NDDN Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 10 février 2005
¿ | 0905 |
Le président (M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.)) |
M. Martin Shadwick (À titre personnel) |
¿ | 0910 |
¿ | 0915 |
¿ | 0920 |
¿ | 0925 |
Le président |
M. Martin Shadwick |
Le président |
M. Rick Casson (Lethbridge, PCC) |
¿ | 0930 |
M. Martin Shadwick |
¿ | 0935 |
Le président |
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ) |
M. Martin Shadwick |
M. Claude Bachand |
¿ | 0940 |
M. Martin Shadwick |
¿ | 0945 |
Le président |
L'hon. Bill Blaikie (Elmwood—Transcona, NPD) |
M. Martin Shadwick |
¿ | 0950 |
L'hon. Bill Blaikie |
M. Martin Shadwick |
L'hon. Bill Blaikie |
M. Martin Shadwick |
L'hon. Bill Blaikie |
M. Martin Shadwick |
L'hon. Bill Blaikie |
M. Martin Shadwick |
Le président |
¿ | 0955 |
L'hon. Larry Bagnell (Yukon, Lib.) |
M. Martin Shadwick |
À | 1000 |
L'hon. Larry Bagnell |
M. Martin Shadwick |
Le président |
L'hon. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Lib.) |
M. Martin Shadwick |
À | 1005 |
L'hon. Keith Martin |
M. Martin Shadwick |
L'hon. Keith Martin |
M. Martin Shadwick |
À | 1010 |
Le président |
M. Martin Shadwick |
À | 1015 |
Le président |
M. Martin Shadwick |
À | 1020 |
Le président |
M. Claude Bachand |
M. Martin Shadwick |
M. Claude Bachand |
Le président |
L'hon. Larry Bagnell |
M. Martin Shadwick |
À | 1025 |
L'hon. Larry Bagnell |
M. Martin Shadwick |
L'hon. Larry Bagnell |
Le président |
M. Martin Shadwick |
Le président |
M. Gordon O'Connor (Carleton—Mississippi Mills, PCC) |
À | 1030 |
Le président |
M. Martin Shadwick |
Le président |
Le président |
L'hon. Keith Martin |
À | 1035 |
Le président |
M. Gordon O'Connor |
L'hon. Keith Martin |
M. Gordon O'Connor |
L'hon. Keith Martin |
Le président |
M. Gordon O'Connor |
Le président |
M. Gordon O'Connor |
À | 1040 |
Le président |
L'hon. Keith Martin |
Le président |
M. Gordon O'Connor |
Le président |
L'hon. Keith Martin |
Le président |
L'hon. Judi Longfield (Whitby—Oshawa, Lib.) |
Le président |
À | 1045 |
M. Rick Casson |
Le président |
M. Rick Casson |
Le président |
La greffière du comité (Mme Angela Crandall) |
Le président |
L'hon. Keith Martin |
Le président |
L'hon. Keith Martin |
Le président |
L'hon. Keith Martin |
Le président |
L'hon. Keith Martin |
Le président |
M. Gordon O'Connor |
Le président |
À | 1050 |
Le président |
CANADA
Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants |
|
l |
|
l |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 10 février 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¿ (0905)
[Traduction]
Le président (M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.)): Je déclare ouverte la 19e séance du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants de la Chambre des communes.
La séance d'aujourd'hui comporte deux parties : nous entendrons d'abord un témoin, le professeur Martin Shadwick, puis nous devrons nous pencher sur certaines affaires, brèves mais importantes.
Aujourd'hui, nous poursuivons notre étude sur l'acquisition des quatre sous-marins du gouvernement du Royaume-Uni, qui est liée au malheureux accident survenu à bord du Chicoutimi.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à M. Lapierre, du Bloc québécois, qui agit à titre de membre substitut aujourd'hui. Bienvenue.
Professeur Shadwick, bienvenue. La parole est à vous.
M. Martin Shadwick (À titre personnel): Merci, monsieur le président.
Je suis ravi de pouvoir vous faire part de certaines réflexions sur la place qu'occupe le sous-marin dans la politique de défense du Canada. Évidemment, je regrette énormément les circonstances qui ont déclenché cet examen, c'est-à-dire l'incident survenu à bord du Chicoutimi à la fin de l'année dernière.
J'aimerais que mes remarques préliminaires soient aussi précises que possible, ou du moins aussi précises que possible pour un universitaire, parce que nous avons été formés, à grands frais, à parler seulement en tranches de 15 minutes. Je ferai donc un effort héroïque pour être plus succinct. Je sais également que vous avez déjà entendu bon nombre de témoignages. Je vais tenter le plus possible de ne pas répéter et recouper ces propos.
J'aimerais me concentrer sur un certain nombre de questions : premièrement, la place historique qu'occupe le sous-marin dans la politique de défense et la doctrine maritime du Canada; deuxièmement, les circonstances entourant l'acquisition des sous-marins de la classe Upholder au cours des 10 dernières années; troisièmement, la raison d'être des sous-marins dans la structure de la force navale du Canada; quatrièmement, un certain nombre de questions concernant les créneaux, qui pourraient peut-être intéresser le comité, questions liées à la gestion de projet, aux pièces de rechange pour les sous-marins, etc.; cinquièmement, certaines hypothèses sur la direction que nous pourrions emprunter, parce que le trajet pourrait changer à la suite de l'incident survenu à bord du Chicoutimi.
Vous aurez bien sûr remarqué que dans l'histoire du Canada, les sous-marins ont joué un rôle relativement mineur au sein de la marine. Même durant la guerre froide, ce service était très restreint comparativement au reste de la marine. Je dirais que le choix de la classe Oberon dans les années 60 était très sensé et constituait une solution efficace par rapport au coût. Ce qu'on pourrait se reprocher concernant l'achat d'équipement naval, ce pourrait être de n'avoir acheté que trois Oberon alors qu'il aurait été peut-être plus sensé d'en acheter quatre ou cinq à cette époque, dans les années 60. On aurait alors eu suffisamment de sous-marins pour diviser la flotte entre les côtes Est et Ouest, évitant ainsi la nécessité d'emprunter ou d'acheter des sous-marins américains usagers, comme nous l'avons fait sur la côte Ouest pendant un certain nombre d'années. De plus, une flotte plus importante aurait davantage permis d'utiliser les sous-marins à d'autres fins que la formation pour la lutte anti-sous-marine, aux côtés des aéronefs et des navires de servitude, et de donner à la petite flotte un rôle opérationnel ainsi qu'un rôle d'entraînement.
Plus récemment, vous savez bien, évidemment, comment le dossier des sous-marins a évolué dans les années 80. Nous avons graduellement modernisé les navires de la classe Oberon et nous leur avons confié plutôt subtilement un rôle opérationnel, en plus du rôle d'entraînement qu'ils avaient déjà. La place du sous-marin dans la structure des Forces canadiennes faisait l'objet d'un débat dans le milieu universitaire et au niveau politique, dans les années 80. À mon avis, la recommandation la plus frappante qui a été formulée à cette époque était celle du sous-comité sénatorial de la défense en 1983, qui préconisait l'acquisition de 17 autres sous-marins diesel électriques. Il est clair que le comité sénatorial de la défense de cette époque envisageait un rôle très important pour les sous-marins. Il aurait été plutôt radical de grossir la flotte d'au moins 17 navires, alors qu'elle n'en comptait que trois.
Au lieu de cela, nous avons eu le livre blanc sur la défense de 1987, qui annulait l'achat prévu de quatre à 12 sous-marins à propulsion classique et favorisait plutôt l'acquisition d'une flotte de 10 à 12 sous-marins nucléaires. Le plan visant à instaurer une marine capable de manoeuvrer dans les trois océans, avec une flotte de 10 à 12 sous-marins nucléaires, était audacieux, voire visionnaire, mais je dois admettre que mon enthousiasme à son égard était assurément limité à cette époque. Je redoutais en 1987 que le coût du projet ne dépasse nettement ce que le gouvernement d'alors avait prévu. Le programme n'allait certainement pas faire ses frais. En outre, comme c'est le cas chaque fois que l'on parle de nucléaire, on entrevoyait déjà une forte opposition du public à l'égard de ce programme et, outre les coûts du projet, je craignais que les sous-marins nucléaires ne déclenchent un tollé contre d'autres initiatives de la politique de défense qui étaient justifiées.
Lorsque le budget d'avril 1989 a mis fin au programme des sous-marins nucléaires, je dois admettre que j'était ambivalent, peut-être même ravi, parce que ce projet, à mon avis, ne présentait pas d'avantages économiques ou autres. C'était un projet audacieux, visionnaire, mais peut-être un peu trop.
Le gouvernement d'alors avait, je crois, de la difficulté à vendre le projet de sous-marins nucléaires. Le grand public n'a jamais su exactement quelle était la raison d'être de cette flotte de submersibles.
Si on regarde les journaux de cette époque, on sent que le public avait l'impression qu'on allait acheter ces sous-marins nucléaires pour surveiller les passeports dans le passage du Nord-Ouest. Même les plus fervents défenseurs de la souveraineté dans l'Arctique auraient du mal à accepter pareilles dépenses à cette fin.
Arrivent ensuite la période de l'après-guerre froide et le plan Mulroney qui vise à acquérir une flotte de six sous-marins à propulsion classique. Ce projet a évidemment fait son chemin jusque dans le livre blanc sur la défense de 1994, qui comportait une section très intéressante, mais obscure, sur les sous-marins et qui tenait compte des conclusions que le comité conjoint spécial avait formulées l'année précédente, en 1993; ce comité disait essentiellement que les sous-marins étaient souhaitables et peut-être utiles, mais qu'il fallait se demander si on pouvait se permettre cet achat. Y avait-il une façon économique de trouver l'argent dans l'enveloppe de la défense pour acheter des sous-marins diesel électriques modernes? Le soutien dépendait-il des coûts? La classe Upholder était évidemment mentionnée dans le livre blanc de 1994.
Quant à la décision d'examiner les sous-marins, vers 1994, 1995 et 1996, il est clair qu'un certain nombre de questions étaient plus impérieuses que d'autres pour le gouvernement. L'acquisition des sous-marins serait, entre autres, conforme à la notion d'une force polyvalente et apte au combat que préconisait le livre blanc de 1994, c'est-à-dire qu'on cherchait à maintenir une capacité aussi polyvalente que possible au sein de la marine. On rejoignait en outre le point de vue de la marine voulant qu'il fallait une flotte équilibrée et que les sous-marins étaient une composante logique d'une telle flotte, au même titre que les frégates, les destroyers, les navires de ravitaillement, etc.
Un certain nombre d'autres arguments étaient avancés, tant dans le milieu universitaire que dans la marine; on disait notamment que les sous-marins étaient toujours essentiels à l'entraînement dans la lutte anti-sous-marine et que nos alliés voulaient que nous ayons cette capacité. Les Américains avaient fait savoir qu'ils étaient intéressés à avoir un accès rapide à des sous-marins à propulsion classique à des fins de formation parce qu'ils avaient délaissé depuis longtemps ce type de sous-marin.
Il y avait d'autres arguments en faveur des sous-marins. Leurs coûts de fonctionnement sont moins élevés. Il y a des frais généraux spéciaux, une structure nécessaire à leur appui, mais par ailleurs, leur équipage est limité et constitue une fraction de l'équipage qu'on retrouve à bord d'une frégate ou d'un destroyer. Nul besoin d'acheter un hélicoptère, pour des raisons évidentes. Nul besoin, non plus, d'embarquer des armes de défense aérienne. Par conséquent, les sous-marins peuvent être perçus comme une acquisition efficace par rapport aux coûts, et relativement peu coûteuse.
D'aucuns disaient également que les sous-marins, en plus de leur capacité de combat, leur furtivité, la nature secrète de leur opération, convenaient également assez bien à la surveillance du territoire, puisqu'ils permettaient de surveiller les eaux territoriales canadiennes et autres à un coût avantageux. Ils pourraient aussi servir à des fonctions constabulaires, notamment pour la surveillance des pêches et la répression du trafic des drogues. On invoquaient en outre les rôles que les sous-marins pourraient jouer à l'étranger pour appuyer l'ONU dans la surveillance des sanctions, les opérations de maintien de la paix, etc. La liste était passablement longue, et nous pouvons nous demander dans quelle mesure chacun de ces arguments était crédible. Certains étaient peut-être plus persuasifs que d'autres.
¿ (0910)
Si on considère la classe Upholder en soi et qu'on met de côté la raison d'être des sous-marins dans la marine canadienne, je crois qu'on a penché en faveur de ces submersibles britanniques pour certaines raisons. Il y avait évidemment le coût. Les sous-marins étaient disponibles à ce qui semblait être un prix très intéressant, du moins au début. Deuxièmement, ils étaient modernes. Ils étaient d'origine récente et ils étaient bien équipés.
J'ai trouvé une citation très intéressante d'un des principaux architectes navals britanniques, dans un document rédigé après que nous avons décidé d'acquérir les sous-marins, dans lequel on compare les systèmes d'armes et de détection de la classe Upholder à ceux des sous-marins nucléaires de la classe Trafalgar de la Royal Navy. L'architecte naval en question écrit que les systèmes d'armes et de détection du Upholder sont plus avancés et plus coûteux que ceux que l'on trouve dans les sous-marins de la classe Trafalgar.
