FOPO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FISHERIES AND OCEANS
COMITÉ PERMANENT DES PÊCHES ET DES OCÉANS
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le lundi 19 novembre 2001
Le vice-président (M. John Cummins (Delta—Richmond-Sud, Alliance canadienne)): Je vais à présent procéder à l'ouverture de cette réunion du Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes.
Je m'appelle John Cummins. Je suis le représentant au Parlement de cette circonscription, Delta—Richmond-Sud. En tant que vice-président du comité, je suis chargé de mener les débats d'aujourd'hui à la place de Wayne Easter, membre élu de la cirsconscription de Malpeque, qui s'excuse de ne pouvoir être présent parmi nous.
Le sujet de la discussion d'aujourd'hui est la gestion de la pêcherie du fleuve Fraser en 2001. Les débats d'aujourd'hui n'ont pas pour but d'établir une vision définitive de la gestion des pêcheries, mais simplement de donner quelques éclaircissements au comité sur ce qui s'est passé.
La liste des intervenants est déjà établie. Si elle ne vous paraît pas satisfaisante, j'en assume la totale responsabilité. Mais il faut savoir que nous ne disposons que d'un temps limité. Nous débattrons jusqu'à huit heures et, s'il reste alors du temps, nous ferons appel à des intervenants dans le public.
Cela étant dit, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous souhaite la bienvenue. Nous sommes enchantés que tout le monde ait pu être présent aujourd'hui.
Le premier intervenant d'aujourd'hui est M. Phil Eidsvik, de la B.C. Fisheries Survival Coalition. Monsieur Eidsvik, la parole est à vous.
M. Phil Eidsvik (porte-parole de la B.C. Fisheries Survival Coalition): Merci, monsieur le président, et bienvenue en Colombie-Britannique à tous les membres du comité, en ce jour pluvieux à Steveston. Nous sommes ravis que vous ayez pu faire le déplacement.
Les événements ayant eu lieu cette année dans le domaine de la pêche en Colombie-Britannique sont très graves et nous sommes heureux que vous preniez le temps d'écouter les professionnels de la pêche vous parler de l'impact qu'a eu sur notre industrie la gestion du MPO pendant les dix dernières années.
• 1419
Je note que Mme Tremblay est ici—bienvenue à vous. Je
voudrais m'excuser auprès de vous, car notre exposé a été préparé
pendant la fin de semaine et n'a pas eu le temps d'être traduit.
Nous avons apprécié la venue de M. Yvan Bernier en Colombie-Britannique en
de nombreuses occasions et sa participation au
comité; nous vous souhaitons tout particulièrement la bienvenue en
ce lieu.
Si vous n'avez pas d'objections, puis-je vous distribuer ceci? Merci.
Il va sans dire que je ne lirai pas le document dans son ensemble, mais il devrait vous aider à suivre le déroulement de mon exposé.
La British Columbia Fisheries Survival Coalition a été fondée en janvier 1993, principalement pour traiter des problèmes concernant les droits de pêche des peuples autochtones en Colombie-Britannique et pour assurer l'accès du public aux pêcheries, à des fins commerciales ou récréatives, tout en respectant les droits des peuples autochtones en vigueur par le passé et jusqu'à aujourd'hui. Nous nous sommes constitués en personne morale en 1993 et une partie significative de notre budget est utilisée pour le règlement de contentieux. Nous avons effectué environ sept déplacements à la Cour suprême du Canada depuis notre fondation en 1993.
Dans le domaine des lois concernant les droits de pêche des peuples autochtones en Colombie-Britannique, notre association et celle qui l'a précédée et que nous avons absorbée ont été impliquées dans toutes les affaires principales survenues dans la province, y compris les affaires Guerin, Sparrow, Vanderpeet, Gladstone, Delgamuukw, et la liste ne s'arrête pas là.
La raison pour laquelle nous intervenons devant vous aujourd'hui concerne le fait—et j'aimerais intervenir dans de meilleures circonstances—que la pêcherie de saumon du Fraser produisait autrefois environ 80 p. 100 de la quantité de saumon de la Colombie-Britannique, soit une valeur totale de 200 millions de dollars; environ 60 p. 100 de ce chiffre provenait du saumon sockeye; cette année, le total des prises de saumon sockeye dans le fleuve Fraser s'élève à 246 000 saumons, soit une valeur d'environ 2,5 millions de dollars. Nous sommes passés de 200 millions à 2,5 millions de dollars en dix ans.
Notre exposé va tenter de vous présenter les raisons générales expliquant pourquoi nous nous retrouvons dans cette situation particulière. Certaines des conséquences plus spécifiques sur les pêcheurs et sur les différents types d'équipements seront abordées par les personnes et associations intervenant après moi.
L'effet principal de la disparition de 200 millions de dollars de l'économie est bien entendu la suppression de milliers d'emplois. Les moyens de subsistance qui faisaient vivre de nombreuses familles et leur permettaient de rembourser leurs emprunts ont disparu. Nous pensons qu'il est possible de renverser la situation, mais cela dépend entièrement d'une modification radicale de la gestion par le MPO.
Il existe trois problèmes qui me semblent devoir être abordés—le premier concerne les résultats du programme de réduction de la tessure et les promesses sous-jacentes.
Le second concerne les prises de saumon sockeye dans le fleuve Fraser en 2001. Le saumon sockeye est le moteur économique principal de la pêche commerciale en Colombie-Britannique. Il existe d'autres espèces, mais d'une manière générale, la plupart des revenus proviennent actuellement de la production de saumon sockeye. En ce qui concerne le secteur des bateaux à lignes traînantes, Mike Griswold, qui interviendra un peu plus tard, vous parlera de ses intérêts spécifiques pour le saumon quinnat et le saumon coho.
Un troisième problème que nous désirons aborder concerne les normes à deux vitesses de POC. POC, le nouveau nom du MPO, a été bien accepté dans la profession pour un certain nombre de raisons, mais pour éviter les confusions, nous préférons continuer à dire MPO afin que chacun sache de quoi nous parlons.
Le premier problème concerne le plan de réduction de la tessure. En 1996, le MPO a lancé un programme en deux parties visant à réduire la pêche commerciale publique. La côte a été divisée en trois zones pour les bateaux à filets maillants, en quelques autres zones pour les bateaux à lignes traînantes et en deux zones pour les senneurs. Il en a résulté que, si vous possédez un bateau à filets maillants, vous avez besoin de trois permis pour pêcher sur toute la côte alors que vous pouviez le faire auparavant avec un seul permis. À cette époque, un permis coûtait, après le premier achat en retour, entre 75 000 et 125 000 $, et votre capital engagé était suffisant pour retourner et rester dans le domaine de la pêche.
• 1424
La réduction de la tessure a fait l'objet d'une controverse.
Je pense que de nombreuses protestations se sont élevées. Il est
clair que, si vous vous promenez parmi les professionnels de la
pêche, dans tous les cafés-restaurants de la côte, vous
rencontrerez des pêcheurs favorables à la réduction de la tessure
et d'autres qui y sont opposés. En tant qu'association, nous nous
sommes gardés de prendre officiellement parti, car cela nous aurait
divisés en deux clans. Certains de nos membres se sont prononcés en
faveur de ce programme et d'autres non.
Ses principaux opposants ont déclaré: «Écoutez, nous passerons par toute réduction de la tessure, nous ferons tout ce que le MPO demande, mais nous ne serons quand même pas capables d'obtenir suffisamment de poisson.» Les défenseurs du programme ont dit: «Eh bien, écoutez, réduisons la tessure, et il sera plus facile d'accéder aux pêcheries, il sera plus facile pour le MPO de les ouvrir car il y aura moins de bateaux, alors pourquoi ne pourrions nous pas pêcher plus?» La discussion était menée en ces termes.
Vous verrez à la page 7 de notre document l'une des promesses qui a été faite:
-
Le retrait des permis améliorera de façon significative la
viabilité financière des professionnels restant dans le domaine de
la pêche commerciale [...]
-
le secteur commercial devrait se porter significativement mieux
[...]
-
La tessure commerciale restante sera le premier bénéficiaire de
l'augmentation du niveau du tonnage.
En 1995, il existait 535 bateaux senneurs sur la côte. Il s'agit de navires de grande taille ayant en général un équipage de cinq personnes et valant en moyenne environ 1 million de dollars chacun; il leur faut donc attraper une quantité de poisson significative chaque année pour être rentables. Ces bateaux étaient économiquement viables avant les événements de 1992. Ils généraient de bons revenus. Mais en 2001, sur le fleuve Fraser, sur ce qui est appelé la zone méridionale, il ne restait plus que 167 senneurs sur une tessure potentielle de 535. Vous pouvez donc vous rendre compte de l'amplitude de la chute—en gros 80 p. 100.
Le MPO avait également fait une autre promesse lors de la mise en place du programme de réduction de la tessure:
-
Les pêcheurs le long de toute la côte auront désormais une
meilleure chance de tirer des revenus durables de cette tessure
moins importante mais plus forte.
Si vous examinez le cas des bateaux à filets maillants, en 1995, 839 d'entre eux étaient autorisés à pêcher le saumon sockeye du fleuve Fraser. De plus, à cette époque, certains navires polyvalents, à la fois à filets maillants et à lignes traînantes, pouvaient choisir l'une ou l'autre des deux options selon le type de poisson présent. Ces navires polyvalents ont été éliminés en 1996, où il leur a fallu décider de devenir soit des bateaux à lignes traînantes, soit des bateaux à filets maillants. Les professionnels ont alors dû faire leur choix.
Il en a résulté qu'en 2001, seuls 407 bateaux à filets maillants sont autorisés à pêcher dans le bas Fraser, et qu'un total d'environ 657 de ces mêmes bateaux sont capables de pêcher dans les stocks de poisson du fleuve Fraser. Ce chiffre est à comparer à presque 3 000 bateaux auparavant. La capacité de la tessure des bateaux à filets maillants a donc été réduite d'environ 80 p. 100.
Avant 1996, sur le fleuve Fraser lui-même, lors de l'ouverture de la pêche, vous pouviez avoir en moyenne environ 1 000, 1 200 ou 1 500 bateaux à filets maillants. Comme nous l'avons indiqué, en 2001, ce nombre a chuté à 407, ce qui signifie en gros que, sur le fleuve Fraser, il ne reste plus qu'un tiers de la tessure.
Malgré la petitesse de la tessure, le fleuve Fraser n'a été ouvert à la pêche au saumon sockeye ni en 1999, ni en 2001; l'année 1999 a été une première dans l'histoire canadienne car elle a marqué l'absence totale de pêche au saumon sockeye par la tessure commerciale sur le fleuve Fraser, et bien entendu, ceci s'est répété pour la deuxième fois cette année, en 2001. Cela fait deux fois en 100 ans, les deux fois survenant dans les cinq dernières années.
Autre promesse faite lors de la mise en place du programme de réduction de la tessure:
-
Nous travaillons vers un futur dans lequel la pêche générera de
bons revenus pour les pêcheurs et contribuera au développement des
économies locales.
Cette promesse a été faite par David Anderson en 1998.
La dernière tessure concernée est bien entendu celle des bateaux à lignes traînantes dont les effectifs ont également chuté d'environ 85 p. 100 depuis 1995. Il ne reste qu'à peu près 390 de ces bateaux, pêchant dans les stocks de saumon sockeye du fleuve Fraser, par rapport aux 3 000 qui existaient avant 1995.
Autre promesse de David Anderson:
-
La pêche n'est pas une industrie en déclin. C'est une industrie
ayant un avenir.
• 1429
Voici les promesses qui ont été faites aux industriels de la
pêche commerciale en Colombie-Britannique, lorsqu'ils ont sacrifié
leur tessure et envoyé vers d'autres secteurs de nombreux
professionnels qui n'étaient pas prêts à quitter cette industrie.
Mais POC, ou le MPO, avait promis que cette industrie aurait un
avenir. Le MPO a affirmé que, vu les baisses énormes d'effectifs,
la planification de la pêche serait simple. Quel est le risque
d'ouvrir une pêcherie, car il y a si peu de bateaux... Comme vous
le dites, il y avait 1 000 bateaux pêchant sur une remontée de
taille limitée et c'était la raison pour laquelle vous disiez que
nous ne pouvions pas procéder à l'ouverture de la pêche. Mais à
présent dans certaines zones, il n'y a que 200 ou 300 bateaux.
C'est pourquoi nous aurions dû pouvoir pêcher dans ces remontées de
taille limitée qui étaient supposées nous être accessibles, mais
comme nous le verrons plus tard, cela ne s'est pas produit.
En 2001, selon notre estimation, qui reste prudente, 6,5 millions de saumons sockeye sont revenus dans le fleuve Fraser. La prise totale par l'industrie de la pêche commerciale publique a été de 256 000 unités.
Ainsi, au vu des temps tumultueux et terribles qu'a vécus l'industrie, de la réduction de la tessure, et des querelles entre amis de toujours pour savoir si cette évolution constitue une bonne chose ou non, c'est à se demander si le MPO de par ses actions ne s'est pas délibérément engagé dans un plan de destruction et d'élimination pure et simple de la pêche commerciale en Colombie-Britannique.
Il doit vous sembler que, pour qu'un membre d'une association de la Colombie-Britannique vienne devant ce comité et vous dise de telles choses, il doit être un peu timbré. Monsieur Wappel, je vois que vous secouez la tête et je suis d'accord avec vous. Comme vous le verrez lorsque vous aurez écouté jusqu'au bout notre exposé et ceux des autres intervenants, vous secouerez certainement la tête en signe d'approbation au lieu de le faire pour exprimer votre incrédulité. Nous sommes en présence d'une situation affligeante.
Si vous consultez le premier graphique à la page 17, la partie ombrée en clair représente la taille totale de la remontée des saumons dans le fleuve. Nous avons juste représenté quelques années, prises dans les 20 dernières années, où la taille des remontées de saumons sockeye dans le fleuve Fraser était réduite. La barre ombrée en foncé indique la quantité de poisson que nous avons prise au cours de ces années à faible remontée. Bien entendu, en 2001, la taille de la remontée des saumons dans le fleuve est supérieure à celle des années à faible remontée, mais la pêche est virtuellement nulle.
Nous demandons pourquoi cela est arrivé. Vous pouvez voir que lors de ces années à faible remontée—il s'agit de la suite du graphique figurant sur la page précédente—nous avons tout simplement pêché de façon raisonnée et avec succès, ce qui a permis un retour important. Les zones ombrées en foncé montrent le retour dans le prochain cycle. Il s'agit de la quantité de poisson qui est retournée dans notre pêcherie au bout d'un cycle de quatre ans.
La page 19 explique simplement que certaines années, vous pourriez mettre 10 millions de poissons dans les frayères et en récupérer peut-être 20 millions. D'autres années, vous pourriez en mettre deux millions dans les frayères et en récupérer peut-être 30 millions. Il n'existe pas vraiment de données stables dans la production de saumon sockeye. Le nombre de poissons que vous placez dans les frayères ne semble pas beaucoup influencer les résultats de production, sauf aux deux extrémités: si vous y mettez trop peu de saumons sockeye ou si vous en mettez trop, alors la production finale sera faible.
C'est pourquoi les personnes chargées de la gestion du fleuve Fraser doivent maintenir un équilibre; vous ne voulez avoir ni trop, ni trop peu. Vous pouvez voir les types de données que nous avons recueillies. Par exemple, en 1993, pour chaque reproducteur placé, nous avons eu en gros trois poissons qui sont retournés. En 1989, huit poissons par reproducteur sont revenus, alors qu'en 1996, il n'y en a eu que deux. Il n'existe donc pas de règle rigoureuse en la matière.
Ce que nous voyons à la page 20, si vous regardez depuis 1961...
Le vice-président (M. John Cummins): Ces graphiques sont plutôt significatifs. Je voudrais juste dire aux membres du comité que s'ils ont des questions au fur et à mesure que nous parcourons ce type de document, je suis certain que M. Eidsvik ne trouvera pas à redire d'être interrompu. Donc, si vous avez des questions sur le sujet, nous serions heureux de les entendre.
Une voix: Monsieur le président, voulez-vous parler de questions concernant les graphiques?
Le vice-président (M. John Cummins): Eh bien, je pense qu'à ce moment de la réunion, ceux-ci sont significatifs. Si cela doit vous aider à comprendre ces graphiques et la terminologie employée, veuillez ne pas hésiter à interrompre l'orateur. Sinon, nous réserverons peut-être les questions pour la fin. Il y en aura certainement concernant les graphiques...car ils sont tellement saisissants.
Monsieur Eidsvik.
M. Phil Eidsvik: À la page 20, l'échappée des saumons sockeye en 2001 donne un graphique intéressant. Comme vous pouvez le voir si vous regardez les années 61 et 65, 1965 a été en fait l'année faible pour le saumon sockeye au cours de ce cycle particulier, ce qui se répercute bien entendu tous les quatre ans. Pour les membres du comité qui ne le sauraient pas, le saumon sockeye se reproduit la première année, reste quelques temps dans les lacs, descend le fleuve, se dirige vers le milieu de l'océan Pacifique, puis s'en retourne la quatrième année. C'est pourquoi vous voyez un creux tous les quatre ans sur le graphique.
• 1434
Mais vous pouvez voir qu'en 1965 a commencé un long processus
de reconstruction approfondie. Au cours de toutes ces années à
faible échappée ayant précédé l'achat en retour de 1996,
l'industrie de la pêche commerciale en Colombie-Britannique était
dotée d'un nombre impressionnant de bateaux. Chacune de ces années,
nous avons pêché. Chacune de ces années, les professionnels
remboursaient leurs bateaux, payaient leurs emprunts, nourrissaient
leurs familles, achetaient des vêtements, emmenaient leurs enfants
voir les films sur Harry Potter—toutes ces sortes d'activités.
L'industrie de la pêche était viable en Colombie-Britannique.
Bien entendu, si vous regardez l'échappée de 2001, vous devez vous demander pourquoi nous avons été obligés de rester à quai cette année, alors que nous avions pêché en 1965, 1973 et 1981.
Pour citer le ministre en poste à l'époque, lorsqu'il parlait de réduction de la tessure, il disait que celle-ci donnerait plus d'atouts aux pêcheurs qui resteraient dans l'industrie. C'est la même promesse qui a été faite et répétée sans cesse à l'industrie de la pêche pendant les quatre ou cinq dernières années.
Mais regardons ce qui s'est passé en réalité. Voyons si les promesses faites par le MPO ont été tenues et nous ont donné plus de temps de pêche. Nous avons juste évoqué rapidement la situation de l'année 2001, mais 2001 n'est pas une exception, si l'on regarde ce qui s'est passé entre 1992 et 1996.
Le graphique à la page 22 considère le nombre de jours de pêche des bateaux senneurs. La zone 20 se situe dans une région du détroit de Juan de Fuca, où les poissons arrivent par les rives méridionales de la côte ouest de l'île de Vancouver et se faufilent à travers le détroit de Juan de Fuca, parfois de part et d'autre de la frontière entre les États-Unis et le Canada.
La barre ombrée en clair représente la taille totale de la remontée des saumons en 1987. Vous pouvez voir qu'elle s'élevait à environ 7,7 millions. Cette année, la remontée a été de 6,4 millions et les chiffres définitifs ne sont pas encore connus. La plupart d'entre nous pensent qu'elle se situera entre 7 et 8 millions.
Vous pouvez voir que nous avions en gros 1 200 jours de pêche des bateaux senneurs dans la zone 20 en 1987 pour une taille de la remontée à peine supérieure à celle de cette année. Or, vous pouvez constater que, cette année, nous avons eu 40 jours de pêche des bateaux senneurs. C'est tout. Quarante jours de pêche des bateaux senneurs pour une année où nous en aurions eu 1 200, il y a 10 ou 13 ans de cela.
Si vous voulez comparer les nombres de jours de pêche des bateaux à filets maillants sur le fleuve Fraser, vous pouvez vous reporter à la zone 29, qui se réfère spécifiquement à la pêcherie de la zone E. L'association responsable de la zone E interviendra devant vous plus tard dans la journée.
En termes de taille de la remontée, chaque unité représente en fait dix jours de pêche. Ainsi, lorsque vous regardez le graphique, le chiffre 1 000 représente en fait 10 000 jours de pêche. En 1987, nous avions 10 000 jours de pêche des bateaux à filets maillants sur le fleuve Fraser pour une remontée de 7,7 millions. Cette année, avec 6,4 millions de poissons, nous n'avons eu aucun jour de pêche; pas un filet n'a été mis à l'eau.
En un mot, nous avons eu 10 000 jours de pêche des bateaux à filets maillants en 1987 pour une remontée à peine supérieure, et cette année, nous sommes restés à quai. Nos professionnels n'ont eu aucun revenu. Nada. Rien.
Le vice-président (M. John Cummins): Pourquoi parlez-vous de 1987?
M. Phil Eidsvik: Car il s'agit de l'année où la taille de la remontée était la plus proche de celle de cette année. Je voulais juste choisir une année présentant une taille de la remontée similaire, afin d'établir une comparaison valable.
Le vice-président (M. John Cummins): S'agit-il de la même chose à la page 22?
M. Phil Eidsvik: Tout à fait. Il s'agit en fait de la même année. Je pense que vous pouvez vous référer à n'importe quelle année et constater le même type de différence.
Vous pouvez donc voir que les promesses faites par le ministre concernant la réduction de la tessure n'ont tout simplement pas été tenues. Je pense que si Brian Tobin, Fred Mifflin, David Anderson ou Herb Dhaliwal—n'importe lequel des ministres qui ont fait ces promesses—étaient ici, ils seraient horrifiés. Les bureaucrates ont en fait transformé les ministres en menteurs.
Le ministre a pris des engagements en toute bonne foi. Les bureaucrates de Colombie-Britannique n'ont tout simplement pas suivi. Je pense que si M. Dhaliwal avait eu le temps d'accorder son attention à cette situation, je me plais à penser et les habitants de Colombie-Britannique voudraient pouvoir penser que notre droit à la pêche n'aurait pas été bafoué cette année et que nous ne nous trouverions pas dans l'état où nous sommes actuellement.
Vous entendrez parler un peu plus des problèmes de gestion au sein du ministère par la bouche d'autres intervenants.
• 1439
Le problème suivant—et il s'agit d'un point sensible dans
l'industrie depuis 1992—est la politique mise en place par les
conservateurs, en la personne de John Crosbie en 1992, qui a créé
une industrie de la pêche commerciale séparée pour un ensemble très
privilégié de groupes autochtones en Colombie-Britannique.
Sur le fleuve Fraser, les bandes indiennes de Musqueam, de Tsawwassen et de la nation Stólo ont été autorisées à vendre leur poisson de consommation. Sur les 30 000 Autochtones vivant autour du fleuve Fraser, ces bandes représentent environ 6 500 personnes. Si vous êtes un Autochtone vivant en amont du fleuve et que vous pêchez avec les Autochtones de Musqueam, vous serez arrêté et emprisonné. Si vous êtes un Autochtone de Campbell River ayant fait un gros investissement dans l'industrie de la pêche commerciale et que vous allez pêcher dans cette pêcherie, vous serez arrêté et emprisonné.
Vous pouvez pêcher dans cette pêcherie avec le même équipement et le même type de bateau au même moment, mais vous serez arrêté et emprisonné. J'ai moi-même été emprisonné et, comme certains d'entre vous le savent sans doute, M. Cummins l'a également été pour la même raison. Plus de 300 inculpations ont été prononcées à l'encontre de pêcheurs refusant d'être victimes d'un apartheid dans l'industrie de la pêche et qui ont protesté en allant pêcher dans cette pêcherie. Et de nombreux procès suivent à présent leur cours dans le système judiciaire.
Nous savons que le comité fédéral a examiné la réglementation s'appliquant à cette pêcherie en particulier. Il a déclaré que celle-ci ainsi que la réglementation lui étant attachée violent les dispositions de la Loi sur les pêches, mais cependant elles existent toujours dix ans après. Et en tant qu'industrie, nous avons dépensé, afin de combattre cette politique, environ 400 000 $ en frais judiciaires, versés à titre de don par les pêcheurs, des pêcheurs privés qui, comme vous l'avez vu, n'ont pas pu pêcher cette année. Ce sujet a créé des dissensions à travers l'industrie et a divisé des familles qui s'entendaient bien auparavant.
Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais 30 p. 100 des acteurs de l'industrie de la pêche en Colombie-Britannique sont des Autochtones qui ont fait de lourds investissements dans cette industrie. En 1989, leurs investissements s'élevaient à 300 millions de dollars. Le deuxième pêcheur le plus important sur la côte de la Colombie-Britannique dans la catégorie des bateaux senneurs est un chef autochtone de Port Hardy, James Walkus; son entreprise obtient un très grand succès. La plupart des Autochtones sont aussi insatisfaits que nous sur le sujet.
Hutch Hunt, qui m'a accompagné pour se plaindre des effets de cette politique lors d'une réunion avec M. Anderson quand celui-ci était ministre, a déclaré: «En 1990, j'ai construit un bateau senneur d'une valeur de 1,5 million de dollars, j'ai cru vos promesses concernant l'achat en retour et ai acheté un autre permis, et maintenant je suis coincé à quai, pendant que vous transférez le poisson dans le fleuve pour les Musqueam, les Sto:lo et les Tsawwassen». Il a ajouté: «Vous me dites que je suis un citoyen de seconde zone et qu'il n'y a pas de place pour moi dans ma pêcherie». Malheureusement, M. Hunt a vendu son outil de travail et cinq familles d'Alert Bay qui avaient du travail chaque année n'ont à présent plus de revenus. C'est une tragédie que les choses en soient arrivées là en Colombie-Britannique.
Vous verrez à travers les exposés qui vont être faits au cours de cet après-midi qu'un contrôle étroit de la pêche publique, commerciale et récréative a été effectué cette année, un contrôle extrêmement sévère, alors que la pêche autochtone n'a virtuellement pas été contrôlée. Et vous verrez que l'industrie de la pêche commerciale publique s'est vue interdire la pêche de ce qui a été appelé une remontée tardive des saumons sockeye, ce qui a créé de nombreux problèmes cette année et modifié notre plan de pêche, alors que la tessure autochtone a largement puisé dans ce stock, et qu'encore une fois nous avons dû laisser notre tessure à quai. Une fois encore, nous ne pouvons croire qu'un organisme de gestion responsable peut accepter de nous faire subir de telles choses.
Je vais vous donner quelques exemples des normes à deux vitesses du MPO. Le MPO a autorisé six navires senneurs à attraper du saumon sockeye dans l'estuaire du Fraser. Ils ont pu pêcher pendant 30 jours. Leur objectif était d'attraper 80 000 unités et ils ont pêché dans l'estuaire du Fraser et à San Juan pratiquement tous les jours pendant cette période. Ils ont déchargé leur prise à French Creek Seafood sur l'île de Vancouver et dans d'autres sites. Certains de nos collègues étaient présents à French Creek en train de vaquer à leurs occupations, et des senneurs entièrement pleins arrivaient pratiquement chaque jour, sans qu'aucun agent des pêches ne soit présent. Personne n'a compté les poissons. Personne ne sait combien de poissons ont été pris. Les pêcheurs ont eux-mêmes rendu compte de la quantité qu'ils ont attrapée.
• 1440
Le saumon sockeye représente de l'argent. Chaque poisson
rapporte en gros 10 $ en faisant une estimation rapide pour une
année moyenne. C'est comme ouvrir la porte d'une banque et dire:
«Phil, tu vas à la banque et tu prends tout l'argent que tu veux.
Oh non, pardon, tu ne peux prendre que 10 000 $, mais personne ne
comptera ce que tu as pris. Personne ne vérifiera après toi.
Arrête-toi simplement quand tu auras pris tes 10 000 $. Ne
t'inquiète pas, personne ne comptera ce que tu as pris.» Bien
entendu, connaissant la nature humaine, il est clair que nous
prendrons plus. Et je ne critique pas seulement la tessure
autochtone, car je connais certaines personnes, mes meilleurs
amis... Par exemple, prenez mon partenaire qui travaille sur mon
bateau—je sais que si le MPO ne contrôlait pas les délimitations
et les périodes de fermeture, il pêcherait aussi. Tout le problème
est là.
Pour en revenir à cette pêcherie en particulier, celle des bateaux senneurs sur le Fraser, ils ont fini par avoir 4,5 fois plus de jours de pêche que toute la tessure commerciale publique réunie n'en a eu dans la zone 20. Alors que la tessure de bateaux à filets maillants de la zone E s'est vu interdire de pêcher afin de protéger une remontée tardive de 300 saumons sockeye seulement, cette autre tessure a pêché pendant 30 jours dans l'aire de croissance de l'estuaire du Fraser sur ces remontées. A-t-elle pris plus de 300 poissons? Certainement.
Une voix: Que signifie décharger à l'aide d'épuisettes?
M. Phil Eidsvik: Avant la mise en place par le ministre Anderson de la politique sélective de pêche, vous pouviez placer votre filet et s'il n'y avait pas beaucoup de poisson dedans, vous pouviez tout simplement le ramener directement sur le bateau. C'était très rapide et efficace. Une épuisette a un diamètre d'environ 36 pouces. Vous la plongez dans l'eau à l'intérieur du filet, transférez le poisson sur le bateau, puis seulement alors vous le triez.
Le spécialiste des bateaux senneurs qui se trouve derrière moi vous donnera plus de détails si vous le désirez. Mon expérience des senneurs est assez limitée.
J'en suis à la page 28 de notre exposé. Allons-nous assez vite, monsieur le président?
Le vice-président (M. John Cummins): Oui. Veuillez juste conserver le même rythme, s'il vous plaît.
M. Phil Eidsvik: Supposons que, pour une raison quelconque, la tessure commerciale ne puisse pas prendre de poisson dans une zone donnée et que ces poissons remontent vers l'amont dans une zone où la tessure commerciale ne peut pas aller, cette zone devient une pêcherie dans laquelle le MPO permettra à un groupe autochtone de les attraper et de les vendre. Nous avons toujours dit que ces zones devraient faire l'objet d'appels d'offres.
Il est facile de créer une pêcherie ESSR (Excess to Salmon Spawning Requirement—Surplus de saumons par rapport aux quantités de reproducteurs nécessaires) en empêchant purement et simplement la tessure extérieure de pêcher. C'est ce qui ne cesse de se répéter sur la côte. Encore une fois, M. Tobin avait promis que cela n'arriverait jamais. L'accès aux remontées tardives de saumons sockeye nous a été interdit, alors que nous avions déjà pris 2 000 d'entre eux à Weaver Creek, mais cette année il nous a été formellement interdit de pêcher même ceux-là. Au moment même où nous parlons, une pêcherie ESSR est ouverte dans l'Inlet Saanich, mais nos collègues n'ont pas le droit de s'y rendre. Cette pêcherie se trouve à un endroit où nos bateaux pourraient facilement pêcher, mais nous avons interdiction totale de nous y rendre. Je crois comprendre que vous irez à Prince Rupert dans les jours qui viennent. Plus de 500 000 saumons sockeye remontent la rivière Skeena. La tessure de senneurs et celle de bateaux à filets maillants auraient pu les attraper, mais ces poissons ont été réservés pour une pêcherie ESSR.
Nous constatons que les produits venant des pêcheries ESSR sont souvent de moins bonne qualité. Cela a en fait détruit la réputation du saumon canadien sur le marché britannique. Il nous faut à présent dépenser des sommes d'argent considérables pour rétablir l'image de marque du Canada comme producteur de saumon de la meilleure qualité.
Je ne vais pas revenir en détail sur les données présentées à la page 33, si ce n'est pour dire qu'il existe des normes à deux vitesses concernant la manière dont l'industrie de la pêche entrant dans le cadre des projets pilotes de vente, celle des bandes indiennes de Musqueam, de Tsawwassen et de la nation Sto:lo, la seule industrie de pêche commerciale, fonctionne.
Dans notre industrie de la pêche publique, nous avons le privilège de pouvoir exiger que les gestionnaires rendent des comptes au Parlement par l'intermédiaire de réunions comme celle-ci. Vous avez le pouvoir de faire venir le directeur général de la région du Pacifique et de lui poser des questions sur la manière dont il gère l'industrie de la pêche, et nous espérons que vous le ferez. Vous ne pouvez pas faire de même avec les autres industries de la pêche, car elles ne sont pas tenues de rendre des comptes au gouvernement. Même si elles gèrent une partie des ressources publiques, elles conservent un fonctionnement entièrement privé. Le Règlement général de pêche du Pacifique s'applique à notre industrie, mais, en vertu d'un accord négocié appelé accord de SPA, les autres industries peuvent tout simplement passer outre tous les règlements ayant été mis en place pour gérer efficacement les pêcheries en Colombie-Britannique depuis les cent dernières années.
Vous verrez quelques notes griffonnées à la page 34. Cela est dû au fait que je n'ai pas relu mon exposé avant et ai corrigé quelques fautes seulement aujourd'hui.
Les responsables de la pêcherie MTB, Joe Becker, Mike Baird et Sam Douglas, qui ont été condamnés pour infraction à la Loi sur la pêche, gèrent encore cette pêcherie. Les gardes-pêche autochtones responsables de cette pêcherie ont été condamnés pour infraction à la Loi sur la pêche et continuent malgré tout de la gérer. Aussi récemment qu'en 1999, l'équipe très efficace de Pêches et Océans chargée de faire respecter la loi, travaillant de concert avec un ancien garde-pêche autochtone, a arrêté Mike Baird qui tentait d'expédier des camions entiers de poisson de l'autre côté de la frontière des États-Unis. C'est la deuxième fois que Mike a été arrêté. Les membres de l'équipe de Steveston chargée de faire respecter la loi ont quand même prévu de le rencontrer pour discuter d'un plan de contrôle du respect de la loi sur ladite pêcherie, bien qu'il ait été condamné pour infraction à la Loi sur la pêche. Voilà le genre d'absurdité qui a cours dans notre industrie et nous ne pouvons toujours pas nous expliquer pourquoi il en est ainsi.
Tout agent des pêches doit signer tout un tas de documents, des déclarations sous serment, indiquant qu'il n'a aucun intérêt financier engagé dans l'industrie de la pêche, alors que ces personnes sont autorisées à la fois à contrôler que la loi est respectée dans leur pêcherie et à y attraper du poisson pour en retirer un profit. Il s'agit d'un conflit d'intérêt qui ne devrait en aucun cas être permis. Peter Pearse l'a souligné dans son rapport en 1992 et John Fraser a fait de même dans le sien en 1994, et nous voici, mesdames et messieurs, sept ans après avec les mêmes problèmes.
Cette pêcherie est grande ouverte à tout le monde. Vous pouvez venir d'Australie ou de Tombouctou et y pêcher. Vous n'avez même pas besoin d'être citoyen canadien.
• 1459
Tous les faits que j'ai cités ici ont récemment été soumis à
la cour lors d'un procès. Ils ont tous été examinés. Le juge a pris
connaissance de l'ensemble, et il s'agit d'une partie du procès sur
lequel il sera chargé de statuer. Nous sommes par conséquent
vraiment confiants concernant tous les faits que nous vous avons
exposés ici.
Il n'existe pas de restriction sur le nombre de permis ou sur la taille des navires. Notre permis coûte 100 000 $. Ils obtiennent le leur gratuitement. Nous payons des droits de renouvellement de permis de 890 $ par an. Ils ne paient aucun droit. Nous devons payer les services d'un observateur sur demande. Ils n'ont pas à le faire.
Je vais passer outre le reste.
Il existe une règle élémentaire dans l'industrie de la pêche qui veut que les pêcheries les moins bien gérées profitent des retombées économiques des efforts de conservation consentis par les pêcheries les mieux gérées. Nous nous en sommes rendus compte cette année avec l'interdiction pour la tessure publique de pêcher sur la remontée tardive. Cette protection a profité à l'industrie de la pêche autochtone. L'accès au saumon coho du Thompson supérieur a également été interdit à la même tessure dans la zone 20. Là encore, l'industrie de la pêche autochtone en a profité pour attraper ce poisson. Il en résulte que les bandes indiennes de Musqueam, de Tsawwassen et de la nation Sto:lo ont pris plus de saumon sockeye cette année que toute la tessure commerciale en Colombie-Britannique. Elles ont pris plus de saumon sockeye sur le Fraser. C'est une tragédie.
Nous espérons vraiment que ce comité va intervenir auprès du MPO, car celui-ci n'a pas cessé de nous dire pendant une décennie: «Ne vous inquiétez pas, messieurs. Nous avons fait des erreurs cette année, mais nous ferons mieux l'année prochaine.» Je suppose que les membres de ce comité originaires de l'Est connaissent bien le problème, car ils ont dû entendre les mêmes sortes de choses venant de leurs propres pêcheurs. Mais ce problème dure ici depuis dix ans. Notre industrie va mourir si nous ne le corrigeons pas; cependant, les fonctionnaires du MPO qui nous ont mis dans cette situation sont toujours en poste.
Nous allons passer rapidement aux recommandations à la page 43.
La première chose que nous voudrions voir ce comité faire est de garantir le droit public à la pêche. Ce droit puise ses origines dans la Grande Charte. Il empêche le gouvernement d'utiliser les stocks de poisson de la manière dont les contrats de publicité, les contrats de voirie et la désignation des sénateurs peuvent être traités par certains gouvernements. Cela signifie que le MPO se doit de traiter tous les Canadiens de la même manière dans l'industrie de la pêche, afin qu'ils aient tous la même chance d'obtenir un permis. Nous devons revenir à un seul type d'industrie de la pêche commerciale pour tous les Canadiens. L'idée selon laquelle le lieu de travail peut encore être divisé en 2001 en fonction des races dépasse l'entendement.
Le manque flagrant de compétences de nos hauts fonctionnaires du MPO constitue un problème majeur. Suite au conflit et aux problèmes terribles survenus au sein du ministère, de nombreuses personnes compétentes du MPO en Colombie-Britannique sont parties. Je ne surévalue pas les compétences du MPO avant 1992. Si vous regardez n'importe où en Colombie-Britannique, vous verrez qu'il y avait les meilleurs gestionnaires du monde dans le domaine du saumon. Nous étions fiers d'eux et je pense que la reconstruction des stocks a prouvé leur compétence.
Les autres recommandations sont importantes. Vous pourrez les trouver dans le document si vous voulez en prendre connaissance.
Si vous avez des questions, je serai heureux d'y répondre.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci beaucoup, monsieur Eidsvik.
Nous allons passer rapidement aux questions. Nous suivons dans un sens un certain protocole en ce qui concerne les questions. Je sais que les membres de la Colombie-Britannique sont au courant d'un grand nombre de ces problèmes. À moins qu'ils n'aient une remarque significative à formuler, nous pourrions peut-être nous tourner vers M. Wappel.
Êtes-vous prêt? Avez-vous une question?
M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.): Je peux commencer, si vous voulez.
Le vice-président (M. John Cummins): Je vous en prie.
M. Tom Wappel: Très bien, si cela convient aux membres du comité.
Je ne suis pas de l'est. Je suis en quelque sorte du centre. Donc tout ce que je sais du saumon sockeye est que j'apprécie d'en manger.
À la page 16, vous dites que le nombre de saumons sockeye du Fraser a été de 6,4 millions en 2001. Pour moi, il s'agit d'un chiffre abstrait. Cela prend-il en compte chaque poisson vivant?
M. Phil Eidsvik: Il s'agit de la taille totale de la remontée. Nous n'aurons pas les chiffres définitifs avant le printemps, car ils sont recalculés. Mais la quantité était en gros de 6,4 millions.
M. Tom Wappel: Le chiffre dont vous parlez représente-t-il le nombre de poissons qui peuvent être pêchés? Est-ce de cela dont vous parlez?
M. Phil Eidsvik: Non. Il représente la taille totale de la remontée. Vous devez retirer de cela l'échappée, ainsi que la pêche de consommation des Américains et des Autochtones; tout le surplus échoit aux tessures récréative et commerciale.
M. Tom Wappel: Parmi ces 6,4 millions, combien de poissons auraient pu être pêchés de manière commerciale?
M. Phil Eidsvik: Si vous regardez les chiffres des années précédentes, vous verrez que nous prenons en général entre deux et trois millions de poissons. Cela aurait laissé trois millions de poissons dans la nature, ce qui constitue une excellente échappée. La prise de trois millions de poissons n'aurait pas été du tout inhabituelle.
M. Tom Wappel: Alors, en fait, la prise ne représente que 10 p. 100 de ce chiffre, soit les 256 000 dont vous parliez, n'est-ce pas?
M. Phil Eidsvik: En gros. C'est à peu près exact.
M. Tom Wappel: Pouvez-vous nous dire quelles ont été les raisons ayant poussé le MPO à agir ainsi?
M. Phil Eidsvik: Nous avons beaucoup de mal à comprendre ces raisons. C'est tout simplement inexplicable. Et si vous vous reportez aux années précédentes, vous verrez que notre industrie de la pêche a été viable jusqu'en 2001, lorsqu'elle prenait trois millions de poissons par an.
Je n'ai pas d'explication, monsieur Wappel. Je suis désolé.
M. Tom Wappel: Le ministère ne vous a-t-il pas donné de raison? Vous affirmez qu'aucune raison ne vous a été donnée ou vous a-t-on donné une raison que vous ne comprenez pas?
M. Phil Eidsvik: Certains spécialistes de cette région seront d'accord avec moi et je pense qu'ils peuvent vous donner une meilleure réponse que moi, car ils sont directement en contact et participent à la gestion des pêcheries avec le MPO. Je pense qu'ils peuvent vous donner une réponse satisfaisante.
M. Tom Wappel: Votre témoignage sous-entend-il que vous ne connaissez pas la raison des agissements du MPO ou êtes-vous en désaccord avec la raison que celui-ci vous a donnée?
M. Phil Eidsvik: Si vous regardez les raisons invoquées par le MPO, elles semblent changer de jour en jour. Je suis désolé, mais je ne suis pas en mesure de vous présenter une analyse correcte de ces raisons, car elles vont dans toutes les directions.
M. Tom Wappel: Très bien. Merci.
À présent, parmi les 6,4 millions de saumons sockeye, combien ont été pris par les pêcheurs autochtones?
M. Phil Eidsvik: En gros 1,5 million.
M. Tom Wappel: Et vous affirmez que cette pêche n'a pas du tout été contrôlée par le MPO.
M. Phil Eidsvik: La majorité ne l'a pas été, non, soit 99 p. 100 des cas.
M. Tom Wappel: Très bien.
Vous devez avoir eu des discussions. Je veux dire, deux des ministres des Pêches sont d'ici, ou l'ont été, messieurs Anderson et Dhaliwal. Ils sont de la côte Ouest. Et M. Tobin est de la côte Est. Vous devez avoir eu des discussions avec eux. Que vous ont-ils dit?
