HAFF Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 10 avril 2003
Á | 1110 |
Le président (M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)) |
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ) |
Le président |
M. Michel Guimond |
Le président |
M. Michel Guimond |
Le président |
M. Michel Guimond |
Le président |
M. Michel Guimond |
Le président |
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC) |
Le président |
M. Rick Borotsik |
Le président |
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.) |
M. Rick Borotsik |
Le président |
M. Michel Guimond |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent (coprésident, Commission sur la démocratie canadienne et la responsabilisation des entreprises) |
Á | 1115 |
Á | 1120 |
Á | 1125 |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
Á | 1130 |
Le président |
M. Walter Robinson (directeur fédéral, Fédération des contribuables canadiens) |
Á | 1135 |
Á | 1140 |
Le président |
M. Walter Robinson |
Le président |
M. Aaron Freeman (membre du conseil, Démocratie en surveillance) |
Á | 1145 |
Á | 1150 |
Le président |
M. Ted White (North Vancouver, Alliance canadienne) |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Ted White |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
M. Ted White |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Ted White |
Á | 1155 |
M. Walter Robinson |
Le président |
M. Aaron Freeman |
Le président |
M. Aaron Freeman |
Le président |
M. Ted White |
Le président |
M. Jacques Saada (Brossard—La Prairie, Lib.) |
Le président |
M. Jacques Saada |
Le président |
M. Jacques Saada |
 | 1200 |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
Mr. Jacques Saada |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
M. Walter Robinson |
Le président |
M. Walter Robinson |
Le président |
M. Michel Guimond |
 | 1205 |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
 | 1210 |
M. Michel Guimond |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
M. Michel Guimond |
Le président |
M. Michel Guimond |
Le président |
M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.) |
M. Michel Guimond |
M. Geoff Regan |
Le président |
M. Aaron Freeman |
 | 1215 |
Le président |
M. Walter Robinson |
Le président |
M. Walter Robinson |
Le président |
M. Dick Proctor (Palliser, NPD) |
M. Aaron Freeman |
M. Dick Proctor |
M. Aaron Freeman |
M. Dick Proctor |
 | 1220 |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Dick Proctor |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Dick Proctor |
Le président |
M. Dick Proctor |
M. Aaron Freeman |
Le président |
M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.) |
 | 1225 |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Joe Jordan |
Le président |
M. Walter Robinson |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
M. Aaron Freeman |
 | 1230 |
Le président |
M. Rick Borotsik |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Rick Borotsik |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Rick Borotsik |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Rick Borotsik |
M. Aaron Freeman |
M. Rick Borotsik |
M. Aaron Freeman |
M. Rick Borotsik |
M. Walter Robinson |
M. Rick Borotsik |
M. Walter Robinson |
M. Rick Borotsik |
 | 1235 |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Rick Borotsik |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Rick Borotsik |
Le président |
Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.) |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
 | 1240 |
Le président |
M. Walter Robinson |
Le président |
M. Aaron Freeman |
Le président |
M. Ted White |
M. Aaron Freeman |
 | 1245 |
M. Ted White |
M. Walter Robinson |
Le président |
M. Ted White |
Le président |
M. Ted White |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Ted White |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
M. Jacques Saada |
Le président |
M. Jacques Saada |
 | 1250 |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
M. Walter Robinson |
Le président |
M. Aaron Freeman |
Le président |
M. Michel Guimond |
Le président |
M. Michel Guimond |
 | 1255 |
· | 1300 |
Le président |
M. Joe Jordan |
Le président |
M. Jacques Saada |
· | 1305 |
Le président |
M. Michel Guimond |
· | 1310 |
Le président |
M. Jacques Saada |
M. Michel Guimond |
M. Jacques Saada |
M. Michel Guimond |
Le président |
CANADA
Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 10 avril 2003
[Enregistrement électronique]
Á (1110)
[Traduction]
Le président (M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)): Chers collègues, nous allons commencer. Nous étudions aujourd'hui le projet de loi C-24 , loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l'impôt sur le revenu (financement politique). Nous poursuivons nos audiences sur ce projet de loi.
Nous sommes très heureux d'accueillir aujourd'hui des témoins très distingués. Nous souhaitons la bienvenue à Aaron Freeman, de Démocratie en surveillance, qui a déjà comparu devant nous; de la Fédération des contribuables canadiens, Walter Robinson, directeur fédéral, et Bruce Winchester, directeur de la recherche; et de la Commission sur la démocratie canadienne et la responsabilisation des entreprises, l'honorable Ed Broadbent, coprésident.
Messieurs, bienvenue à vous tous. Je propose que nous commencions par Ed Broadbent, si les autres sont d'accord. Ensuite nous continuerons dans la même direction, c'est-à-dire qu'Aaron sera le troisième, si cela vous va. Nous serons heureux d'entendre vos observations.
Chers collègues, vous avez reçu non pas l'exposé de Démocratie en surveillance, mais leur analyse du projet C-24, disponible dans les deux langues officielles. J'ai l'exposé de la Fédération des contribuables canadiens, mais il n'est pas disponible dans les deux langues. Et je crois savoir que Ed Broadbent va s'adresser à nous sans texte.
Nous allons donc commencer par vous, Ed.
Nous écouterons tous les exposés avant de passer à la période de questions.
Michel Guimond
[Français]
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Le document de la Fédération des contribuables canadiens est-il est disponible dans les deux langues?
Pourquoi a-t-il été distribué?
[Traduction]
Le président: Ce n'est pas nous qui l'avons distribué.
[Français]
M. Michel Guimond: Pourquoi a-t-il été distribué?
[Traduction]
Le président: Je n'ai pas distribué ce document.
[Français]
M. Michel Guimond: Qui l'a distribué?
[Traduction]
Le président: Je ne sais pas.
[Français]
M. Michel Guimond: Le ciel? Le Saint-Esprit?
[Traduction]
Le président: Non, ils viennent de lever la main pour indiquer qu'ils l'avaient distribué eux-mêmes.
[Français]
M. Michel Guimond: On n'acceptera pas que des témoins fassent indirectement ce qu'on ne peut pas faire directement.
Est-ce que vous pourriez demander, monsieur le président, à un de nos commis de reprendre les notes qui ont été distribuées sans respecter la Loi sur les langues officielles au Canada, comme on doit le faire en comité, s'il-vous-plaît?
[Traduction]
Le président: Tout d'abord, permettez-moi de dire que si j'avais reçu cet exposé, je ne l'aurais pas distribué.
Rick Borotsik.
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le président, ce n'est ni les greffiers ni vous qui m'avez remis ce document.
Le président: Non, non, il n'a pas été distribué par les greffiers.
M. Rick Borotsik: Je l'ai pris moi-même, monsieur le président, ce que je pense avoir le droit de faire. Je l'ai pris et je l'ai.
Le président: Mon collègue pose la question... parce que les documents ont été placés. Walter et Bruce indiquent qu'ils ont fait cela eux-mêmes.
Marlene Catterall.
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le président, je viens de remettre mon document au bout de la table. Quiconque juge que les documents ne doivent être distribués que lorsqu'ils sont disponibles dans les deux langues, peut en faire autant. Je vous encourage à le faire.
M. Rick Borotsik: Il n'a pas été distribué.
Le président: Michel, je répète que si je l'avais reçu, je ne l'aurais pas distribué aux membres du comité.
[Français]
M. Michel Guimond: Avec votre permission, monsieur le président, je dirai que vous faîtes preuve d'hypocrisie. Vous ne devriez pas accepter que dans votre salle de comité--et on a testé ça plusieurs fois ailleurs--le Saint-Esprit ou le Bon-Dieu soit venu mettre devant moi ce document. Vous ne devriez pas accepter cela, monsieur le président.
Vous refusez de porter votre pantalon. C'est libre à vous, monsieur le président, mais dans d'autres comités, j'ai déjà soulevé ce point, et le président a demandé que dans son comité, tout document qui se trouve devant les députés soit distribué dans les deux langues officielles.
Moi, ça ne me dérange pas; c'est votre décision. Mais je veux juste vous dire que vous allez en porter l'odieux.
[Traduction]
Le président: Merci, Michel. J'avais reçu le texte, mais je ne savais pas que les autres membres du comité en avaient reçu un exemplaire aussi. Par ailleurs, comme un membre du comité l'a suggéré, sentez-vous libre de le rendre. Il n'a pas été distribué par le comité.
Ed Broadbent.
L'hon. Ed Broadbent (coprésident, Commission sur la démocratie canadienne et la responsabilisation des entreprises): Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis très heureux de comparaître devant vous.
Je tiens à dire, dès le départ, que je ne suis pas ici à titre d'expert technique, ce qui ne surprendra pas certains d'entre vous. J'ai été coprésident d'une commission qui a formulé des recommandations sur le sujet que vous examinez, et j'y reviendrai dans un instant.
Je ne voudrais pas que vous pensiez que je vous critique, mais j'ai été informé de cette réunion il n'y a que quelques jours. Comme vous le savez tous, il s'agit d'un projet de loi complexe et d'une vaste portée. Dans mon exposé, je formulerai donc quelques observations d'ordre général sur des principes très importants puis j'aborderai une ou deux questions. Ensuite, je serai très heureux de répondre à vos question.
Tout d'abord, je félicite le gouvernement d'avoir déposé ce projet de loi. En tant que démocrate, plutôt qu'un particulier épousant une certaine idéologie—même si c'est le cas—, je pense que ce projet de loi est l'un des plus importants à être déposé au Parlement ces dernières années. Il vient consolider la loi innovatrice et très importante sur le processus électoral qui a été adoptée lors du gouvernement minoritaire de l972 à 1974.
Il repose fondamentalement sur la notion de l'égalité des citoyens et du rôle que ceux-ci devraient jouer pour façonner le processus électoral. Qu'il s'agisse des candidats, des débats électoraux, ou qu'il s'agisse des résultats des élections, toute société démocratique, tout gouvernement démocratique doivent faire tout en leur pouvoir pour que les conditions soient les mêmes pour tous les citoyens.
L'idée d'interdire les dons collectifs, que ce soit de la part des personnes morales, des syndicats ou d'un autre groupe, est juste en principe. Elle vise à établir des règles du jeu équitables pour le déroulement des processus électoraux. Je félicite le gouvernement pour cette initiative.
À cet égard, à titre de coprésident d'une commission sur la responsabilisation des entreprises, j'ai rencontré M. Percy Downe, chef de cabinet du premier ministre du Canada, il y a un peu plus d'un an, pour lui présenter nos recommandations sur cette question et sur d'autres sujets. Sans prendre d'engagement au nom du gouvernement, M. Downe a réagi très favorablement à nos propos. Il nous a interrogés au sujet de nos recommandations sur cette question et il nous a clairement indiqué qu'en tant que chef de cabinet du premier ministre, il était personnellement tout à fait favorable à cette initiative.
Je tiens à souligner que lors de nos propres audiences, de nombreux témoins ont appuyé l'idée d'interdire aux entités collectives de financer les élections. Notre commission a tenu des audiences dans toutes les régions du Canada, dans sept de nos grandes villes—celles où tout le monde va—de Vancouver à l'ouest jusqu'à Halifax à l'est. Nous avons tenu des audiences publiques. Nous avons également rencontré en privé des bénévoles et des gens du monde des affaires et nous avons mené un vaste sondage de l'opinion publique il y a environ 15 ou 18 mois.
La plupart des témoins que nous avons entendus lors de nos audiences, qu'ils soient représentants du monde des affaires, des ONG, des églises, des universités ou des citoyens intéressés, approuvaient la recommandation d'interdire le financement des élections aux personnes morales et aux syndicats et de rendre cette responsabilité aux citoyens.
Nous avons recommandé que deux entités seulement participent aux financements des élections : les gouvernements démocratiquement élus d'une part et les simples citoyens d'autre part. Tous les autres devraient être exclus. Je tiens à souligner que la vaste majorité des témoins que nous avons entendus appuyait cette recommandation de la Commission qui correspond au principe dont s'inspire ce projet de loi. Bien sûr, c'est un processus que les témoins ont choisi aux-mêmes.
Je tiens à vous signaler que nous avons entendu des témoignages très intéressants de la part de gens d'affaires. Ils étaient en faveur d'une telle mesure et nous ont dit qu'ils aimeraient bien qu'on ne leur fasse plus subir de «chantage»—c'est le terme qu'ils ont utilisé—pour les forcer à contribuer au processus électoral. Si vous m'interrogez à ce sujet, je serai heureux de vous en dire plus long.
Si une telle chose est possible dans notre pays à l'heure actuelle, je pense qu'il y a une forte majorité de Canadiens qui sont d'avis que nous devrions nous engager dans cette voie.
Á (1115)
Permettez-moi de traiter de quelques questions.
Premièrement, le projet de loi commence bien en stipulant que seuls les particuliers ont le droit de contribuer, puis il prévoit une exception de mille dollars. J'ai lu les arguments, mais ils ne m'ont pas convaincu.
Si vous me permettez d'être franc, je vous dirai que les membres de mon parti politique ont énormément de mal à appuyer des mesures qui ne sont pas parfaites. J'aurais envie de dire que les membres du parti ministériel ont plutôt tendance à prendre une mesure parfaite et chercher à tout prix un compromis.
En l'occurrence, je ne pense pas que ce soit nécessaire. Je pense que le principe dont s'inspire le projet de loi est bon. Je ne pense pas qu'il faille compliquer le projet de loi en accordant une exception de mille dollars pour les petites entreprises ou les syndicats locaux. Cette exception va à l'encontre de l'excellent principe sur lequel repose ce projet de loi et qui est, je le répète, que seuls de simples citoyens, quelles que soient leurs différences idéologiques, peuvent faire des contributions volontaires au processus—et non pas les sources collectives d'argent, ni les petites entreprises, ni les syndicats locaux.
J'exhorte le comité à réfléchir à cette question et au principe de base du projet de loi qui est de laisser le soin de financer les élections aux particuliers et aux gouvernements démocratiquement élus.
Je m'appuie sur ma propre expérience d'ancien chef de parti pour attirer votre attention sur une autre question importante, soit que les dirigeants des partis politiques du pays, et surtout les employés des partis, savent que ce qui coûte le plus cher dans une campagne électorale c'est la publicité à la télévision. C'est cela qui coûte cher. Si vous examinez les budgets de tous les partis, c'est l'une des deux activités qui coûtent le plus cher. Cela coûte même très très cher.
Si nous voulons que les partis ne soient pas obligés de se procurer autant d'argent, il est évident qu'il faut trouver des moyens pour que les élections coûtent moins cher.
J'étais par hasard en Grande-Bretagne pendant les élections de l998 et j'ai découvert une relique du colonialisme britannique. J'ai découvert que les résidents des pays du Commonwealth et du Royaume-Uni avaient le droit de voter. Alors, j'ai voté aux élections de 1998 au Royaume-Uni.
Je ne vais pas vous dire pour qui j'ai voté, quoique personne ici ne serait surpris. J'ai eu des regrets...
Des voix: Oh, oh!
L'hon. Ed Broadbent: Quoi qu'il en soit, j'ai voté en tant que citoyen du Commonwealth résidant en Grande-Bretagne.
Ce à quoi je veux en venir, c'est qu'en tant que citoyen du Commonwealth, même si j'étais quelqu'un de l'extérieur, j'ai été ravi de voir qu'à la télévision britannique il n'y avait pas de publicité stupide de la part des partis politiques; c'est interdit. Cela élimine une dépense élevée. Il n'y avait pas de clip de sept secondes ou vingt secondes ou autres idioties de ce genre.
J'ai bien réfléchi à la question et je vous parle sérieusement. En tant que chef, j'ai fait ma part de publicité pour mon parti politique. Tous les partis politiques y sont obligés—or, ce ne serait pas nécessaire. Quiconque se donne la peine de réfléchir une minute au sujet du processus électoral se rendra compte que ces messages tonitruants qu'on entend pendant les campagnes électorales ne contribuent pas sérieusement au débat. Nous savons qu'ils sont conçus dans le but de cibler certaines questions de façon très restreinte afin de raffermir une certaine opinion de manière tout à fait irrationnelle et émotive et que leur objectif n'est pas d'engager une discussion rationnelle et sérieuse.
