. Vous pensez qu'il en coûtera cher pour obtenir ce rapport. Je pense que beaucoup plus d'avenues s'offrent à nous aujourd'hui que par le passé. Je ne recommanderais en aucune circonstance une campagne de publicité. Je pense que c'est vous qui avez mentionné ce matin que nous ne pourrions en sortir vainqueurs. Nous n'avons pas assez d'argent pour être en mesure de le faire.

Mais nous avons l'Internet. Nous avons d'autres moyens de faire connaître les choses. L'an dernier, nous avons préparé une vidéo, en collaboration avec l'Association canadienne des chasseurs de phoques. Nous avons été très brillants. Nous sommes venus à Ottawa, en fait à votre centre des médias de la Chambre des communes, pour faire un grand lancement de notre vidéo.

• 1300

Nous avons maintenant quelque chose comme 200 ou 300 exemplaires de cette vidéo qui circulent dans environ 30 pays. Les gens en ont entendu parler dans les médias, et nous avons été inondés de demandes par le courrier électronique et le télécopieur pour en obtenir des exemplaires.

Aussi, je pense qu'à l'ère de la technologie, il existe différents moyens de diffuser ce genre d'information.

Une fois encore, je pense qu'il nous faudra travailler en réseau. Une partie de ce que nous ferons dans les visites que nous avons planifiées sera possible parce que nous n'aurons pas à participer à des événements publics dans ces pays. Nous essayons de trouver dans ces pays des organisations et des personnes animées des mêmes idées que nous et qui pourront nous servir de contacts pour différentes choses, qui travailleront avec nous, et qui ne verront pas cela comme un problème.

Le président: Merci, Tina.

Je passe la parole à M. Stoffer.

Nous sommes un peu à court de temps.

M. Peter Stoffer: Tout d'abord, je tiens à vous remercier. Oui, les tarifs aériens à l'extérieur de Terre-Neuve sont très élevés. J'ai travaillé pour des compagnies aériennes pendant 18 ans.

Il y a deux choses que j'aimerais souligner à votre intention. D'abord, vous avez parlé d'inclure différents groupes pour former ces comités. Je ne vois pas cela ici, bien que c'est sans doute parce que vous étiez fatiguée.

Simplement en guise de suggestion, j'inclurais le nouveau gouvernement du Nunavut et l'Association des Inuits du Labrador. Puis je n'exclurais pas mais j'inclurais—j'insisterais pour qu'ils puissent être présents à la table, même si ce n'est qu'en tant qu'observateurs—l'IFAW, le Fonds mondial pour la nature, le Sierra Club, Greenpeace, etc.

Comme vous le savez, les groupes environnementaux de la planète travaillent en tandem sur certaines causes communes. Je pense que cela ajouterait de la crédibilité à votre conseil si ces organisations étaient invitées. Ainsi, on pourrait faire taire la rhétorique et travailler à des choses plus sérieuses.

Je suis heureux que vous et M. Efford soyez plus ou moins... parce que selon ce que disaient les médias, vous sembliez assez contrariée, et M. Efford semblait assez contrarié. Je suis heureux de voir, comme je l'ai dit hier, que la rhétorique s'est estompée et que nous pourrons passer à quelque chose qui ressemble à une conversation normale.

M. Matthews a dit ici l'autre jour—et je ne sais pas s'il parlait sous le coup de l'émotion—que si rien n'était fait au sujet des phoques, les pêcheurs allaient se charger du problème.

Avez-vous entendu ce commentaire? Si le MPO continue d'ignorer les problèmes qui ont été soulevés ici au cours des trois derniers jours, croyez-vous que les pêcheurs eux-mêmes—je ne parle pas des chasseurs de phoques—pourraient plus ou moins prendre les choses en mains?

Le président: Peter, je ne suis pas certain que ce soit une question très loyale, parce que...

M. Peter Stoffer: Bien, on me l'a posé.

Mme Tina Fagan: Cela ne me dérange pas de répondre à cette question.

Le président: Ça ne vous dérange pas d'y répondre?

