FOPO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FISHERIES AND OCEANS
COMITÉ PERMANENT DES PÊCHES ET DES OCÉANS
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 22 novembre 2001
Le président (M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.)): La séance est ouverte. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le comité se réunit pour examiner les services de communication et de trafic maritimes dans la région du Pacifique.
Nous avons aujourd'hui un programme plutôt chargé. Avant de donner la parole aux témoins, j'aimerais que l'on fasse un petit tour de table pour présenter les membres du comité.
J'aimerais commencer par remercier James Lunney d'avoir suggéré au comité qu'il reçoive des gens du contrôle de la circulation maritime à Ottawa et c'est là qu'on nous a saisis d'un certain nombre de sérieuses préoccupations quant à la situation ici. C'est pourquoi le comité a adopté une motion en vue de se déplacer le long de la côte Ouest pour entendre des témoignages au sujet de cette question. Pendant que nous sommes ici, nous profitons également de l'occasion pour nous renseigner au sujet d'autres questions, notamment la pêche du merlu.
Nous tenons donc à remercier James des efforts qu'il a déployés pour faire les arrangements pour nous ici et de son aide avec l'organisation des comparutions de témoins.
Cela étant dit, je m'appelle Wayne Easter. Je suis président du Comité permanent des pêches et des océans et député libéral représentant la circonscription de Malpeque, à l'Île-du-Prince-Édouard.
À la fin, je céderai la présidence de cette séance à James.
John Cummins.
M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne): Je m'appelle John Cummins, je suis le député de la circonscription de Delta—South Richmond, et je suis vice-président du comité.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ): Suzanne Tremblay, députée bloquiste de Rimouski-Neigette-et-la Mitis, dans la province de Québec.
[Traduction]
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC/RD): Loyola Hearn, St. John's-Ouest, Terre-Neuve.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Peter Stoffer, député de Nouvelle-Écosse, anciennement Britanno-Colombien. Heureux de revenir ici.
M. Rodger Cuzner (Bras d'Or—Cape Breton, Lib.): Rodger Cuzner, député libéral de Bras d'Or, Cape Breton.
M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.): Tom Wappel, député libéral de Scarborough-Sud-Ouest, une banlieue de Toronto.
M. Georges Farrah (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, Lib.): Georges Farrah de Gaspé—Îles-de-la-Madeleine, dans l'est du Québec.
M. Alan Nixon (attaché de recherche du comité): Je m'appelle Alan Nixon et je suis l'attaché de recherche du Comité permanent des pêches et des océans.
Le président suppléant (M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, Alliance canadienne)): Je m'appelle James Lunney et je suis le député de Nanaimo—Alberni. Je suis heureux d'accueillir ici mes collègues du Comité des pêches.
Nous avons déjà entendu de nombreux témoignages au sujet de la première question, soit les Services de communication et de trafic maritimes, et à Ottawa et dans le cadre de nos visites du centre régional à Vancouver et du centre des SCTM à Victoria. Nous étions à Seattle hier et je dois vous dire que nous y avons beaucoup entendu parler en bien du centre ici.
Nous sommes prêts à entendre les témoins convoqués pour aujourd'hui. Je pense que nous allons commencer par Julius.
M. Julius Smolders (surveillant de veille, Services de communication et de trafic maritimes): Monsieur le président, mesdames et messieurs, j'aimerais tout d'abord vous souhaiter la bienvenue ici à Ucluelet et vous remercier de l'occasion qui nous est ici donnée de comparaître devant vous.
Le président: Recevez-vous l'interprétation?
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: J'ai été très tolérante depuis le début du voyage. J'ai accepté qu'on dépose toutes sortes de documents qui étaient juste en anglais. Cela ne me dérangeait pas, mais quand cela vient de la Garde côtière, je ne le prends pas. Je demande que tous ces documents-là soient ramassés.
[Traduction]
Le président: Vous dites que les documents n'existent qu'en anglais?
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: J'ai été très tolérante depuis le début, monsieur le président. Je savais que la plupart des gens d'ici n'avaient pas accès facilement à la traduction, mais la Garde côtière du Canada, qui est un organisme gouvernemental, n'avait aucune raison de ne pas nous préparer ses documents dans les deux langues. On savait depuis longtemps que le comité venait ici, depuis assez longtemps pour avoir le temps de faire traduire les documents. Je demande donc que tous ces documents soient ramassés.
Le président: Oui, Suzanne. Ils pourront faire leurs exposés oralement, s'ils le veulent, et nous nous occuperons de faire traduire les documents pour ensuite les faire parvenir aux membres du comité.
Je comprends votre préoccupation. La Garde côtière est une organisation du gouvernement fédéral et sa politique devrait être de respecter la Loi sur les langues officielles. Le document n'est pas traduit, et nous porterons cela à l'attention de différentes personnes, mais je pense que nous pourrions entendre l'exposé oral et recevoir les mémoires plus tard.
Merci.
Larry.
M. Larry Pokeda (agent responsable, Services de communication et de trafic maritimes): Au nom de la Garde côtière, nous nous excusons de ne pas avoir fait traduire les documents. Nous étions un petit peu bousculés et terminions juste le travail de rédaction. Nous en avons discuté. Nous avions prévu faire traduire les documents, mais le temps nous a tout simplement manqué. Toutes nos excuses.
Le président: Merci, Larry.
Julius.
M. Julius Smolders: Monsieur le président, mesdames et messieurs, ladies and gentlemen, bienvenue et welcome.
J'aimerais brièvement profiter de l'occasion pour vous remercier d'être venus ici pour entendre nos préoccupations. Je me présente: je m'appelle Julius Smolders et je suis surveillant de veille au centre des SCTM de Tofino, ici à Ucluelet. Je suis par ailleurs surveillant de veille actif, ce qui veut dire que je participe au roulement pour les différents postes ici, comme tout le monde et, en tant que tel, je suis agent des SCTM. Je suis également l'agent de formation du centre.
Au début des années 90, le gouvernement fédéral, soucieux de contenir le déficit, a pris diverses mesures en vue de réduire ses dépenses et les niveaux de dotation d'ensemble au sein de la fonction publique fédérale. En conséquence directe de ces mesures, les services du trafic maritime et la radio de la Garde côtière ont fusionné pour devenir ce que l'on appelle aujourd'hui les SCTM.
Près de la moitié des cadres moyens et supérieurs et entre un quart et un tiers du personnel opérationnel ont ou pris leur retraite ou accepté une prime de départ dans le cadre des programmes d'encouragement à la retraite anticipée et d'encouragement au départ anticipé. Notre station a, à elle seule, perdu neuf employés opérationnels sur un total de 22. En conséquence, au niveau des opérations, les SCTM souffrent d'une pénurie chronique de personnel et de contraintes budgétaires non réalistes. Ces lacunes ont résulté en une réduction ou une suspension temporaire des services, comme cela a été documenté dans les Avis à la navigation canadiens.
Les programmes au sein des SCTM, par exemple formation, assurance de la qualité, normes et procédures, etc., souffrent tous de négligence. Le service se trouve dans l'impossibilité de nous offrir la formation dont nous avons besoin et nous sommes loin de respecter nos engagements internationaux.
Le nombre de cadres moyens et supérieurs aux SCTM continue de reculer. Nombre des gestionnaires qui sont restés suite à la fusion ont, depuis, pris leur retraite ou choisi de terminer leur carrière ailleurs. J'ai la très nette impression que leur décision de quitter les SCTM est largement attribuable aux pressions continues résultant de contraintes financières non réalistes; aux frustrations causées par leur incapacité de gérer efficacement les différents programmes des SCTM dans de telles conditions; et au stress et au mécontentement constant à l'égard de la direction générale des SCTM et de la Garde côtière au cours des dernières années.
À l'heure actuelle, le siège régional des SCTM à Vancouver se résume à trois personnes et le siège des SCTM à Ottawa ne réunit lui aussi que trois ou peut-être quatre personnes. Les quelques rares gestionnaires qui sont demeurés en place sont accablés par la multitude des tâches qu'ils doivent tenter d'effectuer dans l'espoir de maintenir en vie divers programmes et engagements des SCTM, tout en s'efforçant de veiller à la prestation ininterrompue de services au niveau opérationnel.
Selon un récent rapport du Vérificateur général, 70 p. 100 des gestionnaires de la fonction publique et près de la moitié des fonctionnaires seront admissibles à la retraite sans pénalité à compter de l'an 2008, c'est-à-dire d'ici seulement sept ans. Aux seuls SCTM, nous allons perdre cinq personnes à la retraite d'ici à cinq ans, commençant par M. Godfrey à la fin de ce mois-ci, et nous perdrons encore quatre personnes avant l'an 2010. Plus de la moitié de nos effectifs opérationnels seront partis, emportant avec eux leurs années de connaissances, d'expérience et d'expertise.
• 0830
Il faut environ un an et demi à deux ans pour embaucher de
nouvelles recrues, leur faire suivre le programme de formation ab
initio au Collège de la Garde côtière canadienne, et terminer leur
formation sur le tas au centre. Si nous entreprenions dès
aujourd'hui de remplacer M. Godfrey, nous ne pourrions pas espérer
avoir un officier des SCTM qualifié et certifié avant
l'automne 2003, et même là, il faudrait que cette personne
réussisse l'examen final.
Toute notre équipe de gestion au bureau régional des SCTM sera admissible à la retraite au cours des six prochaines années, et 100 p. 100 de nos techniciens prendront leur retraite d'ici à l'an 2010. Nous allons très bientôt perdre des membres du fait de la retraite et de l'attrition à un rythme de beaucoup supérieur à celui auquel nous pourrons les remplacer et, encore une fois, ces personnes emportent avec elles de nombreuses années d'expérience, de connaissances et d'expertise.
L'actuel système de dotation des centres SCTM au Canada s'appuie sur une formule de 5,5 personnes par poste. Pour Tofino, cela veut dire 17 personnes pour trois postes. Nous avons clairement montré au cours des dernières années qu'une telle formule de dotation ne répond pas à nos besoins.
Plusieurs pays d'Europe, notamment la Hollande, la Belgique et l'Allemagne, utilisent une formule de sept personnes ou plus par poste pour doter leurs centres STM. Si nous voulons assurer nos besoins et obligations, et à l'interne avec les SCTM, et à l'échelle nationale, conformément aux recommandations et normes internationales, alors le Canada doit lui aussi adopter cette norme européenne de niveau de dotation pour les SCTM.
En adoptant cette norme, les SCTM pourront assurer la pleine dotation des postes opérationnels et une prestation de services ininterrompue. Cela permettrait par ailleurs aux employés actuels de suivre les programmes de recyclage et de requalification selon une formule de roulement. Cela permettrait l'amélioration des qualifications existantes et la formation de cheminement de carrière. Cela permettrait également aux superviseurs de veille d'exécuter dans les temps et de façon professionnelle les tâches précises qui leur reviennent. Enfin, cela nous aiderait à respecter nos obligations internationales envers l'OMI et l'AISM.
Sous l'égide de l'OMI, soit l'Organisation maritime internationale, avec sa résolution A.857(20), et conformément à la recommandation V-103 de l'AISM, l'Association internationale de signalisation maritime, des normes en matière de formation et d'accréditation de personnel de STM ont été établies. Les normes englobent des lignes directrices quant à la formation et à l'accréditation d'opérateurs de STM, de superviseurs de STM, d'instructeurs en milieu de travail, de programmes de rappel et de requalification ou de revérification. Il s'agit là de la norme que nous devrons respecter voire même dépasser dans le cadre de nos efforts de formation. C'est là le repère par rapport auquel nous devrons mesurer notre performance. Or, nous ne l'atteignons pas.
Même la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique établit que les personnes promues à un poste de surveillance doivent recevoir une formation en matière de supervision dans les six mois suivants l'entrée en fonctions. Or, en dépit de demandes répétées de formation du genre, j'ai moi-même été surveillant de veille à Tofino pendant trois ans avant de recevoir enfin ma formation. Nous continuons encore aujourd'hui d'avoir des surveillants qui n'ont pas encore reçu cette formation. Nous continuons d'utiliser comme instructeurs en milieu de travail des personnes qui n'ont pas suivi les cours de base en la matière. Il n'y a presque pas eu de cours de perfectionnement ou de requalification au cours des dernières années et il n'y a pas du tout eu de formation d'avancement de carrière pour nous aider et nous préparer à assumer des rôles de cadres à l'avenir. En tant que chef de file en matière de services de communication et de trafic maritimes au Canada, nous méritons ce qu'il y a de mieux en matière de formation.
Le Collège de la Garde côtière canadienne à Sydney, en Nouvelle-Écosse, est en partie responsable de la formation des agents des SCTM ab initio, des cours de perfectionnement et de requalification pour le personnel existant, ainsi que de la formation et de l'accréditation des capitaines, officiers de pont et ingénieurs.
• 0835
Le Collège de la Garde côtière canadienne souffre, tout comme
les SCTM, des mêmes contraintes financières et compressions
d'effectifs et, avec la pénurie d'instructeurs qui en résulte, se
trouve dans l'impossibilité de répondre à la demande. À l'image des
SCTM et du collège, d'autres programmes maritimes souffrent,
notamment les opérations de la flotte, qui ont vécu des
compressions budgétaires. En tant qu'officier des SCTM, il est
extrêmement frustrant de ne pas disposer de ressources de garde
côtière suffisantes sous forme de navires de la Garde côtière ou
d'autres ressources de recherche et de sauvetage pour être en
mesure de réagir rapidement aux cas de détresse.
Notre personnel technique est la clé de notre prestation de services grâce à son travail d'entretien et de réparation de notre réseau hautement complexe et spécialisé de surveillance et de communication radar. Malheureusement, la section des services techniques a souffert des mêmes compressions budgétaires et compressions d'effectifs, et même de restrictions en matière d'achat de pièces de rechange, tout cela en dépit du fait qu'elle se voyait accablée sous des responsabilités et fonctions additionnelles.
Les techniciens n'assurent plus d'entretien préventif du matériel. Au lieu de cela, ils continuent de se démener pour apporter les réparations requises lorsque le matériel tombe en panne. Sans le plein soutien des services techniques pour l'entretien de ce matériel, nous sommes paralysés.
Un rapport réalisé en 1999 par le U.S. Secretary of Transportation et intitulé «An Assessment of the US Marine Transportation System» (évaluation du système de transport maritime américain), prédit que le trafic de navires commerciaux va doubler ou tripler au cours des 20 prochaines années. Compte parmi les recommandations contenues dans cette étude l'amélioration des services de gestion du trafic maritime en vue d'assurer la sécurité. Par ailleurs, depuis les événements du 11 septembre, nous avons constaté que le plus gros trou en ce qui concerne notre sécurité nationale ce sont nos ports et voies navigables.
En 1992, Vancouver a accueilli le Symposium mondial sur les services de trafic maritime. À l'époque, le Canada était un chef de file mondial en matière de STM et jouissait du respect et de l'admiration de la communauté maritime mondiale pour ses normes et procédures, ses programmes de formation et d'accréditation et sa prestation de services. En l'espace de moins de neuf ans, nous sommes passés de cette position de proéminence et de professionnalisme à un point où nous ne pouvons pas convenablement doter nos centres de SCTM et nos postes de cadres, ni fournir aux officiers des SCTM la formation requise, ni garantir la prestation ininterrompue des services.
Le ministre des Affaires étrangères du Canada, M. John Manley, a fait état de cela. Pour paraphraser ses propos, il a dit que nous tentions de nous faire entraîner dans le sillage d'une réputation que nous ne méritons plus. Au cours des dernières années, le personnel opérationnel a fait état de ses préoccupations aux officiers responsables et aux cadres moyens. Nos officiers responsables et cadres moyens en ont à leur tour saisi les cadres supérieurs, et je ne peux qu'espérer que ces derniers auront porté ces préoccupations au niveau exécutif. La réponse qu'on nous donne à répétition est que nous vivons des temps difficiles sur le plan financier et qu'il nous faut apprendre à faire plus avec moins. Partant, au cours des dernières années il y a eu une progression constante du recours à la gestion au coup par coup et aux solutions partielles.
Il est clair que cela ne fonctionne pas. Nous allons bientôt perdre le contrôle. Si nous ne prenons pas des mesures décisives et positives, nous n'aurons plus suffisamment de personnel opérationnel pour livrer, demain, les services et programmes des SCTM, et nous ne pourrons plus puiser nos leaders et gestionnaires de demain qui seront responsables d'assurer les programmes parmi les rangs de notre personnel qualifié et chevronné. Nous n'aurons plus le personnel technique qualifié nécessaire à la maintenance et à la réparation de notre matériel et nous n'aurons vraisemblablement plus les ingénieurs, officiers de pont et commandants pour nos navires.
• 0840
Comme le fait ressortir notre mémoire, les SCTM et la Garde
côtière sont en train de faiblir, et les quelques années à venir
seront critiques pour notre existence et notre stabilité à long
terme. Nous sommes le protecteur du public. Nous ne devons pas
baisser notre garde mais plutôt veiller à ce que nous soyons tout
à fait prêts à relever les défis et les menaces toujours croissants
qui se dressent devant nous.
Nous sommes responsables devant le peuple canadien et avons pour obligation envers la communauté maritime mondiale d'assurer la sauvegarde de la vie en mer et la protection de l'environnement et de nos fragiles écosystèmes, et, dans le cadre et l'exercice de nos fonctions, de veiller à la préservation de notre stabilité économique grâce au mouvement sûr et efficient du trafic maritime et à la sécurité de nos voies navigables.
Chaque jour, lorsque je me rends au travail, je pense à ces mots de notre hymne national: Protégera nos foyers et nos droits, protégera nos foyers et nos droits.
Thank you. Merci.
Le président suppléant (M. James Lunney): Merci, Julius.
Nous allons maintenant entendre M. Dave Godfrey.
M. Dave Godfrey (superviseur de veille, superviseur par intérim du Centre des opérations, Services de communication et de trafic maritimes): Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs.
Je m'appelle David Godfrey et je suis superviseur de veille au centre SCTM de Tofino. Je suis en poste ici à Ucluelet depuis mon entrée à la Garde côtière il y a plus de 24 ans. J'ai été l'un des premiers employés du centre à Amphitrite Point, et l'un des membres originaux représentant les services du contrôle de trafic de Tofino au sein du Comité des procédures des Services communs de trafic maritime, établi en 1980.
J'aimerais vous entretenir aujourd'hui de l'importance de l'accord international des Services communs de trafic maritime pour la région de Juan de Fuca. L'objet de cet accord international, signé en décembre 1979, est d'assurer un système commun de gestion du trafic maritime dans les eaux du détroit de Juan de Fuca et de ses approches. L'objet de cet accord unique est d'améliorer la sécurité et le mouvement des navires et de minimiser les risques de pollution de l'environnement marin dans les eaux canadiennes et américaines grâce à l'établissement et à l'harmonisation des normes et procédures.
Ces objectifs sont atteints grâce au maintien d'un système conjoint de gestion du trafic maritime; à la vérification, au moyen d'autorisations préalables et de contrôles subséquents, du respect par les navires des règles, procédures et pratiques en vigueur; et, en cas de non-observation des règles, à l'avertissement des autorités responsables.
En vertu de l'accord, on a créé un groupe de coordination mixte chargé de contrôler l'élaboration et l'adoption de règles, de pratiques et de procédures en matière de trafic de navires devant être utilisées dans le cadre du système commun de trafic maritime. Le conseil de gestion mixte régional se réunit tous les deux ans pour examiner les détails techniques et opérationnels de l'accord. Les procédures, matériel et règlements en vigueur dans chaque pays doivent dans toute la mesure du possible être compatibles.
Grâce à cet accord en matière de Services communs de trafic maritime, les SCTM de Tofino assurent un soutien en matière de sécurité maritime à Transports Canada, au marine safety office, Puget Sound, à Seattle, et à plusieurs autres organismes gouvernementaux, ce grâce au contrôle au large des côtes de navires en route pour des ports canadiens et américains via le détroit de Juan de Fuca. Les SCTM de Tofino sont responsables d'un vaste territoire qui s'étend à 50 milles nautiques au large de l'extrémité nord de l'île de Vancouver jusqu'à 48 degrés de latitude nord le long de la côte de Washington.
Bien que la sécurité ait toujours fait partie des services des SCTM, ce sont les événements du 11 septembre de cette année qui ont rehaussé la nécessité de faire preuve d'encore plus de vigilance le long de nos côtes et de l'entrée stratégique au détroit de Juan de Fuca. Les SCTM de Tofino sont les yeux et les oreilles de la communauté maritime internationale dans cette région. Nous sommes considérés par la Garde côtière américaine comme étant les gardiens de l'entrée au détroit de Juan de Fuca, qui est la voie d'accès aux principaux ports de la côte nord-ouest du Pacifique.
• 0845
Lors de récents incidents mettant en cause des navires
transportant des stupéfiants ou des migrants, les SCTM de Tofino
ont servi de liaison de renseignement essentielle pour le ministère
de la Défense nationale, les services de maintien de l'ordre et les
agences des douanes. Sans les services de surveillance et de
vérification assurés par les SCTM de Tofino, ces organismes
auraient été moins bien renseignés en temps réel des mouvements de
navires suspects le long de nos deux côtes.
En l'absence d'un financement suffisant pour couvrir le matériel moderne et le personnel formé dont ont besoin nos Services de communication et de trafic maritimes, ceux-ci auront peine à exécuter les exigences de l'accord en matière de services communs de trafic maritime et leurs obligations en matière de sécurité nationale et internationale.
Je tiens à remercier le comité de m'avoir accordé du temps pour l'entretenir de cet important aspect des responsabilités des SCTM de Tofino. Merci beaucoup.
Le président suppléant (M. James Lunney): Merci beaucoup, Dave.
Nous allons maintenant entendre Terry Wedmedyk. Allez-y, je vous prie.
M. Terry Wedmedyk (superviseur de veille, Services de communication et de trafic maritimes): Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs.
Je m'appelle Terry Wedmedyk. Je suis superviseur de veille aux SCTM de Tofino, et cela fait 22 ans que je travaille pour la Garde côtière canadienne.
Ce que vous avez entendu de la bouche de nos membres syndicaux le mois dernier à Ottawa et de celle de mes collègues ici aujourd'hui est la frustration que nous ressentons en tant qu'employés de ce service essentiel, nous qui sommes chargés de la lourde tâche de gérer ce service de façon efficiente. Nous sommes responsables du contrôle de tous les mouvements de navires, en utilisant radar, radio et autres outils pour veiller à la navigation et au passage des navires en toute sécurité dans les eaux canadiennes et américaines.
La porte d'entrée à tout le Nord-Ouest du Pacifique est située dans la zone des SCTM de Tofino. Nous ne pouvons tout simplement pas ignorer des renseignements importants parce que quelqu'un dit que la Garde côtière n'a pas pour mandat d'assurer la sécurité du pays. Voilà la question dont j'espère vous entretenir aujourd'hui.
Si nous en avons le temps, j'aimerais également tenter de tirer au clair certaines des déclarations faites à la réunion d'octobre à Ottawa et que j'ai lues, et jugées ou trompeuses ou carrément fausses. Si nous en avons le temps, j'aimerais bien que quelqu'un les tire au clair.
Le fait est que nous sommes très au courant de notre potentiel de collecte de renseignements importants qui pourraient bénéficier à d'autres organismes gouvernementaux. Les SCTM assurent ce service depuis de nombreuses années déjà. Étant donné la nature du travail que nous faisons et des renseignements recueillis, les SCTM se sont avérés être un puissant mécanisme de soutien à nos programmes de sécurité nationale. Les renseignements que nous recueillons ne sont pas cachés aux autres ministères. Cela ne nous servirait à rien. Nous ne sommes pas une agence de maintien de l'ordre primaire.
Les SCTM ont pour mandat d'assurer la surveillance et le respect des règles canadiennes et américaines en vigueur. Tous les renseignements recueillis sont communiqués au ministère de la Défense nationale, à la GRC, aux Douanes ou à la garde côtière des États-Unis et du Canada.
Nos renseignements nous viennent d'indicateurs, de systèmes de surveillance électronique, de reconnaissance aérienne, terrestre ou souterraine ainsi que d'autres organes gouvernementaux. Il importe cependant de souligner que certaines agences hésitent à l'occasion à partager leurs renseignements avec nous, ce qui pourrait poser problème.
Les SCTM de Tofino surveillent tous les mouvements de navires pénétrant en eau canadienne ou américaine dans le but de relever certaines choses, par exemple: non-dépôt préalable des rapports adéquats; navire revêtant un intérêt particulier pour d'autres organismes; changement de pavillon d'enregistrement ou de propriété; dernières escales; type de navire et nature du cargo à bord; refus de respecter les règles canadiennes ou américaines; nouveau navire dans la zone; changement de destination de dernière minute; mouvements inhabituels des navires sous surveillance radar.
• 0850
Ces renseignements sont alors distribués aux ministères
susmentionnés au moyen de réseaux radio-téléphoniques et de
transmission de données protégés et non protégés. Il est de plus en
plus difficile de transmettre des renseignements délicats
directement aux unités terrestres ou aériennes faute de systèmes
radio protégés, d'où la nécessité pour les SCTM de communications
radio FM et THF brouillées et la nécessité que soit augmenté le
nombre d'agences utilisant des circuits terrestres protégés.
L'île de Vancouver offre une plate-forme idéale pour les migrants illégaux ou personnes indésirables désireuses d'accéder aux régions plus peuplées de l'Ouest du Canada ou des États-Unis, où ils pourront plus facilement se fondre dans la population. L'île de Vancouver est voisine de ces zones et il y a un accès routier à partir de tous nos plus petits ports. L'île de Vancouver attire tout au long de l'année de nombreux visiteurs étrangers, et l'assimilation est donc de ce fait chose facile.
Il serait plus difficile de réaliser cela le long de la côte Nord, où les routes sont moins faciles d'accès et moins nombreuses. Par exemple, 200 migrants asiatiques debout au terminal du ferry des îles de la Reine-Charlotte ne passeraient pas inaperçus.
Cet état de choses vient augmenter la grande nécessité d'assurer une surveillance radar supplémentaire au large de la côte nord de l'île de Vancouver. À l'heure actuelle, il n'y a rien. Comme d'autres témoins vous l'ont déjà dit, dans le cas des navires transportant des migrants illégaux, la majorité d'entre eux arrivent juste à la limite de notre couverture radar.
En plus de fournir une garantie de sécurité accrue grâce à l'observation et à la surveillance plus rapide de contacts suspects, la sécurité maritime serait elle aussi améliorée au moyen d'une surveillance électronique continue à l'affût de situations maritimes potentiellement dangereuses. L'insuffisance du financement, les compressions d'effectifs et la recherche permanente de moyens de couper encore davantage les coûts ont affaibli notre capacité d'assurer efficacement ce service nécessaire. Les nombreuses compressions imposées au programme ont fait boule de neige et l'on en ressent aujourd'hui les conséquences dans de nombreux éléments de la communauté maritime, et au Canada et à l'étranger.
L'une des questions soulevées à l'occasion des réunions d'octobre a été l'utilisation de la technologie SIA. La technologie SIA en tant que remplacement du radar n'est pas viable du point de vue de la sécurité. Le principal problème du SIA est que le transpondeur peut tout simplement être coupé par le propriétaire du navire lorsque cela l'arrange, rendant son voyage indétectable. Le radar offre quant à lui une couverture continue, quelles que soient les intentions de l'exploitant du navire.
Il importe de souligner ici que les transpondeurs utilisés pour le contrôle de la circulation aérienne, comme ceux qui étaient à bord des appareils qui sont venus s'écraser contre le World Trade Center et le Pentagone, fonctionnent à la manière de la technologie SIA. Les terroristes les ont tout simplement coupés et les appareils n'ont ainsi plus pu être surveillés par le CCA lorsqu'il n'y avait pas de radar.
D'autres méthodes de surveillance de nos rives, comme par exemple les avions ou les navires de patrouille, ne constituent pas en soi des solutions de rechange pratiques. La zone de couverture est beaucoup plus petite dans le cas des navires, et le coût de patrouilles constantes est beaucoup trop élevé. Les navires sont trop lents et les avions sont trop rapides, quittant très vite une région pour pénétrer dans une autre. Les deux méthodes sont très exposées aux aléas climatiques, tandis que le radar assurerait un balayage continu, quelle que soit la météo, sur une zone élargie.
• 0855
Des trois systèmes, le radar est sans doute le moins coûteux
à entretenir. Les coûts du système ne doivent pas forcément être
assumés par un seul ministère. En effet, étant donné que d'autres
ministères bénéficient des renseignements obtenus, des arrangements
de partage des coûts d'achat, d'installation et d'entretien
pourraient peut-être être négociés.
Il me semble que Julius et Frank Dwyer ont également mentionné que nos engagements internationaux n'étaient pas respectés. Le Canada est signataire de la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer de l'Organisation maritime internationale. En vertu de cette convention, nous nous sommes engagés à fournir aux navigateurs pénétrant dans nos eaux à bord de navires étrangers ou canadiens un service de surveillance en cas de détresse. Pour livrer ce service de façon efficace, la communauté internationale a divisé les eaux de chaque pays en quatre zones maritimes devant être couvertes. Des quatre zones maritimes, la zone A2, qui s'étend d'une distance de 40 milles nautiques de la côte à environ 200 milles nautiques, n'est pas couverte.
Le navigateur qui arrive de l'étranger en suivant un couloir standard et qui pénètre dans la zone de trafic de Tofino en route pour San Francisco n'entre pas dans notre territoire proprement dit, mais il traverse nos eaux, et il a tous les droits de s'attendre à ce que s'il appuie sur son bouton d'alerte en cas d'urgence moyenne fréquence quelqu'un lui réponde, car nous avons adhéré à cette convention et nous sommes engagés à assurer ce service de surveillance en cas de détresse. Or, nous ne disposons pas du matériel requis alors, à mon avis, nous ne nous acquittons pas de cette obligation qui est la nôtre.
Je pourrais poursuivre encore, mais je pense que le temps dont nous disposons ici est limité et j'ai ce document que j'ai fourni à tout le monde. Il y a un certain nombre d'autres points qui me préoccupent et qui ont été mentionnés, et nous pourrons peut-être y revenir plus tard. Je ne sais pas trop où nous en sommes côté temps.
Le président suppléant (M. James Lunney): Merci, monsieur Wedmedyk. Certains des sujets que vous aimeriez soulever sortiront peut-être en réponse à des questions. Nous avons un certain horaire à respecter.
Nous allons maintenant entendre M. Larry Pokeda, l'officier responsable de notre base ici.
M. Larry Pokeda: Merci beaucoup.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, comme vous aurez pu le constater, les trois personnes qui viennent de vous faire des exposés possèdent beaucoup de compétences et d'expérience et apportent aussi beaucoup de compassion à leur travail. En ma qualité de gestionnaire de centre, j'aimerais vous exposer mes préoccupations et, ce faisant, je vais sans doute refléter ceux de mes collègues ou homologues travaillant dans d'autres centres.
J'ai fait le tour du système. J'ai travaillé au centre de trafic maritime à Vancouver-Nord en 1978 et 1979. J'ai été employé et contrôleur du STM, côté opérations, jusqu'à ce que j'assume mon poste d'officier responsable. J'ai donc près de 26 années d'expérience avec la Garde côtière. Je suis très attaché à la Garde côtière et je comprends l'orientation qu'elle a adoptée et tout le reste.
J'ai découpé ma présentation en quatre questions qui méritent selon moi qu'on s'y penche.
Premièrement, il y a le financement d'ensemble de la Garde côtière, qui a une incidence sur les SCTM ainsi que sur d'autres programmes et services. L'intégration du service du trafic maritime et de la radio de la Garde côtière sous les Services de communication et de trafic maritimes a donné lieu à une économie nationale de 209 équivalents employés à temps plein, de 10,6 milliards de dollars en salaires, de 2,9 millions de dollars en frais d'exploitation et de maintenance, pour des économies totales, à l'échelle du pays, de 13,6 millions de dollars.
• 0900
Le plan directeur 1995 pour l'intégration du service du trafic
maritime et de la radio de la Garde côtière faisait état d'une
période de mise en oeuvre de cinq ans. Par la suite, on nous a
demandé de réaliser cette intégration en l'espace de quatre ans.
L'intégration a été réalisée en partie en 1999.
L'on doit beaucoup aux employés de tous les centres pour leurs efforts et leur participation à la formation par rotation de postes. Le plan d'entreprise national des SCTM de 1989-1999 à 2000-2001 avait annoncé une période de stabilité pour donner à tous les employés la possibilité de s'habituer à leurs nouvelles fonctions au sein de l'organisation intégrée. Or, il semble que ce soit tout le contraire qui se passe. Des contraintes financières constantes sont exercées année après année, limitant notre capacité d'assurer la formation obligatoire, de moderniser notre matériel, d'embaucher de nouveaux employés et, ce qui est le plus important, d'exécuter notre mandat opérationnel.
Deuxièmement, en ce qui concerne les niveaux de dotation et de recrutement des SCTM dans toute la région du Pacifique avant, pendant et après l'intégration, il n'y a eu aucune étude d'évaluation de la charge de travail dans un quelconque centre SCTM de la région du Pacifique. Il n'y a jamais eu de détermination précise du seuil de dotation requis pour assurer collectivement l'exécution des fonctions des deux disciplines fusionnées. La formule de dotation qui a été utilisée dans le plan directeur en vue de l'intégration doit être revue. Le personnel opérationnel, y compris plusieurs membres du personnel cadre, sont d'avis que les centres sont présentement en situation de sous-effectif et qu'il est urgent de mener une étude pour déterminer la validité de ce constat.
Troisièmement, des études et des mesures de restrictions permanentes augmentent le stress et l'incertitude en milieu de travail partout dans la région du Pacifique. À une époque au cours de laquelle il est essentiel que nos employés se concentrent sur leurs responsabilités, surtout en cette ère de sécurité accrue, il y a en cours un certain nombre d'études et il y a en place un certain nombre de mesures de restrictions qui pourraient avoir une incidence sur la façon dont les SCTM exécutent et exécuteront leur mandat dans les années à venir. Bien que la réalisation d'études et d'examens soit le processus habituellement suivi, il y a lieu de s'interroger sur le moment choisi pour les entreprendre étant donné le dilemme financier devant lequel nous nous trouvons.
Quatrièmement, un matériel vieillissant, des fonds insuffisants et une pénurie de personnel technique viennent aggraver encore notre incapacité de réparer, d'améliorer et de moderniser notre infrastructure au rythme des besoins. Pour ce qui est de notre centre, il lui faut moderniser son matériel opérationnel. Une demande de subvention d'immobilisations pour une étude d'ingénierie a été faite. Les SCTM de Tofino ont le seul service de veille 24 heures par jour sept jours par semaine au pays. Étant donné la nature stratégique de ce centre et son importance pour les intérêts canado-américains ainsi que les exigences en matière de santé et de sécurité des employés, il serait extrêmement avantageux de veiller à ce que l'amélioration et la modernisation immédiates du matériel opérationnel soit une priorité.
Le personnel technique partout dans la région s'efforce de faire face au nombre énorme de projets techniques et de priorités qui leur sont imposés par notre programme opérationnel et par d'autres ministères. Une insuffisance de fonds ajoutée à un manque de personnel technique empêchent de mener ce genre d'activités en temps opportun.
En conclusion, notre programme des SCTM et la Garde côtière en général ont besoin des avoirs physiques et des ressources humaines et financières nécessaires, ainsi que d'une certaine période de stabilité—ce qui est très important—pour assurer au ministère des Pêches et des Océans une main-d'oeuvre et un milieu de travail efficients, productifs et durables.
J'arrête là ma présentation. Merci.
Le président suppléant (M. James Lunney): Merci beaucoup, Larry.
Nous avons encore un témoin ici: il s'agit d'Andy Nelson, qui comparaît au nom du ministère.
Andy, d'après ce que nous avons compris, vous êtes surtout ici pour répondre à nos questions pour le compte du ministère. Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez dire tout de suite?
M. Andy Nelson (surintendant par intérim, Services de communication et de trafic maritimes): Non, c'est bien cela. Au départ, on m'avait demandé de parcourir cette présentation produite à Vancouver, mais vu l'heure et tout le reste—et vous avez déjà entendu cela répété maintes et maintes de fois—je ne pense pas qu'il y ait lieu de revoir tout cela.
Il y a cependant un certain nombre de choses que j'aimerais mentionner. La quasi-totalité de ce que vous avez entendu jusqu'ici a été repris dans tous les centres que nous avons visités, alors il s'agit manifestement d'un problème à l'échelle de l'organisation. Les compressions sont passées d'un niveau à l'autre à travers le MPO. Nous obtenons nos crédits, et c'est toujours entre 750 000 $ et un million de dollars de moins que ce que nous demandons. C'est le cas depuis quatre ans. C'est très difficile pour nous de maintenir nos services, comme vous l'ont expliqué les employés que vous avez entendus.
• 0905
Nos principaux mandats—en l'occurrence, détresse, urgence,
sécurité et services de trafic maritime—ont tous, que je sache,
été assurés. Nous avons eu des réductions pour certains quarts de
travail faute de personnel, mais les principales tâches ont été
maintenues.
J'aimerais tirer une chose au clair relativement à nos engagements internationaux dans le cadre du SMDSM. Un ou deux témoins ont mentionné que nous ne respectons pas nos engagements. Le document distribué hier par le syndicat comportait un certain nombre d'erreurs. Le SMDSM est un système mondial de détresse et de sécurité et les membres signataires de l'OMI... c'est à chaque pays qu'il revient de déclarer les eaux l'entourant. Au Canada, nous avons opté pour A1, soit le système d'alerte par appel sélectif numérique THF, et cela est en train d'être mis en oeuvre alors même que nous parlons. Nous prévoyons que le système sera en place le long des deux côtes d'ici février 2003. C'est ce qui est annoncé depuis quatre ans, et nous sommes plus ou moins dans les temps.
La couverture THF au Canada s'étend jusqu'à environ 40 milles nautiques, tandis qu'à l'échelle internationale, la limite est de 20 milles. Nous l'avons prolongée à cause de nos régions montagneuses le long des côtes Est et Ouest.
Tous les navires commerciaux devront être équipés en conséquence. Au Canada, quelque 17 000 navires devront apporter des améliorations à leur matériel afin d'être conformes à la nouvelle norme, et ce, encore une fois, pour l'an 2003.
Quant à la couverture A2 DMS qui a été mentionnée tout à l'heure, le Canada allait au départ prendre le matériel A2, mais le coût pour chaque navigateur se serait dans cas élevé à entre 30 000 $ et 50 000 $. Nous appuyant sur les réactions constatées chez les usagers, lors de nos réunions PACMAR et de nos réunions du CCMC, ainsi qu'au siège social, il a été décidé de ne pas imposer ce coût supplémentaire aux navigateurs et de tout simplement aller de l'avant avec la technologie THF, qui est moins chère. Le gros de notre côte Est couvert par le THF, et c'est ce vers quoi nous avons penché.
Les navires sillonnant la mer en dehors de la portée du THF au Canada doivent être munis de matériel A3. Il s'agit là du matériel satellite—INMARSAT C, A ou B. Au Canada, cela ne concerne que 300 navires environ qui sont à l'extérieur des eaux internationales. La plupart des pays du monde ont une couverture A3, et il y en a qui sont à l'heure actuelle en train d'établir une couverture A1. Quelques pays ont une couverture A2, et dans les documents, il y est question des pays du tiers monde. Je ne sais plus lequel des pays du tiers monde dispose à l'heure actuelle de matériel SMDSM, mais nous exécutons à cet égard nos mandats internationaux.
Il y a beaucoup de choses dans tout cela. Certains des documents sont exacts, mais certaines des déclarations voulant que nous ne rencontrions pas nos engagements internationaux sont tout à fait fausses.
En ce qui concerne la formation, nous accusons un grand retard aux centres, comme cela vous a été expliqué. Comme je l'ai déjà mentionné, près du tiers du personnel des SCTM au Canada se trouve dans cette région-ci. Nous avons 118 postes et il y en a tout juste un peu plus de 300 dans tout le Canada. Le Collège de la Garde côtière canadienne ne suffit pas à la tâche. Nous n'avons pas les moyens financiers nécessaires pour envoyer un si grand nombre de personnes suivre des cours de recyclage ou de formation polyvalente. Notre engagement à l'égard de l'AISM veut que le personnel soit réaccrédité tous les cinq ans.
Pour votre gouverne, tout membre du personnel qui suit un cours de formation doit être remplacé par quelqu'un d'autre, ce qui signifie heures supplémentaires, en l'occurrence 500 $ par quart, et ces chiffres ne cessent d'augmenter. Lorsque vous avez 118 personnes qui doivent toutes suivre des cours en salle de classe ou améliorer leurs compétences, le coût est parfaitement astronomique.
Les niveaux de dotation établis sont les niveaux de dotation nationaux, et je veux parler ici du 5,5 qui vous a été rapporté. En fait, il ne faut que 4,4 pour doter un poste, mais tout ce qu'il y a côté formation, congés de maladie, congés annuels et autres vient s'ajouter à cela. Nous avons constaté que la formule du 5,5 ne satisfait pas nos besoins le long de la côte Ouest et les pénuries de personnel sont monnaie courante pour nous. Parmi les 118 postes que nous avons, seuls 108 sont en ce moment comblés. Il nous manque donc dix personnes, et le cours suivant ne sera pas offert avant septembre prochain, comme je l'ai dit, et il faudra attendre deux ans avant qu'il en sorte du personnel qualifié pour combler ces postes.