M. Phil Eidsvik: En général, les pêcheurs se sont toujours mieux entendus avec les gestionnaires de la côte Est, car ceux-ci comprennent quelque chose au poisson. M. Dhaliwal, avant d'entrer dans la politique, était responsable d'un parc de limousines et d'une entreprise de nettoyage et d'entretien très prospère, alors que messieurs Tobin et Mifflin ont vécu dans des collectivités de pêcheurs et ont été plongés dans ce milieu toute leur vie. Les compétences de M. Dhaliwal sur la pêche sont extrêmement limitées. Nous n'avons pas eu de longues discussions avec lui sur le sujet, mais celles que nous avons eues ne nous ont pas satisfaits. Mais je sais qu'il a suffisamment d'intelligence pour le comprendre et pour y remédier—enfin, peut-être, s'il a le temps.
M. Tom Wappel: Je comprends que vous essayiez d'user de diplomatie, mais il ne faut pas avoir une intelligence hors du commun pour se rendre compte que les chiffres sont différents. Je me demande juste si vous avez eu des discussions dans le but de savoir pourquoi c'est le cas. Le ministre actuel, ou tout autre ministre, reconnaît-il que l'industrie de la pêche autochtone n'est pas contrôlée? Commençons par là.
M. Phil Eidsvik: Généralement, les ministres vont dire que tout va bien, que tout est entièrement contrôlé et qu'il n'existe pas de tricherie. En fait, les bureaucrates du MPO ont déclaré cette année que la situation était parfaite, alors qu'une équipe de tournage de BC TV est allée à la réserve Katzie, suite à un appel téléphonique, y a acheté illégalement du poisson à une personne autochtone et en a parlé aux nouvelles du soir à six heures. Dans le même reportage, le fonctionnaire du MPO niait qu'aucune vente illégale ait jamais eu lieu.
Je pense que les meilleures sources d'information sur le sujet sont les notes de service des différents agents des pêches qui font part de ce problème tous les ans. C'est un problème important et d'une ampleur énorme.
M. Tom Wappel: Savez-vous ce qui est arrivé à cette personne qui niait qu'il existe une pêcherie illégale, alors qu'il en existait bien une?
M. Phil Eidsvik: Elle est encore en poste et reçoit son chèque de paie régulièrement, pendant que nos pêcheurs n'ont bien entendu pas d'argent cette année.
M. Tom Wappel: Savez-vous qui est cette personne?
M. Phil Eidsvik: Il s'agit de M. Paul Ryall. C'est le gestionnaire de secteur pour le fleuve Fraser et j'aimerais que ce comité lui demande des comptes concernant les commentaires qu'il a faits cette année.
M. Tom Wappel: A-t-il reçu de l'avancement?
M. Phil Eidsvik: Non, mais Pat Chamut en a reçu. Il était responsable de cette pêcherie en 1992 et 1994. Paul Sprout a reçu de l'avancement. Donna Petrachenko, qui a géré cette pêcherie en tant que directrice générale régionale lors des cinq dernières années, a été nommée sous-ministre adjointe. Malheureusement, certaines des personnes très compétentes du MPO ont été mises à l'écart.
Nous ne sommes pas opposés à tous les bureaucrates. Il y a certains bureaucrates sensationnels au ministère, mais je suppose que les lourdeurs du système les empêchent de faire entendre leur voix.
M. Tom Wappel: Très bien.
Je ne suis pas né de la dernière pluie et je sais bien qu'il existe en général plusieurs versions d'une même histoire. Vous faites des déclarations assez catégoriques dans votre document, et je voulais vous demander de commenter «Il n'existe absolument aucun contrôle des pratiques ou du respect de la loi de la part du MPO en ce qui concerne les bateaux senneurs autochtones», apparaissant à la page 26.
M. Phil Eidsvik: Non, il n'y en a absolument pas. Rien. Nada. Pas un contrôle.
M. Tom Wappel: Pensez-vous que le MPO serait d'accord avec vous?
M. Phil Eidsvik: Oui. Peut-être que les hauts fonctionnaires ne le seraient pas, mais les agents de terrain vous diront la même chose que moi.
M. Tom Wappel: Eh bien, si un haut fonctionnaire refuse d'admettre quelque chose, il doit bien avoir une raison.
M. Phil Eidsvik: Vous supposez que les hauts fonctionnaires à qui nous avons affaire sont des individus honnêtes ayant des principes et des valeurs morales. Ce n'est pas une chose qui nous paraît évidente.
M. Tom Wappel: J'aurais besoin de preuves tangibles pour arriver à la même conclusion que vous. Vous dites que la quantité de poissons prise n'a pas fait l'objet d'un comptage, mais que les pêcheurs ont seulement eux-mêmes rendu compte de la quantité qu'ils ont attrapée. Pensez-vous que les hauts fonctionnaires seraient d'accord avec vous?
M. Phil Eidsvik: Je pense que s'ils avaient été à French Creek Seafood et qu'ils aient regardé la pompe à poisson plongée dans la cale de ce bateau, en train de décharger le poisson, de le mettre dans les caisses de transbordement et de faire ensuite circuler ces caisses sur toute l'île de Vancouver, sans la présence d'un seul agent du ministère, je crois que les hauts fonctionnaires auraient eu du mal à ne pas être d'accord avec moi. Mais je suppose qu'ils nieraient probablement qu'il existe un problème.
M. Tom Wappel: D'accord. Juste pour conclure, en théorie, moins de bateaux devait signifier plus de poissons pour moins de pêcheurs.
M. Phil Eidsvik: Tout à fait.
M. Tom Wappel: Il s'agit là de l'idée générale de cette politique.
M. Phil Eidsvik: Oui, c'en est le principe général.
M. Tom Wappel: Et vous affirmez que ce n'est pas ce qui s'est passé.
M. Phil Eidsvik: Eh bien, nous avons 470 bateaux. Sur le fleuve Fraser, ceux-ci n'ont pris aucun poisson cette année—aucun.
M. Tom Wappel: Mais l'industrie de la pêche autochtone a continué?
M. Phil Eidsvik: Oui, elle a continué.
M. Tom Wappel: Et vous dites qu'elle a assuré plus que l'autosuffisance.
M. Phil Eidsvik: Oui. Bien sûr, il existe les projets pilotes de vente. Les Autochtones ont pu en fait bénéficier d'une pêcherie commerciale sur le fleuve, où ils ont pris 269 000 saumons sockeye qu'ils ont vendus. Ces autorisations sont délivrées par le ministère. De notre côté, nous n'avons attrapé aucun poisson sur le fleuve.
M. Tom Wappel: Je suis désolé, j'ai dit que c'était ma dernière question, mais en fait ma dernière question concerne le graphique où vous montrez que vous n'avez pris aucun poisson... Où est-il?
M. Phil Eidsvik: Il est à la page 23.
M. Tom Wappel: Vous montrez à la page 23 que vous n'avez pris aucun poisson. Quelles sont les raisons d'une telle situation?
M. Phil Eidsvik: J'espère que vous le demanderez au ministère, car nous sommes complètement écoeurés par cette situation.
M. Tom Wappel: D'accord, je vous le demande: le ministère vous a-t-il donné une raison? A-t-il donné une raison valable à l'industrie? Interdire toute prise est une mesure plutôt radicale.
M. Phil Eidsvik: C'est en effet une mesure plutôt radicale.
M. Tom Wappel: En général, la raison invoquée est: «Mon Dieu, il n'y a pas de poisson. Nous devons protéger les stocks. Quelque chose n'est pas normal.» Interdire toute prise est une mesure plutôt radicale et il doit y avoir une explication. Les gens ne peuvent pas juste faire ce qu'ils ont envie de faire sans en subir les conséquences.
M. Phil Eidsvik: Monsieur Wappel, si vous étiez ici à la place des pêcheurs, vous verriez que ces personnes ont toujours fait ce qu'elles ont voulu sans l'ombre d'une raison et sans jamais avoir été inquiétées—cela a tout simplement été de la folie pure et incontrôlée pendant les dix dernières années. En tant que membre du Parlement, vous devez avoir du mal à croire qu'un ministère puisse fonctionner ainsi. Je vous garantis que, si vous aviez été ici et que vous aviez vu la réalité des choses, vous secoueriez la tête et vous demanderiez pourquoi et comment une telle ineptie a pu voir le jour.
M. Tom Wappel: Donc vous n'avez reçu aucune explication en ce qui concerne l'interdiction de pêcher que vous mentionnez à la page 23—est-ce là ce que vous affirmez?
M. Phil Eidsvik: Je n'ai pas dit cela. J'ai dit que les raisons étaient variables, selon notre interlocuteur, et jusqu'à ce jour, je ne comprends pas ces raisons, alors je préfère ne pas les énoncer, car je ne suis pas sûr de pouvoir le faire correctement. Elles changent de jour en jour. Peut-être que certaines personnes se trouvant derrière moi ont de meilleures explications.
M. Tom Wappel: Merci, monsieur le président.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci beaucoup pour ces questions perspicaces, monsieur Wappel.
Madame Tremblay.
Afin que les membres présents à l'arrière puissent suivre les débats, le comité intervient dans les deux langues officielles et nous allons entendre quelques questions en français. Merci.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ): Merci, monsieur le président.
Je vous dis franchement que j'ai essayé d'écouter cela avec beaucoup d'attention, mais j'aimerais que vous me disiez clairement, en des mots que je serai capable de comprendre, quel est le problème. Voulez-vous dire que le MPO ne vous a pas permis de pêcher alors qu'il y a du poisson que les autochtones pêchent? Quel est le problème au juste? Expliquez-moi cela en des mots simples.
[Traduction]
M. Phil Eidsvik: Pourquoi le MPO ne nous a-t-il pas laissé pêcher cette année? Pour parler en termes simples—et encore une fois, j'essaie de répondre à la question de M. Wappel—on nous a donné tout un tas d'excuses qui ne semblent pas avoir beaucoup de sens et il n'existe peut-être pas de raison valable derrière tout cela. C'est le genre d'absurdité que je ne saurais expliquer. Peut-être pourrez-vous obtenir des explications de la part du ministère? Ne pas nous laisser pêcher cette année a été une décision totalement absurde. Je ne suis pas capable de trouver une raison valable étayant cette décision—non, vraiment, j'en suis incapable. Vous me demandez de justifier les actions du MPO, alors que celui-ci a agi d'une façon dénuée de tout sens. Comment justifier les actions d'une personne au comportement absurde? C'est pourquoi je ne peux pas vous donner d'explication claire sur ce sujet. Peut-être que, lorsque votre comité sera en présence des fonctionnaires du ministère, ceux-ci seront en mesure de vous expliquer leur façon absurde d'agir, mais pour ma part, madame Tremblay, j'en suis incapable.
Mme Suzanne Tremblay: Vous avez moins de bateaux de pêche. Les bateaux ont des permis. Quand les permis ont-ils été retirés? Quand avez-vous appris que vous n'auriez pas le droit de pêcher cette année?
[Traduction]
M. Phil Eidsvik: Les prévisions d'avant-saison concernant la remontée de cette année étaient bonnes. Nous avions anticipé qu'elle serait importante et, après trois ou quatre ans de pêche très médiocres, nous pensions que, cette année, nous pourrions enfin rembourser un emprunt en attente, consacrer peut-être un peu d'argent à la réparation de nos bateaux et peut-être avoir un peu d'argent supplémentaire pour en profiter avec notre famille. Nous pensions que nous pêcherions jusque vers le début du mois d'août—notre pêcherie commence ses activités ici vers la première semaine d'août—puis tout d'un coup, le MPO a déclaré: «Non, vous ne pourrez pas pêcher.» et n'en a pas démordu. Le mardi, il nous a dit: «Ne vous inquiétez pas, vous pourrez pêcher mercredi.» Le mercredi, il nous a dit: «Ne vous inquiétez pas, vous pourrez pêcher jeudi.» et ainsi de suite chaque jour pendant tout l'été—pendant tout le mois d'août.
Il y a même eu un moment où le MPO nous a garanti que nous pourrions pêcher le mardi, et nous nous sommes tous précipités sur le fleuve dans nos bateaux. Des bateaux de transport remontaient le fleuve pour nous livrer de la glace afin que nous puissions charger le poisson le jour suivant. Dans les usines de transformation, les ouvriers étaient prêts à venir travailler le lendemain matin à huit heures, et tout d'un coup, le MPO a annulé l'ouverture de la pêcherie. Voilà la série d'événements que nous avons dû subir cette année; cela dépasse l'entendement.
La patience dont ont fait preuve les professionnels est exemplaire... Sur la côte Est, la moitié des bureaux des agents des pêches en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick auraient probablement été incendiés à l'heure qu'il est, si une telle situation s'était produite là-bas; les pêcheurs n'auraient pas toléré ce que nous avons dû supporter ici.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Les poissons voyagent. Dans la décision du MPO, pourrait-il y avoir quelque chose de relié aux États-Unis, des pressions qui seraient venues des États-Unis?
[Traduction]
M. Phil Eidsvik: Les Américains s'inquiètent en fait actuellement autant que nous des agissements du MPO, car nous avons passé un accord à long terme avec eux. Ils reçoivent un pourcentage de la prise chaque année—dans le surplus de poissons—et nous recevons notre propre pourcentage. Un organisme fédéral conjoint canado-américain s'occupe de faire respecter cet accord et s'assure que chaque pays reçoit sa part. En ce qui concerne les moyens de pression, les Américains n'en ont pas utilisé, si ce n'est en demandant au MPO: «Pourquoi ne pêchons-nous pas?» S'il n'y a que 100 poissons à attraper et qu'ils reçoivent 18 p. 100 du total, ils se retrouvent avec seulement 18 poissons. Nous recevons le reste. S'il y en a 10 000 à attraper, 1 800 leur reviennent. Ils sont donc logés à la même enseigne que nous.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: S'il y a eu une remonte significative et intéressante, quel peut être l'impact du fait qu'on vous a interdit de pêcher cette année?
[Traduction]
M. Phil Eidsvik: Avant 1992, l'industrie de la pêche sur le fleuve Fraser produisait environ 150 millions de dollars par an. Cette année, elle a produit 1,5 million, soit environ 1 p. 100 du niveau d'autrefois, et encore s'agit-il d'un chiffre moyen. Vous pourriez dire, si vous raisonnez en termes de fabriques de pâte à bois, que nous avons perdu cette année l'équivalent de la masse salariale de trois fabriques, si l'on considère les chiffres d'une année moyenne. Cette année, comme la taille de la remontée était plus faible, ce chiffre est bien entendu plus faible. Je pense qu'un peu plus tard, des pêcheurs viendront vous dire les conséquences que cela a eues sur leur vie personnelle.
Merci, madame Tremblay.
Le vice-président (M. John Cummins): Monsieur Cuzner.
M. Rodger Cuzner (Bras d'Or—Cape Breton, Lib.): Merci beaucoup.
• 1519
Je regarde votre exposé et me demande aussi quelles sont les
raisons d'un tel casse-tête. Il est clair que, sur la côte Est,
nous avons connu quelques années tumultueuses à cause des stocks de
morue et je ne sais quoi encore. Je pense que tous nos
professionnels de la pêche se sont ralliés à nos décisions, car les
solutions scientifiques étaient évidentes. Ce que vous nous montrez
ici est que la biomasse semble être en bon état et que les stocks
paraissent être relativement en bonne santé et en bon nombre, mais
qu'il n'existe pas de corrélation entre ce fait et les décisions
qui sont prises. La situation est donc différente de ce que nous
avons vécu sur la côte Est.
J'ai deux questions, si je peux me permettre. Pour ce qui est de la première, c'est parfait si vous vous sentez compétent pour y répondre; sinon, peut-être que l'un des intervenants suivants le fera.
Pouvez-vous chiffrer en dollars les conséquences de cette situation sur les industries secondaires—c'est-à-dire sur le secteur à valeur ajoutée, les transformateurs? Vous pouvez répondre si vous vous sentez compétent sur le sujet; sinon, je reposerai la question plus tard.
• 1524
L'autre question concerne la situation où vous vous trouvez à
présent. Je suppose que, depuis l'affaire Marshall, la situation
est différente ici. Depuis l'affaire Marshall, sur la côte Est,
nous avons fait de grands progrès. Certaines bandes autochtones ont
signé des accords parfaitement viables. Ils ne sont pas encore
complets, mais je pense qu'ils tiennent compte des aspects liés à
la conservation. Certains progrès ont été accomplis et je pense que
nos professionnels de la pêche non autochtones s'en rendent
également compte.
Si j'en crois ce que vous me dites, s'il n'existe aucun contrôle ou rien de ce genre, c'est comme charger Charles Manson de s'occuper des couteaux-scies. Si quelqu'un possède un intérêt direct et tire un profit de la pêche des stocks et qu'en même temps, il fait partie de l'équipe de gestion qui est normalement responsable de la conservation de ces mêmes stocks, j'ai bien peur que la situation ne devienne vite préoccupante. Votre organisation a-t-elle également présenté cet aspect des choses devant les tribunaux? Si c'est le cas, où en est-on?
M. Phil Eidsvik: Je vous répondrai en premier sur les conséquences de la situation présente sur le secteur à valeur ajoutée. Malheureusement, la seule partie qui manque dans l'exposé d'aujourd'hui concerne justement le secteur de la transformation. Je peux très rapidement vous donner deux brefs éclaircissements sur ce point.
Comme nous nous attendions à avoir une assez bonne remontée cette année, le secteur de la transformation a beaucoup investi au Japon, bien avant le début de la saison, pour développer des marchés là-bas. Nous n'étions plus sur le marché japonais depuis plusieurs années. Cette année, les professionnels de la transformation ont encore promis de livrer du poisson, mais ont dû téléphoner aux clients japonais à la mi-août pour leur dire: «Nous sommes désolés, mais nous ne pouvons pas tenir notre promesse; nous ne pourrons pas vous livrer de poisson.» La réponse des Japonais a été: «Vous nous avez promis du poisson pendant deux des trois dernières années et, dans les deux cas, vous ne nous l'avez pas livré. Ce n'est plus la peine de nous contacter. Nous allons acheter notre poisson en Alaska; nous allons nous approvisionner ailleurs.»
• 1529
J'espère que ce comité aura l'occasion d'entendre les
commentaires du secteur de la transformation à un moment donné.
D'une manière générale, en faisant une estimation rapide, si je reçois 10 $ pour un poisson, la valeur de ce poisson au moment de la vente en gros est d'environ 20 $. Il est important de souligner que pratiquement tous nos revenus générés par le saumon proviennent des marchés à l'export. L'industrie de la pêche en Colombie-Britannique rapporte environ 1 milliard de dollars pour une année normale, dont 800 millions proviennent des marchés à l'export. Ces revenus sont des devises que les autres pays versent au Canada.
En ce qui concerne l'affaire Marshall, nous savons qu'il existe des problèmes de mise en place du programme sur la côte Est, mais le modèle que vous utilisez là-bas a vu le jour ici en 1968. Nous avions alors dit que, pour augmenter la participation des Autochtones à l'industrie de la pêche, le gouvernement devrait acheter des bateaux et des permis en Colombie-Britannique et en faire profiter des groupes autochtones pour qu'ils les utilisent au sein d'une industrie de la pêche unique, avec des règles uniques. Cette initiative a été couronnée d'un grand succès.
En 1992, ce modèle a été aboli au profit de celui créant une industrie de la pêche à deux vitesses, avec des jours de pêche séparés et des règles à la carte. Ce mal qui ronge notre industrie est toujours présent aujourd'hui. Certains bureaucrates de la côte Est ont affirmé qu'il s'agissait d'un assez bon modèle, mais je sais qu'il n'y a pas été adopté, et cela pour une bonne raison: les pêcheurs de là-bas ne l'accepteraient tout simplement pas.
Vous pouvez augmenter la participation des Autochtones à l'industrie de la pêche et le faire d'une manière honorable et juste pour tout le monde avec des règles de pêche identiques pour tous.
Cela répond-il à votre question?
M. Rodger Cuzner: Êtes-vous actuellement en train de remettre en question les institutions en ce qui concerne la situation présente avec le...?
M. Phil Eidsvik: Nous aimerions remettre en question les modalités du contrôle du respect de la loi, mais c'est un processus très difficile et très coûteux.
Pour donner une dimension humaine à tout cela, les agents des pêches ont un très bon bureau ici à Steveston, avec neuf fonctionnaires qui y travaillent. Ils sont en charge d'une zone qui s'étend sur une très grande partie de la côte. Ils sont responsables d'une grosse partie du Lower Mainland. Leur zone d'action représente la plus grande pêcherie de la Colombie-Britannique, en termes de nombre de professionnels. Leur budget est de 1 million de dollars. Les bandes de Musqueam et de Tsawwassen reçoivent 407 000 $ pour gérer leur minuscule pêcherie. Vous savez, le MPO ne dispose que d'une certaine quantité d'argent.
Au train où les choses vont aujourd'hui, nous aimerions licencier tous les fonctionnaires à Ottawa, et remplacer chacun d'entre eux par un agent des pêches ici en Colombie-Britannique. Je pense qu'il s'agit d'une plainte populaire—le manque d'agents des pêches et le manque de contrôle du respect de la loi. Nous pensons que c'est quelque chose que le MPO ferait bien, s'il obtenait les fonds suffisants et l'appui de ses hauts fonctionnaires.
Je ne peux rien dire de mieux.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci.
Monsieur Peschisolido, s'il vous plaît.
M. Joe Peschisolido (Richmond, Alliance canadienne): Je voudrais remercier M. Eidsvik pour son excellent exposé.
Comme dans le cas de messieurs Wappel et Cuzner, les raisons de l'interdiction de pêcher me laissent rêveur.
S'agirait-il d'une décision politique? Vous avez parlé avec beaucoup de diplomatie. Vous n'êtes pas allé plus loin. Est-il possible que les raisons ou les intentions de ces actions soient de décourager l'industrie de la pêche commerciale jusqu'à un point où seule l'activité de pêche autochtone subsisterait sur le Fraser?
M. Phil Eidsvik: Il s'agit certainement là d'une crainte de l'industrie. Si vous regardez la situation d'une région comme celle du Fraser cette année, où la collectivité autochtone a pu pêcher de manière commerciale alors que nous en avons été empêchés, vous ne pouvez que vous demander: «Quels sont les raisons sous-jacentes de cet état de fait?»
Vous vous plaisez à penser qu'en 2001, un gouvernement est incapable de bafouer de façon aussi flagrante les valeurs de la société canadienne et qu'il traite tout le monde de la même manière en matière d'activités commerciales, d'une manière juste et équitable. Cependant, la situation laisse à penser que nous avons été traités avec mépris et que l'on nous a envoyés promener, pendant que les poissons étaient redistribués. Si vous consultez les données concernant les prises dans les 10 dernières années, vous verrez que les chiffres concernant les Autochtones sont montés en flèche. Il existe une inversion des tendances: leurs chiffres augmentent et les nôtres diminuent.
M. Joe Peschisolido: Mais vous pensez que si le ministère suit vos recommandations, il pourrait exister une industrie de la pêche qui pourrait convenir à tout le monde sur le fleuve?
M. Phil Eidsvik: Si vous revenez en arrière, l'industrie de la pêche commerciale était viable jusqu'en 1992. D'année en année, nous avions reconstruit le stock. Si vous regardez les chiffres de 1961 à 1992, l'échappée nette n'a pas connu d'augmentation seulement cinq fois en 30 ans. Cela montre l'engagement des professionnels à assurer un moyen d'existence pour tous. Depuis 1992, nos objectifs concernant l'échappée n'ont pas été atteints au moins la moitié du temps. Une grande incertitude règne sur l'industrie de la pêche.
M. Joe Peschisolido: Merci, monsieur le président.
Le vice-président (M. John Cummins): Monsieur Stoffer, l'enfant chéri de Richmond, représentant élu d'Halifax, membre du Parlement.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Merci.
Je voudrais simplement dire à vous tous qu'il est merveilleux d'être de retour à la maison. Pour ceux qui l'ignorent, ma mère vit à quelques maisons d'ici, et c'est ici que j'ai grandi et pêché les jeunes saumons à partir des dunes de Steveston tout près d'ici. Nous avions l'habitude d'aller dîner au Buccaneer Hotel et d'aider les pêcheurs à décharger leurs bateaux en échange de quelques poissons pour le souper. C'est merveilleux d'être de retour.
Je dois dire, monsieur, que depuis quatre ans que je fais partie de ce comité, l'exposé d'aujourd'hui est probablement l'une des attaques les plus fortes et les plus virulentes qu'aucun intervenant ait jamais faite à l'encontre du ministère. Vous dites ici très clairement à la page 15 que celui-ci est engagé dans une tentative délibérée visant à détruire la pêche commerciale publique et récréative en Colombie-Britannique. Puis vous récidivez en déclarant à la page 28 que les «bureaucrates ont transformé les ministres en menteurs».
Je ne suis pas ici pour défendre la bureaucratie de quelque manière ou forme que ce soit, car nous l'avons nous-mêmes combattue pendant longtemps sur la côte Est et dans le Canada central, mais demain nous allons rencontrer le Dr John Davis que vous connaissez. Nous allons lui demander sans ambages: «Monsieur, en 2001, la remontée était semblable à celle de 1987, mais aucun bateau n'a été autorisé à pêcher. Pour quelle raison?» Que pensez-vous qu'il va nous répondre?
M. Phil Eidsvik: Ce que je pense qu'il vous répondra est que...
M. Peter Stoffer: D'accord, c'est bien.
M. Phil Eidsvik: Je suis désolé.
Une voix: J'espère que vous avez remarqué ce long silence.
M. Peter Stoffer: Monsieur Eidsvik, je suis d'accord avec M. Wappel.
M. Phil Eidsvik: Je pense que si vous demandez à n'importe qui d'autre que lui, personne ne pourra vous fournir d'explication.
M. Peter Stoffer: Je lui demanderai.
Monsieur Eidsvik, je suis d'accord avec M. Wappel. Depuis longtemps, l'accès à certaines pêcheries de la côte Est a été parfois interdit. Chaque fois qu'une fermeture intervient, elle est annoncée par écrit. Le document faisant part de l'interdiction de pêcher explique la raison de cette interdiction.
Un document écrit a-t-il été adressé soit à vous, soit aux professionnels, soit aux senneurs, soit aux propriétaires de bateaux à filets maillants, expliquant pourquoi ils n'étaient pas autorisés à pêcher? Vous avez dit au cours de votre intervention que le MPO vous avait annoncé que, oui, peut-être vous pourriez pêcher demain ou peut-être la semaine prochaine, ou peut-être demain. Vous avez même dit que certains employés du MPO vous avaient garanti que vous pourriez pêcher. Avez-vous une trace écrite de tout cela?
M. Phil Eidsvik: Oui, il existe une quantité assez importante de documents écrits conservés par le groupe d'étude sur le Fraser. Je pense que les membres de ce groupe d'étude—il s'agit de l'organisme conjoint canado-américain responsable de l'industrie de la pêche dans la région—vont vous donner quelques informations sur ce sujet.
Je pourrais répéter devant ce comité quelques-unes des raisons que le MPO nous a données.
M. Peter Stoffer: Non.
M. Phil Eidsvik: Le MPO dira que nous n'avons pas été autorisés à pêcher à cause des remontées tardives. Pourtant, en même temps, une pêcherie de senneurs autochtones et une pêcherie entrant dans le cadre des projets pilotes de vente puisaient abondamment dans cette remontée tardive. C'est absurde.
M. Peter Stoffer: Je comprends cela. Mais si je suis pêcheur ici à Steveston et que j'ai un permis, disons que je suis senneur, j'ai payé une grosse somme pour obtenir mon permis et je veux aller pêcher, lorsque le MPO me dit que je ne peux pas le faire, me le dit-il oralement ou par écrit?
M. Phil Eidsvik: Généralement, il s'agit d'une simple note à nature réglementaire envoyée pour indiquer que la pêche ne sera pas ouverte. Vous appelez un numéro de téléphone particulier ou vous consultez le site Web; l'on vous dit que la pêche est toujours fermée et l'on vous demande de rappeler lundi. Si elle est toujours fermée le lundi, vous rappelez le mercredi.
M. Peter Stoffer: Monsieur le président, pour que les choses soient claires, serait-il possible de se procurer des copies de ces documents pour les garder à titre d'information?
Si le ministère a forcé les pêcheurs à rester à quai pendant une saison entière de pêche, il doit y avoir une raison. Des documents écrits doivent étayer cette décision. Si j'oblige quelqu'un à fermer son industrie, je dois lui dire pourquoi par écrit, qu'il s'agisse d'un problème de conservation des stocks, d'attribution du poisson à quelqu'un d'autre, ou pour une foule de raisons. Je mettrais cela par écrit. J'ose espérer que le MPO fait de même.
Je poserai la question demain à M. Davis et j'espère qu'il nous donnera une réponse. Mais les gens qui ont payé leurs permis, les pêcheurs ont-ils reçu un remboursement s'ils n'ont pas pu pêcher?
M. Phil Eidsvik: Non, aucun remboursement n'a été fait, aucune offre d'indemnité, aucune excuse, aucun remerciement.
M. Peter Stoffer: Combien coûte au propriétaire d'un bateau à filets maillants le permis pour la saison?
M. Phil Eidsvik: Cela dépend de...
Le vice-président (M. John Cummins): Environ 800 $.
M. Peter Stoffer: Est-ce vraiment 800 $?
M. Phil Eidsvik: Oui, 800 $.
M. Peter Stoffer: Et pour un senneur?
M. Phil Eidsvik: Pour un senneur, je pense que c'est environ 4 000 $, peut-être 3 800 $.
M. Peter Stoffer: Et vous achetez un permis tous les ans, n'est-ce pas?
M. Phil Eidsvik: Vous payez un droit de renouvellement, mais le gros de l'investissement est l'acquisition du permis lui-même.
M. Peter Stoffer: Absolument.
M. Phil Eidsvik: Mon permis, avec le paiement duquel je suis encore en train de batailler, m'a coûté 125 000 $.
M. Peter Stoffer: Avec l'arrivée du plan Mifflin, vous avez dû accumuler les permis pour pouvoir pêcher dans d'autres zones, n'est-ce pas?
M. Phil Eidsvik: J'ai bien peur d'avoir commis une idiotie. J'ai acheté mon permis en 1997 car le ministre avait promis une industrie de la pêche viable; comme je n'avais pas assez d'argent moi-même, deux partenaires m'ont aidé à réunir 125 000 $. Notre revenu total découlant de l'achat de ce permis depuis 1997 dépasse à peine les 30 000 $. Et je parle de quatre années de pêche...à peine plus de 30 000 $ pour un investissement de 125 000 $.
M. Peter Stoffer: Monsieur, vous avez dit que, lorsque le plan de revitalisation était en place, le groupe auquel vous apparteniez était divisé sur la question de la réduction de la tessure.
M. Phil Eidsvik: Tout à fait.
M. Peter Stoffer: Mais vous n'avez pas pris position, ou vous n'avez pas plus ou moins participé au débat?
M. Phil Eidsvik: Non.
M. Peter Stoffer: Je vous demande pourquoi vous ne l'avez pas fait. Vous vous êtes mis en retrait et avez observé le déroulement des événements, de toute évidence, alors que votre groupe était divisé, n'est-ce pas?
M. Phil Eidsvik: Oui, car si vous prenez un groupe de 100 personnes que vous mettez dans une pièce pour discuter d'un problème, vous aurez forcément des désaccords. Notre coalition est la plus importante coalition défendant les intérêts de l'industrie de la pêche, et nous restons unis en concentrant nos efforts sur la seule défense de ces intérêts. Si nous avions pris position sur ce problème, la moitié de mes adhérents aurait voulu m'étriper, alors que l'autre moitié m'aurait félicité, et ce n'est pas là une façon appropriée d'assurer la survie d'une association.
M. Peter Stoffer: Juste pour y voir plus clair, y a-t-il des groupes ou des individus autochtones faisant partie de votre coalition?
M. Phil Eidsvik: Oui, certainement. En fait, parmi environ 160 accusés du procès dans lequel nous sommes engagés, un certain nombre sont autochtones. Deux Autochtones ont témoigné à la cour en notre faveur, et l'un d'eux a dit: «Je suis venu protester car les plans du gouvernement devaient être destinés aux Autochtones, et je suis moi-même Autochtone. Le gouvernement ne cesse de dire qu'il fait des choses pour les Autochtones. Je suis moi-même Autochtone, mais lorsque je suis allé là-bas, je me suis fait arrêter.»
M. Peter Stoffer: Monsieur, vous dites que des groupes autochtones le long du fleuve, comme la bande indienne de Musqueam et d'autres groupes, attrapent ce poisson. À qui le vendent-ils?
M. Phil Eidsvik: Une partie de ce poisson part de l'autre côté de la frontière; une partie est vendue aux transformateurs; une partie est vendue dans des sacs poubelle verts aux voisins...
M. Peter Stoffer: Ces groupes sont-ils autorisés à vendre de l'autre côté de la frontière? Est-ce légal?
M. Phil Eidsvik: Ils sont supposés le décharger et le faire compter à un certain endroit, mais le poisson se retrouve à peu près partout.
M. Peter Stoffer: Concernant la vente de l'autre côté de la frontière... Je me souviens, monsieur le président, que vous aviez soulevé ce problème devant notre comité il y a un an ou deux, je crois, en nous racontant comment un bateau avait été suivi et comment il était allé...
Est-ce légal de vendre du poisson de l'autre côté de la frontière, à votre avis, ou faut-il un permis pour le faire?
M. Phil Eidsvik: Je sais que du poisson est exporté de l'autre côté de la frontière, mais je ne connais pas bien les règlements concernant cette pratique. Je ne pourrais vous donner une réponse précise, car je n'en sais pas assez sur le sujet.
M. Peter Stoffer: Merci.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci, monsieur Stoffer.
Le comité a-t-il d'autres questions?
Merci beaucoup, monsieur Eidsvik. Vous avez sans aucun doute fait un exposé très instructif. Et je remercie également le comité d'avoir posé quelques questions très perspicaces.
M. Phil Eidsvik: Je voudrais remercier le comité.
Le vice-président (M. John Cummins): L'intervenant suivant est Mike Forrest, également de la zone E. Mike est intervenu devant le comité au printemps dernier. Le comité s'en souvient sans aucun doute. Il a passé un bon nombre d'années à la Commission internationale.
La parole est à vous, Mike.
M. Mike Forrest (témoignage à titre personnel): Merci beaucoup. Merci à tous d'être venus ici. Vous vous souvenez peut-être de ma présence devant vous au printemps dernier.
Depuis à peu près les 100 dernières années, l'industrie de la pêche au saumon du fleuve Fraser a permis à des centaines de familles comme la mienne de gagner leur vie le long du fleuve. Les Autochtones et les non-Autochtones ont toujours pêché dans les mêmes eaux sans penser que personne n'avait droit à plus qu'à l'égalité des chances pour survivre dans cette industrie. En quelque sorte, depuis peu, notre bateau coule et nous sommes en train de nous noyer, pendant que le gouvernement nous regarde sans proposer la moindre aide pour que nous puissions redresser la barre.
Mes racines et mon moyen de subsistance m'ont été arrachés et redistribués à d'autres sur la base de leur origine ethnique. Cette situation est très difficile pour moi en tant que pêcheur, en tant que personne ayant grandi sur la côte. Le fleuve Fraser coule dans mon sang autant que dans celui de quelqu'un d'autre. Je suis absolument scandalisé d'être mis dans cette situation après avoir participé toute ma vie de façon responsable à cette industrie de la pêche.
Vous connaissez mes références. J'ai été membre pendant quatre ans de la Commission internationale des pêcheries de saumon du Pacifique de 1981 à 1985. J'ai fait partie du groupe d'étude sur le fleuve Fraser de la Pacific Salmon Commission de 1986 à 1999. J'en ai été exclu à cause de mes commentaires concernant les pêcheries autochtones et le processus que M. Anderson mettait en place.
J'ai essayé d'agir de façon responsable toute ma vie dans cette industrie, depuis les années 60 et le rapport de Sol Sinclair, puis sous le mandat de Pearse, Tobin, Mifflin, etc, etc, jusqu'à l'écoeurement. Personne n'a un plus grand sentiment d'abandon que ma famille et moi-même, concernant ce qui s'est passé ici, le fait que nous n'ayons pas le droit de pêcher parce que nous ne correspondons pas à la définition gouvernementale du mot autochtone.
• 1544
Pendant 60 ans, nous avons su protéger et reconstruire le
stock de saumons sockeye et autres du Fraser, ainsi qu'une
industrie de la pêche forte et viable. La gestion de la pêche
supposait d'avoir les compétences d'établir un équilibre entre les
quantités pouvant être pêchées et l'échappée, alors que, de nos
jours, la seule méthode de gestion qui nous est imposée est la
fermeture. Le poisson descendait dans la mer, puis s'en retournait;
nous analysions les besoins en reproducteurs, en poisson de
consommation pour les Autochtones et pour nos amis américains, et
ensuite, nous étions autorisés à utiliser le reste pour la pêche
commerciale.
Phil a expliqué de façon assez spectaculaire, je dois dire, et très précise, l'historique des dix dernières années environ, qui nous ont conduits à la situation actuelle. Nous avons le droit en principe de pêcher les surplus de saumons par rapport aux quantités de reproducteurs nécessaires et, par conséquent, à pêcher dans les stocks définis comme le total des prises autorisées. Or, en 2001, nous avons eu interdiction de pêcher, alors que d'autres ont pêché chaque fin de semaine sous notre nez, d'avril à août, au moins deux jours par semaine. Et l'on nous dit qu'il s'agit d'un problème de conservation et que c'est la raison pour laquelle nous n'avons pas pu pêcher.
L'année 2001 a été un désastre complet. Je ne peux vous l'expliquer en des termes plus simples. Je ne sais pas comment vous pouvez vous mettre à ma place, mais imaginez-vous assis sur le quai avec vos filets sur le treuil, votre bateau prêt pour la pêche, la promesse que vous allez pouvoir pêcher grâce à votre permis en bonne et due forme, et vous voyez quelqu'un d'autre en face du quai en train de prendre le saumon que vous êtes supposé avoir le droit d'attraper, et le vendre pendant que vous êtes obligé de le regarder. C'est comme cela qu'il faut comprendre notre situation.
Mesdames et messieurs, vous devez essayer de vous mettre à notre place, nous les pêcheurs d'ici, car c'est la situation que nous sommes en train de vivre. Il est impossible d'expliquer la réaction viscérale que l'on ressent, lorsque l'on a pêché toute sa vie et que l'on a été élevé dans le milieu de la pêche, quand un décret gouvernemental vous oblige à rester à quai et à regarder quelqu'un d'autre pêcher, et cela sans aucune raison. Il n'y a pas de problème de conservation. Si quelqu'un est autorisé à pêcher, c'est qu'il ne s'agit pas d'un problème de conservation. La conservation est une priorité qui passe avant la pêche de consommation et avant la réattribution à d'autres.
La saison a commencé par la signature d'accords avec des bandes autochtones. Je vous renvoie à l'exposé que je vous ai présenté l'an dernier ou au début de cette année. Cet exposé sur le poisson de la rivière Adams, et un retour précoce sur la rivière Adams...un retour précoce de la remontée tardive aura lieu en 2002, exactement comme nous l'avons indiqué. Les résultats sont restés théoriques en 2001, car nous n'avons pas pu pêcher. Nous n'en avons pas eu le droit. D'autres l'ont fait. D'autres ont été autorisés à pêcher, mais pas nous.
Un retour précoce aura lieu en 2002. La rivière Adams aura une remontée dominante en 2002. Si un retour précoce du poisson de la rivière Adams a lieu en 2002 et que nous ayons à subir les mêmes absurdités qu'en 2001, la tessure entière sera encore immobilisée alors que le poisson mourra avant de pouvoir se reproduire. Nous devons faire mieux que cela.
Nous avons signé des accords au début de l'année, en fait, vers le milieu de l'année, avec les collectivités autochtones. Vous devez comprendre que ces accords permettent aux Autochtones de pêcher dans les eaux du fleuve Fraser pour leur poisson de consommation...et de transformer du poisson de consommation en poisson destiné à la vente et vice versa et je ne sais quoi encore. Selon la politique du MPO, la partie concernant les ventes pilotes, si celles-ci existent—et elles ont bel et bien existé cette année—ne constitue pas un privilège. Elle est distribuée et réglementée de la même façon que n'importe quelle autre pêche commerciale.
C'est écoeurant. Je ne suis pas d'accord avec ces déclarations, car, en réalité, la politique du MPO a été d'établir ces ventes pilotes et de prétendre qu'elles n'étaient pas plus privilégiées que la pêche commerciale; pourtant, les pêcheries permettant ces ventes pilotes reçoivent du poisson avant que nous soyons autorisés à pêcher, et elles ont une réglementation différente, pas de réglementation ou une réglementation laxiste, qui ne se préoccupe pas le moins du monde si le reste d'entre nous peut pêcher.
• 1549
Ils pêchent en premier, nous pêchons ensuite—si nous pêchons.
Dans le cas présent, ils ont pêché trois fois cette année et nous
n'avons pas pêché une seule fois. Et l'on prétend qu'il n'existe
pas de privilèges?
Il leur est demandé de ne pas avoir de viviers afin de préserver les saumons coho et les saumons arc-en-ciel. Nous devons dépenser des centaines de dollars pour acheter des viviers. Nous les avons tous avec nous sur le bateau. Ils sont restés là toute l'année et nous n'avons même pas utilisé ces sacrées caisses. Les Autochtones ont pêché en toute impunité, sans avoir à suivre aucune de ces règles.
Le reclassement des pêcheries autochtones a été à sens unique cette année. Elles sont invariablement passées de pêcheries de consommation en pêcheries destinées à la vente. S'agissant du poisson de consommation, nous avons par le passé été en faveur des pêcheries de consommation en vertu du droit autochtone, conformément à l'article 35. Cela ne nous dérange pas du tout, en fait. Mais il est intolérable que le poisson de consommation devienne tout d'un coup du poisson destiné à la vente et vice versa, dans le seul but de protéger cette pêcherie, alors que nous ne sommes pas autorisés à pêcher. Car si une pêcherie permettant ces ventes pilotes est mise en place, il doit s'établir une concurrence loyale; par conséquent, si une telle pêcherie voit le jour, une pêcherie commerciale doit être autorisée.
Trois pêcheries permettant ces ventes pilotes ont été recensées cette année. Non, officiellement, elles n'effectuaient pas de ventes pilotes; c'étaient des pêcheries de consommation. Désolés, nous avons fait erreur sur ce sujet, et c'est pour cela que vous n'avez pas eu de pêcherie commerciale.
Il existe des tas de problèmes de gestion des pêcheries que je pourrais vous présenter un par un. Cela fait déjà longtemps que je vous parle de ce processus de gestion des pêcheries. Je n'aborderai donc avec vous que quatre ou cinq points spécifiques.
Les projets pilotes de vente doivent être abandonnés. Vous devez vérifier que le gouvernement met un terme à ces projets. N'accordez pas des droits commerciaux sur la base des origines ethniques. Cette pratique fait régresser le Canada. Le Canada auquel je crois ne distribue pas des droits de pêche, qu'elle soit commerciale ou autre, en fonction des origines ethniques. Il devrait exister une seule industrie de la pêche commerciale. Achetez les bateaux. L'affaire Marshall a été discutée, et bien d'autres... Comme nous l'avons suggéré depuis longtemps, achetez les bateaux et tous les pêcheurs pourront pêcher ensemble dans le cadre de la même industrie et non dans deux industries séparées.