Les sous-marins pouvaient, semble-t-il, être achetés à un prix intéressant. Ils étaient modernes, bien équipés. Ils avaient été peu utilisés, ce qui était aussi une lame à deux tranchants, parce qu'il y avait des inconnues que même la Royal Navy ignorait au moment où les appareils étaient amarrés.
Il y avait d'autres facteurs plus subtils qui, je crois, se perdent parfois dans la mêlée. Un de ces facteurs était l'origine britannique des sous-marins. C'était une caractéristique intéressante pour la Marine canadienne puisque nos sous-marins existants étaient britanniques. L'idée de renouer avec le Royaume-Uni signifiait, du moins en théorie, qu'il serait plus facile et plus rapide d'intégrer la technologie à notre propre marine, parce que nos gens connaissaient déjà la technique britannique de conception et de construction de sous-marins, et que si nous avions opté pour un navire allemand, suédois ou français, la courbe d'apprentissage aurait été un peu plus longue. C'était donc un autre avantage, si vous voulez.
Un autre aspect qui rendait cet achat politiquement attirant pour le gouvernement de l'époque, lorsque ce dernier examinait les avantages et les inconvénients des sous-marins, c'est que ces submersibles étaient déjà construits. Ils existaient déjà. Ils pouvaient donc, en théorie, être livrés rapidement, même s'il s'est avéré plutôt optimiste de penser ainsi. Or, puisqu'ils étaient déjà construits, on n'avait pas à choisir un design étranger puis à décider s'il fallait les construire ou les assembler dans un chantier naval canadien; on évitait ainsi de marcher sur un terrain politiquement explosif.
Puisqu'ils étaient déjà construits, toutes ces questions épineuses allaient passer inaperçues. Toute une gamme d'enjeux politiques et financiers et de questions liées au développement régional n'ont jamais été soulevés, parce que le gouvernement pouvait dire, très justement, que ces sous-marins étaient déjà construits et qu'il n'avait pas à se soucier de les faire construire dans un chantier naval du Saint-Laurent ou des Maritimes. Cette préoccupation n'existait pas. Je dirais que ce facteur était politiquement avantageux.
Sur le plan négatif, en particulier en ce qui concerne les Upholder, il y avait évidemment les défauts de jeunesse. C'est peut-être très généreux de les qualifier ainsi. La marine n'était pas sans les connaître. Le HMS Upholder, qui est devenu par la suite le Chicoutimi, comportait des problèmes de torpilles qui ont été longs à régler. Ces problèmes, ou du moins une grande partie de ces problèmes, étaient connus.
Un autre aspect négatif des Upholder, que je mentionnerai brièvement, c'est qu'ils allaient toujours être des sous-marins orphelins. Ce serait les quatre seuls sous-marins de la classe Upholder à être construits, car la Royal Navy, dans le contexte de paix qui a suivi l'après-guerre froide, a décidé de ne plus acquérir un deuxième ensemble, plus important, de sous-marins Upholder, comme elle l'avait d'abord prévu. Ce plan a donc été rayé. Plus aucun autre sous-marin de la classe Upholder n'allait être exporté. C'était les seuls Upholder dans le monde, ce qui signifie que leur propriétaire serait le seul à être aux prises avec les problèmes qu'ils pourraient présenter, notamment au chapitre des pièces de rechange et du soutien pour la durée de vie utile, questions sur lesquelles nous pourrons revenir un peu plus tard.
Si je peux résumer très brièvement l'attitude des universitaires vers 1993, 1994, 1995, ce que je trouve frappant avec le recul, c'est qu'il y avait des universitaires qui, à l'instar des responsables de la marine, croyaient que c'était crucial d'avoir les sous-marins. De même, il y avait des universitaires qui estimaient que ça ne tenait pas la route—nous n'en avions pas les moyens, nous ne pouvions justifier la présence de sous-marins au sein de la marine et il fallait abandonner quelque chose. Mais, autant que je sache, la communauté universitaire était généralement plus ambivalente, c'est-à-dire que les sous-marins étaient souhaitables, mais pas nécessairement essentiels à la survie d'une marine canadienne crédible.
¿ (0915)
Les personnes ambivalentes ont fini par accepter l'idée d'acquérir les sous-marins parce que, au bout du compte, ce semblait être une occasion rêvée d'obtenir quatre sous-marins modernes et peu utilisés à un prix qui paraissait ridiculement bas. Ce facteur a amené un grand nombre de personnes du milieu universitaire qui était ambivalentes à dire qu'à ce prix-là, l'argument devenait crédible. On aurait pu douter du bien-fondé de cette décision si on avait envisagé une dépense de plusieurs milliards de dollars pour des sous-marins entièrement neufs, mais le prix peu élevé a fait renverser la vapeur.
On a aussi l'impression que cette attitude a gagné le gouvernement de même que le Cabinet. En rétrospective, il est très difficile d'imaginer le gouvernement Chrétien approuver un programme d'acquisition de sous-marins de plusieurs milliards de dollars, mais l'idée d'obtenir quatre sous-marins performants à un prix très alléchant a été un facteur décisif, si bien que le prix est devenu vraiment important dans cette équation.
Dans cette conjoncture—et c'était à l'époque où la marine s'afférait à promouvoir l'acquisition des sous-marins, etc.—, nous avons connu un certain nombre de difficultés liées les unes aux autres. D'abord, il y a eu l'intervalle qui s'est écoulé entre le livre blanc de 1994, qui proposait l'acquisition des sous-marins, et la décision prise par le gouvernement Chrétien d'aller de l'avant. L'attente a été longue. Pendant que ce dossier était examiné et débattu au sein du gouvernement, ces sous-marins prenaient de l'âge et on a commencé à se poser de plus en plus de questions sur les conditions dans lesquelles ils avaient été entreposés.
Permettez-moi de préciser ma pensée. Les navires de guerre modernes sont choses difficiles à entreposer, peu importe pendant combien de temps. Les systèmes électroniques et de nombreux autres systèmes se détériorent. Les sous-marins sont peut-être encore plus vulnérables qu'un navire de surface, comme une frégate ou un destroyer. Alors, pendant que nous débattions de ce dossier à l'interne, ces sous-marins prenaient de l'âge, se détérioraient dans une certaine mesure, parce qu'ils avaient été amarrés.
Nous sommes donc en partie responsables de ce problème. Nous avons pris beaucoup de temps avant de décider d'acquérir ces sous-marins. On peut se demander dans quelle mesure on peut reprocher aux Britanniques de ne pas avoir conservé les sous-marins dans un meilleur état, lorsqu'ils les ont mis en gardiennage. Il est fort possible que les Britanniques s'attendaient à trouver un acheteur très rapidement et qu'ils étaient donc quelque peu réticents à faire davantage pour les préserver dans un état acceptable. S'ils avaient su d'avance combien de temps aurait duré l'attente, ils auraient peut-être pris plus de précautions pour préserver l'état physique des sous-marins.
Nous les avons donc peut-être surpris. Ils cherchaient peut-être à économiser. Quoi qu'il en soit, leur préservation durant leur mise en gardiennage soulève des questions évidentes.
Nous pouvons peut-être revenir plus tard sur la question qui consiste à savoir dans quelle mesure nous étions au courant des problèmes techniques que présentaient les sous-marins lors des modifications, de la canadianisation et de la remise en état qu'ils ont subie pour assurer leur navigabilité.
Enfin, j'ai quelques remarques rapides à faire pour vous montrer comment, d'un point de vue intellectuel et idéologique, j'aborde ce dossier. Prenons les sous-marins dans le contexte actuel, pour tenter de déterminer si nous aurions dû acquérir les Upholder ou si nous devrions faire en sorte qu'ils demeurent dans notre flotte. En raison du problème entourant le Chicoutimi et les autres problèmes que présente le sous-marin, il me semble raisonnable de penser que l'avenir du service sous-marinier, entre autres, devrait être examiné dans le cadre de l'examen actuel de la politique internationale. Évidemment, ce serait politiquement très difficile de renoncer à la force sous-marine à ce moment-ci, mais je ne dirais pas qu'il est impossible que pareille décision puisse être prise. Les priorités vont changer, les sous-marins pourraient paraître moins pertinents dans la conjoncture actuelle et si des questions sont laissées sans réponse au sujet des Upholder, on pourrait imaginer que le gouvernement du Canada puisse décider de mettre fin aux pertes et d'abandonner les opérations sous-marines.
En réponse à cela, je crois essentiellement que les sous-marins restent certainement souhaitables au sein des Forces armées canadiennes et plus particulièrement au sein de la marine. Reste à savoir à quel point cet argument est convainquant. Est-ce à dire que les sous-marins sont très souhaitables, mais non essentiels?
¿ (0920)
Voilà, à mon avis, ce dont il faut vraiment débattre. La plupart des gens sont disposés à en reconnaître la valeur. Il s'agit de décider quel prix on est prêt à payer pour l'obtenir. Peut-on en justifier l'acquisition de manière très convaincante ou est-ce simplement qu'on aimerait les avoir, mais qu'on pourrait s'en passer si d'autres priorités essentielles en matière de défense étaient jugées plus importantes?
L'une des raisons pour lesquelles je suis au moins sympathique à l'idée de conserver les sous-marins dans la flotte concerne le principe avancé dans le Livre blanc de 1994 sur la défense au sujet de forces armées polyvalentes et aptes au combat. Je me méfie un peu des modèles d'organisation de la défense axés sur des créneaux—en d'autres mots, des modèles qui consistent à réduire la gamme de compétences des forces armées à un très petit choix qui a la faveur des bureaucrates, si vous voulez, sans tenir compte de tout le reste. Je crains simplement qu'on perde de la souplesse si l'on met de côté beaucoup de capacités en faveur d'une poignée d'autres.
La difficulté fondamentale causée par le modèle des créneaux, l'idée qu'au sein de la Marine, nous n'ayons que des frégates et des navires de soutien, par exemple—et il existe des équivalents de ce modèle dans l'armée de l'air et dans l'armée de terre—, est qu'il est impossible de prédire avec certitude le contexte géostratégique des cinq, dix ou vingt prochaines années. Rien ne garantit que nous allons faire le bon choix. Par conséquent, il est fort possible que nous fassions fausse route et que nous choisissions de nous débarrasser de capacités qui pourraient s'avérer essentielles plus tard. Par contre, il y a aussi l'envers de la médaille.
Du fait que personne ne peut sans crainte prédire le contexte géostratégique, ma préférence—et c'est peut-être simplement une prudence inhérente en termes de planification stratégique—est d'essayer de conserver toutes les compétences et capacités et tout l'équipement au sein des forces que nous sommes raisonnablement capables de payer.
Manifestement, nous ne pouvons pas tout nous payer; il faut faire des choix difficiles. Je suis sûr que l'examen de la politique internationale butte contre exactement les mêmes questions. Toutefois, il existe des raisons qui justifient de conserver les sous-marins. Il est facile de voir cette question comme de la politique bureaucratique, que du fait simplement que l'armée a toujours eu des chars d'assaut ou que la marine a des sous-marins depuis 40 ans et ainsi de suite, il faudrait toujours qu'elle en ait.
Enfin, je vais mentionner très rapidement certaines questions au sujet desquelles vous pourrez m'interroger plus tard ou réfléchir lors de la rédaction du rapport. Il y a la question de l'utilité des sous-marins pour des missions de patrouille. Si l'on met à part la souveraineté, la sécurité et la surveillance des eaux canadiennes, des rôles d'appui peut-être à des opérations onusiennes et internationales, de protection des pêches et de lutte contre le trafic des stupéfiants méritent qu'on s'y arrête plus longtemps.
On a parfois tendance à voir ces rôles comme des moyens concoctés par la marine pour donner du poids à la nécessité de conserver les sous-marins. C'est peut-être fort bien le cas parfois. Une marine qui souhaite conserver ses sous-marins va naturellement s'efforcer de trouver toutes les raisons possibles de le faire. Toutefois, la question mérite un examen beaucoup plus attentif pour voir à quel point le sous-marin convient à des tâches de patrouille dans un contexte d'exploitation et quelles capacités il fournit qui n'existent peut-être pas ailleurs.
Je réserve la question de la propulsion anaérobie des sous-marins pour la période de questions et de réponses. C'était là un argument puissant en faveur des sous-marins, mais les Upholder seront si vieux par le temps qu'ils seront vraiment mis en service que l'enthousiasme à l'idée de les doter d'une propulsion anaérobie qui leur permettrait de circuler dans l'Arctique sera extraordinairement limité, si mes soupçons sont justes. Ces sous-marins, en supposant que les quatre sont mis en service, sont de fait en train de prendre de l'âge.
¿ (0925)
Le président: Professeur, il me déplaît de vous interrompre, mais je n'ai pas le choix. Nous avons ici de nombreuses personnes impatientes de vous poser des questions. Puis-je vous demander d'en arriver à la conclusion?