• 0910
En ce qui concerne les améliorations de matériel pour le
centre de Tofino, une demande d'amélioration du radar a été déposée
pour 2003-2004. Les consoles, les interrupteurs, les boutons et le
reste sur les consoles, ressembleront à ce que vous avez vu à
Victoria. Ce sera un système d'écran tactile, et cela s'inscrit
dans un projet national. Le travail d'amélioration dans notre
région s'échelonnera sur une période de deux ans, soit 2003-2004 et
2004-2005, et tous nos centres seront munis des nouveaux systèmes
de contrôle des communications. Avec ces systèmes, nous allons
également avoir des consoles. Ce que vous avez vu à Victoria est
semblable à ce dont seront équipés tous nos centres d'ici trois à
quatre ans.
Il a été fait mention d'analyses de moindre coût, de meilleures pratiques et d'initiatives de changement. Tous ces programmes ont été lancés compte tenu de nos compressions budgétaires. Ce sont des choses auxquelles nous avons songé dans le but de réduire nos coûts de façon à respecter les exigences du MPO et les compressions budgétaires. Malheureusement, l'argent n'est pas disponible à l'heure actuelle. Nous nous efforçons toujours de nous débrouiller avec moins. Il n'y a absolument aucun doute que cela aura une incidence sur les services si rien ne change.
Je vais m'arrêter là pour les questions, car je sais que l'heure tourne.
Le président suppléant (M. James Lunney): Merci.
La parole sera tout d'abord à M. Cummins.
M. John Cummins: Merci, monsieur le président.
J'aimerais vous remercier, messieurs, de vos exposés de ce matin. Les preuves que vous nous avez exposées sont très convaincantes. Dans ses remarques, M. Wedmedyk a dit que ce que nous entendons est le résultat de la frustration d'employés chargés d'une responsabilité énorme mais ne disposant pas du matériel nécessaire pour faire le travail.
Monsieur Nelson, dans les remarques que vous venez de faire, vous avez dit qu'une demande a été faite en vue de remplacer du matériel d'ici 2003 à 2005, si j'ai bien compris. Vous avez enchaîné en disant que pour certaines choses il y avait des compressions budgétaires et que l'argent n'était pas disponible.
M. Andy Nelson: Il y a ici deux questions distinctes. Les coûts d'immobilisation sortent d'un pot d'argent différent; cet argent va de l'administration centrale directement à la région. Ce n'est pas le cas des opérations et de la maintenance habituelles. Environ 80 p. 100 de nos dépenses au titre de O et M sont absorbées par les salaires et les heures supplémentaires. Les 20 p. 100 restants servent à l'entretien des immeubles, etc. Les coûts d'immobilisation, les remplacements de radios, de goniomètres, de radars, etc., font tous l'objet de subventions d'immobilisations. Cela dépasse le million de dollars et est donc envoyé à l'administration centrale.
Au niveau des SCTM et de l'administration centrale, environ 8 millions de dollars par an sont alloués aux améliorations d'infrastructure à l'échelle du pays. Nous sommes également en concurrence pour cela avec d'autres régions. Vous faites votre demande et parfois l'argent n'est pas disponible et la demande est reportée jusqu'à l'année suivante.
M. John Cummins: Mais là n'est-il pas en vérité le problème? Quelqu'un en haut vous a dit que le matériel va être remplacé, mais tant que vous ne le voyez pas, il n'est pas là, n'est-ce pas?
M. Andy Nelson: C'est exact.
M. John Cummins: Je suis certain que des promesses du genre vous ont été faites par le passé dans différents domaines dont vous avez une expérience directe.
M. Andy Nelson: Avec le problème de rouille que nous avons le long de la côte Ouest... ces jours-ci, ces problèmes-là vont revenir à l'avant-plan. Nous n'avons pas eu de gros problème en ce qui concerne les projets d'envergure. Il faut parfois deux, trois ou quatre ans avant que les fonds ne nous parviennent, mais cela finit toujours par venir. Malheureusement, pendant cette période de temps, il faut recourir à des solutions ponctuelles. Nous avons eu beaucoup de pannes. Cela est très frustrant pour les techniciens car certains éléments de leur matériel ont 25 ou 30 ans. Cela ne se fabrique plus, ce qui rend les choses très difficiles.
M. John Cummins: Julius, vous avez laissé entendre que le trafic commercial allait au cours des 20 prochaines années être multiplié par deux ou par trois. Par ailleurs, Terry a dit qu'il arrive qu'un navire n'ait pas pour destination un port canadien ou américain dans le nord-ouest, mais qu'il traverse tout simplement votre secteur. Ma question en un sens est donc double.
• 0915
Avec ce trafic accru viendra, bien sûr, une responsabilité
accrue, mais lorsque vous discutez des nombres de navires avec
lesquels vous devez voir des interactions, tenez-vous compte de ces
navires qui ont quitté l'Asie en direction de l'Amérique du Nord et
qui passent par votre secteur en longeant la côte Ouest?
M. Julius Smolders: Votre question porte sur la multiplication par deux ou par trois du trafic?
M. John Cummins: Eh bien, j'imagine, comme vous l'avez dit, que si le trafic vient à doubler ou à tripler, cela va bien évidemment augmenter votre charge de travail. Cela est évident. La question est de savoir, lorsque vous parlez de ces chiffres et lorsque nous voyons ces chiffres de trafic... Hier , à Seattle, on nous a dit que le mouvement de trafic était le mouvement des navires en partance ou à destination de la zone.
Les navires qui sont tout simplement en transit, qui ont quitté l'Asie et qui passent par votre zone pour ensuite poursuivre leur voyage le long de la côte vers San Francisco, Los Angeles ou autre... incluez-vous ces navires dans les chiffres de ceux avec lesquels vous avez des interactions? Font-ils partie du puzzle ici?
M. Julius Smolders: Il y a deux aspects ici. Premièrement, les chiffres que j'ai mentionnés ont été tirés d'une étude du secrétaire au transport américain. Il y est dit que l'on peut s'attendre à ce que le trafic commercial se multiplie par deux ou par trois au cours des 20 prochaines années.
Pour ce qui est de notre interaction avec les navires au large des côtes, la route maritime habituellement empruntée par les navires venant d'Asie passe par le passage d'Umnak, en Alaska, pour longer la côte de l'île de Vancouver pour ensuite piquer vers différents ports du fleuve Columbia, San Francisco, Oakland, Los Angeles, ou autre.
Dans les cas où il y a une véritable prise de contact avec ces navires, nous les incluons dans nos statistiques quotidiennes. Cependant, il arrive que de tels navires passent par notre système mais que nous n'ayons aucune communication avec eux.
Il y a une étude en cours à l'heure actuelle.
Comment s'appelle cette étude, Larry, pour les navires océaniques... «Gestion de risque du trafic maritime»: est-ce le bon titre?
Cela concerne tout particulièrement ces navires qui sont en transit et à l'intérieur de la zone économique exclusive canadienne et à l'intérieur de la zone économique exclusive américaine et qui sont à l'extérieur de notre zone de responsabilité mais qui sont toujours, si vous voulez, en eau canadienne ou américaine.
Non, je n'ai pas inclus ces cas-là, et ici encore il y a une étude en cours, celle-ci portant sur ces chiffres précis ainsi que sur les risques posés par ces navires.
M. Larry Pokeda: Oui, je crois que la référence relative à ces statistiques vaudrait sans doute pour la totalité des ports américains le long de la côte Ouest.
Julius, vous me corrigerez si j'ai tort, mais s'agit-il d'une étude sur les ports américains de la côte Ouest ou bien d'une étude pan-nationale?
M. Julius Smolders: C'est une étude à laquelle participent les États-Unis et qui concerne les eaux au large des côtes de la Californie, de l'Orégon, de l'État de Washington et de la Colombie-Britannique.
M. Larry Pokeda: Je ne veux pas semer la confusion ici. Il y a une étude en cours à l'heure actuelle intitulée «West Coast Offshore Vessel Traffic Risk Management Study», qui vise la Californie, l'Orégon, l'État de Washington, la Colombie-Britannique et l'Alaska. Cette étude porte sur tout le volume de trafic de la côte Ouest des États-Unis et du Canada et traite de possibilités en matière de distances minimales à faire respecter par les navires en transit, d'eaux de ballaste, et autres choses du genre. C'est une étude d'un genre différent. Elle n'a pas vraiment rapport avec ces chiffres.
Le président suppléant (M. James Lunney): Merci.
Madame Tremblay, s'il vous plaît.
M. John Cummins: Je pense que Terry voulait ajouter quelque chose, brièvement.
Le président suppléant (M. James Lunney): Auriez-vous un bref commentaire à faire?
M. Terry Wedmedyk: Oui, au sujet de l'engagement international. Ce que je vais vous lire est tiré directement d'une publication de la Garde côtière canadienne:
-
Après le 1er février 1999, les navires SMDSM devront maintenir une
écoute automatisée permanente sur THF DSC CH70 et MF DSC
2187.5 kHz. Cela créera une situation de transition au SMDSM dans
le cadre de laquelle les navires munis de matériel traditionnel
non-SMDSM auront peut-être de la difficulté à avertir ou à
communiquer avec un navire muni de SMDSM. La Garde côtière va donc
surveiller et les fréquences SMDSM et les fréquences de détresse
traditionnelles.
• 0920
Ce n'est clairement pas le cas. Nous n'avons pas au Canada de
MF DSC. La publication de la Garde côtière canadienne, intitulée
Aides radio à la navigation maritime, dit donc une chose, tandis
que nous, nous disons que cela n'existe pas sur le terrain.
M. Andy Nelson: Ils parlent du canal 16 THF.
M. Terry Wedmedyk: Non, cela dit ici que le canal 70 et que le 2187 MF DSC sont les deux choses que nous avons convenu de surveiller pendant la période de transition. Or, nous ne sommes pas équipés pour cela.
M. Andy Nelson: Nous surveillons le 2182, bien sûr, comme le font les Américains.
M. Terry Wedmedyk: On lit ici MF DSC 2187. Voilà donc ce qu'ils disent. Pour ce qui est du tiers monde, pour ce qui est des navires internationaux qui traversent nos eaux mais qui ne sont pas ainsi équipés, que leur dit-on?
M. Andy Nelson: Nous n'avons pas le MF DSC. Nous ne sommes pas tenus d'avoir le MF DSC au Canada.
M. John Cummins: Respectons-nous nos engagements internationaux?
M. Terry Wedmedyk: Je crains que non.
M. Andy Nelson: Lorsque vous êtes à l'extérieur de la portée THF, vous êtes dans des eaux A3, soit des eaux internationales, et cela est couvert par l'INMARSAT.
M. Terry Wedmedyk: Il a également été dit que nous avons consulté les pêcheurs et d'autres groupes afin de déterminer ce qu'ils voudraient et quels seraient les coûts. Où intervient là-dedans la communauté internationale? Nous parlons à la communauté nationale d'un problème qui touche la communauté internationale. Avons-nous réellement respecté notre engagement international en interrogeant des groupes locaux là-dessus? Voilà l'autre point que je voulais soulever.
Le président suppléant (M. James Lunney): Je pense, Andy, que si vous avez quelque chose à dire là-dessus, il serait peut-être bon que vous interveniez afin que l'on puisse clore ce débat et passer à autre chose.
M. Andy Nelson: D'accord. Les navires internationaux doivent être munis de matériel de communication A3. Ils doivent avoir l'INMARSAT C, A ou B. C'est obligatoire pour les navires à l'extérieur de la portée de 150 milles nautiques et cela est conforme aux exigences. S'il n'y a pas de zone A2 identifiée pour un pays, alors c'est une zone A3 par défaut. Au Canada, nous avons déclaré toutes les zones A1 et A3. Voilà en gros quelle est la situation. Nous nous acquittons de nos obligations internationales.
C'est à chaque pays qu'il revient de décider s'il souhaite déclarer une zone A2 ou non, et le Canada a décidé que non. Il n'existe cependant aucune exigence internationale que nous ayons l'A2.
Le président suppléant (M. James Lunney): Allez-y, madame Tremblay.
Mme Suzanne Tremblay: Merci, monsieur le président.
J'aimerais dire qu'il faudrait peut-être qu'on trouve le moyen de nous donner du chauffage, parce que je ne vois pas comment on va être capables de résister aujourd'hui avec le froid qu'il y a ici. Vraiment, je suis à la limite de la congélation. Il va falloir trouver le moyen de faire en sorte qu'on ait chaud, parce que l'écoute va en souffrir un coup.
Plusieurs ont fait allusion au fait que vous n'aviez pas toute la formation et toute la certification voulues. J'aimerais savoir si, par ailleurs, vous avez des salaires qui vont avec les postes que vous occupez sans avoir la formation nécessaire.
[Traduction]
M. Larry Pokeda: J'ai malheureusement mis mon écouteur un peu tard et j'ai manqué...
Le président: Larry, permettez que je vous interrompe un instant. Il nous faut mentionner votre nom avant que vous ne commenciez, car nous n'avons pas d'opérateur de console. Si vous ne donnez pas votre nom, lorsque le procès-verbal sortira, la déclaration de John Cummins vous sera peut-être attribuée à vous, et j'ignore si vous seriez d'accord ou non avec cela.
M. Larry Pokeda: Très bien.
Toutes mes excuses. J'ai pris l'interprétation avec un petit retard. Pourriez-vous s'il vous plaît répéter la question?
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: J'ai dit que plusieurs parmi vous avaient fait allusion au fait que votre personnel manquait de formation et de certification dans certains cas. Vous n'êtes pas capables d'aller chercher la certification voulue parce que vous n'avez pas assez de gens.
Je me demande si, par ailleurs, on vous verse les salaires qui vont avec les fonctions que vous occupez sans avoir les qualifications nécessaires.
[Traduction]
Êtes-vous payé pour ce que vous faites, même si vous n'avez pas les qualifications exigées?
M. Larry Pokeda: Oui. Nous sommes payés pour ce que nous faisons. C'est exact. Il y a certains éléments obligatoires du programme de formation que nous devons avoir avant d'entrer en fonctions. Il y a d'autres éléments, par exemple les cours de perfectionnement et de formation plus poussée relativement à différents types de matériel, que vous suivez plus tard. Mais, pour la plupart, les éléments obligatoires de votre formation sont couverts et, oui, nous sommes payés en conséquence.
M. Andy Nelson: Un petit éclaircissement: lorsque la personne a terminé sa formation et quitte le centre, elle touche son plein salaire, mais pas avant. Par conséquent, pendant qu'elle est en formation, elle n'est rémunérée à un taux autre qu'une fois qu'elle a terminé et qu'elle sort du programme au bout de deux ans.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Cela veut dire qu'il y a des personnes qui occupent des postes pendant trois ans, qui n'ont pas les qualifications nécessaires mais qui n'ont pas le salaire non plus. Je trouve bizarre la façon dont cela fonctionne.
[Traduction]
M. Andy Nelson: Non. Les gens ne sont pas affectés à un poste pour lequel ils ne sont pas qualifiés.
M. Julius Smolders: Je pourrai peut-être moi aussi répondre à cette question, madame Tremblay. Nous avons en place un système de grille salariale qui prévoit des augmentations au fur et à mesure que les employés passent par les différents programmes de formation. J'ai mentionné que nous accusons du retard côté exigences de formation. Ce que j'ai voulu dire par là est que notre formation ne se fait pas en temps opportun. Une fois que nous avons atteint un seuil particulier au centre, alors nous progressons à ce niveau et tout le monde s'y situe. Il y a différents types de matériel à notre centre que ne possèdent pas les autres centres—par exemple, le matériel SMDSM. J'ai fait état de la formation spécialisée dont nous avons besoin. Cependant, il y a d'autres centres au pays qui n'ont peut-être pas cela.
En ce qui concerne la formation des superviseurs, ce que j'ai également mentionné, en vertu de la Loi sur les relations de travail, encore une fois, il s'agit d'une situation dans laquelle la formation n'est pas donnée en temps opportun. Je pense que c'est là-dessus que portait votre question.
De façon générale dans ce pays, nous en sommes tous au même niveau, soit le niveau RO-03, au niveau opérations, et le niveau RO-04, au niveau surveillance. Mais il y a de nombreuses différences d'un centre à l'autre, selon le matériel en place et les exigences de formation particulières à chaque centre. Cela varie donc en effet d'un centre à l'autre.
Le président suppléant (M. James Lunney): Suzanne, une dernière question, s'il vous plaît.
Mme Suzanne Tremblay: Selon ce que je comprends, vous dites que la formation de quelqu'un peut durer jusqu'à deux ans. Si vous engagez une personne demain matin et qu'il faut deux ans pour la former, quel salaire lui donnerez-vous pendant ces deux années? Celui de la personne formée ou celui de la personne non formée? Vous avez un seul niveau de personnel. Combien payez-vous cette personne?
[Traduction]
M. Julius Smolders: Oui, c'est exact. Les gens commencent au niveau RO-OO lorsqu'ils sont en formation. Le salaire d'un stagiaire en formation est de beaucoup inférieur. Une fois terminée la formation de niveau collégial, je pense que l'employé passe au palier supérieur. L'employé est toujours payé à un niveau de beaucoup inférieur pendant qu'il suit sa formation spécifique au centre et ce n'est que lorsqu'il a terminé cette formation qu'il passe au niveau suivant. C'est une échelle progressive qui tient compte de l'expérience et du niveau de formation.
Y figurent également les augmentations de traitement. S'il s'agit d'employés relativement nouveaux de la Garde côtière, ils commenceront au plus bas échelon. Il faut de nombreuses années pour passer par tous les échelons et arriver au salaire maximal.
Le président suppléant (M. James Lunney): Merci, monsieur Smolders.
Monsieur Wappel.
M. Tom Wappel: Merci, monsieur le président. J'ai cinq séries de questions. Si je manquais de temps, je vous demanderais de bien vouloir m'inscrire pour un deuxième tour.
Monsieur Smolders, dans votre exposé—merci, en passant, à tous pour vos présentations—vous avez mentionné deux choses sur lesquelles j'aimerais que vous me donniez quelques rapides éclaircissements. Cette semaine, je croule sous les sigles, qui me rendent fous. Pourriez-vous me dire ce que vous entendez par R et S?
M. Julius Smolders: Excusez-moi, je pensais avoir précisé cela. Cela veut dire recherche et sauvetage.
M. Tom Wappel: J'aurais dû savoir cela. Et OR?
M. Julius Smolders: Officier responsable.
M. Tom Wappel: J'aurais dû savoir cela également.
C'est bien. C'était la question facile.
J'aimerais maintenant être certain d'avoir toutes vos recommandations, ou en tout cas d'avoir compris quelles sont vos recommandations. Je vais vous les énumérer et vous pourrez confirmer.
Monsieur Smolders, la recommandation 1, si j'ai bien compris, serait qu'il y ait sept personnes par poste par opposition à 5,5. Est-ce bien cela?
M. Julius Smolders: C'est exact.
M. Tom Wappel: Deuxièmement, vous aimeriez qu'il y ait davantage de fonds pour le Collège de la Garde côtière canadienne afin de pouvoir former plus de gens pour remplacer les employés qui partiront à la retraite. Est-ce bien cela?
M. Julius Smolders: C'est exact. Ce n'est pas forcément la deuxième recommandation, mais, oui, c'en est une.
M. Tom Wappel: C'est tout simplement dans cet ordre que je les ai notées.
Numéro trois—pas forcément au troisième rang—l'embauche ou le recrutement immédiats de personnes pour remplacer ceux qui sont sur le point de prendre leur retraite.
M. Julius Smolders: Oui, absolument.
M. Tom Wappel: Et côté direction et côté techniciens, n'est-ce pas?
M. Julius Smolders: Au niveau de chaque centre, pris individuellement, ou au niveau opérationnel des SCTM, et nous pouvons aller chercher des cadres chez nos gens d'expérience.
M. Tom Wappel: Très bien.
Quatrièmement, d'après ce que j'ai noté, et c'est M. Wedmedyk qui en a parlé, il faudrait tout de suite augmenter les installations de radar. Dans les documents distribués hier, que M. Nelson a mentionnés et que j'avais oublié d'avoir reçus et que je viens de parcourir, il y a une recommandation qui demande l'établissement de quatre sites radars supplémentaires.
L'un quelconque des membres du panel pourrait-il nous dire où seraient à son avis situés ces quatre sites radars supplémentaires?
M. Terry Wedmedyk: Je pense, premièrement, qu'avant que de décider cela, il faudrait effectuer certaines études d'ingénierie pour déterminer quels seraient les meilleurs emplacements. Une fois cette décision prise, alors, oui, nous en avons besoin, nous en voulons, et nous les paierons, après quoi ce sera aux services d'ingénierie... aux services techniques de s'en occuper. Il leur faudrait faire certaines études pour déterminer les meilleurs emplacements. Il est clair qu'il faudrait que ce soit du côté Nord de l'île de Vancouver, mais où exactement, je ne saurais vous le dire sans ces études.
M. Tom Wappel: Merci.
Je vous pose la question parce que vous n'avez pas fait état de quatre; vous avez tout simplement parlé de sites radars «additionnels». Et la documentation fait état de quatre sites radars. Quelqu'un a dû réfléchir à cela, car on aurait aussi bien pu parler de trois ou de six. Quelqu'un parmi vous devrait savoir pourquoi c'est quatre.
• 0935
Monsieur le président, il faudra à un moment donné que
quelqu'un vienne ici nous expliquer comment on en est arrivé à ce
chiffre quatre.
De toute façon, nous avons compris l'objet visé. Il faudra qu'il y ait davantage de sites radars. Bien sûr, tout cela coûte de l'argent. Nous comprenons cela.
Monsieur Pokeda, vous avez recommandé la modernisation, la réparation et l'amélioration du matériel.
M. Larry Pokeda: C'est exact.
M. Tom Wappel: Très bien.
J'ai maintenant toutes les recommandations que vous aimeriez que nous examinions dans le cadre de nos délibérations visant à déterminer ce que nous allons recommander au ministre.
Ai-je oublié quelque chose?
M. Larry Pokeda: Je pense que nous avons fait état d'autres ressources au sein de la Garde côtière. Nous avons parlé du service technique. Nous pouvons avoir tout l'argent du monde et tout le matériel prêt à être employé, mais si nous n'avons pas le personnel technique pour l'installer, nous sommes toujours coincés. Le soutien technique dans ce domaine est certainement souhaitable. Quant à sa réalisation, cette question revient, encore une fois, au département technique.
M. Tom Wappel: Y a-t-il autre chose?
M. Terry Wedmedyk: En plus de ce que vous avez déjà entendu, je pense également avoir fait état du matériel de brouillage MF ou THF. La raison pour laquelle nous avons une exigence en la matière est que si nous allons discuter avec d'autres navires, unités de surface et aériennes et organismes gouvernementaux, nous ne disposons à l'heure actuelle d'aucun moyen sûr de communiquer avec les navires. Nous avons des téléphones et des lignes terrestres protégées. Mais lorsque nous discutons avec des gens en mer, cette protection n'est plus.
Il me semble que le syndicat a fait état du matériel de brouillage à Ottawa. Il l'a également demandé.
J'aimerais également que l'on revoie notre engagement en matière d'appel numérique sélectif, mais c'est là une autre question.
L'autre recommandation dont j'aimerais faire état est la suivante: peut-être que la responsabilité en matière de sécurité devrait être davantage partagée, au lieu d'être infligée à quelqu'un à qui l'on dit, voilà, c'est à toi de jouer. Tous les autres qui font ce travail sont alors écartés. Il conviendrait peut-être de réexaminer les choses pour voir qui offre quoi.
M. Larry Pokeda: Pour enchaîner ce que j'ai déjà dit au sujet du soutien technique, nous avons fait état de la modernisation du matériel et d'Amphitrite Point, en particulier.
Étant donné les délais de livraison pour le nouveau matériel, allons-nous être en mesure de continuer de fonctionner avec le vieux matériel? Nous travaillons dans certains cas avec de véritables antiquités. C'est ce que nous disent les gens du service technique. Nous ne le savons pas; nous vivons dans certains cas d'espoir pour ce qui est de certains des tubes pour l'image radar et le reste.
Il y a encore une autre question. Celle-ci est facile. Il nous faut à la Garde côtière une période de stabilité pour lancer ce processus et réaliser ce que nous voulons faire. Si nous vivons sans cesse le changement, nous n'allons jamais réussir.
Merci.
M. Tom Wappel: Ai-je épuisé tout mon temps, monsieur le président?
Le président suppléant (M. James Lunney): Oui.
Le président: James, allez-y.
M. James Lunney: J'aurais une brève question et un commentaire.
Premièrement, j'aimerais mentionner que lorsque nous étions à Seattle, Dave, votre participation au comité de la procédure a certainement été reconnue, ainsi que la vôtre, Larry, au sein du comité mixte de coordination. J'en ai fait état tout à l'heure. En fait, l'un des officiers là-bas a dit de Larry qu'il était un mentor.
La collaboration entre les centres pour ce qui est de la gestion du trafic maritime dans le détroit de Juan de Fuca et jusqu'en eau américaine est certainement appréciée à la base de Seattle.
Lorsque nous leur avons demandé quelles étaient leurs observations, de leur perspective, de leur travail avec vous, comme je l'ai dit, ils n'avaient que des louanges pour les membres du personnel et leurs compétences. Ils ont dit qu'il y avait eu des moments où ils avaient appelé et avaient le sentiment que vous vouliez répondre, mais c'était comme s'il y avait trop de casseroles sur le feu. Vous avez dit que vous en aviez six à faire, puis quatre à faire, et que vous leur reviendriez aussitôt.
• 0940
Auriez-vous quelque chose à dire quant à la dotation, à la
formation polyvalente, à la couverture de tout le terrain et à vos
responsabilités? Quelqu'un aimerait-il se prononcer là-dessus?
Le président: Monsieur Godfrey.
M. Dave Godfrey: L'un des problèmes constants auxquels nous nous trouvons confrontés, comme vous l'aurez constaté à Seattle et à Victoria, est qu'ils ont ce luxe, si vous voulez, d'avoir un superviseur en coulisse. Nous n'avons pas ici cette même capacité, comme cela a été souligné dans notre présentation.
Les superviseurs à notre centre, et à d'autres centres dans la région du Pacifique, sont des superviseurs de garde actifs. Lorsque survient un sujet de préoccupation entre nous-mêmes et la Garde côtière américaine en particulier, le superviseur de l'opération appelle notre centre pour parler au superviseur de veille. Dans de nombreux cas, ou en tout cas dans certains cas, le superviseur en question s'occupe peut-être directement de l'incident ou de la situation. Cela rend les choses très difficiles. Il n'y a pas de possibilité d'avoir le même rapport.
Je pense que c'est là une grosse préoccupation, surtout de notre côté. Cela a également été abordé du côté de la Garde côtière américaine. Encore une fois, ce pourrait être réglé grâce à une dotation accrue et à une capacité de superviseur en coulisse.
Larry.
M. Larry Pokeda: J'aimerais ajouter quelque chose là-dessus.
Pour ce qui est de mon poste également, ils ont le luxe d'avoir un officier exécutif qui s'occupe de toutes les questions opérationnelles. Dans mon cas, cette responsabilité retombe sur mes épaules. Comme vous pourrez très bien vous l'imaginer, en tant que gestionnaire, devant m'occuper de questions opérationnelles, cela devient très lourd lorsque je suis appelé à m'occuper de problèmes budgétaires et d'organismes extérieurs. Je ne pense pas rendre service aux opérations elles-mêmes.
Si nous disposions de personnel supplémentaire et pouvions attribuer ce rôle à quelqu'un, ce serait très avantageux d'avoir un adjoint pour traiter des questions opérationnelles entre centres et veiller à ce que la continuité soit maintenue.
Merci.
Le président: Monsieur Smolders.
M. Julius Smolders: J'aimerais ajouter quelque chose du point de vue du superviseur de veille.
Chacun des superviseurs à Tofino se voit accorder des responsabilités supplémentaires pour veiller à ce que le centre fonctionne de façon efficace et efficiente. J'ai mentionné que je suis l'agent de formation du centre. Nous avons également un superviseur de veille responsable des procédures et qui s'occupe de la Garde côtière américaine. Nous avons des superviseurs qui s'occupent du manuel d'information sur les opérations du centre, de la dotation, de l'organisation des quarts de travail, etc.
L'on ne nous donne pas le temps qu'il nous faudrait pour nous occuper comme il se doit de nos différents portefeuilles. En tant qu'agent de formation pour les opérations du centre, on ne me donne que très peu de temps pendant l'année pour m'occuper de ces questions. Lorsqu'on m'en donne, c'est très éclaté.
Pour conclure, monsieur Wappel, ce qu'il nous faut avant tout c'est un financement durable qui nous permette de faire plus de recrutement, d'assurer la formation qu'il faut et de maintenir une prestation de services efficace.
Le président: Monsieur Stoffer, soyez bref, je vous prie. Nous allons manquer de temps.
M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président.
Je tiens à vous remercier, messieurs, de vos présentations.
Monsieur Godfrey, en tant que personne sur le point de prendre sa retraite, il est vraiment admirable que vous soyez ici et que vous vous intéressiez à la chose. Beaucoup de personnes à la veille de leur retraite diraient: Écoutez, occupez-vous des problèmes; moi je m'en vais. J'ai fait mon temps. J'ai essayé, et je m'en vais. Que vous soyez ici est tout à fait admirable et je tiens à vous en remercier personnellement. Je sais que vous réfléchissez à l'avenir de cet établissement, même si vous n'en ferez plus partie. Vous serez occupé avec le Club Lions.
Monsieur Smolders, nous avons à Victoria rencontré une femme prénommée Kathy, qui était vraiment un éclat de lumière.
Lorsque nous avons à Vancouver rencontré M. Henderson, qui est en quelque sorte votre patron, M. Easter lui a demandé à brûle- pourpoint s'il avait l'argent nécessaire pour faire son travail. Il a dit que oui, que l'argent n'était pas le problème. Puis nous sommes allés sur le terrain et nous avons entendu tout le contraire.
Vous secouez la tête.
Pourquoi aurait-il dit cela?
M. Julius Smolders: Au cours des dernières années, nous avons essayé de faire coller une boîte avec un budget. Il nous faut avoir un budget qui colle à la boîte. Vous ne pouvez pas assurer un service de cette envergure avec un budget de broche à foin.
• 0945
Je ne peux pas expliquer à la place de M. Henderson pourquoi
il a dit qu'il n'y avait pas de problème, mais ce que je peux vous
dire c'est que vu d'en bas, et regardant vers le haut, il y a de
gros problèmes, et une part importante de cela... c'est la pointe
de l'iceberg. Les choses seront bientôt beaucoup plus graves si
tout le monde continue de partir à la retraite.
M. Peter Stoffer: Merci. À l'heure actuelle, avec M. Godfrey toujours en poste, tout le monde est très occupé au centre. Est-ce le cas?
M. Julius Smolders: C'est exact.
M. Peter Stoffer: Lorsque M. Godfrey partira, qui va le remplacer?
M. Julius Smolders: Il faudra environ deux ans pour faire venir quelqu'un. En attendant, pendant cet intervalle de deux ans, le fardeau reviendra aux employés en place qui devront faire encore plus d'heures supplémentaires pour assurer les quarts de travail, et ces heures supplémentaires coûteront plus d'argent.
Le président: Dernière question, monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: En d'autres termes, il s'agit d'heures supplémentaires planifiées, chose qu'aucun syndicat, aucun gestionnaire opérationnel, aucun officier responsable n'évoquerait, car les heures supplémentaires planifiées amènent le burnout chez les employés. J'ai parlé hier avec une femme de votre boîte qui a dit avoir travaillé 30 jours d'affilée.
M. Julius Smolders: Oui.
M. Peter Stoffer: Elle gagne environ 44 000 $ à 47 000 $ par an, et ses homologues américains, faisant exactement le même travail, gagnent 60 000 $US.
M. Julius Smolders: C'est exact.
M. Peter Stoffer: Si donc vous voulez attirer de bons éléments pour combler ce poste—tout comme dans la politique, il faut payer les politiciens pour attirer de bons éléments—vous devrez payer les gens pour faire le travail.
M. Julius Smolders: C'est exact. Et depuis 1993 ou 1994, avec le gel des salaires et des augmentations, nous prenons du retard dans notre profession par rapport aux normes américaines et mondiales.
M. Peter Stoffer: C'est comme tout le reste...
Le président: Excusez-moi, Peter.
Monsieur Farrah.
M. Georges Farrah: J'aimerais revenir à la présentation de M. Smolders à la deuxième page, dernier paragraphe. Vous dites que les normes en matière de formation et d'accréditation du personnel STM ne respectent pas les normes internationales.
Je sais que M. Nelson a réfuté cela, et j'aimerais tout simplement un éclaircissement. Vous faites ici une déclaration très grave. J'aimerais tout simplement que cela soit tiré au clair, car cela pourrait avoir une incidence sur la réputation de la Garde côtière ainsi que sur celle du Canada.
Le président: Monsieur Smolders.
M. Julius Smolders: Encore une fois, je parlais de la recommandation V-103 de l'Association internationale de signalisation maritime. Ce document renferme les normes en matière de formation et d'accréditation du personnel STM. Je veux parler ici de la norme internationale établie. Andy a fait état du fait qu'il revient à chaque pays de déterminer son niveau d'adhésion à ces normes. Or, le Canada est bien un partenaire de l'AISM.
Le président: Merci, monsieur Smolders.
Monsieur Hearn.
M. Loyola Hearn: Merci beaucoup, monsieur le président. Permettez-moi de remercier moi aussi les témoins d'être venus ici, et tout particulièrement M. Godfrey. J'aimerais me faire l'écho des propos de Peter. Je trouve parfaitement louable qu'une personne qui n'a plus que cinq jours à tirer ne soit pas en congé de maladie depuis un an et demi, comme ce serait le cas de beaucoup de gens. Cela témoigne de votre dévouement.
Lorsque nous comparons vos échelles salariales à celles des Américains, comme Peter l'a mentionné, cela fait ressortir que les gens font ce genre de travail parce qu'ils y croient et parce qu'ils aiment cela. Il faut espérer que certains politiciens ne sont pas non plus ici à cause de l'argent, Peter. Nous aimons ce que nous faisons et nous pensons avoir un travail à faire.
J'ai néanmoins quelques questions. Premièrement, je pense que M. Smolders a mentionné dans ses remarques que le trafic pourrait doubler voire tripler au cours des 20 prochaines années; cependant, en même temps, en l'espace de sept ans, nous allons perdre 70 p. 100 de notre personnel cadre et 50 p. 100 des fonctionnaires dans leur ensemble.
• 0950
Compte tenu de ce qu'il faut pour former les gens pour occuper
des postes comme les vôtres, où en serons-nous d'ici dix ans?
Le président: Monsieur Smolders.
M. Julius Smolders: Je ne sais vraiment pas où nous en serons. À moins d'être tout à fait prêts à prendre des mesures positives et décisives dès aujourd'hui, nous serons sur le point de perdre carrément le contrôle à cause de ces questions—nous allons perdre du personnel plus vite que nous ne pourrons le remplacer et les volumes de trafic vont augmenter au cours des 10 à 20 prochaines années. Il y a également les questions de sécurité nationale.
Cela me fait peur. Cela me fait peur de penser à la situation dans laquelle nous pourrons très bien nous trouver d'ici cinq ans. Lorsque nous aurons enfin remplacé M. Godfrey au bout de deux ans, il y aura encore quelqu'une d'autre qui sera sur le point de prendre sa retraite. Et lorsque nous serons en mesure de remplacer celui-là, il y en aura deux autres qui seront prêts à partir. Il nous faut bouger maintenant. Nous n'avons plus de temps. Nous n'avons tout simplement plus de temps.
Le président: Monsieur Hearn.
M. Loyola Hearn: Merci, monsieur le président.
Il y a très peu de temps, j'ai soulevé certaines préoccupations à la Chambre, auprès du ministre, M. Dhaliwal, à cause des compressions à Terre-Neuve. Notre côte, bien sûr, est comme la vôtre. Nous faisons face à l'océan Atlantique et nous avons encore moins de couverture que vous côté radar.
À l'époque, 11 phares étaient en train d'être automatisés. Nombre d'entre eux se trouvent dans des régions critiques où les gardiens de phare sont les yeux et les oreilles du système, surtout côté sécurité. Deux sur quatre des hélicoptères qu'utilisait la Garde côtière pour couvrir la région allaient être retirés du service, et c'était également le cas d'un des navires.
On me dit que cela fait partie du plan visant à améliorer le système. Je ne comprends pas. Vous vous occupez de cela depuis beaucoup plus longtemps que moi. Comprenez-vous ce qui se passe?
M. Julius Smolders: Encore une fois, non. Nous ne comprenons pas.
• 0955
Alors que nous nous entretenons avec vous aujourd'hui, nous
avons un navire de la Garde côtière le long de la côte ouest de
l'île de Vancouver. Le navire de la Garde côtière Bartlett est
ancré dans la baie Nootka, et c'est tout. Si c'est là une
amélioration, je ne comprends pas. Je ne comprends tout simplement
pas.
Le président: Monsieur Wedmedyk.
M. Terry Wedmedyk: J'aimerais ajouter quelque chose à cette déclaration concernant les compressions et ce qui est en place à l'heure actuelle.
Lors des réunions à Ottawa, je pense que M. Churchill a dit qu'il y avait un garde-côte de 70 pieds de la Garde côtière canadienne à Prince Rupert, disponible 24 heures par jour.
Ce qu'il n'a pas mentionné c'est l'immense territoire géographique que ce seul garde-côte est sensé desservir. Je suis certain que vous avez vu des cartes de la zone de Prince Rupert. Elle est énorme.
Il faudrait que quelqu'un demande combien de temps il faudrait au navire pour se rendre à l'extrémité de la zone qu'il est sensé couvrir, à partir de sa base. Combien d'heures cela demanderait-il? Je pense que la réponse serait étonnante. Et il a dit que nous n'avions qu'un seul garde-côte, alors nous avons également un gros problème de ce côté-là.
Le président: Merci, Terry. Nous serons à Prince Rupert demain.
Tom, a-t-on répondu à toutes vos questions? Pouvez-vous en poser encore une? Nous allons passer au groupe de témoins suivant.
M. Tom Wappel: Monsieur le président, vous êtes formidable comme président, mais si nous sommes venus ici, c'est surtout pour traiter de cette question.
Le président: Je le sais.
M. Tom Wappel: Sauf tout le respect que je dois aux autres témoins, il est très important que nous couvrions toute cette question.
Le président: Très bien. Encore quelques questions. Allons-y.
M. Tom Wappel: Vous n'aurez peut-être pas de réponse à cette question. Dans la documentation du syndicat, sous la rubrique sécurité nationale du Canada, je lis la déclaration que voici:
-
Les agents des SCTM voient quotidiennement des navires non
identifiés en route pour le Canada et interceptés par aucune autre
autorité.
Est-ce bien le cas et, dans l'affirmative, pourriez-vous nous en donner la preuve?
M. Terry Wedmedyk: Cela est tout à fait juste et, aussi récemment qu'il y a quelques mois, je pense, j'ai moi-même été confronté à une telle situation pendant le quart de minuit, avec une très grosse image sur mon radar. Nous avons tenté de communiquer avec ce navire, car il se dirigeait vers un autre navire qui posait des câbles et qui devait, pour pouvoir faire son travail, disposer d'une marge de dégagement de deux milles à la ronde. Or, cet autre navire fonçait droit dessus. Son capitaine n'a pas pris contact avec nous et nous ne savions pas quel était ce navire. Nous l'avons appelé fois après fois, mais on ne nous a pas répondu.
Au bout du compte, il nous a fallu demander au navire qui posait des câbles de se déplacer et c'est lui qui a fini par identifier l'autre navire car il lui était possible de déchiffrer son nom. Nous avons alors communiqué avec ce navire en utilisant son nom et il a répondu. Lorsque j'ai demandé au capitaine où il était et ce qu'il faisait, car il n'était pas habituel de voir des navires de sa taille dans ces eaux-là et ce n'est pas une route maritime régulière, il a dit qu'il était en eau internationale et qu'il pêchait le thon.
Ma réaction a été de me dire: mais comment puis-je savoir que c'est le cas? Il a dit qu'il était en route pour Tofino pour décharger ses prises. J'ai alors appelé Douanes Canada car, encore une fois, notre rôle est d'avertir les autres autorités lorsqu'il survient des cas du genre. J'ai demandé quelle était l'exigence pour un navire sorti de nulle part et à destination d'un port canadien de se signaler auprès des Douanes. On m'a répondu qu'il n'y avait aucun prédédouanement, que nous n'avons aucune exigence selon laquelle tout navire de pêche canadien en eau internationale se signale aux Douanes dans l'un quelconque de ces petits ports.
«Ne trouvez-vous pas cela étrange?», lui ai-je demandé, et il a répondu «Oui, c'est étrange, mais cela ne relève pas de nous».
M. Tom Wappel: Comment savez-vous qu'il s'agissait d'un navire canadien?
M. Terry Wedmedyk: Parce qu'après avoir obtenu le nom du navire, nous avons pris contact avec lui et avons posé la question. Le capitaine nous a donné son nom, nous l'avons vérifié dans nos dossiers et il s'est trouvé qu'il s'agissait d'un navire de pêche canadien basé à Tofino. Mais je ne savais pas où il était; il aurait très bien pu être au Mexique en train de prendre à son bord des stupéfiants ou autres. Nous ne l'aurions jamais su.