C'est pourquoi je pense qu'il faudrait songer très sérieusement à interdire la publicité à la télévision. Et tous les partis devraient devenir plus souples. Pendant les campagnes électorales, il faudrait peut-être avoir quatre discussions hebdomadaires plutôt qu'un ou deux débats des chefs—autres activités très symboliques totalement irrationnelles étant donné leurs conséquences. Nous pourrions faire en sorte que les réseaux fournissent du temps d'antenne à la fin de chaque semaine pour la tenue d'une discussion. Il faudrait que ce soit de vraies discussions et non pas des discours creux ou un concours pour voir qui peut s'attirer 20 secondes de gloire pendant un débat télévisé.
Á (1120)
Je dis que le comité devrait envisager a) d'interdire par une loi les publicités sur les questions politiques durant les campagnes électorales et b) de chercher des façons de maximiser le débat public autour des enjeux. Une idée que j'ai est de tenir un débat hebdomadaire avec les chefs des partis sur tous les réseaux à la fin de chaque semaine de la campagne. Mais ce n'est qu'une idée.
On pourrait aussi obliger les réseaux à offrir gratuitement du temps d'antenne aux partis, qui pourraient l'utiliser à leur guise. C'est une autre idée.
L'objectif est de réduire les dépenses et donc les besoins de fonds des partis. Une manière d'y parvenir serait d'envisager ce que j'ai proposé à propos des pubs à la télé.
Il y a quelques autres points que je vais aborder brièvement. Premièrement, le projet de loi devrait reconnaître que les partis ont besoin de se financer et d'assumer leurs responsabilités entre les élections. Pour ma part, j'aimerais que tous les partis consacrent une plus grande partie de leurs ressources entre les élections pour faire ce qui est répandu en Europe, et se doter d'équipes de recherche importantes—j'insiste là-dessus—pour produire des documents que les revues savantes seraient heureuses de publier sur des sujets d'actualité qui reflètent les diverses tendances idéologiques—ce qu'elles devraient faire même si certaines refuseront pour se cantonner sur des positions non idéologiques sur certains thèmes.
Comme ancien chef de parti, ma bête noire c'est qu'il y a trop peu de ressources pour les travaux de documentation de manière à ce que les partis, indépendamment de la Chambre des communes, puissent élaborer des positions mûrement réfléchies sur les problèmes auxquels est confronté le pays. Le financement permanent est important pour tout un autre éventail de questions, les bonnes raisons administratives à propos desquelles tous les partis ont des obligations.
Pour ce qui est de la question de financer cela, le texte propose de se baser sur les élections précédentes. Il y a de bons arguments en ce sens, et je ne vais pas les rappeler. Le comité les connaît très bien. Certaines objections ont été soulevées. Le parti pourrait être éminemment impopulaire dans les deux ans qui suivent une élection et pourrait obtenir des fonds publics quand même. Mais cet argument va dans les deux sens parce que, nous le savons tous, les partis peuvent devenir impopulaire aussi bien pour avoir pris les bonnes décisions que les mauvaises et je ne suis pas convaincu que la popularité de l'heure est le meilleur critère pour accorder les fonds. Je reviens donc à ma position qui est que l'idée d'utiliser les résultats des dernières élections comme critère—parce que c'est une question à propos de laquelle il faut être pragmatique—n'est pas mauvaise.
Permettez-moi d'ajouter une autre considération. Tom Kent, comme les députés le savent, a suggéré qu'une des choses qui pourrait être examinée à la place est l'affiliation à un parti, faire en sorte que les contributions au parti dépendent des membres inscrits au parti, ce qui supposerait une vérification comptable.
Cette idée a beaucoup de mérite. Prenons le cas des membres de l'Alliance, du Parti réformiste, avec qui j'ai eu des désaccords—j'approuve peut-être 1 p. 100 de ses politiques—, je les félicite vivement des initiatives remarquables qu'ils ont prises ces dernières années pour recruter des membres. Ils se sont démenés et on trouvé beaucoup de gens qui approuvaient leur position sur de nombreux sujets.
Je trouve cela très démocratique. Une façon d'examiner l'appui de la population pour les partis est d'examiner sérieusement la question du soutien concret dans la collectivité venant de gens qui sont prêts à s'inscrire à un parti. Personnellement, je serais en faveur d'une combinaison de formes de financement. Grosso modo, prenons la moitié de l'argent que l'on pense que ça va coûter en fonction des résultats des élections précédentes et prenons l'autre moitié en fonction du nombre de membres inscrits au parti. Ce serait un argument de poids pour tous les partis politiques du pays, y compris les nouveaux venus, pour qu'ils aillent à la rencontre des gens et leur exposent leurs positions et les convainquent de s'affilier. Donc, une combinaison de financement des partis politiques basée sur les voix obtenues précédemment et le nombre de membres sera peut-être une bonne façon démocratique de procéder.
Une autre option qui était débattue quand j'étais député—j'en ai même parlé une fois moi-même, je crois—c'est que chaque année, lors du dépôt du budget, on donne au contribuable la possibilité, lorsqu'on envoie sa déclaration de revenu, de contribuer au parti de son choix. Que ce soit une possibilité, pas une obligation, mais que ça figure sur la déclaration du revenu : «Voulez-vous faire une contribution de, mettons un ou deux dollars, au parti de votre choix?» Cela pourrait représenter des millions de dollars. Mais ça ne serait pas obligatoire.
Á (1125)
Le gouvernement pourrait également offrir un incitatif, par exemple un financement de contrepartie. Supposons que je penche en faveur d'un parti politique plutôt qu'un autre. Je pense qu'il a fait du bon travail et je veux qu'un dollar supplémentaire de mes impôts soit versé à ce parti. Pour encourager ce genre de contribution, le gouvernement pourrait verser lui aussi un dollar.
Je pense qu'il faut faire preuve d'imagination pour trouver de nouvelles façons de financer nos partis politiques en plus du financement fondé sur le vote aux élections précédentes, ou peut-être qu'il faut avoir recours à un mélange de méthodes.
J'aimerais traiter d'une dernière question, monsieur le président, mais je ne sais pas s'il me reste du temps.
Le président: Il vous en reste encore un tout petit peu, Ed.
L'hon. Ed Broadbent: Très bien.
J'aimerais traiter d'une dernière question qui n'est pas visée par le projet de loi mais qui est au coeur de ce débat. Il s'agit du financement par les tiers.
Comme les membres du comité le savent, il y a un appel devant les tribunaux au sujet de cette question qui devrait être réglée. Le gouvernement va intervenir et j'espère qu'il gagnera, mais nous ne savons pas ce qui va arriver.
J'aimerais dire qu'en principe—encore une fois en tant que démocrate et mise à part toute préférence idéologique—tout ce que fait ce comité, ce projet de loi, sera totalement vicié si ceux qui font campagne pour que les tiers, qui ne font pas partie d'un parti, aient le droit de dépenser sans limite pendant les campagnes électorales... Cela mine totalement, totalement, toutes les dispositions de ce projet de loi.
D'une certaine façon, nos partis sont l'essence démocratique du système représentatif. Comment pouvons-nous raisonnablement limiter les dépenses des partis, ou prendre d'autres mesures de ce genre, d'une part, et dire en même temps à des groupes d'intérêt privé «Vous pouvez recueillir autant d'argent que vous le voulez, et appuyer une question qui fait partie du programme politique d'un ou de plusieurs partis»? Je pense que c'est profondément, profondément antidémocratique. Ce n'est pas démocratique. Le droit de dépenser de l'argent de cette façon n'est pas un droit démocratique.
Si nous croyons à l'égalité, aux droits des citoyens d'aider à choisir des candidats, à financer des campagnes et à déterminer le résultat, y compris au moyen des publicités et du choix des questions dont le public sera saisi; si nous croyons que les citoyens ont un droit égal d'aider à façonner le programme politique, nous devons faire en sorte que les dépenses des tiers ne viennent pas miner totalement l'égalité des citoyens.
Je le répète, je sais que cette question échappe à la portée du projet de loi, mais elle touche directement au principe. J'espère que le comité trouvera le moyen de formuler une recommandation à cet égard dans son rapport au cas où la Cour suprême déciderait... Je ne suis pas avocat—comme je l'ai dit en d'autres occasions, j'ai bien d'autres défauts—mais les avocats à qui j'ai parlé de cette question ont réussi à me rassurer que la Cour suprême rendrait la bonne décision dans cette affaire. Toutefois, j'ose dire que la Cour suprême s'est déjà trompée et qu'elle peut se tromper de nouveau. Il faudra donc peut-être que le Parlement agisse. Si c'est le cas, je recommande que le comité traite de cette question dans son rapport final.
Merci.
Á (1130)
Le président: Merci beaucoup. Nous apprécions vos commentaires et le temps que vous nous accordez ce matin.
La parole est maintenant à Walter Robinson, de la Fédération des contribuables canadiens.
M. Walter Robinson (directeur fédéral, Fédération des contribuables canadiens): Merci, monsieur le président.
[Français]
Ma présentation devant vous ce matin sera seulement en anglais. Toutefois, à la fin de celle-ci, si vous avez des questions en français ou en anglais, je vais essayer d'y répondre dans la langue de votre choix.
[Traduction]
En guise d'introduction, permettez-moi de vous présenter rapidement notre association et ce que nous faisons.
La FCC a été créée en 1990 et après 13 ans seulement nous sommes devenus la principale organisation de défense des droits des contribuables avec près de 65 000 membres actifs.
[Français]
Nous sommes un groupe sans but lucratif et non partisan qui compte presque 60 000 militants partout au Canada, dans chaque région et dans chaque province.
[Traduction]
Nous nous battons pour faire baisser les taxes, pour faire diminuer le gaspillage et, dans le contexte de la réunion d'aujourd'hui, pour que le gouvernement soit plus responsable. Nous sommes constitués en vertu d'une loi fédérale, nous sommes à but non lucratif et nous sommes financés uniquement par les contributions volontaires et après impôt de nos adhérents. Nous n'émettons aucun reçu d'impôt ni ne recevons de fonds du gouvernement. Nous n'adhérons à aucun sectarisme politique, et aucun des membres du personnel de notre fédération n'a le droit d'être membre d'un parti politique ni d'y contribuer.
Le 11 février 2003, le premier ministre affirmait à la Chambre—et je le cite—que «ce projet de loi réduira le cynisme à l'égard de la politique et des politiciens». M. Chrétien a même poursuivi en affirmant que le projet de loi renforcera grandement la culture politique au Canada».
Le projet de loi C-24 ne fera ni l'un ni l'autre.
Si vous demandiez aujourd'hui aux Canadiens quels sont à leur avis les grands enjeux nationaux, je crois qu'ils donneraient en priorité les soins de santé, la guerre en Irak, ou, à Ottawa, le premier match désastreux lors de la première ronde des éliminatoires de la Ligue nationale de hockey. Et si vous deviez creuser un peu plus loin et les interroger sur la confiance qu'ils ont à l'égard des politiciens, le respect qu'ils ont pour le gouvernement, et la confiance qu'ils ont dans les programmes publics, je serais prêt à parier une grosse somme que les réponses tourneraient autour du rapport de cette semaine de la vérificatrice générale. Ils se demanderaient où sont donc passés les 36 000 expulsés, par exemple. Ils s'interrogeraient sur les chèques d'un milliard de dollars du registre des armes à feu, sur les 4 milliards de dollars que coûte annuellement le subventionnement à l'excès des entreprises et le développement régional et sur ce qu'a coûté le scandale de l'année dernière des contrats de commandite.
Qui donne quoi à qui et combien à quel parti politique n'intéressent tout simplement pas la population. Et c'est tout simplement parce que «réparer» le système du financement politique—qui décrit très mal le projet de loi C-24—ne fait rien pour régler le problème de base que l'on constate chez les politiciens qui ne gardent pas leurs promesses, ne gouvernent pas avec intégrité, ne cessent de gaspiller les milliards de dollars des contribuables qu'ils devraient plutôt consacrer aux grandes priorités publiques, et qui ne renforcent ni le rôle ni le pouvoir des députés en leur refusant la possibilité de devenir des législateurs véritablement indépendants qui pourraient faire fonctionner efficacement la Chambre des communes.
Soyons clairs : le projet de loi C-24 ne fait rien pour alléger l'influence indue de l'argent sur la politique; il ne fait que remplacer l'argent des sociétés et des syndicats, d'une part, par l'argent du contribuable, d'autre part. Le projet de loi n'allégera en rien le cynisme de la population. De plus, il pervertit le système fiscal en augmentant les sommes admissibles au crédit d'impôt, mais j'y reviendrai dans un instant.
Enfin, encombré de tous ces amendements techniques apportés à la Loi électorale du Canada et à la Loi de l'impôt sur le revenu, le projet de loi C-24 ne fait que rendre encore plus complexe le processus démocratique. En effet, au lieu d'encourager les nouvelles idées et les nouvelles visions, même celles auxquelles nous nous opposerons farouchement, nous croyons que l'adoption de ce projet de loi ne fera que confirmer cette tendance antidémocratique néfaste qui fait des élections la chasse gardée de ceux qui ont les moyens de s'acheter une batterie d'avocats, de comptables et de technocrates qui leur interpréteront les lois électorales.
Vous n'en êtes peut-être pas au même point qu'en Colombie-Britannique où, avec la loi sur la destitution, on définit presque jusqu'à qui vous pouvez servir le café, comment et à quelle fréquence, mais vous êtes dans le droit chemin vers cette utopie.
Avant de continuer à expliquer notre opposition philosophique au projet de loi, je m'en voudrais de ne pas vous parler de certaines des propositions positives de cette mesure qui sont fort louables. Comme vous l'avez souligné dans vos propres études, le projet de loi C-24 est regroupé autour de cinq grands thèmes : l'interdiction des dons politiques de la part d'entreprises et de syndicats; la limitation des contributions individuelles; l'application des règles d'enregistrement, de déclaration et de vérification aux associations de circonscription; l'adoption d'un nouveau régime pour la nomination des candidats et pour les campagnes au leadership; et l'élargissement du financement des partis politiques—comprenez plutôt «un plus grand financement de la part du contribuable».
Pour ce qui est du premier thème, nous sommes ambivalents, puisque nous n'avons pas encore sondé nos adhérents là-dessus; mais nous voulons néanmoins exprimer une réserve, puisque les syndicats ne paient aucun impôt sur le revenu, contrairement aux entreprises.
Pour ce qui est, en deuxième lieu, de limiter les contributions individuelles à 10 000 $, cette limite semble quelque peu arbitraire, et nous espérons qu'elle n'a pas été établie de la même façon cavalière que lorsque le comité a essayé de limiter les dépenses des tiers—terme extrêmement péjoratif—dans l'ancien projet de loi C-2 de la 36e législature.
Dieu merci, les tribunaux ont refusé systématiquement d'entériner les dispositions draconiennes, abusives, voire inconstitutionnelles, du gouvernement sur les dépenses, à la limite du bâillon.
Cela dit, il nous apparaît moins offensant de limiter les contributions que de limiter les dépenses.
Je voudrais maintenant laisser de côté mon texte préparé pour signaler que je m'inscris en faux contre ce qu'a dit l'honorable Ed Broadbent, assis à mes côtés. En effet, les partis ne sont pas l'essence même du système politique, puisque le peuple, les idées et les débats le sont.
L'application du régime de vérification et de déclaration aux associations de circonscription sur une base annuelle est une nouveauté bienvenue, étant donné que ces organisations profitent également des largesses publiques sous forme d'allégements fiscaux.
Á (1135)
Pour ce qui est de la course à la direction et la mise en candidature, dans la mesure où ces exercices politiques font appel aux associations de circonscription et aux partis politiques ou aux deux qui servent de paravent pour canaliser des dons bénéficiant d'importants allégements fiscaux, l'encadrement de leurs activités est également raisonnable. Toutefois, permettez-moi d'élargir un peu la perspective ici en ce qui a trait au système électoral. C'est un point sur lequel, je crois, mon collègue ici à ma droite et moi allons nous entendre.
Nous trouvons toujours inacceptable que ceux qui se présentent pour devenir candidat dans une circonscription, ou ceux qui participent à la course à la direction d'un parti politique doivent obtenir une majorité nette, 50 p. 100 plus un, des voix exprimées alors que notre régime électoral permet qu'un parti politique forme un gouvernement même s'il ne détient que 38 ou 39 p. 100 des voix exprimées, qu'il est donc minoritaire, alors qu'il exerce la totalité du pouvoir, la plupart du temps, de façon arrogante et belliqueuse pendant un mandat qui peut durer jusqu'à cinq ans.