M. Martin Shadwick: À n'en pas douter.
Très rapidement, je vais conclure en disant que j'en reviens toujours, en partie, à cette question de l'importance relative du sous-marin. Continuons-nous de le classer dans la catégorie de l'équipement très souhaitable ou le classons-nous dans la catégorie de l'équipement si essentiel qu'il faut préserver cette capacité? Personnellement, je serais enclin à le classer dans la catégorie du très souhaitable. Je crois que la décision va essentiellement revenir à faire des compromis. Que peuvent vraiment contribuer les sous-marins? Parce que nous avions utilisé les Oberon plus ou moins comme outils de formation et que nous avons été capables de mettre vraiment en service les Upholder, je soutiens que jusque dans une certaine mesure la marine elle-même n'est pas tout à fait sûre d'à quel point ces sous-marins vont être utiles dans un contexte de défense après-Guerre froide parce que nous nous passons essentiellement de sous-marins depuis une décennie presque. Voilà qui répond peut-être, en partie, à la question. Je n'en sais rien. Toutefois, j'estime que les compromis sont l'élément clé.
Voilà qui met fin à mon exposé.
Le président: Je vous remercie beaucoup de cet exposé fort intéressant sur toute la question des sous-marins et de leur raison d'être. C'est là certes une composante importante de notre étude.
Nous allons maintenant laisser M. Casson entamer le premier tour de table, de sept minutes.
M. Rick Casson (Lethbridge, PCC): Professeur, je vous suis reconnaissant de nous avoir fourni aujourd'hui autant de matière à réflexion sur toute la question, allant de la raison d'être au besoin et à la permanence du besoin, pourrait-on dire.
Dans la notice biographique à votre sujet, on souligne que vous avez étudié les rapports entre les rôles militaires, quasi militaires et non militaires des Forces canadiennes. Durant cette étude, vous êtes-vous arrêté au rapport entre la dimension militaire et la dimension non militaire de notre système de défense nationale, entre les bureaucrates, la classe politique et les militaires?
Je vous pose la question parce que le temps qu'il faut pour acquérir de l'équipement pour nos forces armées est incroyablement long. Tous conviennent qu'il est trop long. L'achat de ces sous-marins a certes pris trop de temps, puisque les premiers contacts remontent à une période préalable à 1994. Or, plus de 10 ans plus tard, les sous-marins ne donnent toujours pas leur plein rendement.
Avez-vous, dans le cadre de vos études, trouvé des théories ou publié des documents sur ces rapports entre la composante militaire et la composante non militaire de notre système de défense et comment elles sont liées et comment elles ne le sont pas, à quel point la formule est efficace et à quel point elle ne l'est pas? Y a-t-il des points sur lesquels nous devrions, en tant que comité, nous pencher pour faire des recommandations au gouvernement en vue d'accélérer le processus d'acquisition?
¿ (0930)
M. Martin Shadwick: Il existe jusque dans une certaine mesure des données dans les études que j'ai faites qui concernent le processus d'acquisition. L'intérêt marqué aux fonctions non militaires, quasi militaires et militaires des forces dans mon travail de recherche s'est limité essentiellement à des rôles comme la recherche et le sauvetage, les secours aux sinistrés, la surveillance des pêches et ainsi de suite. Donc, il concernait davantage l'interaction entre les ministères: faut-il privatiser certaines fonctions, les laisser au sein d'autres ministères ou les confier aux militaires, ce genre de chose? Cependant, la recherche a débordé sur des questions relatives à l'acquisition des sous-marins parce qu'un des arguments invoqués au départ par la Marine était que le sous-marin avait un rôle à jouer dans les missions de patrouille.
Comme le sait fort bien le comité, des essais ont eu lieu dans les années 1990. Des sous-marins de la catégorie Oberon ont fait quelques voyages dans le cadre de missions de surveillance des pêches. Nous n'en avons pas fait suffisamment pour recueillir peut-être autant de données qu'il aurait fallu en réalité, bien que j'avoue, après avoir pris connaissance de la transcription des échanges radio lorsque nous avons utilisé un Oberon pour la protection des pêches, que cela a réchauffé mon coeur de nationaliste canadien. La transcription était une véritable joie à lire parce qu'ils avaient consigné dans le journal de bord les transmissions effectuées au sein de la flottille de pêche américaine.
Après qu'ils aient communiqué avec eux par radio pour leur dire qu'un sous-marin canadien les surveillait, les commentaires des capitaines des bateaux de pêche étaient fascinants. Tout d'abord, ils furent étonnés d'apprendre que le Canada avait un sous-marin et, ensuite, que ce sous-marin était réellement en train de les observer au périscope et qu'il communiquait avec eux par radio. Les bateaux américains se sont dispersés dans toutes les directions dès qu'ils ont su qu'ils étaient observés.
C'est donc une des raisons pour lesquelles j'hésite à rejeter du revers de la main la fonction de patrouille. Elle pourrait avoir son utilité. Nous pourrions peut-être voir s'il y a lieu de modifier les sous-marins de la classe Upholder pour leur permettre de mieux assurer des fonctions de patrouille. Selon la Marine, je crois, les Upholder auront à la livraison les améliorations voulues, par rapport aux Oberon, pour être plus efficaces dans les missions de patrouille. C'est peut-être vrai, et ça ne l'est peut-être pas tout à fait.
Pour ce qui est plus particulièrement des acquisitions, cependant, vous avez tout à fait raison. Tous conviennent que le processus actuel prend beaucoup trop de temps. Nous avons même trouvé le moyen, en ce pays, en plus de transformer les acquisitions en sport-spectacle, de mettre une éternité à prendre des décisions même simples en matière d'acquisitions.
L'achat des sous-marins de classe Upholder en est à lui seul un fort bel exemple. L'équipement était déjà construit. En théorie, son acquisition aurait dû se faire très vite et facilement. Pourtant, pour diverses raisons, en partie politiques, techniques et financières, nous avons même réussi à transformer en une longue saga l'achat d'équipements déjà construits.
Même en ce qui concerne une simple pièce d'équipement comme le Gelaendewagen, c'est-à-dire le produit qui remplace la jeep Iltis, ce ne fut pas rapide. Pourtant, la technologie n'a rien d'extraordinaire. N'importe quel yuppie qui se respecte a une bonne idée du temps qu'il faut pour acheter ce qui est essentiellement un véhicule utilitaire sport et, pourtant, voyez ce qui s'est passé. Voyez combien il a fallu de temps pour mettre en service ce véhicule de remplacement de l'Iltis. À ce rythme-là, si nous avions commencé à chercher un remplacement de la jeep en septembre 1939, nous ne l'aurions pas eu le Jour de la victoire en Europe. Ce n'est pas très impressionnant.
Quant aux détails de l'acquisition, il existe des personnes mieux qualifiées que moi pour trouver les sources d'économie, là où des changements peuvent être apportés. Malheureusement, il semble souvent que nous en venions à la conclusion que la façon la plus rapide d'accélérer le processus au Canada est de ne rien acheter du tout. Cela fait économiser beaucoup de temps. On n'a pas à s'inquiéter de quoi que ce soit.
Une grande partie du problème réside selon moi dans les machinations internes auxquelles se livre la Défense nationale pour déterminer les exigences et le cahier des charges, le manque d'orientation stratégique de la part du gouvernement dans son ensemble concernant ce qui représente un achat sensé, les changements apportés trois ans plus tard, par exemple, et la participation bien sûr de nombreux intéressés, d'autres ministères qui ont voix au chapitre et qui participent au processus d'élaboration de la politique.
Naturellement, l'exemple classique, bien qu'il soit vieux, demeure toujours aussi révélateur. Si ma mémoire est bonne, quand nous avons acheté les chasseurs CF-18, on avait calculé au moment de cet appel d'offres—qui avait fait le calcul, on n'en sait rien—que les trois quarts au moins des données que nous avons transmises aux constructeurs pour leur permettre de soumissionner concernaient les retombées industrielles, les contreparties, la création d'emplois, le transfert de la technologie et ainsi de suite, au Canada. Un quart seulement des spécifications qui leur ont été transmises concernaient les nouveaux chasseurs dont avaient besoin les militaires et ce que nous attendions comme capacités, sur le plan de l'exploitation et de la technologie. Voilà selon moi ce qui résume fort bien la source du problème. Le processus est trop politisé.
¿ (0935)
Il est impossible de dissocier les acquisitions de la défense de la politique et d'en éviter la politisation. En un certain sens, la Constitution l'interdit. Ce ne sont pas les militaires qui prennent la décision, mais les dirigeants politiques. Cependant, nous avons peut-être poussé le processus trop loin par rapport à la plupart des autres pays, bien que j'ajoute simplement en conclusion que notre feuille de route n'est pas toujours aussi mauvaise que nous le croyons par rapport à d'autres. Certains de nos alliés ont été aux prises avec de réelles difficultés à ce même égard.
Quand les Belges achètent de l'équipement militaire, le nord et le sud du pays s'affrontent pour savoir qui va obtenir les retombées industrielles. Nous faisons donc certaines choses avec lesquelles peuvent s'identifier d'autres pays.
Toutefois, dans une période où nos ressources financières en matière de défense sont encore plus resserrées, le fait que nous mettions une décennie ou une décennie et demie à acheter de l'équipement fort simple est, à défaut d'autre chose, absolument incroyable.
Le président: Monsieur Casson, vous avez sept minutes pour poser des questions et obtenir des réponses. Si vous avez plusieurs questions, je vous demanderais d'être concis et je demanderais au témoin également de l'être quand il répond. Par contre, si vous préférez poser une question ouverte, je ne vous en empêche pas.
Quoi qu'il en soit, c'est intéressant. Vous avez mentionné la fonction de patrouille des sous-marins. Nous avons la chance d'avoir parmi nous un chef de police à la retraite. J'ignore si M. MacKenzie souhaite mettre fin à sa retraite pour suivre de la formation en tant que sous-marinier et aider à cet égard. Cependant, vous avez fait valoir un point intéressant, professeur.
[Français]
Monsieur Bachand, s'il vous plaît, c'est maintenant votre tour.
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Comprenez-vous le français?
M. Martin Shadwick: Non.
[Français]
M. Claude Bachand: Monsieur le président, nous sommes chanceux d'accueillir un chef de police, mais je crois que nous aurions besoin d'entendre des mécaniciens quand nous parlons des sous-marins. Leur expertise nous serait très utile, peut-être plus que celle d'un chef de police, malgré tout le respect que je dois à Dave MacKenzie.
Monsieur Shadwick, j'ai bien apprécié votre présentation. C'est une contribution importante au comité. J'envie un peu votre statut de grand chercheur. Je me suis informé auprès de mes amis traducteurs, et academics peut se traduire par « grand chercheur » ou « universitaire ».
Cependant, vous devez comprendre que nous sommes, en tant que députés, les défenseurs des contribuables. Devant chaque situation, nous nous demandons si les contribuables en ont eu pour leur argent, s'ils en ont toujours pour leur argent et s'ils en auront longtemps pour leur argent. C'est ce qui nous guide. J'ai donc bien apprécié que vous vous préoccupiez d'aspects essentiels, cruciaux, prioritaires, dans une situation financière où nous devons nous limiter.
Vous avez également parlé de la politique de 1994. Vous avez dit que les grands chercheurs, au moment de l'acquisition, semblaient trouver qu'elle était souhaitable, mais sans plus. Cependant, on a changé. Pour notre part, nous revendiquons d'ailleurs une nouvelle politique de la défense: celle-là date déjà d'une décennie.
Pour moi, il ne fait aucun doute que la marine canadienne veut garder les sous-marins. Ses représentants sont venus au comité et ils ont tous dit que c'était très important, et ce, pour deux raisons. Vous en avez mentionné une: les patrouilles de surveillance. On parle alors de surveillance côtière, de commerce illicite, etc. Ces sous-marins sont censés être très silencieux et pouvoir s'approcher jusqu'à 50 mètres d'un bateau pour prendre des photos.
À ce propos, j'ai démoli cet argument en parlant des UAV, les véhicules aériens non habités, qui peuvent, selon moi, effectuer à peu près le même type de surveillance pour beaucoup moins cher. Si on a tout lieu de croire qu'un bateau entrant dans nos eaux veut faire du commerce illicite, le UAV peut le détecter, et on peut y envoyer une frégate. Mais il n'est pas certain qu'à l'entrée du bateau dans nos eaux, un sous-marin serait dans son environnement immédiat. Donc, en ce qui a trait à la surveillance côtière et au trafic de drogue, avec les données d'aujourd'hui, je crois que les UAV pourraient faire le travail à meilleur prix.
L'autre argument est à l'effet que l'on veut assurer la souveraineté canadienne. Nous l'avons souvent entendu. Vous avez évité de parler du système de propulsion anaérobie. Vous conviendrez que cela coûterait extrêmement cher de l'avoir: on parle de 150 millions de dollars par sous-marin. C'est très problématique. Une question de souveraineté, c'est aussi une question de visibilité. Que la marine ne vienne pas me dire que si on a des sous-marins, on protège la souveraineté canadienne, surtout dans le Grand Nord canadien, parce que ce n'est pas ce qu'il faut faire. Il faut envoyer des frégates et des gens pour montrer que cela appartient au Canada.
Si vous aviez à collaborer à la rédaction d'un passage de la nouvelle politique de la Défense nationale--qu'on attend impatiemment--, que suggéreriez-vous au gouvernement au sujet de l'épisode des sous-marins?
¿ (0940)
[Traduction]
M. Martin Shadwick: Je vous remercie.
Vous avez posé plusieurs questions fascinantes.
Si, selon toutes les analyses impartiales, nous pouvons mettre ces sous-marins en service et que nous obtenons une capacité crédible à un prix crédible—je vais éviter de définir le mot « crédible », parce que son sens est difficile à cerner à ce stade-ci—, je serais enclin à conserver les sous-marins.