M. Tom Wappel: Monsieur le président, j'aimerais donner à M. Wedmedyk l'occasion de rectifier certaines choses. Il aimerait disposer d'un peu de temps pour corriger certains renseignements fournis dans le cadre de la réunion à Ottawa. Il a rectifié une chose... il ne l'a pas forcément rectifiée, mais il nous a offert des conseils quant à l'énorme région de Prince Rupert.
Monsieur Wedmedyk, y a-t-il autre chose que vous aimeriez nous soumettre?
Et ce sera tout, monsieur le président. Merci.
M. Terry Wedmedyk: Oui, j'ai en effet noté ici un certain nombre de choses dont je voudrais traiter.
Le président: Terry, je vais vous en donner l'occasion dans un instant. Pendant que vous faites vos recherches, pourrait-on entendre M. Cummins? Cela vous donnera le temps de vous organiser.
Monsieur Cummins.
M. John Cummins: Merci, monsieur le président.
Monsieur Nelson, on vous a dit qu'il y avait eu une soumission visant le remplacement de matériel. Êtes-vous au courant de mesures prises par vos supérieurs pour former activement et remplacer des employés existants?
M. Andy Nelson: Vous parlez de soumissions pour remplacer du matériel?
M. John Cummins: Vous avez laissé entendre qu'il y avait en place des projets de remplacement de matériel, et je vous demande si des demandes ou des efforts ont été faits par vos supérieurs en vue de remplacer les employés existants qui vont bientôt prendre leur retraite.
M. Andy Nelson: Oui, c'est exact. C'est moi qui ai fait les demandes pour le matériel. Cela fait partie de mon travail. Quant à la situation en matière de dotation, nous avons dans ma section une personne qui s'occupe de cela. En septembre prochain nous allons lancer un concours pour recruter 10 ou 12 nouveaux employés. Encore une fois, il s'agit là de la formation ab initio, et il faudra environ deux ans pour former ces gens.
Au train où l'on va, nous allons proposer un autre cours six mois plus tard si le collège dispose de suffisamment d'instructeurs pour organiser le cours. C'est là notre problème; il nous faut toute une classe au Collège de la Garde côtière pour former notre personnel. Nous avons un si grand nombre de personnes à remplacer au cours des dix prochaines années.
M. John Cummins: Y a-t-il des fonds disponibles et pour la dotation et pour le matériel? Cela a-t-il été mis en place?
M. Andy Nelson: Le matériel n'exigera pas plus de personnel; le personnel en place suffira.
M. John Cummins: Oui, mais est-ce qu'il y a en place le financement nécessaire pour couvrir et le matériel et la dotation, ainsi que la formation?
M. Andy Nelson: Non, au moment où l'on se parle, le financement nécessaire n'est pas en place.
Le président: Monsieur Godfrey.
M. Dave Godfrey: J'aimerais faire un commentaire au sujet de la dotation et de la situation que nous avons ici dans la région du Pacifique.
Ce dont on parle ici ce sont des employés de remplacement que l'on puise dans les niveaux inférieurs. Je pense qu'il est important de porter à l'attention du comité le fait que le centre SCTM de Comox n'a pas d'officier responsable depuis maintenant un an. L'officier responsable a pris sa retraite, comme moi, il y a un an, et il n'a pas encore été remplacé.
Vous constaterez également demain que pour ce qui est de Prince Rupert, il n'y a qu'un superviseur permanent sur un total de six postes de superviseurs. Le service tourne à l'heure actuelle avec cinq postes occupés par des employés par intérim, avec un roulement aux trois mois. Vous ne pouvez pas rester en place pendant plus de trois mois. Il est donc très difficile pour ces opérations d'exécuter leurs obligations de façon efficiente, car il leur manque les cadres clés pour gérer les centres. C'est là un sujet de préoccupation qui mériterait, je pense, qu'on s'y penche.
Le président: Merci, monsieur Godfrey.
M. Smolders, puis ce sera au tour de Suzanne.
M. Julius Smolders: J'aurai un dernier commentaire à ajouter. Pour être juste, nous avons tout récemment, en septembre, lancé un cours de formation ab initio au collège. Douze personnes se sont inscrites. Neuf sont prévues pour la région centrale et trois pour Terre-Neuve. Cela ne va pas nous aider du tout.
En février, nous allons offrir un programme de formation en français, et tous les candidats participants vont se rendre dans la région des Laurentides. Il y a un autre cours provisoirement prévu pour septembre 2002. La région du Pacifique et les autres régions vont se disputer le nombre de candidats et de places qu'elles auront dans le cadre de ce cours. Mais le plus tôt que nous pourrons inscrire quelqu'un dans le processus de formation initiale c'est septembre 2002. Et ce n'est que s'ils réussissent que nous pourrons espérer avoir quelqu'un pour l'automne 2003.
Le président: Merci, monsieur Smolders.
Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Merci, monsieur le président. J'ai deux petites questions.
Je veux revenir sur une question que j'ai posée hier. Quand nous sommes allés aux États-Unis, on nous a parlé positivement de vous et du modèle canadien, mais on a également comparé l'organigramme organisationnel des États-Unis et le nôtre. Ici, il y a plusieurs centres de décision et c'est confus. On ne connaît pas bien la ligne hiérarchique. Ça va à gauche et à droite. La même personne relève de deux ou trois services, ou le même service fait deux ou trois choses. En tout cas, il y avait des problèmes du côté de votre organisation, disait-on.
J'ai demandé hier aux gens ce qu'ils pensaient d'une organisation mixte, à la fois militaire et civile. J'ai eu une réponse sur laquelle j'ai réfléchi et que j'apparente à la caricature plutôt qu'à une réponse sérieuse. Quels avantages voyez-vous à ce qu'une partie des services soit assumée par les militaires et à ce qu'il y ait une conjonction des militaires et des civils? Eux ont vu des avantages à notre système et ils ont vu des avantages au leur aussi. C'est vrai que vous êtes très occupés et que vous n'avez peut-être pas eu le temps de comparer les deux systèmes, mais quels avantages voyez-vous au système jumelé, militaire et civil?
[Traduction]
Le président: Monsieur Smolders.
M. Julius Smolders: Nous savons d'expérience, ayant traité avec la Garde côtière américaine, qu'elle a un mélange de personnel militaire et civil. Les problèmes que nous vivons dans ce contexte et les problèmes que nous prévoirions si nous faisions la même chose ici...
Mme Suzanne Tremblay: Excusez-moi, mais je ne parlais pas de problèmes. Je parle des avantages que vous y verriez. Y verriez-vous des avantages?
M. Julius Smolders: Non, mais, si vous permettez, j'y verrais un certain nombre d'inconvénients, notamment le manque de continuité. Ce qui est avantageux c'est d'avoir des gens à long terme qui ont énormément d'expérience. Là où nous pourrions travailler beaucoup plus étroitement avec nos militaires ce serait dans la communication d'informations dont nous disposons, en ayant des navires de patrouille côtiers du MDN en mer avec lesquels nous puissions communiquer directement et en toute sécurité en vue de leur transmettre des informations. Quant à l'idée de transférer nos opérations au MDN, non, je n'y verrais pas de gros avantages, exception faite, possiblement, d'une augmentation des fonds qui y seraient consacrés.
Le président: Merci, monsieur Smolders.
Monsieur Godfrey.
M. Dave Godfrey: Si vous permettez, madame Tremblay, l'un des problèmes que je vois, ayant moi-même passé une partie de ma carrière chez les militaires, est que, comme cela vous a sans doute été expliqué, une partie du problème que vit la Garde côtière américaine c'est que les affectations pour le personnel militaire durent en règle générale trois à quatre ans.
Comme cela a été en partie expliqué dans la présentation hier, le problème de l'intégration de personnel militaire dans notre type d'opération se poserait du côté de la formation, comme cela a été indiqué, même si ces personnes avaient une certaine expérience, car il s'agirait vraisemblablement de gens de la marine. Ils auraient certaines connaissances et une certaine expérience dans la marine, mais il leur faudrait néanmoins une certaine formation pour qu'ils soient qualifiés, et une fois en poste, ils n'y resteraient que pendant peut-être un an ou deux avant d'être transférés ailleurs, de devoir quitter la localité, etc. Je ne verrais donc aucun avantage appréciable à ce qu'au niveau canadien l'on essaie d'intégrer du personnel militaire dans notre organisation.
Comme vous le savez, aux États-Unis l'on dit des membres de la Garde côtière que ce sont des militaires, mais la Garde côtière est en vérité paramilitaire; elle fait néanmoins partie de l'appareil militaire. Notre Garde côtière est un service public. Nous ne faisons pas partie de l'organisation militaire. Il nous faudrait donc trouver un mécanisme pour intégrer un service public dans l'organisation militaire.
Je ne dis pas que cela ne pourrait pas se faire. Cela se fait à Victoria et dans d'autres centres de sauvetage au pays, car nos coordonnateurs des opérations de recherche et de sauvetage dans les centres partagent des emplois entre des militaires et du personnel de la Garde côtière. Les choses se passent ainsi à cause des ressources requises. Les militaires dans ces centres nous viennent principalement de l'armée de l'air, à cause des aspects recherche et sauvetage aérien. La Garde côtière s'occupe du volet maritime.
Mais vu le genre de travail que nous faisons aux Services de communication et de trafic maritimes, je ne verrais aucun avantage à ce que nous tentions d'utiliser la Garde côtière américaine comme modèle.
Le président: Merci.
Monsieur Stoffer, vous pouvez poser une toute petite question.
M. Julius Smolders: Si vous permettez que j'intervienne, j'aimerais souligner ici un élément très important: pour pouvoir travailler comme contrôleur du trafic maritime, ou MCTSO, la Loi sur la marine marchande du Canada prévoit que la personne soit accréditée comme officier des SCTM. La formation et l'obtention de l'accréditation voulue constituent un processus long et complexe. Faire former du personnel militaire pour que ces personnes soient transférées un an ou deux plus tard serait un énorme gaspillage de temps, d'argent et de ressources.
Le président: Merci, Julius.
Monsieur Stoffer, rapidement.
M. Peter Stoffer: En règle générale, combien de participants à un cours de formation le réussissent en bout de ligne? Par ailleurs, le lieutenant Devereaux des États-Unis nous y a dit hier que le dieu des SCTM était un certain M. McGowan, qui serait l'inventeur d'un des systèmes. Pourriez-vous, afin que ce la figure au procès-verbal, nous dire rapidement qui est M. McGowan et ce qu'il fait? D'autre part, combien de personnes réussissent leur programme de formation? Ce n'est pas parce qu'il y a 12 inscrits dans la classe que vous aurez deux ans plus tard 12 personnes ici.
M. Julius Smolders: Si je m'appuie sur ma propre expérience en la matière, en règle générale, le taux de réussite se situe aux environs de 50 p. 100. Environ 50 p. 100 des personnes qui sont sorties du collège pour ensuite suivre leur formation spécifique au centre ont réussi jusqu'ici. Ces chiffres ont augmenté au cours des dernières années, mais ce n'est pas parce que le travail est devenu plus facile; c'est parce que nous sommes devenus plus désespérés et avons revu à la baisse nos normes quant à ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas. Et je vous dis cela très sincèrement. C'est un fait.
Récemment, nous avons eu deux personnes sorties du collège et désireuses de faire leur formation spécifique au centre. L'une d'entre elles n'a pas réussi. Il a été décidé d'imposer une cessation de l'instruction. Dans le cas de l'autre candidat, ses résultats étaient douteux, mais nous étions désespérés et nous l'avons donc poussé.
• 1015
Pour ce qui est de M. McGowan, il a commencé comme contrôleur
du trafic maritime à Tofino il y a de cela une vingtaine d'années.
Il a commencé à l'époque avec un petit ordinateur familial et il
s'est mis à élaborer des programmes en vue d'une gestion plus
efficace et plus efficiente du trafic à Tofino. Il a au fil des ans
peaufiné cela au point d'élaborer plus ou moins à lui seul notre
système STM, qui est un système d'établissement ou de dépistage
automatique ou électronique des mouvements de navires et de partage
d'informations entre nous-mêmes, d'autres centres SCTM dans l'Ouest
et Seattle. Il a fait un travail tout à fait admirable.
Malheureusement, il n'a ni les ressources ni le personnel qu'il lui
faudrait. S'il devait lui arriver quelque chose, ce serait la fin
pour nous.
Le président: Merci, monsieur Smolders.
Monsieur Pokeda, dans votre déclaration originale, vous avez dit, parlant de l'intégration, qu'il devait y avoir un document établissant qu'il y aurait une période de stabilité pour vous donner le temps, etc. Vous avez expliqué que c'était en gros le contraire qui se passait. Pourriez-vous nous donner le titre de ce document ou encore le faire parvenir au greffier afin que nous l'ayons et que nous puissions nous y reporter?
M. Larry Pokeda: Oui. Il s'agit du plan directeur 1995 pour l'intégration. Nous avons ce document. Nous le mettrons à votre disposition.
Le président: Bien. Merci.
Tom.
M. Tom Wappel: Terry allait nous donner des renseignements.
Le président: Oui, Terry, excusez-moi. Vous alliez parcourir avec nous certains autres points évoqués à la réunion d'Ottawa et sur lesquels il serait peut-être bon de revenir.
M. Terry Wedmedyk: D'accord. J'ai déjà parlé du problème du SIA en tant que solution de remplacement, expliquant que, pour des raisons de sécurité, cela ne fonctionnera pas car vous pouvez tout simplement le couper. Cela ne ressort pas clairement du procès-verbal de cette réunion. À sa lecture, cela me paraissait être un système parfait.
L'autre question est celle du garde-côte de Prince Rupert. M. Churchill a mentionné que la région du Nord n'est couverte que par un seul garde-côte américain. Il a déclaré ceci: «Je ne pense pas qu'ils aient de couverture radar dans cette région» et «Jusqu'à tout récemment, la Garde côtière américaine a eu un petit navire en service à Ketchikan».
Ce n'est pas vrai. La Garde côtière américaine a sans doute la plus grosse flotte au monde en service dans les eaux de l'Alaska. Elle a de nombreuses flottes stationnées à des endroits comme Homer, Ketchikan, Seward, Kodiak—les plus grosses flottes—ainsi que de plus petites flottes à Juneau, je pense. Elle a trois stations aériennes, l'une à Sitka, l'une à Kodiak et j'ignore où se trouve l'autre. Elle a des stations de communications là-haut. D'autre part, elle dispose d'au moins trois gardes-côtes hauturiers à forte endurance, les gros que vous voyez à la télévision. Bien qu'ils ne soient pas stationnés de façon permanente en Alaska, ils viennent d'Alameda en Californie, de Seattle et d'Honolulu. On les envoie dans les eaux de l'Alaska et ils les patrouillent de façon régulière.
Il aura suffi pour obtenir tous ces renseignements, un simple coup de fil au quartier général de la Garde côtière américaine à Juneau. C'est là que j'ai obtenu tous ces renseignements. Voilà donc l'autre chose que je voulais souligner.
Il a dit qu'il n'y avait pas de couverture radar. Prince William Sound, en Alaska, a des services de trafic maritime. C'est là que l'Exxon Valdez, le pétrolier, a échoué. Je tenais donc à souligner que la Garde côtière dispose de ces installations.
Il a dit que la raison pour laquelle nous n'avons pas de radar ailleurs est le coût. Je pense que c'est M. Desparois qui a dit que nous ne pouvons pas mettre de radar partout. Cela est vrai. Vous ne pouvez pas bâtir partout des installations de radar. Mais il vous faut examiner les points stratégiques et déterminer ce que cela vous coûtera de couvrir ces zones.
On vient tout juste de me remettre un petit quelque chose au sujet du radar pour la côte Ouest, disant que les quatre points pour lesquels on envisageait le radar étaient les suivants: la passe Seymour pour Comox; le port de Prince Rupert; les îles de la Reine-Charlotte pour le service en haute mer; et le Nord de l'île de Vancouver. Voilà les quatre zones qui ont, je pense, été identifiées par le syndicat comme étant celles dans lesquelles ils aimeraient voir installer des postes radar.
La raison pour laquelle la Garde côtière américaine n'a pas d'installations radars à tous ses sites est qu'elle aussi a un problème de budget et qu'elle cherche à optimiser son argent. Elle a choisi d'avoir une flotte plus importante que la nôtre, et les eaux américaines sont de ce fait régulièrement patrouillées par des navires et des aéronefs, tandis que ce n'est pas le cas chez. Elle a choisi d'acheter ces navires supplémentaires au lieu d'installer un poste radar supplémentaire quelque part le long de la côte.
• 1020
Cela n'a pas été dit tout à l'heure mais mérite d'être
souligné. Elle n'a pas ces sites parce qu'elle dispose d'autres
installations ou ressources que nous, nous n'avons pas.
La dernière déclaration qui mérite, selon moi, d'être étoffée, est celle voulant que la Garde côtière des États-Unis soit en train de remplacer 300 canots de sauvetage avec le modèle long de 47 pieds, semblable à ce que nous utilisons au Canada.
Je tiens à déclarer que la côte canadienne est beaucoup plus longue que la côte américaine. Il nous faut savoir de façon très précise de combien de canots de sauvetage le Canada dispose à l'heure actuelle pour couvrir notre territoire. Je peux vous dire que le total est loin des 300 canots de sauvetage qu'ont à l'heure actuelle les Américains. Ici encore, nous manquons de ressources du côté de la flotte. Je tenais à faire ressortir cela car, bien que nous achetions de nouveaux canots de sauvetage, nous sommes loin d'avoir ce qu'il faudrait pour assurer une bonne couverture de toutes nos côtes.
Le président: Merci, Terry.
M. Nelson aimerait dire quelque chose, après quoi nous passerons à M. Godfrey pour le mot de la fin.
Monsieur Nelson.
M. Andy Nelson: Merci, monsieur. J'aimerais apporter quelques précisions, afin que cela figure au procès-verbal.
En ce qui concerne les canots de sauvetage, il y a en deux qui vont être envoyés dans la région au nord de Prince Rupert. Il y en a un qui va aller à Queen Charlotte City ou Sandspit, et l'autre qui va être envoyé à Shearwater. Cela va se faire au cours des deux années à venir. Cela s'inscrit dans le projet national de construction de ces canots de sauvetage qui a fait l'objet d'un contrat passé avec une entreprise de Victoria. Pour que vous ayez tout le contexte, je préciserai qu'il y en a neuf en tout qui vont être déployés le long de la côte Ouest.
En ce qui concerne les concours, le concours en vue de doter le poste d'officier responsable à Comox devra donner lieu à une nomination d'ici le mois de juin de l'an prochain. Le processus de concours demande beaucoup de temps étant donné le nombre de candidats. L'avis de concours en vue de la dotation des postes de superviseurs vacants va sortir d'ici deux semaines. En fait, le poste que j'occupe à l'heure actuelle, celui de surintendant, sera lui aussi doté d'ici juin prochain.
Par ailleurs, en ce qui concerne les eaux internationales, vous êtes en eau internationale dès que vous franchissez la limite des 12 milles. Les lieux de pêche sont à 20 milles des côtes, alors la quasi-totalité des navires qui pêchent là-bas se trouvent en eau internationale. Je préciserai que la limite des 12 milles est une limite canadienne.
En ce qui concerne les normes, il a été dit que nous avons abaissé nos normes en vue de l'embauche. Je ne pense pas que ce soit le cas. Nos normes sont toujours les mêmes. Certaines des personnes qui sortent du collège ne satisfont peut-être pas à nos normes le long de la côte Ouest. Nous en avons eu la preuve ici, récemment, avec des candidats qui n'ont pas réussi. Ils suivent un long processus, et si l'on en arrive à un point où l'on estime qu'une personne ne pourra pas réussir, alors on interrompt sa formation. Si cette personne a du potentiel, elle est maintenue jusqu'à...
Voilà, en gros, ce que je tenais à préciser.
Le président: Merci, monsieur Nelson.
Monsieur Godfrey, vous avez consacré le gros de votre vie à cela. D'après ce que j'ai compris, vous allez prendre votre retraite la semaine prochaine ou...
M. Dave Godfrey: Bientôt.
Le président: ...bientôt en tout cas. Au nom du comité, je tiens à vous remercier de votre service et de votre dévouement.
Sur la base de votre expérience du contrôle du trafic maritime de la Garde côtière, vivons-nous une bonne période ou une mauvaise période, et quelles réflexions pourriez-vous partager avec nous à ce sujet?
Je sais que vous avez réagi à la question de Tom, tout à l'heure. Nous disposons de ces renseignements, mais auriez-vous quelque chose à nous dire en guise de conclusion? Vous avez la parole.
M. Dave Godfrey: Merci, monsieur le président.
Je suis arrivé à la Garde côtière de l'armée de l'air. J'étais contrôleur de trafic aérien à Comox au tout début du service du trafic maritime ici le long de la côte Ouest. Il y avait au début de ma carrière avec la Garde côtière quantité de défis et de sources de stimulation, et j'ai toujours aimé les défis.
Je peux comprendre la décision du ministère de fusionner la radio de la Garde côtière et le service du trafic maritime dans l'intérêt de l'efficience et de la rentabilité. Malheureusement, comme cela vous a été expliqué, il y a eu un abaissement des normes. À mon sens, cela est malheureux. Nous continuons à nous débattre, comme cela vous a été expliqué, pour exécuter nos engagements et à l'échelle nationale et à l'échelle internationale. C'est tout un défi, mais ce n'est pas un défi agréable, pas comme à mes débuts, lorsque nous bâtissions le système et mettions en place les procédures. Nous étions alors très passionnés par notre travail et nous aimions aller au travail.
• 1025
Comme je l'ai dit à nombre de mes amis et collègues, les gens
qui sont réellement passionnés pour leur travail craignent la
retraite. Vous voulez continuer. La retraite, pour vous, c'est se
faire mettre au rancart. Malheureusement, lorsque vous arrivez dans
une situation où les compressions budgétaires ou d'autres
préoccupations changent tout d'un coup la texture de votre travail,
comme cela est arrivé ici au centre, et d'ailleurs dans la plupart
des centres, alors cette passion et cette jouissance... C'est
triste à dire, mais aujourd'hui, j'ai hâte à la retraite.
Regardant maintenant certains des problèmes qui ont été identifiés et certains qui vont continuer d'alimenter la détérioration du service, peut-être... et d'autres personnes m'ont dit souhaiter être à ma place, parce que moi au moins je pourrai m'en sortir. Je ne me sens pas à l'aise avec l'idée de quitter mon poste en l'exposant à d'autres problèmes. J'aimerais me sentir bien, être convaincu que le système jouira du soutien nécessaire—du soutien financier extrêmement important—pour rebâtir ce qui s'est progressivement détérioré au cours des 10 à 15 dernières années. C'est là mon seul voeu.
Comme cela a été mentionné par M. Stoffer, j'ai toujours énormément de compassion et de passion pour le poste, et c'est pourquoi j'étais si heureux d'avoir l'occasion de venir ici et de m'adresser à vous ce matin. Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Godfrey.
Pour la gouverne des témoins, je tiens à préciser que l'objet du comité est de préparer assez rapidement son rapport.
• 1030
Pour être franc avec vous, nous avions espéré faire ce travail
et soumettre les renseignements ainsi recueillis à la Chambre des
communes, au premier ministre, au ministre des Finances et à
d'autres avant le budget qui s'en vient. Comme vous le savez, la
date du dépôt du budget a été avancée et nous ne pourrons sans
doute pas atteindre notre but. Nous nous engageons à intervenir
personnellement auprès de M. Martin, mais nous allons préparer un
mémoire et le déposer à la Chambre, nous l'espérons, d'ici Noël.
Voilà donc ce que nous comptons faire. Une fois que ce rapport aura été préparé, nous vous en ferons parvenir des exemplaires. Je suis certain qu'il exigera encore davantage de lobbying.
Quoi qu'il en soit, nous vous remercions de nous avoir exposé la situation. Nous vous offrons nos meilleurs voeux pour votre retraite et souhaitons bonne chance à vos collègues en ce qui concerne leurs responsabilités et leur avenir.
Merci.
Nous allons faire une courte pause après quoi l'on nous entretiendra des problèmes de la pêche du merlu du Pacifique.
Le président: Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le Comité permanent des pêches et des océans va maintenant examiner les problèmes de la pêcherie du merlu du Pacifique.
Je pense que nous allons commencer avec Norm Sigmund. Allez-y, Norm.
M. Norman Sigmund (témoignage à titre personnel): Je m'appelle Norman Sigmund. Je suis pêcheur depuis 35 ans. Je suis président du Trawl Council of British Columbia et je travaille dans la pêcherie du merlan depuis que nous avons déchargé le premier poisson. J'apprécie l'occasion qui m'est ici donnée de comparaître devant le comité et j'espère vous donner des renseignements utiles quant à l'état de la pêcherie du merlu le long de la côte Ouest.
Les demandes irrationnelles et dangereuses de la Canadian On-shore Hake Coalition doivent être passées en revue. La question de la transformation à terre versus la transformation à bord de navires-usines ne devrait même pas se poser. Avec l'accord actuellement en place, si les transformateurs à terre assurent la production, 80 p. 100 du poisson va à terre et 20 p. 100 va aux navires-usines étrangers.
• 1100
Les deux pêcheries exploitent différemment le merlu. Les
pêcheurs d'alimentation des navires-usines pêchent par petits coups
de filet tout au long de la journée pour alimenter régulièrement en
poisson frais le navire-usine, ne quittant les champs de pêche que
pour se réapprovisionner en carburant et en nourriture tous les dix
jours environ. Le pêcheur basé à terre préfère, lui, prendre 50 à
60 tonnes de poissons pour retourner au port, perdant ainsi chaque
jour le contact avec les lieux de pêche.
Ce système fonctionne bien pour le pêcheur basé à terre. Le bateau de pêche du navire-usine trouve le poisson, prend 10 ou 15 tonnes dans un coup de filet et le pêcheur basé à terre peut alors venir écrémer le ban de poissons, économisant des centaines d'heures-hommes et des milliers de dollars en carburant qu'il aurait consacrés à la recherche du poisson. Avec plus de 1 600 milles carrés de lieux de pêche du merlu tout à côté d'Ucluelet, la nécessité d'un repéreur de poisson est incalculable. Le navire-usine a également été utilisé comme important stabilisateur de marché et filet de sécurité pour la flotte.
En 1997, les Ucluelet Seafood Processors n'ont pas tourné, les conditions du marché étant si mauvaises. De nouveau en 1999, les Pacific Coast Processors n'ont pas fonctionné à cause de problèmes financiers, revenant la saison suivante sous le nom de Canadian Seafood Processors. Pendant la saison de l'an 2000, lorsque le merlu n'est pas revenu aux fonds de pêche d'été au large de la côte Ouest et que le coût de déplacement du poisson de l'extrémité nord de l'île s'est avéré prohibitif, les usines d'Ucluelet n'ont une nouvelle fois pas ouvert leurs portes. En 2001, 80 p. 100 du quota a été réclamé par les transformateurs à terre, et lorsque les chiffres définitifs ont été établis, on a constaté que 57 p. 100 du quota était resté dans l'eau—41 656 tonnes et 83 395 312 livres de poisson sont restés dans l'eau.
Que ces quatre années ont-elles eu en commun? La flotte de pêche du merlu a été sauvée par les navires-usines étrangers. Si tout le quota avait été attribué aux usines à terre, un pourcentage important de la flotte de pêche au chalut serait en très mauvaise posture, moi-même compris. Avec de tels résultats affichés quatre saisons sur cinq, vous pourrez comprendre la crainte des pêcheurs face à la possibilité que le quota tout entier soit attribué aux usines à terre. La perte du filet de sécurité offert par les navires-usines sonnerait le glas des flottes.
Les transformateurs ne veulent pas d'un libre marché. Ce qu'ils exigent, c'est un monopole. Le secteur de la transformation aimerait que vous croyiez que le problème se sont les navires-usines, alors qu'en réalité, c'est sa stratégie de marché qui a amené sa ruine. Avec l'échec du marché du surimi cette saison encore, les deux sociétés se démènent de nouveau pour essayer d'arracher un marché quelque part. Elles n'avaient de nouveau rien fait pour se préparer à un éventuel fléchissement du marché du surimi. Deux semaines avant le début de la saison, les United Seafood Processors ont enlevé quelques machines à fileter d'un vieux chalutier-usine, et nous étions censés être impressionnés par ce nouvel investissement. Les Canadian Seafood Processors ont fait encore moins.
Les transformateurs recourent à la désinformation pour manipuler l'opinion publique. Ils avaient dit que les pêcheurs avaient tardé à ouvrir la saison de la pêche intérieure. C'était faux. Les sociétés n'ont accepté de négocier de bonne foi qu'une fois que les USP avaient terminé le réoutillage de leur nouveau matériel et étaient prêts à faire de la transformation. Les CSP n'allaient pas commencer à produire tant que nous ne pouvions pas garantir la pleine production.
Un élément qu'il ne faudrait pas ignorer est que les pêcheurs ont cette année accepté une réduction de prix de 30 p. 100 afin de permettre aux usines à terre de tourner alors que les employés de ces usines sont demeurés les mieux payés en Amérique du Nord.
Sans la concurrence des navires-usines, vous ne verriez jamais de production de produits de qualité supérieure aux grandes usines d'Ucluelet. Ces usines appartiennent à des conglomérats internationaux qui sont là pour une seule raison—du poisson bon marché—et qui ont fourni amplement de preuves qu'il faut qu'ils y soient contraints pour fabriquer des produits de qualité supérieure et à fort coefficient de main-d'oeuvre. Ils ne le feront pas d'eux-mêmes. S'ils obtenaient le monopole qu'ils reluquent, vous ne verriez pas les cinq à six mois de travail qu'il devrait y avoir dans ces usines pour la production de produits de qualité comme les filets, le produit étêté et éviscéré, voire même les saucisses de merlu. Ce serait dans leur intérêt d'y installer encore plus de machines et de transformer le poisson plus rapidement, avec moins de main-d'oeuvre—pour pouvoir broyer le poisson pour en faire du surimi pendant deux mois, pour ensuite nettoyer les usines et repartir jusqu'à la saison suivante. La Tyson Foods, la société mère des USP, fait déjà cela en Alaska, et la Daerim, la société mère des CSP, a besoin de surimi à l'état brut pour ses usines de Kamaboko en Corée.
Que la pêcherie ne dure que deux mois ne préoccupe ni le village ni la West Coast Reduction: la production de surimi utilise énormément d'eau et le village tire beaucoup de revenus de la taxe d'eau. La West Coast Reduction, quant à elle, se débrouillera très bien avec ses contrats de déchets. Ce sont les employés des usines, qui perdront leur emploi à long terme, et les pêcheurs, qui perdront leur revenu du fait du monopole exercé par les transformateurs, qui seront les vraies victimes.
• 1105
Nous avons l'occasion de bâtir ici le long de la côte Ouest
une pêcherie à long terme susceptible d'avoir un profond effet sur
la stabilité économique de la région, si nous ralentissons un peu
les choses et apportons au projet le soin et la réflexion
nécessaires. Avec une récolte réaliste et durable de plus de
100 millions de livres de merlu par an, la localité, les pêcheurs,
les travailleurs, les propriétaires d'usines—tout le
monde—devraient pouvoir bénéficier de cette immense ressource
naturelle, mais pas si cela est fait sur le dos de certains. Ces
grosses compagnies n'ont pas manifesté les qualités de leaders mûrs
dont il faudrait qu'elles fassent preuve pour que l'on veuille leur
confier cette merveilleuse ressource naturelle.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Sigmund.
Nous allons maintenant entendre Madame le maire, Diane St. Jacques. Merci, madame le maire, de nous accueillir dans votre ville.
Mme Diane St. Jacques (maire d'Ucluelet): Merci, monsieur le président. Bonjour tout le monde.
Je tiens à vous souhaiter la bienvenue ici à Ucluelet, en tant que maire de la ville et également en tant que présidente de la Canadian Hake On-shore Coalition. La Canadian Hake On-shore Coalition a été créée au printemps de l'an 2000 dans le but de fournir aux membres des localités touchées un véhicule pour exprimer leur opposition quant à la façon dont le MPO gère à l'heure actuelle la pêcherie du merlu du Pacifique.
Je sais que vous êtes venus de loin pour venir nous rencontrer, et nous tenons à vous remercier très sincèrement des efforts que vous avez déployés. Vous allez entendre un certain nombre de personnes qui vont vous entretenir de la pêcherie du merlu et de l'incidence qu'a sa gestion actuelle ici le long de la côte.
J'aimerais aborder cette même question, mais d'un point de vue légèrement différent. Je vais commencer par passer en revue les conséquences de l'actuel régime de gestion et expliquer, du point de vue des collectivités, pourquoi nous sommes si opposés à la transformation côtière. Je vous parlerai ensuite de ce à quoi devrait ressembler l'avenir de cette industrie et de ce que vous-même, en tant que comité, pourriez faire pour nous aider à atteindre nos objectifs.
Pour vous situer un peu les choses, il vous faut comprendre que la transformation côtière du merlu du Pacifique est devenue une importante activité économique dans toute la région d'Alberni-Clayoquot.
Cette industrie britanno-colombienne représente plus de 500 emplois directs et une masse salariale annuelle de plus de 7,9 millions de dollars; environ 500 millions de dollars en investissements dans la région; plus de 679 000 $ au titre d'achats annuels de services tels l'électricité, les égouts et, certainement, l'eau; plus de 1,6 million de dollars en contributions annuelles directes à des régimes tels l'assurance-emploi, les indemnités pour accident du travail, le RPC, le PSM, etc. pour les travailleurs de la Colombie-Britannique; et environ 4,7 millions de dollars en investissements visant la protection de l'environnement, ce qui est si important pour nous tous.
Cette industrie a également contribué à la création indirecte de possibilités d'affaires et d'emplois découlant de la production, de la vente et de la distribution de produits à valeur ajoutée dont la vente en gros se chiffre à plus de 40 millions de dollars, ainsi que des retombées économiques autres et la création de nouvelles entreprises, comme par exemple l'usine de la West Coast Reduction à Nanaimo, qui peut employer jusqu'à 50 personnes.
Bien que le fait que ces avantages soient menacés par la transformation en navire-usine soit une raison suffisante, il y a beaucoup d'autres raisons pour lesquelles nous nous y opposons. Premièrement, il y a l'illogisme des politiques. Je ne vais pas consacrer beaucoup de temps ici à passer en revue l'historique de cette pêcherie, car je pense que d'autres vont traiter de cela plus dans le détail. J'aimerais néanmoins souligner que d'importants investissements dans des usines et des infrastructures physiques ont été consentis dans nos localités sur la base des politiques pratiquées par le MPO entre 1992 et 1999 et selon lesquelles la transformation au large des côtes allait être éliminée à la fin de cette saison-ci—ce qui ne sera peut-être encore une fois pas le cas—et pendant la période de recul progressif du traitement au large des côtes, la transformation côtière, avec ses avantages connexes, allait constituer la pêcherie prioritaire, la transformation au large des côtes devant correspondre à la pêcherie excédentaire. Encore une fois, ce n'est pas ce qui a été vécu. De fait, les livraisons d'excédents de merlu au large des côtes finissent par concurrencer les livraisons prioritaires, et le merlu prioritaire est en fait livré aux navires-usines.
Comme je l'ai déjà dit, la transformation côtière est une industrie locale à valeur ajoutée qui fournit des emplois et des avantages dont ont beaucoup besoin les localités comme Ucluelet et Port Alberni. Les avantages économiques procurés à ces localités par la transformation au large des côtes en navire-usine sont négligeables. Les transformateurs à terre sont des citoyens qui paient des impôts, des notes d'électricité, d'égout et d'eau, ainsi que des prestations comme les indemnités pour accident du travail et le RPC, que j'ai évoqués tout à l'heure. Ajoutez cela aux investissements requis en vertu des normes environnementales très strictes et des régimes de contrôle et cela vous donne les coûts d'affaires normaux en Colombie-Britannique. Ces coûts ne sont pas subis par les transformateurs au large des côtes qui sont exemptés des mêmes exigences. Non seulement cela est injuste en principe, mais cela empêche également les transformateurs côtiers d'être aussi concurrentiels qu'ils pourraient l'être.
• 1110
La Canadian Hake On-shore Coalition ne demande pas que les
transformateurs côtiers soient exemptés de ces frais ou règlements,
mais seulement que le terrain de jeu soit égal.
La transformation à terre est censée être prioritaire. Cela est peut-être vrai sur papier, mais, dans les faits, le système des navires-usines joue contre les transformateurs côtiers. La saison pour le secteur côtier est artificiellement écourtée, les livraisons au large des côtes font concurrence aux livraisons côtières, et les transformateurs côtiers sont privés d'un volume constant et de la qualité de prise auxquels ils ont droit.
Les transformateurs côtiers ont plus de capacité qu'il ne leur en faudrait pour absorber ce qui est leur est dû. C'est là l'une des justifications utilisées pour maintenir la pêcherie d'approvisionnement des navires-usines étrangers—on invoque une insuffisance de capacité du côté des transformateurs côtiers. Cela était peut-être vrai il y a plusieurs années déjà, mais ce n'est plus le cas. Les transformateurs côtiers ont la capacité de transformer la prise canadienne. Encore une fois, je pense que d'autres intervenants vous entretiendront davantage de cela.
Les gens sont nombreux à croire à l'argument voulant que les transformateurs côtiers ne puissent pas ni ne veuillent livrer concurrence, surtout côté prix. Tel n'est pas le cas.
Premièrement, les transformateurs côtiers se livrent concurrence les uns aux autres ainsi qu'aux transformateurs américains. Il y a au moins cinq usines à l'île de Vancouver et trois ou quatre autres à une bonne distance de livraison de l'État de Washington.
Deuxièmement, les transformateurs côtiers seraient heureux de livrer concurrence à qui que ce soit, à condition que les règles du jeu soient les mêmes pour tous, mais ce n'est pas le cas à l'heure actuelle.
Troisièmement, le prix du merlu est artificiellement élevé sur notre marché précisément parce que la flotte étrangère jouit d'un certain nombre d'avantages par rapport aux entreprises côtières.
De mon point de vue, l'inéquité ici est tout à fait frappante. Le problème est par ailleurs urgent. Je crains que nous n'ayons pas d'industrie côtière viable si nous ne corrigeons pas ces inégalités.
• 1115
J'aimerais être très claire au sujet d'une chose. En nous
opposant à la transformation au large des côtes ou à bord de
navires-usines étrangers, nous ne préconisons pas en même temps que
le gouvernement vienne appuyer une entreprise ou un type d'activité
économique par rapport à un autre. Plutôt, nous demandons que tous
ceux qui participent à cette industrie soient traités de façon
équitable.
Si la décision du gouvernement d'autoriser les livraisons de merlu aux navires-usines s'appuie sur le désir d'offrir aux pêcheurs une concurrence pour leurs prises, alors cette concurrence ne devrait pas être subventionnée, comme c'est le cas à l'heure actuelle. Si les partenaires de ces coentreprises—la flotte polonaise et les pêcheurs—veulent transformer du merlu, pourquoi ne mènent-ils pas cette activité à terre? Est-ce parce que le fait de rester au large des côtes leur permet d'éviter les règles et les coûts qui sont imposés à tous les autres? Encore une fois, nous nous demandons si cela est juste.
Vous pouvez constater ce que représente cette situation en matière d'emplois et d'incidences économiques. N'oubliez pas que les activités de transformation côtière créent des emplois et de l'activité économique à valeur ajoutée. Par exemple, chaque millier de tonnes de merlu rapatrié pour la transformation à terre créerait quatre à six années-personnes d'emploi. La question n'est donc pas vraiment de savoir quelle partie de l'industrie nous devrions choisir d'appuyer et(ou) de remplacer; il s'agit tout simplement de savoir comment faire pour veiller à ce qu'il y ait une industrie à appuyer à l'avenir.
L'augmentation et la stabilisation de l'approvisionnement de merlu disponible pour les transformateurs côtiers sont essentielles à la viabilité à long terme et à la réussite de l'industrie de transformation côtière elle-même. Je ne saurais trop insister sur le fait qu'il nous faut cette activité économique à terre. Nos collectivités ont besoin d'emplois et des avantages découlant des investissements que je vous ai décrits plus tôt.
• 1120
Notre base de ressources allant rétrécissant—et cela se passe
partout, que l'on parle foresterie ou que l'on parle pêche—il nous
faut tirer jusqu'au dernier dollar de ces ressources. Cela veut
dire que nous ne pouvons pas exporter des ressources brutes comme
le merlu, mais c'est précisément ce que nous faisons en autorisant
la transformation du merlu au large des côtes.
Permettez que j'exprime les choses autrement. Quelle serait votre position si un constructeur automobile à bord d'un navire ou d'une barge et employant des travailleurs de l'automobile étrangers au lieu de Canadiens était autorisé à s'ancrer au large d'Oshawa et était exempté des lois canadiennes en matière de travail et d'environnement? Si vous trouvez cela trop ridicule, comme c'est mon cas, alors songez à un exemple dans l'industrie forestière. Quelle serait alors votre position? J'imagine que vous lutteriez contre un tel scénario, et si c'était bel et bien le cas, vous seriez en train d'épouser la position qui est la nôtre aujourd'hui dans ce dossier.