L'absurdité de notre régime électoral, je vous le dis, est une question plus importante à examiner que ne l'est la réforme du financement des partis politiques, et elle engendre davantage de «cynisme au sujet de la politique et des politiciens», comme le dit le premier ministre.
Pour ce qui est des propositions visant à remplacer les dons des entreprises et des syndicats par une injection équivalente, mais probablement supérieure, surtout avec le temps, de deniers provenant des contribuables—ou, comme on l'appelle commodément, un «financement public»—, j'ai les observations suivantes à formuler.
Dans les débats portant sur la politique d'intérêt public, vous savez tout aussi bien que moi que les mots sont des armes. Employer l'expression «financement public» constitue une tentative délibérée d'atténuer la dépense évidente et, trouvons-nous, choquante de 39 millions de dollars pour une année électorale ainsi que l'escroquerie annuelle de 25 millions de dollars qui suivra pour que les contribuables financent vos organisations partisanes et privées. Cela revient à assimiler les partis politiques à des biens publics comme les hôpitaux ou les routes, et à déguiser ce transfert de richesses en l'affublant de présumées bonnes intentions, comme si les partis politiques étaient défavorisés malgré eux, et qu'ils méritaient donc la sympathie et l'appui de l'État. C'est une proposition indéfendable.
En outre, la diminution de la diversité des sources de financement des campagnes ne contribuera qu'à rendre les politiciens encore plus distants—c'est un véritable problème—qu'ils ne le sont maintenant, compte tenu surtout du remplacement de ces fonds par des deniers publics. La motivation qu'ils pouvaient avoir à mériter les contributions et à regarder les propriétaires d'entreprise, les chefs syndicaux ou les électeurs locaux dans le blanc des yeux disparaîtra.
À ce sujet, je sais bien de quoi je parle, parce que c'est ainsi que nous recueillons des fonds—ville après ville, réunion après réunion, en personne, en regardant les gens droit dans les yeux. Sachez le bien, c'est ce processus qui dans une large mesure garantit la responsabilisation personnelle et organisationnelle.
Selon ce raisonnement, on peut logiquement déduire que nous nous opposons à l'augmentation du pourcentage du remboursement versé aux partis pour la campagne électorale, de même qu'à la réduction des dépenses admissibles des candidats pris individuellement. Mais l'aspect le plus indéfendable du projet de loi C-24, c'est la proposition de doubler le montant du don, pour le faire passer de 200 à 400 $, admissible au crédit d'impôt maximal de 75 p. 100, et l'effet qu'elle aura sur les dons importants eu égard à la tranche de revenu imposable.
Les modifications à la Loi de l'impôt sur le revenu, de par leur nature même, concrétisent les valeurs de notre société. Les choses que nous trouvons non recommandables, nous les taxons davantage, pour tenir compte de leur coût sociétal ou pour décourager les activités de ce genre. Les choses que nous voulons encourager, nous les taxons moins, ou nous accordons dans leur cas des crédits ou des reports d'impôt.
Examinons un instant le crédit d'impôt à caractère politique par rapport aux autres façons de dépenser son revenu disponible, et plus particulièrement les dons de charité. Le montant maximal qu'on peut verser à Centraide, à un centre local de lutte au cancer ou à un hospice pour sidéens pour obtenir le crédit d'impôt maximal de 16 p. 100 est de 200 $, et d'un peu plus dans les tranches supérieures de revenu. En portant la limite de la contribution politique à 400 $ pour obtenir le crédit d'impôt de 75 p. 100, on fait simplement comprendre par le régime fiscal que les dons aux partis politiques privés, sur le plan mathématique, valent près de dix fois plus que les contributions à des organisations de charité, des organisations d'édification de la communauté.
Je vous mets tous au défi de publier cet après-midi un communiqué pour l'annoncer ou d'en faire état dans les documents de votre campagne au cours de la prochaine élection.
Y a-t-il des intéressés?
Pour ce qui est de la question plus générale de l'influence indue d'entreprises et de syndicats sur la politique gouvernementale, je vous dirais que les moyens les plus appropriés de régler ce véritable problème consisteraient à assainir le processus d'appel d'offres pour les contrats gouvernementaux, dont 25 p. 100 sont encore accordés à une source unique selon le vérificateur général du Canada; à mettre fin aux subventions versées aux entreprises qui profitent des largesses d'Industrie Canada et de ses agences de développement régional; et à mettre fin à la majeure partie des contrats accordés à des cabinets de consultants sous la direction de l'ACDI.
Enfin, si vous voulez dissiper le cynisme qu'éprouve le public à l'égard de cette institution et de votre vocation, et lui redonner confiance, comme ce devrait être le cas, dans le processus politique, alors mettez fin au régime de crédit d'impôt à caractère politique et libérez-vous de la discipline de parti afin que vous puissiez faire ce pourquoi les électeurs vous envoient ici. Réfléchissez et agissez de façon indépendante dans l'intérêt de vos électeurs, d'abord, avant tout et tout le temps.
Á (1140)
[Français]
Je vous remercie de votre attention ce matin. J'attends le débat avec impatience.
Le président: Je vous remercie beaucoup. Est-ce que votre collègue a quelque chose à ajouter pour le moment?
M. Walter Robinson: Je suis certain que ce sera le cas durant la période des questions.
Le président: Je vous remercie beaucoup.
[Traduction]
Et maintenant, au nom de Démocratie en surveillance, M. Aaron Freeman.
M. Aaron Freeman (membre du conseil, Démocratie en surveillance): Merci, monsieur le président.
Je remercie le comité de me donner l'occasion de commenter le projet de loi C-24.
Démocratie en surveillance a été active dans le dossier des efforts visant à rendre les règles sur le financement des partis politiques au Canada plus transparentes et démocratiques, depuis la fondation de notre organisme il y a près de dix ans. Cinquante organisations des quatre coins du pays ont souscrit à nos recommandations dans ce domaine.
En fait, c'est la troisième fois que je comparais devant un comité parlementaire sur cette question. Je suis heureux de constater que le gouvernement semble enfin vouloir répondre à ce besoin de réforme qui se fait sentir depuis longtemps dans ce domaine.
Nous sommes loin d'être les seuls à préconiser une réforme du financement électoral. Notre coalition englobe des groupes de femmes, des organisations de défense de l'environnement et de la santé, des syndicats, des organisations de développement économique communautaire et bien d'autres. Bon nombre des problèmes abordés dans ce projet de loi avaient déjà été identifiés par la Commission Lortie en 1991 et dans une série de rapports publiés depuis lors par le directeur général des élections.
Dans le projet de loi C-24, nous avons potentiellement une loi qui limitera la possibilité que des intérêts puissants influencent le processus démocratique, mais pour que la loi soit efficace, il faudra d'abord apporter des amendements qui respectent tout à fait la portée du projet de loi.
Si l'on analyse les données actuelles et historiques sur les dons, au Canada et ailleurs, on constate que si nous nous contentons de colmater quelques-unes des brèches que les donateurs utilisent pour camoufler leurs dons, la réaction des donateurs sera simplement d'acheminer leurs dons par d'autres canaux correspondant à d'autres brèches qui demeurent intrinsèques au système. Les montants et les sources de l'argent ne changeraient pas, seulement les modalités. Je ne crois pas que tels soient l'objectif et l'esprit du projet de loi C-24.
Une loi efficace sur le financement électoral doit faire au moins trois choses. Premièrement, elle doit prévoir la divulgation intégrale de tous les dons politiques, de sorte que même un don d'un dollar serait divulgué; deuxièmement, elle doit stipuler des limites raisonnables au montant des dons, pour qu'on fixe la démarcation entre une contribution raisonnable au processus démocratique et une tentative d'acquérir indûment une influence ou un accès; et troisièmement, elle doit imposer des limites raisonnables aux dépenses électorales afin de s'assurer que la candidature à des postes élus soit abordable et accessible pour la plupart des Canadiens.
Je vais aborder chacune de ces questions, mais je vais seulement faire ressortir les faits saillants de nos principales recommandations. Une liste intégrale des nos recommandations a été remise au greffier et je me ferai un plaisir de répondre à toute question sur l'une ou l'autre de ces recommandations.
Dans le domaine de la divulgation, le projet de loi C-24 corrige certaines lacunes du régime de déclaration, notamment pour les dons aux associations de circonscription, aux candidats à la direction du parti, et pour les assemblées de mise en candidature. Cependant, pour s'assurer que l'argent acheminé de cette manière n'est pas simplement détourné en utilisant d'autres brèches, il faut également corriger les faiblesses suivantes.
Premièrement, les fonds en fiducie. Ces fonds comprennent tout l'argent qui est contrôlé par un candidat ou un parti. Certains ont soutenu que cette brèche a été effectivement fermée, parce que les dons prélevés à même ces fonds pour financer les campagnes électorales sont visés par les exigences en matière de divulgation, mais les fonds pourraient encore servir à des fins personnelles, par exemple pour des vacances ou la retraite, et l'on peut soutenir que cet argent pourrait donc servir à financer des activités dans le cadre des campagnes de financement et d'autres dépenses indirectement liées à la campagne.
Le deuxième domaine est celui des éléments d'identification. Ceux-ci sont importants parce qu'ils permettent de connaître la véritable identité du donateur. Si nous avons maintenant l'adresse, il manque encore plusieurs éléments clés dans le régime de divulgation, notamment l'employeur, le nom de l'entreprise, si le donateur est membre d'un conseil d'administration ou un cadre supérieur, et aussi, dans le cas d'une compagnie ou d'une organisation, la société-mère. Ces éléments d'identification sont prévus dans le régime américain de divulgation, et ils permettraient plus facilement de dire si des compagnies essayaient par exemple d'acheminer illégalement des dons par l'entremise de leurs employés.
Troisièmement, la divulgation est encore retardée. Aux termes du projet de loi C-24, les partis n'ont pas à déclarer leurs dons avant juillet suivant la fin de l'année précédente. En conséquence, il pourrait s'écouler 18 mois entre le don et le moment de sa divulgation. Pour les associations de circonscription, c'est cinq mois après la fin de l'année financière. Pour les courses à la direction des partis, la divulgation a lieu quatre mois après l'élection du chef. Même pour les candidats à la direction, ou le meilleur régime de divulgation existe, la divulgation a lieu chaque semaine durant les quatre dernières semaines de la campagne, mais rien n'interdit les dons entre la date de la dernière déclaration et le vote. Ainsi, on ne connaîtra pas le nom de tous les donateurs avant que le vote ait lieu.
Le deuxième point que je voudrais aborder est celui de la limitation des contributions. Comme on l'a fait remarquer tout à l'heure, on a créé une brèche dans le régime qu'il faut combler, à savoir les fiducies. C'est peut-être la plus grave lacune de la loi et c'est beaucoup plus grave que les lacunes qui existent dans le régime américain, puisque cela permettrait de faire des dons secrets sans limite à n'importe quel député ou parti.
Á (1145)
Par ailleurs, le projet de loi C-24 impose une limite de 10 000 $ à tous les dons par des particuliers et interdit partiellement les dons par des sociétés, des syndicats et d'autres organisations.
Si nous appuyons ces dispositions en principe, il y a toutefois deux raisons de réduire considérablement la limite pour les particuliers. Premièrement, 10 000 $, c'est une somme très supérieure à ce que peuvent se permettre les Canadiens moyens. Cela représente environ un sixième du revenu moyen des ménages au Canada, et une telle dépense serait donc très imprudente pour la grande majorité des Canadiens.
Au Québec et au Manitoba, les dons des sociétés et des syndicats sont complètement interdits, ce que nous préconisons, et la limite pour les particuliers est de 3 000 $. Le régime du Manitoba vient tout juste d'être adopté il y a trois ans. Le régime québécois est en place depuis 25 ans.
La deuxième raison pour laquelle il faut abaisser la limite, c'est pour décourager les compagnies et les syndicats d'acheminer illégalement des dons par l'entremise de leurs employés. Si la limite applicable aux particuliers est suffisamment basse, la compagnie ou le syndicat qui essaierait de le faire devrait faire appel à un très grand nombre d'employés, et plus il y a de gens impliqués dans un tel stratagème, plus grands sont les risques de se faire prendre, ce que très peu d'organisations seraient prêtes à accepter. C'est pourquoi Démocratie en surveillance estime que la limite des dons devrait être établie au maximum à 1 000 $.
La troisième réforme qui s'impose concerne le plafond des dépenses électorales. Le projet de loi C-24 prévoit de nouvelles limites pour les campagnes d'investiture, ce que nous appuyons fermement en principe. Nous croyons toutefois que la limite de 50 p. 100 des dépenses consacrées à la campagne est trop élevée et devrait être ramenée à 25 p. 100.
De plus, de nouvelles limites devraient s'appliquer aux courses à la direction des partis, dont les gagnants sont généralement beaucoup plus puissants que ceux qui gagnent les courses à l'investiture.
Le projet de loi C-24 devrait aussi inclure le coût des sondages et de la recherche dans la définition de dépenses électorales. Cela aussi aurait dû être fait depuis longtemps, mais en utilisant ce prétexte, le projet de loi augmenterait le plafond des dépenses électorales des partis d'environ un million de dollars. Cela encouragerait une escalade des dépenses électorales et renforcerait le jeu du parti au pouvoir, puisque c'est généralement le seul parti dont les dépenses se rapprochent le moindrement de la limite nationale d'environ 14 millions de dollars.
Soit dit en passant, cela renforce aussi le jeu du parti par rapport aux députés et aux autres candidats. Je me ferai un plaisir d'en dire plus long là-dessus pendant la discussion.
Les coûts des sondages et de la recherche représentent depuis beaucoup trop longtemps un trou béant dans le régime, et ces coûts auraient dû être englobés dans la définition figurant dans la loi originale. Nous sommes donc contre la disposition qui vise à relever la limite de dépenses des partis. C'est ce que l'on propose à l'alinéa 422(1)a) du projet de loi.
En conclusion, Démocratie en surveillance espère que le projet de loi C-24 sera adopté après qu'on y aura apporté les amendements que nous avons proposés. Nous estimons que ces changements auraient dû être apportés depuis longtemps. Les sondages montrent que les deux tiers des Canadiens sont en faveur d'interdire complètement les dons faits par des sociétés et des syndicats. Les dispositions du projet de loi sur la transparence viennent corriger les lacunes qui ont été dénoncées constamment depuis dix ans par le directeur général des élections et aussi par la Commission Lortie.
Proposer que l'on attende afin d'étudier cette question plus en profondeur, cela revient pas mal à dire que nous devrions attendre que l'on ait fait davantage de recherches sur l'accoutumance à la nicotine avant de décider d'arrêter de fumer.
Mais la raison la plus importante pour laquelle il faut apporter ces changements et il faut le faire maintenant, c'est que les Canadiens ont le droit de savoir qui finance le processus politique et d'avoir un système démocratique dans lequel l'influence de l'argent et le potentiel de conflits d'intérêts sont réduits au minimum.
Merci.
Á (1150)
Le président: Aaron, merci beaucoup et merci aussi pour votre analyse du projet de loi.
Je voudrais dire à tous les témoins que si vous avez des documents écrits et que vous voulez les remettre au comité, aujourd'hui ou à l'avenir, nous les recevrons avec plaisir.
Voici comment nous procédons ici pour les questions. Nous avons environ cinq minutes pour chaque échange, ce qui comprend à la fois les questions et les réponses, afin de pouvoir faire un tour de table. Et je vais vous interrompre de temps à autre, comme j'interromprai aussi les députés. Je m'empresse toutefois d'ajouter que si vous estimez n'avoir pu répondre complètement à la question, n'hésitez pas à nous écrire pour nous faire parvenir une réponse plus complète.
J'ai sur la liste Ted White, Jacques Saada, Michel Guimond, Geoff Regan, Dick Proctor, Joe Jordan, et ensuite Rick Borotsik.
Ted.
M. Ted White (North Vancouver, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Je m'adresse à M. Broadbent. Je voudrais d'abord dire qu'à mon avis, nous devrons nous contenter de faire connaître notre accord ou notre désaccord sur la question de la publicité par des tiers. Mon parti et moi-même souscrivons au point de vue que les droits des Canadiens de participer librement à une campagne électorale de la manière qu'ils jugent bon de le faire, en dépensant leur propre argent, l'emportent de loin sur tout argument reposant sur le danger qu'un parti puisse dicter le débat. Je tenais simplement à dire cela au départ.