Il se peut que le Upholder comme tel ne soit jamais remis en service. Nous ignorons à quel point il a été endommagé par le feu et ainsi de suite. On pourrait décider peut-être, comme choix stratégique, de le retirer de la flotte et de se concentrer sur les trois autres, le Upholder devenant un bâtiment de formation par exemple. C'est en tout cas ce que je serais enclin à faire, mais comme vous pouvez le voir, j'en reviens toujours à l'aspect financier. Si le prix de cette option est raisonnable, j'aurais tendance à favoriser le maintien de la capacité.
Je suis tout à fait d'accord avec vous, cependant. Pour ce qui est de la surveillance et de la souveraineté, la technologie offre d'autres choix qui n'existaient pas il y a 15, voire 10 ans, comme les véhicules aériens non habités. Le radar à haute fréquence à ondes de surface est aussi une possibilité.
Il y a aussi la question des compromis. Par exemple, si l'on examine la fonction de surveillance et de patrouille des côtes—certains militaires qui s'occupent des sous-marins se réjouiront que j'en parle—, on pourrait en toute objectivité essayer de voir quelle plateforme de surveillance est la plus utile. S'agit-il de conserver, par exemple, trois ou quatre des sous-marins ou faut-il les envoyer au cimetière, s'en débarrasser et investir plutôt dans des véhicules aériens non habités ou des avions?
Comme vous le savez, nous sommes en train de réduire sensiblement le nombre d'avions militaires qui font des patrouilles le long de nos côtes. Certains soutiendront peut-être que si nous nous débarrassons des sous-marins, nous aurons assez d'argent pour moderniser et conserver tous les Aurora et Arcturus. Sur ce seul plan, une analyse des coûts et des avantages des sous-marins par rapport aux avions serait justifiée, bien qu'on soit, il faut l'avouer, en train de mélanger des pommes et des oranges.
Il existe des questions de souveraineté que je n'ai pas mentionnées et pour lesquelles le sous-marin offre des avantages uniques. Naturellement, si nous avons des sous-marins, les États-Unis seront parfois obligés de partager certaines données avec nous en ce qui concerne la gestion des eaux. Si nous intensifions les patrouilles côtières effectuées par des avions, nous n'obtenons pas le même effet. Ils n'ont pas tant besoin de nous dire où se trouvent leurs appareils et nous n'avons pas besoin de leur dire où se trouvent les nôtres, tandis que si nous utilisons des sous-marins, ils sont obligés de partager certaines données avec nous, ce qui fait contribue indirectement à la protection de la souveraineté et de la sécurité canadiennes.
Vous avez mentionné la visibilité, un autre point intéressant dans le contexte des sous-marins et de leur utilisation pour des missions de patrouille côtière, par exemple. On trouve à ce sujet des débats intéressants dans la documentation. Vous pouvez soutenir que si vous êtes responsables d'affirmer et de faire respecter la souveraineté, vous souhaitez être très visibles. Vous voulez que les frégates, les bâtiments de patrouille des pêches ou les avions soient visibles. L'équipement est clairement identifié, on voit tout de suite à qui il appartient, et ainsi de suite, ce qui s'accompagne d'un effet de dissuasion.
Cela bien sûr va à l'encontre de la réalité des sous-marins. La vertu du sous-marin est son invisibilité, sa furtivité, en somme le fait qu'il est difficile à voir. Ce n'est donc pas exactement la meilleure plate-forme pour montrer le drapeau si nous circulons à la surface de l'eau, parce qu'il sera à peu près invisible de toute façon. Vous n'avez pas d'hélicoptère. La capacité d'aborder un bâtiment à partir d'un sous-marin est, au mieux, limitée, et je suis extraordinairement généreux. C'est pratiquement impossible en fait, quel que soit l'état de la mer.
Par contre, cette discrétion du sous-marin peut à l'occasion être précieuse pour affirmer la souveraineté. Ceux que vous essayez de suivre ne peuvent pas savoir trop à l'avance qu'en fait, un sous-marin est peut-être en train de les observer, alors que, si un avion ou un bâtiment de surface est utilisé, c'est un peu plus facile. Parfois, c'est exactement ce que vous souhaitez: simplement avoir un effet de dissuasion. Le sous-marin vous fournira peut-être l'effet de dissuasion grâce à sa furtivité—intégrée au sous-marin à des fins de guerre, je l'avoue, non pas pour patrouiller des zones de pêche. Il est difficile d'évaluer à quel point elle peut être utile.
¿ (0945)
Le président: Merci, monsieur Bachand.
Monsieur Blaikie, vous avez sept minutes.
L'hon. Bill Blaikie (Elmwood—Transcona, NPD): J'étais en train de penser aux commentaires que vous avez faits au sujet du CF-18. Ces décisions peuvent parfois changer l'avenir d'un pays : on peut dire que celle entourant le CF-18 est à l'origine de la dynamique politique qui a caractérisé le Parti réformiste, après 1986.
Pour ce qui est du rôle constabulaire—je voudrais qu'on se concentre là-dessus pour l'instant—on a proposé, entre autres, récemment, de renforcer et d'armer, dans une certaine mesure, la garde côtière, d'y affecter des marins. Vous êtes-vous penché là-dessus dans le cadre de vos études? Où en est le débat sur la question? Y a-t-il des universitaires qui privilégient cette option? J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
M. Martin Shadwick: Merci. C'est un sujet auquel j'ai longuement réfléchi et qui, paraît-il, fait grisonner assez vite.
Nous avons bien sûr, comme pays, examiné la question de la rationalisation des flottes à maintes reprises—qui fait quoi, ainsi de suite. Nous devrions peut-être, aujourd'hui, envisager la possibilité d'accorder à la marine un plus grand rôle dans le domaine de la surveillance des pêches, surtout hauturières. Je suppose que cela va à l'encontre de la tendance observée récemment au Canada. Le Sénat prône la création d'une garde côtière superpuissante de même que l'élargissement de son mandat, plutôt que celui de la marine.
Ce qui m'intrigue davantage, c'est le rôle qui pourrait être confié à la marine. Fait encourageant, celle-ci parle maintenant publiquement de faire l'acquisition de dix patrouilleurs océaniques ou de corvettes qui auraient pour tâche, entre autres, de surveiller les zones de pêche. La marine, pour l'instant, n'est pas assez bien équipée pour remplir ce rôle. Les frégates, à certains égards, sont trop grosses—et j'insiste bien là-dessus—tandis que les navires de défense côtière, eux, sont trop petits. Ils ne peuvent opérer en haute mer. L'idée que la marine se dote d'une flotte de corvettes est plutôt intrigante. Toutefois, je n'exclurais pas du tout la possibilité qu'elle se voit confier un rôle plus important.
Le renforcement de la garde côtière, voire sa militarisation, est un concept fascinant. En fait, c'est l'approche que préconisent les Américains, leur garde côtière étant structurée de cette façon. Il y a d'autres pays qui ont recours, mais pas toujours, à la marine pour certaines tâches. La Grande-Bretagne, la France, dans une certaine mesure, l'Australie et la Nouvelle-Zélande ont tendance à faire davantage appel à la marine pour la surveillance des pêches, les actions antidrogues—entre autres.
Je trouve cette solution plus logique que celle qui consiste à renforcer la garde côtière. On continuerait d'avoir, au Canada, une garde côtière importante qui s'occuperait des opérations de déglaçage, des patrouilles semi-hauturières, des aides à la navigation, ainsi de suite. On continuerait d'avoir une garde côtière composée en grande partie de civils, mais qui effectuerait peut-être des patrouilles hauturières à long rayon d'action et qui serait équipée de navires appropriés. Il faudrait examiner cette question de près.
¿ (0950)
L'hon. Bill Blaikie: Les sous-marins de la classe Upholderou Victoria ne peuvent opérer sous la glace. Je me demande, toutefois, s'ils peuvent contribuer à la protection de la souveraineté dans le Nord en patrouillant tout simplement aux deux extrémités du passage du Nord-Ouest. Est-ce possible, à votre avis?
M. Martin Shadwick: Oui, c'est possible. Ils patrouilleraient, comme vous l'avez dit, aux deux extrémités, dans un milieu non hostile.
Il aurait été intéressant de parler du système de propulsion anaérobie. Les sous-marins munis de ce système commencent à faire leur apparition à l'étranger. Or, nous accuserions un certain retard par rapport aux autres pays même si les sous-marins Upholder entraient en service demain. L'intérêt qu'ils portent au système de propulsion anaérobie n'a rien à voir avec la glace. La capacité de combat d'un sous-marin, même dans les eaux tropicales, est tout simplement plus grande lorsque celui-ci est muni d'un tel système. Dans le contexte canadien, la capacité d'opérer, dans une certaine mesure, dans le Nord, et pas seulement aux deux extrémités du passage du Nord-Ouest, était considérée comme un atout additionnel il y a dix ans, soit à l'époque où nous envisagions d'acheter de tels bâtiments. Aujourd'hui, toute cette discussion est théorique, car nous n'avons ni le désir de doter les sous-marins Upholder d'un tel système, ni les fonds pour le faire.
L'hon. Bill Blaikie: Combien coûterait, grosso modo, un sous-marin doté d'un système de propulsion anaérobie? Qui les fabrique?
M. Martin Shadwick: La Suède, l'Allemagne et la France offrent tous des sous-marins munis de systèmes de propulsion anaérobie. Ils peuvent coûter jusqu'à un milliard de dollars l'unité, peu importe la technologie utilisée, qu'ils soient équipés de piles à combustibles ou d'autres dispositifs. Ces sous-marins sont en train d'entrer en service actif. Il n'y en a pas beaucoup pour l'instant, mais c'est la tendance qui semble s'affirmer pour ce qui est des sous-marins diesel-électriques. Leurs jours sont probablement comptés, le nouveau mode privilégié étant le système hybride qui englobe, entre autres, les piles à combustibles.
L'hon. Bill Blaikie: Comment pouvons-nous dépolitiser le processus d'acquisition? Dépolitiser les responsables politiques qui prennent la décision serait une bonne chose, mais sans aller jusqu'à provoquer une révolution culturelle, avez-vous des moyens ou des solutions à proposer qui pourraient nous être utiles?
Vous avez dit que si nous avions commandé le matériel en 1939, nous l'aurions reçu bien avant le Jour de la Victoire en Europe, et j'ai souvent pensé la même chose. Il est gênant pour un pays de se trouver dans une situation pareille. Nous étions un pays différent en 1939. Quelque chose, manifestement, a changé. Comment, à votre avis, pouvons-nous revenir au pays que nous étions jadis?
M. Martin Shadwick: Je suppose que, si je reviens aux principes de base, le problème fondamental au Canada, c'est que nous n'avons pas, en tant que politiciens, mais aussi en tant que Canadiens, en tant qu'écrivains, de culture de la stratégie. Nous n'avons pas tendance à penser en termes stratégiques lorsqu'il est question des militaires. Au lieu de prendre des décisions rapides et efficaces au sujet du matériel à acheter, nous transformer ces initiatives en projets de création d'emplois.
Si le pays était un peu plus conscient de l'importance de ces questions—on ne peut pas laisser certaines décisions traîner pendant dix ans ou plus, parce qu'il y a des hommes et des femmes, surtout dans l'après-guerre froide, qui risquent leur vie tous les jours. Il serait bon qu'ils aient des casques, des tenues de protection, des véhicules adéquats. Nous avons souvent tendance, au Canada, à faire fi de ces questions ou, à tout le moins, à ne pas prendre de décisions rapidement ou dans un délai raisonnable. C'est là un de nos plus gros problèmes. C'est également la chose la plus difficile à changer, car, dans un sens, nous sommes très fiers du fait que nous n'avons pas de culture de la stratégie. Nous n'envisageons pas les situations sous le même angle que les Américains, et nous sommes très fiers d'être considérés comme un pays voué au maintien de la paix, ainsi de suite. Malheureusement, tout cela est très beau, mais nous avons besoin de leadership, et ce, à tous les niveaux.
L'hon. Bill Blaikie: Même les soldats de la paix ont besoin de casques.
M. Martin Shadwick: C'est vrai, et nous avons tendance à l'oublier.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Blaikie.
Je tiens à rappeler une chose aux membres du comité, étant donné que nous sommes en train de parler d'acquisitions.
Monsieur Shadwick, vous n'êtes peut-être pas au courant non plus.
Il y a un groupe composé d'anciens membres du comité qui a réalisé une étude approfondie sur le processus d'acquisitions. D'après le greffier, vous allez recevoir une copie du rapport. La réponse du gouvernement va vous être transmise aujourd'hui même. Vous aurez donc ces renseignements en main. Je tiens à préciser que je faisais partie du groupe en question.
Comme vous l'avez indiqué, nous en avons assez de voir que l'on met beaucoup de temps à prendre des décisions quand il est question d'acheter des pièces d'équipement majeures. Toutefois, on ressent la même frustration dans bien d'autres pays, de sorte que notre situation n'est pas unique.
Monsieur Bagnell, vous avez droit à sept minutes.
¿ (0955)
L'hon. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Merci d'être venu nous rencontrer.
Je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui, surtout après la nouvelle dépolitisation de Bill Blaikie.
Pendant les premières réunions, j'ai parlé exclusivement de la souveraineté de l'Arctique. Le président pensait peut-être que je m'étais bien fait entendre et comprendre. Or, je suis content de voir qu'il a de nouveau abordé le sujet aujourd'hui. Je voudrais, bien entendu, enchaîner là-dessus.