Je tiens à souligner que le rapatriement de la transformation du merlu sur la terre ferme ne viendrait pas arracher des avantages aux pêcheurs. Ce qui compte, c'est établir dans nos collectivités une base économique durable capable de soutenir toute la collectivité, englobant les pêcheurs, les transformateurs, les fournisseurs et les activités industrielles connexes. Ce qui compte, c'est ajouter un maximum de valeur à ces ressources avant de les vendre. S'agissant du merlu, cela veut dire qu'il faut assurer sa transformation à terre.
Comment réussir notre avenir? Encore une fois, la réponse est simple: il faut niveler le terrain de jeu pour tous ceux qui ont des intérêts dans cette activité économique.
Il fut un temps où les transformateurs étrangers jouaient le rôle important en achetant auprès de nos pêcheurs locaux du poisson qui n'était ni acheté ni transformé à terre, mais cela remonte à il y a plus de 20 ans. Depuis lors, cette industrie, et notre base économique dans les communautés côtières, ont changé. N'est-il pas temps que notre gestion de la pêcherie change elle aussi?
Je comprends que vous êtes confrontés à de nombreuses questions. Je vous exhorte à vous concentrer sur celle-ci. Je vous exhorte à retourner à Ottawa et à demander au ministre des Pêches et à son ministère pourquoi l'examen prévu de cette pêcherie n'a pas été entrepris. Pis encore, si cette étude a été lancée, pourquoi nous y avons-nous pas participé?
Je vous exhorte à intervenir en recommandant une solution juste au problème car je vous garantis qu'un problème existe bel et bien. La solution c'est l'élimination de la transformation en navire-usine étranger de notre merlu du Pacifique, le nivellement du terrain de jeu entre transformateurs et le rapatriement définitif de cette industrie et des emplois et des avantages économiques qu'elle représente. Le plus important est que cette solution est à notre portée si nous travaillons ensemble.
À cet égard, nous avons discuté de cette question avec des membres et des leaders de la communauté. Nous ne disposons ici aujourd'hui que d'une période de temps limitée, alors je ne peux pas vous exposer toutes les réactions que nous avons reçues, mais permettez que je vous en esquisse un certain nombre.
Nous avons une résolution et une lettre de soutien du Sommet des Premières nations. Nous avons également travaillé avec le Coastal Community Network ainsi qu'avec plusieurs députés fédéraux et provinciaux de la Colombie-Britannique. Lors du dernier congrès annuel de l'Union of B.C. Municipalities, nous avons adopté à l'unanimité une résolution d'appui pour la position que nous vous avons présentée.
Merci du temps que vous m'avez accordé. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Le président: Merci, madame le maire.
Monsieur Bourke, représentant les USP.
M. Paul Bourke (directeur, Ucluelet Seafood Processors): Bonjour. J'aimerais vous faire un bref historique des événements qui nous ont amenés jusqu'ici.
Il y a environ 20 ans, nous avons adopté une limite de 200 milles pour protéger nos ressources et les mettre à la disposition de Canadiens. L'idée était de nous assurer un accès à ces ressources et leur protection. Lors de l'adoption de la limite de 200 milles, à la fin des années 70, il y avait ici des navires-usines étrangers qui pêchaient le merlu. C'est alors qu'a été créé le consortium du merlu dont l'objet était d'un jour rapatrier cette pêcherie.
Le premier objectif a été de permettre aux pêcheurs canadiens de prendre le poisson. Il a fallu attendre 1990 environ pour que tout le poisson soit pris par des pêcheurs canadiens. Il y avait beaucoup de résistance à cela et le processus avait demandé longtemps, mais ce fut chose faite il y a environ dix ans. Pendant ces dix années, nous n'avons pas pu récupérer notre dû et accéder à ce poisson à terre, et c'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui, pour vous demander votre aide.
• 1125
Depuis le milieu des années 80, nous présentons des instances
au ministère et aux différents ministres des Pêches qui se sont
succédé, disant que nous pouvons prouver que nous sommes en mesure
d'utiliser cette ressource et de la transformer à terre et que nous
voulons y avoir accès. Chacun des ministres des pêches successifs
m'a dit: «Si vous consentez l'investissement, si vous trouvez le
moyen d'y parvenir, vous aurez le poisson. Ne vous en inquiétez
pas. C'est ainsi que cela se passe au Canada. Ce sont nos
ressources et elles sont là pour nous».
Au début des années 90—en 1991, je pense—il y a eu une série de négociations et de réunions avec le ministère et les pêcheurs. En gros, le ministère a déclaré publiquement que l'objet de la pêcherie était de s'installer à terre et que l'autre volet de l'industrie allait progressivement disparaître. Le consortium du merlu, qui pêchait et approvisionnait les navires-usines étrangers, allait prendre fin une fois la capacité rapatriée par le Canada.
C'est sur cette base que nous avons travaillé. Il nous fallait ici des infrastructures. Il nous fallait des réseaux d'adduction d'eau et d'égouts améliorés. Il y a plusieurs années, nous avons fait une demande de financement en vertu du programme d'infrastructure, le programme de six milliards de dollars dont peuvent se prévaloir toutes les localités du pays—qu'il s'agisse de Vancouver ou de n'importe quelle autre localité. Le gouvernement nous a dit qu'il financerait l'infrastructure si nous faisions l'investissement. Nous avons donc fait l'investissement.
Nous avons, dans cette seule localité, investi entre nous 20 millions à 30 millions de dollars. Il y a encore 20 millions de dollars à Nanaimo. Le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial ont d'importants investissements ici dans notre réseau d'infrastructure. Je pense que la formule prévoit un tiers pour le fédéral, un tiers pour le provincial et un tiers pour la localité. Il s'agit d'un montant d'argent considérable.
L'argent offert par le village pour le système d'égouts, par exemple, a en fait été versé par les transformateurs. Nous avons engagé nos biens et avons un programme de remboursement sur dix ans. Nous payons 10 000 $ par mois pour utiliser le système trois mois dans l'année. C'est beaucoup d'argent.
Depuis que nous avons consenti cet investissement, nous n'avons pas eu accès au poisson dont nous avons besoin. Au cours des deux dernières années, nous n'avons jamais obtenu le volume quotidien de poisson que nous avions demandé. Pas une seule fois. Nous avons fonctionné cette année avec des livraisons très limitées. Vous ne pouvez pas faire d'argent avec un poisson à haut volume et à faible valeur à moins de pouvoir compter sur des livraisons régulières.
Il y a trois ans, M. Anderson, qui était alors ministre des Pêches, après beaucoup de négociations avec les pêcheurs... Nous n'avons jamais réussi à le rencontrer, mais nous lui avons envoyé un mémoire. Il a annoncé une entente triennale. Cette entente n'a jamais été discutée avec les transformateurs. Elle n'a jamais été discutée avec la collectivité. Elle est tout simplement sortie de quelque part. Elle nous a été imposée à la dernière minute. Nous ne l'avons jamais acceptée. Nous n'avions pas fait partie du processus. Depuis, on raconte partout que nous avons accepté cet accord de trois ans, ce qui est tout à fait faux.
Nous avons donc toléré cela pendant trois ans, et les trois années ont passé. Nous voulons que cette transformation au large des côtes prenne fin. Il est incroyable qu'un pays occidental fasse venir des gens de Pologne et de Russie pour transformer son poisson. Nous avons la technologie pour le faire. Nous avons le matériel nécessaire. Nous en avons fourni la preuve. Vous avez vu nos usines. Vous avez vu les investissements que nous avons consentis. En dépit de ce qu'a dit M. Sigmund, je peux vous assurer que nous avons dépensé des millions de dollars sur ce matériel. Nous avons des usines très modernes. Nous sommes très diversifiés dans ce que nous faisons.
Au départ, en 1991, lorsque nous avons lancé notre activité de transformation ici à Ucluelet Seafoods, nous produisions des filets et nous faisions du bon travail. Mais nous avons été contraints d'abandonner cette activité, car la flotte polonaise bradait son produit sur le marché international, le marché de Vancouver et le marché de toute l'Amérique du Nord, vendant son produit bien moins que cela ne lui coûtait de le produire. Elle continue d'ailleurs de le faire.
Il nous faut concurrencer ces compagnies polonaises partout dans le monde. Je me rends à des foires commerciales et elles sont dans le kiosque d'à-côté. Elles ne subissent aucun des coûts d'affaires qui nous sont imposés à nous. Nous n'essayons pas d'échapper à ces coûts. C'est une donnée de départ. Nous devons protéger l'environnement et observer ces lois, et cela coûte des millions de dollars.
Elles ont à bord de ces navires des usines de farine de poisson qui déversent dans l'eau des déchets gélatineux, la forme de déchet la plus toxique de la transformation du poisson. Nous ne sommes pas autorisés à faire cela. La West Coast Reduction a dû dépenser deux millions de dollars, je pense, pour régler son seul problème de déchets gélatineux. Pourquoi ces compagnies étrangères sont-elles autorisées à faire cela sur le seuil de notre porte, au beau milieu d'une biosphère internationale et d'un parc national? C'est une situation absurde. Ce n'est pas juste.
De façon générale, au Canada, les pêcheries ne rapportent pas grand-chose au gouvernement. Elles fournissent des emplois et des avantages indirects pour les contribuables. La seule façon pour que cela fonctionne pour tout le monde c'est qu'un nombre maximal de personnes y soient employées. Notre entreprise compte à l'heure actuelle quelque 550 employés, et il y a de la place pour plusieurs centaines encore. Tout ce qu'il nous faut, c'est un accès à ces ressources.
• 1130
Nous espérons que vous pourrez nous aider, car nos
interventions auprès de l'actuel ministre et du ministère n'ont
jusqu'ici rien donné du tout. Nous vous demandons donc de faire
tout votre possible pour influencer le ministre et pour
sensibiliser le Parlement à notre situation.
Merci beaucoup.
Le président: Merci, monsieur Bourke.
M. Bray, de Port Fish, Port Alberni.
M. Jock Bray (président-directeur général, Port Fish, Port Alberni): Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs. Good morning.
Je m'appelle Jock Bray et j'oeuvre depuis plus de 30 ans dans l'industrie des produits de la mer de Colombie-Britannique. Je suis aujourd'hui associé de Port Fish, qui est l'une des usines de transformation du merlu de Port Alberni dont il a été question ici. Nous sommes également le gestionnaire d'une autre usine de produits de la mer à Delta, du nom de River Seafoods. La River Seafoods transforme en filets frais des poissons de fond qu'elle vend sur le marché nord-américain.
Paul a un petit peu retracé l'histoire de notre industrie. J'aimerais pour ma part traiter de la confusion et des mythes entourant certaines questions très importantes: accès prioritaire au poisson, capacité des usines, concurrence et prix.
Priorité de la transformation à terre pour le merlu—théorie versus réalité... En théorie, comme vous l'avez peut-être entendu dire, un accès prioritaire est accordé aux transformateurs à terre pour la ressource, tandis que les transformateurs au large des côtes sont, en théorie, censés ne recevoir que le merlu excédentaire. En réalité, ce n'est pas ainsi que fonctionne la pêcherie. C'est en fait tout le contraire. Les transformateurs au large des côtes se voyant allouer une partie de la prise en même temps que les transformateurs à terre, et les transformateurs au large des côtes étant en définitive subventionnés et pouvant donc offrir un prix supérieur aux pêcheurs, les transformateurs à terre sont approvisionnés une fois satisfaits les besoins des transformateurs au large des côtes.
Cela ressemble-t-il à vos yeux à un accès prioritaire? Lorsque mon usine tourne pendant une saison à 20 p. 100 de sa capacité faute d'approvisionnement, je sais qu'en tant que transformateur à terre je n'ai pas un accès prioritaire à la ressource.
Capacité—mythe versus réalité... Les pêcheurs disent souvent, comme Norm l'a fait ce matin, que les transformateurs côtiers n'ont pas la capacité de transformer leur TAC. Cela était peut-être vrai autrefois, mais, comme vous l'avez sans doute constaté hier soir lorsque vous avez visité certaines des usines ici, l'industrie s'est améliorée, a consenti les investissements et a amplement la capacité requise pour absorber tout le total autorisé des captures.
Il y a un graphique que vous devriez avoir devant les yeux. Il a pour titre «Capacité de transformation à terre, saison 2001». Ce rapport donne les besoins en matière de production et le volume livré aux quatre principales usines. Davantage de précisions sont fournies, mais ce sont là les principaux éléments.
En vérité, si vous y jetez un rapide coup d'oeil, vous verrez que cela paraît un peu confus au départ. Les sigles en haut de chaque colonne représentent les noms de l'usine concernée: UFP, Utility Food Processors; CSP, Canadian Seafood Processors; Port Fish; et Robert Wholey Company. Vous voyez mois par mois et jour par jour les volumes livrés, les volumes transformés, les volumes non utilisés, la capacité totale et le pourcentage non utilisé de la capacité. Si vous prenez les totaux en fin de mois, cela raconte bien l'histoire. En juin, par exemple, si vous regardez le volume livré comparativement à la capacité totale, vous verrez qu'il y avait quelque 8 280 tonnes non utilisées. La capacité utilisée n'a été que de 1,43 p. 100. En juillet...
M. John Cummins: Jock...
Le président: John Cummins a une question pour vous, monsieur Bray.
M. John Cummins: Pourriez-vous expliquer ces désignations? Je pense comprendre ce que sont le volume livré et le volume transformé, mais je ne comprends pas «volume non utilisé».
M. Jock Bray: Le «volume non utilisé» est la quantité de poisson que nous autres transformateurs avons dit vouloir faire livrer dans nos usines pour satisfaire nos besoins pour la saison. Ce chiffre, pour la saison, a été établi par nous à environ 790 tonnes, je pense—est-ce bien cela, Paul?—pour nous tous. Le «volume non utilisé» est donc la différence entre ce qui a été livré et le chiffre magique que nous visions.
• 1135
Ce chiffre ne représente cependant pas notre capacité totale.
Notre capacité totale serait plutôt de 900 et quelques tonnes par
jour. Ces 790 tonnes que nous demandions donc correspondaient à ce
qu'il nous aurait fallu, au minimum, pour réussir notre saison.
Cela est-il clair, maintenant John?
M. John Cummins: Le volume livré chez UFP en juin a été de 100 tonnes, je suppose. Le volume traité est supérieur. Il est de 120 tonnes. Comment pouvez-vous transformer plus de poisson que ce qui vous est livré?
M. Jock Bray: Bonne question. C'est sans doute une faute typographique.
M. John Cummins: Très bien.
M. Jock Bray: Je revérifierai cela pour vous, John, mais il s'agit vraisemblablement tout simplement d'une faute typographique.
M. John Cummins: Mais les deux volumes auraient dû être identiques...
M. Jock Bray: Ils auraient dû être identiques.
M. John Cummins: ...logiquement.
M. Jock Bray: Oui.
M. John Cummins: Le «volume non utilisé» est la différence entre la capacité de transformation et ce qui a été livré.
M. Jock Bray: Oui, c'est cela, grosso modo.
M. John Cummins: Très bien.
M. Jock Bray: Si vous parcourez le mois, vous voyez que la capacité utilisée en juin s'est chiffrée à seulement 1,3 p. 100, alors qu'en juillet elle a été de 56,82 p. 100. Je veux parler ici de la capacité de l'UFP. C'est le total qui compte. Il n'y a pas de moyenne ici. De toute façon, si vous parcourez le mois, vous voyez qu'on nous a livré bien moins de la moitié du poisson correspondant à notre capacité, ou en tout cas à notre objectif pour réussir l'année.
Les pêcheurs ont dit que les usines ne possèdent pas la capacité nécessaire. Eh bien, ce tableau fait clairement ressortir que nous avons plus que cela en capacité. Tout au long de l'été, nous suppliions les gens à genoux pour avoir du poisson. En fin de saison, lorsque le ministre nous a enfin consenti la réserve, nous avons dû supplier les gens pour du poisson jusqu'à ce qu'il n'en soit plus resté un seul dans l'eau. Les pêcheurs ne peuvent en tout cas pas se plaindre car nous étions ouverts et étions tous les jours prêts à prendre du poisson, mais il n'y avait à l'époque plus assez de poissons dans l'eau.
J'aimerais tirer au clair une déclaration faite par Norm tout à l'heure: il a dit que nous n'avions pas la capacité. Le total des prises autorisées pêchées—je pense que Norm a fait état de 57 p. 100—aurait pu être sensiblement supérieur si les pêcheurs avaient livré aux usines de transformation à terre dès le début de la saison, typiquement début mai. Or, ils ont tardé à nous livrer en mai. Ils ont tardé à nous livrer en juin. Les coentreprises étaient censées démarrer en juin. Nous avons porté plainte. Nous avons fait toutes sortes de demandes au ministre et au MPO afin qu'ils rectifient la situation. Nous avions même proposé un plan à court terme en vue de régler la situation, et vous pourrez le voir si cela ne vous ennuie pas trop de jeter un coup d'oeil sur la lettre que j'ai fait distribuer. Il s'agit d'une lettre que les transformateurs ont rédigée. Nous l'avons envoyée le 8 juin au ministre Dhaliwal. Nous y exposons la situation qui existait à l'époque. Je peux vous en lire un petit extrait.
-
La Hake Fishermen's Association a injustement ligoté la flotte en
demandant un prix supérieur pour bloquer les négociations afin que
les usines à terre ne puissent pas utiliser la réserve.
J'aimerais dire à ceux d'entre vous qui ne comprennent pas cette question de réserve que lorsque le total autorisé des captures est donné pour l'année, le ministre en attribue 50 000 tonnes aux usines à terre. L'an dernier, je pense que le total était de 94 000 tonnes. La différence a été partagée en deux, et la moitié de cette ressource a été attribuée aux coentreprises, la moitié étant versée à la réserve. La réserve devait être attribuée à la partie de l'équation qui pouvait l'utiliser, la priorité devant être donnée aux usines à terre.
Eh bien, cela est absurde pour un pêcheur. Croyez-moi, si j'étais pêcheur, mon choix serait fait, car si une coentreprise paie le double de ce que peuvent se permettre les usines à terre, alors je voudrais qu'un maximum de mon poisson soit livré aux navires-usines.
• 1140
Il se trouve que le 1er juillet était la date à laquelle le
Sous-comité du merlu devait vérifier les débarquements effectués
aux usines côtières. Il s'agissait de déterminer quelle partie de
la réserve serait accordée à la coentreprise si les usines côtières
ne pouvaient l'absorber.
Le 2 juillet, les pêcheurs ont finalement accepté de travailler après avoir refusé de sortir et s'être mis en grève, en quelque sorte. Ils ont finalement accepté d'aller travailler et de livrer du poisson aux usines côtières pour un demi cent de plus que ce que nous demandions, et nous avons immédiatement accepté. À partir de là, ce conflit au sujet du poisson de réserve est devenu une énorme affaire car les pêcheurs faisaient pression sur le MPO afin qu'il accorde cette réserve à la coentreprise. Manifestement, ils se sont abstenus de pêcher pour les usines côtières pendant les deux mois précédents afin de pouvoir livrer le poisson de la réserve aux navires-usines étrangers au prix supérieur. Comme ils disent, cela coule de source.
Cependant, pour vous expliquer un peu mieux, les usines côtières ne pourront jamais soutenir la concurrence étrangère, en l'occurrence polonaise, les coentreprises subventionnées par l'État, qui ne paient pas les avantages sociaux canadiens et pas d'assurance-accident, qui ne sont pas requis de peser précisément le poisson—ce qui ouvre la porte à tous les abus—et qui n'emploient pas de Canadiens à bord. Le prix de 14,5 « la livre que paient les navires-usines ne reflète pas le marché. Les transformateurs canadiens ne peuvent concurrencer les Polonais sur leur marché, du fait que nos produits sont frappés de droits de douane élevés.
Les transformateurs canadiens sont concurrentiels par rapport à leurs homologues américains—ou ils l'étaient à l'époque—qui vendent les produits à base de merlu sur un marché similaire, tout en offrant à leurs pêcheurs entre 2,5« et 4« US la livre. Je pense que la moyenne, à la fin de l'année, était de 3,5« US la livre.
Le prix offert par les Polonais est artificiellement gonflé, avec la complicité de nos pêcheurs, dans le but de conserver une part de la prise autorisée. Une usine en particulier, celle de Port Alberni, avait offert 7,5« aux pêcheurs dès le début de la saison, le prix que les pêcheurs demandaient, mais ces derniers ont répondu ensuite que cela ne suffisait pas. Or, si vous ajoutez tous les autres coûts que nous absorbions alors, notamment le coût de la validation, les droits de permis et une prime pour l'eau de mer réfrigérée, nous payions plus de 8« la livre.
Ce qui intéresse réellement nos pêcheurs, c'est trouver un moyen d'acheminer une plus grande part de la ressource vers la flotte étrangère. Ils se soucient peu des travailleurs canadiens réduits au chômage—cela a été écrit le 8 juin—quand les usines ne tournent pas. Même après avoir fait l'offre à l'association des pêcheurs, quelques pêcheurs qui étaient sortis en mer nous ont appelés au bout de quelques jours, tout d'un coup, pour nous dire: «Jock, désolé, on nous a dit de rester au port». J'ai dit: «Écoutez, nous vous payons le prix que vous demandez, le poisson est là, et vous laissez passer une occasion, car parfois la meilleure pêche de l'année se fait au début». Ils m'ont dit: «Désolé, nous ne pouvons pas, les pressions sont trop fortes».
À l'époque, nous préconisions une solution à court terme et je vais lire cette partie du texte pour montrer en quoi elle consistait:
-
Les transformateurs ont proposé à plusieurs reprises d'instaurer
une période de 45 jours entre le moment où les pêcheurs s'accordent
avec les usines côtières et le début des livraisons à la
coentreprise afin d'obliger les deux parties à négocier de bonne
foi au début de la saison. Cela garantirait que le Canada aurait sa
part de la PTA américano-canadienne.
—un élément très important des négociations qui se déroulent chaque année entre le Canada et les États-Unis, et il s'agit donc de faire en sorte d'utiliser notre part de cette PTA...
-
et que le poisson arrivé en début de saison soit pêché.
-
La situation précise que nous craignions est maintenant devenue
réalité. La coentreprise est prête à commencer [...] et les
pêcheurs ont fait traîner les négociations par volonté flagrante de
transférer la réserve à la flotte étrangère. Les pêcheurs ont dit
dans des réunions et des conversations téléphoniques que si les
usines côtières étaient prêtes à céder la réserve tout de suite,
eux-mêmes commenceraient à livrer à notre prix.
C'est un chantage flagrant: vous nous donnez la réserve, et nous vous livrons du poisson.
Le président: Pourriez-vous réexpliquer cela? Vous m'avez perdu avec l'histoire de la réserve.
M. Jock Bray: Désolé. Il s'agit encore une fois du problème de la réserve et de la raison pour laquelle ils refusaient de livrer aux usines côtières en début de saison. Comme ils disent, cela coule de source pour les pêcheurs, car s'ils touchent deux fois le prix du poisson et que la réserve est en jeu...
Le président: D'accord, maintenant je comprends.
M. Jock Bray: Donc, ils tardent à livrer les usines côtières jusqu'à ce celles-ci n'aient plus la possibilité d'absorber la réserve car il ne reste plus assez de temps dans la saison pour transformer notre attribution régulière plus la réserve. On nous attribue 50 000 tonnes et nous devons les utiliser. Il faut comprendre l'échéancier en jeu. Ils font traîner les choses jusqu'à ce que nous ne puissions plus utiliser la réserve, et une fois que la réserve est fermement dans leur sac, ils disent, d'accord, maintenant nous allons vous livrer le poisson à votre prix. Périodiquement, au cours de la saison, nous nous asseyons, au fur et à mesure que les usines côtières déclarent leurs débarquements, pour négocier quelle partie de cette réserve sera accordée aux navires-usines étrangers.
Nous avons dit d'accord, nous savons que chaque année les pêcheurs se livrent à ce petit jeu. Pourquoi vous, le MPO, le ministre, n'établissez pas un mécanisme pour forcer les pêcheurs et les usines côtières à négocier un prix juste, pour que la pêche commence et que nous prenions la PTA. Faites en sorte que le poisson soit débarqué. Pour moi, cela allait de soi, mais ce n'est allé nulle part.
Pour ce qui est de cette période de 45 jours, nous savons dit d'accord, éloignez la flotte étrangère de notre zone pendant 45 jours. Permettez-nous de prendre le poisson, de mettre en route nos usines, et de faire en sorte que tout roule bien. Cela nous donne cette fenêtre d'opportunité, prive les pêcheurs du moyen de pression de l'absence de livraison qui fait surgir la question de la réserve. Nous demandons simplement un terrain de jeu égal. Nous avons demandé à ce que la coentreprise soit retirée de l'équation pendant 45 jours afin que tout le monde se mette au travail. Le ministre a répondu non, qu'il allait s'en tenir au plan. Nous ne sommes arrivés à rien.
Le président: Pourriez-vous conclure bientôt, Jock? Nous allons manquer de temps.
M. Jock Bray: Est-ce que je parle trop longtemps? Cela m'arrive souvent.
Je reviens au mythe de l'absence de concurrence. En réalité, il y a beaucoup de concurrence entre les usines côtières. Il n'y a pas de problème de manque de concurrence. Nous avons près de dix usines côtières qui se concurrencent pour le poisson et avec une PTA qui diminue chaque année, la concurrence ne va que s'intensifier. Je pense que cela dément tout ce que les pêcheurs peuvent dire lorsqu'ils prétendent que les usines côtières n'ont pas la capacité d'absorber le poisson ou ne sont pas compétitives à l'échelle internationale. Nous le sommes.
• 1155
Pour ce qui est du prix, nous avons déjà expliqué l'essentiel
et je n'y reviendrai pas.
Les produits et les débouchés sont un autre mythe dont Norm a fait état. Un autre mythe veut que le marché pour nos produits, c'est-à-dire le surimi, les filets, le poisson étêté et éviscéré, les saucisses—nous produisons tout cela, tout ce que Norm a mentionné—serait en quelque sorte instable et que les usines côtières ne pourraient pas écouler la totalité de la prise. Je peux vous dire, d'après mon expérience propre—et je commercialise ce poisson depuis pas mal d'années—que nous vendons tout. Nous en manquons même, nous ne produisons pas assez. Je crois que la même chose est vraie d'USP et certainement de l'usine de Robert Wholey. C'est un fait avéré. Il n'y a pas là de problème.
Nous avons été et nous restons très compétitifs, et ce sur un marché mondial. Nous ne parlons pas de vendre au centre-ville de Vancouver ou même à Seattle; nous parlons d'exportation. Notre production est exportée presqu'à 100 p. 100, dans le monde entier.
Nous livrons concurrence et nous sommes très compétitifs par rapport à nos concurrents réels, les usines côtières américaines, juste de l'autre côté de la frontière, qui sont dans la même situation que nous.
La meilleure façon dont je puisse résumer les effets de la situation actuelle sur nos entreprises est de... Eh bien je n'y reviendrai pas, je vous l'ai déjà expliqué, et je veux conclure.
Si l'industrie de la transformation côtière veut survivre, il nous faut une véritable priorité. Autrement dit, il faut approvisionner les usines côtières avant de donner aux navires-usines étrangers accès à la ressource.
Vous avez visité nos installations. Vous avez vu ce que nous pouvons faire. Tout ce dont nous avons réellement besoin, et ce pour quoi nous demandons votre aide, est l'accès prioritaire à ce poisson—nous avons besoin du poisson. Nous espérons pouvoir compter sur votre soutien. Nous vous demandons d'en parler à votre caucus. Qu'il connaisse la vérité et la réalité de ce qui se passe ici, sur la côte Ouest, car je pense réellement que le message ne passe pas.
Merci beaucoup. Je répondrai volontiers à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Bray.
Nous avons maintenant une délégation de la United Fishermen and Allied Workers' Union, représentée par Garth Mirau, accompagné de quelques autres personnes.
M. Garth Mirau (délégué, United Fishermen and Allied Workers' Union): Merci, monsieur Easter, et merci aux membres du comité, de nous avoir invités. Nous ne savions pas que vous veniez en ville sinon nous aurions nous-mêmes demandé à comparaître. Quoiqu'il en soit, nous sommes là, et je vous ai assuré que nous ne prendrions pas trop de votre temps.
Je ne parlerai que quelques minutes, et je suis accompagné de deux personnes qui travaillent dans l'usine, des employés de longue date, l'une chez Canadian Seafood Processors, Lori Foster, déléguée syndicale dans cette usine, et le président de la section locale, Emil Kristianson, qui travaille chez Ucluelet Seafood Products.
Ceux qui ont déjà entendu mon discours savent que je suis très critique au sujet de la politique en matière de pêche au Canada. Elle est le point de départ de tout cela. C'est pour cela que nous sommes ici aujourd'hui, à nous battre pour les restes.
Il existe dans nos eaux une ressource abondante mais mal répartie. J'ai été pêcheur pendant 30 ans. Norm a pêché beaucoup de choses à part le merlu. Nous avions accès à toutes sortes de poissons sur la côte mais les politiques du gouvernement fédéral régissant l'octroi des permis ont fait que nous avons perdu toutes ces opportunités, et les communautés les ont perdues en même temps que nous.
Si vous étiez venus ici encore à l'été de 1995, vous auriez vu jusqu'à 500 bateaux pêchant au large d'ici, débarquant leur poisson ici. Je crois savoir que vous avez visité quelques usines de conditionnement hier soir. Dommage que vous n'ayez pas vu celles qui ont dû fermer à cause de la politique du gouvernement et tous les emplois qui ont disparu en même temps.
Il ne reste donc pratiquement plus d'emplois en ville. Nous représentons entre 350 et 400 travailleurs des deux usines qui sont maintenant réduites à conditionner le merlu. Ucluelet Seafood Products essaye encore de faire un peu de crevette, mais elle a perdu ce marché aussi l'an dernier à cause d'une réaction excessive à une prise accidentelle qui était le fait de deux ou trois bateaux seulement, sur toute la flotte, et ce genre de mesures décidées par les gestionnaires de la pêche sont absolument inacceptables.
• 1200
Les localités d'ici sont totalement tributaires des ressources
naturelles et celle où nous sommes est en train de mourir par
défaut d'accès à une ressource. Nous avons du hareng tout à côté,
nous avons du flétan, toutes sortes de poissons de fond, et nous en
sommes réduits à transformer du merlu—à le hacher pour le vendre
à l'étranger.
Je vais donner la parole à Lori et Emil qui vous expliqueront les effets de cette gestion aberrante de la pêche sur leur vie et celle de leurs voisins et collègues.
Le président: Lori.
Mme Lori Foster (United Fishermen and Allied Workers' Union): Merci à tous de me donner la parole. C'est très dur pour moi, l'émotion est trop forte.
J'ai travaillé dans cette industrie pendant plus de 25 ans. Nous recevions dans les usines toutes les espèces de poisson de l'océan. Comme Garth l'a dit, nous n'avons plus maintenant que le merlu. Je connais beaucoup de gens dans la région, ayant travaillé à un programme CLIP à Ucluelet, qui cherchent à créer des emplois pour les gens. La situation est catastrophique. J'ai fait un sondage auprès des employés de notre usine pour voir comment ils s'en tirent, car il n'y a pas de travail, et ils arrivent à peine à joindre les deux bouts. La plupart d'entre eux n'ont pas droit à l'assurance-emploi, n'ayant pas eu suffisamment de semaines de travail au cours des trois dernières années pour être admissibles.
Ici, à Ucluelet, il n'y a pas de banque alimentaire. Au moins, à Port Alberni, les travailleurs peuvent s'adresser à la banque alimentaire, mais nous sommes en train d'en organiser une ici.
La question que je me pose, c'est pourquoi nous ne sommes pas considérés comme partie prenante de cette industrie. Pourtant, nous y travaillons. Le poisson est notre gagne-pain. Nous achetons des maisons ici. Nous payons des impôts ici. Nous sommes partie prenante.
Je suis en train de m'effondrer. Je ne peux pas continuer.
Le président: Merci, madame Foster.
Monsieur Kristianson.
M. Emil Kristianson (United Fishermen and Allied Workers' Union): Bonjour. Merci de votre invitation à prendre la parole devant vous ce matin.
Je vais essayer d'être bref car la mairesse et M. Bourke et M. Bray et Lori et Garth ont déjà couvert une bonne partie de ce que j'allais dire.
Pour moi, qui représente les travailleurs à terre, il est assez évident, tout bien pesé, que lorsqu'on voit que chaque merlu pris en eaux canadiennes l'an dernier aurait pu être transformé dans les usines canadiennes à terre... Nous sommes nombreux à être étonnés que les navires usines fonctionnent toujours, car ils n'apportent aucun avantage aux localités, aucun avantage à la province, aucun avantage au pays. De fait, ils nous font probablement du tort car ils rejettent dans l'eau leurs eaux non traitées, de même que les effluents humains, juste devant notre parc, comme d'autres l'ont déjà mentionné.
Nous souffrons d'un fort chômage ici. Nous aurions pu transformer beaucoup plus de poisson, et il est là, il était pêché, mais il ne nous était pas livré. Nous nous sentons abandonnés par le ministère des Pêches et des Océans et nous nous sentons comme des citoyens de seconde zone. Je pense que nous méritons un peu plus que la flotte polonaise le droit de transformer cette ressource, qui est une propriété publique. Je n'ai rien contre la flotte polonaise. Si nous avions un excédent, comme par le passé, elle serait la bienvenue pour en absorber une partie, mais les excédents n'existent plus et nous avons besoin de tout ce poisson pour nos collectivités.
C'est tout ce que j'ai à dire.
Le président: Merci beaucoup.
M. Garth Mirau: Pourrais-je vous interrompre un instant?
Le président: Allez-y.
M. Garth Mirau: Je veux signaler une chose. On a dit tout à l'heure que les travailleurs des usines de merlu sont parmi les travailleurs d'usines de poissons les mieux rémunérés du monde, et c'est vrai, relativement parlant, mais il faut savoir qu'ils ne travaillent pas suffisamment pour avoir droit à l'assurance-chômage, pour la plupart d'entre eux. Nous avons eu une réunion spéciale ici, l'an dernier, où l'on nous a dit que certains pourraient demander l'assistance sociale, mais c'est un pis-aller. Il faut que cela change. Et il n'y a pas que le merlu en jeu. C'est toute la politique touchant la pêche. J'espère que lorsque vous vous pencherez sur le merlu, vous examinerez toute la politique en matière de pêche.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Mirau.
Nous allons commencer avec M. Cummins.
M. John Cummins: Merci beaucoup, monsieur le président.
En ce qui concerne le fait que les travailleurs des usines de poisson sont les mieux payés du monde, ils sont également les plus productifs, je crois.
M. Garth Mirau: C'est une main-d'oeuvre hautement qualifiée, très efficiente.
M. John Cummins: Je remercie tous les témoins de leurs commentaires.
Je pense que nous avons ici un débat classique, un différend sur une ressource et sa répartition. Le thème sous-jacent est le mythe de l'accès prioritaire donné aux usines côtières dont a parlé Jock, alors que la réalité est quelque peu différente.
J'aimerais passer en revue les chiffres de nouveau, afin que nous comprenions clairement le problème. Quel a été le quota cette année—environ 85 000 tonnes?
M. Jock Bray: C'était 84 000 tonnes.
M. John Cummins: Donc, l'attribution des usines côtières a été de 50 000 tonnes?
M. Jock Bray: Oui.
M. John Cummins: Et le reste, les 34 000 tonnes restantes, étaient divisées en deux composantes. La moitié devait aller à la coentreprise et l'autre moitié était la réserve. La destination de la réserve restait à déterminer.
Le problème, si j'ai bien suivi, est qu'il n'y a pas eu de pêche en début de saison, en mai ou juin. Vous affirmez qu'il n'y a pas eu de pêche parce que les pêcheurs refusaient de sortir, si bien que la masse du poisson a été prise sur une période plus courte et que les usines n'ont pas été capables d'absorber toute la prise. Est-ce exact?
M. Jock Bray: Oui, à peu près.
M. Norm Sigmund: C'est ce qu'elles disent.
M. John Cummins: Quelle est votre position à vous, Norm?
M. Norm Sigmund: Début mai, les compagnies ont offert aux pêcheurs un prix de 5« la livre. L'an dernier, le prix était de 10«. Elles n'ont même pas voulu venir à la table pour discuter d'une majoration de prix avant début juin. Lorsqu'elles sont venues, en l'espace de deux à trois jours—les principales compagnies d'Ucluelet, USP et CSP, alignent toujours leur position l'une sur l'autre—une fois que le prix a été négocié à 7.25«, les usines ont tourné à plein.
Ce n'est qu'après que l'usine de M. Buston a fini de mettre en place ses équipements qu'elles ont commencé à négocier avec nous. CSP ne voulait même pas... J'étais là, prêt à commencer la production, mais je n'ai pas été autorisé à commencer les livraisons tant que je ne pouvais garantir un volume suffisant pour faire tourner l'usine à plein. Nous parlons de pêche ici. On ne m'a même pas autorisé à faire une pêche d'essai, avant de garantir la production à plein régime, tellement leur budget était serré.
Il est donc ridicule de prétendre que nous avons mis les freins. Les contingents sont répartis à 80 p. 100 pour les usines côtières et 20 p. 100 pour les navires usines. Le problème n'est pas dans la répartition, le problème est qu'ils veulent un monopole, un point c'est tout.
Le président: Monsieur Cummins.
M. John Cummins: Vous affirmez que le retard était dû à un conflit sur le prix et nullement au fait que vous faisiez traîner les choses exprès, en quelque sorte, afin qu'elles soient dans l'incapacité de transformer le poisson.
M. Norm Sigmund: C'est juste.
Le président: John, M. Sigmund a répondu que c'était juste.
Monsieur Bray.
M. Jock Bray: Concernant ce que M. Sigmund vient de dire, notre usine, Port Fish, était prête, disposée et capable de recevoir le poisson. Nous avons négocié de bonne foi avec les pêcheurs, à notre sens. Nous leur avons expliqué le marché. Nous avons passé en revue toute la situation avec eux.
• 1210
Je leur ai demandé, à la fin: «Quel prix vous faudrait-il pour
commencer à pêcher, car nous devons mettre en route la production.
Ce retard est ridicule». Ils ont dit qu'ils accepteraient 7«. J'ai
dit d'accord, et leur ai dit de commencer à pêcher. Ils m'ont
rappelé le lendemain et mont dit: «Non. Nous avons eu une réunion.
Le groupe refuse de ratifier l'accord; il nous faut 7,5«». J'en ai
parlé avec mon partenaire et nous avons accepté.
Les navires sont sortis, je ne me souviens pas combien de jours se sont écoulés, mais pas plus de deux ou trois, avant que deux des navires qui pêchaient pour nous m'appellent et me disent: «Désolé Jock, nous rentrons à quai». Je leur ai demandé pourquoi et ils m'ont dit qu'ils étaient obligés par l'association qui ne voulait pas voir tourner juste une usine, sinon la solidarité du groupe serait rompue. Ils nous ont donc mis à l'arrêt. Cela a été la fin pour nous, alors que nous avions accepté de payer plus que le prix demandé.
Je suis donc perplexe. Je ne veux pas entamer une controverse ici, devant vous. Si vous lisez la lettre que les entreprises de transformation ont composée, ensemble, en date du 8 juin, vous comprendrez très clairement la situation.
Le président: Merci, monsieur Bray. Nous ne voulons pas ressasser le passé. Nous cherchons à améliorer l'avenir.
Monsieur Cummins.
M. John Cummins: Je ne veux pas entrer dans les détails de la saison dernière ou des saisons précédentes, mais Norm a dit que la concurrence pose un problème, que la flotte de coentreprise fait concurrence pour le poisson et qu'il en résulte une majoration des prix.
Si l'on remonte en arrière, d'après ce que j'ai entendu ces derniers jours, le fait que les usines côtières ont ouvert leurs portes a créé une concurrence avec la flotte de coentreprise et cela a fait augmenter le prix au début.
Nous avons maintenant ici dix usines, mais elles n'agissent pas indépendamment les unes des autres. Il y a un prix négocié et toutes les usines doivent l'accepter. Est-ce vrai ou non?
M. Jock Bray: Non. Toutes les usines opèrent de façon entièrement indépendante.
Le président: Notre problème, lorsque nous siégeons en déplacement, est que nous n'avons personne pour consigner les noms des intervenants. Si je ne prononce pas votre nom ou que vous ne dites pas votre nom, quelqu'un va se faire attribuer des propos qu'il n'a pas tenus, et cela lui causera des ennuis.
Monsieur Bray.
M. Jock Bray: Il est évident que nous prenons nos décisions en totale indépendance. D'ailleurs, nous avons pris grand soin, au fil des ans, de ne même pas correspondre entre nous, de ne pas parler de nos tractations avec l'association des pêcheurs. Je suis allé voir un avocat cette année et je lui ai dit: «Voilà, nous devons sans cesse négocier avec une association et nous n'osons même pas en parler entre nous au téléphone». L'avocat m'a répondu: «La Loi sur la concurrence exonère les pêcheurs et les entreprises de pêche».
Cela m'a surpris. C'est curieux, les pêcheurs ont dû être au courant bien avant nous car cela fait déjà pas mal d'années qu'ils ont leur association. Nous-mêmes, nous ne nous concertons pas.