J'ai aussi une question à vous poser. Vous avez évoqué la possibilité d'utiliser d'autres formules pour amasser des fonds, et vous avez fait quelques suggestions. Je me demande simplement si vous avez réfléchi à la possibilité d'utiliser les associations de circonscription enregistrées comme méthode pour déterminer si un parti doit recevoir une contribution. Vous avez mentionné les membres d'un parti, mais ce serait très difficile à vérifier et contrôler et cela ouvrirait la porte à une foule de manipulations possibles. Cependant, le fait d'enregistrer les associations de circonscription permettrait d'avoir affaire à un nombre très limité et mesurable d'intervenants et peut-être que le financement devrait être fondé là-dessus.
Qu'en pensez-vous?
L'hon. Ed Broadbent: Avant de répondre, je voudrais une précision. Voulez-vous dire qu'il y aurait une sorte de financement de base provenant du Trésor et versé à chaque association de circonscription qui est créée pour un parti donné?
M. Ted White: Non, je me disais plutôt que si nous devons avoir du financement public, il serait plus équitable d'en fonder le montant sur le nombre d'associations de circonscription enregistrées d'un parti donné, plutôt que sur le nombre de votes qu'il reçoit aux élections.
L'hon. Ed Broadbent: Je ne comprends toujours pas bien. Voulez-vous dire le nombre d'associations de circonscription...?
Le président: Voulez-vous dire le nombre de membres au niveau de la circonscription?
M. Ted White: Je veux dire le nombre d'associations de circonscription inscrites à Élections Canada.
L'hon. Ed Broadbent: Bon. Nous avons 301 associations de circonscription; je pensais que c'était ce que vous vouliez dire.
C'est une autre façon de procéder. C'est quand même tout un défi pour les partis nouvellement créés, évidemment, mais la plupart des partis établis ont de telles associations. S'il n'en tenait qu'à moi, je pense que je ferais en sorte que l'argent soit versé selon une formule mixte, à la fois en fonction du vote antérieur et du nombre actuel de membres, bien que je reconnaisse la difficulté de vérifier le nombre de membres. C'est donc une proposition que je fais. Si c'était fondé sur l'expérience de personnes expérimentées...
D'après mon expérience, quand j'étais chef, le personnel de tous les partis qui existaient alors travaillait l'un avec l'autre avec un degré plus élevé d'intégrité, si je peux m'exprimer ainsi, en coopération. Donc, si l'on avait des discussions très franches et professionnelles entre les partis et s'il s'avérait que la vérification du nombre de membres des partis soulevait tout simplement trop de difficultés, alors peut-être que ce ne serait pas une très bonne idée. Mais je pense assurément que c'est très démocratique.
J'ai fait allusion aux racines de votre parti. J'ai déjà dit que je ne suis pas tellement d'accord avec votre parti sur le plan des principes, mais je suis par contre d'accord avec l'élan démocratique que votre parti et le Parti réformiste ont imprimé au départ et qui leur a permis d'avoir beaucoup de membres. Je pense que c'est une bonne façon de reconnaître... d'utiliser cela comme base de financement public.
M. Ted White: Merci.
Je m'adresse maintenant à M. Robinson. Pendant que vous faisiez votre exposé, il m'a semblé que la tension artérielle de certains de mes collègues d'en face augmentait un petit peu, mais je suis d'accord avec vous pour dire que ce projet de loi ne va pas réduire le cynisme parmi la population au sujet du gouvernement. Il n'enraye nullement le gaspillage, comme vous le dites à juste titre, ni les dépenses à des fins politiques. Il ne fait rien pour remédier à l'un ou l'autre de ces graves problèmes, qui préoccupent constamment les gens.
Cependant, je voudrais vous interroger au sujet de la remise d'impôt. Vous avez critiqué cela sévèrement. Je voulais seulement vous demander s'il n'y a pas un argument en faveur d'une telle remise d'impôt, si le gouvernement veut encourager les dons minimes de la part d'un grand nombre de personnes intéressées à un parti politique, pour les inciter à s'impliquer dans le processus politique et à s'engager politiquement? Cela aide à obtenir l'engagement des gens.
Je sais qu'il y a un argument séparé au sujet des organismes de charité, mais si nous pouvions seulement nous concentrer sur l'idée d'encourager la participation politique par un grand nombre de particuliers qui feraient des dons minimes, cela ne serait-il pas un outil valable?
Á (1155)
M. Walter Robinson: Par votre entremise, monsieur le président, je m'adresse à M. White. Oui, j'ai remarqué que ma présence à divers comités a parfois le don d'irriter les députés ministériels. C'est dans la nature du débat démocratique.
Quant à la question qui m'est posée, nous abordons cette question du point de vue libertaire, c.-à-d. que si vous voulez contribuer à une association privée et d'adhésion volontaire, puisque telle est exactement la nature d'un parti politique, qui est une organisation et une machine dont le but est de faire campagne électorale, je pense qu'il s'agit là d'une décision que les Canadiens doivent prendre après impôt.
Pour ce qui est des dons à des organismes de bienfaisance, nous préférerions un traitement fiscal beaucoup plus généreux. Nous pensons que ce serait extrêmement avantageux pour la société en favorisant les dons à des organismes de bienfaisance plutôt qu'à des partis politiques.
Je m'inquiéterais davantage de la pertinence des partis politiques dans le contexte de la baisse du taux de participation aux élections, lequel ne sera pas augmenté à mon avis si l'on incite les gens à faire un chèque ou à acheter une carte de membre. C'est plutôt une question d'avoir des candidats, et des idées, et des convictions susceptibles d'amener les gens à aller voter une fois tous les quatre ou cinq ans, le jour des élections.
Je ne vois donc aucune corrélation.
Le président: Monsieur Freeman, quelques mots sur le même sujet.
M. Aaron Freeman: Je n'ai pas eu l'occasion d'aborder cela dans mon texte, mais il est bien connu que nous avons toujours été favorables au financement public. Une formule proportionnelle au soutien populaire accordé à un parti nous conviendrait tout à fait. Nous ne pensons pas que ce qui existe actuellement soit excessif.
Un mot si vous voulez bien au sujet du crédit d'impôt pour lequel notre sentiment est un peu mitigé.
Le président: Très rapidement, Aaron, car ce temps d'intervention appartient à Ted.
M. Aaron Freeman: L'une des conclusions de la Commission Lortie avait été que le crédit d'impôt n'était pas vraiment très efficace. Parmi toutes les compagnies ou entreprises qui pouvaient se prévaloir de ce crédit d'impôt, 20 p. 100 seulement le réclamaient. Pour les particuliers, les chiffres sont assez variables, mais la moitié seulement des particuliers qui peuvent le réclamer le font.
Je ne pense donc pas que les gens fassent des dons pour des raisons fiscales. Je pourrais vous donner mon idée sur les raisons qui expliquent ces chiffres mais...
Le président: Oui, Ted?
M. Ted White: Je pense que mon temps d'intervention est probablement déjà écoulé même si j'avais quelques questions très précises à poser à Aaron, mais j'attendrai le second tour.
Le président: Jacques Saada, Michel Guimond, Geoff Regan et Dick Proctor.
[Français]
M. Jacques Saada (Brossard—La Prairie, Lib.): Je vous remercie beaucoup de votre présence à tous.
Monsieur Broadbent, j'ai été particulièrement impressionné par deux de vos arguments. Le premier concerne le rôle des groupes de pression en démocratie. Si on impose des plafonds de financement à la classe politique, qui est donc au départ composée d'élus, sans limiter en contrepartie celle des groupes de pression, est-ce que c'est vraiment une expression démocratique? Je pense que vous avez répondu à cette question et je suis sur la même longueur d'onde que vous à ce sujet.
Vous n'avez pas parlé du plafond de 10 000 $. J'aurais aimé savoir si vous êtes d'accord ou non sur ce plafond de 10 000 $ en ce qui a trait à la contribution des particuliers aux partis politiques.
Comme dernier élément, j'ai trouvé particulièrement intéressant--et c'est le second point que je voulais soulever--le fait que vous ayez parlé de formules de financement différentes, par exemple sur la base du nombre de membres et du nombre d'adhérents à un parti politique. Vous parliez aussi du nombre de comtés.
Est-ce qu'il y a, à votre connaissance, des exemples d'application de ces principes de financement en fonction de facteurs mixtes, que ce soit ailleurs au Canada ou à l'étranger? Est-ce que ce principe existe déjà? Est-ce qu'il est déjà en application quelque part? Je demande cela parce que je suis très intéressé à ce principe.
Monsieur le président, voulez-vous que je pose toutes mes questions en même temps ou que je les pose une à la fois?
[Traduction]
Le président: À votre place, Jacques, je le ferais très rapidement.
[Français]
M. Jacques Saada: La seconde question s'adresse plutôt à M. Robinson.
[Traduction]
Le président: Jacques, vous allez devoir vous dépêcher.
[Français]
M. Jacques Saada: D'accord.
Je voulais savoir si la liste de vos membres et de vos sources de financement est publique. Si oui, j'aimerais l'obtenir. J'aimerais savoir si vous auriez énoncé cette litanie de positions antigouvernementales, ce qui ne me fâche pas trop et qui me fait un peu sourire, qu'il y ait eu ou non le projet de loi C-24. J'aimerais que vous me disiez en quoi le projet de loi C-24 va renforcer la base sur laquelle vous vous appuyez pour critiquer telle ou telle mesure gouvernementale.
En dernier lieu, vous n'avez pas recommandé l'élimination du remboursement des dépenses électorales qui viennent, par exemple, quand un député obtient 15 p. 100 des votes, et ainsi de suite. Est-ce que vous êtes en faveur de l'élimination totale de toute forme de financement public de la chose politique?
 (1200)
[Traduction]
Le président: Ed Broadbent puis Walter Robinson.
L'hon. Ed Broadbent: Pour une raison que je ne m'explique pas, ma mémoire n'est plus ce qu'elle était depuis que j'ai atteint 65 ans, et n'hésitez donc pas à me signaler si j'ai oublié une des questions.
Pour procéder en ordre inverse, s'agissant des propositions concernant le financement mixte, trouve-t-on des précédents ailleurs? Pour être bref, je n'en sais rien. Je pense que Janet Hiebert, une de mes anciennes collègues à l'Université Queen's, va également comparaître devant le comité. Elle s'y connaît un peu dans ce domaine, et vous auriez peut-être intérêt à lui en parler. Je sais qu'en Europe, l'essentiel du financement des partis politiques provient d'une façon ou d'une autre du trésor public étant donné que dans ces pays-là, on part du principe que cette source de financement est démocratique.
Permettez-moi maintenant de passer à l'autre question qui concerne les limites imposées aux groupes de pression, en l'occurrence la question de savoir s'il est anti-démocratique d'imposer des restrictions aux activités des tierces parties.
Était-ce de cela que vous vouliez parler?
Mr. Jacques Saada: Je voulais simplement souscrire à ce que vous disiez concernant le principe fondamental de la chose. Par contre, ma question portait davantage sur le plafond de 10 000 $. Vous n'en avez pas encore parlé, et j'aimerais savoir ce que vous en pensez.
L'hon. Ed Broadbent: Pour ce qui est du plafond du 10 000 $, je constate que lorsqu'on tient compte des augmentations du coût de la vie, ce plafond équivaut grosso modo à ce qu'on trouvait dans la loi que René Lévesque avait fait adopter au Québec, en l'occurrence 3 000 $. Je n'en ai pas parlé, mais si j'avais à le faire, je pense que je ramènerais probablement ce plafond aux environs de 5 000 $ par respect du principe d'égalité. C'est quelque chose qui me tient vraiment à coeur. Je pense qu'il est absurde, et aussi fondamentalement anti-démocratique, d'affirmer qu'il faut permettre aux gens de dépenser ce qu'ils veulent pour pouvoir exercer une influence sur l'issue des élections. Pourquoi un assisté social ne devrait-il pas jouir du même genre d'influence qu'un millionnaire ou qu'un collectif qui pourrait réunir de l'argent?
Je le répète donc, l'argument voulant qu'un droit fondamental de la démocratie doit être relié à un montant pouvant être dépensé pour influer sur l'issue d'une élection n'est pas démocratique. Tout au contraire.
Le président: Walter Robinson, je vous en prie.
[Français]
M. Walter Robinson: J'ai entendu trois questions, monsieur Saada.
En réponse à la première question, non, notre liste n'est pas publique. Mais permettez-moi de mentionner que cette année nous avons un budget d'environ 3,5 millions de dollars pour sept bureaux partout au Canada et un groupe d'employés de 16 personnes, avec 80 agents, des personnes qui levaient des fonds pour nous, et que la majorité de nos militants sont des particuliers ou de petites et moyennes entreprises. Quant aux dons des grosses compagnies, si vous connaissiez notre travail au cours des six dernières années sur les bourses et les subsides aux affaires, vous verriez que c'est très difficile pour nous de lever des fonds des grosses entreprises.
En ce qui concerne la deuxième question, oui, en l'absence du projet de loi C-24, nos critiques à l'endroit du gouvernement et de notre système politique seraient stables, seraient là.
La troisième question porte sur les remboursements.
[Traduction]
Le président: Soyez très concis.
[Français]
M. Walter Robinson: En ce qui concerne les remboursements, nous n'avons pas de position comme telle en ce moment parce que nous prévoyons poser cette question à nos militants cet été, lors de notre sondage annuel, pour savoir s'ils sont pour ou contre les limites.
Permettez-moi de mentionner aussi que lors des trois dernières élections, le pourcentage des candidats indépendants qui ne se présentaient pas sous la bannière de l'un des cinq partis politiques et qui pouvaient obtenir un remboursement était moins de 2 p. 100.
[Traduction]
Le président: J'imagine que vous pourrez revenir à cette question plus tard, Walter.
Nous allons maintenant passer à Michel Guimond, puis à Geoff Regan.
[Français]
M. Michel Guimond: Merci, monsieur le président.
Je vais parler tranquillement pour que vous puissiez me comprendre. Vous savez que nous avons un ordre du jour qui prévoit l'étude d'autres affaires, le cas échéant. Vous devriez rayer les mots «le cas échéant», car j'aurai une autre affaire à soumettre.
La décision que vous avez prise concernant le document de tout à l'heure, malgré le voeu pieux que vous avez fait, malgré le violon que vous avez sorti, ne me satisfait pas. Je sais que mon temps est pris. S'il le faut, je vais prendre tout mon temps pour parler de cela. Mais étant donné que ma mère m'a dit de contrôler mon mauvais caractère et de bien me comporter devant la visite, je garderai mes remarques pour le président et les membres du comité, tout à l'heure.
Je vais donc adresser ma question à M. Broadbent, pour qui j'ai beaucoup de respect. J'ai effectivement beaucoup de respect pour tout ce que vous avez fait, monsieur Broadbent, et pour tout ce que vous continuez à faire, car vous avez encore beaucoup à offrir. Vous êtes un démocrate, et à ce titre, vous avez tout mon respect. Je peux vous dire que ce sentiment est partagé par beaucoup de membres du Bloc québécois.
J'ai deux questions que je poserai en rafale pour que vous ayez le temps d'y répondre.
J'ai mis des intentions dans l'esprit du ministre responsable de la loi, M. Boudria, et j'aimerais savoir ce que vous en pensez. Je trouve curieux que le projet de loi C-24 arrive à ce moment-ci, en pleine course à la chefferie du Parti libéral. Donc, on doit comprendre, étant donné que cette loi va être adoptée quelque temps en janvier 2004, que la présente course à la chefferie du Parti libéral, qui sera terminée à ce moment-là, est soustraite aux obligations de cette loi.
Sans prêter d'intentions malicieuses à qui que ce soit, êtes-vous d'avis que la loi est claire et que malgré sa mise en vigueur en janvier 2004, on ne pourra pas remonter aux événements qui auront eu lieu lors de la présente course à la chefferie? C'est la première question sur laquelle j'aimerais vous entendre.
Deuxièmement, j'ai posé une question au directeur général des élections, M. Kingsley, au sujet du maximum de 1 000 $ pour les corporations. Je lui ai donné l'exemple de la Banque Royale du Canada, qui a 650 établissements au Canada et qui pourrait faire 650 contributions, soit 650 fois 1 000 $, à un parti ou à des candidats et candidates. Un peu par ironie, M. Kingsley m'a répondu que la Banque Royale ne pourrait donner que 3,22 $, parce qu'en prenant le maximum de 1 000 $ et en le divisant par 308 candidats, cela fait 3,22 $ par candidat. Le directeur des élections a ri de moi un peu. De toute façon, j'aurai l'occasion de le reprendre à un autre moment.