Arrêtez d'inclure des accords garantissant des quantités de poisson dans les attributions de ressources des traités que vous signez. Le service fédéral des pêches vient récemment d'inclure une attribution de ressources au traité signé localement entre la bande de Tsawwassen et le gouvernement fédéral. Trois parties étaient en présence autour de la table: le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial et les Autochtones. Le gouvernement fédéral a accordé une attribution de ressources dans le cadre d'un accord garantissant une quantité de poisson qui, si elle est garantie de la même manière dans les autres traités le long du fleuve Fraser, signifie que les stocks ne seront pas suffisants pour honorer tous les traités, sans même parler des autres Canadiens, des pêcheurs commerciaux comme moi, des adeptes de la pêche récréative ou de toute autre personne. Avant même qu'elles aient pu remonter le fleuve, quelqu'un va dire à ces personnes: «Désolé, je n'ai pas attrapé mon poisson de consommation; je m'en vais pêcher de toute façon.»
Vous savez quoi? Vous allez détruire vos ressources, car vous avez accordé des quantités de poisson trop importantes dans le cadre de l'attribution de ressources, et le reste d'entre nous mettra la clé sous la porte.
Le déclenchement de ventes pilotes est dangereux. Vous devez savoir ce qui déclenche les ventes pilotes d'aujourd'hui. Actuellement, des accords sur les ventes pilotes peuvent être déclenchés sur le fleuve Fraser par une pêcherie située à 200 milles. Si une attribution de ressources est accordée, un total des prises autorisées est défini et l'activité de la pêcherie du fleuve Fraser permettant ces ventes pilotes peut être déclenchée sur du poisson n'ayant rien à voir avec la prise située à 200 milles; vous pêchez dans différents stocks dans le fleuve Fraser à ce moment précis. Vous permettrez à des pêcheries de puiser dans des stocks ne pouvant supporter un prélèvement aussi important et vous surexploiterez les ressources, si vous conservez les projets pilotes de vente actuellement en vigueur.
Vous devez séparer les pêcheries de consommation et celles destinées à la vente sur le fleuve Fraser, sur la côte de la Colombie-Britannique et probablement aussi sur la côte Est.
Enfin, je voudrais que vous me rendiez mon moyen de subsistance et mes racines. Je voudrais que vous participiez à ce que moi-même et de nombreuses personnes assises derrière moi avons essayé de construire pendant à peu près 30 ans: une dynamique positive assurant pour chacun d'entre nous la pérennité et l'avenir économique de ces ressources.
Nous n'allons actuellement pas dans cette direction, mesdames et messieurs, mais nous nous enfonçons de plus en plus profondément. Je voudrais que vous me rendiez mes racines. Je voudrais que vous nous aidiez à réussir. Aussi étrange que cela puisse paraître, nous faisons partie des gens qui croient fermement que l'industrie de la pêche a un avenir; autrement, nous ne prendrions même pas la peine d'être ici, car nous aurions pu vendre nos permis et abandonner le métier.
L'on nous a dit qu'il existait un avenir et nous le croyons. Nous avons besoin de votre aide pour réussir.
Merci.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci beaucoup, monsieur Forrest.
Monsieur Lunney.
M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Nous avons sans aucun doute reçu un message très clair de nos deux intervenants ici ce matin. Monsieur Forrest, j'étais présent à Ottawa lors de votre précédent exposé sur la remontée des saumons de la rivière Adams. Je ne sais pas trop quoi vous dire, si ce n'est qu'il est clair que nous ne parlons pas ici d'un problème de conservation des ressources. S'il y avait quelque chose à dire, il semblerait plutôt que nos ressources sont davantage menacées par un excès de réglementation d'un côté et par un manque de réglementation de l'autre. Je pense que nous cherchons des réponses. Vous soulevez des questions pour lesquelles nous n'avons pas de réponses ici. Je pense donc que je vais suspendre là mon intervention. Je vois que certains des autres membres ont des questions.
Le vice-président (M. John Cummins): Monsieur Wappel.
M. Tom Wappel: Notre ordre de réunion concerne l'industrie de la pêche au saumon du fleuve Fraser.
M. Mike Forrest: Oui, monsieur.
M. Tom Wappel: Et vous nous avez dit que vous avez fait partie de la commission jusqu'en 1999, année où vous en avez été exclu. Dans cette commission, exerciez-vous certaines compétences concernant les problèmes de conservation?
M. Mike Forrest: Je dirais que oui. Si vous connaissez Jim Woody et la personne qui nous a dirigés vers ce processus, je dirais que oui, en effet.
M. Tom Wappel: Donc, si vous pensez vous-même... M. Lunney a dit qu'il ne semble pas s'agir d'un problème de conservation. Je veux m'assurer que le compte-rendu mentionne s'il s'agit d'un problème de conservation ou non. C'est pourquoi j'aimerais que vous nous disiez, vous qui avez des compétences en la matière car vous avez été membre de la commission dont vous nous avez parlé—et ma question porte exclusivement sur les saumons du fleuve Fraser—s'il existe un problème de conservation des stocks aujourd'hui.
M. Mike Forrest: Pour certains, oui; pour d'autres, non.
M. Tom Wappel: Pouvez-vous préciser pour quelles espèces il existe un problème de conservation et pour lesquelles il n'y en a pas?
M. Mike Forrest: Parlez-vous des espèces, ou des quantités au sein d'un même stock? Vous vous aventurez dans des nuances techniques qui sont difficiles à expliquer. Je suis désolé, mais c'est là où nous en sommes.
M. Tom Wappel: Eh bien, laissez-moi juste prendre...
M. Mike Forrest: Si vous parlez des stocks de saumon sockeye, par exemple, il existe quatre types de classifications générales au cours de l'année. Puis, il y a les stocks de saumon quinnat qui remontent toute l'année, puis les saumons coho à la fin, et les saumons kéta après cela.
Il existe certains problèmes de conservation.
M. Tom Wappel: Prenons le saumon sockeye, puisque l'intervenant précédent parlait de 6,4 millions de saumons sockeye dans le Fraser en 2001. Prenons cette espèce seulement. Existe-t-il un quelconque problème de conservation de cette espèce dans le fleuve Fraser en 2001?
M. Mike Forrest: Non.
M. Tom Wappel: D'accord. Existe-t-il de quelconques problèmes de conservation d'autres espèces dans le fleuve Fraser cette année?
M. Mike Forrest: Oui.
M. Tom Wappel: Quelles espèces?
M. Mike Forrest: Certains stocks de saumon coho. Certains stocks—et je dois revenir sur ce que je viens de dire pour le saumon sockeye—dans la partie tardive de la remontée, certains stocks de petite taille nous préoccupent, ainsi que certains stocks de la remontée précoce de saumon quinnat.
M. Tom Wappel: Je vous pose la question spécifiquement—je reviens à ma question précédente—parce qu'il y a eu 6,4 millions de saumons sockeye dans le Fraser cette année. Notre intervenant précédent nous a dit qu'en règle générale, deux à trois millions de saumons seraient pris, alors que la prise commerciale publique totale n'a été que de 256 000 unités dans une espèce qui, vous me dites, n'a pas de problème de conservation.
M. Mike Forrest: Tout à fait. Sur le groupe de poissons dont nous parlons, c'est tout à fait exact.
M. Tom Wappel: Alors comment expliquez-vous une si petite prise?
M. Mike Forrest: Le MPO n'a voulu prendre aucun risque en termes de gestion; il a adopté une gestion utilisant comme moyen la fermeture; pas d'autre méthode...
M. Tom Wappel: Monsieur Forrest, pourquoi employez-vous le terme de risque?
M. Mike Forrest: Car il n'existe pas une seule méthode pour gérer une pêcherie... Si vous décidez d'autoriser la pêche, le processus comporte une certaine dose de risque. L'ouverture de toute pêcherie est forcément accompagnée d'un certain risque.
M. Tom Wappel: Je ne connais rien à la pêche, mais si je considère les chiffres, je dirais que 256 000 sur 6,4 millions correspond à une prise de risque extrêmement limitée.
M. Mike Forrest: C'est un euphémisme.
M. Tom Wappel: Quelle raison explique une si petite prise?
M. Mike Forrest: Voulez-vous dire en pêche commerciale?
M. Tom Wappel: Je veux dire pour le saumon sockeye en pêche commerciale.
M. Mike Forrest: J'ai l'impression que la pêcherie toute entière a été réattribuée à un autre utilisateur. Le ministère n'a pas voulu prendre le risque de nous laisser pêcher. Si vous vous souvenez de la discussion sur le saumon sockeye de la rivière Adams et la conjoncture favorable que nous avions pour pêcher début août—sachant qu'une quantité énorme et une échappée surabondante du stock remontant pendant l'été se trouvait là—nos chances de pêcher ont été réduites à néant sous prétexte de problèmes de conservation concernant les stocks à remontée tardive, à savoir ceux de la rivière Adams, et nous n'avons pas été autorisés à pêcher.
L'absurdité de la situation tient au fait que nous n'avons pas été autorisés à pêcher, et que nous avons dû regarder les autres pêcher. Maintenant, comment essayer d'expliquer cela? Il n'existe pas d'explication rationnelle de la situation. Certains membres du MPO vous diront qu'il s'agissait d'un pur problème de conservation et vous verrez dans les documents dont vous parlez que la conservation sera la raison invoquée—dans l'esprit de quelqu'un—car le MPO se doit de donner une raison, comme vous l'avez souligné, mais les choses se sont passées comme je vous les ai racontées.
M. Tom Wappel: Mais alors, monsieur Forrest, le MPO nous dira certainement que les pêcheurs qui ont attrapé du poisson ne l'ont pas fait à des fins commerciales, mais à d'autres fins.
M. Mike Forrest: À des fins de consommation?
M. Tom Wappel: Oui. De consommation et de cérémonies rituelles...
M. Mike Forrest: La collectivité autochtone soutiendrait probablement cette version des faits. Mais je ne suis pas d'accord.
M. Tom Wappel: Oui. Je suppose que le MPO la soutiendrait aussi.
M. Mike Forrest: Certainement. Je ne suis pas d'accord, car il n'existe aucun contrôle de la destination du poisson que les Autochtones prennent. Pendant la saison, ils ont transformé du poisson de consommation en poisson destiné à la vente—pour satisfaire leurs propres opérations de livraison. Nous ne faisons pas partie de ce système de gestion et nous n'avons pas la chance de savoir ce qu'ils font et pourquoi ils le font. Nous voyons juste les résultats.
M. Tom Wappel: D'accord, merci.
Le vice-président (M. John Cummins): Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Merci, monsieur le président.
Monsieur Forrest, merci de votre présentation. J'ai bien aimé cela. Je n'ai pas les talents d'avocat de mon collègue Wappel, mais je vais quand même me faire un peu l'avocate du diable.
Vous avez terminé votre exposé en nous disant de vous redonner ce qu'on vous a enlevé, c'est-à-dire votre gagne-pain, votre héritage, votre patrimoine. Il semble que plusieurs personnes dans la salle partageaient votre cri du coeur, puisque vous avez eu droit à des applaudissements.
La situation dans laquelle vous êtes aujourd'hui—on vous a enlevé quelque chose, votre héritage, votre patrimoine—n'est quand même pas arrivée du jour au lendemain. Il y a bien eu un processus de négociation qui s'est engagé, au terme duquel on a dit qu'on allait racheter vos permis. Donc, à ma connaissance, on n'a pas fait de hold-up de permis. Ce sont des négociations qui ont mené à la situation dans laquelle vous êtes.
Comment pourrait-on vous redonner une chose que vous avez consenti à laisser aller, une chose pour laquelle vous avez sans doute été compensés? Je voudrais bien comprendre pourquoi on est rendu là. Quelle est la part de volonté que vous aviez? Est-ce que vous n'aviez pas envisagé que vous vous en alliez dans un cul-de-sac en faisant cela? Je voudrais voir clair dans la situation pour bien comprendre où vous en êtes.
[Traduction]
M. Mike Forrest: C'est difficile pour moi, car la plupart des personnes que je représente et les personnes se trouvant derrière moi sont des professionnels de la pêche qui espèrent aller de l'avant et participer à l'avenir économique viable qui nous a été promis par tous les ministres les uns après les autres. Nous avons adhéré au plan de réduction de la tessure, et c'était un plan comme un autre.
Ce plan prévoyait trois choses en 1995-96. L'une d'entre elles était le partenariat; la deuxième était la viabilité économique; la troisième était la conservation—lancée par le ministre du jour Tobin et mise en place par le ministre Mifflin ensuite.
• 1609
Je vais vous dire que, depuis le premier jour de ces
négociations, nous avons reçu la promesse que nous aurions accès
aux ressources dans l'avenir pour atteindre la viabilité
économique. C'est la raison pour laquelle nous avions été attirés
par l'achat de permis et par la concentration de la tessure—la
réduction de la taille de la tessure. Nous avions été attirés par
tout cela, car il devait y avoir un avenir pour nous.
J'ai cru à tout cela. J'ai dépensé presque 400 000 $ pour un nouveau bateau en croyant à cette proposition. Ce bateau n'a pu pêcher le saumon sockeye que quelques jours pendant quelques années. Cette situation n'est pas économiquement viable. Cela n'a aucun sens. Personne travaillant actuellement au ministère n'a participé à la mise en place de cette structure et n'est au courant de ces promesses. Nous avons vécu dans cette situation jour après jour. En termes de viabilité économique, nous avions reçu la garantie de pouvoir accéder aux ressources, mais celles-ci nous ont été retirées et données à quelqu'un d'autre.
Suggérer que le rachat pour la somme de 80 000 $ d'un permis de pêche pour bateau à filets maillants pourrait constituer une indemnité suffisante pour mon histoire, mon moyen de subsistance, le bateau, le filet, l'abri et la propriété est absolument abusif. C'est en fait ce que l'on nous a dit à ce moment-là—80 000 $, messieurs, voici l'indemnité de rachat qui vous est proposée.
Le ministre actuel a eu l'audace de dire récemment à quelqu'un: «Vous avez eu l'occasion de quitter le métier. De quoi vous plaignez-vous?» Cela me fait voir rouge. Nous avons cru à cette proposition et nous avions l'intention de participer à long terme à une industrie de la pêche viable. Et ces personnes nous disent que nous avons eu l'occasion de quitter le métier, que c'est de notre faute. Désolé.
J'ai tellement de mal à entendre ce type de raisonnement. C'est très difficile pour moi.
Les chiffres sont là. L'industrie de la pêche aurait pu être florissante. Si nous nous trouvions encore dans la situation antérieure à 1992 et aux projets pilotes de vente—stratégie des pêches autochtones—nous aurions probablement pêché du saumon sockeye pendant six jours dans le fleuve Fraser cette année. Mais cette année, nous n'avons rien pêché du tout. Voilà où nous en sommes.
J'espère avoir répondu à votre question. Je suis désolé, je m'emballe un petit peu dans mes explications. Il s'agit d'un sujet très émouvant. Ce n'est pas quelque chose que je peux vous expliquer facilement, car il faut avoir vécu cette situation pendant toutes ces années, avec tous ces ministres, en ayant toujours essayé d'agir en tant que personne responsable pour assurer l'avenir de cette industrie, pour finalement qu'elle me soit arrachée et donnée à quelqu'un d'autre et voir que les ressources sont mises en péril.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Vous nous dites de vous redonner ce qu'on vous a enlevé. Le plan d'origine comportait trois éléments: le partenariat, la viabilité économique et la conservation. Cela ne fonctionne pas. Il faudrait mettre tout cela de côté, vous redonner vos permis et augmenter la flottille. Est-ce bien ce que vous voulez?
[Traduction]
M. Mike Forrest: Je suis désolé, peut-être ne me suis-je pas expliqué clairement.
Non, je ne demande pas une nouvelle augmentation de la tessure. Absolument pas. Il est de notre intérêt de conserver une tessure plus restreinte. Et l'on nous avait dit qu'une tessure plus restreinte aurait un meilleur accès aux ressources car elle est plus facile à gérer. Ce qui est le cas. Le seul problème est que, alors que nous avons accepté de réduire la tessure, le MPO ne nous a pas autorisés à pêcher dans ces zones plus petites. La tessure doit rester restreinte. Il est clair que nous avions trop de bateaux. Nous étions d'accord avec cela. Il existe plusieurs raisons à cela. Mais nous avons cru à ce programme, réduit le tessure avec la promesse que nous aurions accès aux ressources, mais cela ne s'est pas produit. Nous avons investi de façon considérable sur la base de la promesse d'un accès futur aux ressources, mais la promesse n'a pas été tenue. À la place, les poissons qui nous avaient été promis ont été réattribués à un nouveau groupe d'utilisateurs, et c'est ce en quoi la situation est abusive.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le vice-président (M. John Cummins): Merci, madame Tremblay.
Monsieur Cuzner.
M. Rodger Cuzner: Ma question se rapporte probablement à l'exposé de Phil, mais je suis sûr que vous pouvez également y répondre.
Le chiffre de 6,4 millions de saumons sockeye provient du MPO, n'est-ce pas?
M. Mike Forrest: Je pense que oui, en effet.
M. Rodger Cuzner: C'est ce qu'il me semble. Et les 256 000 attribués à la pêche commerciale, sont-ils pris en compte ou représentent-ils une approximation de la prise par les Autochtones? Ces chiffres sont-ils intégrés?
M. Mike Forrest: Les 250 000?
M. Rodger Cuzner: Oui. La prise commerciale publique totale.
M. Mike Forrest: Non.
M. Rodger Cuzner: Il s'agit des prises faites par les non-Autochtones?
M. Mike Forrest: En effet. Il s'agit du reste de la prise.
M. Rodger Cuzner: D'accord. Connaissons-nous la quantité de poisson prise par les Autochtones?
M. Mike Forrest: Je pense que, comme Phil l'a mentionné, elle se situe aux environs de 1,5 million, mais je n'ai pas le chiffre exact devant les yeux. D'autres personnes pourraient vous le donner immédiatement, j'en suis sûr, ou vous pouvez le retrouver dans les documents. En tout cas, ce chiffre est supérieur à un million.
M. Rodger Cuzner: Le stock est-il en bon état? Vous avez dit qu'il n'était pas en péril.
M. Mike Forrest: Avec six millions de poissons qui sont revenus? Non, il n'est pas en péril.
M. Rodger Cuzner: Diriez-vous qu'il est en bon état?
M. Mike Forrest: Oui. Le poisson que nous avions placé dans le fleuve est retourné et constitue une échappée surabondante. Nous avons placé trop de poissons en amont du fleuve à plusieurs endroits—à Horsefly, Chilko et de nombreux autres endroits.
Nous aurions pu attraper ces poissons, comme nous avions pensé le faire l'année dernière, mais nous n'avons pas eu l'occasion de sortir nos bateaux pour le faire et à présent, nous avons une échappée surabondante. Nous avons manqué une bonne occasion, car ces poissons vont perturber les autres poissons et il en résultera une mauvaise reproduction. Mais le stock n'est pas en péril.
M. Rodger Cuzner: Quel devrait être le pourcentage d'exploitation?
M. Mike Forrest: L'intervenant qui va me succéder, Mike Griswold, serait probablement capable de vous donner le chiffre exact, mais je dirais qu'un taux d'exploitation de 60 p. 100 est viable, même si ce taux est variable selon les stocks.
Une chose dont nous n'avons pas parlé dans cet exposé se trouve ici dans l'un de ces documents—le saumon rose. Dix-neuf millions de poissons sont retournés dans le fleuve Fraser, mais aucune pêche n'a été autorisée. La quantité totale de reproducteurs nécessaires est d'environ six millions. En tout cas, désolé.
Le vice-président (M. John Cummins): Monsieur Wappel.
M. Tom Wappel: Vous nous montriez un graphique qui, je crois, ne fait pas partie de ceux que l'intervenant précédent nous a présentés. Pourrions-nous avoir une copie de ce graphique?
M. Mike Forrest: Si vous connaissez le cycle du saumon rose, vous vous rappelez qu'il revient tous les deux ans. Il ne retourne pas chaque année. Cette année, les saumons roses sont revenus dans le Fraser. Ils le font les années impaires—un, trois, cinq, sept...
Vous entendrez aussi d'autres intervenants vous dire qu'ils auraient pu pêcher des saumons roses avec leurs bateaux senneurs, et vous aurez l'occasion de leur poser des questions plus tard concernant cette pêche au saumon rose qui n'a pas été autorisée.
Le vice-président (M. John Cummins): Monsieur Stoffer, avez-vous une question?
M. Peter Stoffer: M. Hearn voulait intervenir.
Le vice-président (M. John Cummins): Oui, monsieur Hearn.
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC/RD): Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, permettez-moi de m'excuser. Je suis victime d'une allergie ou de quelque chose de ce genre, qui vient de se déclencher depuis peu. Ce n'est pas une allergie à l'eau salée—je viens de Terre-Neuve.
La plupart de ce que vous et l'intervenant précédent avez évoqué n'est pas nouveau pour nous. L'industrie de la pêche est légèrement différente. Le produit est légèrement différent. Cependant, les frustrations sont très semblables. J'ai grandi sur les bateaux d'une petite collectivité de pêcheurs. Ma famille est une famille de pêcheurs, et je me reconnais donc dans la plupart des choses dont vous parlez, si vous changez un peu le nom des ressources et une partie de la terminologie.
J'ai quelques questions de base. Vous avez été dans l'industrie de la pêche pendant un certain temps, je suppose. Au cours des 15 dernières années, par exemple, comment ont évolué les ressources? Avez-vous constaté une chute importante? Les ressources dont nous parlons aujourd'hui sont-elles équivalentes à ce que vous pouviez voir il y a 15 ans?
M. Mike Forrest: Non. Dans les années 80, nous avons eu une augmentation d'une manière générale, de bons retours et une amélioration grâce à une bonne gestion dans de nombreux cas. Nous restions à quai pour permettre aux poissons de constituer une échappée suffisante, et non pas pour qu'ils soient pris par d'autres. Cela nous a permis d'augmenter les remontées de manière assez significative après une certaine période de temps et nous avons bénéficié des répercussions et des résultats de cette politique pendant les années 80 et le début des années 90.
• 1619
Je pense qu'une grande partie des résultats est la conséquence
de notre changement de politique concernant la pêche effectuée par
les Autochtones, sur laquelle nous n'avions aucun contrôle à cette
époque en 1992. D'autres personnes auront des avis différents—la
qualité de l'eau de l'océan et diverses autres choses seraient à
l'origine de la baisse des quantités de poissons qui reviennent. En
réalité, même avec les niveaux que nous avons à présent—six
millions de poissons revenus cette année—nous aurions pu avoir
nettement plus de pêche. Cela n'a pas été le cas, car le ministère
n'a pas voulu que cela se produise.
En termes généraux, nous sommes dans une période creuse en ce moment, en plus de ce problème de gestion qui perdure. Concernant les problèmes des traités, j'ai bien peur que nous ayons à présent à faire face à de nombreuses difficultés dont l'origine remonte aux années 80 où les prévisions de remontées étaient de 15 ou 20 millions de poissons; à l'heure actuelle, nous constatons que les remontées sont de moins de 10 millions de poissons. C'est encore suffisant pour pêcher, mais si nous attribuons des ressources dans le cadre des traités sur la base de prévisions datant des années 80—ce qui est actuellement le cas lors des négociations des traités, où les chiffres de référence remontent à cette époque—l'attribution de ces ressources sera surévaluée et nous finirons par voir le stock décliner, suite à cette attribution trop importante aux Autochtones.
M. Loyola Hearn: Aucun des deux intervenants ne semble du tout être opposé à une pêche viable de consommation de base. Pourquoi existe-t-il une différence lorsque vous allez au-delà de ce type de pêche, alors que nous sommes tous des Canadiens vivant dans un pays s'étendant d'un océan à l'autre? Dès lors que nous pénétrons dans le domaine de la pêche commerciale, pourquoi devrions-nous être traités de deux manières différentes?
M. Mike Forrest: Je ne vois absolument aucune raison à cela.
La pêche de consommation pratiquée par les Autochtones—le problème de consommation pour les cérémonies rituelles—est à présent inscrite dans l'article 35 de la Constitution, et nous ne pouvons rien y changer. Si le poisson était seulement utilisé à des fins de consommation, personne ne trouverait à redire, car les besoins correspondants en termes de chiffres seraient, selon mes calculs cumulatifs, largement satisfaits pour toute la collectivité autochtone du fleuve Fraser avec 250 000 saumons sockeye. Ce chiffre ne serait en aucun cas de deux millions, d'un million ou quelque chose comme cela... La nation Sto:lo juste à elle seule réclame 1,2 million de poissons à la table des négociations. Les besoins de consommation n'atteignent pas des chiffres pareils.
S'il s'agissait purement de pêche de consommation, personne n'y serait opposé. En fait, nous approuverions le processus. Actuellement, tout est complètement mélangé—le poisson de consommation, le poisson destiné à la vente, et celui dont on ne connaît pas la destination—et tout est vendu. Et il n'y a pas de contrôle du respect de la loi, donc le poisson peut se retrouver congelé dans un entrepôt d'emmagasinage; il est supposé être utilisé pour la consommation, mais il se retrouve congelé dans un entrepôt d'emmagasinage et sera peut-être vendu l'année prochaine. Eh bien, à moins de le suivre à la trace, vous ne pouvez engager des poursuites judiciaires. Officiellement, il s'agit de poisson de consommation. Il se trouve dans l'entrepôt d'emmagasinage de la bande indienne de Lummi Island aux États-Unis, mais c'est officiellement du poisson de consommation.
M. Loyola Hearn: Je pourrais passer des heures à vous raconter les mésaventures de l'industrie de la pêche à Terre-Neuve, l'effondrement de l'industrie de la pêche à la morue, le manque total de surveillance portant sur les autres espèces, les préoccupations concernant la destruction des ressources.
En fait, il y a juste deux semaines, des représentants de l'industrie de la pêche de Terre-Neuve tout entière sont venus à Ottawa pour parler au Comité de l'industrie de la pêche à la crevette, sur laquelle planent actuellement toutes sortes d'inquiétudes. Il s'agit du type de pêche qui fait présentement vivre le plus de monde dans la province, et si elle flanche, nous aurons du mal à nous en relever; de nombreuses personnes ont déjà des problèmes à l'heure qu'il est.
D'autre part, l'industrie de la pêche au saumon était également assez florissante là-bas. À présent, elle est reléguée au plan purement récréatif, et de nombreuses rivières sont même fermées pour de nombreuses raisons—infractions, mauvaise gestion, pêche dans les frayères par d'autres en dehors de notre région administrative. Mais il n'existe presque aucun contrôle du respect de la loi. Il ne reste pratiquement plus d'agents employés pour veiller sur la protection des ressources.
Lorsque nous nous sommes penchés sur le budget du ministère des Pêches et des Océans pour d'autres raisons, on nous a dit que le budget permettant d'assurer le contrôle du respect de la loi a été réduit, ce qui est évident si vous regardez les chiffres des quelques dernières années. Pêches et Océans, l'organisme par excellence de gestion de ce contrôle, refuse d'assumer presque toutes ses responsabilités concernant la protection de l'industrie de la pêche. C'est un problème grave. Il s'agit d'une chose pour laquelle nous avons entrepris des démarches, au moins en ce qui concerne l'infrastructure; la même chose s'applique certainement à l'industrie de la pêche. Si le ministère des Pêches et des Océans est responsable de la gestion de l'industrie de la pêche, il devrait soit faire son travail correctement, soit renoncer complètement à s'en occuper. Je pense qu'une partie du problème auquel nous faisons face chez nous et ici vient de là.
M. Mike Forrest: Nous pensons que le ministère devrait faire son travail correctement.
J'aimerais souligner un point concernant la différence entre la côte Ouest et la côte Est à ce sujet. Les saumons reviennent chez vous tous les deux, trois ou quatre ans. Tout ce que vous avez à faire est de les compter, de faire attention à la qualité de l'eau et de vous assurer de façon intelligente que vos reproducteurs sont bien à l'endroit voulu et vous pourrez alors renouveler vos ressources sans trop de problèmes.
• 1624
Les poissons de fond existent là-bas, et Dieu sait combien.
Des analyses de populations sont effectuées, mais c'est différent.
La comparaison entre les deux n'est pas applicable ici. Les gens
disent que l'industrie de la pêche au saumon suit le chemin de
celle de la pêche à la morue à Terre-Neuve, mais ce ne sera pas le
cas si vous continuez à la contrôler intelligemment. Et nous
pouvons participer activement à la recherche pleine d'espoir d'une
solution.
M. Loyola Hearn: Exactement. Sauf en ce qui concerne le saumon de nos rivières—une bonne industrie de la pêche au saumon que nous sommes en train de perdre par la faute d'une gestion extrêmement mauvaise—vous avez raison. La situation est entièrement différente pour le poisson de haute mer. Lorsque nous englobé les Grands Bancs de Terre-Neuve et repoussé la limite à 200 milles, cela n'a pas englobé tout le plateau continental...
Le vice-président (M. John Cummins): Excusez-moi, monsieur Hearn. Pourrions-nous en venir au fait?
M. Loyola Hearn: Désolé.
Le vice-président (M. John Cummins): En fait, je vous ai interrompu car l'intervenant suivant doit prendre l'avion...
M. Loyola Hearn: Pas de problème.
Le vice-président (M. John Cummins): ...et nous allons devoir presser un peu le mouvement. Merci.
M. Loyola Hearn: En fait, s'il n'y a pas une gestion correcte, il est difficile de faire des miracles; nous connaissons le même problème que vous.
Le vice-président (M. John Cummins): Monsieur Lunney, voulez-vous poser une question rapide?
M. James Lunney: J'ai une question rapide. Revenons aux projets pilotes de vente pilotes, celles-ci semblent constituer un élément nouveau.
M. Mike Forrest: C'était en 1992.
M. James Lunney: Ce n'est pas vraiment nouveau. Mais je croyais vous avoir entendu commenter que, quand le programme de projets pilotes de vente a été mis en place, il ne constituait pas vraiment une priorité. Vous dites maintenant qu'il a reçu le même niveau de priorité que les pêches commerciales.
Parlez-vous des poissons d'alimentation autochtones qui sont soudain apparus dans les projets pilotes de vente? S'agit-il d'une sorte d'entrée de service pour transformer les poissons de consommation en poissons de vente? Est-ce là de quoi il s'agit? Si vous pouviez nous expliquer ce que...
M. Mike Forrest: Tout s'embrouille, cela devient la pêche autochtone. Nous mélangeons les deux.
Et lorsqu'une priorité s'attache à l'une et non à l'autre, il suffit de démontrer que toute prise n'est qu'à fin alimentaire et non à d'autres fins puisque c'est là que se trouve la priorité. Ils pourront toujours aller pêcher avant les pêcheurs professionnels tant qu'ils peuvent démontrer que c'est à des fins alimentaires et non pour les projets pilotes de vente. C'est là le problème.
M. James Lunney: D'accord, merci.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci beaucoup, monsieur Forrest. Nous allons continuer.
M. Mike Forrest: Merci beaucoup.
Le vice-président (M. John Cummins): Nous vous savons gré d'avoir pris le temps de venir ici aujourd'hui.
Nous allons écouter maintenant M. Mike Griswold de la Gulf Trollers Association.
M. Mike Forrest: Demandez-lui de vous parler de la question du groupe d'étude sur le Fraser.
M. Mike Griswold (président, Gulf Trollers Association): C'est mon vieil ami Mike Forrest.
Merci, monsieur le président, membres du comité. Je vous remercie sincèrement de me donner l'occasion d'exprimer les frustrations que je ressens par rapport aux événements de cette année. Comme Mike, je siège au groupe d'étude sur le Fraser depuis sa création en 1985 au point culminant du Traité sur le saumon du Pacifique.
C'est en fait mon deuxième tour comme président des Gulf Trollers. Je ne sais pas pourquoi j'y suis revenu mais je m'adresse à des politiciens, vous devez bien savoir de quoi je parle. J'ai participé à plusieurs processus ayant trait à la gestion des pêches. Mike, moi-même et plusieurs autres ont été choisis par le ministère comme négociateurs intervenants pour aider à la recherche d'une solution négociée aux problèmes du traité entre le Canada et les États-Unis et aux questions de prises. Je siège aussi au Comité consultatif sur la pêche à lignes traînantes intérieure et au Comité consultatif de la côte Sud.
J'ai aussi participé à des processus de table ronde dont Mike et Phil ont tous les deux parlé. Le processus de table ronde avait pour mission de trouver une manière de rendre les flottilles commerciales viables. Nous avons entendu Phil énumérer les promesses qui avaient été faites; nous avons entendu Mike énumérer les promesses qui avaient été faites. J'étais au Delta Airport quand Brian Tobin a dit: «Les avantages de la rationalisation des flottilles s'accumuleront pour ceux qui restent dans l'industrie.» J'attends encore. Je n'ai encore rien vu.
Depuis 1997, nous avons connu des circonstances océaniques et écologiques plutôt défavorables. Celles-ci ont eu des répercussions négatives sur les remontées de saumons, en particulier sur celles du coho dans le Fraser et la Thompson, un affluent du Fraser et dans la Skeena. Mais le ministre, en ce temps-là, David Anderson, a décidé que nous devions réduire les captures.
• 1630
Étant pêcheur à lignes traînantes, ma flottille était presque
entièrement dépendante de la capture des saumons coho et des
saumons quinnat. En 1997, une politique de taux de capture de zéro
a été mise en place sur les stocks de coho. En conséquence, nous
avons dû changer nos méthodes de capture en Colombie-Britannique.
Cela nous a obligé à mettre en place une politique entièrement
nouvelle qui s'appelle le pêche sélective.
J'ai accepté la pêche sélective parce que j'en comprenais la sagesse: nous devions évoluer, nous adapter au marché, nous sensibiliser aux besoins de conservation. Et puis, il y avait ceux qui... Les pêches seraient améliorées si nous pouvions avec honnêteté, capturer le poisson sélectivement, soit en utilisant un matériel de sélection, soit par évitage quand c'est possible.
Je suis devenu avocat de la pêche sélective. J'y ai passé trois ans. J'ai organisé des conférences. Je me suis chargé de deux projets et j'ai offert une série d'ateliers l'année dernière, toujours dans l'idée que nous pourrions capturer des stocks abondants de poissons.
• 1635
Ce qui est arrive ici sur la côte Sud est que maintenant, la
pêche commerciale entière se concentre sur le saumon sockeye du
Fraser. Avant, nous avions un équilibre avec le saumon quinnat et
le saumon coho. Nous avions aussi quelques saumons kéta. Nous
avions quelques autres stocks sur la côte Sud, mais tout s'est
maintenant concentré sur le saumon sockeye. C'est la richesse,
toute la richesse se base sur cette pêche à présent. Par
conséquent, quand on n'attrape pas de saumon sockeye, on ne gagne
pas d'argent. C'est aussi simple que cela.
Siégeant au groupe d'étude sur le Fraser, j'ai participé à la gestion des pêches. J'ai vu les changements. J'ai vu les hauts et j'ai vu les bas. En 1993, nous avons vu une remontée d'environ 24 millions, ce qui constituait un record pour cette époque récente. Mais en 1995, des circonstances défavorables ont fait diminuer la taille de la remontée. C'est pourquoi nous avons entamé le processus de table ronde. Nous avons dû rationaliser la flottille, car nous nous sommes rendu compte que, malgré nos désirs, nous ne verrions plus jamais ces remontées de 100 millions dont parlait le personnel de la Compagnie de la Baie d'Hudson, autrefois. Je ne savais même pas qu'ils savaient compter jusqu'à 100 millions en ce temps-là. Nous avons donc rationalisé les pêches.
• 1639
En 1994, nous avons pris des risques au niveau de la gestion
des stocks. Nous avons trop exploité les stocks de pêche—pas
autant que certaines personnes le prétendent, mais nous étions à 24
heures du désastre. C'est pourquoi le ministère a mis au point une
stratégie de gestion de minimisation des risques.
La minimisation des risques—Mike en a parlé plus tôt—voici ce que c'est en quelques mots: toute gestion de pêche comporte des risques inhérents. Ce que nous recherchions dans la minimisation des risques était d'écarter une partie des risques qui s'attachent aux décisions de gestion. En conséquence, nous avons inclus les pêcheries d'endroits assez reculés. Nous avions une flottille de bateaux à lignes traînantes qui pêchait le saumon sockeye du Fraser dans les îles de la Reine Charlotte. Les îles de la Reine Charlotte sont à peu près aussi éloignées que possible en Colombie-Britannique, tout en étant encore en Colombie-Britannique. Ils ciblaient les stocks du Fraser.
Nous voulions gérer le poisson plus près de l'embouchure du fleuve. Nous y sommes certainement arrivés. Nous l'avons fait probablement trop loin dans l'embouchure du fleuve parce que, en fait, les pêches commerciales, qui dépendaient de la pêche dans les zones maritimes, ont fermé là-bas.
Il y a un ou deux points que j'aimerais aborder en ce qui concerne la gestion du fleuve Fraser. L'une d'elle est la politique d'échappées. Il est très facile de penser que plus on met de poisson dans la frayère, plus importante sera la remontée. Malheureusement, cela ne fonctionne pas ainsi. On peut avoir des retours optimaux à partir d'une quantité moindre de poisson. Malheureusement, la gestion du MPO suit une doctrine... Il y a de nouveaux gestionnaires, ce ne sont pas les mêmes gestionnaires que pendant la période grasse, pendant les beaux jours du Fraser, et ils disent non, nous en aurons toujours plus à condition d'y mettre plus de poisson.
Ce qui se passe à présent est que certaines remontées sont probablement sur le point de s'effondrer. L'une d'elle est la remontée du lac Chilko. Nous y avons mis un million de poissons. Par conséquent, un million de poissons reviendront certainement. C'est un rapport de un à un. Ce n'est pas du tout un investissement. Je doute que ce taux d'intérêt présente le moindre avantage.
Mais ceci a aussi un effet secondaire. En augmentant les échappées dans les fleuves pour certains stocks, nous laissons plus de poissons dans le fleuve pour ceux qui travaillent dans le fleuve.
Je ne voudrais surtout pas insinuer qu'il s'agit d'une conspiration de la part du MPO pour nous conduire à la faillite. Je ne les crois pas aussi intelligents que cela. Mais il faut bien se rendre à l'évidence, car leurs actes nous conduisent droit à la faillite.
C'est en partie à cause de l'augmentation des quotas d'échappées. Celles-ci fournissent des possibilités de stocks d'abondance de poissons migrateurs pour leurs groupes clients en amont de la rivière qui sont surtout des tribus autochtones. De fait, ce ne sont que des tribus autochtones. Ils envisagent d'augmenter le surplus d'échappées pour les besoins des frayères dans ces régions.
En 2001, nous avons eu l'occasion de pêcher des stocks de remontée estivale précoce. Sur l'un des graphes que Phil a fait passer, si vous examinez le stock de remontée estivale précoce de 2001, nous avons battu un record cette année. C'est un record. Mais nous n'avons pas eu l'occasion de pêcher.
Il y a deux raisons à cela. L'une est que l'un des groupes clients en amont du Fraser a demandé une augmentation du taux d'échappées, ce qui signifie tout simplement qu'il est devenu impossible de capturer tous ces poissons en comigration. Ce n'était pas nécessairement une exigence de conservation, mais un moyen de fournir davantage de poisson à un groupe client, à savoir une tribu dans la région de Shuswap. On pourrait dire la même chose à propos de certains stocks à remontée tardive.
• 1644
En vertu de la gestion basée sur la minimisation des risques,
nous voulions une remontée qui serait officiellement de 6,4
millions. Nous l'avons atteint. Nous espérions une remontée de 12
millions. Dieu sait pourquoi nous ne l'avons pas eue, parce que
c'était le moyen normal de prévoir la remontée. Mais un des
problèmes cette année—le ministère le sait; cela a été cité par la
Commission internationale des pêcheries de saumon du Pacifique, le
personnel du Fraser river Panel et discuté par les États-Unis—c'est que
notre compétence à évaluer les remontées est
désormais maintenant trop faible. Nous ne pouvons plus le faire.
Autrefois, nous évaluions les remontées en gérant les pêcheries
commerciales. Maintenant, nous dépendons entièrement de
l'utilisation de pêches expérimentales qui sont incomplètes. Jim
Woodey, biologiste en chef du groupe d'étude sur le fleuve Fraser
dit qu'il ne peut pas le faire et nous donner une estimation
précise.
Pourquoi n'y arrivons-nous pas? La raison pour laquelle nous n'y arrivons pas est que si l'on gère une pêche commerciale, aux termes de la politique du ministère, un projet pilote de vente dans le fleuve se déclenche automatiquement. Une chose mène à l'autre.
Cela nous a gênés. Nous ne pouvons plus gérer la pêche. Il n'y a aucune souplesse et pourtant, la souplesse est une nécessité absolue dans la gestion de la pêche. Soudain, on nous a enfermés dans une toute petite boîte, nous essayons de trouver des occasions de pêcher et nous n'avons pas de place pour nous retourner.
Par conséquent, pourquoi n'avons-nous pas pu pêcher l'été dernier? Je suis l'un de ceux qui ont eu de la chance. Étant d'une région extérieure, j'ai pu pêcher. Dans la pêche à lignes traînantes dans la zone H, nous avons eu quatre ou cinq jours de pêche. Nous n'avons pas attrapé beaucoup de poissons, mais par rapport à mes frères qui pêchent dans le Fraser, nous avons fait des merveilles. Et pourtant, je n'achète rien de neuf, ces temps-ci. En fait, je crois qu'il va falloir que je vende, parce que, en toute franchise, je suis au bord de la faillite.
Que s'est-il passé cette année? Les saumons sont montés, puis ils sont descendus. C'est ce qui se produit tous les ans quand on gère le saumon sockeye du Fraser. Mais nous avons fait face à des préoccupations dominantes: premièrement, nous n'avons pas pu avoir accès aux remontées estivales précoces qui nous auraient donné quelques possibilités et deuxièmement, nous avons capturé à un niveau de 17 p. 100 les stocks de saumon sockeye tardif à cause de problèmes de parasites et de l'arrivée précoce des stocks tardifs dans le Fraser, dont Mike a parlé quand il a présenté son témoignage au printemps.
La limite sur cette pêche était un taux de capture de 17 p. 100. Nous nous y sommes conformés. C'était au moins quelque chose. Toutefois, les choses ont changé comme elles le font constamment. Vers le 17 août, ce taux de capture de 17 p. 100 est tombé à zéro. Il n'y aura pas de taux de capture sur le stock de remontée tardive. C'était comme si on nous avait dit, «désolés, les garçons, mais il n'y aura plus de pêche de saumon sockeye cette année pour les flottilles commerciales non autochtones». C'était tout. Tout a été fermé.