Je me demande si vous savez pourquoi nous n'avons pas réussi, au cours des dernières décennies, à protéger notre souveraineté dans l'Arctique via les livres blancs que nous avons publiés sur l'acquisition de sous-marins, par exemple, de sous-marins nucléaires ou autres types de navires capables de naviguer en surface, sous la mer ou dans les glaces. Nous ne possédons même pas un navire qui est capable de naviguer dans les glaces de l'Arctique. Claude Bachand vous a demandé de formuler des recommandations en ce sens, car nous espérons pouvoir régler ce problème très bientôt.
M. Martin Shadwick: Merci.
Ce qu'il importe de souligner dans le cas de l'Arctique, c'est que l'intérêt que nous portons à cette région a tendance à être hautement cyclique. Ce n'est que lorsqu'un incident se produit que le public et les politiciens s'y intéressent. Dans les années 50, le déploiement du drapeau américain sur les installations du réseau DEW, par exemple, est devenu un cause célèbre. Les incursions effectuées dans le nord par le brise-glace américain Manhattan, en 1969 et 1970, a incité le gouvernement Trudeau à prendre des mesures. Le passage dans le nord du brise-glace Polar Sea de la garde côtière américaine a également poussé le gouvernement Mulroney à agir. Donc, pendant dix ou quinze ans, la question disparaît de l'écran radar, réapparaît ensuite soudainement, donne lieu à un regain d'énergie et d'activité de la part des politiciens, des médias et des universitaires, et retombe dans un état temporaire de mort apparente.
Ce que j'essaie de dire depuis toujours, c'est que cette façon de faire n'est peut-être pas la plus logique. Nous devons nous doter d'une politique plus stable pour protéger notre souveraineté dans l'Arctique, éviter les incidents de tous genre, affirmer notre souveraineté de façon soutenue et non pas en réagissant, comme nous le faisons souvent, à une menace perçue en augmentant soudainement notre présence militaire dans le nord ou en prenant de nouvelles mesures juridiques pour protéger l'Arctique. C'est à ce niveau-là que nous cafouillons. Nous mettons le dossier sur la glace—excusez le jeu de mots—nous l'oublions, et nous attendons que se produise une autre crise.
Ce que je trouve encourageant dernièrement, c'est qu'il semble y avoir un léger regain d'intérêt, au sein du gouvernement et du MDN, depuis un an ou deux, pour nos capacités dans l'Arctique, capacités qui, bien sûr, demeurent limitées. J'ai toujours trouvé étonnant que l'armée japonaise possède un plus grand nombre de véhicules pour terrain nordique que l'armée canadienne. Je présume que c'est à cause du mont Fuji, bien que je n'en sois pas sûr. Mais je trouve cette situation étrange.
Pour ce qui est de notre présence dans l'Arctique canadien, mes amis pacifistes me reprochent parfois de faire ce commentaire, car ils pensent que c'est une bonne chose que l'Arctique canadien soit, à bien des égards, la plus grande zone démilitarisée au monde. D'une part, comme Canadien, j'en suis très fier. D'autre part, je suis inquiet, parce que la présence militaire dans ce vaste territoire est très faible. Pour l'instant, on y trouve moins de 200 personnes. C'est peu.
Pour ce qui est de la capacité de la marine de naviguer dans l'Arctique, j'ai toujours pensé que nous avons commis une erreur monumentale à la fin des années 50 ou au début des années 60. La marine possédait effectivement un brise-glace construit expressément pour elle et acquis dans les années 50. Or, comme le gouvernement a voulu diversifier les modes de prestations des services, la responsabilité du brise-glace a été transférée au ministère des Transports, et la marine a perdu la capacité qu'elle possédait déjà. C'est une tendance que j'ai observée dans bon nombre de mes recherches, au fil des ans.
Les forces entretiennent une relation d'amour et de haine à l'égard des rôles qu'elles sont appelées à jouer dans les domaines de la protection de la souveraineté, de la recherche et le sauvetage, et de la lutte contre les feux de forêt. Elles ont des qualités qui rachètent leurs défauts, mais elles ont peur d'être considérées uniquement comme une force constabulaire.
Lorsque le brise-glace NCSM Labrador a été désarmé, la marine a été obligée de faire un choix: soit affecter l'équipage du Labrador aux nouvelles frégates en construction, soit garder le Labrador. Elle a choisi à juste titre, vu les circonstances, les navires de combat. Si vous lui posiez la question aujourd'hui—je présume qu'elle n'a pas changé d'avis—je ne pense pas qu'elle accueillerait favorablement l'idée d'être dotée d'un grand brise-glace pour qu'elle puisse patrouiller dans l'Arctique.
À mon avis, s'il y a un type de navire qui serait susceptible d'intéresserait la marine, ce serait un bâtiment d'intervention sous-marine comme le NCSM Cormoran, qui a été désarmé dans les années 90 à la suite des réductions apportées au budget de la défense. Un bâtiment d'intervention sous-marine, un bâtiment de recherche capable d'opérer dans les glaces—non pas un brise-glace en tant que tel, mais un navire autre qu'une frégate ou un destroyer qui nous permettrait d'effectuer des patrouilles dans le nord—intéresserait davantage la marine.
Toutefois, je tout à fait d'accord avec ce que vous dites. C'est un sujet que nous avons tendance à laisser disparaître de l'écran radar trop facilement.
À (1000)
L'hon. Larry Bagnell: Il est vrai que la zone est démilitarisée, mais cette démilitarisation, nous la devons au Canada, pas nécessairement aux autres pays. Si l'on s'intéresse davantage à la question, c'est parce que le premier ministre y accorde beaucoup d'importance. La plupart des défis en matière de souveraineté auxquels nous sommes confrontés à l'heure actuelle visent le Nord, non pas les côtes Est ou Ouest.
Je crois comprendre qu'un système de propulsion anaérobie a été conçu pour l'un des sous-marins et qu'il pourrait être installé à n'importe quel moment. Le problème, c'est que ce système ne permettra pas vraiment d'accroître la capacité des sous-marins sous la glace. Il pourra uniquement améliorer celle des sous-marins nucléaires. Donc, ce système de propulsion anaérobie ne nous permettra pas vraiment d'être plus efficaces dans l'Arctique.
M. Martin Shadwick: Vous avez tout à fait raison. C'est un système que nous aimerions, certes, avoir à bord des sous-marins, mais il ne faut pas penser que les systèmes auxiliaires de propulsion anaérobie vont permettre à un sous-marin de la classe Upholder ou à un sous-marin diesel de se rendre au Pôle Nord sur un coup de tête. Ils ne nous permettent pas d'opérer sous la glace comme c'est le cas avec les sous-marin nucléaires.
Le président: Merci, monsieur Bagnell.
Comme il n'y a pas d'autres questions, nous allons passer au deuxième tour. Nous allons entendre monsieur Martin.
Vous avez droit à cinq minutes.
L'hon. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Lib.): Merci, monsieur Shadwick, d'être venu nous rencontrer aujourd'hui.
Si l'on supprime les capacités constabulaires du sous-marin, et compte tenu du milieu géostratégique dans lequel nous évoluons aujourd'hui—il y a notamment 40 pays qui possèdent des sous-marins, y compris des pays comme l'Iran, ce que ne savent pas la plupart des Canadiens—n'est-il pas non pas souhaitable, mais essentiel d'avoir des sous-marins?
M. Martin Shadwick: Dans certaines circonstances, oui. Le sous-marin est un système d'arme formidable—si l'on tient compte de sa discrétion et de sa puissance de feu. Bien sûr, cela dépend, en partie, du type d'armes dont il est équipé, que ce soit des torpilles, des missiles, ou peut-être même des missiles conçus pour l'attaque d'objectifs terrestres. Toutefois, cela soulève la question de savoir si les sous-marins devraient être équipés de missiles de croisière, un concept qui va au-delà ce qui semble acceptable dans un contexte canadien.
L'efficacité au combat demeure également indéniable, et c'est un facteur qui a parfois tendance à être oublié. Prenons, par exemple, l'expérience vécue par les Britanniques lors de la guerre des Malouines au début des années 80. Le fait qu'un ou deux sous-marins nucléaires britanniques aient pu mettre en échec la flotte argentine illustre, de façon impressionnante, ce qu'un ou deux bâtiments peuvent faire. Parallèlement, l'Argentine ne comptait qu'un ou deux sous-marins diesel-électriques au sein de sa flotte. Ils n'ont peut-être pas réussi à infliger des dommages à la force britannique, mais ils ont compliqué la tâche de celle-ci, parce que les Britanniques ne pouvaient poser aucun geste sans d'abord essayer de déterminer l'emplacement des sous-marins argentins. Ils ont passé beaucoup de temps à traquer et à détruire ces sous-marins.
Les capacités militaires des sous-marins, même si elles sont moins évidentes aux yeux du grand public, demeurent formidables. La furtivité et la discrétion des sous-marins reflètent, en passant, le monde de silence dans lequel ils évoluent. La communauté des sous-mariniers n'a pas tellement tendance à parler de la capacité des sous-marins, parce que cette furtivité s'étend au-delà des aspects purement opérationnels. Nous savons que les Américains ont utilisé des sous-marins à propulsion nucléaire, par exemple, pour mener des actions antidrogues dans les Antilles. Toutefois, vous n'entendrez pas tellement parler de ces opérations.
À (1005)
L'hon. Keith Martin: Veuillez m'excuser de vous interrompre. Ma question se rapporte à vos commentaires, auxquels je souscris d'ailleurs. Vous avez dit, comme d'autres, qu'avec les torpilles dont nous équipons les navires nous en avons amplement pour notre argent. Étant donné que les coûts de fonctionnement sont moins élevés que ceux des frégates, les sous-marins sont très avantageux. J'essaie simplement de déterminer, vu le contexte actuel—comme vous l'avez dit, nous ne pouvons prévoir ce qui va arriver dans les 20 prochaines années—, si c'est un investissement prudent.
Aussi, vous avez parlé du facteur coût en disant que le milieu universitaire était quelque peu ambivalent au sujet de l'achat des sous-marins, mais étant donné qu'il était très raisonnable, l'achat des sous-marins était plutôt essentiel.
M. Martin Shadwick: La réponse à votre question dépend en partie de la façon dont on entend utiliser la marine canadienne dans l'avenir. Si l'on devait s'exposer au danger dans le cadre de certains scénarios opérationnels, même sous un mandat des Nations Unies, comme pour affronter un ennemi ayant d'autres sous-marins ou d'autres capacités, l'idée d'avoir un sous-marin prêt pour le combat ou doté de capacités de dissuasion devient beaucoup plus attrayante. Puis, il y a à un certain égard la question de l'analyse coûts-avantages. Dans une mission, est-il plus sensé d'avoir recours à une frégate qu'à un sous-marin? La réponse dépend en partie de l'environnement opérationnel, du théâtre de guerre et de votre ennemi, s'il y a lieu. Il arrivera à l'occasion qu'un sous-marin sera tout indiqué si l'on cherche une façon d'avoir une capacité militaire dans une région. D'autres fois, le recours à une frégate sera le meilleur choix à faire car l'hélicoptère lui donnera certaines capacités. Ça revient en bout de ligne au type de mission que l'on entreprend.
Je pourrais vous donner des exemples, si je reprends la direction dans laquelle vous sembliez vous diriger, comme l'utilisation de sous-marins diesel-électriques pour soutenir les forces de l'OTAN dans les Balkans pendant ce conflit. Ces exemples sont intéressants. C'est vraiment dommage que nous ne disposions pas d'une liste complète—si nous l'avons j'aimerais bien la voir—des façons dont les forces navales ont utilisé leurs sous-marins après la guerre froide pour effectuer des missions intérieures de type policier et des missions à l'étranger à l'appui des efforts de lutte contre le trafic de stupéfiants et d'application de sanctions des Nations Unies ou pour accroître la présence militaire des Nations Unies ou de l'OTAN.
L'hon. Keith Martin: J'ai une dernière question à vous poser. C'est dommage que nous n'ayons pas plus de temps car vous avez soulevé de nombreuses questions importantes, dont l'approvisionnement n'est pas la moindre. Je sais que le gouvernement, tout comme le ministère, a été saisi de cette question. Comme vous le savez, l'amiral Jarvis travaille très fort pour alléger la congestion, si vous me permettez l'expression. Avez-vous des suggestions à faire sur les façons de raccourcir le processus d'approvisionnement en matériel militaire?
M. Martin Shadwick: Au sein du MDN, monsieur Williams, le Groupe des matériels est également conscient de l'importance de réduire autant que possible les délais d'approvisionnement. Certaines choses peuvent-être faites au sein du Groupe des matériels. Bon nombre de ces délais ne sont pas d'ordre politique. C'est trop facile de blâmer complètement les politiciens. Avant que la question ne vienne dans l'arène politique, elle fait l'objet de manoeuvres bureaucratiques au MDN, dans les forces armées et d'autres ministères. Il faut réduire la paperasserie et le nombre interminable de réunions, s'assurer que les énoncés sont rédigés rapidement et de façon cohérente et que l'on se conforme aux règles établies.