Selon vous, est-ce que ce 1 000 $ pourrait entraîner la création de sociétés fictives? Qu'est-ce qu'on fait avec des établissements qui sont juridiquement indépendants? Prenons l'exemple des syndicats puisque vous avez été proche du milieu syndical. Le local 2202 des Teamsters est indépendant par rapport au local 2428 des Teamsters. Cela veut-il dire que le 2202 pourra donner 1 000 $ et que l'autre local, qui est une unité indépendante, pourra aussi donner 1 000 $, ou votre réponse sera-t-elle la même que celle de M. Kingsley, c'est-à-dire que les Teamsters, comme entité, ne pourront faire qu'une seule contribution de 1 000 $ et que s'ils veulent aider tous les candidats d'un parti, ils leur faudra donc diviser ce 1 000 $ par 308.
 (1205)
[Traduction]
Le président: Vous avez deux minutes pour répondre à cette question.
[Français]
L'hon. Ed Broadbent: Merci, monsieur Guimond.
En commençant, je veux vous remercier pour vos observations concernant ma contribution à la vie politique et vous dire en même temps que je suis d'accord sur beaucoup de politiques de votre parti dans le domaine social. À ce propos, je veux souligner que M. Lévesque lui-même a dit que pour lui, la loi la plus importante de sa carrière avait été une loi dans ce domaine. C'est M. Lévesque qui a dit cela, et je respecte beaucoup cela.
[Traduction]
Vous avez posé la question au sujet de la Banque Royale dont, vous le savez, chaque filiale canadienne peut faire une contribution aux partis politiques. En ce qui me concerne, voilà qui justifierait d'autant plus d'abandonner entièrement l'idée de permettre à un syndicat ou à une société de verser quelque contribution que ce soit. Pour ma part, je supprimerais cela purement et simplement. Faites donc ce que le Parlement du Québec a fait il y a 25 ans et ce que le Parlement du Manitoba est en train de faire.
Je n'ai pas la compétence technique dans ce domaine qui me permettrait de répondre en détail à votre question, mais cette question illustre néanmoins à mes yeux toute la complexité de la chose. Pourquoi ne pas abandonner l'idée et être logique avec soi-même et permettre uniquement aux particuliers de financer les partis politiques, d'une part, et les citoyens de le faire d'autre part par le truchement de l'État?
 (1210)
[Français]
M. Michel Guimond: Et concernant les courses à la chefferie?
[Traduction]
L'hon. Ed Broadbent: Vous voulez dire si cela s'appliquerait à la situation? Je l'ignore et je me demande même à quelle course à la direction vous pensez...
J'imagine que si la chose était possible, tout cela deviendrait tout à fait logique. Il pourrait certes y avoir un problème de rétroactivité, au niveau de l'application de la loi aux activités déjà en cours, et je pense que ce problème de rétroactivité se poserait de façon très pointue sous l'angle de la simple justice, mais que s'il était possible par contre d'appliquer la chose d'ici à ce que la loi soit adoptée, cela m'irait parfaitement. Mais peut-être n'est-ce pas réalisable et, par conséquent, une entrée en vigueur au bout de douze mois me paraîtrait tout à fait acceptable.
Le président: Walter Robinson....
[Français]
M. Michel Guimond: Monsieur le président, je n'ai pas adressé de questions à M. Robinson. C'est moi qui pose les questions et j'ai adressé mes questions à M. Broadbent. Mais j'ai une autre question.
[Traduction]
Le président: C'est vrai, vous avez raison.
Ce temps d'intervention appartient aux députés.
Allez-y, mais soyez très bref.
[Français]
M. Michel Guimond: Merci, monsieur le président. Vous passez une mauvaise journée aujourd'hui!
Monsieur Broadbent, on m'a dit que le système au Manitoba... Je ne veux pas être indiscret quant à votre lieu de résidence, mais vous êtes originaire du Manitoba, je crois. Non? Vous n'avez pas résidé au Manitoba? Je pensais que vous étiez du Manitoba.
[Traduction]
Le président: Michel, ce sera tout.
Geoff Regan, Dick Proctor, Joe Jordan, Rick Borotski et Carolyn Parrish.
M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Je voudrais commencer par remercier nos témoins d'avoir accepter notre invitation.
Monsieur Robinson, vous avez déjà comparu devant nous, je le sais. J'espère, qu'à l'avenir, étant donné que vous avez un budget de 3,5 millions de dollars, vous pourrez trouver quelques sous pour vous payer une traduction et respecter les traditions parlementaires que vous connaissez je crois fort bien.
M. Michel Guimond: [Note de la rédaction : Inaudible]... il y a dix minutes.
Une voix: Il a repris son document en anglais.
M. Geoff Regan: C'est moi qui ai la parole et j'ai une question à poser.
[Français]
Avec respect, monsieur Guimond, je vais continuer et poser ma question.
[Traduction]
Permettez-moi de dire quelques mots au sujet de la contribution publique.
Il y a quelques jours, M. Kingsley nous a dit, par exemple, qu'environ 60 p. 100 de l'argent que les partis politiques dépensent en période électorale provenaient de la poche du contribuable, comme vous le savez fort bien. Les contribuables canadiens nous ont très clairement fait savoir que cela leur posait problème et qu'ils voulaient voir disparaître cette impression que les grosses fortunes, les entreprises, les compagnies, les syndicats et ainsi de suite pouvaient exercer beaucoup d'influence. Par contre, si ce genre de financement venait à disparaître, voire à être considérablement limité, il faudrait bien trouver l'appoint en quelque part sous peine de voir les partis politiques éprouver des difficultés à se financer et à financer leurs campagnes électorales.
J'imagine que la question est de savoir s'il faut prévoir une contribution proportionnelle au nombre de voix obtenues par les partis à l'élection précédente, mais je ne pense pas que ce soit là une solution parfaite et je voudrais savoir, monsieur Freeman, si vous n'avez pas d'autres idées à ce sujet et si vous connaissez des précédents dans ce sens, car ce qui me frappe ici, c'est qu'il y a ainsi un lien très direct entre le contribuable et le parti pour lequel il a voté.
En d'autres termes, l'argent va au parti que choisit le contribuable. C'est le contribuable qui décide en votant, quel est le parti qui va obtenir cet argent. Ce n'est pas plus difficile que cela.
Cela dit, je ne pense pas que la solution soit parfaite, mais il y en a peut-être pas de meilleure. Peut-être est-ce la meilleure solution possible dans les circonstances. Par contre, si vous avez d'autres idées, d'autres suggestions sur la façon de procéder, j'aimerais le savoir.
C'est également une question que je pose à la cantonade aux autres témoins.
Le président: Aaron Freeman.
M. Aaron Freeman: Il y a toutes sortes de formules qu'on trouve dans différents pays pour financer les partis politiques. Vous avez d'ailleurs raison, je pense que ce qui accroche un peu chez beaucoup de gens, c'est la question du délai entre la dernière élection, sur laquelle repose la formule, et l'élection en cours, ce qui fait qu'il pourrait parfois s'agir de données vieilles de cinq ans. En cinq ans, le paysage politique peut en effet changer radicalement.
Je pense également que vous avez raison de vous demander ce qu'il serait possible de faire autrement. Ici aussi, je pense que le meilleur choix... disons que je pourrais vous suggérer quelques options.
Aux États-Unis, dans le cas des élections présidentielles, il y a un système de contrepartie. Certes, les dons sont illimités mais il y a néanmoins des limites imposées aux dépenses pour autant qu'on accepte de les respecter. Le problème des limites imposées aux dépenses et aux dons relève aux États-Unis de la Constitution, ce qui n'est pas le cas j'imagine au Canada. Nous sommes intervenus d'ailleurs à ce sujet dans l'affaire Harper. Voilà donc pour la formule américaine.
D'autres pays utilisent une formule basée sur le pourcentage du vote populaire obtenu aux dernières élections. Ainsi, le Mexique a introduit une réforme dans ce sens il y a quelques années. Le financement des partis politiques est assuré à 100 p. 100 par le trésor public, de sorte qu'il n'y a pratiquement aucun don à titre privé et, toujours au Mexique, 70 p. 100 du financement est basé sur le pourcentage du vote populaire, et les 30 p. 100 restant sont partagés équitablement entre tous les partis. Il y a également d'autres pays qui utilisent sous une forme ou une autre la formule du financement par le trésor public avec partage entre les différents partis.
Dans notre cas, j'imagine que nous voudrions sans doute combiner différentes formules de manière à ce que quelque chose qui permette de réduire les dépenses—par exemple, une augmentation du temps d'antenne gratuit mis à la disposition des partis. Mais en même temps, il pourrait également y avoir des mesures d'ordre fiscal comme le crédit d'impôt; ou...
 (1215)
Le président: Je crains de devoir vous interrompre parce que Geoff a accepté, je crois, que Walter puisse également répondre à la même question. Par contre, si vous avez des références, nous les recevrons avec plaisir.
Walter Robinson.
M. Walter Robinson: Monsieur le président, je voudrais par votre entremise remercier M. Regan pour son intervention à notre endroit au sujet des langues officielles. Nous avons été invités vendredi. Nous venions tout juste de revenir de Regina et nous n'avons donc pas eu le temps de faire traduire notre mémoire. Par contre, je m'engage auprès du comité à lui faire remettre une version traduite de mon texte avant même que les traducteurs de la Chambre puissent en commettre une.
Le président: Vous savez, Walter, là n'est pas le problème. Le problème, c'est que votre texte a été distribué dans une langue seulement. N'importe qui est libre de remettre au comité un texte dans la langue officielle de son choix, et là n'est donc pas le problème.
Mais poursuivez, je vous en prie.
M. Walter Robinson: Le comité voudra bien m'excuser si je l'ai offensé.
Vous avez repris quelque chose que le premier ministre avait lui-même dit le 11 lorsqu'il parlait dans ce contexte du fait que seul un financement des partis politiques assuré par le trésor public permettrait de contrer cette impression que les décisions de l'État sont influencées par les grosses fortunes et les milieux d'affaires.
D'ailleurs, je suis tout à fait d'accord avec M. Guimond.
[Français]
Si vous voulez interdire les dons des sociétés et des syndicats, c'est tout ou rien.
[Traduction]
Il ne s'agit pas de l 000 ou de 2 000 $, c'est tout ou rien. Je suis donc tout à fait d'accord avec le député, qui d'ailleurs ne m'écoute pas pour l'instant.
Peu importe, monsieur le président, je répondrai encore une fois par votre entremise à M. Regan que la question qui se pose est de savoir pourquoi remplacer ce qui existe. Pourquoi est-ce nécessaire? Pourquoi ne pas chercher autre chose, en utilisant la technologie et proposer une formule qui permette un face à face avec les électeurs, grâce à des assemblées publiques, pour bien montrer à la population que l'argent est bien entendu un moyen qui permet de faire valoir ses idées, mais que ce n'est pas le seul moyen de le faire? Pourquoi remplacer cela? Nous nous inscrivons en faux contre cette hypothèse fondamentale.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous ne sommes pas d'accord avec l'intention philosophique du projet de loi. Dans mon exposé, j'ai précisé très clairement ce que nous comprenions et ce que nous ne comprenions pas dans ces changements annoncés, mais également ce que nous n'aimions pas dans le régime actuel si c'est celui-là que vous conservez; du point de vue de la transparence, certaines dispositions concernant les rapports, la régimentation et la vérification sont parfaitement logiques.
Le président: Monsieur Proctor, puis Joe Jordan.
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Merci beaucoup, et merci également à nos témoins.
Monsieur Freeman, l'analyse que Démocratie en surveillance fait du projet de loi C-24 vous fait dire qu'en ce qui vous concerne, l'un des points forts du projet de loi est qu'il limiterait à 10 000 $ les dons faits à un parti. Je serais d'accord avec vous si c'était effectivement le cas, mais le fait est que vous pouvez donner 10 000 $ par an à tous les partis politiques enregistrés.
Je me demande donc si a), vous étiez au courant et si b), vous y aviez réfléchi.
M. Aaron Freeman: C'est donc 10 000 $ pour chaque parti.
M. Dick Proctor: C'est bien cela.
M. Aaron Freeman: Oui, nous le savions, et c'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles, si vous poursuivez la lecture de notre analyse, nous signalons au chapitre des «points faibles» que cette limite de 10 000 $ devrait être considérablement réduite parce que, vous avez raison de le dire, ce n'est pas un plafond de 10 000 $. Si on peut donner 10 000 $ à cinq partis différents, le plafond est de 50 000 $. Le plafond devrait être imposé aux donateurs, et non pas aux bénéficiaires du don, et ce plafond devrait être beaucoup plus bas. En fait, plus le plafond est élevé, plus on favorise l'illégalité. Et ce n'est pas logique non plus car rares seraient les Canadiens qui jugeraient prudent de donner 10 000 $ à un parti politique.
L'objectif de cette mesure législative, ou du moins l'un de ses principaux objectifs, et cela remonte à la question du financement des partis politiques par le trésor public, devrait être d'encourager les partis à chercher un plus grand nombre de donateurs. Si le plafond des dons est trop élevé, l'effet recherché ne sera pas atteint.
M. Dick Proctor: Je voudrais poser une question à monsieur Broadbent. Lorsque Jean-Pierre Kingsley a comparu devant nous au début de la semaine, il nous a dit que ce don annuel de 1 000 $ que peuvent faire les petites entreprises et les syndicats à un candidat ou une association de circonscription n'était pas une idée qui venait de lui. Cela semble avoir surgi après que le premier ministre en eut publiquement parlé. Et peut-être que cette idée émanait de l'un ou l'autre des membres de son parti.
Dans le cas d'un élu qui siège à la Chambre depuis très longtemps, et je parle ici de la question du financement des activités politiques, je me demande quelle serait votre réaction si nous suivions votre conseil en éliminant purement et simplement cela du projet de loi pour rendre celui-ci plus pur qu'il ne l'est actuellement.
 (1220)
L'hon. Ed Broadbent: Une ou deux choses. Tout d'abord, à ce que je sache, la version initiale du projet de loi, l'idée primitive, n'en faisait pas mention.
M. Dick Proctor: En effet.
L'hon. Ed Broadbent: En second lieu, pour les raisons que j'ai déjà mentionnées, je ne pense pas que ce soit une bonne idée. Tout cela ne ferait qu'embrouiller davantage les choses.
Dans tous les processus constitutionnels et démocratiques, je pense que c'est toujours une bonne idée de faire en sorte que le principe de base soit clair et le demeure. En l'occurrence ici, le principe est que seuls les particuliers devraient pouvoir participer au financement des élections, à l'exclusion de tout collectif. Au niveau local, si j'étais candidat, je ne vois vraiment pas en quoi cette exemption de 1 000 $ ferait une différence quelconque.
En ce qui me concerne, et je ne m'en cache pas, nous avions surtout des dons de particuliers, mais en revanche je représentais une circonscription de l'industrie automobile et il était tout à fait licite et permis que le Syndicat canadien des travailleurs de l'automobile contribue à ma campagne.
Si je devais me représenter à des élections fédérales, je serais très heureux de recommencer à solliciter des dons auprès de mes compatriotes plutôt que des syndicats ou des gens d'affaires. Si un homme d'affaires veut contribuer à ma campagne, il peut le faire à titre privé, plutôt qu'à titre de propriétaire d'un magasin de chaussures ou que sais-je encore. C'est en tant que citoyen qu'il faut l'encourager à contribuer à une campagne électorale, tout comme on encourage tous les autres citoyens à le faire.
M. Dick Proctor: Combien de temps me reste-t-il?
Le président: Une minute.
M. Dick Proctor: Je m'adresse à Aaron Freeman. Vous avez dit que vous seriez heureux de développer votre pensée sur les sondages et la recherche en fait de dépenses politiques publiques. Vous parliez de l'alinéa 422(1)a) et vous avez dit que cela renforcerait la position des partis.
Pourriez-vous nous en dire davantage?
M. Aaron Freeman: Un des problèmes de ce projet de loi, c'est qu'il renforce les partis—pas seulement dans l'absolu mais aussi par rapport aux députés et aux candidats. Le relèvement du plafond des dépenses ne s'applique pas aux candidats mais uniquement aux partis et, pour être honnête, au parti au pouvoir parce que c'est le seul qui pourra frôler le plafond national. Ce plafond est basé sur le nombre de candidats présentés et le nombre de circonscriptions. La plupart des partis ne présentent pas de candidats dans les 301 circonscriptions. Normalement, deux ou trois le font mais d'habitude, il n'y a que le parti au pouvoir qui s'approche de ce chiffre.