Siéger au groupe d'étude sur le fleuve Fraser comporte un autre aspect, puisque que nous sommes en négociations directes avec les États-Unis. Or, les Américains, avec quelques justifications, commencent à avoir quelques soupçons parce que franchement, nous les privons de poissons. Tout comme la flottille commerciale est privée de poissons à l'heure actuelle, les États-Unis sont aussi privés de poissons. Je crois que des politiques de gestion du ministère sur le Fraser vont finir par nous valoir un échange de messages diplomatiques.
• 1649
Il y a des manigances, là, avec les cibles d'échappées et tout
le reste. Parce que, aux termes du traité, le ministère a le droit
d'établir les cibles d'échappées, celles-ci sont si élevées
qu'elles ne permettent pas d'atteindre le TAC. Or, ce n'est pas
l'esprit du texte que les États-Unis ont signé. Ils ont signé un
document qui présentait une idée qui était renforcée par le traité
ratifié en 1985. Je vous préviens, cette question va se poser. Ils
ont déjà soulevé la question auprès du groupe d'étude sur le
Fraser.
Nous avons discuté les raisons pour lesquelles nous n'avons pas accès au poisson. En particulier, il y a une obligation de conservation des ressources. Nous acceptons tous ce fardeau en tant que pêcheurs commerciaux. En tant qu'utilisateurs des ressources, nous acceptons cette responsabilité. Cela fait partie des frais généraux. Certains jours, on pêche, d'autres non. Quand on nous dit pendant les réunions du groupe d'étude sur le Fraser «nous ne pouvons pas vous permettre de pêcher car cela déclencherait les pêches autochtones dans le fleuve», en toute franchise, nous ne pensons pas avoir la responsabilité de les contrôler.
Que faire? Un agent du MPO a dit, «si je permets à ce bateau à filets maillants de pêcher dans le Fraser, cela signifie que je passerai mon hiver au tribunal». Et pourquoi est-il payé 70 000 $ par an? Il est censé gérer les ressources. Cela fait partie de son travail. Il devrait passer son hiver au tribunal à cause de la pêche autochtone ou des projets pilotes de vente, il serait peut-être justifié.
J'aimerais dire une chose qui sera probablement en défense du ministre. Le ministre a l'impression que les projets pilotes de vente, qui étaient un accord sur les captures, devaient être mis sur un pied d'égalité avec la pêche commerciale. Ce n'est pas le cas. La pêche pour les projets pilotes de vente cette année a été traitée comme un accord contractuel qui primait sur le reste, comme si elle avait une justification constitutionnelle aussi.
Faisons un saut dans le passé, en 1985: quand nous avons négocié le traité pour la première fois, une exemption de 400 000 unités pour la pêche autochtone avait été prévue. Ce chiffre a grimpé à 1,2 million, ce qui à l'heure actuelle réduit encore les possibilités de capture pour la flottille commerciale.
Une frustration particulièrement aiguë pour moi cette année a été la gestion du saumon rose. Nous avons mis 20 millions de saumons roses dans les frayères. Nous attendons une remontée de 10 millions de poissons en 2003. Là, nous allons subir une perte nette. J'essayais de donner à ma flottille la possibilité de pêcher. La raison citée pour laquelle nous n'avons pas pu pêcher cette année était les «besoins de conservation des remontées tardives».
Nous attrapions des saumons sockeye en même temps que des saumons roses, mais nous les laissions partir. Nous remettions les poissons dans l'eau. Le dernier jour, j'ai pêché environ 500 saumons roses. J'ai laissé partir six saumons sockeye. La formule standard, donc, l'évaluation de la mortalité, là—le saumon sockeye est un animal assez résistant—est que l'on tue un poisson sur dix. La proportion de remontée tardive de ces six poissons était environ de 20 p. 100. Je dirais qu'il s'agissait d'environ 0,3 p. 100 des poissons, en fait, je suis nul en maths, mais ce n'était pas très élevé.
Encore une fois, il s'agit de la responsabilité de conservation. Si cette responsabilité devient une redistribution, cela nous mène droit à la faillite. Les règles du jeu doivent être équitables, sinon, il n'y aura aucun terrain d'entente.
• 1654
Que faire pour améliorer la situation? Je suis entièrement
d'accord avec les recommandations de Phil et de Mike selon
lesquelles nous avons besoin d'une sorte de solution dans tout le
secteur de la pêche.
J'ai vu que dans certaines des dispositions proposées du traité, nous commencerions par examiner les accords sur les captures. Eh bien, nous savons comment le MPO traite les accords sur les captures. En outre, elles sont presque de nouveau une pêche garantie. Cela ne marche pas. Vous ne pouvez pas garantir quelque chose qui n'est pas là. Nous ne savons pas si le poisson arrivera. Nous voulons nous assurer d'instituer des mesures qui sont sensibilisées aux remontées des poissons.
Que devrions-nous faire d'autre? Nous devons pousser les agents du MPO à perfectionner l'organisation de pêche en temps réel pendant l'abondance. À l'heure actuelle, ils sont enfermés dans une coquille. Ils ont abdiqué leur responsabilité de faciliter la pêche. J'ai toujours cru qu'ils existaient pour gérer la pêche. À l'heure actuelle, ils semblent n'exister que pour gérer l'absence de pêche et ce n'est pas trop difficile.
Il y a quelques années, le vérificateur général a communiqué un rapport sur la consultation. C'était il y a environ trois ans. Nous attendons encore la mise sur pied d'un processus consultatif qui serait à la fois viable, facile à gérer et qui permettrait aux pêcheurs d'intervenir directement dans les décisions de principe qui ont des répercussions sur leur moyen d'existence. Nous attendons. Tous ce qui s'est produit est que nous avons reçu des décrets d'en haut et le décideur en chef est maintenant parti à Ottawa. Nous verrons peut-être certains changements. Mais il est temps qu'on nous donne le droit de participer aux décisions qui touchent notre gagne-pain.
Enfin et surtout, vous avez demandé des suggestions quant à ce que vous pourriez dire au docteur John Davis quand vous en aurez l'occasion. Ce qu'il vous dira sera tout simplement ce que ses employés vous diront. Il vient d'arriver dans le travail, et j'ai presque pitié de lui parce qu'il vient d'hériter d'un vrai gâchis. Je lui souhaite d'arriver à remettre ce ministère dans le droit chemin.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci, monsieur Griswold.
Monsieur Lunney.
M. James Lunney: Merci, monsieur le président. Et merci encore.
J'ai une question sur le saumon rose. Nous avons entendu deux fois—car M. Forrest l'a mentionné aussi—qu'il y a eu une remontée de saumon rose très importante.
M. Mike Griswold: Très importante.
M. James Lunney: De combien? Était-elle de l'ordre de 19 millions?
M. Mike Griswold: L'évaluation des frayères—c'était lors de la dernière réunion du groupe d'étude sur le Fraser en octobre—était d'environ 20 millions.
M. James Lunney: Et, donc, si j'ai bien compris, vous attendez une remontée d'environ 10 millions plus tard.
M. Mike Griswold: Il s'agit de mon estimation personnelle aujourd'hui, mais je ne crois pas que 20 millions de poissons produiront 100 millions de poissons. Je crois que nous allons voir environ 10 millions de poissons. Il y en a beaucoup trop, là.
M. James Lunney: Nous avons entendu dire, je crois, que s'il y a trop de poissons, cela perturbe les autres.
M. Mike Griswold: Exactement! Ils détruisent le frai des poissons antérieurs.
M. James Lunney: J'essaie de mieux comprendre pourquoi vous n'avez pas été autorisés à pêcher lors de cette importante remontée. Vous ai-je entendu dire que cela avait un rapport avec la protection de la remontée tardive? Essayaient-ils de protéger une autre espèce?
M. Mike Griswold: La remontée tardive des saumons sockeye. Comme vous le savez, le Fraser est divisé en quatre éléments principaux: ce sont les remontées printanières précoces, estivales précoces, estivales et tardives. Cette année, le poisson a été abondant principalement lors de la remontée estivale. On a vu environ cinq millions de poissons lors de la remontée estivale. J'avance un chiffre assez prudent qui s'appuie sur le nombre total de captures, plus les échappées évaluées selon les résultats du sondage acoustique initial.
M. James Lunney: D'accord. Mais s'il y avait une bonne échappée lors de la remontée précoce, quand les objectifs de conservation avaient déjà été atteints, pourquoi était-ce si important de conserver la remontée tardive? Est-elle sensiblement différente?
M. Mike Griswold: Le problème associé à la remontée tardive est que pendant les quatre dernières années, les remontées tardives sont entrées dans le Fraser plus tôt que normal. Une fois qu'ils remontaient le fleuve, les poissons étaient dans l'eau douce, donc vulnérables à un parasite appelé parvi capsula. En l'an 200, ce parasite a pratiquement détruit 97 p. 100 de la remontée.
Nous n'avons pas vu le même degré de mortalité cette année par rapport à l'an 2000, mais nous nous sommes vraiment inquiétés. Nous avons mis un frein à notre prise de poissons à remontée tardive pour cette raison.
Le vice-président (M. John Cummins): Nous donnons la parole à Mme Tremblay, s'il vous plaît.
Mme Suzanne Tremblay: Non.
Le vice-président (M. John Cummins): Monsieur Wappel.
M. Tom Wappel: Merci, monsieur le président.
Monsieur Griswold, vous pratiquez la pêche à lignes traînantes, vous pouvez donc peut-être m'aider à interpréter une feuille de papier qui faisait partie de l'exposé de M. Eidvik. Il parle de la réduction de la flottille de bateaux à lignes traînantes. Je sais que vous ne l'avez pas sous les yeux. Je voudrais comprendre ce dont ils parlent dans ce document. Peut-être pouvez-vous m'aider.
En 1995, on estime qu'il y avait 606 bateaux à lignes traînantes détenteurs de permis de pêche du saumon sockeye du Fraser.
M. Mike Griswold: Permettez-moi d'expliquer. En 1995, avant toute réduction de la flottille, on comptait 1 400 bateaux à lignes traînantes et ils étaient tous détenteurs de permis de pêche de saumon sockeye du Fraser, si celle-ci était ouverte.
M. Tom Wappel: Quel est ce chiffre de 606? Est-ce après les réductions?
M. Mike Griswold: C'est probablement après le premier tour de rachats.
M. Tom Wappel: C'est le premier point et cela concerne le saumon sockeye du Fraser. L'autre point porte sur les régions. On n'y mentionne pas les saumons sockeye du Fraser. Combien de régions sont touchées par le saumon sockeye du Fraser?
M. Mike Griswold: Voulez-vous dire combien sont autorisées à pêcher le saumon sockeye?
M. Tom Wappel: Oui.
M. Mike Griswold: Il y a trois zones de pêche aux lignes traînantes sur la côte à l'heure actuelle. Deux régions sont autorisées à faire des prises de saumon sockeye du Fraser. Ce sont la région H, les eaux limitées par l'Île de Vancouver et la partie continentale de la Colombie-Britannique et la zone G qui est la zone sur la côte ouest de l'île de Vancouver.
M. Tom Wappel: Par conséquent, les 606 bateaux à lignes traînantes admissibles à pêcher le saumon sockeye du Fraser étaient autorisés à pêcher dans les zones G et H.
M. Mike Griswold: C'est exact.
M. Tom Wappel: Ensuite, il est écrit qu'en 2001, il n'y avait que 239 bateaux à lignes traînantes dans la zone G et 157 dans la zone H. Si vous êtes nul en maths, je le suis deux fois plus que vous. Si j'additionne tout cela rapidement, 239 plus 157, cela fait 496 en 2001, par rapport à 606...
M. Mike Griswold: Ça fait 396. Ne faites pas ma déclaration d'impôts.
M. Tom Wappel: Je vous l'avais bien dit que je ne vaux rien en maths.
D'accord, puis on dit que 13 étaient admissibles. Qu'est-ce que cela signifie? 13 quoi, admissibles à quoi? Je n'ai pas eu la possibilité de poser toutes ces questions. Puisque vous êtes pêcheur, je pensais que vous sauriez.
M. Mike Griswold: Je ne sais pas ce que représente ce point ici.
M. Tom Wappel: Vous pourriez peut-être le demander à un témoin expert comme Phil là-bas.
Phil, à la page 13, pourriez-vous expliquer le troisième point?
M. Phil Eidsvik: Il s'agit d'une erreur typographique à la page 13.
M. Tom Wappel: Donc, quel est ce chiffre?
M. Phil Eidsvik: Cela devrait indiquer que 396 bateaux étaient autorisés à pêcher le saumon sockeye sur le Fraser.
M. Tom Wappel: D'accord, merci.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci.
Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président.
À la page 24 du rapport de M. Eidsvik, il est écrit dans le deuxième point que la surveillance et l'application des règlements sont intenses dans la pêche commerciale et inexistantes dans la pêche autochtone.
Êtes-vous d'accord avec cette déclaration?
M. Phil Eidsvik: Oui, tout à fait. Je tire cette conclusion à contrecoeur parce que j'ai franchement passé beaucoup de temps à croire que le MPO était l'autorité la mieux placée pour faire ce travail. Mais ce n'est plus mon opinion.
M. Peter Stoffer: Je pose cette question parce que, si aucun bateau ne pêchait, comme il a été indiqué, il ne pouvait y avoir aucun effort pour faire respecter la loi puisque personne ne pêchait. Si la communauté autochtone n'était pas surveillée par les agents chargés de faire respecter la loi, que faisaient ces agents? Se trouvaient-ils dans une autre région de la province?
Vous déclarez tous qu'aucun bateau ne pêchait le saumon sockeye cet automne. Aucun. Vous avez dit que la pêche est étroitement surveillée. Si personne ne pêchait, personne ne surveillait. Donc, s'il n'y avait pas de surveillance de la pêche autochtone, que faisaient les surveillants l'été dernier? Étaient-ils en vacances?
M. Phil Eidsvik: Eh bien, non. Il y a une surveillance de la pêche autochtone. En fait, le ministère, représenté par Bridget Ennevor, qui est un agent du ministère, a décidé de faire un rapport à ce sujet.
Le rapport a été rédigé par ESSA Technologies et les résultats ont indiqué que pendant les jours où la pêche était ouverte, ils avaient des informations sur la pêche, mais qu'ils n'avaient aucune idée de la pêche pendant les jours où elle était fermée. Ils ont toutefois constaté qu'il y avait des filets dans l'eau quand la pêche était fermée.
M. Peter Stoffer: Pour mémoire, il y a un certain niveau de surveillance, là.
M. Phil Eidsvik: Il y a un minimum de surveillance.
M. Peter Stoffer: D'accord. Très bien.
M. Phil Eidsvik: Ce n'est pas le même degré ou niveau de surveillance que ce qui se fait pour la pêche commerciale.
M. Peter Stoffer: Je comprends.
Vous avez aussi dit qu'il y avait environ 20 000 saumons roses et 6,4 millions de saumons sockeye. Est-ce exact?
M. Phil Eidsvik: Il y avait 20 millions de saumons roses.
M. Peter Stoffer: Pour la compréhension du comité et pour mémoire, si vous êtes autorisé à pêcher le saumon sockeye, à qui le vendez-vous et comment écoulez-vous ce produit?
M. Phil Eidsvik: La flottille de bateaux à lignes traînantes les vend; la plus grande partie des poissons sont surgelés. Ils sont vidés, parfois fendus ou parfois congelés entiers. Ils sont pour la plupart expédiés au Japon comme produit surgelé.
M. Peter Stoffer: Comment vendez-vous le saumon rose?
M. Phil Eidsvik: Une partie du saumon rose va dans le marché des conserves et une autre partie dans le marché du surgelé. Une partie assez importante est vendue officieusement, sur les quais.
M. Peter Stoffer: Comme mon collègue M. Cuzner le disait plus tôt, il y a une réaction en chaîne. Si vous ne pêchez pas, vous ne pouvez pas vendre le produit et les conditionneurs et autres travailleurs en souffrent aussi.
M. Mike Griswold: Ce marché a fait certaines victimes. Phil en a parlé plus tôt. Nous nous attendions à pêcher. Oui, la flottille était toute prête et nous nous attendions à une remontée de 12 millions. Cela ne s'est pas produit, mais on ne s'attendait pas à 250 000. D'après mon expérience, plusieurs témoins vous le diront, nous aurions dû avoir dix fois ce nombre de capture dans la pêche commerciale.
M. Peter Stoffer: Voici ma dernière question, monsieur le président, et je vous remercie. Je pense que vous voudrez aussi poser une question vous-même.
À la page 28 du mémoire de M. Eidsvik... Et vous avez mentionné que M. Davis venant tout juste d'être nommé, il n'aura sans doute pas toutes les réponses que nous cherchons.
M. Mike Griswold: Mais il peut se faire accompagner aux réunions par des agents des pêches.
M. Peter Stoffer: D'accord.
Êtes-vous d'accord ou non avec l'énoncé suivant: les bureaucrates font mentir les ministres.
M. Mike Griswold: J'aimerais dire que c'est une vérité incontestable. Je me souviens d'un cas où Paul Ryall a fait mentir le ministre. Le ministre croyait sincèrement que la pêche commerciale et la pêche pour les projets pilotes de vente étaient mises sur un pied d'égalité. M. Ryall, en tant que directeur du Fraser en ce temps-là, chef de district du Fraser, traitait la pêche pour les projets pilotes de vente comme une disposition contractuelle qui avait priorité.
M. Peter Stoffer: Merci.
Monsieur le président, je vous donne le temps qu'il reste, si vous le désirez.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci.
Le comité a-t-il d'autres questions?
Merci beaucoup, monsieur Griswold.
M. Mike Griswold: Merci beaucoup.
Le vice-président (M. John Cummins): Le prochain intervenant vient du Fishing Vessels Owners' Association de la Colombie-Britannique, Glen Budden, M. Rezansoff.
M. Frank Rezansoff (président, Fishing Vessels Owners' Association de la Colombie-Britannique): Merci, monsieur le président.
C'est la troisième fois dans ma carrière de pêche que je fais un exposé devant la Commission permanente. Il semble qu'à chaque fois, la flottille et moi-même sommes dans une situation qui va en empirant, mais cette fois, c'est comme si nous étions prêts à être submergés sous les vagues.
Je suis président de la Fishing Vessels Owners' Association. Je suis aussi président de la Herring Research and Conservation Society. Je suis membre de la commission sur le Code of Conduct for Responsible Fisheries, président des Fishing Industry Selective Salmon Harvesters, et président de la Salmon Harvesters Association, j'ai donc une connaissance assez étendue de la pêche.
J'aimerais présenter un exposé qui résume les problèmes de gestion des bateaux senneurs, qui explique comment nous avons essayé de développer la pêche dans la région 20, les problèmes que vous avons eus avec le ministère et qui se termine en offrant quelques recommandations.
La Fishing Vessels Owners' Association existe depuis 1938; nous nous inquiétons beaucoup de l'état du système de gestion du ministère à l'heure actuelle. Nous aimerions certainement avoir de l'aide de la part de votre comité peut-être en suggérant une restructuration du système de gestion.
Ce faisant, j'aimerais vous résumer la saison de pêche et me concentrer sur la pêche en commun dans le détroit de Juan de Fuca pour illustrer les problèmes de gestion du MPO.
La prévision pré-saison des pêches cette année était d'environ 12 millions de saumons sockeye du Fraser, mais il n'y en a eu que de 5 à 7 millions, soit un écart de 75 p. 100. Cela aurait constitué la première possibilité de pêche importante depuis quatre ans, parce qu'en 1998, 1999 et 2000, la pêche au senne a été minimale ou inexistante dans les stocks du Fraser. Certains des problèmes que le ministère éprouve dans la gestion de la pêche viennent du besoin pressant de faire passer les stocks dans le fleuve pour la stratégie des pêches autochtones, ce qui rend la pêche plus difficile pour des organismes comme le nôtre et les bateaux à filets traînants et autres.
Un autre problème du ministère est le manque de connaissance et d'expérience de ses cadres supérieurs. Quand vous avez travaillé dans ce domaine aussi longtemps que moi, cela fait 39 ans, vous savez qu'avant, la gestion au niveau supérieur était entre les mains de personnes qui avaient une connaissance et une expérience pratique de la pêche. Ces gens ont maintenant disparu.
• 1719
Notre dernier directeur régional venait des parcs nationaux.
Il y a une importante différence entre la gestion de Banff ou de
Jasper ou d'un autre parc dans la partie centrale du Canada et la
gestion d'une ressource dynamique et changeante telle que le
saumon. Comment peut-on charger quelqu'un d'un ministère dont les
employés de niveau inférieur ont la même ignorance? Le problème a
atteint un tel point que même le Conseil de ressource a exprimé son
inquiétude face au besoin de continuité d'une gestion expérimentée
au ministère.
Le ministère craint que la pêche dans le fleuve capture plus de poissons que nécessaire, c'est pourquoi il se montre d'une prudence excessive par rapport à la pêche commerciale de l'extérieur. En ce qui concerne certains des problèmes qui survenus en 2001, ou inquiétudes, oui, il y a certainement un problème de conservation pour le saumon coho, mais dans la même pêche, et je parle pour nous en particulier, nous avons prouvé que nous pouvions pêcher dans des concentrations de saumons coho en étant sélectifs sans porter atteinte au stock. Les autres flottilles aussi.
On s'inquiétait de l'eau basse et de la température élevée. En réalité, ces conditions étaient optimales. On s'inquiétait des remontées estivales assez faibles, mais nous avons eu l'échappée la plus importante en 75 ans. On s'inquiétait des parasites, mais finalement, ce problème n'a pas été si grave non plus. En outre, les agents du ministère s'inquiètent de problèmes imaginaires: ils pensent encore que nous avons une énorme flottille de senneurs et que si on ouvre la pêche, cette flottille fera l'effet d'un aspirateur gigantesque. En réalité, la flottille a diminué de deux tiers par rapport à ce qu'elle était en 1995. La taille de notre flottille est entre 160 et 170 bateaux. On compte 271 permis, mais certains bateaux détiennent deux permis et ne peuvent pas travailler simultanément dans deux régions. Je pense qu'il y a 110 bateaux au Nord et qu'il y a 160 à 170 bateaux—cela varie car certains bateaux ont été transférés aux pêches autochtones. Ce sont des chiffres approximatifs.
On s'inquiète aussi du haut niveau de capture, mais un tel taux présuppose de grandes quantités de poissons. S'il s'agit d'une petite remontée—cela a été prouvé cette année—nous n'attrapons pas de grandes quantités de poissons simplement parce que nous sommes sur place.
La pêche expérimentale n'est pas suffisante. Le ministère a mis fin au programme des pêches expérimentales. Comme le répète Jim Woodey, la meilleure expérience est d'organiser une pêche à senneur dans le détroit de Johnstone et dans le détroit de Juan de Fuca le même jour et à la même heure. C'est ce qui produit les meilleurs résultats. C'est ce sur quoi se basent toutes les informations au ministère ou à la commission, sur la continuité de cette pêche. Sans cette pêche, on manque de confiance dans les tests.
Nous déchargeons à l'aide d'épuisettes, maintenant, tandis qu'un chalutier comme le mien a été construit pour faire entrer le poisson par une rampe arrière; notre efficacité a donc baissé de 30 à 50 p. 100. Le département craignait que nous ne soyons pas assez sélectifs dans le sud, malgré le fait que nous ayons organisé la pêche sélectivement dans le Nord avec la même sensibilité aux stocks depuis un certain nombre d'années et que nous ayons prouvé un bon taux de réussite. En outre, il s'agit de pratiquement la même flottille parce que nous détenons deux permis. Par ailleurs, la direction des différents organismes et les pêcheurs particuliers sont prêts à se servir de toute l'influence des pairs possible pour garantir que chacun se conforme aux normes les plus strictes.
Le ministère a aussi influencé nos plans de pêche. Ils devaient avoir des poissons en vertu de la stratégie des pêches autochtones.
Une voix: Qu'est-ce que c'est?
M. Glen Budden (Fishing Vessels Owners' Association of British Columbia): L'accord de stratégie des pêches autochtones.
Une voix: Merci
M. Glen Budden: Ils s'inquiétaient des remontées précoces et tardives; ils ont donc réduit le temps de pêche à un bloc de temps de capture de sept à dix jours. Il y avait aussi le manque d'ouvertures antérieur, le problème des pêches expérimentales pour évaluer la taille de la remontée. Une fois que nous sommes arrivés en saison, ils n'ont pas prévu d'ouverture, ce qui a provoqué une sous-estimation de la taille de la remontée et la perte d'autres occasions de pêche, non seulement pour nous mais aussi pour toutes les autres flottilles.
• 1724
Parmi les exigences qu'ils ont exprimées quand nous
organisions cette pêche, ils ne nous permettraient pas d'aller à
Juan de Fuca, où nous n'avons pas pêché depuis environ 1995, à
moins que nous n'enlevions tout élément de concurrence.
Si nous n'obtenions pas l'accès à Juan de Fuca—à la pêcherie de San Juan—il y avait une déviation tout autour de l'extérieur de l'île, parmi toutes les flottilles—celles de la région G, de la région H et la nôtre de la région D—aucun d'entre nous ne pourrait faire la capture auquel il à droit. Si le poisson traversait le détroit de Juan de Fuca et que nous pêchions dans le détroit de Johnstone, aucun d'entre nous n'aurait eu la prise permise, s'ils nous avaient permis de pêcher. C'est pourquoi tout le monde voulait ardemment que la même flottille travaille dans cette zone.
Ils voulaient des preuves que nous pouvions nous montrer sélectifs et que la mortalité sur la côte Sud soit la même que sur la côte Nord. Ils n'acceptaient pas les preuves que nous leur avions déjà soumises. Pour rendre cette pêche possible, nous avons commencé à nous réunir vers la fin novembre de 2000. Nous avons eu des réunions préparatoires entre la flottille, l'industrie et certains cadres intermédiaires du ministère. Nous avons examiné toutes les options possibles et toutes les considérations ayant trait à la conservation du saumon coho. Cela nous a menés à 20 réunions différentes, jusqu'à la date de la pêche. Bien sûr, nous ne sommes pas payés pour ces réunions, mais nous en avions deux ou trois fois par jour pour essayer de convaincre le ministère de nous permettre de pêcher.
À la fin du mois de juin, la pêche a finalement été approuvée. Certains des éléments qui ressortaient était que tout le monde devait être sur un pied d'égalité—nous allions mettre toutes nos prises en commun; la surveillance et la validation de la prise seraient assurées par des observateurs, la pêche commencerait lentement et augmenterait si la prise était peu élevée et dans les limites et si tout le monde jouait le jeu comme il fallait.
Nous avions un groupe représentatif du secteur. Certaines personnes dans l'industrie nous critiquaient sans merci pour avoir accepté cette pêche et pour nous prêter à ce jeu. Nous leur disions que si nous nous le faisions, nous obtiendrions un temps de pêche plus long, c'était la «carotte». Nos critiques rétorquaient que nous n'obtiendrions certainement pas de temps de pêche et que le ministère imposerait la mise en commun des prises lors de toutes les autres pêches sans aucun avantage. Jusqu'à maintenant, c'est à peu près ce qui s'est passé.
Du fait de l'organisation de la pêche, seulement 73 des 165 chalutiers détenteurs de permis ont participé. Parmi plusieurs exigences, il fallait avoir un matériel spécialisé pour y participer, vous deviez verser de votre propre poche une caution de 5 000 $, chaque chalutier devait signer un contrat soigneusement rédigé qui stipulait que vous étiez tenus par contrat d'observer des conditions et des pratiques de pêche particulières.
Tous les chalutiers participants—et même ceux qui ne participaient pas—ont dû verser la somme non remboursable de 500 $, bien que certains aient été en partie remboursés, pour couvrir la formation du chalutier et les frais administratifs. En tout, nous avons réuni environ 600 000 $ pour effectuer cette pêche. Nous avons offert des séances de formation à tous les capitaines—pas à tous les membres d'équipage, mais à tous les capitaines.
Après la formation, environ 130 chalutiers ont obtenu le droit de participer à la pêche. Nous avons divisé la région en 20 blocs. Nous étions obligés d'avertir avant chaque opération, pas seulement à la fin de la journée, mais à chaque opération. Comparez cela à la pêche autochtone qui n'est pas contrôlée. Dans le bateau de l'équipe de gestion, il y avait un de nos représentants et quelques travailleurs du secteur de la transformation.
Nous avons même dû fournir le bateau de gestion parce que le ministère n'avait pas de bateau. Nous avons pris un bateau de la flottille et lui avons donné une part égale pour que nous ayons un bateau pour gérer la pêche. Trente pour cent du contrôle était assuré par des observateurs sur place qui allaient de bateau en bateau. Pour ma part, sur mon bateau, j'avais une caméra assurant une surveillance positionnelle, opérationnelle et visuelle à 100 p. 100, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours par semaine.
Comme nous le faisons lors de toutes les autres pêches sur la côte, après la pêche, nous devions appeler au téléphone une entreprise de contrôle pour déclarer approximativement ce que nous avons à bord; cette déclaration est alors comparée à ce que nous livrons pour savoir si nous avons surestimé ou sous-estimé, si nous sommes proches des chiffres annoncés. Nous avions une surveillance à 100 p. 100 à la livraison, pour tout problème de chiffre et de prise accessoire potentielle.
La pêche a commencé. Vingt pour cent des bateaux ont été choisis, pour ouvrir la pêche. Parmi ces 20 p. 100, seulement 15 ont été autorisés à ouvrir la pêche, par rapport à 250 en 1995 et antérieurement.
• 1729
Les captures étaient peu élevées, celles de coho minimales.
Nous devions relâcher presque tout. Nous avons dit qu'il fallait
amener plus de chalutiers pour déterminer la taille de la remontée.
Vers midi, quelques bateaux ont été ajoutés. Il n'y avait plus de
problèmes. Le système d'information fonctionnait bien. Vers une
heure de l'après-midi la flottille a encore été un peu
augmentée—puis la pêche a pris fin à sept heures du soir le
premier jour.
Ils ont attrapé environ 9 000 saumons sockeye, 146 saumons coho, 134 saumons quinnat et 2 truites arc-en-ciel—un total de 110 opérations. Dans des pêches normales et dans les conditions dans lesquelles nous travaillions avant, on peut faire 110 opérations avec environ 10 bateaux. Nous en avions 250. Les années précédentes, il y en avait 200.
Cette fois-ci, nous avions 110 opérations pour la journée; les prises de 42 opérations ont été déchargées à l'épuisette et mais on a relâché les prises de 68 opérations—Relâchées! C'est un fait nouveau dans la flottille! Elles ont été relâchées parce que nous avons convenu que s'il y avait une présence de saumon coho et une prise peu élevée, mieux valait relâcher et prolonger la pêche.
Ce jour-là, nous avons tenu une conférence et nous avons demandé d'accélérer le rythme de la pêche. Le ministère a insisté que cela devait être fait graduellement. Le lendemain, nous avons commencé à 30 p. 100. Nous avons eu une cible minimale—plutôt une absence de cible. Nous sommes passés à 38 bateaux. À 9 h 35, on atteignait 53 bateaux. À midi, toute la flottille pêchait finalement et la pêche a pris fin à sept heures du soir.
Nous avons donc eu sept heures de pêche avec une flottille de 73 bateaux, puis la pêche n'a plus jamais été ouverte cette année-là. Nous avons eu un total de 411 opérations pour l'année. Nous avons capturé environ 46 000 saumons sockeye—environ 4 000 livres par bateau—et nous avons relâché 466 coho. Seuls, six coho de la haute Thompson ont été attrapés—selon le facteur d'expansion dont ils se servent—la présence de saumon coho de la Thompson se mélange avec le reste du coho. En se basant sur un taux de mortalité de 15 p. 100, nous avons probablement tué un seul coho de la Thompson.
La préparation de cette pêche a pris six mois de ma vie et de la vie de tous les autres. Le revenu réalisé n'a même pas couvert mes frais de carburant pour descendre de la côte Nord à cette pêche. Il n'a pas couvert les frais des tests de mortalité que le ministère effectuait là. Ils ne nous ont même pas permis de continuer de pêcher pour couvrir les frais de cette étude—une étude de mortalité de grand luxe, d'ailleurs, qui ne portait pas seulement sur le problème, mais qui examinait plusieurs aspects.
La valeur moyenne d'un bateau dans le sud est d'environ un million de dollars. Là, nous avons gagné 5 600 $. C'est un taux de rendement du capital investi assez bas, extrêmement bas, même!
Après cet échec, il sera difficile de faire accepter à la flottille une autre initiative et espérer qu'elle sera prise au sérieux. Il n'a pas été facile de convaincre tout le monde de participer à cette pêche. C'était une méthode de pêche au saumon entièrement différente. Cela n'a jamais été fait avant sur cette côte. Nous avons joué le jeu, mais en fin de compte, nous n'avons pas eu la carotte. Dorénavant, personne ne croit plus les promesses du ministère.
Je suis semblable à Mike Griswold et à Mike Forrest. J'ai préconisé la réduction de la flottille, accepté tout le processus, acheté un deuxième permis, j'attendais les retombées positives. Au lieu de cela, cette année, je peux finalement vous dire en toute sincérité que pour la première fois, je n'y crois plus; nous n'y arriverons pas.
Ce sont certains des problèmes que nous avons eus dans la pêche. On peut citer d'autres problèmes qui se rapportent aux mêmes pêches. À l'heure actuelle dans l'inlet Saanich, comme le mentionnait Phil, on pêche le saumon kéta, 150 000 saumons kéta dans le cadre de la pêcherie ESSR. Pour ceux qui ignorent ce qu'est une pêcherie ESSR, quand l'idée a été présentée aux flottilles de saumon, cette pêche devait être ouverte à tous les groupes qui n'ont pas de lien avec les pêches. Par conséquent, tout club de chasse et de pêche, club de conservation ou personne intéressée à la mise en valeur des stocks pouvait demander un permis ESSR, sauf si vous étiez dans la pêche commerciale.
Les bénéfices ainsi réalisés devaient être réinvestis au profit des pêches. Autrement dit, ils devaient être utilisés pour augmenter la taille des remontées ou autre. Nous autres, dans la pêche commerciale, nous avons fait remarquer que cela deviendrait une pêche privée. Nous pouvions déjà voir les écueils. On gère la pêche pour que la pêche ESSR soit possible, mais au détriment de la pêche commerciale.
• 1734
Deux bateaux senneurs, lesquels ont tous les deux vendu leur
permis en vertu du programme de rachat et qui donc n'ont plus de
permis, ont attrapé les 150 000 saumons kéta. La même flottille
pêchait le kéta dans le détroit de Johnstone et a pris 155 000
saumons kéta. La flottille en avait le droit. Deux types ont
attrapé 150 000 kéta. Si deux types peuvent attraper 150 000 kéta
dans une pêcherie qui est isolée des autres stocks, pourquoi les
167 détenteurs de permis commerciaux ne peuvent-ils pas aller
pêcher dans la même zone pour une taille de remontée pratiquement
équivalente à la pêche normale?
Il y a quelque chose qui ne va pas. Quelque chose qui est fondamentalement injuste quand le poisson est transféré aux pêches privées contre... J'ai eu la même discussion avec un agent du MPO cette semaine au Fish Expo. Cela va à l'encontre de la manière dont on devrait assurer le fonctionnement des pêches. Cela devrait être permis après avoir épuisé ou après avoir donné suffisamment d'occasion de pêche à la flottille commerciale. Or, il n'y a eu aucune occasion de pêche sauf une pêche d'évaluation ponctuelle dans le détroit de Johnstone.
Si les 150 000 saumons kéta qui nageaient devant le Gulf Stream ont été pêchés par deux bateaux senneurs sans permis, alors j'aurais tout aussi bien pu les pêcher moi-même. Pourquoi pas moi? Mon privilège m'a tout de même coûté 3 800 $.
Comme nous l'avons dit, il y a eu plus de 20 millions de saumons roses. Nous avons eu une ou deux ouvertures pendant lesquelles nous n'avons pratiquement rien attrapé.
Rien ne semble indiquer que le ministère considère encore la pêche comme une activité à encourager. Il y a trois ans, je suis allé au Comité scientifique consultatif de la recherche dans le Pacifique. Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas ce comité, il s'agit d'un groupe scientifique qui organise des revues par les pairs d'articles scientifiques ou autres. L'un des biologistes halieutiques a déclaré, «Nous ne sommes plus en mode production; nous sommes en mode conservation». C'est la vérité. La conservation portée à l'extrême: plus de pêche du tout.
Tous les ans, le ministère promet des améliorations. Elles ne se concrétisent jamais. Malheureusement, le temps commence à nous manquer. Cette année, un des agents de gestion des pêches a même présenté des excuses à un groupe de pêcheurs qui n'ont pas pu pêcher. Mais on ne se nourrit pas d'excuses. Le système de gestion empire au lieu de s'améliorer.
Vous pourriez en conclure que l'objectif est la destruction de la pêche commerciale du saumon, mais je souscris à l'opinion de Mark. Je ne crois pas que le ministère soit aussi intelligent ou qu'il ait ce genre de plan tortueux.
Par contre, je crois que le système de gestion a graduellement changé. Il est difficile d'identifier exactement quand ces changements se sont produits, au-delà de l'accord de stratégie des pêches autochtones, la mise en place de la gestion de minimisation des risques et les hausses de l'échappée. Mais l'effet cumulatif de ces changements sur une longue période conduit le ministère à voir les choses différemment. Cette nouvelle vision fait obstacle à la pêche et ne permet plus au ministère d'accepter le risque inhérent à la pêche.
Notre directeur exécutif a travaillé au ministère pendant 25 ans. Il était chargé de la pêche au hareng. Il siège avec nous au Conseil consultatif de l'industrie du hareng.
Voici une petite anecdote qui vient de se produire. Le type a mis sur pied tout un système de gestion qui intégrait la science, la gestion et l'industrie de sorte que le processus consultatif est l'une des pêches les mieux gérées de toute la côte.
En fin de compte, certains gestionnaires des pêches remettent en question le TPA qui a été approuvé par le Comité scientifique consultatif de la recherche dans le Pacifique. Donc le comité dit, «Vous pouvez attraper 1 500 tonnes de hareng dans une région, c'est la prise autorisée» et ces gestionnaires des pêches remettent en cause cette décision.
Il y a quelque chose qui ne va pas. Je vous dis, c'est un effet du secteur du saumon. L'idée que nous ne devons pas pêcher est maintenant fermement ancrée dans leurs esprits. Notre directeur exécutif a beau leur répéter, «Le TPA est ce qu'il est. Il se base sur une gestion saine reconnue dans le monde entier. Pourquoi remettez-vous en question la science?» C'est ce qui se passe dans le secteur du saumon.
Au Fish Expo, je m'occupais du stand consacré au Code de conduite, dont je suis membre. Voici une autre anecdote: un pêcheur américain est venu me parler jeudi—un Américain, je le répète—et il m'a dit qu'il avait eu une très bonne saison de pêche au saumon sockeye du Fraser. Il m'a demandé comment cela s'était passé pour moi. Je lui ai répondu que j'en avais attrapé environ 400 et que 600 était notre part, je crois. Mais lui, il avait eu une bonne saison, en deux jours ou un seul, je ne sais pas.
• 1739
Le magazine national de la pêche aux États-Unis a publié un
article sur la bonne saison de pêche des Américains sur le saumon
sockeye du Fraser. Il n'en a pas été ainsi pour le type assis
derrière moi. Il m'a regardé droit dans les yeux en disant, «Dix-neuf
millions de saumons roses et 6 ou 7 millions de saumons
sockeye et vous n'avez pas pêché? Quand aurez-vous le droit de
pêcher?» C'est ce qu'il m'a demandé. «Quand aurez-vous le droit de
pêcher si vous ne pouvez pas pêcher dans cette remontée?»
• 1744
Je crois que la question que nous devrions poser n'est pas
pourquoi le ministère a fermé la pêche. Vous avez demandé à tous
les témoins antérieurs en vertu de quoi le ministère a fermé la
pêche. Ils répondront toujours: «en vertu de la conservation».
J'aimerais retourner la question. Vous devriez demander au
ministère «Quand Bob et les autres pêcheurs vont-ils pouvoir pêcher
s'ils ne peuvent pas pêcher pendant une remontée de 6 millions de
saumon sockeye et de 19 millions de saumon rose?» Car ce sont
probablement les nombres que nous allons avoir pendant longtemps.
Voici ce que je vous conseille: examinez rétrospectivement les 40 dernières années et toutes les remontées et les échappées que nous avons eues et demandez au ministère quelles sont les années où la pêche aurait été permise en vertu des règles actuelles. Tenez compte du régime de gestion actuel, des règlements actuels et de l'influence de la stratégie des pêches autochtones. Je suis prêt à parier qu'il n'y en aurait pas plus de deux ou trois, au plus un chiffre à compter sur une main.
• 1749
On finit par se demander... Nous avons pêché pendant ces 40
années et nous avons bénéficié d'un cycle de reconstruction
continuel. Vous pouvez repousser la question en disant, eh bien,
les conditions environnementales étaient bonnes et les remontées se
reconstituaient. Mais nous avons pêché et nous pêchions
souvent—les bateaux à filets maillants étaient sur le fleuve un ou
deux jours par semaine et les bateaux à lignes traînantes pêchaient
sept jours par semaine. Maintenant, nous ne pêchons plus du tout.
Les remontées sont là, mais nous ne pêchons plus.
Le système est abîmé. Il est abîmé bien au-delà du rafistolage. Il a besoin d'un examen sérieux et minutieux pour révéler comment nous en sommes arrivés là où nous sommes actuellement, quand le système nous a fermé toutes les possibilités. Qu'est-ce qui est arrivé à ce système? On mentionne la pêche à la morue dans l'Est et le reste. Cette pêche n'est pas la même, mais la manière de voir les choses qui en a résulté s'est propagée sur notre côte et a changé notre attitude.
Le ministère doit s'examiner, en évitant toute attitude agressive susceptible d'exacerber les disputes et les conflits; il doit poser un regard honnête sur le système pour découvrir ce qui ne fonctionne pas. Pourquoi ne pêchons-nous pas quand les tailles de remontées sont importantes? C'est incompréhensible.
Certaines des recommandations préconisent des ententes de gestion des pêches avec les représentants de l'industrie, des ententes de cogestion. L'entente qui nous a obligés à mettre nos prises en commun était une sorte de cogestion. C'est un exemple.
Les attributions doivent être plus fermes. Pris entre le gouvernement et les groupes d'utilisateurs, l'Alaska, notre concurrent principal, envisage sérieusement de ne plus habiliter le ministère à dire aux pêcheurs comment attraper leur poisson—faire les attributions, déterminer la taille de la remontée—et considère laisser les responsabilités de l'exploitation des pêches aux gens dont c'est le métier. À l'heure actuelle, le gouvernement ne semble pas avoir le moindre respect pour le droit du public de pêcher. Cela constitue la base de notre rapport.