Les États-Unis ont fait preuve dans le passé d'innovation au chapitre de l'approvisionnement. Actuellement, l'approvisionnement aux États-Unis est dans un piètre état, mais lorsque les Américains ont voulu concevoir deux avions de chasse, l'énoncé des exigences transmis par la U.S. Air Force était incroyablement court, à peine quelques pages. L'industrie avait été tout à fait étonnée. L'énoncé renfermait des exigences très simples qui semblaient dire « Faites de votre mieux et on verra ce que vous nous proposez. » C'est ainsi qu'ont été conçus les F-16 et F-18, qui se sont avérés de formidables avions concurrentiels sur le plan financier.
Mais revenons à l'essentiel : il faut agir plus rapidement. Beaucoup peut être fait pour améliorer grandement les choses. La moitié de la bataille serait peut-être de sensibiliser davantage les gens à l'importance de cette question. Je pense que ce point, qui a été soulevé par M. Williams, est important.
À cet égard, je ne peux me prononcer sur l'impact de la baisse d'expertise en gestion de projet au ministère. Comme vous le savez tous, les capacités de gestion au sein du ministère ont diminué en raison du départ d'employés et de réductions d'effectif. Si seulement cela avait pu réduire la bureaucratie et accélérer le processus, mais malheureusement ça ne semble pas avoir été le cas. Le manque d'employés d'expérience capables de nous sortir des impasses et de régler des problèmes a fait plus de mal que de bien. J'opterais pour une approche à volets multiples pour régler le problème au MDN, dans les forces, dans les autres ministères intéressés et au niveau politique et pour véhiculer le message que tout ce processus prend du temps et de l'argent et qu'il faut un système plus rapide.
À (1010)
Le président: Merci, monsieur Martin.
Nous avons fait deux tours complets. J'ai quelques questions pour le témoin, puis nous verrons si mes collègues ont d'autres questions. Nous devons aborder une autre partie de la réunion. Je sais que l'ordre du jour va de 9 heures à midi, mais vous vous souviendrez que nous tentons de nous en tenir à un horaire de 9 heures à 11 heures. Si le comité estime que nous avons vraiment besoin de la troisième heure, nous l'utiliserons. Mais je ne pense pas que ce soit quelque chose que nous recherchions. Nous devons essayer de nous en tenir à la plage horaire de 9 à 11.
Monsieur, j'ai étudié passablement la Deuxième Guerre mondiale, bien que je ne prétends pas en être un expert. J'ai trouvé ça intéressant quand vous avez dit que si nous avions commandé un jeep en 1939, à la vitesse que vont les choses aujourd'hui, nous ne l'aurions pas eu à temps pour le jour de la Victoire en Europe ou même le jour de la Victoire sur le Japon. Évidemment, nous ne sommes pas en temps de guerre où toute la nation consacre ses efforts à la production, où les femmes contribuent à l'effort de guerre en travaillant dans les usines, etc. Je crois que Hitler a eu le tour d'inciter le Canada, les États-Unis et d'autres pays à acheter du matériel militaire.
Cela dit, ça prend maintenant un temps ridicule pour acheter de l'équipement militaire dans notre pays, et bon nombre de nos alliés se plaignent de la même chose.
J'ai trois questions. Si vous pouviez me donner une réponse concise à ces questions, cela nous permettrait d'approfondir votre témoignage. Connaissez-vous particulièrement la formation que reçoivent les sous-mariniers, et le cas échéant, avez-vous des critiques constructives à faire? Ma deuxième question se rapporte à celle de mon ami M. Bachand sur les UAV. Il a posé plusieurs questions, et je ne suis pas certain que vous avez eu l'occasion de répondre vraiment à celle sur les UAV. Ma dernière question porte sur un point que vous avez soulevé dans vos remarques préliminaires, et dont le comité a déjà discuté, c'est-à-dire la question des pièces de rechange pour les sous-marins.
M. Martin Shadwick: Merci.
Sur le plan de la formation, si nous avions pu mettre la main plus rapidement sur les sous-marins de classe Upholder pour procéder à leur remise à neuf, leur mise en état de service et leur canadianisation, notre régime de formation nous aurait plutôt bien servi. Ce que je veux dire, c'est que dans l'ensemble nos gens sont bien formés. Il faut admettre que même si nous avions pu prendre possession du premier Upholder deux jours après l'annonce du contrat, il aurait quand même fallu mettre nos gens à jour—pas sur le fonctionnement de base des sous-marins—mais sur le fonctionnement de l'équipement électronique plus complexe de ces sous-marins, ce qui aurait entraîné une courbe d'apprentissage. Les sous-marins de classe Oberon n'étaient pas très complexes sur le plan électronique, ce qui ne veut pas dire qu'ils étaient totalement dépourvus de complexité, puisqu'ils étaient dotés de beaucoup plus qu'un d'un simple périscope. Mais la transition aurait nécessité un certain temps.
Étant donné qu'il s'agissait de sous-marins britanniques et que nos sous-mariniers étaient bien formés, je crois que nous aurions pu avancer assez rapidement.
Le problème est attribuable aux délais, à la fois dans le processus d'approvisionnement et dans la réactivation et la canadianisation des sous-marins. Donc, pendant presque dix ans, des membres des forces sous-marines sont partis emportant avec eux leur expérience inestimable et laissant un petit noyau de gens très expérimentés qui devait assumer le fardeau et se charger d'initier de nouvelles personnes.
À (1015)
Le président: À cet égard, nous avons entendu des témoignages contradictoires, voilà pourquoi je vous ai posé la question en tant que spécialiste universitaire dans ce domaine.
Certains témoins ont dit clairement qu'en raison des problèmes que vous venez de mentionner, certains sous-mariniers ont été insuffisamment formés pour compenser le manque de personnel qualifié. Cela aurait été en partie dicté par la nécessité de répondre aux exigences des Britanniques avant de pouvoir obtenir leurs sous-marins. Selon certains témoins, la situation était à ce point critique que des gens sont partis en mer à bord de sous-marins dans des conditions dangereuses.
Rapidement, quelle est votre opinion?
M. Martin Shadwick: Je partage également certaines de ces inquiétudes. Vu de l'extérieur, c'est difficile de dire quel est le niveau d'expérience relative des gens à bord de sous-marins depuis les quatre à cinq dernières années. Je crois que le niveau d'expérience est en baisse, c'est-à-dire qu'il y a des gens qui n'ont pas d'expérience des sous-marins et d'autres qui n'ont pratiquement pas d'expérience de la marine. Cela mérite qu'on s'y attarde attentivement et ça met grandement en évidence le retard dans la remise en état des sous-marins et la longue phase dormante.
En passant, on dénote quelque chose d'autre. Si je reviens sur un point que j'ai soulevé plus tôt au sujet de la perte de capacités et de compétences au sein des Forces armées dans un créneau modèle—dans ce cas, la perte de capacités s'est produite accidentellement. Si vous devez récupérer une capacité dont vous avez permis la perte, c'est très difficile de la retrouver.
Le programme des sous-marins de classe Upholder-Victoria en est un exemple splendide. C'est un exemple, bien que non intentionnel, de ce qui se passe lorsqu'on permet la perte d'une capacité pour ensuite décider que l'on en a besoin et ça illustre bien toutes les manoeuvres qu'il faut faire pour la retrouver. Ça demeure une préoccupation. L'architecte naval britannique que j'ai cité plus tôt ce matin a dit, dans son commentaire sur nos difficultés avec les sous-marins Upholder :
Les Canadiens ont fait une excellente affaire, bien qu'ils ont eu de la difficulté à remettre les navires en service, probablement en raison d'un manque d'expérience liée à l'équipement du navire. |
Cela a également attiré l'attention à l'étranger.
En ce qui a trait aux UAV, on y voit beaucoup de potentiel. Il faut néanmoins mettre ça en perspective. Chaque département de la défense dans le monde dévore pratiquement les brochures de manufacturiers d'UAV et autres documents à la recherche de ces systèmes. Ces systèmes font beaucoup de bruit, mais jusqu'à maintenant on ne voit pas beaucoup d'UAV en service dans le monde. Parmi ceux qui le sont, certains ont des problèmes de fonctionnement ou d'ordre technique.
Dans le contexte canadien, il y a de nombreuses exigences. D'abord, il y a le type de système que nous avons utilisé en Afghanistan. Nous devons développer davantage ces capacités tactiques pour soutenir l'armée. Nous avons testé des UAV plus gros et ayant une plus grande portée dans l'Arctique et au large de nos côtes. Pour ce que ça vaut, je recommande que l'on poursuive ces essais et que l'on trouve des produits qui s'inscriraient logiquement dans ce que nous croyons être des besoins opérationnels valables.
Comme complément aux aéronefs, il est très tentant de dire que si l'on achète de gros UAV, on pourra réduire la flotte de guerre. Je dirais qu'il faut plutôt voir ces capacités comme étant complémentaires. Les UAV apportent certaines choses que n'ont pas les Aurora, mais l'inverse est également vrai. Donc, l'idée de remplacer tous les Aurora, à part trois ou quatre, par des UAV, ça ne tient tout simplement pas la route. Il s'agit de capacités complémentaires.
La question des pièces de rechange est intéressante. Je me rappelle d'en avoir discuté avec des officiers supérieurs de la Marine au moment de l'annonce de l'achat des Upholder et d'avoir partagé mes préoccupations au sujet de l'état orphelin de ces sous-marins et de ce que nous allions en faire. Il ne s'agissait pas d'une demande d'information de haut niveau mais plutôt d'une discussion générale, mais on m'a répondu que nous allions avoir un ensemble assez complet de pièces de rechange de la marine royale dans le cadre du contrat.
J'ai alors mentionné qu'on finirait par les épuiser car les Britanniques n'avaient vraisemblablement pas un stock infini de pièces pour ces navires. Même la marine royale aurait eu de la difficulté à prévoir avec exactitude l'inventaire nécessaire de pièces de rechange étant donné que ces sous-marins étaient demeurés si peu de temps dans sa flotte. La marine royale ne savait peut-être pas vraiment quelle serait l'utilisation des pièces de rechange pour les sous-marins de classe Upholder dans cinq, dix ou quinze ans.
On m'a fait une observation intéressante; on m'a dit que dans certains cas—en réalité dans plus que quelques cas seulement—la marine croyait, officieusement, que certains systèmes des Upholder étaient utilisés dans des sous-marins nucléaires britanniques. Évidemment, on ne parle par des moteurs, mais d'autres systèmes—optiques, senseurs, etc.—, ce qui veut dire qu'ils seraient toujours disponibles par le biais des Britanniques. Il faudrait évidemment passer par les vendeurs britanniques, mais ces systèmes seraient néanmoins disponibles. On pourrait obtenir certains éléments clés—je suppose que les périscopes s'inscrivent dans cette catégorie aussi—car la marine royale les achetait déjà pour ses sous-marins nucléaires.
À (1020)
À cet égard, il faut toutefois mentionner que plus nous canadianisons nos sous-marins, moins ils ont de points en commun avec les sous-marins nucléaires britanniques. Nous changeons quelques systèmes importants pour adopter les torpilles américaines, notamment le système de commande de tir, ce qui nous amène à nous interroger sur les problèmes que pourrait nous poser l'approvisionnement en pièces de rechange aux États-Unis. Une partie des éléments que nous installons sur ces sous-marins qui sont de fabrication américaine ne se retrouvent pas nécessairement dans les sous-marins américains. Il y a donc, selon moi, encore certaines questions intéressantes à se poser relativement à l'approvisionnement en pièces de rechange et au soutien technique pour la durée utile du matériel.
Le président: Merci beaucoup.
Voilà qui termine cette deuxième série d'interventions. Comme je l'ai déjà indiqué, nous avons seulement jusqu'à 11 heures aujourd'hui, alors je ne crois pas que nous pourrons y aller d'une troisième série de questions. Je peux toutefois vous laisser poser une ou deux dernières questions chacun, si vous en avez.
Monsieur Bachand.
[Français]
M. Claude Bachand: Je veux savoir, monsieur Shadwick, comment vous voyez la situation. Lorsque nous sommes allés visiter le sous-marin à Halifax, j'ai posé à l'amiral MacLean la question de savoir comment nous pouvions canadianiser un sous-marin à l'aide de torpilles américaines. N'est-ce pas là plutôt l'américaniser?
[Traduction]
M. Martin Shadwick: Oui, c'est effectivement le cas. Ces sous-marins deviennent de plus en plus multiculturels et multinationaux, un phénomène qui se produit déjà de toute façon dans une certaine mesure avec les sous-marins de classe Oberon. Une bonne quantité d'éléments technologiques américains ont été intégrés aux sous-marins Oberon. De fait, certains des systèmes que nous installons sur les Upholders auraient été pris directement sur les anciens sous-marins et transférés sur ceux de la classe Victoria. Le contenu américain augmente donc.
Comme nous ne produisons pas beaucoup dans ce secteur, l'expression « canadianisation » s'appliquerait en fait aux équipements acquis par le Canada. Ces sous-marins auront en quelque sorte une double personnalité façonnée par les travaux que nous y aurons effectués en combinaison avec la présence de systèmes britanniques et américains et probablement de quelques systèmes européens également.
[Français]
M. Claude Bachand: Merci.
[Traduction]
Le président: Monsieur Bachand, merci.
Monsieur Bagnell, vous pouvez poser vos dernières questions après quoi nous passerons à la deuxième partie de la réunion.
L'hon. Larry Bagnell: Oui, merci.