L'autre chose qu'il ne faut pas oublier, encore une fois, c'est que les dispositions sur le financement public visent principalement le parti. Je n'ai pas calculé le pourcentage, mais j'imagine qu'entre 80 et 90 p. 100 des fonds publics—et le gros de cette somme est l'allocation trimestrielle versée au parti—sont de loin la plus grande portion du financement public, et elle va directement au parti.
Je pense donc que le projet de loi va changer la circulation de l'argent lors d'une campagne et accroîtra l'importance des partis par rapport à celle des candidats.
Le président: Joe Jordan, puis Rick Borotsik suivi de Carolyn Parrish.
M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Proctor, notre campagne en vue d'éliminer le montant de 1 000 $ a le vent dans les voiles parce qu'il me semble que plus on entend de témoins, plus on va mettre en place une machine et dépenser de l'argent pour essayer de contrôler quelque chose qui, vraiment, comme M. Broadbent l'a dit, va à l'encontre du concept fondamental du projet de loi. Cela mérite donc d'être exploré et il ne faut pas abandonner l'idée.
En ce qui concerne le traitement fiscal des dons, ma propre vision de ceci—et votre chiffre, Aaron, à propos de ceux qui se servent du reçu d'impôt est intéressant—est que cela permet d'en assurer un suivi. J'imagine que c'est un motif classique, mais s'il y a un encouragement financier à l'inscrire sur sa déclaration de revenus, cela le met dans le domaine public et jette un peu de lumière dessus.
Donc, si nous devions adopter un système pour lequel aucun suivi n'est fait, autre que le suivi volontaire, j'imagine qu'on est de retour à la situation où on ne sait pas qui donne à qui et c'est le problème qu'on essaie de résoudre.
Fondamentalement, j'imagine, si ce que nous essayons de dire ici c'est que nous voulons éliminer le problème réel ou imaginaire du trafic d'influence grâce à l'argent ou que le système politique est plus réceptif aux gens en fonction de l'épaisseur de leur portefeuille, alors il faut trouver une façon de s'assurer que les dons soient publics.
J'aime l'idée de M. Broadbent d'essayer de faire les choses le plus simplement possible. Cela n'a pas besoin d'être exagérément compliqué, mais cela semble vouloir le devenir.
Déjà 60 p. 100 de l'argent en politique est d'origine publique, mais il y a sans doute de l'argent dont nous ne connaissons pas l'existence et peut-être que ce n'est pas la chose exacte. Sur les différentes formules, il y a du pour et du contre. On pourrait dire, en fonction des résultats des dernières élections, que nous ne voulons pas désavantager les nouveaux partis et les nouvelles idées. Je pense que c'est un des résultats de ce projet de loi, d'essayer d'éliminer les obstacles à l'entrée de gens dans le processus électoral. Quelle que soit l'analyse que l'on fait des chiffres, pour ce qui est de la participation électorale et du succès des tiers partis, il faut s'en occuper, et c'est peut-être une façon de le faire. Mais si vous retenez la liste de membres, le problème, je pense...
Vous savez, comme contribuable, j'hésiterais un peu à financer les membres de l'Alliance que Tom Long a recrutés en Gaspésie. Encore une fois, vous allez dépenser beaucoup d'argent pour essayer de contrôler quelque chose. Il y a peut-être une meilleure façon de le faire. Si le trésor public peut servir d'outil démocratique, c'est peut-être la solution.
La dernière chose—et c'est plus une réflexion de ma part que vous voudrez peut-être commenter — c'est qu'une des façons de rationaliser cette question, c'est d'imposer des contrôles strictes sur ceux qui peuvent donner. Une autre façon serait d'imposer des contrôles strictes sur ce que vous pouvez dépenser et éliminer la nécessité de faire des campagnes de financement. C'est quelque chose que j'ai dit à tous les groupes de témoins.
Maintenant, 63 000 $ dans Leeds-Grenville—et je suis un expert, j'ai gagné par 55 voix...
 (1225)
L'hon. Ed Broadbent: J'ai déjà remporté par 15 voix.
M. Joe Jordan: Je partage votre douleur.
Je dirais que 63 000 $, c'est trop; 23 000 $ serait probablement suffisant. Peut-être que ce que nous devrions envisager, c'est d'inclure les sondages, mais cela ne veut pas dire que nous devons le faire passer de 62 à 70 ¢. Réduisons donc le montant qu'on peut dépenser.
Finalement, si c'est la voie que nous devons prendre, bien sûr nous devons limiter les tiers partis. On ne peut lier une main et laisser l'autre libre.
Vous avez peut-être des idées sur les limites, entre autres.
Le président: Si l'on fait des observations, ce doit être très court. Nous avons instauré un système.
Je regrette d'avoir à vous interrompre.
Walter.
M. Walter Robinson: Très brièvement, on n'a pas besoin de reçus d'impôt pour faire le suivi. On peut toujours assurer le suivi et instaurer là la discipline, et je vous encouragerais à le faire.
Pour ce qui est des voix et du système dont on a parlé, les associations de circonscription, je serais d'accord. Je suis toujours contre le financement public, mais les associations de circonscription... je veux dire, les Conservateurs et l'Alliance créent des associations de circonscription bidons pour dire qu'ils ont 75 ou 80 candidats au Québec. Nous ne voulons pas de cela.
Pour ce qui est de faire correspondre les voix à la subvention en dollars, eh bien, si nous appliquons ce principe ici, appliquons-le pour que les voix exprimées comptent. Le million de voix exprimées en faveur de l'Alliance en Ontario devrait signifier quelque chose, et les 800 000 voix exprimées en faveur du Parti libéral qui ont été gâchées dans l'ouest du Canada devraient aussi signifier quelque chose, dans le cadre d'une réforme du régime électoral. Si nous appliquons ce principe ici, appliquons-le partout dans cette réforme électorale.
Des voix: Bravo!
Le président: Monsieur Broadbent.
L'hon. Ed Broadbent: Si vous le permettez, j'aimerais simplement dire que je suis aussi d'accord pour que le comité prenne beaucoup de temps pour examiner la façon de réduire autant que possible les dépenses électorales. Quiconque observe le régime politique américain, ce que je fais dans un cadre universitaire depuis un certain temps, c'est que ce n'est pas un hasard si tous les sénateurs américains sont millionnaires. Le rôle que joue l'argent dans ce régime est une des choses qui, dans une démocratie, bonne par ailleurs, en sape largement les fondements. Toutes les échappatoires en matière de financement contraignent les membres élus des deux partis du régime américain à passer la moitié de leur temps à recueillir des fonds.
Je suis donc d'accord là-dessus. Je pense que le comité devrait beaucoup réfléchir, s'il le peut, au moyen de réduire les sommes nécessaires pour les élections.
Le président: Aaron, une très courte intervention.
M. Aaron Freeman: Je n'ai pas le temps d'aborder tous les points. Je n'en toucherai que deux.
Pour ce qui est de se servir du crédit d'impôt pour vérifier la divulgation, c'est ce dont vous parlez je crois, cela ne marche pas. C'est le grand problème qui se pose. L'expérience montre que cela ne marche pas.
Une des raisons pour lesquelles ça ne marche pas, selon les solliciteurs de fonds, c'est que les entreprises ont le choix, et que les particuliers ont le choix; ils peuvent le déduire comme dépense d'affaires. Bien sûr, c'est contraire à la Loi de l'impôt sur le revenu, mais cela se fait. C'est une pratique répandue. Certains disent que cela équivaudrait au tiers des revenus des partis.
Cela ne marchera donc pas, en partie pour cette raison et en partie en raison du fait que c'est aux bénéficiaires d'assurer la divulgation. Nous pourrions imposer la divulgation aux donateurs. On pourrait l'envisager, quoi que cela pose aussi certainement des difficultés.
 (1230)
Le président: Je dois vous interrompre, veuillez m'en excuser.
C'est au tour de Rick Borotsik, suivi de Carolyn Parrish.
Chers collègues, je pense que si nous devons traiter d'autres questions, il nous faudrait siéger jusqu'à 12 h 50.
Je donne donc la parole à Rick Borotsik, à Carolyn Parrish puis à Ted White.
M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président.
Je souhaite à nouveau la bienvenue à tous les témoins.
Monsieur Broadbent, vous avez dit à un moment donné que le NPD cherchait à perfectionner la loi et non pas à faire des compromis. Au Manitoba, une loi interdit aux entreprises et aux syndicats de faire des dons; toutefois, il n'y a pas de financement public. En fait, je dirais même, monsieur, qu'il y a maintenant un déficit démocratique en raison de ce texte législatif qu'on est en train de mettre en oeuvre au Manitoba.
Est-cela la perfection, à votre avis?
L'hon. Ed Broadbent: M. Doer a fait un grand nombre d'excellentes choses...
M. Rick Borotsik: C'est un gouvernement néo-démocrate. Est-ce la perfection?
L'hon. Ed Broadbent: ... et des choses très novatrices, mais il a ce léger défaut, et c'est un défaut, de fournir un financement public. Je l'ai dit à M. Doer en personne, que j'espère qu'un texte législatif autrement acceptable, et l'initiative qu'il a prise...
M. Rick Borotsik: Alors c'est seulement un léger défaut.
L'hon. Ed Broadbent: Juste un léger défaut.
M. Rick Borotsik: D'accord. Je vous remercie.
Monsieur Freeman, vous avez été le seul témoin à parler de fonds de fiducie. Je sais que M. Robinson a laissé entendre qu'il y aurait d'autres moyens, peut-être, de passer outre au système, mais vous avez été le seul à parler de fonds de fiducie. Comment votre organisation pense-t-elle, moyennant des changements à cette loi, tenter d'éliminer cette échappatoire?
M. Aaron Freeman: Je serais heureux de...
M. Rick Borotsik: Soyez bref, parce que j'ai une autre question pour M. Robinson.
M. Aaron Freeman: D'accord.
Je serais heureux de vous en fournir le texte, mais c'est une nouvelle disposition qui interdirait les fonds de fiducie et remettrait l'argent dans des fonds de fiducie existants. On a laissé entendre que cela pourrait se faire au moyen du code d'éthique, mais cela pose quelques problèmes.
Le premier, c'est que le code d'éthique ne s'applique qu'aux députés, et que dans un cadre électoral cette règle ne s'appliquerait qu'aux députés et non pas aux autres candidats.
L'autre problème, c'est qu'à moins qu'on croie au 7 chanceux, soit le nombre de tentatives faites au Parlement pour adopter un code d'éthique, nous devrions régler cela par une loi sur les finances électorales, parce qu'il s'agit de contributions de nature électorale. Le code d'éthique peut être adopté ou non, et il peut ou non contenir cette disposition, et elle ne s'appliquera pas à tous les candidats.
M. Rick Borotsik: Monsieur Robinson, avez-vous quelque chose à dire au sujet des fonds de fiducie, par hasard? Vous n'en avez pas parlé dans votre exposé.
M. Walter Robinson: Nous serions favorables. Croyez-le ou non, nous appuyons une partie du travail que fait Démocratie en surveillance pour régler cette question.
M. Rick Borotsik: D'accord.
Monsieur Robinson, vous avez mentionné, et je ne le nie pas, que le but de cette mesure législative est de mettre fin à l'influence des entreprises et des syndicats qui versent des dons. C'est pour donner l'impression que les contributions financières au processus politique seront faites de façon plus ouverte et responsable. Vous avez mentionné quelque chose... et comme je l'ai dit, je ne le nie pas, mais j'aimerais peut-être que vous précisiez.
On semble penser qu'on mettra ainsi fin à toutes les formes de corruption au sein du gouvernement, qu'on mettra fin à l'influence des entreprises dans l'adjudication de contrats; je pense que vous avez parlé de 25 p. 100 de contrats qui ne feraient pas l'objet d'appel d'offres.
Pouvez-vous nous en parler un peu? À votre avis, est-ce qu'en réalité ce texte de loi changerait effectivement ce genre de possibilité au sein du gouvernement?
M. Walter Robinson: Pour répondre à votre question à rebours, mettre fin à l'influence indue? Non. Influencer le gouvernement, c'est une activité légitime. Si une entreprise veut offrir des services au gouvernement, ce qui représente une industrie de 15 milliards de dollars par année au Canada, nous voulons que cela se fasse dans un système d'appel d'offres juste et concurrentiel.
Si on veut mettre fin à l'influence du gouvernement... ou plutôt à l'influence du secteur des affaires—j'ai commis là un lapsus freudien—et des syndicats à cet égard, éliminez les possibilités d'exercer une influence sur ces choses eu égard aux subventions que reçoivent les entreprises et aux subventions de développement régional. Ils ne veulent pas faire ce jeu-là parce qu'il n'y a pas d'enjeu.
M. Rick Borotsik: Monsieur Broadbent, très brièvement, vous avez parlé de donner plus de temps d'antenne gratuit sur les grands réseaux. Je ne suis pas contre. Je me demande tout simplement, comment on peut réglementer cela? Le gouvernement paierait-il en fait de ce temps d'antenne aux stations de télévision du secteur privé? Nous parlons là d'un coût énorme. Que paierait le gouvernement, alors?
 (1235)
L'hon. Ed Broadbent: Le coût dépendrait du temps qu'on exigerait. Cela se fait en Grande-Bretagne. Il y a un temps d'antenne gratuit obligatoire.
M. Rick Borotsik: C'est aussi une station publique, si je comprends bien. Nous parlons ici du secteur privé.
L'hon. Ed Broadbent: Il se peut que je me trompe à ce sujet, mais cela concerne aussi les autres réseaux en Grande-Bretagne. On interdit—et je reviens là-dessus—toutes les annonces politiques diffusées au Royaume-Uni.
Évidemment, on ne veut pas mettre en place le même nombre d'annonces gratuites pour remplacer les annonces insignifiantes que tous les partis achètent maintenant, ces clips de 20 secondes. Et je le répète, tous les partis, soumis à la concurrence des autres, se livrent à cela.
Je pense que les réseaux, en guise de contribution à la démocratie canadienne, devraient être tenus, si l'on veut, en outre d'offrir une certaine période de temps libre, plus de temps libre, à tous les partis.
Pour revenir aux autres aspects, et je terminerai là-dessus, j'aimerais beaucoup que les réseaux mettent en place ce que j'ai mentionné à la fin de chaque semaine, soit une discussion publique de tous les chefs sur les questions politiques de la semaine. Peut-être que tous les réseaux pourraient y collaborer.
M. Rick Borotsik: Merci, monsieur Broadbent.
Le président: Carolyn Parrish, Ted White, puis Jacques Saada.
Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.): Je dois avoir des problèmes de personnalité très graves, outre tout ce que l'on a constaté sur le continent, parce que j'ai trouvé quelque chose d'intéressant dans ce que chacun d'entre vous a dit.
Monsieur Robinson, j'ai beaucoup réfléchi à la possibilité d'augmenter les dégrèvements d'impôt aux associations caritatives et, comme John Bryden, je trouve cela extrêmement compliqué, du fait de la comptabilité et de la vérification. Ce n'est donc pas une panacée. On ne peut pas comparer les deux. C'est très difficile.
Je suis d'accord avec M. Freeman quant au plafond de 1 000 $. J'estime que 10 000 $, c'est énorme. Je dirais que le plafond de 1 000 $ devrait s'appliquer à tout le monde. Je m'inquiète beaucoup que les entreprises... Comme l'a mentionné mon collègue, elles ne devraient pas du tout être là-dedans.
Je trouve que la publicité par les tiers est quelque chose de tout à fait anti-démocratique qui peut être très dangereux. Des gens à l'esprit très étroit peuvent imprimer tout ce qu'ils veulent. Il faut un an pour prouver qu'il y a eu diffamation et, à ce moment-là, on a déjà perdu l'élection. Je voudrais donc, étant donné que je vous respecte, que vous réfléchissiez à cela très sérieusement parce que vous y revenez continuellement. J'estime cela très dangereux en démocratie.
Il est toujours fascinant d'écouter M. Broadbent. J'adore une pensée claire et l'expérience. Je trouve toujours merveilleux de vous écouter. D'après ce que vous avez dit, j'ai l'impression que nous sommes d'accord, à savoir que les dépenses devraient diminuer. Si les plafonds de dépenses diminuent, il sera plus facile de récolter l'argent nécessaire et le processus deviendra plus démocratique et dépendra moins des grosses entreprises et des gens très riches.