Nous nous retrouvons tous à payer à peu près le même prix car c'est celui qui offre le plus qui fixe la norme. C'est toujours ainsi que les choses tournent. Évidemment, si nous voulons que les pêcheurs nous livrent du poisson, nous ne pouvons leur offrir moins que ce qu'une autre usine leur paie, sinon les pêcheurs vont refuser.
Il y a donc des négociations sur le prix de l'année, mais le prix est déterminé par celui qui accepte de payer le prix le plus fort, et tous les autres sont forcés de suivre.
Le président: Merci.
Dernière question, John.
M. John Cummins: Jock, pourriez-vous expliquer votre suggestion concernant la période de 45 jours de livraison aux usines côtières? Il serait entendu que pendant les premiers 45 jours les pêcheurs ne pourraient livrer qu'aux usines à terre, et non aux navires-usines. Ai-je bien saisi?
M. Jock Bray: Oui. Notre interprétation de la coentreprise a toujours été qu'elle serait limitée au poisson excédentaire. L'accord de trois ans leur a accordé une part de la prise totale autorisée, ce à quoi nous n'avons jamais consenti. À mon sens, et je suis sûr que les autres transformateurs ici pensent de même, cela ne correspond pas à la notion de poisson excédentaire.
Le poisson excédentaire est celui que nous ne pouvons pas utiliser. Si nous n'avons même pas l'occasion de transformer ce poisson, comment peut-on savoir s'il est excédentaire ou non? Si nous n'avons pas accès à ce poisson, vous ne pouvez savoir s'il est excédentaire et ceux qui sont censés prendre le poisson excédentaire le reçoivent avant nous. Cela ne tient pas debout.
Voilà la situation à laquelle nous sommes confrontés. Donc, la priorité de 45 jours était simplement une solution de replâtrage à court terme que nous avons demandée. Nous avons voulu revenir à la notion de poisson excédentaire. Donnez-nous l'occasion de prendre ce poisson. Pourquoi laissez-vous la flotte polonaise, qui est censée être limitée au poisson excédentaire, pêcher juste devant nos usines? Vous pouvez les voir, à moins de deux milles au large d'ici, avec les bateaux de pêcheurs qui les approvisionnent, et nous avons 550 travailleurs d'usine assis chez eux, en attente de travailler. C'est de la folie.
Le président: Merci, monsieur Bray.
Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Merci, monsieur le président. J'ai deux questions à poser.
Il y a une chose que je voudrais bien comprendre. Madame Foster, vous avez dit que vous en étiez réduits à transformer du merlu. Quand on dit qu'on en est réduit à transformer du merlu, ça veut dire qu'on est rendu au bout de la corde, qu'il n'y a plus rien, que c'est quasiment des déchets.
Les magnifiques usines qu'on a visitées hier soir, malgré notre fatigue, semblaient assez neuves et bien entretenues. J'ai trouvé ça magnifique. Est-ce que les usines qu'on a vues hier pourraient transformer d'autres sortes de poisson que le merlu? Et qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui vous n'avez accès qu'au merlu? Remarquez que c'est un poisson que je ne connais pas, que je n'ai jamais goûté, mais cela avait l'air beau hier.
[Traduction]
Le président: Madame Foster, ou quiconque d'autre est en mesure de répondre...
Nous allons donc commencer par vous, monsieur Sigmund.
M. Norm Sigmund: C'est une très bonne question. Pendant de nombreuses années, nous avons transformé toutes sortes d'espèces. Nous avions du hareng chez nous, dans la baie de Barkley, l'une des plus grosses pêcheries de hareng de Colombie-Britannique. Tout ce poisson part à Vancouver aujourd'hui. Du flétan était débarqué chez nous, mais il n'arrive plus. L'usine à laquelle travaille Lori transforme du poisson de fond. Elle s'appellait TransPacific alors, aujourd'hui CSP. Nous avons perdu ce travail, car il était économiquement non rentable ici.
Nous avons besoin d'aide ici, afin d'avoir du travail non pas pendant deux mois, mais pendant dix mois. Nous avons besoin d'emplois pour toute l'année. Je dois féliciter Port Fish pour ce qu'ils font avec le merlu. La société fabrique du surimi lorsque le marché est bon. Elle fait du filet lorsque le marché est bon. Elle tranche la tête et vide le poisson. Elle fait de la saucisse. Lorsqu'il n'y a pas de merlu, elle conditionne le turbot. C'est de cela que je parlais tout à l'heure. Nous devons diversifier de façon à pouvoir fonctionner dans n'importe quel marché, avant de tout perdre dans cette localité. Je ne suis pas opposé à ce que tout le poisson soit transformé à terre. Je veux qu'il soit livré dans les conditions voulues, de façon à avoir du travail le plus longtemps possible pour nos travailleurs.
Je pense que l'usine que vous avez visitée hier était celle de R. Wholey Canada Ltd.
Le président: Nous avons vu trois usines.
M. Norm Sigmund: Wholey fournit principalement des filets. Le produit sort d'ici prêt pour la vente au détail. L'usine emploie 132 personnes pour transformer de 50 à 60 tonnes de poissons par jour, alors qu'une usine de surimi n'en emploie que de 30 à 40. Wholey peut conditionner un maximum de 100 tonnes par jour, alors que l'usine de surimi peut en transformer plus de 300 tonnes par jour.
• 1220
Il faudrait chez nous se spécialiser dans les produits de
haute valeur, et non pas dans la pêche en vrac. Ce n'est pas bon
pour les zones de pêche et ce n'est pas bon pour la collectivité.
Il faut changer cela.
C'est une attitude canadienne à l'égard du poisson. Parce que nous en avions tant pendant si longtemps, nous le pêchons massivement, le transformons en bouillie; nous gaspillons la ressource. Nous devons le transformer en produit de prix. On parle des marchés approvisionnés par la coentreprise. Ces débouchés subsistent. Il nous suffit de les approvisionner avec des produits transformés à terre.
Je ne suis pas là pour détruire la pêche côtière, mon but c'est de la renforcer. J'ai été le premier bateau à livrer du merlu à terre, à CSP, et je ne veux pas perdre ce débouché, mais nous avons ici de grosses sociétés qui n'ont pas la même vision de ce que devrait être cette collectivité. Elles veulent accès au poisson. Elles peuvent l'avoir en totalité. Elles feront venir davantage de machines, feront le travail plus vite et nous ne serons pas plus avancés.
Je ne suis pas opposé à débarquer le poisson à terre. Mais je suis opposé à ce qu'il soit débarqué à terre pour être transformé en bouillie et envoyé ailleurs pour la finition. Le surimi est un produit brut. C'est comme un tronc d'arbre.
Le président: Merci, monsieur Sigmund.
Désolé, madame Foster, allez-y.
Mme Lori Foster: Je ne voulais pas donner à entendre que le merlu est un poisson sans valeur. Nous sommes heureux de l'avoir. Je voulais simplement dire que nous avions auparavant toutes ces autres espèces auxquelles nous n'avons plus accès. Aujourd'hui, il ne nous reste plus que le merlu.
Merci.
Le président: Merci, madame Foster.
Madame Tremblay.
Mme Suzanne Tremblay: Comme nous avons l'habitude de l'entendre, nous, les Québécois et les Québécoises, le Canada a une préoccupation canadienne. Quand on pense à une province, on doit penser à tout le Canada.
Est-ce qu'il se pourrait qu'on ait permis aux bateaux-usines russes d'avoir accès au Pacifique? Au Québec, les bateaux russes viennent alimenter nos usines de transformation de poisson, par exemple de transformation de morue. Est-ce qu'il aurait pu y avoir un deal au Canada, qui fait que vous avez ici des bateaux russes? Chez nous, nos usines fonctionnent avec du poisson qui a été pêché par les Russes. Il n'y en a plus beaucoup, mais il y en a encore.
[Traduction]
Le président: Qui veut répondre? Monsieur Bourke.
M. Paul Bourke: Chez nous, il s'agit principalement de la flotte polonaise, pas russe. Nous avons eu des navires russes ici pendant deux ou trois ans, à différents moments.
J'ai participé il y a un an aux négociations bilatérales avec la Pologne. Il y a eu manifestement un marchandage entre le blé, le porc et le merlu. Plusieurs pays ont conclu des accords bilatéraux avec le Canada. Ils nous achètent du porc et nous leur donnons notre poisson. On leur pratiquement laissé le champ libre chez nous, pour satisfaire les besoins d'autres provinces.
Dans le cas du blé vendu aux Russes, par exemple, la Commission canadienne du blé a exercé beaucoup de pression sur le gouvernement fédéral afin de leur donner accès au poisson. Cela marche main dans la main.
Vous avez parlé tout à l'heure de l'accès aux débouchés. La Pologne est l'un des plus gros marchés du monde pour les filets de merlu. Pourtant, bien que nous leur ayons donné librement accès à nos ressources ici, elle impose un droit de douane de 20 p. 100 sur le merlu canadien. Nous ne parvenons pas à vendre le merlu conditionné dans nos usines sur le marché polonais. C'est l'un des plus gros débouchés du monde. Nous nous y heurtons à des barrières commerciales.
Notre gouvernement refuse de faire quoi que ce soit à ce sujet. Pendant des années j'ai soulevé cette question à Ottawa. Le gouvernement ne veut pas intervenir auprès de la Pologne. Il ne veut rien faire pour nous.
• 1230
Je précise, en passant, que le surimi n'est pas une matière
première. C'est un produit de poisson hautement transformé. Nous
achetons du poisson cru, du poisson entier. Nous en prélevons les
filets, nous enlevons toutes les arêtes, toute la peau, et à ce
stade c'est la même filet que celui produit par Wholey ou n'importe
quel autre que vous achetez au supermarché. Nous prenons ces
filets, nous les lavons et nous les hachons et, lorsqu'ils sortent
de notre usine, c'est un produit à très haute valeur ajoutée.
Cela devient la matière première pour quelqu'un d'autre, qui va fabriquer des bâtonnets de crabe, mais je peux vous dire que c'est une forme de poisson très hautement transformé et qui crée beaucoup d'emplois. Nous fournissons des fabricants au Canada. Nous avons approvisionné pendant de nombreuses années une usine à Terre-Neuve et une autre à Toronto. Cela crée énormément d'emplois.
Le président: Merci, monsieur Bourke.
Je viendrai à vous dans un instant, Garth.
Nous connaissons le même problème avec la crevette. Nous avons eu une audience sur la crevette à Ottawa, avec un certain nombre de pêcheurs et de conditionneurs et nous avons parlé de la difficulté d'accès au marché européen. C'est la même situation: la crevette de Terre-Neuve est frappée de droits de douane très lourds et nous ne parvenons pas à être compétitifs dans ces conditions.
Mais je suis en désaccord avec vous sur un point, à savoir le marchandage entre le blé et le merlu. Dans mes fonctions antérieures, j'ai participé aux négociations sur le blé et notre négociateur nous a toujours dit que c'était poisson pour poisson. L'impression existe peut-être qu'il y a un marchandage entre l'agriculture et le poisson ou l'industrie, mais on nous a clairement fait comprendre que c'était poisson pour poisson. Il n'en demeure pas moins que nous devons négocier plus âprement la réduction de ces droits de douane. Là-dessus, je suis d'accord avec vous.
Garth.
M. Garth Mirau: Merci, monsieur Easter.
En réponse à la question de Mme Tremblay, je pense qu'elle fait ressortir le désastre absolu que représente la politique des pêches dans notre pays, lorsque nous en sommes réduits, encore une fois, à nous battre pour l'accès au merlu. Nous avons gaspillé d'énormes ressources, non seulement devant notre porte, mais également sur la côte Est, lorsqu'on voit ce qui s'est passé à Terre-Neuve où la pêche à la morue a été anéantie et où ne parvenons pas à vendre les crevettes qui existent en plus grand nombre que jamais. Et au Québec, ils en sont réduits à importer du poisson russe pour alimenter leurs usines de conditionnement. Cela en dit long sur la gestion désastreuse de la pêche.
Voilà ce que je voulais faire ressortir. J'ai trouvé la question très intéressante et elle devrait amener tout le monde à réfléchir.
Le président: Monsieur Wappel.
M. Tom Wappel: Merci beaucoup de votre témoignage ce matin.
Je suis de Toronto. La seule pêche que je connaisse est la pêche à la ligne que je pratique de temps en temps, mais nous avons eu une note d'information du MPO. Je l'ai lue et je ne suis pas sûr de bien la comprendre et j'aimerais que les témoins m'expliquent. Je cite directement la note:
-
Le Canada a établi en 1998 une formule de partage qui alloue la PTA
canadienne de la façon suivante: les premières 50 000 tonnes
métriques chaque année sont réservées aux usines de transformation
côtières. La partie restante a été scindée.
Et nous avons parlé de cela.
Selon ma lecture, les premières 50 000 tonnes vont aux usines à terre. Cela, je le comprends, c'est ce qui nous a été dit.
On nous donne également les chiffres des attributions et des prises au cours des six dernières années. Et, selon les tableaux que nous a remis le MPO, pour une raison que j'ignore, la prise totale en 2000 n'a été que de 21 259 tonnes métriques. C'était nettement inférieur à 50 000. Moi qui suis simple d'esprit, j'aurais pensé que toute la prise serait allée aux usines côtières, car les premières 50 000 tonnes sont censées leur être réservées. À mes yeux, cela semble une évidence.
En 2001, 81 600 tonnes ont été allouées, selon ces chiffres, et la prise a été de 53 154 tonnes. Là encore, j'aurais cru que les premières 50 000 tonnes iraient aux usines côtières. Or, pour une raison que j'aimerais que l'on m'explique, 31 500 tonnes sont allées aux usines à terre et environ 21 500 tonnes sont allées à la coentreprise.
• 1235
Comment se fait-il que les premières 50 000 tonnes ne vont pas
aux usines à terre comme elles sont censées le faire? Et qui prend
cette décision? Pourquoi, par exemple, les navires-usines sont-ils
autorisés à s'approcher de la zone de pêche tant que les premières
50 000 tonnes n'ont pas été débarquées à terre?
Voix: Bravo, bravo!
M. Tom Wappel: Et je le dis en tant que Torontois. Je pose la question aux pêcheurs, car M. Mirau a dit que personne ne profite de la coentreprise. Les pêcheurs profitent car ils touchent plus d'argent. Et ils dépensent cet argent quelque part, ils le mettent à la banque, ou le dépensent dans les commerces locaux, ou achètent de plus gros navires. Quelqu'un en profite. Les bénéficiaires sont peut-être moins nombreux, le profit est peut-être plus concentré, mais il existe.
Je pose donc la question aux pêcheurs: comment se fait-il que les premières 50 000 tonnes ne soient pas conditionnées à terre?
Le président: Monsieur Norm Sigmund.
M. Norm Sigmund: En 2000, le poisson n'est pas revenu dans sa zone d'estivage normale. Nous l'avons trouvé au large de la côte ouest des îles de la Reine-Charlotte et il n'y a pas là-bas d'usines de conditionnement côtières. Nous ne pouvions ramener le poisson jusqu'ici. Et le gros du poisson a été trouvé avec l'aide de la flotte étrangère qui a réussi à localiser le poisson là-haut.
Ensuite nous avons trouvé un autre banc de poisson dans le détroit de la Reine-Charlotte. Et, personnellement, j'ai essayé d'acheminer du poisson aux usines d'Ucluelet. J'ai envoyé 2 millions de livres de poisson là-bas, ce qui m'a coûté 60 000 $ de ma poche, pour faire tourner ces usines, et ce n'était financièrement pas viable.
Les poissons ont des nageoires. Et s'ils ne sont pas à proximité d'ici, à deux ou trois heures de mer de l'usine, on ne peut les acheminer dans les conditions voulues pour avoir un produit de qualité. C'est pourquoi, en 2000, la plus grande partie du poisson a été conditionnée au large.
M. Tom Wappel: Et l'année suivante?
M. Norm Sigmund: L'année suivante. Comme je l'ai dit dans mon mémoire, ces usines ne peuvent pas transformer 30 ou 40 tonnes par jour. Le coût du nettoyage à fond des équipements est prohibitif. Pour certaines, un nettoyage complet coûte jusqu'à 10 000 $. Nous devons donc leur garantir de tourner à plein rendement. Leurs machines ne peuvent rester immobilisées pendant quelques heures.
Donc, au début de la saison, ou à la fin de la saison, ces grosses usines ne peuvent même pas recevoir de poisson, en raison du coût du nettoyage qu'il faut effectuer à chaque arrêt de la production.
M. Tom Wappel: Est-ce que les navires-usines n'ont pas le même problème?
M. Norm Sigmund: Elles peuvent tourner avec très peu de poisson. Ces navires ne font pas de produits broyés, uniquement des filets. L'usine de Wholey peut être nettoyée par un seul homme avec un tuyau d'arrosage. Mais dans ces usines de broyage géantes, le moindre petit tamis doit être débarrassé de la moindre particule. Chaque boulon doit être démonté. Il faut deux jours pour nettoyer correctement une de ces usines. Tout le problème est là.
Lorsque ces grosses usines ne peuvent être livrées régulièrement... Comme je l'ai dit, cela suppose pêcher le poisson à proximité pour le faire. Et pour prendre 200 ou 300 tonnes pour deux usines, soit 500 ou 600 tonnes par jour, il faut dix navires pêchant au maximum et ayant une journée de pêche parfaite chaque jour. Ce n'est pas un scénario facile.
Le navire-usine peut absorber 15 ou 20 tonnes par jour, par lots de cinq tonnes, et les transformer. Donc, sans eux, nous perdrions le début et la fin de la saison.
M. Tom Wappel: Et si nous avions un navire-usine canadien?
M. Norm Sigmund: C'est illégal. Nous n'avons pas le droit de transformer.
M. Tom Wappel: Pourquoi?
M. Norm Sigmund: Demandez-le au MPO.
M. Tom Wappel: C'est la politique. Nous pourrions leur en parler.
Nous n'avons pas le droit d'avoir un navire-usine canadien?
M. Norm Sigmund: C'est interdit. Nous n'avons pas le droit de conditionner en eaux canadiennes.
Le président: Monsieur Bourke.
M. Paul Bourke: Depuis une dizaine ou une vingtaine d'années, le MPO a pour politique de ne pas autoriser les Canadiens à faire de la transformation à bord. Nous ne pouvons même pas amarrer une barge dotée d'un broyeur à farine de poisson ou de n'importe quel autre équipement près de nos usines. C'est contre la loi.
Au cours des années 80, il existait sur la côte Est un ou deux navires-usines agréés, le dernier appartenant à National Sea, de Lunenburg. Et lorsque ce navire a été désarmé, il y a une dizaine d'années, j'ai conclu un accord avec National Sea pour louer ce navire, l'amener ici, le faire approvisionner par des pêcheurs canadiens, débarquer sa production à notre usine d'Ucluelet, puis transporter le produit par camion jusqu'à Lunenburg.
• 1240
J'ai fait cette proposition au gouvernement lors de
négociations internationales et la réponse a été «Absolument non.
Nous n'autoriserons pas cela».
Je leur ai dit que je comprenais pas. Nous avons six navires-usines étrangers, russes et polonais, qui auront le droit de pêcher dans nos eaux. J'allais employer 40 personnes de Nouvelle-Écosse pour travailler sur ce navire et une quarantaine d'autres pêcheurs canadiens pour l'approvisionner. Nous allions débarquer le poisson et le transformer un peu, puis utiliser nos camions pour l'acheminer à Lunenburg et établir une relation un peu plus étroite avec eux.
Absolument pas—ils refusaient.
Le président: Dernière question, Tom.
M. Tom Wappel: Je n'ai rien d'autre pour le moment.
Le président: M. Cummins, puis M. Lunney. Désolé, je tâcherai de ne plus vous oublier.
M. John Cummins: Merci encore, monsieur le président.
Le président: Je dois passer à M. Lunney. Désolé, John.
M. James Lunney: Merci, monsieur le président. Vous avez failli m'oublier, dans mon coin.
J'aimerais aborder deux aspects. Le premier est l'impact économique sur la collectivité. Lori et Emil nous ont parlé des travailleurs, du fait qu'ils n'ont pas eu le travail auquel ils s'attendaient. La municipalité avait également investi dans l'infrastructure requise par les nouvelles usines, égouts et adduction d'eau, etc.
J'aimerais que quelqu'un nous en dise un peu plus sur les répercussions économiques ressenties par leur collectivité lorsque nombre de ses habitants, je présume, en raison de la pénurie des deux dernières années, n'ont pu payer leur hypothèque, n'ont pu payer leurs taxes foncières et peut-être ont déménagé ailleurs. Quelqu'un voudrait-il nous parler de l'impact économique? Peut-être la mairesse.
Le président: Madame la mairesse.
Mme Diane St. Jacques: Merci. Oui.
Merci, James.
C'est grave pour notre ville. Nous avons essuyé des coups venus de plusieurs côtés, dans la pêche et dans l'exploitation forestière. Cela se répercute sur notre budget car, comme Norm l'a signalé, nous tirons un revenu direct des usines, sous forme de taxation de l'eau et, évidemment, de taxes payées par les travailleurs. Du fait de la chute de nos recettes fiscales cette année, nous avons dû mettre à pied des employés municipaux et nous serrer durement la ceinture. Nous nous en sortons, mais nous avons certainement besoin de votre aide.
J'aimerais répondre à ce que les autres messieurs ont dit tout à l'heure, concernant les bénéfices. C'est vrai, les coentreprises rapportent quelque chose, à un petit groupe de gens. Mais en tant que collectivité canadienne, nous attendons de notre gouvernement et de nos politiciens—dont je fais partie—qu'il rentabilise au maximum notre ressource canadienne, dans l'intérêt des Canadiens.
Pour nous ici, c'est clair et simple. À mes yeux et à ceux des habitants d'Ucluelet, la question est de savoir comment rentabiliser au mieux et faire le meilleur usage de ce merlu canadien? Cela suppose le débarquer ici.
On a comparé cela tout à l'heure à une usine d'automobiles. On peut comparer cela également à l'exportation de troncs bruts. Ce n'est pas acceptable. Et oui, l'impact économique ici est dévastateur.
Le président: Monsieur Lunney.
M. James Lunney: Merci.
J'ai un commentaire auquel j'espère que quelqu'un va répondre.
Si j'ai bien compris, la coentreprise de pêche était destinée à l'origine à exploiter l'excédent. À l'origine, il y avait une prise excédentaire. Nous n'exploitions guère le merlu dans cette région. Je suppose que c'est ainsi que tout a commencé. Les navires-usines étrangers devaient exploiter le poisson excédentaire.
Nous avons eu l'autre jour une séance d'information organisée par le ministère, qui nous a indiqué que les scientifiques estiment que le stock a été surexploité de 10 p. 100 à 14 p. 100 et qu'il est en recul. Les scientifiques sont inquiets.
Nous savons aussi que les usines côtières ont effectué d'énormes investissements pour effectuer à terre la transformation de ce poisson, ici et à Port Alberni, etc.
Donc, vu ces deux facteurs—la diminution du stock et l'augmentation de capacité à terre—peut-être n'y a-t-il plus d'excédent à partager avec une pêcherie en coentreprise. J'espère que cela sera pris en considération lors de l'examen en cours.
Aimeriez-vous ajouter quelque chose concernant cette équation?
Le président: Qui souhaite répondre? Quelqu'un? Monsieur Bray.
M. Jock Bray: La situation existe parce que le ministre a décrété il y a trois ans qu'il y aurait un accord triennal pour répartir la prise totale autorisée de la manière indiquée. Pour les premières 50 000 tonnes, la priorité était donnée aux usines côtières. Puis, le restant de la prise autorisée serait coupé par moitié, la réserve mise de côté et l'autre moitié concédée aux navires-usines étrangers.
Le problème est celui de la priorité. Les usines côtières n'ont jamais eu la priorité. Nous n'avons jamais obtenu les premières 50 000 tonnes. Nous ne les avons jamais eues.
• 1245
Nous avons entendu toutes les explications, les retards et
tout le reste. L'élément majeur est que les pêcheurs veulent livrer
aux navires-usines parce que ces derniers payent plus cher. Vous
verrez cela dans le rapport Pender, lorsque vous aurez l'occasion
de le lire. Je dois présenter des excuses, je ne pense pas qu'il
ait été traduit. Il est trop épais. Vous pourrez en demander la
traduction. Si vous parcourez le rapport Pender, il passe en revue
tous les avantages sociaux et tous les coûts que connaissent les
usines côtières, à la lumière de l'écart de prix payé par les
navires-usines. Croyez-moi, si ces derniers devaient payer les
mêmes coûts que les usines côtières, les prix seraient équivalents.
Pour répondre pleinement à votre question, le MPO a donné une part aux navires-usines. Il n'y a jamais eu de suivi pour voir comment les choses se passaient concrètement. C'était la raison de notre lettre du 8 juin, que nous vous avons communiquée. C'est la raison pour laquelle nous avons cette dispute continue. Oui, nous voyons le tonnage excédentaire être pris avant que nous-mêmes puissions pêcher. Cela n'a pas de sens. Cela ne tient pas debout.
S'agissant des volumes, M. Sigmund a dit que les pêcheurs ne peuvent livrer de petits volumes aux usines côtières à cause des problèmes de nettoyage et de ce genre de choses. Eh bien, il y a plusieurs usines, dont la nôtre, qui peuvent accepter n'importe quel volume, aussi petit soit-il.
Le deuxième élément, si vous regardez les chiffres... Ces chiffres sur la capacité de transformation omettent une donnée fondamentale que vous devez connaître. Si vous comparez ce que les navires-usines ont demandé et ce qu'ils ont obtenu dès le premier jour... Ils ont demandé 400 tonnes par jour et, dès le premier jour, en juin, ils ont obtenu 400 tonnes par jour, sauf quelques exceptions mineures lorsque le temps était mauvais. En gros, ils ont eu leurs 400 tonnes par jour à partir du début de la campagne jusqu'à la prise du dernier poisson de leur quota. Donc, à mes yeux, cet argument ne tient pas la route.
Le président: Dernière intervention, James.
M. James Lunney: Avons-nous la capacité de transformer la totalité de la prise à terre?
M. Jock Bray: Oui, absolument.
M. James Lunney: J'essaie d'établir qu'il n'y a en réalité pas d'excédent.
M. Jock Bray: Les usines côtières pourraient actuellement traiter plus de 100 000 tonnes. Je parle là uniquement des principales usines côtières et je n'y englobe pas les usines américaines auxquelles ces pêcheurs peuvent livrer également et qu'ils fournissent, ni celles de Vancouver qui commencent à absorber de plus en plus de merlu. Ce ne sont pas de gros volumes, mais elles conditionnent un peu de merlu et d'autres espèces et quelques petites livraisons partent dans cette direction. C'est tout à l'avantage des pêcheurs, de toute façon, car la concurrence sur les prix ne fait que s'échauffer.
Le président: Merci, monsieur Bray. J'ai quatre personnes sur...
Mme Suzanne Tremblay: Avez-vous obtenu une réponse à la lettre du 8 juin?
Le président: Monsieur Bray, avez-vous obtenu une réponse à votre lettre de juin?
M. Jock Bray: Je crois que oui. Je l'ai peut-être même ici. Si je fouille quelques instants, je pourrais vous la trouver. Mais en substance la lettre dit «Désolé, la saison a été décidée, nous n'allons rien faire à ce stade. Défendez votre position et présentez vos arguments au Sous-comité du merlu». C'est un comité de transformateurs et de pêcheurs et de fonctionnaires qui se réunissent régulièrement pour discuter de la répartition de la réserve, entre autres, chaque saison. En gros, on nous a opposé une fin de non-recevoir.
Le président: L'accord triennal est maintenant expiré, n'est-ce pas?
M. Jock Bray: Il est échu.
Le président: Quel est l'échéancier pour la prise des décisions concernant l'an prochain et quel est le mécanisme? Vous avez mentionné le sous-comité. Je connaissais son existence. Pouvez-vous nous expliquer le processus suivi pour parvenir à une nouvelle décision et quels sont les délais afin que nous puissions faire nous-mêmes notre travail en temps voulu?
Monsieur Bourke.
M. Paul Bourke: Nous avons besoin d'une décision sur l'attribution aux navires-usines d'ici Noël. C'est ce que nous demandons depuis six mois.
• 1250
En 2000, lorsqu'il n'y avait pas de poisson ici et que nous
subissions un désastre, le ministre nous a donné l'assurance qu'il
y aurait une enquête, que des fonctionnaires allaient examiner la
situation et que nous aurions l'occasion de présenter notre
dossier, comme nous l'avons fait aujourd'hui, l'automne dernier.
Nous n'en avons jamais eu la possibilité, bien que le ministre des
Pêches nous l'ait garanti par écrit. Bien qu'ayant fait des rappels
chaque mois pendant six mois, nous n'avons jamais eu l'occasion de
nous expliquer. Nous sommes maintenant à la dernière semaine de
novembre et le ministre nous a promis cela de nouveau il y a deux
mois. Or, nul n'a encore été nommé pour présider cette enquête.
Aucune réunion n'est prévue.
Nous avons parlé au ministre il y a deux semaines et demandé ce qu'il attendait exactement. Quand va-t-il faire cela? Nous n'avons toujours pas de réponse. Nous devons savoir ce qu'il en sera avant Noël, car nous devons planifier de nouveaux équipements, notamment des congélateurs. Nous devons savoir à quoi nous en tenir. Cela ne peut pas durer ainsi. Il n'y a pas de compromis possible. Ils doivent partir et nous devons survivre. Nous ne pouvons pas survivre avec ces navires-usines étrangers. Nous voulons une réponse, dans un sens ou dans un autre, d'ici Noël.
Le président: M. Lunney, puis la mairesse.
M. James Lunney: Merci, monsieur le président.
Dans une note d'information que le ministre nous a fait parvenir l'autre jour, le ministre s'engage apparemment à procéder à un réexamen de la répartition actuelle. Ce réexamen devrait se dérouler au cours des trois prochains mois, et cette note est datée du 20 novembre. Le ministre annonce une échéance de trois mois.
Le président: Et vous dites, monsieur Bourke, qu'il vous faut une décision d'ici Noël.
M. Paul Bourke: Il nous faut une décision d'ici Noël, ou au plus tard le 1er janvier. Cela fait longtemps qu'ils le savent. Nous le leur avons dit par écrit. Je ne comprends pas pourquoi cela traîne tant. Nous sommes tous sur des charbons ardents. Il nous faut une réponse. Il nous faut une certitude. On ne peut nous laisser à la merci du calendrier d'un bureaucrate à Ottawa.
Le président: Madame la mairesse.
Mme Diane St. Jacques: Merci, monsieur le président.
En complément de ce qu'a dit M. Bourke, nous avons rencontré fin septembre notre ministre provincial de l'Agriculture, de l'Alimentation et de la Pêche. La même semaine il avait eu l'engagement du ministère des Pêches et des Océans qu'un comité serait formé et une décision prise d'ici la fin de cette année. C'était fin septembre et nous comptons là-dessus. Nous n'avons rien entendu depuis. C'est pourquoi j'ai dit dans ma présentation que nous ne savons pas si c'est en route ou non.
Le président: D'accord, nous allons voir si nous pouvons accélérer cela.
Tom, voulez-vous intervenir?
M. Tom Wappel: Juste une question. On a demandé s'ils pouvaient transformer 100 p. 100. Je crois que M. Sigmund voulait donner une réponse à cette question.
Le président: D'accord, désolé, monsieur Sigmund. Il faut parfois donner de la voix ici. Allez-y.
M. Norm Sigmund: Je suis peut-être trop poli.
La capacité a quel prix? En 1977, 1999, 2000 et 2001, si nous n'avions pas eu la coentreprise, la flotte de pêche aurait subi une perte financière terrible. Ces deux grandes compagnies peuvent absorber 25 000 ou 30 000 tonnes chacune. Si elles ne sont pas en état de fonctionner, qu'allons-nous faire du poisson? Où va-t-il aller? C'est à cela que sert la coentreprise: c'est un filet de sécurité. Cela nous donne un débouché. Au cours de quatre des cinq dernières années, c'est elle qui a sauvé la pêche. Nous avons la capacité. Mais si l'une de ces usines est sur la touche, à cause de la crise économique et de la situation du marché, nous sommes dans un énorme pétrin.
Le président: Monsieur Lunney, allez-y.
M. James Lunney: Un commentaire rapide. Vous parlez là de la situation avant que les usines aient accru leur capacité. Elles n'avaient pas la capacité alors, elles l'ont maintenant. Cela ne fait-il pas une grosse différence?
M. Norm Sigmund: Elles avaient déjà la capacité alors. La situation économique était telle qu'elles ne pouvaient transformer le poisson et produire du surimi de façon rentable.
Le président: Merci.
M. Bray, puis je vais devoir donner la parole rapidement aux autres députés qui la demandent et clore cette session. Monsieur Bray.
M. Jock Bray: Nous avons conscience de la situation dont parle Norm et on nous la jette au visage sans cesse ces dernières années. Oui, les usines ont largement assez de capacité pour traiter toute la prise. Il s'est produit dans le passé deux cas de faillites dans l'industrie du conditionnement. Il n'y a là rien de nouveau, ce genre de choses arrive. Ces gens ont fait de leur mieux, n'ont pas réussi et se sont cassé la figure.
S'agissant de la prise totale du poisson excédentaire, c'est là le grand débat. Même s'il y avait une défaillance dans l'industrie—cela peut toujours arriver et on ne peut entièrement l'exclure—mettons en place un mécanisme tel que, si un problème survient et que nous le voyons venir—et nous le saurons très vite—on puisse s'adresse au MPO et lui faire savoir que nous prévoyons un problème cette année. Croyez-moi, il y a beaucoup de capacité de traitement étrangère que l'on pourrait faire venir très vite. Notre grand voisin du sud a des quantités de navires-usines qui font des ronds dans l'eau. On pourrait les faire venir pour conditionner le poisson excédentaire, si jamais l'occasion se présentait. Je ne pense pas que cela arrive, mais ce n'est pas exclu. Je pense qu'il faut gérer cela, et à l'heure actuelle on gère en donnant un quota à un pays étranger, à nos dépens.
Le président: Monsieur Sigmund, avez-vous un dernier commentaire rapide à ce sujet?
M. Norm Sigmund: La réponse à l'affirmation que nous pourrions faire venir des navires-usines américains est que cela est illégal. Les États-Unis ne sont pas dans nos petits papiers. Leurs navires-usines ne sont pas autorisés à venir dans nos eaux. On ne peut pas faire venir rapidement une flotte étrangère. Ce n'est pas quelque chose que l'on peut faire à une ou deux semaines de délai, ou même de deux mois. Cela se planifie longtemps avant le début de la saison.
Le président: M. Stoffer, puis M. Farrah et M. Hearn.
M. Peter Stoffer: Merci beaucoup, monsieur le président.
Sans ouvrir un débat, vous aviez dit, monsieur le président, qu'il n'y a pas de marchandage international—poisson contre blé, par exemple. Vous dites que c'est poisson contre poisson. J'aimerais bien savoir quel poisson nous obtenons en échange de ce que nous accordons. C'était juste un petit commentaire.
Monsieur Sigmund, vous avez bien dit les choses. Venant des Maritimes, comme mes deux autres collègues, on nous accuse d'avoir des travailleurs saisonniers profiteurs, qui veulent juste faire assez de jours pour toucher l'assurance-emploi et se laisser vivre le restant de l'année. Le problème avec cela, bien entendu, est que ce ne sont pas les travailleurs qui sont saisonniers, ce sont les emplois. Je pense que vous avez absolument raison.
J'ai une question pour vous, monsieur Bray. Si vous pouviez transformer à terre chaque once de poisson ou de merlu, de combien de travail parlons-nous? Quelle serait la durée de ce travail et combien cela ferait-il d'emplois? Si vous aviez chaque once, combien de travail cela ferait-il?
Le président: Monsieur Bray.
M. Jock Bray: Cela varie d'usine en usine. Chez nous, nous avons un objectif. Nous tournons typiquement pendant huit à neuf mois. Nous visons travailler pendant dix à onze mois. Nous étirons la production. Nous pouvons recevoir du merlu du Golfe, de la zone entre Vancouver et l'île de Vancouver.
• 1305
D'ailleurs, si vous visitiez notre usine aujourd'hui, vous
trouveriez une situation totalement différente de ce que vous avez
vu dans les trois autres. Chez nous, nous avançons à toute allure.
Nous tournons 24 heures par jour.
Nous sommes avantagés car nous sommes proches de ce côté-ci de l'île. Nous avons également l'avantage de pouvoir faire toutes sortes de produits différents. Certaines des autres usines peuvent également fabriquer une gamme de produits, mais pas aussi large que la nôtre, mais cela va changer. La saison dernière, même USP, qui se limitait jusqu'à présent au surimi, a ouvert toute une chaîne de filetage. Elle peut faire du filet, du hachis et du surimi régulier.
Il m'est difficile de vous donner une réponse pour les autres usines. Notre objectif à nous est d'employer la main-d'oeuvre au moins 10 mois, peut-être 11 mois par an, et nous étirons la saison avec et du merlu et d'autres espèces, comme le turbot.
Le président: Monsieur Bourke.
M. Paul Bourke: Pour répondre à votre question, nous employons aujourd'hui environ 550 personnes. Si nous avions toute la prise autorisée, nous pourrions en employer au moins 200 de plus, et la saison durerait probablement entre trois et huit mois, selon le moment où le poisson arrive et le moment où les pêcheurs veulent bien aller l'attraper. J'ai vu du poisson ici dès le 15 avril et encore jusqu'au 22 décembre.
M. Peter Stoffer: Monsieur Bourque, vous avez mentionné quelque chose au sujet d'une liqueur?
M. Paul Bourke: La liqueur visqueuse.
M. Peter Stoffer: Liqueur visqueuse. J'avoue mon ignorance. Je n'ai jamais entendu parler de cela. Pourriez-vous nous expliquer de quoi il s'agit et pouvez-vous prouver que des matériaux dangereux sont déversés dans les eaux canadiennes en bordure d'un parc national?
M. Paul Bourke: Absolument, nous pouvons le prouver.
La liqueur visqueuse est le résidu de cuisson des déchets de poisson. C'est un effluent hautement toxique qui inquiète grandement les autorités responsables de l'environnement. Au Canada, et presque partout aux États-Unis, il est interdit de rejeter la liqueur visqueuse dans l'océan, sans traitement. C'est un effluent très difficile et très coûteux à traiter. West Coast Reduction, à Nanaimo, vient de dépenser entre 1 million et 2 millions de dollars juste pour cela.
Si on remet cette liqueur dans la farine, la qualité s'en trouve altérée et la farine difficile à vendre. Donc, le fait de pouvoir déverser cette liqueur visqueuse dans la mer représente un réel avantage commercial. La farine sans liqueur vaut environ 300 $ de plus la tonne.
Notre ministre des Pêches est censé s'occuper de l'environnement. Ces navires-usines n'ont pas de permis pour déverser ces effluents dans la mer. Plus de 500 personnes vivent sur ces navires et déversent toutes leurs eaux usées domestiques, intégralement, directement dans les eaux du détroit Barkley, en face du Parc national Pacific Rim. Je vous le garantis, si nous présentions une demande pour déverser nos déchets humains non traités dans les eaux par ici, il y aurait une levée de boucliers dans le monde entier, mais eux ont le droit.
Le président: Dernière question, Peter.
M. Peter Stoffer: Monsieur Bourke, si vous avez une documentation à ce sujet, elle nous serait très utile.
Ma dernière question s'adresse à la localité, à la mairesse.
J'ai parlé à un certain Eric Tamm, du Coastal Communities Network. Cette organisation a fait énormément de travail, non seulement pour cette localité, mais avec Russ Helberg, et beaucoup d'autres, cherchant à mettre en place des possibilités économiques, pas seulement au niveau de la pêche mais dans beaucoup d'autres domaines.
Je sais que nous nous éloignons-là un peu du sujet, mais outre la pêche et les usines de transformation, quelles autres perspectives d'emploi voyez-vous pour la population locale?
Le président: Madame la mairesse.
Mme Diane St. Jacques: Merci, monsieur le président.
M. Peter Stoffer: J'essaie de lui donner l'occasion de se faire valoir, voyez-vous.
Le président: Le NPD a beaucoup de problèmes, Peter.
Mme Diane St. Jacques: Ucluelet a de la chance en ce sens que nous avons toujours eu une économie diversifiée. Mais les choses sont devenues beaucoup plus difficiles ces dix dernières années.
Nous avons évidemment une bonne présence fédérale dans notre communauté, avec le Parc national Pacific Rim et le Centre de gestion du trafic maritime dont vous avez examiné la problématique ce matin. Nous avons toujours eu le tourisme et ce secteur continue de croître. Nous travaillons très fort à l'amélioration de notre infrastructure touristique, la mise en place de sentiers de randonnée et j'espère que la prochaine fois que vous viendrez, vous pourrez emprunter le sentier du Pacifique qui longe l'océan jusqu'au bout de la péninsule.
• 1310
Nous travaillons sans cesse à la création de forêts
communautaires, avec toutes les possibilités qu'elles offrent, non
seulement sur le plan de l'exploitation du bois mais aussi des
activités non sylvicoles à valeur ajoutée et touristiques. Nous
travaillons à cet effet avec deux partenaires, les Premières
nations Toquaht et Ucluelet. Nous avons formé l'année dernière une
société de développement économique qui s'efforce d'ouvrir des
perspectives pour la population locale, car tout tourne autour de
cela, comme dans le cas des usines de transformation: créer des
emplois pour les Canadiens dans les collectivités canadiennes.