Puisque la question s'est posée antérieurement, j'aimerais aussi parler des répercussions de ce régime de gestion sur le secteur de la transformation. Pour opérer avec efficacité, les travailleurs de ce secteur ont besoin d'une certaine accumulation des ressources. Il est impossible dans une usine de passer instantanément d'une capacité opérationnelle de zéro à 100 p. 100. L'usine doit être gérée en fonction de la remontée pour démarrer et avoir le personnel nécessaire en place. Les usines gardent un personnel de base, mais en cas de grosse remontée, si nous avions eu les 12 millions prévus et si nous avions pu pêcher, elles auraient dû passer, en l'espace d'une semaine d'un personnel réduit à des effectifs de 1 200 personnes, si elles pouvaient les trouver, pour faire tourner une grosse usine comme celle pour laquelle je travaille. Ce n'est pas possible. Cela n'a aucun sens. Vous ne pouvez pas demander à une industrie d'aller de zéro à une mise en marche accélérée en quelques heures. Alors, si vous vous demandez quelles sont les répercussions sur le secteur de la transformation, c'est là un des principaux problèmes.
On a beaucoup discuté des contrôles. Je pêche aussi dans la région nord. Deux ou trois fois par jour, un contrôleur sur les lieux nous demande ce que nous attrapons. Quand nous partons, nous devons déclarer ce que nous avons pris. Nous devons téléphoner dans les 24 heures de la fermeture de la pêche pour dire ce que nous avons attrapé. Quand nous livrons ce poisson, une fiche va au ministère et nous devons confirmer sur la feuille de déclaration téléphonique ce que nous avons en fait livré, pour leur permettre de faire la comparaison. Nous devons avoir un numéro de téléphone, un numéro de confirmation pour prouver que c'est bien ce que nous avons fait, faute de quoi nous risquons un retrait de permis l'année suivante. Personne d'autre n'est soumis à cela.
En ce qui concerne la pêche sélective, quand nous sommes allés à San Juan, cela nous a pris six mois pour mettre sur pied ce plan de pêche. Pendant que nous pêchions là-bas, quatre bateaux de la stratégie des pêches autochtones pêchaient parmi nous. Comble d'ironie, nous obtenons un jour pour toute l'année et ils pêchent parmi nous. Nous remontons le poisson à l'épuisette et ils font entrer le poisson par la rampe arrière. Ils pêchent comme ils l'ont toujours fait, rien n'a changé.
• 1754
Rien de marche. S'il y a un problème de conservation sur le
coho, alors, il y a un problème pour tout le monde, pas seulement
pour Bob ou le type derrière moi, mais pour tout le monde, mais
personne n'ose le dire.
Quoi qu'il en soit, c'est la base de notre exposé.
Le vice-président (M. John Cummins): Monsieur Rezansoff, en ce qui concerne ce dernier point, pourriez-vous expliquer au comité l'expression «faire entrer le poisson par la rampe arrière» et le fait que les bateaux autochtones ne faisaient pas cela.
M. Frank Rezansoff: Dans la flottille que nous avons à l'heure actuelle, la majorité des bateaux ont été construits pour faire entrer le poisson à l'arrière par une sorte de rampe. Ils comportent un plan incliné à l'arrière qui permet de ramener dans le bateau de grandes quantités de poissons; c'est une méthode très efficace de manoeuvrer rapidement de grands volumes. Mais cette méthode ne se prête pas au tri de la prise, il est difficile d'être sélectif et de relâcher le poisson dans l'eau vivant, c'est pourquoi maintenant, nous maintenons le poisson le long du bateau et nous le déchargeons à l'aide d'épuisettes d'une capacité de cent à trois cent poissons à la fois selon l'espèce. Ils sont mis dans une boîte en aluminium où ils sont triés. S'ils ont besoin d'être ranimés, nous les mettons dans des bassins de réanimation et les gardons là jusqu'à ce qu'ils soient ranimés. S'ils sont vigoureux dans la boîte et n'ont pas besoin de réanimation, nous les relâchons vivants immédiatement.
C'est un changement assez important par rapport à ce que nous faisions avant, la différence étant qu'un bateau comme le nôtre pouvait probablement faire entrer facilement par la rampe arrière 5 000, 6 000 ou 7 000 saumons roses en quelques minutes, tandis que si nous avons le long du bateau 5 000 ou 6 000 saumons roses, les décharger avec épuisettes et les trier 300 à la fois est un gros travail.
Le vice-président (M. John Cummins): À un autre moment, vous avez mentionné le plan Mifflin; avant 1995-1996, vous aviez un permis qui vous autorisait à pêcher sur toute la côte. Après cette date, la côte a été divisée en deux zones pour la même flottille; par conséquent, si vous vouliez pêcher comme vous le faisiez auparavant, il fallait acheter un autre permis.
M. Frank Rezansoff: En effet, quand ils ont divisé la côte en deux zones, A et D, vous choisissiez une zone. J'ai choisi la zone sud. C'était en 1996. Nous n'avions pas eu d'ouverture en 1996 ou s'il y en a eu une, c'était pour une journée et nous n'avions rien attrapé. C'était après le départ des poissons. Alors, j'ai pratiquement manqué une année.
L'année suivante, j'ai acheté un permis pour l'autre zone, c'était environ 300 000 $. Nous avons fortement subventionné le plan qui devait nous rendre économiquement viables. Mais, jusqu'à maintenant, cela ne s'est pas produit.
Le vice-président (M. John Cummins): Autrement dit, vous deviez payer 300 000 $ supplémentaire pour pêcher où vous le faisiez auparavant.
M. Frank Rezansoff: Oui, c'est cela, et je paie encore.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci.
Avez-vous des questions?
Monsieur Lunney.
M. James Lunney: Merci.
Premièrement, où se trouve la zone 20?
M. Frank Rezansoff: La zone 20, c'est Juan de Fuca, de Sheringham Point à Carmanah, ou à l'entrée du détroit de Juan de Fuca, au sud de l'île de Vancouver jusqu'à l'océan ouvert.
M. James Lunney: C'est bon. Si j'ai bien compris, vous avez dit que vous n'avez pas payé toutes vos factures de flottille de la zone 20...
M. Frank Rezansoff: Personne n'a gagné d'argent en venant. Un groupe d'entre nous est venu, ils avaient deux permis et pêchaient dans la zone nord, vers Skeena ou la zone centrale; ils ont laissé cette pêche pour y aller, renonçant ainsi à deux jours de pêche parce qu'ils pensaient que cela en valait la peine. Nous avons pêché 4 000 saumons sockeye à un dollar la livre, ce qui représente environ 4 000 $. Je suis sûr que ma facture de carburant était de 4 000 $. Alors, quand on soustrait tous les frais de voyage et le manque à gagner... La pêche était restée ouverte au nord, alors, non seulement nous avons renoncé à quelques jours de pêche, mais nous avons aussi attendu trois jours avant d'y retourner. Nous avons payé ces frais de notre poche.
En outre, toute la flottille était censée payer l'étude de mortalité qui devait être effectuée sur le coho. Elle devait nous montrer comment organiser cette pêche.
Au départ, on nous a dit que l'étude de mortalité ne serait pas nécessaire. Ensuite, on nous a dit que si. Puis, on nous a dit, non, le ministère la financerait. Finalement, on nous a annoncé que le ministère s'occuperait de la logistique mais que nous devrions la financer avec nos prises, de sorte que chacun contribuerait au coût de cette étude de mortalité ou qu'elle serait financée avec les 500 $ que tout le monde a payé pour la formation. Mais il n'y avait pas assez d'argent pour couvrir les frais de cette étude. Finalement, nous avons dit au ministère, écoutez, ce n'est pas nous qui avons demandé cette étude, c'est vous qui l'imposez, personne d'autre ne finance les études, pourquoi devrions-nous le faire?—et nous avons tout simplement refusé de payer.
M. James Lunney: En deux mots, vous pêchiez dans la zone 20, puis quand la pêche a été ouverte au sud, dans l'autre zone, vous avez quitté la zone et vous êtes précipités vers le sud pour être déçus quand vous êtes arrivés. Ces ouvertures se produisent-elles en même temps, cela prête à confusion...
M. Frank Rezansoff: Oui, si vous êtes détenteur de plusieurs permis, vous ne pouvez probablement pas avoir accès aux deux zones en même temps.
Voici ce qui s'est passé, nous pêchions dans la Skeena et ils ont dit que la zone centrale ouvrirait peut-être, peut-être pas, puis finalement ils ont annoncé qu'elle ouvrirait. La façon dont la pêche était organisée, vous deviez téléphoner. La date limite était 36 heures avant l'ouverture. Vous deviez dire par téléphone ou par télécopie si vous alliez y participer, puis vous deviez arriver à San Juan et à Port Renfrew dix heures avant l'ouverture. Vous deviez être là pour aller chercher votre permis en personne, faute de quoi vous n'étiez pas admissible à la pêche. Alors pour nous plier à ces conditions, nous avons dû partir tôt de Prince Rupert, aller à toute vitesse en brûlant du carburant pour arriver sur place afin de prendre part à la pêche.
M. James Lunney: Je voudrais parler d'autre chose, et revenir sur la pêche ESSR. C'est quelque chose d'assez nouveau, il me semble, mais je voulais avoir quelques explications. On dit dans un des exposés que le public n'a pas accès aux permis ESSR et qu'ils sont réservés aux Autochtones. Est-ce vrai?
M. Frank Rezansoff: Si vous examinez leur histoire, quand ils nous ont été présentés pour la première fois, j'étais membre du Comité consultatif sur la côte Sud. Quand ils ont été introduits, il devait y avoir ces pêches ESSR, on nous a expliqué qu'elles seraient ouvertes à tous les groupes qui n'ont pas de permis de pêche ou qui n'ont aucun lien avec l'industrie commerciale. Les permis devaient entrer en vigueur après la fin de la pêche commerciale.
Théoriquement, on pourrait penser qu'il y a des régions où on pourrait pêcher, mais où les poissons ne sont pas pris. Quoi que nous fassions, le poisson s'échappe parce qu'il y en a trop, à cause des conditions ou autre, donc les exigences en matière de frai du saumon sont peut-être excessives. Le nouveau poisson a alors tendance à creuser pour mettre à jour le frai. Dans certaines circonstances, il faut attraper ces poissons.
Cette pêche avait été organisée au départ pour que tous les groupes puissent y avoir accès, mais très vite, en un an ou deux, elle est devenue exclusivement réservée aux Autochtones. En outre, il n'y a aucune transparence dans ce processus. L'argent était censé être utilisé pour la réhabilitation des remontées etc., mais je n'ai jamais vu la moindre documentation indiquant où va l'argent, dans la poche de qui, si le poisson est vendu légalement ou s'il est vendu à petit prix au premier tour et à profit au deuxième tour. Il n'y a aucune transparence. C'est essentiellement un transfert.
En outre, je serais prêt à parier n'importe quelle somme que ce poisson fera partie des traditions dans l'établissement du traité. On empêche la flottille commerciale de pêcher, on transfère le poisson aux Autochtones par le biais du ESSR, puis quand on négocie le traité, eh bien, cela fait partie de nos traditions, bon an mal an, nous avons toujours attrapé 150 000 poissons à Goldstream. Et puisque que cela fait partie des traditions, aucune compensation ne sera prévue dans le traité pour le pêcheur commercial. C'est une arme à double tranchant—peut-être à même quadruple tranchant.
M. James Lunney: Merci, monsieur le président.
Le vice-président (M. John Cummins): Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Je vais poser une question pour qu'on éclaire ma lanterne, étant donné que je ne suis pas une spécialiste des pêches, et une autre question pour essayer de comprendre un peu le contexte dans lequel vous vivez.
Premièrement, que veut dire au juste
[Traduction]
«améliorer le programme des pêches à l'essai»?
M. Frank Rezansoff: Parce que l'information à la commission était fondée sur une pêche commerciale une fois par semaine dans la zone 20 et dans le détroit de Johnstone et parce qu'il y a eu trois années—nous pensons à l'année 1996—pendant lesquelles il n'y a eu aucune pêche suite à des soucis sur la conservation des stocks, les personnes participant à ce niveau, à la réunion d'experts ou à la commission, ont présenté un plan visant à augmenter la pêche-pilote. Plutôt que d'avoir un bateau à Juan de Fuca et deux dans le détroit de Johnstone, ils auraient été partisans d'en avoir deux ou trois dans le détroit de Juan de Fuca et éventuellement quatre, cinq ou six dans le détroit de Johnstone pour essayer de remplacer une pêche.
• 1804
Dans un sens, c'est assez positif puisque cela peut vous
fournir de l'information, sans perdre de vue qu'il faudra pas mal
de temps pour l'organiser. D'un autre côté, du point de vue des
pêcheurs, ce n'est pas vraiment positif étant donné qu'il va y
avoir environ une demi-douzaine de personnes en train de faire de
la pêche expérimentale en gagnant leur vie alors que le reste
d'entre nous restera à ne rien faire en attendant la suite des
événements.
La meilleure chose serait que nous ayons une pêche, et prenons l'exemple de cette année, lorsque nous avons pêché à la première ouverture de la pêche, nous avons attrapé—entre Juan de Fuca et le détroit Johnstone—environ 75 000 saumons sockeye pour l'entière flottille. La taille de la remontée était supposée être d'environ six millions pour nous permettre d'avoir d'autres pêches, mais elle a été réduite immédiatement à environ cinq millions et aucune autre pêche n'a été fixée.
Maintenant, si vous aviez prévu une pêche pour la semaine suivante et que la taille de la montaison était réellement de cinq millions, nous aurions pu attraper encore 75 000 poissons, peut-être moins, auquel cas, il y aurait eu moins de poissons que ce que vous n'auriez été capables de mesurer. Le ministère n'a même pas pu mesurer une tolérance à cette pénalité. L'effet sur la frayère aurait été pratiquement nul. Lorsque cinq millions de poissons sont répartis entre deux réseaux et que vous en prenez moins de 75 000, cela ne veut rien dire. Par contre, si nous avions pêché et attrapé davantage de poissons, cela aurait pu leur fournir l'information dont ils avaient besoin pour dire que la taille de la montaison était de six millions, auquel cas les bateaux à filet maillant auraient pu pêcher et nous aurions pu avoir une autre ouverture.
Nous sommes maintenant arrivés au point où toute notre information est fondée sur une pêche et vous ne pouvez avoir la pêche parce que vous n'avez pas l'information. C'est un cercle-vicieux. L'idée d'augmenter la pêche expérimentale visait à placer davantage de bateaux à l'eau afin de leur fournir une information plus importante, cependant cela prendrait du temps de développer toute cette information et certains groupes ne l'acceptent pas.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Vous avez fait allusion au fait que vous aviez rencontré un Américain qui avait eu la chance, lui, de pêcher des saumons de la Fraser.
Je voudrais revenir à la question que j'ai posée à votre collègue qui vous a précédé. Avez-vous l'impression ou peut-on imaginer qu'il y a peut-être quelque chose entre le gouvernement canadien et le gouvernement américain qui fait qu'on a pris des décisions ici pour avantager les Américains en vous empêchant de pêcher parce qu'on essaye de jouer donnant, donnant? Se pourrait-il qu'il y ait anguille sous roche même si c'est du saumon que vous pêchez? On ne sait jamais.
[Traduction]
M. Frank Rezansoff: Non, je ne suis pas vraiment de cet avis. Je pense que les pêches en rivière vont bénéficier davantage de cet état de choses. Je ne pense pas qu'il s'agit d'un complot international. Je considère que la raison pour laquelle les Américains ont pêché était qu'il leur était alloué un pourcentage de cette montaison sur une certaine période, si je ne me trompe, et ils avaient prévu d'attraper les poissons. Ils ont commencé à pêcher sur cette remontée avant nous. Je pense que leur ouverture a eu lieu avant que nous ne commencions réellement à pêcher et ils ont attrapé une quantité appréciable de poissons. Non, je ne suis pas d'avis que ce soit exact.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Nous sommes aujourd'hui le 19 novembre. On vous a empêchés de pêcher au mois d'août et vous aviez commencé à vous préparer au mois de mars. Qu'avez-vous fait entre le début d'août, quand on vous a empêchés de pêcher, et le 19 novembre? Moi, j'écoute tous les bulletins de nouvelles. CBC fait les nouvelles à partir de Toronto et Radio-Canada les fait à partir de Montréal.
• 1809
Comment se fait-il que les nouvelles se sont rendues avant
le 19 novembre pour que vous sachiez
ce qui vous arrivait?
Qu'est-ce que vous avez fait? Avez-vous fait du
lobbying? Êtes-vous allés au bureau du ministre? Il
est dans votre comté. Le ministre est ici, dans votre
région. Est-ce que quelqu'un a arrêté sa
limousine pour lui parler et lui demander s'il était
au courant de ce qui se passait? Avez-vous fait
quelque chose?
[Traduction]
Une voix: Bonne question.
M. Frank Rezansoff: Je ne peux réellement parler que de mon expérience personnelle. J'étais supposé faire un test pendant cette pêche à San Juan ou Juan de Fuca, et en fait, je disposais pendant la pêche d'un peu d'équipement sur le bateau. Je suis retourné faire les tests bien qu'elle soit fermée. J'ai été obligé de faire demi-tour à mi-chemin lorsqu'ils m'ont dit qu'il n'y avait pas assez de poissons pour leur permettre de me payer pour effectuer le test. Je suis donc rentré à la maison et j'ai attendu un jour de plus et puisque j'avais plusieurs permis, je suis parti avec mon engin en direction de la zone 20, J'ai jeté mes filets du Nord et je suis parti en direction du Nord. Je me suis précipité sur mon autre zone et j'ai commencé à pêcher jusqu'au mois de septembre, à la fermeture de la zone. Je suis ensuite rentré à la maison.
J'ai passé pas mal de temps à travailler au Conseil consultatif de l'industrie du hareng puis ensuite au Conseil de recherches. Ensuite, je vous le déclare franchement, j'étais tellement déprimé que je pensais abandonner la pêche et je n'ai eu de contact avec personne. Je me suis éloigné tout simplement parce que j'étais épuisé. J'ai passé six mois relativement désagréables à essayer de faire faire quelque chose à des gens qui n'étaient pas vraiment décidés. Et au bout du compte, il n'y avait aucune récompense.
Je viens de passer cinq années difficiles à essayer de survivre dans cette pêcherie tant bien que mal...j'arrive bientôt à l'âge de prendre ma retraite. Et tout d'un coup je me rends compte que mes primes de retraite ne valent rien. Je ne serais peut-être plus capable de pêcher ou je serai sans doute obligé de pêcher jusqu'à l'âge de 70 ans. Je vais être contraint de repartir à zéro, tout simplement parce que mes actifs ne valent plus rien et je ne peux même pas les vendre.
Qu'est-ce que j'ai pu faire? En fait, je me suis tout simplement éloigné pendant deux ou trois mois, parce que j'en avais besoin, à un niveau personnel.
Quelles sont les nouvelles? Nous avons protesté ici à plusieurs reprises. Voulez-vous que nous descendions dans la rue pour incendier la tour de la rue Hasting? Il se pourrait que ce soient les nouvelles. Mais je ne pense pas qu'ils prendraient en considération le fait que nous descendions pour leur dire que nous ne pêchons plus. Nous avons été mis à l'écart en acceptant...et cela vient d'une personne qui soutenait ou pensait que la réduction de la tessure était une bonne chose.
C'était réellement une bonne idée, mais nous avons marginalisé l'industrie. La situation n'est pas comme à l'Est, où la majorité de la population des petites communautés exerce la profession de pêcheurs. Ici, il n'y en a presque plus. La tessure est tellement petite depuis que nous avons arrêté la pêche et ce n'est pas vraiment nouveau. Voici votre réponse.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci.
Pourrions-nous essayer de raccourcir un peu les réponses et les questions? Notre prochain témoin est également assez pressé.
Monsieur Wappel.
M. Tom Wappel: Je ferai de mon mieux, monsieur le président.
Je vous remercie de votre intervention.
J'essaye de me faire une idée en comparant ce qui est comparant ce qui est comparable et j'espère que vous pourrez m'aider. Je pense que le projet auquel vous avez participé vous a demandé beaucoup d'efforts. Il est vraiment dommage que vous n'en ayez tiré aucun bénéfice. Cela paraissait une excellente façon de travailler avec le MPO et je tiens à vous féliciter d'avoir au moins essayé.
Je souhaite seulement vous poser quelques questions à ce sujet. Vous avez indiqué 45 965 saumons sockeye à la page 21 de votre rapport. Était-ce pour les deux jours?
M. Frank Rezansoff: Oui, c'est le total pour les deux jours.
M. Tom Wappel: M. Eidsvik parle dans son exposé de la pêche à la senne des Autochtones. Il déclare «les navires ont pêché à l'embouchure du Fraser et à San Juan de Fuca». Était-ce à ce même endroit que vous pêchiez?
M. Frank Rezansoff: Oui, je pense qu'il y en avait quatre ou cinq...
M. Tom Wappel: C'est ce que vous nous avez dit. Je veux seulement être certain que nous parlons bien de la même chose, parce que selon ce qu'il a dit, le MPO a octroyé à six navires 30 jours pour pêcher 80 000 poissons dans le même secteur que vous aviez pendant sept heures pour 73 navires et pour pêcher 46 000 pièces. Ai-je raison?
M. Frank Rezansoff: Je vois où vous voulez en venir. Comment se fait-il qu'ils en ont attrapé 80 000 et nous 45 000?
M. Tom Wappel: Pour l'instant, je vais considérer qu'ils en ont attrapé davantage étant donné que c'est le bruit qui court. C'est ce qui leur avait été octroyé et assumons qu'ils ont attrapé la quantité qui leur était allouée. C'est à dire 13 330 pièces par navire et vous aviez 629 pièces par navire.
• 1819
Maintenant, assumons pendant un moment que c'était la
conservation et que le total dont parlait le MPO aurait été de
80 000 plus les 46 000—ce qui représente 126 000—si nous parlons de
conservation, s'ils souhaitaient que tout le monde dans la même
industrie attrape 126 000 au mois d'août, et ils ont décidé que par
souci de conservation, telle est la quantité que vous auriez pu
attraper, et ils l'ont divisé entre 46 000 pour vous et 80 000 pour
la pêcherie autochtone; y avait-il une raison à cela?
M. Frank Rezansoff: Non, cela n'aurait pas du être fait de cette façon. Ils pêchaient depuis longtemps avant que nous n'arrivions sur place.
M. Tom Wappel: D'après cela, ils ont commencé le 1er août et vous avez commencé le 5 août.
M. Frank Rezansoff: D'accord, le 1er août. C'est avant que nous arrivions et ils ont continué à pêcher après notre départ. Il n'y aurait aucune corrélation à rassembler les deux et à dire...
M. Tom Wappel: Pourquoi pas? Si vous parlez de la conservation, si vous êtes préoccupés par la surexploitation du poisson, il existe un certain nombre de poissons que le MPO vous permettrait de pêcher.
M. Frank Rezansoff: la seule chose que je puisse vous dire est qu'à mon avis, le ministère s'occupe de la conservation de deux différentes façons. Il y a un niveau auquel ils empêcheront les pêcheurs de commerce de pêcher, puis, il y a un deuxième niveau auquel ils arrêteront les poissons qui seraient considérés faire partie de la section 35 comme poissons comestibles. Autrement dit, le niveau de conservation pour ces gens-là devrait être...
M. Tom Wappel: Oh, mais allons-donc, 13 000 pièces par navire pour la consommation et les cérémonies rituelles en comparaison de 629 par navire lorsque vous vous trouviez là bas...ils ne peuvent vraisemblablement pas justifier cet état de chose.
M. Frank Rezansoff: C'est pourtant ce qu'ils font.
M. Tom Wappel: Bon, nous verrons cela.
M. Frank Rezansoff: En plus, 80 000 est le nombre qui leur est alloué, mais ils pêchent tous les jours de la semaine. La différence entre le fait qu'ils pêchent à cet endroit et que nous pêchions à cet endroit, comme nous vous l'avons expliqué, réside dans le fait que nous pêchions dans des conditions extrêmement strictes. Nous devions demander l'autorisation de nous installer jusqu'à ce qu'ils nous laissent partir le dernier jour à 13 h 00. Nous devions demander l'autorisation de jeter nos filets et jusqu'à ce qu'ils nous y autorisent, nous ne pouvions nous installer.
• 1824
Ils sont présentement en train de pêcher. Ils vont là-bas
seulement pour pêcher. Ils commencent à six heures du matin et ils
n'arrêtent pas. Ils pourraient faire 12 expéditions par jour.
M. Tom Wappel: Il estimait 500 000 saumons sockeye dans son exposé. Mais pour les besoins de ce que j'aimerais faire ressortir, même s'il s'agit de 80 000, je ne vois pas comment cela a été réparti s'ils se préoccupent de la conservation. Si la conservation ne constitue pas un problème, alors, ils font autre chose.
M. Frank Rezansoff: À mon avis, ils gèrent la conservation à deux niveaux différents. Le niveau de conservation pour la tessure commerciale existe et lorsque nous arrivons là-bas, nous arrêtons. Et le niveau pour arrêter une pêche autochtone ou une pêche de section 35 serait lorsque la remontée est proche de l'extinction. À ce stade, ils arrêteraient cette pêche. Mais ils ne l'arrêteraient pas au même moment... C'est évident. Ils ont continué à pêcher dans la rivière. Après nous avoir arrêtés, ils ont continué à pêcher. Il existe donc deux façons de traiter la conservation.
M. Tom Wappel: Merci monsieur. Merci monsieur le président.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci.
Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Merci monsieur le président.
Nous vous remercions de votre exposé. À la page 25 vous annoncez que vous ne pouvez qu'en conclure que l'objectif du MPO est de détruire la pêche commerciale publique du saumon. Vous parlez de la pêche commerciale du saumon. Vous ne faites pas de différence entre la pêche commerciale des Autochtones ou la pêche commerciale non autochtone. M. Eidsvik nous a dit qu'elles sont...
M. Frank Rezansoff: Je suggère que la seule pêcherie qui ne pêche pas soit la pêcherie commerciale régulière.
M. Peter Stoffer: D'accord. Je devine que la question que je vais vous poser... Vous avez dit que vous étiez là depuis 39 ans.
M. Frank Rezansoff: Oui.
M. Peter Stoffer: Qu'est-ce qui vous fait dire cela et pourquoi pensez-vous que l'objectif du MPO est de détruire ou de se débarrasser de la pêche commerciale régulière du saumon, comme vous dites? Pourquoi, font-ils cela à votre avis? Il doit bien y avoir une raison.
M. Frank Rezansoff: Si vous étiez vraiment cynique...
M. Peter Stoffer: Mais je le suis.
M. Frank Rezansoff: Ce n'est pas que je le sois, mais si vous l'étiez... Prenons par exemple le récent traité Nisga'a. Le ministère a fait certaines prévisions avant le traité quant au coût inhérent aux mesures d'atténuation, au rachat des permis, et a découvert que la quantité d'argent qui leur était nécessaire dépassait considérablement les prévisions. J'ai pris part au processus qui leur a permis de résoudre ce problème. Nous n'avons pas cessé de leur rappeler qu'ils n'indemnisaient pas suffisamment le nombre de poissons autorisés par bateau. Ils étaient bien loin du compte. Ils ont rétorqué qu'ils n'avaient plus d'argent étant donné qu'ils avaient alloué une certaine somme en tant qu'indemnisation dans le cadre de ce traité et qu'elle avait été complètement dépensée. Ils voulaient savoir de quelle façon ils allaient pouvoir acheter le reste. Nous leur avons répondu: «Ce n'est vraiment pas notre problème. Vous avez fait une erreur; vous avez fait une sous-estimation.»
Étant donné qu'ils vont signer de nombreux autres traités plus tard, si vous étiez cynique, vous penseriez probablement que s'ils peuvent amener la flottille de pêche à la faillite, ils obtiendraient une indemnisation pour bigrement moins d'argent—si vous étiez cynique.
M. Peter Stoffer: D'accord.
Vous avez également indiqué au début de votre exposé qu'une personne du SCP, par exemple, a aboutit aux pêcheries. Vous dites que la gestion du SCP et des pêcheries est complètement différente. Ce en quoi vous avez parfaitement raison. Diriez-vous que certains des problèmes que rencontre le MPO sur la côte Ouest sont essentiellement—et je dis cela respectueusement—dus à l'ignorance et à un manque total d'expérience? Parmi les personnes que vous connaissez au MPO, combien d'entre elles ont, comme vous, 39 années d'expérience?
M. Frank Rezansoff: Pas beaucoup, il est vrai.
M. Peter Stoffer: Pas beaucoup.
M. Frank Rezansoff: Et même lorsque je dis que le système est rompu, même pour ceux qui sont là depuis longtemps, il est plus facile pour eux de ne pas avoir de pêche. Si vous n'avez pas de pêche et qu'il n'y a pas l'ombre d'un poisson dans les frayères, eh bien c'est la nature. Mais si vous avez une pêche et peut-être un peu moins d'échappée, eh bien, ce sera de ma faute.
Nous nous sommes lentement enferrés dans cette situation, je pense, dans laquelle même les gestionnaires de lignes qui peut être en savent plus, n'ont pas vraiment envie de faire quelque chose contre l'ordre établi et aller pêcher.
Je vais vous donner un exemple. Lors que nous avons commencé à choisir les pêches, nous étions sur le point de mener une importante série de tests par bateaux à filet maillant et senneurs à Barkley Sound. Le gestionnaire de secteur nous a dit qu'il n'y avait pas assez de poissons à Barkley Sound pour que nous puissions faire le test. Il nous a affirmé que c'était impossible et que nous allions endommager la remontée. Et bien vous pouvez aller jeter un coup d'oeil aux statistiques et voir ce que nous avons attrapé en sept jours de test à Barkley Sound. C'était réellement phénoménal. Et voici un gestionnaire de ligne qui nous dit qu'il n'y a pas de poisson à cet endroit et que l'on ne peut pas pêcher.
• 1829
Je ne pense pas que le ministère ait l'intention au niveau
opérationnel le plus bas de reléguer la pêche dans les oubliettes.
Si l'on monte davantage dans la hiérarchie, et si l'on prend les
traités en considération et toutes les autres choses, je pourrais
penser un peu différemment. Cependant, je suis intimement convaincu
que nous nous sommes emprisonnés, pendant un certain temps, avec
les changements supplémentaires qui sont intervenus pour
différentes raisons, comme par exemple être au bord de la
catastrophe si une certaine flottille est mise à l'eau.
La crise de la morue est survenue sur la côte Est et tout le monde a pris peur. Ceux qui savaient ce qu'ils faisaient sont partis. La stratégie de pêche des Autochtones et la question entière des pêches autochtones a rendu les choses tellement désagréables que tous les gestionnaires quel que soit leur niveau, attendent et comptent—et comptent encore!—les jours qui les séparent de la retraite qui leur permettront de s'échapper du système, car en fait, ils n'éprouvent plus du tout l'envie d'y rester. Et tout cela, empilé dans un système, fait que le mécanisme est brisé et n'est plus opérationnel. Ça ne marche pas.
M. Peter Stoffer: Merci, monsieur Rezansoff.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci beaucoup, monsieur Rezansoff. J'apprécie vraiment votre mémoire aujourd'hui.
J'ai seulement un commentaire à faire avant que vous ne partiez. Cette situation à la direction des pêcheries me rappelle cet ancien adage qui racontait comment un banquier compétent n'aura que peu de mauvais prêts hypothécaires. Un bon gestionnaire de pêcherie fera la même erreur. Il est probable qu'elles ne vont pas être fatales à certaines remontées en particulier, mais il se peut que le nombre sur les frayères soit légèrement moins élevé que ce que vous souhaiteriez. Mais ce n'est pas la fin du monde.
Est-ce que ce n'est pas le message que vous avez essayé de nous faire passer?
M. Frank Rezansoff: J'utiliserai les termes utilisés par notre directeur administratif qui s'occupe de l'industrie du hareng...et il a utilisé les mêmes mots en ce qui concerne le saumon...lorsque nous essayions d'installer cette pêcherie à Juan de Fuca. Voici un homme à qui le ministère a offert une plaque pour sa gestion exemplaire tout au long de ces années. Il a mis en place un système de gestion qui est reconnu dans le monde entier.
Il a regardé les personnes en poste maintenant et il a dit: «Messieurs, ce n'est pas un champ de pommes de terre; vous ne pouvez pas planter une belle rangée de pommes de terre, puis les tirer par la queue.» Il existe pas mal de risques à gérer une pêcherie. Quoique vous fassiez, vous prenez des risques. Et en ce moment, le ministère est complètement opposé au fait de prendre des risques.
Le vice-président (M. John Cummins): Juste une petite question, monsieur Cuzner.
M. Rodger Cuzner: Si je pouvais, étant donné que le ministre a démontré que si on lui donne la science et l'encouragement des bureaucrates...nous avons certainement pu le remarquer sur la côte Est pour la pêche de crabes des neiges. Les allocations ont été augmentées là-bas. Pour aller dans le sens de ce qui est exposé ici aujourd'hui...des décisions sont prises selon l'information reçue.
Je recommande votre groupe dans le cadre du plan de gestion. Vous avez fait preuve d'imagination et vous avez pris des risques. Que s'est-il passé depuis que la saison est fermée? Le groupe a-t-il rencontré à nouveau le MPO? Les recommandations ont-elles fait leur chemin et quelle a été la réaction?
M. Frank Rezansoff: Non, nous n'avons eu aucune réunion avec eux depuis.
Une petite partie du groupe ayant participé à l'élaboration de ce plan a rencontré les porte-parole du ministère. En discutant avec eux, ils nous ont dit qu'ils espéraient travailler en collaboration et mettre sur pied un plan de pêche pour l'année à venir, mais de toutes les façons, ils avanceraient que ce soit avec ou sans la collaboration du ministère. Ils allaient l'aborder de façon différente; ils allaient développer un plan de pêche et s'ils n'emportaient pas l'adhésion du ministère sur ce plan de pêche, ils allaient pêcher sans en tenir compte.
Je pense que cela vous montre vraiment l'état de désespoir dans lequel se trouvent les personnes impliquées. Elles sont tout bonnement au bout du rouleau. Elles n'aperçoivent aucune possibilité de continuer au-delà d'une ou peut-être de deux années. Pour une communauté de pêcheurs qui, somme toute, au cours des trois années pendant lesquelles j'ai pêché, a été relativement honnête et respectueuse des lois, et peut réellement être seule soumise à exécution, parce qu'elle est...pour suggérer qu'ils vont aller pêcher quoi qu'il en soit montre qu'ils sont arrivés à un niveau de désespoir que le ministère se doit de reconnaître.
• 1834
Avons-nous rencontré les propriétaires du navire en
particulier? Non, et je suppose que nous avons été négligents de ne
pas considérer l'affaire globalement, mais je ne voyais aucune
raison de le faire.
J'ai travaillé à l'interne avec notre groupe pour essayer de rassembler quelques idées sur la meilleure façon d'aborder le problème du système de gestion, et comment en discuter avec le ministère. Nous y sommes pratiquement arrivés et nous avons pu élaborer un mémoire nous permettant de trouver une solution. La première chose à faire est d'obtenir quelques indices comme quoi ces personnes responsables veulent bien se remettre en question et reconnaissent que quelque chose ne va pas. Je ne suis pas certain que nous avons pu recueillir ces informations.
Beaucoup de gens responsables de la gestion quotidienne, sur le terrain au niveau de la gestion de ligne, ont reconnu pendant la pêche que quelque chose n'allait pas, mais ils ne font pas partie des personnes qui ont un pouvoir de décision. Au niveau du ministère ou DGR, je ne suis pas certain que l'on reconnaisse que le système est faussé.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci infiniment, monsieur Rezansoff, pour cet exposé tout simplement extraordinaire.
Notre prochain témoin sera M. John Radosevic de l'United Fishermen and Allied Workers' Union. Pendant que John s'approche, j'aimerai attirer votre attention sur ce point, monsieur Stoffer.
Il y de nombreuses années, nous disposions de quelques cadres dirigeants témoins, du MPO avant que le comité ne soit à Ottawa. À ce stade, je leur ai simplement demandé à chacun depuis combien de temps ils étaient avec le ministère. Il s'agissait, comme je vous l'ai dit, de cadres dirigeants. Le ministre actuel et les conseillers principaux étaient présents. Toutes leurs réponses ont été identiques: six mois pour certains, un an et demi pour d'autres. La seule personne étant restée au ministère pendant une période assez longue était le scientifique qui était là depuis 29 ans.
Il s'agissait là des personnes qui prenaient les décisions au ministère. Ils n'avaient pratiquement pas d'expérience au sein du ministère. Ils étaient arrivés là en gravissant les échelons; ils venaient tous d'ailleurs.
Une voix: Faites-vous allusion à ceux d'Ottawa ou ceux de la côte Ouest?
Le vice-président (M. John Cummins): Cela se passait à Ottawa, mais les décisions qui ont été prises ici sont étudiées en détail là-bas et cela pose un réel problème.
Une voix: C'est un point de vue tout à fait valable.
Le vice-président (M. John Cummins): Je vois, monsieur Radosevic, vous êtes accompagné par M. Sutcliffe.
M. John Radosevic (président, United Fishermen and Allied Workers Union): Oui, nous sommes vraiment deux. Vous ne voyez pas double, monsieur le président.
Le vice-président (M. John Cummins): C'est bien.
M. John Radosevic: J'aimerai tout d'abord remercier le comité pour son temps. Je suis accompagné par John Sutcliffe. John est le vice-président de l'United Fishermen and Allied Workers Union, le TCA et je suis le président de cette organisation.
Je veux rester bref. Si vous avez des questions, n'hésitez pas, mais je pense que les orateurs de l'industrie ont probablement fait un travail exceptionnel en rassemblant les détails de cette saison et les événements survenus dans les pêcheries cette année.
La position du syndicat a été largement reportée depuis la mise en oeuvre du programme expérimental des ventes SPA. Il est évident que nous ne soutenons pas les composantes expérimentales des ventes de la stratégie des pêches autochtones. Nous pensons que l'objectif de cette stratégie est de soulager le gouvernement fédéral de certaines de ses obligations associées aux revendications territoriales, au détriment d'un segment de la société, à savoir l'industrie de la pêche commerciale et les personnes qui en vivent.
Ce plan est particulièrement présomptueux étant donné qu'il ne fonctionne que marginalement s'agissant de servir les intérêts des membres des Premières nations, mais pour ce faire, il en coûte énormément aux personnes de l'industrie de la pêche commerciale, y compris aux pêcheurs professionnels autochtones. Les répercussions sont également importantes sur le poisson étant donné que cette pêche mine ou compromet la conservation—comme je suis certain que vous l'avez déjà entendu des intervenants précédents.
J'apprécie que le comité ait pu se déplacer. Cette question est importante. J'aimerai seulement rappeler au comité—peut-être certains d'entre vous s'en souviendront si vous faisiez partie du comité, à ce moment—que la dernière fois que ce comité nous a entendus à ce sujet, cela se passait à Ottawa. J'étais alors accompagné de 11 chefs et représentants des bandes autochtones et des Premières nations. Pour ainsi dire, chaque bande principale au Nord de Campbell River était représentée par ce groupe et soutenue par Phil Fontaine, qui était alors le Grand Chef de l'Assemblée des premières nations.
• 1839
Nous nous trouvions à Ottawa pour déclarer au comité permanent
et toute personne qui voulait nous entendre—nous avions également
plusieurs réunions se déroulant ailleurs—que le programme-pilote
de vente était une sacrée pagaille. Il contribuait à augmenter la
pauvreté des communautés côtières et du Nord de Campbell River,
particulièrement des communautés côtières autochtones. Il
contribuait à accentuer les tensions raciales. Il était
profondément imparfait, en particulier à cause des problèmes
associés aux priorités des pêches et à la surveillance.
Rien n'a changé, c'est toujours la même pagaille. Il contribue toujours à augmenter la pauvreté et la disparité économique au sein des communautés côtières autochtones comme non autochtones. Il est toujours aussi imparfait dans les domaines des priorités et de la surveillance.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci, monsieur Radosevic.
Monsieur Sutcliffe, avez-vous des remarques à faire?
M. John Sutcliffe (vice-président, United Fishermen and Allied Workers Union): Oui. Je suis heureux d'être arrivé à temps pour entendre au moins une partie de l'exposé de Bob. En fait, nous avons passé l'après-midi à aborder certains problèmes au MPO.
L'une des choses qui me tient à coeur est de déterminer la prise perdue cette année dans la pêche, tout le long de la côte. Certains de ces éléments sont en relation directe avec la question des pêches commerciales expérimentales.
Je ne m'attendais pas à ce que cela me soit confirmé, mais comme je le disais, je pensais que cette année, près de 20 millions de saumons avaient été laissés dans l'eau sur la côte de la Colombie-Britannique, ce qui n'était que du surplus par rapport aux objectifs les plus optimistes de la frayère. Ce qui représente plus du double de la prise, qui était alors de six millions—mauvaise gestion sans précédent de vos pêches. J'ai été relativement peu surpris par la réponse d'un des cadres dirigeants qui participait à cette réunion, cette après-midi là: «Au moins 20 millions, John».
Une autre évaluation quantitative que vous avez probablement entendue aujourd'hui, mais si ce n'est le cas, est que cette saison un excédent de 30 millions de saumons roses, de saumons sockeye et de saumons kéta sont retournés au fleuve Fraser. La prise commerciale était seulement de 1,5 million. On a pu voir des échappées de cette taille que pendant trois années au cours du siècle précédent. Les prises n'ont jamais été aussi petites. En général, je pense que cela suffit à démontrer l'ampleur de la mauvaise gestion. Nous avons tout intérêt à l'appeler par son nom.
Il y a un nombre incroyable de problèmes qui en découlent et je ne vais pas aborder directement la question des ventes pilotes. J'ai regardé certains des dossiers, et cette question a déjà été bien approfondie. Par contre, je souhaite faire un commentaire d'ordre général concernant le MPO et l'effondrement des stocks de morues du Nord—les 24 heures ou les 12 heures qui nous séparent de la catastrophe, je ne me souviens plus...
Une voix: La citation exacte était: «une pêche de 12 heures qui nous séparent de la catastrophe sur la remontée de la rivière Adams».
M. John Sutcliffe: Je pense que cela a retenti a fait l'effet d'une bombe dans ce pays après que la morue se soit effondrée de la même façon.
L'un de mes collègues a demandé, lors d'une réunion à laquelle John Fraser a fait ces commentaires, ce que signifiaient 12 heures de plus de la catastrophe dans la gestion d'une pêche. En me rendant à cette réunion, je conduisais sur l'autoroute de l'île à 120 km à l'heure, et j'ai croisé une voiture qui roulait à 120 km à l'heure également. J'ai frôlé la mort pendant un millième de seconde, ce qui arrive très souvent lorsque vous conduisez. Alors que veulent dire ces 12 heures qui nous séparent de la catastrophe? Il y a des règles et il y a des risques. Vous apprenez à vivre avec et cela fonctionne. Lorsque vous gérez une pêche, les 12 heures qui nous séparent de la catastrophe veulent dire à peu près la même chose que ce millième de seconde pendant laquelle vous frôlez la mort en croisant quelqu'un sur une autoroute.