Mme Tina Fagan: Non.

Tout d'abord, dans vos commentaires précédents à propos de l'inclusion de certains groupes, je pense que vous avez assez raison. Nous devrons regarder du côté de certains groupes, même si ce n'est que pour une participation à temps partiel. Nous devrions donner aux activistes pour la défense des animaux et à certains groupes environnementaux cette chance. S'ils participent aux travaux de notre comité, certains bonnes choses en ressortiront sans doute.

Quant à la controverse, j'ai travaillé dans les médias. Ils aiment la controverse. Si elle n'existe pas, ils l'inventent. Aussi ne vous inquiétez pas trop à ce sujet.

Sur la question des pêcheurs, je pense qu'on s'inquiète quelque peu là-bas du fait que parce que les pêcheurs ne sont pas nécessairement tous des chasseurs de phoques, tous les chasseurs de phoques doivent être des pêcheurs. Certains s'inquiètent que leur mode de subsistance puisse être détruit par ces phoques, et il faut s'occuper du problème.

Il y a peut-être une ou deux têtes brûlées, mais dans l'ensemble, je ne pense pas que les pêcheurs prennent les choses en mains et commencent à massacrer les phoques simplement pour s'en débarrasser ou quelque chose du genre. Toutefois, je pense que je les inclurais quelque part dans les structures du comité dont je parle, parce que je crois qu'il s'agit d'un problème qu'il faut régler, et qu'on ne peut l'ignorer.

M. Peter Stoffer: Merci beaucoup.

Le président: Merci.

Charlie.

M. Charlie Power: J'aimerais poser une question dans la même veine.

Une des raisons pour lesquelles les chasseurs de phoques ont désespérément besoin d'argent et ont désespérément besoin de l'industrie de la chasse au phoque, c'est que l'industrie de la chasse au phoque a rapporté l'an dernier 25 millions de dollars à l'économie de Terre-Neuve. La pêche à la morue, qui tente de se remettre en place, rapportait habituellement 700 millions de dollars à l'économie de Terre-Neuve. Il est donc évident que tous les chasseurs de phoques, qui doivent être des pêcheurs, ont désespérément besoin d'une source de revenus pour remplacer celle qu'ils ont perdue.

Les données scientifiques, si vous les étudiez objectivement, vous diront que la population de phoques a certainement doublé, sinon triplé, dans les huit ou dix dernières années.

• 1305

Les raisons justifiant l'établissement d'un total de prises admissibles devraient reposer sur certains faits. L'un de ces faits a trait à l'industrie et au marché que vous avez réussi à développer, mais ce total des prises admissibles ne devrait-il pas tenir compte du simple fait qu'on a laissé une espèce prédominer sur les autres, au détriment de plusieurs autres espèces, notamment la morue, le saumon et les autres poissons de l'Atlantique? Les membres de votre association seraient-ils à peu près tous d'accord pour dire que le total des prises admissibles devrait être plus élevé pour les phoques?

Mme Tina Fagan: Tout d'abord, laissez-moi aborder la question des revenus.

Les chiffres concernant la valeur du poisson au débarquement à Terre-Neuve sont maintenant plus élevés qu'ils ne l'ont jamais été. En fait, beaucoup de pêcheurs et beaucoup de mes chasseurs de phoques font de très bonnes affaires avec la crevette et le crabe. En fait, je continue de souhaiter obtenir un permis pour l'une de ces espèces. Nous avons toutefois toujours besoin de ramener la pêche à la morue. Il ne fait aucun doute là-dessus.

Quant à savoir si mes chasseurs de phoques aimeraient obtenir un quota plus élevé, comme je l'ai dit plus tôt, je répondrai oui, mais cette augmentation des quotas devra être liée à la présence d'un marché fort, stable avec des prix raisonnables.