Si je puis ajouter un mot, M. Lunney s'était enquis tout à l'heure de l'infrastructure et de notre investissement dans l'eau et les égouts. Je ne lui ai pas répondu, et je m'en excuse, mais sachez que nous avons investi, en nous fondant sur les plans d'avenir de la pêche, en mettant à profit les subventions d'infrastructure à hauteur de deux tiers des coûts.
Il y a six ans environ, nous avons construit un réseau d'égouts et d'adduction d'eau. Il a coûté 7 millions de dollars, dont nous avons dû payer un tiers. Nous payons environ 10 000 $ par mois d'intérêts sur cet emprunt, et vous pouvez imaginer le poids que cela représente pour une localité de 1 800 habitants. Nous avons mis en vente des terrains appartenant à la commune pour rembourser cet emprunt, mais notre investissement, aussi bien financier que moral, est important.
J'espère que cela vous renseigne.
Le président: Merci, madame la mairesse.
Monsieur Hearn, la dernière question vous appartient.
M. Loyola Hearn: Merci, monsieur le président.
Je dois dire, tout d'abord, que je pourrais aussi bien me trouver dans n'importe laquelle des 15 à 20 localités de ma circonscription qui ont une usine de poisson, et j'y entendrais les mêmes doléances exprimées par les pêcheurs, d'un côté, et les propriétaires et travailleurs de l'usine de l'autre. Les problèmes que vous rencontrez ne sont certainement pas propres à cette côte. Vous n'êtes pas seuls non plus à être ignorés par les autorités.
À cet égard, lorsque vous intervenez et posez des questions, vous dites qu'Ottawa ne réagit pas, et est lent à prendre des décisions. À votre avis, où se prennent les décisions? Est-ce qu'elles sont réellement prises à Ottawa, ou bien sont-elles le fait des administrateurs locaux qui répondent eux-mêmes aux lettres que vous adressez au ministre?
Chez nous, à plusieurs reprises, lorsque nous avons écrit au ministre, nous nous apercevions que les lettres descendent la filière jusqu'au bureau local. Les réponses sont données par les administrateurs locaux et le ministre appose sa signature sans réellement savoir ou comprendre ce qui se passe. Avez-vous des difficultés à cet égard ou bien les autorités locales sont-elles coopératives? J'aimerais connaître la réaction des deux côtés.
Le président: Quelqu'un veut-il répondre? Monsieur Bourke.
M. Paul Bourke: Le bureau du MPO de Vancouver, qui gère la région Pacifique, n'est pas très coopératif. Au cours des cinq dernières années, nous n'avons guère vu qu'un ou deux fonctionnaires responsables de la pêche étrangère venir visiter nos usines.
M. Dhaliwal est venu l'année dernière rencontrer les Autochtones à Port Alberni et a refusé de rencontrer notre maire, et celui de Port Alberni et celui de Tofino, le Comité des pêches du district régional de Clayoquot. Nous sommes allés exprès à Port Alberni ce jour-là. Il est passé devant notre bureau et ne nous a même pas accordé cinq minutes de son temps.
Les fonctionnaires de Vancouver se déplacent rarement. En trois ans, je pense que nous n'avons vu ici qu'un seul responsable d'Ottawa. Ils vivent coupés de la réalité au 200, rue Kent à Vancouver. Ils sont coupés de cette collectivité. Nous avons très peu de rapports avec l'agent des pêches local.
Les réponses à nos lettres sont toujours rédigées par des bureaucrates. Il y a deux courants: le courant politique—lorsque la lettre est adressée au ministre, elle suit le courant politique; et il y a le courant administratif, et 99 p. 100 des fois c'est le même bureaucrate, celui avec lequel vous avez affaire tous les jours, avec lequel vous n'arrivez à rien, qui répond.
Le ministre... rarement. Je ne sais même pas s'il prend connaissance de la correspondance. Et c'est pourquoi nous sommes dans cette situation. C'est pourquoi, lorsque nous envoyons des lettres urgentes en plein milieu d'une crise, nous recevons une réponse trois à six mois plus tard. Dans quelle autre industrie pourrait-on investir 50 millions de dollars de fonds privés sans pouvoir obtenir de réponse d'un ministre? Malheureusement, c'est ce qui se passe ici. On ne nous accorde aucun respect.
Le président: Merci, monsieur Bourke.
Loyola.
M. Loyola Hearn: J'ai une courte question, monsieur le président.
• 1315
Quand je vous écoute énumérer vos problèmes, moi qui travaille
depuis plusieurs années avec les groupes de pêcheurs, les employés
d'usines et tout cela, je trouve que lorsqu'il se pose un problème
comme celui-ci—les dates d'ouverture des usines étant si
importantes, les attributions de prises et de quotas doivent être
décidées en temps voulu—avec un peu d'esprit d'initiative et
d'organisation, tant du côté des pouvoirs publics que des syndicats
au début de l'année, bon nombre de ces problèmes peuvent être
réglés dans l'intérêt de toute la collectivité, des deux côtés de
l'équation.
Je suis sûr que les pêcheurs préféreraient débarquer leur poisson à terre et fournir des emplois à terre plutôt que de vendre aux navires-usines, si on leur offre un choix raisonnable. Encore une fois, je pense que si le gouvernement jouait son rôle, vous ne rencontreriez pas les problèmes que vous connaissez.
Qu'en est-il des stocks? Sachant que vous en êtes réduit au merlu, car le merlu, chez nous, est l'espèce la plus méprisée... Personne n'aurait pris la peine de pêcher du merlu ou une espèce comme celle-ci lorsque nous avions quantité de morue, de capelan et de hareng. Nous en sommes réduits maintenant aux crustacés et si quelque chose arrive à nos stocks de crevette et de crabe, ce sera la catastrophe, car nous avons perdu tout notre poisson de fond.
Comment vos stocks résistent-ils dans la région? Pour le merlu, ça va. Mais qu'en est-il des autres stocks? Vous dites que vous n'avez pas accès à cause des marchés, ou d'autres raisons de cet ordre, mais est-ce également dû au déclin des stocks?
M. Norm Sigmund: Nos stocks de poisson de fond se portent à merveille, mais ils sont contrôlés par des détenteurs de permis qui les emmènent là où le poisson peut être conditionné de la façon la plus rentable. Nous avions jadis une pêcherie olympique, où vous pouviez sortir n'importe quand et prendre autant que vous vouliez et débarquer le poisson en continu. Aujourd'hui, tout le monde a un contingent fixe, un CI, sans être limité dans le temps. Les pêcheurs peuvent donc maximiser leur intérêt commercial et emmener le poisson à Vancouver pour transformation et c'est cela qui nous a fait du tort. Nous avons perdu tout cela. Nous ne recevons plus le flétan, le hareng et la morue noire. Toutes les autres espèces ne sont plus débarquées chez nous. Il faudra faire quelque chose pour les récupérer. Mais les stocks sont en bon état.
Le président: Monsieur Cuzner.
Désolé, Garth, vous vouliez ajouter quelque chose?
M. Garth Mirau: Je veux simplement faire ressortir que Norm connaît beaucoup mieux que moi la pêche du poisson de fond et a une connaissance de première main des stocks et il est très respecté. S'il dit qu'il y a du poisson, je crois qu'il y a du poisson.
Cette année, la perception règne qu'il y a une pénurie de saumon en Colombie-Britannique. Or, par exemple, le fleuve Skeena a enregistré au cours de trois des cinq dernières années des montaisons record de saumon. Le fleuve Fraser, cette année, a connu la quatrième plus grosse montaison jamais vue depuis que l'on compte le poisson—plus de 30 millions de saumon. Les baies de l'île de Vancouver et du continent sont remplies de saumon kéta, sans que les pêcheurs puissent y accéder. Par voie de conséquence, les travailleurs à terre n'ont pas non plus de travail.
Cette industrie était précédemment diversifiée, pas seulement au niveau des usines de conditionnement mais également au niveau des pêcheurs. Mais du fait des politiques du MPO, du gouvernement fédéral, cette diversification n'existe plus. Aujourd'hui, nous sommes chacun limités à une espèce et cela tue tout le monde. Cela tue les pêcheurs et les conditionneurs et les travailleurs à terre se retrouvent sans travail du tout. Nous en sommes arrivés au point où les gestionnaires du ministère des Pêches ne savent plus comment gérer la pêcherie. Ils savent uniquement gérer les fermetures de la pêche. Voilà la réalité par ici.
Le président: Monsieur Cuzner.
M. Rodger Cuzner: Ne devrions-nous pas, pour la gouverne des membres du comité, nous procurer le plan de coentreprise original, ne serait-ce qu'à titre de référence? Nous avons ici quelques compagnies qui ont effectué d'importants investissements dans la transformation parce qu'il manquait de capacité et elles ont pris des risques financiers afin de développer le conditionnement à terre. Il serait peut-être bon d'avoir au moins ce document sous la main.
Madame St. Jacques, vous avez dit avoir contacté le député provincial au sujet du comité qui va dresser le nouveau plan et on vous a donné l'échéancier. Avez-vous idée de ce que sera la composition de ce comité, qui y siégera?
Le président: Madame la mairesse.
Mme Diane St. Jacques: Merci.
Non, nous n'avons malheureusement aucun autre renseignement, ce qui nous inquiète. Lorsque le ministre provincial des Pêches nous a dit cela, nous y avons cru. Il ne m'est même pas venu à l'idée que le MPO pourrait ne pas tenir cet engagement à son endroit. Mais, malheureusement, nous n'avons rien entendu depuis.
Le président: Monsieur Bourke.
M. Paul Bourke: Nous sommes également très préoccupés par la manière dont ce réexamen sera effectué et qui va s'en charger.
Si l'on se fie au passé, le MPO habituellement désigne ses propres bureaucrates pour revoir les décisions prises par ces mêmes bureaucrates. En ce qui concerne notre situation ici, nous avons des administrateurs qui sont liés de très longue date à cette pêcherie étrangère. Ils y sont très attachés. Il est réellement injuste à notre endroit de les charger eux-mêmes de revoir leur travail et d'en évaluer les résultats.
Nous avons demandé au ministre, et nous vous demandons d'insister auprès de lui, de nommer à la présidence de ce comité quelqu'un qui n'est pas directement impliqué dans la pêche. Ce devrait être une personne impartiale, peut-être un universitaire, qui n'a pas d'antécédents dans le secteur et dont l'emploi ne dépend pas des décisions prises.
Les administrateurs eux aussi vivent à nos crochets. S'ils ne nous avaient pas, nous autres imbéciles qui nous démenons pour transformer ce poisson et l'attraper, eux aussi seraient chômeurs. Il nous faut réellement quelqu'un à la présidence de ce comité qui soit prêt à nous écouter et qui n'a pas de parti pris.
Un employé du MPO ne fera certainement pas l'affaire, à nos yeux. Il faut une personnalité impartiale.
Le président: Merci, monsieur Bourke.
Vous aviez une question, John. Ce sera la dernière question.
M. John Cummins: Je veux revenir sur cette notion de filet de sécurité que représente la coentreprise. Que se passe-t-il si le poisson ne se rassemble pas dans les eaux adjacentes? Est-ce que les transformateurs ont mis en place une solution d'urgence si ce genre de chose arrive? Qu'en est-il?
Le président: Monsieur Bourke.
M. Paul Bourke: Oui.
Nous achetions jadis notre poisson dans toute l'île. Le merlu est très périssable. Il doit être manutentionné avec beaucoup de soins. Mais nous pensons pouvoir faire face à une telle situation.
Il y a également des usines de transformation aux États-Unis, toutes proches de la frontière. Je ne pense pas qu'il y ait de problème. S'il y en avait un, et s'il est d'envergure catastrophique, nous trouverons une solution le moment venu.
S'il fallait faire venir un navire-usine vers la fin de la saison, ou quelque chose de ce genre, l'industrie pourra toujours décider de le faire. Mais il ne faudrait pas le faire venir dès le départ, avant même qu'il y ait un problème.
M. John Cummins: Je pensais à...
Le président: John, si je puis vous interrompre une minute, M. Sigmund veut intervenir. Monsieur Sigmund.
M. Norm Sigmund: Je ne veux pas toujours ramener les quatre ou cinq dernières années, mais ces problèmes surgissent. Ce poisson est périssable. Il n'est pas économiquement viable de l'emmener jusqu'au sud de l'île. Ce n'est rentable pour personne. La qualité du produit se détériore. C'est pourquoi nous avons cessé de le débarquer ici. Il y a deux ans, pendant la campagne 2000, ils transformaient de la bouillie. Lorsque M. Bourke dit qu'un plan d'urgence est en place, cela est totalement faux, à mon avis.
Comme je l'ai déjà dit, s'il est question de faire venir une flotte comme filet de sécurité, il ne suffit pas de claquer des doigts pour voir apparaître une flotte de coentreprise. Cela exige beaucoup de préparation: il faut obtenir des permis, signer des contrats. On ne va pas faire apparaître une flotte comme par magie.
Nous nous sommes retrouvés dans cette situation année après année après année. En 1999, David Fiddler, un de mes amis, a presque fait faillite parce que PCP a fermé ses portes. Plusieurs autres navires ont été dans la même situation. Je réponds donc non, il n'y a pas de plan d'urgence.
Si le poisson se cantonne dans les îles de la Reine-Charlotte, il n'y a absolument aucun moyen de le récolter. Si le poisson se trouve dans...
Je faisais 24 heures de route jusqu'à la zone de pêche et 24 heures au retour. La durée de conservation du merlu est de 24 à 36 heures. Mon temps de voyage était de 48 heures. Il est impossible de pêcher le poisson dans ce genre de scénario.
M. John Cummins: L'autre question sur laquelle j'aimerais des précisions est la notion qu'il faut un volume minimum de poisson avant qu'une usine de conditionnement puisse démarrer. Je crois savoir que chez Port Fish vous avez une production diversifiée, avec le surimi, l'étêtage et éviscération, les saucisses, etc. Avez-vous besoin d'un volume minimal avant de pouvoir conditionner le merlu?
Je pose la question d'abord à Port Fish et j'allais poser la même à M. Bourke—ou à quiconque veut répondre en premier.
Le président: M. Bray d'abord, puis M. Bourke.
Monsieur Bray.
M. Jock Bray: Merci. Notre niveau plancher est assez bas. Nous pouvons probablement accepter une livraison de 24 ou 25 tonnes. Nous l'avons déjà fait. Encore une fois, le problème est celui du nettoyage. Ce n'est pas quelque chose que nous voulons faire régulièrement. Nous le faisons assez fréquemment—vous savez, le mauvais temps amène des navires de pêche, ce genre de choses. Nous sommes très capables de conditionner cinq tonnes, si c'est tout ce que nous recevons.
C'est simplement qu'une fois que nous mettons l'usine en marche, c'est un travail continu. Notre usine tourne normalement 24 heures par jour, sept jours par semaine. Elle n'arrête jamais. C'est cela l'utilisation la plus rentable de l'équipement et le meilleur rendement sur l'investissement, car vous perdez du rendement chaque fois que vous arrêtez la chaîne et devez nettoyer. Il faut nettoyer toutes les machines et toutes les surfaces.
Oui, nous pouvons faire du filet, nous pouvons broyer, nous pouvons étêter et éviscérer, nous pouvons faire des saucisses. Nous pouvons faire toutes sortes de choses différentes. Les petits volumes ne sont pas nécessairement un problème, mais ils ne représentent pas l'exploitation la plus efficiente de l'usine.
Le président: Monsieur Bourke.
M. Paul Bourke: Dans notre cas, nous pouvons transformer environ 300 tonnes par jours en surimi. Avec notre chaîne de filetage—nous venons d'installer une nouvelle chaîne cette année—nous pouvons probablement traiter de 50 à 100 tonnes, au minimum.
Il faut savoir que les pêcheurs ne remplissent pas toujours leur navire. Au début et à la fin de la saison, nous passons contrat avec un navire pour qu'il nous livre le poisson. S'il n'en prend pas assez, nous déchargeons le poisson et le vendons à la société de Jock et à Wholey, donc nous répartissons ce chargement à d'autres usines. Le poisson n'est pas gaspillé, mais il n'est pas économique de travailler en dessous d'un certain volume. C'est comme un dragueur. Vous ne pouvez exploiter un dragueur d'une capacité de 200 tonnes par jour et n'en ramasser que dix. C'est impossible.
Nous avions initialement une chaîne de filetage en 1991, et les pêcheurs nous ont dit: «Vous ne pouvez pas accepter plus de 50 ou 75 tonnes. Il nous faut 200 ou 300 tonnes». Nous avons donc construit une usine de surimi et ils nous ont dit: «Ça ne va pas, vous ne faites que du surimi». Nous avons maintenant les deux et nous pouvons faire l'étêtage et l'éviscération.
L'une des raisons pour lesquelles une décision est urgente pour nous est qu'il nous faut une plus grande capacité de congélation, de façon à pouvoir faire tourner l'usine de surimi et l'usine de filetage en même temps. Nous pouvons le faire si nous avons une décision avant Noël; nous avons le temps d'installer des chambres de congélation supplémentaires. Mais si nous n'avons une décision que la dernière semaine de juin, comme cela va probablement arriver, cela ne se fera pas. C'est pourquoi nous avons besoin de réponses.
Le président: Merci, monsieur Bourke. Merci, John.
Nous devons nous arrêter là. Je tiens à remercier les témoins de leurs témoignages. Nous comprenons l'urgence de la situation, d'une décision. Je ne sais pas dans quel délai nous pourrons boucler notre rapport. Nous essaierons de le faire dans la prochaine quinzaine.
À notre retour à Ottawa, nous allons certainement saisir le ministre de l'urgence de la situation et de la nécessité d'une décision avant Noël. Ensuite, nous déposerons notre rapport aussi rapidement que possible. C'est le mieux que je puisse vous dire pour le moment. Nous informerons le ministre lundi matin de l'urgence d'une décision finale.
James, avez-vous un mot de la fin?
M. James Lunney: J'ai un dernier commentaire.
Diane, vous disiez avoir une lettre ou un accord du ministre des Pêches de la Colombie-Britannique au sujet de l'achèvement d'un examen avant la fin de l'année? Si vous avez un document, il nous serait utile de l'avoir.
Mme Diane St. Jacques: Désolée, James, il n'y pas de document. Je me trouvais à l'UBCM, à une réunion avec M. van Dongen, qui est tout à fait notre allié dans ces tractations. Lui et ses adjoints venaient de rencontrer le matin même le MPO et c'est ce qu'on leur avait dit, car ils poursuivent le même objectif que nous.
Le président: D'accord, merci.
Je signale aux membres du comité que nous devons absolument lever la séance à quatre heures au plus tard, sinon nous ne serons jamais à Prince Rupert demain. Nous avons encore deux groupes de témoins à entendre. Nous ne prendrons pas de pause-déjeuner. Nous avons demandé que l'on nous serve une collation ici et je demande aux membres du comité de prendre dix minutes, de se servir et de manger ici, et nous allons entendre sans tarder notre prochain témoin, car nous devons absolument terminer d'ici 3 h 10.
Le groupe d'Alberni sera le premier. Nous reprendrons la séance dans dix minutes. Merci, encore une fois.
Le président: Très bien. La séance est ouverte.
Je signale pour le procès-verbal que cette réunion porte sur les problèmes de la pêche à Port Alberni. Nous avons quatre témoins, je crois. Nous allons avoir un tour de questions très serré, car nous devons partir d'ici à 3 h 10 et nous aurons encore un autre témoin à entendre. Nous aurons donc des tours de questions de trois ou quatre minutes.
Nous allons commencer avec M. Darren de Luca, de l'Alberni Valley Sport Fishing Association.
M. Darren de Luca (directeur, Alberni Valley Sport Fishing Association): Merci, monsieur Easter.
Je soumets à votre attention notre mémoire, qui est en train d'être distribué. Il est intitulé mémoire au Comité permanent des pêches et océans.
Je vous remercie de votre invitation à comparaître, au nom de l'Alberni Valley Sport Fishing Association. Nous regrettons de devoir critiquer ici la gestion de la pêche récréative, mais nous estimons que la gravité du problème exige l'intervention et l'examen de ce comité.
En 2001, la pêche récréative de la côte ouest de l'île de Vancouver a subi de sévères restrictions afin de protéger les stocks de saumon quinnat. L'Alberni Valley Sport Fishing Association a soutenu ces mesures et collaboré avec le ministère des Pêches et des Océans en vue de concevoir des plans de pêche récréative propres à remplir les objectifs de gestion du MPO.
Il était clair que la seule véritable occasion pour Port Alberni d'avoir une pêcherie viable porterait sur la montaison du saumon rouge, une population saine, retournant cette année. À notre grand choc et inquiétude, nous avons vu les mesures de gestion du MPO détruire le peu de perspectives qui nous restaient. La décision a eu des conséquences profondes et néfastes sur les relations futures avec le MPO et sur la santé économique de notre région. Une bonne partie du plan de gestion du saumon rouge est contenue dans ce document que vous voyez.
Tout le monde ici connaît-il le Conseil consultatif de la pêche sportive? Quelqu'un ne le connaît-il pas? Ce conseil a été mis sur pied par le ministre afin de fournir des conseils sur la pêche récréative. C'est une structure de consultation à l'échelle de la province. Nous sommes le comité local de cette structure d'ensemble, je vous le signale.
Le 13 juillet 2001, les gestionnaires de la pêche du MPO ont convoqué les représentants de l'AVSFA, en rapport avec le plan de gestion du saumon rouge de la Somass, pour nous informer que le ministère ramenait la limite de prise de saumon rouge à deux poissons par jour à compter du mardi 17 juillet. La raison donnée était que la pêche sportive avait dépassé la limite prévue dans le plan de gestion du saumon rouge de la Somass et qu'il fallait la restreindre.
Nous avons protesté contre cette décision pour plusieurs raisons. Premièrement, nous avons fait valoir que la saison touristique n'était qu'à son milieu et que notre pêche commençait tout juste. Deuxièmement, nous avons signalé que le problème résidait dans le plan de gestion du saumon rouge de la Somass établi par le MPO, qui sous-estimait largement le nombre de poissons à nous octroyer pour remplir les obligations du ministère envers les pêcheurs sportifs au titre de la politique de répartition en vigueur.
Troisièmement, nous avons fait remarquer qu'il n'y avait pas de problème de conservation. Les pêcheurs signalaient de grandes quantités de poissons argentés, les conditions environnementales étaient positives et la pluie imminente signifiait que la migration s'intensifierait sensiblement. Nous ne voyions aucune raison de paniquer. Nous avons convenu que si les chiffres d'échappement ne s'amélioreraient pas d'ici la réévaluation de prévision du 19 juillet, la limite de prise récréative serait ramenée à deux poissons par jour.
La décision de fermer la pêche le 20 juillet afin de respecter les objectifs du plan de gestion du saumon rouge de la Somass a été prise par le MPO seul. La raison en reste un mystère. L'échappement au cours de la semaine en question a atteint des proportions records. Du 13 au 20 juillet, plus de 133 000 saumons rouges adultes sont remontés dans les lacs Sproat et Great Central. La semaine suivante, 107 000 saumons adultes de plus sont remontés. Nous savons aujourd'hui que plus de 500 000 saumons rouges adultes et 300 000 saumons d'un an sont remontés dans le bassin, dépassant de loin les objectifs de gestion du MPO.
• 1340
Le prochain titre est «Une nouvelle orientation: Politique de
répartition du saumon du Pacifique». Je crois que cette politique
de répartition vous a été communiquée. C'est un document du MPO et
je m'y réfère. Ce que je vais dire est tiré directement de ce
document.
La politique de répartition du MPO est assortie de critères et de lignes directrices clairs devant régir l'élaboration des plans de pêche récréative du saumon rouge. Voici ces critères:
La pêche récréative du saumon rouge n'aura lieu qu'une fois remplis les besoins de conservation et les besoins des Premières nations au titre de l'article 35—pêche aux fins alimentaires, sociales, et rituelles.
La pêche récréative sera gérée de façon à offrir des opportunités stables et prévisibles de pêche sportive du saumon rouge.
Les activités de gestion viseront une expansion ordonnée de la pêche récréative du saumon rouge, tout en minimisant l'impact sur la pêche commerciale.
La pêche récréative de saumon rouge sera limitée à une moyenne maximale de 5 p. 100 de la prise récréative combinée au cours de la période 1999-2005. C'est là un plafond applicable à toute la côte. Si 10 000 poissons sont pris au total, 5 p. 100 en moyenne seront alloués à la pêche récréative.
Sur la base des lignes directrices ci-dessus, une limite quotidienne de quatre saumons par jour s'applique.
Malheureusement, les gestionnaires de la pêche de la côte Sud ont enfreint et l'esprit et la lettre de cette politique.
«Retombées économiques et impacts à long terme»: l'impact a été rapide et brutal. L'effort de pêche est tombé du jour au lendemain de plus de 500 bateaux par jour à moins de 40. Les touristes déjà arrivés sont repartis immédiatement. Les touristes qui arrivaient étaient indignés, ayant réservé leur séjour bien à l'avance et ayant dépensé des sommes considérables pour se rendre à Port Alberni. Les terrains de camping, les marinas, les guides et les entreprises de services ont encaissé un choc terrible.
Si l'on chiffre l'effort de pêche perdu à seulement 100 $ par bateau et par jour, Port Alberni a connu un manque à gagner de plus de 50 000 $ par jour. La pêche n'a jamais récupéré et toute la saison a été perdue, avec des pertes se chiffrant par millions. Des marchés ont été détruits, les touristes refusant de revenir l'an prochain et l'investissement dans l'industrie est inexistant. La reprise sera lente et incertaine.
«Reconstruire notre crédibilité». Je pense que c'est cela le plus important. L'Alberni Valley Sport Fishing Association demande l'aide du comité pour réparer les dégâts commis et assurer que cela ne se reproduise plus.
Nous formulons trois demandes en particulier:
Premièrement, que le comité appuie l'ouverture d'une étude visant à évaluer la valeur économique de la pêche sportive dans la région d'Alberni-Clayoquot. Le rapport servira à informer les décideurs du MPO de l'importance de la pêche sportive pour l'économie de la région et les entreprises et l'infrastructure qui en dépendent. Nous demandons une contribution de 17 500 $, soit 50 p. 100 des coûts, du gouvernement fédéral. Nous nous engageons à lever l'autre moitié de la somme et nous n'en sommes plus très loin.
Deuxièmement, que le comité soutienne un vaste programme de reconquête du marché pour Port Alberni, de façon à retrouver la part de marché perdue par suite de la décision du MPO de fermer la pêche en pleine saison.
Troisièmement, que votre comité invite le ministre des Pêches et des Océans à donner instruction à son personnel de revoir le plan de gestion du saumon rouge de la Somass, de respecter la politique de répartition «Orientations nouvelles» et d'assurer une opportunité stable et prévisible et une limite de quatre poissons par jour pour la pêche sportive du saumon rouge de la baie d'Alberni.
Je vous remercie de votre attention, au nom de l'Alberni Valley Sport Fishing Association et de la ville d'Alberni.
Le président: Merci, Darren.
James les a mentionnées, mais pourriez-vous répéter les dates. La pêche a été fermée et rouverte une semaine après? Pourriez-vous m'indiquer les dates?
M. Darren de Luca: Elle a été fermée le samedi 20 et, je crois, rouverte le 27.
Le président: Mais, en gros, elle a été fermée immédiatement...
M. Darren de Luca: C'est juste. Elle a été...
Le président: ...et je comprends l'indignation des gens. J'ai vu ce genre de choses arriver ailleurs, sans que ce soit le fait du MPO.
Et elle a été rouverte une semaine plus tard.
M. Darren de Luca: Oui.
Le président: Bien. Je me demandais.
M. Darren de Luca: Elle a été fermée un vendredi après-midi, si bien que tout le monde était à peu près en transit.
Le président: Merci, Darren.
Je donne la parole à M. Kramer, de la Marina China Creek.
M. Bruce Kramer (propriétaire, Marina China Creek): Merci beaucoup.
Voici juste quelques faits et chiffres, en rapport avec ce que Darren a déjà dit. Je pense que vous avez une copie de ce petit document.
Je gère l'une des trois marinas de Port Alberni, la mienne appartenant à l'Administration portuaire de Port Alberni. J'étais à ces réunions tenues pendant l'été avec le ministère, ainsi qu'à celle qui a eu lieu une semaine avant la fermeture totale, intervenue le 20 juillet. Tout allait pour le mieux et tous les groupes d'usagers présents à la réunion étaient satisfaits. Tout allait bien, tout le monde s'amusait.
• 1345
Comme vous pouvez le voir sur ma liste, nous avons quelque
260 emplacements de camping. Le 20 juillet, le jour où ils ont
annoncé la fermeture à midi, nous avions 17 emplacements vacants.
Vingt-quatre heures plus tard, nous avions 207 emplacements vides.
Les chiffres continuent ainsi jusqu'à la fin d'août, ce qui montre que la pêcherie n'a jamais récupéré. Nous estimons le manque à gagner pour cette période de 41 jours à environ 72 000 $, et cela juste pour un terrain de camping sur les nombreux qui existent dans la région.
Donc, suite à cette décision—prise un vendredi à midi, la fermeture prenant effet à minuit, nous avons été confrontés à un grand nombre de touristes furieux débarquant des traversiers, qui avaient dépensé des milliers de dollars pour venir passer deux semaines de vacances chez nous et qui étaient très en colère.
Nous avons organisé des réunions publiques auxquelles M. Lunney a assisté, ainsi que notre maire adjoint. Le ministère a été invité. Pour je ne sais quelle raison, personne du ministère n'est venu expliquer sa position.
Ce que j'essaie de dire, ce que j'aimerais réellement—nous ne pouvons plus rien faire au sujet de cet argent perdu, mais ce que j'aimerais réellement pour l'avenir, c'est un engagement que, si ces choses doivent se reproduire, nous ayons un certain préavis. Et cela ne devrait plus jamais se reproduire lorsque nous avons une si grande quantité de poissons. Voilà en gros ce que je voulais dire.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Kramer. Nous aurons des questions pour vous plus tard.
Je crois que c'est le tour de M. Cole. M. Cole est le propriétaire de Port Boat House.
M. Bob Cole (propriétaire, Port Boat House): Je suis propriétaire d'une entreprise marine, Port Boat House, et je suis le vice-président de la chambre de commerce. Je comparais ici à ces deux titres.
Je pense que M. Kramer a fait une intervention courte car il sait que je suis plutôt loquace. Aussi, n'hésitez pas, frappez de votre maillet lorsque vous voudrez que je me taise.
On vous a distribué un document assez volumineux et il contient quelques annexes...
Le président: Vous n'êtes pas apparenté à Peter Stoffer, par hasard?
M. Bob Cole: Non.
Le président: Il est loquace, lui aussi.
Des voix: Oh, oh!
M. Bob Cole: Je viens juste de le rencontrer et l'ai invité à revenir.
Notre région a été dévastée économiquement par le ralentissement des industries d'exploitation des richesses naturelles, comme d'autres l'ont déjà dit, et le tourisme, et particulièrement le tourisme de pêche sportive, a été notre bouée de sauvetage, comme ici à Ucluelet.
Après plusieurs années de restrictions et de fermetures dans la zone 23, ainsi que d'efforts de restauration et d'amélioration de l'habitat déployés par les bénévoles locaux, nous commencions à voir les montaisons traditionnelles de saumon et les avantages économiques d'une ressource abondante.
La confiance et l'esprit d'entreprise étaient revenus parmi les guides locaux, les terrains de camping, les hôtels et d'autres entreprises apparentées, y compris la mienne, avec le retour en nombre des touristes et des poissons.
Juste comme la saison touristique commençait à battre son plein, les commerces, les restaurants et magasins locaux voyant affluer la clientèle, le MPO a unilatéralement fermé sans préavis et sans raison valable la pêche du saumon rouge.
La fermeture a été décrétée en dépit de la recommandation contraire du comité de cogestion local. Premièrement, la décision était fondée sur une évaluation totalement inexacte, et contestée à juste titre, du stock. Je vous invite à vous reporter aux annexes I et II. Elles sont peut-être difficiles à suivre, mais nous les connaissons par coeur. Il s'agit des chiffres d'échappement du saumon rouge de la Somass et vous voyez une flèche devant le 20 juillet—«7/20»—qui montre une échappée ce jour-là de 20 534 poissons. Le 17 juillet, trois jours plus tôt, 19 300 poissons sont passés par le compteur.
En fait, d'après les chiffres utilisés dans l'avis de fermeture—annexe 2—le 17 juillet, ils disaient que l'échappement avait été de 90 000 poissons, et typiquement on est là proche de la mi-saison de montaison. Nous savions, d'après ce que nous disaient tous les gens qui pêchaient et tous ceux qui affluaient dans les marinas et aux balances, et nous le répétions au ministère: «Il y a beaucoup de poissons en mer. Votre seul bateau de pêche expérimentale se trompe. C'est nous qui avons raison; les poissons sont très brillants. Il y en a beaucoup de nouveaux qui arrivent chaque jour». Nous avions 500 bateaux sur l'eau par jour, selon les chiffres du MPO, et tous disaient la même chose. Ils prenaient beaucoup de poissons.
La pêche a été fermée le 20 juillet, alors que nous leur demandions d'attendre plutôt les chiffres de la réévaluation du 19 juillet. Les chiffres étaient déjà calculés et je les connaissais, et je suis sûr que le ministère pouvait y accéder, et ils montraient que 80 000 poissons de plus étaient passés par le compteur entre le 17 et le 20 juillet—des poissons adultes.
C'est pratiquement le double du nombre auquel ils se sont fiés pour décider la fermeture.
• 1350
En outre, dans ce document du 17 juillet, on voit que la
température de la rivière avait baissé de deux degrés, depuis
l'apogée intervenue plus tôt dans le mois. Le taux d'échappement
s'était considérablement amélioré. Pourtant, dans ce document, daté
du 19 juillet, ils ont choisi de fermer la pêche sportive. Je vous
parlerai plus loin d'une autre raison de la fermeture.
Deuxièmement, le MPO n'a tenu compte en rien de l'impact économique immédiat et à long terme d'une fermeture aussi précoce.
Troisièmement, le ministère n'a reconnu aucune erreur, ni dans sa décision ni dans les chiffres utilisés pour justifier la fermeture—ce qui terrifie les entreprises locales qui ont été si durement touchées cette année, sachant que cela pourrait tout aussi bien se reproduire l'an prochain, si rien n'est fait.
L'effet de la fermeture a été instantané et dévastateur. Les touristes ont évacué la vallée, beaucoup cherchant à sauver leurs vacances de pêche ailleurs, d'autres rentrant simplement chez eux déçus et mécontents. Les chiffres de bateaux sur l'eau témoignent des dégâts instantanés et durables de cette décision. À la deuxième page de l'annexe 2, vous voyez les nombres de bateaux comptés par le ministère des pêches. Ils commencent le 1er août. Mais si vous vous reportez à la première page, l'effort de pêche—le nombre de bateaux—va de 321 à 443 par jour jusqu'à cette date du 19 juillet. Ensuite, le plus grand nombre de bateaux n'a été que de 84—annexe 2, page 2, et c'était le lundi de la longue fin de semaine d'août. L'effort de pêche n'a jamais récupéré, bien que la pêche ait été ouverte. Nous ne cessons de répéter au ministère des Pêches que l'on ne peut fermer et ouvrir la pêche récréative comme la pêche commerciale. Les touristes ne vont pas attendre.
La plupart des commerces m'ont fait part—et mon entreprise est un exemple—d'une chute de 40 p. 100 à 50 p. 100 du chiffre d'affaires, du jour au lendemain, entre le vendredi 19 juillet et le lundi. Cela comprend des commerces comme Gone Fishin', qui vend du matériel de pêche—une diminution de 40 p. 100 et jamais de reprise. La Marina de China Creek a enregistré la même baisse. Ma propre entreprise battait des records jusqu'à la fermeture de juillet. Nous commencions tout juste à voir les affaires repartir, grâce à la pêche sportive et au tourisme de pêche. Notre chiffre d'affaires d'août a été en baisse de 40 p. 100. Cela fait une diminution de 55 p. 100 par rapport à une année typique, car au cours des dix dernières années nous faisions normalement 15 p. 100 de plus en août qu'en juillet. Nos chiffres de septembre étaient en recul de 68 p. 100, soit 58 p. 100 de moins que la moyenne de dix ans. Et encore, moi-même n'ai pas été le plus touché. Ceux qui sont touchés les plus directement—les guides et loueurs de bateaux de pêche et centres de villégiature avec pêche ont souffert encore beaucoup plus que cela.
En dépit de la réouverture la semaine suivante, les affaires n'ont jamais repris. Effectivement, tout le reste de la province considérait notre région comme fermée à la pêche jusqu'à la fin de l'année. J'étais à Kelowna en août et plusieurs personnes m'ont dit que c'était triste que la pêche soit fermée chez nous. J'ai expliqué qu'elle avait rouvert la semaine suivante. Nous avons fait de notre mieux pour diffuser le message que nous étions rouverts, sans succès. S'il y a un avis de fermeture de pêche, accompagné de grands titres disant «Pas de réouverture envisagée», personne ne lit le journal le lendemain quand la situation a changé.
J'ai déjà parlé du mois d'août, le pire depuis dix ans, avec une baisse de 40 p. 100, et de septembre, avec une chute du chiffre d'affaires de 68 p. 100, dans mon entreprise.
Outre mon rôle au sein de la Chambre de commerce, j'ai été membre du Conseil consultatif de la pêche sportive d'Alberni depuis le début des années 80 et je commence à connaître très bien le saumon rouge de la baie d'Alberni, qui possède ses caractéristiques propres, et j'ai remarqué un démantèlement presque systématique de cette pêcherie par la réglementation du MPO au cours des dernières années. Darren a dit qu'on cherche à nous rogner les ailes.
L'annexe 3 contient plusieurs pages. Si vous voulez bien suivre avec moi, la première page résume la prise de saumon rouge plus l'échappement dans la baie d'Alberni entre 1980 et 1998. Si vous allez au milieu de la page, vous voyez la montaison totale de la Somass avec des chiffres variant entre 987 000 jusqu'à un million à la grande époque de 1981, 1983, 1984 et, de nouveau, en 1991 et 1993—de grandes années pour la pêche du saumon rouge, pour la pêche commerciale, les Autochtones et tout le monde. Pour toutes ces années—dans la colonne du milieu, aux trois quarts de la page, vous voyez la prise sportive escomptée. Pour chacune de ces années, sauf les années surabondantes, la prise sportive escomptée est d'environ 10 p. 100 de la montaison, et ce jusqu'en 1998, où le pourcentage est encore inchangé.
• 1355
Si vous tournez la page, vous verrez le plan de gestion du
saumon rouge de la rivière Somass pour 1999, et si vous descendez
jusqu'à la flèche—et j'ai pris cette année en raison de la
montaison estimative cette année-là, sous-estimée même à
600 000—vous verrez que l'on nous a ramené à 54 000, soit au moins
1 p. 100 de moins que le chiffre traditionnel.
Si vous tournez la page et passez à 2000, et descendez jusqu'à 600 000, et regardez le chiffre de la prise sportive, vous voyez que l'on nous a ramenés à 42 000 comme prise escomptée en 2000.
Si vous passez à la page suivante, l'année 2001—désolé, le format est différent—et descendez jusqu'à 600 000 et regardez en face de ce chiffre, vous voyez que l'on nous a ramenés à 36 000.
Dans l'avis de fermeture de la pêche, on disait que nous avions dépassé notre attribution de prise. Eh bien, c'était une attribution réduite. Si on nous la réduit de nouveau l'an prochain, nous allons encore une fois la dépasser avant de commencer.
Les sommaires de prises et d'échappées de saumon rouge montrent la prise sportive historique et, comme vous pouvez le voir, elle a été réduite. Tout allait bien de 1980 jusqu'en 1998. Entre 1998 et 2001, on nous a ramenés de 10 p. 100 à moins de 6 p. 100, sans aucune justification. Au cours des deux dernières années, le nombre de saumons montants a augmenté.
La colère des habitants contre le MPO transparaît d'une pétition de 700 noms signés par les habitants et les touristes dans les jours qui ont suivi la fermeture. La pétition a été remise le mercredi suivant la clôture. Ces signatures ont été recueillies en l'espace de quatre ou cinq jours. Sept cent noms demandant au ministre d'intervenir et de revenir sur la fermeture. Nous en avons envoyé une copie au ministre et vous pouvez parcourir la pétition et voir d'où viennent les signataires. Beaucoup de locaux, beaucoup de touristes, et beaucoup venus de loin. Il y en a de Californie, du Nouveau-Mexique, de l'Idaho, de l'Alberta et beaucoup de l'intérieur de la Colombie-Britannique. Certains d'entre eux, nous le craignons, ne reviendront jamais.
Vous trouverez par ailleurs dans la documentation une série de communiqués de presse et de coupures de presse. Elle montre que la localité était généralement indignée et s'est mobilisée. Des gens qui ne prennent jamais la parole se sont exprimés dans les médias et se sont plaints du court préavis, de la fermeture injustifiée et de l'effet économique sur la vallée.