C'est une petite anecdote. Le MPO, particulièrement depuis le plan d'Anderson, a vraiment modifié sa gestion des risques à l'extrême, à cause de ces événements et de l'intérêt croissant du public dans nos ressources.
• 1844
En même temps, les ressources n'ont jamais été aussi instables
à aucune période de l'histoire. Dans ce contexte que traverse le
ministère dans le cadre du régime de gestion extrême des risques,
la pêche commerciale expérimentale, particulièrement dans le
Fraser, augmente le niveau d'incertitude que le ministère se doit
de gérer.
Même pour une année où 6,5 millions de saumons sockeye, et probablement 2,5 millions, même avec les objectifs d'échappée relativement élevés d'aujourd'hui, auraient pu être attrapés, les risques de permettre une récolte, même basée sur un tel TAC substantiel disponible, lorsque vous avez des incertitudes quant à la prise de la rivière, en plus d'autres incertitudes—et vous avez certainement entendu parler du problème de la mortalité tardive et tout ce qui s'en suit—deviennent vraiment trop lourds à gérer pour le ministère.
Cela devient un cercle vicieux. Ils n'ont pas de pêche et par conséquent deviennent encore plus incertains. Comme le savent les personnes qui sont familières avec ce processus, historiquement, le ministère et la commission du saumon, se sont toujours appuyés sur les pêches pour déterminer l'abondance saisonnière. En l'absence de pêches, ils disposent seulement des pêches à l'essai et cela ne sert qu'à augmenter l'incertitude. Jim Woodey, le biologiste principal rattaché à la face de chalut de la Fraser, sera le premier à expliquer qu'au cours des dernières années, lorsqu'il n'y a pas de pêche, leur incertitude concernant la saison augmente considérablement.
Un grand nombre de facteurs entrent en ligne de compte et s'entremêlent. Plus l'incertitude augmente en l'absence de pêches, et quant aux nombres pris en compte pour les pêches pilotes de ventes, plus l'intention d'avoir des pêches diminue, et bien sûr le régime de gestion devient complètement insoutenable.
Voici certains commentaires assez brefs, mais que je tiens à faire. Il y a eu beaucoup de problèmes depuis 1996, que les précédents témoins ont décrit avec brio. Il est vrai que cette année est complètement différente des autres années. C'est cette année que les ressources halieutiques sont revenues. Elles étaient légèrement masquées au début à cause de la remontée du fleuve Fraser, qui devait compter 12 millions de poissons ou plus et il n'y a pas eu de bon retour. Toutefois, pratiquement tous les autres stocks de la côte sont revenus en force. Il existe quelques petits problèmes de stock, mais les principales remontées intéressantes pour la pêche commerciale ont été particulièrement abondantes, et atteignent probablement ou sont tout au moins très proches des niveaux moyens des années 70, 80 et 90. C'est la capture de 20 millions perdue cette année.
Cette année est différente. Le nouveau règlement—le règlement concernant la conservation, le règlement concernant l'allocation, le règlement concernant le saumon sauvage, le règlement concernant la sélectivité—établi dare-dare par le MPO n'a pas vraiment affecté le problème de mise en application jusqu'à cette année, vu que les quantités disponibles n'étaient pas assez abondantes pour la capture. En revanche cette année, l'incroyable ineptie des gestionnaires nous saute aux yeux et nous ne pouvons que remarquer les difficultés inimaginables qu'ils éprouvent pour mettre ce règlement en application, quelle que soit sa validité. Je mettrai certainement en doute la capacité de nombre d'entre eux.
Aussi, la situation est complètement différente. Les pêcheurs comprennent que cette année, même s'il y a du poisson, ils ne pourront pas pêcher.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci beaucoup.
Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président. Merci mesdames et messieurs d'être présents aujourd'hui et de nous avoir présenté ces faits. Il y a quelques années, nous avons effectué deux rapports concernant la côte Ouest, dans lesquels nous avons discuté du programme-pilote de vente et avons demandé à ce qu'il soit révisé. Je comprends, qu'en ce qui vous concerne, le programme n'a fait l'objet d'aucune révision en matière de ventes pilotes. C'est ce qu'a recommandé à l'unanimité, il y a environ deux ans, le comité composé de représentants de tous les partis dans deux de ses rapports, et visiblement rien n'a été fait. Est-ce que cela est exact?
Une voix: C'est tout à fait exact.
M. Peter Stoffer: Mesdames et messieurs, à votre avis, que faudrait-il faire pour arrêter ce programme-pilote de vente? Cela pose un problème à tout le monde. Mais non seulement à vous, mais aussi, comme vous l'avez mentionné, aux communautés côtières et aux groupes autochtones. Que faut-il faire pour l'arrêter?
Une vois: Nous avons pu identifier deux questions clés. Je comprends tout à fait que ce soit plus compliqué que cela, mais ces deux questions clés existent. La première est la question de priorité et la deuxième la question de surveillance.
• 1854
Si les ventes commerciales doivent être de cette nature, il ne
doit certainement pas y avoir de priorité. C'est pourquoi les
ouvertures simultanées et les mécanismes de déclenchement
simultanés ou similaires de pêches remédieraient à certains des
problèmes relatifs à ces premières pêches particulièrement
fructueuses et qui empêchent le déroulement opportun d'autres
pêches.
La surveillance est l'autre question qui a pu être mise à jour. Si ces pêches étaient correctement surveillées, la colère ressentie lors de ces pêches s'en trouverait vraisemblablement diminuée.
Une voix: L'industrie a eu ce problème pendant des années pour ce qui est les mesures provisoires. Si le gouvernement du Canada, dans sa grande sagesse, détermine que ces mesures sont appropriées, la façon de les appliquer serait par le biais de ce que nous avons l'habitude d'appeler «la solution industrielle». Personne n'y fait vraiment référence, bien que je pense que ce soit la méthode utilisée sur la côte Est, d'après l'arrêt Marshall. Cela provoquerait certainement quelques problèmes comme l'augmentation du prix des permis, mais je ne pense pas qu'en général les pêcheurs s'en plaindraient.
Il existe une façon de prendre les navires, de transférer les permis et les navires aux personnes susceptibles d'être choisies par le gouvernement du Canada pour avoir accès à la pêche. Ce qui met fondamentalement les gens sur un pied d'égalité et ne réassigne pas le poisson de la pêche commerciale ou n'instaure pas une différente pêche commerciale ou tout autre chose.
Je tiens à faire cette observation historique qui présente quelque intérêt, la solution industrielle était quelque chose que l'UFAWU, ou la coalition de survie ou toute autre personne désignée, a conçu et élaboré. Ce document était produit par Native Brotherhood of British Columbia.
M. Peter Stoffer: D'accord.
Il y a trois jours, j'ai discuté avec deux pêcheurs sur la côte Ouest. Nous sortions pour assister aux audiences et je voulais seulement savoir ce qu'ils pensaient. Il est apparu, l'un d'eux tout au moins pensait ainsi—et c'est la même chose que ce que nous avons lu dans les documents. Il semblerait que le MPO souhaite se débarrasser de la pêche commerciale. Je lui ai donc demandé, si c'était exact, quelle serait l'explication? Quelle en est la raison?
Personne n'a pu m'expliquer pourquoi, mais il soupçonnait—et c'était pure spéculation de sa part—que si nous pouvions nous débarrasser de la pêche commerciale, cela laisserait la place à l'industrie de l'aquaculture.
J'aimerai savoir ce que vous en pensez.
Une voix: Cette question ne me fait pas sourire et la situation n'est pas comique. Je n'ai pas vraiment de commentaire à ce sujet ou peut-être si le ministère agit de la sorte par accident ou volontairement, le résultat est le même et c'est inacceptable. Ce n'est pas la bonne chose à faire. Je ne peux m'immiscer dans l'esprit des décideurs à Ottawa, mais la seule chose que je puisse vous dire c'est que les politiques élaborées par le ministère sont extrêmement subversives.
M. Peter Stoffer: J'en conviens.
Nous connaissons ce qui s'est passé cette année et comme cela a été négatif. Que va-t-il se passer l'année prochaine? Est-ce qu'il n'y aurait aucune indication? Si c'est aussi élevé ou presque que ce que nous avons maintenant, existe-t-il une possibilité que le gouvernement réalise ce qui n'a pas marché cette année et autorise les pêcheurs à pêcher l'année prochaine?
Une voix: Il est vrai, nous pensons leur donner cette occasion.
Pour le fleuve Fraser, la remontée prévue, à 50 p. 100 de niveau de probabilité, est pratiquement exactement la même que cette année—soit 12,5 millions. Une certaine partie de cela, environ 3,5 millions, représente des stocks de remontée tardive—la fameuse remontée de la rivière Adams, qui comme ils le soupçonnent est entravée par le problème de l'entrée précoce dans le fleuve. Les stocks tardifs ont un taux de mortalité qui précède la frayère; ils entrent très tôt dans le fleuve.
Voici une question intéressante. Le parasite qui serait mis en cause est extrêmement rare. Il a été identifié il n'y a que trois ans dans le fleuve Fraser, et la seule fois auparavant où ce parasite a été enregistré, c'est dans une ferme de saumons coho à Puget Sound. Le MPO est particulièrement inquiet de réfuter toute relation et il se peut qu'il n'y en ait aucune. Cependant, le seul autre enregistrement précédent de ce parasite qui trouble nos pêches, particulièrement lorsque la migration se fait avec les stocks tardifs, a été effectué par l'industrie de l'aquaculture.
En tout état de cause, il y aura des problèmes graves l'année prochaine. Cela ne fait aucun doute. Certains d'entre eux sont réels et il est nécessaire d'y remédier, mais avec le règlement du gestionnaire, comme ils l'appellent, s'il n'y aucun changement, il est improbable qu'il y aura une capture de poissons. Lorsque j'ai commencé à pêcher dans les années 70, une remontée de 6 ou 8 millions était considérée comme une grande remontée, et elle était fructueuse. J'ai pu élever ma famille en pêchant à la traîne seulement le saumon. Toutes les personnes qui ont rejoint l'industrie au cours des 10 dernières années vont avoir du mal à le croire.
La taille de la remontée n'était pas plus importante que celle de cette année. Dans les années 70, Une remontée de 6,5 à 8 millions dans le fleuve Fraser c'était une aubaine, et, je pense que Bob a fait référence aux échappées et au programme de remaniement qui était alors appliqué, qui produisait ces remontées énormes de 18 à 20 millions, des remontées jamais vue, et ces échappées étaient tout à fait justifiées. Nous avons atteint le point où nous voulions en venir. En revanche, maintenant, la quantité de poissons que nous plaçons sur les frayères, est deux à trois fois plus importante et les retours sont très médiocres.
Il y a une forte corrélation entre le dépassement des échappées et les retours médiocres, tout particulièrement pour le saumon sockeye. Chaque dépassement majeur des échappées depuis 1956 a eu pour conséquence un effondrement des stocks dans la rivière Skeena, le bras de mer Rivers et dans le fleuve Fraser. Cependant, nos gestionnaires continuent à rejeter toujours plus de poissons sur les frayères.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci.
Le comité a-t-il d'autres questions?
Mesdames, messieurs, merci beaucoup pour cet exposé. Nous avons appris beaucoup. Je vous en suis reconnaissant.
Le présentateur suivant est Richard Nomura. Richard est un pêcheur qui possède un bateau à filet maillant qui habite à Ladner et qui garde son bateau ici à Richmond.
Richard.
M. Richard Nomura (témoignage à titre personnel): Bonjour. Je viens d'une famille de pêcheur. Mes trois frères pêchent comme l'a fait mon père. Nous pêchons en général dans le fleuve Fraser dans lequel nous attrapons des saumons sockeye.
Je tiens tout d'abord à vous remercier de me donner cette occasion d'exprimer certaines de mes préoccupations quant à ce qui est arrivé à mon gagne-pain au cours des dernières quelques années.
Comme vous le savez, six millions de saumons sockeye sont retournés dans le fleuve Fraser cette année, et nous n'avons pas eu la possibilité de pêcher. Depuis les trois dernières années, je n'ai eu que deux jours et demi pour essayer de gagner ma vie en pêchant les saumons sockeye dans le fleuve Fraser. Je ne pense que vous puissiez imaginer comme nous avons été déçus de ne pas avoir l'occasion de pêcher cette année avec une remontée de six millions de poissons, particulièrement lorsque l'on sait que cette remontée est la plus importante dans un cycle de quatre années.
Je me souviens que l'année dernière nous avons eu une AGA lors d'une réunion de l'association du secteur E. Un gestionnaire de pêche régional est venu à cette réunion et nous a dit à ce moment, prévoyant les pêches de 2001, qu'il était fort possible que nous ne puissions pas attraper autant de poisson pendant les deux semaines au cours desquelles ils essayaient de planifier les ouvertures. Avec cette idée en tête, c'est ce qu'ont prévu plus ou moins beaucoup de gens d'ici, ils ont investi davantage dans leur équipement et dans la préparation de leur équipement pour se préparer à cette pêche.
Le MPO avance d'innombrables raisons pour expliquer l'absence de ces occasions, mais il ne peut y avoir aucune excuse quant au fait qu'une remontée de cette importance n'ait pas donné lieu à une pêche commerciale dans le fleuve Fraser.
Pendant la sortie du plan Mifflin, il nous a été dit que la réduction de la flottille aurait pour conséquence de nous apporter un moyen d'existence durable et que nos prises augmenteraient.
Nous disposons actuellement d'environ 400 navires dans le secteur E et il y a des moments où la flottille dépasse les 1 000 navires dans le fleuve. Je n'ai jamais attrapé autant de saumons sockeye que maintenant. Le problème auquel nous sommes confrontés ne vient pas d'un manque de poissons, mais plutôt de l'équité d'accès à ces ressources halieutiques.
Cette année, assis sur le quai, j'observais les Autochtones dans le fleuve Fraser qui récoltaient du poisson alors que nous n'avions rien attrapé. Nous avons été informés qu'ils avaient la possibilité de vendre au cours de ventes pilotes certains de leurs poissons de consommation, ce qui signifie qu'il n'y avait pratiquement pas de contrôle des ventes illégales des poissons de consommation.
Certains des représentants au sein de la Commission sur le saumon nous ont informés cette année que lorsque la taille de la remontée était réduite à environ cinq millions pour être ensuite réduite rapidement aux quatre millions, il arrivait souvent que la quantité de poissons alloués à leurs ventes pilotes soit trop importante à quatre millions. Ils les avaient donc autorisés à utiliser ces poissons destinés aux ventes pilotes en poissons de consommation. Un peu plus tard, lorsque la taille de la remontée était passée à cinq millions, ils ont été avertis qu'ils pouvaient utiliser ces poissons pour les ventes pilotes. Il est évident que ces règlements et ces changements font volte-face tellement facilement...il n'y a vraiment plus de différence ente les ventes pilotes et les poissons de consommation. Il s'agit fondamentalement du même poisson.
Je ne sais pas si vous savez pourquoi ces ventes pilotes et ce programme de stratégie de pêches autochtones a été mis en oeuvre. Il a commencé, je pense aux alentours de 1991. À ce moment John Crosbie était le ministre des Pêches. Il a écrit une autobiographie intitulée No Holds Barred, dans laquelle il s'adresse aux pêcheries de la côte Ouest en tant que ministre là-bas. Il écrit:
-
le MPO estimait que les Autochtones de Colombie-Britannique
attrapaient et vendaient près d'un million de saumons par an [...]
si nous voulions arrêter la vente illégale du saumon par les
Autochtones, il serait nécessaire de mettre en place des
patrouilles massives de type militaire qui surveilleraient les
trois grandes rivières de Colombie-Britannique. Ce qu'évidemment
personne ne souhaite ou qui est impossible. En la légalisant, cela
nous permettrait de pouvoir contrôler plus facilement la pêche.
• 1909
C'est la raison pour laquelle nous avons mis le programme de
stratégie des pêches autochtones en oeuvre et cela explique
également la raison d'être des ventes pilotes qui sont un élément
du programme SPA. Dans l'essence, il voulait dire que si vous
cambriolez une banque...nous devrions peut être le légaliser cela
nous permet au moins de savoir qui l'a fait et où va cet argent.
Il écrit:
-
La mise à exécution en 1992 a été rendu plus complexe due au délai
nécessaire à l'obtention de l'approbation du cabinet.
C'est pourquoi, l'été qui a suivi...
-
[...] il a été reporté que 100 000 saumons sockeye du fleuve Fraser
n'avaient pu atteindre les stations de comptage en remontant le
fleuve.
Ce qui veut dire que les poissons ont été comptés jusqu'à Mission. Un sondage acoustique a été effectué afin de déterminer la taille et l'importance de la remontée à ce stade. À partir de cet endroit il n'y a pas de pêcherie. La seule pêcherie qui se trouve au-delà de ce point est une pêcherie autochtone. En tant qu'exploitants pêcheurs, nous sommes d'avis que si nous arrivons à leur faire atteindre Mission, nous aurons réussi notre mission ou tout au moins fait tout notre possible. Nous ne pouvons plus rien faire. Cependant, à ce moment, en 1992, comme il le disait, il manquait 100 000 poissons sur la frayère, en partant de cet endroit jusqu'à Mission.
Il continue:
-
Aussitôt que j'entendis parler de cela, j'ai ordonné qu'une enquête
soit menée à l'interne du MPO. Mon sous-ministre en poste, Bruce
Rawson, m'a proposé de choisir. Je pouvais soit essayer d'arrêter
la perte de ces saumons en renforçant les mesures d'application,
soit j'avais la possibilité de fermer complètement le fleuve
Fraser... Le lendemain, j'ordonnais la complète fermeture de la
pêche sur le fleuve Fraser.
En d'autres termes, même après que le programme ait été mis en application pendant un an, il paraissait voué à l'échec.
Il nous avait été rapporté que le programme-pilote de vente, étant donné qu'il s'agissait d'une pêche commerciale, serait géré comme un engin de quatrième type et ne serait aucunement prioritaire pendant les autres années. Ce qui a vraiment posé un problème est l'interprétation qu'en a fait le MPO dans le sens le plus large du terme en autorisant le commencement des ventes pilotes dès qu'il y avait une récolte commerciale non autochtone de saumons sockeye sur le fleuve Fraser, et ce n'importe où sur la côte. En dépit du fait que nous étions tous gérés comme une seule zone, cela a permis aux Autochtones de sauter juste devant la ligne alors que nous restions assis sur le quai.
Le problème auquel l'industrie doit faire face aujourd'hui est beaucoup plus profond que le nombre croissant des échappées, une médiocre gestion des stocks et la conservation. Le problème réel est constitué par la direction où le ministère entraîne le pays et ses citoyens. Il tente de résoudre les problèmes sociaux et économiques en réorientant une industrie tout en cédant ces privilèges à un groupe de population favorisé. Je suis persuadé que tous les Canadiens compatissent aux souffrances d'autrui, mais les solutions qui sont choisies doivent prendre en considération les droits d'autrui et il est essentiel de trouver des solutions qui puissent donner satisfaction à tous les Canadiens. L'isolation et la ségrégation ne font qu'accentuer le problème ressenti aujourd'hui.
Mes parents sont nés ici il a de nombreuses années et mon père gagnait sa vie ici sur le fleuve Fraser. C'est ce que nous, ses deux fils, avons fait aussi. Lorsque la guerre s'est déclarée, ils ont réalisé qu'il n'étaient pas assez bons pour être seulement Canadiens, et qu'il existait une certaine sorte de Canadiens. Leurs droits de propriété et de liberté leur ont été supprimés et ils ont été envoyés en Alberta pour travailler en tant que travailleur agricole migrant pendant quelques années extrêmement difficiles. À la fin de la guerre, ils sont retournés pour gagner leur vie et rebâtir leur vie. Ils avaient appris ce que voulait dire être un citoyen de deuxième classe.
Plus tard, en 1989, ma famille a reçu réparation du préjudice subi et les excuses du gouvernement du Canada, et je présume que vous en avez une copie. Le gouvernement du Canada reconnaît avoir manqué à ses obligations envers son peuple, envers le peuple japonais. Il est écrit à la première ligne:
-
En tant que peuple, les Canadiens s'engagent à créer une société
qui soit en mesure d'assurer à toutes et à tous l'égalité et la
justice quelle que soit leur race ou leur origine ethnique.
(Traduction libre).
• 1914
Ces excuses ont compté énormément plus que tout pour eux, en
leur reconnaissant le droit d'être canadiens. Malgré le fait qu'ils
soient nés ici, ils n'avaient jamais été reconnus comme des
Canadiens. Me voici aujourd'hui, au sein d'une industrie...et je
ne me sens pas canadien non plus. À certains égards, je ne possède
pas les mêmes droits que d'autres groupes de population peuvent
avoir. Je ne suis pas particulièrement irrité par le fait que le
gouvernement essaye de favoriser la population autochtone à
profiter des ressources halieutiques, en revanche, si cela signifie
qu'il faille prendre à l'un pour donner à l'autre, sans se soucier
des conséquences ou de l'équité, alors on peut appeler cela un acte
criminel. Ce gouvernement devrait avoir honte de déclarer qu'il
représente toutes et tous les Canadiens.
Nous réalisons tous que l'industrie est en train de changer, toutefois il doit certainement exister un moyen juste et équitable me permettant de gagner ma vie de façon rentable. Tout le monde sait que nous sommes les moins favorisés dans cette affaire. Vous le savez, le public aussi et les Autochtones également. Néanmoins, les personnes qui auraient le pouvoir d'agir ne font rien pour changer cet état de choses.
J'aimerai savoir qui défend mes droits de Canadien. J'espère que vous-même ainsi que le gouvernement vous pencherez sur ce qui nous arrive, vu que vous représentez les Canadiens et que vous ferez en sorte que nos droits à l'égalité soient respectés. Tout ce que je veux c'est être traité sur un pied d'égalité.
Merci.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci beaucoup, Richard.
Avez-vous des questions? James.
M. James Lunney: Monsieur Nomura, nous vous remercions de votre participation à cette audience.
Vous nous avez donné, je pense, un aperçu intéressant de ce programme, qui a donné un aspect de profondeur que nous n'avions pas ressenti jusqu'ici. Vous avez mentionné le cas de vos propres parents et du sentiment qu'ils avaient de ne pas se sentir canadiens, suite aux événements survenus au cours de la seconde guerre mondiale, lorsqu'ils ont été envoyés en Alberta. Vous nous avez bien dit, que vos parents étaient nés au Canada.
M. Richard Nomura: Tout à fait. Ils étaient canadiens.
M. James Lunney: Auriez-vous l'obligeance de bien vouloir nous indiquer d'où venaient vos grands-parents?
M. Richard Nomura: Ils étaient japonais.
M. James Lunney: Et maintenant nous vous entendons évoquer qu'en tant que pêcheur professionnel ayant grandi dans cette région et dont les parents avaient vécu de la pêche sur le fleuve...
M. Richard Nomura: Tout à fait, oui.
M. James Lunney: Vous étiez jeune, certainement.
M. Richard Nomura: Ils faisaient parti de la communauté ici. Présentement nous parlons au nom de toute la communauté japonaise ici. La communauté japonaise ici à Steveston était importante et elle l'est toujours. Vous retrouverez encore beaucoup de signes de notre culture ici. Aujourd'hui, la communauté devient de plus en plus multiculturelle, mais à l'origine, la culture était fondamentalement japonaise.
M. James Lunney: C'est tout à fait exact. Et bien sur, nous reconnaissons que le Canada est constitué de populations d'origine pluriethnique. Pour la plupart d'entre nous, si vous creusez juste un peu et remontez notre arbre généalogique, vous vous rendrez compte que nos ancêtres venaient tous d'ailleurs.
Néanmoins, vous faites référence à votre propre expérience ici aujourd'hui, vous restez assis sur le quai sans avoir la possibilité de pêcher, alors que d'autres sont autorisés à pêcher, tout simplement d'après leur origine raciale ou ethnique.
M. Richard Nomura: En fait, la nature globale de l'industrie de la pêche a changé. Nous avons grandi à Steveston. J'habite actuellement à Ladner, bien que comme je le dis à mes amis, je dors à Ladner, mais je vis à Steveston. Quel qu'il en soit, lorsque nous étions enfants—et jusqu'à aujourd'hui, nous avions beaucoup d'amis parmi les Autochtones et nous partions tous à la pêche ensemble. C'était la vraie nature de cette industrie. Tout le monde pêchait ensemble. Mais lentement, les changements sont survenus suite à l'orientation prise par le gouvernement quant aux règlements régissant l'industrie de la pêche, et beaucoup des Autochtones, qui étaient de nos amis, ont décidé de vendre les permis commerciaux qu'ils détenaient, pensant qu'on allait leur donner des permis. Alors lorsque vous considérez les pêches dans le fleuve Fraser, vous vous rendrez compte que les pêcheurs autochtones professionnels ne sont plus très nombreux, étant donné qu'ils sont nombreux à avoir choisi de ne pas conserver les permis. Ils les ont vendus, sachant qu'il leur serait octroyé un permis gratuit accompagné de privilèges.
La situation est bien différente aujourd'hui, en ce qui concerne la flottille du Nord. Si vous regardez d'un peu plus près, une grande partie de cette flottille commerciale du Nord est composée d'Autochtones qui exercent toujours l'activité de pêcheurs. Comme je viens de le dire, ici, avec le cas Sparrow et les autres, ils ont choisi l'autre direction et essayent en fait de séparer les pêches.
M. James Lunney: Je pense que vous avez indiqué qu'en tant que Canadien de seconde et troisième génération, vous ne vous sentiez pas complètement canadien, vu que vos droits vous sont supprimés.
M. Richard Nomura: Tout à fait. Comme je l'ai dit, je me trouve maintenant dans une position où les possibilités d'accéder à ces ressources halieutiques sont fondées sur les différences raciales et avec tous les règlements que nous avons trouvés, nous en sommes au point où les Autochtones sont désormais liés par des ententes en matière du nombre des poissons—des contrats autrement dit—et ces poissons doivent être livrés.
De notre point de vue les plans de gestion que nous avons élaborés permettent de faire bouger les choses. Jusqu'à un certain point tout de même, que nous ne pêchions pas dans une remontée de six millions de poissons par exemple. Comme je l'ai dit, mon père se retournerait dans sa tombe s'il apprenait que nous n'allons plus pêcher dans le fleuve Fraser. Pour nous, aller pêcher dans le Fraser c'est une certitude comme le soleil qui se lève tous les matins et il est inconcevable que nous ne puissions pêcher dans une remontée de six millions de poissons.
Comme je l'ai mentionné auparavant, personne ne veut en parler, mais nous craignons de ne plus jamais pouvoir pêcher ici. Si nous ne pouvons pêcher sur une remontée de six millions, quand allons-nous pouvoir pêcher alors?
Le fait est qu'avec la structure actuelle des pêches et la façon dont les Autochtones sont liés à des ententes, nous nous trouvons dans une position telle que, à causes de ces choses et de la complication à tenir les promesses, l'industrie de la pêche étant devenue tellement complexe, si nous pêchons, cela déclenchera tellement d'autres factions de la pêche que nous ne pouvons prendre le risque d'entrer dans l'eau. C'est aussi simple que cela: la situation est trop compliquée et nous savons une seule chose, c'est que les seules personnes qui vont pouvoir aller pêcher sont les Autochtones.
Je vous ai entendu il y a quelques instants parler à Bob de la conservation. Le fait est qu'ils peuvent pêcher un nombre qu'il est possible de maintenir—autrement dit, ils peuvent pêcher dans une remontée pour leur consommation, du moment qu'ils ne mettent pas la survie de la remontée en péril. En d'autres termes, ils pêchent jusqu'aux extrêmes limites, jusqu'à la quintessence. Dans notre industrie il est nécessaire d'assurer la régularité du nombre que nous pêchons, mais il faut également respecter le facteur de reconstitution de la remontée. Par contre, eux, ils peuvent le faire et c'est là toute la différence. Alors, s'ils continuent à pêcher jusqu'aux dernières limites, nous ne pourrons jamais aller dans l'eau.
M. James Lunney: Merci.
Il est important pour nous que tout le monde soit traité sur un pied d'égalité et en ce qui concerne le redressement des Autochtones nous aimerions les voir prospérer dans la communauté. Et je pense que nous avons pu entendre d'autres intervenants indiquer qu'il y a de la place pour la pêche de consommation et cela ne fait aucun doute. Cependant, en tant que Canadiens, nous pouvons certainement faire mieux que d'allouer nos ressources selon les différences raciales, ce qui serait appelé partout ailleurs du racisme.
M. Richard Nomura: Il y a eu des injustices commises et il est incontestable qu'en tant que Canadiens, nous pouvons tous trouver un terrain d'entente qui nous permette de vivre tous sans conflit. Ce ne doit pas être si difficile de trouver une solution; par contre, si la volonté politique ne s'exprime pas, nous ne pourrons y arriver.
M. James Lunney: Merci, monsieur le président.
Le vice-président (M. John Cummins): Peter.
M. Peter Stoffer: Je vous remercie pour votre exposé.
Je dois dire, lorsque j'étais enfant, c'était fantastique de voir tous mes amis japonais arriver avec leur bateau, de les aider à décharger et de rapporter un saumon à mon père à la maison.
Je voulais dire que si nous avions séparé la flottille japonaise de la flottille des caucasiens dans les années 60 et 70, il y aurait eu des cris de protestation. Maintenant, comme vous le dites si bien, c'est comme si les pêches étaient séparées. Et nous étions habitués à être séparés...
M. Richard Nomura: C'est très intéressant que vous nous parliez de cela, parce que certains de nos amis sont également Autochtones et je me souviens de la fille d'un de nos amis autochtones qui venait nous voir un jour pour jouer avec nos enfants et elle m'a dit: «Pourquoi vous n'auriez pas une pêche japonaise? Nous avons bien des pêches autochtones.» Elle avait seulement huit ou neuf ans à l'époque. C'était vraiment gentil de sa part, mais je ne pense pas que cela aurait servi à grand-chose de répondre à ce moment. C'est ce que j'ai ressenti.
M. Peter Stoffer: Êtes-vous en train de nous dire en réalité que si vous ne pêchez pas l'année prochaine, que la remontée est de la même importance et que vous n'êtes pas autorisés à pêcher, cela signifie fondamentalement la fin pour vous ou les 400 navires actuellement dans le secteur?
M. Richard Nomura: Tout à fait, c'est le nombre actuel des navires qui pêchent dans le fleuve Fraser.
Au cours des dernières années, les problèmes que nous avons surmontés, étaient dus aux changements environnementaux concernant les poissons, comme le réchauffement des eaux et le taux élevé de mortalité. Le MPO a expliqué que ces phénomènes n'étaient jamais survenus auparavant. Nos poissons commençaient à aller dans la rivière, pour certaines raisons, ils ne restaient pas dans le golfe et ils subissaient les modifications de salinité pour ensuite continuer plus loin. Ils remontaient directement, ils mouraient plus tôt, etc.
• 1929
Tous ces facteurs ont maintenant changé. Je suis convaincu que
le gouvernement se trouve dans une position où il est tout à fait
capable de mettre des règlements en place pour nous empêcher de
pêcher, en revanche, ils ne peuvent arrêter les Autochtones. C'est
un fait établi. Prenons l'exemple des bandes indiennes de la nation
Sto:lo qui cette année ont continué à pêcher. Ils sont allés
jusqu'à ce qu'ils appellent une mise à exécution non conflictuelle
leur permettant d'observer et d'enregistrer. À dire vrai, je ne
pense pas qu'ils pensaient faire quelque chose de mal, étant donné
que les poissons étaient probablement suffisamment abondants.
Ils ont la volonté et le pouvoir de faire cela, attendu que nous sommes dans l'impossibilité de le faire. Nous ne le ferons pas. Nous avons protesté à plusieurs reprises, mais c'est ce que nous devons faire. Nous devons enfreindre la loi pour essayer d'avoir une pêche. Cependant, comme je viens de le dire, en ce qui concerne les populations autochtones, il semblerait que la mise à exécution soit quelque peu plus indulgente en leur permettant d'aller pêcher les stocks.
M. Peter Stoffer: J'aimerai terminer avec deux choses. Tout d'abord, avec la permission de Richard, je vais prendre une copie de cela pour la remettre demain à M. Davis et lui demander d'y répondre, si cela ne vous dérange pas.
M. Richard Nomura: Certainement.
M. Peter Stoffer: Ensuite, si le MPO n'est pas prédisposé à écouter les préoccupations des pêcheurs professionnels que nous venons d'entendre, votre organisation ou votre groupe a-t-elle essayé de trouver un compromis avec les groupes autochtones, nous permettant de discuter avec le MPO d'un plan que vous auriez élaboré? Une tentative a-t-elle était faite dans ce sens?
M. Richard Nomura: il y a eu une tentative de discuter avec certains groupes pour aboutir à une entente d'égalité en ce qui concerne le partage des ressources halieutiques. Nous n'avons pas trouvé de solution, vu qu'ils nous ont déclaré ne pas respecter le protocole établi, et certains des conseils de pêche de quelques bandes indiennes n'acceptent pas les directives elles-mêmes ou les personnes qui les ont élaborées.
Je me soucie davantage de voir que les choses ont finalement commencé à changer. Vous avez mentionné le fait que nous pourrions discuter avec les groupes pour tenter de trouver un terrain d'entente. Je pense que nous n'avons aucun contrôle. À notre avis, les Autochtones n'ont rien à perdre à ce stade.
• 1934
Aujourd'hui, il n'y a pas un seul pêcheur professionnel qui ne
serait prêt à échanger son permis contre les privilèges d'un
Autochtone. Ils disent que l'industrie de la pêche commerciale est
en perte de vitesse. Mais non en ce qui concerne les Autochtones;
pour eux, c'est une industrie en pleine expansion.
Je discutais avec une personne autochtone, il y a quelques temps, et, comme vous l'avez dit, il y a 30 ans, ce n'était pas particulièrement intéressant d'être Autochtone, par contre, maintenant, c'est devenu vraiment avantageux. Voici la nouvelle orientation des choses. Je ne suis pas convaincu que ce soit l'avis de la région. Je pense plutôt que cette tendance vient d'un niveau plus élevé. Je suis persuadé que c'est le moyen de justifier les erreurs commises.
Nous nous trouvons dans la position des faibles. À mon avis, le plus frustrant dans tout cela est que ma famille entière en subit les conséquences. Personne ne m'a jamais dit que je faisais une action illégale ou que je ne devrai pas le faire.
Je pensais qu'au cours de ces années mes revenus seraient les plus florissants. Je suis arrivé à un âge où j'ai acquis de l'expérience, je suis pêcheur à part entière et que ces années seraient les meilleures. Tout d'un coup, la base s'écroule.
Le vice-président (M. John Cummins): Merci.
Avez-vous encore des questions?
Merci beaucoup, Richard.
M. McKamey était l'intervenant suivant. Il n'est pas là. Quelqu'un le représente-t-il?
Une voix: Oui, c'est Mike Forrest.
Le vice-président (M. John Cummins): Nous ferons donc avec.
Le présentateur suivant est Bruce Probert. Est-il sorti? Il était là, il y a quelques instants.
Garry Sonnenberg, vous êtes là. Pourquoi ne commenceriez-vous pas, Gary?
M. Gary Sonnenberg (témoignage à titre personnel): Merci, mesdames et messieurs.
J'ai été un pêcheur professionnel pendant pratiquement toute ma vie. J'ai été sur un bateau depuis l'âge de deux ans. J'ai commencé à pêcher avec mon père à l'âge de sept ans. J'ai commencé à pêcher sur mon propre bateau avant même d'avoir mon permis de conduire.
Avec les années, j'ai traversé les bonnes comme les mauvaises années. J'allais pêcher à San Juan trois ou quatre jours par semaine, pour me précipiter ensuite pêcher dans le fleuve Fraser. J'ai continué comme cela pendant de nombreuses années. Puis, pour certaines raisons, cela s'est complètement arrêté et j'en suis arrivé à un point où il m'est impossible de gagner de l'argent avec la pêche dans le fleuve Fraser.
De nombreux problèmes en découlent. Au cours de ma vie, je n'ai jamais été un fanatique des pêches. Puis en 1997, j'ai dû défendre mon terrain. J'ai participé à la pêche de protestation. J'ai été inculpé, mon bateau a été saisi et je suis toujours fondamentalement dans l'appareil judiciaire. J'attends une décision au mois de février, je pense.
J'ai été inculpé pour avoir pêché pendant la fermeture et nous avons converti l'accusation en question constitutionnelle, à savoir si la stratégie des pêches autochtones était constitutionnellement illégale. Nous espérons que la décision sera rendue l'année prochaine.
Le programme de la stratégie des pêches autochtones mis en oeuvre est vraiment mauvais. Il est basé sur les origines raciales et cela ne peut continuer ainsi. Je n'arrive pas à trouver une explication à cela. Considérez-le sous un autre angle. Que penseriez-vous si vous n'étiez pas autorisés au sein du gouvernement du Canada, au sein de votre caucus ou dans le secteur principal tout simplement parce que vous n'appartenez pas à une bande autochtone, si vous n'étiez pas autorisés à débattre des problèmes ou de quelque sujet que ce soit, et que cette décision était fondée uniquement sur des principes raciaux? Est-ce que cela serait juste? Eh bien, c'est la même chose dans notre industrie. Nous sommes mis de côté uniquement sur des principes de race.
• 1939
Lorsque j'ai été accusé et que je me rendais au tribunal, mon
fils—il pêche avec moi depuis qu'il a quatre ans—m'a demandé:
«Pourquoi vas-tu au tribunal—qu'est-ce que tu as fait?» Comment
répondre à cela? Le pourriez-vous? Moi, je ne peux pas. Comment
voulez-vous leur dire que vous allez à l'école...? Vous traitez
certaines personnes différemment des autres. Ce n'est vraiment pas
bien—Vraiment pas.
La semaine dernière je bavardais avec un agent des pêches. C'était une sorte de débat poli, dans un certain sens. Il avait soutenu: «Vous savez, les Autochtones vendent leurs poissons depuis tellement longtemps maintenant qu'ils devraient y être autorisés.» J'ai cogité sur cette phrase pendant quelques minutes et je lui ai répondu: «Ce genre d'affirmation revient à dire: je bois de l'alcool lorsque je conduis depuis 20 ans, donc je devrais être autorisé à le faire.» C'est complètement faux. Il faut que cela change et vite.
Merci.
Le vice-président (M. John Cummins): Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Merci de votre témoignage. Je trouve extrêmement intéressant ce qu'on entend aujourd'hui, mais il reste qu'on est devant une réalité. Je reconnais que tout le monde doit être traité sur le même pied, en toute équité, mais comment envisagez-vous la solution? Les autochtones ont le droit de pêcher. Ce droit leur a été reconnu. Comment peut-on leur donner des droits sans vous en enlever?
[Traduction]
M. Gary Sonnenberg: Eh bien, madame, comme je vous l'ai dit, j'ai pêché toute ma vie. J'ai pêché de concert avec les Autochtones, les Japonais, les Vietnamiens, les Croates et des gens de tous les horizons. Je pêche encore avec les Autochtones ou les non-Autochtones et c'est la seule façon de le faire: mettre tout le monde dans la même pêche et pêcher. C'est la seule chose que nous demandons et c'est la même chose pour eux.
Vous avez déclaré qu'ils avaient un droit de pêche—c'est tout à fait exact—et c'est à des fins alimentaires et rituelles, mais non à des fins commerciales. D'après ce que j'ai compris de la décision Van der Peet, il n'existe aucun droit autochtone leur permettant de vendre le poisson.
Il faut que nous travaillions main dans la main pour trouver des solutions qui satisfassent tout le monde—Voilà ce que nous devons faire.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: On parle de leur droit à la subsistance, à leur cérémonial, etc. Leur donneriez-vous ce droit n'importe quand ou seulement à certaines périodes de l'année? Avez-vous des restrictions à cet égard? Souvent, ils pêchent à des périodes où vous ne pêchez pas, parce que cela fait partie de leurs droits et de leur cérémonial.
[Traduction]
M. Gary Sonnenberg: Ils commencent généralement à pêcher au mois d'avril. Les pêches commencent avec les remontées précoces de saumon quinnat. Il y a de nombreuses années, mon père possédait une pêcherie commerciale de saumons quinnat sur le fleuve Fraser et on n'avait pas à se soucier de la taille du stock. Ils se disaient qu'ils ne pêcheraient pas le saumon quinnat afin de laisser les stocks se reconstituer, et c'est ce qu'ils ont fait, à tel point qu'il y aurait pratiquement de la place pour une autre pêcherie commerciale.
• 1944
Maintenant, je ne nie pas le fait qu'ils ont un droit de
pêcher à des fins alimentaires, rituelles et sociales, mais pendant
tout l'été, lorsque je reste assis à attendre le poisson pendant
qu'ils pêchent sans arrêt, vous pouvez aller n'importe où et vous
trouverez beaucoup de numéros de téléphone affichés. Il vous suffit
de passer un coup de téléphone et votre poisson vous sera livré à
la maison. La vente illégale du poisson se déchaîne. Aucun contrôle
n'est effectué et c'est là le problème.
Lorsque la pêche est menée par une pêcherie dans le cadre de la stratégie des pêches autochtones ou une bonne pêcherie, tout se resserre. Vous ne savez pas quoi est quoi et vous ne pouvez pas le faire. C'est absolument impossible à contrôler. Nous avons eu ce problème pendant des années.
Le vice-président (M. John Cummins): Monsieur Cuzner.
M. Rodger Cuzner: Je voudrais d'abord vous féliciter, Gary, d'avoir cessé de conduire en état d'ébriété après 20 ans.
Chacun des témoins nous fait comprendre que vous reconnaissez volontiers le droit de la communauté autochtone à pratiquer la pêche. Je ne discerne aucune difficulté réelle, ou plutôt personne n'a vraiment exprimé son inquiétude face à un soutien gouvernemental à ce que la communauté puisse prendre part à la pêche en favorisant la création de moyens, tels que l'achat de bateaux ou autres. Il s'agit simplement de s'assurer que si la communauté désire participer à cette pratique, elle doit respecter les mêmes réglementations scientifiques qui reflètent l'intention fondamentale de conserver les ressources halieutiques et autres.
En quelle année est-ce que la SPA a-t-elle été créée?
M. Gary Sonnenberg: En 1992.
M. Rodger Cuzner: En 1992 et avant sa création... Nous remarquons un mouvement parallèle sur la côte Est, où les groupes autochtones pêchent depuis un certain temps aux côtés de groupes non autochtones et se conforment aux mêmes réglementations. Maintenant, depuis l'arrêt Marshall, il semble que la situation soit remise en question, provoquant des inquiétudes sur l'avenir de la pêche.
Je ne sais même pas si j'ai une question à poser, mais je souhaite confirmer qu'il y a un rôle à jouer et je ne crois pas que vous vouliez empêcher l'accès à la pêche. Cet accès devrait simplement être assujetti aux mêmes réglementations que celles auxquelles se soumet la communauté non autochtone.