Je me demandais si vous auriez les uns ou les autres quelque chose à dire à propos d'un système qui, et cela me fait mal de le dire, serait assez similaire au système des primaires aux États-Unis et dépendrait de cotisations, à savoir que des cotisations très peu coûteuses permettraient de détenir une carte de membre d'un parti. On pourrait alors établir le remboursement en fonction du nombre de cotisations perçues par un parti plutôt que du nombre de voix obtenues aux dernières élections—parce que sinon ce sont toujours les plus forts qui héritent de tout. Ceux qui obtiennent le plus de suffrages aux élections obtiendront les remboursements les plus importants cette fois et la fois suivante, tout simplement parce qu'ils ont obtenu le plus de suffrages.
J'aimerais que ce soit moins fonction des dépenses et plus fonction des contacts personnels avec les électeurs, qu'il s'agisse des assemblées d'investiture ou des élections. Si je n'ai pas beaucoup d'argent pour acheter des pancartes, ce que je trouve de toute façon absolument ridicule, il va falloir que j'aie davantage de contact avec les gens. Je ne vais pas pouvoir me cacher derrière des pancartes. Je ne pourrais pas me cacher derrière des tracts. Je vais devoir m'exposer et travailler pour obtenir ces voix.
J'aimerais donc vraiment avoir vos commentaires à ce sujet. Vous en avez déjà parlé, monsieur Broadbent. Pourquoi ne pas revenir à l'idée de cotisations minimes et calculer les remboursements en fonction du nombre de membres que compte un parti?
Le président: Des commentaires?
Ed Broadbent.
L'hon. Ed Broadbent: Je n'ai pas grand-chose à ajouter à ce que j'ai déjà dit. Je pense qu'il serait bon de parvenir à une formule mixte qui se fonderait sur les résultats passés... Comme quelqu'un l'a déjà dit à ce sujet, le problème c'est que c'est passé mais cela indique aussi la participation des citoyens. S'ils ont voté la dernière fois en grand nombre pour votre parti, par exemple, il me semble qu'il y ait une bonne raison pour que celui-ci obtienne un remboursement supérieur.
Une formule mixte me semblerait donc une bonne idée—à savoir les membres actuels du parti, ce qui incite tous les partis à se décarcasser pour inviter les Canadiens à adhérer et à participer au processus politique en se joignant à un parti; et les derniers résultats électoraux. Comment peut-on faire cela de façon crédible et intègre en comptant les cotisations aux différents partis, je ne sais pas et je pense que ce sont des professionnels qui devraient vous conseiller là-dessus afin que ce soit faisable.
 (1240)
Le président: Walter Robinson.
M. Walter Robinson: Monsieur le président, à propos des pancartes électorales, comme M. Saada et M. Guimond... Eux ne mettent pas de pancartes sur les pelouses au Québec. Ils en mettent sur la 20 et sur la 40 et à tous les feux de circulation, mais ils n'en mettent pas sur les pelouses.
Pour ce qui est des dépenses, ma foi, il suffit de ne pas remplacer les dons des sociétés et des syndicats et cela réduit automatiquement les dépenses. Et si vous voulez faire quelque chose à propos des plafonds...
Là encore, nous sommes contre le système de financement, mais les cotisations demandées aux membres des partis ne sont pas la solution. Autrefois, la seule cotisation partisane que j'ai jamais payée était aux Conservateurs, de 1990 à 1993. Je me souviens que j'étais directeur de scrutin dans ces circonscriptions d'Ottawa et vous seriez surpris de savoir combien de personnes vivaient à l'adresse qui correspondait à un terrain vacant rue Cooper, où il y aurait eu 19 et 20 membres.
Ce n'est pas la façon de procéder.
Le président: Aaron Freeman, là-dessus.
M. Aaron Freeman: L'idée ne me semble pas mauvaise. Je crois qu'il faudrait poser la question à certains des attachés de recherche et des fonctionnaires d'Élections Canada. S'ils pouvaient trouver une formule qui puisse fonctionner, ce serait très bien mais il faut que cela soit simple. Et il y a évidemment ce problème de vérification. Je ne sais pas comment je m'y prendrais.
Je suis tout à fait d'accord qu'il faut diminuer les dépenses et si l'on fait cela, on peut diminuer les subventions publiques. Ce serait tout à fait justifié. Les plus grosses dépenses pour le parti, et de loin, sont la publicité électorale. Si l'on augmente le temps de d'antenne gratuit, il est plus que justifié de diminuer le plafond.
À propos de ce plafond, en 1974, il était calculé en fonction de l'argent que les partis dépensaient déjà, ce à quoi on ajoutait l'indice des prix à la consommation. Il ne s'agissait pas d'essayer de diminuer les dépenses des partis mais de considérer ce qu'ils dépensent déjà.
Il est donc tout à fait justifié d'abaisser considérablement le plafond. À propos de ce que vous disiez tout à l'heure, il n'est peut-être pas aussi justifié d'abaisser le plafond des candidats, mais il n'y a pas forcément ce problème dans votre circonscription. Le problème touche les circonscriptions rurales plus vastes où il y a de gros frais de déplacement et où une campagne coûte plus cher.
Le président: Ted White, puis Jacques Saada.
M. Ted White: Merci, monsieur le président.
Je note que Carolyn a dit qu'il était important que cela corresponde à l'argent dépensé. Je n'en suis pas certain. Pour l'Accord de Charlottetown, par exemple, le camp du «oui» a dépensé dix fois plus que le camp du «non» et a tout de même perdu. Le PC a dépensé énormément d'argent aux élections de 1993 et a perdu. Élection après élection, les députés réformistes et de l'AC se font élire en dépensant beaucoup moins que les autres.
J'aimerais toutefois revenir à ma question à M. Freeman. Vous avez dit que vous étiez choqué par les délais de divulgation. Auriez-vous des suggestions à faire quant à un mécanisme qui permettrait, sachant qu'il y a énormément de bénévoles impliqués et qu'il y a toute la bureaucratie d'Élections Canada, un mécanisme qui permettrait d'améliorer le système, d'accélérer cette comptabilité?
M. Aaron Freeman: Certainement. Je vais poser la question à M. Kingsley. Je pense que sa réponse sera qu'il n'aura pas de problème à administrer un tel système, même en période électorale.
Il s'agirait d'un système de divulgation mensuelle ou trimestrielle. Il y aurait une période de divulgation distincte pendant la campagne électorale et on demanderait de présenter le rapport quelques jours ou une semaine avant le scrutin. On interdirait des contributions entre la date de la divulgation et la date du scrutin. Ainsi, tout le monde saurait qui contribue aux campagnes des candidats et des partis avant de voter. Je suis certain que c'est un système que pourrait administrer Élections Canada.
Je sais que M. Kingsley a déjà offert de créer le logiciel nécessaire pour les candidats et les partis afin de simplifier les choses au maximum. C'est la simple touche «envoyer» dans le courrier électronique qui permettrait d'envoyer des choses à Élections Canada, cela va directement sur le site Internet et c'est ensuite vérifié.
Ce système est, je pense, tout à fait possible. Cela fonctionne aux États-Unis où il y a des déclarations mensuelles en ce qui concerne les élections présidentielles.
À propos de votre premier point, je crois que l'erreur que l'on commet parfois quand on examine cette question est que l'on suppose que les gens disent qu'on peut acheter des élections à chaque fois, à savoir que ceux qui dépensent plus l'emportent à chaque fois. Ce n'est pas du tout ce que l'on dit. La question clé ici est de savoir si l'argent influence les élections et il semble très évident que c'est le cas.
 (1245)
M. Ted White: Monsieur Robinson, Carolyn a parlé de toute la question des associations caritatives et je voulais aussi y revenir. Vous nous avez mis au défi d'émettre un communiqué de presse dans le sens de ce que vous dites dans votre exposé.
Cela ne me dérangerait pas tellement bien que je convienne avec Carolyn que la situation est beaucoup plus complexe. Je ne pense pas que l'on puisse comparer les deux parce que vous semblez oublier quelque chose. Beaucoup d'associations caritatives tirent tous leurs revenus directement du gouvernement et de subventions. Par exemple, elles n'ont pas à aller solliciter directement des fonds comme les partis politiques. Nous organisons des meetings, des AGA, des campagnes de financement. Dans une certaine mesure, nous gagnons l'argent que nous récoltons. Votre argument ne tient donc pas entièrement.
Je suis sûr que vous savez aussi, si vous avez examiné certaines des activités des associations caritatives, qu'il y aurait également beaucoup à critiquer et que la comptabilité laisse souvent à désirer. Je ne suis donc pas certain que vous puissiez établir un parallèle direct et j'aimerais simplement que vous l'admettiez. Sinon, j'aurais été heureux d'émettre un communiqué de presse.
M. Walter Robinson: Je le reconnais, par votre entremise monsieur le président, et je ne néglige pas ce qu'ont fait Mme Parrish et M. Bryden. Nous avons suivi cela de très près. Il y a beaucoup à redire quant à l'administration des organismes de bienfaisance, des organismes enregistrés, des frais généraux et de tout un éventail d'autres problèmes et de la mauvaise utilisation des fonds récoltés. Je dirais la même chose—le problème n'est pas réglé—des subventions gouvernementales à l'aide publique au développement. Il n'y a pas grand-chose qui va à l'étranger. Il y a certainement là un corollaire.
Je voudrais aussi revenir sur ce que disait M. Freeman, à savoir que la question n'est pas que l'argent achète les élections, j'en conviens. Est-ce qu'il les influence? Bien sûr. Cela permet d'acheter de la publicité. Mais les idées aussi influencent les élections, le temps qu'il fait, des tas d'autres choses.
Le président: Ted.
M. Ted White: J'aimerais poser une question directement à M. Broadbent et, s'il a le temps, il pourra ajouter ce qu'il veut.
Le président: Allez-y.
M. Ted White: J'ai constaté une contradiction dans vos propos...
L'hon. Ed Broadbent: Inconcevable.
Des voix: Oh oh!
M. Ted White: Vous avez dit que les contributions politiques devraient venir d'actes volontaires de la part de particuliers, mais vous semblez très favorable à l'idée du financement public et c'est pourquoi je me demandais si vous ne seriez pas d'accord pour qu'on adopte un système qui repose exclusivement sur des contributions volontaires plutôt que d'y consacrer des deniers publics? Quelles seraient vos objections à cela?
L'hon. Ed Broadbent: Je ne pense pas qu'il y ait de contradiction à dire qu'il existe deux sources légitimes de financement, d'une part les contributions volontaires, auxquelles je suis tout à fait favorable, d'autre part reconnaître qu'un gouvernement qui est, au sens tout à fait réel et profond d'une démocratie, représentatif de tous les citoyens à un moment donné, contribue au processus public, dont on discute ici, ce qui aiderait tous les partis et ainsi, indirectement, tous les citoyens. C'est deux méthodes différentes, mais je ne pense pas qu'il y ait là de contradiction.
Très franchement, je pense que si l'on pouvait trouver suffisamment de fonds—et je parle là en partie à titre d'ancien chef de parti—pour mener une campagne électorale crédible dans un pays aussi divers que le nôtre, géographiquement et à tout autre point de vue, simplement à partir de contributions volontaires, ce serait très bien. Je ne pense tout simplement pas que cela rapporterait suffisamment pour mener une campagne crédible dans toutes les régions du pays à propos de tous les enjeux dont il faut débattre.
C'est pourquoi je pense qu'il faut combiner le financement public et les contributions volontaires.
Le président: Jacques Saada.
[Français]
M. Jacques Saada: Comme il est 12 h 49, je poserai une question très brève.
[Traduction]
Le président: Deux minutes, s'il vous plaît.
[Français]
M. Jacques Saada: Elle ne prendra même pas deux minutes.
La perception--et je ne débattrais pas du fait qu'elle soit justifiée ou non--est qu'en réduisant le plafond des contributions, on augmente la possibilité de crédibilité de la chose publique par rapport à l'ensemble des citoyens.
Les entreprises ont une tradition visant à aider dans toutes les sphères de l'activité humaine, qu'il s'agisse des arts, de la culture, des sports, et ainsi de suite. En quoi le fait de leur permettre une contribution à la chose politique est-il différent de celui de leur permettre d'appuyer toutes sortes d'autres activités humaines?
Deuxièmement, est-ce que vous pensez qu'entre 1 000 $ de contribution d'une entreprise et 10 000 $ de contribution d'un particulier, c'est l'entreprise qui va être perçue comme ayant le plus d'influence dans le processus?
 (1250)
[Traduction]
L'hon. Ed Broadbent: C'est une question certainement très importante. Je reviens sur ce que disait M. Robinson il y a une minute, à savoir que toutes sortes de choses influencent des élections—le temps qu'il fait, les idées, l'argent—, c'est bien vrai. Et certains d'entre nous estiment que l'argent devrait jouer un rôle moins important. C'est exactement ce dont il est question ici. La démocratie, si l'on revient à la démocratie athénienne, reposait sur la notion d'égalité, de participation égale. Lorsque des entités collectives mettent de l'argent...
Je conviens avec vous que les entreprises devraient contribuer à la société de tas d'autres façons, mais pour ce qui est du débat public, de la sélection des candidats et des résultats électoraux, il me semble que tous les législateurs démocratiques devraient s'efforcer d'éliminer le rôle de l'argent, si l'on veut, et d'optimiser le rôle des idées. C'est ce qui est au coeur de ce projet de loi.
C'est la raison pour laquelle je pense que ni les entreprises ni les syndicats ne devraient contribuer au processus électoral. Nous devrions essayer de faire ce que John Stuart Mill et les autres préconisaient, à savoir insister beaucoup sur le rôle des idées, notamment, si je puis y revenir, de l'idée qu'une personne qui vit de l'aide sociale devrait en principe compter autant qu'un millionnaire. Quand l'argent joue un rôle, cela diminue le principe de l'égalité.
Le président: Walter Robinson, puis Aaron Freeman et ce sera tout.
Walter.
M. Walter Robinson: L'égalité dans la participation demeure. C'est le vote. L'urne est aveugle. L'assisté social ou le millionnaire ont des voix égales, du moins en théorie. Nous n'avons pas une bonne réforme du système électoral si bien qu'on ne peut pas vraiment parler d'égalité.
La question à poser à propos de plafonds de dépenses, de ce genre de dépenses dans un contexte plus large, est, pourquoi les citoyens ne voient pas d'inconvénient à se faire influencer par un parti politique qui dépense de l'argent alors qu'ils n'en veulent pas lorsqu'il s'agit d'un groupe de citoyens tiers, qu'il s'agisse du CPA, de la FCE, d'un syndicat ou du Club des 4-H? Le citoyen a toujours une voix égale.
Le président: Aaron Freeman.
M. Aaron Freeman: Pour aller au coeur de votre question, la raison pour laquelle c'est différent dans le cas du processus démocratique, c'est parce qu'il s'agit du processus démocratique. C'est le processus par lequel nous décidons des lois qui régissent nos vies. Ce sont les êtres humains qui votent, pas les entreprises. L'idée, c'est que les gens doivent être au coeur du processus.
L'autre raison pour éliminer les dons des entreprises et des syndicats, et d'autres organisations, est une raison pratique : c'est courir aux abus. Les entreprises, contrairement aux gens, peuvent faire un don en passant par de multiples filiales ou des coquilles vides. Je n'invente rien. Cela se fait dans le régime actuel. Des centaines de milliers de dollars aboutissent dans les coffres des partis venant de compagnies dont vous ne savez pas vraiment—ou à propos desquelles il faut faire une somme immense de recherches pour le savoir—qui sont les administrateurs et qui est la société mère.
Encore une fois, surtout si vous imposez d'autres limites aux contributions, ce que nous avons appris d'autres régimes c'est que si vous fermez une échappatoire et en laissez une autre grande ouverte, l'argent passe dans celle qui est grande ouverte.
Le président: En votre nom, je tiens à remercier nos témoins. Je tiens à remercier Ed Broadbent de la Commission sur la démocratie canadienne et la responsabilisation des entreprises. Je veux remercier MM. Walter Robinson et Bruce Winchester de la Fédération des contribuables canadiens.
Bruce, je tiens particulièrement à vous remercier. Comme le président, j'aimerais que nous ayons à voir plus de témoins comme vous.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Et de Démocratie en surveillance, je tiens à remercier Aaron Freeman.
Merci beaucoup à tous.