La ville et la Chambre de commerce ont organisé une réunion, dont M. Kramer a fait état, et à laquelle notre député et notre maire adjoint ont assisté, à la suite de laquelle la ville a rédigé une lettre. Vous la trouverez à la toute dernière page de l'annexe, une lettre du maire adjoint nous exprimant son appui. Il y est question d'une pièce jointe et celle-ci est à votre disposition. C'était un document présenté par le Conseil consultatif de la pêche sportive de la vallée d'Alberni présentée à cette réunion publique.
Il nous faut quantifier l'impact afin que dorénavant les décisions du MPO prennent en compte le facteur économique. S'il faut diminuer notre prise, s'il y a des raisons politiques ou autres de changer les chiffres en cours de saison, il faut prendre en considération le facteur économique—cela va coûter un million de dollars à l'économie ou cela va coûter un dollar. C'est indispensable. Nous avons commencé une étude et nous aimerions que le ministère des Pêches y participe afin que les renseignements recueillis profitent à tous.
Comme Darren l'a fait ressortir, le plan de gestion du saumon rouge de la Somass doit faire à la pêche sportive une place suffisante, qui réponde aux besoins de la collectivité et corresponde à l'esprit et à la lettre de la politique d'attribution. Ce n'est pas difficile. C'est ce que nous avons eu pendant huit ans et on nous l'a diminuée au cours des trois dernières années.
Surtout, il faut reconstruire et restaurer notre crédibilité et la confiance dans la pêche sportive dans la zone 23, et ce pour toutes les espèces. Le poisson revient, pour certaines espèces en nombre record, et vous demandiez tout à l'heure quel est l'état des stocks. Il faut un marketing ciblé, inviter les gens à revenir, annoncer tôt dans l'année les chiffres de prise sportive et la limite quotidienne, afin que les touristes que nous avons chassés l'an dernier reviennent.
Bruce a mentionné, sur la route pour venir ici, qu'il a des clients de longue date—des clients réguliers qui viennent depuis 20 et 30 ans—qui lui ont dit «C'est fini, je ne reviens plus; vous m'avez fait le coup à plusieurs reprises et cette fois-ci est la pire». J'ai des clients qui viennent depuis 20 et 30 ans, comme ce monsieur de Spokane—qui m'a promis une lettre que je n'ai pas encore reçue—qui m'a dit qu'il en a assez et qu'il va aller pêcher ailleurs, probablement en Alaska. C'est une perspective qui effraie réellement la collectivité.
• 1400
Là-dessus, je vous remercie du temps que vous nous accordez.
Je serai ravi de répondre à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Cole.
Nous entendons maintenant M. Lochbaum, directeur régional au MPO.
M. Ed Lochbaum (chef de secteur, Gestion des ressources, Secteur de la côte Sud, ministère des Pêches et des Océans): Oui, merci.
Le président: Allez-y, Ed.
M. Ed Lochbaum: Aimeriez-vous que je réponde aux trois, ou bien...
Le président: Eh bien, avez-vous un exposé?
M. Ed Lochbaum: Je peux parler à partir du texte qui a été distribué à tout le monde.
Le président: D'accord.
M. Ed Lochbaum: Pour l'année 2001, notre prévision de montaison de saumon rouge dans la Somass était de l'ordre de 550 000.
Le président: Si je puis vous interrompre un instant, il s'agit de ce texte-ci. Il est intitulé «Présentation au Comité permanent des pêches et océans: Examen du saumon rouge du détroit de Barkley, 2001». Vous l'avez en anglais et en français.
Allez-y, Ed. Désolé de l'interruption.
M. Ed Lochbaum: Je vais passer rapidement en revue les objectifs du plan. La prévision avant saison était de 550 000. Vous verrez dans ce document un guide de répartition de la prise. Je souligne le mot «guide». La gestion de cette montaison n'est pas une science exacte, comme vous vous en doutez bien.
Les objectifs de notre plan de gestion pour 2001 étaient les suivants: établir un seuil intérimaire de prise; contraster les niveaux d'échappement afin d'en apprendre plus sur la productivité des stocks; assurer des opportunités de pêche plus régulières, avec une moindre variabilité de la prise; assurer que les besoins des Premières nations au titre de l'article 35 soient remplis; assurer des possibilités de pêche sportive lorsque le retour est faible; enfin, donner des possibilités de pêche commerciale une fois les contraintes précédentes satisfaites.
Pour situer le contexte, sachez que je fais partie du groupe de gestion gérant le saumon rouge de la vallée Alberni depuis 1974. J'étais déjà là lorsque les pêcheurs sportifs relâchaient le saumon rouge parce qu'ils recherchaient du quinnat.
J'ai eu le grand plaisir de travailler avec diverses personnes au fil des ans afin de porter cette pêcherie récréative à un niveau tel qu'elle présente un intérêt économique énorme pour cette collectivité. Vu que j'y habite moi-même depuis 12 ans, je comprends parfaitement l'optique dans laquelle se situent nos trois témoins.
La structure de gestion est expliquée dans le document. Nous avons des mécanismes d'évaluation du stock en saison pour tenter de confirmer la prévision avant saison. Dans l'ère de conservation dans laquelle nous sommes entrés, nous suivons de beaucoup plus près les avis des scientifiques, je pense, que par le passé. Lorsque les scientifiques nous disent en cours de saison que la taille de la montaison augmente ou diminue, nous réagissons en conséquence.
Dans le cas particulier qui nous occupe, au cours de la semaine du 20, lorsque nous avons eu connaissance de l'évaluation hebdomadaire du stock, il apparaissait que les chiffres étaient soit équivalents à l'évaluation avant saison soit inférieurs. Nous utilisons cette méthode depuis pas mal d'années et elle s'est avérée un guide très utile en cours de saison.
Lorsque nous sommes juste au niveau ou en dessous de la prévision avant saison, les règles de décisions logiques en cours de saison exigent de fermer toute la pêche, selon la prise jusqu'à cette date et le nombre d'échappées désiré. Nous avons essayé de trouver un terrain d'entente avec la pêcherie sportive. Nous n'en avons malheureusement pas trouvé. Le ministère a donc pris la décision de fermer toutes les pêcheries, y compris la pêcherie autochtone, et c'est ce que nous avons fait.
Ensuite, la semaine suivante, les chiffres de montaison sont apparus un peu plus favorables, mais pas beaucoup. Pour rester prudents, nous avons rouvert la pêche récréative, avec une limite réduite.
• 1405
Encore une fois, je ne soulignerai jamais assez que mes
antécédents font que je comprends parfaitement bien la perturbation
que cette fermeture a causée et, pour ma part, je ne souhaite
jamais revoir cela.
Pour tenter de prévenir une répétition de cette situation, nous nous sommes engagés auprès du Conseil consultatif de la côte sud et de la ville de Port Albani, par l'intermédiaire de son maire adjoint suppléant, de revoir—en quelque sorte—les règles d'engagement pour la saison prochaine et au-delà, afin d'éviter ce genre de perturbation.
J'aimerais faire un commentaire rapide sur les chiffres avancés par Bob et Darren. Historiquement, nous avons toujours plafonné à environ 10 p. 100 la prise récréative de ce stock. La raison pour laquelle le pourcentage a baissé—ou semble avoir baissé—dans ce tableau d'attribution est que le plafond de 10 p. 100 n'a jamais été atteint dans le passé, bien que nos procédures de gestion soient axées là-dessus. En dépit de toutes les perturbations survenues cette année, la pêche récréative, selon notre relevé des prises, a néanmoins capturé environ 11 p. 100 du stock. L'une des raisons pour lesquelles nous étions nerveux, en tant que gestionnaires, est que rarement cette pêcherie n'a atteint 10 p. 100. Cette année, elle a capturé du poisson à tout-va, dès le début.
Cela peut s'expliquer de deux façons: soit un succès de pêche énorme, soit une plus grande abondance que prévue. En cours de saison, c'est un jugement subjectif et sachant qu'en moyenne cette pêcherie n'a jamais dépassé 10 p. 100 et a plafonné à considérablement moins, nous avons opté pour la prudence. C'est l'éthique de la conservation qui nous animait à ce stade, et c'est la décision qui a été prise.
• 1410
Cela dit, vous trouverez dans le document tous les faits et
chiffres définitifs sur la montaison de cette année. En dépit des
données anecdotiques que nous avions en cours de saison—et je le
dis avec tout mon respect pour Bob—la taille de la montaison n'a
été supérieure que de 100 000 à la prévision avant saison. Donc, la
prévision n'était pas si loin de la réalité, mais le fait est que
lorsqu'on est confronté à un certain nombre d'obligations légales
envers les pêcheurs commerciaux et sportifs, sur une montaison de
550 000, en tant que gestionnaire, on n'a pas d'autre choix que la
prudence.
• 1415
Cela étant dit, je suis disposé à répondre à vos questions sur
la pêche sportive et sa fermeture. Je répète que nous nous sommes
engagés auprès de la collectivité à revoir les règles d'engagement
pour l'avenir.
Le président: Merci beaucoup, Ed.
Avant de passer aux questions, je veux remercier tous les témoins de leurs présentations. Nous allons commencer par le député local, M. Lunney.
M. James Lunney: Merci, monsieur le président.
J'aimerais, pour commencer, remonter à ce jour de la fin juillet lorsque la pêche a été fermée si soudainement—une réunion publique a été convoquée d'urgence, comme on l'a mentionné, par le maire suppléant et la Chambre de commerce, je crois, et j'y étais. Je peux dire qu'il y avait là beaucoup de citoyens furieux et indignés, mais aussi des touristes qui n'étaient pas encore repartis: des vacanciers, des campeurs et des touristes furibonds qui étaient venus dans la région, mus par leur passion pour la pêche sportive, que certains n'ont pas encore perdue.
Nous avons entendu à cette occasion un certain nombre d'anecdotes qui illustrent ma pensée. Il y avait un monsieur de la Saskatchewan, qui venait depuis des années, tellement régulièrement qu'il avait même acheté un bateau parce qu'il venait pêcher ici année après année. Il doutait qu'il reviendrait jamais.
Un autre a raconté qu'il avait tiré sa roulotte depuis... Nous sommes une île, bien qu'elle soit tellement grande que nous tendons à oublier que nous sommes une île. Pour venir ici, les touristes tirent leur roulotte depuis les États-Unis, et il leur en coûte à peu près 200 $ de traversier, aller-retour.
La troisième personne était une femme qui fait de la promotion touristique, et son cas illustre bien ce que ces messieurs ont dit. Ces voyagistes doivent vendre leurs forfaits par avance. L'un a parlé d'un groupe de médecins qui étaient en route venant de Californie. Ils venaient chaque année et avaient déjà quitté leurs cabinets et s'étaient fait remplacer par des suppléants. Elle a dû les appeler sur leur téléphone cellulaire pour les avertir que la pêche était fermée et les a trouvés quelque part en Oregon. Lorsqu'on sait tout cela, lorsqu'on considère le nombre de vies qui sont touchées par ce genre de décisions, c'est choquant.
Un autre facteur qu'il faut mentionner est la valeur du secteur de la pêche sportive. Il y a des gens ici qui pourront peut-être expliquer comment ces chiffres ont été calculés. Mais si l'on considère l'argent que dépensent les pêcheurs sportifs dans la collectivité—le prix du camping ou de l'hôtel, les sorties en mer, la location de bateau, l'essence pour leur bateau, l'achat de matériel de pêche—cela équivaut à environ 100 $ par poisson pris, infiniment plus que ce que rapporte tout autre secteur de pêche.
Sachant que cette ville était connue jadis comme la capitale mondiale du saumon... Il y a toujours un panneau à l'entrée de la ville qui le clame, bien que ce soit un mensonge embarrassant depuis quelques années. Une autre collectivité de l'île de Vancouver se prétend elle aussi la capitale mondiale du saumon.
Il ne faut pas perdre de vue que cette collectivité a souffert du déclin de l'exploitation forestière, qui a provoqué une crise économique terrible. Elle commençait enfin à retrouver un peu de souffle grâce à l'afflux des touristes et l'activité économique commençait à repartir, lorsque le ministère a violemment claqué la porte.
Ma première question est de savoir—et lorsque j'ai appris la nouvelle de la fermeture imminente, j'ai essayé d'appeler M. Kadowaki, qui est un collègue à vous, monsieur Lochbaum, un supérieur, je crois, Ed. Il est était question de revoir cela, sur la base de vos chiffres de prises, mais tout d'un coup le couperet est tombé, et nous savons tous ce qui est arrivé alors. Ma première question est donc de savoir qui a pris cette décision, Ed.
Le président: Monsieur Lochbaum.
M. Ed Lochbaum: La décision était prise sur l'avis de notre équipe de gestion, par M. Kadowaki et moi-même.
M. James Lunney: D'accord, merci.
Lorsque j'ai essayé de contacter M. Kadowaki immédiatement après, il était curieusement parti en vacances, tout d'un coup. Je vous ai parlé, à vous, quelque temps après. C'est très frustrant pour la population locale, lorsqu'ils cherchent à contacter les fonctionnaires pendant une crise et qu'ils ne trouvent personne. Dès que des décisions difficiles sont prises, ils deviennent introuvables.
M. Ed Lochbaum: Je me souviens tout à fait de vous avoir parlé. M. Kadowaki n'est pas parti en vacances à cause de cela, je peux vous l'assurer. Son congé était prévu depuis longtemps.
S'agissant de nos supérieurs, eh bien vous leur avez parlé hier et vous savez qui est responsable à Vancouver.
Pour ma part, j'étais certainement disponible. Le soir de la réunion de la Chambre de commerce j'étais malheureusement en déplacement à Victoria pour un jour ou deux et je n'étais pas informé de la réunion. Si j'avais su qu'elle allait être organisée à si bref préavis et si j'en avais été informé plus tôt, j'aurais pris des dispositions pour y être et expliquer ce régime d'évaluation du stock.
Encore une fois, je ne soulignerai jamais assez combien cette pêcherie me tient à coeur, depuis 27 ans que je m'en occupe. Je sais ce que représentent ces perturbations. Je gérais cette pêcherie bien avant la construction de la marine de China Creek. Il a été extrêmement gratifiant de la regarder croître, de voir cette montaison devenir florissante et cette pêcherie se développer au fil des ans. Je peux vous l'assurer, nous n'avons pas pris cette décision à la légère.
M. James Lunney: Pourrais-je vous demander pourquoi, alors que les chiffres étaient nettement supérieurs à ce que vous attendiez, vous n'avez pas opté pour une réduction de la limite de prise qui aurait permis aux touristes de capturer au moins la moitié, une limite de deux par jour, au lieu de claquer la porte et de tout fermer?
M. Ed Lochbaum: Nous avons essayé de parvenir à ce compromis. Mais la communauté de la pêche sportive nous a fait savoir qu'une limite de prise réduite était inacceptable. Je ne dis pas que nous aurions pu mettre en oeuvre cela, mais nous aurions au moins pu avoir un dialogue en ce sens. Mais nous nous sommes heurtés à un refus catégorique.
M. James Lunney: Quelqu'un d'autre a-t-il quelque chose à dire à ce sujet?
Le président: Qui vous a opposé ce refus, Ed?
M. Ed Lochbaum: Le groupe consultatif de la pêche sportive en cours de saison.
Le président: Merci. Quelqu'un d'autre souhaite-t-il intervenir?
Monsieur de Luca.
M. Darren de Luca: J'ai une question sur ce compromis, et j'en ai fait mention dans ma présentation à la réunion du 13 juillet. Pêches et des Océans voulait passer à deux poissons par jour le 17 juillet, soit un mardi. Nous voulions attendre jusqu'à la prévision du jeudi. Nous avions convenu alors que si les chiffres de montaison ne s'amélioraient pas, si la migration n'intervenait pas et si tous ces autres problèmes qui les préoccupaient—la température de l'eau de la rivière—n'étaient pas réglés, nous accepterions volontiers de passer à deux poissons par jour le vendredi. Voilà l'avis que nous avons exprimé.
Ce à quoi nous étions opposés le 13 juillet, c'était le plan de gestion du saumon rouge. Tout part de là, de cette réduction continuelle et systématique de notre pêcherie. Même aujourd'hui ils ne comprennent pas, j'en ai peur. Il est faux que, pour la première fois de l'histoire, nous ayons atteint un taux de prise de 11 p. 100. Le problème, c'est qu'ils comptent les saumoneaux que nous capturons, et ils ne les comptent pas dans leurs chiffres d'échappement.
Il y avait—et quelqu'un pourra donner les chiffres exacts—probablement 30 p. 100 de saumoneaux, si bien que les 60 000 poissons que nous avons pris n'étaient en réalité que 40 000 saumons. Non seulement réduisent-ils le nombre de poissons que nous pouvons prendre, ils majorent en même temps nos chiffres de prise.
Nous leur disons, écoutez les gars, vous êtes en train de nous tuer. La saison vient juste de commencer. Il est très difficile de vendre une journée de pêche à deux poissons, pour un guide de pêche de facturer 60 $ de l'heure pour emmener des pêcheurs sportifs attraper deux poissons et les renvoyer ensuite chez eux. Ils n'ont droit que de garder quatre poissons en tout, si bien que et leur limite de possession et leur limite de prise a été réduite. Et ils pouvaient les prendre en un rien de temps. Il y avait des tonnes de poissons. Vous allez attraper deux poissons en l'espace de 15 minutes. Je vous invite certainement à sortir pêcher.
Le président: Monsieur Cole.
M. Bob Cole: J'étais présent le jour de cette réunion du 13 juillet et M. Kramer et M. de Luca y étaient aussi, je crois. Nous leur avons dit que, d'après nos renseignements anecdotiques, il y avait du poisson frais plein la baie, jusqu'à Banfield. Les guides à l'extérieur n'avaient jamais vu autant de saumons rouges passer devant Whale Rock et même le Cape Beale.
• 1425
Leur bateau de pêche expérimental disait qu'il ne restait plus
que 15 000 poissons à l'entrée de la baie. Nous leur assurions
qu'ils se trompaient. Nous leur avons demandé d'attendre jusqu'à la
nouvelle prévision—ils obtiennent les chiffres le jeudi—et si
effectivement les chiffres d'échappement n'augmentaient pas... Il
y avait eu une pêche au filet intensive sur la rivière et les
chiffres d'échappement n'étaient pas élevés à ce stade, à cause de
cette pêche intensive au filet. Mais lorsque cette dernière a été
réduite, car la pêche commerciale a été fermée... et il a commencé
à pleuvoir. Comme vous pouvez le voir dans les tableaux, les
chiffres ont augmenté.
D'ailleurs, aux alentours du 21 du mois, nous avons eu un échappement record. Je ne me souviens pas que l'on ait jamais compté 33 000 poissons passant par jour dans le compteur. Non, c'était même le 19, le jour de la fermeture de la pêche. Nous avons dit que nous accepterions volontiers de descendre à deux, mais que nous pensions que leurs chiffres étaient faux. Nous leur avons dit d'aller doucement, d'attendre jusqu'au jeudi et que, s'il le fallait, nous descendrions à deux le vendredi.
Ils ont choisi d'arrêter de compter le 17 juillet et sont passés à zéro. L'idée me répugne, mais j'ai presque l'impression que c'était pour nous punir. C'était soit punitif, soit politique. C'était totalement irrationnel, et c'est cela qui me fait peur. Dans une économie si fragile, nous ne pouvons nous permettre des décisions à motif politique ou personnel. Il faut s'en tenir aux faits et à la réalité économique et réfléchir très sérieusement avant de prendre une décision.
J'admets que je porte des lunettes roses. Gardez la pêche le plus longtemps possible. Faites ce que vous pouvez. Mais si vous pouvez me prouver que la montaison est moindre ou qu'il y a un problème de conservation, alors je veux bien me serrer la ceinture, comme tout le monde. Mais je ne vais pas laisser passer... Mes chiffres indiquent une montaison totale d'environ 750 000 et un échappement de 579 000 saumons adultes, soit 219 000 ou 214 000 de plus que ce qu'ils appellent l'échappement optimal ou escompté dans les deux systèmes. Nous avons donc eu un retour substantiel. C'était merveilleux. Mais...
Le président: Je sais que James a une autre question, mais lorsqu'on voit les chiffres après coup, c'est toujours facile. Ce n'est pas si simple le jour où la décision doit être prise et je crois M. Lochbaum sur parole, lui qui a 27 années d'expérience dans la région. Je pense que ce doit être une décision extrêmement difficile.
Monsieur Lunney.
M. James Lunney: Merci.
Cela va de soi qu'il y a toujours un élément de risque lorsqu'on évalue les stocks, mais étant donné la valeur supérieure de la pêcherie sportive, avec le plafond de 10 p. 100 auquel vous la limitez, il me semble que c'est au secteur qui apporte la plus grande valeur ajoutée qu'il faut donner une chance de survivre, c'est pour lui qu'il faut faire le plus gros effort, particulièrement s'agissant d'une collectivité comme Port Alberni qui a subi beaucoup de coups.
Dans ces conditions, comment pouvez-vous justifier la fermeture de la pêche sur la seule base des chiffres en baisse rapportés par un seul bateau de pêche expérimentale, alors qu'il y a des centaines de bateaux faisant de bonnes captures, ce qui donne à penser qu'il y a beaucoup de poissons et que tout le monde vous répète qu'ils sont abondants?
Le président: Monsieur Lochbaum.
M. Ed Lochbaum: C'est une méthode que nous utilisons depuis de nombreuses années et qui donne des résultats généralement très fiables en cours de saison. Je n'ai aucune raison de contester la méthode vu la qualité de ses résultats dans le passé. Évidemment, lorsque vous avez une abondance particulièrement grande au plus fort de la montaison, les rapports anecdotiques des pêcheurs sportifs font toujours état d'un grand nombre de poissons. Mais on ne peut gérer la pêche sur cette base.
S'agissant de la valeur de la pêche sportive, si vous remontez en arrière, vous constaterez que le ministère a pleinement épousé cette notion, particulièrement dans la région. Comme je l'ai indiqué, le saumon rouge n'était pas du tout recherché par les pêcheurs sportifs il y a quelques années. Nous avons rendu cette pêche populaire, de concert avec la communauté, et nous continuerons à le faire.
Il y a 15 ans, la prise de saumon rouge était presque intégralement le fait des pêcheurs commerciaux et, comme vous pouvez le voir, la répartition a considérablement changé depuis.
• 1430
Nous nous considérons comme de grands partisans de la pêche
sportive, ainsi qu'en témoigne la priorité que l'ancien ministre
David Anderson a accordée à la pêche sportive d'un certain nombre
d'espèces et je pense que nous continuons dans la même voie. Je
suis en faveur de cela.
Le président: Merci, monsieur Lochbaum.
Suzanne, avez-vous des questions?
Mme Suzanne Tremblay: Non, monsieur le président.
Le président: Nous passons donc à M. Wappel.
M. Tom Wappel: Merci, monsieur le président.
Monsieur Lochbaum, je me reporte à la page intitulée «Barkley Sockeye Bulletin #2001 - 5». L'avez-vous? C'est l'annexe 2 du document de M. Cole.
M. Ed Lochbaum: Oui.
M. Tom Wappel: J'aimerais que vous m'aidiez à comprendre quelque chose, à la rubrique «Pêche récréative».
Le président: Tout le monde a-t-il cette page? L'annexe...
M. Tom Wappel: C'est l'annexe 2 du document de M. Cole, sous la rubrique «Pêche récréative».
M. Ed Lochbaum: Oui.
M. Tom Wappel: Je ne comprends pas trop la terminologie employée par Pêches et des Océans, je me contente de lire:
-
La capture quotidienne moyenne s'est située cette semaine entre 4,7
et 8,3 saumons rouges par bateau. Les chiffres d'effort (élargi)
allaient de 321 à 443 bateaux par jour.
Est-ce exact?
M. Ed Lochbaum: Oui.
M. Tom Wappel: Comment procédez-vous? Est-ce que vous multipliez le nombre de poissons par le nombre de navires?
M. Ed Lochbaum: Oui, en gros.
M. Tom Wappel: Donc, si vous multipliez 8,3, qui est le nombre maximal de poissons, par le nombre de bateaux, vous obtenez 3 677 poissons.
M. Ed Lochbaum: Exact.
M. Tom Wappel: Comment parvenez-vous à 61 500?
M. Ed Lochbaum: Comment nous y arrivons?
M. Tom Wappel: Oui.
M. Ed Lochbaum: C'est la prise cumulative depuis l'ouverture de la pêche.
M. Tom Wappel: Eh bien, si vous divisez 61 500 par 3 677, cela fait 16,6 semaines, c'est-à-dire quatre mois. Est-ce que la pêche sportive a commencé en mars?
M. Ed Lochbaum: Non.
M. Tom Wappel: Comment arrivez-vous à ce chiffre?
M. Ed Lochbaum: Il faudra que j'y réfléchisse une minute.
M. Tom Wappel: Eh bien, vous devriez connaître immédiatement la réponse, car vous avez fermé complètement la pêche sportive, manifestement sur la base d'une erreur de calcul.
J'aimerais vous poser une question, qui est peut-être complètement stupide: Pourquoi ne pas être descendu à un poisson par jour, plutôt que zéro? De cette façon, quelqu'un qui a tiré son bateau jusque sur l'île au prix de 200 $, aurait au moins le plaisir d'attraper un poisson, surtout quand vos chiffres, selon vos propres tableaux et documents, sont de 550 000. En juin, avec les mêmes chiffres, vous autorisiez quatre par jour; en juillet, pour les mêmes chiffres, vous autorisiez quatre par jour. Ensuite, une semaine plus tard, vous descendez à zéro, au lieu de un, par exemple.
M. Ed Lochbaum: Oui.
M. Tom Wappel: Après 27 ans, vous ne pouviez ignorer l'effet catastrophique que cela aurait sur la collectivité.
M. Ed Lochbaum: Ce sont là deux très bonnes remarques. Nous avons un protocole, si vous voulez, ou un processus de gestion en cours de saison qui prévoit une concertation avec l'Alberni Valley Sport Fishing Association. Nous nous concertons et, comme Darren l'a mentionné, nous essayons de trouver un terrain d'entente. Mais, comme Bob l'a mentionné il y a une minute, réduire la limite de prise de quatre à deux représente déjà une perturbation majeure dans ce secteur de pêche, pour les guides.
Moi-même, je n'ai aucune difficulté à descendre à un par jour. Mais je ne pense pas que ce soit acceptable...
M. Tom Wappel: C'est mieux que zéro. C'est mieux que la fermeture complète.
Savez-vous quelle est mon impression, peut-être tout à fait erronée? J'ai l'impression que vous avez fait une suggestion au conseil consultatif, qui l'a mal accueillie et vous avez décrété: «D'accord, je vais vous donner une leçon, ce sera zéro. La prochaine fois, soyez plus conciliants». C'est l'impression que cela donne. Ce n'est peut-être pas la réalité, mais c'est l'impression donnée. C'est dévastateur pour une collectivité, et je ne suis même pas le député local.
Je n'arrive pas à y croire et j'aimerais que vous expliquiez au comité comment vous êtes arrivé à une prise de 61 500...
M. Ed Lochbaum: Je le ferai.
M. Tom Wappel: ...sur la base de vos propres chiffres, les chiffres maximaux, multipliant la prise estimative maximale par le nombre maximal de bateaux. Cela ne donne quand même que 3 677 par semaine.
M. Ed Lochbaum: Je vous fournirai l'explication.
M. Tom Wappel: Merci. C'est tout ce que j'ai à dire.
Le président: Merci, Tom.
Monsieur Lochbaum, si vous vous engagez à nous fournir cela, ce sera bien.
Avez-vous quelque chose à ajouter, Ed?
M. Ed Lochbaum: Non, monsieur le président.
Le président: D'accord. Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président.
Monsieur Lochbaum, vous avez dit qu'une façon d'éviter ce genre de problème à l'avenir serait de créer un autre conseil. Allez-vous créer un autre conseil?
M. Ed Lochbaum: Non. Nous voulons entreprendre un examen, dans le cadre du mécanisme consultatif existant, pour établir un ensemble différent de règles d'engagement, de façon à assurer que les touristes qui viennent pêcher ne soient pas déçus, puissent pêcher pendant toute la saison, à moins d'un problème de conservation majeur.
M. Peter Stoffer: D'accord.
Messieurs, depuis combien de temps le conseil consultatif, celui dont vous avez parlé, existe-t-il?
Un témoin: Vingt ans.
M. Peter Stoffer: Et c'est un conseil conjoint, du MPO et de la localité?
Un témoin: Exact.
M. Peter Stoffer: Bien.
Un témoin: C'est ce que l'on appelle la cogestion, où nous nous réunissons avec les fonctionnaires du ministère pour discuter de la pêche récréative et rechercher un consensus.
M. Peter Stoffer: Mais si vous ne vous accordez pas, s'il faut un arbitrage, c'est le MPO qui a la haute main, est-ce exact?
Un témoin: Absolument.
M. Peter Stoffer: D'accord.
Vous voulez donc mettre en place un comité d'examen. À mes yeux, et suite aux questions de M. Wappel—et c'était une excellente question, Tom, soit dit en passant—il semble que le MPO n'aime pas le conseil consultatif actuel, celui en place, et se dit que s'il effectue une étude et lui rogne un peu les ailes, il n'y aura plus ce vilain problème de cogestion.
Nous avons une situation similaire dans une ville que je ne représente pas, juste en dessous de moi, Sambro, où existe un mécanisme de cogestion qui fonctionne très bien mais que le MPO veut changer pour quelque raison. Est-ce que je me trompe?
Le président: Monsieur de Luca.
M. Darren de Luca: L'Alberni Valley Sport Fishing Association est certainement l'un des sous-comités les plus actifs au sein du Conseil consultatif de la pêche sportive, principalement à cause de la nature de notre pêcherie, qui englobe toute la baie Barkley.
Si l'on va créer un comité d'examen pour décider du moment où la pêche va être fermée, car c'est en gros ce dont il est question ici... Il faudra commencer par revoir cette politique de répartition dans tout le plan de gestion du saumon rouge, c'est-à-dire commencer par le début. Voyons d'abord à combien de poissons nous avons droit avant de parler de fermer la pêche, et nous pensons qu'il faut prévoir suffisamment de poissons dans le plan de gestion pour respecter l'obligation du ministre, soit quatre saumons rouges par jour dans le cas d'une montaison normale, de l'ordre de 500 000 à 600 000 poissons. C'est la première chose à faire.
La deuxième chose qui m'inquiète, et c'est pourquoi nous n'avons pas rencontré le ministère depuis ce jour-là, c'est que si nous arrivons au comité d'examen et disons que nous voulons aller à deux poissons par jour lorsque la montaison est de 300 000 poissons, ou quelque chose du genre, et qu'ils ne sont pas d'accord, Dieu sait ce qu'ils vont faire. Nous sommes très inquiets lorsque nous rencontrons le ministère. Nous n'avons aucune idée de ce qu'ils vont décider sur la base de nos recommandations. Ils pourraient très bien décider qu'ils vont nous montrer un autre tour à leur façon.
Donc, personnellement, je ne participerai certainement pas à ce type de processus tant que les autres problèmes n'auront pas été réglés, et je pense qu'il y a des problèmes administratifs sérieux au sein du MPO. Je sais que vous entendez cette chanson tous les jours, de la part des pêcheurs de merlu comme de nous.
Le président: Dernière question, Peter.
M. Peter Stoffer: Oui, certainement.
Monsieur Lochbaum, lorsque vous avez pris la décision de réduire à deux et que les pêcheurs sportifs ont dit: «Eh bien, attendez un peu, laissez-nous souffler un peu et si le 19—était-ce deux ou trois jours?—il s'avère que vos chiffres sont justes, nous descendrons à deux», monsieur, après 27 ans dans cette industrie, connaissant l'effet dévastateur que cela aurait sur la collectivité, et sachant qu'il s'agit pour vous de gérer les risques, sur le plan de l'évaluation du stock, pourquoi ne pas avoir accepté le conseil des pêcheurs et celui du conseil consultatif qui les représente? Pourquoi ne pas avoir suivi ce conseil, par exemple?
Le président: Monsieur Lochbaum.
M. Ed Lochbaum: Ce n'est pas mon interprétation de l'avis que j'ai reçu.
M. Peter Stoffer: D'accord.
Le président: Merci, monsieur Lochbaum.
Monsieur Hearn.
M. Loyola Hearn: Merci, monsieur le président.
Depuis combien de temps existe le comité?
Un témoin: Depuis 20 ans.
M. Loyola Hearn: Comment les choses se sont-elles passées jusqu'à maintenant? Est-ce le premier gros problème que vous avez?
M. Bob Cole: Avec des optiques diamétralement opposées, nous avons manifestement eu des frictions auparavant. Rien d'aussi instantanément dévastateur ne nous a jamais été infligé.
Il y a déjà eu des fermetures, et des dates d'ouverture et des restrictions avec lesquelles nous n'étions pas d'accord, mais nous nous faisions une raison. C'est simplement que cette fois-ci la restriction était si lourde, à si bref préavis et si injustifiée. C'est cela qui a déclenché notre réaction et qui fait que nous comparaissons devant vous.
Je ne comprends pas la justification d'une fermeture complète, sauf s'il y avait d'autres intérêts de pêche à la réunion du 13 juillet qui voulaient un accès à cette montaison que nous estimions relativement abondante. Je ne sais pas s'il vaut la peine d'entrer dans ces considérations. Nous sommes seulement préoccupés par ce qui s'est passé dans la sphère économique...
M. Loyola Hearn: Pourriez-vous nous dire quels étaient ces autres intérêts?
M. Bob Cole: À la réunion du 13 juillet, ou du 11 juillet, il y avait pas mal de gens. Dans la salle il y avait des représentants et de la flotte de senneurs et de la flotte de fileyeurs, des pêcheurs autochtones et des pêcheurs du programme pilote de vente. Il y avait peut-être une motivation politique à fermer la pêche sportive. C'est elle la plus visible. Si vous avez 400 bateaux par jour sillonnant la baie, c'est comme une nuée. Je ne sais pas si c'était un élément qui a motivé la décision.
M. Loyola Hearn: Où se classe la pêche sportive? Je sais que chez moi les pêcheurs professionnels se plaignent toujours des pêcheurs sportifs qu'ils accusent de les acculer à la faillite. Comment la pêche récréative est-elle perçue ici? Êtes-vous en haut de l'échelle ou tout en bas? J'imagine que tout le monde me donnerait la même réponse, mais où vous situez-vous vous-mêmes?
M. Bob Cole: Nous avons très conscience que l'échappement et la conservation sont les premiers impératifs. Nous avons conscience de l'article 35 et nous savons que nous passons derrière.
Nous sommes dans le plan de gestion du saumon rouge de la Somass, bien qu'il en existe trois ou quatre versions différentes—2001, 1998, d'autres encore. Il y a un plan de gestion qui fait place aux Autochtones pour le programme pilote de vente, qui n'existe guère qu'à Alberni, qui fait place à la pêche commerciale traditionnellement pratiquée à Alberni sur le saumon rouge, avec des chiffres pour les deux—je n'aime pas utiliser le mot «quota» ou «plafond», mais c'est bien de cela qu'il s'agit. Nous sommes préoccupés de voir que nos chiffres ont été systématiquement réduits, alors que les autres sont restés stables ou ont augmenté, selon la taille des montaisons.
Mais le document du ministre explique que lors d'une montaison moyenne, nous devrions pouvoir compter sur quatre et huit—une pêche stable et prévisible. Bien que la taille de la montaison ait été considérablement supérieure à la moyenne, nous ne considérons pas cette année—en fait, il n'y a eu que trois, cinq, peut-être sept années depuis 1980 où l'échappement total a été supérieur. Mais plus de la moitié des années, la montaison a été supérieure de loin à la moyenne de 20 ans. Dans ces conditions, rien de moins que quatre et huit... S'il y a un problème de conservation, ou de mortalité avant la fraie, ou un problème de température de la rivière, nous sommes tout à fait disposés à descendre à deux.
M. Loyola Hearn: J'ai une dernière question.
Le président: Un instant, Loyola, M. Lochbaum souhaite intervenir également.
Monsieur Lochbaum.
M. Ed Lochbaum: Merci.
J'aimerais répondre à ce qui a été dit. Ma mission, en tant que gestionnaire, est très claire. La conservation vient d'abord, puis la pêche ASR autochtone en deuxième place et, dans l'ordre de priorité, la pêche récréative, dans cette province. Les intérêts commerciaux viennent en quatrième position.
L'autre chose que je voudrais dire est que je connais bien la position de Bob. Je connais Bob depuis longtemps.
Pendant de nombreuses années, lorsque d'autres régions de la côte souffraient d'un déclin des stocks, ce qui se répercutait sur la pêche sportive, la vallée Alberni a été l'un des rares endroits où nous avons préservé l'accès à cette montaison de saumon rouge, particulièrement au milieu des années 90 lorsque les stocks de quinnat étaient très bas.
• 1450
Je souligne en outre, et bien qu'il y ait toujours des hauts
et des bas dans un mécanisme consultatif, que comparé à d'autres
régions de la côte où j'ai travaillé, la concertation dans la
vallée Alberni fonctionne extrêmement bien, du point de vue d'un
gestionnaire.
Le président: Merci, monsieur Lochbaum.
Monsieur Hearn.
M. Loyola Hearn: J'ai juste une dernière question, monsieur le président.
Étant donné la bonne qualité générale du travail du conseil jusqu'à présent, pourquoi les choses ont-elles mal tourné cette année? Et en a-t-on tiré les leçons—s'il y a des leçons à tirer—afin que cela ne se répète pas l'an prochain?
Quelque chose a dû se produire cette année. Si les choses se passaient relativement bien jusqu'à présent—bon an mal an—et que cette année il y a eu cette énorme explosion sans préavis, il a dû se produire un déraillement quelque part, du point de vue des deux camps, je suppose.
Le président: Monsieur Lochbaum.
M. Ed Lochbaum: J'ai ruminé ce problème pas mal de fois. Je suis arrivé à la conclusion que c'est dû à cette notion de conservation en cours de saison. Nous semblons avoir fait un bond conceptuel dans cette direction. Par manque d'une meilleure explication, si les chiffres scientifiques obtenus en cours de saison sont source d'inquiétude, nous sommes obligés d'appliquer le principe de précaution. Vous aurez probablement entendu au cours de vos délibérations dans d'autres régions de la côte que certaines décisions prises en application de cette éthique ont entraîné quelques perturbations majeures.
Le président: Ce n'est toujours pas très clair. Vous dites que c'est dû à la gestion de précaution?
M. Ed Lochbaum: Oui.
Le président: Oui. Nous avons reçu ce message cinq sur cinq.
Bob.
M. Bob Cole: Nous avons appris quelque chose. Je suis bien d'accord.
Après cette fermeture de la pêche, Ed Lochbaum a déclaré à la radio de CBC qu'il faut faire intervenir un facteur économique dans les décisions relatives à la pêche. Ce sont bien vos paroles, Ed?
C'est ce que j'ai entendu à la radio de CBC et je suis totalement d'accord avec cela, car si l'on s'en tient uniquement aux données scientifiques, aux chiffres absolus—en comptant les blancs des yeux, en quelque sorte—alors on crée des problèmes avec des fermetures décidées soit prématurément, soit pour de mauvaises raisons et sans égard pour les répercussions économiques. Les témoins précédents disaient la même chose.
En matière de pêche, on ne peut pas considérer uniquement les chiffres absolus ou les tonnes, ou les milliers ou les centaines, il faut également prendre en compte le facteur dollar. C'est une leçon que nous avons apprise et nous cherchons, dans notre présentation, à cerner le facteur économique afin que si l'on ferme une pêcherie, que ce soit le saumon rouge à Alberni, le coho à Campbell River, ou le quinnat à Ucluelet... on ait un chiffre réaliste concernant la valeur économique de la pêche sportive.
Nous savons bien que nous ne pourrons jamais chiffrer cette valeur au dollar près, mais si une journée de bateau vaut entre 100 $ ou 500 $, on pourrait calculer une moyenne. Ainsi, lorsque nous nous asseyons dans ces réunions, nous pourrons déterminer les conséquences pour l'économie de cette décision et voir par quel autre moyen les problèmes pourraient être réglés.
Je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus. Il n'y a pas de contestation. Je ne suis pas sûr que le ministère des Pêches possède dans son mandat une colonne où l'on puisse inscrire le facteur économique, et c'est ce qui m'inquiète.
Le président: Georges Farrah appelle cela la gestion de risque.
Monsieur de Luca.
M. Darren de Luca: En réponse à la question de M. Hearn sur la cause de la défaillance cette année, je pense que M. Wappel a mis le doigt sur le problème.
Nous avons cette évolution depuis des années où ils ne cessent d'entamer cette pêcherie, réduisant la prise chaque année, et finalement nous avons dit: «Écoutez, vous ne pouvez traîner un ou deux d'entre nous dans une salle sombre de Pêches et des Océans et continuer à réduire cette prise et à priver cette collectivité de son assise économique—et c'est pourquoi nous avons refusé de descendre à deux. Peut-être allait-il falloir le faire une fois les nouvelles prévisions en main, et nous l'avons accepté. J'ai l'impression qu'Ed a été mal renseigné sur notre recommandation, mais elle était très claire.
À mon sens, c'était une mesure punitive parce que nous n'avons pas accepté la recommandation du MPO, qui a de ce fait décrété: «Nous allons leur montrer qui exerce le pouvoir ultime», et nous avons vu les résultats.
Le président: Merci, monsieur de Luca.