J'aimerais parler un peu de la préservation des sous-marins et du temps qui s'est écoulé. Vous avez laissé entendre que l'on pourrait se demander si les Britanniques n'auraient pas pu mieux conserver ces sous-marins pendant le temps qui s'est écoulé avant que nous en fassions l'acquisition, étant donné la prolongation du délai nécessaire pour la prise de possession. D'ailleurs, si on en croit le Toronto Star, c'est ce retard qui a causé les fuites, les anomalies électriques et les autres problèmes.
Je ne peux accepter cette argumentation parce que les Britanniques étaient tenus, lorsque nous avons conclu ce marché, de remettre les sous-marins en bon état. Ils devaient défrayer les coûts nécessaires à cette fin. Les sous-marins ont été inspectés par nos experts en génie ainsi que par leurs homologues britanniques. Je peux comprendre que leur mise au rancart ait pu causer leur dégradation, mais cela n'est pas vraiment pertinent compte tenu du fait que l'entente conclue prévoyait leur remise en état avant que nous en fassions l'acquisition ou que nous les mettions en service.
M. Martin Shadwick: C'est un excellent point. Compte tenu des garanties que nous avaient offertes les Britanniques, s'ils tentaient d'économiser quelques livres au niveau des coûts de préservation, ils devraient en faire les frais plus tard parce que le contrat les obligeait à réparer certains des éléments qui se détérioreraient ainsi. Il est difficile d'imaginer qu'ils n'aient pas pu eux-mêmes jauger la situation; il était très avantageux pour eux de garder ces sous-marins en état de marche pendant une période prolongée.
Par ailleurs, certaines informations non vérifiées amènent à penser qu'ils auraient pu se montrer plus vigilants s'ils ne s'étaient pas attendu à vendre rapidement ces sous-marins. En effet, s'ils avaient pris toutes les mesures de précaution nécessaires pour préserver et remiser ces sous-marins, ces mesures auraient dû être interrompues très peu de temps après, ce qui aurait ralenti le processus, parce qu'il faut un certain temps pour inverser le mécanisme lorsque vous prenez des dispositions de préservation d'une certaine ampleur.
Les Britanniques avaient peut-être simplement l'impression que le Canada ou un autre acheteur étranger—parce qu'ils ont d'abord discuté de la vente de ces quatre sous-marins avec d'autres pays, à des paliers inférieurs du moins—allait en faire l'acquisition plutôt rapidement, ce qui fait que les sommes investies dans leur préservation auraient été dépensées en pure perte. L'opération n'en valait donc pas le coût, d'autant plus que leur budget de défense est soumis à autant de contraintes que le nôtre à certains égards.
Les forces maritimes ont tendance à immobiliser les navires de service parce que ceux-ci forment la partie principale—
À (1025)
L'hon. Larry Bagnell: Désolé, puis-je me permettre de vous interrompre? Ce n'est pas là où je voulais en venir.
On peut toujours discuter de toutes ces questions, mais ce n'est pas vraiment ce qui m'intéresse. Je m'intéresse à ce qui s'est produit en fin de compte et aux incidences sur les problèmes éprouvés. Je veux dire que l'entente prévoyait que les Britanniques devaient remettre les sous-marins en état, quel que soit leur degré de détérioration, et que ce n'est pas à leur mise au rancart que l'on doit attribuer, comme le laisse entendre le Toronto Star, les fuites, les anomalies électriques et les autres problèmes pouvant être à l'origine de l'accident. Les problèmes ne sont pas dûs au fait qu'ils ont été mis en rade, parce que l'accord prévoyait de toute façon leur remise en état. Peu importe si les sous-marins tombaient en pièces ou non, l'entente prévoyait que nous allions recevoir des sous-marins en bonne condition et que nos ingénieurs ainsi que leurs homologues britanniques allaient faire les inspections nécessaires à cet effet. Je soutiens donc que le temps écoulé est une question sans intérêt.
M. Martin Shadwick: On aurait pu logiquement s'attendre à ce que les Britannique mettent tout en oeuvre pour garder ces sous-marins en bon état, en sachant bien que si des problèmes venaient à se poser en raison de leur manquement à ce chapitre, ce sont eux qui en paieraient le prix en bout de ligne—et pas seulement du point de vue financier, mais aussi quant à leur réputation de marchands d'armes, notamment. Cela dénoterait un manque de rigueur dans un contexte où la marine royale britannique a d'autres navires à vendre et ne souhaite pas se faire une mauvaise réputation sur le marché parce qu'elle n'arrive pas à préserver correctement ses actifs. Les clients étrangers intéressés par le matériel usagé britannique commenceraient par leur dire qu'ils ont trompé les Canadiens, qu'ils n'ont pas bien préservé leurs sous-marins. Il est bien certain que les Britanniques ont pris ces perspectives en considération.
J'aurais tendance à être d'accord avec votre évaluation de l'article du Toronto Star, mais j'ai tout de même quelques préoccupations d'ordre empirique. Il est possible que les Britanniques ne disposaient pas eux-mêmes de l'expérience nécessaire pour la préservation pendant une aussi longue période...
L'hon. Larry Bagnell: Je suis désolé, mais vous passez encore à côté de la question. Ce que vous dites est intéressant, mais ce n'est toujours pas là où je veux en venir. Le fait est que, peu importe si les mesures de préservation prises étaient efficaces ou non, le contrat prévoyait que nous allions recevoir les sous-marins en bon état. On ne devrait pas pouvoir établir un lien entre les lacunes au niveau de la préservation et les accidents survenus, parce que quel que soit l'état de décrépitude dans lequel ils ont pu se retrouver—et il est possible qu'ils aient été beaucoup endommagés—, nous devions les recevoir en bon état. Nos ingénieurs devaient les inspecter; leurs ingénieurs devaient le faire également; les Britanniques devaient payer pour remettre le tout en bon état de fonctionnement. L'efficacité des mesures de préservation n'auraient donc pu causer aucun problème, si c'est bien comme cela qu'on a procédé. Et on nous a dit que c'est ainsi que les choses se sont passées.
Je dis donc simplement qu'il est possible que les sous-marins se soient retrouvés en bien piètre état—qui le sait vraiment? C'est un autre débat. Mais le jour où nous les avons reçus, nos ingénieurs et les ingénieurs britanniques les avaient inspectés pour assurer qu'ils étaient en bon état, et les Britanniques avaient assumé les frais nécessaires à cette fin, alors tous ces autres détails n'ont aucune incidence véritable. Aucun problème de fonctionnement n'aurait dû découler de leur mise au rancart, que ce soit pour une année ou pour 100 ans, parce que nous devions les acheter après une remise à neuf complète, confirmée par les ingénieurs des deux pays.
Le président: Avez-vous une brève observation à ce sujet? Ce n'est pas précisément pour débattre de ce type de questions que nous vous avons invité.
M. Martin Shadwick: En théorie, je serais d'accord avec cette analyse, mais j'ai quand même quelques préoccupations qui subsistent.
Le président: Je vais laisser M. O'Connor poser la dernière question, ou les deux dernières s'il le souhaite, avant que nous passions à la deuxième partie de la réunion.
Monsieur O'Connor.
M. Gordon O'Connor (Carleton—Mississippi Mills, PCC): En fait, ce n'est pas une question; c'est plutôt une déclaration.
Vous ne tenez pas compte des lois de la physique et du second principe de la thermodynamique. Lorsqu'on laisse une chose de côté sans l'entretenir correctement, elle se détériore; et c'est exactement ce qui s'est produit. C'est la décision du gouvernement de retarder cette acquisition de quatre ans qui a fait en sorte que ces sous-marins se sont détériorés. Je ne vais pas commencer à essayer de déterminer si les correctifs voulus ont été apportés au moment de l'acquisition, ni à chercher à savoir qui a fait le nécessaire ou qui ne l'a pas fait, mais on ne peut pas contester le fait que le délai de quatre ans a fait en sorte que ces sous-marins sont restés dans l'eau salée pendant une aussi longue période et se sont détériorés, ce qui n'a pas manqué d'ajouter aux problèmes techniques. C'est le point que je voulais faire valoir.
À (1030)
Le président: Au nom du comité, je tiens à vous remercier, monsieur Shadwick, pour nous avoir fait profiter de votre expertise. Il est important que nous obtenions une diversité de points de vue et c'est pourquoi nous recevrons deux de vos homologues du milieu universitaire la semaine prochaine. Nous avons également hâte d'entendre leurs témoignages. Merci beaucoup. Nous sommes heureux que vous ayez pu être des nôtres.
M. Martin Shadwick: Merci.
Le président: Chers collègues, nous allons poursuivre notre séance publique.
Voulez-vous prendre une pause d'une minute? Pendant que M. Shadwick quitte la salle, vous pouvez en profiter pour prendre rapidement un rafraîchissement. Par la suite, nous poursuivrons.
M. Martin aura la parole pour faire le point sur un dossier.
La séance est suspendue pour quelques minutes.
À (1030)
À (1033)
Le président: Nous reprenons la 19e séance du Comité permanent de la Chambre des communes de la Défense nationale et des Anciens combattants.
Nous avons terminé la première partie de notre réunion où nous avons discuté de l'acquisition des sous-marins avec M. Martin Shadwick. Nous allons maintenant régler quelques affaires du comité. Tout d'abord, nous avons demandé à M. Keith Martin, secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, de se pencher sur le dossier d'un certain M. Wenzel relativement à une question soulevée par un de nos membres, M. Gordon O'Connor.
Monsieur Martin, je vous demande maintenant de mettre le comité au fait des constatations que vous avez pu faire relativement à cette situation.
L'hon. Keith Martin: On peut affirmer tout d'abord que M. Wenzel a, sans l'ombre d'un doute, servi son pays avec grande distinction durant la Deuxième Guerre mondiale. Il a quitté le service militaire de son propre gré. Toutes les procédures normales ont été suivies au moment de son départ et il a quitté, je le répète, de sa propre initiative. Par la suite, M. Wenzel a demandé une pension. Le tribunal a été saisi de cette requête et ne l'a pas accueillie, mais le ministre a indiqué qu'il allait examiner le dossier pour s'assurer qu'il a été traité avec toute la diligence qui s'impose.
Le tribunal a toutefois conclu que le gouvernement et le ministère avaient toujours traité M. Wenzel de façon équitable et dans le respect des règles applicables; c'est donc l'état actuel de la situation.
À (1035)
Le président: Y a-t-il des questions à ce sujet?
Monsieur O'Connor.
M. Gordon O'Connor: Monsieur Martin, vous nous dites que le ministre va examiner ce dossier, mais ce sera pour s'assurer que toutes les procédures ont été suivies.
L'hon. Keith Martin: C'est exact.
M. Gordon O'Connor: Va-t-il également prendre en compte tous les précédents, c'est-à-dire la façon dont d'autres personnes ont été traitées? Je ne veux pas m'attarder aux décisions prises dans les différentes causes, mais je crois que d'autres personnes se retrouvant dans des circonstances similaires ont eu droit à une pension. J'ose espérer que le ministre prendra en considération ces précédents dans son examen de ce dossier et déterminera en conséquence s'il convient de modifier la décision rendue dans le cas de M. Wenzel.
L'hon. Keith Martin: Monsieur O'Connor, pour toute personne qui quittait le service militaire et voulait obtenir une pension au moment où M. Wenzel est parti, il y avait deux lignes de conduite possible. La première de ces lignes de conduite se scindait elle-même en deux autres une fois que la personne avait décidé de partir. Si le ministère et le gouvernement du Canada jugeaient que le départ de cette personne servait les intérêts du Canada, alors une pension était accordée. Si l'on estimait que le départ de la personne n'allait pas dans les meilleurs intérêts du Canada, alors il n'y avait pas de pension, mais la personne pouvait se voir rembourser toutes les cotisations versées. C'était la loi applicable et c'est ce qu'on expliquait à toutes les personnes qui débutaient leur service militaire. C'était également les possibilités qui étaient offertes à une personne qui choisissait de quitter à un moment donné. Dans le cas de M. Wenzel, c'est la façon dont on a procédé et le tribunal a entériné cette procédure.
Pour ce qui est des cas individuels, si vous parliez de personnes qui ont reçu une pension sans que les règles que je viens de décrire n'aient été respectées, veuillez nous le faire savoir. À notre connaissance, il n'existe pas de pareil cas.
Le président: Monsieur O'Connor.
M. Gordon O'Connor: Mon argumentation concerne l'expression « dans les intérêts du service » ou « dans les intérêts du gouvernement », je ne sais pas quel est le libellé exact. Des décisions ont été rendues dans certains cas où l'on a déterminé qu'un départ servait les intérêts du gouvernement. Par exemple je présume que dans le cas d'une personne qui voulait passer à la fonction publique, le gouvernement a déterminé que cela servait ses intérêts ou quelque chose du genre.
Je sais également qu'il y a d'autres causes où le gouvernement a déterminé que les intérêts du service militaire étaient mieux servis; il a donc accordé une pension à la personne. Je dis simplement que j'aimerais que le ministre compare la situation de ces autres personnes, celles dont le départ a été bénéfique pour le gouvernement, avec le cas de M. Wenzel.
M. Wenzel est allé servir ensuite pendant de nombreuses années dans la réserve aérienne où il a fait beaucoup de travail d'organisation et est devenu une véritable bougie d'allumage. Selon moi, il a ainsi servi les intérêts des Forces canadiennes.