M. Gary Sonnenberg: Très bien. Je ne vois pas de raison pourquoi nous ne pourrions pas pêcher ensemble. Il n'y aucune raison. Dès qu'un mouvement de ségrégation se crée, les choses se compliquent et les groupes on tendance à se mesurer les uns aux autres. C'est injuste. Je ne comprends pas le raisonnement qui amène à promouvoir un tel programme. Qu'est-ce que les gens peuvent en tirer? C'est de la folie.
M. Rodger Cuzner: Monsieur Wappel, je crois que vous êtes familier avec le point que M. Sonnenberg a soulevé au début de son exposé, concernant l'interprétation du droit du gouvernement ou non à la pratique de la pêche. C'est la question que le comité des réglementations a examinée rigoureusement ces derniers temps.
M. Wappel a soutenu activement l'industrie de la pêche de la côte Ouest en participant activement au sein de ce comité et en assurant que ces réglementations, selon l'avis du comité, augmentent les droits du ministre, sinon le ministre transgresserait ses droits.
Je ne sais pas, monsieur Wappel, si vous voulez ajouter des commentaires à ce sujet.
M. Tom Wappel: Ces détails sont des formalités judiciaires et des questions de droit. Je n'ai pas les documents devant moi, mais je me souviens, et je crois que Phil l'a déjà mentionné, que le Comité d'enquête minutieuse examine toutes les réglementations. Je siège au sein de ce comité depuis mon élection. Je dirai même que je suis le membre ayant les plus longs états de service du comité et j'en suis le président sortant. Nous sommes en correspondance constante avec le ministre au sujet d'un grand nombre de questions et celle-ci en fait partie. M. Cummins fait également partie du comité.
Ceci ne concerne aucunement la politique; c'est une question de droit. Il s'agit de savoir si une réglementation est conforme ou non aux pouvoirs dont le ministre est investi, selon une loi précise. À cette fin, ce comité est tout à fait neutre. Nous ne considérons pas les choses du point de vue du parti libéral, conservateur, alliance ou NPD, nous prenons une vue d'ensemble, sauf peut-être lors de la loi sur les brevets concernant les médicaments. Mais, je m'écarte du sujet.
• 1949
En général, nous tentons d'examiner une réglementation de
façon impartiale et objective pour voir si elle satisfait à
certains critères. C'est un comité que je pourrais qualifier sans
prétention et qui est très peu connu du public. Cependant, de temps
en temps, nous faisons des recommandations très importantes qui
sont écoutées parce que le comité est très respecté au sein de
l'administration. Ce respect est essentiel, puisque la bureaucratie
est omniprésente. Vous avez mentionné qu'il y a eu cinq ministres
des Pêches ou peu importe le nombre correspondant à une période de
sept ans; or l'administration est toujours là. Il y aura cinq
autres ministres des Pêches représentant les différents partis au
cours des dix prochaines années, et l'administration perdurera.
Notons que ce n'est pas le ministre qui nomme ces gens, mais le
sous-ministre et le sous-ministre adjoint.
Bon, revenons à notre sujet. Je m'excuse, monsieur Cummins d'avoir fait une digression. Je vous remercie de me donner l'occasion de présenter le Comité d'enquête minutieuse. C'est un comité important que peu de gens connaissent et nous sommes fiers de ce que nous accomplissons.
Le vice-président (M. John Cummins): Vous êtes d'ailleurs un membre éminent de ce comité, monsieur Wappel. Je vous ai vu à l'oeuvre et j'apprécie beaucoup ce que vous faites.
Avez-vous d'autres questions? Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Monsieur Sonnenberg, seriez-vous par hasard un parent de Mélanie au Nouveau-Brunswick?
M. Gary Sonnenberg: Je ne sais pas. J'ai de la parenté dans tout le pays. Mes parents sont originaires d'Alberta, mais je ne sais pas exactement où ils sont allés après.
M. Peter Stoffer: Je vous pose cette question, car Mélanie fait partie du Coastal Communities Network au Nouveau-Brunswick et pratique la pêche de façon très active.
Nous avons l'intention de faire des recommandations au ministre au cours de notre rapport hebdomadaire en Colombie-Britannique. Si vous étiez à notre place, que j'étais M. Dhaliwal et que vous aviez la possibilité de faire une recommandation qui permettrait d'améliorer votre vie et celle de votre famille, quelle serait-elle? Que diriez-vous à M. Dhaliwal s'il était ici?
M. Gary Sonnenberg: Je lui dirais que la SPA est injuste. Une seule pêche commerciale suffit pour tous, basée non sur les races, mais sur un ensemble de règlements auxquels tous doivent se soumettre. C'est la seule façon d'agir pour maintenir une pêche commerciale rentable sur cette côte.
M. Peter Stoffer: Je vous remercie.
Le vice-président (M. John Cummins): Avez-vous d'autres questions? Monsieur Farrah.
M. Georges Farrah (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, Lib.): Je vous remercie de m'accorder la parole.
Vous avez parlé des ventes illégales auxquelles s'adonnent les Autochtones et du manque de contrôle. Quelle suggestion pouvez-vous apporter au gouvernement afin d'arrêter ce trafic? Pourriez-vous expliquer la réalité concrète de ce qui s'est passé?
M. Gary Sonnenberg: En ce qui concerne la réalité de la situation, nous manquons d'effectif pour gérer l'application des règlements. Je ne suis pas sûr que ce soit l'ordre des responsables; ils ferment simplement les yeux et passent ces agissements sous silence. Il y avait une politique qui se résumait de la façon suivante: «observez, prenez en note et signalez»—un point c'est tout. Ça n'allait pas plus loin. Vous étiez témoin d'une infraction, vous en rendiez compte et l'affaire était close. Même en signalant le délit, rien n'était fait pour s'en occuper. Cette situation dure depuis des années.
M. Georges Farrah: Tout le monde en est témoin?
M. Gary Sonnenberg: Absolument. Pendant tout l'été, nous avons été témoins de la vente de poisson sans intervenir. Si nous désirions manger du poisson, nous en achetions. Peu importe d'où il provenait. Nous savions pertinemment d'où venait le poisson. Cependant, ces agissements ne peuvent durer, parce qu'ils sont injustes.
Le vice-président (M. John Cummins): Je vous remercie beaucoup, Gary.
Le prochain témoin sera Bruce Probert.
Pendant que Bruce se prépare, je voudrais signaler à l'attention du comité que les Autochtones représentent 3 p. 100 de la population en Colombie-Britannique. Avant 1992, 30 p. 100 des participants à la pêche commerciale de la Colombie-Britannique étaient Autochtones. Il y avait ainsi une participation réelle à la pêche; ces personnes n'étaient pas seulement des membres de l'équipage, mais des propriétaires de bateaux. Il faut bien reconnaître que quelques-uns des meilleurs pêcheurs de la Colombie-Britannique étaient des Autochtones.
Pour ajouter un autre commentaire à la question posée à Gary par M. Tremblay, il a eu raison de mentionner—et vous devriez également en prendre note—que les Autochtones ont réellement un droit de pêcher, quand il s'agit de la pêche à des fins de subsistance ou à des fins sociales ou rituelles seulement. La question du droit commercial à la pêche a été soulevée à Van der Peet sur le fleuve Fraser et il s'est avéré que les Autochtones n'avaient pas le droit de pêcher à des fins commerciales. Il n'y a aucun doute à ce sujet: c'est une déclaration claire et nette de la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Van der Peet.
Une voix: John, vous avez signalé qu'avant 1992, les peuples autochtones représentaient 30 p. 100 des participants à la pêche commerciale.
Le vice-président (M. John Cummins): Le chiffre était en réalité supérieur à 30 p. 100.
Une voix: Quel serait ce chiffre actuellement? Le savez-vous?
Le vice-président (M. John Cummins): Je ne sais pas. Phil, connaissez-vous le pourcentage précis?
M. Phil Eidsvik: Il est d'environ 30 p. 100.
Le vice-président (M. John Cummins): Oui. Phil dit que c'est toujours 30 p. 100. Ils en souffrent autant que n'importe qui, évidemment, et ils possèdent des bateaux, des permis...
Je voudrais faire mention d'un autre point pendant que nous touchons ce sujet. Pour vous qui provenez de la côte Est, ces bateaux à filets maillants ou ces bateaux à lignes traînantes sont semblables aux langoustiers. Ils permettent d'amasser à peu près le même potentiel de gains. Lorsque le rachat de permis s'est tenu ici sur la côte Ouest, le gouvernement a commencé à débourser environ 40 000 $ pour acheter uniquement votre permis. En réalité, ils ont dû payer environ 80 000 $ pour un permis de bateau à filets maillants ou à lignes traînantes. Vous conserviez le bateau; vous conserviez l'équipement. Ainsi, maintenant, vous possédez un bateau avec lequel vous pouvez tenter votre chance. Toutefois, personne n'en voulait. C'était dur pour les gens de vivre ces épreuves.
En comparaison, sur la côte Est, le gouvernement a acheté les langoustiers, prenant non seulement le bateau, mais le permis et l'équipement également, déboursant aux alentours de 400 000 $ à 450 000 $. Comme vous pouvez le constater, il y a un réel écart entre le rachat de permis sur la côte Est et celui sur la côte Ouest: un écart énorme.
Le prochain témoin est M. Bruce Probert. Bruce a fait un exposé au comité il y a environ un an—ou était-ce il y a 2 ans?—à Ottawa. Bruce, vous avez la parole.
M. Bruce Probert (membre, United Fishermen and Allied Workers' Union; directeur du B.C. Council of Fish Harvesters): Bonjour! Je voudrais tous vous remercier de votre présence et vous souhaite une bonne soirée. Je sais que le vol jusqu'à la côte Ouest est long et j'apprécie les efforts que vous avez faits pour venir et entendre nos inquiétudes.
La documentation qui se trouve devant vous ne représente que des notes que j'ai prises lors de mon exposé au comité permanent en novembre 1999. Je n'ai appris qu'hier soir que ce comité ici présent se réunissait et je voulais simplement vous donner une copie de quelques-uns des commentaires que j'ai faits lors de cette autre réunion, puisqu'ils se rapportent directement au sujet qui nous rassemble 2 ans plus tard. Vous apprendrez l'historique de la question et comprendrez notre insatisfaction d'il y a 2 ans.
Au bas de la page 1, ce sera «page 11 de 43», voilà où commence ma récapitulation. Je lirai à partir de ce point.
J'aimerais tout d'abord clarifier un point avant de commencer. On m'a présenté comme étant un représentant du B.C. Fisheries Survival Coalition. Toutefois, je voudrais préciser que je ne les représente pas. Je suis un membre de la UFAWU, le syndicat des pêcheurs de la côte de la Colombie-Britannique. Je suis également un membre du Fisheries Survival Coalition et à ce moment-là, j'étais le président du Comité sur les normes et la formation du B.C. Council of Professional Fish Harvesters. Je suis présentement un directeur du B.C. Council.
Je suis ici pour représenter ma famille et mes amis, ainsi que d'autres familles avec qui j'ai grandi tout au long de ma vie, en pêchant sur le fleuve Fraser. Dans ma famille, ma mère, mon frère, mon père et ma soeur pêchent. Toute notre famille connaît à fond l'industrie de la pêche. Nous l'avons pratiquée toute notre vie. Nous sommes rendus à la 3e génération de pêcheurs sur la côte de la Colombie-Britannique et je les représente, ainsi que tous les autres pêcheurs de la côte, puisque nous sommes tous animés des mêmes sentiments.
J'aimerais faire une petite parenthèse. J'ai remarqué que dans un grand nombre de commentaires à propos des Autochtones se glisse une perspective historique. Je considère que nous avons une histoire longue de 100 ans dans l'industrie de la pêche, mais cette histoire—notre attachement historique à la pêche—n'est jamais prise en considération dans la même mesure que vous parlez d'un attachement autochtone à la pêche. Quelle est la différence? Je ne comprends pas.
Je voudrais débuter mon exposé en faisant ressortir l'inégalité entre l'Est et l'Ouest qui est si manifeste pour nous sur la côte Ouest. Les stocks de morue de la côte Est se sont effondrés.
J'ai noté les chiffres: on parle de 1,2 milliards de dollars, mais M. Stoffer a précisé que c'était un programme de 4 milliards de dollars pour la LSPA, n'est-ce pas? Ce qui fait un grand total de 4 milliards de dollars pour le programme de la LSPA.
M. Peter Stoffer: John, ce n'était pas seulement la LSPA, mais également pour le PARPMN et d'autres programmes d'adaptation.
M. Bruce Probert: Ah bon! d'accord.
M. Peter Stoffer: Les dépenses ont atteint 4,2 milliards de dollars et le chiffre continue de grimper.
M. Bruce Probert: C'était 4,2 milliards de dollars pour les problèmes de la côte Est, n'est-ce pas?
Puis, nos propres stocks se sont effondrés et nous n'avons strictement rien reçu. Avec du recul, nous avons récupéré les frais de permis cette même année qui étaient équivalents à 700 $. Ainsi, nous avons reçu 700 $ du gouvernement.
L'année précédente, le gouvernement avait créé un programme selon lequel si vous ne pêchiez pas, vous receviez 6 500 $ pour les dépenses encourues à vous préparer à la pêche. La réalité est toute autre: plutôt que de recevoir 6 500 $ pour ne pas pêcher, nous avons recouvert nos frais de permis.
• 2004
Parlant de 1999, j'aimerais mentionner qu'à mon avis, la
majeure partie du problème ou de la crise est dû à la mauvaise
gestion du MPO. Ce point n'a pas été soulevé et pourtant il y a eu
un surplus de 600 000 saumons Chilko, au-delà des exigences prévues
pour les échappées, qui sont remontés vers les frayères. Le MPO
n'était même pas au courant qu'il y avait tout ce poisson en
supplément. En raison de la mauvaise gestion du ministère, on nous
a empêchés de pêcher des poissons représentant 6 millions de
dollars. Les saumons étaient là, mais on ne nous a pas permis de
les attraper et il n'y avait aucune inquiétude au sujet du saumon
coho au moment de cette remontée.
C'était il y a deux ans. L'année dernière, nous avons pêché pendant trois jours sur le fleuve et pas une fois cette année. Notre saison des pêches se résume à trois jours en trois ans.
J'aimerais que vous compreniez qu'il y a deux ans, nous avons presque fait faillite et maintenant nous avons subi deux nouvelles années de mauvaise gestion. Voilà où nous en sommes. Je voulais simplement vous donner un aperçu historique de l'envenimement de la situation que nous vivons sur cette côte.
Le problème principal se situe au niveau de la négligence du MPO. Le ministère n'a jamais tenu compte de ce que les pêcheurs, qui ont grandi en pêchant, ont vécu toute leur vie sur la côte et qui la connaisse intimement, ont à dire. Ceci n'a aucun rapport avec le programme du ministère ou la façon dont celui-ci exploite la pêche. Personne ne prend ses responsabilités. Si ces gestionnaires laissent gaspiller 20 millions de dollars de poissons, ils ne perdent pas leur poste. C'est à nous qu'il revient de trouver un autre emploi, pendant qu'ils continuent à mal gérer les ressources halieutiques. C'est ridicule.
• 2009
Un autre point intéressant est le suivant: la saison
précédente, le MPO a cru que les stocks de poisson étaient
tellement mauvais qu'ils ont décidé de fermer certaines pêcheries
d'espèces comestibles autochtones. En outre, d'après ce que j'en
sais, il n'y a eu aucune vente de la part d'Autochtones cette
année. Néanmoins, la bande Cheam que nous avons mentionnée
précédemment et qui vit dans les environs de Chilliwack, près d'où
je pêche à Fort Langley, a décidé d'aller pêcher sans tenir compte
du MPO, déclarant: «Le poisson est là et nous irons l'attraper».
Les Cheam ont osé défier le MPO. Ça a pris deux semaines avant que
le ministère n'use de son pouvoir pour retirer les filets de pêche
et confisquer les bateaux et les camions, plutôt que de le faire
dès le premier jour de la pêche illicite.
Cette année, le MPO a scellé un accord avec cette même bande, lui disant qu'il n'enverrait des effectifs pour faire respecter la loi qu'en l'avertissant au préalable. Ainsi, le ministère aviserait la bande avant de venir vérifier les filets, les permis et de compter les pêcheurs. Même si ceux-ci pêchaient lorsque la saison était close, ça ne changeait rien. En fin de compte, les Cheam ont créé leurs propres pêcheries et le MPO les a laissés pêcher quand bon leur semblait, ajoutant simplement qu'il prendrait des photos. La pêche est toujours gérée de cette façon deux ans plus tard.
Le personnel du MPO n'a pas le droit de parler de l'accord avec les Cheam ou de ce qui se passe là-bas parce qu'il serait renvoyé. Je suggère que, si vous avez l'intention d'utiliser des forces de l'ordre du MPO ou quiconque ici, vous posiez des questions précises concernant les conditions de l'accord avec la bande Cheam.
J'aimerais également vous faire part de ce que j'ai lu dans le National Post il y a une semaine en rapport avec l'arrêt Marshall sur la côte Est. J'ai appris soudainement que la seule façon équitable d'agir par rapport à l'arrêt Marshall consiste à acheter des permis existants de pêcheurs non autochtones et de transférer les titres de propriété aux Autochtones. Achetez un permis provenant de personnes non autochtones et transférez-le à la pêcherie autochtone.
C'était il y a deux ans. Mais ça continue: transférez les titres de propriété aux pêcheurs autochtones afin qu'ils puissent être regroupés au sein d'une seule pêche commerciale. Sur la côte Ouest, nous appelons cette façon de traiter la «solution industrielle» et nous avons supplié de faire appliquer cette solution dès le premier jour de l'accord de stratégie des pêches autochtones. C'était il y a sept ans et maintenant ça en fait neuf. Neuf ans et rien n'a été fait depuis. Il existe toujours une pêche à part qui détient ses propres réglementations et qui n'est soumise à aucune restriction de maillage pour la conservation des saumons coho ou autre mesure de conservation qui s'applique à la pêche commerciale en général. Il est clair que nous comptons pour très peu dans le réseau d'influence à Ottawa.
En 1999, au cours de toute la saison, je n'ai pas pris un seul saumon sockeye à des fins de subsistance, ni pour ma famille ou pour mes amis. Mon revenu brut était de 100 $. C'était en 1999. Cette année, mon revenu brut du saumon sockeye est de zéro. Voilà à quel point la situation s'est dégradée et ce n'est pas à cause du manque de poisson. Vous savez ce qu'il en est: le poisson est passé en d'autres mains. S'ils peuvent vendre tous les poissons qu'ils attrapent, il n'y a plus de place pour une pêche commerciale.
J'aimerais maintenant parler de certaines questions d'actualité. Il est évident que le MPO nous a trompés. Vous avez entendu parler des nombreux tours de table, du plan Mifflin et d'autres réunions. Cependant, lors d'une réunion du conseil consultatif maritime canadien, le MPO a fait un exposé, affirmant sa responsabilité envers une rentabilité économique. Comment? J'en ai presque perdu mes moyens. Le ministère a osé nous dire qu'il prônait une rentabilité économique, alors que nous ne pêchons même pas. En quoi est-ce que cette solution est rentable? Je ne comprends absolument pas.
Le plan Mifflin a été créé de façon à réduire la pêche commerciale. Le but a été atteint; cependant la pêche autochtone a augmenté de 400 p. 100, alors qu'au même moment ils nous ont réduits de moitié. Il est clair qu'il existe toujours la même capacité de capture; malheureusement, cette capacité est basée sur les races.
Le vice-président (M. John Cummins): Puis-je vous demander de terminer votre exposé, s'il vous plaît. Nous avons encore un certain nombre de témoins et le temps passe vite.
M. Bruce Probert: Bien. J'aimerais attirer votre attention sur un point et j'espère que vous y réfléchirez lorsque vous ferez vos recommandations.
Dans l'arrêt Marshall, on retrouve une précision qui se rapporte au MPO. Ainsi le ministère doit prendre en considération d'autres relations historiques, c'est-à-dire les relations non autochtones à l'industrie. Ceci nous concerne, nous tous qui sommes réunis dans cette pièce aujourd'hui. Ce poisson ne devrait pas être redistribué selon des critères ethniques. Nous avons une place dans l'industrie de la pêche et nous occupons cette place depuis cent ans dans ma famille. J'espère que vous ferez de votre mieux pour nous donner l'occasion de retourner à la pêche. J'ai terminé mon exposé.
Le vice-président (M. John Cummins): Y a-t-il des questions? Très bien.
Je vous remercie beaucoup Bruce. Je vous suis très reconnaissant d'avoir pris le temps de participer à ce comité encore une fois aujourd'hui.
Le prochain témoin est Kim Nguyen. Bonjour Kim. Je vous remercie d'être venue aujourd'hui. Je vous en suis reconnaissant. Je comprends que ces endroits peuvent sembler inhospitaliers. Si cela ne vous dérange pas, Kim, j'aimerais, avec l'accord du comité, vous poser quelques questions.
Elle a dit qu'elle se sentirait beaucoup plus à l'aise si je lui posais des questions.
Kim, vous êtes originaire du Vietnam. Depuis combien de temps êtes-vous au Canada?
Mme Kim Nguyen (porte-parole du B.C. Vietnamese Fishermen's Association): Je suis arrivée au Canada en 1979.
Le vice-président (M. John Cummins): Où êtes-vous allée à votre arrivée au Canada?
Mme Kim Nguyen: J'ai atterri à Edmonton et y suis restée trois ans. Puis, l'entreprise pour laquelle je travaillais a déménagé à Toronto. Puisque je ne voulais pas aller à Toronto, j'ai décidé d'essayer la Colombie-Britannique parce que j'ai des amis qui y habitent. Je me suis liée d'amitié avec des gens que j'ai rencontrés dans la rue. Vous savez: des personnes de mon pays. Ces personnes m'ont dit qu'elles faisaient de bonnes affaires dans la pêche à la maison et ici aussi. Elles voulaient que je me joigne à elles. À l'époque, la famille de mon oncle vivait ici. Je suis retournée chez moi pour parler à ma famille et mon oncle et moi avons décidé de nous lancer dans la pêche. C'était l'année 1984-1985.
Le vice-président (M. John Cummins): Alors, vous vous êtes lancés dans la pêche en 1984.
Mme Kim Nguyen: 1985.
Le vice-président (M. John Cummins): Si cela ne vous dérange pas, je voudrais que vous m'expliquiez comment vous vous êtes procuré l'argent pour vous lancer en affaires? Je comprends que vous avez réussi et que vous avez même acheté un bateau.
Mme Kim Nguyen: Lorsque nous sommes arrivés ici, je suis restée dans la famille de mon oncle. À l'époque, j'étais célibataire et je travaillais sept jours par semaine. Je faisais des ménages le vendredi, samedi et dimanche et je travaillais à l'usine de jeans GWG les autres jours. Le soir, j'allais à l'école. Je travaillais vraiment fort. Mon oncle travaillait également, mais il est âgé. Ma tante était gardienne d'enfant. Nous avons tous regroupés nos revenus. À cette époque, nous économisions tout l'argent que nous gagnions, parce que dans le nouveau pays, nous n'en avions pas. Lorsque nous avons quitté notre pays, nous n'avions rien. Nous sommes des réfugiés de la mer.
Le vice-président (M. John Cummins): Ainsi, vous avez travaillé dur, vous avez économisez votre argent et vous vous êtes lancés dans l'industrie de la pêche.
Mme Kim Nguyen: Oui, nous avons épargné. Vous savez, à l'époque, le bateau nous coûtait environ 58 000 $, mais nous n'avions pas assez d'argent. Alors, nous avons demandé l'appui financier de deux autres amis et ensemble, à 3, nous avons acheté le bateau. Nous avions deux cousins et avec nous, ça faisait trois. Nous avons chacun mis 20 000 $ et nous sommes partis à la pêche tous ensemble.
Au début, en 1986, nous ne savions pas du tout ce qu'était le coût de la vie en Colombie-Britannique. Nous n'avons rien pu mettre de côté. Nous sommes d'abord allés pêcher le saumon, mais nous ne savions pas comment installer le filet et l'équipement. Rien de rien. Mes vieux amis ne savaient rien non plus et parlaient à peine l'anglais. Je devais regarder ce que les autres personnes faisaient pour reproduire leurs gestes. J'ai perdu des filets et beaucoup d'autres choses. Ça nous a pris du temps à apprendre, trois ou quatre ans. Tout ça pour le saumon.
• 2019
Puis, nous avons essayer la capture des crevettes à l'aide
d'une drague. Nous ne savions pas où aller et comment utiliser
notre drague pour capturer les crevettes. Nous l'avons descendue
dans l'eau, mais en accrochant le fond, elle s'est brisée. Nos
filets s'accrochaient et nous les perdions. Nous n'avions plus
d'argent et nos partenaires ont abandonné. Cela a été une période
difficile pour nous, parce que nous ne savions rien.
J'ai parlé à d'autres pêcheurs et leur ai demandé de me donner des conseils, puisque nos deux autres partenaires étaient partis et que mon oncle et moi avions toujours le bateau. Nous avons dû emprunter un peu d'argent à un cousin et nous l'avons remboursé. Nous avons promis à nos anciens partenaires que nous gagnerons de l'argent pour pouvoir les payer afin qu'ils se trouvent un autre emploi. Comme nous ne gagnions pas assez d'argent pour nos trois familles, les deux autres sont partis et mon oncle et moi avons dû garder le bateau. À cette époque, nous apprenions au jour le jour grâce aux autres pêcheurs.
Nous sommes la deuxième industrie de la pêche vietnamienne en Colombie-Britannique.
Le vice-président (M. John Cummins): La deuxième?
Mme Kim Nguyen: Oui, oui. Il y avait un homme plus âgé, Owen Grenville, qui avait beaucoup d'expérience dans le pays, parce qu'il était dans l'armée. Il travaillait sur les gros navires et il nous a montré comment faire. Pourtant, l'exploitant devait faire exactement ce que les pêcheurs faisaient ici.
À cette époque, nous avions quelques connaissances. Nous pouvions décider d'aller à la pêche. J'ai commencé à me sentir plus à l'aise avec mes connaissances et j'ai demandé à un pêcheur à Steveston de me dire où aller, de me faire connaître les règlements et tout ce qui se rapporte à l'industrie.
Vers 1990, j'étais vraiment à l'aise. Nous avons pu aller jusqu'à Rupert.
Le vice-président (M. John Cummins): Votre vie était difficile lorsque vous avez commencé en 1985, puis en 1990, vous vous êtes sentie assez à l'aise pour voyager jusqu'à Prince Rupert et le long de la côte de la Colombie-Britannique. J'imagine que vous gagniez de l'argent?
Mme Kim Nguyen: Nous gagnions un peu d'argent à l'époque. Nous avions appris à ne pas répéter les erreurs du début. Oui, nous avons gagné de l'argent et j'ai pu rembourser tout ce que les 2 autres partenaires avaient prêté. Maintenant, le bateau nous appartient.
Le vice-président (M. John Cummins): Vous vous êtes assurée un profit, vous avez remboursé votre bateau...
Mme Kim Nguyen: Oui, nous avons tout remboursé.
Le vice-président (M. John Cummins): ...et la vie a été facile jusqu'en 1992.
Mme Kim Nguyen: 1992 a été une bonne année. Nous avons gagné beaucoup d'argent avant 1992. Après 1992, nous ne gagnions plus d'argent parce que la pêche était divisée. Nous ne pouvions...
Le vice-président (M. John Cummins): Alors, après 1992, lorsque le gouvernement a introduit cette pêche commerciale autochtone séparée, vous n'aviez plus de chance.
Mme Kim Nguyen: Oui, c'est ça.
Le vice-président (M. John Cummins): Où est votre permis aujourd'hui? Quelle est votre zone...
Mme Kim Nguyen: Mon permis se trouve dans la zone E.
Le vice-président (M. John Cummins): Zone E. Ainsi, vous avez un bateau à filets maillants sur le fleuve Fraser.
Mme Kim Nguyen: Oui, j'ai un bateau à filets maillants sur le fleuve Fraser. C'est très difficile parce que mon mari adore la pêche. Il était pêcheur au Vietnam également. Je l'ai épousé parce qu'il était un bon pêcheur au Vietnam et ici aussi. Malheureusement, en 1996, il a eu une insuffisance rénale. Il adore pêcher, mais je voulais abandonner et remettre notre permis au gouvernement. Il m'a demandé de rester pour lui. Un de ces jours, sa condition s'améliorera.
Le vice-président (M. John Cummins): Y a-t-il plusieurs pêcheurs vietnamiens en Colombie-Britannique de nos jours?
Mme Kim Nguyen: Oui, il y en a beaucoup.
Le vice-président (M. John Cummins): Pourquoi croyez-vous qu'il y en a autant?
Mme Kim Nguyen: Parce que certains d'entre eux pratiquaient la pêche au Vietnam. Ils adoraient leur métier. Ils sont libres. Ce pays représente la liberté. Ils peuvent sortir et aller pêcher. C'était ce qu'ils faisaient au Vietnam aussi. C'est difficile pour eux de faire autre chose à cause de la langue.
Le vice-président (M. John Cummins): Oui.
Mme Kim Nguyen: C'est pourquoi les gens ont choisi d'aller à la pêche. Et avant, la pêche était excellente. Ils gagnaient beaucoup d'argent. La pêche n'était pas séparée en trois zones. Les gens pouvaient bien vivre avec un seul permis. Vous pouviez voyager tout le long de la côte, vous pouviez gagner de l'argent ici et là. Maintenant, cette division est exactement comme celle de la côte Est. Ça s'est produit là-bas et il n'y a plus d'argent à gagner dans ce métier.
Le vice-président (M. John Cummins): Non.
Mme Kim Nguyen: La situation s'est vraiment détériorée.
Le vice-président (M. John Cummins): Oui.
Combien de temps avez-vous pêché au cours des trois dernières années: deux jours et demi?
L'été dernier, il y a eu une pêche de contestation. Un nombre de pêcheurs non autochtones, certains Autochtones également j'imagine et des pêcheurs professionnels autorisés ont fait une démonstration sur le fleuve ici et 43 d'entre eux ont reçu une amende du gouvernement. Avez-vous participé à cette démonstration?
Mme Kim Nguyen: Oui, j'y ai participé.
Le vice-président (M. John Cummins): Avez-vous reçu une amende?
Mme Kim Nguyen: Je n'ai pas jeté mon filet à la mer, mais je voulais aller à cette démonstration pour faire savoir aux gens que nous voulons que la situation soit juste pour tout le monde. Je pratique la pêche et je travaille dur moi aussi. Je respecte la terre également.
Et je suis canadienne. Je veux être traitée sur un pied d'égalité, pas avec...tous les pêcheurs autochtones. Je suis un être humain. Je veux tout partager de façon équitable. J'ai une famille, des enfants et un mari malade. Sans poisson, sans argent, je ne peux pas vivre. C'est très dur pour moi.
Le vice-président (M. John Cummins): Je vous remercie beaucoup, Kim, de votre exposé.
Je ne sais pas si d'autres membres ont... Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Madame, il est important que vous sachiez qu'on a très bien compris votre message. C'est sûr que la justice est une valeur pour le peuple canadien, et on va s'arranger pour que cela se rende à Ottawa.
[Traduction]
Mme Kim Nguyen: Je vous remercie beaucoup.
J'espère qu'on nous traitera de façon juste et que nous pourrons vivre correctement. J'ai mes comptes ici. Je payerais l'hypothèque et toutes les autres factures, mais je n'ai pas d'argent.
Le vice-président (M. John Cummins): Je vous remercie beaucoup, Kim.
Nous laissons maintenant la parole à Larry Wick, s'il vous plaît.
M. Larry Wick (B.C. Fishing Vessel Owners Association): Je vous remercie, mesdames et messieurs.
Je m'appelle Larry Wick et je fais partie de la 3e génération d'une famille qui travaille dans l'industrie de la pêche. Mes fils font également partie de l'industrie. Nous possédons deux bateaux senneurs et deux langoustiers.
Je me suis engagé au sein du groupe d'étude sur le Fraser depuis 14 ans et je suis actif auprès du Fishing Vessel Owners Association. Je suis intervenu dans la négociation du traité et ai assisté à de nombreux conseils et groupes d'étude tout au long de mes 40 ans dans l'industrie.
Je sais que vous êtes pressés et j'ai environ cinq points sur lesquels je voudrais insister. Je commencerais par le groupe d'étude sur le Fraser. Ce groupe est actif depuis les 14 dernières années, toutefois ses opérations sont maintenant en péril, alors que nous gérons notre pêche au sein du caucus canadien, à cause de l'accord de la SPA. Nous qui assistons en tant que membres du groupe d'étude sur le Fraser ne sont pas mis au courant de l'information concernant la quantité de poisson et les heures de pêche. Ces décisions sont prises dans une autre pièce séparée.
• 2029
De temps en temps, le ministère s'est impliqué. Après avoir
accepté unilatéralement un accord de libéralisation avec les États-Unis,
certaines situation ont obligé le gouvernement du Canada à
s'impliquer et nous avons dû retourner à la table de négociation
pour retirer le permis de nos propres pêcheurs afin de permettre
aux Autochtones de pêcher.
Je n'en dirai pas plus à propos de la SPA, mais il fait bien savoir que le programme a perdu tout contrôle de la situation. Cet accord déchire une industrie: il est injuste et inéquitable.
Je continuerai avec la pêcherie ESSR. Au cours de l'été précédent, nous avons préparé une tessure à filets maillants dans la zone E, correspondant au fleuve Fraser, en attente d'une ouverture. En raison de problèmes de gestion d'une remontée tardive et divers autres problèmes—plus précisément, la subsistance et les ventes de la SPA—nous n'avons pu la mettre à l'eau. Cependant, à environ 30 milles d'ici se trouve Saanich Inlet où nous gérons une pêcherie de saumon kéta. Cette pêcherie ESSR, ou excédent des besoins en géniteurs, s'est développée à ce point qu'elle a réussi à attraper 135 000 poissons avant qu'un seul bateau à filets maillants de la zone E ne soit mis à l'eau cette année.
Ces pêcheries ESSR sont devenues des répartitions privées. Elles sont maintenant exploitées tout le long de la rivière Skeena jusqu'à Saanich Inlet. Ceux d'entre nous qui transformons notre propre produit doivent accepter une réduction de 5 $ par caisse dans la valeur de nos conserves de saumon en raison de la qualité des produits qui se trouvent sur le marché par ce type de pêcherie. Les pêcheries ESSR semblent avoir adopté une cadre de répartition strictement privée et les gens n'ont qu'à se servir.
Les points suivants que je désire aborder sont les bordereaux d'achat et la consignation des prises. Le système est tellement désuet que nous sommes obligés d'attendre parfois jusqu'à l'automne pour savoir combien de poissons ont été capturés. Ainsi, si nous pêchons en août, nous ne pouvons obtenir un inventaire adéquat qu'à l'automne. J'assiste aux réunions du groupe d'étude depuis probablement 15 ans et on nous a promis chaque fois la création d'un système plus efficace. Cependant, nous n'avons fait aucun progrès, absolument aucun progrès à ce sujet au sein du MPO.
Si nous avions un système de garantie où les acheteurs comme moi pourraient obtenir 500 bordereaux et, à la fin de l'année, si je retournais 250 bordereaux n'ayant pas été remplis et 250 autres ayant été remplis...les responsables sauraient au moins ce qui se passe. Actuellement, nous avons une pile de livrets et de documents et des poissons qui sautent par-dessus les digues et le poisson comestible qui entre dans le marché privé. Il est quasiment impossible de gérer la pêche lorsque vous siégez au sein du groupe d'étude sur le Fraser parce que vous n'êtes au courant de rien... Vous jetez une tessure dans le fleuve Fraser et vous vous attendez à un nombre x de poissons qui justifie la taille de la remontée, mais à certains moments, cela prend des semaines avant d'obtenir ce genre d'information.
Je me suis pas mal impliqué dans le programme de permis, ce qu'on appelle le plan Mifflin et je me rappelle les mots de M. Anderson:
-
Nous travaillons à un avenir dans lequel la pêche sera rentable
pour les pêcheurs et contribuera à l'économie locale. La pêche
n'est pas une industrie en déclin, c'est une industrie qui a de
l'avenir.
Depuis, ces gens ne nous ont pas permis de pêcher. Vous avez entendu tous les témoignages à ce sujet aujourd'hui. Voici ce qu'ils nous ont promis, selon quoi certains d'entre nous ont pris la décision de rester dans l'industrie.
Je peux vous énumérer certaines promesses:
-
[...] on s'attend à ce que la santé du secteur commercial
s'améliore nettement grâce au programme actuel du retrait des
permis.
Ceci est tiré du document de la nouvelle orientation, Un cadre de répartition du saumon du Pacifique: 1999-2005. Nous avons pêché pendant deux jours depuis ce jour, la même tessure.
• 2034
J'ai décidé d'acheter un deuxième permis. Mes fils sont dans
l'industrie. J'ai donc acheté ce deuxième permis à la coquette
somme d'environ 800 000 $ afin que nous puissions participer à la
pêche des zones du Nord et du Sud. J'ai pris une hypothèque pour
moi, ma femme et mes enfants, mais nous n'avons obtenu aucun temps
de pêche.
Il existe un nouveau programme quelque part qui n'a pas été inclus dans le plan Mifflin, parce qu'il recèle des promesses qui donneront plus de chances aux pêcheurs qui restent dans l'industrie. Ce programme se nomme le plan d'adaptation et de restructuration des pêches du pacifique. C'est en faisant miroiter de telles promesses que nous qui avons décidé de rester avons suivi.
• 2039
Vous ne pouvez pas vous imaginer à quel point on nous a
trompés, parce que maintenant vous avez une pêcherie ESSR qui est
répartie de façon privée sur deux bateaux senneurs. Deux bateaux
senneurs ont eu plus que le reste des 160 bateaux senneurs sur la
côte Sud. Voilà le résultat de la répartition privée.
Nous entendons maintenant parler de Horsefly Lake, où les nations qui y habitent désirent avoir des pêcheries ESSR. Nous entendons ces récriminations constamment, alors que ces pêcheries n'avaient même pas été mentionnées à l'époque de Mifflin. Pas une seule fois. C'est un élément qui a été initié en parallèle avec l'accélération de la SPA.
J'ai assisté à une réunion à Lillooet il y a quelque temps, où le chef de la bande Lillooet m'a dit que ses pêcheurs avaient attrapé 800 poissons et comptaient faire ce qu'ils désiraient, en dépit des traités ou des lois du Canada. Le lendemain, il m'a mené à un point de vue qui donnait sur les séchoirs verticaux et les délégations canadienne et américaine étaient présents dans un autobus. Nous avons marché vers le point de vue et je dirai qu'il y avait de 50 à 100 saumons sockeye qui avaient été jetés là dans les buissons à la vue de tous. Juste à côté se trouvait une piscine en plastique. À mon avis, et je répète ceci n'est qu'une hypothèse, ces poissons se trouvaient dans la piscine à l'arrière d'un camion et ils avaient été jetés là parce que les pêcheurs n'avaient pu trouver acheteur.
La flotte de pêche commerciale n'est pas sortie de l'année afin de protéger les saumons de remontée tardive. Les bateaux à filets maillants de la zone E n'ont pas pêché. La même flotte a décidé de pêcher tout un jour en réaction à de tels abus comme celui que je viens de mentionner. Il ne semble pas y avoir de réglementation à ce sujet.
Je termine en vous laissant réfléchir à un cas. J'ai rencontré un homme il y a quelque temps qui vit dans le nord de la Colombie-Britannique. Il a quatre enfants. La famille est très unie, ses quatre enfants sont tous mariés et il a maintenant huit petits-enfants. Un de ses fils à épousé une femme autochtone. Chaque dimanche, ils mangeaient ensemble jusqu'à ce que les privilèges commencent à se faire sentir. Un jour il est descendu avec son petit-fils de 5 ans jusqu'à la rivière et un petit-fils a dit à un autre: «Je peux pêcher ici, mais Jimmy ne peut pas». Une fois que cette nouvelle s'est répandue, les réunions du dimanche se sont interrompues, parce qu'une partie de la famille ne voulait plus venir. Cet homme m'a dit: «Larry, ma famille s'est désunie et nous faisons la même chose à notre pays».
• 2044
J'ai travaillé dans cette industrie avec Ron Sparrow, celui
qui a donné son nom à la décision Sparrow. J'ai d'excellents amis
au sein de la nation autochtone qui travaillent dans l'industrie
comme moi. Ils sont très insatisfaits, comme nous, surtout ceux qui
oeuvrent dans le secteur commercial. Plusieurs d'entre eux trouvent
cette décision injuste.
Si le Canada veut régler la question des Autochtones, alors ne m'ôtez pas le pain de la bouche. Je suggère que les représentants viennent me voir, me paient et je partirai. Mais, je crois qu'il est injuste d'intervenir et de s'emparer du travail de la dame qui vient de parler et de bien d'autres personnes pour résoudre un problème qui s'est passé il y a de nombreuses années et qui n'a été causé par aucune de ces personnes.
Nous n'avons rien fait de mal. Nous avons pêché lorsque c'était permis. Nous avons respecté les promesses, nous nous sommes soumis aux réglementations et maintenant on nous enlève nos privilèges. Je terminerai sur ce point.
Le vice-président (M. John Cummins): Je vous remercie Larry.
James.
M. James Lunney: Je vous remercie monsieur le président.
Larry, j'aimerais apporter mes commentaires et tirer profit du fait que plusieurs des témoins ici, dont vous faites parti, ont mentionné une série de promesses faites l'une après l'autre par des ministres—réduction des effectifs et retrait des permis, rachats, réduction de l'industrie commerciale—que l'avenir serait meilleur. Selon ces promesses, vous avez pris d'importantes décisions financières, sauf que ces décisions ne se sont pas concrétisées. Le poisson est là, mais vous n'avez pas le droit de l'attraper et la répartition va ailleurs.
L'industrie, comme plusieurs témoins l'ont déclaré aujourd'hui, a passé par des phases de rationalisation, de programmes coopératifs avec inspections, réglementations et autres limitations pour tenter de la conserver et de la gérer. Or, d'autres personnes reçoivent une part sans subir les mêmes contraintes de supervision et sans devoir se conformer aux mêmes règlements. Nous percevons clairement l'insatisfaction que vous éprouvez et que vous avez très bien exprimé à tour de rôle aujourd'hui.
De surcroît, vous avez mentionné la pêcherie ESSR et la nouvelle façon de s'emparer d'une part et de la répartir à une autre personne.
Je voudrais revenir à un point que vous avez mentionné précédemment, Larry. Vous avez dit qu'il fallait que vous attendiez jusqu'à l'automne pour pouvoir tenir le compte du nombre de poissons attrapés; autrement dit le poisson passe d'une main à l'autre avant que vous n'ayez la moindre idée du nombre de poissons pris. Vous avez suggéré un moyen de procéder que je n'a pas très bien compris et peut-être est-ce le cas pour certains autres membres du comité. Pourriez-vous répéter ce que vous avez dit à ce sujet? Vous avez dit que si vous déteniez un certain document, vous pourriez avoir une meilleure idée du nombre de poissons.