Chers collègues, nous allons passer aux autres affaires.
Michel Guimond.
[Français]
M. Michel Guimond: Monsieur le président, je voudrais revenir sur la décision que vous avez prise...
[Traduction]
Le président: Un peu de silence s'il vous plaît.
Michel Guimond.
[Français]
M. Michel Guimond: Monsieur le président, je voudrais revenir sur la décision que vous avez prise à l'effet de ne pas demander que soit retiré le document qui a été distribué par la Canadian Taxpayers' Federation. Je veux vous dire qu'effectivement, ce document n'a pas été distribué par le personnel du comité; je suis allé vérifier auprès de nos deux dévoués assistant et assistante du comité. Mais un fait demeure: à côté de moi, il y a la place de M. Sauvageau, qui était absent du comité, il y a l'ordre du jour, l'analyse du projet de loi C-24, en français et en anglais, et il y a le document de la Fédération des contribuables canadiens.
Monsieur le président, depuis trois ans que je siège à ce comité, je me considère comme étant une personne normalement conciliante. Je me considère comme étant coopératif. Je me considère comme étant un démocrate. J'ai du respect pour chacun des députés qui sont élus ici. Vous avez gagné vos élections. Nous avons gagné nos élections. Notre mandat, nous le tirons du peuple. Je ne remets en question l'élection de personne. Le peuple est le meilleur juge, et je m'attends à la pareille. Je n'ai jamais senti, de la part de membres du comité, une volonté de me brimer en tant que membre du comité. Je ne suis donc pas paranoïaque.
Vous comprenez pourquoi je ne parle pas rapidement. Je veux m'assurer que les membres du comité qui n'ont pas la chance de maîtriser deux, trois ou quatre langues puissent bien me comprendre. C'est pour ça que je ne parle pas rapidement. Je trouve cela très difficile de ne pas parler à mon rythme, mais je fais un effort.
Je vais utiliser une expression typique de chez nous. Je suis quelqu'un qui ne s'enfarge pas dans les fleurs du tapis. Je ne suis pas quelqu'un qui s'offusque facilement. Je le dis pour ceux et celles qui sont ici depuis trois ans. Par contre, j'ai des principes, j'ai des valeurs. Je m'attends à la pareille de la part des autres.
Monsieur le président, un des traits de personnalité que je déteste le plus, c'est l'hypocrisie. Je veux remercier Mme Catterall, la whip en chef du gouvernement. Lorsque je suis intervenu tout à l'heure, elle a dit qu'elle avait pris la décision de remettre le document sur la table.
Je suis surpris que le seul autre membre francophone présent, M. Saada, ait choisi de garder le silence. C'est un député québécois francophone comme moi, qui représente la circonscription de Brossard—La Prairie. C'est son choix. De toute façon, je n'ai pas le pouvoir d'exiger qu'un collègue intervienne s'il n'a pas le goût d'intervenir. Toutefois, je peux être surpris de son silence. Mais la question n'est pas là.
Monsieur le président, avec tout le respect que j'ai pour vous en tant que député, en tant que président et en tant qu'homme--je ne vous connais pas comme ami--, je vous soumets très respectueusement que tout à l'heure, vous avez fait preuve d'un principe qu'on appelle en droit «de l'aveuglement volontaire». Vous avez permis que soit faite indirectement une chose qu'une personne ne peut pas faire directement.
Monsieur le président, encore une fois avec respect, vous avez fait preuve d'aveuglement volontaire. Je vais relire comme il faut le compte-rendu, mais vous avez indiqué que le comité n'avait pas distribué le document unilingue en question.
 (1255)
C'est vrai, c'est vrai, il n'a pas été distribué par quelqu'un du comité, mais par contre, malgré vos principes de respect de l'ordre et du décorum dans votre salle de comité, vous avez accepté qu'il y ait un manquement à l'ordre et au décorum.
Monsieur le président, quand on était l'opposition officielle, j'ai présidé le Comité permanent des comptes publics pendant un an et demi. Nous savons ce que ça veut dire que de respecter l'ordre et le décorum. Nous n'avons qu'à consulter Marleau et Montpetit, nous n'avons qu'à voir notre propre vécu dans nos comités.
Vos pouvoirs, monsieur le président, sont importants. Vous pouvez demander qu'un agent de sécurité expulse de la salle quelqu'un qui intervient à notre endroit. Vous pouvez faire venir les agents de sécurité et faire expulser quelqu'un manu militari. Vous pouvez exiger que les gens dans la salle ferment la sonnerie de leur appareil cellulaire ou leur téléavertisseur. Vous pouvez exiger que les caméras, s'il y en a au début de la séance de comité, soient expulsées. On n'a pas besoin d'avoir de motion en bonne et due forme pour ça. Ce sont vos pouvoirs, vos devoirs et vos responsabilités, qui sont inhérents à votre rôle de président.
Il est vrai que nous avons une motion qui a été proposée par M. Johnston, de l'Alliance canadienne, qui dit:
Que le greffier du comité soit autorisé à distribuer aux membres du comité les documents reçus seulement lorsque ces documents existent dans les deux langues officielles. |
Nous avons adopté cette motion le 10 octobre 2002. C'est vrai que la motion est respectée. Mais qu'en est-il de l'ordre et du décorum?
Je termine, monsieur le président, en vous posant la question suivante: est-ce que ça signifie qu'un président va accepter de n'avoir rien à redire quant à des documents distribués par des tiers qui sont des témoins et qu'il va faire la démarche de distribuer des documents dans la salle même si ces documents-là sont vexatoires, diffamatoires, contraires à la Loi sur les langues officielles?
Moi, je veux juste avoir la réponse à cette question. Là, vous allez me donner la vôtre, et je vais avoir celle de la Chambre quand je vais soulever ma question de privilège. La question est là. Est-ce qu'un tiers, même s'il n'a pas la permission d'un président, peut distribuer des documents comme ça? Car on va faire venir des gens qui vont distribuer des choses. Je vous le dis, c'est moi qui vais les avoir fait entrer en vertu de mon privilège comme député. Est-ce que c'est acceptable qu'un président, se soustrayant à ses responsabilités de respect de l'ordre et du décorum, permette qu'un tiers puisse distribuer n'importe quel document ici ou ailleurs dans cette salle? La question est longue, monsieur le président, et j'ai hâte d'avoir la réponse.
Merci beaucoup.
· (1300)
[Traduction]
Le président: Joe Jordan, pourvu que ce soit très court et sur le même point.
M. Joe Jordan: Oui, je serai très bref, monsieur le président.
Quand je suis entré, j'ai vu le document et j'ai demandé aux greffiers s'il était disponible dans les deux langues officielles. Enfin, il faut trouver... parce qu'ici au comité, on a eu des problèmes à faire des choses quand on a des témoins, et je pense que ça peut avoir influé sur la façon dont les gens s'occupent de ça.
Je ne suis pas en désaccord avec M. Guimond. On ne peut pas leur interdire de mettre des choses sur la table, mais je pense que cette table, et la partie qui est devant les membres devrait être un endroit où les documents qui y sont placés répondent aux critères que le comité s'est fixés.
M. Guimond fera ce qu'il doit faire, mais je pense qu'à l'avenir les témoins ne devraient pas être autorisés à placer des documents devant les membres.
Le président: Jacques Saada.
[Français]
M. Jacques Saada: Monsieur le président, c'est bizarre. Je regrette vraiment que M. Guimond m'ait mis en cause dans son argumentation, pour deux raisons.
La première raison, c'est que même si je n'ai pas fait de grand show médiatique, mon document est parti en même temps que celui du whip à l'autre bout de la table. Je pense que le jugement n'est pas mérité.
Deuxièmement, je suis d'accord, bien sûr, sur le principe; je n'ai pas besoin de le démontrer. Il y a eu tellement d'occurrences ou d'événements de ce genre que ma position est très claire là-dessus; je n'ai rien à démontrer à personne. Mais je ne pouvais pas accepter, je le dis en toute sincérité, que l'on porte une accusation extrêmement grave envers le président alors que c'était une séance télévisée. Même si je n'étais pas d'accord sur la décision que vous avez prise, monsieur le président, et que je souscris au fond de la décision qui aurait dû être de retourner ces documents-là de façon systématique, le ton qui a été employé par mon collègue me paraissait tellement agressif que si je m'étais embarqué dans le débat, cela aurait donné l'impression au public qui regardait à ce moment-là que j'étais d'accord sur l'agression contre vous. Or, je trouve qu'elle n'est pas justifiée parce que généralement, vous faites preuve d'un extrême discernement face à la question relative aux langues officielles.
Alors, le fait que je n'aie pas voulu intervenir publiquement et ouvertement et ainsi de suite n'a rien à voir avec le fond de la question. Je pense que M. Jordan a été extrêmement clair et je souscris tout à fait à ce qu'il a dit. Cela respecte l'esprit de ce que nous avions convenu entre nous, à savoir que quand un groupe vient, il a le droit, comme groupe, d'employer l'une ou l'autre des deux langues officielles. Donc, il vient avec ses documents. Il n'a pas le droit de nous les distribuer parce qu'en ce qui nous concerne, il faut que les deux langues officielles soient respectées en même temps. Il peut les mettre à notre disposition quelque part, quelqu'un peut aller les chercher, mais quand ça vient sur cette table-là, effectivement, il faut que ça respecte l'esprit des langues officielles, et je suis entièrement d'accord là-dessus.
Je voudrais juste finir sur un mot à l'intention de M. Guimond. On a bien sûr chacun son propre style, on a chacun sa propre façon de faire les choses, mais je n'accepte pas l'injustice d'une accusation qui porte sur la façon dont je fais les choses et non pas sur le fond de ce que je fais. Je serais heureux qu'en toute reconnaissance de ce principe-là, vous retiriez votre accusation du fait que je n'ai pas parlé.
· (1305)
[Traduction]
Le président: Michel, tout d'abord, je suis gêné que vous ayez été placé dans l'obligation de présenter vos arguments de cette façon. Je suis tout à fait sincère. Et j'apprécie beaucoup le fait que vous vous êtes exprimé de telle sorte que la décision que vous demandez est la mienne de ne pas les avoir remis.
Je vous assure, si j'avais su à temps que ces documents avaient été distribués, comme les témoins l'ont dit—et ils ont dit qu'ils les avaient distribués eux-mêmes—ils auraient été retirés.
À l'avenir, au fait, tant que nous saurons qu'à ce bout de la table les documents sont là, ils seront enlevés, et les témoins seront avertis qu'ils ne peuvent pas le faire.
En général, et j'espère pas seulement à notre comité, mais dans les comités précédents, comme président et dans d'autres circonstances, je me suis donné beaucoup de mal—beaucoup—pour m'assurer que les deux langues officielles sont utilisées et qu'en particulier la langue minoritaire est protégée. Je l'ai vraiment fait. Vous ne devriez jamais être mis dans la situation de devoir mettre en doute les services dans la langue officielle de la minorité. Je vous présente donc mes excuses.
En réponse à la question que vous avez posée à la fin, la réponse, évidemment est non; les gens n'ont pas le droit de distribuer des documents. Au fait, ils n'ont pas le droit de distribuer des documents peu importe s'ils sont dans les deux langues officielles ou pas. Comme on a dit ici, nous avons, comme comité et comme président du comité, notre propre autorité. C'est notre domaine et c'est à nous de contrôler ces choses.
Mais comme vous l'avez admis, je ne savais pas que ces documents étaient là jusqu'à ce qu'ils y soient. La question dans ce cas est qu'est-ce que je dois faire? Ce document va être traduit. Ce n'était pas un document supplémentaire, mais un document que le témoin allait commenter et il devait être traduit. J'ai le sentiment que les témoins étaient ici et nous étions dans une formule particulière et j'ai donc décidé que nous pouvions aller de l'avant.
Laissez-moi dire une autre chose, Michel, puis vous pourrez reprendre la parole.
À ce stade-ci, je le regrette. Si je devais à nouveau prendre la décision, je les aurais peut-être fait enlever et placer au bout de la table, là où ils auraient dû être. Mais je ne l'ai pas fait. Dans les circonstances, c'est la décision que j'ai prise.
Au fait, Michel, cette décision me revenait à moi. Même si les deux positions se défendent, et même si je regrette, c'était une décision tout à fait légitime de ma part.
Pour conclure, à ce stade-ci en tout cas, je veux vous présenter mes excuses de vous avoir mis dans cette situation—pas tant d'avoir pris la décision, que je regrette. C'est la décision que j'ai prise et je pense qu'il y avait des arguments aussi bien pour que contre.
Michel Guimond.
[Français]
M. Michel Guimond: Merci, monsieur le président. J'apprécie vos propos, mais je veux juste nuancer un peu ce que M. Jordan a dit. Ce ne sont pas uniquement les documents distribués à cette table, c'est la salle de comité. On peut facilement faire indirectement ce qui n'a pas été fait, laisser là un document unilingue. Si la Canadian Taxpayers' Federation envoie un document unilingue anglais ou unilingue français dans chacun de vos bureaux et que vous venez ici pour la réunion, je n'ai pas d'objection, mais dans la salle de comité, on doit s'assurer que ce qui est distribué soit dans les deux langues, parce que là, on va commencer à jouer au jeu du chat et de la souris. Je vous le dis, si cela arrive après le congé avec un autre groupe et que ce n'est pas sur la table devant nous mais sur la table derrière, alors je vais me lever, je vais prendre tous les documents et je vais les mettre à la poubelle.
Il ne faut pas fermer les yeux. On reconnaît qu'au Canada, il y a deux langues officielles. Je ne veux pas être la fanfare de la Loi sur les langues officielles. Moi, je veux devenir souverain; je ne suis pas ici pour réformer le Canada, mais jusqu'à ce que ce soit le cas, il y a deux langues officielles au Canada. Il ne faut pas jouer à faire indirectement ce qu'il n'est pas permis de faire directement.
M. Regan a fait un très bon commentaire à la Canadian Taxpayers' Federation. Avec l'argent qu'ils ont, qu'ils n'aient pas été capables de trouver un traducteur ou une traductrice et de lui donner le temps de traduire ce document, ils ont beau arriver de Regina et d'un peu partout, cela ne tient pas la route.
Je veux aussi que vous vous mettiez dans la peau de celui qui a un document qui n'est pas rédigé dans sa langue maternelle, alors que c'est la langue maternelle de son collègue. Nous avons des interprètes hyper-compétents. Je ne sais pas comment ils font pour travailler dans ces conditions-là. C'est un travail épuisant intellectuellement. Mais moi, comme francophone, je n'ai pas à être pénalisé pour suivre. Ou j'ai un document que je suis capable de suivre dans les deux langues, ou le document n'est pas distribué.
· (1310)
[Traduction]
Le président: Michel, je vous présente mes excuses de vous avoir mis dans l'obligation de devoir présenter vos arguments. Comme vous l'avez dit vous-même, ces documents ont été distribués. Si j'étais arrivé ici cinq minutes plus tôt, ils n'auraient pas été sur la table. Chaque fois que l'on s'apercevra que quelque chose de ce genre va se passer, dorénavant, on y mettra fin.
Jacques Saada.
[Français]
M. Jacques Saada: J'ai demandé quelque chose à mon collègue. Je n'ai pas eu de réponse ni de suivi. Je souhaiterais savoir s'il est prêt à retirer les propos qu'il m'a imputés sur la façade et non pas sur le fond.
M. Michel Guimond: Pour vous montrer l'importance que je donne à cela, je vais revenir aussi sur un autre point. N'oubliez pas, monsieur le président, que j'en ai appelé de votre décision de ne pas demander que soient retirés les documents. Je ne vous demande pas d'arriver une demi-heure avant le comité pour vous assurer qu'il ne se distribue rien et de commencer à jouer à la police. Quand j'ai soulevé la question, je m'attendais à ce que vous demandiez que le document soit retiré.
Je vais relire ce que j'ai mentionné. À mon sens, je n'ai pas employé un language antiparlementaire, j'ai juste soulevé la question du silence. J'ai interprété le silence de M. Saada. Vous avez donné votre interprétation; je la reçois. Mais je n'ai pas employé un langage antiparlementaire. Je ne vois pas l'utilité de m'excuser de cela.
M. Jacques Saada: Je regrette infiniment, monsieur le président.
M. Michel Guimond: Qu'est-ce que tu as dit, Jacques?
[Traduction]
Le président: Michel, si la question est portée à mon attention à l'avenir, je rendrai la décision contraire.
Chers collègues, la séance est levée.