Le président: Permettez-moi une suggestion, car nous pourrions nous relancer la balle pendant bien longtemps à ce sujet. Il est bien certain que nous voulons nous assurer d'éviter toute injustice et que le ministre veut en faire tout autant. Je présume que c'est exactement pour cette raison qu'il souhaite réexaminer le dossier.
Monsieur O'Connor, vous pourriez écrire au ministre ou le rencontrer personnellement—j'estime qu'il est plutôt facile d'approche—parce que je crois que c'est vous qui connaissez mieux le dossier. Vous pourriez aussi demander au comité d'écrire au ministre pour lui exposer les points que vous venez de faire valoir. Autrement dit, si vous voulez que le ministre prenne certaines mesures dans ce dossier, vous pouvez soit lui parler personnellement, soit lui écrire, soit, si vous voulez faire les choses de façon plus officielle, demander au comité de lui écrire en indiquant que nous voulons nous assurer que certaines questions sont prises en compte dans l'examen du dossier.
Qu'en pensez-vous?
M. Gordon O'Connor: Je crois que je préférerais que le comité demande au ministre de prendre en compte quelques-unes de ces autres situations avant de rendre sa décision. Selon moi, il faut en effet considérer les décisions rendues par différentes instances en fonction de leur interprétation des intérêts des forces militaires. Je ne veux pas parler de ces autres causes; je ne remets pas en question les décisions rendues. Mais M. Wenzel a été immédiatement transféré à la réserve aérienne et a contribué à l'organisation de ce groupe, un travail qui a certes servi les intérêts des forces militaires.
À (1040)
Le président: Monsieur Martin.
L'hon. Keith Martin: J'aurais quelques observations à formuler.
Personne ne conteste, monsieur O'Connor, les services rendus par M. Wenzel à notre pays. Personne ne conteste cela d'aucune façon. Mais les questions que vous soulevez, par ailleurs d'excellentes questions, ont déjà été posées durant l'audition de la cause devant le tribunal et avaient été soulevées antérieurement à différents niveaux.
M. Wenzel connaissait très bien les conditions auxquelles il souscrivait lorsqu'il est entré au service des forces militaires ainsi que les conditions applicables à son départ. Il savait bien que deux options étaient possibles au moment du départ. Une personne pouvait toujours choisir de rester en service, mais si elle décidait de partir et si l'on considérait que cette situation ne servait pas les intérêts du gouvernement du Canada ou du pays, vous n'aviez pas droit à une pension et vous pouviez recevoir le remboursement de vos cotisations.
La personne a toujours le choix : je reste ou je m'en vais? M. Wenzel a choisi de partir et d'emprunter d'autres avenues dans le secteur privé, y compris un excellent travail pour la réserve aérienne.
J'ai demandé s'il était question de difficultés financières dans cette cause. M. Wenzel se retrouve-t-il dans une situation délicate? Il a lui-même admis que ce n'était pas le cas. Je crois qu'il est important que le comité en prenne conscience, parce que nous ne voulons certainement pas que nos anciens combattants connaissent des difficultés financières sous quelque forme que ce soit et nous allons tout mettre en oeuvre pour que cela ne se produise pas.
Mais il n'est pas question de difficultés financières dans l'affaire de M. Wenzel.
Le président: Je vais vous interrompre une petite seconde et remercier M. Martin pour cette mise au point. Je rendrai la parole à M. O'Connor dans un moment s'il a autre chose à ajouter.
Je voudrais proposer qu'en ma qualité de président, j'écrive au ministre au nom du comité pour dire que nous avons entendu cette présentation de M. O'Connor pour le compte de M. Wenzel, que nous avons demandé à M. Martin de faire enquête et de nous présenter un rapport, et qu'il s'en est acquitté.
Le comité tient à s'assurer que la loi ne soit pas seulement suivie dans la lettre—et elle a très bien pu l'être—, mais aussi que l'esprit de la loi ou des règles soit équitablement appliqué ici, dans le cas de M. Wenzel. Nous voulons demander au ministre d'examiner son cas, en tenant compte des arguments qu'a présentés M. O'Connor. J'écrirai volontiers au ministre pour vous si c'est ce que veut le comité.
Vouliez-vous en parler, Gordon?
M. Gordon O'Connor: Pour répondre à M. Martin, à mon avis, l'élément important n'est pas tant que M. Wenzel soit appauvri ou non. C'est une question de principe. Il peut y avoir d'autres gens dans la même situation, qui vivent la même chose, qui peuvent être appauvris mais pour moi, c'est secondaire. Nous nous intéressons à la situation de M. Wenzel, maintenant.
Le président: Tout à fait.
Une dernière intervention, brièvement, monsieur Martin, puis nous passerons à autre chose.
L'hon. Keith Martin: Les raisons pour lesquelles le ministre va examiner cette affaire sont exactement les mêmes que vous avez données, monsieur le président. Il tient à s'assurer que la loi est suivie dans la lettre, mais il veut aussi s'assurer que l'esprit de la loi soit respecté. C'est pourquoi il se penchera sur cette affaire.
Le président: Eh bien, c'est parfait. Tel que je le connais, j'ai bien pensé que c'est ce qu'il ferait.
Je vais laisser la parole à Mme Longfield dans un moment, mais à moins d'entendre de vives objections, et le cas échéant il faudrait voter—je ne pense pas en entendre—je vais demander à la greffière de rédiger une lettre résumant notre discussion, remerciant aussi le ministre, puisque, à ce que nous avons compris, il va personnellement se pencher sur cette affaire, et lui demandant de s'assurer de ne pas négliger certains facteurs importants—et nous énumérerons ces facteurs.
Ça va? C'est ce que je propose de faire.
Madame Longfield.
L'hon. Judi Longfield (Whitby—Oshawa, Lib.): Monsieur le président, le ministre, par le biais de son secrétaire parlementaire, s'est déjà engagé à le faire. Je ne vois pas pourquoi il nous faut lui écrire une lettre. Il a déjà pris cet engagement. S'il ne s'acquitte pas de cet engagement, c'est là, je pense qu'il conviendra que le comité lui écrive.
Le président: Avec tout le respect que je vous dois, je pense que vous n'avez pas entendu ce que j'ai dit.
M. Martin a dit qu'il va faire un examen, et nous lui en sommes reconnaissants. C'est pertinent. Mais il n'a pas dit qu'il tiendra compte de certains éléments importants qu'a soulevés M. O'Connor, et c'est l'objet de cette lettre.
Alors, Judi, le seul but de cette lettre que nous souhaitons écrire, c'est de dire « C'est très bien, nous avons appris que vous alliez vous pencher sur cette affaire, et nous voulons nous assurer que l'esprit de la loi, tout autant que la lettre de la loi, est respecté. Nous voulons nous assurer monsieur le ministre, en tant que comité, que vous n'omettiez pas certains facteurs que le comité juge importants ».
Est-ce que nous avons un consensus? D'accord, c'est donc ce que nous allons faire. Je vous remercie.
Nous avons presque terminé.
M. Kenneth Calder, SMA des politiques, est disponible pour venir au comité le 8 ou le 10 mars. Est-ce qu'on souhaite voir M. Calder?
Monsieur Casson.
À (1045)
M. Rick Casson: Février est en train de passer, nous arrivons à mars et nous recevons encore des témoins, et j'ai un peu l'impression, dans une certaine mesure, que nous faisons du sur place.
J'aimerais vraiment que nous nous concentrions sur la rédaction du rapport. Je sais que nous avons parlé de tout cela l'autre jour. Que nous recevions ou non les renseignements recueillis pendant l'enquête, je pense encore qu'en tant que comité, nous devons parvenir à une espèce de conclusion ou nous en approcher, parce que nous pourrions continuer ainsi ad vitam eternam.
Nous pensions qu'en mars le premier rapport, ou quel que soit le nom qu'on lui donne, serait fait. Et pourtant, nous parlons encore de recevoir des témoins les 8 et 10 mars. À mon avis, il faudrait que nous mettions un point final quelque part et que nous nous contentions de ce que nous avons déjà entendu.
Le président: Je ferai comme vous voudrez. Comme je l'ai dit, notre retard est en partie attribuable, on le sait, au fait que nous devrons avoir les documents dans les deux langues officielles, et nous venons de recevoir l'assurance que ce sera fait très bientôt.
Tout dépend du comité. Je pense que le comité, à sa dernière ou avant-dernière réunion, il me semble, avait décidé qu'il voulait entendre M. Calder. Je ne tiens pas, moi non plus, à m'éterniser sur le sujet, mais je voudrais m'assurer que le rapport que nous allons produire, quel que soit, ait une certaine crédibilité.
Si nous pensons pouvoir nous satisfaire d'en terminer avec le témoignage de M. Williams, je veux bien. Si nous pensons qu'entendre M. Calder...
M. Rick Casson: N'y a-t-il pas moyen que M. Calder vienne plus tôt?
Le président: À ce que j'ai compris, il n'est pas disponible plus tôt.
Madame la greffière.
La greffière du comité (Mme Angela Crandall): Il sera en voyage. C'est là le problème.
Le président: Monsieur Martin.
L'hon. Keith Martin: Je suis d'accord avec M. Casson. Nous devons en terminer avec ceci et nous attaquer aux enjeux plus vastes qui sont réellement importants pour les hommes et les femmes de nos Forces armées canadiennes.
Bien que M. Calder ait été le principal responsable des politiques au ministère pendant plus de 10 ans, je ne pense pas qu'il puisse ajouter grand-chose à ce que nous savons déjà. Nous avons entendu tous les experts pertinents. Nous avons entendu les gens les plus compétents, qui connaissaient le mieux le sujet. Je ne crois pas, très franchement, que d'entendre d'autres témoins nous donnera beaucoup plus que nous savons déjà. Je pense que nous devrions en terminer.
Le président: D'accord, si vous voulez.
En tant que président, je dois obéir à la volonté du comité. Il y a eu consensus au comité pour l'inviter, à la dernière ou l'avant-dernière réunion. Puisqu'il n'est disponible que plus tard que nous l'avions espéré, le consensus est maintenant que nous n'avons pas besoin de l'inviter. C'est donc ce que je vais faire. Je ne vais pas l'inviter à moins que quelqu'un propose une motion à l'effet contraire.
Alors nous nous réserverons le droit de l'appeler à témoigner plus tard au besoin, mais pour le moment, nous laissons cela en suspens.
L'hon. Keith Martin: Je voudrais faire un rappel au Règlement, monsieur le président, il n'y a pas eu consensus au sujet de l'envoi d'une lettre au ministre. L'avez-vous compris?
Le président: Oui, il y avait consensus.
L'hon. Keith Martin: Non, ce n'était pas un consensus.
Le président: Il n'y avait pas consensus?
L'hon. Keith Martin: Non.
Le président: Eh bien, il nous faudra donc une motion.
Ce n'est pas ce que j'avais compris, mais je suis heureux que vous l'ayez relevé.
Il me faut donc une motion—de Mme Hinton, appuyée par M. Bachand—pour que j'écrive une lettre au ministre au nom du comité pour le remercier de se pencher personnellement sur le cas de M. Wenzel et expliquer que nous avons eu un rapport de M. Martin, à la demande de M. O'Connor et du comité, et que bien que nous soyons heureux que le ministre se penche sur cette affaire, nous le prions de tenir compte de certains facteurs, notamment le fait que M. Wenzel a eu une carrière prestigieuse par la suite dans un autre service.
Qu'est-ce que c'était, monsieur O'Connor, la réserve aérienne?
M. Gordon O'Connor: Oui.
Le président: Donc, nous énumérerons deux ou trois éléments comme celui-là.
(La motion est adoptée. [voir le Procès-verbal])
À (1050)
Le président: La greffière nous rédigera une lettre. Je vous remercie.
Les dernières choses que j'ai à vous dire sont les suivantes. Vous allez bientôt recevoir une lettre du colonel Gary Rice. Nous recevons beaucoup d'offres, maintenant, pour approfondir cette question, ou pour nous aider à le faire. Je pense qu'elles sont sincères. Je ne sais pas s'il s'intéresse à cette question autant qu'à l'examen de la défense—je pense que c'est l'examen de la défense. Nous pourrions mettre cela en suspens. Quoi qu'il en soit, vous recevrez bientôt cette lettre.
Vous allez recevoir une lettre très pertinente, sous peu, en réponse à certaines allégations qu'a fait l'un de nos témoins, M. O'Keefe. Elle vient de représentants du ministère.
Vous avez devant vous une lettre de l'ancien chef d'état-major de la Défense, le général Henault, au sujet de l'insigne de coiffure. Il nous dit dans cette lettre que la question n'a pas encore été réglée, que l'aumônier général entreprend certaines consultations pertinentes. Je suppose que nous avons toujours la possibilité, en tant que comité, de l'inviter ici avant qu'il prenne décision définitive, ou encore de ne pas toucher à cette question, selon ce que nous jugerons approprié. Je voulais simplement porter cela à votre attention.
Les gens du syndicat que nous avons convenu d'entendre—ceux qui travaillent sur nos navires, y compris les sous-marins—viendront devant le comité le 17 février.
Je pense que c'est tout ce que j'ai pour jeudi prochain. Y a-t-il d'autres questions courantes que vous aimeriez soulever? Non?
Je vous remercie, chers collègues. La séance est levée.