M. Larry Wick: Très bien. C'est un système utilisé aux États-Unis. En ce moment, il existe de nombreux types de technologies quelquefois supérieurs à ce système.
La façon dont nous procédons ici est la suivante: lorsque vous allez pêcher pour une compagnie, le ministère vous remet un livret et un bordereau de pêche. Ce livret a été créé par le ministère des Pêches et des Océans qu'il a remis à la compagnie. Il peut avoir dix ou vingt pages. Il n'y a pas moyen pour le ministère de savoir combien de bordereaux doivent leur être retournés. Je peux aller pêcher et faire deux livraisons par jour ou si je déchire mon filet, je n'attraperai aucun poisson et ne ferai aucune livraison. Il n'existe aucune façon de savoir combien de bateaux sont à la mer, sauf par survol aérien.
Vous pourriez mettre en pratique un système grâce auquel en tant qu'acheteur de poisson, j'obtiens 500 bordereaux du ministère des Pêches et des Océans. À la fin de la semaine—nous transmettons ces consignations en tout temps quand nous les recevons—, je n'aurais peut-être utilisé que 200 bordereaux et il m'en resterait 300. Le ministère pourrait venir vérifier et dire: «Vous avez 300 bordereaux, où sont les 200 qui restent?» et je répliquerais: «Les voici».
Avec ce système de livret, le ministère ne sait pas si j'ai livré une fois, deux fois ou même si j'ai pêché au cours de cette journée. Pour cette raison, il ne sait pas ce qu'il va recevoir. Il ne sait pas combien de bateaux participent à une pêche.
Ce nouveau système nous aurait facilité la tâche lorsque nous avons participé au groupe d'étude sur le Fraser et permis à la flotte de bateaux à filets maillants d'aller pêcher. De toute façon nous n'avons pas fait grand-chose. Si vous croyiez qu'il y avait 5 millions de sites de remontées, vous pourriez attraper 100 000 poissons dans le fleuve Fraser.
En ce moment, nous sortons les bateaux et attrapons 60 000 poissons. Nous n'avons pas de bordereau, alors nous ne connaissons pas le nombre de poissons. Tout ce que nous obtenons est un chiffre approximatif en déchiffrant le système. Avec un cadre de répartition, tout le monde serait protégé.
• 2049
Vous pouvez gagner si vous savez comment vous y prendre sans
déclarer vos prises ou d'une autre manière. C'est ce qui se passe
dans la pêcherie de la SPA. Les pêcheurs disent qu'ils n'ont rien
pris et ils continuent. À moins que nous ne modifiions notre
stratégie...
Si nous nous attendons à attraper 100 000 poissons et prenons en fait 120 000, cela signifie que la remontée était supérieure à ce qui était prévu. Si 100 000 poissons sont attrapés, mais que seulement 60 000 d'entre eux sont consignés, nous croyons que la remontée était inférieure et nous commençons à fermer boutique. Nous devons nous rattraper si nous voulons gérer l'industrie par remontée: les remontées estivales précoces, les remontées estivales et les remontées tardives, ainsi de suite.
Le système nous a été promis depuis des années. Lorsqu'Eric Kramer était là, il y a de cela 15 ans, il l'avait presque obtenu. Puis, trois ou quatre personnes ont déclaré qu'ils allaient l'obtenir. La vice-présidente du groupe d'étude sur le Fraser est partie il y a environ cinq ans pour tenter de concevoir un système, mais il n'y toujours pas trace d'un système quelconque.
Les responsables sont probablement en train d'emballer le crabe et les panopes du pacifique et tout ce que vous voulez dans le même sac. Par contre, la gestion du saumon est vitale et nous sommes très en retard.
Je vous remercie.
M. James Lunney: Combien d'acheteurs se trouvent au sol lors d'une pêche sur le fleuve Fraser?
M. Larry Wick: Lors d'une pêche standard?
M. James Lunney: Lors d'une pêche par bateaux à filets maillants, combien d'acheteurs s'y trouveraient-ils?
M. Larry Wick: Il y en aurait 10, 15 au maximum.
M. James Lunney: Ainsi, essentiellement, cette information pourrait être retransmise au ministère à la fin de la journée, si le système adéquat était en place.
M. Larry Wick: Si le système adéquat en place, nous pourrions le faire. Nous pourrions le faire en ligne ou n'importe quand.
M. James Lunney: La compagnie Avis le fait avec ses voitures, alors il n'y a aucune raison pourquoi l'industrie de la pêche ne pourrait pas le faire à l'ordinateur.
M. Larry Wick: Le système n'est pas assez précis pour l'industrie de la pêche.
Le vice-président (M. John Cummins): Je suis désolé, je ne voulais pas vous interrompre.
Y a-t-il d'autres questions pour le témoin? Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Je vous remercie, monsieur le président.
Lorsque vous avez dit que la délégation avait remarqué ces saumons au bas de la colline, l'avez-vous signalé aux autorités compétentes?
M. Larry Wick: Oui, je l'ai fait.
M. Peter Stoffer: Qu'est-ce que les autorités ont dit?
M. Larry Wick: Elles étaient en train d'enquêter.
M. Peter Stoffer: Quand cela s'est-il passé?
M. Larry Wick: Il y avait du personnel du MPO avec nous et je n'ai rien dit. J'ai laissé passer. Puis, un autre problème s'est soulevé ou quelqu'un m'a appelé parce que je siège au sein du groupe d'étude sur le Fraser. Cette personne m'a dit qu'un Save-On-Foods and Drugs à North Vancouver au coin de Park et Tilford vendait du saumon sockeye rouge. Elle m'a demandé si je comptais intervenir.
J'ai contacté le MPO à ce sujet et pendant que j'étais au téléphone, j'ai mentionné l'incident du poisson dans les buissons aux gens du MPO. Une heure plus tard, une personne de Lillooet m'a appelé. Elle m'a dit être au courant de l'incident parce qu'on lui avait signalé. Elle avait parlé avec des personnes de la bande là-bas, mais personne ne semblait être au courant.
M. Peter Stoffer: Lorsque vous entendez parler d'une remontée de 20 millions de saumons, c'est un problème que nous, à Hays River au Cap-Breton, à Humber au Labrador et à Miramichi au Nouveau-Brunswick aimerions beaucoup avoir. Il n'y a aucun saumon qui remonte ces rivières.
Comme je fais partie de l'industrie depuis plusieurs années, je voudrais en profiter pour vous demander, et j'ai déjà obtenu l'opinion de plusieurs personnes, pourquoi le MPO agit de cette façon? Si vous pouviez faire une recommandation à M. Dhaliwal, quelle serait-elle?
M. Larry Wick: Il devrait y avoir une pêcherie pour tous. Nous devrions tous pêcher au sein d'une seule pêcherie.
M. Peter Stoffer: De façon égale, oui.
M. Larry Wick: Si un Autochtone souhaite devenir pêcheur, il peut venir et pêcher avec nous, sans privilège. Tout le monde paie les mêmes frais de transport. Vous payez la même somme pour le permis, vous pêchez avec tout le monde lorsque c'est permis. C'est tout. Un seul ensemble de règlements. Nous ne désirons pas de disparité, mais une véritable égalité. C'est tout ce que nous voulons.
M. Peter Stoffer: je vous remercie.
Le vice-président (M. John Cummins): Monsieur Wappel.
M. Tom Wappel: Monsieur Wick, est-ce que cette documentation que vous nous avez remise fait-elle partie de votre exposé?
M. Larry Wick: Laquelle?
M. Tom Wappel: Elle contient des citations et parle de l'enquête Peckford. Est-ce que c'est votre documentation?
M. Larry Wick: Oui, elle mentionnait l'enquête Peckford.
M. Tom Wappel: Est-ce que je peux vous demander de parler de l'enquête Peckford?
M. Larry Wick: Oui, si je peux m'en souvenir.
M. Tom Wappel: C'est alarmant de constater qu'en 1995, il était possible de pêcher sur toute la côte de la Colombie-Britannique pour une somme de 800 $, alors que maintenant ça coûte 4 100 $. La valeur d'un permis d'un bateau à filets maillants a monté en flèche, simplement parce qu'un individu a divisé de façon arbitraire la région en 3 zones. C'est la même chose pour le permis d'un bateau senneur et la valeur d'un tel bateau.
M. Larry Wick: C'est exact.
M. Tom Wappel: Ça me fait peur. Peut-être que je ne devrais pas l'être. Je ne suis pas un pêcheur.
M. Larry Wick: Vous avez de la chance.
M. Tom Wappel: Quelle est le raisonnement derrière cette hausse phénoménale des frais ou est-ce que cette politique a-t-elle été étudiée spécialement pour chasser les gens de l'industrie, pour réduire la flotte?
M. Larry Wick: Je crois que le but était d'obtenir moins de bateaux et plus de poissons par bateau. À la fin des années 80 ou au début des années 90, le revenu sur le saumon sockeye était bon. Maintenant ce n'est pas le cas à cause des fermes piscicoles. Il y a beaucoup de concurrents partout dans le monde: le Chili, la Norvège et plusieurs autres pays qui envahissent le marché. Je pense tout de même que ceux d'entre nous qui sont dans l'industrie peuvent se trouver un créneau. Je le pense vraiment.
Je possède une petite entreprise qui produit de petites boîtes de conserve de saumon fumé. Nous faisons aussi du hareng et des longes de thon, des petites choses comme ça. Nous espérons ouvrir notre petite usine à Abbotsford et créer 70 emplois. C'est ce que nous espérons, mais la saison de saumon est telle que nous remettons notre idée en question. Peut-être allons-nous abandonner la partie.
En gros, nous avons acheté une grande partie de notre saumon en Alaska cette année pour approvisionner nos marchés. Pourquoi est-ce que nous faisons cela? Nous pourrions tout autant aller aux États-Unis et payer moins de taxes ou aller en Alaska et faire des emprunts.
M. Tom Wappel: La raison pourquoi je vous pose cette question est parce que vous nous avez donné cette documentation comme faisant partie de votre exposé et j'essaie de comprendre son bien-fondé dans le contexte actuel. Est-ce que ça faisait partie de la façon de procéder, de réduire l'industrie ou est-ce que les pêcheurs ont-ils contesté ces augmentations énormes?
M. Larry Wick: Oh, il y a eu les deux côtés de la médaille. Un grand nombre de pêcheurs voulaient que la côte leur soit grande ouverte et seulement payer les bateaux. Plusieurs d'entre eux désiraient une division en zones.
En ce qui concerne la côte, la division s'est effectuée surtout à des fins de gestion, pour que vous ne pêchiez pas dans la partie supérieure du détroit de Johnstone et attrapiez du poisson qui allait vers Rivers Inlet. Nous avons eu droit à des pêcheries de l'extérieur, alors nous savions quels stocks nous pêchions, plutôt que de pêcher au hasard et prendre du stock d'un peu partout sans savoir lequel vous aviez droit. Voilà pourquoi la division de la côte s'est faite.
M. Tom Wappel: Très bien. Je vous remercie.
Le vice-président (M. John Cummins): Je vous remercie, Monsieur Wappel.
Si je pouvais vous demander très rapidement, Larry... La question a été soulevée un peu plus tôt concernant les difficultés qu'éprouvaient certaines entreprises de transformation qui, pour cette raison, avaient décidé d'exploiter le marché japonais pour la 3e année d'affilée et s'étaient entendues pour vendre du saumon sockeye du fleuve Fraser. Maintenant, encore une fois, elles ont dû dire: «Désolé, nous ne pouvons respecter le contrat». On nous a dit évidemment qu'elles connaissaient des difficultés. Les Japonais ont dit: «Ne nous dérangez plus jusqu'à ce que vous ayez le produit». Avez-vous vécu une expérience semblable ou êtes-vous au courant de ces inquiétudes?
M. Larry Wick: Ça m'est arrivé cette année.
Le vice-président (M. John Cummins): Vraiment?
M. Larry Wick: L'année dernière, nous avons amené quatre acheteurs pour voir le produit, pensant que la saison serait bonne et que nous pourrions attraper beaucoup de poisson. Nous avons établi un programme, connu sous le nom de programme boîte à lunch, pour les fermiers du Japon, qui fait en sorte qu'un repas par semaine est fourni par le gouvernement pour permettre aux fermiers de rester plus longtemps dans les champs. C'est une très grosse entreprise de livraison, comme le système Dairyland, où la femme au foyer peut noter ce qu'elle désire pour les repas de la semaine suivante.
Cette année, nos quatre acheteurs ont amené avec eux 17 personnes au Canada pour voir le produit, pour examiner nos usines, pour se présenter à nous et pour nous présenter à eux. Nous ne pouvions même pas leur fournir 20 000 livres de poisson au moment où la saison s'est terminée, à cause de ces problèmes de permis, et ceux qui ont le droit d'attraper du poisson le jettent dans les buissons.
Le vice-président (M. John Cummins): Bien sûr, un des problèmes concerne la qualité. Cette question de la qualité a toujours été une source d'inquiétude sur le fleuve Fraser. En fait, le saumon sockeye du fleuve Fraser est reconnu à l'échelle mondiale pour sa qualité. Chez les pêcheurs commerciaux, le poisson est sorti du filet et déposé dans de la glace concassée. Cette façon de faire améliore la qualité générale et maintient la qualité du poisson, c'est pourquoi sa réputation est bien méritée. Ceci n'est pas vraiment le cas en ce qui concerne la pêcherie autochtone.
• 2059
Voudriez-vous ajouter des commentaires à ce sujet? Cette
pratique remettra-t-elle en cause notre réputation?
M. Larry Wick: Cette pratique affecte certainement les marchés locaux jusqu'en Alberta et des endroits comme ceux-là. Cependant, maintenant ils exportent leur poisson jusqu'au Japon. Ce mouvement commence. Vous pouvez les voir dans le marché à Tsukiji, des cargaisons de conteneurs s'y rendent.
Il paraît qu'une nouvelle usine a été construite le long du fleuve Fraser sur une réserve autochtone, dont le MPO, d'après ce qu'on m'a dit, ne veut rien savoir, mais qui a été subventionnée par les Affaires indiennes. Je ne l'ai pas visitée, mais on me dit qu'elle est faite en acier inoxydable, une usine hors pair. Je suppose qu'une partie du stock y est envoyée.
Le vice-président (M. John Cummins): C'est une très belle usine. Je l'ai vue.
M. Larry Wick: Je ne l'ai pas vue, Je n'ai aucune idée. Je sais que ceux d'entre nous dans l'industrie ne pourraient probablement pas se le payer.
Le vice-président (M. John Cummins): Non. C'est un tout nouveau bâtiment, absolument fantastique.
M. Larry Wick: J'ai un gros problème avec ça. Je trouve cela très injuste et tout à fait inéquitable. Tout ce qui se déroule en ce moment, alors que nous avons cru au système en toute bonne foi. Ils ont eu une chance de s'en tirer.
Voilà ce qu'on nous a dit: Ce ne sera pas une industrie en déclin; ce sera rentable économiquement; nous accomplirons toutes ces belles choses. Les règlements changent sans arrêt. Ils font la récolte dans la pêcherie ESSR. Ils récoltent du bon poisson.
Le vice-président (M. John Cummins): Je vous remercie beaucoup, Larry.
Je crois que la question de la qualité est importante. L'été dernier, un homme qui se trouvait au fond de la pièce, Dave Wheeler, a repéré un camion sur l'autoroute et l'a suivi jusqu'à une entreprise de transformation à Vancouver. La cargaison avait été transportée probablement de la rivière Skeena. Le camion d'une tonne avait donc parcouru 800 milles pour trimballer du poisson, le transformer ici à Vancouver et le vendre. Qui sait où la cargaison s'en allait, mais vous pouvez être sûr que la qualité était douteuse, parce que la saison là-haut était à sa fin et pourtant le produit allait être exporté du Canada en tant que produit du Canada. Cette pratique amoindrit le produit des gens qui s'assurent que le poisson est manipulé correctement.
Le dernier témoin, je crois, sera Mike Haffenden. Monsieur Haffenden, s'il vous plaît.
Je suis désolé de vous avoir fait attendre si longtemps. Vous avez été très patient, et je suis sûr que vous êtes reconnu pour votre patience.
M. Mike Haffenden (témoignage à titre personnel): J'ai commencé à pêcher en 1958. Je travaillais sur un barrage flottant dans Kelsey Bay et un bateau de pêche qui passait avait un pêcheur qui s'était blessé. L'équipage recherchait un jeune homme et j'y suis allé. Douze jours plus tard, j'avais payé ma maison et je n'ai pas arrêté de pêcher depuis.
La pêche aujourd'hui est quelque peu différente. Je suis d'avis que nous ne suivons pas la bonne voie. Nous sommes absolument mal gérés et je crains l'attitude agressive du MPO vis-à-vis l'application des lois sur la pêche sur une petite échelle. Lorsque le ministère devrait faire appliquer ses lois sur le fleuve Fraser, il n'est nulle part. Cependant, pour des infractions mineures, j'ai vu récemment en plein milieu de la ville de Vancouver, des agents de surveillance avec des armes chargées affronter des pêcheurs de crabe et de crevette.
Je crois que cette façon d'agir est la mauvaise et j'aimerais vous faire remarquer que la GRC est en train de former des agents du MPO. Je méprise les agents de la GRC et je veux que vous sachiez ce qui se passe.
Je répondrai à la question de cet homme ici. Si j'avais une chose à changer dans l'industrie de la pêche, c'est la mauvaise gestion de cette stratégie autochtone. C'est mon opinion.
Je vous remercie beaucoup.
Le vice-président (M. John Cummins): Le dernier témoin sera Ken Connolly. Monsieur Connolly, s'il vous plaît.
Je crois que ce sera le dernier témoin. Il y a deux hommes au fond de la pièce que nous aurions voulu entendre partager leurs connaissances aujourd'hui, mais ils refusent.
M. Ken Connolly (coordonnateur de l'Area E Gillnetters Association): Bonjour. Je m'appelle Ken Connolly. Je suis un coordonnateur de l'Area E Gillnetters Association entre les pêcheurs de la zone E et le MPO. Je n'ai su qu'à la dernière minute que j'allais participer à ce comité parce que je remplace Bob McKamey qui ne pouvait pas venir. Il m'a demandé de lire une lettre qu'il m'a envoyée par télécopieur.
Nous parlions de la mauvaise gestion du MPO. Je suis vraiment au courant de ce problème, parce que j'en ai subi les conséquences tout au long de l'année.
En mars ou février de cette année, j'ai assisté à une réunion sur l'île de Vancouver concernant la pêche à venir du saumon sockeye. En gros, on nous a promis pour la zone E qu'on attraperait tellement de poissons que nous ne saurions pas quoi en faire. Les responsables parlaient à l'époque d'environ 19 millions de poissons. Je leur ai dit de ne pas être si confiants, puisque que nous sommes dans l'arrière-saison. Devant nous se profilent la pêche du détroit de Johnstone, la pêche des bateaux à lignes traînantes et la pêche des bateaux senneurs. Puis, il y a également la pêche autochtone, la pêche américaine, et enfin nous. La pêche sportive se trouve même avant nous. Nous sommes les bons derniers. Et finalement, nous n'avons pas pu pêcher.
En ce qui a trait au problème de gestion du MPO. Je ne sais pas si vous comptez assister aux réunions avec le MPO cette semaine, mais si c'est le cas, vous devriez apprendre à connaître 2 individus en particulier. Ces personnes sont très égocentriques et sont responsables de la mauvaise gestion du ministère. L'une d'entre elles s'appelle Wayne Saito, qui travaille pour la Commission du saumon du Pacifique et l'autre s'appelle Paul Ryall, qui a décidé de son propre chef d'anéantir la pêche du saumon sockeye cette année.
Une voix: Paul...?
M. Ken Connolly: Paul Ryall, R-y-a-l-l. C'est le responsable du fleuve Fraser. Wayne Saito, lui, est la personne en chef à la Commission du saumon du Pacifique.
Une voix: [Note de la rédaction: Inaudible]
M. Ken Connolly: Non, Wayne Saito n'était pas présent et Paul a oublié de se présenter.
M. Peter Stoffer: Qui vous a dit ça? Je suis désolé de vous interrompre. Lors de cette réunion sur l'île de Vancouver, qui vous a dit...?
M. Ken Connolly: C'était d'autres responsables du MPO concernant la pêche aux bateaux senneurs sur le détroit Johnstone...
M. Peter Stoffer: Vous n'auriez pas ce commentaire par écrit?
M. Ken Connolly: Je n'ai que mes notes. Je pourrais vous nommer les gens qui étaient présents. J'ai tenté après la réunion de suivre ces gens pour leur parler de ce problème et ils ont commencé à tout remanier. Tous ces gestionnaires qui étaient en place au début de l'année ont été remaniés et envoyés dans différentes directions. Paul a toutefois maintenu sa position.
Quant à traiter avec eux, je vais vous donner un exemple. J'ai envoyé une lettre à M. Dhaliwal déclarant que ces 2 individus étaient malveillants, déroutants et irresponsables. Je l'ai envoyée le 11 septembre. J'ai supposé qu'elle se serait perdue au cours du remaniement. J'ai été appelé au bureau du MPO sur Annacis Island et j'ai dû m'expliquer avec M. Ryall lui disant pourquoi je l'avais qualifié ainsi. En gros, il voulait que je m'excuse. Je lui ai dit que j'avais mes raisons, l'une d'entre elles étant la mauvaise gestion.
Paul nous a appelés, les gens de l'Area E Association, me demandant de prendre en main une pêche commerciale pour 100 000 filets—en d'autres termes, une moitié de filet et deux heures de pêche pour 50 000 saumons sockeye. Je lui ai dit que ce n'était pas ma responsabilité, mais bien celle de la Commission du saumon du Pacifique et celle du ministère des Pêches et des Océans: en réalité sa responsabilité. Il éprouvait de l'anxiété à l'idée de se trouver dans une situation périlleuse s'il permettait cette pêche. J'ai refusé. Alors, il m'a dit qu'il essayerait de me donner une chance de pêcher, mais à la dernière seconde, il a changé d'idée et on nous a donné la permission de pêcher 50 000 poissons. Cependant, il a donné la permission aux Autochtones qui sont allés pêcher cette journée: les bandes Tsimshian, Stó:lo, Fort Langley, Katzie et Musqueam.
La pêche Musqueam était la dernière. Ce fut le comble pour les bateaux à filets maillants sur le fleuve Fraser. Nous sommes donc sortis et avons protesté pour prouver ce que l'on avançait: nous savions que c'était le seul poisson que nous allions attraper cette saison. C'est à cause de ce geste que j'ai traité M. Ryall d'homme malveillant. Il nous a offert la pêche, puis il nous a tourné le dos et l'a offerte à quelqu'un d'autre; ces autres personnes étant Autochtones.
• 2109
Quant à Wayne Saito, il était dans le bureau syndical avec
M. Radosevic et John Sutcliffe—c'était un lundi matin—et il a dit
à un groupe de pêcheurs et à d'autres membres du syndicat et les
communautés de pêche à cette époque qu'il instaurerait un programme
de pêche organisée sur le fleuve Fraser le mardi matin pour un
nombre x d'heures.
En attendant, les pêcheurs ont décidé qu'ils étaient mieux de se préparer et d'annoncer aux autres pêcheurs qu'il y aurait une pêche. Ils sont tous partis à l'exception d'un certain nombre de personnes de la Commission du saumon du Pacifique et d'autres du syndicat. Wayne Saito a quitté la pièce et a déclaré: «Je ne peux pas faire ça. Je ne peux pas permettre une pêche».
Ainsi, il a promis une pêche aux bateaux à filets maillants de la zone E, puis a retiré sa promesse. C'est malveillant et déroutant et c'est pourquoi j'ai envoyé cette lettre à M. Dhaliwal.
• 2114
Nous avons discuté avec Paul Ryall à propos des agissements du
ministère et que, pour une quelconque raison, la taille de la
remontée était de 6 millions. On nous a apparemment permis d'aller
à la pêche. Soudainement, la taille de la remontée a chuté à 5
millions, puis à 4 millions. Cette baisse a ralenti la pêche
autochtone, Lorsque les chiffres ont atteint les 5 millions, Paul
est sorti et a conclu un accord, donnant carte blanche aux
Autochtones, les bandes Tsimshian et Sto:lo, pour aller à la pêche.
Il a permis au groupe d'attraper 1,2 million de poissons, avec
environ 300 000 pour les bandes Musqueam-Tsawwassen-Burrard.
Il savait que la taille de la remontée baissait. Il croyait agir de bonne foi, espérant que la taille augmenterait. Cependant, elle n'a pas remonté assez rapidement. Après le 20 août, nous ne sommes plus retournés en mer.
J'ai eu connaissance de d'autres transactions de ce genre. M. Woody de la Commission du saumon du Pacifique a déclaré que nous pourrions aller à la pêche les 18, 19 et 20 août, pas plus tard. Ça n'est jamais arrivé, parce que nous devions attraper quelques centaines de saumon sockeye de remontée estivale tardive.
Il y a eu une communication entre la Commission du saumon du Pacifique et un des membres du MPO. Ils ont justifié la mauvaise saison en blâmant la mauvaise planification et le manque de chance. Selon eux, ces deux raisons expliquaient pourquoi nous n'avions pas pêché.
Nous essayons de nous occuper de d'autres pêches. J'ai tenté de traiter avec M. Ryall. Il a décidé que c'était critique que nous aurions pu organiser des pêches de saumon rose, que ce soit à l'aide de bateaux senneurs ou de bateaux à filets maillants dans d'autres zones.
J'essayais de subventionner un projet choisi, que nous organisions par l'entremise de la zone E, en tentant d'attraper 100 000 saumons roses. Personne au sein du MPO n'a pu me donner le feu vert. M. Ryall a décidé de prendre trois semaines de vacances. L'autre responsable était déjà en vacances durant deux semaines.
• 2119
Je me suis débattu pendant deux semaines, appelant d'autres
gestionnaires de zone sur l'île de Vancouver et tentant de
rejoindre le ministère des Pêches et des Océans. Ils ont accepté.
Ils ont donné leur approbation au projet, mais il fallait que
M. Ryall l'accepte également. Lorsque je l'ai abordé lors d'une
réunion, il s'est excusé et m'a dit que cela ne se reproduirait
plus.
Pendant ce temps, environ 20 millions de saumons roses ont remonté le fleuve. On ne permet qu'une remontée de six millions. Ce fut un gaspillage complet de poisson qui aurait pu être évité et réparti entre d'autres pêches ou pêcheurs en temps de crise.
En ce qui concerne le saumon kéta du fleuve Fraser, c'est la même histoire désastreuse. M. Ryall a conclu un accord avec les bandes Tsimshian et Sto:lo, leur permettant de pêcher un maximum de 70 000 poissons. On ne nous permet pas de pêcher parce que la province nous tient en otage en raison des saumons arc-en-ciel et coho.
La province ne permet pas aux pêcheurs de la zone E de pêcher durant le mois d'octobre. Nous avons obtenu une pêche—10 heures seulement—, alors que les Autochtones ont pu pêcher pendant sept à dix jours. Ils ont déclaré qu'ils n'avaient pas pu attraper assez de poissons et ont continué à pêcher.
À notre tour, pour notre petit dix heures de pêche, M. Ryall avait permis une pêche pilote de vente la veille. Les Autochtones en ont toujours eu une au cours de la fin de semaine. Nous avions enfin pu obtenir une pêche le jeudi. La bande Musqueam a déclaré qu'elle allait pêcher avant nous et n'allait pas nous permettre de pêcher après.
Voilà une autre décision de M. Ryall qui met en danger le gagne-pain des pêcheurs de la zone E. Il nous a fait le coup tant de fois.
J'ai demandé à parler à son supérieur. Il m'a dit son nom: il appartient à la garde côtière et non au MPO. La responsable précédente avait travaillé aux traités autochtones.
Une voix: Est-ce que c'était M. Ryall?
M. Ken Connolly: Non. M. Ryall est un biologiste spécialisé dans le saumon au sein du MPO. Son supérieur immédiat actuel, celui qui est responsable s'appelle Pablo Sobrino. Il appartient à la garde côtière. La personne juste en dessous de lui, celle avec qui je traite pour le fleuve Fraser, s'est occupée des traités autochtones. C'est la première année qu'elle est impliquée dans l'industrie de la pêche.
Une voix: Est-il possible qu'une personne de la garde côtière soit le supérieur immédiat d'un agent des pêches?
M. Ken Connolly: Oui.
Une voix: Je veux m'assurer que je comprends la chaîne de commandement.
M. Ken Connolly: Le supérieur de Pablo Sobrino s'appelle Bert Ionson.
Une voix: [Note de la rédaction: Inaudible]
M. Ken Connolly: Non.
Une voix: Vraiment?
M. Ken Connolly: Il s'est occupé des pêches autochtones sur le fleuve Fraser au cours des sept dernières années. Maintenant, il est leur supérieur. Il est responsable de gérer la côte Sud. Il provient de la direction des pêches autochtones. Nous voyons où cette gestion nous mène: dans la mauvaise direction.
Ainsi, la gestion de la rivière Skeena est en place depuis sept à dix ans. Les responsables engagent quelques personnes, les forment afin qu'ils s'habituent aux cycles de remontée, etc. Puis, ils s'incrustent. Nous avons vu passer quatre gestionnaires des pêches pour le fleuve Fraser au cours des cinq dernières années. Ils viennent de la garde côtière et se sont occupés des traités autochtones. La personne avant celle-là s'était impliquée dans la pêche sportive.
Comme je vous l'ai dit, M. Ryall m'a expliqué qu'il avait eu des problèmes avec le budget depuis 1995. Il dit qu'il doit traiter avec les personnes responsables du budget parce qu'il n'y a pas assez de fonds. C'est ce qu'il m'a donné comme excuse.
Le vice-président (M. John Cummins): D'accord.
Voulez-vous ajouter un commentaire, madame Tremblay? Allez-y.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Après avoir écouté cela toute la journée, je pense que j'ai une solution: il faudrait que la Colombie-Britannique se sépare.
Le vice-président (M. John Cummins): Mme Tremblay croit que cette solution est à envisager. Après avoir entendu tous ces témoignages, elle suggère que nous concluions.
Des voix: Bravo!
Le vice-président (M. John Cummins): Un des participants, Bob McKamey, ne s'est pas présenté, mais il m'a envoyé une lettre que je suis supposé lire. Voici son opinion sur le sujet:
-
Vous êtes probablement engourdis de faits, de questions et d'idées
sur la manière de résoudre la crise de la pêche commerciale en
Colombie-Britannique. Vous allez retourner à Ottawa afin de décider
quels sont les faits et quelle est la rhétorique. J'ai peur que
dans votre tentative de «mettre les choses au clair», vous oubliiez
de réfléchir au problème fondamental de la question: qui devrait
participer à la pêche commerciale? La constitution n'établit aucune
discrimination contre quiconque en ce qui a trait à la pêche
commerciale.
-
J'ai le sentiment que vous ne vous êtes pas arrêtés pour réaliser
que votre gouvernement a introduit la politique la plus ouvertement
raciste au Canada depuis les 50 dernières années. Le concept du
projet pilote de vente de la SPA n'est pas moins raciste que si
vous déclariez qu'à partir de demain, les noirs n'auront plus le
droit de travailler au service postal ou que les Asiatiques
n'auront plus le droit de conduire des taxis. Vous pouvez enjoliver
la politique et la faire passer pour autre chose. Cependant, aucune
quantité de miel ne peut changer le fait qu'on vous oblige à
participer à un processus qui n'a plus lieu d'être, depuis la
décision de Rosa Lee Parks qui s'est levée, en déclarant: «Je ne
m'assiérai plus à l'arrière de l'autobus».
-
La plupart d'entre vous sont probablement entrés dans l'arène
politique en sachant où vous arrêter, en discernant le point où
vous ne pouviez plus appuyer la politique du parti. Vous savez
qu'avant d'être un politicien, vous êtes une personne avec des
principes. Sachant cela, vous n'avez sûrement jamais cru que vous
seriez appelée à vous regarder dans le miroir et à décider si vous
êtes vraiment un individu qui a des principes et voué à promouvoir
tout ce qui fait la grandeur de notre pays.
-
Et bien, c'est maintenant le temps de fêter! Vous devez décider si
vous appuyez un racisme ouvert et dirigé vers un groupe précis. Ne
choisissez pas la solution de facilité, comme certains l'ont fait
avant vous, en disant: «Je sais que j'ai tort, mais si je ne le
fais pas, quelqu'un d'autre le fera». Ne jetez pas cette lettre,
parce que vous êtes troublés par ce que vous découvrez devant le
miroir.
-
Vous êtes peut-être en mesure de rationaliser le racisme, lorsqu'il
ne touche que quelques familles loin du haut lieu du pouvoir. Il
est possible que vous trouviez que le racisme parrainé par le
gouvernement est admissible, lorsqu'il peut être utilisé pour
éviter un conflit avec les bandes autochtones. Peut-être que vous
pouvez être le complice du racisme lorsque le contraire pourrait
avoir des conséquences sur votre carrière politique et votre
revenu. Vous avez peut-être la force d'être témoin des abus subis
par les familles qui habitent au Canada depuis des générations. Si
vous le pouvez, alors je suis désolé pour vous et le peuple que
vous représentez. Je me demande avec inquiétude ce à quoi notre
pays va ressembler lorsque des gens comme vous auront fini de
«gouverner».
-
On me rappelle sans arrêt à quel point je suis chanceux de vivre au
Canada, le meilleur pays au monde. Notre capacité de créer un pays
fort et uni en dépit de notre patrimoine diversifié est le résultat
de la lutte pour la protection d'un ensemble de principes
fondamentaux sur la façon dont nous traitons nos concitoyens. Ça
paraît bien à la télévision, mais je doute que ce soit un problème
facile à résoudre lorsque vous devez apposer votre nom au bas de la
feuille. Je vous souhaite bonne chance.
Monsieur Wappel.
M. Tom Wappel: J'essaie de comprendre. En quelle année est-ce que la SPA a-t-elle été créée?
Une voix: 1992.
M. Tom Wappel: C'était donc durant le gouvernement du ministre Crosbie et d'un gouvernement conservateur. Je mentionne ceci parce que j'entends constamment des «votre gouvernement» ceci, «votre gouvernement» cela et «lorsque vous aurez fini de gouverner». Il me semble que ce programme couvre plusieurs gouvernements. Ces idées sont présentées par l'administration, vendues au ministre du jour et elles finissent par se concrétiser. Je voulais simplement savoir exactement ce qu'il en est.
Pourrais-je vous demander pourquoi vous êtes au bas de la hiérarchie de la pêche? Vous mentionniez tous les gens qui attrapent du poisson avant vous. Pourquoi?
M. Ken Connolly: C'est que nous sommes les derniers, et après nous il y a la conservation...
M. Tom Wappel: Mais pourquoi? Comment est-ce que l'ordre hiérarchique est-il déterminé?
M. Ken Connolly: Le poisson doit passer soit par le détroit Johnstone, soit par l'intérieur de l'île de Vancouver ou la côte ouest de l'Île de Vancouver. Les groupes habitant dans ces régions attrapent ces poissons à l'aide de bateaux à lignes traînantes. Je crois qu'il y a 2 groupes distincts de bateaux à lignes traînantes. Il y a aussi le groupe de bateaux senneurs, un groupe de bateaux à filets maillants de la zone D et un groupe de bateaux à lignes traînantes du golfe. Puis, les Américains viennent également pêcher et c'est ce à quoi s'occupe la Commission du saumon du Pacifique. Certaines personnes s'inquiètent du fait que les Américains ont le droit d'attraper de 18 p. 100 à 20 p. 100 du total des prises de remontée, ce qui vient en aide à leur pêche autochtone et à leur pêche commerciale régulière, ce comment ils les nomment. Puis, la SPA intervient. La pêche à des fins de subsistance et rituelles doit être accomplie et c'est toujours la pêche qui vient en premier. Enfin, c'est le tour de la pêche sportive, et petit dernier, la zone E.
Si dans certains cas, les remontées sont basses, ce qui s'est produit une fois en août et nous avons dû arrêter pour des raisons de conservation jusqu'à ce que la taille de la remontée remonte à 6 millions. Traditionnellement, nous pêchions lorsque la remontée était à 3,5 millions et nous vivions très confortablement. Cependant, lorsqu'ils ont vu que la taille de la remontée avait descendu à 4 millions, ils se demandaient même s'ils devaient empêcher la pêche autochtone. Puis, M. Ryall a promis..., en gros, il a dit qu'il ne pouvait promettre ce qu'il ne pouvait garantir. Et bien, il a promis de livrer aux pêcheurs autochtones. Ce fut ses propos.
M. Tom Wappel: Parlons un peu de M. Ryall. Combien de temps a-t-il été au pouvoir?
M. Ken Connolly: Trop longtemps.
M. Tom Wappel: Pourriez-vous me donner une durée précise.
M. Ken Connolly: Je crois que ça fait cinq ou six ans.
M. Tom Wappel: Mais, il n'a pas toujours été le responsable du fleuve Fraser
M. Ken Connolly: Non, avant il était à l'île de Vancouver en tant que biologiste du MPO.
M. Tom Wappel: Vous avez dit qu'il y a eu quatre responsables des pêches sur le Fraser depuis les cinq dernières années.
M. Ken Connolly: Oui, mais il était leur supérieur. Il est le biologiste du fleuve Fraser.
M. Tom Wappel: Oh, il est le biologiste du fleuve Fraser et non le responsable.
M. Ken Connolly: Il est responsable parce qu'il est le biologiste du MPO qui gère les pêches. Wayne Saito est le biologiste de la Commission du saumon du Pacifique.
M. Tom Wappel: Mais, n'y a-t-il pas un bureaucrate au-dessus de lui? Je ne veux pas dire la garde côtière. Y a-t-il un scientifique qui dirige tout ça ou un fonctionnaire?
M. Ken Connolly: Il a le mandat de gérer la pêche. Il est responsable.
Puis, il y a la responsable du saumon de la zone E. Elle s'appelle Barb Mueller et elle s'occupait des traités autochtones. Elle est la toute dernière venue. Je dirai qu'elle est au poteau. Le parfait exemple concerne le saumon kéta: l'alcôve de Barb est ici et 2 alcôves plus loin se trouve celui de la responsable de la pêche au saumon kéta. Celle-ci gère la pêche expérimentale sur le fleuve Fraser. Barb doit lui envoyer des messages courriels. Elle ne peut pas aller la voir, parce que l'autre dame ne veut pas lui donner les numéros. C'est comme la Loi sur l'accès à l'information. Cependant ils essaient de travailler au sein de leur ministère. Le ministère ne laisse passer que des détails de nouvelles et c'est Barb qui doit nous annoncer les nouvelles en entier. Je lui ai parlé plusieurs fois et elle est très insatisfaite dans le système actuel. Tout le monde est supposé travailler ensemble dans ce bureau, mais une main ne sait pas ce que l'autre...
M. Tom Wappel: Vous avez aussi parlé d'un cas où les responsables étaient en vacances et personne ne pouvait prendre de décision. Est-ce que c'était cette année?
M. Ken Connolly: Oui.
M. Tom Wappel: Est-ce que c'était la première année où M. Ryall occupait le poste qui lui permettait de prendre seul ces décisions?
M. Ken Connolly: Non.
M. Tom Wappel: Ce à quoi je veux en venir, c'est qu'il a dû aller en vacances alors qu'il avait les mêmes responsabilités.
M. Ken Connolly: Oh, oui.
M. Tom Wappel: Alors, pourquoi est-ce que c'était seulement l'année dernière qu'une décision a dû être prise concernant la pêche alors qu'il était en vacances? N'y a-t-il pas de protocole établi pour les gens qui partent en vacances?
M. Ken Connolly: Non.
M. Tom Wappel: Nous lui poserons la question, mais...
M. Ken Connolly: Oui, il est parti en vacances au mauvais moment et il a consenti à ce que ça ne se reproduise plus l'année prochaine. Mais, il laisse un responsable, ce qui est angoissant, parce que...
M. Tom Wappel: «Nous ferions mieux la prochaine fois»—Je crois que nous avons déjà entendu la chanson.
Je vous remercie.
Le vice-président (M. John Cummins): Je vous remercie beaucoup, Ken. Nous vous sommes très reconnaissants de ce que vous ayez accepté à faire votre exposé.
Je crois que Mme Tremblay avait une petite question pour M. Haffenden.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Monsieur Haffenden, merci d'accepter de revenir à la table.
Vous avez parlé rapidement de la Gendarmerie royale plus tôt. Si on a bien traduit vos mots, vous avez dit que la Gendarmerie royale n'était pas fiable. Pouvez-vous me donner un peu plus d'information là-dessus, s'il vous plaît?
M. Mike Haffenden: Je vous dirai madame Tremblay que la GRC a fait preuve d'une grande ineptie lors de son enquête. À cause de cette manière de voir assez confuse de ce pays, cette façon de faire serait politiquement correcte. Nous engageons et formons des agents de la GRC qui sont petits de taille et formés à réagir de façon très agressive. C'est un mode que la GRC a adopté: les agents enquêtent mal et font des sottises, et en raison de leur taille—la GRC embauche immanquablement des femmes et des personnes de petite taille—on leur apprend à être très agressifs.
Cette formation est maintenant de rigueur pour les agents de police, qui en raison du climat racial..., en raison du climat politique, suivent la façon de faire de la GRC. Nous avons maintenant des agents de surveillance au sein du ministère des Pêches et des Océans de petite taille à qui on apprend à être agressifs. Je crois que ce n'est pas la bonne voie à suivre.
Le vice-président (M. John Cummins): D'accord. Je vous remercie beaucoup, Monsieur Haffenden.
Je voudrais vous parler rapidement des compétences de quelques-uns des principaux fonctionnaires ici, puisqu'il semble que soyez intéressés. En ce qui a trait à la dernière directrice générale ici, comme il a déjà été mentionné, son poste précédent consistait à offrir des drapeaux pour la fondation Héritage Canada. Le directeur général avant elle travaillait pour Agriculture Canada. Ainsi, il y a eu une série de dirigeants ineptes qui s'occupait de cette question.
L'autre point que je voudrais ajouter, lorsque M. Wick est parti—il a parlé du poisson qui avait été jeté à Lillooet—est que ce n'est pas un fait rare. On m'appelle constamment l'été, ainsi que M. Eidsvik, pour me mentionner des cas semblables. Si vous parlez à des agents des pêches à Chilliwack et Abbotsford, ils vous diront la même chose. Ils trouvent du poisson qui a été jeté dans des endroits cachés, à plusieurs reprises. J'ai enquêté sur cet incident et j'en ai été témoin. C'est choquant, mais ça arrive.
Je voudrais remercier le comité au nom des pêcheurs. Ce fut une longue journée pour vous: cinq heures et demie de vol et plus de six heures ici. Nous vous sommes reconnaissants de votre dévouement et de l'attention silencieuse que vous avez portée aux témoins. Je vous remercie donc, messieurs et mesdames du comité, au nom de tout le monde ici présent.
La séance est levée.