• 1455
Avant de passer à John, j'ai une question pour les entreprises
de pêche sportive. Lorsque quelqu'un vient ici des États-Unis ou
d'ailleurs pour pêcher, et que l'on ferme la pêche comme cela s'est
produit, avez-vous une assurance pour vous protéger si l'on vous
poursuit pour cause d'absence de poissons?
Un témoin: Pas à ma connaissance.
Le président: Ce pourrait être une bonne idée d'en chercher une.
Ed, avez-vous bien dit dans votre exposé liminaire que vous avez également fermé la pêche autochtone? Ai-je bien entendu?
M. Ed Lochbaum: Oui.
Le président: Donc, lorsque la pêche récréative a été fermée, la pêche autochtone l'a été également.
M. Ed Lochbaum: Oui.
Le président: D'accord, merci.
M. Ed Lochbaum: Je pense également avoir la réponse au problème arithmétique soulevé par M. Wappel.
Le président: D'accord.
M. Ed Lochbaum: Si l'on considère les chiffres que vous avez utilisés, il s'agit de la prise par jour, pas par semaine. C'est donc 3 600 poissons par jour, niveau maximum. Divisez 61 000 par ce chiffre, et vous obtenez une pêcherie d'un peu plus de 20 jours. D'accord?
Le président: Merci.
M. Cole, puis M. Cummins.
M. Bob Cole: Darren a mentionné que dans la prise récréative de 61 000 poissons, vous avez englobé les jeunes saumons d'un an. J'ai pêché le saumon rouge deux fois cette année et les deux fois j'ai presque pris notre limite. La pêche était excellente et parmi mes captures il y avait trois saumons d'un an. Donc, sur les huit poissons, il y avait trois juvéniles. Je pense que c'est assez typique de la pêche sportive.
Je pense que l'enquête auprès des pêcheurs demande combien ils ont pris de poissons, sans distinguer entre les adultes et les juvéniles. Entre 200 000 et 300 000 juvéniles sont également remontés, ce qui augure bien du retour de saumon rouge l'an prochain. Je pense que la montaison sera encore meilleure que cette année.
Le président: Monsieur Cummins.
M. John Cummins: Merci beaucoup, monsieur le président, et bienvenue à nos invités de Port Alberni. C'est un excellent endroit pour la pêche, sportive ou commerciale, et j'ai pratiqué les deux.
Depuis quelque temps, lorsque je pêche, évidemment, je vois partout des gardes-pêche et des gendarmes. Il y a quelques minutes, j'ai vu au fond de la salle deux agents de la GRC. J'ai pensé qu'ils accompagnaient peut-être Ed, mais ils sont partis. Je ne voulais pas...
Le président: Ils ont appris que vous étiez en ville.
Voix: Oh, oh!
M. John Cummins: Il ne se trame rien, n'est-ce pas, Ed?
M. Ed Lochbaum: Non.
M. John Cummins: Bien.
Quoi qu'il en soit, je dois dire avant de commencer, Ed, que vous avez passé presque toute votre vie à travailler sur la pêche à Alberni et vous êtes le genre de type que j'aime voir. Vous êtes un homme qui a consacré sa vie professionnelle à développer cette pêche à Port Alberni et j'aimerais voir cela sur toute la côte. J'apprécie la continuité qui existe ici. Vous avez certainement appris à connaître la pêcherie pendant la vingtaine d'années que vous avez passées ici et vous avez acquis une connaissance et un instinct irremplaçable, que ne possèdent pas les fonctionnaires qui ne font qu'un petit tour avant de repartir. Je veux donc reconnaître l'excellent travail que vous avez fait au fil des ans et vous dire que je l'apprécie, comme tout le monde ici, j'en suis sûr.
La difficulté à laquelle nous sommes confrontés aujourd'hui, me semble-t-il, n'est pas propre à Port Alberni. Il me semble qu'on retrouve la même au niveau de toute la gestion de la pêche, même si le contexte est différent. Elle peut surgir dans la pêche commerciale tout aussi bien que dans la pêche récréative, comme dans le cas qui nous occupe. Cela dit, la pêche commerciale a été fermée trop tôt cette année à Alberni, de l'avis de beaucoup, mais c'est pratiquement devenu une tendance ces dernières années.
Est-ce que vous et les gestionnaires de la pêche sur la côte avez reçu des instructions différentes ces dernières années? Vous a-t-on donné des lignes directrices différentes pour gérer la pêche?
Cette question met en jeu de nouveau tout le principe de précaution, car il semble qu'il domine aujourd'hui la gestion de la pêche. Est-ce que vous abordez ces choses aujourd'hui sous un angle différent?
Le président: Monsieur Lochbaum.
M. Ed Lochbaum: Je pense que vous avez raison, monsieur Cummins. Je ne dirais pas que c'est explicite, mais c'est l'optique que nous avons adoptée depuis 1995, depuis l'enquête de John Fraser sur le saumon rouge du Fraser. C'est devenu presque gravé dans notre esprit et il faut que quelque chose comme ceci arrive pour que nous nous demandions ce que ce principe signifie. Autrement dit, quelles sont les bornes et limites de cette gestion préventive?
Comme vous le savez, nous avons connu quantité d'effondrements des stocks et je ne pense pas que c'était dû à une mauvaise gestion. Nous avons la certitude que la survie en mer de certaines espèces a été très faible. J'aime croire que nous n'avons jamais pêché sauvagement, mais lorsque j'y réfléchis, l'éthique de la prudence est beaucoup plus présente qu'il y a dix ans. Je ne dirais pas que nous étions imprudents jadis, mais il me semble que nous avions tendance à faire preuve d'un peu plus de souplesse.
Si l'on se fixe un objectif d'échappement de x poissons, s'il en manque un, a-t-on échoué? En tant que gestionnaire, je ne le pense pas, mais nous avons des détracteurs qui le pensent. Le public fait entendre sa voix beaucoup plus fortement de nos jours qu'il y a quelques années. Dans notre effort d'apparaître prudents, peut-être, dans certains cas, n'avons-nous pas suffisamment défini les bornes et limites de la «prudence».
Le président: Monsieur Cummins.
M. John Cummins: Eh bien, je suis d'accord avec vous. Je ne pense pas que nous ayons fait preuve d'imprudence dans le passé. Regardez comme vous avez réussi à développer cette pêcherie à Alberni au fil des ans. Regardez l'augmentation des montaisons dans le fleuve Fraser au cours des 50 dernières années. Je pense que le ministère a bien géré la pêche au fil des ans, mais depuis quelques années les gestionnaires ne veulent plus accepter le moindre risque. Cela est probablement à l'origine des protestations que nous entendons aujourd'hui.
M. de Luca a mentionné vous avoir dit: «Eh bien, pourquoi ne pas attendre deux ou trois jours, jusqu'à ce que nous ayons les chiffres de mi-saison? Ensuite nous réévaluerons la situation et peut-être descendrons-nous à deux». Le risque n'était pas grand—c'était une question de quelques milliers de poissons—mais il semble exister cette aversion chez les gestionnaires à prendre des risques depuis deux ou trois ans, une aversion que je ne comprends pas très bien et que les gens ici ont du mal à comprendre aussi. Est-ce la réalité ou est-ce juste une perception?
Le président: Monsieur Lochbaum.
M. Ed Lochbaum: Je pense que c'est la réalité. En outre, vous savez probablement que nous avons eu pas mal de changements internes dans notre organisation. Je pense que certains des nouveaux membres de notre personnel de gestion commencent à être plus à l'aise avec les régimes de gestion que nous employons. Je pense que nos supérieurs nous font confiance, à nous les gestionnaires de terrain; j'espère que c'est le cas.
Je ne sais pas si nous avons traversé une période de prudence excessive, par manque d'un meilleur terme. Nous allons continuer à être prudents, mais mon intention personnelle, dans mon secteur de responsabilité, est de réfléchir à ce que cela signifie réellement sur le plan de la gestion de la ressource publique. Je pense qu'il faut un peu plus de flexibilité, quelle que soit la pêcherie, de façon à se rassurer un peu à gauche et se rassurer un peu à droite, tout en visant le milieu. On ne va pas détruire une ressource publique avec ce genre de gestion, qui est celle que nous avons employée par le passé.
M. John Cummins: Dans le même ordre d'idées, je pense qu'il y a une différence—et beaucoup de gens dans cette salle diront comme moi—entre gérer un stock pour la pêche sportive et gérer un stock pour la pêche commerciale. L'impact sur le stock de la pêche commerciale peut être grand en très peu de temps, mais les chiffres de prise par jour de la pêche sportive ne sont pas énormes. Il peut falloir une semaine avant que l'impact apparaisse.
• 1505
Vous avez donc une plus grande marge de manoeuvre, mais il me
semble parfois que le ministère ne reconnaît pas qu'il y a une
différence réelle entre gérer la pêche sportive et gérer la pêche
commerciale. Ils regardent peut-être les choses par grands blocs de
temps, au lieu de le faire au jour le jour.
Le président: Merci, John. C'était votre dernière question.
Monsieur Lochbaum.
M. Ed Lochbaum: Je ne suis pas d'accord avec vous. Je pense que nous avons pleinement conscience des ramifications de la gestion de chacune de ces pêches.
Par exemple, si vous regardez l'ensemble très appauvri des stocks de quinnat de la côte ouest de l'île de Vancouver, grâce à un plan de gestion prudent nous avons donné accès à la pêche sportive cette année, alors qu'avec un stock très similaire en 1996 nous avons littéralement fermé toute la côte pour le quinnat. Je pense donc que nous avons conscience des différences et que nous avons énormément progressé s'agissant de donner des occasions de pêche.
Si nous étions en 1996, avec virtuellement les mêmes chiffres de retour, il n'y aurait pas eu de pêche récréative du quinnat. Mais grâce à la collaboration avec le groupe et aux données d'évaluation du stock, nous avons pu autoriser la pêche du quinnat littéralement tout l'été—certes pas avec les limites de prises historiques, mais il y avait néanmoins la possibilité.
C'est un exemple de deux choses: la conscience que nous, au ministère, avons de la valeur de la pêche récréative; et la volonté que nous avons de collaborer avec les groupes pour mettre au point ce genre de plans.
Le président: Merci, Ed.
Monsieur Stoffer, vous avez 30 secondes.
M. Peter Stoffer: Connaissant la décision, et sachant combien elle a dû être délicate pour vous, avec votre expérience, avez-vous eu l'occasion d'informer le ministre, qui vit tout près, à Surrey? Ou bien n'a-t-il pas été tenu au courant?
M. Ed Lochbaum: Non, à ma connaissance il n'a pas été informé. Le régime actuel dans lequel nous fonctionnons ne le prévoit pas. Mais mes supérieurs étaient informés de la décision que nous prenions.
M. Peter Stoffer: Merci.
Le président: James Lunney.
M. James Lunney: Juste une remarque à ce propos. Le ministre a été informé par moi-même. Il se trouvait au Yukon à ce moment-là et j'ai réussi à faire passer un appel téléphonique. J'ai réussi à joindre son adjoint administratif qui m'a dit qu'il transmettrait nos préoccupations, et je n'ai plus rien entendu depuis, je le signale.
Le président: J'ai une dernière question pour Ed, en rapport avec la question de John et la décision prise. Qu'en est-il du personnel de soutien? Je songe à des spécialistes de l'évaluation des stocks, des chercheurs, tout ce que vous voudrez, qui peuvent contribuer aux évaluations. Avez-vous un personnel suffisant, comparé aux effectifs d'il y a quelques années? Un gestionnaire ne peut prendre de bonnes décisions que s'il est bien renseigné. Disposez-vous, dans le système, d'un soutien suffisant pour fournir les renseignements dont vous avez besoin pour prendre ces décisions?
M. Ed Lochbaum: Oui. Étant un vieux routier, j'ai parfois l'impression d'avoir trop d'informations. Effectivement, avec notre groupe d'évaluation des stocks de la côte Sud, qui travaille sur cette montaison ici, j'ai suffisamment de personnel et la capacité intellectuelle est vaste. Je ne manque de rien.
M. Peter Stoffer: Vous parlez de 550 000 saumons remontant cette seule rivière. Quel ravissement ce serait pour la région Atlantique. Nous n'avons même pas la moitié de ce nombre dans tous les cours d'eau du Canada Atlantique. Bien joué, messieurs.
Le président: Merci de vos présentations. Le groupe de la pêche récréative a formulé quelques recommandations au début. Nous les transmettrons. Merci à tous pour vos interventions et spécialement à vous, Ed, pour votre franchise.
Nous allons suspendre la séance cinq minutes et nous devrons terminer dans 30 minutes.
Le groupe de Tofino vient ensuite. Je pense que nous avons rencontré certains d'entre vous hier.
Le président: Très bien.
Nous allons entendre Warren Bernard, Ian Howat, Dan Haley et Ken Gibson.
Je signale pour le procès-verbal que nous entendons ce groupe de témoins, en vertu du paragraphe 108(2) du Règlement, au sujet de l'infrastructure maritime, les ports pour petits bateaux. Je crois que Warren Bernard sera le premier à prendre la parole.
M. Warren Bernard (directeur, Tofino Salmon Enhancement Society): Vous pouvez m'appeler Whitey, si vous voulez.
Le président: Je pense que nous vous avons presque tous rencontrés hier et cette petite discussion a été intéressante. Nous avons au total une demi-heure à vous consacrer.
Whitey, vous êtes le premier sur la liste, alors allez-y. Vous représentez la Tofino Salmon Enhancement Society.
M. Warren Bernard: Je vous ai indiqué hier l'historique et nommé la plupart des participants de notre société. J'aimerais aujourd'hui vous parler de l'avenir. Je vous ai dit hier que l'un des cours d'eau, la Tranquille River, dont nous avons amélioré l'habitat, retrouvera probablement les niveaux historiques des années 30 d'ici deux ans.
Nous avons proposé au ministère des Pêches de passer au bassin Bedwell-Ursus et d'y commencer l'amélioration. Le MPO nous a dit que c'est une rivière repère. Ils vont en suivre l'évolution et ils espèrent que la montaison de saumon reviendra sans autre effort de mise en valeur. Nous ne sommes pas d'accord. Nous sommes très bien situés pour travailler sur ce cours d'eau et espérons y enregistrer les succès que nous avons connus sur la Tranquille, la Cypre et la Kootowis.
Un autre travail que nous souhaitons entreprendre avec notre groupe est la réintroduction du saumon rose dans la baie Clayoquot. Les Autochtones et certains des vieux nous disent que le saumon rose était jadis abondant dans le détroit. Nous savons également que c'est un excellent poisson à introduire dans un cours d'eau à coho et qu'il contribue à la production de coho.
Nous demandons donc au comité de débarrasser la pensée de Pêches et des Océans d'un peu de bois mort et de nous laisser entreprendre ces projets. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de rappeler tout le bon travail que nous avons fait par le passé et ce genre de choses. J'ai peut-être déjà exagéré cela hier.
Le président: Merci, Whitey. Je pense que nous allons écouter d'abord tous les exposés. Nous avons également pris quelques notes de ce que vous nous avez dit hier. Je pense que vous avez trouvé le mot juste—dégager un peu de bois mort. Il semble que le chemin de celui qui veut faire quelque chose en soit pas mal encombré.
Nous allons passer à Ian Howat. Ian est l'administrateur du district.
M. Ian Howat (administrateur de district, District de Tofino): C'est juste.
Nous avons parlé un peu hier du programme de cession des quais de Transports Canada et des conséquences pour le district de Tofino. Le problème que nous voyons est le quai fédéral que nous avons actuellement à Tofino n'est pas réellement le quai de Tofino; c'est le quai de la baie Clayoquot. La baie compte une population supérieure à celle de Tofino.
• 1525
Il existe un lien très étroit entre les quatre collectivités
entourant la baie Clayoquot, mais Transports Canada insiste pour
que cette installation soit reprise par Tofino ou l'une des
collectivités autochtones de la région.
Nous pensons que le quai appartient à tous les habitants de la baie Clayoquot et que tout un chacun devrait en avoir l'usage et partager le fardeau de son entretien. La façon la plus simple d'assurer cela est qu'il appartienne à un palier de gouvernement supérieur, par exemple le fédéral. Transports Canada semble être la solution logique, vu qu'il s'agit là d'un axe de transport.
Jusqu'à présent, nous n'avons pas réussi à faire entendre raison à Transports Canada. Le ministère insiste pour se débarrasser de ce quai. En outre, il impose des restrictions excessives, la plus grande étant la limite quinquennale d'indemnisation.
Il a une formule pour calculer les coûts d'exploitation et d'entretien de ce quai. Il utilise pour cela une projection sur cinq ans. Ensuite, il accorde des crédits pour l'entretien et l'exploitation. À la fin des cinq années, l'argent non dépensé pour le quai est censé être reversé au Trésor.
Notre argumentation est que les petites localités ont appris à dépenser parcimonieusement leurs fonds. Elles n'en ont pas beaucoup au départ et elles trouvent des façons très efficaces de faire les choses avec très peu de moyens. Nous pensons qu'avec une gestion financière serrée, nous pourrions probablement étirer sur 20 ans les fonds que Transports Canada nous offre, de façon à entretenir cette installation avec parcimonie et éviter d'imposer un fardeau aux contribuables.
Cependant, comme je l'ai dit, Transports Canada estime que si nous faisons un usage frugal de notre argent, nous devrons le reverser à Transports Canada au bout de cinq ans.
C'est tout.
Le président: Merci beaucoup, Ian. Comme je l'ai dit hier, James et moi-même nous engageons à suivre cela avec Transports Canada et voir ce que nous pourrons apprendre. Cela semble différent de ce qui se fait dans ma région.
M. Ian Howat: Si je puis ajouter un mot, le nom du responsable que vous me demandiez hier est Cliff Rhodes. Il est le directeur régional des services immobiliers.
Le président: Merci beaucoup. Nous en avions besoin.
C'est le tour de Dan Haley. Il est également conseiller.
M. Dan Haley (conseiller, District de Tofino): Merci beaucoup.
Je suis venu parler du fait que le bord de mer de Tofino est très restreint, avec une grève très courte sur la baie Clayoquot. Le ministère des Pêches et des Océans n'arrête pas d'ériger des obstacles devant tout le monde, notamment avec la protection de l'herbe à bernache. Nous aimerions que les règles soient un peu assouplies afin que nous puissions utiliser notre bord de mer et avoir un accès plus facile à l'eau, pour l'activité commerciale et les sports nautiques.
Le président: Vous parlez toujours d'une absence de perte nette, comme nous le disions hier.
Whitey, voulez-vous ajouter quelque chose à cela?
M. Warren Bernard: C'est l'autre chose dont j'allais essayer de parler. En gros, le problème est la politique de non-perte nette du MPO, et la question de l'herbe à bernache en fait partie. Quelle soit réintroduire ou originale, chaque fois que quelqu'un mentionne l'herbe à bernache, des drapeaux rouges se lèvent.
Le président: Merci.
Ken, vous nous avez donné un texte. Si vous voulez en dire un petit mot, nous passerons ensuite aux questions.
Ken Gibson est ici à titre personnel. Allez-y.
M. Ken Gibson (témoignage à titre personnel): Je souhaite la bienvenue aux membres du comité sur la côte Ouest. Pour un résident de longue date de la côte Ouest, il est toujours agréable de voir des gens comme vous nous rendre visite.
• 1530
Tout ce que je demande—ce sera la plus courte des
présentations de la journée—est que vous lisiez ce que je dis dans
mon texte sur les conditions requises pour devenir membre de la
société du bord de mer. Vous verrez que c'est une forteresse
impénétrable. Il n'y a pas moyen d'accéder à ce conseil. Si vous
dites quelque chose qui va à l'encontre de ce que dit le conseil,
on se débarrasse de vous dès la prochaine réunion.
Il n'y a pas de procès-verbal. Ils décident eux-mêmes les contrats et leur rémunération. Lisez seulement ce texte et voyez si la liberté pour laquelle nos soldats sont morts pendant la Seconde Guerre mondiale se retrouve dans ce document.
Il est presqu'incroyable que le bord de mer que mon père a cédé il y a des années pour le bien public soit tombé entre les mains d'une bureaucratie—ils appellent cela une société—qui peut passer ses propres contrats, fixer sa propre rémunération, nommer ses propres administrateurs et membres et se comporter de cette façon.
D'ailleurs, il m'a fallu deux mois et demi de lettres répétées et l'envoi d'une somme à Ottawa pour enfin obtenir une copie des lettres patentes. Cela montre combien Pêches et des Océans a de choses à cacher.
Merci. C'est tout ce que j'ai à dire.
Le président: Merci, Ken.
Nous allons passer aux questions, en commençant avec M. Lunney.
M. James Lunney: Merci beaucoup, monsieur le président.
En ce qui concerne l'amélioration de l'habitat du saumon, nous avons entendu hier que l'association des commerces de Tofino et un groupe local ont été très... Nous l'appelons en fait la Tofino Salmon Enhancement Society, à laquelle beaucoup d'habitants de Tofino appartiennent. Ils sont très actifs dans le domaine du repeuplement en saumon. Ils nous en ont parlé hier.
Vous avez très bien réussi à réintroduire le saumon dans certains cours d'eau. Je crois que vous avez mentionné, Whitey, que l'un de ces cours d'eau a retrouvé son niveau historique.
M. Warren Bernard: Presque—il a retrouvé le niveau des années 50. Nous aimerions rétablir le niveau des années 30. Nous avons des archives sur les comptages effectués dans ces cours d'eau par des pêcheurs commerciaux recrutés par le MPO à l'époque. Mais nous savons qu'ils n'ont pas remonté tous les cours d'eau car il n'y avait pas alors de chemins de débardage.
M. James Lunney: Il y a aussi la question d'un cours d'eau auquel la société d'amélioration de l'habitat du saumon aimerait s'attaquer et dont Whitey a parlé. C'est ce que l'on appelle une rivière repère et le MPO aimerait voir si le saumon n'y reviendrait pas seul. Peut-être pourrait-on utiliser d'autres cours d'eau, plus inaccessibles, pour cela.
S'ils veulent augmenter le saumon dans cette rivière, surtout sachant que la communauté sportive en dépend—voilà une collectivité qui essaie de faire du bon travail—on pourrait penser que le MPO se mettrait en quatre pour les aider—j'apporte ces précisions pour que vous compreniez les problèmes.
Ian, nous nous sommes déjà engagés à nous pencher sur cette question de la cession de cet autre quai que tout le monde utilise. Wayne et moi allons nous en occuper.
Il y a l'affaire de Ken Gibson évoquée à la fin. Je précise pour les autres que sa famille a été l'une des premières à s'installer dans le coin. Cela fait très longtemps qu'elle vit ici. Nous avons montré au comité la maison de Ken, en haut de la colline. Ses 2 000 rhododendrons sont réputés à l'échelle internationale et ont fait l'objet d'articles dans des revues internationales spécialisées.
Le président: Nous avons eu du mal à empêcher Suzanne d'en déterrer quelques-uns pour les ramener chez elle.
M. James Lunney: Comme Ken l'a mentionné, le MPO ou Transports Canada s'est débarrassé d'un autre des quais du coin.
Un témoin: C'était la Direction des ports pour petits bateaux, je crois.
M. James Lunney: Est-ce que la direction l'a vendu à un autre groupe local?
Un témoin: Oui, à la Commission portuaire.
Le président: Était-ce la Commission portuaire de Tofino?
Un témoin: Il n'est pas encore vendu. L'administration du port pour petites embarcations ne fait que gérer les pontons pour eux, dans l'intervalle.
M. James Lunney: Qui donc est propriétaire de l'embarcadère?
Un témoin: Le ministère des Pêches et des Océans.
M. James Lunney: Il y a maintenant une société qui gère cela.
Un témoin: C'est juste.
M. James Lunney: Elle gère le quai immédiatement contigu au terrain de Ken. Le quai est sur un terrain que le père de Ken a donné à la collectivité pour l'accès public.
Est-ce exact, Dave?
Un témoin: L'embarcadère lui-même est sur l'estran devant le terrain de Ken Gibson. L'accès au quai se fait par le bout de la rue Forest. L'accès n'est pas sur sa propriété. Il est sur le bail accordé par le gouvernement provincial sur l'estran. C'est un terrain domanial.
M. James Lunney: Ken a toujours un ponton auquel il accède par son terrain du bord de mer. Il y a un conflit entre les deux parce que les bateaux amarrés au quai public gênent l'accès des bateaux de Ken. Est-ce exact?
Un témoin: Le conflit porte sur le fait que le ponton de Ken Gibson en face de l'estran est situé sur le bail du ministère des Pêches et des Océans. Ce conflit met en jeu l'estran sur lequel sont situés les quais flottants.
M. James Lunney: Pouvez-vous nous aider à comprendre en quoi consiste ce différend particulier? Je ne suis pas sûr que le comité puisse le régler.
Ken, est-ce que le problème réside dans les bateaux amarrés à votre ponton? Parfois ils s'amarrent en double au ponton voisin et cela bloque votre accès. Est-ce que la bouée est dans le chemin? Quel est le problème, Ken?
Le président: Ken.
M. Ken Gibson: J'allais éviter d'aborder ce problème. La question que j'ai soulevée intéresse la manière dont la société est constituée. Maintenant que le différend a été évoqué, je veux bien m'expliquer.
Nous avons vécu en harmonie pendant 50 ans, depuis que mon père nous a donné verbalement ses droits riverains pour installer un ponton directement devant sa propriété. Il ne l'a jamais mis par écrit. Je ne sais pas dans quelle mesure vous êtes familiers des droits riverains. Ces droits signifient que le propriétaire du terrain littoral a accès à l'eau sur toute la longueur de sa propriété, en tout point de sa propriété.
Si vous avez 200 pieds de terrain, comme c'est mon cas, vous avez accès l'eau à partir de tous les points de cette propriété et ce jusqu'à l'eau navigable. La loi provinciale dit qu'il faut 60 pieds entre le niveau des basses eaux et l'obstacle le plus proche, que ce soit une estacade flottante ou un bateau.
Dans mon cas, j'ai à peine 20 pieds. Il n'y a absolument aucun moyen de sortir. Les pontons barrent complètement toute la largeur du rivage devant ma propriété, l'enfermant complètement. Il n'y a pas moyen de sortir.
Nous nous sommes entendus pendant toutes ces années parce que mon accès était dans le coin de l'estran. Je ne veux pas bloquer le progrès du port ni rien du genre. Aussi longtemps que je peux sortir en mer depuis ma propriété, je ne réclame rien. Je resterai dans mon coin et en dehors de votre chemin.
Nous avons maintenant cette nouvelle société qui exerce le pouvoir ultime. Elle a décidé de manier le bâton. Elle me dit maintenant que je dois déguerpir, évacuer ce qu'elle appelle son estran.
De mon côté, je demande à exercer mes droits de riverain. Si vous voulez enlever vos pontons flottants numéro deux, trois et quatre, parfait. Vous partez et moi je peux sortir. C'est là-dessus que nous sommes en désaccord.
À mes yeux, c'est le problème du ministère des Pêches car il est responsable par le biais de la société. Si la société était accessible et avait des comptes à rendre, je pourrais aller les voir et leur parler. S'il y avait moyen de pénétrer dans cette forteresse d'acier, on pourrait trouver un arrangement raisonnable. Mais vous verrez, dans mon document, qu'il est absolument impossible d'aller à ses réunions. Il n'y a pas moyen de savoir ce qu'elle trame, rien moyen de savoir du tout.
J'ai offert de comparaître devant son conseil d'administration. On me l'a refusé. Elle ne veut pas entendre parler de moi. J'imagine qu'il faudra que je leur envoie mon avocat.
C'est très gentil à vous, monsieur Lunney, de soulever mon cas, mais c'est surtout un conflit entre mes droits de riverain par rapport à ceux du ministère.
Puisque vous êtes membres du Comité des pêches, vous entendrez peut-être encore parler beaucoup de ce genre de problèmes.
• 1540
Récemment, une affaire a été jugée par les tribunaux, à
Terre-Neuve ou au Nouveau-Brunswick. La Direction des ports pour
petits bateaux a dit aux pêcheurs qu'ils pouvaient faire un certain
nombre de choses sur le rivage. Une vieille dame de 83 ans leur a
fait un procès. Le juge a ordonné au ministère d'enlever les
pontons de la zone riveraine de la dame, de décamper ou bien de
l'indemniser dans les six mois.
Ils feraient bien de s'informer sur l'étendue des droits de riverain, mais je ne parviens absolument pas à le leur faire comprendre.
Merci.
Le président: Merci, Ken.
Nous avons le problème des droits riverains chaque jour dans l'Île-du-Prince-Édouard.
Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Merci.
Monsieur, les lettres patentes qui ont été obtenues l'ont-elles été en vertu d'une loi provinciale ou d'une loi fédérale?
[Traduction]
Un témoin: Fédérale.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Merci.
Voici une autre question. Monsieur Bernard, vous nous avez dit hier que vous aviez obtenu 7 000 $, je crois, d'aide du MPO pour la mise en valeur de votre rivière. Avez-vous eu l'idée de vous adresser à l'agence qui s'occupe du développement de la région de l'Ouest?
Je sais que l'Association des pêcheurs sportifs de saumon de la rivière Rimouski a obtenu de l'aide de Développement économique Canada, qui est le pendant de l'organisme qu'il y a chez vous. C'est un organisme fédéral. Comment s'appelle-t-il?
[Traduction]
Le président: Il s'appelle Diversification économique de l'Ouest canadien. Ron Duhamel en est le ministre.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Avez-vous pensé à lui demander de l'aide pour la mise en valeur de votre rivière?
[Traduction]
Un témoin: Non, pas pour le moment. L'une des raisons en est que nous avons réussi à lever par nous-mêmes des fonds suffisants. Nous sommes une association sans but lucratif. Les règles de la province de la Colombie-Britannique nous obligent à dépenser tous les fonds que nous levons. Nous avons déjà couvert notre budget.
Si nous décidons d'élargir nos opérations, nous rechercherons probablement d'autres sources de financement. N'oubliez pas, chaque fois que l'on demande une subvention, c'est beaucoup de travail. Il y a toutes sortes de formalités et de paperasse. C'est moi qui m'occupe des formalités administratives et ma femme fait les comptes. Parfois, les montants que l'on obtient ne valent pas tout le travail et l'effort déployé. C'est ma façon de voir.
Le président: Je pense que leur problème ne réside pas dans le financement. Ils parviennent très bien à lever les fonds voulus et font un très bon travail. Le problème est que le MPO ne leur permet pas de travailler sur les rivières qu'ils souhaitent. Est-ce exact?
Un témoin: C'est juste.
Le président: D'accord.
Quelqu'un de ce côté veut-il poser des questions?
Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président, et merci à vous, messieurs, pour vos exposés.
J'ai plusieurs questions. Pourriez-vous nous indiquer la superficie sur laquelle vous voulez construire et où il faudrait remplacer l'herbe à bernache? Quelles sont les dimensions?
Un témoin: J'ai une entreprise touchée par cette règle. Dans la partie située entre Method Marine Supply et Ocean West Industries, les deux sociétés que je possède, nous enlèverions probablement une aire de 60 pieds de large et de 100 pieds de long. Cela englobe l'accès à l'embarcadère et l'entrée de ma marina.
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Les autres entreprises ont besoin d'environ 60 pieds par
100 pieds; dans le cas des compagnies aériennes ou de North Sea
Products, ce peut être un peu plus.
Je sais que l'une des entreprises aquacoles envisage d'installer un embarcadère de chargement d'allèges. Et l'emplacement qu'ils visent, je le sais d'après les études que j'ai dû faire sur ma propriété—car il est contigu—présente de l'herbe à bernache, si bien qu'ils vont tous avoir le même problème et vont devoir, selon le MPO, faire les mêmes études, transplanter, sonder le fond, etc.
Une chose que je n'ai pas mentionnée hier est que lorsque j'ai demandé au MPO pourquoi il fallait faire tout cela, alors que c'est un fond antérieurement dragué—cette plante a été réintroduite à cet endroit—ils ont répondu: «D'accord, vous n'avez besoin de le faire qu'une fois. Ensuite, à l'avenir, vous pourrez draguer ces fonds à votre guise».
Je ne fais pas confiance en cela au MPO, car lorsque je leur ai demandé en 1995, lorsque nous avons construit le nouveau quai de ravitaillement en carburant à Tofino, si nous pouvions réutiliser certains des piliers enduits de créosote provenant de l'ancienne installation, ils m'ont dit qu'il était interdit d'utiliser des piliers au créosote et que l'on ne pourrait plus jamais construire avec des piliers au créosote dans le port de Tofino.
Imaginez-vous qu'en 2001, la Direction des ports pour petites embarcations a construit tout un dock—un dock complet—avec du bois enduit de créosote. Aussi, lorsque le MPO me dit: «Oh, vous n'aurez plus à vous inquiéter de cela si vous le faites juste cette fois-ci»—et c'est déjà assez ridicule de devoir le faire maintenant—mais je sais qu'ils vont nous mettre des bâtons dans les roues. Ils ont toujours eu la langue fourchue.
Le président: Merci, monsieur Bernard.
Monsieur Hearn.
M. Loyola Hearn: Merci, monsieur le président.
Je serai très bref, et ferai plutôt un commentaire que poser une vraie question.
Le président: C'est typique.
M. Loyola Hearn: Nous savons d'expérience, et d'ailleurs les choses que nous avons entendues avant votre arrivée... Je suis sûr que vous connaissez tous les problèmes entre le conseil et le MPO, où, parce que les gens ne se sont pas concertés, nous avons eu un problème—les temps sont difficiles dans ce pays et plus encore dans les petites localités rurales qu'ailleurs. Le seul espoir que nous avons de survivre est de tirer tous dans le même sens.
Il est malheureux de se heurter à une bureaucratie qui paralyse l'investissement ou les gens qui veulent aider. C'est peut-être pire encore lorsqu'on a des organismes publics qui se battent entre eux, ou contre des particuliers, ou inversement. Je pense qu'il est temps d'arrêter ces stupidités et de s'asseoir et de régler collectivement nos différends. C'est la seule façon d'aider les petites localités à croître et à prospérer, et peut-être y a-t-il une leçon à tirer dans tout ceci.
M. Warren Bernard: Puis-je répondre à cela?
Le président: Monsieur Bernard.
M. Warren Bernard: Notre association commerciale, la TBA, a payé 10 000 $ une étude technique reflétant la politique d'absence de perte nette du MPO, qui paralyse le développement de notre port. Nous avons présenté ce rapport—des hauts fonctionnaires du MPO sont venus avec le technicien local qui applique ce règlement—et nous en avons discuté librement avec eux. Ils ont admis que la politique est inapplicable dans le cas de Tofino.
Immédiatement après, on nous a imposé toute cette histoire de réimplantation de l'herbe à bernache: les études, tout le bazar. Nous avons donc essayé, et nous avons payé 10 000 $, provenant de nos cotisations, pour faire dresser un rapport par un spécialiste indépendant.
Le président: Monsieur Bernard, est-il possible d'en obtenir une copie?
M. Warren Bernard: J'en ferai tenir une copie à James.
Le président: Donnez-la à James, et nous la distribuerons aux membres du comité.
Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Pourrions-nous avoir également une copie indiquant la date et le lieu de la construction de ce quai au créosote par le MPO?
M. Warren Bernard: Vous l'avez probablement vu. Il est flambant neuf.
Le président: Nous l'avons vu hier, Peter. Nous sommes passés dessus hier après-midi, lorsqu'il pleuvait.
M. Peter Stoffer: Mais vous n'avez pas le droit de mettre de substances délétères dans l'océan?
M. Warren Bernard: Je travaillais pour une grande compagnie pétrolière lorsque nous avons construit le nouveau quai de ravitaillement en carburant à Tofino et c'était elle qui payait. Chevron Canada est certes une grosse société, et elle m'a dit: «Faites tout ce que demande le MPO, prenez les dispositions et faites-le». J'y suis donc allé, au nom de la compagnie, et ai demandé ce qu'il fallait faire pour reconstruire le quai de ravitaillement vieux de 75 ans. Ils m'ont dit de tout arracher, d'arracher le moindre pilier au créosote et de laisser une zone riveraine au bout du remblai que nous avons construit. Ils ont dit de construire le quai en béton et en acier, ce qui a probablement coûté plus de 700 000 $.
Le président: Je pense que l'un des problèmes ici—et cela a été évoqué précédemment au sujet du principe de précaution—est que le ministère ne comprend que l'absolu: voici le chiffre, voici la limite que vous ne pouvez franchir. Il n'y a pas de bon sens ni de flexibilité. Cela ne fait pas partie de l'équation. C'est un problème auquel il faut s'attaquer.
Monsieur Gibson.
M. Ken Gibson: J'aimerais juste ajouter un mot à ce qu'a dit Whitey au sujet de cette herbe à bernache. Il aurait pu ajouter que nulle part où cette herbe a été transplantée, elle n'a pris. Dans presque tous les cas, elle meurt; je n'ai jamais vu un transfert réussi. Si elle veut pousser à un endroit, elle pousse. Et elle pousse en quantités énormes. Je vous invite, juste après le décollage de votre avion tout à l'heure, à regarder par la fenêtre et vous verrez des milliers d'acres d'herbe à bernache poussant dans la baie de Tofino, et vous vous demanderez pourquoi ils s'inquiètent de dix pieds carrés ici et là.
Le président: Merci, Ken.
Si nous voulons décoller d'ici aujourd'hui, il faudra que nous nous arrêtions très bientôt. Monsieur Cummins.
M. John Cummins: J'ai juste une question rapide sur cette histoire de dragage, Whitey. Est-ce que l'administration portuaire elle-même a essayé d'obtenir une espèce de dispense générale, ou cela n'est-il pas possible?
M. Warren Bernard: L'administration portuaire est quelque chose de relativement nouveau sur notre bord de mer. La plupart des entreprises ont traité directement avec le MPO. Le conseil municipal ne s'est pas réellement préoccupé de l'aménagement de l'estran. Il faut traiter avec le bureau du cadastre provincial, le MPO, et le ministère de l'Environnement pour ces choses-là.
M. John Cummins: N'y a-t-il pas moyen pour vous de vous adresser collectivement au MPO et de prouver que tel endroit était antérieurement utilisé et demander une dispense?
M. Warren Bernard: S'il y a de l'herbe à bernache quelque part, peu leur importe qu'elle ait été introduite ou si elle a poussé naturellement.
Je travaille sur le bord de mer depuis 40 ans—je crois l'avoir mentionné—et je sais quelles zones ont été draguées dans le temps, dans les années 60 et 70, probablement illégalement—nous ne nous posions même pas de questions—rejetant toute cette vase plus loin. Cela a été refait ultérieurement trois ou quatre fois, près des hangars, devant North Sea, à l'ancienne usine de B.C. Packers, à mon quai. J'avais fait venir un gros remorqueur à un moment donné.
Cette vase revient petit à petit et l'herbe semble aimer les fonds qui ont été dérangés. N'importe quel agriculteur, j'en suis sûr, comprendra cela. On laboure, et tout pousse mieux. Mais c'est le genre de bon sens qu'ils ne comprennent pas, tout le problème est là.
Le président: Ian, souhaitiez-vous intervenir?
M. Ian Howat: J'ai un commentaire dans l'optique de la municipalité. Tofino a désigné son port comme port de travail, dans son plan d'aménagement officiel, et le MPO semble ne pas vouloir le reconnaître.
Notre impression est que son but est de tout restaurer à l'état naturel sans admettre qu'une structure peut être un habitat. Il faut le signaler. Les structures construites dans le port sont en fait un bon habitat pour le poisson.
Un témoin: La marina que j'ai construite est probablement le meilleur endroit où les gamins peuvent pêcher le crabe, la barbote, la roussette et la perche. Auparavant, c'était juste une étendue de vase complètement stérile et maintenant c'est plein de poissons.
Dans toute cette histoire de perte nette, pas une seule fois je ne les ai entendus se féliciter. Il y a là 120 par 200 pieds d'habitat excellent pour les petits poissons; il y a là des flotteurs où ils peuvent se cacher et de l'eau en permanence. Personne ne vous accorde jamais de crédit pour cela.
Le président: Nous le ferons. Nous vous donnerons le crédit.
S'il n'y a pas d'autres commentaires, je vais vous remercier tous pour vos présentations ce matin.
Nous avons entendu plus de détails hier. Aujourd'hui tout a été enregistré, et vous pourrez vous reporter au compte rendu.
Je veux également vous remercier pour votre hospitalité d'hier. C'était merveilleux.
En mon nom personnel et celui des autres membres du comité, je veux vous dire que nous avons apprécié notre visite ici. Nous pensons que James a peut-être trop rempli notre programme, si bien que nous n'avons pas eu beaucoup de temps pour visiter cette belle région, mais nous avons apprécié notre hébergement hier soir.
James, voulez-vous clore la réunion?
M. James Lunney: J'ai essayé de les convaincre de passer une deuxième nuit ici, mais les horaires des vols ne l'ont pas permis, et nous allons donc nous rendre à l'aéroport afin de décoller avant la nuit.
Je veux exprimer ma reconnaissance aux témoins qui sont venus nous parler de tous ces différents domaines. Je remercie également les membres du comité et le président d'avoir bien voulu s'attaquer à toutes ces questions, d'entendre les témoins du SCTM qui sont venus d'Ottawa pour suivre ces débats.
Nous ferons de notre mieux, en tant que comité, pour faire avancer les choses et dégager des solutions à ces problèmes qui nous ont été présentés. Merci beaucoup.
Le président: La séance est levée.