Si vous introduisez dans le marché plus de phoques qu'il peut en prendre, le problème devient alors le suivant: que fait-on avec ces phoques? Examinons un instant ceux du secteur privé qui achètent les produits du phoque. Que vont-ils faire si tout à coup 100 000 peaux supplémentaires apparaissent à leur porte? Vont-ils dire: «Non, je ne peux les acheter parce que ce n'est pas compris dans mon plan budgétaire», ou vont-ils tenter de les acheter et de les entreposer? Que va-t-il arriver dans deux ans quand leurs entrepôts seront tellement pleins qu'ils ne voudront plus rien acheter? Que va-t-il arriver aux prix?

M. Charlie Power: Pourquoi le gouvernement fédéral, dans ce cas, ne met-il pas sur pied une campagne de marketing en vue de trouver de nouveaux marchés? Pourquoi, alors que le problème des phoques est si évident, et que les problèmes avec la morue sont si évidents...? Le gouvernement fédéral s'apprête à gérer la ressource en se fondant principalement sur des politiques et non sur des données scientifiques.

Le président: Merci, Charlie.

M. Charlie Power: Pourquoi ne peuvent-ils pas le faire? Pourquoi ne l'ont-ils pas fait encore?

Le président: Je pense que vous avez été clair.

Nous dépassons déjà de cinq minutes, et je voudrais que Nancy termine.

Mme Nancy Karetak-Lindell: Merci d'être venu.

Mon propos répète, d'une certaine façon, ce qui a déjà été dit par d'autres membres.

Vous nous avez montré, avec vos produits, une industrie très professionnelle et très bien gérée. Je me demande pourquoi cela ne pourrait pas arriver à convaincre un grand nombre de Canadiens et de personnes à l'étranger que cette industrie est viable, qu'elle peut être très productive et aider à l'économie du Canada.

Que faudrait-il avoir selon vous pour pouvoir montrer ce côté de l'histoire? C'est une industrie très professionnelle, et je dirais encore plus sévère que bien d'autres industries. Peut-être n'utilisons pas suffisamment le parallèle avec, comme vous dites, le poulet et les autres viandes.

Mme Tina Fagan: Je pense que nous devons faire un certain nombre de choses. À l'intérieur du dossier sur l'éducation, vous allez trouver une petite brochure intitulée «Learning about Seals» (À propos des phoques). C'est une brochure que nous avons préparée pour les élèves de cinquième et sixième année. Les choses se déroulent très bien dans les écoles où nous nous sommes rendus.

À court terme, vous avez assez raison; nous devons convaincre plus de gens dans le monde que c'est de ça qu'il est question. Nous devons faire oublier les images du sang rouge sur la glace blanche. On ne peut en aucune façon comparer la chasse aux phoques avec les abattoirs, parce que personne n'a jamais vu un abattoir, ou du moins la plupart des personnes que je connais n'en ont jamais vu un.

Pour que le message puisse passer, je pense qu'il faudra que deux ou trois choses arrivent. Nous devrons être capables de nous réunir—le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux, l'industrie de la chasse au phoque et les autres—et nous devrons être en mesure de trouver le financement nécessaire.

Je ne parle pas de subventions. Je ne parle pas de salaires. Nous devrons être en mesure de trouver le financement nécessaire pour faire passer le message. Si cela signifie se rendre aussi dans d'autres pays...

Une des choses que nous prévoyons faire en Europe, c'est de mettre à contribution les médias, le secteur privé et les gens du gouvernement. Nous espérons pouvoir nous en tenir à ce programme et trouver le financement nécessaire. Il est très difficile de concurrencer les sommes d'argent qu'ont amassées nos détracteurs sur le dos de l'industrie de la chasse aux phoques.

Le président: Tina, je tiens à vous remercier d'être venue aujourd'hui. Il est très rafraîchissant de terminer notre réunion de ce matin avec un témoin qui participe à l'industrie, qui connaît l'industrie, et qui essaie de promouvoir l'industrie pour qu'elle survive et continue de se développer.

• 1310

Sur ce, j'aimerais conclure la réunion. J'aimerais remercier tous les membres pour leur fidélité et pour avoir accepté de venir passer quatre heures et dix minutes ici ce matin.

Merci beaucoup.